Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1889-08-07
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 07 août 1889 07 août 1889
Description : 1889/08/07 (Numéro 7889). 1889/08/07 (Numéro 7889).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Mercredi 7 Août 1S80
N* 7839 — Édition qaotidfenne
Mercredi 7 Août i®>89
gaiTION QUOTI DIENNE
PARIS ÉTRANGER
ET DÉPARTEMENTS (DNION POSTAIS)
f!n an. « V . . 55 » 66 »
Six mois. ... 23 50 34 »
Trois mois. . . 15 » 18 »
^abtimeiiienftf partent des i« et 1S de cliaqae moli
f Paris 15 cent.
UN NUMÉRO [ Départements. 20 —
BUREAUX : Paris, 10, rue des Saints-Pères
On s'abonne h Rome, place du Gesù, 8
ÉDITION 6EHI-QTT0TIDIENNB
PARIS ÉTRANGER
ÏT DÉPAKTIQISSïS (BNIOKT POSTAL*}
Un an. .... 30 » 36 »
Six mois. ... 16 s 19 s
Trois mois. . . 8 50 10 »
I.cs abonnements partent des S" et 16 da chaque mot^
L'UKIYERS ne répond pas des manuscrits qni lui sont adressés
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C'°, 6, place do la Bourse
FRArfCB
PARIS, 6 AOUT 1889
L'événement du jour, c'est la ré
ponse du général Boulanger au réqui
sitoire de M. Quesnay de Beaurepaire.
Le morceau est Ion g,et c'est peut-être
ce qui lui nuira auprès du public,qui
aura quelque peine à le digérer en une
seule fois. Il est vrai que le général
lui-même a pris la précaution de le
diviser en une série de chapitres dont
chacun se réfère à une des accusations
ou insinuations du réquisitoire. De
toutes façons d'ailleurs, l'effet voulu
sera produit. Dans le peuple on dira
que le général a péremptoirement ré
pondu au magistrat, et celui-ci, qui a
d'ailleurs très mal échafaudé son ro
man, n'aura certainement pas le der
nier mot.
La publication de cette réponse
tranche évidemment la question de
savoir si le général Boulanger se pré
sentera ou non devant la Haute Cour.
Le général s'en tient à ses premières
déclarations : il ne reconnaît ni la
compétence ni l'impartialité des juges
qu'on prétend lui imposer, et c'est au
peuple qu'il adresse sa défense. Il n'a
pas tort, et ce n'est pas malhabile.
Un journal nous apprend qu'avant
de partir pour la Suisse, M. de Frey-
cinet a fait agréer par le chef de l'Etat
un règlement portant application de la
loi d'amnistie conditionnelle du 21
juillet.
S'il faut en croire le même journal,
l'autorité militaire, dans ce document,
se serait plutôt inspirée de l'esprit que
du texte même de la loi, en dispen
sant les déserteurs et les insqumis
d'une comparution en conseil de
guerre pour y purger leur contumace;
etl'avocatofficieux du ministre prétend
justifier la chose en disant que non
seulement il eût fallu, sans cela, occu
per la iustice militaire par 2,000 pro
cès coûteux, mais qu'il était matériel
lement impossible d'obliger tous les
bénéficiaires de l'amnistie à un voyage
en France, surtout pour ceux vivant
dans le pays d'Extrême-Orient, en
Amérique et en Australie.
Bref, il se félicite que l'amnistie de
1589 se trouve ramenée aux mêmes
conditions que celle de 1880, et que
la clause de la grâce préalable, à la
quelle certains membres du Parlement
avaient paru tenir, se trouve très heu
reusement tournée dans le décret du
30 juillet.
En résumé, l'acte de repentir for
mulé devant un agent consulaire de
France suffira. C'est cette proposition
que M. de Freycinet a fait ratifier par
le président de la République. Bien
des gens se demandent-si ce n'est pas
là une violation à peine déguisée de la
ïoi, dont il est incontestable que la
Chambre n'a pas voulu faire bénéfi
cier les déserteurs. Il semblera, dans
î'sspèce, que M. de Freycinet donne
une sorte de prime à l'indiscipline.
De Suisse on annonce que le comte
da Waldersee, chef d'état-major gé
néra! de l'armée allemande, se livre
dans' cé cays à une série d'excursions
qui n'ont peut-être pas uniquement la
distraction prfïir mobile. On ne sait pas
ce qui peut arriver, et le conflit mo
mentanément apaisé entre la républi
que helvétique et l'empire allemand
peut renaître quelque jour. En homme
a visé, M. le comte Waldersee recon
naît en touriste le terrain sur lequel il
sera peut-être appelé à opérer comme
militaire. Il n'est pas, en politique, de
petite précaution.
Il se confirme que le gouvernement
des Etats-Unis a décidé de réunir le 14
octobre prochain, à Washington, un
congrès auquel seront convoqués tous
les Etats de l'Amérique espagnole et
portugaise, au nombre de dix-sept,
dans le but de s'entendre sur certains
intérêts communs. Le Journal de Ge
nève remarque avec raison que sous
cette forme vague se cache un pro
gramme très vaste et très précis : en
effet, il ne s'agit de rien moins que
d'étendre jusqu'au cap Horn ou jus
qu'au détroit de Magellan, la fameuse
doctrine de Monroë. Concerter d'a
vance les mesures défensives à pren
dre contre l'invasion des Etats euro
péens ; établir une certaine uniformité
dans les tarifs douaniers ; adopter cer
taines règles pour la protection des pro
duits afférants aux divers Etats; créer
enfin une monnaie commune d'argent
ayant force libératoire dans tous les
pays contractants ; tous les conflits
entre Américains réglés par voie d'ar
bitrage : voilà le programme de Was
hington. Il tient en peu de mots, mais
que de changements, s'il se réalise, il
est appelé à opérer! Le nouveau monde
deviendrait alors un Etat énorme,
régi par des lois semblables ou iden
tiques, à la fois confédération politi
que, union monétaire et Zollverein
douanier.
Reste à savoir si ce rêve n'est pas
une chimère. Ainsi, comment arriver
à concilier des intérêts dissemblables
et souvent divergents et sur quel plan
combiner un système de lois qui puisse
convenir à l'Equateur et au Massa-
chussetts, au Brésil impérial et catho
lique et à la Nouvelle-Angleterre ?
On remarquera que le Canada est le
seul des Etats du nouveau monde qui
ne soit pas convoqué à Washington ;
ce n'est pas qu'on l'ait oublié. On y
pense au contraire,et beaucoup ; mais
l'on a cru devoir respecter pour cette
fois la fiction qui en fait une dépen
dance de la Grande-Bretagne ; toutefois,
on ne renonce pas à l'e3poir de le faire
entrer, par la force persuasive de l'in
térêt ou par celle de la crainte, dans
cette ligue qui rappellerait dans des
proportions plus vastes l'ancien blocus
continental de Napoléon.
A la Chambre des communes an
glaises, sir Fergusson, répondant à
M. Sydney-Buxton, a déclaré que le
gouvernement belge est entré en com
munication avec les puissances inté
ressées à la question de la traite des
esclaves. Suivant les dernières infor
mations reçues de Bruxelles, la con
férence relative à ce sujet ne pourra
se réunir que vers le milieu ou la fin
d'octobre.
bat l'instrument d'un vil marché de
traficants.
Vu d'ensemble, le document paraît
un peu long; mais, quand on le suit
pas à pas, on va jusqu'au bout sans
languir. C'eût été, d'ailleurs, un autre
danger d'être trop court, du moment
qu'il fallait s'attaquer à chacune
des imputations amassées dans l'œu
vre mal venue du procureur général.
Désormais, de ces accusations forgées
avec les témoignages de policiers ou
d'escrocs, que reste-t-il? A notre avis,
un juge impartial devrait reconnaître
qu'il n'en reste rien.
En parlant de la sorte, nous n'en
tendons pas le moins du monde glori
fier dans le général le politicien, dont
la fortune singulière est surtout l'œu
vre de ses adversaires républicains.
Nous sommes loin d'approuver tout
son programme et son entourage nous
reste suspect ; fera-t-il la république
honnête, dont il parle toujours sans la
bien définir? Nous n'en savons rien,
et, à vrai dire, nous en doutons. Mais,
dans l'espèce, il s'agit simplement de
savoir s'il doit être convaincu de ten
tative d'attentat et surtout de concus
sion, et si, par politique, les membres
de la Haute-Cour sont excusables de
vouloir condamner le général — com
me d'avance la presse officieuse an
nonce hautement qu'ils le feront —
pour des faits dont un tribunal ordi
naire devrait juger qn'on n'a pu ad
ministrer la preuve.
S'ils condamnent dans ces condi
tions, les juges de la Haute-Cour in
firment d'avance la valeur de leur sen
tence. Et le général Boulanger ne
risque guère de se tromper en cer
tifiant que le peuple la réformera.
A uguste R oussel.
Le général avait un mot à dire au
procureur, mais ce n'est pas àM.Ques-
nay de Beaurepaire que M. Boulanger
s'adresse directement. Ecartant les ju
ges, dont il nie la compétence et l'im
partialité, c'est au peuple, par la voie
de la presse, qu'il présente sa défense.
Nous la donnons plus loin textuelle
ment.
On ne saurait nier qu'à côté du ré
quisitoire elle fera très bonne figure.
Il n'y a point de circonlocutions,
point d'arguties procédurières, point
de fausse déclamation, et à certains
endroits l'on y sent vraiment vibrer
l'indignation du soldat pris de dégoût
en face d'imputations outrageantes
qui visent à faire de son épée de com-
Parmi les explications que donne
le général Boulanger, il en est une
qui appelle des réserves. C'est celle
qu'il donne au sujet de l'Avenir na
tional et de ses relations, en vue d'une
guerre possible, avec les socialistes
d'un « certain pays. » Ce sont là des
compromissions qu'on ne saurait ad
mettre, même avec le motif que met
en avant le général.
L'inauguration des nouveaux bâti
ments de la Sorbonne a eu lieu hier,
sous la présidence de M. Carnot, en la
présence d'un certain nombre d'étu
diants délégués par les universités
étrangères.
Des discours ont été successivement
prononcés par M. Gréard, recteur de
l'académie de Paris; par M. Hermitte,
professeur à la faculté des sciences;
par M. Chautemps, président du con
seil municipal de Paris, et par M. Fal-
lières, ministre de l'instruction publi
que. Sur l'ensemble de ces discours et
sur le caractère général de la cérémo
nie, nous recevons,d'un auditeur bien
placé pour les apprécier, le récit
d'impressions que nous publierons de
main.
La revue navale de Spithead en
l'honneur de l'empereur Guillaumé,
qui, à cause du mauvais temps et du
brouillard,n'avait pu avoir lieu samedi,
a eu lieu hier. La reine Victoria n'y a
pas assisté. Mais l'empereur Guillaume
était entouré du prince de Galles, du
prince Henry de Battenberg, du prince
Henry de Prusse, du prince Christian,
du marquis de Lomé et du duc de
Cambridge.
Les journaux anglais s'étendent
avec complaisance sur le caractère
formidable de « la flotte de réserve »
qu'on faisait inspecter à l'empereur
Guillaume, et qui comprenait 37 cui
rassés d'escadre, 20 croiseurs sans cui
rasses, quelques croiseurs rapides et
un grand nombre de garde-côtes, de
canonnières et de bateaux torpilleurs,
faisant en tout 112 bâtiments montés
par 23,000 marins.
Quelques journaux de Londres ex
priment vivement leur satisfaction du
spectacle offert au puissant empereur
d'Allemagne, qui, s'il tient compte
surtout des 70 nouveaux bâtiments en
voie de construction à la suite du
dernier vote du Parlement, emportera
de son voyage, disent-ils, la convic
tion que l'Angleterre est toujours la
reine des Océans.
L'épiscopat de la province de Venise,
après celui de la province de Palerme
en Sicile, vient de protester par une
adresse collective contre l'outrage fait
à l'Eglise et au Saint-Siège par l'érec
tion à Rome d'un monument à l'hon
neur de Giordano Bruno.
Les vénérables signataires disent
que cette énorme impiété, qui soulève
l'indignation de quiconque a le senti
ment de la religion, la délicatesse de
la vertu et de l'honneur, le sincère
amour de la patrie, « comble la mesure
des outrages commis depuis l'usurpa
tion de Rome contre le Siège Aposto
lique ».
L'école catholique en Angleterre
La grosse question pour les catholi
ques anglais est pour le moment la
question des écoles.
Diverses lettres pastorales des évê-
ques d'Angleterre viennent d'être pu
bliées sur ce sujet. Il faut citer notam
ment celle de S. Em. le cardinal Man
ning et celle de MgrVaughan,l'évêque
de Salford, qui ont obtenu un grand
retentissement parmi les catholiqués
anglais. '
Nous n'avons pas la lettre de Mgr de
Salford, mais celle du cardinal Man-
ning traite.la question à fond.
Depuis 1847, l'enseignement catho
lique a fait en Angleterre d'immenses
progrès. Il comptait alors peu d'é
coles primaires et pas une seule école
normale.En 1870,il est déjà à la tête de
12,000 écoles, contenant 150,000 en
fants.
La première crise dans l'enseigne
ment catholique anglais fut amenée
vers 1870. C'a fut, si nous ne nous
trompons, un lieutenant de M. Glads
tone, M. Mundella, qui eut le fâcheux
honneur d'attacher son nom à cette
loi. C'était l'entrée en scène de la doc
trine révolutionnaire de la neutralité.
C'était la première grande déviation
de la tradition « chrétienne » qui
avait toujours inspiré la législation de
l'enseignement en Angleterre. Et, à
ce propos, nous nous rappelons avoir
reçu jadis la visite d'un député catho
lique d'Irlande qui nous disait alor3 :
« En politique, nous pouvons être
avec les whigs ; mais pour les ques
tions d'éducation, nous sommes les
alliés des tories.» Tempora mutantur...
Aujourd'hui c'est contre les tories au
pouvoir que S. Em. le cardinal Man-
ning demande précisément le con
cours des députés catholiques d'Ir
lande au profit de l'enseignement
chrétien.
Le gouvernement anglais actuel est
en effet favorable au système des School
Boards (1), créé par la loi de M.
Mundella. Monseigneur Manning ne
s'explique pas sur les motifs de
cette attitude. Il nous semble que
(i) Administration spéciale pour le départe
ment de l'éducation.
nous pouvons les démêler. La neu
tralité prescrite pour les écoles des
School Boards n'empêche pas la lecture
quotidienne de la Bible. Pour le for
malisme protestant cela suffit. Et si
moyennant ce minimum l'école des
School Boards peut, sans alarmer le
protestantisme officiel, faire concur
rence à l'école volontaire anglicane,
elle peut aussi faire concurrence à l'é
cole volontaire catholique.
Il y a à cet égard un fait significatif.
On ne compte pas moins de 1,300 ou
1,400 écoles qui ont été abandonnées
volontairement aux School Boards, soit
par des pasteurs de l'Eglise anglicane,
soit par des ministres des sectes dissi
dentes. Mais il est, bien entendu, sans
exemple que les catholiques aient
abandonné une seule de leurs écoles
aux school boards. Et la chose est
méritoire quand on songe que les ca
tholiques qui entretiennent leurs éco
les (surs leurs seules ressources) ne
forment pas — si on écarte les excep
tions, la partie la plus riche de la
population des Iles-Britanniques.
Est-ce en raison de cet état de cho
ses que le gouvernement s'abstient de
donner une réponse satisfaisante aux
réclamations de l'épiscopat catholique?
On ne sait trop. Le gouvernement
pourtant se défend de toute mauvaise
intention à l'endroit de l'enseigne
ment catholique. L'autre jour encore
M. Balfour,répondant à M. Parnell qui
avait posé à la tribune les revendica
tions de l'épiscopat catholique d'Ir
lande, a dit qu'il se proposait de faire
bientôt « une déclaration » à cet
égard. Nous verrons bien ce que sera
cette déclaration.
Le grand danger de l'enseignement
catholique après 1870 avait été le man
que d'institutrices pour les écoles de
filles. Le danger est désormais con
juré. L'établissement de plusieurs or
dres de femmes vouées à l'enseigne
ment a donné à l'Angleterre une lé
gion d'institutrices sans pareilles.
Aujourd'hui le danger est d'un autre
côté. Il est ou il va être dans le man
que d'instituteurs. En effet, les eatho
liques, qui font les plus lourds sacrifi
ces pour leurs écoles, ne peuvent avoir
cependant la prétention de lutter con
tre les ressources illimitées dont les
School Boards et le gouvernement peu
vent disposer. Ces ressources permet
tent de construire des « palais scolai
, res », d'offrir de larges salaires aux ins
tituteurs et d'assurer leur sort pour
l'avenir. Il est évident que, dans ces
conditions, les School Boards peuvent
aisément se procurer les meilleurs
instituteurs,et par conséquent donner
à leurs écoles la supériorité dans les
concours et dans les examens. Et ce
n'est pas une question de mode ou de
vogue, mais de vie ou de mort pour
les écoles, puisqu'elles ne peuvent
prétendre à des allocations gouverne
mentales qu'en proportion de leurs
succès.
En France, malgré la persécution
officielle, les catholiques sont assurés
d'iine grande avance sur les partisans
de l'enseignement « neutre »!!! grâce
aux traditions sans rivales d'expé
rience et de dévouement que les lé
gions du bienheureux de la Salle
mettent au service de la France catho
lique. Que la persécution cesse,et nous
reprendrons l'avantage. La situation
n'est plus la même en Angleterre. Un
haut fonctionnaire du « département
de l'éducation » disait récemment au
cardinal Manning : « Si vos écoles de
garçons étaient aussi bonnes que vos
écoles de filles, vous nous battriez
complètement. »
Donc la grosse question pour les
catholiques anglais c'est d'augmenter
encore le budget de leur charité pour
leurs écoles. Ce n'est pas un mine©
honneur qu'ils aient pu, dans des con
ditions si déplorables, lutter honora
blement contre l'enseignement offi
ciel. Mais il est clair que la lutte de
vient tous les jours plus difficile à
soutenir, parce que le poids « finan
cier » en devient plus onéreux.
Ainsi les School Boards se montrent
de plus en plus exigeants pour îea
conditions matérielles des écoles.
Leurs inspecteurs réclament comme
espace et comme distribution des bâ
timents des conditions hygiéniques
qui ne coûtent rien aux School Boards,
où on dispose de l'impôt des écoles,
mais qui sont ruineuses pour les éco
les volontaires.
En outre, l'esprit de concurrence et
de prosélytisme s'en mêle. Les inspec
teurs des School Boards n'admettent pas
volontiers la nécessité d'écoles volon
taires concurrentes à côté des leurs;
Ils disent : A quoi bon une école nou
velle? Nous avons, assez de place dans;
la nôtre pour les enfants du pays.Dans
la principauté de Galles, on a, depuis
1876, refusé de mettre sur la Grant
List (liste des allocations) 18 écoles ca
tholiques, sous prétexte qu'elles n'é
taient pas nécessaires.
Malgré cette situation difficile, le
cardinal Manning est loin de déses
pérer de la victoire définitive de l'en
seignement catholique. Nous avons
récemment parlé de ses efforts pour
obtenir que le Parlement soit saisi par
les députés catholiques d'Irlande des
légitimes revendications de la hiérar
chie catholique.
Malgré l'étrange apathie, ou, si l'on
veut,la mauvaise volonté du ministère
conservateur, il compte que l'Angle
terre reviendra sur cette erreur capi
tale et renouvelée du paganisme, qui,
en matière d'enseignement, dépouilla
les parents de leurs droits sur l'édu
cation de de leurs enfants au profit
de l'Etat.
Le fait est que ce n'est pas seule-*
ment là une erreur contre la doctrine
de 1 Eglise. C'est aussi une erreur con
tre la «doctrine » du bon sens.Et dans
le gouvernement des peuples, en dépit
des crises passagères, qui sont parfois
de rudes leçons, la victoire finit toui
jours par rester au bon sens. '
L. Nemours Godré.
L'église du Rosaire à Lourdes
Nous lisons dans le Journal de Lour*
des : ■ *
L'inauguration de l'église du Rosaire re-
nouvellera à Lourdes les splendeurs et le*
joies des fêtes passées.
Voici les noies des âv hevêques et
ques qui sont attends à la Grotte :
S. Em. le cardinal Richard, archevêqaô
de Pans, délégué du Saint-Père ;
Mgr Billere. évêque de parkas ;
Mgr Gouzot. archevêque d'Àucîi ;
Mgr B erchialla, aroheveque de Caeliarî,
primat de Sardaigne ;
Mgr Thomas, archevêque d'Andrinople :
Mgr Fonteneau, arcb.svêque d'Albi ;
Mgr Dufal, évêque dô Delco ;
Mgr Grimardias, évêque de Cahors:
Mgr Bourret, évêque da Rodez ;
Mgr Oatteau, évêque de Luçon ;
Mgr Rougerie, évêque de Panners:
Mgr Fiard, évêque de Montauban ;
Mgr Gaussait, évêque de Perpignan ;
Mgr Dennel, évêque d'Arras ;
Mgr Cœuret, évêque d'Aeen ;
Mgr Petit, évêque du Puy.
Des évêques seuls prendront la parole
aux principales cér-émonies : on annonce
trois heures, un discours
de Mgr l évêqiîe de Luçon à la Grotte,
et pour le lendemain, à la môme heure, à
l esplanade du Rosaire, un discours de
Mgr 1 évêque de Rodez.
, Les grands pèlerinages concourront à re
hausser 1 éclat de ces solennités.
FEUILLETON DE L'UNIVERS
du 7 août 1889
r K vérius
évêque titulaire db limyra et premier
vicaire apostolique de la nouvelle-
bretagne.
Les catholiques attentifs aux progrès que
fait de nos jours l'évangélisation du globe
savent qu'il y a moins de dix ans, Léon
Xl.II confiait à la naissante société des
Missionnaires du Sacré-Cœur la rude tâche
de faire connaître le vrai Dieu aux innom
brables îles de l'Océanie qui se trouvent au
delà des missions de la société de Marie et
des pères de Pïcpus. L'année dernière, le
P. Navarre, le vaillant chef du premier
groupe des missionnaires de la Mélanésie,
recevait, en récompense de ses efforts et de
ses succès, du Saint-Père le titre d'évêqne
de Pentacomie, remplacé presque aussitôt
par celui d'archevêque de Cyr.
Cette année, le Souverain Pontife vient
de cîiviser en deux l'immense vicariat apos
tolique de la Mélanésie. Mgr André Na
varre garde la Nouvelle-Guinée avec Thurs-
day-Island (le dernier poste européen) et
les îles adjacentes ; la Nouvelle-Brelagne,
la Nouvelle-Irlande et les îles Salomon for
meront le vicariat apostolique de la Nou
velle-Bretagne.
.La Nouvelle-Bretagne est connue par
l'essai malheureux de colonisation entre
pris pae le marquis de Raya. M a ? 9 |s'il y a
des obstacles qui rebutent les colons, il n'y
en a point qui déconcertent les apôtres. Ce
fut en Nouvelle-Bretagne que les mission
naires du Sacré-Cœur commencèrent leurs
travaux, assez loin d'ailleurs de ce qui avait
dû être « la Nouvelle-France », Les pères
Jouet et Hartzer ont donné d'intéressants
détails sur cet archipel, qui, placé entre les
Moluques et l'Australie, forme le lien na-
moyen de communication le plus
direct entre l'Asie et l'Océanie (1).
Etablie donc d'abord en Nouvelle-Bre
tagne, la petite phalange apostolique rêvait
jour et nuit la conquête de l£ grande île
aux douze millions d'habitants, la Nouyellp-
Guinée, où fumait encore le sang du Père
Mazucconi, da séminaire des Missions
étrangères de Milan, massaoré en 1855
par les sauvages de Woodlark.
Le premier des missionnaires du Sacré-
Cœur qui suivit les traces do martyr s'ap
pelait Henri Vérius.
Né en Italie de parents piémontais, le 28
mai 1860, pendant le mois de Marie et au
jour où l'on célèbre la fête de saint Philip
pe de Néri, l'apôtre de Rome,Henri Vérius,
était entré à l'âge de douze ans à l'école
apostolique des missionnaires du Sacré-
Cœur, à la Petite œuvre du Sacré-Cœur,
comme on dit à Issoudun, à Rome, à Til*
bourg, à Anvers, à Glaslonbury, à Barce
lone, àSalzbourg.
La « Petite-OEuvre » pour la France,
qu'Henri habitait alors, se trouvait en ce
temps-là à Chezal-Benoît, près d'Issoudun,
où elle est installée aujourd'hui à l'ombre
de la basilique du Sacré-Cœur, déserte,
hélas I et silencieuse depuis les lugubres
décrets de Grévy.
(1) Les Missionnaires du Sacré-Cœur dans les
vicariats apostoliques de la Mélanésie et de la
Micronésie. — .Cinq ans p^rmi les sauvages de
Nouvelle-Preta|ne et de la ïs'ouvelle-Quinée,
Les missions, dès lors, occupaient toutes
les pensées du généreux enfant, qui ne
perdait pas une occasion d'acquérir les di
verses connaissances pratiques dont on
peut avoir besoin en pays sauvage. Son
ardeur était extrême, et ses anciens maî
tres sourient au souvenir d'Henri, exécu
tant au noviciat, de la plus belle grâce du
monde, une pénitence qui consistait à s'en
aller à pas de tortue de la chapelle au ré
fectoire.
Après ce noviciat, envoyé à la résidence
de Barcelone, Henri Vérius suivit quelque
temps les cours du «séminaire du Concile»
termina sa théologie et reçut la prêtrise à
Rome, le 1" novembre 1883.
Enfin, il allait pouvoir contenter son plus
cher désir. Il obtient de partir ponr la Mé
lanésie. Mais il tombe malade à Marseille,
dans la maison de Béthanie, si admirable
ment hospitalière aux apôtres des pays
lointains. Après avoir vu la mort de bien
près, il obtient,par l'intercession de Notre-
Dame du Sacré Cœur, de recouvrer la
santé.
Il s'embarque alors, et bientôt est res
saisi sur le navire par la maladie. On fait
escale à Bourbon, où il retrouve l'un de ses
confrères parti avant lui, et qui, déposé à
terre, venait d'y passer huit jours entre la
vie et la mort. Cinq religieuses de Notre-
Dame du Sacré-Cœur avaient accompagné
le P. Yérijjs,
Notre-Dame étend une fois de plus son
manteau srçr se3 enfants, Les deux apôtres
entrent en convalescence, et deux mois
après la caravane apostolique fait route
pour Sydney.
Bientôt aprè3 le P. Vérius abordait à
Thursday-Island, 1' « antichambre » de la
Nouvelle Guinée, pour lui la (erre promise.
Le 7 juillet 1885, il écrivait à |son supé
rieur général : « Vive le divin Coçur.de Jé
sus 1 Je suis enfin en Nouvelle-Guinée, et,
avec la grâce de Dieu, j'y resterai ! » Il n'y
était pas entré sans avoir eu à lutter contre
des difficultés inouïes, opposition de la part
des protestants, effroyables tempêtes, etc.
Mais il était entré. Que d'épreuves l'y at
tendaient ! Après s'être vu près de mourir
de faim, il fut expulsé par l'autorité an
glaise, circonvenue par les prédicants.
Mais quelque temps après, les mêmes au
torités, mieux informées, levaient leur op
position, et sous les ordres du P. Navarre,
le P. Vérius reprenait avec ardeur l'œuvre
uu moment interrompue.-
Nous n'essayerons pas de dire ce que le
courageux apôtre a, durant ees quatre an
nées, déployé d'activité apostolique. Dès
son premier voyage, il avait pris sur ses
chers Papous un ascendant merveilleux. Ils
savaient si bien combien il les aimait !
Certes, l'humble religieux a dû être
étrangement surpris le jour où Mgr Na
varre lui a remis ses bulles d'évêque titu
laire de Limyra. Quatre ans seulement de
mission, et vingt-neuf ans à peine ! Mais
dans ces régions lointaines, le Souverain
Pontife, agissant dans la pleine indépen
dance de son autorité apostolique, sait choi
sir les hommes prédestinés aux grandes
œuvres, quelle que soit leur jeunesse, ef_
sur un semblable terrain il î tt ui pas dé
longues années pour apprécier ce que va»
lent les ouvriers apostoliques et ce qu'on
peut attendre d'eux.
La mission de la Nouvelle-Bretagne, de
la Nouvelle-Irlande et des îles Salomon,où,
dit-on, le cannibalisme est encore en hon
neur, est plus difficile encore que celle de
la Nouvelle-Guinée. C'est pour cela même
qu'elle est digne de la vaillance du jeune
et intrépide évêque. Il y retrouvera,devenu
infirme, mais dévoué aux sauvages jusqu'à
la raprt, le bon P, Qraiflqil e, Ta premier
enfant de la Petite-Œuvre apostolique,
comme lui en est aujourd'hui le premier
évêque. Laissant ses bien-aimés Guinéens
sous la houlette du vénérable archevêque
da Cyr, il donnera dans ces îles une nouvelle
et forte impulsion aux efforts des mission
naires, tandis qu'à l'autre extrémité des ar
chipels confiés à la congrégation des mis
sionnaires du Sacré-Cœur, aux îles Gilbert,
le P. Bontemps, affermira et développera
ces chrétientés merveilleusement formées
par quelques sauvages évangélisés bien loin
de leur patrie par les bons Pères maristas.
Jusqu'à cette heure, tous les missionnai
res prêtres des trois vicariats apostoliques
sont de nationalité française, sauf Mgr Vé
rius, tant dévoué d'ailleurs à la France, de
venue sou pays d'adoption.
Il est triste de penser que si l'héroïque
apôtre avait réclamé chez nous des lettres
de naturalisation officielle, des hommes in
vestis par la noble et catholique France du
mandat de législateurs, entendraient l'o
bliger à venir faire ses vingt-huit jours, sac
au dos, sous peine de passer en conseil de
guerre le jour où il viendrait chercherai
pende repos sur le terrUoi-- français.
Voilà jusqu où peut CGTiôuire le fanatisme
de 1 irrélie^'j e t j a monomanie de l'égalité
urutale entre tous les citoyens...
Mgr Vérins a raconté dans une de ses
lettres comment il s'y prit pour atteindre
la Nouvelle-Guinée sans pilote et sur quel
ques planches.
Jadis le capitaine de YArche-d'Alliance,
Auguste Marceau, assailli par uue épou
vantable tempête, contre laquelle les ef
forts humains étaient impuissants, avait re
levé le courage de ses matelots avec cette
parole de foi : « Nous n'avons rien à crain
dre ; nous avons un bon pilote sur le gail
lard d'avant | » désignant par ces mots la
statue de la sainte Vierge placée k la proue;
et 1 Arche-d Alliance, dont le gouvernail
avait été brisé, fit sous la main de ce pilote
trois cents lieues en droite ligne pour aU
teindre heureusement Sydney.
Le Père Vérius, — il avait 25 ans alors.
— recourut au même procédé.
« Notre-Dame du Sacré-Cœur elle-mêma
« nous conduira. Ja bénis le bateau (una
» simple barque de pêche !) et je nomma
« ofhciedement devant mes bommesNotre-
« Dame du Sacré-Cœur pilote du Gordon
« pour la Nouvelle-Guinée. Je mets sur la
« pont une petite statua de bronze bénita
« à Rome. » (Lettre du 7 juillet 1885.) La
uordon arriva.
Notre-Dame du Sacré-Cœur sera encore
le pilote du navire qui amènera aux insu
laires de la Nouvelle-Bretagne et des îles
Salomon leur jeune et intrépide évêque.
A la vue de ce grand chef de la prière
d'una haute et frêle stature, un peu courbl
sous le faix de fatigues prématurées, fixant
sur eux ces grands yeux bleus dont le re
gard doux et profond essrçait sur les Gui
néens une sorte de fascination mystérieuse'
ces redoutables sauvages, eux aussi il
faut l'espérer de la protection du Cœur de
Jésus, se sentiront touchés de respect, et
les consolations de ce nouvel apostolat
adouciront pour le pieux Pontife le chagrin
qu'il aura éprouvé en quittant ces pauvrest
Guinéens, au salut desquels il avait voulu
se dévouer jusqu'à sou dernier soupir.
A. Delapohte,
Missionnaire du Sacré- Cœur.
N* 7839 — Édition qaotidfenne
Mercredi 7 Août i®>89
gaiTION QUOTI DIENNE
PARIS ÉTRANGER
ET DÉPARTEMENTS (DNION POSTAIS)
f!n an. « V . . 55 » 66 »
Six mois. ... 23 50 34 »
Trois mois. . . 15 » 18 »
^abtimeiiienftf partent des i« et 1S de cliaqae moli
f Paris 15 cent.
UN NUMÉRO [ Départements. 20 —
BUREAUX : Paris, 10, rue des Saints-Pères
On s'abonne h Rome, place du Gesù, 8
ÉDITION 6EHI-QTT0TIDIENNB
PARIS ÉTRANGER
ÏT DÉPAKTIQISSïS (BNIOKT POSTAL*}
Un an. .... 30 » 36 »
Six mois. ... 16 s 19 s
Trois mois. . . 8 50 10 »
I.cs abonnements partent des S" et 16 da chaque mot^
L'UKIYERS ne répond pas des manuscrits qni lui sont adressés
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C'°, 6, place do la Bourse
FRArfCB
PARIS, 6 AOUT 1889
L'événement du jour, c'est la ré
ponse du général Boulanger au réqui
sitoire de M. Quesnay de Beaurepaire.
Le morceau est Ion g,et c'est peut-être
ce qui lui nuira auprès du public,qui
aura quelque peine à le digérer en une
seule fois. Il est vrai que le général
lui-même a pris la précaution de le
diviser en une série de chapitres dont
chacun se réfère à une des accusations
ou insinuations du réquisitoire. De
toutes façons d'ailleurs, l'effet voulu
sera produit. Dans le peuple on dira
que le général a péremptoirement ré
pondu au magistrat, et celui-ci, qui a
d'ailleurs très mal échafaudé son ro
man, n'aura certainement pas le der
nier mot.
La publication de cette réponse
tranche évidemment la question de
savoir si le général Boulanger se pré
sentera ou non devant la Haute Cour.
Le général s'en tient à ses premières
déclarations : il ne reconnaît ni la
compétence ni l'impartialité des juges
qu'on prétend lui imposer, et c'est au
peuple qu'il adresse sa défense. Il n'a
pas tort, et ce n'est pas malhabile.
Un journal nous apprend qu'avant
de partir pour la Suisse, M. de Frey-
cinet a fait agréer par le chef de l'Etat
un règlement portant application de la
loi d'amnistie conditionnelle du 21
juillet.
S'il faut en croire le même journal,
l'autorité militaire, dans ce document,
se serait plutôt inspirée de l'esprit que
du texte même de la loi, en dispen
sant les déserteurs et les insqumis
d'une comparution en conseil de
guerre pour y purger leur contumace;
etl'avocatofficieux du ministre prétend
justifier la chose en disant que non
seulement il eût fallu, sans cela, occu
per la iustice militaire par 2,000 pro
cès coûteux, mais qu'il était matériel
lement impossible d'obliger tous les
bénéficiaires de l'amnistie à un voyage
en France, surtout pour ceux vivant
dans le pays d'Extrême-Orient, en
Amérique et en Australie.
Bref, il se félicite que l'amnistie de
1589 se trouve ramenée aux mêmes
conditions que celle de 1880, et que
la clause de la grâce préalable, à la
quelle certains membres du Parlement
avaient paru tenir, se trouve très heu
reusement tournée dans le décret du
30 juillet.
En résumé, l'acte de repentir for
mulé devant un agent consulaire de
France suffira. C'est cette proposition
que M. de Freycinet a fait ratifier par
le président de la République. Bien
des gens se demandent-si ce n'est pas
là une violation à peine déguisée de la
ïoi, dont il est incontestable que la
Chambre n'a pas voulu faire bénéfi
cier les déserteurs. Il semblera, dans
î'sspèce, que M. de Freycinet donne
une sorte de prime à l'indiscipline.
De Suisse on annonce que le comte
da Waldersee, chef d'état-major gé
néra! de l'armée allemande, se livre
dans' cé cays à une série d'excursions
qui n'ont peut-être pas uniquement la
distraction prfïir mobile. On ne sait pas
ce qui peut arriver, et le conflit mo
mentanément apaisé entre la républi
que helvétique et l'empire allemand
peut renaître quelque jour. En homme
a visé, M. le comte Waldersee recon
naît en touriste le terrain sur lequel il
sera peut-être appelé à opérer comme
militaire. Il n'est pas, en politique, de
petite précaution.
Il se confirme que le gouvernement
des Etats-Unis a décidé de réunir le 14
octobre prochain, à Washington, un
congrès auquel seront convoqués tous
les Etats de l'Amérique espagnole et
portugaise, au nombre de dix-sept,
dans le but de s'entendre sur certains
intérêts communs. Le Journal de Ge
nève remarque avec raison que sous
cette forme vague se cache un pro
gramme très vaste et très précis : en
effet, il ne s'agit de rien moins que
d'étendre jusqu'au cap Horn ou jus
qu'au détroit de Magellan, la fameuse
doctrine de Monroë. Concerter d'a
vance les mesures défensives à pren
dre contre l'invasion des Etats euro
péens ; établir une certaine uniformité
dans les tarifs douaniers ; adopter cer
taines règles pour la protection des pro
duits afférants aux divers Etats; créer
enfin une monnaie commune d'argent
ayant force libératoire dans tous les
pays contractants ; tous les conflits
entre Américains réglés par voie d'ar
bitrage : voilà le programme de Was
hington. Il tient en peu de mots, mais
que de changements, s'il se réalise, il
est appelé à opérer! Le nouveau monde
deviendrait alors un Etat énorme,
régi par des lois semblables ou iden
tiques, à la fois confédération politi
que, union monétaire et Zollverein
douanier.
Reste à savoir si ce rêve n'est pas
une chimère. Ainsi, comment arriver
à concilier des intérêts dissemblables
et souvent divergents et sur quel plan
combiner un système de lois qui puisse
convenir à l'Equateur et au Massa-
chussetts, au Brésil impérial et catho
lique et à la Nouvelle-Angleterre ?
On remarquera que le Canada est le
seul des Etats du nouveau monde qui
ne soit pas convoqué à Washington ;
ce n'est pas qu'on l'ait oublié. On y
pense au contraire,et beaucoup ; mais
l'on a cru devoir respecter pour cette
fois la fiction qui en fait une dépen
dance de la Grande-Bretagne ; toutefois,
on ne renonce pas à l'e3poir de le faire
entrer, par la force persuasive de l'in
térêt ou par celle de la crainte, dans
cette ligue qui rappellerait dans des
proportions plus vastes l'ancien blocus
continental de Napoléon.
A la Chambre des communes an
glaises, sir Fergusson, répondant à
M. Sydney-Buxton, a déclaré que le
gouvernement belge est entré en com
munication avec les puissances inté
ressées à la question de la traite des
esclaves. Suivant les dernières infor
mations reçues de Bruxelles, la con
férence relative à ce sujet ne pourra
se réunir que vers le milieu ou la fin
d'octobre.
bat l'instrument d'un vil marché de
traficants.
Vu d'ensemble, le document paraît
un peu long; mais, quand on le suit
pas à pas, on va jusqu'au bout sans
languir. C'eût été, d'ailleurs, un autre
danger d'être trop court, du moment
qu'il fallait s'attaquer à chacune
des imputations amassées dans l'œu
vre mal venue du procureur général.
Désormais, de ces accusations forgées
avec les témoignages de policiers ou
d'escrocs, que reste-t-il? A notre avis,
un juge impartial devrait reconnaître
qu'il n'en reste rien.
En parlant de la sorte, nous n'en
tendons pas le moins du monde glori
fier dans le général le politicien, dont
la fortune singulière est surtout l'œu
vre de ses adversaires républicains.
Nous sommes loin d'approuver tout
son programme et son entourage nous
reste suspect ; fera-t-il la république
honnête, dont il parle toujours sans la
bien définir? Nous n'en savons rien,
et, à vrai dire, nous en doutons. Mais,
dans l'espèce, il s'agit simplement de
savoir s'il doit être convaincu de ten
tative d'attentat et surtout de concus
sion, et si, par politique, les membres
de la Haute-Cour sont excusables de
vouloir condamner le général — com
me d'avance la presse officieuse an
nonce hautement qu'ils le feront —
pour des faits dont un tribunal ordi
naire devrait juger qn'on n'a pu ad
ministrer la preuve.
S'ils condamnent dans ces condi
tions, les juges de la Haute-Cour in
firment d'avance la valeur de leur sen
tence. Et le général Boulanger ne
risque guère de se tromper en cer
tifiant que le peuple la réformera.
A uguste R oussel.
Le général avait un mot à dire au
procureur, mais ce n'est pas àM.Ques-
nay de Beaurepaire que M. Boulanger
s'adresse directement. Ecartant les ju
ges, dont il nie la compétence et l'im
partialité, c'est au peuple, par la voie
de la presse, qu'il présente sa défense.
Nous la donnons plus loin textuelle
ment.
On ne saurait nier qu'à côté du ré
quisitoire elle fera très bonne figure.
Il n'y a point de circonlocutions,
point d'arguties procédurières, point
de fausse déclamation, et à certains
endroits l'on y sent vraiment vibrer
l'indignation du soldat pris de dégoût
en face d'imputations outrageantes
qui visent à faire de son épée de com-
Parmi les explications que donne
le général Boulanger, il en est une
qui appelle des réserves. C'est celle
qu'il donne au sujet de l'Avenir na
tional et de ses relations, en vue d'une
guerre possible, avec les socialistes
d'un « certain pays. » Ce sont là des
compromissions qu'on ne saurait ad
mettre, même avec le motif que met
en avant le général.
L'inauguration des nouveaux bâti
ments de la Sorbonne a eu lieu hier,
sous la présidence de M. Carnot, en la
présence d'un certain nombre d'étu
diants délégués par les universités
étrangères.
Des discours ont été successivement
prononcés par M. Gréard, recteur de
l'académie de Paris; par M. Hermitte,
professeur à la faculté des sciences;
par M. Chautemps, président du con
seil municipal de Paris, et par M. Fal-
lières, ministre de l'instruction publi
que. Sur l'ensemble de ces discours et
sur le caractère général de la cérémo
nie, nous recevons,d'un auditeur bien
placé pour les apprécier, le récit
d'impressions que nous publierons de
main.
La revue navale de Spithead en
l'honneur de l'empereur Guillaumé,
qui, à cause du mauvais temps et du
brouillard,n'avait pu avoir lieu samedi,
a eu lieu hier. La reine Victoria n'y a
pas assisté. Mais l'empereur Guillaume
était entouré du prince de Galles, du
prince Henry de Battenberg, du prince
Henry de Prusse, du prince Christian,
du marquis de Lomé et du duc de
Cambridge.
Les journaux anglais s'étendent
avec complaisance sur le caractère
formidable de « la flotte de réserve »
qu'on faisait inspecter à l'empereur
Guillaume, et qui comprenait 37 cui
rassés d'escadre, 20 croiseurs sans cui
rasses, quelques croiseurs rapides et
un grand nombre de garde-côtes, de
canonnières et de bateaux torpilleurs,
faisant en tout 112 bâtiments montés
par 23,000 marins.
Quelques journaux de Londres ex
priment vivement leur satisfaction du
spectacle offert au puissant empereur
d'Allemagne, qui, s'il tient compte
surtout des 70 nouveaux bâtiments en
voie de construction à la suite du
dernier vote du Parlement, emportera
de son voyage, disent-ils, la convic
tion que l'Angleterre est toujours la
reine des Océans.
L'épiscopat de la province de Venise,
après celui de la province de Palerme
en Sicile, vient de protester par une
adresse collective contre l'outrage fait
à l'Eglise et au Saint-Siège par l'érec
tion à Rome d'un monument à l'hon
neur de Giordano Bruno.
Les vénérables signataires disent
que cette énorme impiété, qui soulève
l'indignation de quiconque a le senti
ment de la religion, la délicatesse de
la vertu et de l'honneur, le sincère
amour de la patrie, « comble la mesure
des outrages commis depuis l'usurpa
tion de Rome contre le Siège Aposto
lique ».
L'école catholique en Angleterre
La grosse question pour les catholi
ques anglais est pour le moment la
question des écoles.
Diverses lettres pastorales des évê-
ques d'Angleterre viennent d'être pu
bliées sur ce sujet. Il faut citer notam
ment celle de S. Em. le cardinal Man
ning et celle de MgrVaughan,l'évêque
de Salford, qui ont obtenu un grand
retentissement parmi les catholiqués
anglais. '
Nous n'avons pas la lettre de Mgr de
Salford, mais celle du cardinal Man-
ning traite.la question à fond.
Depuis 1847, l'enseignement catho
lique a fait en Angleterre d'immenses
progrès. Il comptait alors peu d'é
coles primaires et pas une seule école
normale.En 1870,il est déjà à la tête de
12,000 écoles, contenant 150,000 en
fants.
La première crise dans l'enseigne
ment catholique anglais fut amenée
vers 1870. C'a fut, si nous ne nous
trompons, un lieutenant de M. Glads
tone, M. Mundella, qui eut le fâcheux
honneur d'attacher son nom à cette
loi. C'était l'entrée en scène de la doc
trine révolutionnaire de la neutralité.
C'était la première grande déviation
de la tradition « chrétienne » qui
avait toujours inspiré la législation de
l'enseignement en Angleterre. Et, à
ce propos, nous nous rappelons avoir
reçu jadis la visite d'un député catho
lique d'Irlande qui nous disait alor3 :
« En politique, nous pouvons être
avec les whigs ; mais pour les ques
tions d'éducation, nous sommes les
alliés des tories.» Tempora mutantur...
Aujourd'hui c'est contre les tories au
pouvoir que S. Em. le cardinal Man-
ning demande précisément le con
cours des députés catholiques d'Ir
lande au profit de l'enseignement
chrétien.
Le gouvernement anglais actuel est
en effet favorable au système des School
Boards (1), créé par la loi de M.
Mundella. Monseigneur Manning ne
s'explique pas sur les motifs de
cette attitude. Il nous semble que
(i) Administration spéciale pour le départe
ment de l'éducation.
nous pouvons les démêler. La neu
tralité prescrite pour les écoles des
School Boards n'empêche pas la lecture
quotidienne de la Bible. Pour le for
malisme protestant cela suffit. Et si
moyennant ce minimum l'école des
School Boards peut, sans alarmer le
protestantisme officiel, faire concur
rence à l'école volontaire anglicane,
elle peut aussi faire concurrence à l'é
cole volontaire catholique.
Il y a à cet égard un fait significatif.
On ne compte pas moins de 1,300 ou
1,400 écoles qui ont été abandonnées
volontairement aux School Boards, soit
par des pasteurs de l'Eglise anglicane,
soit par des ministres des sectes dissi
dentes. Mais il est, bien entendu, sans
exemple que les catholiques aient
abandonné une seule de leurs écoles
aux school boards. Et la chose est
méritoire quand on songe que les ca
tholiques qui entretiennent leurs éco
les (surs leurs seules ressources) ne
forment pas — si on écarte les excep
tions, la partie la plus riche de la
population des Iles-Britanniques.
Est-ce en raison de cet état de cho
ses que le gouvernement s'abstient de
donner une réponse satisfaisante aux
réclamations de l'épiscopat catholique?
On ne sait trop. Le gouvernement
pourtant se défend de toute mauvaise
intention à l'endroit de l'enseigne
ment catholique. L'autre jour encore
M. Balfour,répondant à M. Parnell qui
avait posé à la tribune les revendica
tions de l'épiscopat catholique d'Ir
lande, a dit qu'il se proposait de faire
bientôt « une déclaration » à cet
égard. Nous verrons bien ce que sera
cette déclaration.
Le grand danger de l'enseignement
catholique après 1870 avait été le man
que d'institutrices pour les écoles de
filles. Le danger est désormais con
juré. L'établissement de plusieurs or
dres de femmes vouées à l'enseigne
ment a donné à l'Angleterre une lé
gion d'institutrices sans pareilles.
Aujourd'hui le danger est d'un autre
côté. Il est ou il va être dans le man
que d'instituteurs. En effet, les eatho
liques, qui font les plus lourds sacrifi
ces pour leurs écoles, ne peuvent avoir
cependant la prétention de lutter con
tre les ressources illimitées dont les
School Boards et le gouvernement peu
vent disposer. Ces ressources permet
tent de construire des « palais scolai
, res », d'offrir de larges salaires aux ins
tituteurs et d'assurer leur sort pour
l'avenir. Il est évident que, dans ces
conditions, les School Boards peuvent
aisément se procurer les meilleurs
instituteurs,et par conséquent donner
à leurs écoles la supériorité dans les
concours et dans les examens. Et ce
n'est pas une question de mode ou de
vogue, mais de vie ou de mort pour
les écoles, puisqu'elles ne peuvent
prétendre à des allocations gouverne
mentales qu'en proportion de leurs
succès.
En France, malgré la persécution
officielle, les catholiques sont assurés
d'iine grande avance sur les partisans
de l'enseignement « neutre »!!! grâce
aux traditions sans rivales d'expé
rience et de dévouement que les lé
gions du bienheureux de la Salle
mettent au service de la France catho
lique. Que la persécution cesse,et nous
reprendrons l'avantage. La situation
n'est plus la même en Angleterre. Un
haut fonctionnaire du « département
de l'éducation » disait récemment au
cardinal Manning : « Si vos écoles de
garçons étaient aussi bonnes que vos
écoles de filles, vous nous battriez
complètement. »
Donc la grosse question pour les
catholiques anglais c'est d'augmenter
encore le budget de leur charité pour
leurs écoles. Ce n'est pas un mine©
honneur qu'ils aient pu, dans des con
ditions si déplorables, lutter honora
blement contre l'enseignement offi
ciel. Mais il est clair que la lutte de
vient tous les jours plus difficile à
soutenir, parce que le poids « finan
cier » en devient plus onéreux.
Ainsi les School Boards se montrent
de plus en plus exigeants pour îea
conditions matérielles des écoles.
Leurs inspecteurs réclament comme
espace et comme distribution des bâ
timents des conditions hygiéniques
qui ne coûtent rien aux School Boards,
où on dispose de l'impôt des écoles,
mais qui sont ruineuses pour les éco
les volontaires.
En outre, l'esprit de concurrence et
de prosélytisme s'en mêle. Les inspec
teurs des School Boards n'admettent pas
volontiers la nécessité d'écoles volon
taires concurrentes à côté des leurs;
Ils disent : A quoi bon une école nou
velle? Nous avons, assez de place dans;
la nôtre pour les enfants du pays.Dans
la principauté de Galles, on a, depuis
1876, refusé de mettre sur la Grant
List (liste des allocations) 18 écoles ca
tholiques, sous prétexte qu'elles n'é
taient pas nécessaires.
Malgré cette situation difficile, le
cardinal Manning est loin de déses
pérer de la victoire définitive de l'en
seignement catholique. Nous avons
récemment parlé de ses efforts pour
obtenir que le Parlement soit saisi par
les députés catholiques d'Irlande des
légitimes revendications de la hiérar
chie catholique.
Malgré l'étrange apathie, ou, si l'on
veut,la mauvaise volonté du ministère
conservateur, il compte que l'Angle
terre reviendra sur cette erreur capi
tale et renouvelée du paganisme, qui,
en matière d'enseignement, dépouilla
les parents de leurs droits sur l'édu
cation de de leurs enfants au profit
de l'Etat.
Le fait est que ce n'est pas seule-*
ment là une erreur contre la doctrine
de 1 Eglise. C'est aussi une erreur con
tre la «doctrine » du bon sens.Et dans
le gouvernement des peuples, en dépit
des crises passagères, qui sont parfois
de rudes leçons, la victoire finit toui
jours par rester au bon sens. '
L. Nemours Godré.
L'église du Rosaire à Lourdes
Nous lisons dans le Journal de Lour*
des : ■ *
L'inauguration de l'église du Rosaire re-
nouvellera à Lourdes les splendeurs et le*
joies des fêtes passées.
Voici les noies des âv hevêques et
ques qui sont attends à la Grotte :
S. Em. le cardinal Richard, archevêqaô
de Pans, délégué du Saint-Père ;
Mgr Billere. évêque de parkas ;
Mgr Gouzot. archevêque d'Àucîi ;
Mgr B erchialla, aroheveque de Caeliarî,
primat de Sardaigne ;
Mgr Thomas, archevêque d'Andrinople :
Mgr Fonteneau, arcb.svêque d'Albi ;
Mgr Dufal, évêque dô Delco ;
Mgr Grimardias, évêque de Cahors:
Mgr Bourret, évêque da Rodez ;
Mgr Oatteau, évêque de Luçon ;
Mgr Rougerie, évêque de Panners:
Mgr Fiard, évêque de Montauban ;
Mgr Gaussait, évêque de Perpignan ;
Mgr Dennel, évêque d'Arras ;
Mgr Cœuret, évêque d'Aeen ;
Mgr Petit, évêque du Puy.
Des évêques seuls prendront la parole
aux principales cér-émonies : on annonce
trois heures, un discours
de Mgr l évêqiîe de Luçon à la Grotte,
et pour le lendemain, à la môme heure, à
l esplanade du Rosaire, un discours de
Mgr 1 évêque de Rodez.
, Les grands pèlerinages concourront à re
hausser 1 éclat de ces solennités.
FEUILLETON DE L'UNIVERS
du 7 août 1889
r K vérius
évêque titulaire db limyra et premier
vicaire apostolique de la nouvelle-
bretagne.
Les catholiques attentifs aux progrès que
fait de nos jours l'évangélisation du globe
savent qu'il y a moins de dix ans, Léon
Xl.II confiait à la naissante société des
Missionnaires du Sacré-Cœur la rude tâche
de faire connaître le vrai Dieu aux innom
brables îles de l'Océanie qui se trouvent au
delà des missions de la société de Marie et
des pères de Pïcpus. L'année dernière, le
P. Navarre, le vaillant chef du premier
groupe des missionnaires de la Mélanésie,
recevait, en récompense de ses efforts et de
ses succès, du Saint-Père le titre d'évêqne
de Pentacomie, remplacé presque aussitôt
par celui d'archevêque de Cyr.
Cette année, le Souverain Pontife vient
de cîiviser en deux l'immense vicariat apos
tolique de la Mélanésie. Mgr André Na
varre garde la Nouvelle-Guinée avec Thurs-
day-Island (le dernier poste européen) et
les îles adjacentes ; la Nouvelle-Brelagne,
la Nouvelle-Irlande et les îles Salomon for
meront le vicariat apostolique de la Nou
velle-Bretagne.
.La Nouvelle-Bretagne est connue par
l'essai malheureux de colonisation entre
pris pae le marquis de Raya. M a ? 9 |s'il y a
des obstacles qui rebutent les colons, il n'y
en a point qui déconcertent les apôtres. Ce
fut en Nouvelle-Bretagne que les mission
naires du Sacré-Cœur commencèrent leurs
travaux, assez loin d'ailleurs de ce qui avait
dû être « la Nouvelle-France », Les pères
Jouet et Hartzer ont donné d'intéressants
détails sur cet archipel, qui, placé entre les
Moluques et l'Australie, forme le lien na-
moyen de communication le plus
direct entre l'Asie et l'Océanie (1).
Etablie donc d'abord en Nouvelle-Bre
tagne, la petite phalange apostolique rêvait
jour et nuit la conquête de l£ grande île
aux douze millions d'habitants, la Nouyellp-
Guinée, où fumait encore le sang du Père
Mazucconi, da séminaire des Missions
étrangères de Milan, massaoré en 1855
par les sauvages de Woodlark.
Le premier des missionnaires du Sacré-
Cœur qui suivit les traces do martyr s'ap
pelait Henri Vérius.
Né en Italie de parents piémontais, le 28
mai 1860, pendant le mois de Marie et au
jour où l'on célèbre la fête de saint Philip
pe de Néri, l'apôtre de Rome,Henri Vérius,
était entré à l'âge de douze ans à l'école
apostolique des missionnaires du Sacré-
Cœur, à la Petite œuvre du Sacré-Cœur,
comme on dit à Issoudun, à Rome, à Til*
bourg, à Anvers, à Glaslonbury, à Barce
lone, àSalzbourg.
La « Petite-OEuvre » pour la France,
qu'Henri habitait alors, se trouvait en ce
temps-là à Chezal-Benoît, près d'Issoudun,
où elle est installée aujourd'hui à l'ombre
de la basilique du Sacré-Cœur, déserte,
hélas I et silencieuse depuis les lugubres
décrets de Grévy.
(1) Les Missionnaires du Sacré-Cœur dans les
vicariats apostoliques de la Mélanésie et de la
Micronésie. — .Cinq ans p^rmi les sauvages de
Nouvelle-Preta|ne et de la ïs'ouvelle-Quinée,
Les missions, dès lors, occupaient toutes
les pensées du généreux enfant, qui ne
perdait pas une occasion d'acquérir les di
verses connaissances pratiques dont on
peut avoir besoin en pays sauvage. Son
ardeur était extrême, et ses anciens maî
tres sourient au souvenir d'Henri, exécu
tant au noviciat, de la plus belle grâce du
monde, une pénitence qui consistait à s'en
aller à pas de tortue de la chapelle au ré
fectoire.
Après ce noviciat, envoyé à la résidence
de Barcelone, Henri Vérius suivit quelque
temps les cours du «séminaire du Concile»
termina sa théologie et reçut la prêtrise à
Rome, le 1" novembre 1883.
Enfin, il allait pouvoir contenter son plus
cher désir. Il obtient de partir ponr la Mé
lanésie. Mais il tombe malade à Marseille,
dans la maison de Béthanie, si admirable
ment hospitalière aux apôtres des pays
lointains. Après avoir vu la mort de bien
près, il obtient,par l'intercession de Notre-
Dame du Sacré Cœur, de recouvrer la
santé.
Il s'embarque alors, et bientôt est res
saisi sur le navire par la maladie. On fait
escale à Bourbon, où il retrouve l'un de ses
confrères parti avant lui, et qui, déposé à
terre, venait d'y passer huit jours entre la
vie et la mort. Cinq religieuses de Notre-
Dame du Sacré-Cœur avaient accompagné
le P. Yérijjs,
Notre-Dame étend une fois de plus son
manteau srçr se3 enfants, Les deux apôtres
entrent en convalescence, et deux mois
après la caravane apostolique fait route
pour Sydney.
Bientôt aprè3 le P. Vérius abordait à
Thursday-Island, 1' « antichambre » de la
Nouvelle Guinée, pour lui la (erre promise.
Le 7 juillet 1885, il écrivait à |son supé
rieur général : « Vive le divin Coçur.de Jé
sus 1 Je suis enfin en Nouvelle-Guinée, et,
avec la grâce de Dieu, j'y resterai ! » Il n'y
était pas entré sans avoir eu à lutter contre
des difficultés inouïes, opposition de la part
des protestants, effroyables tempêtes, etc.
Mais il était entré. Que d'épreuves l'y at
tendaient ! Après s'être vu près de mourir
de faim, il fut expulsé par l'autorité an
glaise, circonvenue par les prédicants.
Mais quelque temps après, les mêmes au
torités, mieux informées, levaient leur op
position, et sous les ordres du P. Navarre,
le P. Vérius reprenait avec ardeur l'œuvre
uu moment interrompue.-
Nous n'essayerons pas de dire ce que le
courageux apôtre a, durant ees quatre an
nées, déployé d'activité apostolique. Dès
son premier voyage, il avait pris sur ses
chers Papous un ascendant merveilleux. Ils
savaient si bien combien il les aimait !
Certes, l'humble religieux a dû être
étrangement surpris le jour où Mgr Na
varre lui a remis ses bulles d'évêque titu
laire de Limyra. Quatre ans seulement de
mission, et vingt-neuf ans à peine ! Mais
dans ces régions lointaines, le Souverain
Pontife, agissant dans la pleine indépen
dance de son autorité apostolique, sait choi
sir les hommes prédestinés aux grandes
œuvres, quelle que soit leur jeunesse, ef_
sur un semblable terrain il î tt ui pas dé
longues années pour apprécier ce que va»
lent les ouvriers apostoliques et ce qu'on
peut attendre d'eux.
La mission de la Nouvelle-Bretagne, de
la Nouvelle-Irlande et des îles Salomon,où,
dit-on, le cannibalisme est encore en hon
neur, est plus difficile encore que celle de
la Nouvelle-Guinée. C'est pour cela même
qu'elle est digne de la vaillance du jeune
et intrépide évêque. Il y retrouvera,devenu
infirme, mais dévoué aux sauvages jusqu'à
la raprt, le bon P, Qraiflqil e, Ta premier
enfant de la Petite-Œuvre apostolique,
comme lui en est aujourd'hui le premier
évêque. Laissant ses bien-aimés Guinéens
sous la houlette du vénérable archevêque
da Cyr, il donnera dans ces îles une nouvelle
et forte impulsion aux efforts des mission
naires, tandis qu'à l'autre extrémité des ar
chipels confiés à la congrégation des mis
sionnaires du Sacré-Cœur, aux îles Gilbert,
le P. Bontemps, affermira et développera
ces chrétientés merveilleusement formées
par quelques sauvages évangélisés bien loin
de leur patrie par les bons Pères maristas.
Jusqu'à cette heure, tous les missionnai
res prêtres des trois vicariats apostoliques
sont de nationalité française, sauf Mgr Vé
rius, tant dévoué d'ailleurs à la France, de
venue sou pays d'adoption.
Il est triste de penser que si l'héroïque
apôtre avait réclamé chez nous des lettres
de naturalisation officielle, des hommes in
vestis par la noble et catholique France du
mandat de législateurs, entendraient l'o
bliger à venir faire ses vingt-huit jours, sac
au dos, sous peine de passer en conseil de
guerre le jour où il viendrait chercherai
pende repos sur le terrUoi-- français.
Voilà jusqu où peut CGTiôuire le fanatisme
de 1 irrélie^'j e t j a monomanie de l'égalité
urutale entre tous les citoyens...
Mgr Vérins a raconté dans une de ses
lettres comment il s'y prit pour atteindre
la Nouvelle-Guinée sans pilote et sur quel
ques planches.
Jadis le capitaine de YArche-d'Alliance,
Auguste Marceau, assailli par uue épou
vantable tempête, contre laquelle les ef
forts humains étaient impuissants, avait re
levé le courage de ses matelots avec cette
parole de foi : « Nous n'avons rien à crain
dre ; nous avons un bon pilote sur le gail
lard d'avant | » désignant par ces mots la
statue de la sainte Vierge placée k la proue;
et 1 Arche-d Alliance, dont le gouvernail
avait été brisé, fit sous la main de ce pilote
trois cents lieues en droite ligne pour aU
teindre heureusement Sydney.
Le Père Vérius, — il avait 25 ans alors.
— recourut au même procédé.
« Notre-Dame du Sacré-Cœur elle-mêma
« nous conduira. Ja bénis le bateau (una
» simple barque de pêche !) et je nomma
« ofhciedement devant mes bommesNotre-
« Dame du Sacré-Cœur pilote du Gordon
« pour la Nouvelle-Guinée. Je mets sur la
« pont une petite statua de bronze bénita
« à Rome. » (Lettre du 7 juillet 1885.) La
uordon arriva.
Notre-Dame du Sacré-Cœur sera encore
le pilote du navire qui amènera aux insu
laires de la Nouvelle-Bretagne et des îles
Salomon leur jeune et intrépide évêque.
A la vue de ce grand chef de la prière
d'una haute et frêle stature, un peu courbl
sous le faix de fatigues prématurées, fixant
sur eux ces grands yeux bleus dont le re
gard doux et profond essrçait sur les Gui
néens une sorte de fascination mystérieuse'
ces redoutables sauvages, eux aussi il
faut l'espérer de la protection du Cœur de
Jésus, se sentiront touchés de respect, et
les consolations de ce nouvel apostolat
adouciront pour le pieux Pontife le chagrin
qu'il aura éprouvé en quittant ces pauvrest
Guinéens, au salut desquels il avait voulu
se dévouer jusqu'à sou dernier soupir.
A. Delapohte,
Missionnaire du Sacré- Cœur.
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