Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1887-12-19
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 19 décembre 1887 19 décembre 1887
Description : 1887/12/19 (Numéro 7304). 1887/12/19 (Numéro 7304).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Ltifidî 19 Béceîttbrè
7304 - Èditeôb QtîotidieiiTîë
Lundi 49 Bécëmbïë 4â87
BSH
ÉDITION QUOTIDIENNS
ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNE >
Un an. v . i
Six mois. .
Trois mois.
PARIS
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. . 55 »
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ÉTRANGER
(union POSTAUX
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34 »
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UN NUMERO | Départements. 20 -
S3UREAUX : Pâris, 10, rue desl Saints-Pères
On s'abonne & Home, place du Geàtt,'8 '
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Six mois. .
Trois mois.
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L'DHIYEItS so r^pendjas des manuscrits pi Jui sont adressé»
ANNOXÎCÏiS
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C 10 , ô, place de IaBouiSB v .r i
FRANCE
PARIS, 18 DECEMBRE 1887
Enfin, ils sont partis. C'est ce que
diraient volontiers tous les contribuai
bles, heureux de voir commencer la
. « trêve des confiseurs ». On répète
souvent que la France tient à sès ins-<
titutions républicaines, et notamment
à ses deux Chambres; et cependant
elle n'est jamais plus satisfaite que
lorsque députés et sénateurs sont en
vacance. Il est vrai que ceux-ci, pen
dant les sessions, agissent de telle
sorte que c'est un soulagement pour
tout le monde de les voir partir.
Quoiqu'il en soit, nous voilà tran
quilles jusqu'au 10 janvier, date fixée
pour la rentrée par la Constitution.
Mais le plus heureux de ce départ doit
être certainement M. Tirard, mainte
nant certain de rester jusque-là.
Aucun intérêt aux deux séances
d'hier ; les députés .ont entendu la lec
ture du décret de clôture de la session ;
les sénateurs ont ajourné la discussion
du crédit demandé pour le nouveau
mode de gestion des fourrages mi
litaires.
Aurons-nous un conflit entre le gou
vernement et le conseil municipal au
sujet de la prise de possession par le
fréfet de la Seine de son logement à
hôtel de ville ! On le dit beaucoup,
2 mais d'autre part il faudrait, pour ins-
.?■ taller M. Poubelle à l'hôtel de ville,
une fermeté qu'on n'espère pas trop
de MM. Carnot et Tirard.
: Nous avons donné hier, aux Derniè
res Dépêches. , la conclusion d'un article
significatif du Nord; nous reprodui
sons aujourd'hui l'article entier, qui
est important et court. L'organe de la
chancellerie russe signifie nettement
à la presse autrichienne et allemande
que la Russie entend rester maîtresse
chez elle. « Elle ne veut pas la guer
re, elle ne la fera pas, >; .mais elle,
prendra en toute liberté les mesures
de précautions qu'èlle jugêra^tiles-
La tension continue entre l'Autriche
et la Russie; mais nous persistons à
ne pas croire à une. rupture immé
diate. Le langage très riet du Nord
nous semble plutôt de. nature à pré
venir la guerre qu'à la provoquer.
Dans la courte discussion à laquelle
a donné lieu au Reichstag le projet
de loi sur le landsturn, renvoyé à
l'examen d'une commission, le ^mi
nistre de la guerre allemand, le géné
ral Bronsart de Schellendorf,.a fait les
déclarations les plus pacifiques. C'est
toujours le même lieu commun que
la triple alliance de l'Allemagne, de
l'Autriche et de l'Italie, à laquelle se
ratache plus ou moins l'Angleterre,
est la plus solide garantie du maintien
de la paix européenne. Ces assurances
pacifiques^ cadrent mal avec les mesu
res militaires demandées.
« Oui, c'est la rue » est le mot en ve
dette d'un petit article de l'Intran
sigeant. La feuille de Rochefort prend
acte avec triomphe de la part, très
large en effet, qui revient aux politi
ciens du pavé dans l'élection prési
dentielle. II y a un point" faible dans
ce triomphe, Y Intransigeant exulte
trop. Il se grisé, comme d'un coup
inespéré de fortune, de ce qui n'a été
au fait que l'application très simple du
droit delà Révolution.Et Rochéfort, ce
virtuose, ce chef d'attaqué du journa
lisme démolisseur, Rochéfort est, lui
aussi, un incomplet, presque un inco
lore. Les dogmes de la Révolution ne
trouvent en lui qu'un homme de foi
médiocre,, modicœ jidei.
Que s'est-il passé, après tout? Sim
plement, ces derniers jours, la rue a
parlé, autoritairement, décisivement
parlé. Gavroche devenu légion, Gavro
che passé, pour la circonstance, classe
dirigeante, a exercé ?sur les votes du
Congrès une pesée indéniablemont im
per ative. Qu y a-t-il là pouvant moti
ver d'immodérées liesses? Pour les ré
publicains de principe, la rue dictant
la loi aux pouvoirs publics, c'est le
droit lui-meme à son maximum de
pureté, le droit à. sa source, c'est la
souveraineté directement exercée par
le souverain seul légitime : le peuple.
Cette tourbe soulevée, d'où montent
des clameurs contradictoires dont les
courants de passion s'entrechoquent,
ce chaos c'est l'ordre^ un ordre supé
rieur aux régularités de surface. Ainsi
jugent, ainsi raisonnent les solennels,
les sentencieux du parti. Rochéfort
n'est pas de ceux-là. Ce n'est pas lui
qui alambiquera des phrases subtiles
en vue de prouver que l'émeute c'est
l'ordre.
Il s'en moque bien de l'ordre. C'est
serait pour Rochéfort sans attraction
et sans saveur. Quant au droit, le sire
s'en soucie comme il se soucie de l'or
dre. Le .lanternier n'a pas cette hypo
crisie du droit particulière aux Prud-
hommes de la démocratie. Nous ne
dirons pas précisément que le droit ou
le tort lui soit chose indifférente ; non.
f Entre les deux, il préfère le tort. Le
tort, en effet, accuse une certaine force,
la force insolente qui brave et opprime
le droit. Ceci entre tout à fait dans les
instincts et les pratiques du person
nage. Piétiner le droit'entre tous sacré.:
le droit des faibles, est sa volupté. In
sulter, fouler aux pieds les persécutés,^
lancer ses meutes sur le prêtre ■_ sans;
défense, sur l'humble religieuse insti
tutrice ou hospitalière, sont les jeux,
dont il égayé son journal et son pu
blic.
Et les bons démocrates qui voient
dans leur Rochéfort un fidèle, uni
champion des droits du peuple ! Les
bons démocrates sont volés. Rochéfort
n'est le champion d'aucune cause.;
Rochéfort est purement un dilettente
du désordre. La Révolution pour lui
n'est rien,qui ressemble à une enfilade
d'aphorismes, hune doctrine, comme di
sent les jacobins vieux modèle. Parlez
donc de doctrine à ce gouailleur sans
foi ni loi; il vous renverra au vertueux
Brisson. Rochéfort, rendons-lui j usti-
ce, n'est pas de cette catégorie pé
dante. La Révolution n'est pas son sys
tème, la Révolution est sa débauche,
un excitant dont il ne peut se passer,
un besoin dépravé duquel il s'est fait
l'esclave, comme le fumeur d'opj.um
l'est, de son vice.
,■ Sans foi démocratique ou autre,
sans attache de sentiment ou de con
viction à un principe politique quelcon
que, Rocheiort est néanmoins une
puissance révolutionnaire, une puis-:
sance dans le mal,et non des moindres.
L'écrivain est sans rival dans l'atroce,
étonnant avec cela de rondeur et de
jovialité gauloise. C'est un horrible;
mélange de répulsion et d'attraction ;
le tout fait un ragoût extrêmement
demandé.
VIntransigeant dispose réellement
de toutes les conditions d'immunité
dans le crime. Ce n'est d'abord pas la
légalité qui pourrait lui être une cause
de gêne. La loi de 1881 sur la matière
a eu pour objet à peu près unique de
lâcher la bride aux méfaits de la
presse. Quelques rares dispositions ré
pressives s'y montrent encore, mais
l'arme, demeure au fourreau. Les plus
monstrueuses excitations d'un certain
journalisme n'ont pas le pouvoir de
l'en faire sortir. En plus de la compli
cité de la loi, acquise en général aux
brigandages de la plume, l'Intran
sigeant a. la virtuosité, avec l'ex
ceptionnel succès de son rédacteur.
Dans l'art, dans le journal, dans tout
ce qui parle aux passions, le succès;
est un élément énorme d'impunité.;
L'artiste en n'importe quoi, fût-ce en
destruction, surtout .en destruction,
l'artiste ayant de certaines prises sur
son public est inviolable, irrespon
sable, au-dessus des lois. -
Moralité : Rochéfort peut tout. Il
s'est fait de son journal une manière
d'acropole. Retranché dans cet impre-,
nable repaire, il allume, il irrite à
plaisir les instincts de, meurtre. Il
existe quelque part, dans la dernière;
loi de la presse, un article, l'article
23, si nous ne nous trompons, qui as
simile à la complicité de droit com
mun là provocation par le journal à
certains crimes, notamment à l'assas
sinat; Rochéfort brave, sans sourciller,
la loi pénale; Rochéfort se frotte, tous
les jours, à l'article 23 sans s'y bles
ser. Il sait bien que les magistrats de
la République ne requéreront pas con
tre lui. Ils n'oseraient.
lîIntransigeant emploie sa formi
dable publicité à propager des calom
nies assassines. Il met au monde de
monstrueuses légendes de religieuses
rôtisseuses d'enfants. Inutilement, les
populations locales protestent, indi
gnées, et entourent la calomniée des
témoignages de leur vénération. Le
pamphlétaire n'én est point déconcer
té, la diffamation poursuit sa besogne
abominable. .
Une simple question : dans cette
exorbitante dépense de verve, de co
lère vraie ou feinte, d'invectives au
bourgeois et au capital où se prodigue
J 'Intransigeant, én quel endroit voit-on
paraître. quelque zèle de la cause du
peuple, quelque sollicitude du sort des
misérables ? Voyons, bons démocrates,
tâchons de ne pas être plus bêtes que
nature. Rochéfort ne s'est enquis onc-
ques du problème de la' misère. Son
ignorance ès sociologie est opaque, et
il ne s'en.cache pas. Il n'a su dire en
ces matières que des choses absolu
ment bouffonnes. Nous nous rappelons
lui avoir vu soutenir le droit à l'égalité
de salaire pour l'auteur d'une œuvre
littéraire de premier ordre et le garçon
pâtissier, auteur d'une brioche, h'In
transigeant détruit autant qu'il est en
lui la vieille société. De bonnes âmes
supposent peut-être que c'est pour
mettre à la place une société mieux
faite. Allons donc, L 'Intransigeant rê
vant .d'un idéal de justice> c est pour
pouffer de rire. L' Intransigeant dé
truit, l'Intransigeant souille simple
ment pour le plaisir. La politique de
Rochéfort, la philosophie de Rochéfort,
tout cela tient dans un mot : Roche-
fort s'amuse*
- Hugo a écrit Le Roi s'amuse, une fic
tion scélérate dont la visée est de salir
la royauté en défigurant l'histoire. La
démagogie, bien plus mille fois que la
royauté, a eu ses despotes, ses omni
potents dans le crime. Les Carrier de
Nantes* les Challier, les Collot d'Her-
bois se sont rendus fameux par
les jeux cruels où ils s'ébattaient. Là,
pour montrer les scènes d'horreur, ;
pas n'est besoin de forcer la vérité.
Pourquoi une plume vengeresse né
nous" donne-t-elle pas un Carrier s'a
muse, un Collot s'amuse... un Rochéfort -
s'amuse?
Rochéfort s'amuse,et le pamplétaire
néanmoins fait de l'argent. C'est le
côté utile de sa longue bamboche* le
côté qui lui vaut à quelque degré unej
manière de considération des gens cor
rects. Après cela, et quant à s'émou-;
voir sur les déshérités, , quant à s'in
quiéter des moyens de relever la con
dition des infimes, le lanternier ne s'en-;
combre pas que l'on sache de ces sortes
de préoccupations, i La littérature bou-
levardière crée au jour le jour une
langue à l'avenant de la continuelle
détérioration des caractères et des
idées. Ello sort de forger un mot tout
neuf pour rendre ce désintéressement
blasé de toute chose, cet odieux déta
chement de tout intérêt élevé ou émou
vant qui paraît entrer dans les allures
du jour. Cela s'appelle ou plutôt cèla
s'écrit : le J'menfichisme. Nous rete
nons le mot, on le dirait fait exprès
pour Y Intransigeant. La politique de
Rochéfort, sa philanthropie, ses vues
sociales, si vues il y a, pur j'menfi
chisme.
P hv S ekret.
La Semaine catholique de Toulouse
reproduit l'article ae M. Eugène
Veuillot consacré à M. Jules Grévy, et
ajoute:
. Après ces réflexions de l'Univers, plaçons
une parole encore inédite et que nous te
nons de bonne source. Un prêtre très voi
sin de Mont-sous-Vaudrey disait èt l'un de
nos amis :
Je vois d'assez près M. Grévy ; il m'admet
parfois à sa table, au château, pendant les va
cances. Je suis persuadé que, si Dieu lui fait la
grâce de ne pas mourir à l'Elysée, il pourra finir
chrétiennement.
Nous souhaitons charitablement à notre;
ancien président la réalisation de ce pré-'
sage. Sous forme de châtiment, il a déjà
reçu la première moitié de la grâce ; c'est
maintenant à. lui de mériter l'autre moitié.
Fiat!Fiat! . ..■■■■
Il est à peine besoin de dire que nous
nous associons aux vœux de la Semaine
catholique de. Toulouse.
Le correspondant à Paris du Novoié
Vremia envoie en traduction russe une
lettre datée du 17 octobre, du général
Boulanger au député de la Corse de
Susini, qui lui avait offert de se désis
ter en sa faveur de son mandat de dé
puté. Nous reproduisons cette lettre à
titre de document :
Mon cher député,
Je n'ai nul besoin de vous dire, combien
je suis teuché de votre, proposition de vous
désister en ma faveur. Mais je vais vous;
répondre avec la môme sincérité qui se dé
gage de chaque argument de votre lettre.
Je ne puis pas et je ne dois pas accepter
votre proposition.
Mon cher député,-tous les deux nous ai
mons notre patrie et nous voulons sincère
ment la servir. Vous me dites : Pour être
à la République, prenez place parmi ses
représentants. .
Mais pour faire œuvre de bon patriote et
de bon Français, je dois avant tout conser
ver mon rang dans l'armée.
Nous différons de point de vue, mpn cher
député ; vous, vous constatez avec tristesse
la faiblesse du gouvernement, l'anarchie
aux portes de la France, l'énervement et le
dégoût universel à l'intérieur.
Quant à moi, je sens venir l'orage du de
hors, qui fera taire tous les différends inté
rieurs. C'est la guerre dans un avenir rap
proché, et ce jour-là. je ne veux pas être
forcé de chercher mon sabre oublié dans
un coin, alors que la France aura besoin
de tous ses généraux et quand elle oubliera
pour un moment tous ses députés.
Voilà pourquoi je n'abandonnerai pas
l'armée, quoi qu'il arrive. Quand, il y a de
cela quelques jours, j'ai sehti toutes les in
trigues ourdies contre moi, j'ai été forcé
d'oublier les règles de la discipline muette,
et d'un seul haussement d'épaules remettre
tout à sa place.
Je ne le regrette pas, mais cela fait, je
suis redevenu un simple soldat et,devant la
situation sérieuse d'aujourd'hui, je préfére
rai toujours ce titre à n'importe quel autre.;
Je suis convaincu que vous m'avez com
pris ; dans le cas où, comme dernier argu
ment, vous me répondriez que, député au
jourd'hui, je. puis redevenir général demain
si la guerre éclatait,je vous répondrai qu'un
général qui veut être digne.d'un comman
dement ne doitpas quitter un seul moment
cette école de commandement qui s'appelle
l'armée.
' Dans l'ère que nous traversons de pro
grès incessant dans le domaine du milita
risme, cesser d'étudier équivaut à être mis
en danger de commettre des fautes le jour
de la lutte.
Ainsi, je reste général. Si je n'étais pas
déjà votre ami, je le deniendrais dès Ce
jour, car il est rare de trouver des hommes
qui, par la crainte de l'avenir, sont capa
bles de propositions comtne celle que vous
venez de me faire.
J'espère être à Paris au mois de dé
cembre et vous assurer personnellement de
mes sympathies.
En attendant ce jour, je vous envoie une
cordiale poignée de main.
Général B uulanger
Les écoles chrétiennes
On lit dans la Semaine religieuse
du diocèse de Paris :
Après la cérémonie de la promulgation
dudécret de béatification du vénérable de
la Salle, le Souverain Pontife, ayant remar
qué parmi les assistants le frère Joseph,
supérieur des Ecoles chrétiennes, le fît ap
peler, à peine rentré dans ses apparte
ments, ,et, mettant, dans son- accueil-.la
bonté paternelle qui le caractérise, témoi
gna au frère supérieur sa satisfaction de ce
qu'il était venu exprès.de France pour rece
voir le décret. Sa Sainteté voulut bien lui
exprimer son bonheur de voir deux Fran
çais parmi les nouveaux bienheureux : Gri-,
gnon de Montfort et Jean-Baptiste de la
Salle. « La pauvre France, ajouta le Pape,;
est bien atteinte par les mauvaises doctri
nes et bien menacée par les conséquences
inévitables des principes qui y dominent. Le
mal est tel que Dieu seul peut , sauver ce
beau pays; c'est pourquoi nous devons
principalement recourir aux remèdes sur
naturels, sans lesquels tous les autres sont
nuls.
C'est donc pour vous une obligation de
promouvoir les idées de foi et d'imprimer
un caractère de plus en plus chrétien à l'é-:
ducation de la jeunesse. Ou vous suscite,
je le sais, des difficultés nombreuses; mais
il faut lutter contre les obstacles et profi
ter delà parcelle de liberté qu'on vous laisse
Eour préserver les enfants de l'ignorance de
lieu et de Jésus-Christ. Employez auprès
de vos frères toute l'influence de votre au
torité, afin qu'ils s'appliquent chaque jour
à devenir plus dévoués à Dieu et au salut
de la jeunesse. L'ennemi vous entoure ; il
essayera de diminuer la vie religieuse dans
vos âmes ; soyez attentifs à rendre vains
ses efforts et à réagir de toute votre puis
sance contre l'envahissement de l'esprit du
monde. Plus que jamais, il faut à l'Eglise
bons religieux.
Voici textuellement la déclaration
da Nord, que résumait hier le télé
graphe :
i L'alerte artificiellement soulevée au su
jet des mouvements de troupes en Pologne
s'en ira commô elle était venue. L 'Invalide
russe a détruit la fantasmagorie qu'elle
mettait en œuvre. La feuille militaire a éta
bli par des chiffres et des détails techniques
le bilan des situations respectives sur les
frontières polonaises et a démontré, que si
une puissance était fondée à se plaindre et
à s'inquiéter des préparatifs d'Etats limi
trophes, ce serait la Russie et non l'Au-r
triche. La Russie laisse à ses voisins la li
berté de pourvoir comme bon leur semble
à leur défense et à leur sauvegardé ; elle
entend user de la même latitude.
On se tromperait si l'on s'imaginait
qu'elle se prêtera à être mise à tout mo
ment sur la sellette ou à subir des interro
gatoires à ce propos. Quant au procès de
tendance qu'on lui fait, à la phraséologie
de circonstance où interviennent le « parti
de la guerre» et les «panslavistes », ce sont
"pures chimères ou purs prétextes. Com
bien de fois faut-il le répéter ? La Russie ne
veut point la guerre ; elle ne la . fera pas.
Mais élle revendique pleinement son droit
de prendre toutes les mesures nécessaires
afin de convertir en un désastre final pour
l'agresseur toute invasion éventuelle do
son territoire. Elle ne serait plus une puis
sance indépendante et une grande puis
sance — et elle prétend rester l'une et l'au
tre — si elle permettait qu'on lui demandât
compte de ce qu'elle croit devoir faire dans
l'intérêt de sa sécurité.
-o-
Nous recevons de Rome la dépêche
suivante : '
Rome, 17 décembre.
, Le prochain consistoire public pour la
canonisation des nouveaux saints est défi
nitivement fixé au 23 décembre.
LE JUBILÉ SACERDOTAL
DE
SA SAINTETÉ LÉON XIII
AMERIQUE
On mande d'Amérique qu'à, l'occa
sion du jubilé du Saint-Père le prési
dent des Etats-Unis, M. Cleveland,
chargera un haut dignitaire de l'Eglise
catholique d'une lettre autographe de
félicitations pour le Pape.
Ce dignitaire, que les journaux amé
ricains nomment déjà, serait S. Em. le
cardinal Gibbons, archevêque de Bal
timore.
. La ville de Milwaukee, siège métro
politain aux Etats-Unis, a célébré le
jubilé pontifical par une procession
solennelle à laquelle assistaient 5,000
personnes. Les rues et les édifices pu
blics avaient été pavoisés aux couleurs
pontificales et de l'Union.
La fête civile, présidée par le maire,
M. O'Neill, à eu lieu au palais de l'ex
position. Une fou}e immense y a as
sisté.
. . AUTRICHE
La Diète de Moravie a voté, sur la
proposition de Mgr l'évêque de Brunn,
la résolution de charger le grand-sé-
néchal du margraviat de Moravie de
présenter au Saint-Père les vœux du
pays à l'occasion de ses noces d'or sa
cerdotales.
La résolution a été votée à l'unani
mité moins une voix, — non pas celle
'd'un des juifs qui siègent à la Diète et
qui tous ont voté la résolution, —mais
celle d'un libéral qui n'a de catholique
que le nom.
Le maître-échevin et les échevins de
la ville royale de Prague ont institué
un comité chargé de transmettre au
Souverain Pontife les vœux de la ca
pitale de l'antique royaume de saint
Venceslas.
BELGIQUE
Le 16 décembre, une réunion géné
rale des étudiants de l'université ca
tholique de Louvain a eu lieu pour
s'occuper de la célébration du jubilé
pontifical.
M. van Gersdaele, président de la;
société des étudiants, a pris le premier
la parole. Il a donné lecture d'une
adresse au Saint-Père.
Mgr Cartuyvels, le vice-recteur de
l'université, a prononcé un très beau
discours, dans lequel il a montré com
bien sera imposant ce spectacle de
tout le monde catholique défilant aux
pieds de Léon XIII et y déposant, avec
son respect et son dévouement, des
richesses sans nombre. Il a ensuite
annoncé qu'aux fêtes du jubilé, à Ro
me, le roi sera représenté par le duc
d'Ursel et son secrétairë, Raoul du
Sari; les^ catholiques belges' par Mgr
l'archevêque de Malines, et l'université
catholique par son recteur magnifique,'
Mgr Abbeloos, et MM. les professeurs
Lefèvre, Descamps et Helleputte. i
M. le professeur Helleputte a pro
noncé un discours plein de chaleur et
vivement applaudi. Devançant ses
confrères, qui ne partiront que dans lé
courant de la semaine prochaine, M.
I-Ielleputte est parti aussitôt pour
Rome.
ETATS-PONTIFICAUX
- . - i
Les chapelains secrets participants
du Saint-Père ont été admis, ce ma
tin, à présenter leurs hommages à Sa
Sainteté, à l'occasion de son jubilé sa-^
cerdotal, ét à lui offrir un précieux
In-pace d'un très beau travail et orné
de l'inscription suivante.
LEONI • XIII • P • M* •
t
NATALI • L * SACERDOTII SVI :
PACALE * SYMBOLVM . ' i
, , - PAGIS ' AVCTORI
VENERABVNDI * DONVM " DEDIMVS
VI * V1RI A * SACRIS V EIVS
Suivent les noms des donateurs, i
GRAND DUCHÉ DE BADE
Un comité de fêtes s'est constitué à
Carlsruhe, la capitale du grand duché
de Bade, pour donner, à l'occasion
des noces d'or de Sa Sainteté, une
grande fête. A la tête du comité s'est
placé M. de Regenauer, président du
conseil des ministres. Toutes les asso
ciations catholiques de la ville pren~;
dront part à cette fête,qui aura lieu le
26 décembre.
Dé plus, il y aura, le 1" janvier, des
fêtes spéciales dans toutes les localités
du grand-duché qui possèdent une
communauté catholique.
GRÈCE
S. G. Mgr Marango, archevêque
d'Athènes, viônt d'arriver à Rome,où il
apporte au Souverain Pontife, à l'oc-
sasion du jubilé, l'hommage et les of
frandes de son peuplé.
Mgr Marango est aussi chargé de
remettre au Pape une lettre autogra
phe de S. M. le roi de Grèce.
MONACO
La maison Armand-Calliat, de Lyon,
termine,en ce moment une croix pas
torale que S. A. le prince Charles III
de Monaco offrira à S. S. Léon XIII, à
l'occasion de son Jubilé sacerdotal.
La grande richesse des pierreries et
des émaux qui rehaussent cette croix
précieuse n'est comparable qu'au goût
parfait qui a présidé à sa conception
artistique.
Nos lecteurs seront heureux de lire
l'intéressant récit que Mgr Chesneau,
vicaire général de Mgr Freppel, vient
d'envoyer à la Semaine religieuse du
diocèse d'Angers, pour rendre compte
de l'audience qu'a daigné lui accorder
le Souverain-Pontife :
Je suis entré seul, tenant en main la
lettre de Monseigneur notre évêque. Le
Pape reçoit dans le cabinet où recevaitPie IX
Il se tenait assis tout au fond, à droite, à
l'extrémité d'une longue table ; son siège
est quelque peu élevé sur un seul gradin.
Cette grande robe blanche, recouverte d'un
manteau blanc à revers blancs légèrement
azurés, me doDna, tout d'abord, l'idée d'une
vision angélique"; mais la grâce du sourire
qui anime ces longues et fines lèvres, la
limpidité, la douceur et la pénétration du
regard, les cheveux blancs qui sortent à
droite et à gauche, sous la calotte blanche,
me rappelèrent que j'étais devant un père,
le père de tout l'univers, chrétien.
Après les génuflexions d'usage, je me
tins à genoux aux pieds de ce Père aimé,
et, bien qu'il m'eût invité à me lever, je fus
heureux de me tenir dans cette attitude
jusqu'à la fin de l'audience.
Le Saint-Père a été le" premier à me par
ler de Mgr Freppel, à me demander des
nouvelles de sa santé, de ses travaux à.Pa-
ris et à Angers. Il m'a dit combien il i'es
timait et l'aimait, combien aussi il lui était
reconnaissant de tout ce qu'il fait et sup
porte pour les intérêts de la religion, en
France, et pour le bien de toute l'Eglise.
Puis il a lu, tout haut, la lettre que je lui
avais remise en arrivant. Vous comprenez
de quels sentiments élevés, dignes, dévoués,
elle était remplie, et comment ces senti
ments se trouvaient exprimés. Le , Saint-
Père en a témoigné une très vive satisfac
tion. J'ai pu, alors, toucher quelques ques
tions particulières. , .
^J'étais là depuis un quart d'heure. Le
moment est venu d'offrir à Sa Sainteté les
présents dont j étais chargé. M. le chanoine
custode, qui attendait dans la salle du
Trône, fut nlors appelé et introduit. Sur le
monticule de chapelets et de médailles que
nous désirions faire bénir, je pris l'écrin
qui renfermait le Denier de Saint-Pierre et
divers autres présents, et, l'ouvrant aux
pieds de Léon XIII, je lui dis: «Très Saint-
« Père, je présente à Votre Sainteté l'hom-
« mage de Mgr l'évêque d'Angers, des çha-
« noines de sa cathédrale, de tous les prê-
« très, de toutes lés communautés religieu-
« ses et de tous les fidèles de son diocèse ;
« et j'exprime, en leur nom, le désir que
« Dieu accorde à Votre Sainteté de vivra
« de longues années encore, et de voir 1»
« prospérité de l'Eglise. -
Le Saint-Père m'a répondu qu'il était
vraiment heureux de ce témoignage fiilial
de l'évêque d'Angers et de son diocèse*
puis il aparlé de la France en' termes pleins!
de regrets et d'espérance... Le mot célè
bre : Gesta Dei per Francos vint alors su»
ses lèvres. Je me permis de citer à mon
tour un verset de l'hymne de Matines qui
me revint en mémoire : « Gallo canen té spes
redit », mais, « ajoutai-je, c'est suivant!
l'air qu'il chante I » et Léon XIII a ri de bojx
cœur. ' ' ' ' ■
Ensuite, nous avons fait l'inventaire, dé
l'écrin. Sur le couvercle se voyaient en or»
les armes du Saint-Père, avec cette dédH
cace : Hommage du diocèse d'Angers à Set
Sainteté Léon X1IL i
• Tout d'abord, c'étaient les chèques re
présentant le Denier de Saint-Pierre, qua
j'avais signés le matin même et que lat
Saint-Père mit sur sa table ; puis une lettre
de deux bons catholiques de l'Anjou, tous#
deux tertiaires de Saint-François,, avec»
trois billets de cent francs qu'ils offraient
au Pape. La lettre témoignait de leur'vé
nération pour le Père commun des fidèles,
et l'argent des fruits. de leurs : travaux,
« bénis par bien des croix n. En retour, ils
demandaient au Saint-Père de vouloir bien
prier pour que leurs enfants s'élèyeut et
vivent toujours dans la pratique, de leurs
devoirs de chrétiens. — « C'est bien tou
chant ! » a dit le Saint-Père . avec émotion»
Ensuite apparut au fond de l'écrin une pa
rure de grande dame : bracelet, bagaa
pendants d'oreilles, broche, chaîne de mon"
tre, avec ce billet anonyme: « Offert au.
« Saint-Père, avec prière de faire servir
« désormais à la gloire de Dieu ce qui a
« servi jusqu'ici à l'orgueil et à la vanité. »
Nouveau geste d'admiration et bon sourire»
du Pape. Tout au fond, se trouvait encore»
une pièce d'or de cent francs offerte par
une personne que j'avais quelque raison do
nommer au Souverain Pontife.
Avantl'audience, comme nous étions dans
la salle d'attente, Mgr délia Volpe m'avait
demandé si, parmi tous f nos colis, grands
et petits, contenant les objets à bénir, il n'y
avait pas de dynamite! J'ai rapporté ce»
trait au Pape et, tous ensemble, nous avons
r-i de bon cœur; Mais voilà que Mgr délia
Volpe ayant été appelé pour nous recon
duire, le Saint-Père fixe sur ce prélat, qu'il
aime beaucoup, ■ un regard qu'il cherchait
vainement à rendre sévère : « Ah 1 dit-il,
vous demandez, s'il y a de la dynamite! »
Et je dus expliquer au bon prélat que>c'é
tait moi qui l'avais dénoncé à Sa. Sain
teté...
Un instant auparavant, nous avions reçtt
la bénédiction que le Saint-Père a voultt
nous donner, pour nous et pour tous ceux
que, nous représentions. Il employa la for
mule solennelle. Avec quelle émotion nous
nous sommes retirés, et quels sentiments
remplissaient nos cœurs, vous. le. compre
nez sans peine. :
Nos lecteurs n'ont pas oublié l'af-f
faire, qui fit tant de bruit il y a
plusieurs riiois, de la mise en vente
par le fisc du mobilier de M. le curé
de Màlissart, privé de son traitement
par nos tristes gouvernants. M. le curé»
de Malissart nous avise que l'opération
va prochainement recommencer.
Voici sa lettre, inspirée par un tout
autre sentiment que-celui du décou-j
ragement :
Monsieur lo rédacteur, '
Permettez-moi de demander à votre ex-*
cellente feuille une bienveillante hospitalité,
afin que vos lecteurs n'oublient pas qu'entra
l'humble curé de Malissart et le haut gou
vernement de la République la paix n'a pas
encore été signée. . f
Dimanche 8 janvier 1888, mes meubles,
saisis de nouveau aujourd'hui même, se
ront, pour la troisième fois eu six ans, ven
dus au plus offrant sur. là place publique»
Pourquoi n'ai-je pas cet honneur, chaqua
année? Je l'ignore, puisque, chaque année,
je refuse l'impôt. "
Cette résistance à la mesure inique qui ai
supprimé mon traitement sans motif a ren
contré, je crois, l'approbation des âmés
fortes et libres; mais,, il faut bien le dire,
elle a soulevé, dans nos rangs mêmes, le
blâme des faibles et des timides.
Quand j'aurais tout l'or d'un nabab, au
nom du droit, je devrais y mettre la tête,
plutôt que de céder à une telle injustice.
Et vous vous étonnez que, sans fortune,
spolié de l'unique ressource qui me permet
de vivre, je refuse de m'incliner humblé-
ment devant les pirateries de nos indignes
maîtres!... J'accepterais librement que les
deniers de la charité chrétienne qui m'as
siste courent l'odieuse et trop probable
chance de servir à parer et à engraisser
leurs sérails!... Ah! de grâce, ne me de
mandez pas tant de vertu. .
D'aures prêtres, direz-vous, vaillants et
dignes, opprimés comme vous, courbent
cependant le front, pacifiquement et sans
bruit, et ne donnent pas le. spectacle d'une
résistance inutile. ;■ . /
J'admire leur patriotisme,- sans avoir la
courage de l'imiter. Mais, lorsque nous
étions près de deux mille victimes de la
brutale'agression d'un gpuvernement per
sécuteur, si notre mobilier,' porté sur deux
mille places publiques, eût été mis à l'en
can, pourriez-vous affirmer que, malgré
leur cynisme,nous n'aurions pas fait reculer
nos lâches détrousseurs ?
Pour , moi, quoi qu'il arrive et malgré
l'inégalité des armes,je soutiendraijusqu'au
bout la lutte sans défaillance. Si je meurs
avant l'heure de la justice, j'emporterai du
moins dans la tombe la légitime espérance
que Dieu, pour obscur que soit le soldat,
lui saura quelque gré d'avoir tenté de ser
vir, dans la mesure'de ses forces, la cause
sacrée de l'Eglise et de la liberté.
- ■ - L'abbé R ey,
Curé de Malissard.
Malissard (Drôme), li décembre 1887.
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L'DHIYEItS so r^pendjas des manuscrits pi Jui sont adressé»
ANNOXÎCÏiS
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C 10 , ô, place de IaBouiSB v .r i
FRANCE
PARIS, 18 DECEMBRE 1887
Enfin, ils sont partis. C'est ce que
diraient volontiers tous les contribuai
bles, heureux de voir commencer la
. « trêve des confiseurs ». On répète
souvent que la France tient à sès ins-<
titutions républicaines, et notamment
à ses deux Chambres; et cependant
elle n'est jamais plus satisfaite que
lorsque députés et sénateurs sont en
vacance. Il est vrai que ceux-ci, pen
dant les sessions, agissent de telle
sorte que c'est un soulagement pour
tout le monde de les voir partir.
Quoiqu'il en soit, nous voilà tran
quilles jusqu'au 10 janvier, date fixée
pour la rentrée par la Constitution.
Mais le plus heureux de ce départ doit
être certainement M. Tirard, mainte
nant certain de rester jusque-là.
Aucun intérêt aux deux séances
d'hier ; les députés .ont entendu la lec
ture du décret de clôture de la session ;
les sénateurs ont ajourné la discussion
du crédit demandé pour le nouveau
mode de gestion des fourrages mi
litaires.
Aurons-nous un conflit entre le gou
vernement et le conseil municipal au
sujet de la prise de possession par le
fréfet de la Seine de son logement à
hôtel de ville ! On le dit beaucoup,
2 mais d'autre part il faudrait, pour ins-
.?■ taller M. Poubelle à l'hôtel de ville,
une fermeté qu'on n'espère pas trop
de MM. Carnot et Tirard.
: Nous avons donné hier, aux Derniè
res Dépêches. , la conclusion d'un article
significatif du Nord; nous reprodui
sons aujourd'hui l'article entier, qui
est important et court. L'organe de la
chancellerie russe signifie nettement
à la presse autrichienne et allemande
que la Russie entend rester maîtresse
chez elle. « Elle ne veut pas la guer
re, elle ne la fera pas, >; .mais elle,
prendra en toute liberté les mesures
de précautions qu'èlle jugêra^tiles-
La tension continue entre l'Autriche
et la Russie; mais nous persistons à
ne pas croire à une. rupture immé
diate. Le langage très riet du Nord
nous semble plutôt de. nature à pré
venir la guerre qu'à la provoquer.
Dans la courte discussion à laquelle
a donné lieu au Reichstag le projet
de loi sur le landsturn, renvoyé à
l'examen d'une commission, le ^mi
nistre de la guerre allemand, le géné
ral Bronsart de Schellendorf,.a fait les
déclarations les plus pacifiques. C'est
toujours le même lieu commun que
la triple alliance de l'Allemagne, de
l'Autriche et de l'Italie, à laquelle se
ratache plus ou moins l'Angleterre,
est la plus solide garantie du maintien
de la paix européenne. Ces assurances
pacifiques^ cadrent mal avec les mesu
res militaires demandées.
« Oui, c'est la rue » est le mot en ve
dette d'un petit article de l'Intran
sigeant. La feuille de Rochefort prend
acte avec triomphe de la part, très
large en effet, qui revient aux politi
ciens du pavé dans l'élection prési
dentielle. II y a un point" faible dans
ce triomphe, Y Intransigeant exulte
trop. Il se grisé, comme d'un coup
inespéré de fortune, de ce qui n'a été
au fait que l'application très simple du
droit delà Révolution.Et Rochéfort, ce
virtuose, ce chef d'attaqué du journa
lisme démolisseur, Rochéfort est, lui
aussi, un incomplet, presque un inco
lore. Les dogmes de la Révolution ne
trouvent en lui qu'un homme de foi
médiocre,, modicœ jidei.
Que s'est-il passé, après tout? Sim
plement, ces derniers jours, la rue a
parlé, autoritairement, décisivement
parlé. Gavroche devenu légion, Gavro
che passé, pour la circonstance, classe
dirigeante, a exercé ?sur les votes du
Congrès une pesée indéniablemont im
per ative. Qu y a-t-il là pouvant moti
ver d'immodérées liesses? Pour les ré
publicains de principe, la rue dictant
la loi aux pouvoirs publics, c'est le
droit lui-meme à son maximum de
pureté, le droit à. sa source, c'est la
souveraineté directement exercée par
le souverain seul légitime : le peuple.
Cette tourbe soulevée, d'où montent
des clameurs contradictoires dont les
courants de passion s'entrechoquent,
ce chaos c'est l'ordre^ un ordre supé
rieur aux régularités de surface. Ainsi
jugent, ainsi raisonnent les solennels,
les sentencieux du parti. Rochéfort
n'est pas de ceux-là. Ce n'est pas lui
qui alambiquera des phrases subtiles
en vue de prouver que l'émeute c'est
l'ordre.
Il s'en moque bien de l'ordre. C'est
serait pour Rochéfort sans attraction
et sans saveur. Quant au droit, le sire
s'en soucie comme il se soucie de l'or
dre. Le .lanternier n'a pas cette hypo
crisie du droit particulière aux Prud-
hommes de la démocratie. Nous ne
dirons pas précisément que le droit ou
le tort lui soit chose indifférente ; non.
f Entre les deux, il préfère le tort. Le
tort, en effet, accuse une certaine force,
la force insolente qui brave et opprime
le droit. Ceci entre tout à fait dans les
instincts et les pratiques du person
nage. Piétiner le droit'entre tous sacré.:
le droit des faibles, est sa volupté. In
sulter, fouler aux pieds les persécutés,^
lancer ses meutes sur le prêtre ■_ sans;
défense, sur l'humble religieuse insti
tutrice ou hospitalière, sont les jeux,
dont il égayé son journal et son pu
blic.
Et les bons démocrates qui voient
dans leur Rochéfort un fidèle, uni
champion des droits du peuple ! Les
bons démocrates sont volés. Rochéfort
n'est le champion d'aucune cause.;
Rochéfort est purement un dilettente
du désordre. La Révolution pour lui
n'est rien,qui ressemble à une enfilade
d'aphorismes, hune doctrine, comme di
sent les jacobins vieux modèle. Parlez
donc de doctrine à ce gouailleur sans
foi ni loi; il vous renverra au vertueux
Brisson. Rochéfort, rendons-lui j usti-
ce, n'est pas de cette catégorie pé
dante. La Révolution n'est pas son sys
tème, la Révolution est sa débauche,
un excitant dont il ne peut se passer,
un besoin dépravé duquel il s'est fait
l'esclave, comme le fumeur d'opj.um
l'est, de son vice.
,■ Sans foi démocratique ou autre,
sans attache de sentiment ou de con
viction à un principe politique quelcon
que, Rocheiort est néanmoins une
puissance révolutionnaire, une puis-:
sance dans le mal,et non des moindres.
L'écrivain est sans rival dans l'atroce,
étonnant avec cela de rondeur et de
jovialité gauloise. C'est un horrible;
mélange de répulsion et d'attraction ;
le tout fait un ragoût extrêmement
demandé.
VIntransigeant dispose réellement
de toutes les conditions d'immunité
dans le crime. Ce n'est d'abord pas la
légalité qui pourrait lui être une cause
de gêne. La loi de 1881 sur la matière
a eu pour objet à peu près unique de
lâcher la bride aux méfaits de la
presse. Quelques rares dispositions ré
pressives s'y montrent encore, mais
l'arme, demeure au fourreau. Les plus
monstrueuses excitations d'un certain
journalisme n'ont pas le pouvoir de
l'en faire sortir. En plus de la compli
cité de la loi, acquise en général aux
brigandages de la plume, l'Intran
sigeant a. la virtuosité, avec l'ex
ceptionnel succès de son rédacteur.
Dans l'art, dans le journal, dans tout
ce qui parle aux passions, le succès;
est un élément énorme d'impunité.;
L'artiste en n'importe quoi, fût-ce en
destruction, surtout .en destruction,
l'artiste ayant de certaines prises sur
son public est inviolable, irrespon
sable, au-dessus des lois. -
Moralité : Rochéfort peut tout. Il
s'est fait de son journal une manière
d'acropole. Retranché dans cet impre-,
nable repaire, il allume, il irrite à
plaisir les instincts de, meurtre. Il
existe quelque part, dans la dernière;
loi de la presse, un article, l'article
23, si nous ne nous trompons, qui as
simile à la complicité de droit com
mun là provocation par le journal à
certains crimes, notamment à l'assas
sinat; Rochéfort brave, sans sourciller,
la loi pénale; Rochéfort se frotte, tous
les jours, à l'article 23 sans s'y bles
ser. Il sait bien que les magistrats de
la République ne requéreront pas con
tre lui. Ils n'oseraient.
lîIntransigeant emploie sa formi
dable publicité à propager des calom
nies assassines. Il met au monde de
monstrueuses légendes de religieuses
rôtisseuses d'enfants. Inutilement, les
populations locales protestent, indi
gnées, et entourent la calomniée des
témoignages de leur vénération. Le
pamphlétaire n'én est point déconcer
té, la diffamation poursuit sa besogne
abominable. .
Une simple question : dans cette
exorbitante dépense de verve, de co
lère vraie ou feinte, d'invectives au
bourgeois et au capital où se prodigue
J 'Intransigeant, én quel endroit voit-on
paraître. quelque zèle de la cause du
peuple, quelque sollicitude du sort des
misérables ? Voyons, bons démocrates,
tâchons de ne pas être plus bêtes que
nature. Rochéfort ne s'est enquis onc-
ques du problème de la' misère. Son
ignorance ès sociologie est opaque, et
il ne s'en.cache pas. Il n'a su dire en
ces matières que des choses absolu
ment bouffonnes. Nous nous rappelons
lui avoir vu soutenir le droit à l'égalité
de salaire pour l'auteur d'une œuvre
littéraire de premier ordre et le garçon
pâtissier, auteur d'une brioche, h'In
transigeant détruit autant qu'il est en
lui la vieille société. De bonnes âmes
supposent peut-être que c'est pour
mettre à la place une société mieux
faite. Allons donc, L 'Intransigeant rê
vant .d'un idéal de justice> c est pour
pouffer de rire. L' Intransigeant dé
truit, l'Intransigeant souille simple
ment pour le plaisir. La politique de
Rochéfort, la philosophie de Rochéfort,
tout cela tient dans un mot : Roche-
fort s'amuse*
- Hugo a écrit Le Roi s'amuse, une fic
tion scélérate dont la visée est de salir
la royauté en défigurant l'histoire. La
démagogie, bien plus mille fois que la
royauté, a eu ses despotes, ses omni
potents dans le crime. Les Carrier de
Nantes* les Challier, les Collot d'Her-
bois se sont rendus fameux par
les jeux cruels où ils s'ébattaient. Là,
pour montrer les scènes d'horreur, ;
pas n'est besoin de forcer la vérité.
Pourquoi une plume vengeresse né
nous" donne-t-elle pas un Carrier s'a
muse, un Collot s'amuse... un Rochéfort -
s'amuse?
Rochéfort s'amuse,et le pamplétaire
néanmoins fait de l'argent. C'est le
côté utile de sa longue bamboche* le
côté qui lui vaut à quelque degré unej
manière de considération des gens cor
rects. Après cela, et quant à s'émou-;
voir sur les déshérités, , quant à s'in
quiéter des moyens de relever la con
dition des infimes, le lanternier ne s'en-;
combre pas que l'on sache de ces sortes
de préoccupations, i La littérature bou-
levardière crée au jour le jour une
langue à l'avenant de la continuelle
détérioration des caractères et des
idées. Ello sort de forger un mot tout
neuf pour rendre ce désintéressement
blasé de toute chose, cet odieux déta
chement de tout intérêt élevé ou émou
vant qui paraît entrer dans les allures
du jour. Cela s'appelle ou plutôt cèla
s'écrit : le J'menfichisme. Nous rete
nons le mot, on le dirait fait exprès
pour Y Intransigeant. La politique de
Rochéfort, sa philanthropie, ses vues
sociales, si vues il y a, pur j'menfi
chisme.
P hv S ekret.
La Semaine catholique de Toulouse
reproduit l'article ae M. Eugène
Veuillot consacré à M. Jules Grévy, et
ajoute:
. Après ces réflexions de l'Univers, plaçons
une parole encore inédite et que nous te
nons de bonne source. Un prêtre très voi
sin de Mont-sous-Vaudrey disait èt l'un de
nos amis :
Je vois d'assez près M. Grévy ; il m'admet
parfois à sa table, au château, pendant les va
cances. Je suis persuadé que, si Dieu lui fait la
grâce de ne pas mourir à l'Elysée, il pourra finir
chrétiennement.
Nous souhaitons charitablement à notre;
ancien président la réalisation de ce pré-'
sage. Sous forme de châtiment, il a déjà
reçu la première moitié de la grâce ; c'est
maintenant à. lui de mériter l'autre moitié.
Fiat!Fiat! . ..■■■■
Il est à peine besoin de dire que nous
nous associons aux vœux de la Semaine
catholique de. Toulouse.
Le correspondant à Paris du Novoié
Vremia envoie en traduction russe une
lettre datée du 17 octobre, du général
Boulanger au député de la Corse de
Susini, qui lui avait offert de se désis
ter en sa faveur de son mandat de dé
puté. Nous reproduisons cette lettre à
titre de document :
Mon cher député,
Je n'ai nul besoin de vous dire, combien
je suis teuché de votre, proposition de vous
désister en ma faveur. Mais je vais vous;
répondre avec la môme sincérité qui se dé
gage de chaque argument de votre lettre.
Je ne puis pas et je ne dois pas accepter
votre proposition.
Mon cher député,-tous les deux nous ai
mons notre patrie et nous voulons sincère
ment la servir. Vous me dites : Pour être
à la République, prenez place parmi ses
représentants. .
Mais pour faire œuvre de bon patriote et
de bon Français, je dois avant tout conser
ver mon rang dans l'armée.
Nous différons de point de vue, mpn cher
député ; vous, vous constatez avec tristesse
la faiblesse du gouvernement, l'anarchie
aux portes de la France, l'énervement et le
dégoût universel à l'intérieur.
Quant à moi, je sens venir l'orage du de
hors, qui fera taire tous les différends inté
rieurs. C'est la guerre dans un avenir rap
proché, et ce jour-là. je ne veux pas être
forcé de chercher mon sabre oublié dans
un coin, alors que la France aura besoin
de tous ses généraux et quand elle oubliera
pour un moment tous ses députés.
Voilà pourquoi je n'abandonnerai pas
l'armée, quoi qu'il arrive. Quand, il y a de
cela quelques jours, j'ai sehti toutes les in
trigues ourdies contre moi, j'ai été forcé
d'oublier les règles de la discipline muette,
et d'un seul haussement d'épaules remettre
tout à sa place.
Je ne le regrette pas, mais cela fait, je
suis redevenu un simple soldat et,devant la
situation sérieuse d'aujourd'hui, je préfére
rai toujours ce titre à n'importe quel autre.;
Je suis convaincu que vous m'avez com
pris ; dans le cas où, comme dernier argu
ment, vous me répondriez que, député au
jourd'hui, je. puis redevenir général demain
si la guerre éclatait,je vous répondrai qu'un
général qui veut être digne.d'un comman
dement ne doitpas quitter un seul moment
cette école de commandement qui s'appelle
l'armée.
' Dans l'ère que nous traversons de pro
grès incessant dans le domaine du milita
risme, cesser d'étudier équivaut à être mis
en danger de commettre des fautes le jour
de la lutte.
Ainsi, je reste général. Si je n'étais pas
déjà votre ami, je le deniendrais dès Ce
jour, car il est rare de trouver des hommes
qui, par la crainte de l'avenir, sont capa
bles de propositions comtne celle que vous
venez de me faire.
J'espère être à Paris au mois de dé
cembre et vous assurer personnellement de
mes sympathies.
En attendant ce jour, je vous envoie une
cordiale poignée de main.
Général B uulanger
Les écoles chrétiennes
On lit dans la Semaine religieuse
du diocèse de Paris :
Après la cérémonie de la promulgation
dudécret de béatification du vénérable de
la Salle, le Souverain Pontife, ayant remar
qué parmi les assistants le frère Joseph,
supérieur des Ecoles chrétiennes, le fît ap
peler, à peine rentré dans ses apparte
ments, ,et, mettant, dans son- accueil-.la
bonté paternelle qui le caractérise, témoi
gna au frère supérieur sa satisfaction de ce
qu'il était venu exprès.de France pour rece
voir le décret. Sa Sainteté voulut bien lui
exprimer son bonheur de voir deux Fran
çais parmi les nouveaux bienheureux : Gri-,
gnon de Montfort et Jean-Baptiste de la
Salle. « La pauvre France, ajouta le Pape,;
est bien atteinte par les mauvaises doctri
nes et bien menacée par les conséquences
inévitables des principes qui y dominent. Le
mal est tel que Dieu seul peut , sauver ce
beau pays; c'est pourquoi nous devons
principalement recourir aux remèdes sur
naturels, sans lesquels tous les autres sont
nuls.
C'est donc pour vous une obligation de
promouvoir les idées de foi et d'imprimer
un caractère de plus en plus chrétien à l'é-:
ducation de la jeunesse. Ou vous suscite,
je le sais, des difficultés nombreuses; mais
il faut lutter contre les obstacles et profi
ter delà parcelle de liberté qu'on vous laisse
Eour préserver les enfants de l'ignorance de
lieu et de Jésus-Christ. Employez auprès
de vos frères toute l'influence de votre au
torité, afin qu'ils s'appliquent chaque jour
à devenir plus dévoués à Dieu et au salut
de la jeunesse. L'ennemi vous entoure ; il
essayera de diminuer la vie religieuse dans
vos âmes ; soyez attentifs à rendre vains
ses efforts et à réagir de toute votre puis
sance contre l'envahissement de l'esprit du
monde. Plus que jamais, il faut à l'Eglise
bons religieux.
Voici textuellement la déclaration
da Nord, que résumait hier le télé
graphe :
i L'alerte artificiellement soulevée au su
jet des mouvements de troupes en Pologne
s'en ira commô elle était venue. L 'Invalide
russe a détruit la fantasmagorie qu'elle
mettait en œuvre. La feuille militaire a éta
bli par des chiffres et des détails techniques
le bilan des situations respectives sur les
frontières polonaises et a démontré, que si
une puissance était fondée à se plaindre et
à s'inquiéter des préparatifs d'Etats limi
trophes, ce serait la Russie et non l'Au-r
triche. La Russie laisse à ses voisins la li
berté de pourvoir comme bon leur semble
à leur défense et à leur sauvegardé ; elle
entend user de la même latitude.
On se tromperait si l'on s'imaginait
qu'elle se prêtera à être mise à tout mo
ment sur la sellette ou à subir des interro
gatoires à ce propos. Quant au procès de
tendance qu'on lui fait, à la phraséologie
de circonstance où interviennent le « parti
de la guerre» et les «panslavistes », ce sont
"pures chimères ou purs prétextes. Com
bien de fois faut-il le répéter ? La Russie ne
veut point la guerre ; elle ne la . fera pas.
Mais élle revendique pleinement son droit
de prendre toutes les mesures nécessaires
afin de convertir en un désastre final pour
l'agresseur toute invasion éventuelle do
son territoire. Elle ne serait plus une puis
sance indépendante et une grande puis
sance — et elle prétend rester l'une et l'au
tre — si elle permettait qu'on lui demandât
compte de ce qu'elle croit devoir faire dans
l'intérêt de sa sécurité.
-o-
Nous recevons de Rome la dépêche
suivante : '
Rome, 17 décembre.
, Le prochain consistoire public pour la
canonisation des nouveaux saints est défi
nitivement fixé au 23 décembre.
LE JUBILÉ SACERDOTAL
DE
SA SAINTETÉ LÉON XIII
AMERIQUE
On mande d'Amérique qu'à, l'occa
sion du jubilé du Saint-Père le prési
dent des Etats-Unis, M. Cleveland,
chargera un haut dignitaire de l'Eglise
catholique d'une lettre autographe de
félicitations pour le Pape.
Ce dignitaire, que les journaux amé
ricains nomment déjà, serait S. Em. le
cardinal Gibbons, archevêque de Bal
timore.
. La ville de Milwaukee, siège métro
politain aux Etats-Unis, a célébré le
jubilé pontifical par une procession
solennelle à laquelle assistaient 5,000
personnes. Les rues et les édifices pu
blics avaient été pavoisés aux couleurs
pontificales et de l'Union.
La fête civile, présidée par le maire,
M. O'Neill, à eu lieu au palais de l'ex
position. Une fou}e immense y a as
sisté.
. . AUTRICHE
La Diète de Moravie a voté, sur la
proposition de Mgr l'évêque de Brunn,
la résolution de charger le grand-sé-
néchal du margraviat de Moravie de
présenter au Saint-Père les vœux du
pays à l'occasion de ses noces d'or sa
cerdotales.
La résolution a été votée à l'unani
mité moins une voix, — non pas celle
'd'un des juifs qui siègent à la Diète et
qui tous ont voté la résolution, —mais
celle d'un libéral qui n'a de catholique
que le nom.
Le maître-échevin et les échevins de
la ville royale de Prague ont institué
un comité chargé de transmettre au
Souverain Pontife les vœux de la ca
pitale de l'antique royaume de saint
Venceslas.
BELGIQUE
Le 16 décembre, une réunion géné
rale des étudiants de l'université ca
tholique de Louvain a eu lieu pour
s'occuper de la célébration du jubilé
pontifical.
M. van Gersdaele, président de la;
société des étudiants, a pris le premier
la parole. Il a donné lecture d'une
adresse au Saint-Père.
Mgr Cartuyvels, le vice-recteur de
l'université, a prononcé un très beau
discours, dans lequel il a montré com
bien sera imposant ce spectacle de
tout le monde catholique défilant aux
pieds de Léon XIII et y déposant, avec
son respect et son dévouement, des
richesses sans nombre. Il a ensuite
annoncé qu'aux fêtes du jubilé, à Ro
me, le roi sera représenté par le duc
d'Ursel et son secrétairë, Raoul du
Sari; les^ catholiques belges' par Mgr
l'archevêque de Malines, et l'université
catholique par son recteur magnifique,'
Mgr Abbeloos, et MM. les professeurs
Lefèvre, Descamps et Helleputte. i
M. le professeur Helleputte a pro
noncé un discours plein de chaleur et
vivement applaudi. Devançant ses
confrères, qui ne partiront que dans lé
courant de la semaine prochaine, M.
I-Ielleputte est parti aussitôt pour
Rome.
ETATS-PONTIFICAUX
- . - i
Les chapelains secrets participants
du Saint-Père ont été admis, ce ma
tin, à présenter leurs hommages à Sa
Sainteté, à l'occasion de son jubilé sa-^
cerdotal, ét à lui offrir un précieux
In-pace d'un très beau travail et orné
de l'inscription suivante.
LEONI • XIII • P • M* •
t
NATALI • L * SACERDOTII SVI :
PACALE * SYMBOLVM . ' i
, , - PAGIS ' AVCTORI
VENERABVNDI * DONVM " DEDIMVS
VI * V1RI A * SACRIS V EIVS
Suivent les noms des donateurs, i
GRAND DUCHÉ DE BADE
Un comité de fêtes s'est constitué à
Carlsruhe, la capitale du grand duché
de Bade, pour donner, à l'occasion
des noces d'or de Sa Sainteté, une
grande fête. A la tête du comité s'est
placé M. de Regenauer, président du
conseil des ministres. Toutes les asso
ciations catholiques de la ville pren~;
dront part à cette fête,qui aura lieu le
26 décembre.
Dé plus, il y aura, le 1" janvier, des
fêtes spéciales dans toutes les localités
du grand-duché qui possèdent une
communauté catholique.
GRÈCE
S. G. Mgr Marango, archevêque
d'Athènes, viônt d'arriver à Rome,où il
apporte au Souverain Pontife, à l'oc-
sasion du jubilé, l'hommage et les of
frandes de son peuplé.
Mgr Marango est aussi chargé de
remettre au Pape une lettre autogra
phe de S. M. le roi de Grèce.
MONACO
La maison Armand-Calliat, de Lyon,
termine,en ce moment une croix pas
torale que S. A. le prince Charles III
de Monaco offrira à S. S. Léon XIII, à
l'occasion de son Jubilé sacerdotal.
La grande richesse des pierreries et
des émaux qui rehaussent cette croix
précieuse n'est comparable qu'au goût
parfait qui a présidé à sa conception
artistique.
Nos lecteurs seront heureux de lire
l'intéressant récit que Mgr Chesneau,
vicaire général de Mgr Freppel, vient
d'envoyer à la Semaine religieuse du
diocèse d'Angers, pour rendre compte
de l'audience qu'a daigné lui accorder
le Souverain-Pontife :
Je suis entré seul, tenant en main la
lettre de Monseigneur notre évêque. Le
Pape reçoit dans le cabinet où recevaitPie IX
Il se tenait assis tout au fond, à droite, à
l'extrémité d'une longue table ; son siège
est quelque peu élevé sur un seul gradin.
Cette grande robe blanche, recouverte d'un
manteau blanc à revers blancs légèrement
azurés, me doDna, tout d'abord, l'idée d'une
vision angélique"; mais la grâce du sourire
qui anime ces longues et fines lèvres, la
limpidité, la douceur et la pénétration du
regard, les cheveux blancs qui sortent à
droite et à gauche, sous la calotte blanche,
me rappelèrent que j'étais devant un père,
le père de tout l'univers, chrétien.
Après les génuflexions d'usage, je me
tins à genoux aux pieds de ce Père aimé,
et, bien qu'il m'eût invité à me lever, je fus
heureux de me tenir dans cette attitude
jusqu'à la fin de l'audience.
Le Saint-Père a été le" premier à me par
ler de Mgr Freppel, à me demander des
nouvelles de sa santé, de ses travaux à.Pa-
ris et à Angers. Il m'a dit combien il i'es
timait et l'aimait, combien aussi il lui était
reconnaissant de tout ce qu'il fait et sup
porte pour les intérêts de la religion, en
France, et pour le bien de toute l'Eglise.
Puis il a lu, tout haut, la lettre que je lui
avais remise en arrivant. Vous comprenez
de quels sentiments élevés, dignes, dévoués,
elle était remplie, et comment ces senti
ments se trouvaient exprimés. Le , Saint-
Père en a témoigné une très vive satisfac
tion. J'ai pu, alors, toucher quelques ques
tions particulières. , .
^J'étais là depuis un quart d'heure. Le
moment est venu d'offrir à Sa Sainteté les
présents dont j étais chargé. M. le chanoine
custode, qui attendait dans la salle du
Trône, fut nlors appelé et introduit. Sur le
monticule de chapelets et de médailles que
nous désirions faire bénir, je pris l'écrin
qui renfermait le Denier de Saint-Pierre et
divers autres présents, et, l'ouvrant aux
pieds de Léon XIII, je lui dis: «Très Saint-
« Père, je présente à Votre Sainteté l'hom-
« mage de Mgr l'évêque d'Angers, des çha-
« noines de sa cathédrale, de tous les prê-
« très, de toutes lés communautés religieu-
« ses et de tous les fidèles de son diocèse ;
« et j'exprime, en leur nom, le désir que
« Dieu accorde à Votre Sainteté de vivra
« de longues années encore, et de voir 1»
« prospérité de l'Eglise. -
Le Saint-Père m'a répondu qu'il était
vraiment heureux de ce témoignage fiilial
de l'évêque d'Angers et de son diocèse*
puis il aparlé de la France en' termes pleins!
de regrets et d'espérance... Le mot célè
bre : Gesta Dei per Francos vint alors su»
ses lèvres. Je me permis de citer à mon
tour un verset de l'hymne de Matines qui
me revint en mémoire : « Gallo canen té spes
redit », mais, « ajoutai-je, c'est suivant!
l'air qu'il chante I » et Léon XIII a ri de bojx
cœur. ' ' ' ' ■
Ensuite, nous avons fait l'inventaire, dé
l'écrin. Sur le couvercle se voyaient en or»
les armes du Saint-Père, avec cette dédH
cace : Hommage du diocèse d'Angers à Set
Sainteté Léon X1IL i
• Tout d'abord, c'étaient les chèques re
présentant le Denier de Saint-Pierre, qua
j'avais signés le matin même et que lat
Saint-Père mit sur sa table ; puis une lettre
de deux bons catholiques de l'Anjou, tous#
deux tertiaires de Saint-François,, avec»
trois billets de cent francs qu'ils offraient
au Pape. La lettre témoignait de leur'vé
nération pour le Père commun des fidèles,
et l'argent des fruits. de leurs : travaux,
« bénis par bien des croix n. En retour, ils
demandaient au Saint-Père de vouloir bien
prier pour que leurs enfants s'élèyeut et
vivent toujours dans la pratique, de leurs
devoirs de chrétiens. — « C'est bien tou
chant ! » a dit le Saint-Père . avec émotion»
Ensuite apparut au fond de l'écrin une pa
rure de grande dame : bracelet, bagaa
pendants d'oreilles, broche, chaîne de mon"
tre, avec ce billet anonyme: « Offert au.
« Saint-Père, avec prière de faire servir
« désormais à la gloire de Dieu ce qui a
« servi jusqu'ici à l'orgueil et à la vanité. »
Nouveau geste d'admiration et bon sourire»
du Pape. Tout au fond, se trouvait encore»
une pièce d'or de cent francs offerte par
une personne que j'avais quelque raison do
nommer au Souverain Pontife.
Avantl'audience, comme nous étions dans
la salle d'attente, Mgr délia Volpe m'avait
demandé si, parmi tous f nos colis, grands
et petits, contenant les objets à bénir, il n'y
avait pas de dynamite! J'ai rapporté ce»
trait au Pape et, tous ensemble, nous avons
r-i de bon cœur; Mais voilà que Mgr délia
Volpe ayant été appelé pour nous recon
duire, le Saint-Père fixe sur ce prélat, qu'il
aime beaucoup, ■ un regard qu'il cherchait
vainement à rendre sévère : « Ah 1 dit-il,
vous demandez, s'il y a de la dynamite! »
Et je dus expliquer au bon prélat que>c'é
tait moi qui l'avais dénoncé à Sa. Sain
teté...
Un instant auparavant, nous avions reçtt
la bénédiction que le Saint-Père a voultt
nous donner, pour nous et pour tous ceux
que, nous représentions. Il employa la for
mule solennelle. Avec quelle émotion nous
nous sommes retirés, et quels sentiments
remplissaient nos cœurs, vous. le. compre
nez sans peine. :
Nos lecteurs n'ont pas oublié l'af-f
faire, qui fit tant de bruit il y a
plusieurs riiois, de la mise en vente
par le fisc du mobilier de M. le curé
de Màlissart, privé de son traitement
par nos tristes gouvernants. M. le curé»
de Malissart nous avise que l'opération
va prochainement recommencer.
Voici sa lettre, inspirée par un tout
autre sentiment que-celui du décou-j
ragement :
Monsieur lo rédacteur, '
Permettez-moi de demander à votre ex-*
cellente feuille une bienveillante hospitalité,
afin que vos lecteurs n'oublient pas qu'entra
l'humble curé de Malissart et le haut gou
vernement de la République la paix n'a pas
encore été signée. . f
Dimanche 8 janvier 1888, mes meubles,
saisis de nouveau aujourd'hui même, se
ront, pour la troisième fois eu six ans, ven
dus au plus offrant sur. là place publique»
Pourquoi n'ai-je pas cet honneur, chaqua
année? Je l'ignore, puisque, chaque année,
je refuse l'impôt. "
Cette résistance à la mesure inique qui ai
supprimé mon traitement sans motif a ren
contré, je crois, l'approbation des âmés
fortes et libres; mais,, il faut bien le dire,
elle a soulevé, dans nos rangs mêmes, le
blâme des faibles et des timides.
Quand j'aurais tout l'or d'un nabab, au
nom du droit, je devrais y mettre la tête,
plutôt que de céder à une telle injustice.
Et vous vous étonnez que, sans fortune,
spolié de l'unique ressource qui me permet
de vivre, je refuse de m'incliner humblé-
ment devant les pirateries de nos indignes
maîtres!... J'accepterais librement que les
deniers de la charité chrétienne qui m'as
siste courent l'odieuse et trop probable
chance de servir à parer et à engraisser
leurs sérails!... Ah! de grâce, ne me de
mandez pas tant de vertu. .
D'aures prêtres, direz-vous, vaillants et
dignes, opprimés comme vous, courbent
cependant le front, pacifiquement et sans
bruit, et ne donnent pas le. spectacle d'une
résistance inutile. ;■ . /
J'admire leur patriotisme,- sans avoir la
courage de l'imiter. Mais, lorsque nous
étions près de deux mille victimes de la
brutale'agression d'un gpuvernement per
sécuteur, si notre mobilier,' porté sur deux
mille places publiques, eût été mis à l'en
can, pourriez-vous affirmer que, malgré
leur cynisme,nous n'aurions pas fait reculer
nos lâches détrousseurs ?
Pour , moi, quoi qu'il arrive et malgré
l'inégalité des armes,je soutiendraijusqu'au
bout la lutte sans défaillance. Si je meurs
avant l'heure de la justice, j'emporterai du
moins dans la tombe la légitime espérance
que Dieu, pour obscur que soit le soldat,
lui saura quelque gré d'avoir tenté de ser
vir, dans la mesure'de ses forces, la cause
sacrée de l'Eglise et de la liberté.
- ■ - L'abbé R ey,
Curé de Malissard.
Malissard (Drôme), li décembre 1887.
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