Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1889-11-19
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 19 novembre 1889 19 novembre 1889
Description : 1889/11/19 (Numéro 7991). 1889/11/19 (Numéro 7991).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Mardi 19 Novembre 1889
N 1 7991 — Édition quotidienne
Mardi 19 Novembre 1889
* ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRASSES
el DèPARTEMEîH (UHION FOSTALg)
Bn an. , . 55 » 69 a
Six mo'.s. . . . 28 50 • 34 »
Trois mois. ,... 15 ■ „» . 13 »
^pkboxtBementa partent dc« |« et 10 de chaque mal»
UN NUMÉRO { lo 0 -'-
BUREAUX Paris, 10, rua des Saints-Pères
Ou s'abonne à Home» Place du Gestt, 8
:• o
ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNB
Un an. » 0 .
SixnuLîj. . . .
Trois mois. . .
PARIS
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16 »
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ÉTRANGER
(UNION postais)
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lea abonnements partent des 1" et f S de chaque neM
L'UNIVERS ce répond pas des manuscrits qui loi sont adressés
ANNONCES.
MM. Ch. LAGRAiNGE, CERF et G", 6, place de la Bourse
FRANGE ;
PARIS, ,18 NOVEMBRE. 1888,
Que va dire M. Floquet . dans son
grand discours de président, et sur
tout que sera la déclaration ministé
rielle? On attend, pour être fixé sur
l'orientation de la politique, sans im-,
patience du reste, les pompeuses dé
clarations de M. Floquet et les pro
messes de M; Gonstans. Aura-t-on
compris dans les régions officielles
qu'une politique d'apaisement s'im
posait, après les élèctions des 22 sep
tembre et 6 octobre? Les actes du gou
vernement et de ses agents ne sem
blent guère l'indiquer. D'ailleurs le
ministère, ne pouvant constituer nne
majorité avec le seul groupe des op
portunistes,et n'inspirant pas la moin
dre confiance aux conservateurs, sera
obligé de compter avec les radicaux.
Ceux-ci le savent, ét" ils en abuseront.
Séance au Sénat aujourd'hui; des
questions importantes comme les so
ciétés de secours aux ouvriers mineurs
et le travail des enfants et des femmes
dans les manufactures, figurent à
l'ordre du jour. -
La Révolution est triomphante au
Brésil; l'empereur et sa famille ont
été embarqués pour l'Europe; il ne
paraît pas y avoir eu même un sem
blant de résistance. On l'a dit souvent,
on doit le répéter, il n'y a plus guère
de rois. Les princes se laissent remer
cier comme de simples ministres ou
présidents de République. _
Il serait curieux de savoir combien
sont ces républicains qui s'imposent
aussi brusquement à un grand pays
comme le Brésil. On pourrait égale
ment demander si la grande républi
que des Etats-Unis, dont les tentatives
pour étendre son action économique
même sur l'Amérique du Sud avaient
reçu médiocre accueil au Brésil, n'a
pas quelque peu poussé au mouve
ment révolutionnaire. Les Yankees ne
sont pas scrupuleux.
Une dépêche du Standard dit qu'il
n'y a plus lieu de douter que sir Lin-
torn Simmons ait réellement pour
mission de rétablir les relations diplo
matiques entre le Saint-Siège et l'An
gleterre. Que de chemin parcouru de
puis l'époque, assez rapprochée, où
une nouvelle de ce genre aurait suffi
pour provoquer en Angleterre une ex
plosion de fanatisme protestant !
On voit poindre dans les journaux
républicains le débat qui ne manquera
pas de s'engager dans la nouvelle
Chambre sur la question religieuse.
La République française et la Justice
sont déjà en discussion sur le Con
cordat. L'une ët l'autre ont pour ré
dacteurs en chef deux députés, MM. Jo
seph Reinach et Camille Pelletan, deux
puissances politiques. C'est le groupe
opportuniste et l'extrême-gauche
qu'on entend en eux.
Cette querelle du Concordat est an
cienne. Jusqn'ici le: parti opportuniste
a voulu le maintien du Concordat.
M. Gambetta n'était point partisan
d'une rupture ouverte, déclarée, avec
le Saint-Siège. Son opinion est restée
la loi de ses disciples. M. Joseph Rei
nach proteste dans la République fran
çaise contre l'idée de M» Camille Pelle
tan. Celui-ci siège à l'extrémité de
l'extrême gauche ; il irait peut-être
s'asseoir plus loin encore, si l'enceinte
du Palais-Bourbon ne marquait une
certaine limite à la gauche parlemen
taire. M. Pelletan est un fougueux
partisan de l'abolition du; Concordat.
Il prend en pitié ceux des républicains
qui ne pensent pas ; comme lui.' « Pau
vres républicains, s'écrie-t-il, qui ne
veulent pas comprendre -que le Con
cordat est pouf eux la dernière dés
duperies ! » " ' r - " 1 ~ ; /
Le débat en, est là entre la Républi
que française et la Justice. J • -
Le j ournal opportuniste ne veut pôini
passer pour dupe : il affiche la toléran
ce. Nous remercions.!'organe de feu M.
Gambetta de ses, bonnes intentions.
En réalité, il y a toujours eu plus- de
calcul que d'équité ou.de modération
dans le zèle du ; parti opportuniste
pour le Concordat:, Et en cela, nous le
reconnaissons, les opportunistes ont
été plus avisés que; les radicaux.^ La
Justice voudrait-elle nous en : cr®irè ?
On a fait plus de tort à l'Eglise, de
puis dix ans, à la faveur du^ Con
cordat, qu'on n'en eût fait en l'abro
geant. Les modérés se sont montrés
plus habiles que les-violents. Au fond,
ils servaient la même cause,; car le
but de la république, c'feSt la déchris
tianisation du peuple, française mais
combien les opportunistes peuvent se
vanter d'y avoir mieux réussi que les
radicaux !
M. Camille Pelletan, en particulier,
est trop imbu de la tradition révolu
tionnaire pour être politique : il ne
connaît que la violence. A l'égard du
clergé, la prison, la confiscation, le
bannissement, l'échafaud, ce sont ses
moyens. Il s'étonne qu'on n'ait point
appliqué à un ancien maadement,
tout irréprochable, de Mgrl'évêquede
Viviers, au sujet des élections, l'article
du code pénal qui punit de bannisse
ment tout ministre du culte coupable
d'avoir critiqué ou censuré soit le gou
vernement, soit tout acte de l'autorité
publique. Voilà, selon lui, comme on
devrait procéder : abolition du Conr
cordât, puis application sévère du co
de pénal revu et augmenté à l'usage
du clergé. Seulement, le fougueux
disciple de Camille Desmoulins et de
Marat oublie qu'avec de tels moyens
on n'aboutit qu'à faire des martyrs et
à provoquer une réaction contre les
persécuteurs : il connaît pourtant son
histoire de la Révolution. . , .
Bien plus habile, nous sommes oblir
gés de le dire, a été la conduite des
opportunistes. Quel était le grand des
sein et de la franc-maçonnerie, et de
la libre-pensée, et de la république
qui a porté l'une et l'autre au pouvoir?
Le triomphe de la Révolution parla
laïcisation de la France. On y eût
échoué par la persécution ouvert® ; on
y a réussi par une politique hypocrite.
Les opportunistes, depuis douze ou
quinze ans qu'ils régnent, n'ont cessé
de proclamer qu'ils ne voulaient pas
là séparation de l'Eglise et de l'Etat:
Le Concordat a été maintenu, et même
l'ambassade du gouvernement de la
république auprès du Saint-Siège. En
apparence, rien n'a été rompu ; en réa
lité, tout ce que pouvait être fait con
tre la religion l'a été. Et la république
a pu dire qu'elle ne persécutait point l
Quelle est celle des entreprises contre
l'Eglise, quelle est celle des me
sures contre le clergé que le main
tien du Concordat a empêchées? Les
majorités républicaines du Parlement
n'ont-elles pas pu voter toutes les
lois que l'esprit de secte suggé
rait? Les ministères républicains
n'ont-ils pas pu agir en toute circons
tance au gré des passions du parti ?
Est-ce que les lois sur l'observation
du dimanche et sur l'inviolabilité du
mariage n'ont pas été abrogées? Est-
ce que les congrégations religieuses
n'ont pas été expulsées à main armée ?
Est-ce que le sang même n'a pas
coulé pour la fermeture des chapelles ?
Est-ce que les traitements du clergé'
n'ont pas été supprimés autant de fois
qu'il a plu au gouvernement? Est-ce
que la laïcisation des cimetières, des
hôpitaux, des écoles n'a pas été con
sommée, selon le programme franc-
maçonnique? Et tout cela s'est fait
avec le Concordat ! Il a suffi que le
budget des cultes ne fût pas supprimé,
pour qu'on pût dire que le Concordat
n'était pas violé. Moyennant le paie
ment à peu près régulier d'une partie
des arrérages des biens confisqués du
clergé, le gouvernement et le parti
républicain ont pu poursuivre contre
le catholicisme l'exécution du plan
révolutionnaire et arriver peu à peu à
leur fin. En réalité, le Concordat ne
subsiste plus aujourd'hui que de nom,
tant il a été violé dans son esprit de
puis que la république règne en
France.
Néanmoins ce nom même parait de
trop au parti radical. Il semble qu'il y
ait dans le seul mot de Concordat une
dernière attache avec l'Eglise qu'il
faille briser pour la consommation de
l'œuvre révolutionnaire. C'est là-des
sus qu'on se disputera entre radicaux
et opportunistes. Faudra-t-il, oui ou
non, maintenir le peu qui reste du
Concordat ? Devra-t-on en supprimer
même le titre, pour rompre le dernier
lien avec la religion, pour effacer la
dernière trace des anciens rapports en
tre l'Eglise et l'Etat? Ou vaudrait-il
mieux le laisser subsister pour con
server plus sûrement le moyen d'op
primer la religion et d'asservir le cler
gé, sans entrer dans les voies ouver
tes de la persécution? Ce sera tout le
débat entre les violents et les habiles.
Pour notre part, c'est moins l'abolition
du Concordat que nous craindrions
que l'application qui peut en être faite
par les républicains.
. A rthur L oth.
Le seul Etat du Nouveau-Monde qui;
ne fût pas en République vient de
suivre, paraît-il, l'exemple de tous les
autres pays du continent américain.
Depuis quarante-huit heures, il n'y a
plus d'enipire du Brésil.
Cette révolution n'était peut-être
point absolument inattendue. Mais on
ne la croyait pas si proche,ni si aisée.
Cela s'est fait tout à,coup et tout d'un
coup. La brusque nouvelle a d'abord
trouvé bien des incrédules. Elle a reçu
confirmation ; il à fallu se rendre. Les
dépêches de Rio-Janeiro sont là, qui
nous disent que la République est pro
clamée au Brésil. Embarqués sur-le-
•champ, déjà l'empereur et sa famille
sont en route pour l'Europe. Ils cin
glent vers Bordeaux.
7 On se livré à mille commentaires.
On se demande d'où vient le coup.
L'empire du Brésil étant le seul pays
capable,'en Amérique, de gêner la
prépondérance des Etats-Unis,, de lejir, :
faire un peu contre-poids, on soup
çonne fort ceux-ci de n'être pas pré-.
cisément étrangers à cette révolution.
Il n'y aurait là rien d'étonnant. Mais
ce iie sont que des conjectures. Il
faut, si tant est qu'on puisse jamais
le bien connaître, attendre encore
pour savoir le fond de l'affaire. -
Oii ne sait même pas, au juste, com
ment se sont passées les choses. Doit-
on s'en rapporter aux dépêches venues
de Rio-Janeiro ? Elles n'indiquent
point que l'empereur ait eu, dans cette
aventure, la grande contenance d'un
vrai souverain. Sera-ce, en Europe,
une raison pour n'ajouter qu'une foi
médiocre aux dépêches de Rio-Janeiro?
Nous craignons un peu le contraire.
Le trône est, sans doute, comme
tant d'autres, une de ces choses dont
la possession fatigue et pèse parfois,
et dont l'homme, ne sent tout le prix
que lorsqu'il les a perdues. L'empe
reur du Brésil n'a jamais paru se sou
cier beaucoup du trône. 11 n'en doit
pas moins être malheureux et humilié.
Son infortune mérite des égards.
Cependant, il faut bien dire ce que
tout le monde éprouve ; il faut bien
voir les choses comme elles sont. A
quoi bon dissimuler qu'en Europe on
croira très facilement que les dépê
che^ de Rio-Janeiro sont exactes, en
particulier quand elle racontent que
don Pedro, ne faisant pas figure de
souverain, n'a tenté aucune résistance,
et s'est laissé tout: paisiblement dépo
ser, puis embarquer ? A quoi bon dis
simuler que, le premier moment de
surprise passée chacun se dira qu'a
près tout ce qui arrive au Brésil n'est
pas surprenant, que cela devait finir
ainsi; et que la faute en est, pour une
grande part, à l'empereur déposé lui-
même ?
Lorsqu'on est souverain, il faut
l'être avant tout ; il faut l'être, autant
que possible, uniquement. Il faut con
sidérer sa fonction comme un grand
honneur et comme une lourde charge,
plus que suffisante pour un homme
seul. Il ne faut point paraître en faire
fi, et la traiter, avec une ostentation
de mauvais goût, en qualité négli
geable. 11 faut tenir son rang, toujours
et en tout lieu. Il ne faut point se po
ser en littérateur ou savant plutôt
qu'en roi ou empereur, et affecter de
mettre le philosophe et l'artiste au-
dessus du monarque. Bref, il ne faut
point avoir constamment l'air de de
mander pardon d'être un souverain.
On s'expose i ce que les gens, sans
pour cela daigner vous croire sincère,
trouvent néanmoins avec empresse
ment que vous avez bien raison. Don
Pedro, homme très digne de respect,
avait ce travers malheureux. Il n'était
empereur qu'accessoirement. Il n'en
élait pas fier ; tandis qu'il l'était de
posséder les dons qui mènent, lors
qu'on les a plus développés que lui, à
différentes classes de l'Institut. Il ne
se sentait pas d'aise en se voyant traité
par Victor Hugo, qui avait à peu près
autant de tact que d'esprit, avec beau
coup moins d'égards que lui-même
n'en montrait au poète. Victor Hugo
voulait bien oublier qu'il avait affaire
à un tyran. Don Pedro était ravi.
Qu'est-il, à la longue, résulté de tout
cela?Il en est résulté que le peuple
brésilien, oubliant les mérites et les
vertus de son empereur, a fini par
avoir pour l'empire et la dignité im
périale le même attachement et la
même considération que Don Pedro.
P ierre V buillot.
Le Voltaire s'élève contre l'action du
clergé en matière électorale et il en
donne les raisons que voici :
Pourquoi les prêtres n'ont-ils pas. le droit
de raisonner sur la chose publique? Les
facteurs, les cantonniers, les marchands de
tabac ont bien ce droit-là.
C'est pourtant bien simple ! Les prêtres
n'ont pas le droit dé raisonner sur la chose
publique parce que, lorsqu'ils le font, c'est
toujours contra la république qu'ils raison
nent.
Les prêtres sont des fonctionnaires, tout
comme les cantonniers et les facteurs. Us
émargent au budget Se l'Etat. Ils sont te
nus de respecter le gouvernement, et ils
n'ont le droit ni de l'attaquer, ni de le ba
fouer. Cela lenr est imposé par le Concor
dat, qui lie également l 'Etat et le clergâ,
dont il fixe les rapports.
Tant que le Concordat existera, tant que
l'Etat paiera lus appointements des prêtres
et des évéques, et l'on sait qu'il leur donne
plus qu'il n'y est obligé, les prêtres et les
évêques séront dans la cruelle nécessité
d'être déférents et de s'abstenir de toute
hostilité marquée. Si leur conscience leur
dit de combattre la République, elle de
vrait bien leur dire aussi de refuser la
monnaie ; mais, sur ce point peut-être;
conseille-t-elte à voix basse, à voix si basse
qu'on ne l'entend pas.
Si le Voltaire savait ce dont il parle,
il n'ignorerait pas que les prêtres ne
sont nullement des fonctionnaires,
attendu que leur traitément est une
indemnité, et qu'ils sont en toute vé
rité les créanciers de l'Etat, dont le
rôle à leur égard est celui de dé
biteur."
1 Or, du moment que les prêtres ne
sont pas des fonctionnaires, que de
vient l'argumentation du Voltaire , ba
sée tout entière sur cette qualité?
Quant au Concordat, il est vrai que
c'est un acte qui lie également l'Etat
et le clergé dont il fixe les rapports;
mais Iq Voltaire a tort de croire que
le Concordat n'impose d'obligations
^qju'aU;. clergé . seulement. De. par. cet
acte, l'Etat doit assurer à l'Église
l'entière liberté de l'exercice du
culte. Or, cette obligation, l'Etat y a
contrevenu odieusement, et par l'ex
pulsion des religieux, et par la laï
cisation des écoles et des hôpitaux, et
par la suppression ou suspension des
traitements du clergé qui constitue
de sa part un véritable vol, et surtout
par la loi militaire qui supprime l'im
munité ecclésiastique.
C'est donc à l'Etat, non aux prêtres,
que le Voltaire devrait adresser ses
remontrances, s'il avait le vrai senti
ment de la justice et du droit.
A uguste R oussel.
Tels maîtres, tels élèves
M. Sarcey écrit dans le XIX e Siècle :
Ainsi donc, ce sera toujours et partout
la même chose. Je n'entendrai à tous les
degrés de l'échelle universitaire que des
plaintes sur le relâchement de la disci
pline. Partout les enfants sont traités
comme de petits hommes, et partout ils en
abusent. On fait, sur la dignité de l'enfant
qu'il, ne faut pas blesser par des corrections
humiliantes, sur le prétendu surmenage
de l'école et du collège auquel il ne faut
pas ajouter de pensum, un tas de belles
phrases reluisantes. Tout cela est parfait ;
mais les gamins se sentent les plus forts,
ils ne font que ce qui leur platt, et les
études en souffrent.
Après ce préambule, M. Sarcey pro
duit les doléances d'un instituteur
qui écritàla7Wôwne des instituteurs pour
dénoncer le régime actuel de l'école
normale, où les candidats instituteurs
ne travaillent plus, font ce qu'ils veu
lent et jouissent fréquemment de
sorties où, livrés à eux-mêmes, ils se
livrent au jeu et à la débauche.
M. Sarcey voudrait croire que ces
plaintes sont exagérées. Néanmoins, il
conclut :
Ce n'est pas pour donner des conseils sur
une matière qui m'est peu connue, que j'ai
pris la plume. Je n'ai voulu que montrer
une fois de plus, par un témoignage irré
cusable, cette vérité, qui n'est que trop
réelle, hélas 1 c'est que la discipline, qui
tombe en poussière dans les écoles pri
maires et dans les lycées, est fortement at
taquée et menacée dans les écoles norma
les. Les maîtres secouent le joug, comme on
eo a débarrassé leurs élèves.
Savez-vous le grand mal de ce siècle,
celui dont il périra? ,
Personne ne veut plus obéir !.
Voilà un aveu dont nous prenons
acte. Faut-il s'étonner, après cela, que
« les maîtres ayant secoué le joug »
l'enseignement d'une école laïcisée
aboutisse à des résultats réellement
abominables ? Voici, par exemple, le
témoignage non suspect des citoyens
Cercueil et Chevalier, deux anticléri
caux notoires, chargés, comme mem
bres d'une commission locale, d'ins
pecter les écoles des Grandes-Carriè
res et de La Chapelle. Ils disent dans
leur rapport au préfet de la Seine :
Ce qke nous avons remarqué avec peine,
monsieur le préfet, c'est le manque d'ins
truction morale des enfants : bien qu'ils
aient été aux cours de morale aux écoles
d'où ils sortent, ils ne semblent pas s'en
douter.
Aux questions sur les devoirs envers la
famille, envers la société, envers la patrie,
quelques-uns seulement ont un peu et très
faiblement répondu. . ,
Il est pénible de dire, monsieur le préfet,
que cette absence d'instruction morale fait
que les enfants perdent la notion du respect
et du devoir, qui sont les bases de la mo
rale ; de là. les gros mots, les injures, les
paroles obscènes. ■ •
. Tous ces faits ignobles, si déshonorants
pour les mœurs républicaines, pour la mo
rale, et si pernicieux pour lajsociété fran
çaise, font que les 'enfants deviennent dé
sagréables, puis détestables, et souvent
leur inconduite est scandaleuse sur la voie
publique ; tout le'monde s'en plaint, ce qui
fait qu'une grande partie des patrons ne
veulent plus prendre d'apprentis à cause
des désagréments qu'ils ont à subir, des
enfants mal élevés dont ils ont la responsa^
bilité. y. ;
Nous n'ajouterons pas un seul mot.
Mais que disent de cela les laïcisa-
teurs ?
La Persécution
On lit dans le Républicain du Gers:
Nous apprenons que, par décret rendu
en conseil d'Etat, les délibérations du con
seil général du département du "Gars por
tant vote des subventions en r faveur des
écoles primaires libres, congréganistes ou
autres, ont été annulées. . , • -
On pense qu'il en sera de même pour
celles qui concernent les séminaires.
On se rappelle qu'une décision pa
reille atteignait naguères des votes
semblables rendus par le conseil gé
néral du Morbihan; Et l'on voit par là
-quel cas l'on fait de la volonté des po
pulations, lorsque cette volonté se ma--
nifeste, selon son droit, en faveur des
établissements libres d'instruction.
— On écrit de Belley :
Les religieuses ^ui dirigeaient l'école de
filles de Massignieu-de^Rives, récemment
laïcisée, viennent de quitter la commune.
L'institutrice laïque, ; malgré tous- les
moyens employés, n'avait pu recueillir que
cinq élèves, toutes les autres étaient ins
crites à l'école libre que les sœurs se pro
posaient d'ouvrir.
Les laïcisateurs ont alors avisé les soaur3
que le local loué par elles était insalubre
et que l'Académie ne pouvait supporter d'y
voir installer une école.
Et voilà comme on triomphe, quand on
n'est pas gêné par l'honnêteté ni les scru-
pules !
Du reste, dans cette affaire, l'adminis
tration avait agi indignement, les religieu
ses n'avaient été averties de la laïcisation
de leur école qu'au dernier moment, et
n'avaient eu que quarante huit heures pour
déménager par une pluie battante.
De ce fait on peut rapprocher ce
qui s'est passé naguère pour une école
libre de la Sarthe. L'inspection acadé
mique en a exigé la fermeture sous
prétexte qu'il y avait à côté un atelier
de rouissage.
Or, cet atelier ne fonctionne que
pendant le temps des vacances sco
laires, au moment où se fait la récolte
du lin ; mais il fallait un prétexte à la
persécution, et l'on a invoqué celui-là.
N'est-ce pas le fait d'une tyrannie
insupportable ?
Nous recevons de Rome la dépêche
suivante : ?
Rome, 18 novembre, il h. 25 du matin.
Les solennités de béatification du véné
rable P. Chanel ont été splendides.
• MgrLuçon, évêque de Belley, officiait.
Onze cardinaux étaient présents.
Sa Sainteté le Pape Léon XIII est venu,
vers quatre heures, vénérer les reliques du
Bienheureux.
L'assistance comprenait au moins-cinq
mille personnes, auxquelles s'était joint le
pèlerinage français.
Le salut solennel a. été donné par Mgr
l'évêque de Belley.
A son départ, le Pape a été salué par
d'ardentes acclamations, auxquelles a suc
cédé le chant du Magnificat. ;, f
Ce soir, à Saint-Louis des Français, clô
ture du pèlerinage. Allocution de M. l'abbé
Garnier.
La Révolution du Brésil
lïAgence Havas nous communique
les dépêches suivantes :
RLo-de-Janeiro, 17 novembre, 2 h. 35.
L'empereur est parti ce matin pour l'Eu
rope.
Lisbonne, 17 novembre.
Le Commereio, de Porto, annonce que -le
vicomte d'Ouro Preto, président du conseil
des ministres du Brésil, déporté, a été em
barqué à bord du steamer Ralilio.
Rio-de-Janeiro, 18 novembre, 4 h. 5.
Le ministre des finances du gouverne^
ment provisoire se rendant dans les bu
reaux de la Banque nationale du Brésil a
confirmé à son président que, conformé
ment à la proclamation parue, tous les en
gagements pris par le gouvernement anté
rieur seraient respectés et exécutés par le
nouveau gouvernement.
Londres, 18 novembre.
Le Daily Telegrapk expose que la cause
principale de la révolution est le sentiment
de désaffection qu'avait fait naître dans
l'armée dom Pedroi homme de science,
qui ne manifestait aucune sympathie pour
l'élément militaire."
Le Daily Telegraph déclare que peu im
porte à l'Europe la forme de gouvernement
que sè donneront les Brésiliens, tant que la
paix ne sera pas troublée chez eux. .
Le journal anglais ajoute que si les hom
mes qui viennent d'assumer le pouvoir &
Rio-de-Janeiro savent y maintenir l'ordre
et développer les immenses ressources; de
leur pays, ils peuvent compter sur les sym
pathies de l'étranger.
Le Morning Post exprime la crainte que
le Brésil ne soit entré. dans une phase de
désordres. Les membres du nouveau gou
vernement ne lui paraissent pas offrir des
garanties suffisantes de solidité.
Le Standard émet incidemment cette
singulière insinuation que . l'Espagne ou
l'Allemagne pourraient être amenées à
prendre des mesures contre les. insurgés.
Il y a au Brésil, dit le Standard, une
nombreuse population allemande,qui solli
citera peut-être l'intervention du prince de
Bismarck, sous une forme quelconque.*
Le Times accueille sans émotion le chan^
gement qui vient de s'opérer de l'autre côté
de l'Atlantique^ II. constate que le crédit
hrésilien n'en a été que très : faible-:
ment ébranlé, samedi, sur le marché de là
Cité.
On estime qu'il n'y a pas de raison pour
qu'une république ne paye pas ses dettes
aussi bien qu'uni monarchie.
Le Times redoute seulémsnt que le mou
vement actuel ne soit le prélude d'un dé
membrement de l'empire en plusieurs Etats
autonomes, ou qu'on ne cherche à ré
tablir l'esclavage en dépit des principes
qui dominent dans le reste du monde .civi
lisé.
M. Andrieux, dans la Petite Répu
blique française , consacre- un article
aux événements du Brésil. Parlant
de don Pedro, l'empereur détrôné; il
dit : ; . :
! S'il eût pu montrer à ses sujets notre ré
publique parlementaire, nos cabinets éphé
mères, nos députés issus de la candidature
officielle, notre Sénat nommé par le suf
frage restreint, notre armée toujours en for
mation, notre industrie, notre agriculture,
notre commerce toujours incertains du len
demain économique aussi bien que du lenr
demain politique, nos travailleurs perdant
l'espoir de voir jamais se réaliser les ré
formes sans cesse promises et; sans cesse
ajournées ; s'il eût pu leur dire : « La Ré
publique, la voilà 1 » Il est probable que l'a
miral baron de Ladars n'aurait été vic
time d'aucun attentat et qne la dynastie de
Bragance n'eût point été écartée du gou
vernement du Brésil.
Mais les républicains de Rio connaissent
mieux la Constitution des Etats-Unis de
l'Amérique du Nord que celle sous l'é
treinte de laquelle se débat notre démocra
tie anémiée, et j'imagine qu'en procla
mant la République au Srésil, ils ont sur
tout voulu se délivrer du régime parlemen
taire.
Le jugement est peut-être trop flat
teur pour la république américaine,
mais on n'en saurait contester la jus
tesse en ce qui concerne la république
de France.
Dans la correspondance du Blue
Book publié à Londres sur les affaires
de Crète, un mot aura peut-être frappé
le lecteur. Insistant sur les difficultés
que la situation de la Crète crée aux
puissances également: amies de la
Turquie et de la Grèce, lord Salisbury
parle de l'Angleterre et de ses « alliés
<<.Nos alliés », dit-il. A moins qu'on,
ne veuille voir là un lapsus calami T
c'est l'aveu de l'entrée de l'Angleterre
dans la triple alliance.
Il est superflu d'ajouter que nous
ne croyons pas au lapsus } mais à l'aveu,,,
auquel nous étions d'ailleurs préparé
par l'incartade de l'amiral Hewett en.
Italie et par certaines attaques de jour?
naux gladstoniens contre la politique
étrangère du cabinet Salisbury.
On n'a pas oublié non plus l'apaise
ment subit qui a succédé à la violente
querelle soulevée entre les journaux:
de Londres et de Berlin à propos de
^incident Morier. La presse allemande
n'a point fait d'excuses à l'ambassa
deur d]Angleterre à Saint-Pétersbourg.
Mais sir Robert Morier n'a pas ,été dé
savoué ; il est resté à son poste, et les.
journaux, des deux pays ont parlé
d'autre chose. *
Enfin il convient aussi de rappeler
levoyage de l'empereur Guillaume à
Londres et lés politesses dont il a été
comblé. C'était une réconciliation
inattendue entre Berlin et Londres,
après les amères discussions qui avaient
suivi la mort de l'empereur « Frédéric
le Noble. ». Et on sait que le prince de
Galles a rendu avec empressement la
politesse de son royal ne.veu.
Chacun de ces faits estpar lui-même
assez significatif. Réunis, ils forment
un ensemble de preuves, ou si l'on, veut
dè symptômes qui frapperaient l'esprit
le'moins prévenu.
La question pour nous n'est donc
pas de savoir si l'alliance ou entente
anglo-allemande existemais de sa
voir jusqu'où elle va. Sur ce point, tou
tes les hypothèses sont permises. On
nous dit qu'il s'agit d'une entente pu
rement défensive ;■ que l'Angleterre
n'a promis, son intervention en faveur
de la triple alîiaiice que dans le cas
où la triple alliance serait attaquée
sans provocation. Bref, qu'elle veut
sur toute chose garantir la paix de
l'Europe.
C'est un bon billet que l'Europe a
là ! Personne ne peut se méprendre sur
ces formules diplomatiques dont on »
recouvre les espérances de l'avenir.
Et il est facile de voir quelles sont
pour l'Angleterre les espérances
de l'avenir. " Elle - espère bien, en
cas de difficultés dans le fond de l'A
sie, avoir à son service la diplomatie de
M. de Bismarck et au besoin des gre
nadiers poméraniens; Elle espère que
la France se résignera à la patience et
à l'isolement ; qu'elle aura le temps de
digéreT l'Egypte ■ et qu'elle gardera la
suprématie de la Méditerranée en ac
cordant quelques minces dépouilles à
l'avide Italie et en préservant cette
chère alliée des» conséquences de sa
politique provocatrice.
Moyennant ces avantagés, elle pro
met d'être la gardienne dé l'ordre actuel
et de mettre ses forces navales au ser
vice de la politique italorallemande,
qui a besbihv paraît-il, d'être protégée
sur les grands chemins de l'Océan;
Bref, le cabinet Salisbury croit
qu'il y aura bientôt de « l'eau trouble »
en Europe et se prépare à y pêcher.
C'est pour cela qu'il a obtenu un demi-
milliard pour augmenter la flotte et
qu'il va fortifier les défenses de Malte;
mais le cabinet tory dépend d'une
majorité qui est bientôt au bout de
son mandat et dont le pays ae semble
plus vouloir. Sa disparition causerait
sur les bords de la Seine un très vif
plaisir.
L. N emours G odré.
. Le , Temps publie la dépêche sui
vante i .
Rome, 17 novembre, 10 h. 45.
On dit que le mariage du prince de
Naples avec la princesse Cléméntine de
Belgique est absolument décidé entre les
deux familles ; mais qne, suivant les tradi
tions de la maison de Savoie, il faudra at
tendre que 1p.prince ait accompli ses vingt
et an ans, soit l'hiver de 1890, pour rendre
la nouvelle-officielle. .<■ .
C'est pour la troisième fois que cette
ncmvelle est lancée dans le public, et
l'on sait quel accueil elle a chaque fois
reçu en Belique, où elle a soulevé une
réelle indignation, chez tous lés catho
liques, qui sont le parti le plus dévoué
à la couronne.
Il n'est pas à supposer que celle-ci,
à l'encontre de ces sentiments, songe
à négocier le mariage dont il s'agit.
La France du travail à Rome
On écrit de Rome le 15 novembre
1889 :
Ce matin à 8 heures, messe de commu
nion à Saint-Pierre par S. Em. le cardinal
Langénieux. Les ouvriers entrent en pro
cession avec leurs bannières au chant de
« Catholiques et Bretons toujours ». La
messe est dite à la chapelle de Sainte-Pé-
tronille, fille adoptive de saint Pierre. Son
corps est conservé tout entier sous l'putel.
Avant la messe, le cardinal, dans un dis
cours émouvant, rappelle les liens qui unis
sent sainte Pétronillo à la France. Sans
N 1 7991 — Édition quotidienne
Mardi 19 Novembre 1889
* ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRASSES
el DèPARTEMEîH (UHION FOSTALg)
Bn an. , . 55 » 69 a
Six mo'.s. . . . 28 50 • 34 »
Trois mois. ,... 15 ■ „» . 13 »
^pkboxtBementa partent dc« |« et 10 de chaque mal»
UN NUMÉRO { lo 0 -'-
BUREAUX Paris, 10, rua des Saints-Pères
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ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNB
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PARIS
IT DÈPARTÏMOT»
so »
16 »
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ÉTRANGER
(UNION postais)
3S ■
19 »
10 »
lea abonnements partent des 1" et f S de chaque neM
L'UNIVERS ce répond pas des manuscrits qui loi sont adressés
ANNONCES.
MM. Ch. LAGRAiNGE, CERF et G", 6, place de la Bourse
FRANGE ;
PARIS, ,18 NOVEMBRE. 1888,
Que va dire M. Floquet . dans son
grand discours de président, et sur
tout que sera la déclaration ministé
rielle? On attend, pour être fixé sur
l'orientation de la politique, sans im-,
patience du reste, les pompeuses dé
clarations de M. Floquet et les pro
messes de M; Gonstans. Aura-t-on
compris dans les régions officielles
qu'une politique d'apaisement s'im
posait, après les élèctions des 22 sep
tembre et 6 octobre? Les actes du gou
vernement et de ses agents ne sem
blent guère l'indiquer. D'ailleurs le
ministère, ne pouvant constituer nne
majorité avec le seul groupe des op
portunistes,et n'inspirant pas la moin
dre confiance aux conservateurs, sera
obligé de compter avec les radicaux.
Ceux-ci le savent, ét" ils en abuseront.
Séance au Sénat aujourd'hui; des
questions importantes comme les so
ciétés de secours aux ouvriers mineurs
et le travail des enfants et des femmes
dans les manufactures, figurent à
l'ordre du jour. -
La Révolution est triomphante au
Brésil; l'empereur et sa famille ont
été embarqués pour l'Europe; il ne
paraît pas y avoir eu même un sem
blant de résistance. On l'a dit souvent,
on doit le répéter, il n'y a plus guère
de rois. Les princes se laissent remer
cier comme de simples ministres ou
présidents de République. _
Il serait curieux de savoir combien
sont ces républicains qui s'imposent
aussi brusquement à un grand pays
comme le Brésil. On pourrait égale
ment demander si la grande républi
que des Etats-Unis, dont les tentatives
pour étendre son action économique
même sur l'Amérique du Sud avaient
reçu médiocre accueil au Brésil, n'a
pas quelque peu poussé au mouve
ment révolutionnaire. Les Yankees ne
sont pas scrupuleux.
Une dépêche du Standard dit qu'il
n'y a plus lieu de douter que sir Lin-
torn Simmons ait réellement pour
mission de rétablir les relations diplo
matiques entre le Saint-Siège et l'An
gleterre. Que de chemin parcouru de
puis l'époque, assez rapprochée, où
une nouvelle de ce genre aurait suffi
pour provoquer en Angleterre une ex
plosion de fanatisme protestant !
On voit poindre dans les journaux
républicains le débat qui ne manquera
pas de s'engager dans la nouvelle
Chambre sur la question religieuse.
La République française et la Justice
sont déjà en discussion sur le Con
cordat. L'une ët l'autre ont pour ré
dacteurs en chef deux députés, MM. Jo
seph Reinach et Camille Pelletan, deux
puissances politiques. C'est le groupe
opportuniste et l'extrême-gauche
qu'on entend en eux.
Cette querelle du Concordat est an
cienne. Jusqn'ici le: parti opportuniste
a voulu le maintien du Concordat.
M. Gambetta n'était point partisan
d'une rupture ouverte, déclarée, avec
le Saint-Siège. Son opinion est restée
la loi de ses disciples. M. Joseph Rei
nach proteste dans la République fran
çaise contre l'idée de M» Camille Pelle
tan. Celui-ci siège à l'extrémité de
l'extrême gauche ; il irait peut-être
s'asseoir plus loin encore, si l'enceinte
du Palais-Bourbon ne marquait une
certaine limite à la gauche parlemen
taire. M. Pelletan est un fougueux
partisan de l'abolition du; Concordat.
Il prend en pitié ceux des républicains
qui ne pensent pas ; comme lui.' « Pau
vres républicains, s'écrie-t-il, qui ne
veulent pas comprendre -que le Con
cordat est pouf eux la dernière dés
duperies ! » " ' r - " 1 ~ ; /
Le débat en, est là entre la Républi
que française et la Justice. J • -
Le j ournal opportuniste ne veut pôini
passer pour dupe : il affiche la toléran
ce. Nous remercions.!'organe de feu M.
Gambetta de ses, bonnes intentions.
En réalité, il y a toujours eu plus- de
calcul que d'équité ou.de modération
dans le zèle du ; parti opportuniste
pour le Concordat:, Et en cela, nous le
reconnaissons, les opportunistes ont
été plus avisés que; les radicaux.^ La
Justice voudrait-elle nous en : cr®irè ?
On a fait plus de tort à l'Eglise, de
puis dix ans, à la faveur du^ Con
cordat, qu'on n'en eût fait en l'abro
geant. Les modérés se sont montrés
plus habiles que les-violents. Au fond,
ils servaient la même cause,; car le
but de la république, c'feSt la déchris
tianisation du peuple, française mais
combien les opportunistes peuvent se
vanter d'y avoir mieux réussi que les
radicaux !
M. Camille Pelletan, en particulier,
est trop imbu de la tradition révolu
tionnaire pour être politique : il ne
connaît que la violence. A l'égard du
clergé, la prison, la confiscation, le
bannissement, l'échafaud, ce sont ses
moyens. Il s'étonne qu'on n'ait point
appliqué à un ancien maadement,
tout irréprochable, de Mgrl'évêquede
Viviers, au sujet des élections, l'article
du code pénal qui punit de bannisse
ment tout ministre du culte coupable
d'avoir critiqué ou censuré soit le gou
vernement, soit tout acte de l'autorité
publique. Voilà, selon lui, comme on
devrait procéder : abolition du Conr
cordât, puis application sévère du co
de pénal revu et augmenté à l'usage
du clergé. Seulement, le fougueux
disciple de Camille Desmoulins et de
Marat oublie qu'avec de tels moyens
on n'aboutit qu'à faire des martyrs et
à provoquer une réaction contre les
persécuteurs : il connaît pourtant son
histoire de la Révolution. . , .
Bien plus habile, nous sommes oblir
gés de le dire, a été la conduite des
opportunistes. Quel était le grand des
sein et de la franc-maçonnerie, et de
la libre-pensée, et de la république
qui a porté l'une et l'autre au pouvoir?
Le triomphe de la Révolution parla
laïcisation de la France. On y eût
échoué par la persécution ouvert® ; on
y a réussi par une politique hypocrite.
Les opportunistes, depuis douze ou
quinze ans qu'ils régnent, n'ont cessé
de proclamer qu'ils ne voulaient pas
là séparation de l'Eglise et de l'Etat:
Le Concordat a été maintenu, et même
l'ambassade du gouvernement de la
république auprès du Saint-Siège. En
apparence, rien n'a été rompu ; en réa
lité, tout ce que pouvait être fait con
tre la religion l'a été. Et la république
a pu dire qu'elle ne persécutait point l
Quelle est celle des entreprises contre
l'Eglise, quelle est celle des me
sures contre le clergé que le main
tien du Concordat a empêchées? Les
majorités républicaines du Parlement
n'ont-elles pas pu voter toutes les
lois que l'esprit de secte suggé
rait? Les ministères républicains
n'ont-ils pas pu agir en toute circons
tance au gré des passions du parti ?
Est-ce que les lois sur l'observation
du dimanche et sur l'inviolabilité du
mariage n'ont pas été abrogées? Est-
ce que les congrégations religieuses
n'ont pas été expulsées à main armée ?
Est-ce que le sang même n'a pas
coulé pour la fermeture des chapelles ?
Est-ce que les traitements du clergé'
n'ont pas été supprimés autant de fois
qu'il a plu au gouvernement? Est-ce
que la laïcisation des cimetières, des
hôpitaux, des écoles n'a pas été con
sommée, selon le programme franc-
maçonnique? Et tout cela s'est fait
avec le Concordat ! Il a suffi que le
budget des cultes ne fût pas supprimé,
pour qu'on pût dire que le Concordat
n'était pas violé. Moyennant le paie
ment à peu près régulier d'une partie
des arrérages des biens confisqués du
clergé, le gouvernement et le parti
républicain ont pu poursuivre contre
le catholicisme l'exécution du plan
révolutionnaire et arriver peu à peu à
leur fin. En réalité, le Concordat ne
subsiste plus aujourd'hui que de nom,
tant il a été violé dans son esprit de
puis que la république règne en
France.
Néanmoins ce nom même parait de
trop au parti radical. Il semble qu'il y
ait dans le seul mot de Concordat une
dernière attache avec l'Eglise qu'il
faille briser pour la consommation de
l'œuvre révolutionnaire. C'est là-des
sus qu'on se disputera entre radicaux
et opportunistes. Faudra-t-il, oui ou
non, maintenir le peu qui reste du
Concordat ? Devra-t-on en supprimer
même le titre, pour rompre le dernier
lien avec la religion, pour effacer la
dernière trace des anciens rapports en
tre l'Eglise et l'Etat? Ou vaudrait-il
mieux le laisser subsister pour con
server plus sûrement le moyen d'op
primer la religion et d'asservir le cler
gé, sans entrer dans les voies ouver
tes de la persécution? Ce sera tout le
débat entre les violents et les habiles.
Pour notre part, c'est moins l'abolition
du Concordat que nous craindrions
que l'application qui peut en être faite
par les républicains.
. A rthur L oth.
Le seul Etat du Nouveau-Monde qui;
ne fût pas en République vient de
suivre, paraît-il, l'exemple de tous les
autres pays du continent américain.
Depuis quarante-huit heures, il n'y a
plus d'enipire du Brésil.
Cette révolution n'était peut-être
point absolument inattendue. Mais on
ne la croyait pas si proche,ni si aisée.
Cela s'est fait tout à,coup et tout d'un
coup. La brusque nouvelle a d'abord
trouvé bien des incrédules. Elle a reçu
confirmation ; il à fallu se rendre. Les
dépêches de Rio-Janeiro sont là, qui
nous disent que la République est pro
clamée au Brésil. Embarqués sur-le-
•champ, déjà l'empereur et sa famille
sont en route pour l'Europe. Ils cin
glent vers Bordeaux.
7 On se livré à mille commentaires.
On se demande d'où vient le coup.
L'empire du Brésil étant le seul pays
capable,'en Amérique, de gêner la
prépondérance des Etats-Unis,, de lejir, :
faire un peu contre-poids, on soup
çonne fort ceux-ci de n'être pas pré-.
cisément étrangers à cette révolution.
Il n'y aurait là rien d'étonnant. Mais
ce iie sont que des conjectures. Il
faut, si tant est qu'on puisse jamais
le bien connaître, attendre encore
pour savoir le fond de l'affaire. -
Oii ne sait même pas, au juste, com
ment se sont passées les choses. Doit-
on s'en rapporter aux dépêches venues
de Rio-Janeiro ? Elles n'indiquent
point que l'empereur ait eu, dans cette
aventure, la grande contenance d'un
vrai souverain. Sera-ce, en Europe,
une raison pour n'ajouter qu'une foi
médiocre aux dépêches de Rio-Janeiro?
Nous craignons un peu le contraire.
Le trône est, sans doute, comme
tant d'autres, une de ces choses dont
la possession fatigue et pèse parfois,
et dont l'homme, ne sent tout le prix
que lorsqu'il les a perdues. L'empe
reur du Brésil n'a jamais paru se sou
cier beaucoup du trône. 11 n'en doit
pas moins être malheureux et humilié.
Son infortune mérite des égards.
Cependant, il faut bien dire ce que
tout le monde éprouve ; il faut bien
voir les choses comme elles sont. A
quoi bon dissimuler qu'en Europe on
croira très facilement que les dépê
che^ de Rio-Janeiro sont exactes, en
particulier quand elle racontent que
don Pedro, ne faisant pas figure de
souverain, n'a tenté aucune résistance,
et s'est laissé tout: paisiblement dépo
ser, puis embarquer ? A quoi bon dis
simuler que, le premier moment de
surprise passée chacun se dira qu'a
près tout ce qui arrive au Brésil n'est
pas surprenant, que cela devait finir
ainsi; et que la faute en est, pour une
grande part, à l'empereur déposé lui-
même ?
Lorsqu'on est souverain, il faut
l'être avant tout ; il faut l'être, autant
que possible, uniquement. Il faut con
sidérer sa fonction comme un grand
honneur et comme une lourde charge,
plus que suffisante pour un homme
seul. Il ne faut point paraître en faire
fi, et la traiter, avec une ostentation
de mauvais goût, en qualité négli
geable. 11 faut tenir son rang, toujours
et en tout lieu. Il ne faut point se po
ser en littérateur ou savant plutôt
qu'en roi ou empereur, et affecter de
mettre le philosophe et l'artiste au-
dessus du monarque. Bref, il ne faut
point avoir constamment l'air de de
mander pardon d'être un souverain.
On s'expose i ce que les gens, sans
pour cela daigner vous croire sincère,
trouvent néanmoins avec empresse
ment que vous avez bien raison. Don
Pedro, homme très digne de respect,
avait ce travers malheureux. Il n'était
empereur qu'accessoirement. Il n'en
élait pas fier ; tandis qu'il l'était de
posséder les dons qui mènent, lors
qu'on les a plus développés que lui, à
différentes classes de l'Institut. Il ne
se sentait pas d'aise en se voyant traité
par Victor Hugo, qui avait à peu près
autant de tact que d'esprit, avec beau
coup moins d'égards que lui-même
n'en montrait au poète. Victor Hugo
voulait bien oublier qu'il avait affaire
à un tyran. Don Pedro était ravi.
Qu'est-il, à la longue, résulté de tout
cela?Il en est résulté que le peuple
brésilien, oubliant les mérites et les
vertus de son empereur, a fini par
avoir pour l'empire et la dignité im
périale le même attachement et la
même considération que Don Pedro.
P ierre V buillot.
Le Voltaire s'élève contre l'action du
clergé en matière électorale et il en
donne les raisons que voici :
Pourquoi les prêtres n'ont-ils pas. le droit
de raisonner sur la chose publique? Les
facteurs, les cantonniers, les marchands de
tabac ont bien ce droit-là.
C'est pourtant bien simple ! Les prêtres
n'ont pas le droit dé raisonner sur la chose
publique parce que, lorsqu'ils le font, c'est
toujours contra la république qu'ils raison
nent.
Les prêtres sont des fonctionnaires, tout
comme les cantonniers et les facteurs. Us
émargent au budget Se l'Etat. Ils sont te
nus de respecter le gouvernement, et ils
n'ont le droit ni de l'attaquer, ni de le ba
fouer. Cela lenr est imposé par le Concor
dat, qui lie également l 'Etat et le clergâ,
dont il fixe les rapports.
Tant que le Concordat existera, tant que
l'Etat paiera lus appointements des prêtres
et des évéques, et l'on sait qu'il leur donne
plus qu'il n'y est obligé, les prêtres et les
évêques séront dans la cruelle nécessité
d'être déférents et de s'abstenir de toute
hostilité marquée. Si leur conscience leur
dit de combattre la République, elle de
vrait bien leur dire aussi de refuser la
monnaie ; mais, sur ce point peut-être;
conseille-t-elte à voix basse, à voix si basse
qu'on ne l'entend pas.
Si le Voltaire savait ce dont il parle,
il n'ignorerait pas que les prêtres ne
sont nullement des fonctionnaires,
attendu que leur traitément est une
indemnité, et qu'ils sont en toute vé
rité les créanciers de l'Etat, dont le
rôle à leur égard est celui de dé
biteur."
1 Or, du moment que les prêtres ne
sont pas des fonctionnaires, que de
vient l'argumentation du Voltaire , ba
sée tout entière sur cette qualité?
Quant au Concordat, il est vrai que
c'est un acte qui lie également l'Etat
et le clergé dont il fixe les rapports;
mais Iq Voltaire a tort de croire que
le Concordat n'impose d'obligations
^qju'aU;. clergé . seulement. De. par. cet
acte, l'Etat doit assurer à l'Église
l'entière liberté de l'exercice du
culte. Or, cette obligation, l'Etat y a
contrevenu odieusement, et par l'ex
pulsion des religieux, et par la laï
cisation des écoles et des hôpitaux, et
par la suppression ou suspension des
traitements du clergé qui constitue
de sa part un véritable vol, et surtout
par la loi militaire qui supprime l'im
munité ecclésiastique.
C'est donc à l'Etat, non aux prêtres,
que le Voltaire devrait adresser ses
remontrances, s'il avait le vrai senti
ment de la justice et du droit.
A uguste R oussel.
Tels maîtres, tels élèves
M. Sarcey écrit dans le XIX e Siècle :
Ainsi donc, ce sera toujours et partout
la même chose. Je n'entendrai à tous les
degrés de l'échelle universitaire que des
plaintes sur le relâchement de la disci
pline. Partout les enfants sont traités
comme de petits hommes, et partout ils en
abusent. On fait, sur la dignité de l'enfant
qu'il, ne faut pas blesser par des corrections
humiliantes, sur le prétendu surmenage
de l'école et du collège auquel il ne faut
pas ajouter de pensum, un tas de belles
phrases reluisantes. Tout cela est parfait ;
mais les gamins se sentent les plus forts,
ils ne font que ce qui leur platt, et les
études en souffrent.
Après ce préambule, M. Sarcey pro
duit les doléances d'un instituteur
qui écritàla7Wôwne des instituteurs pour
dénoncer le régime actuel de l'école
normale, où les candidats instituteurs
ne travaillent plus, font ce qu'ils veu
lent et jouissent fréquemment de
sorties où, livrés à eux-mêmes, ils se
livrent au jeu et à la débauche.
M. Sarcey voudrait croire que ces
plaintes sont exagérées. Néanmoins, il
conclut :
Ce n'est pas pour donner des conseils sur
une matière qui m'est peu connue, que j'ai
pris la plume. Je n'ai voulu que montrer
une fois de plus, par un témoignage irré
cusable, cette vérité, qui n'est que trop
réelle, hélas 1 c'est que la discipline, qui
tombe en poussière dans les écoles pri
maires et dans les lycées, est fortement at
taquée et menacée dans les écoles norma
les. Les maîtres secouent le joug, comme on
eo a débarrassé leurs élèves.
Savez-vous le grand mal de ce siècle,
celui dont il périra? ,
Personne ne veut plus obéir !.
Voilà un aveu dont nous prenons
acte. Faut-il s'étonner, après cela, que
« les maîtres ayant secoué le joug »
l'enseignement d'une école laïcisée
aboutisse à des résultats réellement
abominables ? Voici, par exemple, le
témoignage non suspect des citoyens
Cercueil et Chevalier, deux anticléri
caux notoires, chargés, comme mem
bres d'une commission locale, d'ins
pecter les écoles des Grandes-Carriè
res et de La Chapelle. Ils disent dans
leur rapport au préfet de la Seine :
Ce qke nous avons remarqué avec peine,
monsieur le préfet, c'est le manque d'ins
truction morale des enfants : bien qu'ils
aient été aux cours de morale aux écoles
d'où ils sortent, ils ne semblent pas s'en
douter.
Aux questions sur les devoirs envers la
famille, envers la société, envers la patrie,
quelques-uns seulement ont un peu et très
faiblement répondu. . ,
Il est pénible de dire, monsieur le préfet,
que cette absence d'instruction morale fait
que les enfants perdent la notion du respect
et du devoir, qui sont les bases de la mo
rale ; de là. les gros mots, les injures, les
paroles obscènes. ■ •
. Tous ces faits ignobles, si déshonorants
pour les mœurs républicaines, pour la mo
rale, et si pernicieux pour lajsociété fran
çaise, font que les 'enfants deviennent dé
sagréables, puis détestables, et souvent
leur inconduite est scandaleuse sur la voie
publique ; tout le'monde s'en plaint, ce qui
fait qu'une grande partie des patrons ne
veulent plus prendre d'apprentis à cause
des désagréments qu'ils ont à subir, des
enfants mal élevés dont ils ont la responsa^
bilité. y. ;
Nous n'ajouterons pas un seul mot.
Mais que disent de cela les laïcisa-
teurs ?
La Persécution
On lit dans le Républicain du Gers:
Nous apprenons que, par décret rendu
en conseil d'Etat, les délibérations du con
seil général du département du "Gars por
tant vote des subventions en r faveur des
écoles primaires libres, congréganistes ou
autres, ont été annulées. . , • -
On pense qu'il en sera de même pour
celles qui concernent les séminaires.
On se rappelle qu'une décision pa
reille atteignait naguères des votes
semblables rendus par le conseil gé
néral du Morbihan; Et l'on voit par là
-quel cas l'on fait de la volonté des po
pulations, lorsque cette volonté se ma--
nifeste, selon son droit, en faveur des
établissements libres d'instruction.
— On écrit de Belley :
Les religieuses ^ui dirigeaient l'école de
filles de Massignieu-de^Rives, récemment
laïcisée, viennent de quitter la commune.
L'institutrice laïque, ; malgré tous- les
moyens employés, n'avait pu recueillir que
cinq élèves, toutes les autres étaient ins
crites à l'école libre que les sœurs se pro
posaient d'ouvrir.
Les laïcisateurs ont alors avisé les soaur3
que le local loué par elles était insalubre
et que l'Académie ne pouvait supporter d'y
voir installer une école.
Et voilà comme on triomphe, quand on
n'est pas gêné par l'honnêteté ni les scru-
pules !
Du reste, dans cette affaire, l'adminis
tration avait agi indignement, les religieu
ses n'avaient été averties de la laïcisation
de leur école qu'au dernier moment, et
n'avaient eu que quarante huit heures pour
déménager par une pluie battante.
De ce fait on peut rapprocher ce
qui s'est passé naguère pour une école
libre de la Sarthe. L'inspection acadé
mique en a exigé la fermeture sous
prétexte qu'il y avait à côté un atelier
de rouissage.
Or, cet atelier ne fonctionne que
pendant le temps des vacances sco
laires, au moment où se fait la récolte
du lin ; mais il fallait un prétexte à la
persécution, et l'on a invoqué celui-là.
N'est-ce pas le fait d'une tyrannie
insupportable ?
Nous recevons de Rome la dépêche
suivante : ?
Rome, 18 novembre, il h. 25 du matin.
Les solennités de béatification du véné
rable P. Chanel ont été splendides.
• MgrLuçon, évêque de Belley, officiait.
Onze cardinaux étaient présents.
Sa Sainteté le Pape Léon XIII est venu,
vers quatre heures, vénérer les reliques du
Bienheureux.
L'assistance comprenait au moins-cinq
mille personnes, auxquelles s'était joint le
pèlerinage français.
Le salut solennel a. été donné par Mgr
l'évêque de Belley.
A son départ, le Pape a été salué par
d'ardentes acclamations, auxquelles a suc
cédé le chant du Magnificat. ;, f
Ce soir, à Saint-Louis des Français, clô
ture du pèlerinage. Allocution de M. l'abbé
Garnier.
La Révolution du Brésil
lïAgence Havas nous communique
les dépêches suivantes :
RLo-de-Janeiro, 17 novembre, 2 h. 35.
L'empereur est parti ce matin pour l'Eu
rope.
Lisbonne, 17 novembre.
Le Commereio, de Porto, annonce que -le
vicomte d'Ouro Preto, président du conseil
des ministres du Brésil, déporté, a été em
barqué à bord du steamer Ralilio.
Rio-de-Janeiro, 18 novembre, 4 h. 5.
Le ministre des finances du gouverne^
ment provisoire se rendant dans les bu
reaux de la Banque nationale du Brésil a
confirmé à son président que, conformé
ment à la proclamation parue, tous les en
gagements pris par le gouvernement anté
rieur seraient respectés et exécutés par le
nouveau gouvernement.
Londres, 18 novembre.
Le Daily Telegrapk expose que la cause
principale de la révolution est le sentiment
de désaffection qu'avait fait naître dans
l'armée dom Pedroi homme de science,
qui ne manifestait aucune sympathie pour
l'élément militaire."
Le Daily Telegraph déclare que peu im
porte à l'Europe la forme de gouvernement
que sè donneront les Brésiliens, tant que la
paix ne sera pas troublée chez eux. .
Le journal anglais ajoute que si les hom
mes qui viennent d'assumer le pouvoir &
Rio-de-Janeiro savent y maintenir l'ordre
et développer les immenses ressources; de
leur pays, ils peuvent compter sur les sym
pathies de l'étranger.
Le Morning Post exprime la crainte que
le Brésil ne soit entré. dans une phase de
désordres. Les membres du nouveau gou
vernement ne lui paraissent pas offrir des
garanties suffisantes de solidité.
Le Standard émet incidemment cette
singulière insinuation que . l'Espagne ou
l'Allemagne pourraient être amenées à
prendre des mesures contre les. insurgés.
Il y a au Brésil, dit le Standard, une
nombreuse population allemande,qui solli
citera peut-être l'intervention du prince de
Bismarck, sous une forme quelconque.*
Le Times accueille sans émotion le chan^
gement qui vient de s'opérer de l'autre côté
de l'Atlantique^ II. constate que le crédit
hrésilien n'en a été que très : faible-:
ment ébranlé, samedi, sur le marché de là
Cité.
On estime qu'il n'y a pas de raison pour
qu'une république ne paye pas ses dettes
aussi bien qu'uni monarchie.
Le Times redoute seulémsnt que le mou
vement actuel ne soit le prélude d'un dé
membrement de l'empire en plusieurs Etats
autonomes, ou qu'on ne cherche à ré
tablir l'esclavage en dépit des principes
qui dominent dans le reste du monde .civi
lisé.
M. Andrieux, dans la Petite Répu
blique française , consacre- un article
aux événements du Brésil. Parlant
de don Pedro, l'empereur détrôné; il
dit : ; . :
! S'il eût pu montrer à ses sujets notre ré
publique parlementaire, nos cabinets éphé
mères, nos députés issus de la candidature
officielle, notre Sénat nommé par le suf
frage restreint, notre armée toujours en for
mation, notre industrie, notre agriculture,
notre commerce toujours incertains du len
demain économique aussi bien que du lenr
demain politique, nos travailleurs perdant
l'espoir de voir jamais se réaliser les ré
formes sans cesse promises et; sans cesse
ajournées ; s'il eût pu leur dire : « La Ré
publique, la voilà 1 » Il est probable que l'a
miral baron de Ladars n'aurait été vic
time d'aucun attentat et qne la dynastie de
Bragance n'eût point été écartée du gou
vernement du Brésil.
Mais les républicains de Rio connaissent
mieux la Constitution des Etats-Unis de
l'Amérique du Nord que celle sous l'é
treinte de laquelle se débat notre démocra
tie anémiée, et j'imagine qu'en procla
mant la République au Srésil, ils ont sur
tout voulu se délivrer du régime parlemen
taire.
Le jugement est peut-être trop flat
teur pour la république américaine,
mais on n'en saurait contester la jus
tesse en ce qui concerne la république
de France.
Dans la correspondance du Blue
Book publié à Londres sur les affaires
de Crète, un mot aura peut-être frappé
le lecteur. Insistant sur les difficultés
que la situation de la Crète crée aux
puissances également: amies de la
Turquie et de la Grèce, lord Salisbury
parle de l'Angleterre et de ses « alliés
<<.Nos alliés », dit-il. A moins qu'on,
ne veuille voir là un lapsus calami T
c'est l'aveu de l'entrée de l'Angleterre
dans la triple alliance.
Il est superflu d'ajouter que nous
ne croyons pas au lapsus } mais à l'aveu,,,
auquel nous étions d'ailleurs préparé
par l'incartade de l'amiral Hewett en.
Italie et par certaines attaques de jour?
naux gladstoniens contre la politique
étrangère du cabinet Salisbury.
On n'a pas oublié non plus l'apaise
ment subit qui a succédé à la violente
querelle soulevée entre les journaux:
de Londres et de Berlin à propos de
^incident Morier. La presse allemande
n'a point fait d'excuses à l'ambassa
deur d]Angleterre à Saint-Pétersbourg.
Mais sir Robert Morier n'a pas ,été dé
savoué ; il est resté à son poste, et les.
journaux, des deux pays ont parlé
d'autre chose. *
Enfin il convient aussi de rappeler
levoyage de l'empereur Guillaume à
Londres et lés politesses dont il a été
comblé. C'était une réconciliation
inattendue entre Berlin et Londres,
après les amères discussions qui avaient
suivi la mort de l'empereur « Frédéric
le Noble. ». Et on sait que le prince de
Galles a rendu avec empressement la
politesse de son royal ne.veu.
Chacun de ces faits estpar lui-même
assez significatif. Réunis, ils forment
un ensemble de preuves, ou si l'on, veut
dè symptômes qui frapperaient l'esprit
le'moins prévenu.
La question pour nous n'est donc
pas de savoir si l'alliance ou entente
anglo-allemande existemais de sa
voir jusqu'où elle va. Sur ce point, tou
tes les hypothèses sont permises. On
nous dit qu'il s'agit d'une entente pu
rement défensive ;■ que l'Angleterre
n'a promis, son intervention en faveur
de la triple alîiaiice que dans le cas
où la triple alliance serait attaquée
sans provocation. Bref, qu'elle veut
sur toute chose garantir la paix de
l'Europe.
C'est un bon billet que l'Europe a
là ! Personne ne peut se méprendre sur
ces formules diplomatiques dont on »
recouvre les espérances de l'avenir.
Et il est facile de voir quelles sont
pour l'Angleterre les espérances
de l'avenir. " Elle - espère bien, en
cas de difficultés dans le fond de l'A
sie, avoir à son service la diplomatie de
M. de Bismarck et au besoin des gre
nadiers poméraniens; Elle espère que
la France se résignera à la patience et
à l'isolement ; qu'elle aura le temps de
digéreT l'Egypte ■ et qu'elle gardera la
suprématie de la Méditerranée en ac
cordant quelques minces dépouilles à
l'avide Italie et en préservant cette
chère alliée des» conséquences de sa
politique provocatrice.
Moyennant ces avantagés, elle pro
met d'être la gardienne dé l'ordre actuel
et de mettre ses forces navales au ser
vice de la politique italorallemande,
qui a besbihv paraît-il, d'être protégée
sur les grands chemins de l'Océan;
Bref, le cabinet Salisbury croit
qu'il y aura bientôt de « l'eau trouble »
en Europe et se prépare à y pêcher.
C'est pour cela qu'il a obtenu un demi-
milliard pour augmenter la flotte et
qu'il va fortifier les défenses de Malte;
mais le cabinet tory dépend d'une
majorité qui est bientôt au bout de
son mandat et dont le pays ae semble
plus vouloir. Sa disparition causerait
sur les bords de la Seine un très vif
plaisir.
L. N emours G odré.
. Le , Temps publie la dépêche sui
vante i .
Rome, 17 novembre, 10 h. 45.
On dit que le mariage du prince de
Naples avec la princesse Cléméntine de
Belgique est absolument décidé entre les
deux familles ; mais qne, suivant les tradi
tions de la maison de Savoie, il faudra at
tendre que 1p.prince ait accompli ses vingt
et an ans, soit l'hiver de 1890, pour rendre
la nouvelle-officielle. .<■ .
C'est pour la troisième fois que cette
ncmvelle est lancée dans le public, et
l'on sait quel accueil elle a chaque fois
reçu en Belique, où elle a soulevé une
réelle indignation, chez tous lés catho
liques, qui sont le parti le plus dévoué
à la couronne.
Il n'est pas à supposer que celle-ci,
à l'encontre de ces sentiments, songe
à négocier le mariage dont il s'agit.
La France du travail à Rome
On écrit de Rome le 15 novembre
1889 :
Ce matin à 8 heures, messe de commu
nion à Saint-Pierre par S. Em. le cardinal
Langénieux. Les ouvriers entrent en pro
cession avec leurs bannières au chant de
« Catholiques et Bretons toujours ». La
messe est dite à la chapelle de Sainte-Pé-
tronille, fille adoptive de saint Pierre. Son
corps est conservé tout entier sous l'putel.
Avant la messe, le cardinal, dans un dis
cours émouvant, rappelle les liens qui unis
sent sainte Pétronillo à la France. Sans
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