Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1889-09-15
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 septembre 1889 15 septembre 1889
Description : 1889/09/15 (Numéro 7927). 1889/09/15 (Numéro 7927).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Dimatxche ls Septembre i§8§
N* 7827 -» ÉdMon quotidiens#
Dimanche 15 Septembre Ï889
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Edition quoti dienne
"PARIS ÉrRAK5Kt
kl ïïparteuknts (bniox postallâ
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L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lai sont adressés
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C", 6, place de la Bourse
FRANCS
PARIS, 14 SEPTEMBRE 1839
Le tapage Gausé par l'inconvenante
et maladroite circulaire de M. Théve-
net n'est pas près de s'apaiser. Voici
qu'une dépêche, adressée aux jour
naux de départements et dont nous
donnons le texte plus loin, nous pro
met d'abondantes délations. Le gou
vernement organiserait lui-même con
tre les membres du clergé une sur
veillance universelle. On sait ce que
cela veut dire, surtout de la part
d'hommes comme ceux qui sont ac
tuellement au pouvoir.
Dans la campagne, entreprise pour
défendre le ministre Thévenet et sa
circulaire, en présentant les membres
du clergé comme des agresseurs, les
feuilles qui se piquent de modération,
comme le Temps , sont peut-être en
core plus déplaisantes que les feuilles
radicales ou opportunistes ; pour sou
tenir le ministre, qu'au fond elles
condamnent, elles ne reculent pas
devant les falsifications les plus
hardies.
Il est un fait qui devrait donner à
réfléchir aux Débals , au Temps et aux
autres journaux qui, à l'occasion de
la circulaire Thévenet, prêchent la
soumission aux évêques comme aux
fidèles : c'est que la quasi-unanimité
des évêques se prononce, soit directe
ment, soit indirectement, contre les
prétentions ministérielles. 11 est à
croire que les évêques connaissent
mieux leurs droits et leurs devoirs que
des journalistes sceptiques, sinon im
pies. Hier, nous publiions une lettre
de Mgr Vigne, archevêque d'Avignon,
au ministre des cultes ;• aujourd'hui,
en voici une de Mgr Sebaux, évêque
d'Angoulême.D'autre part, nous avons
donné et continuons à donner des
fragments significatifs de nombreuses
lettres pastorales sur les droits et les
devoirs électoraux des pasteurs comme
desfidèles.
Y aurait-il quelques nouvelles diffi
cultés dans le sein même du minis
tère ? A peine de retour de Lyon, où il
a triomphé à peu de frais, — mais
combien durera ce triomphe ? — M.
Thévenet a eu une entrevue avec M.
Constans, qui de son côté retarde son
voyage à Toulouse, où cependant sa
présence ne serait pas inutile pour dé
fendre sa candidature. Qu'est-ce que
cela signifie ?
Devons-nous croire le* National qui,
poursuivant ses indiscrétions, nous dit
maintenant que « le ministre de la
guerre serait pris de scrupules (un peu
tardifs) qui le font hésiter sur le parti
à prendre. » On aurait même assuré
au National que M. de Freycinet
« aurait déjà songé à donner sa démis
sion avant le 22 ». De cela nous dou
tons beaucoup; M. de Freycinet n'est
pas de ces hommes qui savent se reti
rer avec dignité ; il attend qu'on le
casse aux gages, ou au moins que la
situation soit absolument désespérée.
D'après le même National , un fait au
moins est certain, à savoir « que c'est
uniquement pour atténuer sa part de
responsabilité dans les décisions pri
ses, que le ministre de la guerre s'est
absenté par trois fois ces temps der
niers. » Cela, nous le croirions vo
lontiers d'un oscillant comme M. de
Freycinet, toujours désireux de se ré
server l'avenir ; mais nous espérons
que ce beau calcul sera déjoué.
L'intervention si dévouée du cardi
nal Manning a produit ses fruits au
près des ouvriers grévistes ; les comités
ont donné leur adhésion à la proposi
tion du cardinal, qui faisait commen
cer le 4 novembre l'augmentation de
salaire ; les armateurs des docks ont
également accepté, pourvu que le tra
vail reprenne lundi.
Ainsi, tout se serait arrangé au mo
ment où tout espoir d'arrangement
semblait perdu, et on le doit à un car
dinal. Le fait est surtout significatif
en Angleterre ; les Anglais protestants
rendent ainsi hommage au prince de
l'Eglise; c'est une leçon dont les gou
vernants, dans un pays catholique
comme la France devraient profiter.
Nous n'espérons pas qu'ils le fassent.
Des dépêches d'Italie confirment la
nouvelle donnée par le Journal des
Débats d'une prochaine dissolution de
la Chambre par M. Crispi, auquel il
faut des députés plus complaisants
pour leur faire voter ses projets finan
ciers. La dissolution avait été décidée
malgré l'opposition de plusieurs mi
nistres ; le roi l'aurait acceptée et elle
aurait lieu le mois prochain.
En admettant que M. Crispi obtienne
les députés qu'il désire, cela lui ren-
dra-t-il l'opinion? On peut en douter 1
Une dépêche signale une tentative
d'assassin&t contre le ministre; on
ne paraît pas, de l'autre côté des Al
pes, la prendre très au sérieux.
François-Joseph se fera-t-il ou non
couronner roi de Bohême? tes discus
sions sont très vives en Autriche à ce
sujet. Les Hongrois comme les Alle
mands sont hostiles au couronnement
qui, dans leur esprit, porterait atteinte
au dualisme. On prétend même que
M. Tisza pourrait se voir, à cette occa
sion, très vivement attaqué, même par
des députés qui l'avaient jusqu'ici sou
tenu. Cela viendrait d'autant plus mal
pour lui qu'une affaire se poursuit à
Buda-Pesth, qui révèle des scandales
dans les hautes régions gouvernemen
tales
Un journal républicain, modéré et
indépendant, la Liberté, estime qu'il
y a trop de diversité et même d'oppo
sition dans les vues des groupes révi
sionnistes pour, que l'opinion publique
puisse tenir à la revision et même y
croire.
Il est certain que tous les journaux,
les chefs de parti et les candidats qui
crient: Revisons la Constitution ! ne
visent pas le même but et n'entendent
pas reviser dans la même mesure.
Le royaliste veut faire sortir de la
revision la royauté, avec un consente
ment national qui donnerait l'illusion
du plébiscite sans être précisément le
plébiscite lui-même. La chose n'est
pas des plus nettes.
L'impérialiste y cherche le trône
pour le prince Victor, et prétend faire
sanctionner à la fois la souveraineté
absolue du peuple et l'hérédité impé
riale, ce qui est contradictoire.
Le napoléonien-jéromiste veut que
la revision maintienne la république,
mais en donne la présidence à vie à
un Napoléon. C'est une hypocrisie.
Le général Boulanger demande car
rément une constitution qui le fasse
maître sous une désignation quelcon
que: président, directeur, protecteur,
consul, peu lui importe, pourvu qu'il
soit César.
Les radicaux se contentent de la
suppression du Sénat, petite réforme
qui, en donnant tout le pouvoir à une
seule Chambre, nous mènerait droit à
la Convention.
La Liberté s st donc fondée à dire que
les révisionnistes ne s'entendent pas
et que de leur succès sortirait le
gâchis ; mais elle a tort de croire que
cette diversité de vues les fera échouer
devant le suffrage universel. Non, le
suffrage universel,n'étant qu'une force
brutale qui obéit à des sensations, ne
se laissera pas arrêter par l'idée que le
lendemain ses élus ne pourront s'en-
tendre.Si les hommes du présent régi
me l'emportent, ils devront leur succès
à la possession du pouvoir qui, leur
donnant beaucoup de faveurs à distri
buer, beaucoup d'argent et le moyen
de se faire craindre, leur donne aussi
beaucoup de force. L'idée qu'après les
avoir chassés leurs vainqueurs ne
pourraient s'entendre n'y sera pour
rien.
Ce qu'il faut à une coalition, c'est
un cri de guerre que tous les coalisés
{missent également accepter sans se
ier pour longtemps, et qui pro
jette ou semble promettre quelque
chose. Le mot revision répond très
bien à ce besoin. Ceux, mêmes par
mi les honnêtes gens, qui s'accom
moderaient volontiers de la constitu
tion actuelle si le gouvernement était
en bonnes mains, parlent de la revi
ser uniquement pour en finir avec la
bande opportuniste et les radicaux
politiques, ses alliés. Aussi peut-on
croire que les révisionnistes seront
en majorité dans la prochaine Cham
bre.
Ce ne sera pas là, d'ailleurs, un dé
nouement. D'abord cette Chambre ré
visionniste ne pourra faire aucune
revision ; ensuite il est très probable
que les vaincus ne voudront pas ac
cepter leur défaite. Pour ces farceurs
et ces exploiteurs, le peuple cesse
d'être souverain dès qu'il veut les
chasser. Il faut donc craindre les con
flits et le gâchis. Nous l'avons dit avant
la Liberté. Mais parce qu'il est difficile
de sortir sans péril de l'état déplora
ble, dégradant où le régime actuel
nous a mis, est-ce une raison d'y res
ter ? A ce compte, le malade devrait se
Il faut voter pour les révisionnistes;
parce qu'il y a de ce côté une chance
de'salut. Cette majorité de coalition,
qui ne s'entendra pas sur les condi
tions de la revision, pourra, du moins,
si le groupe catholique y est actif et
résolu, condamner et annuler tout ce
qui a été fait depuis dix ans contre
nos droits.
Eugène Veuillot.
Le Temps , comme tous les journaux
dévoués au régime actuel et décidés à
maintenir toutes les lois, toutes les
mesures contre lesquelles les catholi
ques n'ont cessé de réclamer, s'est
élevé et s'élève encore contrôle lan
gage tenu par tant d'évêques au sujet
des élections. Ces conseils si sages, où
l'amour de la patrie éclate comme
l'amour de l'Eglise, révoltent la feuille
libre-penseuse et révolutionnaire. Elle
y dénonce des abus et des fautes dont
le clergé devra porter la peine. Re«
vendiquer le respect de la religion et
désirer des députés qui sauront con
damner le3 attentats commis sous les
présidences de MM. Grévy et Carnot,
est, à ses yeux, oublier toute prudence,
toute convenance et manquer au de-
voir! ■ ■ ■ ■ '
Un membre de l'épiscopat a, cepen
dant trouvé grâce devant le Temps,
c'est Mgr l'archevêque de Tours. Ce
prélat, dit la feuille ministérielle, est
bien avisé et parle sagement. Elle cite
à l'appui de son éloge quelques passa
ges .de la circulaire que nous avons
donnée en entier dans notre dernier
numéro, et s'écrie : « Nous n'aurions
« jamais pu dire mieux, et nous som-
« mesheureux devoirle pieux arche -
« vêque donner cette répliqué » aux
journaux qui poussent « le clergé à
« descendre dans l'arène électorale. »
Elle conclut ainsi :
. On demande quel langage lès évêques
pourraient ou devraient tenir pour ne pas
exciter contre eux les républicains, pour ne
pas compromettre le Concordat, auquel nous
tenons comme eux sans doute ils y tien
nent, pour ne pas amener de malheureuses
représailles, pour maintenir enfin entre la
République et l'Eglise un medus vivendi pa
cifique et honorable pour l'une et l'autre.
Nous n'avons pour répondre à cette ques
tion qu'à citer le mandement de l'archevê
que de Tours. Si tous les évêques parlaient
ainsi et donnaient à leurs curés les mêmes
conseils, le procès qui menace de se
rouvrir resterait clos ; la question même de
l'ingérence du clergé dans nos affaires po
litiques finirait par disparaître.
La Semaine religieuse de Tours don
nera, sans doute, son avis. sur ces
commentaires. .
Ce n'est pas, d'ailleurs, pour nous,
le moment d'expliquer au Temps que
les évêques, en demandant que d'hon
nêtes gens, respectueux des droits de
l'Eglise, soient élus, ne s'ingèrent nul
lement dans les affaires des partis et
ne se prononcent pour aucun d'eux.
Ils restent sur leur terrain.
Eugène Veuillot-
Réponse épiscopale
Nous lisons dans la Semaine reli
gieuse du diocèse d'Angoulême :
Le 6 septembre, Mgr l'évêque d'Angoulême
recevait comme tous ses collègues la circulaire,
partout aujourd'hui connue, de AI., le ministre
des cultes. Il la communiquait sans commen
taire & son clergé (1), publiant, d'ailleurs, ce
jour-là même, l'encyclique du Saint-Père, rela
tive au patronage de saint Joseph et au recours
à la sainte Vierge. Mais, en même temps, il
adressait à M. le ministre la réponse suivante :
Angeulême, le 7 septembre 1889.
Monsieur le ministre,
J'ai reçu la circulaire, en date du 4 sep-
tembre, que vous m'avez fait l'honneur de
m'adresser, et je la communique immé
diatement au clergé du diocèse. Mais per
mettez-moi, monsieur le ministre, de vous
présenter quelques observations.
Je me suis toujours opposé à ce que les
prêtres mêlassent la politique à Pexercice
des fonctions sacerdotales, et tous se font
un devoir de s'en abstenir.
Mais il est des esprits hostiles ou préve
nus qui voient de la politique où il n'y en
a pas, ou qui, étendant outre mesure le
sens de ce mot, l'appliquent sans raison &
des matières doctrinales ou morales qu'un
curé a le devoir de traiter devant les fi
dèles.
Cette première réserve faite, je lis dans
la circulaire : Abuser d'une manière quelcon
que du crédit ou de F autorité que peut leur
donner leur caractère; et encore : générale
ment tous les actes qui dénoteraient une hos
tilité systématique , etc.; ces mots ne se prê
tent-ils pas aux interprétations les plus ar
bitraires, et bientôt même, dans l'état ac
tuel des esprits, aux accusations les plus
injustes et aux délations les plus regretta
bles?
Dira-t-on, monsieur le ministre, que pré
férer un candidat religieux à un candidat
connu pour ses opinions anti-chrétiennes,
et manifester cette préférence en dehors du
ministère, est un acte d'hostilité systéma
tique? Laissant de côté la question des
régimes politiques, ne devons-nous pas, en
conscience, désirer de voir aux affaires des
hommes respectueux des droits de Dieu et
de la liberté de l'Eglise ?
La circulaire dit encore au sujet des rè
gles de conduite dont, depuis le Concordat.
1 observation a été exigée sous tous les régi
mes , que la violation de ces règles a été la
;première et la principale cause des difficul
tés qui se sont élevées entre l'autorité reli
gieuse et le pouvoir civil.
Je pourrais faire plus d'une remarque sur
ces règles de conduite ; mais je ne puis,
monsieur le ministre, ne pas relever ce qui
est dit de leur violation. Quand ont-elles été
violées, sauf peut-être dans quelques cas
particuliers et sans conséquence ? je
l'ignore. S'il existe un malaise entre l'auto
rité religieuse et l'autorité civile, la cause
en est certainement ailleurs : les lois sco
laires, l'éducation sans enseignement chré
tien, l'introduction de livres suspects dans
les écoles, les suspensions arbitraires de
traitements, l'expulsion des religieux, des
laïcisations multipliées,, l'interdiction en
bien des lieux de? cérémonies extérieures
du culte, la loi militaire fatale au recrute
ment du clergé et aux intérêts religieux des
peuples, etc., voilà, monsieur le ministre,
la première et la principale cause de diffi
cultés que nous déplorons nous-mêmes.
Pour demeurer les témoins impassibles de
toutes ces mesures, il faudrait avoir perdu
le sens de la mission divine qui nous est
confiée. Qu'une franche et loyale liberté
soit rendue à l'Eglise, la paix reviendra
avec elle, et nous en serons les premiers
heureux.
. Ces considérations n'ont aucun caractère
politique ; elles sont au-dessus des ques-
(1) Monsieur le curé,
Nous venons de recevoir et nous portons, im
médiatement à votre connaissance la circulaire
suivante de M. le ministre de 1& justioe et des
cultes; nous ne croyons pas pouvoir vous ên
laisser ignorer les termes.
Veuillez, etc,
tions de partis, et j'ai la confiance, mon
sieur le ministre, que vous voudrez bien le
reconnaître.
J'aurais un dernier regret à exprimer : la
circulaire est écrite d'un ton auquel nous
ne sommes pas accoutumés, mais qui ne
nous fera pas oublier les égards que nous
devons à l'autorité.
C'est au nom des principes que j'ai l'hon
neur de vous adresser cette lettre, monsieur
le ministre ; car, en fait, mon diocèse est
un de ceux où les circonstances locales im
posent au clergé la plus grande réserve, et
l'éloignent de toute immixtion dans les dis
cussions électorales.
Veuillez bien, etc.
f Alex. Léopold , évêque d'Angoulême.
Sous ce titre : « La parole aux uns,
le bâillon aux autres, la servitude à
tous », nous lisons dans la Semaine
catholique du diocèse de Séez:
Dans une circulaire toute récente, M.
Fallières, ministre de l'instruction publique,
recommande aux instituteurs, d'une façon
à peine déguisée, d'user de leur influence
en faveur des candidats chers à son cœur ;
il leur indique qu'ils ne peuvent se désinté
resser de « cette lin supérieure ».
Le ministre de la justice et des cultes,
M. Thévenet, la menace à la bouche, tient
au clergé un langage tout opposé ; d'où
découle cette conclusion : nos prétendus
libéraux n'accordent à nos prêtres le titre
de citoyens français que lorsqu'il s'agit de
les enrégimenter.
Dans l'attitude bien connue d'un planteur
commandant à des nègres, voici la circu
laire incroyable que ce ministre de la jus
tice vient d'adresser à NN. SS. les arche
vêques et évêques de France. Nous la re
produisons, en mettant en face du document
ministériel la réponse de notre vaillant évê
que.
Sa protestation indignée sera lue avec
fierté par tout homme dont le cœur est
français.
Suit la reproduction, par la Se
maine, de la lettre; ministérielle et
de la réponse épiscopale, mises en
regard.
Nous trouvons également dans la
Semaine catholique le texte d'une ré
ponse faite par Mgr l'évêque de Séez à
un de ses diocésains les plus éminents
qui lui adressait une sorte de consul
tation électorale :
Cher Monsieur,
Je vous remercie de votre bonne lettre,
dont la publication, si vous vouliez l'auto
riser, produirait un salutaire effet dans les
graves circonstances que nous traversons.
Vous me faites l'honneur de me demander
quel est, à mon avis, la langage qu'il con
vient de tenir à nos populations pour les
éclairer. Si j'étais appelé à solliciter leur
suffrages, je leur dirais simplement :
Sans distinction de classe, riches, pau
vres, savants, ouvriers, ignoraals, je viens
aujourd'hui faire appel à votre foi, à votre
honneur, à votre patriotisme, à. votre dé
vouement, & votre amour pour l'Eglise et
pour la France, car je ne sais jamais sépa
rer ces deux mères qui semblent insépara
bles dans les vues de la divine Provi
dence. Aussi l'histoire est là qui l'atteste
hautement, les souffrances et les humilia
tions de l'une sont toujours les souffrances
et les humiliations de l'autre, de même
qu'elles se partagent les gloires et les
triomphes. Les passions humaines s'agite
ront en vain, elles ne parviendront jamais
& séparer co que Dieu, dans ses vues im
pénétrables, a si intimement uni.
Depuis un siècle surtout, les ennemis de
Dieu et de la France n'ont rien négligé pour
rompre cette union providentielle, , sachant
bien que c'était un moyen infaillible d'affai
blir l'une, momentanément du moins ; ils
oublient que de par Dieu l'Eglise est im
mortelle; mais ils savent que, si la France
est la nation choisie, ses destinées sont en
tre ses mains suivant qu'elle sera ou non
fidèle à. sa. grande et sublime mission ca
tholique. On pourrait dire d'elle qu'elle est
la grande nation-lumière, avec plus de vé
rité qu'un poète fameux l'affirmait de la ca
pitale de la France. Mais si, malgré les
terribles avertissements que Dieu, dans sa
miséricorde et son amour, s'est plu à lui
donner, si les désastres — innommés dans
l'histoire — qu'elle a subis depuis quel
ques années ne lui ouvrent pas enfin les
yeux, n'y a-t il pas lieu de trembler devant
l'abîme où elle peut être précipitée ?
Il faut bien l'avouer, quoi qu'il en coûte,
le sens moral semble s'oblitérer de plus en
plus dans cette noble France, si jalouse au
trefois de tout ce qui pouvait toucher à sa
foi religieuse et à son incomparable patrio
tisme. Son amour pour la liberté, suivant
le droit et la justice, n'avait d'égal que sa
haine contre toute tyrannie, et aujourd'hui
nous la voyons courber silencieusement la
tête devant des lois qui outragent sa foi,
son honneur, son indépendance, jusqu'à
fouler aux pieds les droits sacrés du père
de famille. Hors la loi les catholiques ! s'é-
crie-t-on dans une grande assemblée publi
que, et elle garde le silence. Une voix mi
nistérielle insulte du haut de la tribune à
celle que nous vénérons comme la plus su
blime des créatures, et elle se tait. Quoi
qu'il arrive, toujours et en tout temps, s'é
crie dans ,1a même assemblée une voix au
torisée, nous serons unis pour faire iront
contre l'Eglise catholique, et les applaudis
sements éclatent de toutes parts.
Assez d'insultes, assez d'outrages : notre
droit, notre devoir sont de protester, par
tous les moyens légitimes, contre une ty
rannie qui ne tire sa force que de notre
inavouable et criminelle quiétude, dont les
conséquences peuvent être si terribles.
Que faut-il donc pour nous faire sortir de
ce demi-sommeil léthargique, qui simule
si bien la mert qu'il en est souvent le signe
précurseur? Notre aveuglement est-il donc
sans remède? Ne comprendrons-nous pas
enfin qu'il y a des chaînes qu'il faut briser
coûte que coûte, puisqu'en les traînant plus
longtemps c'est plus que la mort, c'est la
honte, c'est le déshonneur? Catholiques et
Français, à ces deux titres nous voulons la
liberté, mais la liberté comme l'a dit un
des plus grands caractères des temps mo-r
dernes, liberté pour tout et pour tous, ex
cepté pour le mal et pour les malfaiteurs.
Inspirés par ces nobles paroles, préparons-
nous, à la veille du grand événement du 22
septembre, et dont l'extrême importance ne
peut échapper à personne, préparons-nous,
dis-je, à remplir un devoir sacré avec une
inébranlable fermeté. Marchons tous au
scrutin la tête haute et le cœur ferme ;plus
de compromis, plus de ces lâcheté?, indb,
gnes qui sacrifient la patrie, ô honte 1 à une
misérable pièce de monnaie, à des promes
ses menteuses et parfois à quelque chose
de plus méprisable encore.
. Consentirons-nous donc à courber plus
longtemps nos fronts devant des ennemis
qui ne sont dignes que de notre mépris?
Debout contré les sectaires qui veulent
nous opprimer ! Debout contre les sectaires'
qui ont juré au pied du Golgotha une haine
à mort et sans trêve à notre foi, à notre
Dieu et aux nations qui reconnaissent son
étendard sacré ! Relevons avec une fierté
digne de nos pères cet audacieux défi.
Aussi bien, si nous sommes vaincus dans
la lutte, nous n'avons aucun quartier à at
tendre. de nos ennemis. Les chaînes du
honteux esclavage qui nous est réservé sont
prêtes. Pouvons-nous sans rougir tendre
nos mains pour les recevoir? Non, mille fois
non, plutôt la mort. Potius mori qu&m fœ-
dari. La loi nous arme elle-même et nous
offre les moyens de vaincre ; remeroions le
Seigneur et sachons nous en servir» Au
scrutin donc tous et vaillamment, pour Dieu
et la France 1
Pardonnez-moi, cher monsieur, cette let
tre un peu trop longue. Si j'ai abusé de
votre patience, je compte toujours sur
votre grande bienveillance, qui m'est bien
connue.
Agréez, je vous prie, l'hommage de mes
plus respectueux sentiments.
f François-Marie, \
évêque de Séez.
Le comité ouvrier catholique de
Reims a envoyé cette dépêche à Mgr
Trégaro :
Séez.
Monseigneur l'évêque,
Avons lu avec enthousiasme votre admi
rable lettre, qui répond si bien au cri de
nos consciences opprimées par des persécu
teurs éhontés. Ils oublient que les fils se
sentent toujours insultés par les outrages
dont on abreuve leurs pères. Merci du
soulagement donné à l'indignation des Fran
çais, profondément humiliés dans leur di
gnité d'hommes libres et d'hommes bien
élevés.
le comité catholique de reims.
Nous savons que Mgr l'évêque de
Séez a reçu un grand nombre de té
moignages d'adhésion et d'ardentes fé
licitations pour sa lettre à M. Théve
net:
L'Agence Havas nous communique
la dépêche suivante :
Rome, 13 septembre.
L 'Osservatore Romano déclare qu'il
n'existe aucun conflit entre l'Espagne et le
Vatican. Le gouvernement et la nonciature
vivent en parfaite harmonie.
L 'Osservatore ajoute que le Pape a reçu
ce3 jours derniers de Majorque une adresse
signée par cent cinquante mille habitants
de l'île, chiffre qui représente à peu
près celui de la population, le priant de
choisir l'île de préférence à tout autre lieu
pour s'y retirer, dans le cas [où il quitterait
Rome. .
Plusieurs journaux de province pu
blient la dépêche que voici :
Paris, 10 septembre, 11 h. soir.
Nous savons dé source autorisée que des
instructions ont été envoyées & tous les
agents du gouvernement en province pour
faire surveiller les prétendus agissements
du clergé ainsi que les prédications dans
les églises en vue des élections générales.
C'est la délation organisée en sys
tème de gouvernement. Il fallait s'y
attendre; mais le parti des « mou
chards» se trompe, s'il croit de la
sorte empêcher le clergé de faire tout
son devoir.
Voici la profession de foi du géné
ral Boulanger adressée aux électeurs
du XVIII 0 arrondissement :
Electeurs,
L'heure attendue va enfin sonner. Dans
quelques jours, la France prononcera entre
la politique loyale duj'parti républicain na
tional et Ja politique louche et cauteleuse
dont le parlementarisme est la triste expres
sion.
Il n'y a plus, en réalité, que deux partis
en présence : le parti ferryste et le nôtre,
le parti ' radical ayant définitivement abdi
qué aux pieds du Sénat.
Nous voulons la revision, et nos adver
saires la repoussent. Voter pour nous,
c'est voter pour la reprise de nos libertés
confisquées par des aventuriers sans patrio
tisme et sans honneur. C'est voter aussi
contre lies dilapidations financières et le3
extravagances coloniales qui ont coûté, en
quelques années, plus de quinze cents mil
lions au Trésor et plus de quarante mille
hommes au pays.
La république, dont se réclament les po
liticiens opportunistes et radicaux, ce sont
eux qui l'ont conduite au bord de l'abîme.
C'est nous qui l'empêcherons d'y tomber»
Mais ces hommes aimeraient mieux la lais
ser sombrer dans la tourmente que de cé
der à d'autres la place où ils ont édifié, par
la corruption et la terreur, leur influence et
leur fortune.
Electeurs du XVIII* arrondissement,
Il faut vous prononcer nettement, sans
autre souci que celui du but à atteindre.
Les hommes ne sont rien dans une bataille
qui va décider du sort de la patrie et de la
république. Et si je vous demande vos suf
frages, c'est parce que je représente actuel
lement non une personnalité que^ les persé
cutions et les calomnies ont mise en lu
mière^ mais le sentiment national,qui aspire
à secouer enfin le lourd fardeau des dettes
grandissantes, des iniquités intolérables et
des humiliations de la patrie.
Vive la France!
Vive la République 1
Général B oulanèer.
Londres, le 12 septembre 1889.
«LaVille lumière », ce n'est plus
Paris, c'est Lyon. Ainsi vient de le
décider, en dépit du fameux décret de
Victor Hugo, le Voltaire.
Le peuple lyonnais n'est pas seule
ment la « lumière », il est aussi le bon
sens etl'honneur.
Et pourquoi ce grand avancement
est-il donné à Lyon? Quel acte a mé
rité à cette ville d'être appelée « le cer
veau de la France », et de s'entendre
dire par le Voltaire qu'elle personnifie
« la démocratie honnête? »
Tout uniment parce qu'elle parait
disposée à se faire représenter par M.
Thévenet.
C'est drôle !
Les Elections
ET
L'ÉPISCOPAT
VIII (I)
chalons . — Mgr Sourrieu dit, en
communiquant aux fidèles de son
diocèse l'encyclique Quamquam pluf
ries :
Dans nos prières, pourrions-nous sépa
rer la France de l'Eglise, les périls de la.
fille aînée dos périls de la Mère ? Les cir
constances sont graves; vous le savez, et
ne peuvent ni ne doivent nous laisser indif
férents. Quelles aspirations vont être con
çues, quels desseins formés, quelles œuvres
préparées dans ce vote autour duquel s'agi
tent tant d'opinions et de passions diver
ses? La lumière, la vraie lumière se fera-
t-elle dans un assez grand nombre d'es>
prits ? La droite raison et la conscience
sauront-elles y garder ou reprendre leur
empire ?
Messieurs et chers coopérateurs, c'est
Dieu qui dirige les pas de l'homme. (Prov.
20.) Rois ou peuples, pour être toujours li
bres, n'en sont pas moins toujours dans sa
main, sicut divisiones aquarum (Prov. 21),
comme l'eau qu'on répand dans les jardins.
C'est Dieu enfin de qui procèdent les saints
désirs, les projets équitables et les œuvres
justes : Deus à quo sancta desideria, recta
consilia et justa sunt opéra. Or, tous les
biens de Dieu, tous les trésors de sa sa
gesse et de sa puissance sont offerts, sont
promis à la prière, dès lors que la prière
est humble, confiante, persévérante.
En conséquence, faisons pour notre cher
pays ce que le Saint-Père nous avertit de
faire pour l'Eglise entière. Prions, intercé
dons de toute manière auprès de cette Ma
jesté qui aime à se manifester par l'indul
gence. Multiplions, prolongeons nos priè
res à mesure que se multiplient et se pro
longent les crises de la patrie. N'est-ce pas
ainsi qu'a daigné faire Jésus-Christ lui-
même quand il élut ses apôtres et au dernier
jour de sa vie mortelle, quand il tomba en
agonie ? Si l'on nous conteste le droit im
prescriptible de parler aux hommes, du
moins personne ne pourra trouver mauvais
que nous parlions à Dieu. A Dieu offrons
des supplications avec des larmes. Si nous
ne cessons d'agir auprès de Dieu pour la
France, nous aurons mis dans la balance de
ses destinées un appoint très précieux et
très considérable : Quoniam tu Dominus
suavis et mitis et multx misericordix omni
bus invocantibus te. (Ps. 85.) Parce que vous
êtes bon, vous, Seigneur, etgdoux et plein
de miséricorde envers tous ceux qui vous
invoquent.
clermont .-— Mgr Boyer, après avoir
communiqué au clergé et aux fidèles
de son diocèse l'Encyclique Quam
quam pluries, ajoute :
Nous prierons pour la sainte Eglise et
pour son chef suprême, le Pape Léon XIII,
qui donne au monde cet exemple d'une
confiance absolue en la prière, au moment
même où ses ennemis poussent la persé
cution grossière jusqu'à élever au pied du
Vatican un monument sacrilège.
Nous prierons aussi pour notre cher pays
de France, afin qu'on lui rende tout ce qui
fait la vie d'une grande nation : — que la
religion y soit toujours respectée ; que tou
tes les familles aient la possibilité de con
fier leurs enfants à des écoles d'où le saint
nom de Dieu ne soit .point banni; que le
culte divin demeure assuré à toutes les pa
roisses par le libre recrutement du sacer
doce ; enfin, que par la sage et énergique
volonté de ceux qui sont appelés à consti
tuer ou à. exercer le pouvoir, Dieu reprenne
sa place dans nos lois, dans nos écoles,
dans nos.mœurs; et qu'ainsi, pour notre
bonhear et pour sa gloire, il. nous accorde
encore des jours de prospérité, de concorde
et de paix., ^
le mans . — Nous lisons dans la
Semaine du Fidèle :
M. Thévenet, ministre des cultes, ayant
cru devoir adresser aux évêques de France
une lettre aussi injustifiée dans le fond
qu'inouïe dans la forme, s'est attiré de
Mgr l'évêque de Séez la réponse qu'on va
lire.-' ■ •
■ Tous les cœurs en qui n'a pas péri la
fierté française et qui gardent le sentiment
du droit et des plus justes convenances,
applaudiront aux observations del'éminent
prélat.
Suit la reproduction de là lettre mi
nistérielle et de là réponse épiscopale.
nevers . — Mgr Lelong s'adresse à
son clergé en ces termes :
Nevers, le 8 septembre 1889.
Monsieur le curé,
L'approche des élections législatives ne
saurait nous laisser indifférents. La foi et
' (1) V. YVnivers des 4, 6, 8, 11, 12, 13 et 14
septembre.
N* 7827 -» ÉdMon quotidiens#
Dimanche 15 Septembre Ï889
isBsaasasaB
Edition quoti dienne
"PARIS ÉrRAK5Kt
kl ïïparteuknts (bniox postallâ
Un an. .... 55 » 68 »
Six mois. . . . 28 50 34 »
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L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lai sont adressés
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C", 6, place de la Bourse
FRANCS
PARIS, 14 SEPTEMBRE 1839
Le tapage Gausé par l'inconvenante
et maladroite circulaire de M. Théve-
net n'est pas près de s'apaiser. Voici
qu'une dépêche, adressée aux jour
naux de départements et dont nous
donnons le texte plus loin, nous pro
met d'abondantes délations. Le gou
vernement organiserait lui-même con
tre les membres du clergé une sur
veillance universelle. On sait ce que
cela veut dire, surtout de la part
d'hommes comme ceux qui sont ac
tuellement au pouvoir.
Dans la campagne, entreprise pour
défendre le ministre Thévenet et sa
circulaire, en présentant les membres
du clergé comme des agresseurs, les
feuilles qui se piquent de modération,
comme le Temps , sont peut-être en
core plus déplaisantes que les feuilles
radicales ou opportunistes ; pour sou
tenir le ministre, qu'au fond elles
condamnent, elles ne reculent pas
devant les falsifications les plus
hardies.
Il est un fait qui devrait donner à
réfléchir aux Débals , au Temps et aux
autres journaux qui, à l'occasion de
la circulaire Thévenet, prêchent la
soumission aux évêques comme aux
fidèles : c'est que la quasi-unanimité
des évêques se prononce, soit directe
ment, soit indirectement, contre les
prétentions ministérielles. 11 est à
croire que les évêques connaissent
mieux leurs droits et leurs devoirs que
des journalistes sceptiques, sinon im
pies. Hier, nous publiions une lettre
de Mgr Vigne, archevêque d'Avignon,
au ministre des cultes ;• aujourd'hui,
en voici une de Mgr Sebaux, évêque
d'Angoulême.D'autre part, nous avons
donné et continuons à donner des
fragments significatifs de nombreuses
lettres pastorales sur les droits et les
devoirs électoraux des pasteurs comme
desfidèles.
Y aurait-il quelques nouvelles diffi
cultés dans le sein même du minis
tère ? A peine de retour de Lyon, où il
a triomphé à peu de frais, — mais
combien durera ce triomphe ? — M.
Thévenet a eu une entrevue avec M.
Constans, qui de son côté retarde son
voyage à Toulouse, où cependant sa
présence ne serait pas inutile pour dé
fendre sa candidature. Qu'est-ce que
cela signifie ?
Devons-nous croire le* National qui,
poursuivant ses indiscrétions, nous dit
maintenant que « le ministre de la
guerre serait pris de scrupules (un peu
tardifs) qui le font hésiter sur le parti
à prendre. » On aurait même assuré
au National que M. de Freycinet
« aurait déjà songé à donner sa démis
sion avant le 22 ». De cela nous dou
tons beaucoup; M. de Freycinet n'est
pas de ces hommes qui savent se reti
rer avec dignité ; il attend qu'on le
casse aux gages, ou au moins que la
situation soit absolument désespérée.
D'après le même National , un fait au
moins est certain, à savoir « que c'est
uniquement pour atténuer sa part de
responsabilité dans les décisions pri
ses, que le ministre de la guerre s'est
absenté par trois fois ces temps der
niers. » Cela, nous le croirions vo
lontiers d'un oscillant comme M. de
Freycinet, toujours désireux de se ré
server l'avenir ; mais nous espérons
que ce beau calcul sera déjoué.
L'intervention si dévouée du cardi
nal Manning a produit ses fruits au
près des ouvriers grévistes ; les comités
ont donné leur adhésion à la proposi
tion du cardinal, qui faisait commen
cer le 4 novembre l'augmentation de
salaire ; les armateurs des docks ont
également accepté, pourvu que le tra
vail reprenne lundi.
Ainsi, tout se serait arrangé au mo
ment où tout espoir d'arrangement
semblait perdu, et on le doit à un car
dinal. Le fait est surtout significatif
en Angleterre ; les Anglais protestants
rendent ainsi hommage au prince de
l'Eglise; c'est une leçon dont les gou
vernants, dans un pays catholique
comme la France devraient profiter.
Nous n'espérons pas qu'ils le fassent.
Des dépêches d'Italie confirment la
nouvelle donnée par le Journal des
Débats d'une prochaine dissolution de
la Chambre par M. Crispi, auquel il
faut des députés plus complaisants
pour leur faire voter ses projets finan
ciers. La dissolution avait été décidée
malgré l'opposition de plusieurs mi
nistres ; le roi l'aurait acceptée et elle
aurait lieu le mois prochain.
En admettant que M. Crispi obtienne
les députés qu'il désire, cela lui ren-
dra-t-il l'opinion? On peut en douter 1
Une dépêche signale une tentative
d'assassin&t contre le ministre; on
ne paraît pas, de l'autre côté des Al
pes, la prendre très au sérieux.
François-Joseph se fera-t-il ou non
couronner roi de Bohême? tes discus
sions sont très vives en Autriche à ce
sujet. Les Hongrois comme les Alle
mands sont hostiles au couronnement
qui, dans leur esprit, porterait atteinte
au dualisme. On prétend même que
M. Tisza pourrait se voir, à cette occa
sion, très vivement attaqué, même par
des députés qui l'avaient jusqu'ici sou
tenu. Cela viendrait d'autant plus mal
pour lui qu'une affaire se poursuit à
Buda-Pesth, qui révèle des scandales
dans les hautes régions gouvernemen
tales
Un journal républicain, modéré et
indépendant, la Liberté, estime qu'il
y a trop de diversité et même d'oppo
sition dans les vues des groupes révi
sionnistes pour, que l'opinion publique
puisse tenir à la revision et même y
croire.
Il est certain que tous les journaux,
les chefs de parti et les candidats qui
crient: Revisons la Constitution ! ne
visent pas le même but et n'entendent
pas reviser dans la même mesure.
Le royaliste veut faire sortir de la
revision la royauté, avec un consente
ment national qui donnerait l'illusion
du plébiscite sans être précisément le
plébiscite lui-même. La chose n'est
pas des plus nettes.
L'impérialiste y cherche le trône
pour le prince Victor, et prétend faire
sanctionner à la fois la souveraineté
absolue du peuple et l'hérédité impé
riale, ce qui est contradictoire.
Le napoléonien-jéromiste veut que
la revision maintienne la république,
mais en donne la présidence à vie à
un Napoléon. C'est une hypocrisie.
Le général Boulanger demande car
rément une constitution qui le fasse
maître sous une désignation quelcon
que: président, directeur, protecteur,
consul, peu lui importe, pourvu qu'il
soit César.
Les radicaux se contentent de la
suppression du Sénat, petite réforme
qui, en donnant tout le pouvoir à une
seule Chambre, nous mènerait droit à
la Convention.
La Liberté s st donc fondée à dire que
les révisionnistes ne s'entendent pas
et que de leur succès sortirait le
gâchis ; mais elle a tort de croire que
cette diversité de vues les fera échouer
devant le suffrage universel. Non, le
suffrage universel,n'étant qu'une force
brutale qui obéit à des sensations, ne
se laissera pas arrêter par l'idée que le
lendemain ses élus ne pourront s'en-
tendre.Si les hommes du présent régi
me l'emportent, ils devront leur succès
à la possession du pouvoir qui, leur
donnant beaucoup de faveurs à distri
buer, beaucoup d'argent et le moyen
de se faire craindre, leur donne aussi
beaucoup de force. L'idée qu'après les
avoir chassés leurs vainqueurs ne
pourraient s'entendre n'y sera pour
rien.
Ce qu'il faut à une coalition, c'est
un cri de guerre que tous les coalisés
{missent également accepter sans se
ier pour longtemps, et qui pro
jette ou semble promettre quelque
chose. Le mot revision répond très
bien à ce besoin. Ceux, mêmes par
mi les honnêtes gens, qui s'accom
moderaient volontiers de la constitu
tion actuelle si le gouvernement était
en bonnes mains, parlent de la revi
ser uniquement pour en finir avec la
bande opportuniste et les radicaux
politiques, ses alliés. Aussi peut-on
croire que les révisionnistes seront
en majorité dans la prochaine Cham
bre.
Ce ne sera pas là, d'ailleurs, un dé
nouement. D'abord cette Chambre ré
visionniste ne pourra faire aucune
revision ; ensuite il est très probable
que les vaincus ne voudront pas ac
cepter leur défaite. Pour ces farceurs
et ces exploiteurs, le peuple cesse
d'être souverain dès qu'il veut les
chasser. Il faut donc craindre les con
flits et le gâchis. Nous l'avons dit avant
la Liberté. Mais parce qu'il est difficile
de sortir sans péril de l'état déplora
ble, dégradant où le régime actuel
nous a mis, est-ce une raison d'y res
ter ? A ce compte, le malade devrait se
Il faut voter pour les révisionnistes;
parce qu'il y a de ce côté une chance
de'salut. Cette majorité de coalition,
qui ne s'entendra pas sur les condi
tions de la revision, pourra, du moins,
si le groupe catholique y est actif et
résolu, condamner et annuler tout ce
qui a été fait depuis dix ans contre
nos droits.
Eugène Veuillot.
Le Temps , comme tous les journaux
dévoués au régime actuel et décidés à
maintenir toutes les lois, toutes les
mesures contre lesquelles les catholi
ques n'ont cessé de réclamer, s'est
élevé et s'élève encore contrôle lan
gage tenu par tant d'évêques au sujet
des élections. Ces conseils si sages, où
l'amour de la patrie éclate comme
l'amour de l'Eglise, révoltent la feuille
libre-penseuse et révolutionnaire. Elle
y dénonce des abus et des fautes dont
le clergé devra porter la peine. Re«
vendiquer le respect de la religion et
désirer des députés qui sauront con
damner le3 attentats commis sous les
présidences de MM. Grévy et Carnot,
est, à ses yeux, oublier toute prudence,
toute convenance et manquer au de-
voir! ■ ■ ■ ■ '
Un membre de l'épiscopat a, cepen
dant trouvé grâce devant le Temps,
c'est Mgr l'archevêque de Tours. Ce
prélat, dit la feuille ministérielle, est
bien avisé et parle sagement. Elle cite
à l'appui de son éloge quelques passa
ges .de la circulaire que nous avons
donnée en entier dans notre dernier
numéro, et s'écrie : « Nous n'aurions
« jamais pu dire mieux, et nous som-
« mesheureux devoirle pieux arche -
« vêque donner cette répliqué » aux
journaux qui poussent « le clergé à
« descendre dans l'arène électorale. »
Elle conclut ainsi :
. On demande quel langage lès évêques
pourraient ou devraient tenir pour ne pas
exciter contre eux les républicains, pour ne
pas compromettre le Concordat, auquel nous
tenons comme eux sans doute ils y tien
nent, pour ne pas amener de malheureuses
représailles, pour maintenir enfin entre la
République et l'Eglise un medus vivendi pa
cifique et honorable pour l'une et l'autre.
Nous n'avons pour répondre à cette ques
tion qu'à citer le mandement de l'archevê
que de Tours. Si tous les évêques parlaient
ainsi et donnaient à leurs curés les mêmes
conseils, le procès qui menace de se
rouvrir resterait clos ; la question même de
l'ingérence du clergé dans nos affaires po
litiques finirait par disparaître.
La Semaine religieuse de Tours don
nera, sans doute, son avis. sur ces
commentaires. .
Ce n'est pas, d'ailleurs, pour nous,
le moment d'expliquer au Temps que
les évêques, en demandant que d'hon
nêtes gens, respectueux des droits de
l'Eglise, soient élus, ne s'ingèrent nul
lement dans les affaires des partis et
ne se prononcent pour aucun d'eux.
Ils restent sur leur terrain.
Eugène Veuillot-
Réponse épiscopale
Nous lisons dans la Semaine reli
gieuse du diocèse d'Angoulême :
Le 6 septembre, Mgr l'évêque d'Angoulême
recevait comme tous ses collègues la circulaire,
partout aujourd'hui connue, de AI., le ministre
des cultes. Il la communiquait sans commen
taire & son clergé (1), publiant, d'ailleurs, ce
jour-là même, l'encyclique du Saint-Père, rela
tive au patronage de saint Joseph et au recours
à la sainte Vierge. Mais, en même temps, il
adressait à M. le ministre la réponse suivante :
Angeulême, le 7 septembre 1889.
Monsieur le ministre,
J'ai reçu la circulaire, en date du 4 sep-
tembre, que vous m'avez fait l'honneur de
m'adresser, et je la communique immé
diatement au clergé du diocèse. Mais per
mettez-moi, monsieur le ministre, de vous
présenter quelques observations.
Je me suis toujours opposé à ce que les
prêtres mêlassent la politique à Pexercice
des fonctions sacerdotales, et tous se font
un devoir de s'en abstenir.
Mais il est des esprits hostiles ou préve
nus qui voient de la politique où il n'y en
a pas, ou qui, étendant outre mesure le
sens de ce mot, l'appliquent sans raison &
des matières doctrinales ou morales qu'un
curé a le devoir de traiter devant les fi
dèles.
Cette première réserve faite, je lis dans
la circulaire : Abuser d'une manière quelcon
que du crédit ou de F autorité que peut leur
donner leur caractère; et encore : générale
ment tous les actes qui dénoteraient une hos
tilité systématique , etc.; ces mots ne se prê
tent-ils pas aux interprétations les plus ar
bitraires, et bientôt même, dans l'état ac
tuel des esprits, aux accusations les plus
injustes et aux délations les plus regretta
bles?
Dira-t-on, monsieur le ministre, que pré
férer un candidat religieux à un candidat
connu pour ses opinions anti-chrétiennes,
et manifester cette préférence en dehors du
ministère, est un acte d'hostilité systéma
tique? Laissant de côté la question des
régimes politiques, ne devons-nous pas, en
conscience, désirer de voir aux affaires des
hommes respectueux des droits de Dieu et
de la liberté de l'Eglise ?
La circulaire dit encore au sujet des rè
gles de conduite dont, depuis le Concordat.
1 observation a été exigée sous tous les régi
mes , que la violation de ces règles a été la
;première et la principale cause des difficul
tés qui se sont élevées entre l'autorité reli
gieuse et le pouvoir civil.
Je pourrais faire plus d'une remarque sur
ces règles de conduite ; mais je ne puis,
monsieur le ministre, ne pas relever ce qui
est dit de leur violation. Quand ont-elles été
violées, sauf peut-être dans quelques cas
particuliers et sans conséquence ? je
l'ignore. S'il existe un malaise entre l'auto
rité religieuse et l'autorité civile, la cause
en est certainement ailleurs : les lois sco
laires, l'éducation sans enseignement chré
tien, l'introduction de livres suspects dans
les écoles, les suspensions arbitraires de
traitements, l'expulsion des religieux, des
laïcisations multipliées,, l'interdiction en
bien des lieux de? cérémonies extérieures
du culte, la loi militaire fatale au recrute
ment du clergé et aux intérêts religieux des
peuples, etc., voilà, monsieur le ministre,
la première et la principale cause de diffi
cultés que nous déplorons nous-mêmes.
Pour demeurer les témoins impassibles de
toutes ces mesures, il faudrait avoir perdu
le sens de la mission divine qui nous est
confiée. Qu'une franche et loyale liberté
soit rendue à l'Eglise, la paix reviendra
avec elle, et nous en serons les premiers
heureux.
. Ces considérations n'ont aucun caractère
politique ; elles sont au-dessus des ques-
(1) Monsieur le curé,
Nous venons de recevoir et nous portons, im
médiatement à votre connaissance la circulaire
suivante de M. le ministre de 1& justioe et des
cultes; nous ne croyons pas pouvoir vous ên
laisser ignorer les termes.
Veuillez, etc,
tions de partis, et j'ai la confiance, mon
sieur le ministre, que vous voudrez bien le
reconnaître.
J'aurais un dernier regret à exprimer : la
circulaire est écrite d'un ton auquel nous
ne sommes pas accoutumés, mais qui ne
nous fera pas oublier les égards que nous
devons à l'autorité.
C'est au nom des principes que j'ai l'hon
neur de vous adresser cette lettre, monsieur
le ministre ; car, en fait, mon diocèse est
un de ceux où les circonstances locales im
posent au clergé la plus grande réserve, et
l'éloignent de toute immixtion dans les dis
cussions électorales.
Veuillez bien, etc.
f Alex. Léopold , évêque d'Angoulême.
Sous ce titre : « La parole aux uns,
le bâillon aux autres, la servitude à
tous », nous lisons dans la Semaine
catholique du diocèse de Séez:
Dans une circulaire toute récente, M.
Fallières, ministre de l'instruction publique,
recommande aux instituteurs, d'une façon
à peine déguisée, d'user de leur influence
en faveur des candidats chers à son cœur ;
il leur indique qu'ils ne peuvent se désinté
resser de « cette lin supérieure ».
Le ministre de la justice et des cultes,
M. Thévenet, la menace à la bouche, tient
au clergé un langage tout opposé ; d'où
découle cette conclusion : nos prétendus
libéraux n'accordent à nos prêtres le titre
de citoyens français que lorsqu'il s'agit de
les enrégimenter.
Dans l'attitude bien connue d'un planteur
commandant à des nègres, voici la circu
laire incroyable que ce ministre de la jus
tice vient d'adresser à NN. SS. les arche
vêques et évêques de France. Nous la re
produisons, en mettant en face du document
ministériel la réponse de notre vaillant évê
que.
Sa protestation indignée sera lue avec
fierté par tout homme dont le cœur est
français.
Suit la reproduction, par la Se
maine, de la lettre; ministérielle et
de la réponse épiscopale, mises en
regard.
Nous trouvons également dans la
Semaine catholique le texte d'une ré
ponse faite par Mgr l'évêque de Séez à
un de ses diocésains les plus éminents
qui lui adressait une sorte de consul
tation électorale :
Cher Monsieur,
Je vous remercie de votre bonne lettre,
dont la publication, si vous vouliez l'auto
riser, produirait un salutaire effet dans les
graves circonstances que nous traversons.
Vous me faites l'honneur de me demander
quel est, à mon avis, la langage qu'il con
vient de tenir à nos populations pour les
éclairer. Si j'étais appelé à solliciter leur
suffrages, je leur dirais simplement :
Sans distinction de classe, riches, pau
vres, savants, ouvriers, ignoraals, je viens
aujourd'hui faire appel à votre foi, à votre
honneur, à votre patriotisme, à. votre dé
vouement, & votre amour pour l'Eglise et
pour la France, car je ne sais jamais sépa
rer ces deux mères qui semblent insépara
bles dans les vues de la divine Provi
dence. Aussi l'histoire est là qui l'atteste
hautement, les souffrances et les humilia
tions de l'une sont toujours les souffrances
et les humiliations de l'autre, de même
qu'elles se partagent les gloires et les
triomphes. Les passions humaines s'agite
ront en vain, elles ne parviendront jamais
& séparer co que Dieu, dans ses vues im
pénétrables, a si intimement uni.
Depuis un siècle surtout, les ennemis de
Dieu et de la France n'ont rien négligé pour
rompre cette union providentielle, , sachant
bien que c'était un moyen infaillible d'affai
blir l'une, momentanément du moins ; ils
oublient que de par Dieu l'Eglise est im
mortelle; mais ils savent que, si la France
est la nation choisie, ses destinées sont en
tre ses mains suivant qu'elle sera ou non
fidèle à. sa. grande et sublime mission ca
tholique. On pourrait dire d'elle qu'elle est
la grande nation-lumière, avec plus de vé
rité qu'un poète fameux l'affirmait de la ca
pitale de la France. Mais si, malgré les
terribles avertissements que Dieu, dans sa
miséricorde et son amour, s'est plu à lui
donner, si les désastres — innommés dans
l'histoire — qu'elle a subis depuis quel
ques années ne lui ouvrent pas enfin les
yeux, n'y a-t il pas lieu de trembler devant
l'abîme où elle peut être précipitée ?
Il faut bien l'avouer, quoi qu'il en coûte,
le sens moral semble s'oblitérer de plus en
plus dans cette noble France, si jalouse au
trefois de tout ce qui pouvait toucher à sa
foi religieuse et à son incomparable patrio
tisme. Son amour pour la liberté, suivant
le droit et la justice, n'avait d'égal que sa
haine contre toute tyrannie, et aujourd'hui
nous la voyons courber silencieusement la
tête devant des lois qui outragent sa foi,
son honneur, son indépendance, jusqu'à
fouler aux pieds les droits sacrés du père
de famille. Hors la loi les catholiques ! s'é-
crie-t-on dans une grande assemblée publi
que, et elle garde le silence. Une voix mi
nistérielle insulte du haut de la tribune à
celle que nous vénérons comme la plus su
blime des créatures, et elle se tait. Quoi
qu'il arrive, toujours et en tout temps, s'é
crie dans ,1a même assemblée une voix au
torisée, nous serons unis pour faire iront
contre l'Eglise catholique, et les applaudis
sements éclatent de toutes parts.
Assez d'insultes, assez d'outrages : notre
droit, notre devoir sont de protester, par
tous les moyens légitimes, contre une ty
rannie qui ne tire sa force que de notre
inavouable et criminelle quiétude, dont les
conséquences peuvent être si terribles.
Que faut-il donc pour nous faire sortir de
ce demi-sommeil léthargique, qui simule
si bien la mert qu'il en est souvent le signe
précurseur? Notre aveuglement est-il donc
sans remède? Ne comprendrons-nous pas
enfin qu'il y a des chaînes qu'il faut briser
coûte que coûte, puisqu'en les traînant plus
longtemps c'est plus que la mort, c'est la
honte, c'est le déshonneur? Catholiques et
Français, à ces deux titres nous voulons la
liberté, mais la liberté comme l'a dit un
des plus grands caractères des temps mo-r
dernes, liberté pour tout et pour tous, ex
cepté pour le mal et pour les malfaiteurs.
Inspirés par ces nobles paroles, préparons-
nous, à la veille du grand événement du 22
septembre, et dont l'extrême importance ne
peut échapper à personne, préparons-nous,
dis-je, à remplir un devoir sacré avec une
inébranlable fermeté. Marchons tous au
scrutin la tête haute et le cœur ferme ;plus
de compromis, plus de ces lâcheté?, indb,
gnes qui sacrifient la patrie, ô honte 1 à une
misérable pièce de monnaie, à des promes
ses menteuses et parfois à quelque chose
de plus méprisable encore.
. Consentirons-nous donc à courber plus
longtemps nos fronts devant des ennemis
qui ne sont dignes que de notre mépris?
Debout contré les sectaires qui veulent
nous opprimer ! Debout contre les sectaires'
qui ont juré au pied du Golgotha une haine
à mort et sans trêve à notre foi, à notre
Dieu et aux nations qui reconnaissent son
étendard sacré ! Relevons avec une fierté
digne de nos pères cet audacieux défi.
Aussi bien, si nous sommes vaincus dans
la lutte, nous n'avons aucun quartier à at
tendre. de nos ennemis. Les chaînes du
honteux esclavage qui nous est réservé sont
prêtes. Pouvons-nous sans rougir tendre
nos mains pour les recevoir? Non, mille fois
non, plutôt la mort. Potius mori qu&m fœ-
dari. La loi nous arme elle-même et nous
offre les moyens de vaincre ; remeroions le
Seigneur et sachons nous en servir» Au
scrutin donc tous et vaillamment, pour Dieu
et la France 1
Pardonnez-moi, cher monsieur, cette let
tre un peu trop longue. Si j'ai abusé de
votre patience, je compte toujours sur
votre grande bienveillance, qui m'est bien
connue.
Agréez, je vous prie, l'hommage de mes
plus respectueux sentiments.
f François-Marie, \
évêque de Séez.
Le comité ouvrier catholique de
Reims a envoyé cette dépêche à Mgr
Trégaro :
Séez.
Monseigneur l'évêque,
Avons lu avec enthousiasme votre admi
rable lettre, qui répond si bien au cri de
nos consciences opprimées par des persécu
teurs éhontés. Ils oublient que les fils se
sentent toujours insultés par les outrages
dont on abreuve leurs pères. Merci du
soulagement donné à l'indignation des Fran
çais, profondément humiliés dans leur di
gnité d'hommes libres et d'hommes bien
élevés.
le comité catholique de reims.
Nous savons que Mgr l'évêque de
Séez a reçu un grand nombre de té
moignages d'adhésion et d'ardentes fé
licitations pour sa lettre à M. Théve
net:
L'Agence Havas nous communique
la dépêche suivante :
Rome, 13 septembre.
L 'Osservatore Romano déclare qu'il
n'existe aucun conflit entre l'Espagne et le
Vatican. Le gouvernement et la nonciature
vivent en parfaite harmonie.
L 'Osservatore ajoute que le Pape a reçu
ce3 jours derniers de Majorque une adresse
signée par cent cinquante mille habitants
de l'île, chiffre qui représente à peu
près celui de la population, le priant de
choisir l'île de préférence à tout autre lieu
pour s'y retirer, dans le cas [où il quitterait
Rome. .
Plusieurs journaux de province pu
blient la dépêche que voici :
Paris, 10 septembre, 11 h. soir.
Nous savons dé source autorisée que des
instructions ont été envoyées & tous les
agents du gouvernement en province pour
faire surveiller les prétendus agissements
du clergé ainsi que les prédications dans
les églises en vue des élections générales.
C'est la délation organisée en sys
tème de gouvernement. Il fallait s'y
attendre; mais le parti des « mou
chards» se trompe, s'il croit de la
sorte empêcher le clergé de faire tout
son devoir.
Voici la profession de foi du géné
ral Boulanger adressée aux électeurs
du XVIII 0 arrondissement :
Electeurs,
L'heure attendue va enfin sonner. Dans
quelques jours, la France prononcera entre
la politique loyale duj'parti républicain na
tional et Ja politique louche et cauteleuse
dont le parlementarisme est la triste expres
sion.
Il n'y a plus, en réalité, que deux partis
en présence : le parti ferryste et le nôtre,
le parti ' radical ayant définitivement abdi
qué aux pieds du Sénat.
Nous voulons la revision, et nos adver
saires la repoussent. Voter pour nous,
c'est voter pour la reprise de nos libertés
confisquées par des aventuriers sans patrio
tisme et sans honneur. C'est voter aussi
contre lies dilapidations financières et le3
extravagances coloniales qui ont coûté, en
quelques années, plus de quinze cents mil
lions au Trésor et plus de quarante mille
hommes au pays.
La république, dont se réclament les po
liticiens opportunistes et radicaux, ce sont
eux qui l'ont conduite au bord de l'abîme.
C'est nous qui l'empêcherons d'y tomber»
Mais ces hommes aimeraient mieux la lais
ser sombrer dans la tourmente que de cé
der à d'autres la place où ils ont édifié, par
la corruption et la terreur, leur influence et
leur fortune.
Electeurs du XVIII* arrondissement,
Il faut vous prononcer nettement, sans
autre souci que celui du but à atteindre.
Les hommes ne sont rien dans une bataille
qui va décider du sort de la patrie et de la
république. Et si je vous demande vos suf
frages, c'est parce que je représente actuel
lement non une personnalité que^ les persé
cutions et les calomnies ont mise en lu
mière^ mais le sentiment national,qui aspire
à secouer enfin le lourd fardeau des dettes
grandissantes, des iniquités intolérables et
des humiliations de la patrie.
Vive la France!
Vive la République 1
Général B oulanèer.
Londres, le 12 septembre 1889.
«LaVille lumière », ce n'est plus
Paris, c'est Lyon. Ainsi vient de le
décider, en dépit du fameux décret de
Victor Hugo, le Voltaire.
Le peuple lyonnais n'est pas seule
ment la « lumière », il est aussi le bon
sens etl'honneur.
Et pourquoi ce grand avancement
est-il donné à Lyon? Quel acte a mé
rité à cette ville d'être appelée « le cer
veau de la France », et de s'entendre
dire par le Voltaire qu'elle personnifie
« la démocratie honnête? »
Tout uniment parce qu'elle parait
disposée à se faire représenter par M.
Thévenet.
C'est drôle !
Les Elections
ET
L'ÉPISCOPAT
VIII (I)
chalons . — Mgr Sourrieu dit, en
communiquant aux fidèles de son
diocèse l'encyclique Quamquam pluf
ries :
Dans nos prières, pourrions-nous sépa
rer la France de l'Eglise, les périls de la.
fille aînée dos périls de la Mère ? Les cir
constances sont graves; vous le savez, et
ne peuvent ni ne doivent nous laisser indif
férents. Quelles aspirations vont être con
çues, quels desseins formés, quelles œuvres
préparées dans ce vote autour duquel s'agi
tent tant d'opinions et de passions diver
ses? La lumière, la vraie lumière se fera-
t-elle dans un assez grand nombre d'es>
prits ? La droite raison et la conscience
sauront-elles y garder ou reprendre leur
empire ?
Messieurs et chers coopérateurs, c'est
Dieu qui dirige les pas de l'homme. (Prov.
20.) Rois ou peuples, pour être toujours li
bres, n'en sont pas moins toujours dans sa
main, sicut divisiones aquarum (Prov. 21),
comme l'eau qu'on répand dans les jardins.
C'est Dieu enfin de qui procèdent les saints
désirs, les projets équitables et les œuvres
justes : Deus à quo sancta desideria, recta
consilia et justa sunt opéra. Or, tous les
biens de Dieu, tous les trésors de sa sa
gesse et de sa puissance sont offerts, sont
promis à la prière, dès lors que la prière
est humble, confiante, persévérante.
En conséquence, faisons pour notre cher
pays ce que le Saint-Père nous avertit de
faire pour l'Eglise entière. Prions, intercé
dons de toute manière auprès de cette Ma
jesté qui aime à se manifester par l'indul
gence. Multiplions, prolongeons nos priè
res à mesure que se multiplient et se pro
longent les crises de la patrie. N'est-ce pas
ainsi qu'a daigné faire Jésus-Christ lui-
même quand il élut ses apôtres et au dernier
jour de sa vie mortelle, quand il tomba en
agonie ? Si l'on nous conteste le droit im
prescriptible de parler aux hommes, du
moins personne ne pourra trouver mauvais
que nous parlions à Dieu. A Dieu offrons
des supplications avec des larmes. Si nous
ne cessons d'agir auprès de Dieu pour la
France, nous aurons mis dans la balance de
ses destinées un appoint très précieux et
très considérable : Quoniam tu Dominus
suavis et mitis et multx misericordix omni
bus invocantibus te. (Ps. 85.) Parce que vous
êtes bon, vous, Seigneur, etgdoux et plein
de miséricorde envers tous ceux qui vous
invoquent.
clermont .-— Mgr Boyer, après avoir
communiqué au clergé et aux fidèles
de son diocèse l'Encyclique Quam
quam pluries, ajoute :
Nous prierons pour la sainte Eglise et
pour son chef suprême, le Pape Léon XIII,
qui donne au monde cet exemple d'une
confiance absolue en la prière, au moment
même où ses ennemis poussent la persé
cution grossière jusqu'à élever au pied du
Vatican un monument sacrilège.
Nous prierons aussi pour notre cher pays
de France, afin qu'on lui rende tout ce qui
fait la vie d'une grande nation : — que la
religion y soit toujours respectée ; que tou
tes les familles aient la possibilité de con
fier leurs enfants à des écoles d'où le saint
nom de Dieu ne soit .point banni; que le
culte divin demeure assuré à toutes les pa
roisses par le libre recrutement du sacer
doce ; enfin, que par la sage et énergique
volonté de ceux qui sont appelés à consti
tuer ou à. exercer le pouvoir, Dieu reprenne
sa place dans nos lois, dans nos écoles,
dans nos.mœurs; et qu'ainsi, pour notre
bonhear et pour sa gloire, il. nous accorde
encore des jours de prospérité, de concorde
et de paix., ^
le mans . — Nous lisons dans la
Semaine du Fidèle :
M. Thévenet, ministre des cultes, ayant
cru devoir adresser aux évêques de France
une lettre aussi injustifiée dans le fond
qu'inouïe dans la forme, s'est attiré de
Mgr l'évêque de Séez la réponse qu'on va
lire.-' ■ •
■ Tous les cœurs en qui n'a pas péri la
fierté française et qui gardent le sentiment
du droit et des plus justes convenances,
applaudiront aux observations del'éminent
prélat.
Suit la reproduction de là lettre mi
nistérielle et de là réponse épiscopale.
nevers . — Mgr Lelong s'adresse à
son clergé en ces termes :
Nevers, le 8 septembre 1889.
Monsieur le curé,
L'approche des élections législatives ne
saurait nous laisser indifférents. La foi et
' (1) V. YVnivers des 4, 6, 8, 11, 12, 13 et 14
septembre.
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