Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1889-09-03
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 03 septembre 1889 03 septembre 1889
Description : 1889/09/03 (Numéro 7915). 1889/09/03 (Numéro 7915).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7067355
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Mardi 3 Septembre 1860 7915 - Édition quotidienne
ea^iWBSESgBBgsiwtgataaiiies^MBBsasMBBStgBragaa^^
ÉSITION QÏOTIDEEIÎMB
Mardi 3 Septembre 1889
ÉDITION EESn-GUOUDIENNE
Un an. , . .
Six mois. . .
Trois mois. .
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CI DÉTAÏTEliEÏÏB
. 55 »
. 23 50
. 15 »
etranges
(uxion-'posta l ï)
63 a
34 »
18 s
^CfeoboBnements partent des |« et 1S de chaque mois.
.... ( Paris -, . .... 15 calit.
UN NUMÉRO } Départements. 20 —
BIEIEAUX : Paris, 10, rua des Saints-Pères
PARIS
ïx dfcpartemekts
Un an. 30 »
Six mois. ... 16 »
Trois mois. . . 8 50
étranger
(union postais)
38 »
19 »
10 s
jggttaaaM
On s'abonne à Rome, place da Gesù. 8
wmnnininn un»'; i ii r t i
Les abonnements partent des 4" ot tS do chaque moi»
lUKIYERS ne répond pas des mauascrits qui lui sont adressés
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C">, 6, place do la Bourse
«ara**
FHANGB
PARIS, 2 SEPTEMBRE 1839
Sous le titre « Union latine », un
journal publiait hier une sorte de ma
nifeste, signé au nom d'un soi-disant
comité franco-italien parle secrétaire
général, un B. Malon, qui est peut-
être celui de la Commune. Le dit se
crétaire,porte-plume, à ce qu'il paraît,
de MM. Anatole de la Forge et Amil-
care Gipriani, présidents du comité,
nous faisait savoir qu'il importait de
célébrer par une manifestation gran
diose l'arrivée à Paris des Italiens,
qu'envoient « à la démocratie répu
blicaine et sociale française les asso
ciations démocratiques et garibaldien-
nies, fédérées à cet effet; les groupes
de la fédération ouvrière mazzinienne,
représentés au congrès de Naples et les
groupes socialistes représentés aux
congrès de Rimini et de Forli ». Il s'a-
Îfissait toujours, d'après le citoyen Ma-
on,de protester contre la triple alliance
et d'avertir le monde « que la solidarité
des deux peuples saurait s'affirmer le
jour où la coalition monarchique ten
terait de noyer dans le sang,en même
temps que l'indépendance (première
visée) des nations républicaines, les
libertés politiques, les conquêtes de
1789 et des espérances sociaies des
peuples occidentaux, avides # de paix
internationnale, de liberté politique et
de justice économique. » La manifes
tation a en lieu, mais elle a été moins
imposante que ne le souhaitaient les
incandescents organisateurs. La po
lice a fait rentrer un drapeau rouge
qu'avaient voulu déployer les délégués
de l'association démocratique d'Asti
[Piémont).
M. Spuller se trouvait hier dans
l'Isère pour l'inauguration d'un mo
nument élevé à un inconnu du nom
de Buyat. Au discours du maire de
Saint-Priest il a répondu que « la ré
publique doit être conduite par des
gens qui redoutent les aventures, et
qui surtout craignent da voir la France
retomber dans le césarisme. » De son
côté, M- Yves Guyot, allant à Dunker-
qtifi poser la première pierre d'une
éclusfl,s'est vu accueilli par les cris de
Vive Boulanger ! A bas Guyot ! avec ac
compagnement de la chanson les
Pioupious d'Auvergne. Sur quoi M. An-
drieux dit négligemment, dans la Pe
tite République : « Ces choses-là font
toujours plaisir à enregistrer. »
On mande'de Londres que les gré
vistes anglais, au nombre d'environ
cinquante mille, ont traversé hier
après-midi les principales voies de
Londres pour se rendre àHyde-Park.
Ils sont partis des docks en rangs ser
rés ; plusieurs fanfares les accompa
gnaient. De nombreux drapeaux
étaient déployés dans le cortège. Les
chefs du parti ouvrier ont prononcé
des discours, à la suite desquels il a
été décidé que la grève ne cesserait
que lorsque les ouvriers auraient reçu
une entière satisfaction. Comme on le
voit, tout cela n'annonce pas une pa
cification prochaine.
Eîa réponse à la notification de la
Bulgarie relative aux préparatifs mi
litaires de la Serbie, la Porte a télé
graphié à Sofia que la Bulgarie fait
partie intégrante de la Turquie ; qu'en
conséquence toute agression contre la
'Bulgarie sera une agression contre la
Turquie ; que la Bulgarie ne doit aonc
rien craindre, et que du reste la Ser
bie n'est pas matériellement capable
d'attaquer la Bulgarie.
Le correspondant viennois du Stan
dard prétend tenir d*un personnage
occupant une position élevés dans la.
monde diplomatique les détails sui
vants sur les causes qui auraient mo
tivé le retard dans la visite du czar en
Allemagne.
Le czar avait eu primitivement l'in
tention de venir à Berlin dans le "cou
rant du mois de mai, pour être ainsi
te premier des souverains à rendre vi
site à l'empereur Guillaume. Mais au
mois de mai l'impératrice de Russie,
qui aujourd'hui encore se ressent des
suites de l'accident de Borki, se trouva
si malade que le czar ne crut pas de
voir la quitter. D'autre part, le roi
Humbert ne voulut pas différer son
voyage,et l'empereur Alexandre^ayant
appris cette infraction à l'ordre primi
tivement fixé pour les visites, se sentit
blessé dans son orgueil.
Gomme, de plus, le cérémonial de
cour l'ennuie et que sa dernière entre
vue avec le prince de Bismarck, en
novembre 1888, ne lui avait pas laissé
de souvenirs agréables, le czar remit
sa visite sans indiquer aucune date
précise. Un moment même il fit savoir
à Berlin qu'il se proposait de rendre
sa visite à l'empereur Guillaume hors
de la capitale allemande. Cette offre
ayant été poliment repoussée par l'em
pereur d'Allemagne, les choses res
tèrent en suspens. Ce n'est que dans
les premiers jours du mois d'août que
le czar annonça qu'il consentait à ve
nir à Berlin en revenant de Danemark.
Le Standard dit, en outre, dans son
article de fond, que le ton adopté ces
jours derniers par la presse officielle
et officieuse^ allemande ne saurait évi
demment inspirer à l'empereur Alexan
dre III un très vif désir de se rendre
en Allemagne.
La Vérité
SUR
LÀ QUESTION ROMAINE
I •
La conciliation. Qui ne la veut pas.
— Tel est le titre du premier chapitre
de la brochure romaine que nous
nous proposons d'analyser. L'auteur
constate tout d'abord que la guerre
déclarée par le gouvernement au Sou
verain Pontife remonte à vingt-neuf
ans, mais qu'elle a naturellement pris
un caractère plus aigu après le 20 sep
tembre 1870, date de l'entrée des enva
hisseurs par la brèche de la Porta Pia. Il
s'en est suivi un malaise général qui
explique comment, à chaque bruit,
vrai ou cru tel, d'une réconciliation,
on l'aecueille comme la nouvelle d'un
bien désiré ; le nouveau royaume lui-
même « regarde la cessation de ce dis
sentiment comme un complément né
cessaire à son assiette définitive. »
Le Pape serait-il donc, par aven
ture, moins disposé à la réconcilia
tion? Après avoir posé cette question,
l'auteur de l'opuscule répond tout
d'abord que, pour parler plus juste
ment, il faudrait dire la paix , au lieu
de la réconciliation , celle-ci "n'étant
qu'un moyen d'avoir la paix que l'on
dsit vraiment viser. « Qu'on lève les
yeux vers les objets supérieurs aux
choses terrestres, sans perdre de vue
le véritable bien de l'Italie et de la
société, et alors on pourra en toute
certitude affirmer que le Pape désire
la paix plus que personne, et la veut
d'autant plus sincèrement et la cher
che avec d'autant plus d'ardeur, que
plus élevé est son caractère et que
sont plus nobles les motifs dont il
s'inspire, »
Développant cette pensée,I'auteur de
l'opuscule dit que, ministre d'un Dieu
auteur de la paix, vicaire de Celui qui
est venu apporter la paix au monde, le
Pape, après avoir dans ses encycliques
souvent exposé la nécessité de l'àc-
cord entre les deux puissances pour
le-bien de l'Eglise et de la société ci
vile, ne pourrait sans une contradic
tion--manifeste, faire obstacle à la*
paix. Ayant tout tenté depuis son Pon
tificat « avec une admirable longani
mité » pour renouer ou rendre plus
étroits les liens de bonne intelligence
avec les autres Etats de l'Europe, peut-
il être souçonné de se faire « un pro
moteur de dissentiments et de luttes
avec l'Italie, sa patrie, siège privilégié
du Vicaire de Jésus-Christ » ?
Donc le désir de réconciliation et
de paix ne trouve nulle opposition dans
le Pape. Qui donc dès lors doit répon
dre de la continuation de la guerre ?
Il en est qui, « au mépris de la logique
et du bon sens»,voudraient voir lePape
« reconnaître les faits accomplis, s'ac
commoder de son mieux de la miséra
ble condition qui lui est faite, et sinon
approuver, au moins supporter en si
lence » tout ce qui se fait contre lui.
Mais cela, ce serait^ comme le dit l'au
teur de la brochure,« la réconciliation
au ' prix d'une sacrilège trahison 1 » Et
comment pourrait-on appeler la paix
« une réconciliation pareille n'ayant
pas pour base la justice, et offensant
gravement la dignité dit Souverain
Pontife » ? Qu'on sache donc une fois
pour toutes que le Pape, « comme tout
légitime possesseur 1 dépouillé de son
bien, doit revendiquer ses droits; Et
parce que ces droits sont sacro-saints
et imprescriptibles, étant en vérité les
droits de l'Eglise et de son divin Fon
dateur, le Pape ne pourra jamais ces
ser de les défendre en réclamant avant
tout l'indépendance politique néces
saire à l'exercice de son suprême apos
tolat ».
Après cette déclaration, la conclu
sion s'impose. C'est que la responsabi
lité de l'état présent incombe tout en
tière à ceux qui l'ont créé par leurs in
justices et ne font aucune proposition
pour le faire. cesser. « La paix né peut
se faire quand les deux contendants
n'en ont pas la volonté; or le gouver
nement italien a commencé lui-même
par l'avoir contraire. Non seulement
il n'a pas fait une proposition, fût-ce
d'un accord provisoire, s'il ne croyait
pas possible l'accord plein et définitif,
mais il traite en ennemis et en coupa
bles ceux qui demandent la concilia
tion. Il ne veut pas la paix, et il n'en
fait pas mystère. »
Les preuves abondent; l'auteur de
la brochure les énumère en rappelant
brièvement les principaux actes de
persécution du gouvernement italien
en ces derniers temps, et il n'est
pas malaisé dès lors de constater que
c'est bien le gouvernement italien qui
délibérément fait obstacle à la paix,
parce que, en poursuivant la ruine du
pouvoir temporel du Souverain Pon
tife, l'on a voulu en réalité atteindre
son pouvoir spirituel.
Auguste Roussel.
la prompte récompense de ses travaux
apostoliques.
Le H. P. Sempé
La R. P. Noguès nous télégraphie de
Lourdes, en ces termes, une bien dou
loureuse nouvelle :
Lourdes, 2 septembre, 8 h. 53 matin.
Un homme que le monde catholique ai
mait et vénérait et dont le nom restera à
jamais attaché à celui de Lourdes, le T.
R. P. Sempé, vient da mourir après quel
ques heures de cruelles souffrances.
Sa mort est un deuil pour l'évêque et
l'Eglise de Tarbes et pour les pèlerins du
monde entier, qui tous ont connu sa bonté
et apprécié ses œuvres.Les obsèques auront
lieu mercredi matin.
M oqués.
Nous n'ajouterons rien & ce télé
gramme, qui dit tout en son éloquente
brièveté.
Le R. P. Sempé a été le zélateur pas
sionné de Notre-Dame de Lourdes.
Notre-Dame de Lourdes lui obtiendra
Nous recevons du comité des Douze,
avec prière de l'insérer, la communi
cation suivante :
Certains journaux attribuent au comité
des Douze un rôle qu'il n'a jamais eu. Ce
comité, délégation des droites, n'a jamais
été un csmité électoral. Il acoepte de rem*
plir la mission d'arbitre entre les candidats
qui le lui demandent en Rengageant à ac
cepter son verdict ; il ne pouvait refuser
cette mission sans manquer à son but, qui a
toujours été de maintenir l'union entré tous
les conservateurs.
Il se met aussi à la disposition de tous
ceux de ses amis qui s'adressent au secré
tariat général des droites pour obtenir,,
dans l'intérêt de leur élection, tels ou tels
renseignements.. .
Mais, il ne fait pas de désignation de
candidats, laissant cette initiative aux co
mités locaux ou aux divers comités autori
sés à cet effet. .
Ce n'est que par suite de renseignements
inexacts qu'on peut prêter au comité des
Douze un autre rôle que celui qui vient
d'être déterminé.
Paris, le 1 er septembre 1889.
Nous lisons dans l'Aquitaine :
M. Bidoul, sous-inspecteur de l'enregis-
trement,. vient d'être, par décision ministé
rielle, nommé commissaire pour l'adminis
tration de la mense archiépiscopale de Bor
deaux, jusqu'à la nomination du successeur
de Mgr Guilbert.
le fait dénoncé par M. le vicaire gé
néral Théas, la preuve du profond dé
pit causé à la franc-maçonnerie des
Hautes-Pyrénées par le succès élec
toral de M. Semmartin, qui a si fran
chement arboré dans le combat la
bannière catholique. Ce nous est une
raison de plus d'applaudir de nouveau
et plus vivement encore à ce triomphe
des vaillants efforts du parti catholi
que dans le diocèse de Tarbes.
Auguste Roussel.
Le Journal des Débats publie la dé
pêche suivante :
Rome, Si août.
Les ambassadeurs accrédités près le
Saint-Siège ont reçu, par ordre dû Pape,
une copie des inventaires détaillés que les
diverses administrations du Vatican ont
dressés de tous les objets, et biens relevant
de ces mêmes administrations. On ajoute
que la secrétairerie d'Etat se réserve de
saisir le corps diplomatique .d'une note de
mandant la protection internationale du
palais du Vatican, en cas de départ du
Pape.
En réponse à une calomnie de la
Petite Gazette de Bagnères dirigée
contre Mgr l'évêque de Tarbes, au su
jet de l'élection de M. Semmartin* ce
journal a reçu la lettre suivante :
Tarbes, le 11 août 1889,
Monsieur le gérant,
Vous avez imprimé dans la Petite Gazette
da 4 août :
La grotte de Lourdes, sur l'incitation de l'évê
que de Tarbés, a expédié au candidat de son
cœur la modeste obole de seize mille cinq cents
francs.
Une si étrange assertion n'aura sans
doute réussi à tromper personne. Je viens
cependant, au nom de Mgr l'évêque, pro
tester contre cette calomnie odieuse, et dire
publiquement ce que tout le monde sait,
que les aumônes faites au sanctuaire de
Lourdes sont toujours employées confor
mément aux désirs des donateurs, et qu'on
n'a pas l'indélicatesse d'en détourner une
obole pour les élections de Bagnères ou
d'ailleurs.
Cette protestation, qui pourra paraître
insuffisante à quelques-uns, je vous prie,
et, au besoin, vous requiers de,'l'insérer
dans votre plus prochain numéro.
Agréez, monsieur le gérant, l'assurance
de ma considération distinguée.
A. T héas , vicaire général. ,
Il est certain que Mgr l'évêque de
Tarbes use de miséricorde en se con
tentant d'une rectification dans les
colonnes du journal calomniateur,
quand il aurait pu exiger une répara
tion devant les tribunaux, La leçon
n'en est pas moins donnée et elle est
bonne ; nous voulons espérer qu'elle
profitera, bien que la rage satanique
d'une certaine presse contre la religion,
et toutes les dévotions qq'plîg inspire
semble défier toute conversion.
De toutes façons nous avons, dans
Le Manifeste et la Presse
Nous terminons aujourd'hui la re
vue des appréciations données par les
divers, journaux du manifeste de
Monsieur le comte de Paris.
On lit dans la Justice :
Ce manifeste, d'ailleurs médiocre, peut
se résumer en deux mots : « Alliez-vous
aux boulangistes, et rétablissez la monar
chie à mon profit. » Le petit fils de Louis-
Philippe indique même, dans une phrase
délicate, sa confiance dans les dispositions
des bonapartistes' & lâcher leur empire et
leurs deux empereurs. ■
Rien de terne et de vide comme ces li
gnes, où. l'on chercherait vainement l'in
dicatien d'une politique précise, à part la
phrase obligée pour, le cléricalisme. Il y a
présentement un peu plus de quarante et
un ans que les Bourbons des deux branches
adressent de l'étranger, à la France, des
manifestes où ils disent, sous des formes
plus ou moins mystiques: «Prenez mon
ours ». Il y a un peu plus de quarante et
un ans qu'on ne prend pas leurs ours, et
que le seul résultat de chacun de ces petits
papiers est de grossir la collection. Celui-ci
ne l'enrichira guère ; et ce serait perdre son
temps que de le discuter.
Extrait du Voltaire :
Deux choses sont à noter dans le mani
feste de Monsieur le comte de Paris.
L'alliance définitive, bien qu'hypocrite,
du chef de la maison de France avec M.
Boulanger.
L'explosion des pensées cléricales de
Monsieur le comte de Paris, et l'appel très
net qu'il fait aux passions religieuses. Pour
un seul homme politique, c'est trop.
Voici ce que dit le Radical :
La royauté et l'Institut, ces deux forces,
Monsieur le comte de Paris et M. Edouard
Hervé, ces deux candidats, ont adressé le
même manifeste aux électeurs. M. Hervé,
il est vrai, ne parlait-qu'au huitième arron
dissement de la capitale, et Monsieur le
comte de Paris parle à la France entière.
Mais il" n'en parle pas mieux pour cela.
Le manifeste tient en deux lignes pour
qui sait lire.
Aux électeurs : « Quand vous n'aurez pas
un candidat royaliste, votez pour le candi
dat boulangiste ! »
Aux curés : « Le roi de Franoe et le gé
néral Boulanger vous rendront l'enseigne
ment de l'enfance que la république vous
avait enlevé 1 *
C'est bien là tout, en effet, pour le mo
ment : Battre les républicains d'abord ; en*
suite préparer la jaune génération & la mo
narchie,
M. Edmond Magnier écrit dans l'E
vénement: -
La franchise du manifeste, libre jusqu'à
l'audace, n'est pas faite psurnous déplaire.
Nous qui combattons drapeau déployé et
toutes armes dehors, nous aimons à voir
« le roi » se camper fièrement en face de la
République et engager l'épée avec elle. Le
pays du moins ne s'y trompera pas. Il sait
aujourd'hui — s'il a quelquefais paru l'i
gnorer — où il irait en s'abandonnant aux
convoitises du parti monarchique : ce ne
serait pas à la république conservée et ren
due à des idées autoritaires, ce serait &une
nouvelle guerre civile,
Le Parti Ouvrier nous donne une
idée des divagations qui ont cours
dans le groupe qu'il représente :
Quelle république est la nôtre l
Figurons-nous un brigand qui, dans un
manifeste rendu public, conseillerait aux"
Français de voler et de tuer. Lu loi ne
serait pas désarmée. Ne pouvant l'empoi*
gner lui-même, on empoignerait ses com
wmmm
..'Urnrfii
FEUILLETON DE L'UNIVERS
DU 3 SEPTEMBRE 1889
CHOSES LITTMiMS
leb irresponsables devant la justice (1)
Vous rappelez-vous dans les Soirées de
Saint-Pétersbourg cette page inoubliable sur
le bourreau, l'être d'exception créé comme
an monde, que le comte de Maistre, avec
une apparente exagération qui a soulevé
bien des clameurs, place au sommet de la
société comme la clef de voûte de l'édifice ?
Exagération apparente, dis-je : c'est qu'en
effet nous oublions trop aisément l'erigine
et le rôle du bourreau sous l'ancien régime;
nous oublions trop aisément surtout quelle
était alors la conception populaire du bour
reau, et cependant, entre le dégoût répul
sif qu'inspire aujourd'hui un tueur d'hom
mes, entre l'horreur qu'il excitait il y a
deux siècles, quelle immense et profonde
différence!
Le respect de la vie humaine a pris dans
(1) Par lô docteur Riant, 1 vol, in *12, chez J.
B. Baillière.
ces derniers temps des proportions jus
qu'alors extraordinaires et inconnues. Il
existe une école de jurisconsultes qui ré
clament savamment et légalement la sup
pression de la peine de mort. Il s'est trouvé
des nations pour inscrire cette suppression
dans leurs codes. Avec plus de persévérance
i coup sûr que de justice et de véritable
compassion, un illustre poète s'est fait à
travers le monde le porte-parole incessant
de ceux qui s'élèvent contre l'effusion da
sang de l'homme par d'autres hommes. Et
plus les peuples ennemis redoublent de
méfiance et de précautions hostiles, plus
s'attisent et grandissent les longues haines
et les immortels ressentiments, plus s'aug
mente le nombre des rêveurs doux et attris
tés, apôtres condamnés à se voir éternelle
ment méconnus, qui prêchent sans espoir
aux foules inattentives ou moqueuses les
idées de fraternité et de réconciliation.
Combien étrange aurait paru leur lan
gage à nos ancêtres du seizième siècle ! Ils
ne l'eussent vraisemblablement pas com •
pris, et se fussent dédaigneusement dé
tournés du "pauvre fol de discoureur. Car le
mépris de l'existence était alors arrivé à
une toile frénésie qu'on regardait comme
un couard celui qui ne bravait pas en quel
que sorte au jour le jour la pointe des
épées ou la balle des arquebuses.
Dans ce bouleversement de la France, la
loi du plus fort devient l'unique règle
de justice, les magistrats désertent leurs
sièges, il n'est plus question de suppli
ces légalement infligés par des juges à
un coupable. Petit à petit lo go$t des mas
sais et des pendaisons se répand, les sei
gneurs et les bourgeois profitent des dé
sordres pour assouvir leurs passions et
vider- leurs querelles particulières, l'achar
nement et la durée de la lutte en font une
guerro cruelle et sans merci, les belles
dames — les estampes du temps les accu
sent — prennent plaisir à voir pendre les
prisonniers; bref, on en arrive & dire, par
lant de ce temps-là, que tout homme d'ar
mes est un bourreau.
C'est seulement au siècle suivant, sous la
main implacable de Richelieu, sous son in
flexible pouvoir, que recommencent les
exécutions régulières. L'homme qu'aucun
obstacle ne détournait de son but, même
les obstacles vivants; le ministre qui, selon,
ses propres paroles, fauchait tout sur son
passage et couvrait la trace sanglante de
son rouge manteau de cardinal, taille pres
que à chaque pas de la besogne au bour
reau, et quelle besogne 1 Le livre des exé
cutions devient un suppléaient au Nobi
liaire de France, et le3 noms les plus illus
tres défilent sur ses feuillets : comte de la
Chapelle, duc de Bouteville, comte de Cha-
lais, marquis de Cinq-Mars, pour finir par
le dernier rejeton des premiers barons
chrétiens, le maréchal Henry do Montmo
rency.
Ces terribles coups de hache donnent à
la figure effacée et anonyme du bourreau
le relief et la personnalité qui lui man
quaient. Debout sur l'échafaud qui lui sert
de piédestal, sa stature massive apparaît à
la fpule avec des proportions démesurées
qu'aggrandit encore l'épouvante. Les pre
miers traits de sa légende commencent à se
former; mais si on le tien} & l'écart, si le
peuple fuît sa demeure avec une horreur
superstitieuse, nul ne songe à le mépriser.
Il inspire des sentiments indéfinissables, un
mélange d'effroi, de pitié, de dégoût; mais
à son métier sinistre l'opinion ne donne au
cun caractère avilissant.
Des anciennes habitudes en effet il reste
au moins le souvenir, et l'on n'a pas encore
eu le temps d'oublier l'époque où le plus
noble gentilhomme et le plus courtois
tranchait la tète d'un adversaire abattu.
Et puis, aux yeux de ces hommes in
domptables; endurcis et trempés par une
longue suite de hasards et de dangers, le
bourreau est : marqué au front d'un signe
presque surhumain, indélébile et sacré, de
vant lequel tous courbent la tête ; il est
l'exécuteur des châtiments et des ven
geances de Dieu. Lui aussi il est de droit
divin.
Le bourreau n'ignore pas cette croyance,
et d'après elle il mesure la grandeur de sa
mission. Il oublie les côtés atroces, il ne
voit plus les aspects hideux et repoussants;
comme un soldat qui défend son pays, il
extermine dans la paix de sa conscience,
avec la certitude de n'être point maudit.
Pendant les dix-septième et dix-huitième
siècles, la science des supplices se déve
loppe et se raffine; à lire le détail de cer
taines exécutions, on dirait que la cerveau
subtil d'un légiste féroce a savamment ap
précié le degré de tortures que peut soufv
frir un homme avant d'expirer. En même
temps le nombre des bourreaux augmente ;
leur institution devient un rouage presque
indispensable à l'existence d'une cité po
puleuse. Des ordonnance? royales leur at
tribuent des droits péouniaires sur les
foires et marchés; d'autres ordonnances,
rendues par les Parlements, règlent dans
chaque province le tarif des exécutions.
J'ai sous les yeux les mandats accordés à
un certain Jouenne.qui exerça les fonctions
d'exécuteur, de 1760 à 1780, dans les res
sorts de Tours et de Rouen : ces mandats
nous apprennent que pour fustiger un
condamné il en coûtait cinq livres; pour la
marquer, deux livres? pour la pendre, dix
livres; pour lui trancher la tête, vingt li
vres; pour le brûler, quinze livres; pour le
rompre sur l'échafaud, quinze livres. Il se
rait facile d'étendre encore ot de prolonger
très loin cette nomenclature. Sans parler
des documents originaux, les recueils de
procédure criminelle publiés au siècle der
nier contiennent toujours de minutieux dé
tails sur les façons multiples de supplicier
les condamnés.
Cette infinie variété de supplicss est de
venue l'un dos principaux griefs contre
l'ancien régime. L'inquisition, les oubliet ■
tes des châteaux, et les affreux tourments
de l'ancianse justice, constituent pour le
bourgeois parisien les trois articles d'un
Credo auquel il ne serait pas facile de le
faire renoncer, jusqu'à présent, il n'avait
eu pour se fortifier dans sa croyance que
les promenades à travers les baraques de
la foire de Neuilly| mais voici qu'à la grande
Exposition de 1889 on a pris soin de ré
server une galerie aux vieux instruments
de torture. Qae les ipères sensibles y con
duisent donc leurs fiîs : elles y trouveront
l'auteur des Billets du matin au'on peut
lire dans le 7emp, depuis quelques mois :
plices-, attendu qu'il n'est pas permis da
de faire l'éloge du vol et de l'assassinat.
Or, que prêche le susnommé Philippe,
sinon le vol et l'assassinat du suffrage uni-» ..
versel? *
M. Auguste Vacquerie, qui se com
plaît aux drôleries, oppose, dans la
Rappel , M. Saint-Genest à Monsieur le
comte de Paris. D'un arlicle dudit
Saint-Genest antérieur au manifeste,
mais qu'il lui applique, M. VacquerU
déduit la conclusion que voici :
Cest un royaliste qui répond au rôi.C'est
un royaliste qui dit à ce roi sujet de Beu-
langer que le boulangisme est la terreur,
des pères de famille et des hommes d'af
faires. C'est un royaliste qui dit à'un roi
que le régime qui nous sauvera de la guerra
civile et de la guerre étrangère, c'est la
république.
Mettons que le royaliste Saint-Ge
nest vaut le républicain Vacquerie —«
ce qui n'est pas lui faire honneur —
et n'en parlons plus.
M. Henry des Houx, devenu le leader
de la Jeune République, journal da
dame Séverine, nous livre son appré-.
ciation en ces termes :
Monsieur le comte de Paris s'est appli
qué pour écrire son manifeste. L'effort est
visible. Il a'cherché à réunir la brièveté im
périale des Césars, avec la majesté royale
de Monsieur le comte-de Chambord. Maia
l'apparence composite de la forme met en
relief plutôt qu'elle n'atténue l'incohérence
du fomd. Jamais ce prince, qui n'a sans
douta abrégé la signature du roi, son grand-
père, que pour économiser un Louis, n'a
mieux mérité le surnom de Philippe de Ma
cédoine, qui lui fut octroyé par son oncle,
Monsieur le duc d'Aumale,
Il recommande en première ligne les
candidats orléanistes : c'est la concession
qu'il veut bien faire au principe monarchi
que; mais en seconde ligne, il désigne aa
vote de ses amis, pêle-mêle, les impéria
listes, les _ boulangistes, les blanquistes,
tout ce qui constitue la clientèle actuelle
du générai Boulanger.
Il y en _a deux colonnes de çà 'ton.
Son voisin, le Clairon , dil de son
côté :
Du factum de Philippe VII, il n'y a guère
qu'un point à retenir : c'est que le préten
dant donne son adhésion explicite à la poli
tique de M. de Mackau et de M. de Cassa-
gnac, ét qu'il blâme par avance les roya
listes qui auraient assez le respect d'eux-,
mêmes pour ne pas tremper leur pain dans
la grande soupière boulangiste. « Là où
vous avez des candidats, recommanda le
prétendant à ses partisans, soutènez-les
énergiquement. Ailleurs, inspirez-vous des
nécessités de la lutte et ne traitez pas en
ennemis ceux qui combattent les mêmes ad
versaires que vous. » Comme forme, c'est
assez jésuitique; mais, comme fond, o'esi
suffisamment clair.
Ecoutons maintenant la Voix } da
M. Millerand :
Le comte de Paris, d'un coip de plume*
abolit 1 histoire du siècle tsntier. Il oublie
que les diverses constitutions qui ont régi
la France ont proclamé l'égalité des cultes ;
plus de catholiques et de protestants, de
juifs et de chrétiens au regard de la loi. Il
change tout c.sïa.
« Catholiques, chrétiens, » c'est à eux
seuls qu'il s'adresse. Il n'y a plus de ci
toyens pour le comte de Paris. Cette dé
nomination est périmée. Il sera le fils da
l'Eglise catholique, le roi très chrétien. ».
Plût à Dieu qu'il en fût ainsi que la
dit la Voix\ . '
On lit dans la Paix
Le passage du manifeste où lé comte de
Paris lait appel aux catholiques ns manque
pas d unç habileté perfide. Sous prétexta
de promettre à l'Eglise la liberté, — que,
a ailleurs, la république ne lui a jamais en
levée, — il laisse entendre, à qui sait lira
entre les lignes, qu'il rendra à l'Eglise le
droit d'intervention dans les affaires de
l'Etat, qu'il lui donnera la suprématie dans
l'enseignement, en un mot, qu'il établira
en France ce fameux « gouvernement des
curés » qu'avaient jadis 'rêvé les hommes
du 16 Mai.
La Paix déclarant que la république
n'a jamais enlevé la liberté à l'Eglise»
c'est un bon jeune homme, et, toni .sa
pleurnichant dans son mouchoir, il leur ex
pliquera la supériorité de notre époque sur.
les siècles de barbarie. '
Ces siècles de barbarie, je veux bien
convenir avec vous que sur certains pointa
ils n'étaient pas irréprochables; mais ce
pendant, pour un observateur impartial,que
de bonnes choses et même d'excellentes ont
peut y découvrir ! Certes je ne prétend*
point justifier des excès de cruauté mêraa
à l'égard des misérables, indignes ou peu
s'en faut de toute pitié humaine; mai3 cette
inexorable rigueur dans la répression des
crimes, si vous voulez y faire attention,
procédait de deux très nobles et très justes
mobiles. Il faut placer au premier rang ca
mépris de 1 existence dont l'eti déjà parlé
signe infaillible d'une race 'forte et vigou
reuse. Toute société Js'iae encore, dans la
plénitude ou même £ a ns l'excès da sa puis-
sance vitale, tient peu de compte des ..indi
vidus, surtout, quand ils sont une honte ou
un danger pour 1e corps social. Qu'importe
à l'arbre plein de sève, dont la poussé^ ro
buste s'élance d'un jet vers le ciel.\ es re ; e _
tons bâtards qui 5e gênent ou W'excrois
sances noueuses qui déshono'- P nt enn frnnr?
C'est seulement au d^'Ïs°s5é!
qu elles commencent > A s'inquiéter d'un peu
de sang versé. Témoignage irrécusable da
iaiblessc \ vaiu^ûjent ou invoque le respect
de la rie humaine et mille autres prétextes
spécieux : la véritable raison c'est que l'ar-
bre s'épuise, il n'a plus la force d'étouffer
les tiges rivales ou de supporter une ampu
tation, •
lie RfjQQnd mobile de nos aïeux, et je eA
ea^iWBSESgBBgsiwtgataaiiies^MBBsasMBBStgBragaa^^
ÉSITION QÏOTIDEEIÎMB
Mardi 3 Septembre 1889
ÉDITION EESn-GUOUDIENNE
Un an. , . .
Six mois. . .
Trois mois. .
pakis
CI DÉTAÏTEliEÏÏB
. 55 »
. 23 50
. 15 »
etranges
(uxion-'posta l ï)
63 a
34 »
18 s
^CfeoboBnements partent des |« et 1S de chaque mois.
.... ( Paris -, . .... 15 calit.
UN NUMÉRO } Départements. 20 —
BIEIEAUX : Paris, 10, rua des Saints-Pères
PARIS
ïx dfcpartemekts
Un an. 30 »
Six mois. ... 16 »
Trois mois. . . 8 50
étranger
(union postais)
38 »
19 »
10 s
jggttaaaM
On s'abonne à Rome, place da Gesù. 8
wmnnininn un»'; i ii r t i
Les abonnements partent des 4" ot tS do chaque moi»
lUKIYERS ne répond pas des mauascrits qui lui sont adressés
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C">, 6, place do la Bourse
«ara**
FHANGB
PARIS, 2 SEPTEMBRE 1839
Sous le titre « Union latine », un
journal publiait hier une sorte de ma
nifeste, signé au nom d'un soi-disant
comité franco-italien parle secrétaire
général, un B. Malon, qui est peut-
être celui de la Commune. Le dit se
crétaire,porte-plume, à ce qu'il paraît,
de MM. Anatole de la Forge et Amil-
care Gipriani, présidents du comité,
nous faisait savoir qu'il importait de
célébrer par une manifestation gran
diose l'arrivée à Paris des Italiens,
qu'envoient « à la démocratie répu
blicaine et sociale française les asso
ciations démocratiques et garibaldien-
nies, fédérées à cet effet; les groupes
de la fédération ouvrière mazzinienne,
représentés au congrès de Naples et les
groupes socialistes représentés aux
congrès de Rimini et de Forli ». Il s'a-
Îfissait toujours, d'après le citoyen Ma-
on,de protester contre la triple alliance
et d'avertir le monde « que la solidarité
des deux peuples saurait s'affirmer le
jour où la coalition monarchique ten
terait de noyer dans le sang,en même
temps que l'indépendance (première
visée) des nations républicaines, les
libertés politiques, les conquêtes de
1789 et des espérances sociaies des
peuples occidentaux, avides # de paix
internationnale, de liberté politique et
de justice économique. » La manifes
tation a en lieu, mais elle a été moins
imposante que ne le souhaitaient les
incandescents organisateurs. La po
lice a fait rentrer un drapeau rouge
qu'avaient voulu déployer les délégués
de l'association démocratique d'Asti
[Piémont).
M. Spuller se trouvait hier dans
l'Isère pour l'inauguration d'un mo
nument élevé à un inconnu du nom
de Buyat. Au discours du maire de
Saint-Priest il a répondu que « la ré
publique doit être conduite par des
gens qui redoutent les aventures, et
qui surtout craignent da voir la France
retomber dans le césarisme. » De son
côté, M- Yves Guyot, allant à Dunker-
qtifi poser la première pierre d'une
éclusfl,s'est vu accueilli par les cris de
Vive Boulanger ! A bas Guyot ! avec ac
compagnement de la chanson les
Pioupious d'Auvergne. Sur quoi M. An-
drieux dit négligemment, dans la Pe
tite République : « Ces choses-là font
toujours plaisir à enregistrer. »
On mande'de Londres que les gré
vistes anglais, au nombre d'environ
cinquante mille, ont traversé hier
après-midi les principales voies de
Londres pour se rendre àHyde-Park.
Ils sont partis des docks en rangs ser
rés ; plusieurs fanfares les accompa
gnaient. De nombreux drapeaux
étaient déployés dans le cortège. Les
chefs du parti ouvrier ont prononcé
des discours, à la suite desquels il a
été décidé que la grève ne cesserait
que lorsque les ouvriers auraient reçu
une entière satisfaction. Comme on le
voit, tout cela n'annonce pas une pa
cification prochaine.
Eîa réponse à la notification de la
Bulgarie relative aux préparatifs mi
litaires de la Serbie, la Porte a télé
graphié à Sofia que la Bulgarie fait
partie intégrante de la Turquie ; qu'en
conséquence toute agression contre la
'Bulgarie sera une agression contre la
Turquie ; que la Bulgarie ne doit aonc
rien craindre, et que du reste la Ser
bie n'est pas matériellement capable
d'attaquer la Bulgarie.
Le correspondant viennois du Stan
dard prétend tenir d*un personnage
occupant une position élevés dans la.
monde diplomatique les détails sui
vants sur les causes qui auraient mo
tivé le retard dans la visite du czar en
Allemagne.
Le czar avait eu primitivement l'in
tention de venir à Berlin dans le "cou
rant du mois de mai, pour être ainsi
te premier des souverains à rendre vi
site à l'empereur Guillaume. Mais au
mois de mai l'impératrice de Russie,
qui aujourd'hui encore se ressent des
suites de l'accident de Borki, se trouva
si malade que le czar ne crut pas de
voir la quitter. D'autre part, le roi
Humbert ne voulut pas différer son
voyage,et l'empereur Alexandre^ayant
appris cette infraction à l'ordre primi
tivement fixé pour les visites, se sentit
blessé dans son orgueil.
Gomme, de plus, le cérémonial de
cour l'ennuie et que sa dernière entre
vue avec le prince de Bismarck, en
novembre 1888, ne lui avait pas laissé
de souvenirs agréables, le czar remit
sa visite sans indiquer aucune date
précise. Un moment même il fit savoir
à Berlin qu'il se proposait de rendre
sa visite à l'empereur Guillaume hors
de la capitale allemande. Cette offre
ayant été poliment repoussée par l'em
pereur d'Allemagne, les choses res
tèrent en suspens. Ce n'est que dans
les premiers jours du mois d'août que
le czar annonça qu'il consentait à ve
nir à Berlin en revenant de Danemark.
Le Standard dit, en outre, dans son
article de fond, que le ton adopté ces
jours derniers par la presse officielle
et officieuse^ allemande ne saurait évi
demment inspirer à l'empereur Alexan
dre III un très vif désir de se rendre
en Allemagne.
La Vérité
SUR
LÀ QUESTION ROMAINE
I •
La conciliation. Qui ne la veut pas.
— Tel est le titre du premier chapitre
de la brochure romaine que nous
nous proposons d'analyser. L'auteur
constate tout d'abord que la guerre
déclarée par le gouvernement au Sou
verain Pontife remonte à vingt-neuf
ans, mais qu'elle a naturellement pris
un caractère plus aigu après le 20 sep
tembre 1870, date de l'entrée des enva
hisseurs par la brèche de la Porta Pia. Il
s'en est suivi un malaise général qui
explique comment, à chaque bruit,
vrai ou cru tel, d'une réconciliation,
on l'aecueille comme la nouvelle d'un
bien désiré ; le nouveau royaume lui-
même « regarde la cessation de ce dis
sentiment comme un complément né
cessaire à son assiette définitive. »
Le Pape serait-il donc, par aven
ture, moins disposé à la réconcilia
tion? Après avoir posé cette question,
l'auteur de l'opuscule répond tout
d'abord que, pour parler plus juste
ment, il faudrait dire la paix , au lieu
de la réconciliation , celle-ci "n'étant
qu'un moyen d'avoir la paix que l'on
dsit vraiment viser. « Qu'on lève les
yeux vers les objets supérieurs aux
choses terrestres, sans perdre de vue
le véritable bien de l'Italie et de la
société, et alors on pourra en toute
certitude affirmer que le Pape désire
la paix plus que personne, et la veut
d'autant plus sincèrement et la cher
che avec d'autant plus d'ardeur, que
plus élevé est son caractère et que
sont plus nobles les motifs dont il
s'inspire, »
Développant cette pensée,I'auteur de
l'opuscule dit que, ministre d'un Dieu
auteur de la paix, vicaire de Celui qui
est venu apporter la paix au monde, le
Pape, après avoir dans ses encycliques
souvent exposé la nécessité de l'àc-
cord entre les deux puissances pour
le-bien de l'Eglise et de la société ci
vile, ne pourrait sans une contradic
tion--manifeste, faire obstacle à la*
paix. Ayant tout tenté depuis son Pon
tificat « avec une admirable longani
mité » pour renouer ou rendre plus
étroits les liens de bonne intelligence
avec les autres Etats de l'Europe, peut-
il être souçonné de se faire « un pro
moteur de dissentiments et de luttes
avec l'Italie, sa patrie, siège privilégié
du Vicaire de Jésus-Christ » ?
Donc le désir de réconciliation et
de paix ne trouve nulle opposition dans
le Pape. Qui donc dès lors doit répon
dre de la continuation de la guerre ?
Il en est qui, « au mépris de la logique
et du bon sens»,voudraient voir lePape
« reconnaître les faits accomplis, s'ac
commoder de son mieux de la miséra
ble condition qui lui est faite, et sinon
approuver, au moins supporter en si
lence » tout ce qui se fait contre lui.
Mais cela, ce serait^ comme le dit l'au
teur de la brochure,« la réconciliation
au ' prix d'une sacrilège trahison 1 » Et
comment pourrait-on appeler la paix
« une réconciliation pareille n'ayant
pas pour base la justice, et offensant
gravement la dignité dit Souverain
Pontife » ? Qu'on sache donc une fois
pour toutes que le Pape, « comme tout
légitime possesseur 1 dépouillé de son
bien, doit revendiquer ses droits; Et
parce que ces droits sont sacro-saints
et imprescriptibles, étant en vérité les
droits de l'Eglise et de son divin Fon
dateur, le Pape ne pourra jamais ces
ser de les défendre en réclamant avant
tout l'indépendance politique néces
saire à l'exercice de son suprême apos
tolat ».
Après cette déclaration, la conclu
sion s'impose. C'est que la responsabi
lité de l'état présent incombe tout en
tière à ceux qui l'ont créé par leurs in
justices et ne font aucune proposition
pour le faire. cesser. « La paix né peut
se faire quand les deux contendants
n'en ont pas la volonté; or le gouver
nement italien a commencé lui-même
par l'avoir contraire. Non seulement
il n'a pas fait une proposition, fût-ce
d'un accord provisoire, s'il ne croyait
pas possible l'accord plein et définitif,
mais il traite en ennemis et en coupa
bles ceux qui demandent la concilia
tion. Il ne veut pas la paix, et il n'en
fait pas mystère. »
Les preuves abondent; l'auteur de
la brochure les énumère en rappelant
brièvement les principaux actes de
persécution du gouvernement italien
en ces derniers temps, et il n'est
pas malaisé dès lors de constater que
c'est bien le gouvernement italien qui
délibérément fait obstacle à la paix,
parce que, en poursuivant la ruine du
pouvoir temporel du Souverain Pon
tife, l'on a voulu en réalité atteindre
son pouvoir spirituel.
Auguste Roussel.
la prompte récompense de ses travaux
apostoliques.
Le H. P. Sempé
La R. P. Noguès nous télégraphie de
Lourdes, en ces termes, une bien dou
loureuse nouvelle :
Lourdes, 2 septembre, 8 h. 53 matin.
Un homme que le monde catholique ai
mait et vénérait et dont le nom restera à
jamais attaché à celui de Lourdes, le T.
R. P. Sempé, vient da mourir après quel
ques heures de cruelles souffrances.
Sa mort est un deuil pour l'évêque et
l'Eglise de Tarbes et pour les pèlerins du
monde entier, qui tous ont connu sa bonté
et apprécié ses œuvres.Les obsèques auront
lieu mercredi matin.
M oqués.
Nous n'ajouterons rien & ce télé
gramme, qui dit tout en son éloquente
brièveté.
Le R. P. Sempé a été le zélateur pas
sionné de Notre-Dame de Lourdes.
Notre-Dame de Lourdes lui obtiendra
Nous recevons du comité des Douze,
avec prière de l'insérer, la communi
cation suivante :
Certains journaux attribuent au comité
des Douze un rôle qu'il n'a jamais eu. Ce
comité, délégation des droites, n'a jamais
été un csmité électoral. Il acoepte de rem*
plir la mission d'arbitre entre les candidats
qui le lui demandent en Rengageant à ac
cepter son verdict ; il ne pouvait refuser
cette mission sans manquer à son but, qui a
toujours été de maintenir l'union entré tous
les conservateurs.
Il se met aussi à la disposition de tous
ceux de ses amis qui s'adressent au secré
tariat général des droites pour obtenir,,
dans l'intérêt de leur élection, tels ou tels
renseignements.. .
Mais, il ne fait pas de désignation de
candidats, laissant cette initiative aux co
mités locaux ou aux divers comités autori
sés à cet effet. .
Ce n'est que par suite de renseignements
inexacts qu'on peut prêter au comité des
Douze un autre rôle que celui qui vient
d'être déterminé.
Paris, le 1 er septembre 1889.
Nous lisons dans l'Aquitaine :
M. Bidoul, sous-inspecteur de l'enregis-
trement,. vient d'être, par décision ministé
rielle, nommé commissaire pour l'adminis
tration de la mense archiépiscopale de Bor
deaux, jusqu'à la nomination du successeur
de Mgr Guilbert.
le fait dénoncé par M. le vicaire gé
néral Théas, la preuve du profond dé
pit causé à la franc-maçonnerie des
Hautes-Pyrénées par le succès élec
toral de M. Semmartin, qui a si fran
chement arboré dans le combat la
bannière catholique. Ce nous est une
raison de plus d'applaudir de nouveau
et plus vivement encore à ce triomphe
des vaillants efforts du parti catholi
que dans le diocèse de Tarbes.
Auguste Roussel.
Le Journal des Débats publie la dé
pêche suivante :
Rome, Si août.
Les ambassadeurs accrédités près le
Saint-Siège ont reçu, par ordre dû Pape,
une copie des inventaires détaillés que les
diverses administrations du Vatican ont
dressés de tous les objets, et biens relevant
de ces mêmes administrations. On ajoute
que la secrétairerie d'Etat se réserve de
saisir le corps diplomatique .d'une note de
mandant la protection internationale du
palais du Vatican, en cas de départ du
Pape.
En réponse à une calomnie de la
Petite Gazette de Bagnères dirigée
contre Mgr l'évêque de Tarbes, au su
jet de l'élection de M. Semmartin* ce
journal a reçu la lettre suivante :
Tarbes, le 11 août 1889,
Monsieur le gérant,
Vous avez imprimé dans la Petite Gazette
da 4 août :
La grotte de Lourdes, sur l'incitation de l'évê
que de Tarbés, a expédié au candidat de son
cœur la modeste obole de seize mille cinq cents
francs.
Une si étrange assertion n'aura sans
doute réussi à tromper personne. Je viens
cependant, au nom de Mgr l'évêque, pro
tester contre cette calomnie odieuse, et dire
publiquement ce que tout le monde sait,
que les aumônes faites au sanctuaire de
Lourdes sont toujours employées confor
mément aux désirs des donateurs, et qu'on
n'a pas l'indélicatesse d'en détourner une
obole pour les élections de Bagnères ou
d'ailleurs.
Cette protestation, qui pourra paraître
insuffisante à quelques-uns, je vous prie,
et, au besoin, vous requiers de,'l'insérer
dans votre plus prochain numéro.
Agréez, monsieur le gérant, l'assurance
de ma considération distinguée.
A. T héas , vicaire général. ,
Il est certain que Mgr l'évêque de
Tarbes use de miséricorde en se con
tentant d'une rectification dans les
colonnes du journal calomniateur,
quand il aurait pu exiger une répara
tion devant les tribunaux, La leçon
n'en est pas moins donnée et elle est
bonne ; nous voulons espérer qu'elle
profitera, bien que la rage satanique
d'une certaine presse contre la religion,
et toutes les dévotions qq'plîg inspire
semble défier toute conversion.
De toutes façons nous avons, dans
Le Manifeste et la Presse
Nous terminons aujourd'hui la re
vue des appréciations données par les
divers, journaux du manifeste de
Monsieur le comte de Paris.
On lit dans la Justice :
Ce manifeste, d'ailleurs médiocre, peut
se résumer en deux mots : « Alliez-vous
aux boulangistes, et rétablissez la monar
chie à mon profit. » Le petit fils de Louis-
Philippe indique même, dans une phrase
délicate, sa confiance dans les dispositions
des bonapartistes' & lâcher leur empire et
leurs deux empereurs. ■
Rien de terne et de vide comme ces li
gnes, où. l'on chercherait vainement l'in
dicatien d'une politique précise, à part la
phrase obligée pour, le cléricalisme. Il y a
présentement un peu plus de quarante et
un ans que les Bourbons des deux branches
adressent de l'étranger, à la France, des
manifestes où ils disent, sous des formes
plus ou moins mystiques: «Prenez mon
ours ». Il y a un peu plus de quarante et
un ans qu'on ne prend pas leurs ours, et
que le seul résultat de chacun de ces petits
papiers est de grossir la collection. Celui-ci
ne l'enrichira guère ; et ce serait perdre son
temps que de le discuter.
Extrait du Voltaire :
Deux choses sont à noter dans le mani
feste de Monsieur le comte de Paris.
L'alliance définitive, bien qu'hypocrite,
du chef de la maison de France avec M.
Boulanger.
L'explosion des pensées cléricales de
Monsieur le comte de Paris, et l'appel très
net qu'il fait aux passions religieuses. Pour
un seul homme politique, c'est trop.
Voici ce que dit le Radical :
La royauté et l'Institut, ces deux forces,
Monsieur le comte de Paris et M. Edouard
Hervé, ces deux candidats, ont adressé le
même manifeste aux électeurs. M. Hervé,
il est vrai, ne parlait-qu'au huitième arron
dissement de la capitale, et Monsieur le
comte de Paris parle à la France entière.
Mais il" n'en parle pas mieux pour cela.
Le manifeste tient en deux lignes pour
qui sait lire.
Aux électeurs : « Quand vous n'aurez pas
un candidat royaliste, votez pour le candi
dat boulangiste ! »
Aux curés : « Le roi de Franoe et le gé
néral Boulanger vous rendront l'enseigne
ment de l'enfance que la république vous
avait enlevé 1 *
C'est bien là tout, en effet, pour le mo
ment : Battre les républicains d'abord ; en*
suite préparer la jaune génération & la mo
narchie,
M. Edmond Magnier écrit dans l'E
vénement: -
La franchise du manifeste, libre jusqu'à
l'audace, n'est pas faite psurnous déplaire.
Nous qui combattons drapeau déployé et
toutes armes dehors, nous aimons à voir
« le roi » se camper fièrement en face de la
République et engager l'épée avec elle. Le
pays du moins ne s'y trompera pas. Il sait
aujourd'hui — s'il a quelquefais paru l'i
gnorer — où il irait en s'abandonnant aux
convoitises du parti monarchique : ce ne
serait pas à la république conservée et ren
due à des idées autoritaires, ce serait &une
nouvelle guerre civile,
Le Parti Ouvrier nous donne une
idée des divagations qui ont cours
dans le groupe qu'il représente :
Quelle république est la nôtre l
Figurons-nous un brigand qui, dans un
manifeste rendu public, conseillerait aux"
Français de voler et de tuer. Lu loi ne
serait pas désarmée. Ne pouvant l'empoi*
gner lui-même, on empoignerait ses com
wmmm
..'Urnrfii
FEUILLETON DE L'UNIVERS
DU 3 SEPTEMBRE 1889
CHOSES LITTMiMS
leb irresponsables devant la justice (1)
Vous rappelez-vous dans les Soirées de
Saint-Pétersbourg cette page inoubliable sur
le bourreau, l'être d'exception créé comme
an monde, que le comte de Maistre, avec
une apparente exagération qui a soulevé
bien des clameurs, place au sommet de la
société comme la clef de voûte de l'édifice ?
Exagération apparente, dis-je : c'est qu'en
effet nous oublions trop aisément l'erigine
et le rôle du bourreau sous l'ancien régime;
nous oublions trop aisément surtout quelle
était alors la conception populaire du bour
reau, et cependant, entre le dégoût répul
sif qu'inspire aujourd'hui un tueur d'hom
mes, entre l'horreur qu'il excitait il y a
deux siècles, quelle immense et profonde
différence!
Le respect de la vie humaine a pris dans
(1) Par lô docteur Riant, 1 vol, in *12, chez J.
B. Baillière.
ces derniers temps des proportions jus
qu'alors extraordinaires et inconnues. Il
existe une école de jurisconsultes qui ré
clament savamment et légalement la sup
pression de la peine de mort. Il s'est trouvé
des nations pour inscrire cette suppression
dans leurs codes. Avec plus de persévérance
i coup sûr que de justice et de véritable
compassion, un illustre poète s'est fait à
travers le monde le porte-parole incessant
de ceux qui s'élèvent contre l'effusion da
sang de l'homme par d'autres hommes. Et
plus les peuples ennemis redoublent de
méfiance et de précautions hostiles, plus
s'attisent et grandissent les longues haines
et les immortels ressentiments, plus s'aug
mente le nombre des rêveurs doux et attris
tés, apôtres condamnés à se voir éternelle
ment méconnus, qui prêchent sans espoir
aux foules inattentives ou moqueuses les
idées de fraternité et de réconciliation.
Combien étrange aurait paru leur lan
gage à nos ancêtres du seizième siècle ! Ils
ne l'eussent vraisemblablement pas com •
pris, et se fussent dédaigneusement dé
tournés du "pauvre fol de discoureur. Car le
mépris de l'existence était alors arrivé à
une toile frénésie qu'on regardait comme
un couard celui qui ne bravait pas en quel
que sorte au jour le jour la pointe des
épées ou la balle des arquebuses.
Dans ce bouleversement de la France, la
loi du plus fort devient l'unique règle
de justice, les magistrats désertent leurs
sièges, il n'est plus question de suppli
ces légalement infligés par des juges à
un coupable. Petit à petit lo go$t des mas
sais et des pendaisons se répand, les sei
gneurs et les bourgeois profitent des dé
sordres pour assouvir leurs passions et
vider- leurs querelles particulières, l'achar
nement et la durée de la lutte en font une
guerro cruelle et sans merci, les belles
dames — les estampes du temps les accu
sent — prennent plaisir à voir pendre les
prisonniers; bref, on en arrive & dire, par
lant de ce temps-là, que tout homme d'ar
mes est un bourreau.
C'est seulement au siècle suivant, sous la
main implacable de Richelieu, sous son in
flexible pouvoir, que recommencent les
exécutions régulières. L'homme qu'aucun
obstacle ne détournait de son but, même
les obstacles vivants; le ministre qui, selon,
ses propres paroles, fauchait tout sur son
passage et couvrait la trace sanglante de
son rouge manteau de cardinal, taille pres
que à chaque pas de la besogne au bour
reau, et quelle besogne 1 Le livre des exé
cutions devient un suppléaient au Nobi
liaire de France, et le3 noms les plus illus
tres défilent sur ses feuillets : comte de la
Chapelle, duc de Bouteville, comte de Cha-
lais, marquis de Cinq-Mars, pour finir par
le dernier rejeton des premiers barons
chrétiens, le maréchal Henry do Montmo
rency.
Ces terribles coups de hache donnent à
la figure effacée et anonyme du bourreau
le relief et la personnalité qui lui man
quaient. Debout sur l'échafaud qui lui sert
de piédestal, sa stature massive apparaît à
la fpule avec des proportions démesurées
qu'aggrandit encore l'épouvante. Les pre
miers traits de sa légende commencent à se
former; mais si on le tien} & l'écart, si le
peuple fuît sa demeure avec une horreur
superstitieuse, nul ne songe à le mépriser.
Il inspire des sentiments indéfinissables, un
mélange d'effroi, de pitié, de dégoût; mais
à son métier sinistre l'opinion ne donne au
cun caractère avilissant.
Des anciennes habitudes en effet il reste
au moins le souvenir, et l'on n'a pas encore
eu le temps d'oublier l'époque où le plus
noble gentilhomme et le plus courtois
tranchait la tète d'un adversaire abattu.
Et puis, aux yeux de ces hommes in
domptables; endurcis et trempés par une
longue suite de hasards et de dangers, le
bourreau est : marqué au front d'un signe
presque surhumain, indélébile et sacré, de
vant lequel tous courbent la tête ; il est
l'exécuteur des châtiments et des ven
geances de Dieu. Lui aussi il est de droit
divin.
Le bourreau n'ignore pas cette croyance,
et d'après elle il mesure la grandeur de sa
mission. Il oublie les côtés atroces, il ne
voit plus les aspects hideux et repoussants;
comme un soldat qui défend son pays, il
extermine dans la paix de sa conscience,
avec la certitude de n'être point maudit.
Pendant les dix-septième et dix-huitième
siècles, la science des supplices se déve
loppe et se raffine; à lire le détail de cer
taines exécutions, on dirait que la cerveau
subtil d'un légiste féroce a savamment ap
précié le degré de tortures que peut soufv
frir un homme avant d'expirer. En même
temps le nombre des bourreaux augmente ;
leur institution devient un rouage presque
indispensable à l'existence d'une cité po
puleuse. Des ordonnance? royales leur at
tribuent des droits péouniaires sur les
foires et marchés; d'autres ordonnances,
rendues par les Parlements, règlent dans
chaque province le tarif des exécutions.
J'ai sous les yeux les mandats accordés à
un certain Jouenne.qui exerça les fonctions
d'exécuteur, de 1760 à 1780, dans les res
sorts de Tours et de Rouen : ces mandats
nous apprennent que pour fustiger un
condamné il en coûtait cinq livres; pour la
marquer, deux livres? pour la pendre, dix
livres; pour lui trancher la tête, vingt li
vres; pour le brûler, quinze livres; pour le
rompre sur l'échafaud, quinze livres. Il se
rait facile d'étendre encore ot de prolonger
très loin cette nomenclature. Sans parler
des documents originaux, les recueils de
procédure criminelle publiés au siècle der
nier contiennent toujours de minutieux dé
tails sur les façons multiples de supplicier
les condamnés.
Cette infinie variété de supplicss est de
venue l'un dos principaux griefs contre
l'ancien régime. L'inquisition, les oubliet ■
tes des châteaux, et les affreux tourments
de l'ancianse justice, constituent pour le
bourgeois parisien les trois articles d'un
Credo auquel il ne serait pas facile de le
faire renoncer, jusqu'à présent, il n'avait
eu pour se fortifier dans sa croyance que
les promenades à travers les baraques de
la foire de Neuilly| mais voici qu'à la grande
Exposition de 1889 on a pris soin de ré
server une galerie aux vieux instruments
de torture. Qae les ipères sensibles y con
duisent donc leurs fiîs : elles y trouveront
l'auteur des Billets du matin au'on peut
lire dans le 7emp, depuis quelques mois :
plices-, attendu qu'il n'est pas permis da
de faire l'éloge du vol et de l'assassinat.
Or, que prêche le susnommé Philippe,
sinon le vol et l'assassinat du suffrage uni-» ..
versel? *
M. Auguste Vacquerie, qui se com
plaît aux drôleries, oppose, dans la
Rappel , M. Saint-Genest à Monsieur le
comte de Paris. D'un arlicle dudit
Saint-Genest antérieur au manifeste,
mais qu'il lui applique, M. VacquerU
déduit la conclusion que voici :
Cest un royaliste qui répond au rôi.C'est
un royaliste qui dit à ce roi sujet de Beu-
langer que le boulangisme est la terreur,
des pères de famille et des hommes d'af
faires. C'est un royaliste qui dit à'un roi
que le régime qui nous sauvera de la guerra
civile et de la guerre étrangère, c'est la
république.
Mettons que le royaliste Saint-Ge
nest vaut le républicain Vacquerie —«
ce qui n'est pas lui faire honneur —
et n'en parlons plus.
M. Henry des Houx, devenu le leader
de la Jeune République, journal da
dame Séverine, nous livre son appré-.
ciation en ces termes :
Monsieur le comte de Paris s'est appli
qué pour écrire son manifeste. L'effort est
visible. Il a'cherché à réunir la brièveté im
périale des Césars, avec la majesté royale
de Monsieur le comte-de Chambord. Maia
l'apparence composite de la forme met en
relief plutôt qu'elle n'atténue l'incohérence
du fomd. Jamais ce prince, qui n'a sans
douta abrégé la signature du roi, son grand-
père, que pour économiser un Louis, n'a
mieux mérité le surnom de Philippe de Ma
cédoine, qui lui fut octroyé par son oncle,
Monsieur le duc d'Aumale,
Il recommande en première ligne les
candidats orléanistes : c'est la concession
qu'il veut bien faire au principe monarchi
que; mais en seconde ligne, il désigne aa
vote de ses amis, pêle-mêle, les impéria
listes, les _ boulangistes, les blanquistes,
tout ce qui constitue la clientèle actuelle
du générai Boulanger.
Il y en _a deux colonnes de çà 'ton.
Son voisin, le Clairon , dil de son
côté :
Du factum de Philippe VII, il n'y a guère
qu'un point à retenir : c'est que le préten
dant donne son adhésion explicite à la poli
tique de M. de Mackau et de M. de Cassa-
gnac, ét qu'il blâme par avance les roya
listes qui auraient assez le respect d'eux-,
mêmes pour ne pas tremper leur pain dans
la grande soupière boulangiste. « Là où
vous avez des candidats, recommanda le
prétendant à ses partisans, soutènez-les
énergiquement. Ailleurs, inspirez-vous des
nécessités de la lutte et ne traitez pas en
ennemis ceux qui combattent les mêmes ad
versaires que vous. » Comme forme, c'est
assez jésuitique; mais, comme fond, o'esi
suffisamment clair.
Ecoutons maintenant la Voix } da
M. Millerand :
Le comte de Paris, d'un coip de plume*
abolit 1 histoire du siècle tsntier. Il oublie
que les diverses constitutions qui ont régi
la France ont proclamé l'égalité des cultes ;
plus de catholiques et de protestants, de
juifs et de chrétiens au regard de la loi. Il
change tout c.sïa.
« Catholiques, chrétiens, » c'est à eux
seuls qu'il s'adresse. Il n'y a plus de ci
toyens pour le comte de Paris. Cette dé
nomination est périmée. Il sera le fils da
l'Eglise catholique, le roi très chrétien. ».
Plût à Dieu qu'il en fût ainsi que la
dit la Voix\ . '
On lit dans la Paix
Le passage du manifeste où lé comte de
Paris lait appel aux catholiques ns manque
pas d unç habileté perfide. Sous prétexta
de promettre à l'Eglise la liberté, — que,
a ailleurs, la république ne lui a jamais en
levée, — il laisse entendre, à qui sait lira
entre les lignes, qu'il rendra à l'Eglise le
droit d'intervention dans les affaires de
l'Etat, qu'il lui donnera la suprématie dans
l'enseignement, en un mot, qu'il établira
en France ce fameux « gouvernement des
curés » qu'avaient jadis 'rêvé les hommes
du 16 Mai.
La Paix déclarant que la république
n'a jamais enlevé la liberté à l'Eglise»
c'est un bon jeune homme, et, toni .sa
pleurnichant dans son mouchoir, il leur ex
pliquera la supériorité de notre époque sur.
les siècles de barbarie. '
Ces siècles de barbarie, je veux bien
convenir avec vous que sur certains pointa
ils n'étaient pas irréprochables; mais ce
pendant, pour un observateur impartial,que
de bonnes choses et même d'excellentes ont
peut y découvrir ! Certes je ne prétend*
point justifier des excès de cruauté mêraa
à l'égard des misérables, indignes ou peu
s'en faut de toute pitié humaine; mai3 cette
inexorable rigueur dans la répression des
crimes, si vous voulez y faire attention,
procédait de deux très nobles et très justes
mobiles. Il faut placer au premier rang ca
mépris de 1 existence dont l'eti déjà parlé
signe infaillible d'une race 'forte et vigou
reuse. Toute société Js'iae encore, dans la
plénitude ou même £ a ns l'excès da sa puis-
sance vitale, tient peu de compte des ..indi
vidus, surtout, quand ils sont une honte ou
un danger pour 1e corps social. Qu'importe
à l'arbre plein de sève, dont la poussé^ ro
buste s'élance d'un jet vers le ciel.\ es re ; e _
tons bâtards qui 5e gênent ou W'excrois
sances noueuses qui déshono'- P nt enn frnnr?
C'est seulement au d^'Ïs°s5é!
qu elles commencent > A s'inquiéter d'un peu
de sang versé. Témoignage irrécusable da
iaiblessc \ vaiu^ûjent ou invoque le respect
de la rie humaine et mille autres prétextes
spécieux : la véritable raison c'est que l'ar-
bre s'épuise, il n'a plus la force d'étouffer
les tiges rivales ou de supporter une ampu
tation, •
lie RfjQQnd mobile de nos aïeux, et je eA
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