Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1892-10-01
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 70622 Nombre total de vues : 70622
Description : 01 octobre 1892 01 octobre 1892
Description : 1892/10/01 (Numéro 8918). 1892/10/01 (Numéro 8918).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7078398
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Samedi 1 er Octobre 1892
N* 8918. —• Edition quotidienne
———IPyiBIIBWIHiWWHIII
Samedi 1 er Octobre 1892 s
Dn an 1 .
« Six mois
ÉDITIO N QUOTID IENNE
PARIS .ÉTRANGER
1T DÉPAUTBMBMTi {ONIOH POSTAL»)
. 55 » €9 »
. 28 50 84 ■
. 4 5 » 18 il
Trois mois. .
2 s 6S abonnements partent des 1» et 16 de chaque moif
UN NUMÉRO i ......... 18 cent.
ujm JNumuttu j uépartéménta . . . 20 —
BUREAUX ; Paris, 10, rue des Saints-Père®
Onm'sbonne-à Rome, place du Gesù, 8
ÉDITION SEMI-QU©52®ÊSNNÈ
On 83 ...
Six mois. .
Trois mois.
paris.
>T DÉPARTEMJSNÏi
. i 80 »
..16 #
. . 8 50
ÉTRANGER
(vmON PQSTAXÏl)
33 « .
19 »
10 »
tes abonnements parte nt des 1 «» et 16 de chaque moM
l'BSÎYEES M répond pas des manuscrits qui loi sont idMSSft ■
ANNONCES
8SM. LAGRANGE, .CERF et C'°, 6, place'de la Bourse
FRANCE
PARIS, 30 SEPTEMBRE 1892
II y a une question Liebknecht, au
sujet de laquelle s'échangent les dé
mentis. Le Figaro maintient que l'agi
tateur allemand a été, sinon expulsé,
au moins invité à s'en aller, et que la
police a veillé paternellement sur son
départ; les journaux officieux démen
tent toute intervention gouvernemen
tale^ l'intéressé fait de même, si nous
en croyons une dépêche de Mulhouse.
Il reste toutefois que le socialiste alle
mand n'a pas présidé la réunion an
noncée à Lyon. Pourquoi?
Dans la circonstance, il nous semble
que les socialistes français se sont
laissé jouer par leur ami Liebknecht.
On a affiché très opportunément à Mar
seille un discours du dit Liebknecht
très peu agréable pour des oreilles
françaises, et cet affichage a pu con
tribuer à le faire partir. Ses déclara
tions de Marseille ne méritent pas
grande confiance, d'autant que, dès
qu'il a été sorti de France, il a tenu
de nouveau un langage qu'aucun
Français iie pourrait accepter, encore
moins applaudir. ' -
La leçon servira-t-elle' à nos socia
listes ? Cesseront-ils de se ; laisser pren
dre aux belles paroles des Allemands,
comme des Anglais et,des Italiens?
Nouvel incident à Carmaux : .deux
escadrons de dragons y étaient en
voyés, soit par précaution pour renfort
cer les troupes, soit pour relever les
soldats qui y étaient déjà. Là-dessus le
citoyen Baudin a signalé au préfet
que c'était une provocation, .et le pré
fet, avec une complaisance peu méri
toire, a télégraphié que les dragons no
viendraient pas. On voudrait exciter,
les grévistes en leur donnant une idée
exagérée de leur force, qu'on ne pour
rait faire mieux. Du reste, le préfet
du Tarn n'a cessé de se montrer au-
dessous de sa tâche, reculant dès
qu'on lui montre les dents. :
On annonce pour aujourd'hui ïsl ré
ponse du conseil d'administrations des
mines de Carmaux aux propositions
d'arbitrage.
Le nouveau lord-maire de Londres
a été installé ; c'est un catholique. Des
sectaires >se sont bien permis de lui
poser quelques questions d'une con
venance plus que douteuse ; ils n'ont
pas osé s'opposer à son installation.
Après avoir accepté un lord-maire
jiiif, qui devait finir piteusement de
vant la justice, cela aurait été raide.
On trouvera plus loin le texte, que
nous transmet- -le télégraphe, d'un
manifeste que le parti nationaliste ir
landais adresse à ses compatriotes.
La présence et les déclarations du
socialiste allemand Liebknecht au
congrès de Marseille ont soulevé quel :
que émotion. Nous ?ie voulons pas ici
rechercher si, oui ou non, Liebknecht
a reçu du .gouvernement l'ordre ou
l'avis de repasser la froqtière aii plus!
-yite. Quelles ont été au juste Mar
seille les déclarations du député alle
mand leur caractère ou leur portée
méritent-ils le bruit qu'on en a fait,"
voi.'à. les points qu'il nous semble in-
t£rpss■Liebknecht, député au Reischtag,
un des nlutf considérables, sinon le
pemilr pamli le» chefs du grand
parti socialiste allemand, occupe une
situation et jouit d'un crédit qui don-'
nent évidemment de l'importance à
ses déclarations. Son. avis n'est pas ce
lui d'un homme, c'est l'opinion d'une
masse d'hommes, énorme et très puis
sante. ' *
Le député du Reichstag allemand-
est venu représenter les socialistes de
l'empire au congrès national du parti
ouvrier français. Depuis quelque
temps nos socialistes reprochaient à
Liebknecht de faire de nombreux ac
crocs aux grandes théories internatio
nalistes. Le citoyen Protot, ancien
membre de la Commune, avait même
écrit une violente brochure pour
établir que Liebknecht et son ami
Bebel n'étaient au fond que des chau
vins allemands. Liebknecht mit à
profit son passage en France pour
essayer de répondre à ces accusar
tions; il prononça donc en faveur du
socialisme international un discours
que nous avons reproduit : partageant
le monde entier en deux nations seu-
lémént, les bourgeois et les prolétai
res, l'orateur allemand supprimait
d'ùh coup et' frontières et patries. 11'
ajqutait même ce paragraphe ;
Entre vous Français, et nous Allemands,
il y a un large fleuve de sang. Nous en
sommes innocents, de oe sang : ce sont
nos ennemis à nous qui l'ont versé, etoe
fleuve de sang ne forme pas une frontière
de'haine pour nous. Nous sommes des
frères. Nous avons protesté ooiitre la guerre
fratricide de 1870, comme^ vous avez, pro
testé. vous-mêmes, ,et .notre attitude yis-£-
VÎ3. delaguerre n'a jamais changé. ,
Le lendemain, directement interro
gé sur la question d'Alsace-Lorraine,
Liebknecht fit la déclaration suivante :
; Faùesrnous la République démocratique
èt sociale,laissez-nous faire notre Républi
que démocratique et sociale, et la question
d'Alskce-Lorrairié sèra 'vidée. La guerre*
n'est pas une solution, car elle ne fait pas
des vainqueurs, mais seulement des vain
cus. Supposez que vous nous repreniez
l'Âlsace^Lorraine ; dix ans plus tard, la ba
taille s'engagera de nouveau et tout sera
remis en question. D'ailleurs, la protesta
tion qui fut faite en 1870-71 par Bebel et
par; moi, tous nos camarades, socialistes 1
du.Reichstag et nous sommes prêts à la
reoommencer. Je le répète, le triomphe du
socialisme en France et en Allemàgne ré
soudra seul cette question.
Les socialistes de Marseille accueil
lirent ces paroles par des acclama
tions répétées. Liebknecht fut le héros
du congrès. <
..L'enthousiasme, des Marseillais n'a;
pas tardé à soulever contre Liebknecht
une sorte de réaction : un grand nom
bre de journaux, même parmi les
plus avancés de la gauche, ont re
proché au socialiste allemand de chan
ger de doctrine en changeant de terri
toire et de vouloir duper les Français
par des déclarations contraires à ses
véritables sentiments. Une protesta^
tit>n, signée du citoyen Protot et de
quelques amis de l'ancien communard,'
a même été affichée sur les murs de
Marseille.
En réalité, on a raison de s'élever
ainsi contra le socialiste allemand;,
on est dans le vrai en l'accusant d'a
voir une théorie pour l'Allemagne^
une autre pour la France; Il s'est écoulés
vingt-rdeux ans depuis la guerre : en
prenant de l'âge, Liebknecht est de
venu plus raisonnable-; aussi a4-il
jugé bon d'adoucir ses théories anti
patriotiques. Déjà, l'an dernier, en
plein congrès socialiste international,
à Bruxelles, il laissait entrevoir car*
taines tendances qui n'avaient .rien
de commun avec l'abolition des pa
tries et la suppression des frontières,
I Au Reichstag, il a prononcé des dis-,
| cours très allemands, dont quelques
phrases sont bonnes à recueillir :
Jamais je n'admettrai, que l'Allemagne,
rende l'Alsaoe-Lorraine à la France...
Mes amis et moi,nous sommes bien déci-*
dés à ne pas laisser amoindrir la patrie al
lemande...
.11 n'y a peut-être pas dans toute cette as
semblée un seul député qui ait déclaré avec
autant de force que moi que, dans le cas
d'une guerre de revanche pour l'Alsace-Lor
raine, entreprise soit par la France seule,
soit par la France alliée avec la Russie, on
ne trouverait point une Allemagne divisée,
mais que l'Allemagne tout .entière se lève
rait pour, combattre.
Ces déclarations, d'ailleurs, ne sont!
pas pournpus surprendre. Le système
du socialisme international n'est plus
guère en faveur : les théoriciens le
proclament encore dans les congrès;
mais, à part un certain nombre d'ex
ceptions, ils n'osent plus affirmer que
le? socialistes refuseraient de marcher
en temps dé guerre. En outre, les in
cidents comme ceux qui viennent de
se produire entré mineurs belges et
mineurs français suffisent à démon
trer que le sentiment de la fraternité
entre prolétaires de tous pays n'a pas.
encore bien pénétré les masses ou
vrières. Et que de fois des quereU
les du même genre," moins bruyant
tes, mais non moins significatives;
n'ont-elles- pas lieu entre ouvriers*
français et ouvriers étrangers? * H
Il ne nùùs déplaît pas dé constater
cette baisse de l'idée internationaliste.
Ce que l'on doit reprocher à Liebk
necht,c'est non pointde se montrer pa
triote allemand, ce en quoi il a raison/
mais de venir se moquer de nous en
France-avec ses grandes phrases, qui
nô ; signifient rien: Car , au 'fond; les-
congressistes-de Marseille tmt été'biert
naïfs' 'd'applaudir un discours où
Liebknecht renvoyait la solution de la
question d'Alsace-Lorraine après l'é
tablissement, sur les rives du Rhin,
âe deux républiques.sociales.,
Evidemment, „il ne nous serait.pas f
désagréable de voir, un grand parti , al
lemand prêt à mettre l'empereur en
de sérieux embarras, le jour où celui-
ci déclarerait la guerre à la France.
Mais il ne doit pas être ici question de
notre intérêt pàrticulier : il s'agit d'un
principe. A ce point de vue, l'on doit
se réjouir de voir l'idée de patrie re<-
pousser toujours vivace, au-dessus des
théories socialistes sous lesquelles .on
avait prétendu l'étouffer.
Ce qu'il faut pour régler définitive-;
ment les grandes questions du tra
vail/ ce u*est point l'union des ou
vriers de tôus pays contre les capital
listes du monde entier; c'est une en^
tenté internationale, qu'il est difficile*,
mais non impossible d'accomplir, et
qu'avec le temps on fera sans avoir
besoin d'effacer les patries.
F rançois V euillot.
Voici le'texte de la note de YOsser-
■èatore Romario, relative aux alléga
tions du GilBlas, signalée par une dé
pêche de Rome,;
Un journal français, le GilBlas ; a publié,
il y a quelques jours, un prétendu entre
tien, tenu le 11 juin dernier, entre un de ses
rédacteurs et le nonce à Paris, Mgr Fer-
rata. Dans cet entretien, le nonoe aurait
exposé ses idées sur l'aotion électorale de
l'élément catholique en France.
Cet article n'a été que tardivement porté
& la connaissance de Mgr Ferr.ata t qui de
puis le 7,de. ce .moi? se trouve à Gradoli,
son pays natal.
FEUILLETON DE VUNIVERS
du 1 er OCTOBRB 1892
ENFANTS DE PARIS
Esquisses d'après nature
L'Atelier
A Parisf p eu i d' élèves deà. frères entrent,
dans les ateliers. Les parents, généralement*
moins instruits que leurs enfants, émerveil-,
lés de leur science juvénile,,les dirigent ,de
préférence du côté de la vie de bureau. Ad
ministrations de l'Etat, compagnies de che-
mins de fer, maisons de banque, de oomr
merce, d'industrie, tout leur est bon, tout
leurest désirable, pourvu que la comptabi
lité y fleurisse etque.la calligraphie y,puisse
déployer ses grâoes.
Cette voie bureaucratique est, comme
toutes les voies parisiennes, semée d'épines,,
de cailloux, traversée de luttes, de décep
tions et d'embûches. Beaucoup d.e ceux qui
s 'y engagent à. la ; légèr e ress emblen t au bû-,
■cherondu bon LaFontaine ;.unjour ou.l'au-,
Ire la concurrence effrénée,, la chassé aux
emplois, les. chômages, les faillites, les ca-,
prices des chefs, les maladies, remplaçant
la dime,.la taille et ia corvée,du temps jadis,.
Leur font d'un malheureux la peinture achevée.'
L'atelier, avec la plupart des mêmes,
■épreuves, présente des dangers plus redou
tables encore au point de vue moral, et il
faut aux enfants de 14 ou 15 ans, qui y en
trent comme apprentis au sortir de l'école,
une force de oaractère peu commune pour:
résister à cette influence délétère. Les. pre
mières leçons qu'ils y reçoivent sont " des,
leçons d'impiété, de blasphèmes, de gros-
sière raillerie. Le tabac, la boisson, la dé*
bauche précooe les atteignent à la. fois dans
leur corps et dans leur âme. La bonne vo*
lonfcé des patron^, la surveillance des contre
maîtres peuvent atténuer le mal, mais, non
le détruire ; et s'il y a des degrés dans cette
corruption, si, dans lesf ateliers môme les
plus mauvais, .il se. rencontre. ■ beaucoup de
braves .gens*.et d'honnêtes ouvriers, il,est
oertain que l'ateliar tel qu'ilestconstitué
de nos : jours, avec la licepoe de la presse,
de la chanson, de la caricature!, et . la souver
raineté d.u.reepeot humain, est fatal à 1$.
conservation de la foi et desle»îâmes des. enfanta et des jejyups jgens.
: Pourtant, si . la •■ démoralisation ,fcst, la,
règle, grâce à Dieu,: elle . souffre des.
exceptions.. Parmi ces apprentis et ces
j.eunes ouvriers de 15,18 et 20 ans, un cer
tain 'nombre, entamés, mais non détruits, ;
se refont après s'être défaits, et trouvent'
dans les patronages chrétiens,, religieux ou
laïques, la force du repentir et de la persé
vérance. De ceux-là, on pout dire, toujours
avec l'immortel bonhomme , .
Ils- ne Mouraient pas tous, mais, tous é.taient
[frappés.
Mais il en est d'autres qui ne sont pas.
même frappés, et j'ai connu des jeunes
gens chrétiens, élevés par les frères, qui,
ont grandi parmi les tentations et les dan
gers de l'atelier, sans y perdre une parcelle,
de leur foi, sans même y contracter une
souillure. Avant de vous montrer à l'œuvre
un de ces jeunes héros, permettez-moi de
vous dire un mot d'une des victimes de
l'atelier dont le corps a succombé,, mais
dont l'âme s'est purifiée dans la souffrance
et Je repentir.
. Il était oharmant, ce pauvre Paul, aveosâ
taille élancée, ses grands yeux limpides, et
la grâce un peu gàuohe de^son adolescence.
D'un esprit fin et doucement. moqueùr,
4'un cœur, aimant, d'upe bonté expansive,!
ilsemblait n'avoir qu'à.se laisser mener par
la,Proyidenceippur. vivre heureux. Sa belle,
éoriture,, son style d'une élégance et d'une,
pureté incroyables chez un garçon de
15 ans, sortant de l'éoole primaire, lui pro
mettaient un avenir brillant. Mais il man
quait'un péu de jugement et complètement
de oaractère. Un eaprice irréfléchi l'é-
carta dé la vie de bureau pour le pousser
à l'atelier et f au lieu d'aspirer à une car
rière d'éorivaia et de rédaoleur, dans quel-
qué grande administration, il voulut deve
nir ouvrier mécanicien.
Avec une .santé plus vigoureuse et une
volonté plus énergique, il e$t pu réussir et
se faire, dans ce métier, .une tpès bonne
situation. Mais, ces deux instruments de
lutte et de succès lui faisaient défaut, Pas
ser dix heures par jour debout, penché sur
un étau, à limer,fpolir, façonner l'acier et le
cuivre, c'est rude pour un corps d'adoles
cent, et, le soir venu, le pauvre enfant se
sentait plus las que de raisoni Cependant,,
tant que l'âme soutint le. corps, tant qùe la
paix de 1» candeur et la pureté de la vie
vinrent eii aide aux meiribres fatigués, l'ap
prenti résista â l'épreuve et garda tant bien
que mal son équilibre. Mais peu & peu une
sorte de langueur envahit son esprit, puis
son cœur, et gagna ses muscles pt ses nerff :
11 éprouvait des alternatives de faiblesse
et de force, des défaillances momentanées
suivies de relèvements, il se sentait comme
ballotté par un flux et un reflux d'impres
sions coniradicloires, et il se demandait
avec an^jété s'il pourrait longtemps encore
lutter entre les' mauvais courants qui l'en
traînaient, à l'abîme,
Nous sommes autorisé à déclarer que :
1° Le nonce de Paris n'a jamais reçu per
sonne qui se soit qualifié de rédacteur au
Gil Blas ou ayant un rapport quelconque
avec ce journal;
2° Le nonce n'a jamais exposé, à des
personnes qui auraient pu se présenter sous
une fausse qualification, ni à personne, des
idées corame cellés contenues dans ledit
article du Gil Blas.
3° Le fait même que le Gil Blas n'a parlé
de ce prétendu entretien que trois mois
après la date où il aurait eu lieu, prouve
évidemment le peu de fondement d'une
telle assertion.
La Liberté s'amuse agréablement
des renseignements que nous avons
donnés sur la situation financière du
Grand-Orient :
. S'il y a, dit-elle, quelque enseignement à
tirer de ces données arithmétiques, o'est
que la frano-maçonnerie est un simple
Crqquemitaine, et que les catholiques ont
tort d'y voir la cheville ouvrière du régime
et,, d'en faire le bouo émissaire .d^ leurs
méoomptes, .
_Va pour Croquemitaine, si on veut
bien s'apercevoir que c'est un Croque-
mitaine extrêmement fâcheux, bien
vivant et malfaisant. C'est une consta-'
tation certainement facile pour la Li
berté, qui a plus d'une fois blâmé les
persécutions législatives 1 ou adminis
tratives dirigées contre des œuvres
catholiques. La Liberté n'ignore pas
tolur que nous comment ces déplora
bles mesures ont été constamment
proposées et votées par des francs*
maçons, à l'exception d'un -seuly le
docteur Desprès. C'est aussi la Liberté
qui a-■ révélé, ! par une analyse déve
loppée du livre de M. Gopm-Alban-
celli, comment la franc-maçonnerie
était parvenue à exercer dans le Par
lement une influence hors de toute
proportion avec la minorité qu'elle
représente dans le pays»
Il en ; a toujours été. de même, et
notre thèse est de montrer qu'il en va
être de même encore pour le plus
grand préjudice du bon ordre, ; du bon
sens et de la paix sociale, si on n'y
prend garde aux prochaines élections.
A la veille de la Révolution, les
francs-maçons n'étaient guère plus
nombreux en France qu'ils ne sont au
jourd'hui. Ils avaient600'loges : il yen
a présentement plus de 500/ On sait ce
qu'ils ont pu faire : la surprise,l'audace,
la violence, la terreur répandue ont
suppléé le nombre. Il en a été de
meme depuis en toutes les occasions
de trouble. Après la proclamation de
la République en 1870, on a vu des
villes de trente mille âmes trembler
tout à coup devant des individus sans*
autorité ni mandat que l'autorité et le
mandat qu'ils voulaient bien prendre
avec aplomb : une ceinture rouge, un
sabre au travers, une table à l'hôtel de
ville, des proclamations audacieuses...
et voilà tout: la gendarmerie, qui de
vait coffrer ces garnements, finissait
par être à leurs ordres. Regardons ce
qui se passe— du moins ce qu'on nous
laisse voir de ce qui se passe —■ au
Brésil, où la Révolution maçonnique
réalise enfin son rêve, et jugaons de
ce que nous verrions chez nous si les
loges triomphaient seulement un jour,
un seul 1
G. Bois.
Un Lord-Maira catholique
Nous , avons noté naguère l'émotion
un peu superficielle que causait à Lon
dres la perspective de voir un alder-
man catholique arriver aux honneurs
de la chaire civique et devenir lord-
maire de la capitale du Royaume-Uni.
Ce n'était pourtant pas tout à fait la
{tremière fois qu'il était question d'un
ord-maire appartenant à la religion
catholique. Mais il y a « fagot et fa
got ». Appartenir â une religion par
sa naissance et son baptême est une
chose, tenir à sa religion et la prati
quer en est une autre. Sir Polydore de
Keyser, qui fut lord-maire il y a trois
ans, était d'origine belge et catholi
que ; mais il n'entendait pas que sa re
ligion le gênât, et on l'avait vu avec
une parfaite aisance se donner un aur ,
mônier protestant etassister à tous les
services anglicans auxquels-les lords-
maires ont coutume d'assister.
Tel n'est point aujourd'hui le cas'
de Yalderman StuartKnil}. Dès qu'il
a été question de sa nomination,
M. Knill a fait ses réserves. L'autre
jour encorele lord-maire actuellement
en fonction, sir David Evans, lui a
posé, d'après les journaux, les ques
tions suivantes :
Nommerez-vous, si vous êtes élu lord-
maire, un chapelain de la mairie choisi dans
l'Eglise établie ? —Assisterez-voiis, lors
des cérémonies officielles, aux offices qui'
seront célébrés à Saint-Paul, à Saint-Lau
rent et en d'autres lieux où les cérémonies
religieuses sont oélébrées suivant < le rite |
anglioan?
Fort carrément, Yalderman Knill a
répondu :
Si je suis élu lord-maire, je nomme
rai un chapelain de mon Eglise. Mais je
prierai les aldermen de là cité de Londres
de choisir un olergyman de l'Eglise établie
pour remplir les fonctions officielles, et au
quel sera attribué le traitement habituelle
ment payé au chapelain du lord-maire ; jé.
rétribuerai moi-même lès services' de iùon
propre chapelain.
Je n'assisterai pas au service de l'Eglise
établie; mais, avec la permission de< mes
anciens dans la cour des aldermen, je nom
merai un iocum tenem pour me remplaoer à
ces cérémonies.
On pouvait s'attendre à vo ir les
journaux profiter de l'occasion' pour
faire du, zèle protestant et ressusciter
quelques vieilles tirades sur les dan 7
gers du papisme.
Il n'en a rien été, à part peut-être
quelques feuilles spéciales qui ont
pour mission d'entretenir, le vieux
levain de la réforme. On a même
trouvé le questionnaire du lord-maire
Evans un peu inconvenant. Du moins
la majorité des aldermen a été de cet
avis, et hier, au jour traditionnel de
la Sdint-Michel, M. Stuart Knill a été
nommé lord-maire pour l'année pro
chaine. En vain deux ou trois intran
sigeants de la corporation ont voulu
combattre cette élection au Guildhall
et créer du tumulte en faisant appel
aux vieux préjugés. Ils en ont été
pour leurs frais, et le nom de M. Knill
est sorti triomphant de la lutte.
Un article du Times paru hier ma
tin indiquait clairement ce résultat.
Ce journal,qui est rarement aussi bien
inspiré, disait que si on ne nommait
pas Yalderman Knill, il faudrait nom
mer un lord-maire juif et que ni les
habitants de Londres,ni la corporation
ne gagneraient quelque chose à écarter
un homme qui honorait sa religion et
suivait les inspirations de sa cons-
science, pour un juif qui,sans être pro
testant, s'arrangerait facilement de
toutes les cérémonies du culte pro
testant. Au temps de Shylock, fait re
marquer le Times , les juifs voulaient
bien commercer avec les chrétiens,leur
parler, marcher avec eux; mais ils ne
voulaient ni prier, ni manger,ni boire
avec eux. Aujourd'hui ces détails n©
leur coûtent plus rien. Mais le Times
ne voit pas que cela soit bien méritant
de leur part. Et il raille .les, protes
tants qui acceptent' ce. changement
du juif comme uni gain sérieux pour
l'orthodoxie. Le Times pourrait ajou
ter qu'un des derniers lords-maires a
été un juif, un Isaacs,et que. l 'honneur
de la grande charge civique de Lon
dres n'y a rien gagné : au contraire.
L. N. G.
Mgr Laouënan
Le pieux évêque,le vaillant mission
naire, l'apôtre savant et zélé dont l'E
glise de France est justement fière,
vient de succomber sous les coups de'
la maladie causée par quarante ans de
travaux et de fatigues. Mgr Làouenan
est mort à Montbeton, près de Mon-
tauban, au sanatorium fdtadé par la
générosité de Mme la comtesse de Mé4
nars, en faveur des prêtres des mis»
sions étrangères. 11 était venu là- cher
cher quelque repos, non-point la gaé-,
rison qu'il n'espérait pas, connaissant
mieux que personne l'état de,«es for
ces dépensées sans compter au ; service
de la civilisation et de la foi. • i .
Mgr Laouënan,fils d'un iarmateur da
Lannion, était né en 1822. Il était,-
eomme- son nom,- breton tout entier^
De banne heure, sa vocation ecclésias
tique se révéla ; et l'on put comprendre
qu'au sein d'une famille où régnait une.
grande aisance, il rêvait de labeurs et
de sacrifices; Au grand séminaire de
Saint-Brique où il vint après avoir
passé par Tréguier et Plouguernevelj
l'abbé Laouënan fut très,, remarqué,
L'évêque d'alors se résigna difficile
ment à laisser . s'éloigner un Vi jeunet
prêtre dont le zèle et l'intelligence pro
mettaient, pour lapiété du dipeè9e,;dea
fruits abondants. En 1846, après la pé
riode d'études et de prépa^at^ops subie
à la glorieuse et chère m^isop Vde la
rue du Bac, l'ahbé Laouënan. partait
pour Pondichéry. Toute sa carrière
devait se dérouler dans cette région•
On sait la grande, importancë des
écoles pour la prédication, religieuse
parmi les Indiens. Le nouveau mis
sionnaire eut, bientôt à exercer son
activité dans cet ordre de ; trava}ix,pour
lequel il était doué. Il occupa, longr
temps les fonctions de supérieur aii
collège colonial, où sè distribue un
enseignement complet. ,
Très jeune encore, il eut l'occasion
d'acquérir une expérience spéciale et
d'amener à l'état de science apçro*
fondie les notions qu'il avait rapide
ment recueillies sur le langage et, les 1
croyances des peuplades indoiies:
Vers 1850, le schisme, qui pendant
deux siècles a troublé les ' posses*-
sions portugaises de l'Inde, avait
causé des difficultés et dès tristesses
nouvelles. Le Saint-Père Pié IX dut
envoyer sur les lieux 1 des représenï
tants pour mettre fin aux gravés dis»
sentiménts dont la ville de Goa était
le foyer. La délégation avait Mgr B ûjx £
nand pour chef et l'abbé Laouënan
pour secrétaire. Celui-ci, an cours
de voyages à travers l'Indu, mit à
profit toutes les heures et toutes les
circonstances pour amasser des'do
cuments. On le vit courant guir ; tou9
les chemins pour observer le3 monu»
ments, visiter les temples,-,étudier les
traditions et les mœurs ; réunir, àveo
l'ardeur infatigable tfu savant et de l'a
pôtre, une foule d'indications préQi.e^i
ses. Sans doute, â cette époaiiè l'abbô
Laouënan n avait pa^ eîicorô pepsé ^
Il me oonfiait naïvement ses inquiétudes,
Wn désir curieux et sa peur de oet inconnu
yers lequelle,portaient ses passions"naisslïn-
tes,les exemples. et les discours de ses. çama-
ra^es, et dont l'écartaient l'ennui t la fausse
ga\eté, le. dégoût précooe delà vie, visibles
dftns leurs regards,, dans, leurs aocents^
dans Joute leur attitude. Gomment le plaisir
pouvait-il ê tre chose si douce j et porter des
fruits si amers? Et .cependant, malgré ce.
cri de son bon sens, malgré la révolte de
sa conscience chrétienne, malgré mes con
seils et mes prières, il se rapprochait de
jour en jour.de cet arbre.du fruit défendu,
où chaque génération vient à son tour cueil
lir la déchéance et la mort.
Ce qui le perdait,'o'était moins l'attrait
dlu mal que l'affaiblissement graduel en son.
âme de la notion du bien. Etre attaqué, mal
traité, violenté même^ au sujet de sa foi et
de sa; sagesse),.o'est dur parfois, me disait-il,
mais ça peut se. supporter. Ce qui est terri
ble, parce que o'est insaisissable, c'est ce.
soepticisme gouailleur qui so moque de tout,
du . mal comme du bien, de la vertu comme
du vice ; o'est ce mépris de toute chose,
de la religion, de la patrie, de la famille,
çjette blagueen un mot, pour l'appeler par
Son^nom^qui rit de .tout, ne respecte rien,
ni père ni mère, ni pudeur ni honneur, et
qui finit par envahir et empoisonner l'âme
comme les miasmes paludéens empoisonnent
le sang.
La blague, voilà le premier et le dernier
mot de'l'atelier ; .c'est le voltairianisme de
la rue. Voltaire osait se vanter dans ses
lettres à ses amis de ses communions sa
crilèges à Feraey. « Je viens de déjeuner h
l'église par devant notaire », écrivait-il le
jourde Pâques avec son cynisme de damné.
— A l'atelier,mon pauvre Paul entendait les
beaux esprits de l'endroit lui dire en rica-
p^nt ; « Si ça te rapporte quelque chose
d'aller à ton patronage, à la messe, à con
fesse, vas-y bravement, mon bonhomme.
Confesse-toi, communie, et fais-toi bien
payera L'argent des calotins est toujours»
bon & prendre. »
De-part et' d'autre, c'est la même inspira-
tion, le mépris de Dieu, de la vérité^ de
Pâme humaine; mais avec une différence®
fondamentale : le sacrilège que les philo
sophes de la lime et de l'étau conseillaient
en blaguant au pauvre apprenti, ils ne l'au
raient pas voulu commettre eux-mêmes pour
un empire, tandis que Voltaire lé commet
tait tranquillement et s'en vantait. Les im
pies de l'atelier ne sont le plus souvent que
des égarés et des inconscients-, Voltaire,
lui, était un misérable.
Parmi tous ces dangers, le pauvre enfant
atteignit la fin de son apprentissage sans
avoir entièrement rompu avec ses amis
d'enfance et ses habitudes chrétiennes ;
mais à peine ouvrier, l'occasion de chute,
écartée jusque-là, vint au-devant de lui et
triompha presque sans lutte de ses der
nières résistances; Il se précipita tête bais
sée dans les plaisirs mortels de Paris, et il
en sortit, quelques mois après,"usé jusqu'à
la cordé, démoli, dévoré : le corps y resta,
mais l'âme se réveilla et se retrouva tout
entière, La,maladie,chrétiennement accep-
tée, .lui rendit toutes les tendresses, toutes
les délicatesses de sa foi et de son cœur, et
il expira, repentant et purifié, au milieu de
ses vrais amis et des prières suprêmes de
l'Eglise, dans les br^s et sous les larmes
de sa mère.
Voilà la victime de l'atelier ; en voioi
maintenant le héros chrétien à vingt ans ;
il ne ressemble en rien à Paul : sous une
une frêle enveloppe, il porte, une âme éner
gique, fortement trempée dans la foi catho
lique. Au premier regard, on le prendrait
pour un enfant; au seoondjon reconnaît en lui
un homme. Il l'a toujoursétéy dè même qu'il
y en a qui ne le seront jamais» Vivre; pour!
lui,o'est faire son devoir. Au foyer paternèi,
il s'est toujours montré le plus , tendre de$
fils ; sa mère, veuve de bonne heure, a:rei,
trouvé en cet enfant de douze ans l'appui,*
le dévouement viril de son mari. A l'écôle,,
modèle de ses camarades, il « travaillé;-
obéi, respecté ^es maîtres, .sans un mo-,
ment. de défaillance. Tous les: vie ont ressemblé au jour de sa première;
communion. . - .... : . ■ ■ ■ |
A l'atelier, la contradiction et la
n'ont fait qu'affirmer et mettre plus
vive lumière son invincible fermetés Ap-)
prenti, puis ouvrier dans une grande. typo-<
graphie, il s'est toujours- montré catho
lique , sans ostentation comme sans fai
blesse, et jamais les railleries, les- gro^'e-î
retés, les menaces même de ses ç8^ ara aea
d'atelier ne l'ont fait dévier 4-une. ligne ni
reculer d'un pas. .Peu à peu, les mauvais*
plaisants et les mauvais sujets se sont tus>
i^s ont désarmé devant des conviotiohs si
calmes et si fortes, et l'estime, l'affeotioit
même chez plusieurs ont succédé-aux quo*
libets et aux persécutions; ■
Un trait et une lettre de lui suffiront i l®
faire connaître tout entier dans son hé*
roïque simplicité, , ,
Un nouveau venu dans l'atelier; sorte
d'Hercule typographe, posant en fraric-ma*
çon, quoi-qu'il ne fût ni franc'ni-maçon, sa
mit dès, le premier jour à déblatérer devant '
lui contre la religion, les prêtres, les catho
liques, et il finit par s'éerier, avec unèf voix
de stentor et des-gestes d'énergumènes
« Je voudrais tenir un de ces clérioaux 1 Jet
l'êtriperais sur place et de la belle façon K '
Christian se, lève, s'avance vers lui, et le
regardant bien en face : k Etripez-mo^
dono, oar je suis clérical.—Toi, clérical}
misérable 1 hurle le colosse en levant sur la
N* 8918. —• Edition quotidienne
———IPyiBIIBWIHiWWHIII
Samedi 1 er Octobre 1892 s
Dn an 1 .
« Six mois
ÉDITIO N QUOTID IENNE
PARIS .ÉTRANGER
1T DÉPAUTBMBMTi {ONIOH POSTAL»)
. 55 » €9 »
. 28 50 84 ■
. 4 5 » 18 il
Trois mois. .
2 s 6S abonnements partent des 1» et 16 de chaque moif
UN NUMÉRO i ......... 18 cent.
ujm JNumuttu j uépartéménta . . . 20 —
BUREAUX ; Paris, 10, rue des Saints-Père®
Onm'sbonne-à Rome, place du Gesù, 8
ÉDITION SEMI-QU©52®ÊSNNÈ
On 83 ...
Six mois. .
Trois mois.
paris.
>T DÉPARTEMJSNÏi
. i 80 »
..16 #
. . 8 50
ÉTRANGER
(vmON PQSTAXÏl)
33 « .
19 »
10 »
tes abonnements parte nt des 1 «» et 16 de chaque moM
l'BSÎYEES M répond pas des manuscrits qui loi sont idMSSft ■
ANNONCES
8SM. LAGRANGE, .CERF et C'°, 6, place'de la Bourse
FRANCE
PARIS, 30 SEPTEMBRE 1892
II y a une question Liebknecht, au
sujet de laquelle s'échangent les dé
mentis. Le Figaro maintient que l'agi
tateur allemand a été, sinon expulsé,
au moins invité à s'en aller, et que la
police a veillé paternellement sur son
départ; les journaux officieux démen
tent toute intervention gouvernemen
tale^ l'intéressé fait de même, si nous
en croyons une dépêche de Mulhouse.
Il reste toutefois que le socialiste alle
mand n'a pas présidé la réunion an
noncée à Lyon. Pourquoi?
Dans la circonstance, il nous semble
que les socialistes français se sont
laissé jouer par leur ami Liebknecht.
On a affiché très opportunément à Mar
seille un discours du dit Liebknecht
très peu agréable pour des oreilles
françaises, et cet affichage a pu con
tribuer à le faire partir. Ses déclara
tions de Marseille ne méritent pas
grande confiance, d'autant que, dès
qu'il a été sorti de France, il a tenu
de nouveau un langage qu'aucun
Français iie pourrait accepter, encore
moins applaudir. ' -
La leçon servira-t-elle' à nos socia
listes ? Cesseront-ils de se ; laisser pren
dre aux belles paroles des Allemands,
comme des Anglais et,des Italiens?
Nouvel incident à Carmaux : .deux
escadrons de dragons y étaient en
voyés, soit par précaution pour renfort
cer les troupes, soit pour relever les
soldats qui y étaient déjà. Là-dessus le
citoyen Baudin a signalé au préfet
que c'était une provocation, .et le pré
fet, avec une complaisance peu méri
toire, a télégraphié que les dragons no
viendraient pas. On voudrait exciter,
les grévistes en leur donnant une idée
exagérée de leur force, qu'on ne pour
rait faire mieux. Du reste, le préfet
du Tarn n'a cessé de se montrer au-
dessous de sa tâche, reculant dès
qu'on lui montre les dents. :
On annonce pour aujourd'hui ïsl ré
ponse du conseil d'administrations des
mines de Carmaux aux propositions
d'arbitrage.
Le nouveau lord-maire de Londres
a été installé ; c'est un catholique. Des
sectaires >se sont bien permis de lui
poser quelques questions d'une con
venance plus que douteuse ; ils n'ont
pas osé s'opposer à son installation.
Après avoir accepté un lord-maire
jiiif, qui devait finir piteusement de
vant la justice, cela aurait été raide.
On trouvera plus loin le texte, que
nous transmet- -le télégraphe, d'un
manifeste que le parti nationaliste ir
landais adresse à ses compatriotes.
La présence et les déclarations du
socialiste allemand Liebknecht au
congrès de Marseille ont soulevé quel :
que émotion. Nous ?ie voulons pas ici
rechercher si, oui ou non, Liebknecht
a reçu du .gouvernement l'ordre ou
l'avis de repasser la froqtière aii plus!
-yite. Quelles ont été au juste Mar
seille les déclarations du député alle
mand leur caractère ou leur portée
méritent-ils le bruit qu'on en a fait,"
voi.'à. les points qu'il nous semble in-
t£rpss■Liebknecht, député au Reischtag,
un des nlutf considérables, sinon le
pemilr pamli le» chefs du grand
parti socialiste allemand, occupe une
situation et jouit d'un crédit qui don-'
nent évidemment de l'importance à
ses déclarations. Son. avis n'est pas ce
lui d'un homme, c'est l'opinion d'une
masse d'hommes, énorme et très puis
sante. ' *
Le député du Reichstag allemand-
est venu représenter les socialistes de
l'empire au congrès national du parti
ouvrier français. Depuis quelque
temps nos socialistes reprochaient à
Liebknecht de faire de nombreux ac
crocs aux grandes théories internatio
nalistes. Le citoyen Protot, ancien
membre de la Commune, avait même
écrit une violente brochure pour
établir que Liebknecht et son ami
Bebel n'étaient au fond que des chau
vins allemands. Liebknecht mit à
profit son passage en France pour
essayer de répondre à ces accusar
tions; il prononça donc en faveur du
socialisme international un discours
que nous avons reproduit : partageant
le monde entier en deux nations seu-
lémént, les bourgeois et les prolétai
res, l'orateur allemand supprimait
d'ùh coup et' frontières et patries. 11'
ajqutait même ce paragraphe ;
Entre vous Français, et nous Allemands,
il y a un large fleuve de sang. Nous en
sommes innocents, de oe sang : ce sont
nos ennemis à nous qui l'ont versé, etoe
fleuve de sang ne forme pas une frontière
de'haine pour nous. Nous sommes des
frères. Nous avons protesté ooiitre la guerre
fratricide de 1870, comme^ vous avez, pro
testé. vous-mêmes, ,et .notre attitude yis-£-
VÎ3. delaguerre n'a jamais changé. ,
Le lendemain, directement interro
gé sur la question d'Alsace-Lorraine,
Liebknecht fit la déclaration suivante :
; Faùesrnous la République démocratique
èt sociale,laissez-nous faire notre Républi
que démocratique et sociale, et la question
d'Alskce-Lorrairié sèra 'vidée. La guerre*
n'est pas une solution, car elle ne fait pas
des vainqueurs, mais seulement des vain
cus. Supposez que vous nous repreniez
l'Âlsace^Lorraine ; dix ans plus tard, la ba
taille s'engagera de nouveau et tout sera
remis en question. D'ailleurs, la protesta
tion qui fut faite en 1870-71 par Bebel et
par; moi, tous nos camarades, socialistes 1
du.Reichstag et nous sommes prêts à la
reoommencer. Je le répète, le triomphe du
socialisme en France et en Allemàgne ré
soudra seul cette question.
Les socialistes de Marseille accueil
lirent ces paroles par des acclama
tions répétées. Liebknecht fut le héros
du congrès. <
..L'enthousiasme, des Marseillais n'a;
pas tardé à soulever contre Liebknecht
une sorte de réaction : un grand nom
bre de journaux, même parmi les
plus avancés de la gauche, ont re
proché au socialiste allemand de chan
ger de doctrine en changeant de terri
toire et de vouloir duper les Français
par des déclarations contraires à ses
véritables sentiments. Une protesta^
tit>n, signée du citoyen Protot et de
quelques amis de l'ancien communard,'
a même été affichée sur les murs de
Marseille.
En réalité, on a raison de s'élever
ainsi contra le socialiste allemand;,
on est dans le vrai en l'accusant d'a
voir une théorie pour l'Allemagne^
une autre pour la France; Il s'est écoulés
vingt-rdeux ans depuis la guerre : en
prenant de l'âge, Liebknecht est de
venu plus raisonnable-; aussi a4-il
jugé bon d'adoucir ses théories anti
patriotiques. Déjà, l'an dernier, en
plein congrès socialiste international,
à Bruxelles, il laissait entrevoir car*
taines tendances qui n'avaient .rien
de commun avec l'abolition des pa
tries et la suppression des frontières,
I Au Reichstag, il a prononcé des dis-,
| cours très allemands, dont quelques
phrases sont bonnes à recueillir :
Jamais je n'admettrai, que l'Allemagne,
rende l'Alsaoe-Lorraine à la France...
Mes amis et moi,nous sommes bien déci-*
dés à ne pas laisser amoindrir la patrie al
lemande...
.11 n'y a peut-être pas dans toute cette as
semblée un seul député qui ait déclaré avec
autant de force que moi que, dans le cas
d'une guerre de revanche pour l'Alsace-Lor
raine, entreprise soit par la France seule,
soit par la France alliée avec la Russie, on
ne trouverait point une Allemagne divisée,
mais que l'Allemagne tout .entière se lève
rait pour, combattre.
Ces déclarations, d'ailleurs, ne sont!
pas pournpus surprendre. Le système
du socialisme international n'est plus
guère en faveur : les théoriciens le
proclament encore dans les congrès;
mais, à part un certain nombre d'ex
ceptions, ils n'osent plus affirmer que
le? socialistes refuseraient de marcher
en temps dé guerre. En outre, les in
cidents comme ceux qui viennent de
se produire entré mineurs belges et
mineurs français suffisent à démon
trer que le sentiment de la fraternité
entre prolétaires de tous pays n'a pas.
encore bien pénétré les masses ou
vrières. Et que de fois des quereU
les du même genre," moins bruyant
tes, mais non moins significatives;
n'ont-elles- pas lieu entre ouvriers*
français et ouvriers étrangers? * H
Il ne nùùs déplaît pas dé constater
cette baisse de l'idée internationaliste.
Ce que l'on doit reprocher à Liebk
necht,c'est non pointde se montrer pa
triote allemand, ce en quoi il a raison/
mais de venir se moquer de nous en
France-avec ses grandes phrases, qui
nô ; signifient rien: Car , au 'fond; les-
congressistes-de Marseille tmt été'biert
naïfs' 'd'applaudir un discours où
Liebknecht renvoyait la solution de la
question d'Alsace-Lorraine après l'é
tablissement, sur les rives du Rhin,
âe deux républiques.sociales.,
Evidemment, „il ne nous serait.pas f
désagréable de voir, un grand parti , al
lemand prêt à mettre l'empereur en
de sérieux embarras, le jour où celui-
ci déclarerait la guerre à la France.
Mais il ne doit pas être ici question de
notre intérêt pàrticulier : il s'agit d'un
principe. A ce point de vue, l'on doit
se réjouir de voir l'idée de patrie re<-
pousser toujours vivace, au-dessus des
théories socialistes sous lesquelles .on
avait prétendu l'étouffer.
Ce qu'il faut pour régler définitive-;
ment les grandes questions du tra
vail/ ce u*est point l'union des ou
vriers de tôus pays contre les capital
listes du monde entier; c'est une en^
tenté internationale, qu'il est difficile*,
mais non impossible d'accomplir, et
qu'avec le temps on fera sans avoir
besoin d'effacer les patries.
F rançois V euillot.
Voici le'texte de la note de YOsser-
■èatore Romario, relative aux alléga
tions du GilBlas, signalée par une dé
pêche de Rome,;
Un journal français, le GilBlas ; a publié,
il y a quelques jours, un prétendu entre
tien, tenu le 11 juin dernier, entre un de ses
rédacteurs et le nonce à Paris, Mgr Fer-
rata. Dans cet entretien, le nonoe aurait
exposé ses idées sur l'aotion électorale de
l'élément catholique en France.
Cet article n'a été que tardivement porté
& la connaissance de Mgr Ferr.ata t qui de
puis le 7,de. ce .moi? se trouve à Gradoli,
son pays natal.
FEUILLETON DE VUNIVERS
du 1 er OCTOBRB 1892
ENFANTS DE PARIS
Esquisses d'après nature
L'Atelier
A Parisf p eu i d' élèves deà. frères entrent,
dans les ateliers. Les parents, généralement*
moins instruits que leurs enfants, émerveil-,
lés de leur science juvénile,,les dirigent ,de
préférence du côté de la vie de bureau. Ad
ministrations de l'Etat, compagnies de che-
mins de fer, maisons de banque, de oomr
merce, d'industrie, tout leur est bon, tout
leurest désirable, pourvu que la comptabi
lité y fleurisse etque.la calligraphie y,puisse
déployer ses grâoes.
Cette voie bureaucratique est, comme
toutes les voies parisiennes, semée d'épines,,
de cailloux, traversée de luttes, de décep
tions et d'embûches. Beaucoup d.e ceux qui
s 'y engagent à. la ; légèr e ress emblen t au bû-,
■cherondu bon LaFontaine ;.unjour ou.l'au-,
Ire la concurrence effrénée,, la chassé aux
emplois, les. chômages, les faillites, les ca-,
prices des chefs, les maladies, remplaçant
la dime,.la taille et ia corvée,du temps jadis,.
Leur font d'un malheureux la peinture achevée.'
L'atelier, avec la plupart des mêmes,
■épreuves, présente des dangers plus redou
tables encore au point de vue moral, et il
faut aux enfants de 14 ou 15 ans, qui y en
trent comme apprentis au sortir de l'école,
une force de oaractère peu commune pour:
résister à cette influence délétère. Les. pre
mières leçons qu'ils y reçoivent sont " des,
leçons d'impiété, de blasphèmes, de gros-
sière raillerie. Le tabac, la boisson, la dé*
bauche précooe les atteignent à la. fois dans
leur corps et dans leur âme. La bonne vo*
lonfcé des patron^, la surveillance des contre
maîtres peuvent atténuer le mal, mais, non
le détruire ; et s'il y a des degrés dans cette
corruption, si, dans lesf ateliers môme les
plus mauvais, .il se. rencontre. ■ beaucoup de
braves .gens*.et d'honnêtes ouvriers, il,est
oertain que l'ateliar tel qu'ilestconstitué
de nos : jours, avec la licepoe de la presse,
de la chanson, de la caricature!, et . la souver
raineté d.u.reepeot humain, est fatal à 1$.
conservation de la foi et des
: Pourtant, si . la •■ démoralisation ,fcst, la,
règle, grâce à Dieu,: elle . souffre des.
exceptions.. Parmi ces apprentis et ces
j.eunes ouvriers de 15,18 et 20 ans, un cer
tain 'nombre, entamés, mais non détruits, ;
se refont après s'être défaits, et trouvent'
dans les patronages chrétiens,, religieux ou
laïques, la force du repentir et de la persé
vérance. De ceux-là, on pout dire, toujours
avec l'immortel bonhomme , .
Ils- ne Mouraient pas tous, mais, tous é.taient
[frappés.
Mais il en est d'autres qui ne sont pas.
même frappés, et j'ai connu des jeunes
gens chrétiens, élevés par les frères, qui,
ont grandi parmi les tentations et les dan
gers de l'atelier, sans y perdre une parcelle,
de leur foi, sans même y contracter une
souillure. Avant de vous montrer à l'œuvre
un de ces jeunes héros, permettez-moi de
vous dire un mot d'une des victimes de
l'atelier dont le corps a succombé,, mais
dont l'âme s'est purifiée dans la souffrance
et Je repentir.
. Il était oharmant, ce pauvre Paul, aveosâ
taille élancée, ses grands yeux limpides, et
la grâce un peu gàuohe de^son adolescence.
D'un esprit fin et doucement. moqueùr,
4'un cœur, aimant, d'upe bonté expansive,!
ilsemblait n'avoir qu'à.se laisser mener par
la,Proyidenceippur. vivre heureux. Sa belle,
éoriture,, son style d'une élégance et d'une,
pureté incroyables chez un garçon de
15 ans, sortant de l'éoole primaire, lui pro
mettaient un avenir brillant. Mais il man
quait'un péu de jugement et complètement
de oaractère. Un eaprice irréfléchi l'é-
carta dé la vie de bureau pour le pousser
à l'atelier et f au lieu d'aspirer à une car
rière d'éorivaia et de rédaoleur, dans quel-
qué grande administration, il voulut deve
nir ouvrier mécanicien.
Avec une .santé plus vigoureuse et une
volonté plus énergique, il e$t pu réussir et
se faire, dans ce métier, .une tpès bonne
situation. Mais, ces deux instruments de
lutte et de succès lui faisaient défaut, Pas
ser dix heures par jour debout, penché sur
un étau, à limer,fpolir, façonner l'acier et le
cuivre, c'est rude pour un corps d'adoles
cent, et, le soir venu, le pauvre enfant se
sentait plus las que de raisoni Cependant,,
tant que l'âme soutint le. corps, tant qùe la
paix de 1» candeur et la pureté de la vie
vinrent eii aide aux meiribres fatigués, l'ap
prenti résista â l'épreuve et garda tant bien
que mal son équilibre. Mais peu & peu une
sorte de langueur envahit son esprit, puis
son cœur, et gagna ses muscles pt ses nerff :
11 éprouvait des alternatives de faiblesse
et de force, des défaillances momentanées
suivies de relèvements, il se sentait comme
ballotté par un flux et un reflux d'impres
sions coniradicloires, et il se demandait
avec an^jété s'il pourrait longtemps encore
lutter entre les' mauvais courants qui l'en
traînaient, à l'abîme,
Nous sommes autorisé à déclarer que :
1° Le nonce de Paris n'a jamais reçu per
sonne qui se soit qualifié de rédacteur au
Gil Blas ou ayant un rapport quelconque
avec ce journal;
2° Le nonce n'a jamais exposé, à des
personnes qui auraient pu se présenter sous
une fausse qualification, ni à personne, des
idées corame cellés contenues dans ledit
article du Gil Blas.
3° Le fait même que le Gil Blas n'a parlé
de ce prétendu entretien que trois mois
après la date où il aurait eu lieu, prouve
évidemment le peu de fondement d'une
telle assertion.
La Liberté s'amuse agréablement
des renseignements que nous avons
donnés sur la situation financière du
Grand-Orient :
. S'il y a, dit-elle, quelque enseignement à
tirer de ces données arithmétiques, o'est
que la frano-maçonnerie est un simple
Crqquemitaine, et que les catholiques ont
tort d'y voir la cheville ouvrière du régime
et,, d'en faire le bouo émissaire .d^ leurs
méoomptes, .
_Va pour Croquemitaine, si on veut
bien s'apercevoir que c'est un Croque-
mitaine extrêmement fâcheux, bien
vivant et malfaisant. C'est une consta-'
tation certainement facile pour la Li
berté, qui a plus d'une fois blâmé les
persécutions législatives 1 ou adminis
tratives dirigées contre des œuvres
catholiques. La Liberté n'ignore pas
tolur que nous comment ces déplora
bles mesures ont été constamment
proposées et votées par des francs*
maçons, à l'exception d'un -seuly le
docteur Desprès. C'est aussi la Liberté
qui a-■ révélé, ! par une analyse déve
loppée du livre de M. Gopm-Alban-
celli, comment la franc-maçonnerie
était parvenue à exercer dans le Par
lement une influence hors de toute
proportion avec la minorité qu'elle
représente dans le pays»
Il en ; a toujours été. de même, et
notre thèse est de montrer qu'il en va
être de même encore pour le plus
grand préjudice du bon ordre, ; du bon
sens et de la paix sociale, si on n'y
prend garde aux prochaines élections.
A la veille de la Révolution, les
francs-maçons n'étaient guère plus
nombreux en France qu'ils ne sont au
jourd'hui. Ils avaient600'loges : il yen
a présentement plus de 500/ On sait ce
qu'ils ont pu faire : la surprise,l'audace,
la violence, la terreur répandue ont
suppléé le nombre. Il en a été de
meme depuis en toutes les occasions
de trouble. Après la proclamation de
la République en 1870, on a vu des
villes de trente mille âmes trembler
tout à coup devant des individus sans*
autorité ni mandat que l'autorité et le
mandat qu'ils voulaient bien prendre
avec aplomb : une ceinture rouge, un
sabre au travers, une table à l'hôtel de
ville, des proclamations audacieuses...
et voilà tout: la gendarmerie, qui de
vait coffrer ces garnements, finissait
par être à leurs ordres. Regardons ce
qui se passe— du moins ce qu'on nous
laisse voir de ce qui se passe —■ au
Brésil, où la Révolution maçonnique
réalise enfin son rêve, et jugaons de
ce que nous verrions chez nous si les
loges triomphaient seulement un jour,
un seul 1
G. Bois.
Un Lord-Maira catholique
Nous , avons noté naguère l'émotion
un peu superficielle que causait à Lon
dres la perspective de voir un alder-
man catholique arriver aux honneurs
de la chaire civique et devenir lord-
maire de la capitale du Royaume-Uni.
Ce n'était pourtant pas tout à fait la
{tremière fois qu'il était question d'un
ord-maire appartenant à la religion
catholique. Mais il y a « fagot et fa
got ». Appartenir â une religion par
sa naissance et son baptême est une
chose, tenir à sa religion et la prati
quer en est une autre. Sir Polydore de
Keyser, qui fut lord-maire il y a trois
ans, était d'origine belge et catholi
que ; mais il n'entendait pas que sa re
ligion le gênât, et on l'avait vu avec
une parfaite aisance se donner un aur ,
mônier protestant etassister à tous les
services anglicans auxquels-les lords-
maires ont coutume d'assister.
Tel n'est point aujourd'hui le cas'
de Yalderman StuartKnil}. Dès qu'il
a été question de sa nomination,
M. Knill a fait ses réserves. L'autre
jour encorele lord-maire actuellement
en fonction, sir David Evans, lui a
posé, d'après les journaux, les ques
tions suivantes :
Nommerez-vous, si vous êtes élu lord-
maire, un chapelain de la mairie choisi dans
l'Eglise établie ? —Assisterez-voiis, lors
des cérémonies officielles, aux offices qui'
seront célébrés à Saint-Paul, à Saint-Lau
rent et en d'autres lieux où les cérémonies
religieuses sont oélébrées suivant < le rite |
anglioan?
Fort carrément, Yalderman Knill a
répondu :
Si je suis élu lord-maire, je nomme
rai un chapelain de mon Eglise. Mais je
prierai les aldermen de là cité de Londres
de choisir un olergyman de l'Eglise établie
pour remplir les fonctions officielles, et au
quel sera attribué le traitement habituelle
ment payé au chapelain du lord-maire ; jé.
rétribuerai moi-même lès services' de iùon
propre chapelain.
Je n'assisterai pas au service de l'Eglise
établie; mais, avec la permission de< mes
anciens dans la cour des aldermen, je nom
merai un iocum tenem pour me remplaoer à
ces cérémonies.
On pouvait s'attendre à vo ir les
journaux profiter de l'occasion' pour
faire du, zèle protestant et ressusciter
quelques vieilles tirades sur les dan 7
gers du papisme.
Il n'en a rien été, à part peut-être
quelques feuilles spéciales qui ont
pour mission d'entretenir, le vieux
levain de la réforme. On a même
trouvé le questionnaire du lord-maire
Evans un peu inconvenant. Du moins
la majorité des aldermen a été de cet
avis, et hier, au jour traditionnel de
la Sdint-Michel, M. Stuart Knill a été
nommé lord-maire pour l'année pro
chaine. En vain deux ou trois intran
sigeants de la corporation ont voulu
combattre cette élection au Guildhall
et créer du tumulte en faisant appel
aux vieux préjugés. Ils en ont été
pour leurs frais, et le nom de M. Knill
est sorti triomphant de la lutte.
Un article du Times paru hier ma
tin indiquait clairement ce résultat.
Ce journal,qui est rarement aussi bien
inspiré, disait que si on ne nommait
pas Yalderman Knill, il faudrait nom
mer un lord-maire juif et que ni les
habitants de Londres,ni la corporation
ne gagneraient quelque chose à écarter
un homme qui honorait sa religion et
suivait les inspirations de sa cons-
science, pour un juif qui,sans être pro
testant, s'arrangerait facilement de
toutes les cérémonies du culte pro
testant. Au temps de Shylock, fait re
marquer le Times , les juifs voulaient
bien commercer avec les chrétiens,leur
parler, marcher avec eux; mais ils ne
voulaient ni prier, ni manger,ni boire
avec eux. Aujourd'hui ces détails n©
leur coûtent plus rien. Mais le Times
ne voit pas que cela soit bien méritant
de leur part. Et il raille .les, protes
tants qui acceptent' ce. changement
du juif comme uni gain sérieux pour
l'orthodoxie. Le Times pourrait ajou
ter qu'un des derniers lords-maires a
été un juif, un Isaacs,et que. l 'honneur
de la grande charge civique de Lon
dres n'y a rien gagné : au contraire.
L. N. G.
Mgr Laouënan
Le pieux évêque,le vaillant mission
naire, l'apôtre savant et zélé dont l'E
glise de France est justement fière,
vient de succomber sous les coups de'
la maladie causée par quarante ans de
travaux et de fatigues. Mgr Làouenan
est mort à Montbeton, près de Mon-
tauban, au sanatorium fdtadé par la
générosité de Mme la comtesse de Mé4
nars, en faveur des prêtres des mis»
sions étrangères. 11 était venu là- cher
cher quelque repos, non-point la gaé-,
rison qu'il n'espérait pas, connaissant
mieux que personne l'état de,«es for
ces dépensées sans compter au ; service
de la civilisation et de la foi. • i .
Mgr Laouënan,fils d'un iarmateur da
Lannion, était né en 1822. Il était,-
eomme- son nom,- breton tout entier^
De banne heure, sa vocation ecclésias
tique se révéla ; et l'on put comprendre
qu'au sein d'une famille où régnait une.
grande aisance, il rêvait de labeurs et
de sacrifices; Au grand séminaire de
Saint-Brique où il vint après avoir
passé par Tréguier et Plouguernevelj
l'abbé Laouënan fut très,, remarqué,
L'évêque d'alors se résigna difficile
ment à laisser . s'éloigner un Vi jeunet
prêtre dont le zèle et l'intelligence pro
mettaient, pour lapiété du dipeè9e,;dea
fruits abondants. En 1846, après la pé
riode d'études et de prépa^at^ops subie
à la glorieuse et chère m^isop Vde la
rue du Bac, l'ahbé Laouënan. partait
pour Pondichéry. Toute sa carrière
devait se dérouler dans cette région•
On sait la grande, importancë des
écoles pour la prédication, religieuse
parmi les Indiens. Le nouveau mis
sionnaire eut, bientôt à exercer son
activité dans cet ordre de ; trava}ix,pour
lequel il était doué. Il occupa, longr
temps les fonctions de supérieur aii
collège colonial, où sè distribue un
enseignement complet. ,
Très jeune encore, il eut l'occasion
d'acquérir une expérience spéciale et
d'amener à l'état de science apçro*
fondie les notions qu'il avait rapide
ment recueillies sur le langage et, les 1
croyances des peuplades indoiies:
Vers 1850, le schisme, qui pendant
deux siècles a troublé les ' posses*-
sions portugaises de l'Inde, avait
causé des difficultés et dès tristesses
nouvelles. Le Saint-Père Pié IX dut
envoyer sur les lieux 1 des représenï
tants pour mettre fin aux gravés dis»
sentiménts dont la ville de Goa était
le foyer. La délégation avait Mgr B ûjx £
nand pour chef et l'abbé Laouënan
pour secrétaire. Celui-ci, an cours
de voyages à travers l'Indu, mit à
profit toutes les heures et toutes les
circonstances pour amasser des'do
cuments. On le vit courant guir ; tou9
les chemins pour observer le3 monu»
ments, visiter les temples,-,étudier les
traditions et les mœurs ; réunir, àveo
l'ardeur infatigable tfu savant et de l'a
pôtre, une foule d'indications préQi.e^i
ses. Sans doute, â cette époaiiè l'abbô
Laouënan n avait pa^ eîicorô pepsé ^
Il me oonfiait naïvement ses inquiétudes,
Wn désir curieux et sa peur de oet inconnu
yers lequelle,portaient ses passions"naisslïn-
tes,les exemples. et les discours de ses. çama-
ra^es, et dont l'écartaient l'ennui t la fausse
ga\eté, le. dégoût précooe delà vie, visibles
dftns leurs regards,, dans, leurs aocents^
dans Joute leur attitude. Gomment le plaisir
pouvait-il ê tre chose si douce j et porter des
fruits si amers? Et .cependant, malgré ce.
cri de son bon sens, malgré la révolte de
sa conscience chrétienne, malgré mes con
seils et mes prières, il se rapprochait de
jour en jour.de cet arbre.du fruit défendu,
où chaque génération vient à son tour cueil
lir la déchéance et la mort.
Ce qui le perdait,'o'était moins l'attrait
dlu mal que l'affaiblissement graduel en son.
âme de la notion du bien. Etre attaqué, mal
traité, violenté même^ au sujet de sa foi et
de sa; sagesse),.o'est dur parfois, me disait-il,
mais ça peut se. supporter. Ce qui est terri
ble, parce que o'est insaisissable, c'est ce.
soepticisme gouailleur qui so moque de tout,
du . mal comme du bien, de la vertu comme
du vice ; o'est ce mépris de toute chose,
de la religion, de la patrie, de la famille,
çjette blagueen un mot, pour l'appeler par
Son^nom^qui rit de .tout, ne respecte rien,
ni père ni mère, ni pudeur ni honneur, et
qui finit par envahir et empoisonner l'âme
comme les miasmes paludéens empoisonnent
le sang.
La blague, voilà le premier et le dernier
mot de'l'atelier ; .c'est le voltairianisme de
la rue. Voltaire osait se vanter dans ses
lettres à ses amis de ses communions sa
crilèges à Feraey. « Je viens de déjeuner h
l'église par devant notaire », écrivait-il le
jourde Pâques avec son cynisme de damné.
— A l'atelier,mon pauvre Paul entendait les
beaux esprits de l'endroit lui dire en rica-
p^nt ; « Si ça te rapporte quelque chose
d'aller à ton patronage, à la messe, à con
fesse, vas-y bravement, mon bonhomme.
Confesse-toi, communie, et fais-toi bien
payera L'argent des calotins est toujours»
bon & prendre. »
De-part et' d'autre, c'est la même inspira-
tion, le mépris de Dieu, de la vérité^ de
Pâme humaine; mais avec une différence®
fondamentale : le sacrilège que les philo
sophes de la lime et de l'étau conseillaient
en blaguant au pauvre apprenti, ils ne l'au
raient pas voulu commettre eux-mêmes pour
un empire, tandis que Voltaire lé commet
tait tranquillement et s'en vantait. Les im
pies de l'atelier ne sont le plus souvent que
des égarés et des inconscients-, Voltaire,
lui, était un misérable.
Parmi tous ces dangers, le pauvre enfant
atteignit la fin de son apprentissage sans
avoir entièrement rompu avec ses amis
d'enfance et ses habitudes chrétiennes ;
mais à peine ouvrier, l'occasion de chute,
écartée jusque-là, vint au-devant de lui et
triompha presque sans lutte de ses der
nières résistances; Il se précipita tête bais
sée dans les plaisirs mortels de Paris, et il
en sortit, quelques mois après,"usé jusqu'à
la cordé, démoli, dévoré : le corps y resta,
mais l'âme se réveilla et se retrouva tout
entière, La,maladie,chrétiennement accep-
tée, .lui rendit toutes les tendresses, toutes
les délicatesses de sa foi et de son cœur, et
il expira, repentant et purifié, au milieu de
ses vrais amis et des prières suprêmes de
l'Eglise, dans les br^s et sous les larmes
de sa mère.
Voilà la victime de l'atelier ; en voioi
maintenant le héros chrétien à vingt ans ;
il ne ressemble en rien à Paul : sous une
une frêle enveloppe, il porte, une âme éner
gique, fortement trempée dans la foi catho
lique. Au premier regard, on le prendrait
pour un enfant; au seoondjon reconnaît en lui
un homme. Il l'a toujoursétéy dè même qu'il
y en a qui ne le seront jamais» Vivre; pour!
lui,o'est faire son devoir. Au foyer paternèi,
il s'est toujours montré le plus , tendre de$
fils ; sa mère, veuve de bonne heure, a:rei,
trouvé en cet enfant de douze ans l'appui,*
le dévouement viril de son mari. A l'écôle,,
modèle de ses camarades, il « travaillé;-
obéi, respecté ^es maîtres, .sans un mo-,
ment. de défaillance. Tous les:
communion. . - .... : . ■ ■ ■ |
A l'atelier, la contradiction et la
n'ont fait qu'affirmer et mettre plus
vive lumière son invincible fermetés Ap-)
prenti, puis ouvrier dans une grande. typo-<
graphie, il s'est toujours- montré catho
lique , sans ostentation comme sans fai
blesse, et jamais les railleries, les- gro^'e-î
retés, les menaces même de ses ç8^ ara aea
d'atelier ne l'ont fait dévier 4-une. ligne ni
reculer d'un pas. .Peu à peu, les mauvais*
plaisants et les mauvais sujets se sont tus>
i^s ont désarmé devant des conviotiohs si
calmes et si fortes, et l'estime, l'affeotioit
même chez plusieurs ont succédé-aux quo*
libets et aux persécutions; ■
Un trait et une lettre de lui suffiront i l®
faire connaître tout entier dans son hé*
roïque simplicité, , ,
Un nouveau venu dans l'atelier; sorte
d'Hercule typographe, posant en fraric-ma*
çon, quoi-qu'il ne fût ni franc'ni-maçon, sa
mit dès, le premier jour à déblatérer devant '
lui contre la religion, les prêtres, les catho
liques, et il finit par s'éerier, avec unèf voix
de stentor et des-gestes d'énergumènes
« Je voudrais tenir un de ces clérioaux 1 Jet
l'êtriperais sur place et de la belle façon K '
Christian se, lève, s'avance vers lui, et le
regardant bien en face : k Etripez-mo^
dono, oar je suis clérical.—Toi, clérical}
misérable 1 hurle le colosse en levant sur la
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 84.15%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 84.15%.
- Collections numériques similaires La Tresne Jean Jacques Claire Lecomte marquis de La Tresne Jean Jacques Claire Lecomte marquis de /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "La Tresne Jean Jacques Claire Lecomte marquis de" or dc.contributor adj "La Tresne Jean Jacques Claire Lecomte marquis de")
- Auteurs similaires La Tresne Jean Jacques Claire Lecomte marquis de La Tresne Jean Jacques Claire Lecomte marquis de /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "La Tresne Jean Jacques Claire Lecomte marquis de" or dc.contributor adj "La Tresne Jean Jacques Claire Lecomte marquis de")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7078398/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7078398/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7078398/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7078398/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7078398
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7078398
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7078398/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest