Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1892-09-24
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 24 septembre 1892 24 septembre 1892
Description : 1892/09/24 (Numéro 8911). 1892/09/24 (Numéro 8911).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Samedi 24 Septembre 1892
N'8911. — Edition quotidienne
Samedi 24 Septembre 1892
ÉDITIO N QUOTID IENNE
PARIS ÉTRANGER
■t département! (union postal*)
Un an .»•».» 55 d 66 m
Six mois 28 50 8 .4 »
Trois mois. . . . 15 » 18 »
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On Vabonne à Rome, place du Gesù, 8
ÉDITION SEMI-QU ©SES £ENNE
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ÉTRANGER-
(union postal») .
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Lea abonnements parte nt des 1 " et 16 de chaque mola
XHKIT1BS ne répond pas des manuscrits qui loi soit idntsfr "*
ANNONCC8 ^
MM. LAGRANGE, CERF et G 1 ', 6, place de la Bourse
FRANCE
PARIS, 23 SEPTEMBRE 189*
La fête du centenaire de la procla
mation de la République a été favo
risée par le temps,qui était à souhait ;
aussi l'animation était-elle grande à
Paris :* la foule se pressait sur le pas
sage, le matin, de M. Carnot se ren
dant à la cérémonie du Panthéon ;
l'après-midi des * deux cortèges de la
rive droite et de la rive gauche avec
leurs chars allégoriques.
Au Panthéon, il y a eu les trois dis
cours annoncés de MM. Loubet, Chal-
lemel-Lacour et Floquet. Dans l'après-
midi, le programme a été ponctuelle
ment suivi par les deux cortèges. Le
soir, les illuminations ont été assez
maigres. »
En somme, journée très animée,
très gaie, mais peu d'enthousiasme.
On s'amusait sans beaucoup songer à
la politique.
Il est à croire qu'il en à été de même
en province.
On continue à parler d'un arbi
trage à Carmaux, le gouvernement
poursuivant son intervention pour
amener la direction des mines et les
grévistes à une entente à ce sujet. Si
les renseignements qu'on donne sur
les exigences des grévistes sont exacts,
1 entente sera difficilej
Nous disions que tout le monde n'a
vait pas été satisfait en Belgique du
manifeste rédigé par les citoyens
Basly et Lamendin et accepté par les
délégués, belges, qu'on accusait de
s'être laissé jouer. Le mécontente
ment se fait jour dans des manifesta
tions d'ouvriers belges dirigées con
tre les ouvriers français.
Trois discours, qui se répètent, se
complètent et aussi se contredisent,
car ils dénoncent des aspirations di
verses, ont marqué la fête du cen
tenaire.
Tous trois devaient louer la Révolu
tion, et aucun n'y a manqué ; mais si,
dans une telle circonstance et pour
des orateurs officiels, l'éloge, poussé
jusqu'au dithyrambe, était de rigueur,
on pouvait cependant y mêler quelque
justice, pour le passé. Il y aurait eu de
la grandeur à le faire ; on n'y a pas
songé. L'idée de la grandeur et du
devoir échappe aux hommes du jour.
. Le président du conseil, M. Loubet,
a ouvert la séance. Son discours com
posé de phrases banales chargées de
grands mots; montre un gouverne
ment sans principes et sans vues, vi
sant, pour durer, à contenter les oppor
tunistes et les radicaux sans décourager
les conservateurs ni les socialistes.
Ce gros homme paraît croire, en dépit
du proverbe, qu'une porte ne doit
être ni ouverte ni fermée.
M. Floquet.Forateur delà Chambre,
le représentant de la majorité parle
mentaire, toujours poseur, toujours
solennel et voisin au* ridicule, s'est
avancé vers l'extrême-gauche sans
lâcher tout à fait le centre, et a de
mandé en phrases vagues et sonores
des réformes sociales. Il a prouvé du
même coup qu'il n'entend rien â ces
questions. Ce gorgé, qui cependant
n'est pas encore satisfait, ignore abso
lument le caractère, la portée, la rai
son des revendications qu'il prend
sous son patronage, dans l'espoir d'y
trouver un point d'appui pour arriver
à décrocher la présidence de l'Etat.
L'orateur du Sénat, M. Challemel-
Lacour, a — fond et forme — mieux
parlé que les deux autres. Plus soli
dement et plus intelligemment répu
blicain que MM. Loubet et Floquet,
il comprend qu'il faut arriver à l'ac
cord des esprits et des intérêts pour
assurer l'avenir de la République. Cet
accord, le respect pratique de l'Eglise
et le dévouement raisonné aux besoins
des classes ouvrières peuvent seuls le
donner. M. Ghallemel-Lacour en est
convaincu ; il l'indique, mais il n'ose
pas le déclarer carrément. Au total,
u reste un opportuniste et n'a pas as
sez de vigueur de caractère pour dire
tout ce qu'il pense_ et condamner
ainsi son passé ! Celui-là non plus ne
fôFSL rioDt»
Au total, cette fête n'aura été qu'une
fête populaire. Les chars en bois
blanc et en carton, mais décorés de
soie, de velours, de fleurs et chargés
de masques ont eu plus de succès que
les discours, et c'était justice. Eux, en
effet, ils ont rempli leur office puis
que le public a été content. Ils laisse
ront un souvenir. Las discours ne
laisseront rien.
.Cette insuffisance des orateurs tient
à ûnt> cause que ni le gouvernement
ni les ciiefs des vieux partis républi
cains ne peuvent comprendre. La ré
publique qu'ils ont fêtée et qui, sous
des noms divers, dure,quantaux idées,
depuis cent ans, va mourir. Ce triom
phe est la préface d'un enterrement.
Oui, cette république, œuvre de l'im
piété et de la révolte, dont toute l'orga
nisation a eu pour but et pour résultat
de chasser Dieu de nos institutions, d'a
chever la ruine sociale d'une aristo
cratie déjà détournée de ses voies, et
de dominer un peuple devenu incons
cient de ses droits et de ses devoirs,
cette république est maintenant con
damnée. Nous aurens ou la démocra
tie conservatrice^ par?© l'esprit
chrétien l'éclairera, ou le socialisme,
qui achèverait la ruine morale et ma
térielle de la France.
Eugène Veuiixot.
M. Goblet s'acharne à vouloir être
un grand homme. Sans rééditer de
vieilles et trop faciles plaisanteries
sur sa taille, reconnaissons qu'il n'a
pas l'étoffe nécessaire à jouer ce
rôle. Lui, cependant, est gonflé de son
importance. Aussi, du moment où l'on
célébrait par des discours officiels le
centenaire de la République, M. Goblet
a-t-il pensé que la France ne se ré
jouirait qu'à demi,si lui, Goblet, n'of
frait pas son éloquence à l'admiration
des foules.
L'ancien président du conseil a donc
parlé mercredi soir, sous prétexte de
punch, au sein d'une réunion provo
quée par le comité républicain radical-
socialiste du premier arrondissement.
La conversation engagée depuis quel
ques jours entre opportunistes et radi
caux donne à ce discours un intérêt
particulier: c'est la vraie réponse de
M. Goblet aux avances des modérés,
et si le directeur delà Petite République
leur dit: Non! avec raideur, du moins
ne peuvent-ils lui reprocher de n'être
pas suffisamment clair.
Le nom seul du comité qui offrait le
punch à M. Goblet indique l'accen
tuation à gauche des radicaux : il
n'est plus simplement radical, l'ancien
président du conseil,-il se proclame
« radical-socialiste !»
En outre, ne voulant plus dire
« messieurs » et craignant d'employer
le terme « citoyens », il traite les as
sistants de « chers concitoyens » ;
c'est un acheminement vers la révo
lution.
Ecoutez aussi comment il traite les
opportunistes : parlant de l'évolution
nécessaire que la République, à son
avis, doit accomplir, M. Goblet s'é
crie :
Quelle évolution? Celle qui fera d'un
gouvernement bourgeois, organisé pour le
plus grand profit des classes supérieures,
un gouvernement d'égalité et de justice,
pour tout dire en un mot, le gouvernement
de la démocratie.
Ainsi voilà nos gouvernants actuels
traités de « bourgeois » par M. Goblet !
Qui donc parle en ce moment? Un
ancien ministre, ou bien un chef du
parti ouvrier ?
Après cette déclaration, M. Goblet
énumère les principales revendications
du programme radical-socialiste : ré
forme de l'impôt, séparation de l'Eglise
et de l'Etat, décentralisation adminis
trative, retrait des lois sur le scrutin
d'arrondissement et les candidatures
multiples, etc.
M. Goblet a voulu dire aussi son
mot sur l'adhésion des anciens partis
à la République : le paragraphe est à
citer :
Certes, quel que soit le motif de leur
adhésion tardive, je ne suis pas pour qu'on
la repousse, mais au contraire pour qu'on
fasse bon accueil à tous ceux dont la sincé
rité n'est pas suspecte. La République,
quoi qu'on en dise, a toujours été ouverte à
tous les hommes de bonne volonté. S'ils n'y
sont pas venus plus tôt, c'est qu'ils ne l'ont
pas voulu. Ne nous faisons pas illusion ce
pendant, et n'oublions pas ce qui nous sé
pare. Ce que veulent faire de ce gouverne-,
ment môme les plus sincères parmi les
nouveaux ralliés, c est une république réac
tionnaire et clérioale,et nous avons, nous, le
devoir d'en faire une république libérale,
c'est-à-dire destructive de toutes les opres-
sions qui peuvent menacer la libertés de
consciences ou des personnes, et progres
siste, c'est-à-dire marchant incessamment
d'un pas ferme et ininterrompu vers l'amé
lioration de notre état social.
Il y a du changement dans la ma
nière de voir de M. Goblet : l'an passé,
les radicaux n'admettaient point que
la porte de la République, dont ils
s'imaginaient avoir la clef dans leur
poche, pût s'ouvrir aux « ralliés ».
Aujourd'hui, l'orateur des radicaux-
socialistes place la question sur son
vrai terrain : le parti conservateur a
le droit incontestable de prendre place
dans la République ; il est vrai qu'il
soutient, — M. Goblet eût été aveu
gle de ne pas le reconnaître, — des
opinions très opposées à celles du
parti radical. La question est donc de
savoir lequel des deux partis prendra
le gouvernement. Pour nous, nous
avons bon espoir.
F. V.
Jérusalem
II
La libre-pensée veut retourner con
tre les livres saints l'hommage qu'elle
est forcée de leur rendre ; — ïïistoije,
dit-elle, histoire en effet, mais pareille
aux histoires humaines,qui n'ont au
cun rapport avec le surnaturel. —
Vaine prétention. Le premier pro
blème est résolu en notre faveur par
nos adversaires. Ils nous ont refusé
longtemps et à tout prix l'aveu qu'ils
signent aujourd'hui. Pour eux, la
Bible ne représentait qu'un ramassis
de fables, et c'était surtout le motif
par lequel ils repoussaient l'idée de
l'inspiration. Maintenant que la Bible
est reconnue exacte et sincère, ils re
courent à un autre prétexte. Ils en
inventeront toujours. Quoi qu'ils pré
tendent, ils sont contraints de modi
fier complètement leur tactique, et
ils restent sous le coup d'un démenti
qu'eux-mêmes se sont infligé. Notre
gain est manifeste. L'inspiration étant
une vérité d'ordre supérieur et pou
vant, par suite, s'accorder avec les
vérités ordinaires, le monde saura
bien mieux reconnaître le surnaturel
dans la Bible, déclarée, par tous les
juges, véridique.
D'ailleurs le champ n'est pas laissé
aux seuls adversaires ni aux indiffé
rents. Les chrétiens reprennent dans
l'exégèse et dans l'archéologie la place
à laquelle ils ont droit et, continuel
lement, l'élargissent. Parmi les signes
les plus clairs de cette renaissance, on
peut noter la création de l'Ecole pra
tique d'études bibliques, établie à Jé
rusalem. Au couvent dominicain de
Saint-Etienne, couvent construit sur
lé lieu même où le premier diacre,
premier martyr, donna sa vie pour,
attester Jésus, un enseignement com
plet est organisé et fonctionne. Là, à
proximité des matériaux et en présence
des souvenirs qui alimentent la con
troverse universelle, là sont distri
buées à de nombreux auditeurs les le
çons de la science pure, neuve et har
die. Pour apprécier le caractère et la
portée de ces études, il suffit d'ouvrir
une publication trimestrielle dirigée
par les professeurs du couvent de Saint-
Etienne. La Revue Biblique, imprimée à
Paris (1), fondée par les Pères Domi
nicains, a fourni en peu de temps une
somme considérable de travaux à la
hauteur de n'importe quelle critique (2).
Elle a parmi , ses collaborateurs des
religieux de diverses congrégations
et dé différents pays. Dominicains, Jé
suites, Barnabites, Lazaristes, Fran
ciscains, Pères de l'Assomption met
tent en commun leur savoir,qui fruc
tifie et promet des conquêtes superbes.
Hors de la Terre-Sainte proprement
dite, mais dans la même région, une
instruction solide et brillante est of
ferte à la jeunesse. Nous n'avons pas
besoin de dire quelle importance a
Y Université de Beyrouth dirigée par la
Compagnie de Jésus.
Donc, sur la terre que l'on croyait
à jamais épuisée, dans cette Jérusalem
qui était la figure de la décadence et
de l'abandon, voici un centre de cul
ture intellectuelle. Le développement
que peuvent recevoir ces efforts n'a
pour ainsi dire pas de limite. C'est la
foi qui les soutient. C'est la Bible qui
les conduit. Ils se déploient dans la
ville du Seigneur, sur tous les points
où séjourna le peuple messager des
promesses de rédemption. Le mouve
ment émane du Christ et remonte vers
Lui. Que les outils mécaniques pren
nent leur part de ce concours. Bateaux
à vapeur, voitures de poste, chemins
de fer, seraient-ils moins dignes que
les œuvres des architectes et des tisse
rands d'être bénis par Dieu et de ser
vir sa gloire '?
L'apparition de la science physique
et de la science historique sur le sol
que foulèrent les pieds de Jésus pour
rait être l'image de l'union à laquelle
tendent toutes les réalités, si opposées
qu'elles soient entre elles.
Ces deux ordres de connaissances
se trouvent dans des situations égale
ment fausses. La science expérimen
tale s'est jetée hors des voies de la
philosophie, et elle cherche vaine
ment ailleurs la solution que seules
les idées peuvent fournir. Elle conclut
au progrés, mais la loi de ce progrès,
mais la nature de cette force lui de
meurent inintelligibles. Comment se
fait-il qu'il y a un progrès? Nul pro
fesseur, nul ingénieur, renfermé dans
l'étude des phénomènes sensibles, ne
peut le dire ; et le but principal de
tant de travaux est manqué. Les com
mentateurs des textes et des docu
ments ne réussissent pas mieux : ils
enregistrent les faits sans en donner
l'explication. La certitude expéri
mentale et la certitude historique
sont affirmées par tout le monde;
mais la conclusion qu'il faut tirer de
leur existence, personne ne l'indique.
Des lois fixes, des actes volontaires et
réfléchis, un vaste enchaînement de
causes; on nous montre cela, et, si
nous demandons ce que cela signifie,
nous n'obtenons aucune réponse.
Les philosophes modernes n'avouent
pas qu'ils renoncent à leur rôle, qui
serait de raisonner sur les idées acqui
ses par les sciences; ils font pire: ils
se privent de la lumière dont ils ont
besoin. Aux chimistes, aux biologistes,
aux archéologues qui, par hasard, les
prient d'analyser et d'interpréter les
découvertes, ils laissent voir qu'ils ne
savent comment s'y prendre. Ceux
qui ont le plus de hardiesse ou de sin
cérité déclarent que la loi universelle
dans laquelle on devrait ranger les
lois générales et, avec celles-ci, les
lois particulières, réside trop loin de
nous. Un jour, M- Taine a pq.rlé de
« l'axiome éternel qui se prononce au
suprême sommet des choses » ; et ils
il
1) Librairie Lethielleux.
2) Voici le sommaire du numérode juillet: Le
fragment évangélique du Faj/oum, par le il. P.Savi,
barnabite; Le Livre des proto-hébreux de Chaldêe,
par le docteur Bourdais ; Mlia oapitqlim, p$r le
II. P. Ôermer-Durand,' de l'Assomption 1 ; Les
juifs établis en Palestine avant l'exede, par
M. l'abbé de Moor; Conférence sur le kikkar ou
talint hébreu, par le R. P. Cré, des mission
naires d'Afrique ; Une inscription palmyrienne,
par le R. P. Laerange, de l'ordre des Domini
cains et par M. le baron de Gontenson; Lettre de
Jérusalem, par le R. I?. Lagrange ; Le Clergé angli
can ,par le R.P. Faucher: Lettre de Smyrne, par
le R. P. QUivier, eto.
ont décidé que l'oracle définitif était
rendu. Le « suprême sommet des cho
ses » ! Pour cette ascension-là aucun
amateur ne se présente. Donc, sur le
genre humain qui doute, qui souffre,
qui gémit et qui souvent,sans le savoir,
implore, le ciel est fermé. Inaccessi
ble, la vérité qui nous passionne et
qui nous est plus nécessaire que le
pain ! Inaccessible !
Or, dans les vallées et dans les plai
nes que le nouveau chemin de fer va
traverser, un être doux et grave a
paru jadis qui disait aux foules stupé
faites : « Je suis la voie, la vérité et la
vie!... Personne ne vient au Père si
ce n'est par moi. » Il enseignait la
doctrine et accomplissait les actes
annoncés dans le Livre que l'exégèse
libre-penseuse reconnaît pour histo
rique. Il réalisait les promesses qui
remplissaient la loi écrite et les tradi
tions orales. Il venait renouer le lien
qui met en communication l'huma
nité avec le ciel ouvert. Aux audi
teurs qui lui demandaient s'il était le
Christ, le Messie qui devait combler
l'espérance des siècles, il répondait :
« C'est moi, qui vous parle. » Et sur
les chemins, dans les bourgades, dans
les carrefours, il prêchait l'amour de
Dieu, l'amour du prochain, l'oubli de
soi. Continuellement il enseignait que
le bonheur du monde est illusoire ;
que. le monde lui-même n'est qu'un
rêve ; que la seule vérité c'est l'Esprit,
antérieur à toutes choses, Père de
toutes choses, terme de toute exis
tence, refuge où la créature trouvé
le repos, la joie, l'inépuisable vie. Et
les ministres envoyés par les princes
des prêtres et par les pharisiens pour
le faire taire, s'en retournaient décon
certés, s'excusant de n'avoir pas osé
s'emparer de lui et attestant que ja
mais aucun homme n'avait « parlé
comme cet homme ! » Son œuvre, ar
rosée de son sang, est un édifice co
lossal, composé, d'éléments incorrup
tibles et radieux, qui embrasse la
terre et atteint le « suprême sommet
des choses ». Le Médiateur est venu,
il a terrassé le désespoir et la mort. Les
cieux sont ouverts ; et l'Eglise distri
bue leurs richesses.
La vertu morale de l'Evangile n'est
sérieusement méconnue de personne.
Athées et débauchés n'échappent pas
à l'ascendant de pureté qui se manifeste
dans l'enfant en prière,dans la mère vo
lontairement immolée, dans l'homme
qui consacre sa vie et son àme à la vé
rité, à la justice, à l'honneur, à tout ce
qui n'est pas lui. Une réalité existant
hors de nous peut seule expliquer le
don de soi-même et le prestige qu'il
exerce. L'héroïsme réfute le néant.
L'effort de la pensée n'est pas moins
démonstratif que celui du cœur. On
n'aime pas le néant et non plus on
ne saurait l'étudier. Donc la science
va nécessairement vers Dieu.
Tendrait-elle, par une nécessité de
son instinct, à un but inaccessible?
Ce serait la contradiction absolue, ce
serait l'impossibilité. Mais, pour elle,
comme pour le cœur, la médiation est
indispensable. Souvent on ne croit
que vaguement en Dieu ou bien on le
nie, parce qu'on ne parvient pas à se
faire la moindre idee de son action.
Dieu agit. Il est essentiellement acte.
Aristote et saint Thomas l'appellent
actus pur us. Or, quels rapports peu
vent subsister entre les phénomènes du
monde limité et l'infini vivant? Le
Médiateur a projeté la lumière sur ce
problème ; et par Lui, par Lui seul,
nous savons que la nature, création
de Dieu, est destinée à s'unir à
Dieu. Nous savons que la sagesse, qui
a choisi pour chaque chose une loi,
a fait de même pour l'ensemble. La
grande loi selon laquelle a été consti
tué le temps implique la succession et
les changements qu'on désigne par le
mot de progrès. Nous avons appris de
Jésus que l'unité règne au-dessus des
éléments divisés, et qu'elle les at
tire pour les unifier sans les confon
dre. Ce travail s'opère sous nos yeux,
avec notre participation, ou con
sciente, ou aveugle, ou contrainte.
Nous avons appris de Jésus que l'être
un ne vit pas isolé ; que l'unité et la
filuralité s'accordent dans la vie, dans
'amour et dans la science.
• Cette notion, inconnue avant le
Christ, éclaircit l'énigme où nous vi
vons. Par elle, nous comprenons com
ment les dissidences, les contrastes, les
heurts, les combats né sauraient dé
truire l'équilibre de la sphère intel
lectuelle ; pas plus que les orages, les
éruptions ou les cyclones n'ébranleni
la stabilité du monde visible. En effet,
il n'y a pas d'écart si emporté et si
prolongé qui ne concorde avec la di
rection générale imposée à la nature,
pas de contradiction qui ne se réduise
à l'harmonie.
Plus encore; la raison d'être du mal,
fréquente et terrible objection, nous
est en partie dévoilée. Le mal est per
mis parce qu'il est assujetti à servir
le bien. Le Dieu souverain s'est oc
troyé cette conquête. Voilà pourquoi,
ainsi que le dit Y Ecclésiastique, les
œuvres du Très-Haut sont « deux 4
deux », et « l'une conirè l'autre a ;
auQ et dm et unum contra unum. Er
reur, souffrance, mort, tout cela est
vraiment vaincu, puisque tout cela
rend témoignage à la vérité, m mé
rite, à H vie qui régnent éternelle
ment. Quatre cents ans avant le Christ,
Platon écrivait : « Il faut que quel-
« qu'un vienne pour jious instruire »,
Le Maître est venu; et sa vertu su
blime demeure; et l'historien et l'ex
périmentateur, qui s'étaient détournés
de Lui, se trouvent ramenés vers l'ho
rizon qu'ils pensaient fuir toiy ours.
Dans le pays où Jésus a glorifié l'hu
milité tout en répandant les splendeurs
de la lumière divine, là où l'orgueil
superbe s'est senti pénétré par la dour
ceur, la science croit braver Dieu, tan
dis qu'elle court sur la voie du bap
tême.
Quelle Jérusalem nouvelle,
Sort du fond du désert brillante de clartés 1
Nous pouvons concevoir un épa-
nouissement nouveau de l'esprit
chrétien : l'Evangile vivifiant la
science comme il anime la morale, loi
des nations, instrument de justice, ga
rantie du présent et de l'avenir. Ainsi
nous exhorte le sage et vaillant
Léon XIII, qui défie la force brutale
victorieuse. A Jérusalem, Jésus, an
nonçant la ruine du Temple, ras
surait ses disciples en leur expli
quant comment la destruction et la
mort peuvent enfanter : « Lorsque
« vous entendrez parler de guerre et de,
« bruits de guerres, ne craignez pas,'
« parce qu'z'if faut que ces choses arri-
« vent. » Nous possédons par Lui la
raison d'espérer jusque sur le bord
de l'abîme. Nous savons que l'abîme
séculaire peut être comblé en un ins
tant et que du sépulcre de Jésus lu. vio
s'est élancée triomphante. Or, le tom
beau, prophétisé par Isaïe, est tou
jours « glorieux ».
Eugène Tavernier.
Correspondance Romaine
Rome, 20 septembre.
La nomination de l'illustre orienta
liste, le T. R. P Ciasca, au poste de
Ero-secrétaire de la Propagande, a
esoin de quelque explication, car
autrement on ne comprendrait pas
pourquoi on a créé un pro-secrétaire
du moment qu'il y a un secrétaire
dans la personne de Mgr Persico.
Lorsque, il y a deux mois, S. Em. le
cardinal Ledochowski, préfet de la
Propagande, pour se soustraire à la
chaleur étouffante de Rome, se rendit
en Suisse, Mgr Persico,effrayé de là
lourde charge d'affaires qui allait peser
sur lui, demanda un aide,que le Saint-
Père lui donna dans la personne de
Mgr Ciasca, des ermites de Saint-Au
gustin, nommé, dans le consistoire
du 1 er juin de l'année dernière, arche
vêque titulaire de Larisse. Or, le car
dinal Ledochowski étant rentré à Rome
Mgr Ciasca aurait dû retourner à ses
anciennes fonctions de préfet des ar
chives du Vatican; mais le Saint-Père,
désirant qu'il ne sorte pas de la Pro
pagande, a voulu lui donner une po
sition officielle en le nommant pro
secrétaire.
Cette nomination signifie, première
ment, que Mgr Persico va bientôt
quitter la secrétairerie de la Propa
gande ; puis, que Mgr Ciasca est déjà
désigné comme son successeur. Pour
ce qui regarde la nouvelle destination
de Mgr Persico, on dit depuis long
temps, et je crois que c'est vrai, qu'il
sera créé cardinal dans le proohain
consistoire. Je sais qu'autrefois il fut
question de l'envoyer nonce en Es
pagne, pour y remplacer Mgr Di Pie-
tro, lorsque celui-ci serait élevé à la
pourpre; mais je crois savoir que, à
cause de son grand âge, ce projet a
été abandonné.
Mgr Tripepi, qui succède' à Mgr
Ciasca dans la préfecture des archives
du Vatican, est né dans une petite
ville de la Calabre. dans l'Italie méri
dionale. Il est venu tout jeune à Rome,
où il a fait son cours de théologie.
Après,il s'est particulièrement adonné
aux études historiques, surtout pour
ce qui regarde l'histoire ecclésiastique,
et a publié plusieurs importants ou
vrages apologétiques sur la Papauté.
Dans son modeste logis au palais du
Vatican, il vit tout à fait dans la re
traite, ne s'oeoupant que de ses
études.
On a annoncé que Mgr SatqlU,
président de l'academie des Nobles
ecclésiastiques , était envoyé aux
Etats-Unis pour représenter le Saint-
Père aux fêtes colombiennes de Chi
cago; je crois savoir- que la mission
de l'illustre prélat a un but bien plus
important. On se rappelle la question
soulevée aux Etats-Unis à proposées
éoolçs cédées par Mgr Ireland, arche
vêque de Saint-Paul de Minnesota, à
deux municipalités de son diocèse, et
d'une décision déclara toterari posse en certains cas
la méthode suivie en cette occasion
par Mgr l'archevêque de Saint-Paul.
Malgré çette décision lea esprit» ne
s'étant pas complètement calmés, le
Saint-Père aurait décidé que la ques
tion serait étudiée et examinée sur les
lieux par un personnage, qui, en sa
qualité d'étranger, serait tout à fait
sîins prévention et par conséquent
complètement impartial. Telle serait
précisément la mission confiée à Mgr
Satolli, qui, doué d'un talent et d'une
prudence exceptionnels, pourra d'au
tant xnieux s'en acquitter, qu'il est
déjà bien connu par l'épiscopat amé
ricain, ayant représenté le Saint-Père
^ ^inauguration de l'université catho
lique de Washington.
Pans cota, dernière correspondance,
j'annonçais que M. Colucci, commis*
saire pour les hôpitaux de Rome, ve-
' nait de commencer la laïcisation en
chassant de l'hôpital des fous les re
ligieux de la Miséricorde, qui, depuis
près de trente ans, en avaient la sur
veillance. Voiciencore un exploit _ de
M. le commissaire.
' La question des hôpitaux se résuma
en deux mots : les revenus ne suffi
sent pas aux dépenses. Les années
passées, c'était la municipalité qui ré*
tablissait l'équilibre du budget des
hôpitaux; mais, depuis que M.Grispi,
attribuant au gouvernement les reve
nus des confréries de Rome, a exo
néré des dépenses de l'assistance pu
blique la municipalité, celle-ci n'^
{»lus rien à voir avec les hôpitaux, et,
e gouvernement ne voulant pas. leur
venir en aide, l'administration s'est
vue dans la nécessité de réduire lea
dépenses. M. Silvestrelli, le premier
commissaire royal, connaissant les
besoins d.e la ville, n'eut pas le cou
rage de faire cette réduction et donna,
sa démission; mais son successeur,
M. Colucci, n'a pas les mêmes scru
pules, et il a décrété la suppression
de deux hôpitaux : celui de Sainte-?
Marie de la Consolation pour les bles-r
sés, et celui de la Très Sainte-Trinité
pour les pèlerins et les convales
cents. ' -
De sorte que pendant que l'accrois
sement ûe la population exigerait da
nouveaux hôpitaux, Rome en verra
diminuer le nombre, et les malades
trouveront plus difficilement un abri.
Voilà le ; progrès de la capitale , du.
royaume d'Italie : on détruit ce que les*-
Papes avaient créé !
La sûreté publique laisse de jour
en j dur [davantage à désirer. On peut
dire que pasun jour ne s'écoule sans
nous apporter quelque nouvelle aven
ture de brigandage. En Sicile, quoiqua
les autorités aient déployé une éner
gie qui, n'est pas dans leur habitude,
1 es brigands fourmillent d'un bout à
l'autre de l'île. Pas plus tard qu'hier^
des lettres privées — car le gouverne
ment, ne pouvant empêcher les faits,tâ
che de les cacher—annonçaient qu'un
riche propriétaire dès environs de Ga-
tane venait d'être saisi par les bri
gands, qui demandaient une rançon
de 50,000 francs. A proximité de Rome,
les vols se suivent et se ressemblent.
Dans une semaine on a eu à enregis
trer un marchand colporteur dévalisé
sur la route de Palombara, une bour
gade près de Mentana; six charretiers
assaillis et dépouillés pas loin de Pi-
perno; les domestiques du princo
Brancaccio volés de tout ce qu'ils
avaient sur eux pendant que de ï>as-
catiils se rendaient, en break, à Monte
Porzio. La campagne est terrorisé^
par l'audace des brigands, qui redou
ble, encouragée pa,r l'impuissance du
gouvernement.
Tous ceux qui ont fréquenté le Va
tican pendant la seconde moitié de ca
siècle, c'est-à-dire du commencement
du Pontificat de Pie IX jusqu'à aujour
d'hui, ont connu certainement un des
valets de chambre du Pape ( Scopatori
Segreti) Joseph Minoocheri. Il était
d'Imola, et Mgr Mastaï l'avait pris à
son service, en 1834, deux ans après
que de l'archevêché de Spolète il eûtétô
transféré à Imola. Depuis lors, le
fidèle serviteur n'avait plus quitté son
bon maître, et lorsque, le Quirinal
cerné par les révolutionnaires, Pie IX
réussit à s'évader et se réfugia à Gaëto,
Joseph Minoccheri était parmi les
quelques familiers à qui le secret d^
la fuite avait été révélé. Après la xaoi't
de Pie IX, le nouveau Pape garda le
vieux serviteur de son prédécesseur.
Ce fidèle de deux Pontifes est mort
dans le palais du Vatican, le 24 décem-
bre 1891, âgé dô 78 ans. Qufâlâud
temps avant sa mort, il avait dicté &
son fils, le chanoine dom Louis, ses
souvenirs sur la vie de Pie IX, pen
dant son épiscopat à Imola et son
Pontificat. Ce sont de petites anecdo
tes, racontées en toute simplicité^
dans une forme en harmonie avea
l'humble condition de l'auteur, et pour
tant bien intéressantes comme tout ce
qui a rapport à la vie intime des grands
hommes. .
M. le professeur Antoine-Marie Bo-
ïietti, rédacteur de YOssermtore Ro-
manot, vient de recueillir ces souve
nirs, en y ajoutant d'importants dé
tails sur la mort de Pie IX, Sur son
voyage au Chili, et sur sa courageusa
conduite à Spolète pendant l'orageuse
période de la révolution de 1831 ; il
les a publiés en un volume intitulé :
fio IX à Imola e Roma. Ce petit vo
lume sera lu avec plaisir par tous
ceux qui gardent dans leur cour 16
souvenir du grand Pontife.
Le Centenaire
au pantheon
La fête de la proclamation do la Répu
blique a été favorisée par un temps superbe-
aussi la foule se pressait nombreuse, dès là
première heure, non seulement aux abords
du Panthéon, mais aussi sur la route que
devait suivre le président de la République"
accompagné du général Borius, secrétaire
général de la présidence, suivi des minis-,
très, escorté d un peloton de cuirassiors
Las trottoirs de la rue Soufflot étaient t>ar^
ticulièrement couverts de monde ; il v avait
du monde aussi aux fenêtres et jusque sur
les toits ; la chaussée restait libre, crâce à
uae double haie d'agents de police «t
N'8911. — Edition quotidienne
Samedi 24 Septembre 1892
ÉDITIO N QUOTID IENNE
PARIS ÉTRANGER
■t département! (union postal*)
Un an .»•».» 55 d 66 m
Six mois 28 50 8 .4 »
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XHKIT1BS ne répond pas des manuscrits qui loi soit idntsfr "*
ANNONCC8 ^
MM. LAGRANGE, CERF et G 1 ', 6, place de la Bourse
FRANCE
PARIS, 23 SEPTEMBRE 189*
La fête du centenaire de la procla
mation de la République a été favo
risée par le temps,qui était à souhait ;
aussi l'animation était-elle grande à
Paris :* la foule se pressait sur le pas
sage, le matin, de M. Carnot se ren
dant à la cérémonie du Panthéon ;
l'après-midi des * deux cortèges de la
rive droite et de la rive gauche avec
leurs chars allégoriques.
Au Panthéon, il y a eu les trois dis
cours annoncés de MM. Loubet, Chal-
lemel-Lacour et Floquet. Dans l'après-
midi, le programme a été ponctuelle
ment suivi par les deux cortèges. Le
soir, les illuminations ont été assez
maigres. »
En somme, journée très animée,
très gaie, mais peu d'enthousiasme.
On s'amusait sans beaucoup songer à
la politique.
Il est à croire qu'il en à été de même
en province.
On continue à parler d'un arbi
trage à Carmaux, le gouvernement
poursuivant son intervention pour
amener la direction des mines et les
grévistes à une entente à ce sujet. Si
les renseignements qu'on donne sur
les exigences des grévistes sont exacts,
1 entente sera difficilej
Nous disions que tout le monde n'a
vait pas été satisfait en Belgique du
manifeste rédigé par les citoyens
Basly et Lamendin et accepté par les
délégués, belges, qu'on accusait de
s'être laissé jouer. Le mécontente
ment se fait jour dans des manifesta
tions d'ouvriers belges dirigées con
tre les ouvriers français.
Trois discours, qui se répètent, se
complètent et aussi se contredisent,
car ils dénoncent des aspirations di
verses, ont marqué la fête du cen
tenaire.
Tous trois devaient louer la Révolu
tion, et aucun n'y a manqué ; mais si,
dans une telle circonstance et pour
des orateurs officiels, l'éloge, poussé
jusqu'au dithyrambe, était de rigueur,
on pouvait cependant y mêler quelque
justice, pour le passé. Il y aurait eu de
la grandeur à le faire ; on n'y a pas
songé. L'idée de la grandeur et du
devoir échappe aux hommes du jour.
. Le président du conseil, M. Loubet,
a ouvert la séance. Son discours com
posé de phrases banales chargées de
grands mots; montre un gouverne
ment sans principes et sans vues, vi
sant, pour durer, à contenter les oppor
tunistes et les radicaux sans décourager
les conservateurs ni les socialistes.
Ce gros homme paraît croire, en dépit
du proverbe, qu'une porte ne doit
être ni ouverte ni fermée.
M. Floquet.Forateur delà Chambre,
le représentant de la majorité parle
mentaire, toujours poseur, toujours
solennel et voisin au* ridicule, s'est
avancé vers l'extrême-gauche sans
lâcher tout à fait le centre, et a de
mandé en phrases vagues et sonores
des réformes sociales. Il a prouvé du
même coup qu'il n'entend rien â ces
questions. Ce gorgé, qui cependant
n'est pas encore satisfait, ignore abso
lument le caractère, la portée, la rai
son des revendications qu'il prend
sous son patronage, dans l'espoir d'y
trouver un point d'appui pour arriver
à décrocher la présidence de l'Etat.
L'orateur du Sénat, M. Challemel-
Lacour, a — fond et forme — mieux
parlé que les deux autres. Plus soli
dement et plus intelligemment répu
blicain que MM. Loubet et Floquet,
il comprend qu'il faut arriver à l'ac
cord des esprits et des intérêts pour
assurer l'avenir de la République. Cet
accord, le respect pratique de l'Eglise
et le dévouement raisonné aux besoins
des classes ouvrières peuvent seuls le
donner. M. Ghallemel-Lacour en est
convaincu ; il l'indique, mais il n'ose
pas le déclarer carrément. Au total,
u reste un opportuniste et n'a pas as
sez de vigueur de caractère pour dire
tout ce qu'il pense_ et condamner
ainsi son passé ! Celui-là non plus ne
fôFSL rioDt»
Au total, cette fête n'aura été qu'une
fête populaire. Les chars en bois
blanc et en carton, mais décorés de
soie, de velours, de fleurs et chargés
de masques ont eu plus de succès que
les discours, et c'était justice. Eux, en
effet, ils ont rempli leur office puis
que le public a été content. Ils laisse
ront un souvenir. Las discours ne
laisseront rien.
.Cette insuffisance des orateurs tient
à ûnt> cause que ni le gouvernement
ni les ciiefs des vieux partis républi
cains ne peuvent comprendre. La ré
publique qu'ils ont fêtée et qui, sous
des noms divers, dure,quantaux idées,
depuis cent ans, va mourir. Ce triom
phe est la préface d'un enterrement.
Oui, cette république, œuvre de l'im
piété et de la révolte, dont toute l'orga
nisation a eu pour but et pour résultat
de chasser Dieu de nos institutions, d'a
chever la ruine sociale d'une aristo
cratie déjà détournée de ses voies, et
de dominer un peuple devenu incons
cient de ses droits et de ses devoirs,
cette république est maintenant con
damnée. Nous aurens ou la démocra
tie conservatrice^ par?© l'esprit
chrétien l'éclairera, ou le socialisme,
qui achèverait la ruine morale et ma
térielle de la France.
Eugène Veuiixot.
M. Goblet s'acharne à vouloir être
un grand homme. Sans rééditer de
vieilles et trop faciles plaisanteries
sur sa taille, reconnaissons qu'il n'a
pas l'étoffe nécessaire à jouer ce
rôle. Lui, cependant, est gonflé de son
importance. Aussi, du moment où l'on
célébrait par des discours officiels le
centenaire de la République, M. Goblet
a-t-il pensé que la France ne se ré
jouirait qu'à demi,si lui, Goblet, n'of
frait pas son éloquence à l'admiration
des foules.
L'ancien président du conseil a donc
parlé mercredi soir, sous prétexte de
punch, au sein d'une réunion provo
quée par le comité républicain radical-
socialiste du premier arrondissement.
La conversation engagée depuis quel
ques jours entre opportunistes et radi
caux donne à ce discours un intérêt
particulier: c'est la vraie réponse de
M. Goblet aux avances des modérés,
et si le directeur delà Petite République
leur dit: Non! avec raideur, du moins
ne peuvent-ils lui reprocher de n'être
pas suffisamment clair.
Le nom seul du comité qui offrait le
punch à M. Goblet indique l'accen
tuation à gauche des radicaux : il
n'est plus simplement radical, l'ancien
président du conseil,-il se proclame
« radical-socialiste !»
En outre, ne voulant plus dire
« messieurs » et craignant d'employer
le terme « citoyens », il traite les as
sistants de « chers concitoyens » ;
c'est un acheminement vers la révo
lution.
Ecoutez aussi comment il traite les
opportunistes : parlant de l'évolution
nécessaire que la République, à son
avis, doit accomplir, M. Goblet s'é
crie :
Quelle évolution? Celle qui fera d'un
gouvernement bourgeois, organisé pour le
plus grand profit des classes supérieures,
un gouvernement d'égalité et de justice,
pour tout dire en un mot, le gouvernement
de la démocratie.
Ainsi voilà nos gouvernants actuels
traités de « bourgeois » par M. Goblet !
Qui donc parle en ce moment? Un
ancien ministre, ou bien un chef du
parti ouvrier ?
Après cette déclaration, M. Goblet
énumère les principales revendications
du programme radical-socialiste : ré
forme de l'impôt, séparation de l'Eglise
et de l'Etat, décentralisation adminis
trative, retrait des lois sur le scrutin
d'arrondissement et les candidatures
multiples, etc.
M. Goblet a voulu dire aussi son
mot sur l'adhésion des anciens partis
à la République : le paragraphe est à
citer :
Certes, quel que soit le motif de leur
adhésion tardive, je ne suis pas pour qu'on
la repousse, mais au contraire pour qu'on
fasse bon accueil à tous ceux dont la sincé
rité n'est pas suspecte. La République,
quoi qu'on en dise, a toujours été ouverte à
tous les hommes de bonne volonté. S'ils n'y
sont pas venus plus tôt, c'est qu'ils ne l'ont
pas voulu. Ne nous faisons pas illusion ce
pendant, et n'oublions pas ce qui nous sé
pare. Ce que veulent faire de ce gouverne-,
ment môme les plus sincères parmi les
nouveaux ralliés, c est une république réac
tionnaire et clérioale,et nous avons, nous, le
devoir d'en faire une république libérale,
c'est-à-dire destructive de toutes les opres-
sions qui peuvent menacer la libertés de
consciences ou des personnes, et progres
siste, c'est-à-dire marchant incessamment
d'un pas ferme et ininterrompu vers l'amé
lioration de notre état social.
Il y a du changement dans la ma
nière de voir de M. Goblet : l'an passé,
les radicaux n'admettaient point que
la porte de la République, dont ils
s'imaginaient avoir la clef dans leur
poche, pût s'ouvrir aux « ralliés ».
Aujourd'hui, l'orateur des radicaux-
socialistes place la question sur son
vrai terrain : le parti conservateur a
le droit incontestable de prendre place
dans la République ; il est vrai qu'il
soutient, — M. Goblet eût été aveu
gle de ne pas le reconnaître, — des
opinions très opposées à celles du
parti radical. La question est donc de
savoir lequel des deux partis prendra
le gouvernement. Pour nous, nous
avons bon espoir.
F. V.
Jérusalem
II
La libre-pensée veut retourner con
tre les livres saints l'hommage qu'elle
est forcée de leur rendre ; — ïïistoije,
dit-elle, histoire en effet, mais pareille
aux histoires humaines,qui n'ont au
cun rapport avec le surnaturel. —
Vaine prétention. Le premier pro
blème est résolu en notre faveur par
nos adversaires. Ils nous ont refusé
longtemps et à tout prix l'aveu qu'ils
signent aujourd'hui. Pour eux, la
Bible ne représentait qu'un ramassis
de fables, et c'était surtout le motif
par lequel ils repoussaient l'idée de
l'inspiration. Maintenant que la Bible
est reconnue exacte et sincère, ils re
courent à un autre prétexte. Ils en
inventeront toujours. Quoi qu'ils pré
tendent, ils sont contraints de modi
fier complètement leur tactique, et
ils restent sous le coup d'un démenti
qu'eux-mêmes se sont infligé. Notre
gain est manifeste. L'inspiration étant
une vérité d'ordre supérieur et pou
vant, par suite, s'accorder avec les
vérités ordinaires, le monde saura
bien mieux reconnaître le surnaturel
dans la Bible, déclarée, par tous les
juges, véridique.
D'ailleurs le champ n'est pas laissé
aux seuls adversaires ni aux indiffé
rents. Les chrétiens reprennent dans
l'exégèse et dans l'archéologie la place
à laquelle ils ont droit et, continuel
lement, l'élargissent. Parmi les signes
les plus clairs de cette renaissance, on
peut noter la création de l'Ecole pra
tique d'études bibliques, établie à Jé
rusalem. Au couvent dominicain de
Saint-Etienne, couvent construit sur
lé lieu même où le premier diacre,
premier martyr, donna sa vie pour,
attester Jésus, un enseignement com
plet est organisé et fonctionne. Là, à
proximité des matériaux et en présence
des souvenirs qui alimentent la con
troverse universelle, là sont distri
buées à de nombreux auditeurs les le
çons de la science pure, neuve et har
die. Pour apprécier le caractère et la
portée de ces études, il suffit d'ouvrir
une publication trimestrielle dirigée
par les professeurs du couvent de Saint-
Etienne. La Revue Biblique, imprimée à
Paris (1), fondée par les Pères Domi
nicains, a fourni en peu de temps une
somme considérable de travaux à la
hauteur de n'importe quelle critique (2).
Elle a parmi , ses collaborateurs des
religieux de diverses congrégations
et dé différents pays. Dominicains, Jé
suites, Barnabites, Lazaristes, Fran
ciscains, Pères de l'Assomption met
tent en commun leur savoir,qui fruc
tifie et promet des conquêtes superbes.
Hors de la Terre-Sainte proprement
dite, mais dans la même région, une
instruction solide et brillante est of
ferte à la jeunesse. Nous n'avons pas
besoin de dire quelle importance a
Y Université de Beyrouth dirigée par la
Compagnie de Jésus.
Donc, sur la terre que l'on croyait
à jamais épuisée, dans cette Jérusalem
qui était la figure de la décadence et
de l'abandon, voici un centre de cul
ture intellectuelle. Le développement
que peuvent recevoir ces efforts n'a
pour ainsi dire pas de limite. C'est la
foi qui les soutient. C'est la Bible qui
les conduit. Ils se déploient dans la
ville du Seigneur, sur tous les points
où séjourna le peuple messager des
promesses de rédemption. Le mouve
ment émane du Christ et remonte vers
Lui. Que les outils mécaniques pren
nent leur part de ce concours. Bateaux
à vapeur, voitures de poste, chemins
de fer, seraient-ils moins dignes que
les œuvres des architectes et des tisse
rands d'être bénis par Dieu et de ser
vir sa gloire '?
L'apparition de la science physique
et de la science historique sur le sol
que foulèrent les pieds de Jésus pour
rait être l'image de l'union à laquelle
tendent toutes les réalités, si opposées
qu'elles soient entre elles.
Ces deux ordres de connaissances
se trouvent dans des situations égale
ment fausses. La science expérimen
tale s'est jetée hors des voies de la
philosophie, et elle cherche vaine
ment ailleurs la solution que seules
les idées peuvent fournir. Elle conclut
au progrés, mais la loi de ce progrès,
mais la nature de cette force lui de
meurent inintelligibles. Comment se
fait-il qu'il y a un progrès? Nul pro
fesseur, nul ingénieur, renfermé dans
l'étude des phénomènes sensibles, ne
peut le dire ; et le but principal de
tant de travaux est manqué. Les com
mentateurs des textes et des docu
ments ne réussissent pas mieux : ils
enregistrent les faits sans en donner
l'explication. La certitude expéri
mentale et la certitude historique
sont affirmées par tout le monde;
mais la conclusion qu'il faut tirer de
leur existence, personne ne l'indique.
Des lois fixes, des actes volontaires et
réfléchis, un vaste enchaînement de
causes; on nous montre cela, et, si
nous demandons ce que cela signifie,
nous n'obtenons aucune réponse.
Les philosophes modernes n'avouent
pas qu'ils renoncent à leur rôle, qui
serait de raisonner sur les idées acqui
ses par les sciences; ils font pire: ils
se privent de la lumière dont ils ont
besoin. Aux chimistes, aux biologistes,
aux archéologues qui, par hasard, les
prient d'analyser et d'interpréter les
découvertes, ils laissent voir qu'ils ne
savent comment s'y prendre. Ceux
qui ont le plus de hardiesse ou de sin
cérité déclarent que la loi universelle
dans laquelle on devrait ranger les
lois générales et, avec celles-ci, les
lois particulières, réside trop loin de
nous. Un jour, M- Taine a pq.rlé de
« l'axiome éternel qui se prononce au
suprême sommet des choses » ; et ils
il
1) Librairie Lethielleux.
2) Voici le sommaire du numérode juillet: Le
fragment évangélique du Faj/oum, par le il. P.Savi,
barnabite; Le Livre des proto-hébreux de Chaldêe,
par le docteur Bourdais ; Mlia oapitqlim, p$r le
II. P. Ôermer-Durand,' de l'Assomption 1 ; Les
juifs établis en Palestine avant l'exede, par
M. l'abbé de Moor; Conférence sur le kikkar ou
talint hébreu, par le R. P. Cré, des mission
naires d'Afrique ; Une inscription palmyrienne,
par le R. P. Laerange, de l'ordre des Domini
cains et par M. le baron de Gontenson; Lettre de
Jérusalem, par le R. I?. Lagrange ; Le Clergé angli
can ,par le R.P. Faucher: Lettre de Smyrne, par
le R. P. QUivier, eto.
ont décidé que l'oracle définitif était
rendu. Le « suprême sommet des cho
ses » ! Pour cette ascension-là aucun
amateur ne se présente. Donc, sur le
genre humain qui doute, qui souffre,
qui gémit et qui souvent,sans le savoir,
implore, le ciel est fermé. Inaccessi
ble, la vérité qui nous passionne et
qui nous est plus nécessaire que le
pain ! Inaccessible !
Or, dans les vallées et dans les plai
nes que le nouveau chemin de fer va
traverser, un être doux et grave a
paru jadis qui disait aux foules stupé
faites : « Je suis la voie, la vérité et la
vie!... Personne ne vient au Père si
ce n'est par moi. » Il enseignait la
doctrine et accomplissait les actes
annoncés dans le Livre que l'exégèse
libre-penseuse reconnaît pour histo
rique. Il réalisait les promesses qui
remplissaient la loi écrite et les tradi
tions orales. Il venait renouer le lien
qui met en communication l'huma
nité avec le ciel ouvert. Aux audi
teurs qui lui demandaient s'il était le
Christ, le Messie qui devait combler
l'espérance des siècles, il répondait :
« C'est moi, qui vous parle. » Et sur
les chemins, dans les bourgades, dans
les carrefours, il prêchait l'amour de
Dieu, l'amour du prochain, l'oubli de
soi. Continuellement il enseignait que
le bonheur du monde est illusoire ;
que. le monde lui-même n'est qu'un
rêve ; que la seule vérité c'est l'Esprit,
antérieur à toutes choses, Père de
toutes choses, terme de toute exis
tence, refuge où la créature trouvé
le repos, la joie, l'inépuisable vie. Et
les ministres envoyés par les princes
des prêtres et par les pharisiens pour
le faire taire, s'en retournaient décon
certés, s'excusant de n'avoir pas osé
s'emparer de lui et attestant que ja
mais aucun homme n'avait « parlé
comme cet homme ! » Son œuvre, ar
rosée de son sang, est un édifice co
lossal, composé, d'éléments incorrup
tibles et radieux, qui embrasse la
terre et atteint le « suprême sommet
des choses ». Le Médiateur est venu,
il a terrassé le désespoir et la mort. Les
cieux sont ouverts ; et l'Eglise distri
bue leurs richesses.
La vertu morale de l'Evangile n'est
sérieusement méconnue de personne.
Athées et débauchés n'échappent pas
à l'ascendant de pureté qui se manifeste
dans l'enfant en prière,dans la mère vo
lontairement immolée, dans l'homme
qui consacre sa vie et son àme à la vé
rité, à la justice, à l'honneur, à tout ce
qui n'est pas lui. Une réalité existant
hors de nous peut seule expliquer le
don de soi-même et le prestige qu'il
exerce. L'héroïsme réfute le néant.
L'effort de la pensée n'est pas moins
démonstratif que celui du cœur. On
n'aime pas le néant et non plus on
ne saurait l'étudier. Donc la science
va nécessairement vers Dieu.
Tendrait-elle, par une nécessité de
son instinct, à un but inaccessible?
Ce serait la contradiction absolue, ce
serait l'impossibilité. Mais, pour elle,
comme pour le cœur, la médiation est
indispensable. Souvent on ne croit
que vaguement en Dieu ou bien on le
nie, parce qu'on ne parvient pas à se
faire la moindre idee de son action.
Dieu agit. Il est essentiellement acte.
Aristote et saint Thomas l'appellent
actus pur us. Or, quels rapports peu
vent subsister entre les phénomènes du
monde limité et l'infini vivant? Le
Médiateur a projeté la lumière sur ce
problème ; et par Lui, par Lui seul,
nous savons que la nature, création
de Dieu, est destinée à s'unir à
Dieu. Nous savons que la sagesse, qui
a choisi pour chaque chose une loi,
a fait de même pour l'ensemble. La
grande loi selon laquelle a été consti
tué le temps implique la succession et
les changements qu'on désigne par le
mot de progrès. Nous avons appris de
Jésus que l'unité règne au-dessus des
éléments divisés, et qu'elle les at
tire pour les unifier sans les confon
dre. Ce travail s'opère sous nos yeux,
avec notre participation, ou con
sciente, ou aveugle, ou contrainte.
Nous avons appris de Jésus que l'être
un ne vit pas isolé ; que l'unité et la
filuralité s'accordent dans la vie, dans
'amour et dans la science.
• Cette notion, inconnue avant le
Christ, éclaircit l'énigme où nous vi
vons. Par elle, nous comprenons com
ment les dissidences, les contrastes, les
heurts, les combats né sauraient dé
truire l'équilibre de la sphère intel
lectuelle ; pas plus que les orages, les
éruptions ou les cyclones n'ébranleni
la stabilité du monde visible. En effet,
il n'y a pas d'écart si emporté et si
prolongé qui ne concorde avec la di
rection générale imposée à la nature,
pas de contradiction qui ne se réduise
à l'harmonie.
Plus encore; la raison d'être du mal,
fréquente et terrible objection, nous
est en partie dévoilée. Le mal est per
mis parce qu'il est assujetti à servir
le bien. Le Dieu souverain s'est oc
troyé cette conquête. Voilà pourquoi,
ainsi que le dit Y Ecclésiastique, les
œuvres du Très-Haut sont « deux 4
deux », et « l'une conirè l'autre a ;
auQ et dm et unum contra unum. Er
reur, souffrance, mort, tout cela est
vraiment vaincu, puisque tout cela
rend témoignage à la vérité, m mé
rite, à H vie qui régnent éternelle
ment. Quatre cents ans avant le Christ,
Platon écrivait : « Il faut que quel-
« qu'un vienne pour jious instruire »,
Le Maître est venu; et sa vertu su
blime demeure; et l'historien et l'ex
périmentateur, qui s'étaient détournés
de Lui, se trouvent ramenés vers l'ho
rizon qu'ils pensaient fuir toiy ours.
Dans le pays où Jésus a glorifié l'hu
milité tout en répandant les splendeurs
de la lumière divine, là où l'orgueil
superbe s'est senti pénétré par la dour
ceur, la science croit braver Dieu, tan
dis qu'elle court sur la voie du bap
tême.
Quelle Jérusalem nouvelle,
Sort du fond du désert brillante de clartés 1
Nous pouvons concevoir un épa-
nouissement nouveau de l'esprit
chrétien : l'Evangile vivifiant la
science comme il anime la morale, loi
des nations, instrument de justice, ga
rantie du présent et de l'avenir. Ainsi
nous exhorte le sage et vaillant
Léon XIII, qui défie la force brutale
victorieuse. A Jérusalem, Jésus, an
nonçant la ruine du Temple, ras
surait ses disciples en leur expli
quant comment la destruction et la
mort peuvent enfanter : « Lorsque
« vous entendrez parler de guerre et de,
« bruits de guerres, ne craignez pas,'
« parce qu'z'if faut que ces choses arri-
« vent. » Nous possédons par Lui la
raison d'espérer jusque sur le bord
de l'abîme. Nous savons que l'abîme
séculaire peut être comblé en un ins
tant et que du sépulcre de Jésus lu. vio
s'est élancée triomphante. Or, le tom
beau, prophétisé par Isaïe, est tou
jours « glorieux ».
Eugène Tavernier.
Correspondance Romaine
Rome, 20 septembre.
La nomination de l'illustre orienta
liste, le T. R. P Ciasca, au poste de
Ero-secrétaire de la Propagande, a
esoin de quelque explication, car
autrement on ne comprendrait pas
pourquoi on a créé un pro-secrétaire
du moment qu'il y a un secrétaire
dans la personne de Mgr Persico.
Lorsque, il y a deux mois, S. Em. le
cardinal Ledochowski, préfet de la
Propagande, pour se soustraire à la
chaleur étouffante de Rome, se rendit
en Suisse, Mgr Persico,effrayé de là
lourde charge d'affaires qui allait peser
sur lui, demanda un aide,que le Saint-
Père lui donna dans la personne de
Mgr Ciasca, des ermites de Saint-Au
gustin, nommé, dans le consistoire
du 1 er juin de l'année dernière, arche
vêque titulaire de Larisse. Or, le car
dinal Ledochowski étant rentré à Rome
Mgr Ciasca aurait dû retourner à ses
anciennes fonctions de préfet des ar
chives du Vatican; mais le Saint-Père,
désirant qu'il ne sorte pas de la Pro
pagande, a voulu lui donner une po
sition officielle en le nommant pro
secrétaire.
Cette nomination signifie, première
ment, que Mgr Persico va bientôt
quitter la secrétairerie de la Propa
gande ; puis, que Mgr Ciasca est déjà
désigné comme son successeur. Pour
ce qui regarde la nouvelle destination
de Mgr Persico, on dit depuis long
temps, et je crois que c'est vrai, qu'il
sera créé cardinal dans le proohain
consistoire. Je sais qu'autrefois il fut
question de l'envoyer nonce en Es
pagne, pour y remplacer Mgr Di Pie-
tro, lorsque celui-ci serait élevé à la
pourpre; mais je crois savoir que, à
cause de son grand âge, ce projet a
été abandonné.
Mgr Tripepi, qui succède' à Mgr
Ciasca dans la préfecture des archives
du Vatican, est né dans une petite
ville de la Calabre. dans l'Italie méri
dionale. Il est venu tout jeune à Rome,
où il a fait son cours de théologie.
Après,il s'est particulièrement adonné
aux études historiques, surtout pour
ce qui regarde l'histoire ecclésiastique,
et a publié plusieurs importants ou
vrages apologétiques sur la Papauté.
Dans son modeste logis au palais du
Vatican, il vit tout à fait dans la re
traite, ne s'oeoupant que de ses
études.
On a annoncé que Mgr SatqlU,
président de l'academie des Nobles
ecclésiastiques , était envoyé aux
Etats-Unis pour représenter le Saint-
Père aux fêtes colombiennes de Chi
cago; je crois savoir- que la mission
de l'illustre prélat a un but bien plus
important. On se rappelle la question
soulevée aux Etats-Unis à proposées
éoolçs cédées par Mgr Ireland, arche
vêque de Saint-Paul de Minnesota, à
deux municipalités de son diocèse, et
d'une décision
la méthode suivie en cette occasion
par Mgr l'archevêque de Saint-Paul.
Malgré çette décision lea esprit» ne
s'étant pas complètement calmés, le
Saint-Père aurait décidé que la ques
tion serait étudiée et examinée sur les
lieux par un personnage, qui, en sa
qualité d'étranger, serait tout à fait
sîins prévention et par conséquent
complètement impartial. Telle serait
précisément la mission confiée à Mgr
Satolli, qui, doué d'un talent et d'une
prudence exceptionnels, pourra d'au
tant xnieux s'en acquitter, qu'il est
déjà bien connu par l'épiscopat amé
ricain, ayant représenté le Saint-Père
^ ^inauguration de l'université catho
lique de Washington.
Pans cota, dernière correspondance,
j'annonçais que M. Colucci, commis*
saire pour les hôpitaux de Rome, ve-
' nait de commencer la laïcisation en
chassant de l'hôpital des fous les re
ligieux de la Miséricorde, qui, depuis
près de trente ans, en avaient la sur
veillance. Voiciencore un exploit _ de
M. le commissaire.
' La question des hôpitaux se résuma
en deux mots : les revenus ne suffi
sent pas aux dépenses. Les années
passées, c'était la municipalité qui ré*
tablissait l'équilibre du budget des
hôpitaux; mais, depuis que M.Grispi,
attribuant au gouvernement les reve
nus des confréries de Rome, a exo
néré des dépenses de l'assistance pu
blique la municipalité, celle-ci n'^
{»lus rien à voir avec les hôpitaux, et,
e gouvernement ne voulant pas. leur
venir en aide, l'administration s'est
vue dans la nécessité de réduire lea
dépenses. M. Silvestrelli, le premier
commissaire royal, connaissant les
besoins d.e la ville, n'eut pas le cou
rage de faire cette réduction et donna,
sa démission; mais son successeur,
M. Colucci, n'a pas les mêmes scru
pules, et il a décrété la suppression
de deux hôpitaux : celui de Sainte-?
Marie de la Consolation pour les bles-r
sés, et celui de la Très Sainte-Trinité
pour les pèlerins et les convales
cents. ' -
De sorte que pendant que l'accrois
sement ûe la population exigerait da
nouveaux hôpitaux, Rome en verra
diminuer le nombre, et les malades
trouveront plus difficilement un abri.
Voilà le ; progrès de la capitale , du.
royaume d'Italie : on détruit ce que les*-
Papes avaient créé !
La sûreté publique laisse de jour
en j dur [davantage à désirer. On peut
dire que pasun jour ne s'écoule sans
nous apporter quelque nouvelle aven
ture de brigandage. En Sicile, quoiqua
les autorités aient déployé une éner
gie qui, n'est pas dans leur habitude,
1 es brigands fourmillent d'un bout à
l'autre de l'île. Pas plus tard qu'hier^
des lettres privées — car le gouverne
ment, ne pouvant empêcher les faits,tâ
che de les cacher—annonçaient qu'un
riche propriétaire dès environs de Ga-
tane venait d'être saisi par les bri
gands, qui demandaient une rançon
de 50,000 francs. A proximité de Rome,
les vols se suivent et se ressemblent.
Dans une semaine on a eu à enregis
trer un marchand colporteur dévalisé
sur la route de Palombara, une bour
gade près de Mentana; six charretiers
assaillis et dépouillés pas loin de Pi-
perno; les domestiques du princo
Brancaccio volés de tout ce qu'ils
avaient sur eux pendant que de ï>as-
catiils se rendaient, en break, à Monte
Porzio. La campagne est terrorisé^
par l'audace des brigands, qui redou
ble, encouragée pa,r l'impuissance du
gouvernement.
Tous ceux qui ont fréquenté le Va
tican pendant la seconde moitié de ca
siècle, c'est-à-dire du commencement
du Pontificat de Pie IX jusqu'à aujour
d'hui, ont connu certainement un des
valets de chambre du Pape ( Scopatori
Segreti) Joseph Minoocheri. Il était
d'Imola, et Mgr Mastaï l'avait pris à
son service, en 1834, deux ans après
que de l'archevêché de Spolète il eûtétô
transféré à Imola. Depuis lors, le
fidèle serviteur n'avait plus quitté son
bon maître, et lorsque, le Quirinal
cerné par les révolutionnaires, Pie IX
réussit à s'évader et se réfugia à Gaëto,
Joseph Minoccheri était parmi les
quelques familiers à qui le secret d^
la fuite avait été révélé. Après la xaoi't
de Pie IX, le nouveau Pape garda le
vieux serviteur de son prédécesseur.
Ce fidèle de deux Pontifes est mort
dans le palais du Vatican, le 24 décem-
bre 1891, âgé dô 78 ans. Qufâlâud
temps avant sa mort, il avait dicté &
son fils, le chanoine dom Louis, ses
souvenirs sur la vie de Pie IX, pen
dant son épiscopat à Imola et son
Pontificat. Ce sont de petites anecdo
tes, racontées en toute simplicité^
dans une forme en harmonie avea
l'humble condition de l'auteur, et pour
tant bien intéressantes comme tout ce
qui a rapport à la vie intime des grands
hommes. .
M. le professeur Antoine-Marie Bo-
ïietti, rédacteur de YOssermtore Ro-
manot, vient de recueillir ces souve
nirs, en y ajoutant d'importants dé
tails sur la mort de Pie IX, Sur son
voyage au Chili, et sur sa courageusa
conduite à Spolète pendant l'orageuse
période de la révolution de 1831 ; il
les a publiés en un volume intitulé :
fio IX à Imola e Roma. Ce petit vo
lume sera lu avec plaisir par tous
ceux qui gardent dans leur cour 16
souvenir du grand Pontife.
Le Centenaire
au pantheon
La fête de la proclamation do la Répu
blique a été favorisée par un temps superbe-
aussi la foule se pressait nombreuse, dès là
première heure, non seulement aux abords
du Panthéon, mais aussi sur la route que
devait suivre le président de la République"
accompagné du général Borius, secrétaire
général de la présidence, suivi des minis-,
très, escorté d un peloton de cuirassiors
Las trottoirs de la rue Soufflot étaient t>ar^
ticulièrement couverts de monde ; il v avait
du monde aussi aux fenêtres et jusque sur
les toits ; la chaussée restait libre, crâce à
uae double haie d'agents de police «t
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