Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1893-10-09
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 70622 Nombre total de vues : 70622
Description : 09 octobre 1893 09 octobre 1893
Description : 1893/10/09 (Numéro 9281). 1893/10/09 (Numéro 9281).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7082054
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Lundi 9 Octobre 1893
OaudaMaMHMMMHH
g» IBS
N* 9231 — édition qcotidUîin#
■WMMBWMWBWBHBMMil»JIKlL.llllllllll Mitlill Mil Ml
Lundi 9 Octobre 1893
ÉDITION
PARIS
et départements
Un aa 40 »
Six mois 21 »
Trois mois. ... 11 »
QUOTID IENNE
ÉTRANGER
(union postale)
51 »
26 50
14 »
-.Ces abonnements parten t des 1 " et 16 de chaque mois
OH NUMÉRO ('
BUREAUX;
ÎO cent.
18 —
Paris , 10, ru e des Saints-Pères
jOn s'abonne i Rome, place du Gesù, 8
EDITION SEMI-QUOTIDIENNE
ÉTRANGER
PAHIS
ET DÉPARTEMENTS
Un an 20 »
Six mois 10 »
Trois mois. ... 5 »
(union postale) s i
26 » .
13 » ••"A
6.50
Leï abonnements partent des î« r et 16 de chaque mois
L'UNIVERS ut -répond pas des manuscrits qui loi soit adressés
' ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et G'% 6, plaoe de la Bourse
BULLETIN_DU JOUR
PARIS, 8 OCTOBRE 1893
Dix-neuf conférences dans le bassin
touiller du Pas-de-Calais, neuf dans
celui du Nord, et toutes faites par des
députés socialistes 1 Tel est le pro
gramme de la journée d'aujourd'hui.
On ne dira pas qu'elle n'est pas trè3
remplie ; nous disons très et non bien
remplie^car ces conférences de politi
ciens ne feront certainement pas de
bien.
Devant ces excitations qui peuvent
amener des conséquences effroyables,
on se demande a quoi pense M. le
président du conseil, si fier de sa poi
gne. Il semble que le moment est
venu de faire respecter la loi comme
il promettait à M. Trarieux de le faire.
Cela vaudrait mieux que de se faire
donner des ovations peu spontanées
et largement ridicules par les popula
tions des Pyrénées-Orientales, tout en
prétendant conserver l'incognito»
Malgré l'absence de la presse, on
sait à peu près ce qui s'est passé dans
la première journée du congrè3 ou-,
vrier: les indiscrétions n'ont pas
manqué. Ea somme, il ne s'est rien
dit qui n'ait déjà été répété bien sou?
vent dans des réunions socialistes, et
l'on ne comprend pas pourquoi la
presse a été si soigneusement exclue.
Serait-ce une vengeance du citoyen
Guesde qui, lors de son élection, n'a
-pas précisément eu ce qu'on appelle
une bonne presse ?
On trouvera plus loin des détails
sur cette première journée du congrès
du parti ouvrier:
Ce . matin, il ne nous est rien venu
d'Italie qui soit de nature à augmenter
ou à diminuer les inquiétudes ; on est
au même point qu'hier, c'est-à-dire
qù'ily a un peu d'accalmie, sans qu'on
soit-venu au beau fixe. Comment, du
reste, avec l'Europe telle que l'a cons
tituée une politique révolutionnaire,
{>ourrait-on avoir la pleine tranquil-
ité? La paix semble toujours « mal as
sise » comme on le disait d'un des
nombreux traités signés entre catho
liques et huguenots au temps des
guerres de religion.
1 On nous annonçait hier que les re
présentants des puissances étaient in
tervenus dans le conflit brésilien; ils
avaient invité le président Peixoto à se
retirer, le menaçant, en cas de refus,
de reconnaître aux insurgés les droits
de belligérants. La nouvelle était
grave, mais elle est démentie ce ma-
tinr Peut-être doit-on le regretter pour
les Brésiliens qui auraient tout intérêt
& Yèir se terminer la lutte.
■
LES LYCÉES DE FILLES
Il paraît, le Figaro l'assure, que l'on
s'écrase à la porte des lycées de filles.
Contre eux, observe la feuille boule-
vardière, s'était dressé longtemps un
préjugé mondain ; le préjugé a dé
sarmé, la mode favorise aujourd'hui
ces établissements dont naguère elle
écartait les personnes de bon ton.
Mode et . préjugé, tels sont les grands
mots q.ui, font loi dàris le monde où le
Figaro gouverne les opinions. Et, pour
tant, quelle plus délicate et plus grave
question pour une mère que l'éduca
tion de sa fille ; avec quel soin, avec
quels scrupules même, ne doit-elle
pas choisir la 'maison où son enfant
recèvra ces leçons et ces exemples
qui laissent une empreinte ineffaçable
sur la vie entière ! Bagatelles que
tout cela ! lia mode est une souveraine
dont on n'a pas le droit de discuter les
arrêts ; elle ordonne aujourd'hui d'en
voyer la jeune fille au lycée.; on n'exa
mine point, on ne songe pas à se ré
volter : le lycée, quels que soient les
dangers que l'âme y puisse courir,
reçoit la jeune fille des mains de sa
mère.
Une mère, cependant, plus coura
geuse ou plus vigilante que les autres,
a poussé l'énergie jusqu'à protester
dans le Figaro. Elle est animée, cette
mère, sinon d'une foi très ardente,
au moins de sentiments religieux,
qu'on peut croire sincères ; sa plainte,
en effet, a pour objet précis l'exclu
sion du pretre des lycées de jeunes
filles. Vous croyez peut être que sa
juste indignation lui donnera la fer
meté nécessaire pour combattre la ty
rannie du préjugé ? Oh ! que non-pas !
Nous l'avons dit, elle proteste dans la
Figaro : c'est un grand acte déjà ; aussi,
l'avoir accompli lui met la conscience
en paix et elle envoie sa fille au lycée.
Le défaut de toute éducation chrétienne
lui semble en vérité bien «agaçant », et
vraiment ennuyeux; mais l'enseigne
ment que distribuent ces écoles uni
versitaires est si haut, si supérieur 1
Il faut bien, n'est-ce pas, lui sacrifier
quelque petite chose? La sagesse nous
enseigne à modérer nos désirs et l'on
ne peut avoir à la fois tous les avan
tages... Que répondre à de tels ar
guments?
On a beau ne posséder que peu
d'expérience , il est des jugements
qu'un chrétien, si jeune soit-il et
si ignorant des choses de la vie, peut
formuler par cela seul qu'il est chré
tien, par cela seul qu'il est instruit
de sa religion. Il nous est donc per
mis de le déclarer, la mère de famille
qui tient un tel langage, manque à
son devoir:
Les quelques lignes dont est com
posée sa lettre au Figaro , suffisent à
jeter un terrible jour sur l'état d'es
prit, — sur l'état d'âme, comme on dit
à présent de. certaines familles
mondaines, de celles où l'on.s'imagine
encore être. chrétiens, parce qu'on
va, le dimanche, à la messe d'une
heure, étaler sa dernière toiletté. Dans
ce milieu, l'enseignement, pourvu
qu'il soit d'un degré supérieur —
et l'on s'inquiète peu de l'esprit du
maître— tient lieu de toute éduca
tion religieuse, partant de toute vraie
éducation morale.
Mais, eh même temps, que nos édu
cateurs modernes sont ici bien saisis
sur le vif et. bien pris sur le fait I
Dans les lycées de jeunes filles, ils
croient avoir tout prévu, tout pesé,
tout réglé, quand ils ont haussé de
quatre ou cinq crans le niveau de
l'instruction littéraire et scientifique.
Certes, nous ne sommes point de ceux
qui prétendent réduire l'instruction
féminine
A connaître un pourpoint d'avec un haut-de-
. [chausses.
Mais sans vouloir poser d'avis ca
tégorique en ce sujet, qui, nous ne le
cachons pas, est en dehors un peu de
notre compétence, il semble que, chez
la jeune fille, l'instruction, pour éten
due qu'on la désire; doit toujours être
primée par l'éducation.
Nos bons universitaires, juchés sur
leur sagesse et sur leur expérience, ne
l'entendent pas q.insi. Le principal
seuci qui les dévore est de doter les
jeunes filles d'un enseignement supé
rieur : au lieu de leur distribuer, avec
modération , l'instruction. nécessaire
—r et que nous ne voulons pas si res r
treinte que. l'insinuent parfois , nos
ennemis — on les bourre d'une
science indigeste et, pour une , grande
part, inutile. Or, la science inutile,
bien souvent, risque d'être nuisible.
Si, du moins, l'on contrebalançait par
une éducation solide et chrétienne, les
dangers que présente cette-science,
dès qu'on en veut mettre dans l'es
prit plus que l'esprit ne peut en conte
nir. Mais non, la science est exigeante,
elle absorbe le temps disponible et
nos maîtres renvoient l'éducation mo
rale, au temps, si court, que passera
la jeune fille entre la sortie au lycée
et la définitive entrée dans le monde.
Seulement, on oublie qu'àlors il] sera
trop tard : la mauvaise empreinte,
ayant pris trop profondément sur
l'âme, ne s'effacera plus.
Du reste, quelle éducation pourrait-
on fournir en ces lycées de filles?
Le beau principe de la neutralité, si
parfois il oublie d'arrêter à la porte les
mauvaises doctrines, ne laisse jamais
endormir sa vigilance quand il faut
bannir l'enseignement religieux. A ces
malheureuses jeunes filles, on ne sau
rait donc distribuer que les maigres
bienfaits d'une morale purement phi
losophique. A ce compte, l'absence
de toute éducation nous paraît beau
coup moins dangereuse. Le naturel,
assez bon quelquefois, peut de lui-
même et sans culture, pousser» de b ons
fruits ; mais qu'il résiste à l'influence
pernicieuse de cette philosophie
décevante qu'on enseigne aujour
d'hui, ee serait un prodige que
le plus vulgaire bon sens interdit
d'espérer. La morale chrétienne ou
l'immoralité, entre ces deux extrêmes
il existe parfois une apparence, un
vernis^ d'honnêteté mondaine: mais
que l'on évite avec soin de fouiller
sous cette apparence si l'on veut s e-
pargner de cruelles déceptions.
L'éducation sans Dieu nous prépare,
on le voit, une société charmante, ou
bientôt les passions les plus violentes
et les plus basses ne seront plus gê-r
nées par les préjugés d'un autre âge:
L'athéisme officiel descend peu à
peu sur la société tout entière, il en
vahit jusqu'aux milieux qu'on avait
cru les plus capables de s'en pré
server.
Hier, nous examinions les masses
populaires; nous considérons aujour
d'hui les familles mondaines : partout
les faits nous offrent le même en
seignement, partout ils nous jettent
le même delenda Carthago ! Il faut dé
truire là société sans Dieu, il faut
se mettre vigoureusement à l'oeuvre
pour rebâtir la société chrétienne.
François Veuillot.
Interrogé l'autre jour par un repor
ter, M. le député Millerand lui a dit
qu'il continuait à désirer vivement la
séparation de l'Eglise et de l'Etat, et
qu'il s'empresserait de la voter si on la
proposait à la Chambre; mais il ne
songe point à la proposer lui-même,
ne croyant pas qu'il y ait une majo
rité pour cette mesure, et l'attention
publique lui paraissant tournée plutôt
vers les réformes économiques et so
ciales.
Là-dessus, M. Clemenceau, rédac
teur en chef de la Justice , gourmande
le député Millerand et les Français
en général. On manque de persévé
rance dans ce pays. Ce n est qu'en
frappant avec obstination sur un clou
qu'on l'enfonce, et quand 1 attention
publique se détourne d'un sujet, il
faut l'y.«ramener au lieu-de la suivre.
Ah ! l'on n'agit point en Angleterre
comme chez nous. En Angleterre, on
s'entête, on persiste, on ne lâche pas
prise, avant que la réforme poursui
vie soit effectuée., Ah ! l'Angleterre,
l'Angleterre, c'est le modèle des
pays ! Prenons exemple sur l'admi
rable Angleterre !
Aoh yes !
M. le maire de Sainte-Livière, dans
l'arrondissement de Vitry, n'ayant
pas été consulté par l'autorité ecclé
siastique sur la nomination de M. le
curé de Landricourt, qui dessert en
même temps l'église de Sainte-Livière,
a manifesté son mécontentement par
une mesure radicale. Il a !< fermé la
boîte », —• pour employer son élégante
et respectueuse manière de parler, —
et le dimanche l"octobre,ses adminis
trés ont dû se passer de messe et d'of
fices malgré les réclamations dUprêtrè
auquel M, le maire a refusé par deux
fois d'ouvrir la porte de l'église.
C'est le plus scandaleux abus de
pouvoir, et M. le maire mérite une
bonne leçon, h'Echo de la Marne es
père bien que le gouvernement la lui
donnera. Nous le souhaitons, mais
nous n avons pas autant de confiance.
Ce n est pas seulement de l'asile
qu elles avaient fondé que les sœurs
de Saint-Vincent de Paul du quartier
Saint-Sever,à Rouen, ont étébrutale-
expulsées; elles ont dû aussi abandon-
ner longtemps, elles prodiguaient leurs
soins à de vieilles femmes.
Ce que celles-ci deviendront, qu'im
porte aux laïcisateurs ! Est-ce qu'elles
votent ? Est-ce qu'elles font grève ?
Non l Alors ?
Lorsqu'elles ont appris l'incroyable
nouvelle do] l'expulsion, les malheu
reuses sont entrées dans le plus pro
fond désespoir; Toutes voulaient sui
vre les sœurs ; toutes les suppliaient
de les emmener avec elles.
Les religieuses se sont mises alors
à chercher de toutes parts un local,
jusqu'au moment où une dame géné
reuse en a mis un à leur disposition.
Mais ce local même était insuffisant,
et il fallut se séparer de trois ou qua
tre des pauvres femmes. Ce fut l'occa
sion de vraies scènes de désespoir,
aucune d'elles ne consentant à quitter
les sœurs pour aller à l'hôpital géné
ral. Enfin, quatre d'entre elles se ré
signèrent forcément.
Quant à l'asile laïcisé,' il n'a reçu
que treize enfants sur deux cent cin
quante qui se rendaient chez les
sœurs.
O'est assez dire combien impopu-
lairô' ' était cette laïcisation, et de
quelles sympathies sont entourées les
religieuses.
——.— ♦ ....
DÉMOCRATIE CHBËTI.EHHE
PREMIER ARTICLE
Le 6 août dernier, l'abbé Naudet
prononçait à Liège un très éloquent
discours, sous ce titre : La démocratie
chrétienne. Quelques jours après, se
tenait à Bruxelles un congrès dé
mocratique, où le crucifix installé à
la place d'honneur indiquait à tous
que les démocrates de l'assemblée
étaient et entendaient bien rester
chrétiens.
Ce sont là, entre beaucoup d'autres,
des signes d'une situation qu'il serait
puéril de ne pas voir et sur lesquels,
comm® Français et comme catho
liques, nous devons fixer no3 ré
flexions. .
Un grand fait domine l'histoire de
l'humanité : la vie nationale s'appuie
sur la religion. Le gouvernement, qui
n'est pas la nation, mais seulement
l'homme ou le groupe d'hommes y
détonant le pouvoir, a puy en quel-»
ques rares conjonctures,.'guerroyer
contre là religion, voire faire parade
d'athéisme. Mais,pendant ce temps-là,
la sève religieuse continuait à circu
ler dans les rangs de la nation tyran
nisée par ses chefs. Un orateur de la
loge l'Equerre l'avouait hier encore,
non sans quelque mélancolie.. « Mal
gré la loi qui donne la priorité au
mariage civil, il n'est pas étonnant,
disait le quidam, de voir le mariage
religieux être encore dans l'esprit pu
blic* le vrai et seul mariage, sans le
quel il n'y a point d'ùnion, mais un
simple concubinage légal. » En d'au
tres termes, le gouvernement a beau
répudier la religion, la nation y tient.
La religion, aux yeux de la grande
masse des citoyens, en république
comme en monarchie, est un organe
principal et indispensable de la vie
nationale.
Si, pour une" cause quelconque, à
tort ou à raison, une nation, la nôtre
par exemple, passe d'une constitution
monarchique à une constitution dé
mocratique, la séparation de la reli
gion et ae la nation, de l'Eglise et de
l'Etat, en doit-elle être la consé
quence ?
« Assurément, disent nos monar
chistes quand même. L'autel ne peut
subsister qu'appuyé sur le trône, du
moins en France. La France a été
mise en république par la bande d'a
thées qui compose la maçonnerie. Ces
gaillards-là, maîtres de la République,
gouvernent le pays par las députés
dont ils ont peuplé le Parlement. Ils
traquent la religion de toutes parts.
Seulj le rétablissement de la monar
chie peut rendre à la religion, avec la
liberté, l'action. Qu'est-ce que la dé
mocratie? L'explosion de toutes les
passions populaires, la ' souveraineté
du peuple mise à la place de la sou
veraineté de Dieu. Lo cardinal Gui-
bert s'était trompé du tout au tout, s'il
ne parlait pas avec une malicieuse
ironie. La République sera athée, ou
elle ne sera pas. »
Ces messieurs vont trop loin. Que,
sous certains de ses aspects, la mo
narchie semble plus favorable à la
religion, cela peut évidemment se sou
tenir, là surtout où une nation reli
gieuse est gouvernée par une dynastie
religieuse aussi. Contre la monar
chie chrétienne, prise en soi, nous
n'avons aucun grief. La religion, fort
heureusement, peut s'accommoder
avec la constitution monarchique, de
beaucoup jusqu'ici la plus commune
chez les nations civilisées et même
-chez les nations à civiliser.
Mais si les événements ont intro
duit, au sein d'une nationale régime
démocratique, si ce .régime lui agrée,
si elle semble en mesure de le con
server assez longtemps, sinon . tou
jours, cette nation est-elle par : là
vouée irrémissiblement à l'irréligion ?
Et que doivent penser, que , doivent
faire les hommes religieux qu'elle
compte dans son sein ? C'est la ques
tion de l'heure présente.
Au point de vue de l'autorité, elle
•st résolue par les enseignements du
chef de la religion. L'avènement de la
démocratie en France ne décourage
pas le Pape. Il y voit pour l'Eglise une
situation sous quelques rapports nou
velle, mais non désespérée,non même
{lire qu'auparavant. Le clergé, gui est
e sel de la terre et la lumière du
monde, tournera plus particulière
ment son zèle du côté des masses que
la Révolution avait accoutumées à le
fuir. L'ouvrier retrouvera le prêtre
qui lui tendra affectueusement la
main j et la rencontre du prêtre et de'
l'ouvrier donnera à la démocratie la
moralité supérieure qui, en corrigeant
ses erreurs, en combattant ses pas
sions, en lui prescrivant son devoir
après avoir protégé son droit, légiti
mera et affermira* ses progrès et ses
succès.
Quel est le desideratum de là démo
cratie ? Si nous ne nous trompons, il
consiste en ceci : que le travail soit
parmi les hommes le distributeur nor
mal de la jouissance.
Cette idée est juste, pourvu qu'elle
soit bien comprime et sagement appli
quée.
Ce qui suppose : 1° Que l'on désigne
sous le nom de travail toutes les ap
plications de la force humaine, intel
lectuelle ou physique, à la production
d'utilités morales ou matérielles ;
2° Que les résultats dtf travail hu
main puissent être accumulés par qui,
ayant le droit de les consommer, pré
fère les conserver, formant ainsi par
l'épargne, le capital; ;
3° Que les fruits du travail, soit im
médiat, soit accumulé, puissent être
transmis à autrui par voie d'échange,
de don ou d'héritage . e
Car le travail n'est pas une fin, mais
un moyen. Il aboutit à la propriété,
Et la propriété qu'il doit constituer,
c'est dans une société prospère, au
minimum celle qui suffira aux besoins
de chaque travailleur, individu, mem.-
bre d'une famille et citoyen d'un pays,
durant sa vie entière.
Que l'on n'en vienne pas là aisé'
ment, nous le reconnaissons volon:
tiers. Mais à qui la faute ?
N'accusons pas la Providence ? Pour
des motifs très sages, elle veut que
l'humanité gagne son pain à la sueur
de son front ; mais elle ne lui refuse
paslepain. De nos jours surtout, sur
une terre aussi fertile qu'est la nôtre,
avec le secours puissant d'innombra
bles machines, avec les découvertes
merveilleuses de la science, il est aisé
au travail, convenablement réglé, de
donner a tous du pain, c'est-à-dire
l'honnête nécessaire.
Si la Providence rend possible non
le luxe pour tous, ce qui serait loin
d'être un bienfait, du moins une mo
deste aisance pour tous, une nation
n'a-t-elle pas le droit, plus encore le
devoir, d'y tendre ?
N'est-ce pas là un des côtés princi
paux de ce bien public, c'est-à-dire
général que tout gouvernement a
l'obligation de procurer dans la me
sure de ses forces ?
L'empereur Constantin, encore
payen, mais déjà éclairé par l'Evan
gile, ordonnait à tous les gouver
neurs de province de rechercher les
personnes qui manquaient du néces
saire, afin de les aider des fonds de
l'Etat, estimant que, dans un Etat bien
ordonné, nul ne devait être aban
donné aux étreintes de la misère.
Cela dût paraître bien étonnant aux
paysans du II? siècle ; mais c'était la
loi de nature aussi bien que la loi du
Christ. Les hommes forment une fa
mille; chacun doit , s'il le peut, se
sustenter au moyen du travail: s'il
ne le peut pas, c'est le devoir impé
rieux de ses frères de venir a son
aidé.
Mais la meilleure organisation
d'une société est, sans contredit ,
celle où, sauf de rares exceptions,
chacun pourra obtenir assez du tra
vail pour n'être pas contraint de re
courir à l'aumône...
C'est cette organisation à laquelle
aspire la démocratie contemporaine.
La religion ne peut que l'y encou
rager et l'y aider»
Avec elle , le problème,, peut, être
heureusement résolu , au grand .avan
tage de la nation. Sans elle, il ne le
sera point. ,
Voilà pourquoi le clergé s'adresse
FEUILLETON DE L 'UNIVERS
DU 9 OCTOBBB 1893
CAUSERIE SCIENTIFIQUE
Cloches sous-continentales
Pour des raisons qu'il est superflu de
développer devant les leoteurs de YUnivers %
je suis certain que notre monde terraqué
et sublûnaire s'arrêtera un jour dans sa
course elliptique autour du soleil et que
l'humanité verra naître le dernier homme.
Quand aura, lieu le dernier cataclysme?
Seul, Dieu oônnhit' le* jour' et l'heure. Ce
jour est-il prochaine» Il est sûr que notre
génération ne le verra pas. Mais que nos
petits-enfants ou nos arrières-petits-en
fants n'assisteront pas au jour de colère
prédit par David et par la Sibylle, qui ose
rait le prétendre? Les signes se'multi
plient.
Un de ces signes me parait être l'exces
sive et effrayante rapidité du progrès scien
tifique. Ah ! nous sommes loin des temps
où un Pic de la Mirandole pouvait dispu
ter de omni re scibili, où un Leibnitz, un
Pascal ou un Newton étaient i la fois géo*
mètres, physiciens et philosophes, toute la
lyre ! Aujourd'hui, la muse des Sciences
est obligée d'imiter les fabricants d'épin
gles'et de diviser le travail entre ses fidèles:
Nous avons des ohimistes qui né savent
que de la chimie et n'ont pas le temps d'é>-
tudier toute la chimie, des naturalistes,
comme M.Tréoul.qui passent leur vie à étu
dier les feuilles des arbres, des géomètres
< comme X, Y, ouZ qui n'entendent rien aux
oalouls de l'américain Sylveâter. Il n'y a
plus de savants complets, môme dans une
scienoe. M. Moissan qui a isolé le fluor,
découvert le triiodure de bore et cristallisé
le carbone, , n'est peut-être pas très ferré
sur la ehimie. organique. Le résultat le plus
clair de oette poussée vertigineuse, le voioi :
dans vingt ans, personne ne saura plus
rien. Les polyteohnioiens eux-mêmes, pas
seront leurs deux années d'éoole à voltiger
Si rapidement dans le cycle des connais
sances scientifiques, qu'il adviendra d'eux
comme du fameux disque de Newton ; tou
tes les couleurs de l'aro-en-oiel ; y figurent ;
faites le tourner, il est gris, même grisâtre.
Mais l'humanité, n'en aura pas moins son
piusée, lequel, je le crains fort, sera sur
tout un arsenal contre le Maître des scienoes.
. Or, il y a des mystères que l'humanité
scientifique ne pénétrera jamais; quand elle
aura découvert tout ce qui lui est permis de
savoir, elle s'en ira, n'ayant plus rien à
faire ici-bas. J'ai sur le rebord de ma fe
nêtre (oh! rien de Jenny l'ouvrière!) un
géranium qui ressemble à tous les'géra
niums & fleurs roses. Pourquoi ces Heurs
sont-elles roses? Pourquoi la main d'un
jardinier savant ne peut-elle en ohangerla
nuance, la p&lir ou la foncer et, qui sait ?
produire le' géranium à fleurs bleues ou
noires ? Voilà de la pure scienoe horticole,
voilà la Scienoe. Mais quand mon jardinier
aura noirci mon géranium, il ne saura pas
plus pourquoi il est noir qu'il ne sait pour
quoi la feuille d'un si beau vert est coupée
dans toute sa largeur par une bande foncée ;
pas plus qu'il ne saura pourquoi la fleur est
inodore et pourquoi la feuille possède ce
parfum étrange et si capiteux. Je n'ignore
pas que les savants auront ce qu'ils ap?
pellent une explioation. Ils vous diront que
oertaines huiles essentielles se glissent par
ici en évitant de passer par là.
Ils les suivront,, oes huiles essentielles et
les Trécul de l'avenir vous nommeront (ils
ne sont jamais embarrassés pour dire des
noms) les oanaux. par où cette huile passe,
allant à la fôuille et refusant d'aller à là
fleur. Le secret de cette préférence est
dans la petite graine du géranium, laquelle
ne diffère guère de la graine du rosier où
cependant l'huile essentielle va dans la fleur
sans se risquer dans, la feuille.
Voilà ce que la Soience ne découvrira
jamais, parce que Dieu s'est réservé le se
cret de la Vie.
Mais, quant à oe que l'Humanité peut sa
voir, elle va grand train pour le connaître,
et le temps n'est pas éloigné où .le rouleau
lisible pour elle sera complètement dé-
poulé.
Nous voioi un peu loin des Cloches sous-
continentales, titre de oe chapitre.
Pas si loin, pas si loin 1 Même tout près.
Si le mystère de la Vie doit rester impé
nétrable, oelui des combinaisons purement
matérielles est abandonné, non pas seule
ment à nos idisoussions, mais aux décou
vertes de l'homme. Dans cet ordre, le sa
vant trouvera tout... ou à peu près.
■ Particulièrement les deux infinis, le petit
et le grand, se laisseront peut-être pénétrer
un jour, dans la mesure, bien entendu, de
l'inteHeot humain. Les savants s'acharnent
à ces deux éludes: la constitution moléou-
laire des corps, et la constitution du monde
stellaire. L'inventeur de la mélinite, par
exemple, amis,dit-on, à profit son séjourfor-
cé dans la bonne ville d'Etampes,pour com
biner un explosif plus terrible que tout ce
qu'on a vu jusqu'ici. Je pense que l'admi
nistration ne l'a pas autorisé à faire des
expériences qui auraient pu faire sauter la
prison, contenant et contenu, jusque dans
les nuages. Sa découverte ne peut donc être,
si elle existe, que le résultat de oalouls pro
fonds sur la constitution moléculaire des
corps. Cette manie de faire, sauter le monde
l'a-t-elle conduit à réfléchir sur la manière
dont le monde est sorti du ohaos pour arri
ver à l'état où nous le vcyons aujourd'hui ?
Toujours est-il que M. Turpin est sorti de
prison non seulement armé d'une archi-
mélinite, mais encore d'un volume sur la
formation des mondes.
Mais il ne s'agit pas ioi de cet ouvrage
dont je parlerai prochainement, mais sim
plement du système de M. Radeau.
M. Radeau ne s'oocupe que de notre
humble planète et de sa constitution.
« Il est généralement admis, dit-il, que
la Terre est formée d'un globe igné,fluide à.
la partie .périphérique, enveloppé d'une
croûte solide, sorte de peau relativement
mince, sur les trois quàrts de laquelle s'é
tendent les mers, l'atmosphère environnant
le tout. •
Cette constitution lui paraît oependant
insuffisante pour expliquer des phénomènes
importants connus aujourd'hui.
Ces phénomènes sont au contraire fort
bien expliqués et reliés entre eux, si l'on
admet que la oroûte, au-dessous des conti
nents, ne touche pas le globe fluide, mais
en est séparée par un espace rempli de
matières gazeuses en pression. Les conti
nents constitueraient ainsi des sortes de
cloches très aplaties,. gonflées et soutenues
par des gaz, tandis que le fond, des océans
reposerait directement sur le globe igné.
Déjà les observations du pendule avaient
porté les astronomes (Bouguer, Laplace,
Petit) & penser que les' montagnes sont
creuses en dessous. L'hypothèse de M. Ra
deau va beauooup plus loin; elle étend
cette idée des vides à l'ensemble des terres
qui émergent des eaux, tout en admettant.,
bien entendu, des irrégularités looales.
Lamé a. démontré dans sa Théorie de
l'Elasticité , et cela se conçoit a priori, que
j lacroûte terrestre est iaoapable de oonser-
} ver sa forme elle-même, sur de grands
' espaces, si elle, n'est pas soutenue en
dessous. A mesure que le globe fluide se
oontraote (par refroidissement), elle est.
donc obligée de le suivre,en s'écrasant et'se
plissant ; mais on oomprend qu'à certains
endroits elle se sépare du noyau, et qu'il
se forme des anfraotuosités, des boursu-
flures, où vont se loger les gaz qui se
dégagent delà masse encore en fusion.
Les saillies continentales tendent géné
ralement à s'exhausser, gonflées par les gaz
qui s'y accumulent, pendant que le fond
des mers s'affaisse; Ainsi s'explique le re-?
cul progressif des rivages, constaté dès les
premières études de Géologie .Mais les gaz,
emprisonnés à une très forte pression,
fuient peu à peu par les fissures de l'éoorce.
Lorsque l'apport de nouvelles quantités,
provenant du noyau interne, deviendra in
suffisant, la pression s'affaiblira sous les
continents, et ceux-ci s'effondreront sur la
nouvelle croûte solidifiée au-dessous, en
donnant lieu à des cuvettes ou. cirques cra-
tériformes plus ou moins étendus. C'est
l'état où nous voyons aujourd'hui la Lune.
Si, par suite d'éboulements sous-jacents,
la résistance de la croûte diminue trop en
un point, le graz fait sauter cette partie fai
ble ; une bouffée de oe gaz pénètre dans
l'atmosphère, la boursouflure se vide par
tiellement et la croûte se referme. N'est-ce
pas là exactement ce qui est arrivé tout ré
cemment au Krakatoat
A quelle pression et & quelle température
sont ces gaz? Quelle en est la nature? Si
l'éo'orce terrestre a 30 kilomètres d'épais
seur sous les oontinents (chiffre assez pro
bable), la pression doit être de 650 atmos
phères et la température de 900 degrés
environ. Les formules de Glausius et de
M. Sarrau montrent que, dans ces condi
tions, les gaz difficilement liquifiables ont
une densité inférieure ou peu supérieure à
celle de l'eau. L'ordre de superposition
s'établirait ainsi : hydrogène , méthane,
azote, éthane, oxygène, anhydride oarboni-
que. Mais il y a certainement beauooup
d'autres gaz stables dans' ces conditions,
peut-être l'acide chlorhydrique, l'hydrogène
silicié, etc.; leur oonnaissanoe entraînerait
probablement celle de la génèse des pé-
trolts, du chlorure de sodium, de la silioe
en poussière lànoée par les volcans, etc.
Cette idée des cloches sous-continentales
n'est pas une pure hypothèse. Il y a des
faits et des. choses qui paraissent la démon
trer. Puisque la oroûte terrestre n'a ni assez
d'épaisseur, ni, assez de rigidité pour se
tenir d'elle même sur de grands espaces, il
faut qu'elle se trouve dans son ensemble
en équilibre statique, o'est-à-dire que, si l'on
considère des colonnes verticales, dé même
section, allant de la surfaoe jusqu'à une
nappe de niveau inférieur prise dans le
globe liquide, la quantité de matière conte
nue dans chacune de ces colonnes doit être
partout la même. La compensation des!
4,000 à 6,000 mètres d'eau que contiennent
les océans et des 5 à 600 mètres de terres
qui émergent au-dessus, exige alors qu'il y
ait au-dessous de ces terres une sone de fai j
OaudaMaMHMMMHH
g» IBS
N* 9231 — édition qcotidUîin#
■WMMBWMWBWBHBMMil»JIKlL.llllllllll Mitlill Mil Ml
Lundi 9 Octobre 1893
ÉDITION
PARIS
et départements
Un aa 40 »
Six mois 21 »
Trois mois. ... 11 »
QUOTID IENNE
ÉTRANGER
(union postale)
51 »
26 50
14 »
-.Ces abonnements parten t des 1 " et 16 de chaque mois
OH NUMÉRO ('
BUREAUX;
ÎO cent.
18 —
Paris , 10, ru e des Saints-Pères
jOn s'abonne i Rome, place du Gesù, 8
EDITION SEMI-QUOTIDIENNE
ÉTRANGER
PAHIS
ET DÉPARTEMENTS
Un an 20 »
Six mois 10 »
Trois mois. ... 5 »
(union postale) s i
26 » .
13 » ••"A
6.50
Leï abonnements partent des î« r et 16 de chaque mois
L'UNIVERS ut -répond pas des manuscrits qui loi soit adressés
' ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et G'% 6, plaoe de la Bourse
BULLETIN_DU JOUR
PARIS, 8 OCTOBRE 1893
Dix-neuf conférences dans le bassin
touiller du Pas-de-Calais, neuf dans
celui du Nord, et toutes faites par des
députés socialistes 1 Tel est le pro
gramme de la journée d'aujourd'hui.
On ne dira pas qu'elle n'est pas trè3
remplie ; nous disons très et non bien
remplie^car ces conférences de politi
ciens ne feront certainement pas de
bien.
Devant ces excitations qui peuvent
amener des conséquences effroyables,
on se demande a quoi pense M. le
président du conseil, si fier de sa poi
gne. Il semble que le moment est
venu de faire respecter la loi comme
il promettait à M. Trarieux de le faire.
Cela vaudrait mieux que de se faire
donner des ovations peu spontanées
et largement ridicules par les popula
tions des Pyrénées-Orientales, tout en
prétendant conserver l'incognito»
Malgré l'absence de la presse, on
sait à peu près ce qui s'est passé dans
la première journée du congrè3 ou-,
vrier: les indiscrétions n'ont pas
manqué. Ea somme, il ne s'est rien
dit qui n'ait déjà été répété bien sou?
vent dans des réunions socialistes, et
l'on ne comprend pas pourquoi la
presse a été si soigneusement exclue.
Serait-ce une vengeance du citoyen
Guesde qui, lors de son élection, n'a
-pas précisément eu ce qu'on appelle
une bonne presse ?
On trouvera plus loin des détails
sur cette première journée du congrès
du parti ouvrier:
Ce . matin, il ne nous est rien venu
d'Italie qui soit de nature à augmenter
ou à diminuer les inquiétudes ; on est
au même point qu'hier, c'est-à-dire
qù'ily a un peu d'accalmie, sans qu'on
soit-venu au beau fixe. Comment, du
reste, avec l'Europe telle que l'a cons
tituée une politique révolutionnaire,
{>ourrait-on avoir la pleine tranquil-
ité? La paix semble toujours « mal as
sise » comme on le disait d'un des
nombreux traités signés entre catho
liques et huguenots au temps des
guerres de religion.
1 On nous annonçait hier que les re
présentants des puissances étaient in
tervenus dans le conflit brésilien; ils
avaient invité le président Peixoto à se
retirer, le menaçant, en cas de refus,
de reconnaître aux insurgés les droits
de belligérants. La nouvelle était
grave, mais elle est démentie ce ma-
tinr Peut-être doit-on le regretter pour
les Brésiliens qui auraient tout intérêt
& Yèir se terminer la lutte.
■
LES LYCÉES DE FILLES
Il paraît, le Figaro l'assure, que l'on
s'écrase à la porte des lycées de filles.
Contre eux, observe la feuille boule-
vardière, s'était dressé longtemps un
préjugé mondain ; le préjugé a dé
sarmé, la mode favorise aujourd'hui
ces établissements dont naguère elle
écartait les personnes de bon ton.
Mode et . préjugé, tels sont les grands
mots q.ui, font loi dàris le monde où le
Figaro gouverne les opinions. Et, pour
tant, quelle plus délicate et plus grave
question pour une mère que l'éduca
tion de sa fille ; avec quel soin, avec
quels scrupules même, ne doit-elle
pas choisir la 'maison où son enfant
recèvra ces leçons et ces exemples
qui laissent une empreinte ineffaçable
sur la vie entière ! Bagatelles que
tout cela ! lia mode est une souveraine
dont on n'a pas le droit de discuter les
arrêts ; elle ordonne aujourd'hui d'en
voyer la jeune fille au lycée.; on n'exa
mine point, on ne songe pas à se ré
volter : le lycée, quels que soient les
dangers que l'âme y puisse courir,
reçoit la jeune fille des mains de sa
mère.
Une mère, cependant, plus coura
geuse ou plus vigilante que les autres,
a poussé l'énergie jusqu'à protester
dans le Figaro. Elle est animée, cette
mère, sinon d'une foi très ardente,
au moins de sentiments religieux,
qu'on peut croire sincères ; sa plainte,
en effet, a pour objet précis l'exclu
sion du pretre des lycées de jeunes
filles. Vous croyez peut être que sa
juste indignation lui donnera la fer
meté nécessaire pour combattre la ty
rannie du préjugé ? Oh ! que non-pas !
Nous l'avons dit, elle proteste dans la
Figaro : c'est un grand acte déjà ; aussi,
l'avoir accompli lui met la conscience
en paix et elle envoie sa fille au lycée.
Le défaut de toute éducation chrétienne
lui semble en vérité bien «agaçant », et
vraiment ennuyeux; mais l'enseigne
ment que distribuent ces écoles uni
versitaires est si haut, si supérieur 1
Il faut bien, n'est-ce pas, lui sacrifier
quelque petite chose? La sagesse nous
enseigne à modérer nos désirs et l'on
ne peut avoir à la fois tous les avan
tages... Que répondre à de tels ar
guments?
On a beau ne posséder que peu
d'expérience , il est des jugements
qu'un chrétien, si jeune soit-il et
si ignorant des choses de la vie, peut
formuler par cela seul qu'il est chré
tien, par cela seul qu'il est instruit
de sa religion. Il nous est donc per
mis de le déclarer, la mère de famille
qui tient un tel langage, manque à
son devoir:
Les quelques lignes dont est com
posée sa lettre au Figaro , suffisent à
jeter un terrible jour sur l'état d'es
prit, — sur l'état d'âme, comme on dit
à présent de. certaines familles
mondaines, de celles où l'on.s'imagine
encore être. chrétiens, parce qu'on
va, le dimanche, à la messe d'une
heure, étaler sa dernière toiletté. Dans
ce milieu, l'enseignement, pourvu
qu'il soit d'un degré supérieur —
et l'on s'inquiète peu de l'esprit du
maître— tient lieu de toute éduca
tion religieuse, partant de toute vraie
éducation morale.
Mais, eh même temps, que nos édu
cateurs modernes sont ici bien saisis
sur le vif et. bien pris sur le fait I
Dans les lycées de jeunes filles, ils
croient avoir tout prévu, tout pesé,
tout réglé, quand ils ont haussé de
quatre ou cinq crans le niveau de
l'instruction littéraire et scientifique.
Certes, nous ne sommes point de ceux
qui prétendent réduire l'instruction
féminine
A connaître un pourpoint d'avec un haut-de-
. [chausses.
Mais sans vouloir poser d'avis ca
tégorique en ce sujet, qui, nous ne le
cachons pas, est en dehors un peu de
notre compétence, il semble que, chez
la jeune fille, l'instruction, pour éten
due qu'on la désire; doit toujours être
primée par l'éducation.
Nos bons universitaires, juchés sur
leur sagesse et sur leur expérience, ne
l'entendent pas q.insi. Le principal
seuci qui les dévore est de doter les
jeunes filles d'un enseignement supé
rieur : au lieu de leur distribuer, avec
modération , l'instruction. nécessaire
—r et que nous ne voulons pas si res r
treinte que. l'insinuent parfois , nos
ennemis — on les bourre d'une
science indigeste et, pour une , grande
part, inutile. Or, la science inutile,
bien souvent, risque d'être nuisible.
Si, du moins, l'on contrebalançait par
une éducation solide et chrétienne, les
dangers que présente cette-science,
dès qu'on en veut mettre dans l'es
prit plus que l'esprit ne peut en conte
nir. Mais non, la science est exigeante,
elle absorbe le temps disponible et
nos maîtres renvoient l'éducation mo
rale, au temps, si court, que passera
la jeune fille entre la sortie au lycée
et la définitive entrée dans le monde.
Seulement, on oublie qu'àlors il] sera
trop tard : la mauvaise empreinte,
ayant pris trop profondément sur
l'âme, ne s'effacera plus.
Du reste, quelle éducation pourrait-
on fournir en ces lycées de filles?
Le beau principe de la neutralité, si
parfois il oublie d'arrêter à la porte les
mauvaises doctrines, ne laisse jamais
endormir sa vigilance quand il faut
bannir l'enseignement religieux. A ces
malheureuses jeunes filles, on ne sau
rait donc distribuer que les maigres
bienfaits d'une morale purement phi
losophique. A ce compte, l'absence
de toute éducation nous paraît beau
coup moins dangereuse. Le naturel,
assez bon quelquefois, peut de lui-
même et sans culture, pousser» de b ons
fruits ; mais qu'il résiste à l'influence
pernicieuse de cette philosophie
décevante qu'on enseigne aujour
d'hui, ee serait un prodige que
le plus vulgaire bon sens interdit
d'espérer. La morale chrétienne ou
l'immoralité, entre ces deux extrêmes
il existe parfois une apparence, un
vernis^ d'honnêteté mondaine: mais
que l'on évite avec soin de fouiller
sous cette apparence si l'on veut s e-
pargner de cruelles déceptions.
L'éducation sans Dieu nous prépare,
on le voit, une société charmante, ou
bientôt les passions les plus violentes
et les plus basses ne seront plus gê-r
nées par les préjugés d'un autre âge:
L'athéisme officiel descend peu à
peu sur la société tout entière, il en
vahit jusqu'aux milieux qu'on avait
cru les plus capables de s'en pré
server.
Hier, nous examinions les masses
populaires; nous considérons aujour
d'hui les familles mondaines : partout
les faits nous offrent le même en
seignement, partout ils nous jettent
le même delenda Carthago ! Il faut dé
truire là société sans Dieu, il faut
se mettre vigoureusement à l'oeuvre
pour rebâtir la société chrétienne.
François Veuillot.
Interrogé l'autre jour par un repor
ter, M. le député Millerand lui a dit
qu'il continuait à désirer vivement la
séparation de l'Eglise et de l'Etat, et
qu'il s'empresserait de la voter si on la
proposait à la Chambre; mais il ne
songe point à la proposer lui-même,
ne croyant pas qu'il y ait une majo
rité pour cette mesure, et l'attention
publique lui paraissant tournée plutôt
vers les réformes économiques et so
ciales.
Là-dessus, M. Clemenceau, rédac
teur en chef de la Justice , gourmande
le député Millerand et les Français
en général. On manque de persévé
rance dans ce pays. Ce n est qu'en
frappant avec obstination sur un clou
qu'on l'enfonce, et quand 1 attention
publique se détourne d'un sujet, il
faut l'y.«ramener au lieu-de la suivre.
Ah ! l'on n'agit point en Angleterre
comme chez nous. En Angleterre, on
s'entête, on persiste, on ne lâche pas
prise, avant que la réforme poursui
vie soit effectuée., Ah ! l'Angleterre,
l'Angleterre, c'est le modèle des
pays ! Prenons exemple sur l'admi
rable Angleterre !
Aoh yes !
M. le maire de Sainte-Livière, dans
l'arrondissement de Vitry, n'ayant
pas été consulté par l'autorité ecclé
siastique sur la nomination de M. le
curé de Landricourt, qui dessert en
même temps l'église de Sainte-Livière,
a manifesté son mécontentement par
une mesure radicale. Il a !< fermé la
boîte », —• pour employer son élégante
et respectueuse manière de parler, —
et le dimanche l"octobre,ses adminis
trés ont dû se passer de messe et d'of
fices malgré les réclamations dUprêtrè
auquel M, le maire a refusé par deux
fois d'ouvrir la porte de l'église.
C'est le plus scandaleux abus de
pouvoir, et M. le maire mérite une
bonne leçon, h'Echo de la Marne es
père bien que le gouvernement la lui
donnera. Nous le souhaitons, mais
nous n avons pas autant de confiance.
Ce n est pas seulement de l'asile
qu elles avaient fondé que les sœurs
de Saint-Vincent de Paul du quartier
Saint-Sever,à Rouen, ont étébrutale-
expulsées; elles ont dû aussi abandon-
ner
soins à de vieilles femmes.
Ce que celles-ci deviendront, qu'im
porte aux laïcisateurs ! Est-ce qu'elles
votent ? Est-ce qu'elles font grève ?
Non l Alors ?
Lorsqu'elles ont appris l'incroyable
nouvelle do] l'expulsion, les malheu
reuses sont entrées dans le plus pro
fond désespoir; Toutes voulaient sui
vre les sœurs ; toutes les suppliaient
de les emmener avec elles.
Les religieuses se sont mises alors
à chercher de toutes parts un local,
jusqu'au moment où une dame géné
reuse en a mis un à leur disposition.
Mais ce local même était insuffisant,
et il fallut se séparer de trois ou qua
tre des pauvres femmes. Ce fut l'occa
sion de vraies scènes de désespoir,
aucune d'elles ne consentant à quitter
les sœurs pour aller à l'hôpital géné
ral. Enfin, quatre d'entre elles se ré
signèrent forcément.
Quant à l'asile laïcisé,' il n'a reçu
que treize enfants sur deux cent cin
quante qui se rendaient chez les
sœurs.
O'est assez dire combien impopu-
lairô' ' était cette laïcisation, et de
quelles sympathies sont entourées les
religieuses.
——.— ♦ ....
DÉMOCRATIE CHBËTI.EHHE
PREMIER ARTICLE
Le 6 août dernier, l'abbé Naudet
prononçait à Liège un très éloquent
discours, sous ce titre : La démocratie
chrétienne. Quelques jours après, se
tenait à Bruxelles un congrès dé
mocratique, où le crucifix installé à
la place d'honneur indiquait à tous
que les démocrates de l'assemblée
étaient et entendaient bien rester
chrétiens.
Ce sont là, entre beaucoup d'autres,
des signes d'une situation qu'il serait
puéril de ne pas voir et sur lesquels,
comm® Français et comme catho
liques, nous devons fixer no3 ré
flexions. .
Un grand fait domine l'histoire de
l'humanité : la vie nationale s'appuie
sur la religion. Le gouvernement, qui
n'est pas la nation, mais seulement
l'homme ou le groupe d'hommes y
détonant le pouvoir, a puy en quel-»
ques rares conjonctures,.'guerroyer
contre là religion, voire faire parade
d'athéisme. Mais,pendant ce temps-là,
la sève religieuse continuait à circu
ler dans les rangs de la nation tyran
nisée par ses chefs. Un orateur de la
loge l'Equerre l'avouait hier encore,
non sans quelque mélancolie.. « Mal
gré la loi qui donne la priorité au
mariage civil, il n'est pas étonnant,
disait le quidam, de voir le mariage
religieux être encore dans l'esprit pu
blic* le vrai et seul mariage, sans le
quel il n'y a point d'ùnion, mais un
simple concubinage légal. » En d'au
tres termes, le gouvernement a beau
répudier la religion, la nation y tient.
La religion, aux yeux de la grande
masse des citoyens, en république
comme en monarchie, est un organe
principal et indispensable de la vie
nationale.
Si, pour une" cause quelconque, à
tort ou à raison, une nation, la nôtre
par exemple, passe d'une constitution
monarchique à une constitution dé
mocratique, la séparation de la reli
gion et ae la nation, de l'Eglise et de
l'Etat, en doit-elle être la consé
quence ?
« Assurément, disent nos monar
chistes quand même. L'autel ne peut
subsister qu'appuyé sur le trône, du
moins en France. La France a été
mise en république par la bande d'a
thées qui compose la maçonnerie. Ces
gaillards-là, maîtres de la République,
gouvernent le pays par las députés
dont ils ont peuplé le Parlement. Ils
traquent la religion de toutes parts.
Seulj le rétablissement de la monar
chie peut rendre à la religion, avec la
liberté, l'action. Qu'est-ce que la dé
mocratie? L'explosion de toutes les
passions populaires, la ' souveraineté
du peuple mise à la place de la sou
veraineté de Dieu. Lo cardinal Gui-
bert s'était trompé du tout au tout, s'il
ne parlait pas avec une malicieuse
ironie. La République sera athée, ou
elle ne sera pas. »
Ces messieurs vont trop loin. Que,
sous certains de ses aspects, la mo
narchie semble plus favorable à la
religion, cela peut évidemment se sou
tenir, là surtout où une nation reli
gieuse est gouvernée par une dynastie
religieuse aussi. Contre la monar
chie chrétienne, prise en soi, nous
n'avons aucun grief. La religion, fort
heureusement, peut s'accommoder
avec la constitution monarchique, de
beaucoup jusqu'ici la plus commune
chez les nations civilisées et même
-chez les nations à civiliser.
Mais si les événements ont intro
duit, au sein d'une nationale régime
démocratique, si ce .régime lui agrée,
si elle semble en mesure de le con
server assez longtemps, sinon . tou
jours, cette nation est-elle par : là
vouée irrémissiblement à l'irréligion ?
Et que doivent penser, que , doivent
faire les hommes religieux qu'elle
compte dans son sein ? C'est la ques
tion de l'heure présente.
Au point de vue de l'autorité, elle
•st résolue par les enseignements du
chef de la religion. L'avènement de la
démocratie en France ne décourage
pas le Pape. Il y voit pour l'Eglise une
situation sous quelques rapports nou
velle, mais non désespérée,non même
{lire qu'auparavant. Le clergé, gui est
e sel de la terre et la lumière du
monde, tournera plus particulière
ment son zèle du côté des masses que
la Révolution avait accoutumées à le
fuir. L'ouvrier retrouvera le prêtre
qui lui tendra affectueusement la
main j et la rencontre du prêtre et de'
l'ouvrier donnera à la démocratie la
moralité supérieure qui, en corrigeant
ses erreurs, en combattant ses pas
sions, en lui prescrivant son devoir
après avoir protégé son droit, légiti
mera et affermira* ses progrès et ses
succès.
Quel est le desideratum de là démo
cratie ? Si nous ne nous trompons, il
consiste en ceci : que le travail soit
parmi les hommes le distributeur nor
mal de la jouissance.
Cette idée est juste, pourvu qu'elle
soit bien comprime et sagement appli
quée.
Ce qui suppose : 1° Que l'on désigne
sous le nom de travail toutes les ap
plications de la force humaine, intel
lectuelle ou physique, à la production
d'utilités morales ou matérielles ;
2° Que les résultats dtf travail hu
main puissent être accumulés par qui,
ayant le droit de les consommer, pré
fère les conserver, formant ainsi par
l'épargne, le capital; ;
3° Que les fruits du travail, soit im
médiat, soit accumulé, puissent être
transmis à autrui par voie d'échange,
de don ou d'héritage . e
Car le travail n'est pas une fin, mais
un moyen. Il aboutit à la propriété,
Et la propriété qu'il doit constituer,
c'est dans une société prospère, au
minimum celle qui suffira aux besoins
de chaque travailleur, individu, mem.-
bre d'une famille et citoyen d'un pays,
durant sa vie entière.
Que l'on n'en vienne pas là aisé'
ment, nous le reconnaissons volon:
tiers. Mais à qui la faute ?
N'accusons pas la Providence ? Pour
des motifs très sages, elle veut que
l'humanité gagne son pain à la sueur
de son front ; mais elle ne lui refuse
paslepain. De nos jours surtout, sur
une terre aussi fertile qu'est la nôtre,
avec le secours puissant d'innombra
bles machines, avec les découvertes
merveilleuses de la science, il est aisé
au travail, convenablement réglé, de
donner a tous du pain, c'est-à-dire
l'honnête nécessaire.
Si la Providence rend possible non
le luxe pour tous, ce qui serait loin
d'être un bienfait, du moins une mo
deste aisance pour tous, une nation
n'a-t-elle pas le droit, plus encore le
devoir, d'y tendre ?
N'est-ce pas là un des côtés princi
paux de ce bien public, c'est-à-dire
général que tout gouvernement a
l'obligation de procurer dans la me
sure de ses forces ?
L'empereur Constantin, encore
payen, mais déjà éclairé par l'Evan
gile, ordonnait à tous les gouver
neurs de province de rechercher les
personnes qui manquaient du néces
saire, afin de les aider des fonds de
l'Etat, estimant que, dans un Etat bien
ordonné, nul ne devait être aban
donné aux étreintes de la misère.
Cela dût paraître bien étonnant aux
paysans du II? siècle ; mais c'était la
loi de nature aussi bien que la loi du
Christ. Les hommes forment une fa
mille; chacun doit , s'il le peut, se
sustenter au moyen du travail: s'il
ne le peut pas, c'est le devoir impé
rieux de ses frères de venir a son
aidé.
Mais la meilleure organisation
d'une société est, sans contredit ,
celle où, sauf de rares exceptions,
chacun pourra obtenir assez du tra
vail pour n'être pas contraint de re
courir à l'aumône...
C'est cette organisation à laquelle
aspire la démocratie contemporaine.
La religion ne peut que l'y encou
rager et l'y aider»
Avec elle , le problème,, peut, être
heureusement résolu , au grand .avan
tage de la nation. Sans elle, il ne le
sera point. ,
Voilà pourquoi le clergé s'adresse
FEUILLETON DE L 'UNIVERS
DU 9 OCTOBBB 1893
CAUSERIE SCIENTIFIQUE
Cloches sous-continentales
Pour des raisons qu'il est superflu de
développer devant les leoteurs de YUnivers %
je suis certain que notre monde terraqué
et sublûnaire s'arrêtera un jour dans sa
course elliptique autour du soleil et que
l'humanité verra naître le dernier homme.
Quand aura, lieu le dernier cataclysme?
Seul, Dieu oônnhit' le* jour' et l'heure. Ce
jour est-il prochaine» Il est sûr que notre
génération ne le verra pas. Mais que nos
petits-enfants ou nos arrières-petits-en
fants n'assisteront pas au jour de colère
prédit par David et par la Sibylle, qui ose
rait le prétendre? Les signes se'multi
plient.
Un de ces signes me parait être l'exces
sive et effrayante rapidité du progrès scien
tifique. Ah ! nous sommes loin des temps
où un Pic de la Mirandole pouvait dispu
ter de omni re scibili, où un Leibnitz, un
Pascal ou un Newton étaient i la fois géo*
mètres, physiciens et philosophes, toute la
lyre ! Aujourd'hui, la muse des Sciences
est obligée d'imiter les fabricants d'épin
gles'et de diviser le travail entre ses fidèles:
Nous avons des ohimistes qui né savent
que de la chimie et n'ont pas le temps d'é>-
tudier toute la chimie, des naturalistes,
comme M.Tréoul.qui passent leur vie à étu
dier les feuilles des arbres, des géomètres
< comme X, Y, ouZ qui n'entendent rien aux
oalouls de l'américain Sylveâter. Il n'y a
plus de savants complets, môme dans une
scienoe. M. Moissan qui a isolé le fluor,
découvert le triiodure de bore et cristallisé
le carbone, , n'est peut-être pas très ferré
sur la ehimie. organique. Le résultat le plus
clair de oette poussée vertigineuse, le voioi :
dans vingt ans, personne ne saura plus
rien. Les polyteohnioiens eux-mêmes, pas
seront leurs deux années d'éoole à voltiger
Si rapidement dans le cycle des connais
sances scientifiques, qu'il adviendra d'eux
comme du fameux disque de Newton ; tou
tes les couleurs de l'aro-en-oiel ; y figurent ;
faites le tourner, il est gris, même grisâtre.
Mais l'humanité, n'en aura pas moins son
piusée, lequel, je le crains fort, sera sur
tout un arsenal contre le Maître des scienoes.
. Or, il y a des mystères que l'humanité
scientifique ne pénétrera jamais; quand elle
aura découvert tout ce qui lui est permis de
savoir, elle s'en ira, n'ayant plus rien à
faire ici-bas. J'ai sur le rebord de ma fe
nêtre (oh! rien de Jenny l'ouvrière!) un
géranium qui ressemble à tous les'géra
niums & fleurs roses. Pourquoi ces Heurs
sont-elles roses? Pourquoi la main d'un
jardinier savant ne peut-elle en ohangerla
nuance, la p&lir ou la foncer et, qui sait ?
produire le' géranium à fleurs bleues ou
noires ? Voilà de la pure scienoe horticole,
voilà la Scienoe. Mais quand mon jardinier
aura noirci mon géranium, il ne saura pas
plus pourquoi il est noir qu'il ne sait pour
quoi la feuille d'un si beau vert est coupée
dans toute sa largeur par une bande foncée ;
pas plus qu'il ne saura pourquoi la fleur est
inodore et pourquoi la feuille possède ce
parfum étrange et si capiteux. Je n'ignore
pas que les savants auront ce qu'ils ap?
pellent une explioation. Ils vous diront que
oertaines huiles essentielles se glissent par
ici en évitant de passer par là.
Ils les suivront,, oes huiles essentielles et
les Trécul de l'avenir vous nommeront (ils
ne sont jamais embarrassés pour dire des
noms) les oanaux. par où cette huile passe,
allant à la fôuille et refusant d'aller à là
fleur. Le secret de cette préférence est
dans la petite graine du géranium, laquelle
ne diffère guère de la graine du rosier où
cependant l'huile essentielle va dans la fleur
sans se risquer dans, la feuille.
Voilà ce que la Soience ne découvrira
jamais, parce que Dieu s'est réservé le se
cret de la Vie.
Mais, quant à oe que l'Humanité peut sa
voir, elle va grand train pour le connaître,
et le temps n'est pas éloigné où .le rouleau
lisible pour elle sera complètement dé-
poulé.
Nous voioi un peu loin des Cloches sous-
continentales, titre de oe chapitre.
Pas si loin, pas si loin 1 Même tout près.
Si le mystère de la Vie doit rester impé
nétrable, oelui des combinaisons purement
matérielles est abandonné, non pas seule
ment à nos idisoussions, mais aux décou
vertes de l'homme. Dans cet ordre, le sa
vant trouvera tout... ou à peu près.
■ Particulièrement les deux infinis, le petit
et le grand, se laisseront peut-être pénétrer
un jour, dans la mesure, bien entendu, de
l'inteHeot humain. Les savants s'acharnent
à ces deux éludes: la constitution moléou-
laire des corps, et la constitution du monde
stellaire. L'inventeur de la mélinite, par
exemple, amis,dit-on, à profit son séjourfor-
cé dans la bonne ville d'Etampes,pour com
biner un explosif plus terrible que tout ce
qu'on a vu jusqu'ici. Je pense que l'admi
nistration ne l'a pas autorisé à faire des
expériences qui auraient pu faire sauter la
prison, contenant et contenu, jusque dans
les nuages. Sa découverte ne peut donc être,
si elle existe, que le résultat de oalouls pro
fonds sur la constitution moléculaire des
corps. Cette manie de faire, sauter le monde
l'a-t-elle conduit à réfléchir sur la manière
dont le monde est sorti du ohaos pour arri
ver à l'état où nous le vcyons aujourd'hui ?
Toujours est-il que M. Turpin est sorti de
prison non seulement armé d'une archi-
mélinite, mais encore d'un volume sur la
formation des mondes.
Mais il ne s'agit pas ioi de cet ouvrage
dont je parlerai prochainement, mais sim
plement du système de M. Radeau.
M. Radeau ne s'oocupe que de notre
humble planète et de sa constitution.
« Il est généralement admis, dit-il, que
la Terre est formée d'un globe igné,fluide à.
la partie .périphérique, enveloppé d'une
croûte solide, sorte de peau relativement
mince, sur les trois quàrts de laquelle s'é
tendent les mers, l'atmosphère environnant
le tout. •
Cette constitution lui paraît oependant
insuffisante pour expliquer des phénomènes
importants connus aujourd'hui.
Ces phénomènes sont au contraire fort
bien expliqués et reliés entre eux, si l'on
admet que la oroûte, au-dessous des conti
nents, ne touche pas le globe fluide, mais
en est séparée par un espace rempli de
matières gazeuses en pression. Les conti
nents constitueraient ainsi des sortes de
cloches très aplaties,. gonflées et soutenues
par des gaz, tandis que le fond, des océans
reposerait directement sur le globe igné.
Déjà les observations du pendule avaient
porté les astronomes (Bouguer, Laplace,
Petit) & penser que les' montagnes sont
creuses en dessous. L'hypothèse de M. Ra
deau va beauooup plus loin; elle étend
cette idée des vides à l'ensemble des terres
qui émergent des eaux, tout en admettant.,
bien entendu, des irrégularités looales.
Lamé a. démontré dans sa Théorie de
l'Elasticité , et cela se conçoit a priori, que
j lacroûte terrestre est iaoapable de oonser-
} ver sa forme elle-même, sur de grands
' espaces, si elle, n'est pas soutenue en
dessous. A mesure que le globe fluide se
oontraote (par refroidissement), elle est.
donc obligée de le suivre,en s'écrasant et'se
plissant ; mais on oomprend qu'à certains
endroits elle se sépare du noyau, et qu'il
se forme des anfraotuosités, des boursu-
flures, où vont se loger les gaz qui se
dégagent delà masse encore en fusion.
Les saillies continentales tendent géné
ralement à s'exhausser, gonflées par les gaz
qui s'y accumulent, pendant que le fond
des mers s'affaisse; Ainsi s'explique le re-?
cul progressif des rivages, constaté dès les
premières études de Géologie .Mais les gaz,
emprisonnés à une très forte pression,
fuient peu à peu par les fissures de l'éoorce.
Lorsque l'apport de nouvelles quantités,
provenant du noyau interne, deviendra in
suffisant, la pression s'affaiblira sous les
continents, et ceux-ci s'effondreront sur la
nouvelle croûte solidifiée au-dessous, en
donnant lieu à des cuvettes ou. cirques cra-
tériformes plus ou moins étendus. C'est
l'état où nous voyons aujourd'hui la Lune.
Si, par suite d'éboulements sous-jacents,
la résistance de la croûte diminue trop en
un point, le graz fait sauter cette partie fai
ble ; une bouffée de oe gaz pénètre dans
l'atmosphère, la boursouflure se vide par
tiellement et la croûte se referme. N'est-ce
pas là exactement ce qui est arrivé tout ré
cemment au Krakatoat
A quelle pression et & quelle température
sont ces gaz? Quelle en est la nature? Si
l'éo'orce terrestre a 30 kilomètres d'épais
seur sous les oontinents (chiffre assez pro
bable), la pression doit être de 650 atmos
phères et la température de 900 degrés
environ. Les formules de Glausius et de
M. Sarrau montrent que, dans ces condi
tions, les gaz difficilement liquifiables ont
une densité inférieure ou peu supérieure à
celle de l'eau. L'ordre de superposition
s'établirait ainsi : hydrogène , méthane,
azote, éthane, oxygène, anhydride oarboni-
que. Mais il y a certainement beauooup
d'autres gaz stables dans' ces conditions,
peut-être l'acide chlorhydrique, l'hydrogène
silicié, etc.; leur oonnaissanoe entraînerait
probablement celle de la génèse des pé-
trolts, du chlorure de sodium, de la silioe
en poussière lànoée par les volcans, etc.
Cette idée des cloches sous-continentales
n'est pas une pure hypothèse. Il y a des
faits et des. choses qui paraissent la démon
trer. Puisque la oroûte terrestre n'a ni assez
d'épaisseur, ni, assez de rigidité pour se
tenir d'elle même sur de grands espaces, il
faut qu'elle se trouve dans son ensemble
en équilibre statique, o'est-à-dire que, si l'on
considère des colonnes verticales, dé même
section, allant de la surfaoe jusqu'à une
nappe de niveau inférieur prise dans le
globe liquide, la quantité de matière conte
nue dans chacune de ces colonnes doit être
partout la même. La compensation des!
4,000 à 6,000 mètres d'eau que contiennent
les océans et des 5 à 600 mètres de terres
qui émergent au-dessus, exige alors qu'il y
ait au-dessous de ces terres une sone de fai j
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 82.77%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 82.77%.
- Collections numériques similaires Hydrothérapie Hydrothérapie /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Hydrothérapie"Description des fontaines acides de Spa ; ensemble la vertu d'icelles et de la fontaine de fer de Tongres, par M. Philippe Gherinx,... /ark:/12148/bpt6k1912003g.highres Guide du médecin et du touriste aux bains de la vallée du Rhin, de la Forêt-Noire et des Vosges... / par le docteur Aimé Robert,... ; avec plusieurs analyses inédites de M. Bunsen,... /ark:/12148/bpt6k889379s.highres
- Auteurs similaires Hydrothérapie Hydrothérapie /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Hydrothérapie"Description des fontaines acides de Spa ; ensemble la vertu d'icelles et de la fontaine de fer de Tongres, par M. Philippe Gherinx,... /ark:/12148/bpt6k1912003g.highres Guide du médecin et du touriste aux bains de la vallée du Rhin, de la Forêt-Noire et des Vosges... / par le docteur Aimé Robert,... ; avec plusieurs analyses inédites de M. Bunsen,... /ark:/12148/bpt6k889379s.highres
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7082054/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7082054/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7082054/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7082054/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7082054
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7082054
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7082054/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest