Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1893-08-19
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 19 août 1893 19 août 1893
Description : 1893/08/19 (Numéro 9231). 1893/08/19 (Numéro 9231).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7081545
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Samedi 19 Août 1893
ÉDITIO N QUOTID IENNE
PARIS ÉTRANGER
ktf départements . (union postale)
Dn an . . 40 » ,61 »
Six mois .... . 21 » " 2650
Trois mois. ... 11 » 14 »
Les abonnements partent des 1" et 16 de chaque mois
UN NUMÉRO (
BUREAUX : Paris , 10, ru e de3 Saints-Pères
On s'abonne à Rome, place du Gesù, 8
\
N* 9231 — édition quotidienne
Samedi 19 Août 1893
if«
ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNE
Dn. an . /
Si* mois. .
Trois mois.
PARIS .
et départements
. .. 20 »
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5
ÉTRANGER
(union postale)
26 »
13 »
6 ÇO
■ Les abonnements partent des 1" et 16 de chaque mois
L 'UNIVERS ne répocd pas dès manuscrits qîTi lai sont adressés
ANNONCES '
MM. LAGRANGE, CERF et C", 6, plaoe de la Bourse ; ■
«rafegag»
BULLETIN-DU JOUR
PARIS 18 AOUT 1893
L'aventure de M. Develle aurait dû
■ servir à M. Viette.son collègue.M. De
velle avait dit : « Il y a des journa
listes français payés par l'étranger ».
Et quand des explications lui ont été
demandées, il a juré qu'il n'avait ja
mais rien raconté de semblable. Et
voilà que M. Viette s'est écrié à Mont-
béliard, dans une réunion qu'il y te
nait samedi : « Je. connais les noms
de toutes les personnes compromises
dans l'affaire du Panama. » M. Yiette
n'a plus qu'une conduite à tenir : li
vrer ces noms. Il préférera déclarer
qu'il n'a pas tenu le propos que tant
de témoins ont entendu.
Un dernier mot! Réponseà une ca
lomnie ! Manœuvre indigne ! Protes
tation !Une réponse... ! Ces mots s'éta
lent sur tous les murs,-recouvrant les
premières affichés, moins violentes,
moins ponctuées de signes exclama-
tifs. Ce sont les dernières cartouches
électorales. Encore 24 heures, et pour
le plus grand nombre des circonscrip
tions, la bataille sera livrée. Multi
plions, si tard qu'il soit, les prières et
les efforts.
. Rien de baillant dans notre politique
intérieure. Le zèle des préfets en fa
veur des candidats officiels ne se ra
lentit pas, le préfet du Var que M. Du-
puy n'a pas osé déplacer, se distingue
entre tous. Mais son candidat, M. Glé-
menceau, est de plus en plus mena
cé. On l'accueille dans toutes les réu
nions, où il se dépense' avec une ex
traordinaire vigueur, par des aoh y es !
aoh yes ! qui ne présagent rien.de bon
pour l'ami de l'Angleterre.
Aucune nouvelle de Cornélius Herz,
mais sa femme, si l'on en croit un
journal du matin, est à Paris, où
elle est venue mystérieusement pour
être mise en rapport avec de gros
personnages, et son voyage à Pa
ris aurait provoqué le voyage que
M. le premier ministre Dupuy a fait
-hier.à Fontainebleau. Qu'y à-t-il de
vrai dans ce roman ?
Les troubles qui ont éclaté à Aiguesr
Mortes (Gard), ont été plus graves
que ne le faisaient prévoir les dépê
ches d'hier. Ouvriers français et ita
liens se sont battus. Il a fallu en
voyer des troupes de Nîmes et de Lu-
nel. Il y a eu dix morts et trente bles
sés. •
Il a fallu ramener sous escorte à la
gare où ils ont pris le train.pour Mar
seille, les ouvriers italiens qui res
taient là-bas et à qui on eût fait un
. ;mauvais parti. N'y aurait-il aucun
moyen de prévenir de si regrettables
et douloureux incidents? Ils éclatent
un beau jour, mais sont là résultante
d'une situation depuis longtemps con
nue et à laquelle personne "ne se
préoccupe de remédier. -
La Chambre belge a décidé hier
qu'elle voterait dans la session ac
tuelle la loi électorale, afin, qu'on
puisse commencer aussitôt la confec
tion des listes et que les élections
aient lieu à l'époque habituelle.
Dans les cercles gouvernementaux
italiens on déplore,et on a raison, que le
voyage du prince de Naples en Alsace-
Lorraine ait lieu au moment où l'Italie
veut solliciter de la France des con
cessions importantes en ce qui con
cerne le régime monétaire de l'Union
latine. Le plan d'être en bons rapports
militaires avec l'jBmpire d'Allemagne,
et financiers avec la République fran
çaise peut être très habile. Mais per
sonne en France Tie pourrait, sans
être à la fois dupe et coupable, aider
à sa réalisation.
La Hongrie est dévastée par les
inondations. Douze villages sont subr
mergés. Trente personnes ont péri.
Une dépêche de Bilbao annonce
des troubles à Guernica en faveur des
privilèges des provinces basques. La
gendarmerie a rétabli l'ordre. Pourquoi
supprittier cés - privilèges ? Ne peut-
on faire de l'unité sans recourir à une
excessive centralisation ? Décentrali
sons ! c'est le cri en Espagne, et c'est
en France aussi le. vœu des esprits les
meilleurs. •
Des incidents se sont produits en
Grèce entre les officiers de l'escadre
anglaise et un aubergiste, «t entre
matelots des deux nations. Une en
quête est ouverte. Ces incidents et ces
riSes montrent en quelle faveur est
partout tenue l'Angleterre !
La Russie déclare prendre note dé
la déclaration de Ménélik exprimant
le désir de ne pas prolonger le traité
iqui met l'Abyssinie sous le protecto
rat italien. La nouvelle a dû être
pénible au gouvernement du roi Hum-
bert.
CONSULTATION
On nous pose cette question :
En divers endroits, le candidat con
servateur, qui est en m&Dûe temps
catholique, sans se déclarer .réfrac-
taire. s'abstient de. parti pris d'adhérer
positivement aux instructions ponti
ficales." FauMl demander à ce can
didat de s'expliquer? t
Réponse :
Le moment de demander des x expli
cations est passé ; il pourra revenir
avec les ballottages, mais nous n'y
sommes pas encore. De plus, si le can
didat trop réservé est vraiment catho
lique et que l'on puisse compter sur
son vote, il n'y aurait lieu de tenter
quèlque chose qu'au cas où son con
current serait catholique aussi. Alors,
il faudrait poser les questions néces
saires, puis aller au plus franc et au
plus complet des deux.
Nous l'avons déjà dit maintes fois :
notre candidat est le catholique avant
tout, celui qui, homme d'obéissance,
de droiture et de bon sens, accepte la
république avec la résolution d'en ré
former les lois sectaires, et qui est
loyal dans son acceptation comme
résolu dans son opposition.
Après lui et faute de lui, nous soute
nons, selon la situation électorale, soit
le candidat qui, venant de la Droite,
n'ose pas se détacher carrément des
réfractaires, soit celui qui, venant de
la Gauche , n'accepte formellement
qu'une partie de nos revendications.
Et si, grâce à ce minimum de droite
et à ce minimum de gauche, on peut,
dès la prochaine législature, entamer
les lois scolaires et militaire, on aura
fait une bonne besogne.
Ceux qui à cette tactique ouverte,
loyale, obligatoire, opposent la poli
tique du maximum, cherchent, non le
succès de leurs idées, mais l'échec des
idées contraires, lesquelles s'appuient
sur l'Encyclique aux catholiques de
France. Ils ne veulent pas que le Pape
ait vu juste et ait eu raison. Mieux
vaut pour eux le maintien du statu
quo, mieux vaut même son aggrava- J
tion qu'un apaisement qui contrarie- j
rait leurs prévisions et condamnerait
leurs passions. Léon XIII ne s'y est
pas»trompé : on l'a vu par sa lettre , 1
au cardinal Lecot.
E ugène V euillot.
UN BON MOUVEMENT
Le scrutin va s'ouvrir.
Parmi les catholiques, la très ■
grande majorité certainement, sans .
espérer une éclatante victoire, aime à '
penser que des urnes sortira une
Chambre moins mauvaise que les
précédentes. Beaucoup des membres
du centre qui reviendront, paraissent 1
vouloir suivre une politique un peu
plus modérée. Il y aura un élément
nouveau, un parti conservateur ins- t
tallé dans la République avec l'agré
ment des électeurs, et constituant un
groupe sur léquel aussi pourra s'ap
puyer un ministère désireux d'ouvrir
une ère de pacification. Nous obtien
drons sans doute quelques adoucisse
ments aux lois persécutrices, en at
tendant de parvenir au but que nous
ne nous lasserons jamais de poursui
vre : la. réforme complète de ces lois.
Voilà ce que souhaite la très grande
majorité des' catholiques, voilà £e
qu'elle espère comme résultat du
scrutin de dimanche.
Il est une petite minorité qui ne se
trouve pas dans les mêmes disposi
tions. Ces catholiques n'ont point
voulu obéir au Pape; eux seuls détien
nent la sagesse et Léon XIII, à leurs
yeux, s'est trompé, du jour où il a été
d'un autre avis que le leur. Ils pen
sent cela tout simplement, sans la
moindre hésitation, — ils ne se dou
tent pas que leur outrecuidance est
parfaitement ridicule. Ce que tous les
autres catholiques espèrent,ceux-ci,plus
ou moins ouvertement, le redoutent.
Ils verraient avec satisfaction .le suf
frage universel renvoyer au Palais-
Bourbon' une Chambr e aussi mauvaise*
pire même que la précédente. Ils
éprouveraient une certaine joie, qu'ils
rie pourraient contenir, à penser que
le mal va continuer, va s'8ggraver.
L'idée qu'ils y sont pour quelque chose,
ne les troublerait pas le moins du
monde. Ls penseraient que cela leur
donne raison, et seraient tout surpris
de voir la masse des catholiques, lais
sant, oubliant derrière eux la petite
église, s'obstiner, malgré cet échec
d'un jour, à marcher en avant, vers
le salut, dans les voies que le Saint-
Père nous prescrit de prendre.
Hélas, oui, quelques catholiques
sont dans ce triste état d'esprit !
Nous le demandons aux hésitants/
à ceux des nôtres qui ont été influen
cés, ébranlés par de fallacieux conseils
et. des arguments pernicieux :
Quelle est, en conscience, la bonne
situation pour un catholique?
Obéit-ikà des sentiments qui con
viennent à un vrai fils de l'Eglise, ce
lui qui désire, plus ou moins formelle
ment, se l'avouant ou. ne se l'avouant
pas, que le mal continue, qu'il s'ag
grave^ pour que la politique du Pape
subisse un échec, --parce que cette
politique-là n'est pas celle qu'il pré
fère, celle qu'il eût voulu voir adop*
ter'?" -■■■■■■
Qui s'est mis dans le cas d'appren
dre sans pouvoir s'attrister, le • succès
des sectaires opportunistes et radi
caux, s'est mis dans un mauvais cas.
Nous supplions lés boudeurs d'y
réfléchir ; nous les supplions d'avoir
un bon mouvement! Qu'ils n'écoutent
pas les excitations perfides des pessi
mistes rageurs et hargneux; qu'ils ne
sé renferment point dans une absten
tion maussade, sous. prétexte qu'ils
n'ont pas devant eux un candidat qui
leur convienne, un candidat hostile à
toute République et réclamant le maxi
mum. Qu'ils votent'et fassent voter,
à défaut d'un meilleur, pour le mo
déré ne promettant que d'insurfi-
sàntes réparations, pour le constitu
tionnel aii programme trop modeste.
Qu'ils songent à leur responsabilité,
qu'ils n'écoutent point l'esprit de
parti* qu'ils écoutent la voix qu'ils ne
peuvent faire taire au fond de leur
conscience!
P ierre V euiixot.
L 'Osservatore Romano publie le texte
►latin de la lettre adressée à S. Em. le
cardinal Lecot par le Saint-Père.
En insérant ce document, l'organe
du Saint-Siège présente des observa
tions qui doivent être reproduites:
« Le bien de l'Eglise et le bien de la
France ». Voilà les deux nobles desseins
au succès desquels le Saint-Père ne peut
rester indifférent 6ans manquer à la su
blime mission qu'il exerce sur la terre et
dont II doit se préoccuper avec toute la
tendresse d'un père, la sollioitude du ■ Pas
teur, l'autorité qui appartient au Dooteur
suprême de l'Eglise.
Que si pour protéger et accroître oes
dëux biens souverains, le Pape a oru de
voir, parce document nouveau et très im
portant, fortifier les avertissements anté
rieurs, oe n'est pas, comme certains l'insi
nuent avec malice et impertinence, parce
qu'il songe & s'immiscer dans la lutte de
demain et pour jouer en France au « Grand
électeur », mais parce que, contre ses pa
roles et contre ses avertissements paternels
se sont élevées dés voix téméraires qui ont
oru pouvoir enseigner au Vicaire de Jésus-
Christ, au Chef de cette Eglise dont la
France est la Ftlle aînée et cherie, quel est
l'intérêt de celle-ci et le bien véritable des
catholiques et de l'Eglise; parce qu'ils sont,
eux, des juges plus compétents, des amis
plus tendres, plus sincères et plus| éolairés
que Lui...
Et, eh fait, la lettre ponti&oale, dit très
olairemest qu'elle s oe but et aucun autre ;
elle montre qu'elle eât dans l'esprit de son
auteur auguste ce qu'elle est en réalité :
une réponse énergique et digne & des ob
jections irrévérencieuses, à oertains doutes
déraisonnables, à oertaines réserves injus
tifiées et coupables.
Si ces doutes et ces objections n'avaient
pas été présentés dans des discours et
dans des articles inopportuns, la publica
tion d'une telle réponse s'eût pas été né-
Oessaire.
Telle est certainement l'impression que
devra produire sur tous oe nouveau et très
important document ; lequel est aussi une
splendide confirmation de cet idéal sublime
qui, dans l'examen des intérêts vitaux de là
France, a constamment inspiré et inspirera
toujours l'intelligence éolairée, la paternelle
et très tendre sollioitude du Vicaire de Jé
sus-Christ.
BRÈVE RÉPONSE
Nous recevons deux lettres, l'une
anonyme, l'autre signée d'un prêtre
où'« dans l'intérêt de la cause conser
vatrice et religieuse » on nous de
mande avec quelque vivacité, bien
qu'en termes affectueux, de ne plus
attaquer M. de Cassagnac-
L'Univers n'a pas attaqué M. de
Cassagnac. Lassé de le voir prendre
sans cesse à partie et,comme toujours,
brutalement, des catholiques soumis
aux prescriptions du Pape, il a signalé
son attitude. C'était un devoir. Pour
un journal catholique, ce n'est pas
assez d'obéir ; il doit défendre les ins
tructions qu'il suit et aussi ceux qui
les suivent comme lui. Autrement son
obéissance est louche. On peut dire de
l'obéissancè ce que le poète a dit de la
foi: quand elle est sincère, elle agit.
Cette défense contre les attaques
ncessantes de M. de Cassagnac a
d'ailleurs été très limitée; elle n'a
guère dépassé la mesure d'une protes
tation.
. L'Univers a-t-il risqué, en agissant
ainsi, de nuire à la cause conserva
trice? Non, certes. D'abord, qu'est-ce
que la cause conservatrice et reli
gieuse en dehors de l'action catho
lique, telle que l'Eglise l'entend? Puis,
n'est-il pas mauvais serviteur de cette
cause, celui ; que l'on voit se ruer sur
tout conservateur qui, entre les ensei
gnements de Léon XIII et ceux de
M. de Cassagnac, préfère ceux de
Léon XIII?
La protestation que nous avons fait
entendre et que d'autres journaux ca.-
tholiquesont fait entendre aussi, était
nécessaire. Il fallait en outre rappeler
que,de deux candidats se déclarant tous
deux catholiques, nous devons préfé
rer celui qui accepte complètement ou
le plus largement les directions pon
tificales. C'est celui-là qui donne le
bon exemple . comprend le mieux la
situation et fera la meilleure besogne.
Ainsi, entre M. Laudet et M. de Cas
sagnac, il ne s'agit pas de savoir lequel
jusqu'ici a été le plus en vue, mais le
quel marche et marchera dans la voie
où il faut marcher.
Diverses choses seraient à dire là-
dessus, et il y aurait, croyons-nous,
quelque utilité à les dire. Cependant,
puisqu'on nous demande d'enrayer la
polémique, nous enrayons. -
E. V.
Dans l'un de ses derniers numéros,
la Gazette de France a inséré une
lettre de M. Gibert, rédacteur de
l' Avant-garde de l'Ouest , accusant les
trois curés de la ville d'Avranches
d'avoir assisté à la distribution des
prix de l'école communale des filles.
M. Gibert, prend surtout à partie l'un
d'eux, etle montre sous un jour très
défavorable < : à l'en croire, ce curé
serait coupable d'une sorte d'apostasie,
terme fatal d'ailleurs pour ceux qui se
placent, à.la voix de Léon XIII, sur le
terrain catholique. Il n'y a qu'un
malheur pour M. Gibert, pour la
Gazette et pour son grand titre, Le
chemin parcouru : c'est que l'accusé
n'a pas assisté à la distribution sus
dite : il ne peut donc être cité comme
une preuve des prétendues défâil-
knces morales produites par les pa
roles du Souverain Pontife. Pauvre
Gazette 1
. . _ ; -,
Parmi les professions de foi des
libres-penseurs qui veulent demeur
rer fidèles à la liberté, celle de M. de
Labruyère mérite d'être mentionnée.
Il est candidat « révisionniste répu
blicain » dans le quartier de la Made
leine. Il s'explique nettement sur la
question religieuse. Partisan dè la sé
paration de l'Eglise et de l'Etat, M. de
Labruyère reconnaît que l'abrogation
du Concordat, « contrat bilatéral »,
impose un ensemble de mesures d'é
quité. «Cetteréforme,dit-il, aboutirait
« à une confiscation nouvelle si elle
« n'était précédée d'une restitution
« des biens que l'Etat s'est annexés
« pendant la Révolution ». Il recon
naît encore que le Concordat est de
venu « un instrument d'oppression
« entre les mains de sectaires imbé-
« ciles ou scélérats ». Il veut* en at
tendant, l'application loyale du traité
de pacification.
Quand la grande affaire de la loi sur
les associations sera enfih engagée,.
M. de Labruyère réclamera la liberté
« pour les associations catholiques
« comme pour les syndicats ouvriers,
« comme pour les corporations ; « li
berté « pour l'es diocèses, pour les pa-
« roisses, pourlesordresreligieux.de
« s'organiser, et de se développer,
« sauf limitation du chiffre des revenus
« dans des bornes raisonnables; cons-
«, titution d'un tribunal arbitral pour
« fixer la restitution due à l'Eglise par
« 1,'Etat. » En fait de mainmorte, M. de
Labruyère se préoccupe surtout de
celle qui est représentée par « les com
pagnies d'assurances et les hauts ban- ^
quiers » qui accaparent la fortune
mobilière et sont « un dahger autre- ;
« ment réel que celui des monastères
« et des couvents. »
« Les opportunistes seuls pâtiraient
d'une séparation ainsi entendue et
pratiquée », dit M. de Labruyère. Cer
tainement, ils verront avec colère
cette profession de foi qui relève, de
vant la foule longtemps abusée, la
notion de la justice. 8
LA NOUVELLE CONSTITUTION DES BÊNÉDICMS
Le Moniteur de Rome qui nous arrive i
publie le texte latin de la nouvelle consti
tution des Bénédictins. Voioi les disposi
tions essentielles indiquées par ce docu
ment :
Le Souverain Pontife rappelle
quelle fut toujours sa sollicitude
envers l'ordre ae Saint-Benoit, l'un
des principaux appuis et des plus
beaux ornements de l'Eglise. Il a
donné maintes fois des'preuves de cet
intérêt. Naguère S. E. le cardinal Dus-
met est venu à Rome pour poserais
première pierre du monastère de Saint-
Anselme sur le Mont-Aventin, et pré
sider une assémblëé d'abbés et de dé
légués des divers monastères de Bé
nédictins. Le but de cette assemblée
était de traiter en commun les ques
tions intéressant l'ordre tout entier,
et en particulier de constituer une as
sociation fraternelle qui réunit toutes
les communautés par un lien de
charité mutuelle.
Les délégués se réunirent à plu
sieurs reprises dans, -le palais de
Saint-Caliste, et convinrent de di
verses propositions dont S. E. le car
dinal Dusmet rendit compte à Sa Sain- .
teté le 2 mai de cette année.
Léon XIII ayant pris l'avis de plu
sieurs cardinaux, a résolu de confir
mer ces décisions. En conséquence,
toutes les congrégations de bénédic
tins que l'on appelle noires, consti
tuent une association fraternelle, qui
ne subordonne aucune d'elles à une
autre. Pour lui donner plus d'unité et
sans rien changer, à l'ordre de cho
ses actuel, un primat de toutes .les
congrégations sera élu, et s'oqcupdra
à Rome des affaires concernant l'in
térêt commun de l'ordre.
Il pourra être choisi parmi toutes
les congrégations, sans distinction de
nation ou de monastère ; il sera en
mêtae te.mps abbé de l'abbaye de
Saint-Anselme de Rome, et y rési
dera. Cette abbaye ne sera pas consi
dérée comme appartenant à l'une des
congrégations, mais sera peuplée de
religieux pris parmi chacune d'elles.
Le primat exercera cette charge
pendant douze an»; au bout de ce
temps, tous les abbés se réuniront à
Rome afin de nommér son successeur,
ou de le réélire lui-même pour une
nouvelle période de douze ans. S'il
meurt, ou si j pour une autre raison,son
siège se trouve vacant, Je recteur de
l'abbaye de Saint-Anselme remplira
sa charge par intérim, mais devra
sans retard convoquer les abbés. Pour
que l'élection soit validé, les deux tiers
des votes séront nécessairés. Le pre
mier primat est désigné par S. S.
Léon XIII lui-même.
FEUILLETON DE L UNIVERS
DU 19 AOUT 1893
(23)
VICTOR HUGO
APRÈS 1852 0.
CHAPITRE XI
PARIS ET BORDEAUX
. IV-' "
Le 2 octobre 1870, Victor Hugo, après
avoir parlé aux Allemands, puis aux Fran
çais, s'adressait aux Parisiens^ Il leur, di
sait : « Paris se défendra victorieusement...
Résistance aujourd'hui, délivrance de
main... Nous ne sommes plus de chair,
'mais de pierre... -Face à l'ennemi I Nous
nous appelons tous France, patrie, mu
railles (1) ». Malgré cela,le 28 janvier 1871,
Paris capitula. Les élections & l'Assemblée
nationale eurent lieu le 8 février. Le dé
partement de la Seine avait 43 représen
tants à nommer. Victor Hugo fut élu le
second, par 213.686 voix (2); entre Louis
Blanc, qui arrivait le premier aveo 216.530
suffrages, et Gambetta, qui venait le troi
sième aveo 202.239.
(*) Reproduction interdite. '
(1) Depuis l'exil, p. 69.
(2) Et non 2t4, 169, comme il eut dit aux
pages 90 et 411 do volume Depuis l'exil. (Voir
au Journal officiel du 18 février 1871 les procèa-
' verbaux des élections du 8 février dans le dé
partement de la Seine.)
L'Assemblée se réunit à Bordeaux le
42 février, Victor Hugo y arriva le lende
main. Il devait y rester un mois et fut, pen
dant ce temps, l'hôte,d'un honorable négo
ciant, M. E. Portes, rue Saint-Maur, n® 13.
Malgré ses cheveux gris et sa barbe grise,
il avait encore des allures juvéniles, il por
tait un képi de garde national, un veston
de fantaisie très oourt, une chemise de
laine rouge. Il fut désigné par le sort pour
faire partie du onzième bureau auquel ap
partenait également M. Courcelle, le tré
sorier de l'œuvre des seoours aux Francs-
Comtois.Dès la première réunion dùÉureau,
M. Courcelle alla saluer le poète. Le Maître
était, en ce moment, debout, seul, dans
l'embrasure d'une fenêtre. Son collègue
déclina sa qualité de trésorier du comité
franc-comtois. Viotor Hugo aussitôt, d'un
mouvement très vif, avec beaucoup de cha
leur et de grâce, lui prit les deux mains
qu'il garda dans les siennes, et aveo cette
cantijène très prononcée qui lui était pro
pre : « Ah 1 o'est vous, dit-il, mon cher tré
sorier, que je suis aise de vous voir, de
faire votre connaissance 1... Y a-t-il long
temps que vous n'êtes allé à Besançon ?— »
« Oh 1 oui, longtemps, bien longtemps. D'a
bord, je ne suis pas de Besançon, mais de
VesouJ. Ensuite, j'étais, comme vous en
fermé dans Paris ; et, à l'heure qu'il est,
je ne sais pas encore si ma petite ville est
restée debout, si ma famille est vivante 1
J'ai reçu une dépêche moitié allemande,
moitié -française, m'apprenant que j'étais
nommé député et m'invitant à me ren
dre à Bordeaux. Je suis venu... mais
je ne sais rien, absolument rierwiu pays, et
je suis inquiet, mortellement inquiet 1 A
mon très grand regret, je ne puis rien vous
apprendre de Besançon.»— *Ah liant pis!
reprit Victor Hugo, tant pis ! vous m'auriez
dit si mon buste (3) était toujours dans ta
bibliothèque ! (4) »
Le onzième bureau était présidé par l'a
miral La Roncière Le Noury, qui avait
commandé en chef la division des marins
détachés dans lès forts de Paris. On ne se
réunissait guère sans que -Victor Hugo ne
parlât de sa conduite pendant le siège, du
violent désir qu'il avait eu, du commence
ment à la fin, de marcher & l'ennemi. Un
jour, il revint à son thème favori et, dési
gnant le président : — « Oui, costinua-t-il,
mon noble ami, mon vaillant ami l'amiral,
qui est là, vous dira que j'ai voulu partager
ses dangers.que je l'ai, à plusieurs reprises,
sollicité "pour le faire.»—N'y tenant plus,
l'amiral se tourna vers son voisin et, se
faisant de sa main un écran, lui dit & demi-
voix : — « Mais oe n'est pas vrai 1 ce n'est
pasvrail Je l'ai un jour invité â déjeuner dans
mon fort, et il n'a jamais o5é venir (5) ! »
Fallait-il signer la paix ou continuer la
guerre? Le jour où le onzième bureau eut
à se prononcer sur cette question, il parut
à ses membres que, si la signature de là
paix était le plus douloureux des sacrifices,
elle était en même temps le plus impérieux
des devoirs. Continuer la lutte, c'était aller
au-devant d'une défaite, non-seulement
certaine, msis immédiate. C'était creuser
plus profondément l'abîme où le pays était
tombé, c'était sacrifier à une folie d'une
heure, non seulement l'avenir, mais l'exis
tence même de la Franoe ! Viotor Hugo de-
(3) Ea 1842, David d'Angers, avec sa généro
sité habituelle, avait fait hommage à la ville
de Besançon, patrie du poète, de son buetn de
Victor Hugo, qui fat placé dans la bibliothèque
de la ville.
, (4) S. Courcelle, Souvenirs de l 'Assemblée na
tionale de 487 1 (inédit).
(5) S. Courcelle. . '
manda la parole. — « Oui, dit-il à ses col
lègues, vous avez raison de voter la paix.
Pour vous,députés des départements, 1 il n'y
a pas moyen d'agir autrement que vous ne
le faites, et je vous approuve... Mais moi,
député de Paris, je voterai la guerré. (6) »
La disoussion s'ouvrit , à l'Assemblée le
1" mars. Le rapport de la commission
chargée de l'examen du projet de loi relatif
aux préliminaires de paix signés ' à Ver
sailles, concluait à l'adoption (7), Victor
Hugo le combattit. Il parla pour la guerre
dans le présent et pour la paix dans l'ave
nir. Son discours fut avant tout une glori
fication du « grand peuple parisien », une
déification de Paris : « Paris, à l'heure
nu'il est, est cloué sur sa croix et saigne
'aux quatre membres ». Jamais peut-être le
poète n'avait à ce point prodigué les anti
thèses. En terminait, il montrait la France,
victorieuse à son tour, criant à l'Allema
gne : « Suis-je ton enjnemie ? Non ! je suis
ta sœur. Je t'ai tout repris et je te rends
tout..." Ma vengeance, o'est la fraternité I
Plus dè frontières ! Le Rhin à tous 1
Soyons la même république, soyons les
Etais-Unis dlEurope, soyons la liberté eu
ropéenne, soyons la paix universelle 1 Et
maintenant, serrons-nous la main, car nous
nous sommes rendus service l'une à l'autre, tu
m'as délivrée de mon empereur, je te déli
vre du tien (8). »
Ainsi, à ce moment terrible, quand la
France agonisait sous l'étreinte mortelle de
l'Allemagne, Viotor Hugo proclamait que
l'Allemagne avait rendu service à la France I
Ce qui éi&it vrai, o'est que l'Allemagne avait
rendu servioe à M, Victor Hugo.
(6) M. Sébastien Courcelle, Souvenirs inédits.
(7) Le rapporteur était un républicain,
M. Victor Lefranc.
{8j Depuis l'exil, p. 103.
L'effet de ce disoours fut déplorable.
Henri Rochefort, grand ami de l'auteur des
Châtiments, rédigeait alors le Mot d'Ordre.
Voici en quels termes oe journal appréoiait
la harangue du poète : « Quinet avait traité
la question au point de vue historiques t
géographique , Viotor Huge la traite au point
de vue poétique. De fort belles antithèses,
quelques expressions heureuses, rien *de
plus. Pas de fil oonducteur, pas de lien, au
cune vue d'ensemble... La fin du dis
cours d'Hugo, mal oomprise par la gauche,
a soulevé quelque tempête. C'est qu'aussi,
parler de République universelle et de fra
ternité avec les peuples allemands quand
tous les cœurs français ne doivents'ouvrir
qu'à un seul sentiment : la haine, devait
sembler quelque peu intempestif (9). »
Les conclusions de la commission furent
adoptées par 546 voix contre 107.
A l'ouverture de la séance du 13 février,
le président Grévy avait donné lecture
d'une lettre du général Garibaldi, sis démet
tant du mandat que lui avaient confié trois
départements, la. Sâine, la Cète-d'Or et les
Alpes-Maritimes. Le même jour, Garibaldi
donna sa démission de commandant de
l'armée des Vosges et annonça qu'il quittait
la Franoe. Le lendemain on apprenait qu'il
avait été élu. aussi à- Alger. Un rapport fut
fait à l'assemblée sur cette dernière élec
tion, dans la séance du 8 mars. Le rappor
teur, M. Vente, concluait à l'annulation,
puisque aussi bien en renonçant, le 13 fé
vrier, au mandat de député avant toute vé
rification de pouvoir, Garibaldi avait claire
ment manifesté la résolution de ne pas ac
cepter la qualité de citoyen français- et de
rester citoyen italien.
(9) Le Mot d'Ordre (rédacteur en .chef : Henri
Rochefort) numéro du lundi 6 mars 1871.
Victor Hugo demanda la parole. « Les
puissances européennes, dit-il, n'interve
naient pas ; eh bien, un* homme est inter
venu, et cet homme est une puissance. Cet
homme, messieurs, qu'avait il? son épée,
et oette épée avait déjà délivré un peuple,
et cette épée pouvait en sauver un autre. Il
l'a pensé ; il est venu, il a combattu... Je ne
yeux blesser personne dans celte assem*
blée, mais je dirai qa'il est le seul des gé
néraux qui ont lutté pour la France, lé seul
qui n'ait pas été vaincu. » Ces parole* sou
levèrent un tumulte indescriptible (10). Le
président invita l'orateur à s'expliquer; Vic-
(10) L'assemblée avait-elle tort de protester
contre un tal langage, de ne pas laisser dire,
pour la plus grande joie dss Allemands campés
sur notre sol, que tous les .généraux français
avaient été vaincus, t - tous, même d'Aurelles
de Paladines, le vainqueur de Coutmiers; Faid-
herbe, le vainqueur de Bipaume ; Chanzy,
qui, dans la série de ses glorieux combats sur
la Loire, avait si souvent lutté avec avantage
contra les armées du prince Frédéric Charges et
du duo de Merklembourg, à Marolles. à Mar-
chenoir, & Prigoy ? — Quant aux victoires de
Garibaldi, voir le Rapport fait au nom de la com
mission d'enquête sur les actes du gouvernement
de la Défense-nationale, par M. Perrot . membre
de l'Assemblée nationale; tome II, Expédition
de l'Est. Ea voici la conclusion : « Si le général
Garibaldi avait été un général français, nous
aurions été contraints de vous demander que ce
rapport et les pièces qui. le justifient, fussent
renvoyés par l'Assemblée au ministère de la
guerre, afin d'examiner si le général Garibaldi
ne devait pas être traduit devant un conseil de
guerre, pour y répondre de sa conduite, comme
ayant abandonné à l'ennemi, de propos délibéré
et sans combat, des positions qu'il avait reçu,
mission de défendre; et comme ayant par là'oc
casionné la perte d'une armée française et
amené un désastre militaire qui n'aura de com
parable que l'histoire des désastres de Sedan et
de Metz. »
ÉDITIO N QUOTID IENNE
PARIS ÉTRANGER
ktf départements . (union postale)
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Six mois .... . 21 » " 2650
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BUREAUX : Paris , 10, ru e de3 Saints-Pères
On s'abonne à Rome, place du Gesù, 8
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N* 9231 — édition quotidienne
Samedi 19 Août 1893
if«
ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNE
Dn. an . /
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L 'UNIVERS ne répocd pas dès manuscrits qîTi lai sont adressés
ANNONCES '
MM. LAGRANGE, CERF et C", 6, plaoe de la Bourse ; ■
«rafegag»
BULLETIN-DU JOUR
PARIS 18 AOUT 1893
L'aventure de M. Develle aurait dû
■ servir à M. Viette.son collègue.M. De
velle avait dit : « Il y a des journa
listes français payés par l'étranger ».
Et quand des explications lui ont été
demandées, il a juré qu'il n'avait ja
mais rien raconté de semblable. Et
voilà que M. Viette s'est écrié à Mont-
béliard, dans une réunion qu'il y te
nait samedi : « Je. connais les noms
de toutes les personnes compromises
dans l'affaire du Panama. » M. Yiette
n'a plus qu'une conduite à tenir : li
vrer ces noms. Il préférera déclarer
qu'il n'a pas tenu le propos que tant
de témoins ont entendu.
Un dernier mot! Réponseà une ca
lomnie ! Manœuvre indigne ! Protes
tation !Une réponse... ! Ces mots s'éta
lent sur tous les murs,-recouvrant les
premières affichés, moins violentes,
moins ponctuées de signes exclama-
tifs. Ce sont les dernières cartouches
électorales. Encore 24 heures, et pour
le plus grand nombre des circonscrip
tions, la bataille sera livrée. Multi
plions, si tard qu'il soit, les prières et
les efforts.
. Rien de baillant dans notre politique
intérieure. Le zèle des préfets en fa
veur des candidats officiels ne se ra
lentit pas, le préfet du Var que M. Du-
puy n'a pas osé déplacer, se distingue
entre tous. Mais son candidat, M. Glé-
menceau, est de plus en plus mena
cé. On l'accueille dans toutes les réu
nions, où il se dépense' avec une ex
traordinaire vigueur, par des aoh y es !
aoh yes ! qui ne présagent rien.de bon
pour l'ami de l'Angleterre.
Aucune nouvelle de Cornélius Herz,
mais sa femme, si l'on en croit un
journal du matin, est à Paris, où
elle est venue mystérieusement pour
être mise en rapport avec de gros
personnages, et son voyage à Pa
ris aurait provoqué le voyage que
M. le premier ministre Dupuy a fait
-hier.à Fontainebleau. Qu'y à-t-il de
vrai dans ce roman ?
Les troubles qui ont éclaté à Aiguesr
Mortes (Gard), ont été plus graves
que ne le faisaient prévoir les dépê
ches d'hier. Ouvriers français et ita
liens se sont battus. Il a fallu en
voyer des troupes de Nîmes et de Lu-
nel. Il y a eu dix morts et trente bles
sés. •
Il a fallu ramener sous escorte à la
gare où ils ont pris le train.pour Mar
seille, les ouvriers italiens qui res
taient là-bas et à qui on eût fait un
. ;mauvais parti. N'y aurait-il aucun
moyen de prévenir de si regrettables
et douloureux incidents? Ils éclatent
un beau jour, mais sont là résultante
d'une situation depuis longtemps con
nue et à laquelle personne "ne se
préoccupe de remédier. -
La Chambre belge a décidé hier
qu'elle voterait dans la session ac
tuelle la loi électorale, afin, qu'on
puisse commencer aussitôt la confec
tion des listes et que les élections
aient lieu à l'époque habituelle.
Dans les cercles gouvernementaux
italiens on déplore,et on a raison, que le
voyage du prince de Naples en Alsace-
Lorraine ait lieu au moment où l'Italie
veut solliciter de la France des con
cessions importantes en ce qui con
cerne le régime monétaire de l'Union
latine. Le plan d'être en bons rapports
militaires avec l'jBmpire d'Allemagne,
et financiers avec la République fran
çaise peut être très habile. Mais per
sonne en France Tie pourrait, sans
être à la fois dupe et coupable, aider
à sa réalisation.
La Hongrie est dévastée par les
inondations. Douze villages sont subr
mergés. Trente personnes ont péri.
Une dépêche de Bilbao annonce
des troubles à Guernica en faveur des
privilèges des provinces basques. La
gendarmerie a rétabli l'ordre. Pourquoi
supprittier cés - privilèges ? Ne peut-
on faire de l'unité sans recourir à une
excessive centralisation ? Décentrali
sons ! c'est le cri en Espagne, et c'est
en France aussi le. vœu des esprits les
meilleurs. •
Des incidents se sont produits en
Grèce entre les officiers de l'escadre
anglaise et un aubergiste, «t entre
matelots des deux nations. Une en
quête est ouverte. Ces incidents et ces
riSes montrent en quelle faveur est
partout tenue l'Angleterre !
La Russie déclare prendre note dé
la déclaration de Ménélik exprimant
le désir de ne pas prolonger le traité
iqui met l'Abyssinie sous le protecto
rat italien. La nouvelle a dû être
pénible au gouvernement du roi Hum-
bert.
CONSULTATION
On nous pose cette question :
En divers endroits, le candidat con
servateur, qui est en m&Dûe temps
catholique, sans se déclarer .réfrac-
taire. s'abstient de. parti pris d'adhérer
positivement aux instructions ponti
ficales." FauMl demander à ce can
didat de s'expliquer? t
Réponse :
Le moment de demander des x expli
cations est passé ; il pourra revenir
avec les ballottages, mais nous n'y
sommes pas encore. De plus, si le can
didat trop réservé est vraiment catho
lique et que l'on puisse compter sur
son vote, il n'y aurait lieu de tenter
quèlque chose qu'au cas où son con
current serait catholique aussi. Alors,
il faudrait poser les questions néces
saires, puis aller au plus franc et au
plus complet des deux.
Nous l'avons déjà dit maintes fois :
notre candidat est le catholique avant
tout, celui qui, homme d'obéissance,
de droiture et de bon sens, accepte la
république avec la résolution d'en ré
former les lois sectaires, et qui est
loyal dans son acceptation comme
résolu dans son opposition.
Après lui et faute de lui, nous soute
nons, selon la situation électorale, soit
le candidat qui, venant de la Droite,
n'ose pas se détacher carrément des
réfractaires, soit celui qui, venant de
la Gauche , n'accepte formellement
qu'une partie de nos revendications.
Et si, grâce à ce minimum de droite
et à ce minimum de gauche, on peut,
dès la prochaine législature, entamer
les lois scolaires et militaire, on aura
fait une bonne besogne.
Ceux qui à cette tactique ouverte,
loyale, obligatoire, opposent la poli
tique du maximum, cherchent, non le
succès de leurs idées, mais l'échec des
idées contraires, lesquelles s'appuient
sur l'Encyclique aux catholiques de
France. Ils ne veulent pas que le Pape
ait vu juste et ait eu raison. Mieux
vaut pour eux le maintien du statu
quo, mieux vaut même son aggrava- J
tion qu'un apaisement qui contrarie- j
rait leurs prévisions et condamnerait
leurs passions. Léon XIII ne s'y est
pas»trompé : on l'a vu par sa lettre , 1
au cardinal Lecot.
E ugène V euillot.
UN BON MOUVEMENT
Le scrutin va s'ouvrir.
Parmi les catholiques, la très ■
grande majorité certainement, sans .
espérer une éclatante victoire, aime à '
penser que des urnes sortira une
Chambre moins mauvaise que les
précédentes. Beaucoup des membres
du centre qui reviendront, paraissent 1
vouloir suivre une politique un peu
plus modérée. Il y aura un élément
nouveau, un parti conservateur ins- t
tallé dans la République avec l'agré
ment des électeurs, et constituant un
groupe sur léquel aussi pourra s'ap
puyer un ministère désireux d'ouvrir
une ère de pacification. Nous obtien
drons sans doute quelques adoucisse
ments aux lois persécutrices, en at
tendant de parvenir au but que nous
ne nous lasserons jamais de poursui
vre : la. réforme complète de ces lois.
Voilà ce que souhaite la très grande
majorité des' catholiques, voilà £e
qu'elle espère comme résultat du
scrutin de dimanche.
Il est une petite minorité qui ne se
trouve pas dans les mêmes disposi
tions. Ces catholiques n'ont point
voulu obéir au Pape; eux seuls détien
nent la sagesse et Léon XIII, à leurs
yeux, s'est trompé, du jour où il a été
d'un autre avis que le leur. Ils pen
sent cela tout simplement, sans la
moindre hésitation, — ils ne se dou
tent pas que leur outrecuidance est
parfaitement ridicule. Ce que tous les
autres catholiques espèrent,ceux-ci,plus
ou moins ouvertement, le redoutent.
Ils verraient avec satisfaction .le suf
frage universel renvoyer au Palais-
Bourbon' une Chambr e aussi mauvaise*
pire même que la précédente. Ils
éprouveraient une certaine joie, qu'ils
rie pourraient contenir, à penser que
le mal va continuer, va s'8ggraver.
L'idée qu'ils y sont pour quelque chose,
ne les troublerait pas le moins du
monde. Ls penseraient que cela leur
donne raison, et seraient tout surpris
de voir la masse des catholiques, lais
sant, oubliant derrière eux la petite
église, s'obstiner, malgré cet échec
d'un jour, à marcher en avant, vers
le salut, dans les voies que le Saint-
Père nous prescrit de prendre.
Hélas, oui, quelques catholiques
sont dans ce triste état d'esprit !
Nous le demandons aux hésitants/
à ceux des nôtres qui ont été influen
cés, ébranlés par de fallacieux conseils
et. des arguments pernicieux :
Quelle est, en conscience, la bonne
situation pour un catholique?
Obéit-ikà des sentiments qui con
viennent à un vrai fils de l'Eglise, ce
lui qui désire, plus ou moins formelle
ment, se l'avouant ou. ne se l'avouant
pas, que le mal continue, qu'il s'ag
grave^ pour que la politique du Pape
subisse un échec, --parce que cette
politique-là n'est pas celle qu'il pré
fère, celle qu'il eût voulu voir adop*
ter'?" -■■■■■■
Qui s'est mis dans le cas d'appren
dre sans pouvoir s'attrister, le • succès
des sectaires opportunistes et radi
caux, s'est mis dans un mauvais cas.
Nous supplions lés boudeurs d'y
réfléchir ; nous les supplions d'avoir
un bon mouvement! Qu'ils n'écoutent
pas les excitations perfides des pessi
mistes rageurs et hargneux; qu'ils ne
sé renferment point dans une absten
tion maussade, sous. prétexte qu'ils
n'ont pas devant eux un candidat qui
leur convienne, un candidat hostile à
toute République et réclamant le maxi
mum. Qu'ils votent'et fassent voter,
à défaut d'un meilleur, pour le mo
déré ne promettant que d'insurfi-
sàntes réparations, pour le constitu
tionnel aii programme trop modeste.
Qu'ils songent à leur responsabilité,
qu'ils n'écoutent point l'esprit de
parti* qu'ils écoutent la voix qu'ils ne
peuvent faire taire au fond de leur
conscience!
P ierre V euiixot.
L 'Osservatore Romano publie le texte
►latin de la lettre adressée à S. Em. le
cardinal Lecot par le Saint-Père.
En insérant ce document, l'organe
du Saint-Siège présente des observa
tions qui doivent être reproduites:
« Le bien de l'Eglise et le bien de la
France ». Voilà les deux nobles desseins
au succès desquels le Saint-Père ne peut
rester indifférent 6ans manquer à la su
blime mission qu'il exerce sur la terre et
dont II doit se préoccuper avec toute la
tendresse d'un père, la sollioitude du ■ Pas
teur, l'autorité qui appartient au Dooteur
suprême de l'Eglise.
Que si pour protéger et accroître oes
dëux biens souverains, le Pape a oru de
voir, parce document nouveau et très im
portant, fortifier les avertissements anté
rieurs, oe n'est pas, comme certains l'insi
nuent avec malice et impertinence, parce
qu'il songe & s'immiscer dans la lutte de
demain et pour jouer en France au « Grand
électeur », mais parce que, contre ses pa
roles et contre ses avertissements paternels
se sont élevées dés voix téméraires qui ont
oru pouvoir enseigner au Vicaire de Jésus-
Christ, au Chef de cette Eglise dont la
France est la Ftlle aînée et cherie, quel est
l'intérêt de celle-ci et le bien véritable des
catholiques et de l'Eglise; parce qu'ils sont,
eux, des juges plus compétents, des amis
plus tendres, plus sincères et plus| éolairés
que Lui...
Et, eh fait, la lettre ponti&oale, dit très
olairemest qu'elle s oe but et aucun autre ;
elle montre qu'elle eât dans l'esprit de son
auteur auguste ce qu'elle est en réalité :
une réponse énergique et digne & des ob
jections irrévérencieuses, à oertains doutes
déraisonnables, à oertaines réserves injus
tifiées et coupables.
Si ces doutes et ces objections n'avaient
pas été présentés dans des discours et
dans des articles inopportuns, la publica
tion d'une telle réponse s'eût pas été né-
Oessaire.
Telle est certainement l'impression que
devra produire sur tous oe nouveau et très
important document ; lequel est aussi une
splendide confirmation de cet idéal sublime
qui, dans l'examen des intérêts vitaux de là
France, a constamment inspiré et inspirera
toujours l'intelligence éolairée, la paternelle
et très tendre sollioitude du Vicaire de Jé
sus-Christ.
BRÈVE RÉPONSE
Nous recevons deux lettres, l'une
anonyme, l'autre signée d'un prêtre
où'« dans l'intérêt de la cause conser
vatrice et religieuse » on nous de
mande avec quelque vivacité, bien
qu'en termes affectueux, de ne plus
attaquer M. de Cassagnac-
L'Univers n'a pas attaqué M. de
Cassagnac. Lassé de le voir prendre
sans cesse à partie et,comme toujours,
brutalement, des catholiques soumis
aux prescriptions du Pape, il a signalé
son attitude. C'était un devoir. Pour
un journal catholique, ce n'est pas
assez d'obéir ; il doit défendre les ins
tructions qu'il suit et aussi ceux qui
les suivent comme lui. Autrement son
obéissance est louche. On peut dire de
l'obéissancè ce que le poète a dit de la
foi: quand elle est sincère, elle agit.
Cette défense contre les attaques
ncessantes de M. de Cassagnac a
d'ailleurs été très limitée; elle n'a
guère dépassé la mesure d'une protes
tation.
. L'Univers a-t-il risqué, en agissant
ainsi, de nuire à la cause conserva
trice? Non, certes. D'abord, qu'est-ce
que la cause conservatrice et reli
gieuse en dehors de l'action catho
lique, telle que l'Eglise l'entend? Puis,
n'est-il pas mauvais serviteur de cette
cause, celui ; que l'on voit se ruer sur
tout conservateur qui, entre les ensei
gnements de Léon XIII et ceux de
M. de Cassagnac, préfère ceux de
Léon XIII?
La protestation que nous avons fait
entendre et que d'autres journaux ca.-
tholiquesont fait entendre aussi, était
nécessaire. Il fallait en outre rappeler
que,de deux candidats se déclarant tous
deux catholiques, nous devons préfé
rer celui qui accepte complètement ou
le plus largement les directions pon
tificales. C'est celui-là qui donne le
bon exemple . comprend le mieux la
situation et fera la meilleure besogne.
Ainsi, entre M. Laudet et M. de Cas
sagnac, il ne s'agit pas de savoir lequel
jusqu'ici a été le plus en vue, mais le
quel marche et marchera dans la voie
où il faut marcher.
Diverses choses seraient à dire là-
dessus, et il y aurait, croyons-nous,
quelque utilité à les dire. Cependant,
puisqu'on nous demande d'enrayer la
polémique, nous enrayons. -
E. V.
Dans l'un de ses derniers numéros,
la Gazette de France a inséré une
lettre de M. Gibert, rédacteur de
l' Avant-garde de l'Ouest , accusant les
trois curés de la ville d'Avranches
d'avoir assisté à la distribution des
prix de l'école communale des filles.
M. Gibert, prend surtout à partie l'un
d'eux, etle montre sous un jour très
défavorable < : à l'en croire, ce curé
serait coupable d'une sorte d'apostasie,
terme fatal d'ailleurs pour ceux qui se
placent, à.la voix de Léon XIII, sur le
terrain catholique. Il n'y a qu'un
malheur pour M. Gibert, pour la
Gazette et pour son grand titre, Le
chemin parcouru : c'est que l'accusé
n'a pas assisté à la distribution sus
dite : il ne peut donc être cité comme
une preuve des prétendues défâil-
knces morales produites par les pa
roles du Souverain Pontife. Pauvre
Gazette 1
. . _ ; -,
Parmi les professions de foi des
libres-penseurs qui veulent demeur
rer fidèles à la liberté, celle de M. de
Labruyère mérite d'être mentionnée.
Il est candidat « révisionniste répu
blicain » dans le quartier de la Made
leine. Il s'explique nettement sur la
question religieuse. Partisan dè la sé
paration de l'Eglise et de l'Etat, M. de
Labruyère reconnaît que l'abrogation
du Concordat, « contrat bilatéral »,
impose un ensemble de mesures d'é
quité. «Cetteréforme,dit-il, aboutirait
« à une confiscation nouvelle si elle
« n'était précédée d'une restitution
« des biens que l'Etat s'est annexés
« pendant la Révolution ». Il recon
naît encore que le Concordat est de
venu « un instrument d'oppression
« entre les mains de sectaires imbé-
« ciles ou scélérats ». Il veut* en at
tendant, l'application loyale du traité
de pacification.
Quand la grande affaire de la loi sur
les associations sera enfih engagée,.
M. de Labruyère réclamera la liberté
« pour les associations catholiques
« comme pour les syndicats ouvriers,
« comme pour les corporations ; « li
berté « pour l'es diocèses, pour les pa-
« roisses, pourlesordresreligieux.de
« s'organiser, et de se développer,
« sauf limitation du chiffre des revenus
« dans des bornes raisonnables; cons-
«, titution d'un tribunal arbitral pour
« fixer la restitution due à l'Eglise par
« 1,'Etat. » En fait de mainmorte, M. de
Labruyère se préoccupe surtout de
celle qui est représentée par « les com
pagnies d'assurances et les hauts ban- ^
quiers » qui accaparent la fortune
mobilière et sont « un dahger autre- ;
« ment réel que celui des monastères
« et des couvents. »
« Les opportunistes seuls pâtiraient
d'une séparation ainsi entendue et
pratiquée », dit M. de Labruyère. Cer
tainement, ils verront avec colère
cette profession de foi qui relève, de
vant la foule longtemps abusée, la
notion de la justice. 8
LA NOUVELLE CONSTITUTION DES BÊNÉDICMS
Le Moniteur de Rome qui nous arrive i
publie le texte latin de la nouvelle consti
tution des Bénédictins. Voioi les disposi
tions essentielles indiquées par ce docu
ment :
Le Souverain Pontife rappelle
quelle fut toujours sa sollicitude
envers l'ordre ae Saint-Benoit, l'un
des principaux appuis et des plus
beaux ornements de l'Eglise. Il a
donné maintes fois des'preuves de cet
intérêt. Naguère S. E. le cardinal Dus-
met est venu à Rome pour poserais
première pierre du monastère de Saint-
Anselme sur le Mont-Aventin, et pré
sider une assémblëé d'abbés et de dé
légués des divers monastères de Bé
nédictins. Le but de cette assemblée
était de traiter en commun les ques
tions intéressant l'ordre tout entier,
et en particulier de constituer une as
sociation fraternelle qui réunit toutes
les communautés par un lien de
charité mutuelle.
Les délégués se réunirent à plu
sieurs reprises dans, -le palais de
Saint-Caliste, et convinrent de di
verses propositions dont S. E. le car
dinal Dusmet rendit compte à Sa Sain- .
teté le 2 mai de cette année.
Léon XIII ayant pris l'avis de plu
sieurs cardinaux, a résolu de confir
mer ces décisions. En conséquence,
toutes les congrégations de bénédic
tins que l'on appelle noires, consti
tuent une association fraternelle, qui
ne subordonne aucune d'elles à une
autre. Pour lui donner plus d'unité et
sans rien changer, à l'ordre de cho
ses actuel, un primat de toutes .les
congrégations sera élu, et s'oqcupdra
à Rome des affaires concernant l'in
térêt commun de l'ordre.
Il pourra être choisi parmi toutes
les congrégations, sans distinction de
nation ou de monastère ; il sera en
mêtae te.mps abbé de l'abbaye de
Saint-Anselme de Rome, et y rési
dera. Cette abbaye ne sera pas consi
dérée comme appartenant à l'une des
congrégations, mais sera peuplée de
religieux pris parmi chacune d'elles.
Le primat exercera cette charge
pendant douze an»; au bout de ce
temps, tous les abbés se réuniront à
Rome afin de nommér son successeur,
ou de le réélire lui-même pour une
nouvelle période de douze ans. S'il
meurt, ou si j pour une autre raison,son
siège se trouve vacant, Je recteur de
l'abbaye de Saint-Anselme remplira
sa charge par intérim, mais devra
sans retard convoquer les abbés. Pour
que l'élection soit validé, les deux tiers
des votes séront nécessairés. Le pre
mier primat est désigné par S. S.
Léon XIII lui-même.
FEUILLETON DE L UNIVERS
DU 19 AOUT 1893
(23)
VICTOR HUGO
APRÈS 1852 0.
CHAPITRE XI
PARIS ET BORDEAUX
. IV-' "
Le 2 octobre 1870, Victor Hugo, après
avoir parlé aux Allemands, puis aux Fran
çais, s'adressait aux Parisiens^ Il leur, di
sait : « Paris se défendra victorieusement...
Résistance aujourd'hui, délivrance de
main... Nous ne sommes plus de chair,
'mais de pierre... -Face à l'ennemi I Nous
nous appelons tous France, patrie, mu
railles (1) ». Malgré cela,le 28 janvier 1871,
Paris capitula. Les élections & l'Assemblée
nationale eurent lieu le 8 février. Le dé
partement de la Seine avait 43 représen
tants à nommer. Victor Hugo fut élu le
second, par 213.686 voix (2); entre Louis
Blanc, qui arrivait le premier aveo 216.530
suffrages, et Gambetta, qui venait le troi
sième aveo 202.239.
(*) Reproduction interdite. '
(1) Depuis l'exil, p. 69.
(2) Et non 2t4, 169, comme il eut dit aux
pages 90 et 411 do volume Depuis l'exil. (Voir
au Journal officiel du 18 février 1871 les procèa-
' verbaux des élections du 8 février dans le dé
partement de la Seine.)
L'Assemblée se réunit à Bordeaux le
42 février, Victor Hugo y arriva le lende
main. Il devait y rester un mois et fut, pen
dant ce temps, l'hôte,d'un honorable négo
ciant, M. E. Portes, rue Saint-Maur, n® 13.
Malgré ses cheveux gris et sa barbe grise,
il avait encore des allures juvéniles, il por
tait un képi de garde national, un veston
de fantaisie très oourt, une chemise de
laine rouge. Il fut désigné par le sort pour
faire partie du onzième bureau auquel ap
partenait également M. Courcelle, le tré
sorier de l'œuvre des seoours aux Francs-
Comtois.Dès la première réunion dùÉureau,
M. Courcelle alla saluer le poète. Le Maître
était, en ce moment, debout, seul, dans
l'embrasure d'une fenêtre. Son collègue
déclina sa qualité de trésorier du comité
franc-comtois. Viotor Hugo aussitôt, d'un
mouvement très vif, avec beaucoup de cha
leur et de grâce, lui prit les deux mains
qu'il garda dans les siennes, et aveo cette
cantijène très prononcée qui lui était pro
pre : « Ah 1 o'est vous, dit-il, mon cher tré
sorier, que je suis aise de vous voir, de
faire votre connaissance 1... Y a-t-il long
temps que vous n'êtes allé à Besançon ?— »
« Oh 1 oui, longtemps, bien longtemps. D'a
bord, je ne suis pas de Besançon, mais de
VesouJ. Ensuite, j'étais, comme vous en
fermé dans Paris ; et, à l'heure qu'il est,
je ne sais pas encore si ma petite ville est
restée debout, si ma famille est vivante 1
J'ai reçu une dépêche moitié allemande,
moitié -française, m'apprenant que j'étais
nommé député et m'invitant à me ren
dre à Bordeaux. Je suis venu... mais
je ne sais rien, absolument rierwiu pays, et
je suis inquiet, mortellement inquiet 1 A
mon très grand regret, je ne puis rien vous
apprendre de Besançon.»— *Ah liant pis!
reprit Victor Hugo, tant pis ! vous m'auriez
dit si mon buste (3) était toujours dans ta
bibliothèque ! (4) »
Le onzième bureau était présidé par l'a
miral La Roncière Le Noury, qui avait
commandé en chef la division des marins
détachés dans lès forts de Paris. On ne se
réunissait guère sans que -Victor Hugo ne
parlât de sa conduite pendant le siège, du
violent désir qu'il avait eu, du commence
ment à la fin, de marcher & l'ennemi. Un
jour, il revint à son thème favori et, dési
gnant le président : — « Oui, costinua-t-il,
mon noble ami, mon vaillant ami l'amiral,
qui est là, vous dira que j'ai voulu partager
ses dangers.que je l'ai, à plusieurs reprises,
sollicité "pour le faire.»—N'y tenant plus,
l'amiral se tourna vers son voisin et, se
faisant de sa main un écran, lui dit & demi-
voix : — « Mais oe n'est pas vrai 1 ce n'est
pasvrail Je l'ai un jour invité â déjeuner dans
mon fort, et il n'a jamais o5é venir (5) ! »
Fallait-il signer la paix ou continuer la
guerre? Le jour où le onzième bureau eut
à se prononcer sur cette question, il parut
à ses membres que, si la signature de là
paix était le plus douloureux des sacrifices,
elle était en même temps le plus impérieux
des devoirs. Continuer la lutte, c'était aller
au-devant d'une défaite, non-seulement
certaine, msis immédiate. C'était creuser
plus profondément l'abîme où le pays était
tombé, c'était sacrifier à une folie d'une
heure, non seulement l'avenir, mais l'exis
tence même de la Franoe ! Viotor Hugo de-
(3) Ea 1842, David d'Angers, avec sa généro
sité habituelle, avait fait hommage à la ville
de Besançon, patrie du poète, de son buetn de
Victor Hugo, qui fat placé dans la bibliothèque
de la ville.
, (4) S. Courcelle, Souvenirs de l 'Assemblée na
tionale de 487 1 (inédit).
(5) S. Courcelle. . '
manda la parole. — « Oui, dit-il à ses col
lègues, vous avez raison de voter la paix.
Pour vous,députés des départements, 1 il n'y
a pas moyen d'agir autrement que vous ne
le faites, et je vous approuve... Mais moi,
député de Paris, je voterai la guerré. (6) »
La disoussion s'ouvrit , à l'Assemblée le
1" mars. Le rapport de la commission
chargée de l'examen du projet de loi relatif
aux préliminaires de paix signés ' à Ver
sailles, concluait à l'adoption (7), Victor
Hugo le combattit. Il parla pour la guerre
dans le présent et pour la paix dans l'ave
nir. Son discours fut avant tout une glori
fication du « grand peuple parisien », une
déification de Paris : « Paris, à l'heure
nu'il est, est cloué sur sa croix et saigne
'aux quatre membres ». Jamais peut-être le
poète n'avait à ce point prodigué les anti
thèses. En terminait, il montrait la France,
victorieuse à son tour, criant à l'Allema
gne : « Suis-je ton enjnemie ? Non ! je suis
ta sœur. Je t'ai tout repris et je te rends
tout..." Ma vengeance, o'est la fraternité I
Plus dè frontières ! Le Rhin à tous 1
Soyons la même république, soyons les
Etais-Unis dlEurope, soyons la liberté eu
ropéenne, soyons la paix universelle 1 Et
maintenant, serrons-nous la main, car nous
nous sommes rendus service l'une à l'autre, tu
m'as délivrée de mon empereur, je te déli
vre du tien (8). »
Ainsi, à ce moment terrible, quand la
France agonisait sous l'étreinte mortelle de
l'Allemagne, Viotor Hugo proclamait que
l'Allemagne avait rendu service à la France I
Ce qui éi&it vrai, o'est que l'Allemagne avait
rendu servioe à M, Victor Hugo.
(6) M. Sébastien Courcelle, Souvenirs inédits.
(7) Le rapporteur était un républicain,
M. Victor Lefranc.
{8j Depuis l'exil, p. 103.
L'effet de ce disoours fut déplorable.
Henri Rochefort, grand ami de l'auteur des
Châtiments, rédigeait alors le Mot d'Ordre.
Voici en quels termes oe journal appréoiait
la harangue du poète : « Quinet avait traité
la question au point de vue historiques t
géographique , Viotor Huge la traite au point
de vue poétique. De fort belles antithèses,
quelques expressions heureuses, rien *de
plus. Pas de fil oonducteur, pas de lien, au
cune vue d'ensemble... La fin du dis
cours d'Hugo, mal oomprise par la gauche,
a soulevé quelque tempête. C'est qu'aussi,
parler de République universelle et de fra
ternité avec les peuples allemands quand
tous les cœurs français ne doivents'ouvrir
qu'à un seul sentiment : la haine, devait
sembler quelque peu intempestif (9). »
Les conclusions de la commission furent
adoptées par 546 voix contre 107.
A l'ouverture de la séance du 13 février,
le président Grévy avait donné lecture
d'une lettre du général Garibaldi, sis démet
tant du mandat que lui avaient confié trois
départements, la. Sâine, la Cète-d'Or et les
Alpes-Maritimes. Le même jour, Garibaldi
donna sa démission de commandant de
l'armée des Vosges et annonça qu'il quittait
la Franoe. Le lendemain on apprenait qu'il
avait été élu. aussi à- Alger. Un rapport fut
fait à l'assemblée sur cette dernière élec
tion, dans la séance du 8 mars. Le rappor
teur, M. Vente, concluait à l'annulation,
puisque aussi bien en renonçant, le 13 fé
vrier, au mandat de député avant toute vé
rification de pouvoir, Garibaldi avait claire
ment manifesté la résolution de ne pas ac
cepter la qualité de citoyen français- et de
rester citoyen italien.
(9) Le Mot d'Ordre (rédacteur en .chef : Henri
Rochefort) numéro du lundi 6 mars 1871.
Victor Hugo demanda la parole. « Les
puissances européennes, dit-il, n'interve
naient pas ; eh bien, un* homme est inter
venu, et cet homme est une puissance. Cet
homme, messieurs, qu'avait il? son épée,
et oette épée avait déjà délivré un peuple,
et cette épée pouvait en sauver un autre. Il
l'a pensé ; il est venu, il a combattu... Je ne
yeux blesser personne dans celte assem*
blée, mais je dirai qa'il est le seul des gé
néraux qui ont lutté pour la France, lé seul
qui n'ait pas été vaincu. » Ces parole* sou
levèrent un tumulte indescriptible (10). Le
président invita l'orateur à s'expliquer; Vic-
(10) L'assemblée avait-elle tort de protester
contre un tal langage, de ne pas laisser dire,
pour la plus grande joie dss Allemands campés
sur notre sol, que tous les .généraux français
avaient été vaincus, t - tous, même d'Aurelles
de Paladines, le vainqueur de Coutmiers; Faid-
herbe, le vainqueur de Bipaume ; Chanzy,
qui, dans la série de ses glorieux combats sur
la Loire, avait si souvent lutté avec avantage
contra les armées du prince Frédéric Charges et
du duo de Merklembourg, à Marolles. à Mar-
chenoir, & Prigoy ? — Quant aux victoires de
Garibaldi, voir le Rapport fait au nom de la com
mission d'enquête sur les actes du gouvernement
de la Défense-nationale, par M. Perrot . membre
de l'Assemblée nationale; tome II, Expédition
de l'Est. Ea voici la conclusion : « Si le général
Garibaldi avait été un général français, nous
aurions été contraints de vous demander que ce
rapport et les pièces qui. le justifient, fussent
renvoyés par l'Assemblée au ministère de la
guerre, afin d'examiner si le général Garibaldi
ne devait pas être traduit devant un conseil de
guerre, pour y répondre de sa conduite, comme
ayant abandonné à l'ennemi, de propos délibéré
et sans combat, des positions qu'il avait reçu,
mission de défendre; et comme ayant par là'oc
casionné la perte d'une armée française et
amené un désastre militaire qui n'aura de com
parable que l'histoire des désastres de Sedan et
de Metz. »
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