Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1887-09-09
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 09 septembre 1887 09 septembre 1887
Description : 1887/09/09 (Numéro 7204). 1887/09/09 (Numéro 7204).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7060248
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
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Vendredi Septembre db87
N° 7204. — Edition quotidienne."
Vendredi 9 Septembre 4887
ÉDITION QUOTIDIENNE
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w ÏT DÉPARTEMENT#
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ioitrnal sera envoyé dès le lendemain de
ia réception de la demande accompagnée
d'un mandat-poste. '
PARIS, 8 SEPTEMBRE 1S87
On s'aperçoit que nous sommes en
vacances ; les journaux s'arrêtent aux
moindres incidents et s'attardent vo
lontiers dansles polémiques. C'est en
grande partie à cela qu il faut attri
buer le prolongement des discussions
. au sujet de l'attitude passée et future
de la droite à l'égard du ministère
Rouvier. Pour le. passé, les commen
taires paraissent en, effet superflus ;
pour l'avenir, ils sont quelque peu
{trématurés. Nous devions néanmoins
es signaler.
Si le jeu.ne. député Laguerre est
content d,a tapage qui se fait mainte
nant autour de sa lettre et qui conti
nue bien le tapage de la,dépêche, c'est
qu'il a le contentement facile. Rares,
très rares sont les journaux qui dai-
gnëat lui accorder les circonstances
atténuantes. Certains, qui voulaient
bie,n ne voir dans la dépêche que-l'er
reur d'un moment, jugent sévèrement
le député qui se livre ccfntre leminis-
tre de la guerre à une série de récri
minations, dont la plupart sont sans
aucun fondement.
Le Figaro était bien informé ; le co
lonel Bouchy est mis en non-activité.Le
ministre de la guerre a trouvé que
trente jours d'arrêts forcés, peine déjà
bien dure pour ùn officier supérieur,
n'étaient pas une punition suffisante
pour quelques paroles imprudentes,
car on ne peut pas reprocher autre
«hose au colonel. Les quelques jour
naux qui essayent de justifier l'acte
ministériel, les uns en haine du com
mandement militaire, les autres à
fitre d'officieux, le reconnaissent eux-
mêines. Tout le monde ne jugera pas
comme le général Ferron.
Les adhésions n'arrivent pas nom
breuses au citoyen Hovélacque pour le
congrès des délégués des conseils mu
nicipaux ; la circulaire du .ministre
Fallières n'aura pas été sans effet.
Jusqu'ici quatre conseils munici
paux seulement ont adhéré.; ce n'est
pas brillant, d'autant qu'on ne peut
dire que la qualité remplace la quan
tité.
; A défaut de l'entrevue des empe
reurs d'Allemagne et de Russie déci
dément démentie, eii aura la visite
du comte Kalnocky au prince de Bis
marck ? Mais quelle sera la significa
tion de cette visite? Serait-ce l'indice
d'un rapprochement plus intime de
l'Autriche et de l'Allemagne? ou bien
M. de Bismarck essayera-t-il de décider
l'Autriche à laisser à la Russie toute
liberté d'action, en Bulgarie? Cette der
nière hypothèse, qui serait pour t'Au
triche une espèce d'abdication, paraît
peu vraisemblable.
On parlé avec une certaine insis
tance d'un voyage du prince Ferdi
nand en Hongrie; ce serait même,
d'après certains nouvellistes, un
moyen pour lé prince de se sortir de
l'aventure où il regretterait déjà de
s'être trop vite engagé. Il ne re
viendrait plus à Sofia. Mais d'autres
nouvelles, démentant le voyage, disent
au contraire que la situation s améliore
en Bulgarie et qu'on va procéder aux
élections.
Le mieux est d'attendre.
Le Jacobinisme
ET LA SUPPRESSION DES OCTROIS
I
Les conservateurs n'ont aucune rai
son pour aimer l'octroi beaucoup plus
que leurs. adversaires., La suppression
des octrois était proposée pendant la
pérodé électorale par un candidat con
servateur, M, Hervé,qui en faisait l'ob
jet d'une conférence. Il s'agissait de
remplacer les taxes : d!octroi par une
taxe unique sur l'alcool. D'autres sys
tèmes, en assez grand nombre, ont
été proposés, car la question est vieille:
assurance obligatoire, impôt unique
sur lé revenu, etc.
Un projet soumis au Parlement par
M. Yves- Guyot et un groupe de ses
amis propose l'impôt sur le capital.
C'est une partie d'un projet plus géné-
* rai, popularisé naguère par M. Méhier
dans une tournée de conférences où
M. Yves Guyot l'assistait. M. Ménier,
propriétaire d'un capital- considérable
en terres et en matériel d'industrie,
semblait un singulier apôtre de l'im
pôt unique sur le capital; mais il pen
sait que l'exemple donnerait du poids
à la doctrine, et que l'étonnement du
premier abord se changerait vite en
conviction. M. Yves Guyot l'encoura
geait fort : de la collaboration du ca
pitaliste et de l'économiste naquit une
. série de brochures et même d'assez
gros.volumes. . ,
M. Ménier* mourut. Les héritiers dé
son industrie ne parurent point suivre
les mêmes vues d'apostolat écono
mique, du moins n'ont-ils pas fait la
même propagande, et M. Yves Guyot
resta, sans compétition, prophète de
4'knpôt sur le capital. Il n'était pas
mauvais de connaître ces origines.
Il est juste aussi d'en convenir, M
Yves Guyot eut tout l'esprit de suite,:
toute l'obstination, toute l'infatigable
assurance qu'il faut pour faire la for
tune d'une idée, fût-ce une idée fausse.;
Toute occasion lui fut bonne : corres
pondance, yoyages, congrès, candidat
ture, élection au conseil; municipal et,
enfin, à la Chambre des députés; 1
aucun moyen d'influence, aucune res-,
source de publicité ne furent perdus.
Le rapport qu'il présenta à la Chambré
des députés est à peu prèsla vingtième
répétition , d'un /effort tenté ailleurs.
Aussi pëut-on le; considérer comme le
dernier mot du système. Si on ajouté
qu'il est signé d'une centaine de noms
significatifs, comme ceux de MM. La
guerre, Clemenceau, Clovis Hugues,*
Barodet, les deux Raspail, Brialou,
Labordère, de Mortillet (de Saint-Ger
main), Delattre, Michou, " Planteau,
Cantagrel, Camélinat et toute la crème
du parti farouche, il n'y a plus de {
doute : le capital est à la veille d'un
assaut.
Ainsi le; projet soumis au Parlement
(à la date du 22 juin 1886) diffère
d'abord de tous ; les projets antérieurs
sur la suppression de l'octroi, par son
caractère politique et ses allures de
réforme socialiste. C'est un impôt sur
tout politiqué proposé contre les ri
ches, pour alléger sans doute, si c'est,
Î)0ssible, le sort de la classe électorale
a plus pauvre,: et tout au moins en
tous cas pour satisfaire ses rancunes.
M.< Yves /Guyot s'en : défend en vain.
Les collègues qui ont signé son projet
ne s'en défendraient pas tous. Mais M.
Guyot lui-même se trahit dans un cri
de guerre qui termine son rapport:
prévoyant avec colère l'échec possible
de. sa proposition, il entrevoit le jour
où la passion, triomphant à la suite
d'un coup de bascule de scrutin, pour
rait accomplir avec violence l'œuvre
injustement ajournée, établir enfin,
« au lieu d'impôts de justice, des im
pôts de revanche ».
Justice ou revanche, voici intégra
lement le projet du groupe de M. Yves
Guyot pour substituer à l'octroi un
« impôt de justicé » :
Art. 1 er . — Les conseils , municipaux des
communes soumises à l'octroi sont autori
sés à remplacer leurs octrois par des taxes
directes.
Art. 2. — Us pourront eux-mêmes déter
miner l'assiette de fces taxes ,
Art. 3. — Si ces taxes sont proportion
nelles, ia déclaration qui les aura établies
deviendra exécutoire un mois après le dé
pôt qui en aura été fait à la préfecture ou
à. la sous-préféeture.
Si ces taxes spnt progressives, il sera sta
tué par une loi sur le taux de la progres
sion.
Art. 4. — Les communes pourront, à
l'aide de centimes additionnels ajoutés au
principal de leurs taxes locales, se.rédimer
envers le trésor des taxes perçues pour son
compte à l'entrée des villes.
C'est tout, mais cela suffit. Au pre
mier coup d'œilrien n'apparaît de bien
cruel, mais il faut relire ce petit chef-
d'œuvre pour le bien saisir. C'est un
diamant qu'il faut,voir sous différents
iours. Depuis bien des années, le Par
lement n a pas été saisi d'une proposi
tion d'un jacobinisme plus pur et d une
simplicité d'exécution plus admirable.
Supposons pouruïimoment ces qua
tre articles votés tels et quels et pro
mulgués de puis ce matin. Le conseil
municipal de Paris délibère immédia
tement que l'octroi, de Paris est sup
primé. Le soir, fête générale : danses
dans les carrefours,manifestations en
l'honneur du- conseil municipal, ri
pailles chez les marchands de vin,
couronnement d.e bustes de la Répu
blique,, chant de la Carmagnole e t de
la Marseillaise.
Le pouveir exécujtif ne peut pas an
nuler cette délibération comme il en a
pu annuler tant d'autres, puisqu'elle
est faite en exécution d'une loi. Com
me l'octroi de Paris produit 151 mil
lions, le conseil municipal délibère,
— on peut bien dire décrète — l'impôt
progressif sur le capital immobilisé,de
suite saisissable et qui .ne saurait se
dérober. Les propriétaires rembourse
ront les millions de l'octroi. Le pou
voir exécutif n'y peut rien. Le pouvoir
législatif lui-même ne peut que statuer
sur le taux de là progression. Le con
seil municipal pourra même se passer
de cette approbation, s'il veut avoir la
modestie de n'imposer aux propriétai
res qu'une taxe parfaitement, écra
sante, mais sëulpment proportionnelle.
Ce n'est qu'un commencement : les
taxes directes{o.vï. I er ) ne frappent pas
uniquement la, propriété. Le rôle des
taxes directes est la liste des gens
suspects de pouvoir payer au gré du
conseil municipal, ?souverain législa
teur et juge en même temps. Le con
seil municipal c'est la majorité du con
seil municipal, c'est-à-dire le groupe
qui renferme lui-même la commis
sion : écrivons comité,ei le système est
complet. On voit maintenant la portée
des signatures qui ornent le rapport
de M. Yves Guyot. On comprend par
faitement ce que Veulent ces mes
sieurs, comment tant de radicaux fa
meux s'intéressent si vivement à la
suppression des octrois avec M. Yves
Guyon, et comment ils dédaignent ou
ignorent, la. plupart, si profondément
la même question quand elle n'est
plus qu'une question d'affaires. .
[ L'impôt progressif .décrété par les
assemblées municipales " serait-il Voté
par le Parlement? Et pourquoi non?
Chaciin de ces votes n'aura qu'une
importance légale insuffisante très
vraisemblablement pour soulever une
opposition qui fasse la majorité. Est-
ce que les députés et les sénateurs de
Paris feraient la majorité? Et qu'im-
I>ortè aux autres ? Leurs électeurs ne
eur en demanderont pas compte.
Et d'ailleurs, faudrait-il compter sur
l'opposition , des / élus de Paris ? Est-
ce que les élus de Lyon, de Marseille,
empêcheraient le Parlement de sanc
tionner la délibération des assem
blées municipales de-Lyon ou de Mar
seille? Ils ne sont pas la majorité,
et les élus des autres régions ne.sont
pas intéressés dans cette affaire : peut-
etre ne la voteraient-ils pas sans quel
que malin plaisir.
Les grandes villes de France,où la
loi du nombre donne la farce à la
classe électorale la moins éclairée et
la plus passionnée en même temps,
seraient en quelques mois livrées à la
tyrannie sans recours, aux ; décrets
sans* appel des comités radicaux. Ce
serait, mille fois pis encore, dans les
villes.de moyenne importance, où les
influences locales et les questions de
personnes s'imposent dans toutes les
délibérations importantes. Et les villes
industrielles donc ! Ah! le joli serpent
niché sous les décombres des. octrois
immolés de la main de M. Guyot!
Saint-Etienne, Yoiron, Decazeville,
Montceau-les-Mines, etc... suppriment
leurs octrois ou se rédiment envers
l'Etat. Tout aussitôt la compagnie est
à la discrétion de M. Basly. de M. Ca
mélinat, de M. Laguerre, • qui taxent
tout aussitôt le capital de. la compa
gnie avec une intégrité sans pareille
et un entrain joyeux. Si le capital im
mobilier d'un mineur estimé à peu
de chose., est taxé cent sous, le capital
de la compagnie, la mine et l'exploita
tion, qui sont la fortune du pays, sont
taxés proportionnellement^ sans objec
tion ni discussion possible, la taxe,
proportionnelle étant exigible un mois
après le dépôt de la délibération à la
sous-préfecture.
Du petit, au grand ce serait néces
sairement partout la .même chose. Ah !
les propriétaires, face à face avec les
socialistes armés de la loi Guyot, pas
seraient un joli quart d'heure ! Quelle
fête! citoyens, quelle fête! M. Yves
Guyot serait en quinze jours le démo
crate le plus célèbre des deux mondes.
Mais non, ce n'est qu'un rêve, ce se
rait trop beau!
Les. octrois méritent assurément un
examen sérieux, une étude plus ap
profondie et plus solide que ne paraît
le croire M. Yves Guyot, qui n'y a vu
qu'une thèse de meeting,un thème de
propagande et d'agitation ,• peut-être
un instrument de stérile popularité.
Les arguments recherchent avant tout
l'effet à produire sur les auditeurs, la
sensation, l'applaudissement. Le rap
port est faible : beaucoup de banalités
émises avec importance, agrémentées
de figures, de graphiques de savante i
apparence et d'un complet enfantil
lage, beaucoup de ces violences ap-:
plaùdies dans les réunions publiques
et qui font sourirele lecteur.Un exem
ple entre vingt : M. Yves Guyot pense
qu'avant la Révolution l'impôt était
«. l'instrument d'exploitation d'un cer
tain nombre de personnes par un plus
petit nombre». Ilrappelle que la Révo
lution supprima les octrois et que cet
impôt iie reparut que pendant la pé
riode réactionnaire de l'an VII. La
rentrée de l'octroi avec la réaction
devient alors sopabre et dramatique.
La phrase de M. Guyot est remar
quable:
Cet impôt qui rentrait sournoisement,
honteusement, en rampant, en se faufi
lant, ne tarda pas à grandir, à s'enfler,
crescendo, comme la calomnie de Basile I
Cela veut dire simplement que cet
impôt s'est accru depuis qu'il est ré
tabli, mais Basile soit ! Ce qui va cres
cendo depuis quelques années, c'est le
déficit. Les dépenses extravagantes de
aïcisation, de constructions scolaires,
qui ont accablé le budget de toutes les
villes à octroi, en sont la meilleure
cause, «t le déficit a commencé en
même temps que ces folies. Or, M.
Guyot et ses amis n'ont cessé d'y ap
plaudir vivement:
Au moment même où nous lisions
son rapport,M- Guyot ne se réjouissait-
il pas de l'expulsion des sœurs de l'hô-
jital Necker et de l'hospicedesEnfants-
Maladeè? Les religieuses de l'hôpital
coûtaient à la Ville de 4 à 5,000 francs,
jes infirmières laïques en coûteront
40,000. La différence est bien plus con
sidérable encore à l'hospice de l'En-
fant-Jésus, où les sœurs étaient plus '
nombreuses. Au total, voilà 100,000
rancs de plus au budget de la Ville,
100,000 francs, de plus à tirer de l'oc
troi, grâce à la politique de M. Guyot
que l'octroi désole ! Tous les ans nous
payerons 100,000 francs (une jolie
rente) pour que cet économiste trouve
le loisir d'accord? r sa conduite et ses
discours.
Mais laissons M. Guyot et venons à
l'octroi.
(A suivrej
G. Bois.
La polémique continue entre divers
journaux de droite sur, la nécessité,
l'utilité ou le danger qu'il y a, pour
les^ conservateurs, à se rapprocher, de»
lu République.
. Nous trouvons, ce matin, dans le
Gaulois , une lettre. bien raisonnable
de M. Dugué de la Fauconnerie, adres
sée au chef et membre de la , droite
républicaine,M.Lepoutre, sur ce 'grave
sujet. ■
M. Dugué de la Fauconnerie tient
à paraître original, paysan et bon
homme. Original ? Il l'est, mais, un
peu moins qu'il ne ,le croit Paysan ?
II ne l'est pas du tout, mais en se sur
veillant avec soin il arrive à bien jouer
son rôle. Bonhomme? Il ne faut pas
trop s'y fier. M. Lepoutre, nous en
sommes sûr, va trouver qu'avec son
air de grande bonhomie, ,1e député de
l'Orne a parfois la raillerie mordante.
Ce pauvre M. Lepoutre !
M. Dugué de la Fauconnerie lui,dé
clare tout d'abord qu'il a été sur le
point, un instant, de prendre la plu
me pour féliciter son,« cher collègue»
de son adhésion solennelle et ardente à.
la république. Il pensait que M. Le
poutre n'avait pu se rallier de cette
façon éclatante que pour de très, bon
nes raisons, et .il en était au comble de
joie. Nous allons donc avoir un gou
vernement juste et sage ! s'est-il écrié.
La-chose est certaine, puisque mon
cher collègue Lepoutre nous invite à
nous ranger tous derrière ce gouver
nement !
Je me suis dit que, sans doute, vos élec
teurs du Nord, étaient extrêmement con
tents de la façon dont vont les choses; que
l'apaisement s'était fait chez vous ; que les
affaires avaient repris; que l'on était revenu
dans votre département aux vraies et sai
nes traditions d'une administration conci
liante et paternelle, et que, craignant d'être
débordé par l'enthousiasme de vos com
mettants, vous aviez tenu non-seulement à
affirmer le vôtre, mais à nous le faire par
tager. ■ - '
Et comme, d'une autre côté, je ne pou
vais pas admettre qu'un homme politique
tel que vous, et un chef de parti, qui a fa
talement charge d'âmes, tentât de nous
entraîner dans une,voie dangereuse, c'est-
à-dire pût nous demander de prêter notre
concours à un gouvernement dont il n'au
rait pas d'avance approfondi les intentions
et mesuré l'énergie, je me suis senti ras
suré, si rassuré que j'avais même com
mencé un- petit manifeste, dans lequel je
disais à mes Percherons : « Rassurez-vous,
chers électeurs ! Si M. Lepoutre a écrit
une lettre comme celle qu'il vient d'écrire,
c'est; qu'il a de bonnes raisons pour ça ;
vous pouvez dormir tranquilles I »
Seulement, M. Dugué de la Fau
connerie s'est souvenu tout à coup que
son rôle de paysan, — paysan de Nor
mandie ! — lui prescrivait la pruden
ce, et, avant de continuer son petit
manifeste, il a' pensé qu'il était sage
d'écrire « à deux amis, l'un à Paris,
l'autre à Roubaix, pour savoir si leur
contentenient était aussi complet
que » celui de M. Lepoutre.
Ôr, voici ce qu'on a répondu à M.
Dugué de lia. Fauconnerie.
De Roubaix :
, Jamais les choses n'ont été plus mal
qu'elles ne vont depuis quelque temps, et
il semble vraiment que l'administration
prenne à tâche de désavouer, par tous ses
actes, les théories libérales et sages ex
posées récemment par le président du con
seil.
Qu'il s'agisse de bureaux de tabacs, de
recettes buralistes, dénominations déjuges
de paix, de percepteurs, d'agents voyërs,
d'instituteurs, de facteurs ou de canton
niers; qu'il s'agisse de renouveler le3 com
missions administratives des hospices, les
bureaux de bienfaisance, les commissions
de révision des listes électorales ; qu'il
s'agisse de désigner les répartiteurs,, les
membres de3 commissions d'hygiène, les
délégués cantonaux, etc., etc., c'est' tou
jours le même système d'intolérance, le
même esprit d'exclusion I
Des services rendus, des titres ac
quis, de la valeur personnelle, de la mora
lité des candidats, il n'est jamais question :
la seule préoccupation est de complaire à la
poignée d'intrigants, d'avocassiers de cam
pagne, de vauriens, qui, depuis quinze ans,
se sont donné la mission, dans chaque can
ton, dans chaque commune, d'espionner et
de dénoncer les braves gens. C'est ceux-là
qu'en toutes circonstances on continue il
consulter, et dont on persiste à. servir les
passions et les rancunes, à l'exclusion des
maires comme moi, & qui on ne pardonne
pas d'avoir soutenu la liste sur laguelle
était M. Lepoutre! - ,
. De Paris :
M. Proudhon, préfet de l'Aisne, m'écrit
mon.correspondant,celui qui a déclaré,l'au
tre jour que, iionimé par un gouvernement
de combat, il continuerait à combattre non
seulement les conservateurs; mais les répu
blicains, suspects de modérantisme, est tou
jours à son poste, et il paraît même cer
tain . qu'il ne sera' pas déplacé. Son cas
n'est d'ailleurs pas isplé, et.un certain nom
bre de ses collègues ont ténu un langage
analogue,"sans que le ministre de l'intérieur
paraisse s'en être ému !
-En lisant ces deux lettres,qui jettent
un jour, bien triste et bien vrai, sur la
situation où continue d'être la France,
le brave et simple paysan Dugué, aba
sourdi, n'a pu retenir cette exclama
tion pleine de bon sens : « Quel drôle
de moment M.. Lepoutre a choisi pour
crier : Vive la République ! » En effet !
Et M. Dugué de la Fauconnerie, se-
vère mais juste, s'adressant à M. Le
poutre, continue en ces termes, qui,
de la part d'un paysan, ne sont vrai
ment pas mal du tout :
La vérité est, cher collègue, qu'il ne faut
pas multiplier, des . manifestations que perr
sonne ne songe à vous demander.
Rien ne vous oblige; à coup sûr,de .crier:
« Vive le roi'! » pas davantage : « Vive
l'empereur !• » encore mbins : ' « A bas la
République ! » (ce qui vous ferait, mener au
poste, sans môme que vous puissiez, vu le
cas de flagrant 1 délit,. invoquer "l'immunité
parlementaire;) mais rien né vous obligenoii
.plus à crier,;. « Vive la république! » Ne
criez donc rien, .c'est si, simple; et vous
n'avez qu'à lire ce qii'ont écrit de vous les
journaux républicains, vous verrez à quoi
ça sert de leur faire des petites 'risettes...'
Çà n« sert à rien du tout.
Voilà de sages discours, dont pour
raient profiter aussi les conservateurs
qui; sans se rallier ouvertement, com
me l'honorable M. Lepoutre, à la. Ré
publique/soutiennent cependant avec
obstination le ministère actuel. /
Qu'il est dommage de penser que,
très probablement, ni M. Lepoutre, ni
les autres n'en profiteront! Pourvu, au
moins, que M. Dugué de la Fauconne
rie s'en souvienne !
Pierre Veuillot.
Où en est le congrès dès délégués
des conseils municipaux de toute la
France ? Le grandiose appel des con
seillers m unicipaux de Paris ne sem
ble pas avoir obtenu grand succès. Le
télégraphe nous signalait hier l'échec
de l'appel parisien au conseil munici
pal de Lyon ; voici quelques détails
sur ce qui s'est passé à-cette occasion :
Lyon, 7 septembre.
A la séance du conseil municipal de. Lyon
qui a eu lieu la nuit dernière, M. Des
champs a demandé si l'administration avait
reçu une communication du conseil munici
pal de Paris relative au congrès des com
munes et quelle suite elle entendait donner
à cette affaire. ; .
Le maire a répondu qu'il savait, en effet,
reçu la communication dont il s'agit. Mais
il ne croit pas qu'il y ait lieu de délibérer
sur ce sujet : l'illégalité de la délibération
du consèjl. municipal de Paris n'était pas
douteuse; elle a d'ailleurs été annulée par
décret du geuveraement. Le conseil muni
cipal de Lyon n'a donc pas à s'en occu
per.- *
• M. Picornot dépose alors une proposition
tendant à l'envoi d'une délégation au con
grès des communes. II. demande la discus
sion immédiate de sa proposition..
La discussion s'engage. Le conseil re
pousse la proposition à , une très grande
majorité.
Jadis la « démocratie parisienne »,
par déférence pour , sa sœur de Lyon,
choisissait pour député l'illustre Ba
rodet, alors presque ' inconnu, et la
« démocratie lyonnaise » reconnais
sait ce bon procédé en, élisant à son
tour l'ex-communard Ranç. Qu'est de
venue cette belle entente ? .
A défaut de l'adhésion du conseil
municipal de Lyon, les, conseillers
nvunicipaux en ont récolté, deux dans
la Nièvre; le conseil municipal de
Guerigny ; a choisi pour son délégué
au congrès le citoyen Massé, sénateur
radical. Il est vrai que la délibération
a été annulée par un arrêté préfecto
ral en date du 5 septembre.
Le conseil municipal de Nevers a
fait mieux encore : à la majorité de
dix voix contre sf jp.t, après avoir flé
tri « les agissemiants d'un ministère
affolé, émanant de' l'accouplement hon
teux delà réaction et de l'opportunisme,
et sans s'arrêter autrement que pour les
mépriser aux ridicules menaces du mi?
nistre de l'intérieur », il a décidé qu'il
enverrait deux dlélégués.' au congrès,
afin de travailler « a.u développement
des idées républicaines, radicales >et
socialistes, et de jeter à la face des mir
nistres sans verjjogne, qui osent gou
verner la Fraqce républicaine, les
mots de droit, de justice et de liberté,
qu'en annulant à l'avance cette ; déli
bération ils ont cyniquement violés. »
Voilà. qui est fier, et comme . les
conseillers municipaux qui ont voté
la réunion du congrès et lancé l'appel
aux départements vont triompher !
Cependant cela ne leur fait .encore que
quatre adhérents sur 36,000 conseils.
Des malintentionnés pourront trouver
que c'est peu est que les « ridicules
menaces du ministre de l'intérieur »
n'ont pas été sans produire un certain
effet.
A défaut des conseils municipaux
qui se dérobent, les conseillers pari
siens auront les groupes et comités
socialistes ; ainsi. Te comité socialiste
de vigilance des intérêts, municipaux
de Paris commutiique à Y Intransigeant
l'ordre du jour suivant, voté dans la
séance du vendredis septembre :
Le comité, estimant que le ,congrès des
communes (proposition Vaillant) ne peut
qu'être utile au progrès des idées démo
cratiques et à la propagation des principes
de; la Révolution, engage le bureau du .con
seil municipal à persévérer dans la décision
et l'attitude qu'il a prises dans cette ques
tion.:' , • . !.
Il invite les municipalités de France à
tenir pour nulle et non avenue la décision
du ministère allemand que nous subissons
et qui, une fois .de plus, a saisi l'occasion
de manifester ses tendances réaction
naires.
Nous ne croyons pas que l'invitation
dudit comité socialiste ait grand effet
sur lés conseils municipaux, qui con
tinueront sans doute à se dérober. Ce
fait est assez significatif, en ce, qu'il
aggrave singulièrement la responsa,-
bilité des ministères républicains pas
sés, présents ét futurs^ Volontiers, les
hommes d'ÏItat de la république, quel
que peu honteux du mal qu'ils font
ou laissent faire, se font présenter
copajne inyjuissants dans /leurs, jour-,
naux officieux. L'abstention, des ';cori~:
seils municipaux, dont beaucoup sont
aux mains des.radicaux;prouve qu'ils:
ne sont pas aussi désarmés et impuis-'
sants qu'ils youdraientile faire croire.
Ea campagne
tiA MOBILISATION DU 17 e CORPS
IV
f Carcassonne, 7. septembre.
. . L'expérience de mobilisation se.poursuit
régulièrement, ponctuellement,dans les con-,
ditions du programme. Carcassonne, est la
base de toutle corps d'armée. Là sont réu
nies, avec le quartier général, les réserves
de tous les,corps et de tous les services. Les
approvisionnements y' sont concentrés,.
Vingt-six fours .roulants et huit fours de
campagne établis sur la place d'Armes, de
Carcassonne fournissent du pain à tout lo
corps d'armée. Ce pain ést absolument sem-
blable.au pain de munition fabriqué jour
nellement dans ■ la manutention militaire.
Le lecteur : désire-t-il savoir exactement,
sans être obligé de venir à Carcassonne, ce
que c'est qu'un . four roulant et un.four de
campagne ? Ùn four roulant ressemble assez
de loin à une locomobjie à vapeur. Un cais-
Son en.tôle aux angles. arrondis, de. 3 à 4
mètres de long, monté, sur .4 roues et sur
monté d'une cheminée sur le devant, tel est
l'aspect du foyr roulant. L'intérieur est di-
visé en deux ou trois compartiments. Char
que foùr peut cuire à la ibis une centaine
de rations.Le four de campagne est en tôle
également, mais ils ne se compose que
d'une simple carcasse qui se pose sur le
sol. et que l'on entoure de briques refrac-
taires et de terre. La terre est prise dans
un trou de .80 centimètres qui se fait devant
la bouche du four, ce qui permet au ; bou
langer d'enfourner ou de. retirer les pains
s$ns se baisser.
, A part l'alimentation et les approvision
nements, chaque division est censée agir
isolément et lutter l'une contre l'autre, la
trente-troisième marchant, de Toulouse sur
Carcassonne, : la trente-quatrième s'avan-
çant de Carcassonne, à Toulouse. On sait
déjà que la rencontre doit aveir lieu au sud
de, Castelnaudary, le . 9 septembre. Il ; y
aura,d'ici là peu dé chose à signaler.
. Mais déjà, comme je le faisais pressentir
hier, on peut juger si l'expérience de mobi
lisation aura.eû une sérieuse utilité et si on
est fondé à la considérer comme un succès.
Nous examinerons aujourd'hui le premier
de ces deux points de vue.
/ Je ne crois pas qu'il y ait un seul mili
taire sérieux qui.conteste aujourd'hui l'uti
lité de l'expérience qui se fait en ce moment.
S^ins doute, si l'on pouvait savoir d'avance
contre qui et dans quelles conditions se fera
la prochaine guerre,, et . si l'on pouvait en
faire incognito' et en secret une répétition
générale, cela vaudrait mieux à tous
égards. Mais on m'accordera sans peine
que l'expérience ne pouvait être ramenée à
ces. termes-là., Les manœuvres ne pou
vaient avoir envuequ'un ennemi imaginaire.
Il eût été même plus que dangereux d'agir
autrement.; c'eût été révéler à nos voisins
des dispositions et des plans qu'il est de la
dernière importance de maintenir secrets:
Mais, comme je l'ai déjà exposé, il y a dàns
la première partie de la mobilisation toute
une série d'opérations auxquelles on né sau
rait trop s'exercer en temps de paix. Sans
.doute,plusieurs de ces opérations sout l'ob
jet d'exercices fréquents dans les garnisons;
mais ce ne sont là que 5 des exercices par
tiels, réduits,: fragmentaires, qui ne don
nent «pas une idée ^suffisante de l'ensemblo
ët qui est de les ajuster et de les faire cadrer
èntre eux sans compter qu'il y a plusièurs
de ces opérations qui ne peuvent avoir-lieu
qu'en cas de mobilisation. Telles sont les
réquisitions de chevaux, les transports de
troupes nombreuses par chemin de fer, les
cantonnements - resserrés, la mise en mou-
vemerlt du service télégraphique, des am
bulances, etc. • /
, : Or; quoique tout ce . qu'il y aura à faire
en cas de mobilisation générale soit prévu,
écrit et porté à la connaissance .de chaque
militaire en ce qui le" concerne, rien ne
grave ces choses-là dans la mémoire com
me la pratique. Assurément si le général
Bréart avait averti les officiers de son corps
d'ariûéé que dans " trois mois il interroge
rait chacun, d'eux sur la partie de la mobi
lisation qui le concerne, les réponses n'au
raient pas été aussi sûres; aussi,exactes et
aussi complètes-qu'elles pourront l'être
quand le 17 e q,orps rentrera dans ' ses quar
tiers. Aujourd'hui on peut affirmer en
toute certitude que, dans le 17 e corps, cha
cun est parlaitement fixé sur le rôle qu'il
aura .à jouer en cas de mobilisation. S'il a
été commis quelque faute, elle est mainte-
iiévnt reconnue, et, s'il fallait recommencer,
elle ne sérait plus commise. Mais ce n'est
pas seulement "le 17° corps qui profite de
l'expérience. Les: autres corps d'armée sui
vent d'un regard attentif tout ce qui. s'y
passe. Les récits des journaux militaires,
les rapports des délégués des autres corps,
enfin les communications qui ne manqueront
pas d'être faites, soit officiellement.par. la
ministre de la guerre,.soit officieusement
parles écrivains, et savants militaires, por
teront à la connaissance de/ toute l'armée
les résultats de cet ess,ai avec toutes les le
çons qu 'il renferme. Ces leçons 1 consisteront
.en modifications apportées à divers articles
du plan primitif que la pratique aura,fait
reconnaître défectueux,,et en reçotnmanda-
tions plus instantes relativement M J'obser-
vatioj}-de certainsipojnts du règlement que
.l'on; aura été, g&Têralement porté à négli
ger. D$.~to'ates façons, l'armée retirera un
fjès grand fruit de cette mobilisation./ . >
Mais ce n.e spnt pas seulement les oS-
Vendredi Septembre db87
N° 7204. — Edition quotidienne."
Vendredi 9 Septembre 4887
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Pow là saison des eaux et.des vacances,
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quotidienne au prix de 5 fr. 50. — Le
ioitrnal sera envoyé dès le lendemain de
ia réception de la demande accompagnée
d'un mandat-poste. '
PARIS, 8 SEPTEMBRE 1S87
On s'aperçoit que nous sommes en
vacances ; les journaux s'arrêtent aux
moindres incidents et s'attardent vo
lontiers dansles polémiques. C'est en
grande partie à cela qu il faut attri
buer le prolongement des discussions
. au sujet de l'attitude passée et future
de la droite à l'égard du ministère
Rouvier. Pour le. passé, les commen
taires paraissent en, effet superflus ;
pour l'avenir, ils sont quelque peu
{trématurés. Nous devions néanmoins
es signaler.
Si le jeu.ne. député Laguerre est
content d,a tapage qui se fait mainte
nant autour de sa lettre et qui conti
nue bien le tapage de la,dépêche, c'est
qu'il a le contentement facile. Rares,
très rares sont les journaux qui dai-
gnëat lui accorder les circonstances
atténuantes. Certains, qui voulaient
bie,n ne voir dans la dépêche que-l'er
reur d'un moment, jugent sévèrement
le député qui se livre ccfntre leminis-
tre de la guerre à une série de récri
minations, dont la plupart sont sans
aucun fondement.
Le Figaro était bien informé ; le co
lonel Bouchy est mis en non-activité.Le
ministre de la guerre a trouvé que
trente jours d'arrêts forcés, peine déjà
bien dure pour ùn officier supérieur,
n'étaient pas une punition suffisante
pour quelques paroles imprudentes,
car on ne peut pas reprocher autre
«hose au colonel. Les quelques jour
naux qui essayent de justifier l'acte
ministériel, les uns en haine du com
mandement militaire, les autres à
fitre d'officieux, le reconnaissent eux-
mêines. Tout le monde ne jugera pas
comme le général Ferron.
Les adhésions n'arrivent pas nom
breuses au citoyen Hovélacque pour le
congrès des délégués des conseils mu
nicipaux ; la circulaire du .ministre
Fallières n'aura pas été sans effet.
Jusqu'ici quatre conseils munici
paux seulement ont adhéré.; ce n'est
pas brillant, d'autant qu'on ne peut
dire que la qualité remplace la quan
tité.
; A défaut de l'entrevue des empe
reurs d'Allemagne et de Russie déci
dément démentie, eii aura la visite
du comte Kalnocky au prince de Bis
marck ? Mais quelle sera la significa
tion de cette visite? Serait-ce l'indice
d'un rapprochement plus intime de
l'Autriche et de l'Allemagne? ou bien
M. de Bismarck essayera-t-il de décider
l'Autriche à laisser à la Russie toute
liberté d'action, en Bulgarie? Cette der
nière hypothèse, qui serait pour t'Au
triche une espèce d'abdication, paraît
peu vraisemblable.
On parlé avec une certaine insis
tance d'un voyage du prince Ferdi
nand en Hongrie; ce serait même,
d'après certains nouvellistes, un
moyen pour lé prince de se sortir de
l'aventure où il regretterait déjà de
s'être trop vite engagé. Il ne re
viendrait plus à Sofia. Mais d'autres
nouvelles, démentant le voyage, disent
au contraire que la situation s améliore
en Bulgarie et qu'on va procéder aux
élections.
Le mieux est d'attendre.
Le Jacobinisme
ET LA SUPPRESSION DES OCTROIS
I
Les conservateurs n'ont aucune rai
son pour aimer l'octroi beaucoup plus
que leurs. adversaires., La suppression
des octrois était proposée pendant la
pérodé électorale par un candidat con
servateur, M, Hervé,qui en faisait l'ob
jet d'une conférence. Il s'agissait de
remplacer les taxes : d!octroi par une
taxe unique sur l'alcool. D'autres sys
tèmes, en assez grand nombre, ont
été proposés, car la question est vieille:
assurance obligatoire, impôt unique
sur lé revenu, etc.
Un projet soumis au Parlement par
M. Yves- Guyot et un groupe de ses
amis propose l'impôt sur le capital.
C'est une partie d'un projet plus géné-
* rai, popularisé naguère par M. Méhier
dans une tournée de conférences où
M. Yves Guyot l'assistait. M. Ménier,
propriétaire d'un capital- considérable
en terres et en matériel d'industrie,
semblait un singulier apôtre de l'im
pôt unique sur le capital; mais il pen
sait que l'exemple donnerait du poids
à la doctrine, et que l'étonnement du
premier abord se changerait vite en
conviction. M. Yves Guyot l'encoura
geait fort : de la collaboration du ca
pitaliste et de l'économiste naquit une
. série de brochures et même d'assez
gros.volumes. . ,
M. Ménier* mourut. Les héritiers dé
son industrie ne parurent point suivre
les mêmes vues d'apostolat écono
mique, du moins n'ont-ils pas fait la
même propagande, et M. Yves Guyot
resta, sans compétition, prophète de
4'knpôt sur le capital. Il n'était pas
mauvais de connaître ces origines.
Il est juste aussi d'en convenir, M
Yves Guyot eut tout l'esprit de suite,:
toute l'obstination, toute l'infatigable
assurance qu'il faut pour faire la for
tune d'une idée, fût-ce une idée fausse.;
Toute occasion lui fut bonne : corres
pondance, yoyages, congrès, candidat
ture, élection au conseil; municipal et,
enfin, à la Chambre des députés; 1
aucun moyen d'influence, aucune res-,
source de publicité ne furent perdus.
Le rapport qu'il présenta à la Chambré
des députés est à peu prèsla vingtième
répétition , d'un /effort tenté ailleurs.
Aussi pëut-on le; considérer comme le
dernier mot du système. Si on ajouté
qu'il est signé d'une centaine de noms
significatifs, comme ceux de MM. La
guerre, Clemenceau, Clovis Hugues,*
Barodet, les deux Raspail, Brialou,
Labordère, de Mortillet (de Saint-Ger
main), Delattre, Michou, " Planteau,
Cantagrel, Camélinat et toute la crème
du parti farouche, il n'y a plus de {
doute : le capital est à la veille d'un
assaut.
Ainsi le; projet soumis au Parlement
(à la date du 22 juin 1886) diffère
d'abord de tous ; les projets antérieurs
sur la suppression de l'octroi, par son
caractère politique et ses allures de
réforme socialiste. C'est un impôt sur
tout politiqué proposé contre les ri
ches, pour alléger sans doute, si c'est,
Î)0ssible, le sort de la classe électorale
a plus pauvre,: et tout au moins en
tous cas pour satisfaire ses rancunes.
M.< Yves /Guyot s'en : défend en vain.
Les collègues qui ont signé son projet
ne s'en défendraient pas tous. Mais M.
Guyot lui-même se trahit dans un cri
de guerre qui termine son rapport:
prévoyant avec colère l'échec possible
de. sa proposition, il entrevoit le jour
où la passion, triomphant à la suite
d'un coup de bascule de scrutin, pour
rait accomplir avec violence l'œuvre
injustement ajournée, établir enfin,
« au lieu d'impôts de justice, des im
pôts de revanche ».
Justice ou revanche, voici intégra
lement le projet du groupe de M. Yves
Guyot pour substituer à l'octroi un
« impôt de justicé » :
Art. 1 er . — Les conseils , municipaux des
communes soumises à l'octroi sont autori
sés à remplacer leurs octrois par des taxes
directes.
Art. 2. — Us pourront eux-mêmes déter
miner l'assiette de fces taxes ,
Art. 3. — Si ces taxes sont proportion
nelles, ia déclaration qui les aura établies
deviendra exécutoire un mois après le dé
pôt qui en aura été fait à la préfecture ou
à. la sous-préféeture.
Si ces taxes spnt progressives, il sera sta
tué par une loi sur le taux de la progres
sion.
Art. 4. — Les communes pourront, à
l'aide de centimes additionnels ajoutés au
principal de leurs taxes locales, se.rédimer
envers le trésor des taxes perçues pour son
compte à l'entrée des villes.
C'est tout, mais cela suffit. Au pre
mier coup d'œilrien n'apparaît de bien
cruel, mais il faut relire ce petit chef-
d'œuvre pour le bien saisir. C'est un
diamant qu'il faut,voir sous différents
iours. Depuis bien des années, le Par
lement n a pas été saisi d'une proposi
tion d'un jacobinisme plus pur et d une
simplicité d'exécution plus admirable.
Supposons pouruïimoment ces qua
tre articles votés tels et quels et pro
mulgués de puis ce matin. Le conseil
municipal de Paris délibère immédia
tement que l'octroi, de Paris est sup
primé. Le soir, fête générale : danses
dans les carrefours,manifestations en
l'honneur du- conseil municipal, ri
pailles chez les marchands de vin,
couronnement d.e bustes de la Répu
blique,, chant de la Carmagnole e t de
la Marseillaise.
Le pouveir exécujtif ne peut pas an
nuler cette délibération comme il en a
pu annuler tant d'autres, puisqu'elle
est faite en exécution d'une loi. Com
me l'octroi de Paris produit 151 mil
lions, le conseil municipal délibère,
— on peut bien dire décrète — l'impôt
progressif sur le capital immobilisé,de
suite saisissable et qui .ne saurait se
dérober. Les propriétaires rembourse
ront les millions de l'octroi. Le pou
voir exécutif n'y peut rien. Le pouvoir
législatif lui-même ne peut que statuer
sur le taux de là progression. Le con
seil municipal pourra même se passer
de cette approbation, s'il veut avoir la
modestie de n'imposer aux propriétai
res qu'une taxe parfaitement, écra
sante, mais sëulpment proportionnelle.
Ce n'est qu'un commencement : les
taxes directes{o.vï. I er ) ne frappent pas
uniquement la, propriété. Le rôle des
taxes directes est la liste des gens
suspects de pouvoir payer au gré du
conseil municipal, ?souverain législa
teur et juge en même temps. Le con
seil municipal c'est la majorité du con
seil municipal, c'est-à-dire le groupe
qui renferme lui-même la commis
sion : écrivons comité,ei le système est
complet. On voit maintenant la portée
des signatures qui ornent le rapport
de M. Yves Guyot. On comprend par
faitement ce que Veulent ces mes
sieurs, comment tant de radicaux fa
meux s'intéressent si vivement à la
suppression des octrois avec M. Yves
Guyon, et comment ils dédaignent ou
ignorent, la. plupart, si profondément
la même question quand elle n'est
plus qu'une question d'affaires. .
[ L'impôt progressif .décrété par les
assemblées municipales " serait-il Voté
par le Parlement? Et pourquoi non?
Chaciin de ces votes n'aura qu'une
importance légale insuffisante très
vraisemblablement pour soulever une
opposition qui fasse la majorité. Est-
ce que les députés et les sénateurs de
Paris feraient la majorité? Et qu'im-
I>ortè aux autres ? Leurs électeurs ne
eur en demanderont pas compte.
Et d'ailleurs, faudrait-il compter sur
l'opposition , des / élus de Paris ? Est-
ce que les élus de Lyon, de Marseille,
empêcheraient le Parlement de sanc
tionner la délibération des assem
blées municipales de-Lyon ou de Mar
seille? Ils ne sont pas la majorité,
et les élus des autres régions ne.sont
pas intéressés dans cette affaire : peut-
etre ne la voteraient-ils pas sans quel
que malin plaisir.
Les grandes villes de France,où la
loi du nombre donne la farce à la
classe électorale la moins éclairée et
la plus passionnée en même temps,
seraient en quelques mois livrées à la
tyrannie sans recours, aux ; décrets
sans* appel des comités radicaux. Ce
serait, mille fois pis encore, dans les
villes.de moyenne importance, où les
influences locales et les questions de
personnes s'imposent dans toutes les
délibérations importantes. Et les villes
industrielles donc ! Ah! le joli serpent
niché sous les décombres des. octrois
immolés de la main de M. Guyot!
Saint-Etienne, Yoiron, Decazeville,
Montceau-les-Mines, etc... suppriment
leurs octrois ou se rédiment envers
l'Etat. Tout aussitôt la compagnie est
à la discrétion de M. Basly. de M. Ca
mélinat, de M. Laguerre, • qui taxent
tout aussitôt le capital de. la compa
gnie avec une intégrité sans pareille
et un entrain joyeux. Si le capital im
mobilier d'un mineur estimé à peu
de chose., est taxé cent sous, le capital
de la compagnie, la mine et l'exploita
tion, qui sont la fortune du pays, sont
taxés proportionnellement^ sans objec
tion ni discussion possible, la taxe,
proportionnelle étant exigible un mois
après le dépôt de la délibération à la
sous-préfecture.
Du petit, au grand ce serait néces
sairement partout la .même chose. Ah !
les propriétaires, face à face avec les
socialistes armés de la loi Guyot, pas
seraient un joli quart d'heure ! Quelle
fête! citoyens, quelle fête! M. Yves
Guyot serait en quinze jours le démo
crate le plus célèbre des deux mondes.
Mais non, ce n'est qu'un rêve, ce se
rait trop beau!
Les. octrois méritent assurément un
examen sérieux, une étude plus ap
profondie et plus solide que ne paraît
le croire M. Yves Guyot, qui n'y a vu
qu'une thèse de meeting,un thème de
propagande et d'agitation ,• peut-être
un instrument de stérile popularité.
Les arguments recherchent avant tout
l'effet à produire sur les auditeurs, la
sensation, l'applaudissement. Le rap
port est faible : beaucoup de banalités
émises avec importance, agrémentées
de figures, de graphiques de savante i
apparence et d'un complet enfantil
lage, beaucoup de ces violences ap-:
plaùdies dans les réunions publiques
et qui font sourirele lecteur.Un exem
ple entre vingt : M. Yves Guyot pense
qu'avant la Révolution l'impôt était
«. l'instrument d'exploitation d'un cer
tain nombre de personnes par un plus
petit nombre». Ilrappelle que la Révo
lution supprima les octrois et que cet
impôt iie reparut que pendant la pé
riode réactionnaire de l'an VII. La
rentrée de l'octroi avec la réaction
devient alors sopabre et dramatique.
La phrase de M. Guyot est remar
quable:
Cet impôt qui rentrait sournoisement,
honteusement, en rampant, en se faufi
lant, ne tarda pas à grandir, à s'enfler,
crescendo, comme la calomnie de Basile I
Cela veut dire simplement que cet
impôt s'est accru depuis qu'il est ré
tabli, mais Basile soit ! Ce qui va cres
cendo depuis quelques années, c'est le
déficit. Les dépenses extravagantes de
aïcisation, de constructions scolaires,
qui ont accablé le budget de toutes les
villes à octroi, en sont la meilleure
cause, «t le déficit a commencé en
même temps que ces folies. Or, M.
Guyot et ses amis n'ont cessé d'y ap
plaudir vivement:
Au moment même où nous lisions
son rapport,M- Guyot ne se réjouissait-
il pas de l'expulsion des sœurs de l'hô-
jital Necker et de l'hospicedesEnfants-
Maladeè? Les religieuses de l'hôpital
coûtaient à la Ville de 4 à 5,000 francs,
jes infirmières laïques en coûteront
40,000. La différence est bien plus con
sidérable encore à l'hospice de l'En-
fant-Jésus, où les sœurs étaient plus '
nombreuses. Au total, voilà 100,000
rancs de plus au budget de la Ville,
100,000 francs, de plus à tirer de l'oc
troi, grâce à la politique de M. Guyot
que l'octroi désole ! Tous les ans nous
payerons 100,000 francs (une jolie
rente) pour que cet économiste trouve
le loisir d'accord? r sa conduite et ses
discours.
Mais laissons M. Guyot et venons à
l'octroi.
(A suivrej
G. Bois.
La polémique continue entre divers
journaux de droite sur, la nécessité,
l'utilité ou le danger qu'il y a, pour
les^ conservateurs, à se rapprocher, de»
lu République.
. Nous trouvons, ce matin, dans le
Gaulois , une lettre. bien raisonnable
de M. Dugué de la Fauconnerie, adres
sée au chef et membre de la , droite
républicaine,M.Lepoutre, sur ce 'grave
sujet. ■
M. Dugué de la Fauconnerie tient
à paraître original, paysan et bon
homme. Original ? Il l'est, mais, un
peu moins qu'il ne ,le croit Paysan ?
II ne l'est pas du tout, mais en se sur
veillant avec soin il arrive à bien jouer
son rôle. Bonhomme? Il ne faut pas
trop s'y fier. M. Lepoutre, nous en
sommes sûr, va trouver qu'avec son
air de grande bonhomie, ,1e député de
l'Orne a parfois la raillerie mordante.
Ce pauvre M. Lepoutre !
M. Dugué de la Fauconnerie lui,dé
clare tout d'abord qu'il a été sur le
point, un instant, de prendre la plu
me pour féliciter son,« cher collègue»
de son adhésion solennelle et ardente à.
la république. Il pensait que M. Le
poutre n'avait pu se rallier de cette
façon éclatante que pour de très, bon
nes raisons, et .il en était au comble de
joie. Nous allons donc avoir un gou
vernement juste et sage ! s'est-il écrié.
La-chose est certaine, puisque mon
cher collègue Lepoutre nous invite à
nous ranger tous derrière ce gouver
nement !
Je me suis dit que, sans doute, vos élec
teurs du Nord, étaient extrêmement con
tents de la façon dont vont les choses; que
l'apaisement s'était fait chez vous ; que les
affaires avaient repris; que l'on était revenu
dans votre département aux vraies et sai
nes traditions d'une administration conci
liante et paternelle, et que, craignant d'être
débordé par l'enthousiasme de vos com
mettants, vous aviez tenu non-seulement à
affirmer le vôtre, mais à nous le faire par
tager. ■ - '
Et comme, d'une autre côté, je ne pou
vais pas admettre qu'un homme politique
tel que vous, et un chef de parti, qui a fa
talement charge d'âmes, tentât de nous
entraîner dans une,voie dangereuse, c'est-
à-dire pût nous demander de prêter notre
concours à un gouvernement dont il n'au
rait pas d'avance approfondi les intentions
et mesuré l'énergie, je me suis senti ras
suré, si rassuré que j'avais même com
mencé un- petit manifeste, dans lequel je
disais à mes Percherons : « Rassurez-vous,
chers électeurs ! Si M. Lepoutre a écrit
une lettre comme celle qu'il vient d'écrire,
c'est; qu'il a de bonnes raisons pour ça ;
vous pouvez dormir tranquilles I »
Seulement, M. Dugué de la Fau
connerie s'est souvenu tout à coup que
son rôle de paysan, — paysan de Nor
mandie ! — lui prescrivait la pruden
ce, et, avant de continuer son petit
manifeste, il a' pensé qu'il était sage
d'écrire « à deux amis, l'un à Paris,
l'autre à Roubaix, pour savoir si leur
contentenient était aussi complet
que » celui de M. Lepoutre.
Ôr, voici ce qu'on a répondu à M.
Dugué de lia. Fauconnerie.
De Roubaix :
, Jamais les choses n'ont été plus mal
qu'elles ne vont depuis quelque temps, et
il semble vraiment que l'administration
prenne à tâche de désavouer, par tous ses
actes, les théories libérales et sages ex
posées récemment par le président du con
seil.
Qu'il s'agisse de bureaux de tabacs, de
recettes buralistes, dénominations déjuges
de paix, de percepteurs, d'agents voyërs,
d'instituteurs, de facteurs ou de canton
niers; qu'il s'agisse de renouveler le3 com
missions administratives des hospices, les
bureaux de bienfaisance, les commissions
de révision des listes électorales ; qu'il
s'agisse de désigner les répartiteurs,, les
membres de3 commissions d'hygiène, les
délégués cantonaux, etc., etc., c'est' tou
jours le même système d'intolérance, le
même esprit d'exclusion I
Des services rendus, des titres ac
quis, de la valeur personnelle, de la mora
lité des candidats, il n'est jamais question :
la seule préoccupation est de complaire à la
poignée d'intrigants, d'avocassiers de cam
pagne, de vauriens, qui, depuis quinze ans,
se sont donné la mission, dans chaque can
ton, dans chaque commune, d'espionner et
de dénoncer les braves gens. C'est ceux-là
qu'en toutes circonstances on continue il
consulter, et dont on persiste à. servir les
passions et les rancunes, à l'exclusion des
maires comme moi, & qui on ne pardonne
pas d'avoir soutenu la liste sur laguelle
était M. Lepoutre! - ,
. De Paris :
M. Proudhon, préfet de l'Aisne, m'écrit
mon.correspondant,celui qui a déclaré,l'au
tre jour que, iionimé par un gouvernement
de combat, il continuerait à combattre non
seulement les conservateurs; mais les répu
blicains, suspects de modérantisme, est tou
jours à son poste, et il paraît même cer
tain . qu'il ne sera' pas déplacé. Son cas
n'est d'ailleurs pas isplé, et.un certain nom
bre de ses collègues ont ténu un langage
analogue,"sans que le ministre de l'intérieur
paraisse s'en être ému !
-En lisant ces deux lettres,qui jettent
un jour, bien triste et bien vrai, sur la
situation où continue d'être la France,
le brave et simple paysan Dugué, aba
sourdi, n'a pu retenir cette exclama
tion pleine de bon sens : « Quel drôle
de moment M.. Lepoutre a choisi pour
crier : Vive la République ! » En effet !
Et M. Dugué de la Fauconnerie, se-
vère mais juste, s'adressant à M. Le
poutre, continue en ces termes, qui,
de la part d'un paysan, ne sont vrai
ment pas mal du tout :
La vérité est, cher collègue, qu'il ne faut
pas multiplier, des . manifestations que perr
sonne ne songe à vous demander.
Rien ne vous oblige; à coup sûr,de .crier:
« Vive le roi'! » pas davantage : « Vive
l'empereur !• » encore mbins : ' « A bas la
République ! » (ce qui vous ferait, mener au
poste, sans môme que vous puissiez, vu le
cas de flagrant 1 délit,. invoquer "l'immunité
parlementaire;) mais rien né vous obligenoii
.plus à crier,;. « Vive la république! » Ne
criez donc rien, .c'est si, simple; et vous
n'avez qu'à lire ce qii'ont écrit de vous les
journaux républicains, vous verrez à quoi
ça sert de leur faire des petites 'risettes...'
Çà n« sert à rien du tout.
Voilà de sages discours, dont pour
raient profiter aussi les conservateurs
qui; sans se rallier ouvertement, com
me l'honorable M. Lepoutre, à la. Ré
publique/soutiennent cependant avec
obstination le ministère actuel. /
Qu'il est dommage de penser que,
très probablement, ni M. Lepoutre, ni
les autres n'en profiteront! Pourvu, au
moins, que M. Dugué de la Fauconne
rie s'en souvienne !
Pierre Veuillot.
Où en est le congrès dès délégués
des conseils municipaux de toute la
France ? Le grandiose appel des con
seillers m unicipaux de Paris ne sem
ble pas avoir obtenu grand succès. Le
télégraphe nous signalait hier l'échec
de l'appel parisien au conseil munici
pal de Lyon ; voici quelques détails
sur ce qui s'est passé à-cette occasion :
Lyon, 7 septembre.
A la séance du conseil municipal de. Lyon
qui a eu lieu la nuit dernière, M. Des
champs a demandé si l'administration avait
reçu une communication du conseil munici
pal de Paris relative au congrès des com
munes et quelle suite elle entendait donner
à cette affaire. ; .
Le maire a répondu qu'il savait, en effet,
reçu la communication dont il s'agit. Mais
il ne croit pas qu'il y ait lieu de délibérer
sur ce sujet : l'illégalité de la délibération
du consèjl. municipal de Paris n'était pas
douteuse; elle a d'ailleurs été annulée par
décret du geuveraement. Le conseil muni
cipal de Lyon n'a donc pas à s'en occu
per.- *
• M. Picornot dépose alors une proposition
tendant à l'envoi d'une délégation au con
grès des communes. II. demande la discus
sion immédiate de sa proposition..
La discussion s'engage. Le conseil re
pousse la proposition à , une très grande
majorité.
Jadis la « démocratie parisienne »,
par déférence pour , sa sœur de Lyon,
choisissait pour député l'illustre Ba
rodet, alors presque ' inconnu, et la
« démocratie lyonnaise » reconnais
sait ce bon procédé en, élisant à son
tour l'ex-communard Ranç. Qu'est de
venue cette belle entente ? .
A défaut de l'adhésion du conseil
municipal de Lyon, les, conseillers
nvunicipaux en ont récolté, deux dans
la Nièvre; le conseil municipal de
Guerigny ; a choisi pour son délégué
au congrès le citoyen Massé, sénateur
radical. Il est vrai que la délibération
a été annulée par un arrêté préfecto
ral en date du 5 septembre.
Le conseil municipal de Nevers a
fait mieux encore : à la majorité de
dix voix contre sf jp.t, après avoir flé
tri « les agissemiants d'un ministère
affolé, émanant de' l'accouplement hon
teux delà réaction et de l'opportunisme,
et sans s'arrêter autrement que pour les
mépriser aux ridicules menaces du mi?
nistre de l'intérieur », il a décidé qu'il
enverrait deux dlélégués.' au congrès,
afin de travailler « a.u développement
des idées républicaines, radicales >et
socialistes, et de jeter à la face des mir
nistres sans verjjogne, qui osent gou
verner la Fraqce républicaine, les
mots de droit, de justice et de liberté,
qu'en annulant à l'avance cette ; déli
bération ils ont cyniquement violés. »
Voilà. qui est fier, et comme . les
conseillers municipaux qui ont voté
la réunion du congrès et lancé l'appel
aux départements vont triompher !
Cependant cela ne leur fait .encore que
quatre adhérents sur 36,000 conseils.
Des malintentionnés pourront trouver
que c'est peu est que les « ridicules
menaces du ministre de l'intérieur »
n'ont pas été sans produire un certain
effet.
A défaut des conseils municipaux
qui se dérobent, les conseillers pari
siens auront les groupes et comités
socialistes ; ainsi. Te comité socialiste
de vigilance des intérêts, municipaux
de Paris commutiique à Y Intransigeant
l'ordre du jour suivant, voté dans la
séance du vendredis septembre :
Le comité, estimant que le ,congrès des
communes (proposition Vaillant) ne peut
qu'être utile au progrès des idées démo
cratiques et à la propagation des principes
de; la Révolution, engage le bureau du .con
seil municipal à persévérer dans la décision
et l'attitude qu'il a prises dans cette ques
tion.:' , • . !.
Il invite les municipalités de France à
tenir pour nulle et non avenue la décision
du ministère allemand que nous subissons
et qui, une fois .de plus, a saisi l'occasion
de manifester ses tendances réaction
naires.
Nous ne croyons pas que l'invitation
dudit comité socialiste ait grand effet
sur lés conseils municipaux, qui con
tinueront sans doute à se dérober. Ce
fait est assez significatif, en ce, qu'il
aggrave singulièrement la responsa,-
bilité des ministères républicains pas
sés, présents ét futurs^ Volontiers, les
hommes d'ÏItat de la république, quel
que peu honteux du mal qu'ils font
ou laissent faire, se font présenter
copajne inyjuissants dans /leurs, jour-,
naux officieux. L'abstention, des ';cori~:
seils municipaux, dont beaucoup sont
aux mains des.radicaux;prouve qu'ils:
ne sont pas aussi désarmés et impuis-'
sants qu'ils youdraientile faire croire.
Ea campagne
tiA MOBILISATION DU 17 e CORPS
IV
f Carcassonne, 7. septembre.
. . L'expérience de mobilisation se.poursuit
régulièrement, ponctuellement,dans les con-,
ditions du programme. Carcassonne, est la
base de toutle corps d'armée. Là sont réu
nies, avec le quartier général, les réserves
de tous les,corps et de tous les services. Les
approvisionnements y' sont concentrés,.
Vingt-six fours .roulants et huit fours de
campagne établis sur la place d'Armes, de
Carcassonne fournissent du pain à tout lo
corps d'armée. Ce pain ést absolument sem-
blable.au pain de munition fabriqué jour
nellement dans ■ la manutention militaire.
Le lecteur : désire-t-il savoir exactement,
sans être obligé de venir à Carcassonne, ce
que c'est qu'un . four roulant et un.four de
campagne ? Ùn four roulant ressemble assez
de loin à une locomobjie à vapeur. Un cais-
Son en.tôle aux angles. arrondis, de. 3 à 4
mètres de long, monté, sur .4 roues et sur
monté d'une cheminée sur le devant, tel est
l'aspect du foyr roulant. L'intérieur est di-
visé en deux ou trois compartiments. Char
que foùr peut cuire à la ibis une centaine
de rations.Le four de campagne est en tôle
également, mais ils ne se compose que
d'une simple carcasse qui se pose sur le
sol. et que l'on entoure de briques refrac-
taires et de terre. La terre est prise dans
un trou de .80 centimètres qui se fait devant
la bouche du four, ce qui permet au ; bou
langer d'enfourner ou de. retirer les pains
s$ns se baisser.
, A part l'alimentation et les approvision
nements, chaque division est censée agir
isolément et lutter l'une contre l'autre, la
trente-troisième marchant, de Toulouse sur
Carcassonne, : la trente-quatrième s'avan-
çant de Carcassonne, à Toulouse. On sait
déjà que la rencontre doit aveir lieu au sud
de, Castelnaudary, le . 9 septembre. Il ; y
aura,d'ici là peu dé chose à signaler.
. Mais déjà, comme je le faisais pressentir
hier, on peut juger si l'expérience de mobi
lisation aura.eû une sérieuse utilité et si on
est fondé à la considérer comme un succès.
Nous examinerons aujourd'hui le premier
de ces deux points de vue.
/ Je ne crois pas qu'il y ait un seul mili
taire sérieux qui.conteste aujourd'hui l'uti
lité de l'expérience qui se fait en ce moment.
S^ins doute, si l'on pouvait savoir d'avance
contre qui et dans quelles conditions se fera
la prochaine guerre,, et . si l'on pouvait en
faire incognito' et en secret une répétition
générale, cela vaudrait mieux à tous
égards. Mais on m'accordera sans peine
que l'expérience ne pouvait être ramenée à
ces. termes-là., Les manœuvres ne pou
vaient avoir envuequ'un ennemi imaginaire.
Il eût été même plus que dangereux d'agir
autrement.; c'eût été révéler à nos voisins
des dispositions et des plans qu'il est de la
dernière importance de maintenir secrets:
Mais, comme je l'ai déjà exposé, il y a dàns
la première partie de la mobilisation toute
une série d'opérations auxquelles on né sau
rait trop s'exercer en temps de paix. Sans
.doute,plusieurs de ces opérations sout l'ob
jet d'exercices fréquents dans les garnisons;
mais ce ne sont là que 5 des exercices par
tiels, réduits,: fragmentaires, qui ne don
nent «pas une idée ^suffisante de l'ensemblo
ët
èntre eux sans compter qu'il y a plusièurs
de ces opérations qui ne peuvent avoir-lieu
qu'en cas de mobilisation. Telles sont les
réquisitions de chevaux, les transports de
troupes nombreuses par chemin de fer, les
cantonnements - resserrés, la mise en mou-
vemerlt du service télégraphique, des am
bulances, etc. • /
, : Or; quoique tout ce . qu'il y aura à faire
en cas de mobilisation générale soit prévu,
écrit et porté à la connaissance .de chaque
militaire en ce qui le" concerne, rien ne
grave ces choses-là dans la mémoire com
me la pratique. Assurément si le général
Bréart avait averti les officiers de son corps
d'ariûéé que dans " trois mois il interroge
rait chacun, d'eux sur la partie de la mobi
lisation qui le concerne, les réponses n'au
raient pas été aussi sûres; aussi,exactes et
aussi complètes-qu'elles pourront l'être
quand le 17 e q,orps rentrera dans ' ses quar
tiers. Aujourd'hui on peut affirmer en
toute certitude que, dans le 17 e corps, cha
cun est parlaitement fixé sur le rôle qu'il
aura .à jouer en cas de mobilisation. S'il a
été commis quelque faute, elle est mainte-
iiévnt reconnue, et, s'il fallait recommencer,
elle ne sérait plus commise. Mais ce n'est
pas seulement "le 17° corps qui profite de
l'expérience. Les: autres corps d'armée sui
vent d'un regard attentif tout ce qui. s'y
passe. Les récits des journaux militaires,
les rapports des délégués des autres corps,
enfin les communications qui ne manqueront
pas d'être faites, soit officiellement.par. la
ministre de la guerre,.soit officieusement
parles écrivains, et savants militaires, por
teront à la connaissance de/ toute l'armée
les résultats de cet ess,ai avec toutes les le
çons qu 'il renferme. Ces leçons 1 consisteront
.en modifications apportées à divers articles
du plan primitif que la pratique aura,fait
reconnaître défectueux,,et en reçotnmanda-
tions plus instantes relativement M J'obser-
vatioj}-de certainsipojnts du règlement que
.l'on; aura été, g&Têralement porté à négli
ger. D$.~to'ates façons, l'armée retirera un
fjès grand fruit de cette mobilisation./ . >
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