Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1887-03-03
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 03 mars 1887 03 mars 1887
Description : 1887/03/03 (Numéro 7019). 1887/03/03 (Numéro 7019).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Jeudi 3 Mars 1887
N* 7019. *- Edition Cilôtidienftôl
Jeudi 3 Mars 1887
ÉDITION QUOTIDIENNE
tJHian.' .
Six mois. .
Trois mois.
paris
"ST DèpARTSMEKT»
. . 55 »
28 50
• . 15 »
étranger
(UNION POSTALE)
66 »
34 e »
18 »
Xee afeoonempnlii partent des 1" et s® de chaque mois
• ™ NUMÉRO lo^
BUREAUX : Parip^ 10, rue des Saints-Pères
On a'abonr^ > Rome, place du Gosù, 8
ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNE '
' "
•paris . étranger y -j
et dép>i>tement» (union postale) vi'i
Un an'. . ... ... 30 » 36 » * '
Six mois. ... 16 » 19 » \ v • -
Trois mois. . . 8 -50 . ' 10 »
-,
LM abonnement!* partent des 1" et f® de chaque moM 'i.
' J/'UMVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressé?
v " annonces
MM. Ch". LAGRANGE, CERF et C'*,. 6, place de la Bourse
PHAKCE
PARIS, 2 MARS 1387
lift seul .discours, hier, sur les cé
réales; M. Rouvier a tenu toute la
séance; il va sans dire qu'il a com
battu les droits. On continuera la dis
cussion demain.
M. Cunéo d'Ornano a déposé sa de
mande d'interpellation au sujet de
l'incident Léandri; la discussion en a
été fixée à lundi ; les officieux annon
cent, avec M. le ministre Goblet, que
tout sera terminé à ce moment, ce qui
facilitera le triomphe du ministère.
On trouvera plus loin une note du
Temps qui témoigné des embarras
que causent au ministère les droits
sur les céréales. - Les ministres com
prennent qu'ils ne devraient pas se
désintéresser d'une question de cette
importance ; mais dans quel sens se
décider? Ils ont dû donner toute liberté
de parlera M. Develle, protectionniste
accentué, .qui menaçait d'amener par
sa retraite la dissolution d'un minis
tère peu homogène, et voilà MM. Gra-
net,. Lockroy et ; autres libre-échan-
gistes qui réclament d'autant plus
qu'ils sont poussés par des députations
ardentes venues notamment de Mar
seille. D'après la note du Temps», M. lé
président du conseil interviendrait lui-
même; après le discours de M. Develle,;
il prendrait la parole pour dégager le
ministère. Quel rôle ridicule !
; Quels seront les résultats des ballot
tages qui ont lieu aujourd'hui en Al-*
ïemagne ? D'après les nouvellistes, 5
généralemént acquis au gouverne-
-ment, M. de Bismarck aurait une
majorité d'une vingtaine de voix ; de'
plus, il pourrait, pour la question spé-|
ciale du septennat militaire, détacher
quelque^ "députés du Centre, qui vote-;
raient pour obéir aux désirs du Saint-
Père. : j
C'est décidément bien difficile de
. constituer un ministère en Italie: tous
les hommes politiques auxquels on!
s'adresse refusent l'un après l'autre
les uns trouvent la situation trop em
brouillée, les autres ne sont pas de
taille à faire même un ministère d'af
faires, car on est allé jusqu'aux dou
blures. On croit que le gouvernement;
unitaire finira par être acculé à un'
• ^ministère de gauche,comprenant MM.
rCrispi .ee trigame, Nicotera et Cairoli.
Mais le ministère sera-t-il bien solide?;
De plus,* il ne pourrait pas continuer'
la politique étrangère de MM. Depretis
, et Robilant, et notamment maintenir
Ja triple alliance avec t l'Allemagne et
l'Autriche, en admettant qu'elle existe,\
comme cela a été dit. i
Nous recevons de Rome la dépêche;
suivants : - ■
Rome, 2 mars, i h. 25 du soir.
A l'occasion de l'anniversaire de son cou
ronnement, le Pape a reçu aujourd'hui les.
félicitations des cardinaux, qui lui ont été:
.présentés par le doyen du Sacré-Collège,:
S. Etn. le cardinal Sacconi. >
Répondant à l'adresse du cardinal, le-
Souverain-Pontife dit que, bien qu'il fût!
'profondément attristé pa.r la perte récentej
d'un des membres les plus distingués du!
Sacré-Collège, qui durant sa vie, courte;
mais laborieuse, avait su'rendre de nom-!
breux et signalés services au- Pontificat en;
fournissant au Pape, avec un amour et uni
dévouement sincères, une aide intelligente j
. et zélée, Il accueillait avec un vif-plaisir les;
vœux du Sacré-Collège, offerts avec des i
protestations d'un dévouement' h toute
épreuve et l'intention de concourir toujours|
davantage à aider le Pape dans le gouver-.
nement de. l'Eglise. ,
Ce gouvernement, ajoute Léon XIII,Nous;
apparut d'abord comme un poids formida-j
..ble.et il est encore tel àctuellementpar suite;
des temps mauvais et de la condition dif-,
iicile faite h l'Eglise, par la crainte d'un
avenir plus terrible encore' pour l'Eglise et;
la société. Toutefois Nous sommes sou
tenu.par la^pensée du secours divin et par
la vertu souveraine de l'Eglise s'exerçant.
en faveur de la société.
Cette vertu reste toujours intacte, et au
jourd'hui encore, l'Eglise haïe, combattue,
persécutée, continue sa^ mission pacifique,
en propageant les bienfaits de la vraie reli
gion et de la vraie civilisation. 'Aussi con
naissant cette vèrtu de l'Eglise, Nous déci
dâmes,' dès le commencement de Notre
Pontificat, de. la faire mieux connaître, et'
Nous eûmes la consolation de voir Nos pa
roles bien accueillies et, par suite, la foi
propagée au loin grandir sensiblement..
' Ah! si les peuples et les princes, fuyant
lespréjugés et lès haines accumulés contre
l'Eglise et le Souverain-Pontife, reconnais
saient dans l'Eglise un principe fécond de
prospérité combien la société serait plus
tranquille' et combien moins elle tremble
rait pour l'avenir !
A cet effet; Nous avons cru que l'œuvre
la plus opportune et la plus conforme à'
Notre charge était de montrer aux peuples
et aux princes ce port de salut, et de les
•aider A. y entrer. Nous avons consacré Notre
vie dans ce but, persuadé que Nous agis
sions ainsi pour les intérêts de la religion
et de la société.
En vain l'on a voulu voir -dans Nos actes
un but différent de cette noble mission. Si
Nous réclamons pour l'autorité du Souve
rain-Pontife uns vraie liberté comme une
vraie sécurité et indépendance, 'c'est dans
ce but ; car la liberté et l'indépendance du
Pape tendent'à- faciliter l'action Bienfaisante
et' pacifique de l'Eglise et de la religion.
Ah! si on voulait, si on savait rendre en
fin raison à Nos justes revendications, la
nation qui serait la première à en retire
des avantages, ce serait incontestablement
la nation où siège le Pontificat à qui elle
doit tant de gloire et de grandeur.
Voilà les entreprises auxquelles Nous
croyons devoir toujours appliquer Notre
pensée. Que Dieu veuille les réaliser ! Qu'il
veuille aussi que Notre jubilé sacerdotal,
que Nos fils se préparent à fêter avec tant
de piété et d'amour, réussisse pour le bien
do l'Eglise, l'accroissement de là religion
et la glorification du Pontificat Romain.
Même les plus zélés catholiques, et
les plus préoccupés des intérêts reli
gieux, ne voient guère que e& qui se
passe, à Paris. Les lois votées par les
Chambres, les actes du gouvernement,
c'est ce qui frappe surtout. Mais ces
mesures parties d'en haut, et qui cons
tituent des attentats flagrants aux
droits_ de l'Eglise et à la liberté des
consciences chrétiennes, ont une
foule de conséquences qui passent le
plus souvent inaperçues. Quantité de
petits faits échappent, et l'on ne sait
pas àquel point les intérêts locaux, les
libertés individuelles souffrent de l'é
tat de persécution entreténu par les
pouvoirs publics.
Ainsi, la Semaine religieuse d'An-
necy annonce qué, depuis plusieurs
mois, cinq paroisses du diocèse sont
privées de cloche. Qui savait cela ? Et
qui se^ fût occupé d'un aussi menu
fait? C'est par hasard que nous rappre
nons. Mais qu'on y prenne garde, il
y a là des choses de conséquence.
Pourquoi ces cinq églises n'ont-elles
plus de cloches ? C'est qu'il n'y a plus
ni sonneur ni sacristain. Et pourquoi
n'y a-t-il plus ni sonneur ni sacris
tain ? Ici le fait prend une grande im
portance. La tïernière loi municipale
dispense les communes de l'obliga
tion. ae subvenir aux frais du culte.
Leur participation est devenue facul
tative. Parmi les conseils municipaux,
les uns votent encore, les autres ne
votent plus les subsides. Cependant,
la plupart des fabriques d'église sont
pauvres et incapables par elles-mêmes
de payer les dépenses paroissiales: Les
habitants sont pauvres aussi, ou peu
habitués à donner pour l'église; beau
coup croient s'acquitter suffisamment
de leurs devoirs de paroissiens par
leur contribution au budget des cultes
et le paiement de la taxe des chaises.
Qu'en résulte-t-il ? C'est que la fabrique
réduite à son petit budget de deux ou
trois cents francs, n'a plus le moyen
de rétribuer le sonneur ni le sacris
tain.
Réclamera-t-elle auprès de l'admi
nistration préfectorale? Du chef-lieu,
on lui répondrait que les communes
ne sont pas tenues de payer les frais
du culte, et qu'elles ont bien assez de
dépenses avec les écoles, les chemins,
les sociétés de gymnastique et de tir,
pour n'avoir pas à s'occuper des frais
de la sacristie. Une intervention offi
cieuse du préfet pourrait amener le
conseil municipal à voter un petit se
cours ; mais le haut fonctionnaire
n'aurait garde de , se compromettre
auprès des esprits forts du conseil
pour des affaires de religion. Si le con
seil communal, au contraire, vote une
subvention, le préfet refuse d'approu
ver le crédit, sous prétexte que la com- ;
mune n'est pas assez riche pour faire
des prodigalités.
Autrefois les frais du culte étaient
en majeure partie supportés par la
commune, c'est-à-dire par la réunion
des habitants de la paroisse. Le culte
paroissial était .justement considéré!
comme une dépense communale. Pri
vées de la coopération des communes,
les fabriques, qui depuis la Révolution
ne possèdent presque plus rien et
n'ont, la plupart, que des revenus in
suffisants, ne s.ont même plus en état!
de faire face aux dépenses les plus ur
gentes. Cinq paroisses du diocèse
d'Annecy. sont privées de leurs clo- ;
ches ; mais ce n est pas seulement'la
sonnerie des cloches qui ne se fait plus
entendre ; le culte public aussi a cessé.
Là où il n'y a plus de sacristain pour
sonner la clocne, il n'y a plus de ser
vant de l'autel ni de chantre, plus de
grand'messe, par conséquent, les di
manches et jours de fête, plus de ser
vices^ funèbres ni d'anniversaires pour
les défunts. Les églises de campagne
n'ont même plus la ressource des en
fants. La loi sur l'instruction obliga
toire a pris les enfants de chœur aussi.
Le curé ne peut plus suppléer par eux
au sacristain et_ au chantre ; dans
■beaucoup dîendroits, nous l'avons déjà
dit, il en est réduit à se servir lui-
meme la messe et à faire répondre
aux prières liturgiques par sa servante
ou quelque personne. de bonne vo
lonté..
Nous assistons à une désorganisa
tion du culte. A .mesure que la nou
velle loi municipale recevra son appli
cation, les fabriques laissées à elles-
memes seront de plus en —plus
incapables de subvenir aux dépenses,
même les plus nécessaires. Leur petit
budget ne suffira jamais à rétribuer
les serviteurs de l'église, à payer les
fournitures du culte, à pourvoir aux
dépenses d'entretien du linge, du
mobilier et de l'édifice. On ne sonnera
plus les cloches, on ne chantera plus
de grandmesses, il n'y aura plus de
fêtes dans la paroisse. Il faudra réduire
tout lé culte à une messe basse sans
pompe liturgique, sans chanta; sans
ornements, à la messe des catacombes
et des temps de la Terreur. Le sort des
cinq paroisses d'Annecy sera bientôt,
comme le prévoit la Semaine religieuse,
celui de vingt, de quarante, de cent
paroisses; ce sera celui de tous les_
diocèses. •
Les lois de persécution auront pro
duit leur résultat. Non seulement
l'Eglise aura été dépouillée de toute
prérogative, de tout honneur; non
seulement elle aura été proscrite de
toutes les institutions et de toutes les
choses publiques;mais encoreelle sera
atteinte dans sa vie privée, dans l'in
time de son existence, dans son
culte. Et qu'on ne dise pas qu'il lui
restera la liberté et le concours des
fidèles. Non, elle n'est même pas libre
de se suffire à elle-même. L'école obli
gatoire lui enlève les enfants; les exer
cices des bataillons scolaires du di
manche, les réunions des sociétés de
gymnastique et des orphéons,encoura
gées par les autorités républicaines,
lui prennent les jeunes gens ; les rè
glements universitaires interdisent aux
instituteurs de remplir aucun service
à l'église; les "susceptibilités préfecto
rales ne permettent même pas à un
maire, à un adjoint de concourir à
l'office en chantant ou en jouant de
l'orgue; les conseils municipaux ré
publicains refusent tout subside à l'é
glise et les préfets républicains refu
sent d'approuver le budget des com
munes qui votent une subvention à la
fabrique. Voilà comment l'Eglise a la
liberté de pourvoir à ses besoins et de;
subvenir elle-même à son culte ! On:
lui retire tout, on l'entrave de toutes :
les manières, et on lui dit après celai
qu'elle est libre! Les persécuteurs sa-i
vaient ce qu'ils faisaient; ils ne se
trompaient pas en calculant que leursj
lois amèneraient un jour la désorgani
sation des paroisses, et qu'ils parvien-j
draient à frajpper la religion au cœur*
en détruisant le culte public. !
Arthur Loth. . i
Nous allions trop vite! Ce débat sur;
les céréales menaçait de ne point s'éter
niser. Lundi encore, on avait prononcé
deux discours, dans la même séance!
quel gaspillage ! Il était urgent de ra
lentir le train. Qn l'a ralenti, et, -hier,
un seul discours a pris toute la journée
parlementaire. Durant quatre heures,
M. Rouvier, ardent apôtre du libre-
échangisme lorsqu'il ne s'agit pas des:
huiles de Marseille, a fulminé contres
le droit de cinq francs. Ç'a été long,:
bien long, mais point absolument dé
nué d'intérêt. Orateur diffus, heurté,!
incorrect, l'ancien ministre a-quelque;
chose pour lui cependant, et ce quel-;
que chose est beaucoup : il se montre !
toujours vif et passionné. En outre, il
est habile. De sorte qu'on l'écoute et
qu'il produit un certain effet.
Il a eu bien vite* hier, jeté de l'ani
mation dans le débat. Il a commencé
par soutenir que personne, aux 4 et
18 octobre 1885, n'avait osé, d'une fa- ,
çon nette et formelle, dire aux élec
teurs : « Je demanderai le relèvement
du droit sur les céréales étrangères. »
A l'appui de ce qu'il avançait, pre
nant les professions de foi d'un cer
tain nombre de représentants des ré
gions où les agriculteurs souffrent le
Elus, il en a donné .lecture à la Cham-
re. On trouve dans ces professions
de foi des phrases comme celles-ci :
« Il faut protéger par des lois sérieu
ses, efficaces, les denrées agricoles. »
— « Nous protégerons l'agriculture
contre la concurrence étrangère. » —
« Nous continuerons à protéger l'agri
culture. » Etc. Dans aucune des| cita
tions que prodiguait |l'orateur, il n'y
avait cette phrase ; « Nous relèverons
à cinq francs le droit sur les blés: »
Aussi lisait-il de son air le plus itriom-
phant. Mais,bientôt,de tous côtés,par
tent, éclatent de vives réclamations.
Ceux qui avaient parlé dans leurs mani
festes électoraux du relèvement de la
taxe,et dont M. Rouvier ne soufflait mbt,
lui demandent avec impétuosité pour
quoi il les passe tranquillement sous
silence. Les - autres font encore plus
de tapage. « C'est vrai, clament-ils,
notre profession de foi ne contient
qu'une phrase plus ou moins vague
en faveur de l'agriculture; mais nous
avons promis de réclamer le droit de
cinq francs sur les céréales étrangères
dans toutes les réunions où nous avons
comparu. » Ce n'est pas sans peine
Sue M. Floquet parvint à rétablir l'or-
re et le calme. Après quelques mi
nutes d'agitation, de remous, 1$ député
libre-échangiste put 1 enfin reprendre
son discours.
Discours sombre; M. Rouvier, l'air
fatal, a prédit les plus grands mal
heurs à la France, aux villes comme
aux campagnes, à l'agriculture elle-
même, à l'agriculture qu'on abuse, si
le droit de cinq francs est voté par les
Chambres. Elle en mourra, l'agricul
ture, et nous en pâtirons tous cruelle
ment. Il y avait de quoi frémir. Espé
rons que l'orateur protectionniste, qui
parlera demain nous rassurera un pieu.
C'est nécessaire. Cet orateur sera-t-il
M. Develle, ministre, mais à qui les
membres du cabinet ne permettent
de prendre la* parole qu'à titre privé ?
M. Peytral nous a déclaré que M. Loc
kroy, ministre aussi, mais, parlant,
comme l'autre, rien qu'en son nom
personnel, répondrait à,son collègue.
JLe spectacle serait curieux, édifiant et
rare. M. Lockroy, qui assistait à la
séance, a paru trouver M. Peytral ter
riblement indiscret. Il a mordu sa
moustache; il n'a pas dit non.
En attendant les compétentes dis*
sertations de M. Lockroy, il faut cons
tater, avant.de finir,que le libre-échan
giste' Rouvier lui-même a reconnu les
souffrances de l'agriculture, lly aquel-
que chose à faire, a-t-il dit, et il a
proposé son remède: Que tous les cul-,
tivateurs deviennentaussi savants que
ce M. Grandeau, qui obtient de si ma
gnifiques résultats en cultivant du blé
dans des petits pots sur sa fenêtre, et
tout ira bien. C'est vraiment fort
simple.
Pierre Veuillot.
■ Le correspondant romain du Monde,
celui qui annonçait, sinon comme
« très probable », au moins « comme
possible », un accord prochain entre
le Pape et ses spoliateurs, revient, par
une nouvelle lettre, sur le « plan »
dont il avait indiqué « les lignes gé
nérales ». Mais, s'il y revient, c'est
pour faire retraite, il commente de
telle sorte ses premiers dires qu'il
•n'en reste à peu près rien. C'est au
point que lui-même ne les reconnaît
pas. Il croit, par exemple, que « le
plan » auquel il faisait si bon accueil
ne ressemelait aucunement à celui
que produisait en même temps le Jour
nal des Débats. Or,, pour le fond des
choses, ils étaient identiques. Seule
ment, tandis que le correspondant du
Monde s'avançait avec précaution et
tenait le langage respectueux d'un ca
tholique,. celui des Débats parlait d'un
autre ton.
En même temps qu'il explique sa
première lettre de manière à l'effacer,
le correspondant du Monde défend ses
intentions. Pour notre part, nous ne
les avons pas accusées. Nous savons,
parfaitement que le Monde pense com
me nous sur la question du pouvoir
temporel ; mais les bonnes intentions
ne peuvent toujours préserver de l'er
reur, et dans cette circonstance il y a
eu erreur. ,Le « plan » auquel le corres
pondant du Monde croyait ,y voyant une
œuvre autorisée, n'a été qu'une com
binaison d'amateur sans consistance.
Ces négociateurs, qui ne tenaient leur
mandat ni du Vatican, ni du Quirinal,
ni de Rerlin,et prétendaient cependant
faire marcher Berlin, le Quirinal et le
Vatican, rappellent les diplomates d'es
pèce particulière qui du temps de Mo
lière travaillaient au mariage du Grand
Turc avec la République de Venise.
Il convient de ne pas trop s'en occu
per.
Eugène Veuillot.
II y a trois jours, le récit d'un meur
tre épouvantable remplissait les co
lonnes des journaux de Paris. : on
apprenait que M. Stilmant, directeur
des Aciéries de France, avait été lâ
chement assassiné, sur un des quais
de Seine, par un ouvrier mécontent,
de nationalité belge, qui s'était tué
lui-même après avoir satisfait sa ven
geance.
. C'était, moins les détails de sauva
gerie qui ont accompagné le meurtre
de M. Watrin, la répétition du dramo'
de Decazeville. Mais là ne s'est point
borné le scandale, et à cette scène de
meurtre il y a eu un épilogue peut-
être plus épouvantable encore. On a
fait au meurtrier des funérailles dont
le Temps nous donne le récit en ces
termes :
Durant toute la journée d'hier la foule
n'a cessé de stationner rue Juge, devant la
demeure de Deruyter. De distance en dis
tance circulaient des gardiens des brigades
centrales; au poste, rue Violet, les gardiens
du quartier avaient été consignés. Ces
mesures avaient été motivées par la
note suivante parue la veille dans le Cri du
Peuple :
Le groupe des Athées, les Antipropriétaires,
la sestion générale des tailleurs présentent leurs
condoléances à la veuve du justicier Deruyter
pour l'acte de virilité révolutionnaire que son
mai'i a accompli sur la personne de Stilmant,
et prient leurs camarades de bagne de le pren
dre pour modèle de dignité humaine.
Un avis ultérieur donnera l'heure de l'enterre
ment, où sont priés de se trouver tous les anar
chistes de Paris et de la banlieue. • -
Le contre-temps apporté par le retarddu
permis d'inhumer et l'heure matinale à la
quelle a eu lieu ce matin* l'enterrement de
Deruyter ont quelque peu entravé la mani
festation projetée par les socialistes-révolu
tionnaires. A neuf heures précises la levée
du corps a été faite sans incident. Sur les
/.trottoirs, sur le seuil des portes, lés voisins
et les femmes regardent curieusement, mais
pas, un cri n'est proféré. La bière est mise
rapidement sur un char de 1' classé, ainsi
que trois couronnes très simples, deux en
Ïerles avec les inscriptions : A notre ami —
'ictime du ■ travail, et une troisième d'im
mortelles jaunes. Derrière le char prennent
place le frère de Deruyter, qui conduit ' le
deuil,et une trentaine de personnes, la plu
part en costume de travail. Parmi eux deux
deux ou trois anarchistes et autant de so
cialistes-révolutionnaires.
Le convoi prend la rue Violet, passe de
vant l'église et monte la rue de l'Abbé-
Groult. Dans Grenelle,'les gens se mettent
aux fenêtres ou sur lé pas de leur porte;
mais arrivé rue Vouillé et rue d'Alésia, ces
marques de curiosité elles-mêmes cessent
complètement. Le long du trajet, des grou
pes d'agents avaient été échelonnés, mais
ils n'ont pas eu à intervenir.
Au cimetière de Bagneux, où le cortège
est arrivé à onze heures, des discours ont
été prononcés; 'Nous les donnons comme
documents humains, si l'on peut appliquer
ce qualificatif à de telles élucubrations.
Un ouvrier belge a d'abord salué Alfred
Deruyter au nom de tous les ouvriers bel
ges résidant à Paris. « Deruyter, a-t-il dit,
est mort content, car il a pu se venger.
Bien qu'il repose en terre étrangère, ses
compagnons viendront souvent le visiter. »
Un socialiste a fait l'éloge du révolté."
« Quand les ouvriers se verront domptés,
s'est-il écrié, qu'ils fassent comme Deruy
ter. » :
Un troisième orateur, le citoyen Coupard,
président de la chambre syndicale des chif
fonniers, dit qu'il faudra graver sur la
tombe de celte victime du patronat : Hom
mage au courage malheureux! « Comme
sur les tombes de Vallès, de Blanqui, etc.,
ajoute-t-il, nous reviendrons ici, chaque
année, saluer ce martyr aussi grand eux. »
Au nom de la jeunesse anarchiste, le com
pagnon Jahn, qui n'est guère âgé que de
dix-sept ans, prononce les paroles suivan
tes : « Tu n'as eu qu'un tort, compagnon,
c'est de t'être donné la mort et de ne pas
avoir osé affronter la justice bourgeoise.
Mort aux exploiteurs ! mort h la bourgeoi
sie ! » Aussitôt éclatent les cris : Vive l'anar
chie! vive la révolution sociale !
On entend enfin un dernier anarchiste :
« Deruyter, cœur généreux, tu n'as pas
voulu attendre le grand jour de la révolu
tion! Semblable au Spartacus antique, tu
t'es immolé toi-même après avoir vengé tes
frères ouvriers. Compagnons, je ne sais pas
à quelle école appartenait Deruyter, mais
je crie : Vive ce soldat anonyme dont
l'exemple devrait être suivi par tous ! vive
l'anarchie ! »
Vive l'anarchie ! vive la révolution so ■
ciale ! répondent les révolutionnaires !
On voit que le Temps s'ingénie à di
minuer 'la gravité des manifestations
dont l'enterrement du meurtrier De
ruyter a été le prétexte. Mais celte gra
vité éclate aux yeux pour quiconque
ne cherche pas à s'illusionner. Ces
apdlogies sauvages du meurtre trans
formé en un acte héroïque pendant que
le meurtrier est lui-même qualifié de
victime, ont uue signification qu'on
chercherait vainement à dissimuler.
C'est un symptôme de guerre sociale
imminente,qu'on aurait grand tort de
traiter avec indifférence ou dédain.
De pareilles manifestations seraient
déjà fort alarmantes sous un gouver
nement qui aurait le souci du danger
que court l'ordre social et la volonté d'y
parer. Mais combien plus le deviennent-
elles sous un gouvernement qui, bien
loin de s'opposer à la propagande des
idées anarchistes, s'en fait pour ainsi
dire le complice! S'il en était autre
ment , des discours comme ceux dont
le Temps donne des extraits mène
raient directement leurs auteurs de
vant la. justice, qui aurait à les châ
tier avec la dernière sévérité. Or, on
remarquera que le 'Temps ne laisse
même pas entrevoir qu'il puisse être
question de poursuites ; il se félicite
même de ce que les agents de police
« n'ont pas eu à intervenir ». On de
mande en quelle circonstance, dès
lors, on jugera que les agents ont à
intervenir.
Auguste Roussel.
Les journaux de Londres parlent
sérieusementde prétendues poursuites
que le gouvernement anglais aurait
l'intention d'exercer contre MgrCroke,
archevêque de Cashel. Nous avons dit,
l'autre jour, que Mgr Croke, envoyant
son offrande à un journal de Dublin
pour la souscription ouverte au profit
de M. John Dillon et divers autres dé
putés irlandais, écrivait que si un ma
nifeste du parti irlandais conseillait au
peuple irlandais de refuser le paye
ment des impôts, il appuierait lé ma
nifeste en principe. L'éminent prélat
ajoutait qu'il était malheureux de voir
le peuple irlandais fournir lui-même
au gouvernement anglais un argent
qu'on employait contre lui à armer la
police et les troupes.
Cette lettre de Mgr Croke a produit
d'autant plus de sensation que jadis
l'éminent prélat s'est prononcé contre
le manifeste du parti national qui,lors
de l'emprisonnement en masse de Kil-
mainham, conseillait au peuple irlan
dais de refuser tous les loyers.Si le mi
nistère Salisbury se lance dans ces
poursuites, auxquelles nous ne croyons
pas pour notre part, il devra aussitôt
en commencer d'dutres contre l'ar
chevêque de Dublin, qui s'est publi
quement prononcé en faveur du « plan
de campagne. » Et ces poursuites, dé
clare un journal radical de Londres,
donneraient immédiatement aux ar
chevêques de Cashél et de Dublin ce
qui peut leur manquer encore pour
« une canonisation populaire ».
Voici la note du. Temps à laquelle il
est fait allusion plus haut :
M. Develle, ministre de l'agriculture, doit
prendre la parole après-demain jeudi, de
vant la Chambre, pour faire connaître son
opinion sur la question du relèvement des
droits sur les céréales.
On sait déjà qu'il doit parler en son nom
personnel ; il appuiera l'élévation du droit
à 5 fr. pour les blés, en déclarant nette
ment qu'il n'engage eh rien la responsabi
lité du cabinet, qui a décidé de garder la
neutralité dans ce débat.
De nombreuses démarches out été faites
depuis quelques jours auprès des ministres
opposés à l'élévation des droits pour les
déterminer à intervenir dans.le débat et à
opposer leur thèse à celle du ministre de
l'agriculture.
La'question a fait à plusieurs reprises
l'objet des délibérations du conseil des mi
nistres. Finalement, il a été convenu que
M. Develle parlerait seul en son nom per
sonnel; mais le président du conseil mon
tera à, latribune et fera une déclaration
pour, expliquer les motifs qui ont déterminé
le cabinet à garder là neutralité: et dégager
en même temps les ministres opposite au
relèvement des droits.
Au rédacteur
• l équilibre du budget
Monsieur le Rédacteur,
J'ai l'honneur de vous adresser les ré
flexions suivantes, dont vous ferez l'usage
que vous jugerez convenable. -
Quels que soient les déguisements dont
les financiers décorent leurs budgets, s'ils
diffèrent quelque peu dans la l'orme, ils
sont absolument les mêmes quant au fond;
et il faut véritablement avoir une bien
triste idée de l'intelligence de ceux à qui
l'on prétend faire croire qu'un budget peut
s'équilibrer sans emprunt ni impôt. Quand
une balance cesse-d'ôtre en équilibre, il n'y
a-qu'un moyen de le rétablir-: c'est d'ôter
du poids au plateau qui baisse ou, d'en
ajouter à celui qui monte. Réduire lés dé
penses ou augmenter les recettes. Jamais
nos gouvernants républicains ne se résou
dront à faire des économies sérieuses et à -
s'ôter le pain de la bouche,'car ils ne se
soutiennent que par leurs dépenses.-Il fau
dra donc, forcément, qu'ils aient recours à
l'impôt et à l'emprunt. .
Opérations de trésorerie, obligations
sexennaires ne sont, en réalité, que des
emprunts déguisés. Si vous employez à
d'autres dépenses les fonds destinés aux
remboursements, c'est un emprunt que
vous faites, et une dette que vous conso
lidez ; boucher un trou pour en creuser un
autre. L'emprunt est lui-même un impôt,
car si le capital grève l'avenir, l'intérêt
grève le présent en nécessitant un impôt.
Mais l'impôt et l'emprunt étant un épou-
vantail pour le contribuable, on cherche à
les dissimuler sous des dénominations in
compréhensibles pour ceux qui ne sont pas
initiés aux sorcelleries de la finance. C'est
le tour du gobejet; faire passer la muscade
sans que Jocrisse s'en aperçoive, et la larce
est jouée. .
Il y a trois sources de revenus : le sol,
valeur réelle ; le métal, valeur de conven
tion, et le papier, valeur de crédit. Je dis
le sol, valeur réelle, parce que plus il pro
duit, plus la richesse augmente, et que plus
les autres s'accroissent, plus leur valeur
diminue. Malheureusement il est tellement
écrasé par l'impôt et le libre-échange qui
n'a de vrai que le nom, que si cela conti
nue, il ne tardera pas à s'effondrer, entraî
nant avec lui tout le reste dans le gouffre
béant de la banqueroute.
Notre malheureuse France est devenue,
permettez-moi l'expression, la vache à lait
des intrigants qui l'exploitent et de l'étran
ger qui ne lui permet de vivre qu'à condi-.
tion qu : il puisse la traire, et quand elle
tomber a épuisée et tarie, il lui sera facile
de s'en partager les morceaux. Quand donc
l'électeur par trop naïf ouvrira-t-rl les yeux
et cessera-t-il d'être la dupe des ambitieux
qui s'engraissent à ses dépens ? '
Ce n'est donc pas assez qu'il soit écrasé
d'impôts, que ses enfants lui soient enlevés
presque au berceau pour en faire des athées
et plus tard.les envoyer mourir par le fer
ou la maladie à trois mille lieues de la pa
trie ; qu'il soit lui-même astreint au service
militaire pendant les trois quarts de sa vie?
Qu'atlend-il donc de.plus? une catastrophe?
Eh bien, il l'aura.
Veuillez recevoir, monsieur le directeur,
l'assurance de ma considération la plus
distinguée.
L. de L a T ouk du; P in.
L'Osservatore Romano annonce, d'a
près le Cittadino de Gênes, que le
Saint-Pére, prenant en pitié les mal
heureuses victimes des derniers trem
blements de terre en .Italie, a, dans sa
grande générosité, fait parvenir,"pour
les soulager, à Mgr l'archevêque de
Gênes une somma de vingt mille
francs.
Voici le texte officiel de la formule
du serment à prêter par les évêques et
archevêques en Prusse, aux termes de
la nouvelle ordonnance signalée précé
demment par les dépêches de l'Agence
Havas : .
. Nousi Guillaume, par la grâce de Dieu,
roi de Prusse, etc., etc., vu l'abolition de
l'ordonnance du 6 décembre 1873, nous or
donnons ce qui suit :
Paragraphe unique. — Les archevêques,
les princes-évêques et les évêques doivent
prêter à notre personne le serment ci-après;:
« Moi, N. N., je jure comme futur évê-
que de N., devant Dieu tout-puissant qui
voit et connaît tout,, et sur les saints Evan
giles, que, dès que je serai sur le siège
de N., je resterai fidèle à S. M. le roi de
Prusse (N. N.) et h ses légitimes succes
seurs dans le gouvernement de la nation,
comme à mon Roi et Seigneur; que je lui
rendrai soumission et obéissance en faisant
à Sa Majesté Royale tout le bien en mon
pouvoir, comme en écartant de lui tout le
mal selon mes forces. Spécialement,je ferai
mes efforts afin que les esprits des prêtres
confiés à ma direction épiscopale et des
fidèles qui me sont soumis soient ins
truits avec soin dans le respect et la fidé
lité au Roi, l'amour envers la patrie, l'o
béissance aux loix et en toutes jles vertus
qui dans le chrétien font distinguer le b'on
sujet; je ferai tous mes efforts pour que
mon clergé ne soit pas instruit et élevé en
sens contraire. ■
« Spécialement je promets de ne consti
tuer aucune association ou société, soit à
l'intérieur, sott à. l'extérieur du pays, qiii
puisse devenir dangereuse 'pour la sûreté
publique, et, au cas où je viendrais îi sa
voir que dans mon diocèse ou ailleurs il se
trame des choses pouvant nuire à l'Etat, je
veux les dénoncer à S. M. le Roi.
« Je promets de maintenir irrévocable
ment tout cela, d'autant plus que je suis
certain qu'en prêtant serment à Sa Sainteté
et à l'Eglise, je ne me suis obligé à rien qui
puisse être opposé à la fidélité .et à TobéiS*
sance envers'mon souverain.
« Je jure tout cela, et que Dieu me soit
N* 7019. *- Edition Cilôtidienftôl
Jeudi 3 Mars 1887
ÉDITION QUOTIDIENNE
tJHian.' .
Six mois. .
Trois mois.
paris
"ST DèpARTSMEKT»
. . 55 »
28 50
• . 15 »
étranger
(UNION POSTALE)
66 »
34 e »
18 »
Xee afeoonempnlii partent des 1" et s® de chaque mois
• ™ NUMÉRO lo^
BUREAUX : Parip^ 10, rue des Saints-Pères
On a'abonr^ > Rome, place du Gosù, 8
ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNE '
' "
•paris . étranger y -j
et dép>i>tement» (union postale) vi'i
Un an'. . ... ... 30 » 36 » * '
Six mois. ... 16 » 19 » \ v • -
Trois mois. . . 8 -50 . ' 10 »
-,
LM abonnement!* partent des 1" et f® de chaque moM 'i.
' J/'UMVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressé?
v " annonces
MM. Ch". LAGRANGE, CERF et C'*,. 6, place de la Bourse
PHAKCE
PARIS, 2 MARS 1387
lift seul .discours, hier, sur les cé
réales; M. Rouvier a tenu toute la
séance; il va sans dire qu'il a com
battu les droits. On continuera la dis
cussion demain.
M. Cunéo d'Ornano a déposé sa de
mande d'interpellation au sujet de
l'incident Léandri; la discussion en a
été fixée à lundi ; les officieux annon
cent, avec M. le ministre Goblet, que
tout sera terminé à ce moment, ce qui
facilitera le triomphe du ministère.
On trouvera plus loin une note du
Temps qui témoigné des embarras
que causent au ministère les droits
sur les céréales. - Les ministres com
prennent qu'ils ne devraient pas se
désintéresser d'une question de cette
importance ; mais dans quel sens se
décider? Ils ont dû donner toute liberté
de parlera M. Develle, protectionniste
accentué, .qui menaçait d'amener par
sa retraite la dissolution d'un minis
tère peu homogène, et voilà MM. Gra-
net,. Lockroy et ; autres libre-échan-
gistes qui réclament d'autant plus
qu'ils sont poussés par des députations
ardentes venues notamment de Mar
seille. D'après la note du Temps», M. lé
président du conseil interviendrait lui-
même; après le discours de M. Develle,;
il prendrait la parole pour dégager le
ministère. Quel rôle ridicule !
; Quels seront les résultats des ballot
tages qui ont lieu aujourd'hui en Al-*
ïemagne ? D'après les nouvellistes, 5
généralemént acquis au gouverne-
-ment, M. de Bismarck aurait une
majorité d'une vingtaine de voix ; de'
plus, il pourrait, pour la question spé-|
ciale du septennat militaire, détacher
quelque^ "députés du Centre, qui vote-;
raient pour obéir aux désirs du Saint-
Père. : j
C'est décidément bien difficile de
. constituer un ministère en Italie: tous
les hommes politiques auxquels on!
s'adresse refusent l'un après l'autre
les uns trouvent la situation trop em
brouillée, les autres ne sont pas de
taille à faire même un ministère d'af
faires, car on est allé jusqu'aux dou
blures. On croit que le gouvernement;
unitaire finira par être acculé à un'
• ^ministère de gauche,comprenant MM.
rCrispi .ee trigame, Nicotera et Cairoli.
Mais le ministère sera-t-il bien solide?;
De plus,* il ne pourrait pas continuer'
la politique étrangère de MM. Depretis
, et Robilant, et notamment maintenir
Ja triple alliance avec t l'Allemagne et
l'Autriche, en admettant qu'elle existe,\
comme cela a été dit. i
Nous recevons de Rome la dépêche;
suivants : - ■
Rome, 2 mars, i h. 25 du soir.
A l'occasion de l'anniversaire de son cou
ronnement, le Pape a reçu aujourd'hui les.
félicitations des cardinaux, qui lui ont été:
.présentés par le doyen du Sacré-Collège,:
S. Etn. le cardinal Sacconi. >
Répondant à l'adresse du cardinal, le-
Souverain-Pontife dit que, bien qu'il fût!
'profondément attristé pa.r la perte récentej
d'un des membres les plus distingués du!
Sacré-Collège, qui durant sa vie, courte;
mais laborieuse, avait su'rendre de nom-!
breux et signalés services au- Pontificat en;
fournissant au Pape, avec un amour et uni
dévouement sincères, une aide intelligente j
. et zélée, Il accueillait avec un vif-plaisir les;
vœux du Sacré-Collège, offerts avec des i
protestations d'un dévouement' h toute
épreuve et l'intention de concourir toujours|
davantage à aider le Pape dans le gouver-.
nement de. l'Eglise. ,
Ce gouvernement, ajoute Léon XIII,Nous;
apparut d'abord comme un poids formida-j
..ble.et il est encore tel àctuellementpar suite;
des temps mauvais et de la condition dif-,
iicile faite h l'Eglise, par la crainte d'un
avenir plus terrible encore' pour l'Eglise et;
la société. Toutefois Nous sommes sou
tenu.par la^pensée du secours divin et par
la vertu souveraine de l'Eglise s'exerçant.
en faveur de la société.
Cette vertu reste toujours intacte, et au
jourd'hui encore, l'Eglise haïe, combattue,
persécutée, continue sa^ mission pacifique,
en propageant les bienfaits de la vraie reli
gion et de la vraie civilisation. 'Aussi con
naissant cette vèrtu de l'Eglise, Nous déci
dâmes,' dès le commencement de Notre
Pontificat, de. la faire mieux connaître, et'
Nous eûmes la consolation de voir Nos pa
roles bien accueillies et, par suite, la foi
propagée au loin grandir sensiblement..
' Ah! si les peuples et les princes, fuyant
lespréjugés et lès haines accumulés contre
l'Eglise et le Souverain-Pontife, reconnais
saient dans l'Eglise un principe fécond de
prospérité combien la société serait plus
tranquille' et combien moins elle tremble
rait pour l'avenir !
A cet effet; Nous avons cru que l'œuvre
la plus opportune et la plus conforme à'
Notre charge était de montrer aux peuples
et aux princes ce port de salut, et de les
•aider A. y entrer. Nous avons consacré Notre
vie dans ce but, persuadé que Nous agis
sions ainsi pour les intérêts de la religion
et de la société.
En vain l'on a voulu voir -dans Nos actes
un but différent de cette noble mission. Si
Nous réclamons pour l'autorité du Souve
rain-Pontife uns vraie liberté comme une
vraie sécurité et indépendance, 'c'est dans
ce but ; car la liberté et l'indépendance du
Pape tendent'à- faciliter l'action Bienfaisante
et' pacifique de l'Eglise et de la religion.
Ah! si on voulait, si on savait rendre en
fin raison à Nos justes revendications, la
nation qui serait la première à en retire
des avantages, ce serait incontestablement
la nation où siège le Pontificat à qui elle
doit tant de gloire et de grandeur.
Voilà les entreprises auxquelles Nous
croyons devoir toujours appliquer Notre
pensée. Que Dieu veuille les réaliser ! Qu'il
veuille aussi que Notre jubilé sacerdotal,
que Nos fils se préparent à fêter avec tant
de piété et d'amour, réussisse pour le bien
do l'Eglise, l'accroissement de là religion
et la glorification du Pontificat Romain.
Même les plus zélés catholiques, et
les plus préoccupés des intérêts reli
gieux, ne voient guère que e& qui se
passe, à Paris. Les lois votées par les
Chambres, les actes du gouvernement,
c'est ce qui frappe surtout. Mais ces
mesures parties d'en haut, et qui cons
tituent des attentats flagrants aux
droits_ de l'Eglise et à la liberté des
consciences chrétiennes, ont une
foule de conséquences qui passent le
plus souvent inaperçues. Quantité de
petits faits échappent, et l'on ne sait
pas àquel point les intérêts locaux, les
libertés individuelles souffrent de l'é
tat de persécution entreténu par les
pouvoirs publics.
Ainsi, la Semaine religieuse d'An-
necy annonce qué, depuis plusieurs
mois, cinq paroisses du diocèse sont
privées de cloche. Qui savait cela ? Et
qui se^ fût occupé d'un aussi menu
fait? C'est par hasard que nous rappre
nons. Mais qu'on y prenne garde, il
y a là des choses de conséquence.
Pourquoi ces cinq églises n'ont-elles
plus de cloches ? C'est qu'il n'y a plus
ni sonneur ni sacristain. Et pourquoi
n'y a-t-il plus ni sonneur ni sacris
tain ? Ici le fait prend une grande im
portance. La tïernière loi municipale
dispense les communes de l'obliga
tion. ae subvenir aux frais du culte.
Leur participation est devenue facul
tative. Parmi les conseils municipaux,
les uns votent encore, les autres ne
votent plus les subsides. Cependant,
la plupart des fabriques d'église sont
pauvres et incapables par elles-mêmes
de payer les dépenses paroissiales: Les
habitants sont pauvres aussi, ou peu
habitués à donner pour l'église; beau
coup croient s'acquitter suffisamment
de leurs devoirs de paroissiens par
leur contribution au budget des cultes
et le paiement de la taxe des chaises.
Qu'en résulte-t-il ? C'est que la fabrique
réduite à son petit budget de deux ou
trois cents francs, n'a plus le moyen
de rétribuer le sonneur ni le sacris
tain.
Réclamera-t-elle auprès de l'admi
nistration préfectorale? Du chef-lieu,
on lui répondrait que les communes
ne sont pas tenues de payer les frais
du culte, et qu'elles ont bien assez de
dépenses avec les écoles, les chemins,
les sociétés de gymnastique et de tir,
pour n'avoir pas à s'occuper des frais
de la sacristie. Une intervention offi
cieuse du préfet pourrait amener le
conseil municipal à voter un petit se
cours ; mais le haut fonctionnaire
n'aurait garde de , se compromettre
auprès des esprits forts du conseil
pour des affaires de religion. Si le con
seil communal, au contraire, vote une
subvention, le préfet refuse d'approu
ver le crédit, sous prétexte que la com- ;
mune n'est pas assez riche pour faire
des prodigalités.
Autrefois les frais du culte étaient
en majeure partie supportés par la
commune, c'est-à-dire par la réunion
des habitants de la paroisse. Le culte
paroissial était .justement considéré!
comme une dépense communale. Pri
vées de la coopération des communes,
les fabriques, qui depuis la Révolution
ne possèdent presque plus rien et
n'ont, la plupart, que des revenus in
suffisants, ne s.ont même plus en état!
de faire face aux dépenses les plus ur
gentes. Cinq paroisses du diocèse
d'Annecy. sont privées de leurs clo- ;
ches ; mais ce n est pas seulement'la
sonnerie des cloches qui ne se fait plus
entendre ; le culte public aussi a cessé.
Là où il n'y a plus de sacristain pour
sonner la clocne, il n'y a plus de ser
vant de l'autel ni de chantre, plus de
grand'messe, par conséquent, les di
manches et jours de fête, plus de ser
vices^ funèbres ni d'anniversaires pour
les défunts. Les églises de campagne
n'ont même plus la ressource des en
fants. La loi sur l'instruction obliga
toire a pris les enfants de chœur aussi.
Le curé ne peut plus suppléer par eux
au sacristain et_ au chantre ; dans
■beaucoup dîendroits, nous l'avons déjà
dit, il en est réduit à se servir lui-
meme la messe et à faire répondre
aux prières liturgiques par sa servante
ou quelque personne. de bonne vo
lonté..
Nous assistons à une désorganisa
tion du culte. A .mesure que la nou
velle loi municipale recevra son appli
cation, les fabriques laissées à elles-
memes seront de plus en —plus
incapables de subvenir aux dépenses,
même les plus nécessaires. Leur petit
budget ne suffira jamais à rétribuer
les serviteurs de l'église, à payer les
fournitures du culte, à pourvoir aux
dépenses d'entretien du linge, du
mobilier et de l'édifice. On ne sonnera
plus les cloches, on ne chantera plus
de grandmesses, il n'y aura plus de
fêtes dans la paroisse. Il faudra réduire
tout lé culte à une messe basse sans
pompe liturgique, sans chanta; sans
ornements, à la messe des catacombes
et des temps de la Terreur. Le sort des
cinq paroisses d'Annecy sera bientôt,
comme le prévoit la Semaine religieuse,
celui de vingt, de quarante, de cent
paroisses; ce sera celui de tous les_
diocèses. •
Les lois de persécution auront pro
duit leur résultat. Non seulement
l'Eglise aura été dépouillée de toute
prérogative, de tout honneur; non
seulement elle aura été proscrite de
toutes les institutions et de toutes les
choses publiques;mais encoreelle sera
atteinte dans sa vie privée, dans l'in
time de son existence, dans son
culte. Et qu'on ne dise pas qu'il lui
restera la liberté et le concours des
fidèles. Non, elle n'est même pas libre
de se suffire à elle-même. L'école obli
gatoire lui enlève les enfants; les exer
cices des bataillons scolaires du di
manche, les réunions des sociétés de
gymnastique et des orphéons,encoura
gées par les autorités républicaines,
lui prennent les jeunes gens ; les rè
glements universitaires interdisent aux
instituteurs de remplir aucun service
à l'église; les "susceptibilités préfecto
rales ne permettent même pas à un
maire, à un adjoint de concourir à
l'office en chantant ou en jouant de
l'orgue; les conseils municipaux ré
publicains refusent tout subside à l'é
glise et les préfets républicains refu
sent d'approuver le budget des com
munes qui votent une subvention à la
fabrique. Voilà comment l'Eglise a la
liberté de pourvoir à ses besoins et de;
subvenir elle-même à son culte ! On:
lui retire tout, on l'entrave de toutes :
les manières, et on lui dit après celai
qu'elle est libre! Les persécuteurs sa-i
vaient ce qu'ils faisaient; ils ne se
trompaient pas en calculant que leursj
lois amèneraient un jour la désorgani
sation des paroisses, et qu'ils parvien-j
draient à frajpper la religion au cœur*
en détruisant le culte public. !
Arthur Loth. . i
Nous allions trop vite! Ce débat sur;
les céréales menaçait de ne point s'éter
niser. Lundi encore, on avait prononcé
deux discours, dans la même séance!
quel gaspillage ! Il était urgent de ra
lentir le train. Qn l'a ralenti, et, -hier,
un seul discours a pris toute la journée
parlementaire. Durant quatre heures,
M. Rouvier, ardent apôtre du libre-
échangisme lorsqu'il ne s'agit pas des:
huiles de Marseille, a fulminé contres
le droit de cinq francs. Ç'a été long,:
bien long, mais point absolument dé
nué d'intérêt. Orateur diffus, heurté,!
incorrect, l'ancien ministre a-quelque;
chose pour lui cependant, et ce quel-;
que chose est beaucoup : il se montre !
toujours vif et passionné. En outre, il
est habile. De sorte qu'on l'écoute et
qu'il produit un certain effet.
Il a eu bien vite* hier, jeté de l'ani
mation dans le débat. Il a commencé
par soutenir que personne, aux 4 et
18 octobre 1885, n'avait osé, d'une fa- ,
çon nette et formelle, dire aux élec
teurs : « Je demanderai le relèvement
du droit sur les céréales étrangères. »
A l'appui de ce qu'il avançait, pre
nant les professions de foi d'un cer
tain nombre de représentants des ré
gions où les agriculteurs souffrent le
Elus, il en a donné .lecture à la Cham-
re. On trouve dans ces professions
de foi des phrases comme celles-ci :
« Il faut protéger par des lois sérieu
ses, efficaces, les denrées agricoles. »
— « Nous protégerons l'agriculture
contre la concurrence étrangère. » —
« Nous continuerons à protéger l'agri
culture. » Etc. Dans aucune des| cita
tions que prodiguait |l'orateur, il n'y
avait cette phrase ; « Nous relèverons
à cinq francs le droit sur les blés: »
Aussi lisait-il de son air le plus itriom-
phant. Mais,bientôt,de tous côtés,par
tent, éclatent de vives réclamations.
Ceux qui avaient parlé dans leurs mani
festes électoraux du relèvement de la
taxe,et dont M. Rouvier ne soufflait mbt,
lui demandent avec impétuosité pour
quoi il les passe tranquillement sous
silence. Les - autres font encore plus
de tapage. « C'est vrai, clament-ils,
notre profession de foi ne contient
qu'une phrase plus ou moins vague
en faveur de l'agriculture; mais nous
avons promis de réclamer le droit de
cinq francs sur les céréales étrangères
dans toutes les réunions où nous avons
comparu. » Ce n'est pas sans peine
Sue M. Floquet parvint à rétablir l'or-
re et le calme. Après quelques mi
nutes d'agitation, de remous, 1$ député
libre-échangiste put 1 enfin reprendre
son discours.
Discours sombre; M. Rouvier, l'air
fatal, a prédit les plus grands mal
heurs à la France, aux villes comme
aux campagnes, à l'agriculture elle-
même, à l'agriculture qu'on abuse, si
le droit de cinq francs est voté par les
Chambres. Elle en mourra, l'agricul
ture, et nous en pâtirons tous cruelle
ment. Il y avait de quoi frémir. Espé
rons que l'orateur protectionniste, qui
parlera demain nous rassurera un pieu.
C'est nécessaire. Cet orateur sera-t-il
M. Develle, ministre, mais à qui les
membres du cabinet ne permettent
de prendre la* parole qu'à titre privé ?
M. Peytral nous a déclaré que M. Loc
kroy, ministre aussi, mais, parlant,
comme l'autre, rien qu'en son nom
personnel, répondrait à,son collègue.
JLe spectacle serait curieux, édifiant et
rare. M. Lockroy, qui assistait à la
séance, a paru trouver M. Peytral ter
riblement indiscret. Il a mordu sa
moustache; il n'a pas dit non.
En attendant les compétentes dis*
sertations de M. Lockroy, il faut cons
tater, avant.de finir,que le libre-échan
giste' Rouvier lui-même a reconnu les
souffrances de l'agriculture, lly aquel-
que chose à faire, a-t-il dit, et il a
proposé son remède: Que tous les cul-,
tivateurs deviennentaussi savants que
ce M. Grandeau, qui obtient de si ma
gnifiques résultats en cultivant du blé
dans des petits pots sur sa fenêtre, et
tout ira bien. C'est vraiment fort
simple.
Pierre Veuillot.
■ Le correspondant romain du Monde,
celui qui annonçait, sinon comme
« très probable », au moins « comme
possible », un accord prochain entre
le Pape et ses spoliateurs, revient, par
une nouvelle lettre, sur le « plan »
dont il avait indiqué « les lignes gé
nérales ». Mais, s'il y revient, c'est
pour faire retraite, il commente de
telle sorte ses premiers dires qu'il
•n'en reste à peu près rien. C'est au
point que lui-même ne les reconnaît
pas. Il croit, par exemple, que « le
plan » auquel il faisait si bon accueil
ne ressemelait aucunement à celui
que produisait en même temps le Jour
nal des Débats. Or,, pour le fond des
choses, ils étaient identiques. Seule
ment, tandis que le correspondant du
Monde s'avançait avec précaution et
tenait le langage respectueux d'un ca
tholique,. celui des Débats parlait d'un
autre ton.
En même temps qu'il explique sa
première lettre de manière à l'effacer,
le correspondant du Monde défend ses
intentions. Pour notre part, nous ne
les avons pas accusées. Nous savons,
parfaitement que le Monde pense com
me nous sur la question du pouvoir
temporel ; mais les bonnes intentions
ne peuvent toujours préserver de l'er
reur, et dans cette circonstance il y a
eu erreur. ,Le « plan » auquel le corres
pondant du Monde croyait ,y voyant une
œuvre autorisée, n'a été qu'une com
binaison d'amateur sans consistance.
Ces négociateurs, qui ne tenaient leur
mandat ni du Vatican, ni du Quirinal,
ni de Rerlin,et prétendaient cependant
faire marcher Berlin, le Quirinal et le
Vatican, rappellent les diplomates d'es
pèce particulière qui du temps de Mo
lière travaillaient au mariage du Grand
Turc avec la République de Venise.
Il convient de ne pas trop s'en occu
per.
Eugène Veuillot.
II y a trois jours, le récit d'un meur
tre épouvantable remplissait les co
lonnes des journaux de Paris. : on
apprenait que M. Stilmant, directeur
des Aciéries de France, avait été lâ
chement assassiné, sur un des quais
de Seine, par un ouvrier mécontent,
de nationalité belge, qui s'était tué
lui-même après avoir satisfait sa ven
geance.
. C'était, moins les détails de sauva
gerie qui ont accompagné le meurtre
de M. Watrin, la répétition du dramo'
de Decazeville. Mais là ne s'est point
borné le scandale, et à cette scène de
meurtre il y a eu un épilogue peut-
être plus épouvantable encore. On a
fait au meurtrier des funérailles dont
le Temps nous donne le récit en ces
termes :
Durant toute la journée d'hier la foule
n'a cessé de stationner rue Juge, devant la
demeure de Deruyter. De distance en dis
tance circulaient des gardiens des brigades
centrales; au poste, rue Violet, les gardiens
du quartier avaient été consignés. Ces
mesures avaient été motivées par la
note suivante parue la veille dans le Cri du
Peuple :
Le groupe des Athées, les Antipropriétaires,
la sestion générale des tailleurs présentent leurs
condoléances à la veuve du justicier Deruyter
pour l'acte de virilité révolutionnaire que son
mai'i a accompli sur la personne de Stilmant,
et prient leurs camarades de bagne de le pren
dre pour modèle de dignité humaine.
Un avis ultérieur donnera l'heure de l'enterre
ment, où sont priés de se trouver tous les anar
chistes de Paris et de la banlieue. • -
Le contre-temps apporté par le retarddu
permis d'inhumer et l'heure matinale à la
quelle a eu lieu ce matin* l'enterrement de
Deruyter ont quelque peu entravé la mani
festation projetée par les socialistes-révolu
tionnaires. A neuf heures précises la levée
du corps a été faite sans incident. Sur les
/.trottoirs, sur le seuil des portes, lés voisins
et les femmes regardent curieusement, mais
pas, un cri n'est proféré. La bière est mise
rapidement sur un char de 1' classé, ainsi
que trois couronnes très simples, deux en
Ïerles avec les inscriptions : A notre ami —
'ictime du ■ travail, et une troisième d'im
mortelles jaunes. Derrière le char prennent
place le frère de Deruyter, qui conduit ' le
deuil,et une trentaine de personnes, la plu
part en costume de travail. Parmi eux deux
deux ou trois anarchistes et autant de so
cialistes-révolutionnaires.
Le convoi prend la rue Violet, passe de
vant l'église et monte la rue de l'Abbé-
Groult. Dans Grenelle,'les gens se mettent
aux fenêtres ou sur lé pas de leur porte;
mais arrivé rue Vouillé et rue d'Alésia, ces
marques de curiosité elles-mêmes cessent
complètement. Le long du trajet, des grou
pes d'agents avaient été échelonnés, mais
ils n'ont pas eu à intervenir.
Au cimetière de Bagneux, où le cortège
est arrivé à onze heures, des discours ont
été prononcés; 'Nous les donnons comme
documents humains, si l'on peut appliquer
ce qualificatif à de telles élucubrations.
Un ouvrier belge a d'abord salué Alfred
Deruyter au nom de tous les ouvriers bel
ges résidant à Paris. « Deruyter, a-t-il dit,
est mort content, car il a pu se venger.
Bien qu'il repose en terre étrangère, ses
compagnons viendront souvent le visiter. »
Un socialiste a fait l'éloge du révolté."
« Quand les ouvriers se verront domptés,
s'est-il écrié, qu'ils fassent comme Deruy
ter. » :
Un troisième orateur, le citoyen Coupard,
président de la chambre syndicale des chif
fonniers, dit qu'il faudra graver sur la
tombe de celte victime du patronat : Hom
mage au courage malheureux! « Comme
sur les tombes de Vallès, de Blanqui, etc.,
ajoute-t-il, nous reviendrons ici, chaque
année, saluer ce martyr aussi grand eux. »
Au nom de la jeunesse anarchiste, le com
pagnon Jahn, qui n'est guère âgé que de
dix-sept ans, prononce les paroles suivan
tes : « Tu n'as eu qu'un tort, compagnon,
c'est de t'être donné la mort et de ne pas
avoir osé affronter la justice bourgeoise.
Mort aux exploiteurs ! mort h la bourgeoi
sie ! » Aussitôt éclatent les cris : Vive l'anar
chie! vive la révolution sociale !
On entend enfin un dernier anarchiste :
« Deruyter, cœur généreux, tu n'as pas
voulu attendre le grand jour de la révolu
tion! Semblable au Spartacus antique, tu
t'es immolé toi-même après avoir vengé tes
frères ouvriers. Compagnons, je ne sais pas
à quelle école appartenait Deruyter, mais
je crie : Vive ce soldat anonyme dont
l'exemple devrait être suivi par tous ! vive
l'anarchie ! »
Vive l'anarchie ! vive la révolution so ■
ciale ! répondent les révolutionnaires !
On voit que le Temps s'ingénie à di
minuer 'la gravité des manifestations
dont l'enterrement du meurtrier De
ruyter a été le prétexte. Mais celte gra
vité éclate aux yeux pour quiconque
ne cherche pas à s'illusionner. Ces
apdlogies sauvages du meurtre trans
formé en un acte héroïque pendant que
le meurtrier est lui-même qualifié de
victime, ont uue signification qu'on
chercherait vainement à dissimuler.
C'est un symptôme de guerre sociale
imminente,qu'on aurait grand tort de
traiter avec indifférence ou dédain.
De pareilles manifestations seraient
déjà fort alarmantes sous un gouver
nement qui aurait le souci du danger
que court l'ordre social et la volonté d'y
parer. Mais combien plus le deviennent-
elles sous un gouvernement qui, bien
loin de s'opposer à la propagande des
idées anarchistes, s'en fait pour ainsi
dire le complice! S'il en était autre
ment , des discours comme ceux dont
le Temps donne des extraits mène
raient directement leurs auteurs de
vant la. justice, qui aurait à les châ
tier avec la dernière sévérité. Or, on
remarquera que le 'Temps ne laisse
même pas entrevoir qu'il puisse être
question de poursuites ; il se félicite
même de ce que les agents de police
« n'ont pas eu à intervenir ». On de
mande en quelle circonstance, dès
lors, on jugera que les agents ont à
intervenir.
Auguste Roussel.
Les journaux de Londres parlent
sérieusementde prétendues poursuites
que le gouvernement anglais aurait
l'intention d'exercer contre MgrCroke,
archevêque de Cashel. Nous avons dit,
l'autre jour, que Mgr Croke, envoyant
son offrande à un journal de Dublin
pour la souscription ouverte au profit
de M. John Dillon et divers autres dé
putés irlandais, écrivait que si un ma
nifeste du parti irlandais conseillait au
peuple irlandais de refuser le paye
ment des impôts, il appuierait lé ma
nifeste en principe. L'éminent prélat
ajoutait qu'il était malheureux de voir
le peuple irlandais fournir lui-même
au gouvernement anglais un argent
qu'on employait contre lui à armer la
police et les troupes.
Cette lettre de Mgr Croke a produit
d'autant plus de sensation que jadis
l'éminent prélat s'est prononcé contre
le manifeste du parti national qui,lors
de l'emprisonnement en masse de Kil-
mainham, conseillait au peuple irlan
dais de refuser tous les loyers.Si le mi
nistère Salisbury se lance dans ces
poursuites, auxquelles nous ne croyons
pas pour notre part, il devra aussitôt
en commencer d'dutres contre l'ar
chevêque de Dublin, qui s'est publi
quement prononcé en faveur du « plan
de campagne. » Et ces poursuites, dé
clare un journal radical de Londres,
donneraient immédiatement aux ar
chevêques de Cashél et de Dublin ce
qui peut leur manquer encore pour
« une canonisation populaire ».
Voici la note du. Temps à laquelle il
est fait allusion plus haut :
M. Develle, ministre de l'agriculture, doit
prendre la parole après-demain jeudi, de
vant la Chambre, pour faire connaître son
opinion sur la question du relèvement des
droits sur les céréales.
On sait déjà qu'il doit parler en son nom
personnel ; il appuiera l'élévation du droit
à 5 fr. pour les blés, en déclarant nette
ment qu'il n'engage eh rien la responsabi
lité du cabinet, qui a décidé de garder la
neutralité dans ce débat.
De nombreuses démarches out été faites
depuis quelques jours auprès des ministres
opposés à l'élévation des droits pour les
déterminer à intervenir dans.le débat et à
opposer leur thèse à celle du ministre de
l'agriculture.
La'question a fait à plusieurs reprises
l'objet des délibérations du conseil des mi
nistres. Finalement, il a été convenu que
M. Develle parlerait seul en son nom per
sonnel; mais le président du conseil mon
tera à, latribune et fera une déclaration
pour, expliquer les motifs qui ont déterminé
le cabinet à garder là neutralité: et dégager
en même temps les ministres opposite au
relèvement des droits.
Au rédacteur
• l équilibre du budget
Monsieur le Rédacteur,
J'ai l'honneur de vous adresser les ré
flexions suivantes, dont vous ferez l'usage
que vous jugerez convenable. -
Quels que soient les déguisements dont
les financiers décorent leurs budgets, s'ils
diffèrent quelque peu dans la l'orme, ils
sont absolument les mêmes quant au fond;
et il faut véritablement avoir une bien
triste idée de l'intelligence de ceux à qui
l'on prétend faire croire qu'un budget peut
s'équilibrer sans emprunt ni impôt. Quand
une balance cesse-d'ôtre en équilibre, il n'y
a-qu'un moyen de le rétablir-: c'est d'ôter
du poids au plateau qui baisse ou, d'en
ajouter à celui qui monte. Réduire lés dé
penses ou augmenter les recettes. Jamais
nos gouvernants républicains ne se résou
dront à faire des économies sérieuses et à -
s'ôter le pain de la bouche,'car ils ne se
soutiennent que par leurs dépenses.-Il fau
dra donc, forcément, qu'ils aient recours à
l'impôt et à l'emprunt. .
Opérations de trésorerie, obligations
sexennaires ne sont, en réalité, que des
emprunts déguisés. Si vous employez à
d'autres dépenses les fonds destinés aux
remboursements, c'est un emprunt que
vous faites, et une dette que vous conso
lidez ; boucher un trou pour en creuser un
autre. L'emprunt est lui-même un impôt,
car si le capital grève l'avenir, l'intérêt
grève le présent en nécessitant un impôt.
Mais l'impôt et l'emprunt étant un épou-
vantail pour le contribuable, on cherche à
les dissimuler sous des dénominations in
compréhensibles pour ceux qui ne sont pas
initiés aux sorcelleries de la finance. C'est
le tour du gobejet; faire passer la muscade
sans que Jocrisse s'en aperçoive, et la larce
est jouée. .
Il y a trois sources de revenus : le sol,
valeur réelle ; le métal, valeur de conven
tion, et le papier, valeur de crédit. Je dis
le sol, valeur réelle, parce que plus il pro
duit, plus la richesse augmente, et que plus
les autres s'accroissent, plus leur valeur
diminue. Malheureusement il est tellement
écrasé par l'impôt et le libre-échange qui
n'a de vrai que le nom, que si cela conti
nue, il ne tardera pas à s'effondrer, entraî
nant avec lui tout le reste dans le gouffre
béant de la banqueroute.
Notre malheureuse France est devenue,
permettez-moi l'expression, la vache à lait
des intrigants qui l'exploitent et de l'étran
ger qui ne lui permet de vivre qu'à condi-.
tion qu : il puisse la traire, et quand elle
tomber a épuisée et tarie, il lui sera facile
de s'en partager les morceaux. Quand donc
l'électeur par trop naïf ouvrira-t-rl les yeux
et cessera-t-il d'être la dupe des ambitieux
qui s'engraissent à ses dépens ? '
Ce n'est donc pas assez qu'il soit écrasé
d'impôts, que ses enfants lui soient enlevés
presque au berceau pour en faire des athées
et plus tard.les envoyer mourir par le fer
ou la maladie à trois mille lieues de la pa
trie ; qu'il soit lui-même astreint au service
militaire pendant les trois quarts de sa vie?
Qu'atlend-il donc de.plus? une catastrophe?
Eh bien, il l'aura.
Veuillez recevoir, monsieur le directeur,
l'assurance de ma considération la plus
distinguée.
L. de L a T ouk du; P in.
L'Osservatore Romano annonce, d'a
près le Cittadino de Gênes, que le
Saint-Pére, prenant en pitié les mal
heureuses victimes des derniers trem
blements de terre en .Italie, a, dans sa
grande générosité, fait parvenir,"pour
les soulager, à Mgr l'archevêque de
Gênes une somma de vingt mille
francs.
Voici le texte officiel de la formule
du serment à prêter par les évêques et
archevêques en Prusse, aux termes de
la nouvelle ordonnance signalée précé
demment par les dépêches de l'Agence
Havas : .
. Nousi Guillaume, par la grâce de Dieu,
roi de Prusse, etc., etc., vu l'abolition de
l'ordonnance du 6 décembre 1873, nous or
donnons ce qui suit :
Paragraphe unique. — Les archevêques,
les princes-évêques et les évêques doivent
prêter à notre personne le serment ci-après;:
« Moi, N. N., je jure comme futur évê-
que de N., devant Dieu tout-puissant qui
voit et connaît tout,, et sur les saints Evan
giles, que, dès que je serai sur le siège
de N., je resterai fidèle à S. M. le roi de
Prusse (N. N.) et h ses légitimes succes
seurs dans le gouvernement de la nation,
comme à mon Roi et Seigneur; que je lui
rendrai soumission et obéissance en faisant
à Sa Majesté Royale tout le bien en mon
pouvoir, comme en écartant de lui tout le
mal selon mes forces. Spécialement,je ferai
mes efforts afin que les esprits des prêtres
confiés à ma direction épiscopale et des
fidèles qui me sont soumis soient ins
truits avec soin dans le respect et la fidé
lité au Roi, l'amour envers la patrie, l'o
béissance aux loix et en toutes jles vertus
qui dans le chrétien font distinguer le b'on
sujet; je ferai tous mes efforts pour que
mon clergé ne soit pas instruit et élevé en
sens contraire. ■
« Spécialement je promets de ne consti
tuer aucune association ou société, soit à
l'intérieur, sott à. l'extérieur du pays, qiii
puisse devenir dangereuse 'pour la sûreté
publique, et, au cas où je viendrais îi sa
voir que dans mon diocèse ou ailleurs il se
trame des choses pouvant nuire à l'Etat, je
veux les dénoncer à S. M. le Roi.
« Je promets de maintenir irrévocable
ment tout cela, d'autant plus que je suis
certain qu'en prêtant serment à Sa Sainteté
et à l'Eglise, je ne me suis obligé à rien qui
puisse être opposé à la fidélité .et à TobéiS*
sance envers'mon souverain.
« Je jure tout cela, et que Dieu me soit
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