Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1892-09-22
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 22 septembre 1892 22 septembre 1892
Description : 1892/09/22 (Numéro 8909). 1892/09/22 (Numéro 8909).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Jeudi 22 Septembre 1892
N* 8909. — Edition quotidienne
Un an , > .
Six mois . .
Trois mois.
ÉDITIO N QUOTID IENNE
PARIS . ÉTRANGER
■t départements (union postal*)
i . SB » 66 »
» . 28 50 34 »
. . 15 » 18 »
95
Jeudi 22 Septembre 1892
ÉDITION 'SEMI-QUO'SSE &ENNE
&es abonnements parten t des 1 » et 16 da chaque mois
UN NUMÉRO I ■f >ar * s • • • « 15 cent.
UmiLKU i D éparté ménts . . . 20 -
BUREAUX s Puis, 10, rue des Saints-Pères
On t'abonne i Rome, place da Gesù, 8
On .un . .
Six mois. . . ,
Trois mois. . .
PARIS
«t départements
. 80 » •
16 »
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ÉTRANGER
(union postal»)
36 »
19 o
10 »
Les abonnements parte nt de.a ! "■ et 16 de chaque mois
i'BNlVIES m répond pas 'Ses manuscrits qui loi soit idresséi
annonces
LAGRANGE, CERF et C 1 ', 6, place di la B oums
FRANCE
PARIS, Si SEPTEMBRE 4892
Dans le conseil des ministres qui
s'est tenu hier à Fontainebleau, on a
arrêté d'une manière définitive le
programme de la fête gouvernemen
tale demain au Panthéon, et fixé au
18 octobre la rentrée des Chambres.
Voilà ce que nous disent les notes of
ficieuses; mais sont-elles complètes?
On ne le croit généralement pas ; on
n'admet pas qu'un conseil des minis
tres se soit tenu sans s'occuper de La.
grève de Garmaux. On l'admet d'au
tant moins que le conseil, divisé en
deux séances par le déjeuner, a été,
paraît-il, assez long, et l'on ajoute
assez mouvementé. Il y aurait juste
ment eu une chaude discussion au su
jet de l'intervention du gouvernement
à Garmaux ; l'accord ne se serait pas
fait, et alors on aurait pris le parti de
ne pas dire que la question avait été
examinée.
Nous signalons ces faits, du reste
assez vraisemblables, sans nous pro
noncer sur leur exactitude.
On a maintenant le programme
officiel et définitif de la cérémonie de
demain; on remarque que, contraire
ment aux prescriptions des lois et rè
glements, le clergé ne figure pas dans
la liste des autorités et corps consti
tués invités. Depuis trois ou quatre
jours, certains journaux radicaux
avaient commencé une campagne
pour demander que le clergé ne soit
pas représenté au centenaire de la
République. Le gouvernement aura-t-
il pris peur? Aura-t-il, de lui-même,
compris qu'il ne devait pas inviter le
clergé au centenaire d'une république
qui avait débuté par des lois de persé
cution contre l'Eglise ? Nous l'igno
rons, et cela nous importe peu. Nous
trouvons que la place du clergé ca
tholique n'est pas à l'église Sainte-Ge
neviève laïcisée, pour glorifier la Ré
publique de 1792, qui fût persécutrice
jusqu au. consulat.
Hier a été inauguré le monument
de Kellermann à Valmy; c'était
M. Bourgeois qui présidait, sans doute
comme représentant du département
de la Marne. Nous nous bornons à
mentionner le fait; la cérémonie est
racontée et appréciée plus loin.
--"■f '■
Nous avons un manifeste du prince
Victor Napoléon qui invité ses fidèles
à célébrer le centenaire et < revendique
ledit centenaire comme faisane partie
des « idées napoléoniennes ». La re
vendication paraîtra quelque peu ha
sardée. Nous donnons le manifeste,
ainsi que le compte rendu de la séance
des comités pébliscitaires où il a été
communiqué aux fidèles du prince.
On a des nouvelles du Dahomey ;
les troupes de Behanzin ont attaqué
le corps français et ont été repoussées,
après avoir subi de grosses pertes. Le
colonel Dodds annoncé qu'il continue
son'mouvement en avant.
L'accord s'est fait entre les délégués
des ouvriers belges et les citoyens
Basly et Lamendin ; ils ont publié un
manifeste dans lequel s'affiche haute
ment le cosmopolitisme révolution
naire.
A propos d'un centenaire
La republique célèbre officiellement
son centenaire. En a-t-elle bien le
droit? Les uns disent oui, les autres
disent non. Nous, volontiers, nous di
rions à la fois oui et non.
Il est certain qu'à s'en tenir aux
dates, voilà tout un siècle que la ré
publique française a été proclamée et
déclarée une, indivisible et fo ndée à
jamais. Mais il est certain aussi que,
durant ce même siècle, nous avons eu
trois fois l'empire et trois fois la
royauté : au total, soixante-deux ans
de monarchie contre trente-huit ans
de république.
Mais les mots ëxpriment-ils ici la
réalité des choses, et parce que nous
avons eu depuis cent ans deux empe
reurs et trois rois, s'ensuit-il que nous
ayons eu vraiment la monarchie ?
Louis Veuiîlot aimait à, dire et plus
d'unè fois il a écrit dans ce journal
même, qu'en réalité, depuis la chute
de Louis XVI, la France était en ré
publique. Il en donnait avec éclat de
fortes raisons,, bien faites pour éton
ner la plupart des royalistes d'aujour
d'hui. Je crois que le chef même du
parti, M. le comte d'Haussonville en
personne, n'y comprendrait rien.
Cette vérité philosophique et politique
lui paraîtrait un paradoxe. Du reste,
c'est son devoir de croire que de 1815
à 1830,et surtout de 1830 à 1848, nous
avons eu la royauté, puisqu'il a man
dat de la refaire sur ce modèle, en y
ajoutant, après coup, la sanction sou
veraine du suffrage universel, base de
la monarchie impériale.
A coup sûr, un tel plan de restaura
tion royale n'eût pas empêché Louis
Veuillot de répéter : Voilà un siècle
que nous , sommes en république, et
tout porte à croire que nous y reste
rons.
Eût-il jjottr cela désespéré de la
France,et particulièrement de 1 avenir
de la religion en France ? Non certes 1
Il eut travaillé, comme il 1 avait déjà
fait, à nous donner la république de
tout le monde.
C'est un rêve ou un mensonge, la
république de tout le monde, crient et
même vocifèrent ceux qui nous ap
pellent des ralliés, des transfuges, des
traîtres ou des rêveurs et des naïfs.
Voilà ce que l'on gagne près de Cer
tains catholiques et monarchistes à
suivre le Pape.
Ils ajoutent que la république est
nécessairement eà France, sinon par
tout, «nnemiôy absolue de Tordre et
de l'Eglise ; que ,ce régime appartient
irrévocablement à la canaille ; que ja
mais il n'a donné et jamais ne don
nera aux catholiques autre chose que
la persécution, Bref, c'est la gueuse \
si nous ne voulons pas qu'elle nous
étrangle, étranglons-lal — Et com
ment y arriver ? — Mais en annon
çant tous les jours avec des airs ter
ribles qu'on l'étranglera demain. Qui
sait? ça peut arriver... et" puis, si ça
n'arrive pas, on aura du moins, sans
s'exposer à rien, fait la consolation et
l'admiration de quantité de bonnes
gens, sensibles au tapage et tolérant
d'être trompés et moqués, pourvu
qu'on flatte les passions qu'ils ont et
les espérances qu'ils voudraient avoir.
Mais de quel droit tient-on pour dé
montré que la forme républicaine,
médiocre ou mauvaise ailleurs, est
nécessairement en France condamnée
au mal? On invoque comme preuve
le passé et le présent. Nous contestons
qu il y ait preuve sans appel pour le
présent, et nous nions que cela soit
prouvé pour le passé.
Voyons les faits :
Sur nos 38 années de république,
16 ont été acceptables ou bpnnes ;*
22,,détestables ou mauvaises. Le mal
l'a emporté; mais, en somme, d'assez
peu pour qu'il n'y ait pas lieu de dé
sespérer pour toujours de la victoire
du bien ou, au minimum, d'un modus
vivendi valant sans peine, au total,
ce que nous a donné dans ce siècle la
monarchie.
Il ne faut pas ,se récrier; c'est de
l'histoire.
Le consulat, qui était incontestable
ment une.forme de la république n'a-
t-il pas été une époque de réparation ?
Il nous a tout de suite, en fait, rendu
la liberté du culte, puis il nous a donné
le Concordat. Si le premier consul an
nexa déloyalement à son œuvre répa
ratrice les articles organiques, il faut à
la fois condamner cet acte, et recon- '
naître que ces articles étaient presque
tous empruntés aux lois et décrets de
la royauté très chrétienne^, et aussi
très gallicane. Bpnaparte avait, certes,
tort de les relever ; nos rois n'avaient-
ils pas eu le tort de les faire ?
La république de 1848, douteuse à
ses débuts et qui serait incontestable
ment devenue exécrable si on l'avait
laissée, à ses fondateurs, fut vite écartée
de cette pente par l'adhésion, le con
cours des "hommes d'ordre, appelés
républicains du lendemain. Les élec-,
tions furent assez bonnes et, au total,
la phase républicaine de février 1848
à décembre 1852 a été pour l'Eglise
en France le meilleur temps qu'elle
ait eu en ce siècle. Cette république a
vu renaître dans toute leur liberté les'
conciles provinciaux ;' elle a rendu,
Rome au Pape, elle a proclamé la li
berté de l'enseignement chrétien et fait
une loi pour l'appliquer. Si la France
conservatrice n'avait pas cédé alors à
son fond césarien, la république des
honnêtes gens et de la vraie liberté
pouvait être fondée. Sauf quelquôs
rêveurs, personne n'y songea, et au
lieu de chercher à combattre les révo-!
lutionnaires sur le terrain légal, on
chercha un homme, — non pas un ;
Bourbon ou un d'Orléans, mais un
Bonaparte.
La république de 1870, ou plutôt de
1871, car 1870 fut tout à la guerre, a
été jusqu'à 1878 aussi acceptable
que l'avaient été la monarchie de
juillet et même la restauration. Nous
y avons conquis une loi sur l'ensei
gnement supérieur dont ni l'une ni
l'autre de ces monarchie, n'eût voulu..
Nous ne blâmons pas ceux qui, du
rant ces sept années, écartant l'idée
d'établir la république contre la ré
volution, ont cnerché la monarchie.
Nous en étions. Nous espérions qu'à
cette république provisoire on pour
rait substituer la monarchie chré
tienne de nom et de fait. Nous avions
l'homme. Par sa naissance, Henri de
France était le roi : par ses doctrines
hautement affirmées, il était, le chef
du parti catholique. Nous devions
l'appuyer et nous le fîmes, sans tou
tefois nous engager dans son parti.
C'est comme soldats du Pape que nous
fûmes volontairement. ies alliés de
l'armée royale.
Hélas! cette armée n'existait guère,
et, de plus, les trois quarts des chefs
qui devaient la former et la conduire
ne voulaient pas le vrai roi. Ils ma
nœuvrèrent pour l'écarter ou le rendre
promptement impossible, afin qu'un
autre prît la place, et, par ce misérable
travail, nous livrèrent à la république
révolutionnaire. C'est grâce à ces ha
biles gens, pénétrés de l'esprit orléa
niste, que nous n'avons eu ni le roi
chrétien, ni la république honnête.
Et maintenant ils prétendent nous
mettre à leur suite, nous, catholiques
ayant tout ; ils s'élèvent contre les en
seignements du Pape et s'étonnent
que. nous ne soyons pas avec eux. A
les entendre^ il y a folie à croire que
la république puisse accepter l'Eglise
et devenir habitable. Cependant cela
s'est vu à trois reprises, et a duré des
années dans des conditions très di
verses.
Non, reprennent les orléanistes de
naissance et les royalistes orléanisés,
ni sous le Consulat, ni de 1848 à 1852,
ni de 1871 à 1878, nous n'avons eu
vraiment la république.
Ce langage absolu et faux s'expli
que. Les réfractaires ont, en effet,
intérêt à dire que la vraie républi
que, la seule possible, est la républi
que sans Dieu et persécutrice. Qu'ils
le disent donc. Gela n'empêchera pas
les esprits droits et indépendants de
reconnaître que nous avons eu trois
Sériodes de république habitable et
'en conclure, comme le Pape et tout
l'épiscopat, et tant d'autres, que les
catholiques assez fermes pour mettre
les intérêts religieux au-dessus des
intérêts de parti, peuvent accepter la
forme républicaine et lui demander,
avec chance de succès, un gouverne
ment honnête, respectueux des droits
de l'Eglise et pénétré de l'esprit na
tional.
Ce n'est pas, nous le savons, cette
république de teut le monde que fête
dvec une pompe carnavalesque le
gouvernement du jour. Il y a là des
sectaires, des ambitieux, des jouis
seurs et des imbéciles qui acclament
tout ce qui s'est fait de mauvais, de
criminel depuis quinze ans, et se pro
mettent de le maintenir. Que nous im
portent leurs déclarations et les me
naces qu'ils y pourront joindre! Le
présent leur_ appartient, mais l'ave
nir. cet avenir dont ils prétendent in
solemment, disposer. il peut être à
nous. Gonquérons-le en marchant rê-
solûment dans la voie que nous a mar
quée Léon XIII.
Eugène Veuillot.
Le prince Victor-Napoléon vient de
faire un acte où ne manquent ni l'a-
propos ni l'habileté. Il prend texte
au centenaire de la République
fipur adresser à la France un mani
es te. où il affirme à la fois le principe
fondamental des républicains et les
idées napoléoniennes. Voici ce docu
ment, qui pourra avoir quelque in
fluence sur la rédaction définitive des
discours que nos personnages officiels
préparent pour demain :
Aux comités plébiscitaires de France
On va célébrer l'anniversaire du 22 sep
tembre 1792, parce qu'en ce jour la Répu
blique fut proclamée. Mais on oublie que,
ce jour-là aussi, fut inauguré un principe
bien supérieur à la République.
Le.s parlementaires d'alors, par l'organe
d'un des plus autorisés d'entre eux, avaient
dit : « L'expression d'appel au peuple est
« mauvaise, autant qu'impolitiquement pro-
a floncée... Le peuple ne peut parler, ne
« peut agir que par ses représentants. »
Les démoorates de la Convention leur
répondirent, à l'unanimité, le 22 sep
tembre :
« Il ne peut y avoir de constitution que
« celle qui est acceptée par le peuple. »
A-t-on toujours suivi les grands prin
cipes que proclamaient les législateurs de
la Révolution?
Ces principes voulaient que la nation
tout entière fût appelée & faire oonnaître sa
volonté.
^Devant cette volonté, tous auraient dû
s'incliner, et les compétitions de parti au
raient disparu.
' Un gouvernement puisant sa force dans
oélle origine vraiment démocratique pou
vait seul être un instrument de paix et de
progrès social.
N est-ce pas parce qu'ils étaient les élus
du peuple que les Napoléons ont eu les
moyens de servir sa cause ?
N'est-ce pas parce qu'ils ont sauvegardé
ses droits, qu'ils ont mérité sa confiance et
o"btenu ses millions de suffrages ?
C'est Napoléon I er qui a sauvé et organisé
les conquêtes de 1789.
C'est Napoléon III qui a rétabli dans son
intégrité le suffrage universel mutilé. C'est
lui qui, par la liberté des réunions et des
coalitions, par le développement des socié
tés de secours mutuels, par la création des
caisses de retraite, a inauguré cette trans
formation sociale que désormais il n'ôst
plus au pouvoir de personne d'arrêter.
Ne voit-on pas chaque jour ceux qui re
prochaient avec le plus de véhémence à
l'auteur couronné de « Y Extinction du pau
périsme » d'être socialiste, se pavoiser de
ce titre devant l'opinion publique, afin d'en
obtenir quelque crédit ?-
: Quelle que sdit la destinée que l'avenir
me réserve, jesuivrai ces exemples. Gomme
représentant de la tradition napoléonienne,
je demande à. mes amis de s'en inspirer
sans cesse.
Qu'en tonte circonstance ils se rangent
du côté des petits, des humbles, des mal- ;
heureux, des affligés, Qu'ils tes aiment, les
assistent; qu'ils seoondent leurs légitimes
revendications. Qu'ils ne s'irritent pas
même de leurs erreurs : car ils souffrent et
ils ignorent.
D'où que viennent les projets d'amélio
ration sociale, qu'ils les soutiennent et s'ef
forcent de les faire triompher.
La commémoration du 22 septembre leur
fournira l'occasion de bien marquer leurs
tendances.
Il ne peut y avoir de Constitution que
celle qui est acceptée par le peuple , a dit la
Convention.
Tout notre droit public moderne est
renfermé dans cette solennelle déclaration.
Cependant les Napoléons, seuls parmi
les gouvernements monarchiques ou répu
blicains de ce siècle, ont constamment su
bordonné leur pouvoir comme leurs Cons
titutions à l'acceptation du peuple.
La date du 22 septembre, dans ce qu'elle
a d'élevé, de pur, d'organique,.de définitif,
leur appartient donc exclusivement.
Revendiquez-la en la célébrant.
Démontrez ainsi que l'esprit du grand
homme, dont les institutions civiles, finan
cières, religieuses, judiciaires, militaires,
administratives régissent encore la grande
nation, survit en nous, indestructible et
rayonnant, consolation de nos épreuves,
gage de nos espérances.
Napoléon.
20 septembre 1892.
Au Panthéon
Chaque année, aux Etats-Unis, il y
a un jour d'actions de grâces et de
{>rières solennelles en mémoire de
'émancipation du peuple américain.
A ces prières prennent part tous les
citoyens de ce pays libre, tous les ma
gistrats qu'il s'est donnés, tous les
membres du gouvernement. C'est un
beau et grand spectacle que celui
d'une nation qui ne croit pas se
déshonorer en reconnaissant haute
ment et publiquement qu'elle doit au
grand Dieu du ciel et à sa providence
une reconnaissance éternelle pour
tous ses bienfaits.
. En France, on a supprimé depuis
plusieurs années toute manifestation
religieuse qui pouvait avoir un carac
tère public et social. Nos gouvernants,
au cours de leurs voyages, se gardent
bien d'entrer dans les églises et, s'ils
passent par hasard devant nos plus
splendides cathédrales, ils se conten'
tent d'en admirer le portail.
t Les voilà qui vont célébrer bruyam
ment le centenaire de la prétendue
émancipation de la France. Feront-
ils ce jour-là une exception à leurs
habitudes d'athéisme ? Non certes :
ils n'ont pas oublié que la Révolu
tion fut faite contre Dieu bien plus
encore que contre les rois, et les révo
lutionnaires de toute école et de toute
époque se sont toujours crus de taille à
gouverner les peuples sans aucun se
cours divin.
Il n'est donc question, pour la fête
du 22. septembre, ni de messe, ni de
prières, ni d'actions de grâces. Et
cela «st bien naturel de la part d'un
gouvernement « qui ignore Dieu ».
Et pourtant notre monde officiel
sera obligé ce jour-là d'emprunter les
voûtes d'une église pour abriter sa
manifestation soi-disant patriotique.
Oh! je sais bien qu'il s agit d'une
église profanée — désaffectée, en lan
gage officiel. — Mais de même qu'il
n'est pas possible à un chrétien d'es
suyer de son front l'eau du baptême,
on n'a pu non plus désaffecter suffi
samment le temple consacré à Dieu
sous l'invocation de la glorieuse pa
tronne de Paris, pour que son enceinte
« naturellement chrétienne » se prête
facilement aux parades d'un culte
essentiellement laïc. ;
Oui, même quand la croix d'or ne
brillerait plus au sommet de ce dôme
destiné à abriter les précieux restes de
la vierge de Nanterre, le plan seul dè
ce temple magnifique suffirait à rap
peler que c'est ici un édifice chrétien,
tandis que les peintures qui nous re
présentent la vie, la mort et la glorifi
cation de Geneviève, ou bien encore
les hauts faits de nos rois très chré
tiens et de ce peuple franc aimé du
Christ, protesteraient hautement con
tre cette nouvelle profanation qu'on
veut lui infliger.
Ni la présence de M. Garnot, étenné
de se retrouver dans un temple chré
tien sans avoir à craindre la colère
des loges, ni les boniments de MM. Flo-
quet et Ghallemel, ni les chants des
chœurs du Conservatoire , fussent-
ils « accompagnés d'Un orchestre nom
breux », ne suffiront à transformer
assez ce glorieux sanctuaire pour en
faire disparaître tout ce qui le. rendait
vénérable aux yeux des Parisiens. La
cérémonie qui se prépare sera une
profanation de plus : voilà tout.
Ce jour-là les catholiques feront
monter jusqu'au trône de Dieu, en
lès faisant passer par les mains de
sainte Geneviève, leurs prières et
leurs supplications, pour obtenir à
tous les profanateurs le pardon qui
leur est si nécessaire, et à la France
chrétienne, si tristement représentée
aujourd'hui, une» ère de rénovation,
de pacification religieuse et de véri
table, liberté.
L. J.
On lit dans le Rappel :
La discussion du budget des cultes, une
des premières qui doivent se produire à la
Chambre, à la rentrée, aura cette année un
intérêt particulier, au point de vue des ré
sultats possibles.
Jusqu'ici, on se bornait chaque année à
émettre un vote de principe sur la suppres
sion du budget des cultes qui, demandée
par les partisans de la séparation de l'Eglise
et de l'Etat, était régulièrement repoussée,
cette séparation ne réunissant pas enoore
de majorité dans la Chambre. La com
mission du budget, sur la motion de son
rapporteur, M. Dupuy-Dutemps, a alors
proposé de reprendre l'œuvre commencée
il y a une dizaine d'années — puis inter
rompue depuis — de la limitation des dé
penses du culte aux services prévus et aux
chiffres fixés par le Concordat. A ce point
de vue, le débat sera particulièrement inté
ressant.
Tout d'abord le rapporteur propose la
suppression, des archevêchés et évêchés
non concordataires.
Nous avons actuellement dix-sept arche
vêchés et soixante-sept évêchés ; le rappor
teur propose de ramener ces chiffres à neuf
archevêchés et quarante-huit évêchés. La
réduction ne serait pas immédiate; elle se
ferait par voie d'extinction.
Le rapporteur propose en outre la sup
pression totale et immédiate des vicaires
généraux, qui sont au nombre de 185, à sa
voir : 1 pour Paris, 18 pour les métropoles
et 166 pour les autres diocèses.
Ces diverses propositions ne sont
pas inattendues. Comme l'indique la
note du Rappel, elles sont dans la logi
que des précédents.
Du reste, ces messieurs de la com
mission du budget sont encore bien
bons. Ils n'iront pas plus loin, pour
cette année.
Mais comment s'arrêteront-ils dans
la voie où ils ont voulu rentrer?
Dans son rapport sur le budget des
cultes, M. Dupuy-Dutemps fait obser
ver qu'aux termes du Concordat, il
doit y avoir une paroisse par justice
de paix, soit autant de curés que de
juges de paix. Or, il y a actuellement
2,281 juges de paix et 3,450 curés, soit
569 cures de plus que le nombre con
cordataire.
Voilà 569 curés d'excédent bien
menacés pour une autre année-
Ce n'est pas tout. Le rapport en
question indique certaines autres
dispositions non concordataires,main
tenues encore au budget des cultes,
telles que celles relatives au traite
ment des desservants, qui ne sont pas
nommés dans le Concordat. Or, ces
desservants parasites figurent à eux
seuls pour 30 millions au budget. Il
n'y aura rien de plus logique que de
les en faire disparaître.
Ainsi revisé, le budget du culte ca-\
holiquj consistera en : '
1° Traitement de 9 archevêques :
A 15,000 fr. . . 135,000 fr.
De 48 évêques :
A 10,000 fr. . . 480,000 fr.
2° Traitement de 2,281 curés des
deux elasses :
A 1,350 fr. en
moyenne. . ,
3,079,360 fr.
Au total.. . . 3,694,360 fr.
pour le personnel des ministres du,
culte.
A ce prix, les gouvernants actuels
pourront se donner le luxe de maintenir
le Concordat, sans trop exciter les ré
criminations de ceux qui aspirent à
leur succéder.
- Le Concordat, pour un budget du
culte catholique de 3 .millions et quel
ques centaines de mille francs, ce ne
sera vraiment pas trop cher.
Jérusalem
Un chemin de fer relie Jérusalem ail
bord de la Méditerranée. La semaine
dernière, un train d'essai, partant de
Jaffa, a franchi le -parcours entier.
L'inauguration aura lieu dans quel
ques jours. Bientôt le rugissement de
là locomotive éveillera, matin et soir,
les échos de la ville sainte.
La nouvelle paraît étrange aux incré
dules, bien qu ils affectent d'en triom
pher. Ils se complaisent à vanter la
conquête que. réalise la méca.nique
moderne en s'installant sur le sol sa
cré. D'avance, ils savourent le con
traste qui va. s'établir entre les noms
des lieux vénérés et les appellations à
présent usitées dans la langue des voya
ges.-La joie est causée par la pensée
que, désormais, la science matérielle
pourra se permettre à l'égard de l'his
toire sainte les familiarités auxquelles
se sont accoutumées certaine érudition
et certaine, littérature. De même que
l-'exégèse sectaire et que le «roman phi
losophique, la machine va pouvoir en
prendre à son aise avec les croyances.
On ne dit pas que le surnaturel va être
écrasé sous les rouages d'acier, mais
simplement qu'il sera emporté par la
fumée du moteur et, avec elle, dissipé. •
Les chrétiens aussi peuvent se ré
jouir, mais pour des motifs plus sé
rieux et plus nobles. C'est une vue
bien superficielle que de n'envisager
dans ce fait qu'une sorte de prise de
possession accomplie par le génie hu-r
main, dans une région qui semblait
réservee aux mystères des œuvres di
vines. Il faudrait examiner quel inté
rêt a décidé l'homme à diriger de ce
côté ses entreprises. Alors on s'aper
cevrait tout de suite que la conquête
célébrée appartient en propre à ce
monde même qu'on s'imagine avoir
dompté. Jérusalem attire vers elle la
civilisation qui la dédaignait. Qu'on y
songe : la Palestine, le pays de Gha-
naan, la terre qui a bu le sang des
Israélites, des Philistins et des Assy
riens, et qu'on disait morte comme la
mer qu'elle contient; ces souvenirs
où le nom de Jésus est celui qui se
trouve le plus rapproché de notre épo
que ; cet ensemble d'exploits, de gloi
res et de prodiges qui rappelle le mi
nistère prophétique, le règne de Salo
mon et de David, les victoires de Jo-
sué ; cette terre vers laquelle Moïse a
conduit ses frères et que les patriar
ches avaient habitée, elle n'appartient
donc pas au,monde de la fable? Hier,
des écrivains et des législateurs décla
raient que l'histoire saintq est un |
tissu de faussetés qui abrutit les en
fants; ils n'admettaient comme authen
tiques que les dates des croisades, en
défigurant cette collection d'épopées ;
et voici que la science moderne se met
au service des chrétiens, prêtres, moi
nes, laïques, héritiers des vieilles
croyances, qui prétendent posséder la
tradition par laquelle l'humanité est
rattachée à Dieu ! Ici, la force qui
s'impose est celle de la foi. Sans les
pèlerinages au tombeau du Christ,
continués durant des siècles; entrete
nus par les Pères Franciscains, déve
loppés, dans ces dernières années,
avec un grand succès, par les Pères
de l'Assomption, personne n'eût
songé à construire ce chemin de fer^
Quel besoin de relier à l'Europe, à la
France, à Paris, une ville déchue, en
fouie dans l'épaisseur d^s sables non
moins que dans les profondeurs du
passé, enveloppée du sommeil qui
pèse sur l'Orient ?
Que l'attention de nos adversaires
se fixe sur la contrée où vécut le Mes
sie, nous devons le souhaiter. La'vérité
que nous professons ne se compose
pas seulement de prodiges : elle com
prend l'ordre naturel. Nous aurions
grand tort, nous n'avons pas le droit
de rien sacrifier dans ce qui appar
tient à l'un ou à l'autre de ces deux
domaines. Parfois la puissance _ des
merveilles qui nous ont été révélées
nous séduit absolument ; et nous per
dons de vue les réalités inférieures qui
servirenj à leur manifestation. Célé
brons le miracle, mais sans oublier la*
nature au milieu de laquelle il appa
raît. Les deux ne se séparent point.
Jésus-Christ proclame cette union : il
est le lien substantiel du fini et de l'in
fini, de la nature et du divin ; il est
l'Homme-Dieu. De même qu'il est venu
pour accomplir la loi, loin de la dé«
traire; de même il a confirmé la na
ture, loin de la déposséder. Si, comme
l'Eglise l'enseigne, la foi suppose là
raison, il est également vrai qu©
l'adhésion au miracle a pour condition
première la certitude rationnelle,faute
de laquelle on ne le reconnaîtrait pas.
Nous avons des preuves abondantes
que Jésus a vécu aux temps,; dans les
lieux et selon la manière indiqués par
l'Evangile; nous désirons qu'elles res
plendissent de clarté. Le double ca
ractère de la perscmne adorable doit
nous être présent, afin que nous com*
prenions également la possibilité
d'observer les préceptes et l'immen
sité de la récompense. « Des so
phistes sans nombre »,«. écrit Louis
Veuillat,«se sontefforcés de retirer au
Christ, vrai Dieu et vrai homme, tan
tôt l'humanité, tantôt la divinité. »
Bien que renversé et détruit, le pre
mier système, soutenu principalement
par Strauss, a laissé quelques traces.
Aucun 1 incrédule n'ose plus admettre
l'invention qui voulait abaisser le
Sauveur à la catégorie des mythes,;
mais beaucoup de chrétiens ^man
quent de la certitude explicite, qui
permet d'être en garde contre les insi
nuations de l'erreur. Bien des gens, qui
se prosternent devant les splendeurs
du surnaturel, se demandent jusqu'à
quel point nous , sommes assurés que
l'existence humaine de Jésus s'est
Eassée telle qu'on la raconté. Il sem-
le en effet parfois que le Dieu in
carné n'a pu vivre de notre vie, faire
4es actes simples qui accompa^nentdes
merveilles, s'humilier, souffrir, mou
rir ; en un mot, accepter d'être mécon
nu. A cet.égard, des notions complètes
sont indispensables. Récemment, un
livre remarquable a été publié dans
ce but. Le R. P. Olivier,a décrit la
Passion, en réunissant une foule de
détails empruntés aux sources pure
ment , historiques.. Sans tomber dan#
aucune exagération ; au contraire, en
se tenant de très près aux faits prouvés
et aux conjectures rigoureuses, l'élo
quent religieux est arriyé à tracer un
tableau dont l'effet est irrésistible. A
cette lecture, on a la sensation directe
du spectacle, et l'on perçoit mieux
comment tant d'acteurs et de témoins
ont pu, devant le Fils de Dieu, s'aban
donner au crime, à l'infamie, à la lâ~
cheté, à la vulgaire sottise. Il en se
rait ainsi de nos jours ; et certaine
ment ces choses formidables ont eu
lieu ainsi.
L'authenticité des évangiles, non
plus que la vie humaine de Jésus, ne
donne prise aux obj ections ; mais l'An
cien Testament? les récits et les doc
trines que l'on désigne d'ordinaire en
parlant de la Bible? Sur ce terrain, le
travail de la critique la plus hostile a
rendu aux chrétiens des services in
nombrables. Il y a un peu plus de cent
ans que toute l'Allemagne instruite et
avecielle une partie de l'Europe furent
secouées, comme d'un coup de ton
nerre .qui -aurait ébr anlé les cœurs.
Lorsque, de 1774 à 1778, Lessing lança
dans le public les Fragments de Wol~
fenbiittel,. on eût dit que tout était
perdu. Sophismes, mensonges, outra
ges. insanités dirigés contre Moïse,
contre Jésus, contre les apôtres, se ré
pandaient comme un déluge de feu.
La plupart des protestants, qui s'effor
çaient de défendre la véracité des au
teurs sacrés, livraient l'essentiel et
augmentaient le mal, étourdis qu'ils
étaient par le vacarme. Cette fois, on
croyait que la base du christianisme
avait chancelé; on le sentait, on le
voyait, c'était fini. Néanmoins, après
■1830, Strauss jugeait nécessaire de
N* 8909. — Edition quotidienne
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Jeudi 22 Septembre 1892
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FRANCE
PARIS, Si SEPTEMBRE 4892
Dans le conseil des ministres qui
s'est tenu hier à Fontainebleau, on a
arrêté d'une manière définitive le
programme de la fête gouvernemen
tale demain au Panthéon, et fixé au
18 octobre la rentrée des Chambres.
Voilà ce que nous disent les notes of
ficieuses; mais sont-elles complètes?
On ne le croit généralement pas ; on
n'admet pas qu'un conseil des minis
tres se soit tenu sans s'occuper de La.
grève de Garmaux. On l'admet d'au
tant moins que le conseil, divisé en
deux séances par le déjeuner, a été,
paraît-il, assez long, et l'on ajoute
assez mouvementé. Il y aurait juste
ment eu une chaude discussion au su
jet de l'intervention du gouvernement
à Garmaux ; l'accord ne se serait pas
fait, et alors on aurait pris le parti de
ne pas dire que la question avait été
examinée.
Nous signalons ces faits, du reste
assez vraisemblables, sans nous pro
noncer sur leur exactitude.
On a maintenant le programme
officiel et définitif de la cérémonie de
demain; on remarque que, contraire
ment aux prescriptions des lois et rè
glements, le clergé ne figure pas dans
la liste des autorités et corps consti
tués invités. Depuis trois ou quatre
jours, certains journaux radicaux
avaient commencé une campagne
pour demander que le clergé ne soit
pas représenté au centenaire de la
République. Le gouvernement aura-t-
il pris peur? Aura-t-il, de lui-même,
compris qu'il ne devait pas inviter le
clergé au centenaire d'une république
qui avait débuté par des lois de persé
cution contre l'Eglise ? Nous l'igno
rons, et cela nous importe peu. Nous
trouvons que la place du clergé ca
tholique n'est pas à l'église Sainte-Ge
neviève laïcisée, pour glorifier la Ré
publique de 1792, qui fût persécutrice
jusqu au. consulat.
Hier a été inauguré le monument
de Kellermann à Valmy; c'était
M. Bourgeois qui présidait, sans doute
comme représentant du département
de la Marne. Nous nous bornons à
mentionner le fait; la cérémonie est
racontée et appréciée plus loin.
--"■f '■
Nous avons un manifeste du prince
Victor Napoléon qui invité ses fidèles
à célébrer le centenaire et < revendique
ledit centenaire comme faisane partie
des « idées napoléoniennes ». La re
vendication paraîtra quelque peu ha
sardée. Nous donnons le manifeste,
ainsi que le compte rendu de la séance
des comités pébliscitaires où il a été
communiqué aux fidèles du prince.
On a des nouvelles du Dahomey ;
les troupes de Behanzin ont attaqué
le corps français et ont été repoussées,
après avoir subi de grosses pertes. Le
colonel Dodds annoncé qu'il continue
son'mouvement en avant.
L'accord s'est fait entre les délégués
des ouvriers belges et les citoyens
Basly et Lamendin ; ils ont publié un
manifeste dans lequel s'affiche haute
ment le cosmopolitisme révolution
naire.
A propos d'un centenaire
La republique célèbre officiellement
son centenaire. En a-t-elle bien le
droit? Les uns disent oui, les autres
disent non. Nous, volontiers, nous di
rions à la fois oui et non.
Il est certain qu'à s'en tenir aux
dates, voilà tout un siècle que la ré
publique française a été proclamée et
déclarée une, indivisible et fo ndée à
jamais. Mais il est certain aussi que,
durant ce même siècle, nous avons eu
trois fois l'empire et trois fois la
royauté : au total, soixante-deux ans
de monarchie contre trente-huit ans
de république.
Mais les mots ëxpriment-ils ici la
réalité des choses, et parce que nous
avons eu depuis cent ans deux empe
reurs et trois rois, s'ensuit-il que nous
ayons eu vraiment la monarchie ?
Louis Veuiîlot aimait à, dire et plus
d'unè fois il a écrit dans ce journal
même, qu'en réalité, depuis la chute
de Louis XVI, la France était en ré
publique. Il en donnait avec éclat de
fortes raisons,, bien faites pour éton
ner la plupart des royalistes d'aujour
d'hui. Je crois que le chef même du
parti, M. le comte d'Haussonville en
personne, n'y comprendrait rien.
Cette vérité philosophique et politique
lui paraîtrait un paradoxe. Du reste,
c'est son devoir de croire que de 1815
à 1830,et surtout de 1830 à 1848, nous
avons eu la royauté, puisqu'il a man
dat de la refaire sur ce modèle, en y
ajoutant, après coup, la sanction sou
veraine du suffrage universel, base de
la monarchie impériale.
A coup sûr, un tel plan de restaura
tion royale n'eût pas empêché Louis
Veuillot de répéter : Voilà un siècle
que nous , sommes en république, et
tout porte à croire que nous y reste
rons.
Eût-il jjottr cela désespéré de la
France,et particulièrement de 1 avenir
de la religion en France ? Non certes 1
Il eut travaillé, comme il 1 avait déjà
fait, à nous donner la république de
tout le monde.
C'est un rêve ou un mensonge, la
république de tout le monde, crient et
même vocifèrent ceux qui nous ap
pellent des ralliés, des transfuges, des
traîtres ou des rêveurs et des naïfs.
Voilà ce que l'on gagne près de Cer
tains catholiques et monarchistes à
suivre le Pape.
Ils ajoutent que la république est
nécessairement eà France, sinon par
tout, «nnemiôy absolue de Tordre et
de l'Eglise ; que ,ce régime appartient
irrévocablement à la canaille ; que ja
mais il n'a donné et jamais ne don
nera aux catholiques autre chose que
la persécution, Bref, c'est la gueuse \
si nous ne voulons pas qu'elle nous
étrangle, étranglons-lal — Et com
ment y arriver ? — Mais en annon
çant tous les jours avec des airs ter
ribles qu'on l'étranglera demain. Qui
sait? ça peut arriver... et" puis, si ça
n'arrive pas, on aura du moins, sans
s'exposer à rien, fait la consolation et
l'admiration de quantité de bonnes
gens, sensibles au tapage et tolérant
d'être trompés et moqués, pourvu
qu'on flatte les passions qu'ils ont et
les espérances qu'ils voudraient avoir.
Mais de quel droit tient-on pour dé
montré que la forme républicaine,
médiocre ou mauvaise ailleurs, est
nécessairement en France condamnée
au mal? On invoque comme preuve
le passé et le présent. Nous contestons
qu il y ait preuve sans appel pour le
présent, et nous nions que cela soit
prouvé pour le passé.
Voyons les faits :
Sur nos 38 années de république,
16 ont été acceptables ou bpnnes ;*
22,,détestables ou mauvaises. Le mal
l'a emporté; mais, en somme, d'assez
peu pour qu'il n'y ait pas lieu de dé
sespérer pour toujours de la victoire
du bien ou, au minimum, d'un modus
vivendi valant sans peine, au total,
ce que nous a donné dans ce siècle la
monarchie.
Il ne faut pas ,se récrier; c'est de
l'histoire.
Le consulat, qui était incontestable
ment une.forme de la république n'a-
t-il pas été une époque de réparation ?
Il nous a tout de suite, en fait, rendu
la liberté du culte, puis il nous a donné
le Concordat. Si le premier consul an
nexa déloyalement à son œuvre répa
ratrice les articles organiques, il faut à
la fois condamner cet acte, et recon- '
naître que ces articles étaient presque
tous empruntés aux lois et décrets de
la royauté très chrétienne^, et aussi
très gallicane. Bpnaparte avait, certes,
tort de les relever ; nos rois n'avaient-
ils pas eu le tort de les faire ?
La république de 1848, douteuse à
ses débuts et qui serait incontestable
ment devenue exécrable si on l'avait
laissée, à ses fondateurs, fut vite écartée
de cette pente par l'adhésion, le con
cours des "hommes d'ordre, appelés
républicains du lendemain. Les élec-,
tions furent assez bonnes et, au total,
la phase républicaine de février 1848
à décembre 1852 a été pour l'Eglise
en France le meilleur temps qu'elle
ait eu en ce siècle. Cette république a
vu renaître dans toute leur liberté les'
conciles provinciaux ;' elle a rendu,
Rome au Pape, elle a proclamé la li
berté de l'enseignement chrétien et fait
une loi pour l'appliquer. Si la France
conservatrice n'avait pas cédé alors à
son fond césarien, la république des
honnêtes gens et de la vraie liberté
pouvait être fondée. Sauf quelquôs
rêveurs, personne n'y songea, et au
lieu de chercher à combattre les révo-!
lutionnaires sur le terrain légal, on
chercha un homme, — non pas un ;
Bourbon ou un d'Orléans, mais un
Bonaparte.
La république de 1870, ou plutôt de
1871, car 1870 fut tout à la guerre, a
été jusqu'à 1878 aussi acceptable
que l'avaient été la monarchie de
juillet et même la restauration. Nous
y avons conquis une loi sur l'ensei
gnement supérieur dont ni l'une ni
l'autre de ces monarchie, n'eût voulu..
Nous ne blâmons pas ceux qui, du
rant ces sept années, écartant l'idée
d'établir la république contre la ré
volution, ont cnerché la monarchie.
Nous en étions. Nous espérions qu'à
cette république provisoire on pour
rait substituer la monarchie chré
tienne de nom et de fait. Nous avions
l'homme. Par sa naissance, Henri de
France était le roi : par ses doctrines
hautement affirmées, il était, le chef
du parti catholique. Nous devions
l'appuyer et nous le fîmes, sans tou
tefois nous engager dans son parti.
C'est comme soldats du Pape que nous
fûmes volontairement. ies alliés de
l'armée royale.
Hélas! cette armée n'existait guère,
et, de plus, les trois quarts des chefs
qui devaient la former et la conduire
ne voulaient pas le vrai roi. Ils ma
nœuvrèrent pour l'écarter ou le rendre
promptement impossible, afin qu'un
autre prît la place, et, par ce misérable
travail, nous livrèrent à la république
révolutionnaire. C'est grâce à ces ha
biles gens, pénétrés de l'esprit orléa
niste, que nous n'avons eu ni le roi
chrétien, ni la république honnête.
Et maintenant ils prétendent nous
mettre à leur suite, nous, catholiques
ayant tout ; ils s'élèvent contre les en
seignements du Pape et s'étonnent
que. nous ne soyons pas avec eux. A
les entendre^ il y a folie à croire que
la république puisse accepter l'Eglise
et devenir habitable. Cependant cela
s'est vu à trois reprises, et a duré des
années dans des conditions très di
verses.
Non, reprennent les orléanistes de
naissance et les royalistes orléanisés,
ni sous le Consulat, ni de 1848 à 1852,
ni de 1871 à 1878, nous n'avons eu
vraiment la république.
Ce langage absolu et faux s'expli
que. Les réfractaires ont, en effet,
intérêt à dire que la vraie républi
que, la seule possible, est la républi
que sans Dieu et persécutrice. Qu'ils
le disent donc. Gela n'empêchera pas
les esprits droits et indépendants de
reconnaître que nous avons eu trois
Sériodes de république habitable et
'en conclure, comme le Pape et tout
l'épiscopat, et tant d'autres, que les
catholiques assez fermes pour mettre
les intérêts religieux au-dessus des
intérêts de parti, peuvent accepter la
forme républicaine et lui demander,
avec chance de succès, un gouverne
ment honnête, respectueux des droits
de l'Eglise et pénétré de l'esprit na
tional.
Ce n'est pas, nous le savons, cette
république de teut le monde que fête
dvec une pompe carnavalesque le
gouvernement du jour. Il y a là des
sectaires, des ambitieux, des jouis
seurs et des imbéciles qui acclament
tout ce qui s'est fait de mauvais, de
criminel depuis quinze ans, et se pro
mettent de le maintenir. Que nous im
portent leurs déclarations et les me
naces qu'ils y pourront joindre! Le
présent leur_ appartient, mais l'ave
nir. cet avenir dont ils prétendent in
solemment, disposer. il peut être à
nous. Gonquérons-le en marchant rê-
solûment dans la voie que nous a mar
quée Léon XIII.
Eugène Veuillot.
Le prince Victor-Napoléon vient de
faire un acte où ne manquent ni l'a-
propos ni l'habileté. Il prend texte
au centenaire de la République
fipur adresser à la France un mani
es te. où il affirme à la fois le principe
fondamental des républicains et les
idées napoléoniennes. Voici ce docu
ment, qui pourra avoir quelque in
fluence sur la rédaction définitive des
discours que nos personnages officiels
préparent pour demain :
Aux comités plébiscitaires de France
On va célébrer l'anniversaire du 22 sep
tembre 1792, parce qu'en ce jour la Répu
blique fut proclamée. Mais on oublie que,
ce jour-là aussi, fut inauguré un principe
bien supérieur à la République.
Le.s parlementaires d'alors, par l'organe
d'un des plus autorisés d'entre eux, avaient
dit : « L'expression d'appel au peuple est
« mauvaise, autant qu'impolitiquement pro-
a floncée... Le peuple ne peut parler, ne
« peut agir que par ses représentants. »
Les démoorates de la Convention leur
répondirent, à l'unanimité, le 22 sep
tembre :
« Il ne peut y avoir de constitution que
« celle qui est acceptée par le peuple. »
A-t-on toujours suivi les grands prin
cipes que proclamaient les législateurs de
la Révolution?
Ces principes voulaient que la nation
tout entière fût appelée & faire oonnaître sa
volonté.
^Devant cette volonté, tous auraient dû
s'incliner, et les compétitions de parti au
raient disparu.
' Un gouvernement puisant sa force dans
oélle origine vraiment démocratique pou
vait seul être un instrument de paix et de
progrès social.
N est-ce pas parce qu'ils étaient les élus
du peuple que les Napoléons ont eu les
moyens de servir sa cause ?
N'est-ce pas parce qu'ils ont sauvegardé
ses droits, qu'ils ont mérité sa confiance et
o"btenu ses millions de suffrages ?
C'est Napoléon I er qui a sauvé et organisé
les conquêtes de 1789.
C'est Napoléon III qui a rétabli dans son
intégrité le suffrage universel mutilé. C'est
lui qui, par la liberté des réunions et des
coalitions, par le développement des socié
tés de secours mutuels, par la création des
caisses de retraite, a inauguré cette trans
formation sociale que désormais il n'ôst
plus au pouvoir de personne d'arrêter.
Ne voit-on pas chaque jour ceux qui re
prochaient avec le plus de véhémence à
l'auteur couronné de « Y Extinction du pau
périsme » d'être socialiste, se pavoiser de
ce titre devant l'opinion publique, afin d'en
obtenir quelque crédit ?-
: Quelle que sdit la destinée que l'avenir
me réserve, jesuivrai ces exemples. Gomme
représentant de la tradition napoléonienne,
je demande à. mes amis de s'en inspirer
sans cesse.
Qu'en tonte circonstance ils se rangent
du côté des petits, des humbles, des mal- ;
heureux, des affligés, Qu'ils tes aiment, les
assistent; qu'ils seoondent leurs légitimes
revendications. Qu'ils ne s'irritent pas
même de leurs erreurs : car ils souffrent et
ils ignorent.
D'où que viennent les projets d'amélio
ration sociale, qu'ils les soutiennent et s'ef
forcent de les faire triompher.
La commémoration du 22 septembre leur
fournira l'occasion de bien marquer leurs
tendances.
Il ne peut y avoir de Constitution que
celle qui est acceptée par le peuple , a dit la
Convention.
Tout notre droit public moderne est
renfermé dans cette solennelle déclaration.
Cependant les Napoléons, seuls parmi
les gouvernements monarchiques ou répu
blicains de ce siècle, ont constamment su
bordonné leur pouvoir comme leurs Cons
titutions à l'acceptation du peuple.
La date du 22 septembre, dans ce qu'elle
a d'élevé, de pur, d'organique,.de définitif,
leur appartient donc exclusivement.
Revendiquez-la en la célébrant.
Démontrez ainsi que l'esprit du grand
homme, dont les institutions civiles, finan
cières, religieuses, judiciaires, militaires,
administratives régissent encore la grande
nation, survit en nous, indestructible et
rayonnant, consolation de nos épreuves,
gage de nos espérances.
Napoléon.
20 septembre 1892.
Au Panthéon
Chaque année, aux Etats-Unis, il y
a un jour d'actions de grâces et de
{>rières solennelles en mémoire de
'émancipation du peuple américain.
A ces prières prennent part tous les
citoyens de ce pays libre, tous les ma
gistrats qu'il s'est donnés, tous les
membres du gouvernement. C'est un
beau et grand spectacle que celui
d'une nation qui ne croit pas se
déshonorer en reconnaissant haute
ment et publiquement qu'elle doit au
grand Dieu du ciel et à sa providence
une reconnaissance éternelle pour
tous ses bienfaits.
. En France, on a supprimé depuis
plusieurs années toute manifestation
religieuse qui pouvait avoir un carac
tère public et social. Nos gouvernants,
au cours de leurs voyages, se gardent
bien d'entrer dans les églises et, s'ils
passent par hasard devant nos plus
splendides cathédrales, ils se conten'
tent d'en admirer le portail.
t Les voilà qui vont célébrer bruyam
ment le centenaire de la prétendue
émancipation de la France. Feront-
ils ce jour-là une exception à leurs
habitudes d'athéisme ? Non certes :
ils n'ont pas oublié que la Révolu
tion fut faite contre Dieu bien plus
encore que contre les rois, et les révo
lutionnaires de toute école et de toute
époque se sont toujours crus de taille à
gouverner les peuples sans aucun se
cours divin.
Il n'est donc question, pour la fête
du 22. septembre, ni de messe, ni de
prières, ni d'actions de grâces. Et
cela «st bien naturel de la part d'un
gouvernement « qui ignore Dieu ».
Et pourtant notre monde officiel
sera obligé ce jour-là d'emprunter les
voûtes d'une église pour abriter sa
manifestation soi-disant patriotique.
Oh! je sais bien qu'il s agit d'une
église profanée — désaffectée, en lan
gage officiel. — Mais de même qu'il
n'est pas possible à un chrétien d'es
suyer de son front l'eau du baptême,
on n'a pu non plus désaffecter suffi
samment le temple consacré à Dieu
sous l'invocation de la glorieuse pa
tronne de Paris, pour que son enceinte
« naturellement chrétienne » se prête
facilement aux parades d'un culte
essentiellement laïc. ;
Oui, même quand la croix d'or ne
brillerait plus au sommet de ce dôme
destiné à abriter les précieux restes de
la vierge de Nanterre, le plan seul dè
ce temple magnifique suffirait à rap
peler que c'est ici un édifice chrétien,
tandis que les peintures qui nous re
présentent la vie, la mort et la glorifi
cation de Geneviève, ou bien encore
les hauts faits de nos rois très chré
tiens et de ce peuple franc aimé du
Christ, protesteraient hautement con
tre cette nouvelle profanation qu'on
veut lui infliger.
Ni la présence de M. Garnot, étenné
de se retrouver dans un temple chré
tien sans avoir à craindre la colère
des loges, ni les boniments de MM. Flo-
quet et Ghallemel, ni les chants des
chœurs du Conservatoire , fussent-
ils « accompagnés d'Un orchestre nom
breux », ne suffiront à transformer
assez ce glorieux sanctuaire pour en
faire disparaître tout ce qui le. rendait
vénérable aux yeux des Parisiens. La
cérémonie qui se prépare sera une
profanation de plus : voilà tout.
Ce jour-là les catholiques feront
monter jusqu'au trône de Dieu, en
lès faisant passer par les mains de
sainte Geneviève, leurs prières et
leurs supplications, pour obtenir à
tous les profanateurs le pardon qui
leur est si nécessaire, et à la France
chrétienne, si tristement représentée
aujourd'hui, une» ère de rénovation,
de pacification religieuse et de véri
table, liberté.
L. J.
On lit dans le Rappel :
La discussion du budget des cultes, une
des premières qui doivent se produire à la
Chambre, à la rentrée, aura cette année un
intérêt particulier, au point de vue des ré
sultats possibles.
Jusqu'ici, on se bornait chaque année à
émettre un vote de principe sur la suppres
sion du budget des cultes qui, demandée
par les partisans de la séparation de l'Eglise
et de l'Etat, était régulièrement repoussée,
cette séparation ne réunissant pas enoore
de majorité dans la Chambre. La com
mission du budget, sur la motion de son
rapporteur, M. Dupuy-Dutemps, a alors
proposé de reprendre l'œuvre commencée
il y a une dizaine d'années — puis inter
rompue depuis — de la limitation des dé
penses du culte aux services prévus et aux
chiffres fixés par le Concordat. A ce point
de vue, le débat sera particulièrement inté
ressant.
Tout d'abord le rapporteur propose la
suppression, des archevêchés et évêchés
non concordataires.
Nous avons actuellement dix-sept arche
vêchés et soixante-sept évêchés ; le rappor
teur propose de ramener ces chiffres à neuf
archevêchés et quarante-huit évêchés. La
réduction ne serait pas immédiate; elle se
ferait par voie d'extinction.
Le rapporteur propose en outre la sup
pression totale et immédiate des vicaires
généraux, qui sont au nombre de 185, à sa
voir : 1 pour Paris, 18 pour les métropoles
et 166 pour les autres diocèses.
Ces diverses propositions ne sont
pas inattendues. Comme l'indique la
note du Rappel, elles sont dans la logi
que des précédents.
Du reste, ces messieurs de la com
mission du budget sont encore bien
bons. Ils n'iront pas plus loin, pour
cette année.
Mais comment s'arrêteront-ils dans
la voie où ils ont voulu rentrer?
Dans son rapport sur le budget des
cultes, M. Dupuy-Dutemps fait obser
ver qu'aux termes du Concordat, il
doit y avoir une paroisse par justice
de paix, soit autant de curés que de
juges de paix. Or, il y a actuellement
2,281 juges de paix et 3,450 curés, soit
569 cures de plus que le nombre con
cordataire.
Voilà 569 curés d'excédent bien
menacés pour une autre année-
Ce n'est pas tout. Le rapport en
question indique certaines autres
dispositions non concordataires,main
tenues encore au budget des cultes,
telles que celles relatives au traite
ment des desservants, qui ne sont pas
nommés dans le Concordat. Or, ces
desservants parasites figurent à eux
seuls pour 30 millions au budget. Il
n'y aura rien de plus logique que de
les en faire disparaître.
Ainsi revisé, le budget du culte ca-\
holiquj consistera en : '
1° Traitement de 9 archevêques :
A 15,000 fr. . . 135,000 fr.
De 48 évêques :
A 10,000 fr. . . 480,000 fr.
2° Traitement de 2,281 curés des
deux elasses :
A 1,350 fr. en
moyenne. . ,
3,079,360 fr.
Au total.. . . 3,694,360 fr.
pour le personnel des ministres du,
culte.
A ce prix, les gouvernants actuels
pourront se donner le luxe de maintenir
le Concordat, sans trop exciter les ré
criminations de ceux qui aspirent à
leur succéder.
- Le Concordat, pour un budget du
culte catholique de 3 .millions et quel
ques centaines de mille francs, ce ne
sera vraiment pas trop cher.
Jérusalem
Un chemin de fer relie Jérusalem ail
bord de la Méditerranée. La semaine
dernière, un train d'essai, partant de
Jaffa, a franchi le -parcours entier.
L'inauguration aura lieu dans quel
ques jours. Bientôt le rugissement de
là locomotive éveillera, matin et soir,
les échos de la ville sainte.
La nouvelle paraît étrange aux incré
dules, bien qu ils affectent d'en triom
pher. Ils se complaisent à vanter la
conquête que. réalise la méca.nique
moderne en s'installant sur le sol sa
cré. D'avance, ils savourent le con
traste qui va. s'établir entre les noms
des lieux vénérés et les appellations à
présent usitées dans la langue des voya
ges.-La joie est causée par la pensée
que, désormais, la science matérielle
pourra se permettre à l'égard de l'his
toire sainte les familiarités auxquelles
se sont accoutumées certaine érudition
et certaine, littérature. De même que
l-'exégèse sectaire et que le «roman phi
losophique, la machine va pouvoir en
prendre à son aise avec les croyances.
On ne dit pas que le surnaturel va être
écrasé sous les rouages d'acier, mais
simplement qu'il sera emporté par la
fumée du moteur et, avec elle, dissipé. •
Les chrétiens aussi peuvent se ré
jouir, mais pour des motifs plus sé
rieux et plus nobles. C'est une vue
bien superficielle que de n'envisager
dans ce fait qu'une sorte de prise de
possession accomplie par le génie hu-r
main, dans une région qui semblait
réservee aux mystères des œuvres di
vines. Il faudrait examiner quel inté
rêt a décidé l'homme à diriger de ce
côté ses entreprises. Alors on s'aper
cevrait tout de suite que la conquête
célébrée appartient en propre à ce
monde même qu'on s'imagine avoir
dompté. Jérusalem attire vers elle la
civilisation qui la dédaignait. Qu'on y
songe : la Palestine, le pays de Gha-
naan, la terre qui a bu le sang des
Israélites, des Philistins et des Assy
riens, et qu'on disait morte comme la
mer qu'elle contient; ces souvenirs
où le nom de Jésus est celui qui se
trouve le plus rapproché de notre épo
que ; cet ensemble d'exploits, de gloi
res et de prodiges qui rappelle le mi
nistère prophétique, le règne de Salo
mon et de David, les victoires de Jo-
sué ; cette terre vers laquelle Moïse a
conduit ses frères et que les patriar
ches avaient habitée, elle n'appartient
donc pas au,monde de la fable? Hier,
des écrivains et des législateurs décla
raient que l'histoire saintq est un |
tissu de faussetés qui abrutit les en
fants; ils n'admettaient comme authen
tiques que les dates des croisades, en
défigurant cette collection d'épopées ;
et voici que la science moderne se met
au service des chrétiens, prêtres, moi
nes, laïques, héritiers des vieilles
croyances, qui prétendent posséder la
tradition par laquelle l'humanité est
rattachée à Dieu ! Ici, la force qui
s'impose est celle de la foi. Sans les
pèlerinages au tombeau du Christ,
continués durant des siècles; entrete
nus par les Pères Franciscains, déve
loppés, dans ces dernières années,
avec un grand succès, par les Pères
de l'Assomption, personne n'eût
songé à construire ce chemin de fer^
Quel besoin de relier à l'Europe, à la
France, à Paris, une ville déchue, en
fouie dans l'épaisseur d^s sables non
moins que dans les profondeurs du
passé, enveloppée du sommeil qui
pèse sur l'Orient ?
Que l'attention de nos adversaires
se fixe sur la contrée où vécut le Mes
sie, nous devons le souhaiter. La'vérité
que nous professons ne se compose
pas seulement de prodiges : elle com
prend l'ordre naturel. Nous aurions
grand tort, nous n'avons pas le droit
de rien sacrifier dans ce qui appar
tient à l'un ou à l'autre de ces deux
domaines. Parfois la puissance _ des
merveilles qui nous ont été révélées
nous séduit absolument ; et nous per
dons de vue les réalités inférieures qui
servirenj à leur manifestation. Célé
brons le miracle, mais sans oublier la*
nature au milieu de laquelle il appa
raît. Les deux ne se séparent point.
Jésus-Christ proclame cette union : il
est le lien substantiel du fini et de l'in
fini, de la nature et du divin ; il est
l'Homme-Dieu. De même qu'il est venu
pour accomplir la loi, loin de la dé«
traire; de même il a confirmé la na
ture, loin de la déposséder. Si, comme
l'Eglise l'enseigne, la foi suppose là
raison, il est également vrai qu©
l'adhésion au miracle a pour condition
première la certitude rationnelle,faute
de laquelle on ne le reconnaîtrait pas.
Nous avons des preuves abondantes
que Jésus a vécu aux temps,; dans les
lieux et selon la manière indiqués par
l'Evangile; nous désirons qu'elles res
plendissent de clarté. Le double ca
ractère de la perscmne adorable doit
nous être présent, afin que nous com*
prenions également la possibilité
d'observer les préceptes et l'immen
sité de la récompense. « Des so
phistes sans nombre »,«. écrit Louis
Veuillat,«se sontefforcés de retirer au
Christ, vrai Dieu et vrai homme, tan
tôt l'humanité, tantôt la divinité. »
Bien que renversé et détruit, le pre
mier système, soutenu principalement
par Strauss, a laissé quelques traces.
Aucun 1 incrédule n'ose plus admettre
l'invention qui voulait abaisser le
Sauveur à la catégorie des mythes,;
mais beaucoup de chrétiens ^man
quent de la certitude explicite, qui
permet d'être en garde contre les insi
nuations de l'erreur. Bien des gens, qui
se prosternent devant les splendeurs
du surnaturel, se demandent jusqu'à
quel point nous , sommes assurés que
l'existence humaine de Jésus s'est
Eassée telle qu'on la raconté. Il sem-
le en effet parfois que le Dieu in
carné n'a pu vivre de notre vie, faire
4es actes simples qui accompa^nentdes
merveilles, s'humilier, souffrir, mou
rir ; en un mot, accepter d'être mécon
nu. A cet.égard, des notions complètes
sont indispensables. Récemment, un
livre remarquable a été publié dans
ce but. Le R. P. Olivier,a décrit la
Passion, en réunissant une foule de
détails empruntés aux sources pure
ment , historiques.. Sans tomber dan#
aucune exagération ; au contraire, en
se tenant de très près aux faits prouvés
et aux conjectures rigoureuses, l'élo
quent religieux est arriyé à tracer un
tableau dont l'effet est irrésistible. A
cette lecture, on a la sensation directe
du spectacle, et l'on perçoit mieux
comment tant d'acteurs et de témoins
ont pu, devant le Fils de Dieu, s'aban
donner au crime, à l'infamie, à la lâ~
cheté, à la vulgaire sottise. Il en se
rait ainsi de nos jours ; et certaine
ment ces choses formidables ont eu
lieu ainsi.
L'authenticité des évangiles, non
plus que la vie humaine de Jésus, ne
donne prise aux obj ections ; mais l'An
cien Testament? les récits et les doc
trines que l'on désigne d'ordinaire en
parlant de la Bible? Sur ce terrain, le
travail de la critique la plus hostile a
rendu aux chrétiens des services in
nombrables. Il y a un peu plus de cent
ans que toute l'Allemagne instruite et
avecielle une partie de l'Europe furent
secouées, comme d'un coup de ton
nerre .qui -aurait ébr anlé les cœurs.
Lorsque, de 1774 à 1778, Lessing lança
dans le public les Fragments de Wol~
fenbiittel,. on eût dit que tout était
perdu. Sophismes, mensonges, outra
ges. insanités dirigés contre Moïse,
contre Jésus, contre les apôtres, se ré
pandaient comme un déluge de feu.
La plupart des protestants, qui s'effor
çaient de défendre la véracité des au
teurs sacrés, livraient l'essentiel et
augmentaient le mal, étourdis qu'ils
étaient par le vacarme. Cette fois, on
croyait que la base du christianisme
avait chancelé; on le sentait, on le
voyait, c'était fini. Néanmoins, après
■1830, Strauss jugeait nécessaire de
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