Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1889-02-10
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 10 février 1889 10 février 1889
Description : 1889/02/10 (Numéro 7714). 1889/02/10 (Numéro 7714).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Dimanche 10 Féyrier 1889
N* 7714 — Editionquotlâïenn#
Dimanche 10 Février 1889
tasm
ÉDITION QUOTIDIENNE
ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNE
paris
ET DÉPARTEMENT*
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un numéro { 2!°-'•
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Un an. . .
Six mois. .
Trois mois.
paris
ET DÉPARTEMENTS
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. . 16 »
. . 8 50
étranger
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19 »
10 »
francs
PARIS, l> FEVRIER 1889
, L'olympien Floquet va de nouveau
jouer son « va-tout » ; il le jouera mê
me trois fois, disent des journaux bien
uuormés: une première fois aujour-
d. nui même sur la question de priorité
•entre le scrutin d'arrondissement et
|a revision; une deuxième fois pour
1 adoption du scrutin uninominal ; une
troisième fois" pour sa revision, qu'il
prétend imposer telle qu'elle est. Quel
terrible homme, et comme il sait que
les opportunistes n'oseront pas, malgré
leur haine et leurs convoitises, le ren
verser en ce moment !
Cependant la revision pourrait ne
pas marcher toute seule; les oppor
tunistes continuent à déclarer qu'ils
n en veulent à aucun prix. II est vrai
que des paroles aux actes il y a loin,
surtout chez eux.
Après avoir entendu M. Floquet, la
commission du scrutin uninominal a
maintenu son vote en faveur du projet
ministériel : c'était prévu. Le rappor
teur est M. Thomson, qui déposera
son rapport aujourd'hui même.
Dans ses explications, M. Floquet a
avoué que le ministère avait vaine
ment cherché un moyen de s'opposer
aux candidatures multiples ; il n'en a
pas trouvé. Il a déclaré que, s'il pro
posait maintenant le scrutin uninomi-
aial, après avoir jadis défendu le scru
tin de liste, c'est qu'il avait acquis la
conviction que l'opinion républicaine
se prononçait pour celui-là contre
celui-ci. Cette plaisanterie était inu
tile; personne n'ignore que le scrutin
'd'arrondissement est repris unique
ment par peur du général Boulanger.
Aujourd'hui, l'ordre du jour de la
Chambre des députés porte la suite de
la discussion du projet de M. Yves
Guyot supprimant les octrois; mais on
attend le dépôt du budget de 1890 par
M. Peytral, et surtout les deux rap
porte de MM. Tony Révillon sur la
révision,_ et Thomson sut le scrutin
■d'arrondissement ; on compte bien que
la bataille s'engagera immédiatement
au sujet de la priorité à donner à l'un
des rapports. Cela pourra être vif.
Le ministre de la guerre a pris occa-
. sion de récents incidents pour adres
ser aux commandants de corps d'ar
mée une circulaire importante, dont;
on trouvera le texte plus loin. Dans
cette circulaire, M. de Freycinet rap
pelle que les « manifestations poli
tiques » sont formellement interdites
aux officiers ; il exprime l'espoir qu'il'
ne se produira plus de ces actes regret
tables, contre lesquels il est obligé de
sévir. Cette circulaire vise l'ordre du
jour du colonel Sénart, et peut-être
aussi, sans qcie le ministre ose l'avouer,
le discours maçonnique et antiboulan-
giste du général Riu.
Demain a lieu le ballottage de la
Côte-d'Or; deux candidats sont en pré
sence : M. Toussaint, conservateur et
révisionniste, et M. Bargy, le républi
cain dont nos lecteurs n'auront pas
oublié les odieuses déclarations. S'il
y avait réellement des modérés dans
le parti républicain, ils ne voteraient
à aucun prix pour ce Bargy.
De nouvelles et significatives mani
festations ont eu lieu à Rome hier;
elles viennent à l'appui des renseigne
ments que nous donnait notre corres
pondant sur la crise économique que
traverse l'Italie. Ce sont réellement les
« manifestations de la misère ».
Et pendant ce temps-là, M. Crispi
songe à augmenter les impôts pou?
arriver à équilibrer un budget hors de
proportion avec les ressources réelles
de l'Italie.
Voiries DERNIERES NOUVELLES à la fin
Le socialisme d'Etat
Il est difficile de répondre à cette
question : Quel doit être dans l'Etat le
régime du travail? M. Claudio Jannet
nous dit avec raison : La liberté!
Mais ici même, nous nous trouvons
fort embarrassés. Vivons-nous sous le
régime delà liberté du travail ? Faut-il
prendre au pied de la lettre la liberté
que nous a octroyée la Révolution, et
croire que le régime des anciennes
corporations était contraire à la li
berté ? Il nous semble que la liberté
du travail n'est que la liberté des tra
vailleurs, leur droit de s'assembler, de
délibérer, d'établir des règlements
pour tout ce qui concerne leur profes
sion. A ce point de vue, les corpora
tions d'arts et métiers constituaient
l'autonomie de la classe, ouvrière, et
la rattachaient à l'ordre social. Aussi
les politiciens de 89 commencèrent
par s'attaquer aux corporations. La
classe ouvrière protesta, et la preuve
en est qu'il y eut encore plus d'ou
vriers guillotinés que de nobles ou de
prêtres.
La liberté n'est assurément pas le
droit de sans lois et en anar
chie, (j'est cependant ainsi que la
Révolution a compris la liberté.
La classe ouvrière a été révolu
tionnée, et aujourd'hui les anar
chistes comptent sur elle. Il y a un
siècle que les honnêtes gens se plai
gnent de la part restreinte qui leur est
faite au nom de la liberté. A-t-on vu
les amateurs de la « liberté de cons
cience » respecter la conscience des
catholiques ? Les libres-penseurs souf
frent-ils que les catholiques prennent
la liberté de penser q-ue le catholi
cisme est la vraie religion? Quant
aux libertés politiques, elles se rédui
sent à obéir à des gouvernements is
sus de l'émeute. Ceux qui sous la Res
tauration prenaient la qualification
de libéraux ont toujours voté pour le
renversement des gouvernements déjà
bien suffisamment révolutionnaires.
Tout ce qui s'est abrité sous le nom de
liberté a toujours été révolutionnaire.
Et les efforts des honnêtes gens ont
été jusqu'à présent impuissants à po
pulariser quelques honnêtes libertés.
M. Claudio Jannet combat avec vi
gueur le socialisme d'Etat, c'est le but
du grand ouvrage qu'il vient de pu
blier (1). Y a-t-il donc un autre socia
lisme que le socialisme d'Etat? L'Etat
est la seule puissance contre laquelle
la lutte soit impossible; sous quelque
forme que se présente la culture ou le
métier, elle est restrëinte, locale. Les
corporations sont de droit naturel,
puisque l'association est naturelle à
l'homme. Le législateur moderne dé
fend les Français contre le penchant
de la nature, et sous prétexte de li
berté, il leur interdit de sortir de l'in
dividualisme. C'est du socialisme d'E
tat au premier chef. Il est évident qu'à
un moment donné tous les individus,
mécontents de leur sort, diront à l'E
tat: Nourrissez-nous,et nous travaille
rons pour vous. C'est la tendance du
socialisme ouvrier.
Le seul obstacle au socialisme d'Etat
et à toute idée de socialisme, c'est le
droit d'association qui, se diversifiant
selon les localités, les goûts, les inté
rêts, les professions, assure à l'indi
vidu la protection d'un groupe puis
sant, et à l'Etat des centres nombreux
d'action et de résistance 1 » : quelques
personnes se méprennent en prenant
l'individualisme pour l'opposé du so
cialisme. La vérité est que l'indivi
dualisme français est sorti des mains
de socialistes qui ont constitué l'État
omnipotent. Et n'est-ce pas là le prin
cipe du socialisme? Le droit de la pro
priété,de la conscience a-t-il arrêté les
régénérateurs de 1789? Et aujourd'hui
arrête-t-il leurs successeurs ? Nous
sommes donc en plein socialisme par
l'intrusion de l'Etat dans toutes les
familles, par le droit qu'il usurpe de
légiférer sur tout. L'individualisme,
qui nous rend impuissants, accroît
démesurément la puissance de l'Etat.
Et l'Etat fondé sur des illusions de
liberté aboutit à la servitude univer
selle.
Cette liberté entendue dans le sens
de l'individualisme est favorable à
l'aliénabilité de là terre. Le problème
est compliqué. Mais les deux tiers
de l'espèce humaine ont intérêt à l'ina-
liénabilité, à la stabilité du foyer. Est-
ce que la famille n'est pas capable du
droit de propriété ? A sa perpétuité ré
pond la perpétuité du bien de famille.
La femme et les enfants ne sont-ils pas
les premiers créanciers du mari et du
père ?. Pourquoi cette dette ne serait-
elle pas garantie par la perpétuité, l'i-
naliénabilité du foyer domestique ? La
loi moderne sacrifie la femme et les
enfants ; leur individualité, par elle-
même incapable de se défendre, est
dépouillée de protection légale. Elle
s'absorbe dans la personne du mari et
du père.
L'aliénabilité du sol a pour objet la
fixalité; elle en a un autre, qui est
le principal, c'est de maintenir la po
pulation en état de révolution. Si 1 on
croit que la société a un autre but,
on l'envisagera différemment. La sub
sistance d'une nation est son intérêt
capital. L'agriculture prospère-t-elle
avec des familles instables, endettées,
aux expédients pour vivre ? Les lois
qui protègent la culture sont d'ordre
social. On a changé tout cela en 89.
C'est ce qu'on a appelé la libérté du
sol. Au fond, ce n'était que la liberté
reconnue aux manieurs d'argent et
usuriers de spéculer sur le sol, en y
entretenant une agitation révolution
naire. En quoi, on a réussi, en France
du moins, où la population, autrefois
si attachée à l'ordre, est devenue l'es
poir des politiciens du socialisme.
Le développement de l'industrie a
jeté l'Europe et particulièrement la
France dans une crise violente. Le
commerce, l'échange est devenu non
plus une question nationale, mais une
question universelle. Le libre-échange
a mis chaque nation en concurrence
avec toutes les autres, et a partout
surexcité le travail. Au lieu de s'ar
rêter, les économistes ont poussé en
avant et ont demandé à la France de
travailler encore davantage. L'ouvrier
moderne travaille plus que l'esclave
antique. Est-il plus libre quand il est
talonné par la difficulté de vivre et
par l'impossibilité d'élever une fa
mille ? Une des raisons pour lesquelles
l'Angleterre espère dominer la con-
(1) Le Socialisme d'Etat et la Réforme sociale,
par Claudio Jannet, professeur d'économie po
litique à l'Institut catholique de Paris. 1 vol,,
ehez Pion, rua Garancière, 10j
currence, c'est que ses ouvriers sont
libres et ne subissent pas la servitude
militaire. Ils en subissent une autre,
celle des travaux forcés.
La politique et la guerre n'avaient
pu mêler les peuples; cette opération
s'accomplit par le libre-échange; dé
sormais la question internationale pri
mera les questions nationales. Les na
tionalités s'effondrent dans le genre
humain. Des ligues de peuples, un
empire universel s'annoncent. La ra
pidité des communications rend tout
possible. Ceux qui ne sont pas philan
thropes, et ne se posent pas en amis
du genre humain, pensent à la France
et se demandent ce qu'elle deviendra.
L'empire universel est le rêve du so
cialisme extrême; le mélange, la fu
sion des peuples est le résultat du
commerce universel. L'individualisme
français donne la main à ce socialisme.
Et le" socialisme d'Etat, tant prôné en
France,nous y achemine rapidement.
Ce n'est pas que l'empire universel
soit réalisable, mais sur la route bien
des nationalités peuvent perdre leur
nom. Nous disons cela pour les natio
nalités à gouvernement instable. Pour
la France, la question est tout inté
rieure. Nous devons coloniser ou cul
tiver notre pays, avant de fonder des
colonies avec des fonctionnaires pu
blics. La question sociale~ne dépasse
pas nos frontières ; elle est, dans ces
limites, suffisamment ardue.
Tout ce qui touche au socialisme
d'Etat et aux réformes sociales est trai
té par M. Claudio Jannet avec une rare
supériorité. Il nous initie aux efforts
tentés dans cet ordre de faits en An-
pleterre, aux Etats-Unis, en Allema
gne, en Autriche. Il nous décrit le mé
canisme des institutions en juriscon
sulte qui en a pénétré le sens intime.
Il nous donne les plus précieux ren
seignements sur la législation fran
çaise et sur les réformes qui nécessi
teraient quelques modifications du
code civil. Cette réforme du code ci
vil ne peut arriver qu'après de grands
changements dans les mœurs et les
idées. La France, comme l'Italie, est
entraînée dans le courant de la
Révolution française. Le Midi [de
l'Europe,qui formait autrefois les prin
cipales provinces de l'empire médi
terranéen fondé par les Romains, pen
che vers l'individualisme et la révolu
tion, tandis que les races qui n'ont
pas été touchées par la loi romaine
restent fidèles au principe d'associa
tion et de gouvernement. D'ailleurs,
le gouvernement n'est qu'une consé
quence naturelle du principe d'asso
ciation. Les associations de culture et
de travail sont pour les classes labo
rieuses la vraie liberté politique. Et
c'est par là que de grands gouverne
ments essaient de s'attacher les popu
lations. Les Allemands ont déjà opéré
en Alsace-Lorraine des réformes favo
rables aux classes populaires.. La so
ciété d'Economie sociale, qui les prêche
depuis si longtemps n!a pu rien obte
nir. Ces réformes sont cependant mo
destes ; mais elles sont un arrêt
dans la révolution : espérons que M.
Claudio Jannet, par son travail si
consciencieux, si savant, aura plus de
succès.
Coquille.
La question de la suppression des
traitements ecclésiastiques, si com-
plaisamment résolue par le conseil
d'Etat dans le sens des prétentions
des gens du pouvoir, a encore pour
beaucoup de diocèses un intérêt très
pratique, quoique les mesures qui at
teignent les prêtres dans leurs moyens
d'existence ^soient un peu moins fré
quentes qu'il y a quelques années.
Ainsi le seul diocèse de Viviers
compte encore douze prêtres privés de
traitement par décision ministérielle.
M. de Freycinet vient d'adresser aux
commandants de corps d'armée la cir
culaire suivante, qui rappelle Tinter-
diction, faite depuis longtemps, aux
militaires de toute « manifestation po
litique » :
ministère de la guerre
Paris, 8 février 1889.
La ministre de la guerre
& MM. les gouverneurs militaires de Paris
et de Lyon,
les généraux commandant les corps
d'armée.
Mon cher général,
Je vous prie de rappeler aux militaires
sous vos ordres que les manifestations po
litiques, de quelque nature qu'elles soient,
sont formellement interdites.
Les chefs, lorsqu'ils s'adressent à leurs
troupes, verbalement ou par écrit, doivent
s'abstenir de toute allusion à la politique,
soit intérieure, soit extérieure.
J'ai réprimé les rares écarts qui se sont
produits; je réprimerai plus sévèrement en
core ceux qui viendraient à se produire par
la suite. Je compte sur le bon esprit de
tous pour m'éviter des mesures que je
prendrais à regret, mais sans hésiter.
G. de Freycinet.
Les idées de M. Fazzari
Voici la circulaire que M. Fazzari
vient d'adresser aux évêques d'Italie :
Rome, 2 février.
Excellence Révérendissime,
Le programme de la réconciliation entre
l'Etat et l'Eglise, au nom duquel plus de
10,000 électeurs dans l'un des collèges les
plus libéraux d'Italie m'ont élu député, non
seulement a été discuté par les Italiens de
tous les partis, mais il a eu encore un très
large écho en dehors'de notre pays; en
sorte qu'on peut dire sans crainte d exagé
ration que la question soulevée par moi
intéresse surtout la monde politique.
La faveur avec laquelle cette idée a été
acoueillie, le haut et public encouragement
à persévérer qui m'a été donné dans une
récente occasion, me persuadent que le
moment est venu de mettre en CBuvre.dans
les limites de la loi,les moyens qui peuvent
en préparer efficacement la réalisation.
Il ne suffît pas que la majorité du pays
s'associe platoniquement au désir de la ré
conciliation; il est nécessaire que ce désir
ait sa légitime manifestation dans la Cham
bre élective qui est l'émanation du pays.
A cette fin, il va s'établir à Rome un co
mité central, qui, avec l'aide de comités
locaux, se propose de soutenir, dans les fu
tures élections politiques, comme candidats
à la députation,ceux qui feront de la récon
ciliation leur programme, leur bannière.
Pour donner vie à cette organisation,l'on
invite à y contribuer tous ceux qui sentent
vivant le.culte de la patrie, et particulière
ment ceux qui ont combattu pour elle.
Votre Excellence, par cela même que,
dans l'exercice de son saint ministère, elle
est, à bon droit, entourée, d'un si grand
respect et d'une estime publique si grande,
est plus qu'aucun autre à même de m'iindi
quer les noms sur lesquels il conviendrait
de faire tomber le choix, dans son diocèse,
soit pour la candidatûre à la députation,
soit pour la composition des comités lo
caux.
C'est pourquoi, avec l'entière et sincère
confiance que j'ai dans votre patriotisme et
dans le désir delà paix religieuse, queVotre
Excellence ne peut pas ne pas avoir, vous
me permettrez de m'adresser à vous pour
réclamer votre précieux et éclairé concours
en vue de la fin que nous nous proposons.
Quand l'idée de là réconciliation qui,
loin d'être incompatible avec l'intégrité de
l'Italie, est destinée à rendre plus solides
les bases de son unité, quand cette idée
aura dans la Chambre élective des repré
sentants légitimes en proportion des parti-
tisans qu'elle a déjà en grand nombre dans
la majorité du pays, il n'est pas douteux
que toute difficulté de la réaliser disparaî
tra. Et le Souverain Pontife ne tardera pas
à avoir ce qu'il estime nécessaire pour le
plein et glorieux exercice de sa haute
mission : et l'Italie pourra saluer, avec la
fin de la querelle entre l'Eglise et l'Etat,
l'aurore de son bien-être et de sa vraie
grandeur. Grandeur et bien-être qui peu
vent être aussi dans le désir de ceux qui
sont opposés à la conciliation, mais qui ne
pourront être obtenus, sinon quand il sera
donné aux Italiens de fondre et d'harmo
niser non seulements les sentiments reli
gieux avec ceux de la patrie, mais aussi
les intérêts de la Papauté avec ceux de la
monarchie.
Jusqu'ici il a été opportun de laisser le
terrain politique à la domination d'un parti,
pour amener la désillusion de ceux qui s'en
promettaient tous les bienfaits du progrès
et de la civilisation. Mais les conditions ac
tuelles de l'Italie, la grande prostration
économique dans laquelle elle se débat ne
laissent plus désormais de doute que, en
poursuivant dans cette voie, on verra croî-.
tre et s'aggraver de plus en plus les motifs
de mécontentement général.
Pour remédier à cet état de choses, le
seul changement des hommes au pouvoir
ne servirait de rien. Car, pour animés qu'ils
soient des meilleures intentions, ils sont et
seront impuissants à empêcher la confusion
politique que nous déplorons tous. Mais
cette confusion cessera, et le malaise actuel
finira, si les électeurs envoient à la Cham
bre des députés qui veulent la réconcilia
tion et qui, la voulant, rendent possible
une assiette financière proportionnée à nos
ressources, une économie da 150 millions
par an sur le budget, de nouvelles lois des
tinées à assurer le libre développement de
l'activité et de l'intelligence individuelle
sans les mille odieuses entraves qui la
paralysent aujourd'hui, et, comme couron
nement de ces avantages économiques, la
perspective des plus vastes et plus sûrs
horizons politiques.
Peut-être qu'à beaucoup cela paraîtra
une utopie.
Il n'en sera pas ainsi pour ceux qui se
confient à la haute sagesse de Léon XIII
et à son grand amour pour l'Italie.
Achille Fazzari.
Cette lettre appelle diverses obser
vations.
La première, que nous avons déjà
faite, c'est qu'il est étrange de voir
M. Fazzari prendre auprès des évêques
une pareille initiative, afin de récla
mer leur intervention «pour un mode
d'action politique dont M. Fazzari sait
à merveille que le Pape, tout récem
ment encore, a interdit l'usage aux
catholiques italiens. Il suffit de rappe
ler ce qui est advenu pour l'Unione
Romana.
Cette première observation nous
conduit à celle-ci : c'est que M. Faz
zari, qui se permet ainsi d'agir publi
quement à l encontre des recomman
dations formelles du Souverain Pon
tife, est par là-même aussi peu auto
risé que possible à vouloir faire enten
dre que, dans une récente occasion —
c'est-à-dire évidemment lors de l'en
voi de son télégramme au Pape — il a
reçu un haut et public encouragement
à persévérer. Il est nécessaire de rap
peler ici que le Pape, envoyant sa bé
nédiction à M. Fazzari en réponse à un
télégramme respectueux, ignorait
qu'en même temps M. Fazzari en
voyait un autre télégramme au roi
Humbert, détenteur à Rome des
possessions du Saint-Siège. Il est non
moins nécessaire de rappeler que la
réponse du cardinal secrétaire d'Etat,
faite au nom de Sa Sainteté, a pré
cédé la publication de la lettre où M.
Fazzari disait de son programme qu'il
ne s'attaquait nullement à l'intégrité
unitaire de l'Italie.
Une troisième observation, c'est
qu'il paraîtra bizarre que, «'adressant
à des évêques pour réclamer leur con
cours en vue de la solution d'une dif
ficulté comme celle qui consiste à
rendre ses droits de souveraineté tèm-
porelle à. la Papauté, M. Fazzari ne
fasse entrer en ligne de compte
que l'intérêt économique et bud
gétaire . Assurément, les intérêts
matériels sont à considérer, et nous
serons les derniers à contester f que
leur ruine ou leur prospérité se
rattachent étroitement aux conditions
de la vie morale d'un peuple ; mais
encore convient-il de les placer à leur
rang et, dans une question qui —
M. Fazzari a raison de le dire — inté
resse le monde entier, de ne pas
faire taire devant eux les plus hautes
raisons de morale et de justice, aux
quelles s© réfère l'obligation de resti
tuer au Pape ce dont il a été dépos
sédé.
Une dernière observation — car il
faut nous limiter — se présente avec
un caractère particulier de gravité.
Dans sa lettre-circulaire à l'épiscppat
italien, M. Fazzari fait tout spéciale
ment appel, pour lui venir en aide,
à ceux qui ont « combattu » pour
l'intégrité unitaire de l'Italie. Qu'est-
ce à dire? Et de quels combats entend
parler notre conciliateur? Il est vrai
semblable que ce sont principalement
ceux auxquels lui-même a pris part.
Or, il est bon de se rappeler que M.
Fazzari a été un combattant garibal
dien.
Tout cela nous permet de dire que
la nouvelle manifestation de M. Faz
zari n'est pas de nature à lui rendre
favorables les catholiques, qui, dans
tous les pays du monde, sont juste
ment soucieux de ne pas voir la ques
tion romaine prêter à de pareilles
équivoques. Aussi comprenons-nous à
merveille que la Voce délia Verità, fai
sant part à ses lecteurs de la nouvelle
entreprise de M.Fazzari,l'ait comparée
à ces bonnes intentions dont est pavé
l'enfer. Sous ce titre : M. Fazzari et la
conciliation , elle écrit :
M. Fazzari continue à faire résonner de
son nom les trompettes de la renommée.
Quelques journaux publient une circulaire
qn'il aurait adressée aux évêques italiens
pour que ceux-ci proposent des candidats
qu'on élirait députés afin que, dans le Par
lement, ils patronnent la conciliation entre
l'Italie et le Vatican.
Nous entendons rester étrangers à cette
nouvelle manifestation de la question ro
maine, parce qu'elle se présente sous un
aspect auxquel il n'est pas permis aux ca
tholiques italiens de prêter maintenant
ni appui, ni concours, ni faveur. Mais,nous
souvenant du proverbe connu qui dit que
certain lieu est pavé de bonnes intentions,
nous voulons faire preuve de longanimité
et nocs disons que cette nouvelle démarche
de M. Fazzari pourra fournir la preuve
de ses bonnes intentions, mais nous
croyons qu'elle ne servira pas à autre
chose.
Nous ne voudrions pas aller plus loin
que la Voce délia Verità en doutant des
bonnes intentions de M. Fazzari. Ce
pendant nous devons noter que, pressé
de dire si son programme de l'inté
grité unitaire de l'Italie comportait
un retranchement de quelque partie
de son unité actuelle, ce qui est indis
pensable pour assurer la souveraineté
temporelle du Pape, proclamée par
Léon XIII nécessaire au libre exer
cice de son pouvoir spirituel, M. Faz
zari a fait obstinément silence. Ce que
nous constatons encore, c'est que,pour
l'exécution d'un programme que ce
silence rend suspect, M.Fazzari préco
nise un mode d'action blâmé par le
Pape.
C'est plus qu'il n'en faut pour met
tre en garde les catholiques contre les
nouveaux agissements du conciliateur
italien.
Auguste Roussel.
Sur la foi d'une dépêche de Berlin
adressée au Journal des Débats , la plu
part des journaux ont annoncé depuis
deux jours la mort de S. Em. le car
dinal Ledochowski et publié des né
crologies de l'éminent prince de l'E
glise.
Or, il est vrai que S. Em. le cardinal
Ledochowski a été très gravement
malade et que son état inspire tou
jours de grandes inquiétudes. Néan
moins, aux dernières nouvelles, on
signalait un peu d'amélioration. Des
prières se font partout à Rome pour
la guérison de l'illustre prélat.
Les abonnements partent des 1" et <3 c*o chaque mois
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
ANNONCES
iMM. Ch. LAGRANGE, CERF et C le , 6, place de la Bourse
il y a cent ans ; mais en cela la France est
encore plus victime que coupable.
Nous espérons que Dieu viendra confon
dre et humilier, les blasphémateurs et les
impies; qu'il les confonde, sans confotjdrtf
et humilier la France, c'est notre désir ét
notre espérance. ~ ,
Après l'Eglise, le cœur catholique songe
d'abord à la France, Les destinées de
l'Eglise et de la Franco paraissent unies
dans le plan de Dieu. Elles marchent en
semble dans la gloire ou dans l'épreuve.
Poiir les peuples d'Orient, les chrétiens,
c'étaient les Francs; et si les Francs
étaient humiliés, les musulmans relevaient
la tête, raillaient et persécutaient les chré
tiens. .
Plus ou moins, dans tout l'univers, a
passé le mot des Orientaux. Les chrétièns,
ce sont les Francs, et plus n'est besoin d al
ler en Orient pour voir les enaemis du
Christ relever la tôle quand la France est
humiliée. (
Sans être prophète, mais prévoyant l a-
venir d'après les leçons de l'histoire, nous
disons avec confianoe que la France gar
dera sa position historique et traditioiielle.
Elle restera au premier rang, si elle re
jette tous les restes d'erreur qui demeurent
en elle, du jansénisme, du gallicanisme,
du libéralisme.
Tout le poison de ess erreurs est contenu
dans ces fameux principes de 89 ; sur ces
principes, il existe une grande confusion
d'idées, et les prêtres doivent s'appliquer à
la faire disparaître.
C j qu'ils .ont do bon est ancien et se
trouva dans l'Evangile et la tradition ca
tholique.
Ce qu'ils ont de nouveau et leur appar
tient en propre est faux, mauvais, funeste. 1
C'est le protestantisme porté à ses der
nières conséquences, la société catholique
brisée, l'individualisme établi partout
l'homme divisé, coupé, ne trouvant plus ni
ses pieds ni sa tête.
Qu'on ne nous accuse donc pas de rejeter
la liberlé et d'aimer l'autocratie, comme à.
Saint Pétersbourg. Saint-Pétersbourg, je
le veux ec je l'approuve quand il tend la
main à l'Eglise ; je le veux et je l'approuva
quand il dit à la France : Restez debout 1
Mais s'il veut slavofier tous les peuples, ja
n'en veux -pas et je ne veux pas non plus de
son autocratie.
Mais pour caresser les principes de 89,
non jamais 1 Comme des bêtes l'anves ils
nous dévoreraient. Non, pour sauver la so
ciété, n'affaiblissons pas la vérité, ne tra
hissons pas les principes ; nous ferions
comme des hommes qnivoudraient changer
les mathématiques ponr sauver certains
budgets en péril de naufrage. La vérité
théologique, philosophique, est immuable
comme la vérité mathématique.
Affirmons d'abord et hautement la vérité;
et, la vérité sauve, nous pourrons recon
naître la liberté et tolérer même ses fai
blesses.
De la vérité naîtront la sagesse, la pru
dence et la charité, et elles feront le reste ;
car celui qui se pénètre de la vérité, se
rapproche de Dieu ; et celui qui se rap«
proche de Dieu, se .rapproche des honi*
Les Principes de 1789
La Semaine religieuse du Puy rap
porte, d'après le Bulletin catholique de
Rayonne le résumé des considérations
exposées par S. Em. le cardinal Pa-
rocchi, vicaire de Sa Sainteté, le 23
décembre 1888, pendant sa visite au
séminaire français dont Son Eminen-
ce est protecteur, en réponse à une
adresse qui lui était présentée par le
doyen des élèves du séminaire.
Voici ce remarquable exposé :
L'année 1888, a dit Son Eminence, a
été pour l'Eglise l'année des joies et du
triomphe, l'année de l'hosanna universel.
En 1889 aurons nous les tristes spectacles
du Vendredi-Saint?
Eu Italie, hélas! le Vendredi Saint vien
dra peut-être avant le nouvel an; et sur
les théâtres de Rome, la personne sacrée
de Notre-Seigneur Jésus-Christ.sera sif-
flée, crucifiée de nouveau, dans un drame
impie, infâme.
En France, les sectes s'agitent et veu
lent achever cette Révolution commencée
mes.
Succès
des écoles professionnelles catholiques
dans le passé ;
Jugements de nos adversaires en cette matière.
— L'esprit religieux et artistique des ouvriers
du moyen âge. — Leur supériorité sur les
artisans d'aujourd'hui s'affirme dans l'orfè
vrerie, dans Ja menuiserie, dans la serrurerie,
dans la sculpture, la peinture sur verre et
l'écriture. — Supériorité des . maî'rcs. Ils
créent un genre national fécond en résultats
pratiques. — Conclusion.
Cet article, ainsi que le suivant, est
destiné à combattre deux sortes d'ad
versaires, également obstinés contre
l'Eglise. Lès premiers appartiennent
à l'école de MM. Ferry, Lockroy et
Spuller. Leur tactique consiste à taire
nos succès dans le passé et à calom
nier nos intentions dans le présent.
(Voir la collection du journal la Répu
blique française ; articles au jour le
jour.) Les seconds appartiennent à
l'école universitaire, représentée par
M. Renan. Ces derniers louent volon
tiers le moyen âge et accordent satis
faction à l'Eglise pour les services
d'autrefois. Ils nous refusent dans le
présent toute espèce de compétence
pédagogique, pour en réserver la pos
session aux seuls professeurs de l'E
tat. (Le Parti national , 11 août 1888 :
Discours de M. Renan à Lannion.)
Nous allons voir ce qu'il faut penser
de semblables jugements.
On peut diviser l'histoire de nos
écoles professionnelles en deux pério
des distinctes : l'une qui s'étend du
neuvième au quatorzième siècle. (Viol-
let-le-Duc, Dictionnaire historique, tome
I, pages 242-300 ; Léon Maître, Ecoles
épiscopales et monastiques.) L'autre qui
commence vers l'an 1699, c'est-à-dire
à l'époque même de la fondation de
l'Académie chrétienne du vénérable
de la Salle, et qui se continue jusqu'à
nous. ( Annales de l'Institut des Frères
des Ecoles chrétiennes. T. I et II.) Ces.
deux périodes sont également riches
en résultats féconds.
Première période. — Lorsqu'on étu
die un détail quelconque, pris dans
cette merveilleuse unité de l'art chré
tien au moyen âge, on reconnaît im
médiatement la préoccupation souve
raine de l'ouvrier qui s'attache à re
produire l'idéal. Même dans les mo
numents primitifs, on rencontre un
sentiment protond qui s'efforce de
vaincre une matièrerehelle à la forme.
L'expression finit par triompher au
douzième siècle; au treizième siècle,
elle atteint une perfection qui n'a
jamais été dépassée depuis. Il ne faut
pas en être surpris : les maîtres et les
élèves de nos écoles monastiques n'é
pargnaient ni soins ni peines. Ce n'é
taient pas, comme aujourd'hui, des fa
bricants intéressés, des artistes même
épris de leur œuvre; c'étaient des
N* 7714 — Editionquotlâïenn#
Dimanche 10 Février 1889
tasm
ÉDITION QUOTIDIENNE
ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNE
paris
ET DÉPARTEMENT*
Un an. . . 55 »
Six mois. ... 2850
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ETRANGER
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BUREAUX : Paris, 10, rue des Saints-Pères
On »'abonno à Rome, place du Gesît, 8
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, . 30 »
. . 16 »
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étranger
(UNION POSTALE)
36 »
19 »
10 »
francs
PARIS, l> FEVRIER 1889
, L'olympien Floquet va de nouveau
jouer son « va-tout » ; il le jouera mê
me trois fois, disent des journaux bien
uuormés: une première fois aujour-
d. nui même sur la question de priorité
•entre le scrutin d'arrondissement et
|a revision; une deuxième fois pour
1 adoption du scrutin uninominal ; une
troisième fois" pour sa revision, qu'il
prétend imposer telle qu'elle est. Quel
terrible homme, et comme il sait que
les opportunistes n'oseront pas, malgré
leur haine et leurs convoitises, le ren
verser en ce moment !
Cependant la revision pourrait ne
pas marcher toute seule; les oppor
tunistes continuent à déclarer qu'ils
n en veulent à aucun prix. II est vrai
que des paroles aux actes il y a loin,
surtout chez eux.
Après avoir entendu M. Floquet, la
commission du scrutin uninominal a
maintenu son vote en faveur du projet
ministériel : c'était prévu. Le rappor
teur est M. Thomson, qui déposera
son rapport aujourd'hui même.
Dans ses explications, M. Floquet a
avoué que le ministère avait vaine
ment cherché un moyen de s'opposer
aux candidatures multiples ; il n'en a
pas trouvé. Il a déclaré que, s'il pro
posait maintenant le scrutin uninomi-
aial, après avoir jadis défendu le scru
tin de liste, c'est qu'il avait acquis la
conviction que l'opinion républicaine
se prononçait pour celui-là contre
celui-ci. Cette plaisanterie était inu
tile; personne n'ignore que le scrutin
'd'arrondissement est repris unique
ment par peur du général Boulanger.
Aujourd'hui, l'ordre du jour de la
Chambre des députés porte la suite de
la discussion du projet de M. Yves
Guyot supprimant les octrois; mais on
attend le dépôt du budget de 1890 par
M. Peytral, et surtout les deux rap
porte de MM. Tony Révillon sur la
révision,_ et Thomson sut le scrutin
■d'arrondissement ; on compte bien que
la bataille s'engagera immédiatement
au sujet de la priorité à donner à l'un
des rapports. Cela pourra être vif.
Le ministre de la guerre a pris occa-
. sion de récents incidents pour adres
ser aux commandants de corps d'ar
mée une circulaire importante, dont;
on trouvera le texte plus loin. Dans
cette circulaire, M. de Freycinet rap
pelle que les « manifestations poli
tiques » sont formellement interdites
aux officiers ; il exprime l'espoir qu'il'
ne se produira plus de ces actes regret
tables, contre lesquels il est obligé de
sévir. Cette circulaire vise l'ordre du
jour du colonel Sénart, et peut-être
aussi, sans qcie le ministre ose l'avouer,
le discours maçonnique et antiboulan-
giste du général Riu.
Demain a lieu le ballottage de la
Côte-d'Or; deux candidats sont en pré
sence : M. Toussaint, conservateur et
révisionniste, et M. Bargy, le républi
cain dont nos lecteurs n'auront pas
oublié les odieuses déclarations. S'il
y avait réellement des modérés dans
le parti républicain, ils ne voteraient
à aucun prix pour ce Bargy.
De nouvelles et significatives mani
festations ont eu lieu à Rome hier;
elles viennent à l'appui des renseigne
ments que nous donnait notre corres
pondant sur la crise économique que
traverse l'Italie. Ce sont réellement les
« manifestations de la misère ».
Et pendant ce temps-là, M. Crispi
songe à augmenter les impôts pou?
arriver à équilibrer un budget hors de
proportion avec les ressources réelles
de l'Italie.
Voiries DERNIERES NOUVELLES à la fin
Le socialisme d'Etat
Il est difficile de répondre à cette
question : Quel doit être dans l'Etat le
régime du travail? M. Claudio Jannet
nous dit avec raison : La liberté!
Mais ici même, nous nous trouvons
fort embarrassés. Vivons-nous sous le
régime delà liberté du travail ? Faut-il
prendre au pied de la lettre la liberté
que nous a octroyée la Révolution, et
croire que le régime des anciennes
corporations était contraire à la li
berté ? Il nous semble que la liberté
du travail n'est que la liberté des tra
vailleurs, leur droit de s'assembler, de
délibérer, d'établir des règlements
pour tout ce qui concerne leur profes
sion. A ce point de vue, les corpora
tions d'arts et métiers constituaient
l'autonomie de la classe, ouvrière, et
la rattachaient à l'ordre social. Aussi
les politiciens de 89 commencèrent
par s'attaquer aux corporations. La
classe ouvrière protesta, et la preuve
en est qu'il y eut encore plus d'ou
vriers guillotinés que de nobles ou de
prêtres.
La liberté n'est assurément pas le
droit de sans lois et en anar
chie, (j'est cependant ainsi que la
Révolution a compris la liberté.
La classe ouvrière a été révolu
tionnée, et aujourd'hui les anar
chistes comptent sur elle. Il y a un
siècle que les honnêtes gens se plai
gnent de la part restreinte qui leur est
faite au nom de la liberté. A-t-on vu
les amateurs de la « liberté de cons
cience » respecter la conscience des
catholiques ? Les libres-penseurs souf
frent-ils que les catholiques prennent
la liberté de penser q-ue le catholi
cisme est la vraie religion? Quant
aux libertés politiques, elles se rédui
sent à obéir à des gouvernements is
sus de l'émeute. Ceux qui sous la Res
tauration prenaient la qualification
de libéraux ont toujours voté pour le
renversement des gouvernements déjà
bien suffisamment révolutionnaires.
Tout ce qui s'est abrité sous le nom de
liberté a toujours été révolutionnaire.
Et les efforts des honnêtes gens ont
été jusqu'à présent impuissants à po
pulariser quelques honnêtes libertés.
M. Claudio Jannet combat avec vi
gueur le socialisme d'Etat, c'est le but
du grand ouvrage qu'il vient de pu
blier (1). Y a-t-il donc un autre socia
lisme que le socialisme d'Etat? L'Etat
est la seule puissance contre laquelle
la lutte soit impossible; sous quelque
forme que se présente la culture ou le
métier, elle est restrëinte, locale. Les
corporations sont de droit naturel,
puisque l'association est naturelle à
l'homme. Le législateur moderne dé
fend les Français contre le penchant
de la nature, et sous prétexte de li
berté, il leur interdit de sortir de l'in
dividualisme. C'est du socialisme d'E
tat au premier chef. Il est évident qu'à
un moment donné tous les individus,
mécontents de leur sort, diront à l'E
tat: Nourrissez-nous,et nous travaille
rons pour vous. C'est la tendance du
socialisme ouvrier.
Le seul obstacle au socialisme d'Etat
et à toute idée de socialisme, c'est le
droit d'association qui, se diversifiant
selon les localités, les goûts, les inté
rêts, les professions, assure à l'indi
vidu la protection d'un groupe puis
sant, et à l'Etat des centres nombreux
d'action et de résistance 1 » : quelques
personnes se méprennent en prenant
l'individualisme pour l'opposé du so
cialisme. La vérité est que l'indivi
dualisme français est sorti des mains
de socialistes qui ont constitué l'État
omnipotent. Et n'est-ce pas là le prin
cipe du socialisme? Le droit de la pro
priété,de la conscience a-t-il arrêté les
régénérateurs de 1789? Et aujourd'hui
arrête-t-il leurs successeurs ? Nous
sommes donc en plein socialisme par
l'intrusion de l'Etat dans toutes les
familles, par le droit qu'il usurpe de
légiférer sur tout. L'individualisme,
qui nous rend impuissants, accroît
démesurément la puissance de l'Etat.
Et l'Etat fondé sur des illusions de
liberté aboutit à la servitude univer
selle.
Cette liberté entendue dans le sens
de l'individualisme est favorable à
l'aliénabilité de là terre. Le problème
est compliqué. Mais les deux tiers
de l'espèce humaine ont intérêt à l'ina-
liénabilité, à la stabilité du foyer. Est-
ce que la famille n'est pas capable du
droit de propriété ? A sa perpétuité ré
pond la perpétuité du bien de famille.
La femme et les enfants ne sont-ils pas
les premiers créanciers du mari et du
père ?. Pourquoi cette dette ne serait-
elle pas garantie par la perpétuité, l'i-
naliénabilité du foyer domestique ? La
loi moderne sacrifie la femme et les
enfants ; leur individualité, par elle-
même incapable de se défendre, est
dépouillée de protection légale. Elle
s'absorbe dans la personne du mari et
du père.
L'aliénabilité du sol a pour objet la
fixalité; elle en a un autre, qui est
le principal, c'est de maintenir la po
pulation en état de révolution. Si 1 on
croit que la société a un autre but,
on l'envisagera différemment. La sub
sistance d'une nation est son intérêt
capital. L'agriculture prospère-t-elle
avec des familles instables, endettées,
aux expédients pour vivre ? Les lois
qui protègent la culture sont d'ordre
social. On a changé tout cela en 89.
C'est ce qu'on a appelé la libérté du
sol. Au fond, ce n'était que la liberté
reconnue aux manieurs d'argent et
usuriers de spéculer sur le sol, en y
entretenant une agitation révolution
naire. En quoi, on a réussi, en France
du moins, où la population, autrefois
si attachée à l'ordre, est devenue l'es
poir des politiciens du socialisme.
Le développement de l'industrie a
jeté l'Europe et particulièrement la
France dans une crise violente. Le
commerce, l'échange est devenu non
plus une question nationale, mais une
question universelle. Le libre-échange
a mis chaque nation en concurrence
avec toutes les autres, et a partout
surexcité le travail. Au lieu de s'ar
rêter, les économistes ont poussé en
avant et ont demandé à la France de
travailler encore davantage. L'ouvrier
moderne travaille plus que l'esclave
antique. Est-il plus libre quand il est
talonné par la difficulté de vivre et
par l'impossibilité d'élever une fa
mille ? Une des raisons pour lesquelles
l'Angleterre espère dominer la con-
(1) Le Socialisme d'Etat et la Réforme sociale,
par Claudio Jannet, professeur d'économie po
litique à l'Institut catholique de Paris. 1 vol,,
ehez Pion, rua Garancière, 10j
currence, c'est que ses ouvriers sont
libres et ne subissent pas la servitude
militaire. Ils en subissent une autre,
celle des travaux forcés.
La politique et la guerre n'avaient
pu mêler les peuples; cette opération
s'accomplit par le libre-échange; dé
sormais la question internationale pri
mera les questions nationales. Les na
tionalités s'effondrent dans le genre
humain. Des ligues de peuples, un
empire universel s'annoncent. La ra
pidité des communications rend tout
possible. Ceux qui ne sont pas philan
thropes, et ne se posent pas en amis
du genre humain, pensent à la France
et se demandent ce qu'elle deviendra.
L'empire universel est le rêve du so
cialisme extrême; le mélange, la fu
sion des peuples est le résultat du
commerce universel. L'individualisme
français donne la main à ce socialisme.
Et le" socialisme d'Etat, tant prôné en
France,nous y achemine rapidement.
Ce n'est pas que l'empire universel
soit réalisable, mais sur la route bien
des nationalités peuvent perdre leur
nom. Nous disons cela pour les natio
nalités à gouvernement instable. Pour
la France, la question est tout inté
rieure. Nous devons coloniser ou cul
tiver notre pays, avant de fonder des
colonies avec des fonctionnaires pu
blics. La question sociale~ne dépasse
pas nos frontières ; elle est, dans ces
limites, suffisamment ardue.
Tout ce qui touche au socialisme
d'Etat et aux réformes sociales est trai
té par M. Claudio Jannet avec une rare
supériorité. Il nous initie aux efforts
tentés dans cet ordre de faits en An-
pleterre, aux Etats-Unis, en Allema
gne, en Autriche. Il nous décrit le mé
canisme des institutions en juriscon
sulte qui en a pénétré le sens intime.
Il nous donne les plus précieux ren
seignements sur la législation fran
çaise et sur les réformes qui nécessi
teraient quelques modifications du
code civil. Cette réforme du code ci
vil ne peut arriver qu'après de grands
changements dans les mœurs et les
idées. La France, comme l'Italie, est
entraînée dans le courant de la
Révolution française. Le Midi [de
l'Europe,qui formait autrefois les prin
cipales provinces de l'empire médi
terranéen fondé par les Romains, pen
che vers l'individualisme et la révolu
tion, tandis que les races qui n'ont
pas été touchées par la loi romaine
restent fidèles au principe d'associa
tion et de gouvernement. D'ailleurs,
le gouvernement n'est qu'une consé
quence naturelle du principe d'asso
ciation. Les associations de culture et
de travail sont pour les classes labo
rieuses la vraie liberté politique. Et
c'est par là que de grands gouverne
ments essaient de s'attacher les popu
lations. Les Allemands ont déjà opéré
en Alsace-Lorraine des réformes favo
rables aux classes populaires.. La so
ciété d'Economie sociale, qui les prêche
depuis si longtemps n!a pu rien obte
nir. Ces réformes sont cependant mo
destes ; mais elles sont un arrêt
dans la révolution : espérons que M.
Claudio Jannet, par son travail si
consciencieux, si savant, aura plus de
succès.
Coquille.
La question de la suppression des
traitements ecclésiastiques, si com-
plaisamment résolue par le conseil
d'Etat dans le sens des prétentions
des gens du pouvoir, a encore pour
beaucoup de diocèses un intérêt très
pratique, quoique les mesures qui at
teignent les prêtres dans leurs moyens
d'existence ^soient un peu moins fré
quentes qu'il y a quelques années.
Ainsi le seul diocèse de Viviers
compte encore douze prêtres privés de
traitement par décision ministérielle.
M. de Freycinet vient d'adresser aux
commandants de corps d'armée la cir
culaire suivante, qui rappelle Tinter-
diction, faite depuis longtemps, aux
militaires de toute « manifestation po
litique » :
ministère de la guerre
Paris, 8 février 1889.
La ministre de la guerre
& MM. les gouverneurs militaires de Paris
et de Lyon,
les généraux commandant les corps
d'armée.
Mon cher général,
Je vous prie de rappeler aux militaires
sous vos ordres que les manifestations po
litiques, de quelque nature qu'elles soient,
sont formellement interdites.
Les chefs, lorsqu'ils s'adressent à leurs
troupes, verbalement ou par écrit, doivent
s'abstenir de toute allusion à la politique,
soit intérieure, soit extérieure.
J'ai réprimé les rares écarts qui se sont
produits; je réprimerai plus sévèrement en
core ceux qui viendraient à se produire par
la suite. Je compte sur le bon esprit de
tous pour m'éviter des mesures que je
prendrais à regret, mais sans hésiter.
G. de Freycinet.
Les idées de M. Fazzari
Voici la circulaire que M. Fazzari
vient d'adresser aux évêques d'Italie :
Rome, 2 février.
Excellence Révérendissime,
Le programme de la réconciliation entre
l'Etat et l'Eglise, au nom duquel plus de
10,000 électeurs dans l'un des collèges les
plus libéraux d'Italie m'ont élu député, non
seulement a été discuté par les Italiens de
tous les partis, mais il a eu encore un très
large écho en dehors'de notre pays; en
sorte qu'on peut dire sans crainte d exagé
ration que la question soulevée par moi
intéresse surtout la monde politique.
La faveur avec laquelle cette idée a été
acoueillie, le haut et public encouragement
à persévérer qui m'a été donné dans une
récente occasion, me persuadent que le
moment est venu de mettre en CBuvre.dans
les limites de la loi,les moyens qui peuvent
en préparer efficacement la réalisation.
Il ne suffît pas que la majorité du pays
s'associe platoniquement au désir de la ré
conciliation; il est nécessaire que ce désir
ait sa légitime manifestation dans la Cham
bre élective qui est l'émanation du pays.
A cette fin, il va s'établir à Rome un co
mité central, qui, avec l'aide de comités
locaux, se propose de soutenir, dans les fu
tures élections politiques, comme candidats
à la députation,ceux qui feront de la récon
ciliation leur programme, leur bannière.
Pour donner vie à cette organisation,l'on
invite à y contribuer tous ceux qui sentent
vivant le.culte de la patrie, et particulière
ment ceux qui ont combattu pour elle.
Votre Excellence, par cela même que,
dans l'exercice de son saint ministère, elle
est, à bon droit, entourée, d'un si grand
respect et d'une estime publique si grande,
est plus qu'aucun autre à même de m'iindi
quer les noms sur lesquels il conviendrait
de faire tomber le choix, dans son diocèse,
soit pour la candidatûre à la députation,
soit pour la composition des comités lo
caux.
C'est pourquoi, avec l'entière et sincère
confiance que j'ai dans votre patriotisme et
dans le désir delà paix religieuse, queVotre
Excellence ne peut pas ne pas avoir, vous
me permettrez de m'adresser à vous pour
réclamer votre précieux et éclairé concours
en vue de la fin que nous nous proposons.
Quand l'idée de là réconciliation qui,
loin d'être incompatible avec l'intégrité de
l'Italie, est destinée à rendre plus solides
les bases de son unité, quand cette idée
aura dans la Chambre élective des repré
sentants légitimes en proportion des parti-
tisans qu'elle a déjà en grand nombre dans
la majorité du pays, il n'est pas douteux
que toute difficulté de la réaliser disparaî
tra. Et le Souverain Pontife ne tardera pas
à avoir ce qu'il estime nécessaire pour le
plein et glorieux exercice de sa haute
mission : et l'Italie pourra saluer, avec la
fin de la querelle entre l'Eglise et l'Etat,
l'aurore de son bien-être et de sa vraie
grandeur. Grandeur et bien-être qui peu
vent être aussi dans le désir de ceux qui
sont opposés à la conciliation, mais qui ne
pourront être obtenus, sinon quand il sera
donné aux Italiens de fondre et d'harmo
niser non seulements les sentiments reli
gieux avec ceux de la patrie, mais aussi
les intérêts de la Papauté avec ceux de la
monarchie.
Jusqu'ici il a été opportun de laisser le
terrain politique à la domination d'un parti,
pour amener la désillusion de ceux qui s'en
promettaient tous les bienfaits du progrès
et de la civilisation. Mais les conditions ac
tuelles de l'Italie, la grande prostration
économique dans laquelle elle se débat ne
laissent plus désormais de doute que, en
poursuivant dans cette voie, on verra croî-.
tre et s'aggraver de plus en plus les motifs
de mécontentement général.
Pour remédier à cet état de choses, le
seul changement des hommes au pouvoir
ne servirait de rien. Car, pour animés qu'ils
soient des meilleures intentions, ils sont et
seront impuissants à empêcher la confusion
politique que nous déplorons tous. Mais
cette confusion cessera, et le malaise actuel
finira, si les électeurs envoient à la Cham
bre des députés qui veulent la réconcilia
tion et qui, la voulant, rendent possible
une assiette financière proportionnée à nos
ressources, une économie da 150 millions
par an sur le budget, de nouvelles lois des
tinées à assurer le libre développement de
l'activité et de l'intelligence individuelle
sans les mille odieuses entraves qui la
paralysent aujourd'hui, et, comme couron
nement de ces avantages économiques, la
perspective des plus vastes et plus sûrs
horizons politiques.
Peut-être qu'à beaucoup cela paraîtra
une utopie.
Il n'en sera pas ainsi pour ceux qui se
confient à la haute sagesse de Léon XIII
et à son grand amour pour l'Italie.
Achille Fazzari.
Cette lettre appelle diverses obser
vations.
La première, que nous avons déjà
faite, c'est qu'il est étrange de voir
M. Fazzari prendre auprès des évêques
une pareille initiative, afin de récla
mer leur intervention «pour un mode
d'action politique dont M. Fazzari sait
à merveille que le Pape, tout récem
ment encore, a interdit l'usage aux
catholiques italiens. Il suffit de rappe
ler ce qui est advenu pour l'Unione
Romana.
Cette première observation nous
conduit à celle-ci : c'est que M. Faz
zari, qui se permet ainsi d'agir publi
quement à l encontre des recomman
dations formelles du Souverain Pon
tife, est par là-même aussi peu auto
risé que possible à vouloir faire enten
dre que, dans une récente occasion —
c'est-à-dire évidemment lors de l'en
voi de son télégramme au Pape — il a
reçu un haut et public encouragement
à persévérer. Il est nécessaire de rap
peler ici que le Pape, envoyant sa bé
nédiction à M. Fazzari en réponse à un
télégramme respectueux, ignorait
qu'en même temps M. Fazzari en
voyait un autre télégramme au roi
Humbert, détenteur à Rome des
possessions du Saint-Siège. Il est non
moins nécessaire de rappeler que la
réponse du cardinal secrétaire d'Etat,
faite au nom de Sa Sainteté, a pré
cédé la publication de la lettre où M.
Fazzari disait de son programme qu'il
ne s'attaquait nullement à l'intégrité
unitaire de l'Italie.
Une troisième observation, c'est
qu'il paraîtra bizarre que, «'adressant
à des évêques pour réclamer leur con
cours en vue de la solution d'une dif
ficulté comme celle qui consiste à
rendre ses droits de souveraineté tèm-
porelle à. la Papauté, M. Fazzari ne
fasse entrer en ligne de compte
que l'intérêt économique et bud
gétaire . Assurément, les intérêts
matériels sont à considérer, et nous
serons les derniers à contester f que
leur ruine ou leur prospérité se
rattachent étroitement aux conditions
de la vie morale d'un peuple ; mais
encore convient-il de les placer à leur
rang et, dans une question qui —
M. Fazzari a raison de le dire — inté
resse le monde entier, de ne pas
faire taire devant eux les plus hautes
raisons de morale et de justice, aux
quelles s© réfère l'obligation de resti
tuer au Pape ce dont il a été dépos
sédé.
Une dernière observation — car il
faut nous limiter — se présente avec
un caractère particulier de gravité.
Dans sa lettre-circulaire à l'épiscppat
italien, M. Fazzari fait tout spéciale
ment appel, pour lui venir en aide,
à ceux qui ont « combattu » pour
l'intégrité unitaire de l'Italie. Qu'est-
ce à dire? Et de quels combats entend
parler notre conciliateur? Il est vrai
semblable que ce sont principalement
ceux auxquels lui-même a pris part.
Or, il est bon de se rappeler que M.
Fazzari a été un combattant garibal
dien.
Tout cela nous permet de dire que
la nouvelle manifestation de M. Faz
zari n'est pas de nature à lui rendre
favorables les catholiques, qui, dans
tous les pays du monde, sont juste
ment soucieux de ne pas voir la ques
tion romaine prêter à de pareilles
équivoques. Aussi comprenons-nous à
merveille que la Voce délia Verità, fai
sant part à ses lecteurs de la nouvelle
entreprise de M.Fazzari,l'ait comparée
à ces bonnes intentions dont est pavé
l'enfer. Sous ce titre : M. Fazzari et la
conciliation , elle écrit :
M. Fazzari continue à faire résonner de
son nom les trompettes de la renommée.
Quelques journaux publient une circulaire
qn'il aurait adressée aux évêques italiens
pour que ceux-ci proposent des candidats
qu'on élirait députés afin que, dans le Par
lement, ils patronnent la conciliation entre
l'Italie et le Vatican.
Nous entendons rester étrangers à cette
nouvelle manifestation de la question ro
maine, parce qu'elle se présente sous un
aspect auxquel il n'est pas permis aux ca
tholiques italiens de prêter maintenant
ni appui, ni concours, ni faveur. Mais,nous
souvenant du proverbe connu qui dit que
certain lieu est pavé de bonnes intentions,
nous voulons faire preuve de longanimité
et nocs disons que cette nouvelle démarche
de M. Fazzari pourra fournir la preuve
de ses bonnes intentions, mais nous
croyons qu'elle ne servira pas à autre
chose.
Nous ne voudrions pas aller plus loin
que la Voce délia Verità en doutant des
bonnes intentions de M. Fazzari. Ce
pendant nous devons noter que, pressé
de dire si son programme de l'inté
grité unitaire de l'Italie comportait
un retranchement de quelque partie
de son unité actuelle, ce qui est indis
pensable pour assurer la souveraineté
temporelle du Pape, proclamée par
Léon XIII nécessaire au libre exer
cice de son pouvoir spirituel, M. Faz
zari a fait obstinément silence. Ce que
nous constatons encore, c'est que,pour
l'exécution d'un programme que ce
silence rend suspect, M.Fazzari préco
nise un mode d'action blâmé par le
Pape.
C'est plus qu'il n'en faut pour met
tre en garde les catholiques contre les
nouveaux agissements du conciliateur
italien.
Auguste Roussel.
Sur la foi d'une dépêche de Berlin
adressée au Journal des Débats , la plu
part des journaux ont annoncé depuis
deux jours la mort de S. Em. le car
dinal Ledochowski et publié des né
crologies de l'éminent prince de l'E
glise.
Or, il est vrai que S. Em. le cardinal
Ledochowski a été très gravement
malade et que son état inspire tou
jours de grandes inquiétudes. Néan
moins, aux dernières nouvelles, on
signalait un peu d'amélioration. Des
prières se font partout à Rome pour
la guérison de l'illustre prélat.
Les abonnements partent des 1" et <3 c*o chaque mois
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
ANNONCES
iMM. Ch. LAGRANGE, CERF et C le , 6, place de la Bourse
il y a cent ans ; mais en cela la France est
encore plus victime que coupable.
Nous espérons que Dieu viendra confon
dre et humilier, les blasphémateurs et les
impies; qu'il les confonde, sans confotjdrtf
et humilier la France, c'est notre désir ét
notre espérance. ~ ,
Après l'Eglise, le cœur catholique songe
d'abord à la France, Les destinées de
l'Eglise et de la Franco paraissent unies
dans le plan de Dieu. Elles marchent en
semble dans la gloire ou dans l'épreuve.
Poiir les peuples d'Orient, les chrétiens,
c'étaient les Francs; et si les Francs
étaient humiliés, les musulmans relevaient
la tête, raillaient et persécutaient les chré
tiens. .
Plus ou moins, dans tout l'univers, a
passé le mot des Orientaux. Les chrétièns,
ce sont les Francs, et plus n'est besoin d al
ler en Orient pour voir les enaemis du
Christ relever la tôle quand la France est
humiliée. (
Sans être prophète, mais prévoyant l a-
venir d'après les leçons de l'histoire, nous
disons avec confianoe que la France gar
dera sa position historique et traditioiielle.
Elle restera au premier rang, si elle re
jette tous les restes d'erreur qui demeurent
en elle, du jansénisme, du gallicanisme,
du libéralisme.
Tout le poison de ess erreurs est contenu
dans ces fameux principes de 89 ; sur ces
principes, il existe une grande confusion
d'idées, et les prêtres doivent s'appliquer à
la faire disparaître.
C j qu'ils .ont do bon est ancien et se
trouva dans l'Evangile et la tradition ca
tholique.
Ce qu'ils ont de nouveau et leur appar
tient en propre est faux, mauvais, funeste. 1
C'est le protestantisme porté à ses der
nières conséquences, la société catholique
brisée, l'individualisme établi partout
l'homme divisé, coupé, ne trouvant plus ni
ses pieds ni sa tête.
Qu'on ne nous accuse donc pas de rejeter
la liberlé et d'aimer l'autocratie, comme à.
Saint Pétersbourg. Saint-Pétersbourg, je
le veux ec je l'approuve quand il tend la
main à l'Eglise ; je le veux et je l'approuva
quand il dit à la France : Restez debout 1
Mais s'il veut slavofier tous les peuples, ja
n'en veux -pas et je ne veux pas non plus de
son autocratie.
Mais pour caresser les principes de 89,
non jamais 1 Comme des bêtes l'anves ils
nous dévoreraient. Non, pour sauver la so
ciété, n'affaiblissons pas la vérité, ne tra
hissons pas les principes ; nous ferions
comme des hommes qnivoudraient changer
les mathématiques ponr sauver certains
budgets en péril de naufrage. La vérité
théologique, philosophique, est immuable
comme la vérité mathématique.
Affirmons d'abord et hautement la vérité;
et, la vérité sauve, nous pourrons recon
naître la liberté et tolérer même ses fai
blesses.
De la vérité naîtront la sagesse, la pru
dence et la charité, et elles feront le reste ;
car celui qui se pénètre de la vérité, se
rapproche de Dieu ; et celui qui se rap«
proche de Dieu, se .rapproche des honi*
Les Principes de 1789
La Semaine religieuse du Puy rap
porte, d'après le Bulletin catholique de
Rayonne le résumé des considérations
exposées par S. Em. le cardinal Pa-
rocchi, vicaire de Sa Sainteté, le 23
décembre 1888, pendant sa visite au
séminaire français dont Son Eminen-
ce est protecteur, en réponse à une
adresse qui lui était présentée par le
doyen des élèves du séminaire.
Voici ce remarquable exposé :
L'année 1888, a dit Son Eminence, a
été pour l'Eglise l'année des joies et du
triomphe, l'année de l'hosanna universel.
En 1889 aurons nous les tristes spectacles
du Vendredi-Saint?
Eu Italie, hélas! le Vendredi Saint vien
dra peut-être avant le nouvel an; et sur
les théâtres de Rome, la personne sacrée
de Notre-Seigneur Jésus-Christ.sera sif-
flée, crucifiée de nouveau, dans un drame
impie, infâme.
En France, les sectes s'agitent et veu
lent achever cette Révolution commencée
mes.
Succès
des écoles professionnelles catholiques
dans le passé ;
Jugements de nos adversaires en cette matière.
— L'esprit religieux et artistique des ouvriers
du moyen âge. — Leur supériorité sur les
artisans d'aujourd'hui s'affirme dans l'orfè
vrerie, dans Ja menuiserie, dans la serrurerie,
dans la sculpture, la peinture sur verre et
l'écriture. — Supériorité des . maî'rcs. Ils
créent un genre national fécond en résultats
pratiques. — Conclusion.
Cet article, ainsi que le suivant, est
destiné à combattre deux sortes d'ad
versaires, également obstinés contre
l'Eglise. Lès premiers appartiennent
à l'école de MM. Ferry, Lockroy et
Spuller. Leur tactique consiste à taire
nos succès dans le passé et à calom
nier nos intentions dans le présent.
(Voir la collection du journal la Répu
blique française ; articles au jour le
jour.) Les seconds appartiennent à
l'école universitaire, représentée par
M. Renan. Ces derniers louent volon
tiers le moyen âge et accordent satis
faction à l'Eglise pour les services
d'autrefois. Ils nous refusent dans le
présent toute espèce de compétence
pédagogique, pour en réserver la pos
session aux seuls professeurs de l'E
tat. (Le Parti national , 11 août 1888 :
Discours de M. Renan à Lannion.)
Nous allons voir ce qu'il faut penser
de semblables jugements.
On peut diviser l'histoire de nos
écoles professionnelles en deux pério
des distinctes : l'une qui s'étend du
neuvième au quatorzième siècle. (Viol-
let-le-Duc, Dictionnaire historique, tome
I, pages 242-300 ; Léon Maître, Ecoles
épiscopales et monastiques.) L'autre qui
commence vers l'an 1699, c'est-à-dire
à l'époque même de la fondation de
l'Académie chrétienne du vénérable
de la Salle, et qui se continue jusqu'à
nous. ( Annales de l'Institut des Frères
des Ecoles chrétiennes. T. I et II.) Ces.
deux périodes sont également riches
en résultats féconds.
Première période. — Lorsqu'on étu
die un détail quelconque, pris dans
cette merveilleuse unité de l'art chré
tien au moyen âge, on reconnaît im
médiatement la préoccupation souve
raine de l'ouvrier qui s'attache à re
produire l'idéal. Même dans les mo
numents primitifs, on rencontre un
sentiment protond qui s'efforce de
vaincre une matièrerehelle à la forme.
L'expression finit par triompher au
douzième siècle; au treizième siècle,
elle atteint une perfection qui n'a
jamais été dépassée depuis. Il ne faut
pas en être surpris : les maîtres et les
élèves de nos écoles monastiques n'é
pargnaient ni soins ni peines. Ce n'é
taient pas, comme aujourd'hui, des fa
bricants intéressés, des artistes même
épris de leur œuvre; c'étaient des
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