Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1887-10-12
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 12 octobre 1887 12 octobre 1887
Description : 1887/10/12 (Numéro 7237). 1887/10/12 (Numéro 7237).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k706057f
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Mercredi 42 Octobre 1887
N*^7237. —' Edition 'quotidienne
Mercredi 12 Octobre 1887
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ÉDITION QUOTIDIENNE
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it DiPABTBuinn
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L'UNIVERS ne répond gas des manuscrits qui lni sont adressât
ANNONCES
MU. Ch. LAGRANGE, CERF et C le , 6, place de laBourso
FRANCE
PARIS, 11 OCTOBRE 1887
C'est bien décidément une vulgaire
et hbnteuse affaire d'escroquerie à la
décoration que l'affaire du général
Caffarel. Il n'est nullement question
ni de trahison ni même de livraison
de documents. Il est heureux que
l'opinion, qui commençait à se frapper
grâce aux commérages et aux men
songes de nombre de journaux, plus
soucieux de faire du tapage ou de
donner satisfaction à leurs passions
politiques que de faire connaître la vé
rité, soit enfin un peu rassurée. Et en-
cora faudra-t-il du temps pour que le
calme se fasse complètement dans les
esprits, qui déjà s'affolaient. Nous
donnons plus loin une note du Temps,
évidemment faite sur renseignements
sûrs, qui est complètement rassu
rante.
Une autre affaire d'escroquerie à la
décoration s'est produite : trois arres
tations ont eu lieu, et ce ne seraient
pas, dit-on, les dernières. Gette affaire
est tout à fait distincte de celle de Mme
Limouzin.
Nous avons donné hier un résumé
du discours du général Ferron à Char
tres; nous publions aujourd'hui le
texte complet. La ministre de laguerre
s'est proposé un double but : défendre
l'armée, que ne doivent pas atteindre
les scandales du moment, et justifier
sa.conduite vis-à-vis des journaux qui
trouvent que, pour une vulgaire af
faire d'escroquerie, il ne fallait pas
faire tant de tapage.
On attendait avec une impatience
qui se s comprend les explications
que le général Ferron donnerait au
sujet de la fabrication des fusils Le-
bel. On trouvera plus loin le résumé de
ces explications tel que nous le donne
le procès-verbal officiel de la commis-
sion^ Aucune indiscrétion n'est venue
compléter le procès-verbal ; on a com
pris qu'en semblable matière la dis
crétion était un devoir. Mais, hélas!
certains journaux, qui ontjait cam
pagne avec le député radical Borie,
annoncent déjà que l'on ne se conten
tera pas des explications du ministre
de la guerre et que la question sera;
portée à la tribune. C'est un excellent
moyen pour mettre nos voisins au
courant de tout ce qu'on fait chez
nous pour la défense nationale ; on
voit des espions allemands partout ;
trop souvent nous servons complai-
samment d'espions qu'on n'a pas à
payer.
C'est aujourd'hui que M. Spuller
doit être entendu par la commission
du budget au sujet de l'élévation des
rétributions scolaires. Après-demain,
la commission entendra MM. Flourens
et Etienne au sujet de ce qu'on appelle
« l'union indo-chinoise»..
Cela deviendrait-il une habitude?
Hier est mort un député conservateur
du Nord, M. Bottieau, et dej i ce ma
tin on parle de renouveler aans ce dé
partement la tactique de l'abstention
3ui assure pour dijnanche l'élection
e M. Christophle dans l'Orne. Cepen
dant cette espèce d'abdication des con
servateurs a été assez mal accueillie
dans l'opinion conservatrice pour qu'on
ne la renouvelle pas. C'est en s'affir-
xaant, au risque même de nombreux
échecs, et non en s'effaçant, qu'on ga
gne du terrain. Par l'effacement, on
risque de perdre celui-là même qu'on
avait acquis.
Les nouvelles de la Bulgarie confir
ment le.succès du gouvernement, dont
les candidats, en beaucoup de loca
lités, ont été élus sans concurrents.
Sur les désordres déjà signalés, les
renseignements sont contradictoires:
d'après les dépêches favorables au
prince Ferdinand, ces désordres au
raient été de peu d'importance et pro
voqués par les opposants, mécontents
de se voir en telle minorité ; d'après
les opposants, les désordres auraient
été graves et provoqués par l'oppres
sion que les partisans du prince Fer
dinand faisaient subir aux Bulgares
indépendants. C'est probablement le
cas de répéter : In meaio verilas.
Le sultan du Maroc n'est pas mort,
paraît-il; peut-être même se relèvera-
t-il de cette maladie. Alors, ce serait
l'ajournement de la question maro
caine. L'Europe a déjà assez de mo
tifs de trouble, sans que celui-là
vienne s'y ajouter.
Comme l'annonce une dépêche, le
gouvernement marocain donne une
indemnité de 100,000 francs à la fa
mille du capitaine d'artillerie Schmitt,
l'attaché militaire à la légation fran
çaise, traîtreusement assassiné.
Se rappelle-t-on le dernier discours
de M. Jules Ferry ? L'ancien président
du conséil y a laissé voir clairement
qu'il n'est pas sans inquiétude sur le
sort du ministère. lia raison. Plus la
rentrée approche, et moins le minis
tère est solide. Déjà, certains le décla
rent perdu. C'est de l'exagération ;
mais il est bien malade. Les conserva
teurs, enfin, commencent à s'en déta
cher. Ils s'aperçoivent, et M. de Cas-
sagnac le proclamait lui-même l'autre
jour, qu'ils n'ont rien gagné au rem
placement de M. Goblet par M. Rou-
vier. .
Sans doute, et de très bonne foi, on
a pu croire, lorsque le ministère s'est
formé,qu'il avait l'intention,par l'apai
sement des querelles intestines, par
l'arrêt de la persécution religieuse, de
rétablir entre les Français la concorde
civile, dont, plus que jamais,, ils ont
tant besoin. Il, est probable même que
le ministère l'avait, cette intention.
Mais une bonne intention ne suffit pas
pour sortir de l'ornière v .quand l'habi
tude, les mauvais instincts, ia fai
blesse, la peur vous poussent à y res
ter. Dès les premiers jours, il a été fa
cile de voir que MM. Rouvier, Spuller,
Ferron, etc..., ne changeraient rien à
la néfaste marche des choses, et, com
me leurs prédécesseurs, tourneraient le
dos à la saine politique. La droite, qui
avait espéré mieux, beaucoup mieux,
n'a point voulu en démordre immé
diatement. Elle s'est obstinée. Atten
dons les vacances, disait-elle, et les
ministres, libres enfin, à l'abri pour
trois mois des interpellations, encou
ragés par notre constante bienveillan
ce, prendront l'attitude pacificatrice
que, jusqu'ici, certaines phrases va
gues de leurs discours nous ont, seu
les, fait entrevoir. Les vacances sont
venues, elles se terminent, et le cabinet
n'a pas pris l'attitude pacificatrice espé
rée^ au contraire. Il faut se rendre à
l'évidence. La droite est en train de
s'y rendre. Le manifeste de Monsieur
le comte de Paris, de plus, l'a secouée
vivement.Ses vieux, ses bons instincts
de lutte se sont réveillés. Gare au mi
nistère!
JUne seconde raison avait eu autant
d'influence sur la conduite de la droite
vis-à-vis du cabinet. L'avènement des
opportunistes écartait le « péril » Bou-
langer.Eh bien, les députés conserva
teurs se rendent parfaitement compte
d'une chose, qui est l'impossibilité ab
solue, pour l'instant, du retour de M.
Boulanger au pouvoir. Les scènes déplo
rables de la gare de Lyon, les lettres
stupides de XX... Laur, les criminel
les menaces d'émeute proférées par
\'Intransigeant, les insanités de tout
genre enfin, si écœurantes, si alarman
tes, qui ont suivi la chute du général
Boulanger, ce tapage révolutionnaire,
avilissant, qui retentit encore, ne per
mettraient certainement point à celui,
n'importe quel il soit,qui succéderait à
M. Rouvier, d'ici à peu de semaines,
comme président du conseil, de con
fier une seconde fois le ministère de la
guerre au commandant du treizième
corps. Mais on oublie vite en France,
— n'oublions pas du moins cette vé
rité, — on oublie tellement vite, qu'im
possible aujourd'hui, le retour du gé
néral Boulanger sera, peut-être, dans
cinq ou six mois, presque inévitable,
si l'on attend jusqu'à cette époque
pour renverser le cabinet actuel.
Donc, leur intérêt, qui, bien plus, est
celui de la France, fait aux députés
conservateurs une obligation de ne
point temporiser. •
Car la chute du ministère dépend
d'eux. L'appui de la droite empêchait
MM. Rouvier, Spuller et consorts de
tomber. L'abstention de la droite en
traînerait bien vite leur écroulement.
L'hostilité de la droite les tuerait tout
de suite. C'est en vain que, pour gar
der le pouvoir, ils iraient à gauche.
Les radicaux ne veulent point de ces
opportunistes, et quand même ces
opportunistes deviendraient absolu
ment radicaux, les radicaux, sans
faire attention à leur politique, ne
voyant que leurs personnes, persiste
raient toujours dans la haine qu'ils
ont vouée aux successeurs de M. Go
blet. La culbute ne serait donc pas re
tardée d'un instant. Le ministère le
doit sentir, et nous croyons que, mal
gré les conseils de M. Ranc, il n'ira
pas plus à gauche. Il n'ira pas davan
tage à droite; on est fixé sous ce rap
port, Il continuera donc sa politique,
politique moins brutale dans la forme,
mais au fond tout aussi funeste que
celle de ses prédécesseurs, et qui fait
un devoir aux députés de la droite,
même à M. Lepoutre, honnête hom
me, bon Français, de, renverser un
ministère, qui ne rétablit pas l'union
et n'a point ralëntï'la persécution.
La seule chose qui nous paraîtrait
fâcheuse dans la chute de MM. Rou
vier, Spuller, Fallières et Cie, ce serait
qu'ils entraînassent avec eux M. Flou
rens. Nous espérons que cette consé
quence regrettable ne se produira pas.
M. Flourens, en effet, dont le choix
comme ministre des affaires étran
gères avait semblé tout d'abord au
moins bizarre, a réussi fort bien dans
ce poste qui ne fut jamais plus diffi
cile. Le pays a confiance en lui, les
cabinets européens le considèrent. Il
faut qu'il reste où il est- Le futur'pré
sident du conseil comprendra cette
nécessité.
Pierre Veuillot.
La triste affaire du général Caffarel
a produit une véritable panique au
sujet des plans de mobilisation; on a
parlé, non seulement de documents
plus ou moins importants livrés, mais
même d'une trahison à la suite de la
quelle les Allemands auraient eu con
naissance et du « plan de mobilisa
tion» et du «plan de concentration».
L'article suivant du Temps, qui est
évidemment d'un homme compétent
et bien informé, fait justice de ces
craintes sans fondement:
- Parce qu'un sous-chef d'état-major géné
ral du ministère de la guerre va passer
jeudi devant un conseil d'enquête, en rai
son des faits graves qui ont déjà provoqué
sa mise immédiate en non-activité, faut-il
en conclure, comme le bruit s'en est ré
pandu, que d'importants secrets aieut été
révélés à l'étranger par suite du passage
au ministèré de cet officier général ? Les
relations de ce dernier avec une dame dont
l'existence est fort louche et chez qui l'on a
trouvé, en évidence, le portrait d'un ancien
ministre de la guerre, doivent-elles nous
pousser fatalement à croire que cette aven
turière ait été en possession de secrets
d'Etat ?
On parle, non sans inquiétude, de plans
disparus, dérobés ou livrés, et là-dessus les
imaginations se montent et les esprits se
troublent.
Mais qu'on sache donc, une fois pour
toutes, que, tout d'abord, il est impossible
de se procurer notre plan de mobilisation.
Et cela, pour une raison excellente, c'est
qu'il n'existe point. La mobilisation est la
résultante d'un ensemble d'instructions s'a-
dressant aux différentes unités de l'armée
française et ayant pour effet d'établir, dans
chaque région militaire, le mode suivant
lequel il faut procéder pour porter nos
troupes à leur effectif de guerre. C'est une
chose qui peut se faire au grand jour; l'ex
périence si bien réussie dernièrement dans
le 17 e corps en a fourni la meilleure dés
preuves. Chaque Français connaît ses de
voirs; tout est prévu; et, répétons le en
core, le plan dont on parle tant n'existe
pas.
Pour la concentration, c'est autre chose ;
il existe un plan, mais celui-ci n'est pas
commode à transporter. Ce n'est pas, en
effet, une sorte de tableau que notre état-
major a établi, comme on semble le croire;
mais une quantité énorme de travaux, ré
sultats d'une longue série d'études, qui ont
seulement la valeur d'études, et envisagent
tous les cas de concentration probables, en
tenant compte des projets, des mouve
ments, des formations et du nombre des
adversaires auxquels nons pourrions avoir
affaire à un moment donné. C'est un en
semble volumineux, d'un poids considéra
ble, dont le transport nécessiterait l'emploi
de plusieurs tombereaux. Les détails en
sont infinis et comprennent autant de pro
jets qu'il se pourrait produire d'hypothèses
sur chacune de nos frontières.
Pourrait-on s'imaginer un instant notre
état-major ayant élaboré, par exemple, un
seul plan de concentration pour le cas d'une
agression venant de l'Est, et ayant, tout
d'un coup, en raison d'une alliance, à porter
une partie de nos forces d'un autre côté ?
C'est là une supposition qui permet de
saisir à quel point on s'égarerait si l'on ve
nait à penser qu'un rouleau de papiers
suffirait à contenir le plan de nos premiers
moùvements de troupes après la mobilisa
tion.
Ce n'est point tout. Car, si bien combinés
qu'ils soient, si variés qu'ils puissent paraî
tre, tous ces projets sont,à chaque instant,
susceptibles de modifications. L'augmenta
tion des effectifs dans les armées étrangè
res, les changements survenus dans leurs
garnisons, d'une part ; la création de nos
derniers régiments, de l'autre, ainsi que
l'organisation nouvelle de notre infanterie,
ne sont-ils pas autant de faits qui entraî
nent forcément des changements considé
rables dans tous ces travaux que, pour ainsi
dire, chaque jour modifie, que chaque pro
grès perfectionne ?
Et jusqu'au dernier jour, jusqu'à l'heure
même où devra commencer la lutte, qui
donc saurait prédire auquel de ces projets
il conviendra de s'arrêter ? Oserait-on affir
mer qu'il ne faudra pas encore opérer des
changements au dernier instant pour faire
face au plan de notre adversaire ?
On voit qu'il est matériellement impos
sible que tout le travail dès maintenant
établi vienne à disparaître ou puisse être
copié et transporté.-
Ce n'est point une raison pour ne pas
veiller avec le soin le plus jaloux sur ces
précieux documents et ne pas sévir avec la
plu? intraitable rigueur contre les tentatives
indiscrètes, si petites et si partielles qu'elles
puissent être.
Nous recevons la dépêche suivante ;
Montpellier, 11 octobre, 11 h. 10, m.
Le douzième congrès des jurisconsultes
catholiques a été ouvert ce matin, au milieu
d'une nombreuse assistance, par une messe
qu'a célébrée Mgr de Cabrières.
Après la messe, a eu lieu la première
séance générale. M. Lucien Brun, prési
dent, a remercié en termes d'une exquise
délicatesse Mgr de Cabrières de son bien
veillant accueil et de sa présence à la réu
nion, puis il a exposé dans un très remarqua T
ble discours, fréquemment; applaudi, le ca
ractère général et l'ensemble du programme
du congrès, qui comprend l'examen de la
fameuse déclaration des droits de l'homme.
L'éloquent sénateur a défini l'idée révo
lutionnaire qui est à proprement parler la
guerre à la foi chrétienne. Il a conclu que
la Révolution ne sera vaincue que par la
pleine restauration sociale des lois de Diëu.
Une triple salve d'applaudissements a salué
l'admirable péroraison de l'orateur, inspi
rée par 4a foi chrétienne et par l'ardeur du
vrai patriotisme.
Mgr de Cabrières, dans une éloquente
allocution, a souhaité ensuite la bienvenue
aux congressistes » dont l'œuvre, a-t-il dit,
est grande et sainte, parce qu'il n'a jamais
été plus nécessaire d'opposer la barrière
des saines doctrines aux débordements de
l'erreur et de l'immoralité.
« Sans doute, a t-il ajouté, la restauration
du droit chrétien ne sera pas l'œuvre d'un
jour, néanmoins faisons notre devoir et
ayons confiance qu'elle arrivera. »
Sa. Grandeur a terminé en adressant un
délicat hommage à M. de Belcastel, présent
au bureau, et dont le nom a; été salué par
les applaudissements de l'assemblée.
Voici l'article de l'Osservatore romano
que nous signalions hier:
Nous hésitions à croire que M. Crispi
eût réellement prononcé les paroles qui lui
ont été attribuées par la Gazette de Franc
fort, et de fait on les dément aujourd'hui.
Nous hésitions à le croire,non pas que les
paroles prononcées à l'adresse du Souve
rain Pontife nous parussent impossibles
dans la bouche de M. Crispi, puisque tout
est possible et qu'il faut s'attendre à tout
de la part de celui qui permet ' qu'en pré
sence de ses fonctionnaires on adresse des
outrages et des calomnies à la Papauté,
comme celles qui ont été proférées, iln'y a
pas longtemps, à.l'occasion d'une commé
moration publique, qui a réussi d'une façon
digne de l'éyénement qu'il s'agissait de cé
lébrer; mais il nous semblait impossible
que M. Crispi eût l'audace de déclarer le
Pape soumis aux lois nationales comme un
simple citoyen italien,et de se mettre ainsi
en contradiction ouverte avec ces mêmes
lois, qui reconnaissent, que ce soit même
par dérision, les prérogatives souveraines
du Pontife romain.
Mais si M. Crispi n'a pas prononcé ces
paroles, cela n'empêche pas que la pensée
principale qu'elles expriment ne soit; non
seulement celle de M. Crispi, mais aussi
celle de tous les hommes politiques italiens
actuels : la pensée a été reproduite mille
fois par la presse quotidienne.
La question romaine, dit-on t Vexiste
plus ; les relations de l'Italie avec le Saint-
Siège sont une question foncièrement ita
lienne et ne regardant que l'Italie, dans la
quelle le gouvernement ne veut pas et ne
peut pas souffrir la moindre immixtion de
qui que ce soit,
UOsservatore Romano expose ensuite
la tactique du gouvernement italien,
qui, sachant qu'il y a d'autres gouver
nements qui pourraient lui demander
des comptes, essaye de prévenir le pé
ril en déclarant que lui seul est res
ponsable de ses actes, et que personne
n'a le droit de s'en mêler.
Puis il continue ainsi :
■ Les fauteurs de la Révolution italienne
sentent le besoin de répéter, du matin au
soir, qu'ils sont à Rome et qu'ils veulent y
rester, ou que Rome est une conquête in
tangible, ou finalement que personne d'au
delà des frontières italiennes n'a le droit de
s'immiscer dans les choses qui concernent
les rapports entre l'Etat et le Saint-Siège.
Puis, parlant du droit des autres
nations de s'occuper de la situation de
l'Eglise et de la Papauté, l'organe au
torisé du Saint Siège dit :
Les premières notions rudimentaires
juridiques suffisent pour comprendre que
celui qui a un intérêt non seulement légi
time, mais suprême et inaliénable, a aussi
le droit de le faire valoir, et qu'il dit
avoir un tribunal national ou international
auprès duquel il puisse le faire valoir. Si
ce tribunal lui refuse ensuite la justice qu'il
demande, son droit est opprimé; mais il ne
deviendra pas pour cela moins légitime, et
celui qui le lui refuse ne cessera pas de
faire une œuvre odieusement illégitime; Or,
y a-t-il un intérêt plus légitime, et par là
même un droit plus sacré que celui des ca
tholiques du monde entier à l'absolue indé
pendance de leur Chef suprême ? Quel inté
rêt et quel droit plus sacré que celui que
possèdent trois cents millions d'âmes,à pou
voir être assurés que le Magistère infaillible
dont elles dépendent ne puisse, en aucune
façon et par aucune force et puissance exté
rieur#, être entravé dans l'exercice de son
ministère ?
Enfin, au sujet d'une intervention
possible dans Ja question romaine,
1 ' Osservatore Romano rappelle l'inter
vention de l'Italie en faveur d'Italiens
ayant souffert des dommages à l'étran
ger ; il dit notamment :
Quoi donc, la France, l'Autriche, l'Alle
magne et les nations et gouvernements ci
vilisés,ne devraient se lever pour prendre la
défense de leurs sujets que quand il s'agit de
dommages matériels et isolés, et ils de
vraient laisser impunément violer les su
prêmes intérêts moraux de millions et de
millions leurs sujets ?
Il suffit de signaler une pareille contradic
tion, à laquelle se joint la prétention des
révolutionnaires de faire d'une question uni
verselle une simple question intérieure et
d'escamoter à leur profit les - intérêts mo
raux du monde entier, pour démontrer com
bien une telle prétention est vaine et ridi
cule.
L'Italie révolutionnaire demande, en itn
mot, à tous les gouvernements, de man quer
à leurs devoirs les plus élémentaires. Et,en
vérité, il suffit de signaler cettft demande
pour en comprendre toute l'énormité et l'évi
dente injustice.; Telle elle doit apparaître
aux yeux de tous les gouvernements, et
l'évidence, tôt ou tard, doit finir par s'im
poser et triompher de tout sophisme.
Lettres de Pologne et de Russie
tA FORCE PRIME DROIT
Cracovie, 6 octobre.
Le prince de Bismarck est arrivé vers le
déclin de sa vie à une impasse ; il cherche
en vain une issue.La maxime barbare: « la
force prime le droit », qu'il avait adoptée
et qu'il met en pratique depuis plus de
vingt ans, il la voit maintenant retournée
contre lui et sa politique par un bras plua
puissant que le sien. Cela devait arriver
nécessairement, un peu plus tôt, un peu
plus tard,et le grand homme prussien ne
l'ayant pas prévu à temps ne peut se vanter
d'avoir été trèsperspicace.Il a fondé sapoliti-
que sur deux suppositions , que la France
FEUILLETON DE UUNIVERS
BU 12 OCTOBRB 1887
La Religion babylonienne
•ANS »E* RAPPORTS AVEC LA Bl»LÏ
La sainte Ecriture nous parle en plusieurs
endroits des dieux de Babylone. Elle nom
me le dieu Bel, le dieu Nabo, le dieu Méro-
dach. La lettre de Jérémie, placée à la fin
de la prophétie de Baruch, décrit en traits
frappants le culte et la religion des Baby
loniens. .« Vous verrez à Babylone, dit l'au
teur aux.Juifs, des dieux d'or, d'argent, de
pierre et de bois qu'on porte sur les épau
les... Ils portent des couronnes d'or sur
leur tête,... ils sont couverts de vêtements
dp pourpre... L'un d'eux porte un sceptre
comme un. homme, comme le chef d'un
pays ; il tient dans sa main le glaive et la
hache... Ôn allume pour eux des lampes, et
en grand nosabre... Leurs prêtres sont as
sis dans leurs temples, ayant des tuniques
déchirées, la tête" et ia barbe rasées. Ils
poussent des clameurs et des rugissements
contre les dieux, comme dans le repas d'un
mori. Les prêtres leur enlèvent leurs vêler
rments et ils en revêtent leurs femmes et
leurs enfants, pte. »
Dans le livre de Daniel., nous voyons com
ment on offrait tous les jours au dis» Bel,
dans l'un de ses temples, à Babylone, .douze
artabes de farine, quarante brebis et six
amphores de yin. Il était servipa? séante-
dix prêtres. La sainte écriture jxe &ç>.us fiûX
pas d'ailleurs connaître ce qu'étaient Bel,
Mérjdach, Nabo.
Les écrivains anciens ne nous en ont
guèrs appris davantage sur les divinités
babyloniennes. Mais les archéologues mo
dernes peuvent nous fournir aujourd'hui
des renseignements. préoieux sur les dieux
et la religion de la capitale de Nabuchodo-
nosor.et il est intéressant de savoir ce qu'é
taient cette religion et ce culte dont les
Juifs captifs ont eu le spectacle sous les
yeux. Un professeur d'Oxford vient de trai
ter ce sujet dans ses Hibbert Lectures (1).
Nous allons étudier à sa suite quelles ont
été les origines de la religion babylonien
ne, et q?i.elg put été les principaux dieux ;
nous rechercherons eflfirç ce que l'on peut
savoir de l'organisation du culte,
I
Nous n'avons aucun renseignement direct
sur les origines de la religion babylonienne.
Il résulto de là qu'un vaste champ est ou
vert aux conjectures et aux hypothèses des
savants. L'auteur des Lectures a adopté sur
ce point une explication qui est aujourd'hui
à 14 mode, surtout en Angleterre; mais
c'est bien dp tputes les explications qu'on
peut imaginer lapins inacceptable. Il arrive
à des conclusions fort étranges ,et très im
prévues pour des lecteurs français. Ainsi,
d'après lui, Mo^se ne serait pas autre chose
qu'une personnification çol^il. Quant à la
religion primitive des habitants de la jGh&l-
dée, elle aurait, été ce que l'on appelle au
jourd'hui d'un nom barbare le totémisme.
Le toléra désigne, pjjez les tribus de l'Amé
rique du Nord, une sorte d'agent pvptej??
teur, animal ou végétal, qui donne son nom
à la tribu et la protège. Le totémisme est
(1) Ilibberl Lecture pn fuji fîgljgion of the an-
cient Babyloniàn's'. ' By À. H, jïayçe. Lorsdqn,
|887.- '
l'état de civilisation auquel le totem préside.
Les chefs de tribu croient descendre du
totem, animal, végétal ou même minéral,
qui leur a donné son nom.
S'il fallait en croire l'auteur des Lectures,
chacune des anciennes villes des bords de
l'Euphrate aurait eu son totem, quadrupède,
oiseau, plante ou objet matériel quelcon
que, honoré d'abord par la famille princi
pale et devenu ensuite l'objet du culte et le
protecteur de toute la cité. D'après lui,
l'antilope, la gazelle, le bouc, le chien et
même le porc auraient .été les totems de
certaines parties de la Ghaldée. Du culte
du totem d où l'on croyait que les familles
principales étaient sorties, on passe au culte
des animaux, dieux protecteurs d'une ville
ou d'une région ; puis au culte des dieux à
forme humaine, accompagnés, comme d'un
serviteur, de l'animal qui avait été primiti
vement adoré comme un dieu. Arrivée à
cette étape, l'imagination ne s'arrêta plus.
Elle donna au dieu une compagne et une
famille, et ainsi fut oréée toute la mytholo
gie babylonienne.
Le point de départ de cette théorie est
certainement faux. On a beaucoup exagéré
dans ces dernières années le rôle du toté
misme en mythologie. De ce que, dans de
^ombreuses trilras sayv^ges, les individus
portent oii ont pgrté des npms de plantes
ou d'animaux, ii ne s'ensuit aucunement,
qu'autrefois au moins, ces individus aient
cru réellement descendre de la plante oj}
de l'animal ayqijei jis ont emprunté leur
nom. Lés nombreux Renard,'Lebœuf, Le
lièvre, Noyer, Poirier, Narcisse,' etc., qu'on
rencontre parmi nous n'ont ét§ ainsi
nommés pa'pee que les animaux, les arbres
ou la fleur que leur nom rappelle ont été le
totem de leurs ancêtres. Le premier Lebœuf
a pu être surnommé ainsi à cause de sa force-
le premier Leliçvre a pu devoir cette qualifi
cation & sa timidité 6u à sa 'lâcheté? Dans
plusieurs cas, une certaine ressemblance
plus ou moins vague qu'on aura cru remar
quer entre la physionomie de certaines per
sonnes et l'aspect ou l'allure de certains
animaux, a pu faire attribuer à ces per
sonnes le nom de ces animaux.
Mais, quoi qu'il en soit de ce point, même
en admettant que certaines religions ont
été totémistes à une certaine période de
leur transformation, comme plusieurs sa
vants l'admettent pour' l'Egypte et pour la
Grèce, on ne peut soutenir que la religion
babylonienne soit dans ce cas. Sans doute,
il y a pu daps la religion de la Ghaldée un
élément zoomorphique, mais de là au toté
misme la distance est grande.
Les totémistes croient à une certaine pa
renté entre eux et l'objet matériel de leur
culte. Nous ne trouvons aucune croyance
pareille sur les rives de l'Enphrate. Les toté
mistes s'abstiennent d'ordinaire de manger,
de tuer où de faire usage d'une matière
quelconque de l'objet qu'il vénèrent, excepté
dans quelques circonstances particulières et
dans un but sacré : c'est ainsi que les Egyp
tiens habitant un district où l'on adorait un
animal divin ne mangeaient point la cb^ai?.
de celte espèce d'animaujj, Cette pratique
était inconnue à Babylone. L'auteur des
Lectures essaie bien d'expliquer par les
totémistes la distinction des animaux purs
et impurs, mais o'est là une hypothèse sansj
fondement.
La religio^ ph^ldéenne, comme toutes les
fausse^ religions, n'est que la religion véri
table pervertie. Les études astronomiques
amenèrpr/, las habitants dç B&bv^" ne à per .
sonnifler lç§ astre» e t k les adorer. Le vra,j
Di® 1 ?. uevint alors seulement prix&ys ùiter,
pares. A côté des dieurç, çjr plaça naturelle
ment des çiéa§^s; il y. eut ainsi des ïa-
m.iUes divines à. l'image de la famille hu
maine, et la mythologie fut créée. La reli
gion babylonienne n'était au fond,, comme
nous allons le voir, que le sabéismeou culte
des astres, non celui d'animaux ou de plan
tes sacrées.
II
Les sept planètes personnifiées nous ap
paraissent comme les divinités principales
de la Chaldée. On sait que les anciens ran
geaient sous ce nom le soleil et la lune avec
cinq autres planètes proprement dites, les
plus visibles et les plus brillantes. Primiti
vement la lune était plus honorée que le so
leil, comme régnant sur la nuit et mesurant
le temps. Les cinq planètes qu'on vénérait
avec l'astre de la nuit et celui du jour sont
Saturne, Jupiter, Mars, Vénus et Mercure,
pour les désigner parles noms sous lesquels
elles nous sont connues. .
Mérçidaoh, le grand dieu de Babylone,
du temps du moins de Nabuchodonosor,'^
était, pense-t-on, la déification de la pla
nète Jupiter. Le nom de cette divinité nous
est connu par celui de Mérodach-Baladw,
roi de Babylone, dont la Bihl,e panante
l'ambassade au roi Ezéçhiss, à Jérusalem,
et par le prophète Jérémie, qui la nomme
expre^éwent (2). C'était probablement le
même que le dieu Bel,dont parle le livre de
Daniel et dont parle aussi l'historié grec
Hérodote.
Aux yeux des Babyloniens, Mérodach
était le Baa.1, le seigneu,i\ le maître par çx-
cellence, et ils avaient élevé en sod ^ onne ur
un temple qui était «ne " merve jii e s , du
s appe)»'^ E.s a giia. )0 u le temple'
de 1 élév^" on de la Ce temple était un
carré, formé par quatre murs enfermant une
vaste superficie de terrain, aveo des portes
de bronze. L'entrée portait le nom de Ka-
khilibou ou porte de gloire. Au milieu de
l'enceinte s'élevait une tour carrée, à sept
étages, au sommet de laquelle était un sano
tuaire, avec un lit et une table d'or, desti-
■ (2) Sérémie, L. S»
nés au dieu et à la déesse son épouse, Zar-
panit. Au-dessous de la tour était un autre
sanctuaire, et à l'extérieur se trouvaient
deux autels : un petit en or pour les offran
des particulières,et un grand pour le sacri
fice des brebis etl'oblation de l 'encens.
Dans l'enceinte du même temple, le dieu
Nabo ou Nabou, dont le nom entre comme
élément dans le nom fameux de Nabucho-
donosor, avait aussi une sorte de chapelle.
Nabo signifie proprète (3). Il était fils de>
Mérodach et de Zarpanit. La chapelle s'ap.-
peiait E*zida , ee qui veut dit le temple fer
mement établi. Mérodach, Zarpanit et Ns.oo
forment la grande triade divine, da Rabv-
lone.
La plupart de. ces déiaîîs nous sont con
nus par un fragment de Nabu/chodonosor,
cité dans les Mïbbevk Lectures, et où nous
lisons ; ♦< .J'ai rendu aussi brillant que le
Soleil Ka-khalibou la porte de gloire, aussi
yen que la porte d'E-zidia. J'ai couvert d'or
éclatant et de riches ornements les sièges
sacrés, la place àaa dieux qui fixent la des
tinée, lors la grande fête du commence
ment l'année, le huitième et le onzième
j,pqu\dtt mois, quand le roi divin (Mérodach),
le dieu du ©iel et de la terre, le maître da
ciel, descend, pendant que le& autres dieux
du oie' et de la terre l'éçiautent avec une:
brainle respectueuse M se tiennent humble
ment debout devant lui ; il détermine aiors
la destinée $e longs jours et même la des
tinée' do ma vie, J'ai couvert d'or ce saint
des saints, ce sanctuaire du premier né des
dieux, le prince Mérodach. »
Le fils de Mérodach, Nabo, était le diëu
de là science, le grand scribe. On l'iden
tifiait avoç 1» planète Mercure, et par beau
coup de traits il rappelle l'Hermès grec et
le Mercure latin.'On le représentait debout,
(3) Le prophète en hébreu s'appelle nabi. Les
deux mots dérivent d® la même racine.
N*^7237. —' Edition 'quotidienne
Mercredi 12 Octobre 1887
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ÉDITION QUOTIDIENNE
V; , PARIS
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XJh an; .... 55 »
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L'UNIVERS ne répond gas des manuscrits qui lni sont adressât
ANNONCES
MU. Ch. LAGRANGE, CERF et C le , 6, place de laBourso
FRANCE
PARIS, 11 OCTOBRE 1887
C'est bien décidément une vulgaire
et hbnteuse affaire d'escroquerie à la
décoration que l'affaire du général
Caffarel. Il n'est nullement question
ni de trahison ni même de livraison
de documents. Il est heureux que
l'opinion, qui commençait à se frapper
grâce aux commérages et aux men
songes de nombre de journaux, plus
soucieux de faire du tapage ou de
donner satisfaction à leurs passions
politiques que de faire connaître la vé
rité, soit enfin un peu rassurée. Et en-
cora faudra-t-il du temps pour que le
calme se fasse complètement dans les
esprits, qui déjà s'affolaient. Nous
donnons plus loin une note du Temps,
évidemment faite sur renseignements
sûrs, qui est complètement rassu
rante.
Une autre affaire d'escroquerie à la
décoration s'est produite : trois arres
tations ont eu lieu, et ce ne seraient
pas, dit-on, les dernières. Gette affaire
est tout à fait distincte de celle de Mme
Limouzin.
Nous avons donné hier un résumé
du discours du général Ferron à Char
tres; nous publions aujourd'hui le
texte complet. La ministre de laguerre
s'est proposé un double but : défendre
l'armée, que ne doivent pas atteindre
les scandales du moment, et justifier
sa.conduite vis-à-vis des journaux qui
trouvent que, pour une vulgaire af
faire d'escroquerie, il ne fallait pas
faire tant de tapage.
On attendait avec une impatience
qui se s comprend les explications
que le général Ferron donnerait au
sujet de la fabrication des fusils Le-
bel. On trouvera plus loin le résumé de
ces explications tel que nous le donne
le procès-verbal officiel de la commis-
sion^ Aucune indiscrétion n'est venue
compléter le procès-verbal ; on a com
pris qu'en semblable matière la dis
crétion était un devoir. Mais, hélas!
certains journaux, qui ontjait cam
pagne avec le député radical Borie,
annoncent déjà que l'on ne se conten
tera pas des explications du ministre
de la guerre et que la question sera;
portée à la tribune. C'est un excellent
moyen pour mettre nos voisins au
courant de tout ce qu'on fait chez
nous pour la défense nationale ; on
voit des espions allemands partout ;
trop souvent nous servons complai-
samment d'espions qu'on n'a pas à
payer.
C'est aujourd'hui que M. Spuller
doit être entendu par la commission
du budget au sujet de l'élévation des
rétributions scolaires. Après-demain,
la commission entendra MM. Flourens
et Etienne au sujet de ce qu'on appelle
« l'union indo-chinoise»..
Cela deviendrait-il une habitude?
Hier est mort un député conservateur
du Nord, M. Bottieau, et dej i ce ma
tin on parle de renouveler aans ce dé
partement la tactique de l'abstention
3ui assure pour dijnanche l'élection
e M. Christophle dans l'Orne. Cepen
dant cette espèce d'abdication des con
servateurs a été assez mal accueillie
dans l'opinion conservatrice pour qu'on
ne la renouvelle pas. C'est en s'affir-
xaant, au risque même de nombreux
échecs, et non en s'effaçant, qu'on ga
gne du terrain. Par l'effacement, on
risque de perdre celui-là même qu'on
avait acquis.
Les nouvelles de la Bulgarie confir
ment le.succès du gouvernement, dont
les candidats, en beaucoup de loca
lités, ont été élus sans concurrents.
Sur les désordres déjà signalés, les
renseignements sont contradictoires:
d'après les dépêches favorables au
prince Ferdinand, ces désordres au
raient été de peu d'importance et pro
voqués par les opposants, mécontents
de se voir en telle minorité ; d'après
les opposants, les désordres auraient
été graves et provoqués par l'oppres
sion que les partisans du prince Fer
dinand faisaient subir aux Bulgares
indépendants. C'est probablement le
cas de répéter : In meaio verilas.
Le sultan du Maroc n'est pas mort,
paraît-il; peut-être même se relèvera-
t-il de cette maladie. Alors, ce serait
l'ajournement de la question maro
caine. L'Europe a déjà assez de mo
tifs de trouble, sans que celui-là
vienne s'y ajouter.
Comme l'annonce une dépêche, le
gouvernement marocain donne une
indemnité de 100,000 francs à la fa
mille du capitaine d'artillerie Schmitt,
l'attaché militaire à la légation fran
çaise, traîtreusement assassiné.
Se rappelle-t-on le dernier discours
de M. Jules Ferry ? L'ancien président
du conséil y a laissé voir clairement
qu'il n'est pas sans inquiétude sur le
sort du ministère. lia raison. Plus la
rentrée approche, et moins le minis
tère est solide. Déjà, certains le décla
rent perdu. C'est de l'exagération ;
mais il est bien malade. Les conserva
teurs, enfin, commencent à s'en déta
cher. Ils s'aperçoivent, et M. de Cas-
sagnac le proclamait lui-même l'autre
jour, qu'ils n'ont rien gagné au rem
placement de M. Goblet par M. Rou-
vier. .
Sans doute, et de très bonne foi, on
a pu croire, lorsque le ministère s'est
formé,qu'il avait l'intention,par l'apai
sement des querelles intestines, par
l'arrêt de la persécution religieuse, de
rétablir entre les Français la concorde
civile, dont, plus que jamais,, ils ont
tant besoin. Il, est probable même que
le ministère l'avait, cette intention.
Mais une bonne intention ne suffit pas
pour sortir de l'ornière v .quand l'habi
tude, les mauvais instincts, ia fai
blesse, la peur vous poussent à y res
ter. Dès les premiers jours, il a été fa
cile de voir que MM. Rouvier, Spuller,
Ferron, etc..., ne changeraient rien à
la néfaste marche des choses, et, com
me leurs prédécesseurs, tourneraient le
dos à la saine politique. La droite, qui
avait espéré mieux, beaucoup mieux,
n'a point voulu en démordre immé
diatement. Elle s'est obstinée. Atten
dons les vacances, disait-elle, et les
ministres, libres enfin, à l'abri pour
trois mois des interpellations, encou
ragés par notre constante bienveillan
ce, prendront l'attitude pacificatrice
que, jusqu'ici, certaines phrases va
gues de leurs discours nous ont, seu
les, fait entrevoir. Les vacances sont
venues, elles se terminent, et le cabinet
n'a pas pris l'attitude pacificatrice espé
rée^ au contraire. Il faut se rendre à
l'évidence. La droite est en train de
s'y rendre. Le manifeste de Monsieur
le comte de Paris, de plus, l'a secouée
vivement.Ses vieux, ses bons instincts
de lutte se sont réveillés. Gare au mi
nistère!
JUne seconde raison avait eu autant
d'influence sur la conduite de la droite
vis-à-vis du cabinet. L'avènement des
opportunistes écartait le « péril » Bou-
langer.Eh bien, les députés conserva
teurs se rendent parfaitement compte
d'une chose, qui est l'impossibilité ab
solue, pour l'instant, du retour de M.
Boulanger au pouvoir. Les scènes déplo
rables de la gare de Lyon, les lettres
stupides de XX... Laur, les criminel
les menaces d'émeute proférées par
\'Intransigeant, les insanités de tout
genre enfin, si écœurantes, si alarman
tes, qui ont suivi la chute du général
Boulanger, ce tapage révolutionnaire,
avilissant, qui retentit encore, ne per
mettraient certainement point à celui,
n'importe quel il soit,qui succéderait à
M. Rouvier, d'ici à peu de semaines,
comme président du conseil, de con
fier une seconde fois le ministère de la
guerre au commandant du treizième
corps. Mais on oublie vite en France,
— n'oublions pas du moins cette vé
rité, — on oublie tellement vite, qu'im
possible aujourd'hui, le retour du gé
néral Boulanger sera, peut-être, dans
cinq ou six mois, presque inévitable,
si l'on attend jusqu'à cette époque
pour renverser le cabinet actuel.
Donc, leur intérêt, qui, bien plus, est
celui de la France, fait aux députés
conservateurs une obligation de ne
point temporiser. •
Car la chute du ministère dépend
d'eux. L'appui de la droite empêchait
MM. Rouvier, Spuller et consorts de
tomber. L'abstention de la droite en
traînerait bien vite leur écroulement.
L'hostilité de la droite les tuerait tout
de suite. C'est en vain que, pour gar
der le pouvoir, ils iraient à gauche.
Les radicaux ne veulent point de ces
opportunistes, et quand même ces
opportunistes deviendraient absolu
ment radicaux, les radicaux, sans
faire attention à leur politique, ne
voyant que leurs personnes, persiste
raient toujours dans la haine qu'ils
ont vouée aux successeurs de M. Go
blet. La culbute ne serait donc pas re
tardée d'un instant. Le ministère le
doit sentir, et nous croyons que, mal
gré les conseils de M. Ranc, il n'ira
pas plus à gauche. Il n'ira pas davan
tage à droite; on est fixé sous ce rap
port, Il continuera donc sa politique,
politique moins brutale dans la forme,
mais au fond tout aussi funeste que
celle de ses prédécesseurs, et qui fait
un devoir aux députés de la droite,
même à M. Lepoutre, honnête hom
me, bon Français, de, renverser un
ministère, qui ne rétablit pas l'union
et n'a point ralëntï'la persécution.
La seule chose qui nous paraîtrait
fâcheuse dans la chute de MM. Rou
vier, Spuller, Fallières et Cie, ce serait
qu'ils entraînassent avec eux M. Flou
rens. Nous espérons que cette consé
quence regrettable ne se produira pas.
M. Flourens, en effet, dont le choix
comme ministre des affaires étran
gères avait semblé tout d'abord au
moins bizarre, a réussi fort bien dans
ce poste qui ne fut jamais plus diffi
cile. Le pays a confiance en lui, les
cabinets européens le considèrent. Il
faut qu'il reste où il est- Le futur'pré
sident du conseil comprendra cette
nécessité.
Pierre Veuillot.
La triste affaire du général Caffarel
a produit une véritable panique au
sujet des plans de mobilisation; on a
parlé, non seulement de documents
plus ou moins importants livrés, mais
même d'une trahison à la suite de la
quelle les Allemands auraient eu con
naissance et du « plan de mobilisa
tion» et du «plan de concentration».
L'article suivant du Temps, qui est
évidemment d'un homme compétent
et bien informé, fait justice de ces
craintes sans fondement:
- Parce qu'un sous-chef d'état-major géné
ral du ministère de la guerre va passer
jeudi devant un conseil d'enquête, en rai
son des faits graves qui ont déjà provoqué
sa mise immédiate en non-activité, faut-il
en conclure, comme le bruit s'en est ré
pandu, que d'importants secrets aieut été
révélés à l'étranger par suite du passage
au ministèré de cet officier général ? Les
relations de ce dernier avec une dame dont
l'existence est fort louche et chez qui l'on a
trouvé, en évidence, le portrait d'un ancien
ministre de la guerre, doivent-elles nous
pousser fatalement à croire que cette aven
turière ait été en possession de secrets
d'Etat ?
On parle, non sans inquiétude, de plans
disparus, dérobés ou livrés, et là-dessus les
imaginations se montent et les esprits se
troublent.
Mais qu'on sache donc, une fois pour
toutes, que, tout d'abord, il est impossible
de se procurer notre plan de mobilisation.
Et cela, pour une raison excellente, c'est
qu'il n'existe point. La mobilisation est la
résultante d'un ensemble d'instructions s'a-
dressant aux différentes unités de l'armée
française et ayant pour effet d'établir, dans
chaque région militaire, le mode suivant
lequel il faut procéder pour porter nos
troupes à leur effectif de guerre. C'est une
chose qui peut se faire au grand jour; l'ex
périence si bien réussie dernièrement dans
le 17 e corps en a fourni la meilleure dés
preuves. Chaque Français connaît ses de
voirs; tout est prévu; et, répétons le en
core, le plan dont on parle tant n'existe
pas.
Pour la concentration, c'est autre chose ;
il existe un plan, mais celui-ci n'est pas
commode à transporter. Ce n'est pas, en
effet, une sorte de tableau que notre état-
major a établi, comme on semble le croire;
mais une quantité énorme de travaux, ré
sultats d'une longue série d'études, qui ont
seulement la valeur d'études, et envisagent
tous les cas de concentration probables, en
tenant compte des projets, des mouve
ments, des formations et du nombre des
adversaires auxquels nons pourrions avoir
affaire à un moment donné. C'est un en
semble volumineux, d'un poids considéra
ble, dont le transport nécessiterait l'emploi
de plusieurs tombereaux. Les détails en
sont infinis et comprennent autant de pro
jets qu'il se pourrait produire d'hypothèses
sur chacune de nos frontières.
Pourrait-on s'imaginer un instant notre
état-major ayant élaboré, par exemple, un
seul plan de concentration pour le cas d'une
agression venant de l'Est, et ayant, tout
d'un coup, en raison d'une alliance, à porter
une partie de nos forces d'un autre côté ?
C'est là une supposition qui permet de
saisir à quel point on s'égarerait si l'on ve
nait à penser qu'un rouleau de papiers
suffirait à contenir le plan de nos premiers
moùvements de troupes après la mobilisa
tion.
Ce n'est point tout. Car, si bien combinés
qu'ils soient, si variés qu'ils puissent paraî
tre, tous ces projets sont,à chaque instant,
susceptibles de modifications. L'augmenta
tion des effectifs dans les armées étrangè
res, les changements survenus dans leurs
garnisons, d'une part ; la création de nos
derniers régiments, de l'autre, ainsi que
l'organisation nouvelle de notre infanterie,
ne sont-ils pas autant de faits qui entraî
nent forcément des changements considé
rables dans tous ces travaux que, pour ainsi
dire, chaque jour modifie, que chaque pro
grès perfectionne ?
Et jusqu'au dernier jour, jusqu'à l'heure
même où devra commencer la lutte, qui
donc saurait prédire auquel de ces projets
il conviendra de s'arrêter ? Oserait-on affir
mer qu'il ne faudra pas encore opérer des
changements au dernier instant pour faire
face au plan de notre adversaire ?
On voit qu'il est matériellement impos
sible que tout le travail dès maintenant
établi vienne à disparaître ou puisse être
copié et transporté.-
Ce n'est point une raison pour ne pas
veiller avec le soin le plus jaloux sur ces
précieux documents et ne pas sévir avec la
plu? intraitable rigueur contre les tentatives
indiscrètes, si petites et si partielles qu'elles
puissent être.
Nous recevons la dépêche suivante ;
Montpellier, 11 octobre, 11 h. 10, m.
Le douzième congrès des jurisconsultes
catholiques a été ouvert ce matin, au milieu
d'une nombreuse assistance, par une messe
qu'a célébrée Mgr de Cabrières.
Après la messe, a eu lieu la première
séance générale. M. Lucien Brun, prési
dent, a remercié en termes d'une exquise
délicatesse Mgr de Cabrières de son bien
veillant accueil et de sa présence à la réu
nion, puis il a exposé dans un très remarqua T
ble discours, fréquemment; applaudi, le ca
ractère général et l'ensemble du programme
du congrès, qui comprend l'examen de la
fameuse déclaration des droits de l'homme.
L'éloquent sénateur a défini l'idée révo
lutionnaire qui est à proprement parler la
guerre à la foi chrétienne. Il a conclu que
la Révolution ne sera vaincue que par la
pleine restauration sociale des lois de Diëu.
Une triple salve d'applaudissements a salué
l'admirable péroraison de l'orateur, inspi
rée par 4a foi chrétienne et par l'ardeur du
vrai patriotisme.
Mgr de Cabrières, dans une éloquente
allocution, a souhaité ensuite la bienvenue
aux congressistes » dont l'œuvre, a-t-il dit,
est grande et sainte, parce qu'il n'a jamais
été plus nécessaire d'opposer la barrière
des saines doctrines aux débordements de
l'erreur et de l'immoralité.
« Sans doute, a t-il ajouté, la restauration
du droit chrétien ne sera pas l'œuvre d'un
jour, néanmoins faisons notre devoir et
ayons confiance qu'elle arrivera. »
Sa. Grandeur a terminé en adressant un
délicat hommage à M. de Belcastel, présent
au bureau, et dont le nom a; été salué par
les applaudissements de l'assemblée.
Voici l'article de l'Osservatore romano
que nous signalions hier:
Nous hésitions à croire que M. Crispi
eût réellement prononcé les paroles qui lui
ont été attribuées par la Gazette de Franc
fort, et de fait on les dément aujourd'hui.
Nous hésitions à le croire,non pas que les
paroles prononcées à l'adresse du Souve
rain Pontife nous parussent impossibles
dans la bouche de M. Crispi, puisque tout
est possible et qu'il faut s'attendre à tout
de la part de celui qui permet ' qu'en pré
sence de ses fonctionnaires on adresse des
outrages et des calomnies à la Papauté,
comme celles qui ont été proférées, iln'y a
pas longtemps, à.l'occasion d'une commé
moration publique, qui a réussi d'une façon
digne de l'éyénement qu'il s'agissait de cé
lébrer; mais il nous semblait impossible
que M. Crispi eût l'audace de déclarer le
Pape soumis aux lois nationales comme un
simple citoyen italien,et de se mettre ainsi
en contradiction ouverte avec ces mêmes
lois, qui reconnaissent, que ce soit même
par dérision, les prérogatives souveraines
du Pontife romain.
Mais si M. Crispi n'a pas prononcé ces
paroles, cela n'empêche pas que la pensée
principale qu'elles expriment ne soit; non
seulement celle de M. Crispi, mais aussi
celle de tous les hommes politiques italiens
actuels : la pensée a été reproduite mille
fois par la presse quotidienne.
La question romaine, dit-on t Vexiste
plus ; les relations de l'Italie avec le Saint-
Siège sont une question foncièrement ita
lienne et ne regardant que l'Italie, dans la
quelle le gouvernement ne veut pas et ne
peut pas souffrir la moindre immixtion de
qui que ce soit,
UOsservatore Romano expose ensuite
la tactique du gouvernement italien,
qui, sachant qu'il y a d'autres gouver
nements qui pourraient lui demander
des comptes, essaye de prévenir le pé
ril en déclarant que lui seul est res
ponsable de ses actes, et que personne
n'a le droit de s'en mêler.
Puis il continue ainsi :
■ Les fauteurs de la Révolution italienne
sentent le besoin de répéter, du matin au
soir, qu'ils sont à Rome et qu'ils veulent y
rester, ou que Rome est une conquête in
tangible, ou finalement que personne d'au
delà des frontières italiennes n'a le droit de
s'immiscer dans les choses qui concernent
les rapports entre l'Etat et le Saint-Siège.
Puis, parlant du droit des autres
nations de s'occuper de la situation de
l'Eglise et de la Papauté, l'organe au
torisé du Saint Siège dit :
Les premières notions rudimentaires
juridiques suffisent pour comprendre que
celui qui a un intérêt non seulement légi
time, mais suprême et inaliénable, a aussi
le droit de le faire valoir, et qu'il dit
avoir un tribunal national ou international
auprès duquel il puisse le faire valoir. Si
ce tribunal lui refuse ensuite la justice qu'il
demande, son droit est opprimé; mais il ne
deviendra pas pour cela moins légitime, et
celui qui le lui refuse ne cessera pas de
faire une œuvre odieusement illégitime; Or,
y a-t-il un intérêt plus légitime, et par là
même un droit plus sacré que celui des ca
tholiques du monde entier à l'absolue indé
pendance de leur Chef suprême ? Quel inté
rêt et quel droit plus sacré que celui que
possèdent trois cents millions d'âmes,à pou
voir être assurés que le Magistère infaillible
dont elles dépendent ne puisse, en aucune
façon et par aucune force et puissance exté
rieur#, être entravé dans l'exercice de son
ministère ?
Enfin, au sujet d'une intervention
possible dans Ja question romaine,
1 ' Osservatore Romano rappelle l'inter
vention de l'Italie en faveur d'Italiens
ayant souffert des dommages à l'étran
ger ; il dit notamment :
Quoi donc, la France, l'Autriche, l'Alle
magne et les nations et gouvernements ci
vilisés,ne devraient se lever pour prendre la
défense de leurs sujets que quand il s'agit de
dommages matériels et isolés, et ils de
vraient laisser impunément violer les su
prêmes intérêts moraux de millions et de
millions leurs sujets ?
Il suffit de signaler une pareille contradic
tion, à laquelle se joint la prétention des
révolutionnaires de faire d'une question uni
verselle une simple question intérieure et
d'escamoter à leur profit les - intérêts mo
raux du monde entier, pour démontrer com
bien une telle prétention est vaine et ridi
cule.
L'Italie révolutionnaire demande, en itn
mot, à tous les gouvernements, de man quer
à leurs devoirs les plus élémentaires. Et,en
vérité, il suffit de signaler cettft demande
pour en comprendre toute l'énormité et l'évi
dente injustice.; Telle elle doit apparaître
aux yeux de tous les gouvernements, et
l'évidence, tôt ou tard, doit finir par s'im
poser et triompher de tout sophisme.
Lettres de Pologne et de Russie
tA FORCE PRIME DROIT
Cracovie, 6 octobre.
Le prince de Bismarck est arrivé vers le
déclin de sa vie à une impasse ; il cherche
en vain une issue.La maxime barbare: « la
force prime le droit », qu'il avait adoptée
et qu'il met en pratique depuis plus de
vingt ans, il la voit maintenant retournée
contre lui et sa politique par un bras plua
puissant que le sien. Cela devait arriver
nécessairement, un peu plus tôt, un peu
plus tard,et le grand homme prussien ne
l'ayant pas prévu à temps ne peut se vanter
d'avoir été trèsperspicace.Il a fondé sapoliti-
que sur deux suppositions , que la France
FEUILLETON DE UUNIVERS
BU 12 OCTOBRB 1887
La Religion babylonienne
•ANS »E* RAPPORTS AVEC LA Bl»LÏ
La sainte Ecriture nous parle en plusieurs
endroits des dieux de Babylone. Elle nom
me le dieu Bel, le dieu Nabo, le dieu Méro-
dach. La lettre de Jérémie, placée à la fin
de la prophétie de Baruch, décrit en traits
frappants le culte et la religion des Baby
loniens. .« Vous verrez à Babylone, dit l'au
teur aux.Juifs, des dieux d'or, d'argent, de
pierre et de bois qu'on porte sur les épau
les... Ils portent des couronnes d'or sur
leur tête,... ils sont couverts de vêtements
dp pourpre... L'un d'eux porte un sceptre
comme un. homme, comme le chef d'un
pays ; il tient dans sa main le glaive et la
hache... Ôn allume pour eux des lampes, et
en grand nosabre... Leurs prêtres sont as
sis dans leurs temples, ayant des tuniques
déchirées, la tête" et ia barbe rasées. Ils
poussent des clameurs et des rugissements
contre les dieux, comme dans le repas d'un
mori. Les prêtres leur enlèvent leurs vêler
rments et ils en revêtent leurs femmes et
leurs enfants, pte. »
Dans le livre de Daniel., nous voyons com
ment on offrait tous les jours au dis» Bel,
dans l'un de ses temples, à Babylone, .douze
artabes de farine, quarante brebis et six
amphores de yin. Il était servipa? séante-
dix prêtres. La sainte écriture jxe &ç>.us fiûX
pas d'ailleurs connaître ce qu'étaient Bel,
Mérjdach, Nabo.
Les écrivains anciens ne nous en ont
guèrs appris davantage sur les divinités
babyloniennes. Mais les archéologues mo
dernes peuvent nous fournir aujourd'hui
des renseignements. préoieux sur les dieux
et la religion de la capitale de Nabuchodo-
nosor.et il est intéressant de savoir ce qu'é
taient cette religion et ce culte dont les
Juifs captifs ont eu le spectacle sous les
yeux. Un professeur d'Oxford vient de trai
ter ce sujet dans ses Hibbert Lectures (1).
Nous allons étudier à sa suite quelles ont
été les origines de la religion babylonien
ne, et q?i.elg put été les principaux dieux ;
nous rechercherons eflfirç ce que l'on peut
savoir de l'organisation du culte,
I
Nous n'avons aucun renseignement direct
sur les origines de la religion babylonienne.
Il résulto de là qu'un vaste champ est ou
vert aux conjectures et aux hypothèses des
savants. L'auteur des Lectures a adopté sur
ce point une explication qui est aujourd'hui
à 14 mode, surtout en Angleterre; mais
c'est bien dp tputes les explications qu'on
peut imaginer lapins inacceptable. Il arrive
à des conclusions fort étranges ,et très im
prévues pour des lecteurs français. Ainsi,
d'après lui, Mo^se ne serait pas autre chose
qu'une personnification çol^il. Quant à la
religion primitive des habitants de la jGh&l-
dée, elle aurait, été ce que l'on appelle au
jourd'hui d'un nom barbare le totémisme.
Le toléra désigne, pjjez les tribus de l'Amé
rique du Nord, une sorte d'agent pvptej??
teur, animal ou végétal, qui donne son nom
à la tribu et la protège. Le totémisme est
(1) Ilibberl Lecture pn fuji fîgljgion of the an-
cient Babyloniàn's'. ' By À. H, jïayçe. Lorsdqn,
|887.- '
l'état de civilisation auquel le totem préside.
Les chefs de tribu croient descendre du
totem, animal, végétal ou même minéral,
qui leur a donné son nom.
S'il fallait en croire l'auteur des Lectures,
chacune des anciennes villes des bords de
l'Euphrate aurait eu son totem, quadrupède,
oiseau, plante ou objet matériel quelcon
que, honoré d'abord par la famille princi
pale et devenu ensuite l'objet du culte et le
protecteur de toute la cité. D'après lui,
l'antilope, la gazelle, le bouc, le chien et
même le porc auraient .été les totems de
certaines parties de la Ghaldée. Du culte
du totem d où l'on croyait que les familles
principales étaient sorties, on passe au culte
des animaux, dieux protecteurs d'une ville
ou d'une région ; puis au culte des dieux à
forme humaine, accompagnés, comme d'un
serviteur, de l'animal qui avait été primiti
vement adoré comme un dieu. Arrivée à
cette étape, l'imagination ne s'arrêta plus.
Elle donna au dieu une compagne et une
famille, et ainsi fut oréée toute la mytholo
gie babylonienne.
Le point de départ de cette théorie est
certainement faux. On a beaucoup exagéré
dans ces dernières années le rôle du toté
misme en mythologie. De ce que, dans de
^ombreuses trilras sayv^ges, les individus
portent oii ont pgrté des npms de plantes
ou d'animaux, ii ne s'ensuit aucunement,
qu'autrefois au moins, ces individus aient
cru réellement descendre de la plante oj}
de l'animal ayqijei jis ont emprunté leur
nom. Lés nombreux Renard,'Lebœuf, Le
lièvre, Noyer, Poirier, Narcisse,' etc., qu'on
rencontre parmi nous n'ont ét§ ainsi
nommés pa'pee que les animaux, les arbres
ou la fleur que leur nom rappelle ont été le
totem de leurs ancêtres. Le premier Lebœuf
a pu être surnommé ainsi à cause de sa force-
le premier Leliçvre a pu devoir cette qualifi
cation & sa timidité 6u à sa 'lâcheté? Dans
plusieurs cas, une certaine ressemblance
plus ou moins vague qu'on aura cru remar
quer entre la physionomie de certaines per
sonnes et l'aspect ou l'allure de certains
animaux, a pu faire attribuer à ces per
sonnes le nom de ces animaux.
Mais, quoi qu'il en soit de ce point, même
en admettant que certaines religions ont
été totémistes à une certaine période de
leur transformation, comme plusieurs sa
vants l'admettent pour' l'Egypte et pour la
Grèce, on ne peut soutenir que la religion
babylonienne soit dans ce cas. Sans doute,
il y a pu daps la religion de la Ghaldée un
élément zoomorphique, mais de là au toté
misme la distance est grande.
Les totémistes croient à une certaine pa
renté entre eux et l'objet matériel de leur
culte. Nous ne trouvons aucune croyance
pareille sur les rives de l'Enphrate. Les toté
mistes s'abstiennent d'ordinaire de manger,
de tuer où de faire usage d'une matière
quelconque de l'objet qu'il vénèrent, excepté
dans quelques circonstances particulières et
dans un but sacré : c'est ainsi que les Egyp
tiens habitant un district où l'on adorait un
animal divin ne mangeaient point la cb^ai?.
de celte espèce d'animaujj, Cette pratique
était inconnue à Babylone. L'auteur des
Lectures essaie bien d'expliquer par les
totémistes la distinction des animaux purs
et impurs, mais o'est là une hypothèse sansj
fondement.
La religio^ ph^ldéenne, comme toutes les
fausse^ religions, n'est que la religion véri
table pervertie. Les études astronomiques
amenèrpr/, las habitants dç B&bv^" ne à per .
sonnifler lç§ astre» e t k les adorer. Le vra,j
Di® 1 ?. uevint alors seulement prix&ys ùiter,
pares. A côté des dieurç, çjr plaça naturelle
ment des çiéa§^s; il y. eut ainsi des ïa-
m.iUes divines à. l'image de la famille hu
maine, et la mythologie fut créée. La reli
gion babylonienne n'était au fond,, comme
nous allons le voir, que le sabéismeou culte
des astres, non celui d'animaux ou de plan
tes sacrées.
II
Les sept planètes personnifiées nous ap
paraissent comme les divinités principales
de la Chaldée. On sait que les anciens ran
geaient sous ce nom le soleil et la lune avec
cinq autres planètes proprement dites, les
plus visibles et les plus brillantes. Primiti
vement la lune était plus honorée que le so
leil, comme régnant sur la nuit et mesurant
le temps. Les cinq planètes qu'on vénérait
avec l'astre de la nuit et celui du jour sont
Saturne, Jupiter, Mars, Vénus et Mercure,
pour les désigner parles noms sous lesquels
elles nous sont connues. .
Mérçidaoh, le grand dieu de Babylone,
du temps du moins de Nabuchodonosor,'^
était, pense-t-on, la déification de la pla
nète Jupiter. Le nom de cette divinité nous
est connu par celui de Mérodach-Baladw,
roi de Babylone, dont la Bihl,e panante
l'ambassade au roi Ezéçhiss, à Jérusalem,
et par le prophète Jérémie, qui la nomme
expre^éwent (2). C'était probablement le
même que le dieu Bel,dont parle le livre de
Daniel et dont parle aussi l'historié grec
Hérodote.
Aux yeux des Babyloniens, Mérodach
était le Baa.1, le seigneu,i\ le maître par çx-
cellence, et ils avaient élevé en sod ^ onne ur
un temple qui était «ne " merve jii e s , du
s appe)»'^ E.s a giia. )0 u le temple'
de 1 élév^" on de la Ce temple était un
carré, formé par quatre murs enfermant une
vaste superficie de terrain, aveo des portes
de bronze. L'entrée portait le nom de Ka-
khilibou ou porte de gloire. Au milieu de
l'enceinte s'élevait une tour carrée, à sept
étages, au sommet de laquelle était un sano
tuaire, avec un lit et une table d'or, desti-
■ (2) Sérémie, L. S»
nés au dieu et à la déesse son épouse, Zar-
panit. Au-dessous de la tour était un autre
sanctuaire, et à l'extérieur se trouvaient
deux autels : un petit en or pour les offran
des particulières,et un grand pour le sacri
fice des brebis etl'oblation de l 'encens.
Dans l'enceinte du même temple, le dieu
Nabo ou Nabou, dont le nom entre comme
élément dans le nom fameux de Nabucho-
donosor, avait aussi une sorte de chapelle.
Nabo signifie proprète (3). Il était fils de>
Mérodach et de Zarpanit. La chapelle s'ap.-
peiait E*zida , ee qui veut dit le temple fer
mement établi. Mérodach, Zarpanit et Ns.oo
forment la grande triade divine, da Rabv-
lone.
La plupart de. ces déiaîîs nous sont con
nus par un fragment de Nabu/chodonosor,
cité dans les Mïbbevk Lectures, et où nous
lisons ; ♦< .J'ai rendu aussi brillant que le
Soleil Ka-khalibou la porte de gloire, aussi
yen que la porte d'E-zidia. J'ai couvert d'or
éclatant et de riches ornements les sièges
sacrés, la place àaa dieux qui fixent la des
tinée, lors la grande fête du commence
ment l'année, le huitième et le onzième
j,pqu\dtt mois, quand le roi divin (Mérodach),
le dieu du ©iel et de la terre, le maître da
ciel, descend, pendant que le& autres dieux
du oie' et de la terre l'éçiautent avec une:
brainle respectueuse M se tiennent humble
ment debout devant lui ; il détermine aiors
la destinée $e longs jours et même la des
tinée' do ma vie, J'ai couvert d'or ce saint
des saints, ce sanctuaire du premier né des
dieux, le prince Mérodach. »
Le fils de Mérodach, Nabo, était le diëu
de là science, le grand scribe. On l'iden
tifiait avoç 1» planète Mercure, et par beau
coup de traits il rappelle l'Hermès grec et
le Mercure latin.'On le représentait debout,
(3) Le prophète en hébreu s'appelle nabi. Les
deux mots dérivent d® la même racine.
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