Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1882-10-09
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 09 octobre 1882 09 octobre 1882
Description : 1882/10/09 (Numéro 5444). 1882/10/09 (Numéro 5444).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Lundi 9 Octobre 1882
6444 — Edition quotidienne.
Lundi 9 Octobre 1882
HK9
PARIS
fJn an. . . .
Six mois.. .
Trois moisf.
Un Numéro, à Paris. . . .. ...
— Départements
55 fr. »
28 50
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DÉPARTEMENTS
Un an, . , , „ .
Six mois. . , . r .
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Édition semi-quotidienne
Un an, 30 fr. -<» Sjx mois, 16fr. — Trois mois, 8 fr. 50
BUREAUX
Paris, 10, Rue des Saints-Pères j _
L'UNIVERS ne réptsa pas des manuscrits qui lui sont adressé»
On s'abonne, à Borne, place du Cesi
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poste.
FRANGE
PARIS, 8 OCTOBRE 1882
Plus hardi que M. de Bouteiller, qui
se contentait d'insinuer la candida-
ture de M. de Freycinet à la succes
sion non encore ouverte du cabinet
Duclerc, le National vaticine. Il nous
déroule la série des transformations
par lesquelles passera le gouverne
ment avant d'arriver à M. de Freyci
net. D'abord, on aura M. Jules Ferry
qui viendra renforcer M. Duclerc, trop
insuffisant. Puis., le cabinet Ferry-Du-
clerc renversé, M. Gambetta prendre
le pouvoir; mais ses fautes ne lui per
mettront même pas d'imposer la disso
lution et le scrutin de liste, et l'on re
viendra à M. o de Freycinet, suprême es
poir de la république.
Nous verrons si le National est bon
prophète.
Décidément, M. le ministre Devès
n'est pas fixé sur son fameux projet
centre la magistrature. A la première
note Havas et à la conversation avec
le rédacteur du Voltaire, s'ajoute une
nouvelle note de Y Agence Bavas, qu'on
trouvera plus loin. Il paraît que le projet
n'est pas encore rédigé ; il ne le sera
que dans une huitaine. En même temps
que, se contredisant légèrement, l'A
gence Havas annonce cela, elle plaide
les circonstances atténuantes pour cer
taines idées prêtées à M. Devès, notam
ment pour le conseil de discipline,
qui a paru raide, et pour la mise d'of
fice à la retraite des magistrats à trente
ans de service et soixante ans d'âge.
Nous doutons que les raisons de l'offi
cieuse Agence fassent accepter les idées
de M. Devès, qui fera toujours trop ou
trop peu. Du reste, nous doutons en
core .davantage^ qu'il ait le temps de
mettre à exécution ses idées contre la
magistrature. Il doit en douter lui-
même.
M. Floquet fait annoncer par l'A
gence Havas qu'il a refusé la candida
ture que lui offraient les électeurs de
Brignoles, parce qu'il se considère
comme lié avec les électeurs de Per
pignan. Espère-t-il, par^ cet acte de
grandeur d'âme, conquérir les radi
caux roussillonnais ? Il pourrait bien
se tromper, car on continue à lui op
poser un candidat intransigeant, qui
est le docteur Magnan.
Du reste, dans l'arrondissement de
Brig'noles, il se heurtait également à
une candidature radicale, celle du ci
toyen Poulet, conseiller municipal de
Paris. Cela a pu contribuer iï son
refus.
Il paraît qu'on va suspendre la pu
blication des listes des indemnisés du
2 décembre. De tous les côtés on se
plaint de la manière dont les indem
nités sont réparties, et un nouvel exa
men est nécessaire. Cela ne nous sur
prend pas.
Une explication
• S. Ex. Mgr Czacki a reçu de M. Grévy
la. barrette et rentre à Rome cardinal.
C'est le couronnement régulier de la
haute fonction qu'il a remplie près du
gouvernement français. Il va rejoindre
au Sacré -collège ses èminents prédéces
seurs,les cardinaux Sacconi, Chigi, Me
glia, qui ont laissé ici tant et de si bons
souvenirs. Du reste, que le souverain
Pontife lui fit prendre cette voie ou une
autre, le nouveau cardinal était, par
sa situation, son amour de l'Eglise,
son mérite, du nombre des prélats que
cette dignité attend. Avant qu'il fût
«désigné pour le poste qu'il a occupé
près de trois ans, l'on était convaincu
a Rome que cet ecclésiastique polo
nais , jeune encore bien qu'entré
tard dans les ordres, porterait un jour
la pourpre.
Ce n est pas seulement pour faire
nos compliments et nos adieux au car
dinal Czacki que nous parlons de son
élévation au cardinalat. Nous voulons,
au moment de son départ et lorsqu'on
ne peut plus interpréter à faux nos
paroles, dire quelle a été notre situa
tion vis-à-vis de lui. Ce sera notre ré
ponse aux nombreux articles où, sous
prétexte de le louer, on nous outrage.
Lorsque S. Em. le cardinal Meglia et
les deux prêtres distingués qu'il avait
pour auxiliaires, MM. Tagliani et Tosti
(yuerra, quittèrent Paris, nous ne les
vîmes pas partir sans_ regret. Mgr Me
glia nous avait honorés de sa bienveil
lance et de sa confiance. Nous avions
pu apprécier la sûreté de sa paro']? f
nous savions que, sous une apparence
froide et réservée, trop réservée peut-
être, se trouvait un esprit ferme et
droit, absolument dévoué à l'Eglise et
tenant par-dessus tout aux principes.
On a dit que chez lui le prêtre domi
nait le diplomate. Est-ce un défaut?
Ce qui doit toujours dominer chez le
prêtre, c'est le prêtre. Une nonciature
a ans les temps actuels, particulière
ment en France, est, d'ailleurs, beau
coup plus un poste ecclésiastique qu'un
poste diplomatiqùe.
Les sentiments que voulait bien nous
montrer Mgr Meglia n'avaient rien de
nouveau pour nous; ses prédécesseurs,
les cardinaux Sacconi_ et Chigi, avant
eux le cardinal Fornari et Mgr Garibal-
di, nous y avaient habitués. Jusqu'ici,
dans les crises diverses que l'Univers a
traversées, il avait toujours trouvé à la
nonciature des conseils et un appui.
Et de même que l'on y comptait a bon
droit sur lui, on y admettait, on y res
pectait son indépendance ; cette indé
pendance* qui exclut la platitude et
n'empêche pas la soumission.
Si nous regrettions le nonce qui par
tait, nous attendions avec confiance
son successeur. Outre que Y Univers a
pour principe de trouver bon tout ce
que fait le Pape, nous avions ici des
raisons particulières de contentement:
le rédacteur en chef du journal avait
rencontré à Rome Mgr Czacki et en
gardait un bon souvenir. Notre corres
pondant romain le connaissait depuis
longtemps et avait'eu avec lui d'excel
lents rapports. Il se croyait son ami.
De plus, nous nous souvenions de la
part prépondérante qu'il avait prise
à la Correspondance de Genève , cette
publication où vivait l'esprit des ha
rangues de Pie IX, et qui, sans s'in
quiéter des gouvernements ni des pe
tites combinaisons modérées et libé
rales, affirmait carrément les principes
de la politique chrétienne.
Nous devions donc compter à la
fois, et nous y comptions, sur les
bonnes dispositions personnelles de
Mgr Czacki et sur la bienveillance par
ticulière que promettait lacommunauté
des doctrines. Nous pensions aussi que
les vieux services de l'Univers ne se
raient pas oubliés.On eût pu nous dire,
sans beaucoup nous surprendre, que la
ligne de telle ou telle feuille catholique
plairait plus que la nôtre; mais si l'on
nous avait prédit que le Figaro serait
tenu à la nonciature pour ami et;
l'Univers pour ennemi, nous ne l'au
rions certes pas cru. Même aujour
d'hui, en dépit du fait accompli et des
allusions outrageantes dont le Monde,
le Figaro, la Défense, le Times, le Fran
çais nous poursuivent, nous avons
peine à y croire. C'est si singulier !
Les sentiments et les dispositions
que nous rappelons ne restèrent pas à
l'état platonique. Nous parlâmes tout
de suite du successeur de Mgr Meglia
de manière à lui gagner le concours
sympathique de nos amis. Notre col
lection l'atteste. Cependant si l'Univers
ne ménagea pas les éloges, s'il annonça
que l'on devait compter sur une active
et brillante nonciature, d'autres le dé
passèrent dans cette voie. La Patrie
disait, l'autre jour, que Ton faisait trop
de bruit à propos du départ du Nonce;
on en fit trop aussi à propos de son ar
rivée. Quantité d'articles et de correspon
dances parurent çà et là pour montrer
dans ce changement un événement.
C'était forcer la note et rendre, par
excès de zèle, un mauvais service au
prélat aimable et distingué qui arrivait.
Telle fut dès lors notre impression.
Aussi refusâmes-nous d'insérer une
étude biographique intitulée : Monsei
gneur Wladimir Czacki , dont, par l'en
tremise de Mgr de Ségur, qui ne l'avait
pas lue, l'auteur anonyme, un reli
gieux nous dit-on, voulut bien nous of
frir la primeur. Cet écrit, qui fut pu
blié en brochure, ne se bornait pas à
louer le nouveau Nonce ; il semblait
vouloir établir que jusqu'ici la noncia
ture de Paris n'avait pas vu un hom
me, et qu'enfin elle allait en voir un.
Le Figaro vient de donner la même
note. Elle n'était pas juste il y a trois
ans, elle ne l'est pas devenue. Mgr
Czacki a travaillé de son mieux ; mais
lui immoler ses prédécesseurs est à la
fois une inconvenance, une injustice
et une sottise.
Dans* un réfeent article qu'il eût dû
écarter, et au sujet duquel le directeur
du Monde a regretté de ne pouvoir se
battre en duel, le Gaulois s est fait de
cette brochure un grief contre l'émi-
nent prince de l'Eglise. Voilà de la
prévention! Un homme public, occu
pant une grande situation, évite diffl-
lement les flatteurs, les parasites, les
maladroits amis, et ne peut empêcher
cette engeance de lui jeter des pavés
croyant lui jeter des fleurs. Il faut
plaindre Mgr Czacki d'avoir subi, ,de
subir encore cet inconvénient des gran
deurs, et non le lui reprocher. Esprit
fin et délié, il sentit certainement
mieux que personne qu'on se. pressait
trop d'escompter son avenir et de pro
mettre des merveilles. Nous en avons
eu personnellement la preuve.
„ Depuis quelque temps déjà, il étai
à Paris et y avait pris langue, lorsque
nous eûmes l'honneur de lui faire
une première visite. A peine lui avions-
nous exprimé le regret de n'avoir pu
nous présenter plus tôt, qu'il voulut
bien nous remercier du langage de
l'Univers sur lui. Il ajouta qu'on l'avait
gêné en lui prêtant une force qu'il ne
prétendait pas avoir, jnais que s'il
n'était pas 1 iiôlïipie Jiorg ligné qu'pn
pvait eu Iç tort d'annonC*"; il es P, é ;
| rait montrer ce que peuvent la
bonne volonté, l'amour de l'Eglise et
la résolution de faire son devoir. Nous
refusâmes de prendre à la lettre ces
paroles trop modestes, puis nous lui
rappelâmes que l'Univers était à son
service. Il répondit qu'il y comptait et
apprécia nos travaux en termes qui
nQusJj&rureutjun écho .des,.encoura
gements et des bénédictions que nous
avions reçus du Saint-Père.
L'entretien ne se borna pas à un
échange de compliments. Mgr Czacki
voulut bien nous demander des ren
seignements pour un travail dont il
s'occupait,, et nous interroger sur
quelques-uns des hommes du jour et
quelques-unes des questions du temps.
Quant aux questions, il nous sembla
qu'il pensait comme nous ; quant aux
hommes, il évita de s'engager; pré
caution naturelle.-dans sa situation.
Au total, nous sortîmes très satisfait.
Comment cette situation s'est-elle
modifiée ? Gomment sommes-nous de
venus suspects et avons-nous été dé
clarés hostiles? Nous en sommes en
core aux conjectures. Le "désir d'être
l'homme de tous fit-il croire au
Nonce qu'il nedevait ni être ni paraître
trop bien disposé pour l'Univers ? Pen-
sait-il que l'énergie de notre opposi
tion, s'il paraissait nous approuver, le
gênerait dans ses relations forcées
avec nos gouvernants ? Trouva-t-il nos
idées trop absolues ? Quelques rap
ports de nos adversaires le firent-ils
douter de nos sentiments? Nous l'i
gnorons. La chose certaine, c'est qu'il
fut vite hors de doute pour nous que
npus n'étions pas en faveur. Nous res
tâmes à l'écart, tout prêts à donner
une explication si elle était demandée,
très décidés à ne rien réclamer.
Cotte réserve n'arrangea pas nos
affaires. .Nous apprîmes bientôt, par
des feuilles boulevardières, que l'on
ourdissait de noirs complots contre le
Nonce, et que l'Univers en était. Nous
y avions même un rôle important.
Faut-il l'avouer ? ce commérage, loin
de nous irriter ou de nous inquiéter,
nous fit hausser les épaules et sourire.
L 'Univers conspirant contre le Nonce,
voulant en faire un agent politique
des royalistes, cherchant à peser sur
les décisions du Pape, ayant un candi
dat à la nonciature ; quelles sottises !
Après tant d'années de luttes, tant de
témoignages de notre respect, tant
de gages de notre droiture, après
avoir été loués de si haut pour nos
doctrines, fallait-il nous défendre con
tre de tels propos ?
Quels faits, quels indices avaient ré
vélé la conspiration? Le Figaro, le
Monde , le correspondant parisien du
Times, M. Oppert, de Blowitz... en
Bohême, viennent de les rappeler avec
un instructif accord.
Les « louches détracteurs » du Non
ce, voulant le perdre dans l'opinion
catholique et près du Pape, assu
rent ces bonnes âmes, lui repro
chaient des rapports trop suivis et
trop expansifs avec les hommes du
gouvernement, une grande com
plaisance pour la république et
les républicains, des propos dédai
gneux et hostiles contre les royalistes,
une attitude faible quant à la défense
religieuse, etc.
Il y en a plus long, mais, au fond,
c'est tout. La dessus, Monde, Figaro et
Times déclarent à l'envi, d'un ton doc
toral et impétueux, qu'un ambassa
deur doit entretenir des relations cour
toises avec le gouvernement près du
quel il est accrédité, que le Nonce au
rait manqué à sa mission s'il s'était li
vré aux légitimistes, qu'il y a des ca
tholiques dans tous les partis, que le
représentant du Pape doit, comme le
Pape lui-même, voir partout des âmes
à sauver; qu'il est tenu à la pruden
ce, etc.
Voilà de grands enfonceurs de portes
ouvertes ! Mais qui donc a jamais pré
tendu qu'un Nonce doit faire de la po
litique, être homme de parti, agir sans
réflexion et ne pas voir les chefs du
gouvernement près duquel il est accré
dité? Tout le monde, au contraire, re
connaît ces obligations. 11 ne faudrait
pas, pour noircir ses adversaires et en
avoir raison, leur prêter des niaiseries
auxquelles ils n'ont pu sônger. Le dé
bat ne peut porter que sur la question
de mesure. Cette question, diverses
feuilles l'ont traitée plus ou moins
librement ou justement. L' Univers n'y
a pas touché. Quand on dit le con
traire, on ment. Il a suivi en
simple témoin ce débat mesquin et
fâcheux. Les journaux de reportage et
de papotage qui rendaient compte des
dîners et des réceptions du Nonce, qui
le félicitaient d'avoir modifié les allures
trop graves de la nonciature, qui le
suivaient dans les salons officiels et
même à la table du correspondant du
Times, ces journaux ne nous semblaient
guère moins inconvenants que ceux
où l'on relevait ces menus propos
pour s'en faire une arme. Nous lais
sâmes passer le blâme comme l'éloge,
ne nous reconnaissant pas le droit et
n'ayant pas le désir de chercher la
mesure de la réserve ou de l'abandon
que le Nonce devait apporter dans ses
relations obligatoires avec les Grévy,
les Gambetta, les Constans et autres
persécuteurs.
Notre silence a déplu aux zélés du
Figaro et au s méticuleux du Monde.
Soit ! qu'on nous le reproche si l'on y
trouve plaisir et profit, mais qu'on ne
nous accuse pas d'avoir parlé.
JJn fait, un seul, est mis spéciale
ment à notre charge. Il s'agit del$fa-
~"»use dépêche annonçant comme
probable l'envoi de Mgr Czacki à
Saint-Pétersbourg, où une nonciature
serait créée. Le gentilhomme—pardon,
le titré — qui relève malhonnêtement
cette vieillerie dans le Figaro affirme
que nous parlions à ce sujet de dis-
gruie Cest' faux. Ni l'idée, ni le-mot
ne se trouvent dans la dépêche. Nous
rapportions un bruit qui courait à Ro
me. que d autres journaux ont donné
comme nous, et qui n'avait rien de
blessant pour Mgr Czacki. Le croire
plus apte qu'aucun autre à terminer
heureusement les négociations enga
gées entre Rome et la Russie, était-ce
lui faire injure? On s'étonne et l'on
s'afflige d'avoir à s'expliquer sur de
telles misères.
Nos agresseurs sont-ils plus fondés
à prétendre que nous avons méconnu
tout à la fois les difficultés, les ennuis,
les amertumes de la mission de Mgr
Czacki, et les éclatants services qu'il a,
rendus?
D'abord, nous n'avons rien mécon
nu, puisque nous n'avons rien atta
qué, rien discuté ; cependant si c'est
un tort de ne pas juger absolument
la nonciature de Mgr Czacki comme le
font le Figaro, le Times et le Monde, de
ne pas y voir tout ce qu'ils y montrent,
ce tort nous l'avons. Mais est-on vrai
ment tenu d'admettre l'avis de ce
trio?
Ils nous disent que Mgr Czacki n'a
trouvé nul plaisir à mettre sa main
dans celles.de MM. Constans, Ferry,
Gambetta et autres Gougeard, à se '
montrer dans leurs salons, à dîner
avec eux. Nous le croyons sans peine.
A coup sûr il n'allait de bon cœur ni
chez le préfet de police Andrieux, ni
chez d'autres non moins répugnants.
Il agissait en diplomate et se sacri
fiait. Personne, du côté catholique, ni
du côté gouvernemental, malheureu
sement, ne s'y est mépris ; c'est pour
quoi cette diplomatie et ces sacrifices
ne pouvaient être féconds.
De même qu'il serait fort injuste de
reprocher au cardinal Czacki les mal
heurs dont l'Eglise a été frappée en
France pendant sa courte nonciature,
il est maladroit de prétendre que cette
nonciature a été particulièrement bril
lante. Mgr Czacki' a certainement
lutté contre les malfaiteurs officiels
de toutes les forces de sa vive intelli
gence, de toutes les ressources de son
habileté ; mais que pouvaient sa grâce,
son savoir, sa diplomatie, contre des
butors ennemis de Dieu et sûrs d'être
les plus forts? La diplomatie ne prend
pas partout. Elle peut donner de grands
résultats quand on à devant soi un gou
vernement qui, tout en nourrissant de
mauvaises idées et même de mauvais
desseins, veut s'entendre avec l'Eglise,
apprécie sa force et lui reconnaît des
droits. Il en était ainsi en France sous
Louis-Philippe, sous Napoléon III et
même sous les présidences de MM.
Thiers et de Mac-Mahon. LL. EEm. les
cardinaux Fornari, Sacconi, Chigi,
Meglia ont, pendant leurs nonciatu
res, fait avec succès de la diplomatie.
Il y a eu de leur temps, en effet, non
pas des luttes sauvages comme aujour
d'hui, mais nombre de questions gra
ves et délicates à traiter. Que de diffi
cultés a rencontrées Mgr Chigi pen
dant cette longue et belle nonciature,
où il fut si bien secondé par Mgr Ca-
pri. S'il y avait des obstacles, il y
avait aussi des hommes avec lesquels
on pouvait s'entendre. Nous n'en som
mes plus là, et Mgr Czacki, sans être
moins habile que ses devanciers, ne
pouvait réussir comme eux. Aussi
laisse-t-il à son successeur une situa
tion plus mauvaise que celle dont il
avait hérité.
Les flatteurs, fort peu désintéressés,
qui veulent absolument nous transfor
mer en adversaires de Mgr Czacki,
nous disent : Nierez-vous qu'il ait em
pêché un mal « incalculable », maintenu
le Concordat, obtenu de bonnes no
minations épiscopales? D'abord, nous
ne nions rien du tout, et aucun acte,
aucune démarche du Nonce n'a ja
mais été dans l'Univers l'objet d'une
discussion quelconque ; ensuite le pro
pre de ce qui est incalculable étant
de ne pouvoir être calculé, ce mot,
qui semble dire beaucoup, au fond ne
ait rien. Quant au Concordat et aux
nominations épiscopales, c'est diffé
rent. Nul doute que Mgr Czacki n'ait
mis le zèle le plus grand à préserver
de toute atteinte ces deux colonnes de
notre édifice religieux. Mais si l'on
veut être juste et parler raison, il ne
faut pas exagérer en ces points les
difficultés.
Le Concordat, très attaqué dans la
Chambre par une minorité radicale,
ne l'a pas encore été dans les conseils
du gouvernement. M. Grévy compte
le fausser à l'aide des articles organi
ques, mais il refuse de le briser. Tous
ses ministres ont toujours été de cet
avis. M. Gambetta et M. Jules Ferry
eux-mêmes se proclament « concor
dataires » réfléchis et déterminés.
Donc, le d§nger qui, bientôt peut-être,
sëra menaçant, n'a pas encore sérieu
sement existé. Quant aux nominations
épiscopales, elles ont certainement été
la grande affaire du Nonce et son prin
cipal souci. Des candidats impossibles
ont dû lui être proposés, les uns sé
rieusement, les autres pour la forme,
afin d'acquitter une promesse ou de
sonder le terrain. Il a réussi à les écar
ter. On nous dit qu'il ne l'a pas fait
( sans peine ; nous en sommes convain
cus et il ne pouvait remporter aucun
supcès gqi lui méritât plus de recon
naissante,
Le" Figaro et le Monde parlent en
termes échauffés des embarras parti
culiers et inattendus que nos divisions
politiques auraient suscités à Mgr
Czacki. Ces embarras étaient faciles à
prévoir, et jusqu'ici avaient paru fa
ciles à vaincre. Il y a longtemps que
les catholiques militants sont dans
l'opposition, et les royalistes y sont
depuis 1830. Cependant tous les non
ces qui se sont succédé en France de
puis Mgr Fornari jusqu'à Mgr Meglia
inclusivement, ont su entretenir à la
fois de bons rapports avec Je gouver
nement et avec ses ennemis, quand
ceux-ci étaient catholiques. Pourquoi
n'en a-t-il pas été de même cette fois ?
Les monarchistes auraient-ils deman
dé au Nonce de prendre une couleur
politique? On le prétend, mais on se
rait fort en peine de le prouver. Per
sonne n'a oublié que le Nonce n'a pas
à intervenir dans nos luttes intérieu
res et ne doit arborer aucune cocarde.
Et si, par impossible, quelque jour
nal avait fait cet oubli, ce ne serait
pas l'Univers. Cette dernière accusation
est donc aussi frivole que les précé
dentes.
Violemment et sottement attaqué au
sujet de Mgr Czacki, nous avons dû
entrer dans ces détails. Nous ne_ l'a
vons pas fait sans regret. S'il daigne
nous lire, l'éminent cardinal recon
naîtra qu'il n'a jamais eu besoin d'ê
tre défendu contre nous. Les intri
gants, les libéraux, les pauvrets, les
enviejix qui, sous prétexte de zèle, se
sont dans la presse constitués ses avo
cats, ont pu vouloir lui plaire ; ils ont
certainement voulu nous nuire. Nous
leur avons laissé le champ libre, car
un tel combat nous répugnait, et nous
ne pouvions croire qu'on les écoute
rait longtemps. Il fallait parler enfin,
nous nous y sommes résignés et nous
comptons que ce ne sera pas sans
profit.
Dans cette grande Home chrétienne
où il va travailler, prier, méditer, le
cardinal Czacki jugera les hommes et
les choses de France mieux qu'il n'a
pu le faire quand tant de préoccupa
tions l'accablaient. Il reconnaîtra alors
que nous n'avons jamais oublié ce que
nous devions à sa personne et à sa
dignité. Nous ne pouvions être ses ad
versaires, encore moins ses ^ennemis ;
nous n'avons pas eu la prétention d'ê
tre ses juges. Nous savions qu'il ai
mait le Pape, qu'il cherchait a faire
son devoir, qu'il voulait servir l'E
glise. Comment aurions-nous songé à
l'attaquer, même si les convenances
ne nous l'avaient défendu. Ceux qui lui
ont dit et peut être persuadé que nous
lui étions systématiquement hostiles
nous ont calomniés et l'ont trompé.
Eugène Vei'iu.ot.
La loi du 28 mars
A la suite d'un rapport sur la loi
criminelle du 28 mars, le congrès des
jurisconsultes catholiques réunis à
Reims, vient d'adopter à l'unanimité
la résolution suivante :
Considérant que la puissance législative
a des limites, que les assemblées qui en
sont investies n'ont pas le pouvoir de tout
ordonner ; que, notamment, elles ne peu
vent ni ordonner de faire le mal, ni violer
par leurs prescriptiens le droit naturel ;
que toute sanction pénale attachée ù. une
loi injusie est un abus de la force et un
acte de violence ;
Considérant que l'autorité paternelle, fon
dement de la famille, est de droit naturel
et divin;
Considérant que l'attribut essentiel de
cette autorité est, pour le père de famille,
la charge d'élever ses enfants; que le de
voir qui lui incombe de pourvoir à la sub
sistance matérielle et au dévellopement in
tellectuel et imoral de son entant implique
nécessairement le droit corrélatif de juger,
en pleine liberté de conscience et de rai
son, par quels moyens et dans quelles con
ditions il peut le faire ;
Considérant que la loi du 28 mars fait
au père de famille des injonctions qui pa
ralysent son droit de juger et violentent sa
liberté ; qu'en portant cette grave atteinte
à l'autorité paternelle, elle tend à désorga
niser la famille et, par suite, à ruiner le
fondement de l'ordre soeial.
Par ces motifs,
Le congrès est d'avis :
1° Que l'acte législatif intitulé « loi 'du
28 mars 1882 sur l'enseignement primaire
obligatoire » constitue un excès de pou
voir ;
2° Que les citoyens ont, en conséquence,
le droit de se refuser îi l'exécuter.
Nous recevons la dépêche suivante :
Rome, 8 octobre, 9 h. 3îi matin.
Aujourd'hui a lieu un grand dîner h
l'ambassade d'Espagne, en l'honneur de
Mgr Rampolla, nommé nonce à Madrid,
en remplacement de S. Em. le cardinal
Bianchi.
Les pèlerins français sont attendus.
Les congrégations romaines viennent
d entrer en vacances.
et a été présenté avec tant de force
par leur avocat, M 0 Hémar, qu'on doit
s'attendre à ce que le président du
tribunal de la Seine se déclare une
fois de plus cpihpétent dans une ques
tion qui relève absolument des tribu
naux civils.Mais il est à craindre que
l'affaire ne suive après ce.la le cours
ordinaire de ces sortes d'affaires et
qu'un arrêté du tribunal des conflits
ne vienne dessaisir de nouveau la jus
tice civile. t
Le scandale serait cette fois a plus
grand encore que dans les précéden
tes affaires ; car ici le droit des sœurs
échappe à toiîte ingérence politique
pour raison d'Etat, et les procédés
violents du préfet Floquet n'ont même
pas le prétexte des décrets de mars,
ni le caractère d'une mesure de haute
police. C'est de l'arbitraire,, pur et du
plus odieux.
Nous donnons une partie de la re
marquable plaidoirie de M" Hémar,
car l'affaire intéresse tout le monde.
Si le tribunal des conflits donne rai
son au préfet Floquet, on peut dire
qu'il n'y a plus de justice civile en
France. Avec des circonstances diffé
rentes, tout particulier peut se trouver
dans le cas des sœurs, et voir ses ti
tres méconnus, ses droits violés de la
même manière. Tous les justiciables
sont intéressés à l'issue du procès en
gagé contre le préfet de la Seine.
La série' des crochetages et des ex
pulsions a recommencé avec le mi
nistère Duclerc. L'incident des sœurs
de l'école de la rue de la Lune est un
des plus odieux de la persécution. Il se
juge en ce moment en référé. Le droit
des sœurs de Charité est si bien établi
-Rouen possède un préfet qui semble
avoir pris à tâche de surpasser M, Flo
quet lui-même. Ce préfet a une fureur
de laïcisation sans pareille. La loi, les
convenances ne sont rien pour lui. A
Dieppe, on l'a vu, il s'est permis de
changer la direction de l'école com
munale de filles sans même prendre
l'avis du conseil municipal, quoique
la loi de -1850, non abrogée, soit for
melle à cet égard. Mais on ne savait
pas encore que ce « laïeisateur » sec
taire avait été sur le point. de faire
enfoncer les portes de l'école pour y
installer la nouvelle institutrice laï
que.
Ce procédé commode entre de plus
en plus dans les mœurs administra
tives de la République. On enfonce au
jourd'hui les portes comme autrefois
on envoyait du papier. timbré. C'est
plus court et plus sûr.
On doit à la modération, peut-être
excessive, de l'honorable maire démis
sionnaire de n'avoir pas eu le specta
cle à Dieppe d'une installation d'ins
titutrice laïque par la voie du vol avec
effraction.
Quoique attaché aux institutions ré
publicaines, M. Le Vert a défendu con
tre le fanatisme du préfet le droit du
conseil municipal et de la population
avec une fermeté qui lui fait le plus
grand honneur.
Parmi les documents qu'il a commu
niqués aux membres du conseil muni
cipal pour leur faire part de sa con
duite, nous trouvons la lettre suivante,
qui explique de quelle manière M.
Hendlé s'est emparé des clefs de la
nouvelle école pour y installer l'insti
tutrice laïque, Mlle Quesnel :
Dieppe, 2 octobre 4 882.
Monsieur le sous-préfet,
J'ai l'honneur de vous accuser i^éception
de votre lettre de ce jour et de l'arrêté pré
fectoral, en date du 1 er octobre, qui me re
quiert d'installer l'institutrice laïque dans
l'école neuve du quartier Saint-Remy et, en
cas de refus de ma part, délègue M. Lé-
bastard, inspecteur primaire à Dieppe, h
l'effet de procéder à ladite installation.
M. Lebastard, qui m'a apporté ces do
cuments, m'a déclaré en môme temps que,
si je ne lui remettais pas de suite les clefs
de l'école, il allait forcer la porte. J 'ai cé
dé, monsieur le sous-préfet, h la violence
morale suffisamment établie et n'ai pas cru
devoir obliger un estimable fonctionnaire à
recourir à dos moyens extrêmes qu'il ré
prouve certainement au fond du cœur. Mais
la question do droit, monsieur le sous-pré
fet, reste entière; elle n'est, pas résolue par
l'arrêté de M. le préfet. Peut-on changer la
direction d'une école communale sans pren
dre l'avis du conseil municipal? Comme je
ne le pense pas, je vous renouvelle la de
mande que j'ai eu l'honneur de vous adres
ser samedi dernier, pour être autorisé à
convoquer le conseil, afin qu'il délibère sur
cette question, conformément aux articles
de loi que je vous ai cités.
Veuillez agréer, monsieur le sous-prêfet,
l'assurance de ma considération la plus dis
tinguée.
Le maire démissionnaire,
J. Le Vert.
La Vigie de Dieppe dit, à ce propos,
que l'on n'a pas crocheté la serrure,
mais uniquement parce que M. Le
Vert a voulu épargner à l'administra
tion préfectorale une telle indignité. Il
a cédé, dit-elle, à la violence morale
suffisamment établie, mais en laissant
entière la question de droit, qui. n'a
été nullement résolue par l'acte arbi
traire de M. le préfet. C'est au conseil
municipal, quand il pourra enfin se
réunir, que reviendra le soin d'exami
ner cette question et d'en poursuivre
légalement la solution.
Sur cette affaire scandaleuse de
Dieppe, où là loi a été manifestement
violée par le préfet Hendlé, le Temps
lui-même fait des réflexions qui ne
sont pas à l'avantage du citoyen pré
fet dans le conflit qu'il a engagé avec
l'administration municipale (jeDieppe.
Il ne nous appartient pas de nous faire
juge entre M. le maire et M. le préfeLMais
on peut tirer de cet incident une leçon
utile. Ce qui fait, à nos yeux, la gravité po
litique de ce conflit, c'est qu'il a éclaté, non
pas entrç l'administration et ujae rnupicipa-
6444 — Edition quotidienne.
Lundi 9 Octobre 1882
HK9
PARIS
fJn an. . . .
Six mois.. .
Trois moisf.
Un Numéro, à Paris. . . .. ...
— Départements
55 fr. »
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Un an, . , , „ .
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Édition semi-quotidienne
Un an, 30 fr. -<» Sjx mois, 16fr. — Trois mois, 8 fr. 50
BUREAUX
Paris, 10, Rue des Saints-Pères j _
L'UNIVERS ne réptsa pas des manuscrits qui lui sont adressé»
On s'abonne, à Borne, place du Cesi
Ceux de nos souscripteurs ■ dont l'abon
nement expire le 15 octobre sont priés de
le renouveler dès à présent pour éviter
toute interruption dans la réception du
journal.
Le meilleur mode de renouvellement est
l'envoi d'un mandat sur la poste ou d'un
chèque à vue, à l'ordre de l'administrateur-
du journal. Y joindre l'une des dernières
bandes du journal.
Les abonnements datent des 1" et 16 de
chaque mois.
Toute demande de changement d'adresse
doit être accompagnée d'une des dernières
bandes et de 50 centimes en timbres-
poste.
FRANGE
PARIS, 8 OCTOBRE 1882
Plus hardi que M. de Bouteiller, qui
se contentait d'insinuer la candida-
ture de M. de Freycinet à la succes
sion non encore ouverte du cabinet
Duclerc, le National vaticine. Il nous
déroule la série des transformations
par lesquelles passera le gouverne
ment avant d'arriver à M. de Freyci
net. D'abord, on aura M. Jules Ferry
qui viendra renforcer M. Duclerc, trop
insuffisant. Puis., le cabinet Ferry-Du-
clerc renversé, M. Gambetta prendre
le pouvoir; mais ses fautes ne lui per
mettront même pas d'imposer la disso
lution et le scrutin de liste, et l'on re
viendra à M. o de Freycinet, suprême es
poir de la république.
Nous verrons si le National est bon
prophète.
Décidément, M. le ministre Devès
n'est pas fixé sur son fameux projet
centre la magistrature. A la première
note Havas et à la conversation avec
le rédacteur du Voltaire, s'ajoute une
nouvelle note de Y Agence Bavas, qu'on
trouvera plus loin. Il paraît que le projet
n'est pas encore rédigé ; il ne le sera
que dans une huitaine. En même temps
que, se contredisant légèrement, l'A
gence Havas annonce cela, elle plaide
les circonstances atténuantes pour cer
taines idées prêtées à M. Devès, notam
ment pour le conseil de discipline,
qui a paru raide, et pour la mise d'of
fice à la retraite des magistrats à trente
ans de service et soixante ans d'âge.
Nous doutons que les raisons de l'offi
cieuse Agence fassent accepter les idées
de M. Devès, qui fera toujours trop ou
trop peu. Du reste, nous doutons en
core .davantage^ qu'il ait le temps de
mettre à exécution ses idées contre la
magistrature. Il doit en douter lui-
même.
M. Floquet fait annoncer par l'A
gence Havas qu'il a refusé la candida
ture que lui offraient les électeurs de
Brignoles, parce qu'il se considère
comme lié avec les électeurs de Per
pignan. Espère-t-il, par^ cet acte de
grandeur d'âme, conquérir les radi
caux roussillonnais ? Il pourrait bien
se tromper, car on continue à lui op
poser un candidat intransigeant, qui
est le docteur Magnan.
Du reste, dans l'arrondissement de
Brig'noles, il se heurtait également à
une candidature radicale, celle du ci
toyen Poulet, conseiller municipal de
Paris. Cela a pu contribuer iï son
refus.
Il paraît qu'on va suspendre la pu
blication des listes des indemnisés du
2 décembre. De tous les côtés on se
plaint de la manière dont les indem
nités sont réparties, et un nouvel exa
men est nécessaire. Cela ne nous sur
prend pas.
Une explication
• S. Ex. Mgr Czacki a reçu de M. Grévy
la. barrette et rentre à Rome cardinal.
C'est le couronnement régulier de la
haute fonction qu'il a remplie près du
gouvernement français. Il va rejoindre
au Sacré -collège ses èminents prédéces
seurs,les cardinaux Sacconi, Chigi, Me
glia, qui ont laissé ici tant et de si bons
souvenirs. Du reste, que le souverain
Pontife lui fit prendre cette voie ou une
autre, le nouveau cardinal était, par
sa situation, son amour de l'Eglise,
son mérite, du nombre des prélats que
cette dignité attend. Avant qu'il fût
«désigné pour le poste qu'il a occupé
près de trois ans, l'on était convaincu
a Rome que cet ecclésiastique polo
nais , jeune encore bien qu'entré
tard dans les ordres, porterait un jour
la pourpre.
Ce n est pas seulement pour faire
nos compliments et nos adieux au car
dinal Czacki que nous parlons de son
élévation au cardinalat. Nous voulons,
au moment de son départ et lorsqu'on
ne peut plus interpréter à faux nos
paroles, dire quelle a été notre situa
tion vis-à-vis de lui. Ce sera notre ré
ponse aux nombreux articles où, sous
prétexte de le louer, on nous outrage.
Lorsque S. Em. le cardinal Meglia et
les deux prêtres distingués qu'il avait
pour auxiliaires, MM. Tagliani et Tosti
(yuerra, quittèrent Paris, nous ne les
vîmes pas partir sans_ regret. Mgr Me
glia nous avait honorés de sa bienveil
lance et de sa confiance. Nous avions
pu apprécier la sûreté de sa paro']? f
nous savions que, sous une apparence
froide et réservée, trop réservée peut-
être, se trouvait un esprit ferme et
droit, absolument dévoué à l'Eglise et
tenant par-dessus tout aux principes.
On a dit que chez lui le prêtre domi
nait le diplomate. Est-ce un défaut?
Ce qui doit toujours dominer chez le
prêtre, c'est le prêtre. Une nonciature
a ans les temps actuels, particulière
ment en France, est, d'ailleurs, beau
coup plus un poste ecclésiastique qu'un
poste diplomatiqùe.
Les sentiments que voulait bien nous
montrer Mgr Meglia n'avaient rien de
nouveau pour nous; ses prédécesseurs,
les cardinaux Sacconi_ et Chigi, avant
eux le cardinal Fornari et Mgr Garibal-
di, nous y avaient habitués. Jusqu'ici,
dans les crises diverses que l'Univers a
traversées, il avait toujours trouvé à la
nonciature des conseils et un appui.
Et de même que l'on y comptait a bon
droit sur lui, on y admettait, on y res
pectait son indépendance ; cette indé
pendance* qui exclut la platitude et
n'empêche pas la soumission.
Si nous regrettions le nonce qui par
tait, nous attendions avec confiance
son successeur. Outre que Y Univers a
pour principe de trouver bon tout ce
que fait le Pape, nous avions ici des
raisons particulières de contentement:
le rédacteur en chef du journal avait
rencontré à Rome Mgr Czacki et en
gardait un bon souvenir. Notre corres
pondant romain le connaissait depuis
longtemps et avait'eu avec lui d'excel
lents rapports. Il se croyait son ami.
De plus, nous nous souvenions de la
part prépondérante qu'il avait prise
à la Correspondance de Genève , cette
publication où vivait l'esprit des ha
rangues de Pie IX, et qui, sans s'in
quiéter des gouvernements ni des pe
tites combinaisons modérées et libé
rales, affirmait carrément les principes
de la politique chrétienne.
Nous devions donc compter à la
fois, et nous y comptions, sur les
bonnes dispositions personnelles de
Mgr Czacki et sur la bienveillance par
ticulière que promettait lacommunauté
des doctrines. Nous pensions aussi que
les vieux services de l'Univers ne se
raient pas oubliés.On eût pu nous dire,
sans beaucoup nous surprendre, que la
ligne de telle ou telle feuille catholique
plairait plus que la nôtre; mais si l'on
nous avait prédit que le Figaro serait
tenu à la nonciature pour ami et;
l'Univers pour ennemi, nous ne l'au
rions certes pas cru. Même aujour
d'hui, en dépit du fait accompli et des
allusions outrageantes dont le Monde,
le Figaro, la Défense, le Times, le Fran
çais nous poursuivent, nous avons
peine à y croire. C'est si singulier !
Les sentiments et les dispositions
que nous rappelons ne restèrent pas à
l'état platonique. Nous parlâmes tout
de suite du successeur de Mgr Meglia
de manière à lui gagner le concours
sympathique de nos amis. Notre col
lection l'atteste. Cependant si l'Univers
ne ménagea pas les éloges, s'il annonça
que l'on devait compter sur une active
et brillante nonciature, d'autres le dé
passèrent dans cette voie. La Patrie
disait, l'autre jour, que Ton faisait trop
de bruit à propos du départ du Nonce;
on en fit trop aussi à propos de son ar
rivée. Quantité d'articles et de correspon
dances parurent çà et là pour montrer
dans ce changement un événement.
C'était forcer la note et rendre, par
excès de zèle, un mauvais service au
prélat aimable et distingué qui arrivait.
Telle fut dès lors notre impression.
Aussi refusâmes-nous d'insérer une
étude biographique intitulée : Monsei
gneur Wladimir Czacki , dont, par l'en
tremise de Mgr de Ségur, qui ne l'avait
pas lue, l'auteur anonyme, un reli
gieux nous dit-on, voulut bien nous of
frir la primeur. Cet écrit, qui fut pu
blié en brochure, ne se bornait pas à
louer le nouveau Nonce ; il semblait
vouloir établir que jusqu'ici la noncia
ture de Paris n'avait pas vu un hom
me, et qu'enfin elle allait en voir un.
Le Figaro vient de donner la même
note. Elle n'était pas juste il y a trois
ans, elle ne l'est pas devenue. Mgr
Czacki a travaillé de son mieux ; mais
lui immoler ses prédécesseurs est à la
fois une inconvenance, une injustice
et une sottise.
Dans* un réfeent article qu'il eût dû
écarter, et au sujet duquel le directeur
du Monde a regretté de ne pouvoir se
battre en duel, le Gaulois s est fait de
cette brochure un grief contre l'émi-
nent prince de l'Eglise. Voilà de la
prévention! Un homme public, occu
pant une grande situation, évite diffl-
lement les flatteurs, les parasites, les
maladroits amis, et ne peut empêcher
cette engeance de lui jeter des pavés
croyant lui jeter des fleurs. Il faut
plaindre Mgr Czacki d'avoir subi, ,de
subir encore cet inconvénient des gran
deurs, et non le lui reprocher. Esprit
fin et délié, il sentit certainement
mieux que personne qu'on se. pressait
trop d'escompter son avenir et de pro
mettre des merveilles. Nous en avons
eu personnellement la preuve.
„ Depuis quelque temps déjà, il étai
à Paris et y avait pris langue, lorsque
nous eûmes l'honneur de lui faire
une première visite. A peine lui avions-
nous exprimé le regret de n'avoir pu
nous présenter plus tôt, qu'il voulut
bien nous remercier du langage de
l'Univers sur lui. Il ajouta qu'on l'avait
gêné en lui prêtant une force qu'il ne
prétendait pas avoir, jnais que s'il
n'était pas 1 iiôlïipie Jiorg ligné qu'pn
pvait eu Iç tort d'annonC*"; il es P, é ;
| rait montrer ce que peuvent la
bonne volonté, l'amour de l'Eglise et
la résolution de faire son devoir. Nous
refusâmes de prendre à la lettre ces
paroles trop modestes, puis nous lui
rappelâmes que l'Univers était à son
service. Il répondit qu'il y comptait et
apprécia nos travaux en termes qui
nQusJj&rureutjun écho .des,.encoura
gements et des bénédictions que nous
avions reçus du Saint-Père.
L'entretien ne se borna pas à un
échange de compliments. Mgr Czacki
voulut bien nous demander des ren
seignements pour un travail dont il
s'occupait,, et nous interroger sur
quelques-uns des hommes du jour et
quelques-unes des questions du temps.
Quant aux questions, il nous sembla
qu'il pensait comme nous ; quant aux
hommes, il évita de s'engager; pré
caution naturelle.-dans sa situation.
Au total, nous sortîmes très satisfait.
Comment cette situation s'est-elle
modifiée ? Gomment sommes-nous de
venus suspects et avons-nous été dé
clarés hostiles? Nous en sommes en
core aux conjectures. Le "désir d'être
l'homme de tous fit-il croire au
Nonce qu'il nedevait ni être ni paraître
trop bien disposé pour l'Univers ? Pen-
sait-il que l'énergie de notre opposi
tion, s'il paraissait nous approuver, le
gênerait dans ses relations forcées
avec nos gouvernants ? Trouva-t-il nos
idées trop absolues ? Quelques rap
ports de nos adversaires le firent-ils
douter de nos sentiments? Nous l'i
gnorons. La chose certaine, c'est qu'il
fut vite hors de doute pour nous que
npus n'étions pas en faveur. Nous res
tâmes à l'écart, tout prêts à donner
une explication si elle était demandée,
très décidés à ne rien réclamer.
Cotte réserve n'arrangea pas nos
affaires. .Nous apprîmes bientôt, par
des feuilles boulevardières, que l'on
ourdissait de noirs complots contre le
Nonce, et que l'Univers en était. Nous
y avions même un rôle important.
Faut-il l'avouer ? ce commérage, loin
de nous irriter ou de nous inquiéter,
nous fit hausser les épaules et sourire.
L 'Univers conspirant contre le Nonce,
voulant en faire un agent politique
des royalistes, cherchant à peser sur
les décisions du Pape, ayant un candi
dat à la nonciature ; quelles sottises !
Après tant d'années de luttes, tant de
témoignages de notre respect, tant
de gages de notre droiture, après
avoir été loués de si haut pour nos
doctrines, fallait-il nous défendre con
tre de tels propos ?
Quels faits, quels indices avaient ré
vélé la conspiration? Le Figaro, le
Monde , le correspondant parisien du
Times, M. Oppert, de Blowitz... en
Bohême, viennent de les rappeler avec
un instructif accord.
Les « louches détracteurs » du Non
ce, voulant le perdre dans l'opinion
catholique et près du Pape, assu
rent ces bonnes âmes, lui repro
chaient des rapports trop suivis et
trop expansifs avec les hommes du
gouvernement, une grande com
plaisance pour la république et
les républicains, des propos dédai
gneux et hostiles contre les royalistes,
une attitude faible quant à la défense
religieuse, etc.
Il y en a plus long, mais, au fond,
c'est tout. La dessus, Monde, Figaro et
Times déclarent à l'envi, d'un ton doc
toral et impétueux, qu'un ambassa
deur doit entretenir des relations cour
toises avec le gouvernement près du
quel il est accrédité, que le Nonce au
rait manqué à sa mission s'il s'était li
vré aux légitimistes, qu'il y a des ca
tholiques dans tous les partis, que le
représentant du Pape doit, comme le
Pape lui-même, voir partout des âmes
à sauver; qu'il est tenu à la pruden
ce, etc.
Voilà de grands enfonceurs de portes
ouvertes ! Mais qui donc a jamais pré
tendu qu'un Nonce doit faire de la po
litique, être homme de parti, agir sans
réflexion et ne pas voir les chefs du
gouvernement près duquel il est accré
dité? Tout le monde, au contraire, re
connaît ces obligations. 11 ne faudrait
pas, pour noircir ses adversaires et en
avoir raison, leur prêter des niaiseries
auxquelles ils n'ont pu sônger. Le dé
bat ne peut porter que sur la question
de mesure. Cette question, diverses
feuilles l'ont traitée plus ou moins
librement ou justement. L' Univers n'y
a pas touché. Quand on dit le con
traire, on ment. Il a suivi en
simple témoin ce débat mesquin et
fâcheux. Les journaux de reportage et
de papotage qui rendaient compte des
dîners et des réceptions du Nonce, qui
le félicitaient d'avoir modifié les allures
trop graves de la nonciature, qui le
suivaient dans les salons officiels et
même à la table du correspondant du
Times, ces journaux ne nous semblaient
guère moins inconvenants que ceux
où l'on relevait ces menus propos
pour s'en faire une arme. Nous lais
sâmes passer le blâme comme l'éloge,
ne nous reconnaissant pas le droit et
n'ayant pas le désir de chercher la
mesure de la réserve ou de l'abandon
que le Nonce devait apporter dans ses
relations obligatoires avec les Grévy,
les Gambetta, les Constans et autres
persécuteurs.
Notre silence a déplu aux zélés du
Figaro et au s méticuleux du Monde.
Soit ! qu'on nous le reproche si l'on y
trouve plaisir et profit, mais qu'on ne
nous accuse pas d'avoir parlé.
JJn fait, un seul, est mis spéciale
ment à notre charge. Il s'agit del$fa-
~"»use dépêche annonçant comme
probable l'envoi de Mgr Czacki à
Saint-Pétersbourg, où une nonciature
serait créée. Le gentilhomme—pardon,
le titré — qui relève malhonnêtement
cette vieillerie dans le Figaro affirme
que nous parlions à ce sujet de dis-
gruie Cest' faux. Ni l'idée, ni le-mot
ne se trouvent dans la dépêche. Nous
rapportions un bruit qui courait à Ro
me. que d autres journaux ont donné
comme nous, et qui n'avait rien de
blessant pour Mgr Czacki. Le croire
plus apte qu'aucun autre à terminer
heureusement les négociations enga
gées entre Rome et la Russie, était-ce
lui faire injure? On s'étonne et l'on
s'afflige d'avoir à s'expliquer sur de
telles misères.
Nos agresseurs sont-ils plus fondés
à prétendre que nous avons méconnu
tout à la fois les difficultés, les ennuis,
les amertumes de la mission de Mgr
Czacki, et les éclatants services qu'il a,
rendus?
D'abord, nous n'avons rien mécon
nu, puisque nous n'avons rien atta
qué, rien discuté ; cependant si c'est
un tort de ne pas juger absolument
la nonciature de Mgr Czacki comme le
font le Figaro, le Times et le Monde, de
ne pas y voir tout ce qu'ils y montrent,
ce tort nous l'avons. Mais est-on vrai
ment tenu d'admettre l'avis de ce
trio?
Ils nous disent que Mgr Czacki n'a
trouvé nul plaisir à mettre sa main
dans celles.de MM. Constans, Ferry,
Gambetta et autres Gougeard, à se '
montrer dans leurs salons, à dîner
avec eux. Nous le croyons sans peine.
A coup sûr il n'allait de bon cœur ni
chez le préfet de police Andrieux, ni
chez d'autres non moins répugnants.
Il agissait en diplomate et se sacri
fiait. Personne, du côté catholique, ni
du côté gouvernemental, malheureu
sement, ne s'y est mépris ; c'est pour
quoi cette diplomatie et ces sacrifices
ne pouvaient être féconds.
De même qu'il serait fort injuste de
reprocher au cardinal Czacki les mal
heurs dont l'Eglise a été frappée en
France pendant sa courte nonciature,
il est maladroit de prétendre que cette
nonciature a été particulièrement bril
lante. Mgr Czacki' a certainement
lutté contre les malfaiteurs officiels
de toutes les forces de sa vive intelli
gence, de toutes les ressources de son
habileté ; mais que pouvaient sa grâce,
son savoir, sa diplomatie, contre des
butors ennemis de Dieu et sûrs d'être
les plus forts? La diplomatie ne prend
pas partout. Elle peut donner de grands
résultats quand on à devant soi un gou
vernement qui, tout en nourrissant de
mauvaises idées et même de mauvais
desseins, veut s'entendre avec l'Eglise,
apprécie sa force et lui reconnaît des
droits. Il en était ainsi en France sous
Louis-Philippe, sous Napoléon III et
même sous les présidences de MM.
Thiers et de Mac-Mahon. LL. EEm. les
cardinaux Fornari, Sacconi, Chigi,
Meglia ont, pendant leurs nonciatu
res, fait avec succès de la diplomatie.
Il y a eu de leur temps, en effet, non
pas des luttes sauvages comme aujour
d'hui, mais nombre de questions gra
ves et délicates à traiter. Que de diffi
cultés a rencontrées Mgr Chigi pen
dant cette longue et belle nonciature,
où il fut si bien secondé par Mgr Ca-
pri. S'il y avait des obstacles, il y
avait aussi des hommes avec lesquels
on pouvait s'entendre. Nous n'en som
mes plus là, et Mgr Czacki, sans être
moins habile que ses devanciers, ne
pouvait réussir comme eux. Aussi
laisse-t-il à son successeur une situa
tion plus mauvaise que celle dont il
avait hérité.
Les flatteurs, fort peu désintéressés,
qui veulent absolument nous transfor
mer en adversaires de Mgr Czacki,
nous disent : Nierez-vous qu'il ait em
pêché un mal « incalculable », maintenu
le Concordat, obtenu de bonnes no
minations épiscopales? D'abord, nous
ne nions rien du tout, et aucun acte,
aucune démarche du Nonce n'a ja
mais été dans l'Univers l'objet d'une
discussion quelconque ; ensuite le pro
pre de ce qui est incalculable étant
de ne pouvoir être calculé, ce mot,
qui semble dire beaucoup, au fond ne
ait rien. Quant au Concordat et aux
nominations épiscopales, c'est diffé
rent. Nul doute que Mgr Czacki n'ait
mis le zèle le plus grand à préserver
de toute atteinte ces deux colonnes de
notre édifice religieux. Mais si l'on
veut être juste et parler raison, il ne
faut pas exagérer en ces points les
difficultés.
Le Concordat, très attaqué dans la
Chambre par une minorité radicale,
ne l'a pas encore été dans les conseils
du gouvernement. M. Grévy compte
le fausser à l'aide des articles organi
ques, mais il refuse de le briser. Tous
ses ministres ont toujours été de cet
avis. M. Gambetta et M. Jules Ferry
eux-mêmes se proclament « concor
dataires » réfléchis et déterminés.
Donc, le d§nger qui, bientôt peut-être,
sëra menaçant, n'a pas encore sérieu
sement existé. Quant aux nominations
épiscopales, elles ont certainement été
la grande affaire du Nonce et son prin
cipal souci. Des candidats impossibles
ont dû lui être proposés, les uns sé
rieusement, les autres pour la forme,
afin d'acquitter une promesse ou de
sonder le terrain. Il a réussi à les écar
ter. On nous dit qu'il ne l'a pas fait
( sans peine ; nous en sommes convain
cus et il ne pouvait remporter aucun
supcès gqi lui méritât plus de recon
naissante,
Le" Figaro et le Monde parlent en
termes échauffés des embarras parti
culiers et inattendus que nos divisions
politiques auraient suscités à Mgr
Czacki. Ces embarras étaient faciles à
prévoir, et jusqu'ici avaient paru fa
ciles à vaincre. Il y a longtemps que
les catholiques militants sont dans
l'opposition, et les royalistes y sont
depuis 1830. Cependant tous les non
ces qui se sont succédé en France de
puis Mgr Fornari jusqu'à Mgr Meglia
inclusivement, ont su entretenir à la
fois de bons rapports avec Je gouver
nement et avec ses ennemis, quand
ceux-ci étaient catholiques. Pourquoi
n'en a-t-il pas été de même cette fois ?
Les monarchistes auraient-ils deman
dé au Nonce de prendre une couleur
politique? On le prétend, mais on se
rait fort en peine de le prouver. Per
sonne n'a oublié que le Nonce n'a pas
à intervenir dans nos luttes intérieu
res et ne doit arborer aucune cocarde.
Et si, par impossible, quelque jour
nal avait fait cet oubli, ce ne serait
pas l'Univers. Cette dernière accusation
est donc aussi frivole que les précé
dentes.
Violemment et sottement attaqué au
sujet de Mgr Czacki, nous avons dû
entrer dans ces détails. Nous ne_ l'a
vons pas fait sans regret. S'il daigne
nous lire, l'éminent cardinal recon
naîtra qu'il n'a jamais eu besoin d'ê
tre défendu contre nous. Les intri
gants, les libéraux, les pauvrets, les
enviejix qui, sous prétexte de zèle, se
sont dans la presse constitués ses avo
cats, ont pu vouloir lui plaire ; ils ont
certainement voulu nous nuire. Nous
leur avons laissé le champ libre, car
un tel combat nous répugnait, et nous
ne pouvions croire qu'on les écoute
rait longtemps. Il fallait parler enfin,
nous nous y sommes résignés et nous
comptons que ce ne sera pas sans
profit.
Dans cette grande Home chrétienne
où il va travailler, prier, méditer, le
cardinal Czacki jugera les hommes et
les choses de France mieux qu'il n'a
pu le faire quand tant de préoccupa
tions l'accablaient. Il reconnaîtra alors
que nous n'avons jamais oublié ce que
nous devions à sa personne et à sa
dignité. Nous ne pouvions être ses ad
versaires, encore moins ses ^ennemis ;
nous n'avons pas eu la prétention d'ê
tre ses juges. Nous savions qu'il ai
mait le Pape, qu'il cherchait a faire
son devoir, qu'il voulait servir l'E
glise. Comment aurions-nous songé à
l'attaquer, même si les convenances
ne nous l'avaient défendu. Ceux qui lui
ont dit et peut être persuadé que nous
lui étions systématiquement hostiles
nous ont calomniés et l'ont trompé.
Eugène Vei'iu.ot.
La loi du 28 mars
A la suite d'un rapport sur la loi
criminelle du 28 mars, le congrès des
jurisconsultes catholiques réunis à
Reims, vient d'adopter à l'unanimité
la résolution suivante :
Considérant que la puissance législative
a des limites, que les assemblées qui en
sont investies n'ont pas le pouvoir de tout
ordonner ; que, notamment, elles ne peu
vent ni ordonner de faire le mal, ni violer
par leurs prescriptiens le droit naturel ;
que toute sanction pénale attachée ù. une
loi injusie est un abus de la force et un
acte de violence ;
Considérant que l'autorité paternelle, fon
dement de la famille, est de droit naturel
et divin;
Considérant que l'attribut essentiel de
cette autorité est, pour le père de famille,
la charge d'élever ses enfants; que le de
voir qui lui incombe de pourvoir à la sub
sistance matérielle et au dévellopement in
tellectuel et imoral de son entant implique
nécessairement le droit corrélatif de juger,
en pleine liberté de conscience et de rai
son, par quels moyens et dans quelles con
ditions il peut le faire ;
Considérant que la loi du 28 mars fait
au père de famille des injonctions qui pa
ralysent son droit de juger et violentent sa
liberté ; qu'en portant cette grave atteinte
à l'autorité paternelle, elle tend à désorga
niser la famille et, par suite, à ruiner le
fondement de l'ordre soeial.
Par ces motifs,
Le congrès est d'avis :
1° Que l'acte législatif intitulé « loi 'du
28 mars 1882 sur l'enseignement primaire
obligatoire » constitue un excès de pou
voir ;
2° Que les citoyens ont, en conséquence,
le droit de se refuser îi l'exécuter.
Nous recevons la dépêche suivante :
Rome, 8 octobre, 9 h. 3îi matin.
Aujourd'hui a lieu un grand dîner h
l'ambassade d'Espagne, en l'honneur de
Mgr Rampolla, nommé nonce à Madrid,
en remplacement de S. Em. le cardinal
Bianchi.
Les pèlerins français sont attendus.
Les congrégations romaines viennent
d entrer en vacances.
et a été présenté avec tant de force
par leur avocat, M 0 Hémar, qu'on doit
s'attendre à ce que le président du
tribunal de la Seine se déclare une
fois de plus cpihpétent dans une ques
tion qui relève absolument des tribu
naux civils.Mais il est à craindre que
l'affaire ne suive après ce.la le cours
ordinaire de ces sortes d'affaires et
qu'un arrêté du tribunal des conflits
ne vienne dessaisir de nouveau la jus
tice civile. t
Le scandale serait cette fois a plus
grand encore que dans les précéden
tes affaires ; car ici le droit des sœurs
échappe à toiîte ingérence politique
pour raison d'Etat, et les procédés
violents du préfet Floquet n'ont même
pas le prétexte des décrets de mars,
ni le caractère d'une mesure de haute
police. C'est de l'arbitraire,, pur et du
plus odieux.
Nous donnons une partie de la re
marquable plaidoirie de M" Hémar,
car l'affaire intéresse tout le monde.
Si le tribunal des conflits donne rai
son au préfet Floquet, on peut dire
qu'il n'y a plus de justice civile en
France. Avec des circonstances diffé
rentes, tout particulier peut se trouver
dans le cas des sœurs, et voir ses ti
tres méconnus, ses droits violés de la
même manière. Tous les justiciables
sont intéressés à l'issue du procès en
gagé contre le préfet de la Seine.
La série' des crochetages et des ex
pulsions a recommencé avec le mi
nistère Duclerc. L'incident des sœurs
de l'école de la rue de la Lune est un
des plus odieux de la persécution. Il se
juge en ce moment en référé. Le droit
des sœurs de Charité est si bien établi
-Rouen possède un préfet qui semble
avoir pris à tâche de surpasser M, Flo
quet lui-même. Ce préfet a une fureur
de laïcisation sans pareille. La loi, les
convenances ne sont rien pour lui. A
Dieppe, on l'a vu, il s'est permis de
changer la direction de l'école com
munale de filles sans même prendre
l'avis du conseil municipal, quoique
la loi de -1850, non abrogée, soit for
melle à cet égard. Mais on ne savait
pas encore que ce « laïeisateur » sec
taire avait été sur le point. de faire
enfoncer les portes de l'école pour y
installer la nouvelle institutrice laï
que.
Ce procédé commode entre de plus
en plus dans les mœurs administra
tives de la République. On enfonce au
jourd'hui les portes comme autrefois
on envoyait du papier. timbré. C'est
plus court et plus sûr.
On doit à la modération, peut-être
excessive, de l'honorable maire démis
sionnaire de n'avoir pas eu le specta
cle à Dieppe d'une installation d'ins
titutrice laïque par la voie du vol avec
effraction.
Quoique attaché aux institutions ré
publicaines, M. Le Vert a défendu con
tre le fanatisme du préfet le droit du
conseil municipal et de la population
avec une fermeté qui lui fait le plus
grand honneur.
Parmi les documents qu'il a commu
niqués aux membres du conseil muni
cipal pour leur faire part de sa con
duite, nous trouvons la lettre suivante,
qui explique de quelle manière M.
Hendlé s'est emparé des clefs de la
nouvelle école pour y installer l'insti
tutrice laïque, Mlle Quesnel :
Dieppe, 2 octobre 4 882.
Monsieur le sous-préfet,
J'ai l'honneur de vous accuser i^éception
de votre lettre de ce jour et de l'arrêté pré
fectoral, en date du 1 er octobre, qui me re
quiert d'installer l'institutrice laïque dans
l'école neuve du quartier Saint-Remy et, en
cas de refus de ma part, délègue M. Lé-
bastard, inspecteur primaire à Dieppe, h
l'effet de procéder à ladite installation.
M. Lebastard, qui m'a apporté ces do
cuments, m'a déclaré en môme temps que,
si je ne lui remettais pas de suite les clefs
de l'école, il allait forcer la porte. J 'ai cé
dé, monsieur le sous-préfet, h la violence
morale suffisamment établie et n'ai pas cru
devoir obliger un estimable fonctionnaire à
recourir à dos moyens extrêmes qu'il ré
prouve certainement au fond du cœur. Mais
la question do droit, monsieur le sous-pré
fet, reste entière; elle n'est, pas résolue par
l'arrêté de M. le préfet. Peut-on changer la
direction d'une école communale sans pren
dre l'avis du conseil municipal? Comme je
ne le pense pas, je vous renouvelle la de
mande que j'ai eu l'honneur de vous adres
ser samedi dernier, pour être autorisé à
convoquer le conseil, afin qu'il délibère sur
cette question, conformément aux articles
de loi que je vous ai cités.
Veuillez agréer, monsieur le sous-prêfet,
l'assurance de ma considération la plus dis
tinguée.
Le maire démissionnaire,
J. Le Vert.
La Vigie de Dieppe dit, à ce propos,
que l'on n'a pas crocheté la serrure,
mais uniquement parce que M. Le
Vert a voulu épargner à l'administra
tion préfectorale une telle indignité. Il
a cédé, dit-elle, à la violence morale
suffisamment établie, mais en laissant
entière la question de droit, qui. n'a
été nullement résolue par l'acte arbi
traire de M. le préfet. C'est au conseil
municipal, quand il pourra enfin se
réunir, que reviendra le soin d'exami
ner cette question et d'en poursuivre
légalement la solution.
Sur cette affaire scandaleuse de
Dieppe, où là loi a été manifestement
violée par le préfet Hendlé, le Temps
lui-même fait des réflexions qui ne
sont pas à l'avantage du citoyen pré
fet dans le conflit qu'il a engagé avec
l'administration municipale (jeDieppe.
Il ne nous appartient pas de nous faire
juge entre M. le maire et M. le préfeLMais
on peut tirer de cet incident une leçon
utile. Ce qui fait, à nos yeux, la gravité po
litique de ce conflit, c'est qu'il a éclaté, non
pas entrç l'administration et ujae rnupicipa-
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