Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1879-07-09
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 70622 Nombre total de vues : 70622
Description : 09 juillet 1879 09 juillet 1879
Description : 1879/07/09 (Numéro 4278). 1879/07/09 (Numéro 4278).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7030868
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Mercredi 9 Juillet 187 S
N° 4278 — Édition quotidienne.
Mercredi 9 Juillet "Î879
..'PARIS
; ;... : 55 ïr. »
. feix % mois. « » i « « ^ » »% » f «i # t • « 28 * 50
Trois mois . . t-y.
TJn
Un Numéro,' à Paris. ■."-t-.f
—: Départements.
BUREAUX
Paris,- 10, Rue-' des Saints-Pères
: On s'abonne, à Rome, -place . ilu Gcsu, 8 \
. ' - ' • V ht,
TJn an. . .
Six mtis.. .
Trois mois.
DÉPARTEMENTS'
• • • t
• • « • •
55 fr. »'
28' 50
15 »
Édition semi -quotidienne
Un an. 30 fr. — Six mois, 16 fr. — Trois mois, 8 fr. 50
. L 'UNIVERS-ne répeid pas ies «aiwscrLts qui lui sont adressés
• —r-H '■ -• . " • ' ■
ANNONCES
' MM. ffi. MGEAN6E, CERF et G ie , 6, place de la Bourse
Ceux de nos souscripteurs dont l'abon-
ûement expire le 15, juillet.: sont priés de
le renouveler dès à présent pour éviter
toute interruption dans, la -réception du
Journal. / T
Le meilleur mode de renouvellement lest
l 'envoi d'un mandat .sur la poste ou d'un
chèque à vue, à l'ordre de l'administrateur
du journal. Y joindre l'une des dernières
.bandes d'i journal. ■ " :
Les abonnements datent des 1 er et,16 de
chaque mois.
Toute demande de changement d'adresse
doit être accompagnée d'une des dernières
bandes et de 50 centimes en timbres-
poste. . ' •
FRANGE
PARAS, 8 JUILLET 1879
En dépit des haines qu'elles exploi
tent, les feuilles radicales comprennent
fort bien que l'opinion n'abandonne
pas les congrégations religieuses , dan s
la lutte engagée contre la liberté de
l'enseignement religieux. Aussi le projet
Ferry apparaît-il déjàçommé inefficace
aux yeux mêmes de ceux qui le défen
daient hier encore coïame sèul prati
cable à l'heure actuelle. Nous avons
cité à ce propos -îa'iît 'publique française,
Aujourd'hui l'organe gambettiste'juge
nécessaire d'insister en trois articles
sur les mesures qui lui semblent in
dispensables pour fortifier le projet
Ferry.
Lé premier s'attaque à l'idée même
des congrégations, qu'elles soient au
torisées ou non. En effet, la République
française soutient qu'au point de vue
i évolutionnaire, qui doit guider les
législateurs modernes en matière de
droit d'association, il ne saurait y avoir
place dans la société pour aucune as
sociation religieuse, les membres de
«ses associations se mettant par les
trois vœux de pauvreté, d'obéissance
et de chasteté, en dehors des condi
tions « qui font les citoyens de TE at
moderne ». D'après cela, il faut enten
dre que l 'Etat moderne impose aux ci
toyens dignes de ce nom la triste obli
gation de ne pas être chastes, de ne
pas se plier à l'obéissance et d'avoir
cent mille francs de rente. C'est un
idéal comme un autre, mais nous ne
voyons pas en quoi il l'emporte sur
celui que se proposent les religieux. :
En tout cas, l'on ne prouve pas que
ceux-ci n'aient pas droit de se réunir
pour suivre le leur. Parce qu'ils, font
Vœu d'être pauvres, les religieux refu-
en-t-ils de payer régulièrement les
Impôts auxquels ils sont soumis, com
me les autres citoyens ? Parce qu'ils
font vœu d'obéir à leur supérieur, dans
tout ce qui a trait à la direction spi
rituelle, attendu qu'ils savent d'a
vance que cette autorité s'exercera tou
jours dans les limites des commande
ments prescrits par Dieu lui-même,
s'interdisent-ils d'obéir aux lois justes
de l'Etat, et, par suite,, sont-ils en cela
différents des autres citoyens, sur les
quels, du moment qu'ils respectent les
lois ayant vraiment ce caractère, l'E
tat ne saurait établir d'inquisition?
- Enfin, parce qu'ils font vœu de
chasteté, ce qui est un acte .libre de
leur libre volonté, les religieux s'en
gagent-ils à éloigner de la vie de fa
mille ceux dont ils dirigent l'ensei
gnement? Ne sait-on pas, au contrai
re, que la famille n'a jamais eu de
plus* ardents défenseurs, et naguères
encore ne leur reprochait-on pas,
par une injustice toute contraire
a celle d'aujourd'hui, de tenir la so
ciété tout entière par . les mariages
dont ils sont, disait-on, les ordinaires
instruments?
Donc la mauvaise foi, ici, éclate une
fois de plus. Ce qu'on veut, en réalité,
ce n'est pas soustraire à une autorité
morale, dont ils ne se plaignent pas,
un certain nombre de citoyens;mais,
parce qu'ils sont religieux, on veut que
ces citoyens deviennent les esclaves du
dieu-Etat, auquel on prétend de même
soumettre tous ceux qui vivent à l'abri
des lois. Car, enfin, lorsqu'on nous dit
que « l'ordre religieux est une armée
soumise à un chef, sous l'empire d'une
discipline militaire, » quelle différence
établit-on entre cette situation et celle
qu'offre, par exemple, l'armée des fonc
tionnaires soumis, eux. aussi, à une
discipline que nos gouvernants actuels
tendent à rendre bien autrement hu
miliante pour la liberté.
Nous nous trompons, il y a une dif
férence ; car c'est librement que les
religieux obéissent à une autorité qui
ne les retient soumis qu'autant qu'ils
le veulent : en peut-on dire autant de
la multitude des fonctionnaires cour
bés sous les volontés et trop souvent
sous les caprices d'un ministre ou
d'un chef de bureau? A cet égard,
qu'on pèse par exemple les termes de
la circulaire envoyée tout récemment
à ses agents par M. Léon Say, et qu'on
nous dise si c'est par de tels discours
que nos ministres développent, au gré
de la République française, l'indépen
dance dont elle paraît si soucieuse
d'assurer le bénéfice au « citoyen mo
derne. »
Vraiment, tout cela fait pitié, car
tout cela n'est qu'hypocrisie pure. En
quoi, nous le demandons à tout esprit
impartial, l'existence des congréga
tions religieuses a-telle gêné qui que
ce soit pour Pexercice du droit que
veut protéger la République française,
c'est-à-dire « pour le développement
de son initiative et de 1 sa personna
lité? » Au point do vue spécial de l'en
seignement, que veut-on dire lorsqu'on
ajoute que « mettre .en concurrence
ces congrégations et les simples parti
culiers, c'est ouvrir une lutte à des
conditions tout à fait inégales? » Est-
ce que cet argument ne peut pas aussi
bien se retourner contre toute entre-
Erise industrielle -ou commerciale ?
ans cet ordre d'idées, nous dira-t-on
cpielestle particulier qui pourrait lutter
à armes égales contre lés compagnies
dont les iiiembres ont associé leurs
capitaux, ou songe-t-on, à cause de
cela, à proscrire-l'idée même d'entre-
prendt-e quoi que ce soit par voie .d'as
sociation?
Ce-qu'on veut, il faudrait au ra,oins
avoir le triste courage de le dire bien
haut : c'est supprimer toute idée reli
gieux dans la société: Et comme les
congrégations sont, des missionrtaii^s
très ardents ët très féconds de l'idée
religièlisè, c'est à eux que l'on s'en
prend toutd'abord, pour arriver ensuite
au clergé lui-même,
Comment eh douter îoFsqiie, da\is
les dfeUx autres articles publiés par la
République française, on voit ce journal
préoccupé, d'une part, de réclamer la
dissolution du conseil d'Etat et sa ré
organisation sur de nouvelles bases,
pour supprimer dorénavant toute es
pèce de libéralités testamentaires en
faveur des établissements ecclésiasti
ques; d'autre part, de prouver que,
sous le régime des lois actuelles, les
membres des congrégations non auto
risées n'ont droit qu'à l'expulsion?
A cette prétention illégale des mo
dernes persécuteurs,- nous n'oppose
rons pas une fois de plus les réponses
juridiques qui ont été déjà faites et se
ront bientôt de nouveau portées à la
tribune. Nous nous contenterons d'ob
server qu'hier même la Répvbliquefran
çaise, plaidant cojitre M. Madier-Mont-
jau, confessait le contraire de ce qu'elle
avance aujourd'hui. Au surplus, un
argument suffit. Nous délions ceux
qui parlent de la sorte de faire décréter
l'expulsion d'un seul religieux par la
seule raison qu'il appartiendrait à une
congrégation non autorisée. Car ce
religieux n'aurait qu'à en appeler aux
tribunaux pour faire condamner qui
conque mettrait la main à cette me
sure, ordonnée au mépris de tous les
principes et de tous les textes de notre
législation. .
Auguste Roussel.
M. de la Bassetière n'a pas seule
ment répondu à M.. Paul Bert, il l'a
réfuté ; il a prouvé que ce savant est
ignorant ou inintelligent, à moins
qu'il ne méprise de parti pris la vé
rité. Pour commettre certaines er
reurs il faut, en effet, ou ne pas con
naître lçs questions que l'on traite, ou
•ne pas comprendre les. extraits que
l'on cite, ou manquer absolument de
loyauté. M. Paul Bert a commis ces er
reurs-là; elles font tout son discours.
Aucun -homme de bon sens et dégagé
de l'esprit de parti n'en- pouvait dou
ter après l'avoir entendu ; aucun de
ses amis politiques, ne peut honnête
ment le contester aujourd'hui. M. de
la Bassetière l'a établi même pour
eux. Ils le nient. On savait bien qu'ils
le nieraient. Mentir est l'arme favorite
du parti.
Il n'en est pas moins hors de doute
que M. Paul Bert a donné comme'
exactes des propositions extraites de
compilations calomnieuses déjà réfu
tées et condamnées. Cependant il se
posait en homme qui a puisé aux sources.
Tel est son savoir et telle est sa loyauté.
Si d'autres extraits ont été négligés,
c'est que le temps de tout vérifier et de
tout expliquer manquait. L'œuvre sera
reprise,' et M.Paul Bert sortira de ce
débat aussi aplati que l'a été M. Jules
Ferry par M. Keller. Qu'est-il resté des
affirmations du"ministre-après les vé-.
rifications de l'orateur catholique ?
Absolument rien. Il en est de même
pour les points du discours de M. Paul
Bert que M. de la Bassetière a touchés ;
il en sera aussi de même pour le reste,
si la majorité laisse à ses adversaires
la liberté de discussion.
Dans tous les cas il est déjà absolu
ment démontré que l'on prétend fer
mer les écoles des jésuites en mettant
à leur charge des livres qu'ils n'ont
pas écrits et des doctrines étrangè
res à leur enseignement. C'est bien
le procès de tendances, promis par
M. Spuller; c'est aussi le comble de l'ini
quité. M. le duc delàRochefoucauld-
Bisaccia a fait ressortir cette énormité,
ce scandale, en quelques paroles émues
ou tous les pères de famille trouveront
l'expression de leurs sentiments. Nous
le félicitons et nous le remercions d'a
voir si noblement dit que jamais nous
ne livrerons nos enfants aux sectaires
qui veulent nous ies arracher pour
qu'ils perdent leur âme et soient enne
mis de Dieu. .
Eugène Veui-llot.
Se souvenant sans doute des beaux
jour de la « dictature de l'incapacité,».
où il réunissait la direction des armées
à celle des affaires de l'intérieur, M.
Gambetta veut absolument avoir,
comme président de- la Chambre, le
droit de réquisition directe des troupes.
Il lui déplaît d'être obligé de faire pas
ser ses réquisitions parle ministère de
la guerre. Nous disons M. Gambetta-, et
non les présidents des Chambres, parde
qu'en realité il ne s'agit dans ce droit
de réquisition directe que de rex-dicta-
têuf ; lé ridicule M. Martel n'a certai
nement pas la prétention de comman
der directement aux généraux, et il
n'a fait aucune observation lorsqife la
commission du Sénat & âiïieiide, fort
sagement, le singulier article intro
duit par le. gouvernement dans sa pau
vre loi dite de garantie.
.M. Gambetta maintient ses exigen
ces, et il est appuyé non-seulement
par les opportunistes, qui sont ses
très humbles serviteurs, mais encore
par les radicaux, heureux de trouver
une occasion dliumilier et do désor
ganiser-l'armée, en soumettant l'apto-
rité militaire aux présidents des Cham
bres. La commission nommée par la
Qiiatnhrë s'est prononcée dès le pre
mier jour pour le droit de.réquisition
directe. La République française , qui
leste l'organe de M. Grcmbetta, quoi
que celui-ci, retenu par sa grandeur
au palais BoUrbon, ne daigne plus pa
raître rue de la Chaussée-d'Antin, en
registrait ainsi le triomphe de son
patron *
Le projet a été adopté sans débuts par
les bureaux, sauf l'article 5, qui règle l'exer
cice du droit de réquisition de la force ar
mée par chaque président, en vile d'assu
rer la sécurité intérieure et extérieure do
chaque Chambre^ On sait que le Sénat a
accepté la rédaction de sa commission, qui
subo uonne la réciuisition adressée par
chaque président à l'autorité du ministre de
la guerre.
; Les bureaux de la Chambre dut été una
nimes pour considérer que cette subordina
tion en ! ovait toute garantie aux Chambres ;
elle peut constituer un danger cl donne une
importance trop grande à îa personne mê
me du ministre de la guerre. La commis
sion a été d'avis que la subordination édic
tée par l'article 5 devait disparaître.
Le ministre de la guerro aurait une
« importance trop grande » dit la Ré
publique française. Est-ce que l'on ne
pourrait pas t ,avec plus de raison, re
tourner d'argument et dire que le droit
de réquisition directe qui met la force
militaire à la discrétion de M. Gam
betta, donne a une importance trop
grande » à un personnage qui n'a
d'autres titres au commandement de
l'armée que les désastres de sa fameuse
dictature, et qui n'est, hiérarchique
ment, que la troisième autorité de la
république?
Le Journal des Débais, toujours em
pressé à faire sa cour à. M. Gambetta
pour lui faire oublier quelques vel
léités d'indépendance bientôt dissipées,
a invoqué un précédent, celui de l'As-
semblee constituante qui, le 11-mai
1848, rendait un décret dont les ar-
cles 6 et 7, introduits plus tard dans
son règlement, étaient ainsi conçus :
Le président est chargé de veiller à la
sûreté intérieure et extérieure de l'Assem
blée Nationale. A cet effet, il a droit de re
quérir la force armée et toutes les autorités
dont il juge le concours nécessaire. Les ré
quisitions peuvent être adressées directe -
ment à tous officiers commandants ou fonc
tionnaires, qui sont tenus d'y obtempérer
immédiatement, sous les peines portées
par les lois.
Le président peut déléguer son droit de
réquisition aux questeurs ou à l'un d'eux.
Ce précédent n'est pas applicable
avec la constitution Wallon. Alors, il
n'y avait qu'une Assemblée souve
raine qui réunissait tous les pouvoirs.
La commission exécutive, composée
de MM. Lamartine, Arago, Garnier-
Pagès, Marie et Ledru-Rollin, élus par
l'Assemblée, n'avait d'autre pouvoir
que -çeux que la Chambre lui avait
délégués, et elle était révocable à vo
lonté. Les ministres n'étaient, en réa
lité, que les agents indirects de la
Constituante. '
Il n'en est pas de même aujourd'hui
où il y a trois pouvoirs, les deux Cham
bres et le président de la République,
qui a le pouvoir exécutif. Du reste, la'
Constituante elle-même avait compris
que le droit de réquisition directe était
un droit exceptionnel, motivé par une
situation exceptionnelle; elle ne l'ins
crivit pas dans la constitution, com
prenant qu'il ne pouvait subsister dès
qu'il y avait un président de la Répu
blique dont les pouvoirs n'étaient pas
une délégation de la Chambre.
Hier, les ministres de l'intérieur, de
la justice et de la guerre ont été en
tendus par la commission dè la Cham
bre des députés ; ils ont fait valoir cet
argument et d'autres encore, que le
Journal des Débats résume ainsi :
Les ministres ont défendu la rédaction
adoptée par le Sénat à la suite d'un accord
intervenu entre le gouvernement et la com
mission sénatoriale. Ils ont exposé qu'il
importait de ne pas retarder le vote défini
tif du projet afin que l'on puisse commen
cer immédiatement les travaux nécessaires
h l'appropriation du palais du Luxembourg
et du palais Bourbon.
M. LeRoyer a expliqué que si la Cham
bre accueillait favorablement la pensée de
sa commission, les sénateurs ne manque- ;
ront pas de déclarer que le système du'
droit de réquisition directe des forces uni
taires porte, dans une certaine mesure, at
teinte à la Constitution.
Le paragraphe 3 de l'article 3 de la loi
du 25 février 1875, sur l'organisation des
pouvoirs, publics, auquel a fait allusion
M. le garde des sceaux, porte en effet : .
Le président de la République dispose de la
force armée.
Le général Gresley, ministre de la gHerre,
a indiqué que le droit de réquisition di
recte pourrait être d'une application diffi
cile, et que d'ailleurs il serait inutile.
Il à- cité des circulaires ministérielles â&
l8i$/.s'appliquant au droit de réquisition.
Il a ajouté qu'on comprenait qu'à cette épo
que ce système eût été introduit dans la loi
parée qu'il y avait une Assemblée unïqué,
et. de plus, cette Assemblée était souve
raine. . ,
Les. ministres avaient raison, et fit
cofiiiilission aurait pu se rendre à des
arguments très séri£ux ; présentés par
des hommes aussi peu suspêCts aux
radicaux que le citoyen Leroyer et
le général Gresley ; niais la décision
de là commission*était prise, et l'on a
passé outre, après des explications
aont nous empruntons encore le
résumé au Journal des Débats :
La comriiissîotl il fait corrtprendre aux re
présentants du gouverneriîeflt que les cri
tiques dirigées contre l'article o ne Visaient
nullement le président actuel de là Répu
blique, ni les membres du cabinet. El'e se
préoccupait seulement de prendre des pré
cautions pour un avenir plus ou moins éloi
gné. •
L'appli'cation du droit de réquisition di
recte, dans la pensée de 'a commission, est'
en dehors de toute prévision possible. I'
s'agit uniquement de mesures dé sagS pré
voyance, prises dans l'intérêt.des succes
seurs de la Chambre acLue"e, car le prési
dent la république et ses ministres sont
mortels. ' ............
Cela est purement grotesque : si ie
droit de réquisition directe est, dans la
pensée de 11 Commission, « en dehors
de tpute prévision'possible », pourquoi
l'exiger contre la volonté du gouverne
ment et au risque de soulever un con
flit avec le Sénat?
Comprenant la faiblesse de leurs,
arguments* et n'osant dire la vérité,
qui se résume à ceci 1 M. Gambetta
veut être maître de l'armée, et ies ra
dicaux, qui ne lui font. pas l'honneur
de le craindre, voient ûàÏÏS ses exi
gences un moyen d'humilier l'arlîlfo
et de désorganiser le commandement,
plusieurs journaux, parmi lesquels la
République française et le Journal des
Débals , invoquent les leçons de l'his
toire, Ils évoquent le spectre du coup
d'Etat de 1851, et demandent ce qu'il
serait arrivé silo président Dupinavait
eu le droit de réquisition directe.
L'argument ne nous paraît, p'as irré^
futable, et nous croyons que le futur
procureur général de l'empire n'aurait
pas fait grand usage du droit de ré
quisition. Mais en admettant même
un'président plus ferme, nous doutons
que ce droit couvre une Assemblée.
Trois jours après le fameux décret de
1848,4e 15 mai, la Chambre était en
vahie ; et si elle a été dégagée, le dé
cret n'y a guère servi. Six semaines
plus tard, une épouvantable insurrec
tion menaçait la Chambre, qui, pour
-la réprimer, se voyait obligée de ren
voyer sa commission exécutive et .de
remettre tous les pouvoirs au général
Cavaignac.
Ces exemples suffisent pour mon
trer ce que vaut le droit de réquisition
directe, utile pour amener des con
flits avec l'autorité militaire, utile;sur-
tout au président d'une des deux
Chambres qui voudrait faire un coup
d'Etat.
A. Rastoul.
On se rappelle que . les pourvois des
instituteurs congréganistes devaient
être examinés par le conseil d'Etat
dans la séance du vendredi 27 juin,
quand on apprit tout à coup que, —
le rapport prêt, — le commissaire du
gouvernement, M. Flourens, en me
sure de prendre des conclusions, —
les affaires étaient retirées durôle.
D'où vient ce retard? Bien des rai
sons ont été données ; nous saurons
bientôt la véritable.
Le vendredi 18 juillet revient le tour
de M. Flourens, dont on connaît les
sentiments républicains et aussi la
loyauté de caractère, et qui, si nous
sommes bien informé, après avoir, il
y a de longs mois, demandé du temps
pour examiner la question, n'a pas
fait difficulté v de reconnaître, bien
avant le 27juin, qu'il était absolument
prêt;
A retarder davantage la solution, il
y aurait une faute, dont il sera bientôt
aisé de déterminer les auteurs. Si les
pourvois n'étaient pas inscrits au rôle
du 18 juillet, nous saurions sur qui
faire peser la responsabilité qui se dé
gagerait d'elle-même. Alors, en effet,
nous serions en présence d'un déni de
justice caractérisé, et jusqu'à preuve
évidente nous nous refusons à le
croire possible.
Le duc de Saint-Simon, dans ses Mé
moires, raconte _ une scène bien cu
rieuse. On était' dans l'attente de la
mort du roi, en 1715, et on préparait
la régence du duc d'Orléans, ou chacun
savait que Saint-Simon devait avoir sa
place. Le 18 août était un dimanche.
« Plusieurs du Parlement, dit le duc,
étaient venus le matin savoir des nou
velles du roi et, d'habitude, ils s'en re
tournaient de bonne heure. » Sur les
huit heures du soir, Saint-Simon
monta chez le duc de Noailles, qui
était « enfermé dans son cabinet, d'où
il vint m$ trouver dans sa chambre.
Après plusieurs propos sur l'état du
roi et sur l'avenir, il se mit à enfiler
un assez long discours sur les jésuites,
la conclusion fut de mé proposer de
les chasser tous de France et d'appli
quer leurs biens aux universités. »
Cette proposition parut absolument
folle à Saint-Simon. Noailles s'en aper
çut « à mon air effrayé et il se mit en
raisonnement. Cependant son cabinet
s'ouvrit, d r où je vis le procureur géné
ral (d'Aguesseau) sortiretvenir ànous...
Noailles lui dit ce qu'il agitait entre lui
et mt)i qui pourtant n'avait pas dit un
motencore, mais à qui un geste échappé
de surprise avait mis le duc de Noailles
en plaidoyer.- Le procureur général
l'interrompît bientôt pour me regar
der froidement et jne dire de même
que c'était la meilleur*? et la plus utile
chose qùë l'on put faire au' commen
cement de la regence que l'expiîision
totale, radicale et safis retour des jé
suites hors du royaume et de disposer
sur le champ de leurs maisons ci de
leurs biens en faveur des universités.
Je ne puis exprimer ce que je devins à
cette sentence du procureur générai :
Cette folie, assez contagieuse pour
offusquer un homme aussi sago. et
dans une place qui ne lai permettait
pas d'en. ignorer la mécanique et les
suites,, me fit peur d'en être gagné
aussi. L'étop.nement où je' fus me mît
en doute d'avoir bien ëntendu ; je le
fis répéter et je deiïlêHrai stupéfait. Ils
c'a perçurent bientôt à nia contenance
que j't'làîs plus occupé de mes penséeè
quo de leurs dîseoHrs; ils mé prièrent
de leur dire ce que je psnsais de leur
proposition. Je leur avouai que je la
trouvai tellement étrange que j'arais
peine à croire à ffles oreilles. Ils se mi
rent là-dessus, l'un avec feu, l'autre
avec poids èt gravité et s'interfompant
l'un FaUtra; à me dire ce que chacO/i
sait sur les jésuites* leur domination,
leur danger pour l'EglisS st pour l'Etat
et pour les particuliers. A la lîïl, l'im
patience ffîe prit, je les interrompis à
mon tour et il ffîe parut que je leur
faisais plaisir dans celle OÙ ils étaient
d'entendre ce que j'avais à leuf dife. »
Saint-Simon, chacun le sait, était
ianséniste; et ce n'était pas l'affection
qu i' portait aux jésuites qui lui faisait
trouver si folle et si extravagante la
proposition préparée entre le froid et
sage Daguesseau et le bouillant et a-
ventureux Noailles. 11 leurdéclara donc
qu'il ne l6Ur contestait rien de tout
ce qu'ils voudraient alléguer contre les
jésuites et sûr <'< les avantages que trou
verait la France d'en être délivrée, en
core reinarque-t-il qu'il y eût beau
coup à dire là-dessus. Il se retranchait
uniquement sur la cause, le comment
et les suites. »
Sur le comment, les_ scrupules de
Saint-Simon , à ^ vrai _ dire , ^ fe
raient rire nos maîtres d'atîjouri'hu-.
Il paraît bien que sous le despotisme
de la monarchie absolue les intérêts
privés avaient des garanties dont ils
manquent absolument en république.
Saint*Simontrouvaitdonc une impos
sibilité absolue à saisir tous les jésuites
d'un coup de filet, ët â faire tout de
suite de leurs maisons et de leurs biens
ce que 1 a fantaisie d u pouvoir en eu t Voulu
faire. Il redoutait l'opinion publique
beaucoup plus que les ministres de la ré
publique et souhaitait au moins une rai
son de justice à donner au public. « Il
ne s'était rien passé, disait-il, sur quoi
on. ait pu je ne dis pas accuser mais
soupçonner les jésuites de brâsêer rien
contre l'Etat; nul délit, par consé
quent, sur lequel on put fonderie ban
nissement du plus obscur particulier ;
quelle violence donc à l'égard de toute
une compagnie que ces deux mes
sieurs représentaient si appuyée, si
puissante, si dangereuse; la faire aux
bout de deux règnes qui l'avaient si
constammènt favorisée ; la faire à l'en
trée d'une régence qui est toujours un
temps de ménagement et de faiblesse ;
la faire enfin par un régent accusé de
n'avoir pas de religion sans parler du
reste, et que la vie publiquement dé
bauchée et les propos peu mesurés sur
la religion rendaient infiniment moins
propre à cette exécution quand elle
serait juste et possible »!
Ces scrupules de saint Simonne sont
pas de misé aujourd'hui. Les temps
ont marché et la république ne se soucie
pas de l'opinion. Saint Simon en avait
cure et se demandait comment elle
permettrait l'exécution de cette injus
tice. Il avait l'esprit trop,borné, assu
rait-il, pour imaginer aucune manière
de l'executer : que « le tout à la fois,
comme il dit, lui semblait mathéma
tiquement impossible, que par parties,
quels cris! quels troubles! quels mou
vements dès les premiers pas! Cette
immensité de jésuites, leurs familles,
leurs écoliers et les familles de ces
écoliers, leurs pénitents et, les trou
peaux de leurs . retraites et de leurs
congrégations, les sectateurs de leurs
sermons, leurs amis et ceux de leurs
doctrines. Quel vacarme avant qu'on
eût nettoyé la province par la
quelle on aurait commencé, et quand
et comment achèverait-on dans toutes
les provinces? Où conduire ces exilés?
Hors la frontière, répondra-t-on ; mais
qui les empêchera de rentrer? Point
de mer comme en Sicile, ni de grande
muraille comme à la Chine, tout ou
vert partout, et favorisés de ce nombre
immense de tous états et de tous lieux
dont je viens de parler. »
Et en présence de toutes ces garan
ties et de ces défenses que les inté
rêts privés, nous le répétons, les
droits de la conscience et la liberté
individuelle pouvaient, en ce temps
de despotisme, élever contre l'arbi
traire ae l'autorité, Saint-Simon con
cluait : « C'est une chimère abso
lument impossible. » M. Ferry, au re
bours, va de l'avant. Il sait que sous
la république la liberté n'existe point;
les intérêts privés sont setns défense
devant les caprices d'une majorité ef
frayée et malsaine, et il psut impuné
ment, lui M. Ferry, escorté de MM.
Paul Bert et Spuller, voire mç.tne de
l'avorton de M. • Deschanel, il peut
marcher sur les droits de la _ con
science et se passer de la moindre
apparence de justice.
Saint-Simoii, continuant son dis
cours, supposait pour un instant la
violence « non - seulement faisable,
mais exécutée. » ; ,
« Que dira la cour de Rome, disait-il à
ses deux interlocuteurs autrement ins
truits et intelligents malgré leur folie
froide ou bouillante que nos députés; que
dira la cour de Rome, dont les jésuites
sont en France les plus utiles instru
ments etles plus dévoués à ses préten
tions (c'est un galiiean et un jansé
niste qui parle) et à ses ordres... Que
diront toutes les puissances catholi- .
ques chez qui tous les jésuites ont tant
de crédit? Et les peuples catholiques
de toute l'Europe, ou par la chaire,
le confessionnal, ies classes, les jé
suites, ont autant d'ârnes et de parti
sans que ces mômes moyens l»ur don
nent en France ? Que diront tous ies
ordres réguliers bénédictins, domini
cains, chanoines divers? Ne doit-on
pas juger que tous frémiront d'un coup
qui peut les frapper à leur tour, si la
fantaisie en prend: qu'ils en crain
dront ie menaçant exemple et qu'ils se
réuniront avec tout ce qui se sentira
ou se croira intéressé à l'empêcher ?
Et s'ils ën viennent à bout, quelle folie,
quelle ignominie, se sera-t-on si gra
tuitement préparée ! »
Ce n'est peut-être pas cette dernière
preuve qui toucherait beaucoup noà
ministres de la république. La folie^t
l'ignominie même peuvent-elles faire
peur à des amnistieurs de la Commune?
Mais Saint-Simon ne s'arrêtait pas là., il
continuait : « Quel péril encore, et péril
à ne plus pouvoir espérer sûreté ni
tranquillité après s'être mis le dedans
et le dehors contre soi avec ce qu'on
appelle la religion à la tête ! Je con
clus enfin que cette tentative, si bien
concertée qu'elle pût être, serait la
perte de M. le duc d'Orléans et un tel
bouleversement, que je ne voyais pas
comment ni quand on pourrait- les
calmer. » . *
Enfin, pour terminer, le duc cons
tate que ses deux interlocuteurs ne
purent répondre un seul mot à pas
une des objections qu'il venait d«
faire. Mais ils déclarèrent qu'ils n'é
taient point persuadés, et ils conti
nuaient, dit Saint-Simon, à aboyer à
la lune. Cette expression est bien irré
vérencieuse pour le grave d'Aguesseau;
«Je sortis, continue Saint-Simon, noyé
dans l'étonnement, à la recherche de
ce que le procureur général pouvait
avoir fait de son sens, de ses lumières,
de sa sagesse. »
Il n'y â pas à se noyés d'un tel
étonnemént devant les ministres de la
république : on est accoutumé à voir
le bout de leur sens, de leurs lumiè
res, de leur sagesse.
Malheureusement, ils n'aboient pas
seulement à la lune; et si la folie de
soli ami avait-pu. gagner l'esprit de
d'AgUefiseau, ennemi pf-rsonnel et par
lementaire de-la société», dit encore
l'historien, il ne faut pas s'étonner que
la folie de M. Gambetta ait gagne MM.
Ferry et les autres. Il est inutile en
core de constater qu'il n'y a pas dans
les conseillers de la république un seuS,
homme assçz intelligent pour demeurer
confondu avec Saint-Simon devant ces
extravagances. Mais il est utile, je
crois, de constater le nombre et la
puissance des contre-poids que la mo
narchie absolue apportait aux fan
taisies despotiques et folles que pou
vaient concevoir les dépositaires du
pouvoir. Le suffrage universel a tout
rasé, et le cheval de Caligula peut
être nommé consul. s
■ Léon Aobineau.
On nous écrit de Versailles (Cham
bre des députés), le 7 juillet: ,
(Suite de la discussion sur les lois Ferrv.)
Nous en sommes toujours à l'amendement
de M. Kel'er. M. de la Bassetière répond,
ainsi qu'il en avait pris l'engagement sa
medi dernier, au libelle àn citoyen Paul
Bert. Ce libelle a fait, il est vrai, sourire
de pitié tous ceux qui ont encore, avec la
vue claire des choses, quelque teirfture
d'histoire, religieuse et quelque connaissan
ce en philosophie, en psychologie et en
morale. Mais co-jnme le nombre ,des es
prits ayant une culture môme moyenne va
diminuant de jour en jour, et que des hom
mes de la force des citoyens Paul Bert,
Ferry, Spuller et autres tiennent le haut du
pavé et font l'opinion des masses populai
res, il était bon qu'on répondit à cette mau
vaise parodie des Provinciales et qu'on re
mît à leur place respective les calomnia
teurs et les calomniés.
Malgré la fatigue physique qu'il éprou
vait, fatigue que le mauvais vouloir des ré
publicains augmentait encore, le député'
vendéen a réussi dans la vaste tache qu'il
avait entreprise. Je ne veux pas dire qu'il
ait répondu à toutes les inventions et h tou
tes les calomnies des républicains : il fau
drait pour cela plusieurs discours et plu
sieurs séances; mais il a ruiné par la base
toute l'argumentation du citoyen Paul Bert,
en rappelant que le fameux recueil des Ex
traits des Assertions, livre sur lequel Pascal
s'était appuyé et que le citoyen Paul Bert
avait copié avec l'aveuglement de la haine
et de l'ignorance, n'était qu'un long tissu de
textes habilement tronqués et malignement:
dénaturés. Il n'y a pas un seul savant en
N° 4278 — Édition quotidienne.
Mercredi 9 Juillet "Î879
..'PARIS
; ;... : 55 ïr. »
. feix % mois. « » i « « ^ » »% » f «i # t • « 28 * 50
Trois mois . . t-y.
TJn
Un Numéro,' à Paris. ■."-t-.f
—: Départements.
BUREAUX
Paris,- 10, Rue-' des Saints-Pères
: On s'abonne, à Rome, -place . ilu Gcsu, 8 \
. ' - ' • V ht,
TJn an. . .
Six mtis.. .
Trois mois.
DÉPARTEMENTS'
• • • t
• • « • •
55 fr. »'
28' 50
15 »
Édition semi -quotidienne
Un an. 30 fr. — Six mois, 16 fr. — Trois mois, 8 fr. 50
. L 'UNIVERS-ne répeid pas ies «aiwscrLts qui lui sont adressés
• —r-H '■ -• . " • ' ■
ANNONCES
' MM. ffi. MGEAN6E, CERF et G ie , 6, place de la Bourse
Ceux de nos souscripteurs dont l'abon-
ûement expire le 15, juillet.: sont priés de
le renouveler dès à présent pour éviter
toute interruption dans, la -réception du
Journal. / T
Le meilleur mode de renouvellement lest
l 'envoi d'un mandat .sur la poste ou d'un
chèque à vue, à l'ordre de l'administrateur
du journal. Y joindre l'une des dernières
.bandes d'i journal. ■ " :
Les abonnements datent des 1 er et,16 de
chaque mois.
Toute demande de changement d'adresse
doit être accompagnée d'une des dernières
bandes et de 50 centimes en timbres-
poste. . ' •
FRANGE
PARAS, 8 JUILLET 1879
En dépit des haines qu'elles exploi
tent, les feuilles radicales comprennent
fort bien que l'opinion n'abandonne
pas les congrégations religieuses , dan s
la lutte engagée contre la liberté de
l'enseignement religieux. Aussi le projet
Ferry apparaît-il déjàçommé inefficace
aux yeux mêmes de ceux qui le défen
daient hier encore coïame sèul prati
cable à l'heure actuelle. Nous avons
cité à ce propos -îa'iît 'publique française,
Aujourd'hui l'organe gambettiste'juge
nécessaire d'insister en trois articles
sur les mesures qui lui semblent in
dispensables pour fortifier le projet
Ferry.
Lé premier s'attaque à l'idée même
des congrégations, qu'elles soient au
torisées ou non. En effet, la République
française soutient qu'au point de vue
i évolutionnaire, qui doit guider les
législateurs modernes en matière de
droit d'association, il ne saurait y avoir
place dans la société pour aucune as
sociation religieuse, les membres de
«ses associations se mettant par les
trois vœux de pauvreté, d'obéissance
et de chasteté, en dehors des condi
tions « qui font les citoyens de TE at
moderne ». D'après cela, il faut enten
dre que l 'Etat moderne impose aux ci
toyens dignes de ce nom la triste obli
gation de ne pas être chastes, de ne
pas se plier à l'obéissance et d'avoir
cent mille francs de rente. C'est un
idéal comme un autre, mais nous ne
voyons pas en quoi il l'emporte sur
celui que se proposent les religieux. :
En tout cas, l'on ne prouve pas que
ceux-ci n'aient pas droit de se réunir
pour suivre le leur. Parce qu'ils, font
Vœu d'être pauvres, les religieux refu-
en-t-ils de payer régulièrement les
Impôts auxquels ils sont soumis, com
me les autres citoyens ? Parce qu'ils
font vœu d'obéir à leur supérieur, dans
tout ce qui a trait à la direction spi
rituelle, attendu qu'ils savent d'a
vance que cette autorité s'exercera tou
jours dans les limites des commande
ments prescrits par Dieu lui-même,
s'interdisent-ils d'obéir aux lois justes
de l'Etat, et, par suite,, sont-ils en cela
différents des autres citoyens, sur les
quels, du moment qu'ils respectent les
lois ayant vraiment ce caractère, l'E
tat ne saurait établir d'inquisition?
- Enfin, parce qu'ils font vœu de
chasteté, ce qui est un acte .libre de
leur libre volonté, les religieux s'en
gagent-ils à éloigner de la vie de fa
mille ceux dont ils dirigent l'ensei
gnement? Ne sait-on pas, au contrai
re, que la famille n'a jamais eu de
plus* ardents défenseurs, et naguères
encore ne leur reprochait-on pas,
par une injustice toute contraire
a celle d'aujourd'hui, de tenir la so
ciété tout entière par . les mariages
dont ils sont, disait-on, les ordinaires
instruments?
Donc la mauvaise foi, ici, éclate une
fois de plus. Ce qu'on veut, en réalité,
ce n'est pas soustraire à une autorité
morale, dont ils ne se plaignent pas,
un certain nombre de citoyens;mais,
parce qu'ils sont religieux, on veut que
ces citoyens deviennent les esclaves du
dieu-Etat, auquel on prétend de même
soumettre tous ceux qui vivent à l'abri
des lois. Car, enfin, lorsqu'on nous dit
que « l'ordre religieux est une armée
soumise à un chef, sous l'empire d'une
discipline militaire, » quelle différence
établit-on entre cette situation et celle
qu'offre, par exemple, l'armée des fonc
tionnaires soumis, eux. aussi, à une
discipline que nos gouvernants actuels
tendent à rendre bien autrement hu
miliante pour la liberté.
Nous nous trompons, il y a une dif
férence ; car c'est librement que les
religieux obéissent à une autorité qui
ne les retient soumis qu'autant qu'ils
le veulent : en peut-on dire autant de
la multitude des fonctionnaires cour
bés sous les volontés et trop souvent
sous les caprices d'un ministre ou
d'un chef de bureau? A cet égard,
qu'on pèse par exemple les termes de
la circulaire envoyée tout récemment
à ses agents par M. Léon Say, et qu'on
nous dise si c'est par de tels discours
que nos ministres développent, au gré
de la République française, l'indépen
dance dont elle paraît si soucieuse
d'assurer le bénéfice au « citoyen mo
derne. »
Vraiment, tout cela fait pitié, car
tout cela n'est qu'hypocrisie pure. En
quoi, nous le demandons à tout esprit
impartial, l'existence des congréga
tions religieuses a-telle gêné qui que
ce soit pour Pexercice du droit que
veut protéger la République française,
c'est-à-dire « pour le développement
de son initiative et de 1 sa personna
lité? » Au point do vue spécial de l'en
seignement, que veut-on dire lorsqu'on
ajoute que « mettre .en concurrence
ces congrégations et les simples parti
culiers, c'est ouvrir une lutte à des
conditions tout à fait inégales? » Est-
ce que cet argument ne peut pas aussi
bien se retourner contre toute entre-
Erise industrielle -ou commerciale ?
ans cet ordre d'idées, nous dira-t-on
cpielestle particulier qui pourrait lutter
à armes égales contre lés compagnies
dont les iiiembres ont associé leurs
capitaux, ou songe-t-on, à cause de
cela, à proscrire-l'idée même d'entre-
prendt-e quoi que ce soit par voie .d'as
sociation?
Ce-qu'on veut, il faudrait au ra,oins
avoir le triste courage de le dire bien
haut : c'est supprimer toute idée reli
gieux dans la société: Et comme les
congrégations sont, des missionrtaii^s
très ardents ët très féconds de l'idée
religièlisè, c'est à eux que l'on s'en
prend toutd'abord, pour arriver ensuite
au clergé lui-même,
Comment eh douter îoFsqiie, da\is
les dfeUx autres articles publiés par la
République française, on voit ce journal
préoccupé, d'une part, de réclamer la
dissolution du conseil d'Etat et sa ré
organisation sur de nouvelles bases,
pour supprimer dorénavant toute es
pèce de libéralités testamentaires en
faveur des établissements ecclésiasti
ques; d'autre part, de prouver que,
sous le régime des lois actuelles, les
membres des congrégations non auto
risées n'ont droit qu'à l'expulsion?
A cette prétention illégale des mo
dernes persécuteurs,- nous n'oppose
rons pas une fois de plus les réponses
juridiques qui ont été déjà faites et se
ront bientôt de nouveau portées à la
tribune. Nous nous contenterons d'ob
server qu'hier même la Répvbliquefran
çaise, plaidant cojitre M. Madier-Mont-
jau, confessait le contraire de ce qu'elle
avance aujourd'hui. Au surplus, un
argument suffit. Nous délions ceux
qui parlent de la sorte de faire décréter
l'expulsion d'un seul religieux par la
seule raison qu'il appartiendrait à une
congrégation non autorisée. Car ce
religieux n'aurait qu'à en appeler aux
tribunaux pour faire condamner qui
conque mettrait la main à cette me
sure, ordonnée au mépris de tous les
principes et de tous les textes de notre
législation. .
Auguste Roussel.
M. de la Bassetière n'a pas seule
ment répondu à M.. Paul Bert, il l'a
réfuté ; il a prouvé que ce savant est
ignorant ou inintelligent, à moins
qu'il ne méprise de parti pris la vé
rité. Pour commettre certaines er
reurs il faut, en effet, ou ne pas con
naître lçs questions que l'on traite, ou
•ne pas comprendre les. extraits que
l'on cite, ou manquer absolument de
loyauté. M. Paul Bert a commis ces er
reurs-là; elles font tout son discours.
Aucun -homme de bon sens et dégagé
de l'esprit de parti n'en- pouvait dou
ter après l'avoir entendu ; aucun de
ses amis politiques, ne peut honnête
ment le contester aujourd'hui. M. de
la Bassetière l'a établi même pour
eux. Ils le nient. On savait bien qu'ils
le nieraient. Mentir est l'arme favorite
du parti.
Il n'en est pas moins hors de doute
que M. Paul Bert a donné comme'
exactes des propositions extraites de
compilations calomnieuses déjà réfu
tées et condamnées. Cependant il se
posait en homme qui a puisé aux sources.
Tel est son savoir et telle est sa loyauté.
Si d'autres extraits ont été négligés,
c'est que le temps de tout vérifier et de
tout expliquer manquait. L'œuvre sera
reprise,' et M.Paul Bert sortira de ce
débat aussi aplati que l'a été M. Jules
Ferry par M. Keller. Qu'est-il resté des
affirmations du"ministre-après les vé-.
rifications de l'orateur catholique ?
Absolument rien. Il en est de même
pour les points du discours de M. Paul
Bert que M. de la Bassetière a touchés ;
il en sera aussi de même pour le reste,
si la majorité laisse à ses adversaires
la liberté de discussion.
Dans tous les cas il est déjà absolu
ment démontré que l'on prétend fer
mer les écoles des jésuites en mettant
à leur charge des livres qu'ils n'ont
pas écrits et des doctrines étrangè
res à leur enseignement. C'est bien
le procès de tendances, promis par
M. Spuller; c'est aussi le comble de l'ini
quité. M. le duc delàRochefoucauld-
Bisaccia a fait ressortir cette énormité,
ce scandale, en quelques paroles émues
ou tous les pères de famille trouveront
l'expression de leurs sentiments. Nous
le félicitons et nous le remercions d'a
voir si noblement dit que jamais nous
ne livrerons nos enfants aux sectaires
qui veulent nous ies arracher pour
qu'ils perdent leur âme et soient enne
mis de Dieu. .
Eugène Veui-llot.
Se souvenant sans doute des beaux
jour de la « dictature de l'incapacité,».
où il réunissait la direction des armées
à celle des affaires de l'intérieur, M.
Gambetta veut absolument avoir,
comme président de- la Chambre, le
droit de réquisition directe des troupes.
Il lui déplaît d'être obligé de faire pas
ser ses réquisitions parle ministère de
la guerre. Nous disons M. Gambetta-, et
non les présidents des Chambres, parde
qu'en realité il ne s'agit dans ce droit
de réquisition directe que de rex-dicta-
têuf ; lé ridicule M. Martel n'a certai
nement pas la prétention de comman
der directement aux généraux, et il
n'a fait aucune observation lorsqife la
commission du Sénat & âiïieiide, fort
sagement, le singulier article intro
duit par le. gouvernement dans sa pau
vre loi dite de garantie.
.M. Gambetta maintient ses exigen
ces, et il est appuyé non-seulement
par les opportunistes, qui sont ses
très humbles serviteurs, mais encore
par les radicaux, heureux de trouver
une occasion dliumilier et do désor
ganiser-l'armée, en soumettant l'apto-
rité militaire aux présidents des Cham
bres. La commission nommée par la
Qiiatnhrë s'est prononcée dès le pre
mier jour pour le droit de.réquisition
directe. La République française , qui
leste l'organe de M. Grcmbetta, quoi
que celui-ci, retenu par sa grandeur
au palais BoUrbon, ne daigne plus pa
raître rue de la Chaussée-d'Antin, en
registrait ainsi le triomphe de son
patron *
Le projet a été adopté sans débuts par
les bureaux, sauf l'article 5, qui règle l'exer
cice du droit de réquisition de la force ar
mée par chaque président, en vile d'assu
rer la sécurité intérieure et extérieure do
chaque Chambre^ On sait que le Sénat a
accepté la rédaction de sa commission, qui
subo uonne la réciuisition adressée par
chaque président à l'autorité du ministre de
la guerre.
; Les bureaux de la Chambre dut été una
nimes pour considérer que cette subordina
tion en ! ovait toute garantie aux Chambres ;
elle peut constituer un danger cl donne une
importance trop grande à îa personne mê
me du ministre de la guerre. La commis
sion a été d'avis que la subordination édic
tée par l'article 5 devait disparaître.
Le ministre de la guerro aurait une
« importance trop grande » dit la Ré
publique française. Est-ce que l'on ne
pourrait pas t ,avec plus de raison, re
tourner d'argument et dire que le droit
de réquisition directe qui met la force
militaire à la discrétion de M. Gam
betta, donne a une importance trop
grande » à un personnage qui n'a
d'autres titres au commandement de
l'armée que les désastres de sa fameuse
dictature, et qui n'est, hiérarchique
ment, que la troisième autorité de la
république?
Le Journal des Débais, toujours em
pressé à faire sa cour à. M. Gambetta
pour lui faire oublier quelques vel
léités d'indépendance bientôt dissipées,
a invoqué un précédent, celui de l'As-
semblee constituante qui, le 11-mai
1848, rendait un décret dont les ar-
cles 6 et 7, introduits plus tard dans
son règlement, étaient ainsi conçus :
Le président est chargé de veiller à la
sûreté intérieure et extérieure de l'Assem
blée Nationale. A cet effet, il a droit de re
quérir la force armée et toutes les autorités
dont il juge le concours nécessaire. Les ré
quisitions peuvent être adressées directe -
ment à tous officiers commandants ou fonc
tionnaires, qui sont tenus d'y obtempérer
immédiatement, sous les peines portées
par les lois.
Le président peut déléguer son droit de
réquisition aux questeurs ou à l'un d'eux.
Ce précédent n'est pas applicable
avec la constitution Wallon. Alors, il
n'y avait qu'une Assemblée souve
raine qui réunissait tous les pouvoirs.
La commission exécutive, composée
de MM. Lamartine, Arago, Garnier-
Pagès, Marie et Ledru-Rollin, élus par
l'Assemblée, n'avait d'autre pouvoir
que -çeux que la Chambre lui avait
délégués, et elle était révocable à vo
lonté. Les ministres n'étaient, en réa
lité, que les agents indirects de la
Constituante. '
Il n'en est pas de même aujourd'hui
où il y a trois pouvoirs, les deux Cham
bres et le président de la République,
qui a le pouvoir exécutif. Du reste, la'
Constituante elle-même avait compris
que le droit de réquisition directe était
un droit exceptionnel, motivé par une
situation exceptionnelle; elle ne l'ins
crivit pas dans la constitution, com
prenant qu'il ne pouvait subsister dès
qu'il y avait un président de la Répu
blique dont les pouvoirs n'étaient pas
une délégation de la Chambre.
Hier, les ministres de l'intérieur, de
la justice et de la guerre ont été en
tendus par la commission dè la Cham
bre des députés ; ils ont fait valoir cet
argument et d'autres encore, que le
Journal des Débats résume ainsi :
Les ministres ont défendu la rédaction
adoptée par le Sénat à la suite d'un accord
intervenu entre le gouvernement et la com
mission sénatoriale. Ils ont exposé qu'il
importait de ne pas retarder le vote défini
tif du projet afin que l'on puisse commen
cer immédiatement les travaux nécessaires
h l'appropriation du palais du Luxembourg
et du palais Bourbon.
M. LeRoyer a expliqué que si la Cham
bre accueillait favorablement la pensée de
sa commission, les sénateurs ne manque- ;
ront pas de déclarer que le système du'
droit de réquisition directe des forces uni
taires porte, dans une certaine mesure, at
teinte à la Constitution.
Le paragraphe 3 de l'article 3 de la loi
du 25 février 1875, sur l'organisation des
pouvoirs, publics, auquel a fait allusion
M. le garde des sceaux, porte en effet : .
Le président de la République dispose de la
force armée.
Le général Gresley, ministre de la gHerre,
a indiqué que le droit de réquisition di
recte pourrait être d'une application diffi
cile, et que d'ailleurs il serait inutile.
Il à- cité des circulaires ministérielles â&
l8i$/.s'appliquant au droit de réquisition.
Il a ajouté qu'on comprenait qu'à cette épo
que ce système eût été introduit dans la loi
parée qu'il y avait une Assemblée unïqué,
et. de plus, cette Assemblée était souve
raine. . ,
Les. ministres avaient raison, et fit
cofiiiilission aurait pu se rendre à des
arguments très séri£ux ; présentés par
des hommes aussi peu suspêCts aux
radicaux que le citoyen Leroyer et
le général Gresley ; niais la décision
de là commission*était prise, et l'on a
passé outre, après des explications
aont nous empruntons encore le
résumé au Journal des Débats :
La comriiissîotl il fait corrtprendre aux re
présentants du gouverneriîeflt que les cri
tiques dirigées contre l'article o ne Visaient
nullement le président actuel de là Répu
blique, ni les membres du cabinet. El'e se
préoccupait seulement de prendre des pré
cautions pour un avenir plus ou moins éloi
gné. •
L'appli'cation du droit de réquisition di
recte, dans la pensée de 'a commission, est'
en dehors de toute prévision possible. I'
s'agit uniquement de mesures dé sagS pré
voyance, prises dans l'intérêt.des succes
seurs de la Chambre acLue"e, car le prési
dent la république et ses ministres sont
mortels. ' ............
Cela est purement grotesque : si ie
droit de réquisition directe est, dans la
pensée de 11 Commission, « en dehors
de tpute prévision'possible », pourquoi
l'exiger contre la volonté du gouverne
ment et au risque de soulever un con
flit avec le Sénat?
Comprenant la faiblesse de leurs,
arguments* et n'osant dire la vérité,
qui se résume à ceci 1 M. Gambetta
veut être maître de l'armée, et ies ra
dicaux, qui ne lui font. pas l'honneur
de le craindre, voient ûàÏÏS ses exi
gences un moyen d'humilier l'arlîlfo
et de désorganiser le commandement,
plusieurs journaux, parmi lesquels la
République française et le Journal des
Débals , invoquent les leçons de l'his
toire, Ils évoquent le spectre du coup
d'Etat de 1851, et demandent ce qu'il
serait arrivé silo président Dupinavait
eu le droit de réquisition directe.
L'argument ne nous paraît, p'as irré^
futable, et nous croyons que le futur
procureur général de l'empire n'aurait
pas fait grand usage du droit de ré
quisition. Mais en admettant même
un'président plus ferme, nous doutons
que ce droit couvre une Assemblée.
Trois jours après le fameux décret de
1848,4e 15 mai, la Chambre était en
vahie ; et si elle a été dégagée, le dé
cret n'y a guère servi. Six semaines
plus tard, une épouvantable insurrec
tion menaçait la Chambre, qui, pour
-la réprimer, se voyait obligée de ren
voyer sa commission exécutive et .de
remettre tous les pouvoirs au général
Cavaignac.
Ces exemples suffisent pour mon
trer ce que vaut le droit de réquisition
directe, utile pour amener des con
flits avec l'autorité militaire, utile;sur-
tout au président d'une des deux
Chambres qui voudrait faire un coup
d'Etat.
A. Rastoul.
On se rappelle que . les pourvois des
instituteurs congréganistes devaient
être examinés par le conseil d'Etat
dans la séance du vendredi 27 juin,
quand on apprit tout à coup que, —
le rapport prêt, — le commissaire du
gouvernement, M. Flourens, en me
sure de prendre des conclusions, —
les affaires étaient retirées durôle.
D'où vient ce retard? Bien des rai
sons ont été données ; nous saurons
bientôt la véritable.
Le vendredi 18 juillet revient le tour
de M. Flourens, dont on connaît les
sentiments républicains et aussi la
loyauté de caractère, et qui, si nous
sommes bien informé, après avoir, il
y a de longs mois, demandé du temps
pour examiner la question, n'a pas
fait difficulté v de reconnaître, bien
avant le 27juin, qu'il était absolument
prêt;
A retarder davantage la solution, il
y aurait une faute, dont il sera bientôt
aisé de déterminer les auteurs. Si les
pourvois n'étaient pas inscrits au rôle
du 18 juillet, nous saurions sur qui
faire peser la responsabilité qui se dé
gagerait d'elle-même. Alors, en effet,
nous serions en présence d'un déni de
justice caractérisé, et jusqu'à preuve
évidente nous nous refusons à le
croire possible.
Le duc de Saint-Simon, dans ses Mé
moires, raconte _ une scène bien cu
rieuse. On était' dans l'attente de la
mort du roi, en 1715, et on préparait
la régence du duc d'Orléans, ou chacun
savait que Saint-Simon devait avoir sa
place. Le 18 août était un dimanche.
« Plusieurs du Parlement, dit le duc,
étaient venus le matin savoir des nou
velles du roi et, d'habitude, ils s'en re
tournaient de bonne heure. » Sur les
huit heures du soir, Saint-Simon
monta chez le duc de Noailles, qui
était « enfermé dans son cabinet, d'où
il vint m$ trouver dans sa chambre.
Après plusieurs propos sur l'état du
roi et sur l'avenir, il se mit à enfiler
un assez long discours sur les jésuites,
la conclusion fut de mé proposer de
les chasser tous de France et d'appli
quer leurs biens aux universités. »
Cette proposition parut absolument
folle à Saint-Simon. Noailles s'en aper
çut « à mon air effrayé et il se mit en
raisonnement. Cependant son cabinet
s'ouvrit, d r où je vis le procureur géné
ral (d'Aguesseau) sortiretvenir ànous...
Noailles lui dit ce qu'il agitait entre lui
et mt)i qui pourtant n'avait pas dit un
motencore, mais à qui un geste échappé
de surprise avait mis le duc de Noailles
en plaidoyer.- Le procureur général
l'interrompît bientôt pour me regar
der froidement et jne dire de même
que c'était la meilleur*? et la plus utile
chose qùë l'on put faire au' commen
cement de la regence que l'expiîision
totale, radicale et safis retour des jé
suites hors du royaume et de disposer
sur le champ de leurs maisons ci de
leurs biens en faveur des universités.
Je ne puis exprimer ce que je devins à
cette sentence du procureur générai :
Cette folie, assez contagieuse pour
offusquer un homme aussi sago. et
dans une place qui ne lai permettait
pas d'en. ignorer la mécanique et les
suites,, me fit peur d'en être gagné
aussi. L'étop.nement où je' fus me mît
en doute d'avoir bien ëntendu ; je le
fis répéter et je deiïlêHrai stupéfait. Ils
c'a perçurent bientôt à nia contenance
que j't'làîs plus occupé de mes penséeè
quo de leurs dîseoHrs; ils mé prièrent
de leur dire ce que je psnsais de leur
proposition. Je leur avouai que je la
trouvai tellement étrange que j'arais
peine à croire à ffles oreilles. Ils se mi
rent là-dessus, l'un avec feu, l'autre
avec poids èt gravité et s'interfompant
l'un FaUtra; à me dire ce que chacO/i
sait sur les jésuites* leur domination,
leur danger pour l'EglisS st pour l'Etat
et pour les particuliers. A la lîïl, l'im
patience ffîe prit, je les interrompis à
mon tour et il ffîe parut que je leur
faisais plaisir dans celle OÙ ils étaient
d'entendre ce que j'avais à leuf dife. »
Saint-Simon, chacun le sait, était
ianséniste; et ce n'était pas l'affection
qu i' portait aux jésuites qui lui faisait
trouver si folle et si extravagante la
proposition préparée entre le froid et
sage Daguesseau et le bouillant et a-
ventureux Noailles. 11 leurdéclara donc
qu'il ne l6Ur contestait rien de tout
ce qu'ils voudraient alléguer contre les
jésuites et sûr <'< les avantages que trou
verait la France d'en être délivrée, en
core reinarque-t-il qu'il y eût beau
coup à dire là-dessus. Il se retranchait
uniquement sur la cause, le comment
et les suites. »
Sur le comment, les_ scrupules de
Saint-Simon , à ^ vrai _ dire , ^ fe
raient rire nos maîtres d'atîjouri'hu-.
Il paraît bien que sous le despotisme
de la monarchie absolue les intérêts
privés avaient des garanties dont ils
manquent absolument en république.
Saint*Simontrouvaitdonc une impos
sibilité absolue à saisir tous les jésuites
d'un coup de filet, ët â faire tout de
suite de leurs maisons et de leurs biens
ce que 1 a fantaisie d u pouvoir en eu t Voulu
faire. Il redoutait l'opinion publique
beaucoup plus que les ministres de la ré
publique et souhaitait au moins une rai
son de justice à donner au public. « Il
ne s'était rien passé, disait-il, sur quoi
on. ait pu je ne dis pas accuser mais
soupçonner les jésuites de brâsêer rien
contre l'Etat; nul délit, par consé
quent, sur lequel on put fonderie ban
nissement du plus obscur particulier ;
quelle violence donc à l'égard de toute
une compagnie que ces deux mes
sieurs représentaient si appuyée, si
puissante, si dangereuse; la faire aux
bout de deux règnes qui l'avaient si
constammènt favorisée ; la faire à l'en
trée d'une régence qui est toujours un
temps de ménagement et de faiblesse ;
la faire enfin par un régent accusé de
n'avoir pas de religion sans parler du
reste, et que la vie publiquement dé
bauchée et les propos peu mesurés sur
la religion rendaient infiniment moins
propre à cette exécution quand elle
serait juste et possible »!
Ces scrupules de saint Simonne sont
pas de misé aujourd'hui. Les temps
ont marché et la république ne se soucie
pas de l'opinion. Saint Simon en avait
cure et se demandait comment elle
permettrait l'exécution de cette injus
tice. Il avait l'esprit trop,borné, assu
rait-il, pour imaginer aucune manière
de l'executer : que « le tout à la fois,
comme il dit, lui semblait mathéma
tiquement impossible, que par parties,
quels cris! quels troubles! quels mou
vements dès les premiers pas! Cette
immensité de jésuites, leurs familles,
leurs écoliers et les familles de ces
écoliers, leurs pénitents et, les trou
peaux de leurs . retraites et de leurs
congrégations, les sectateurs de leurs
sermons, leurs amis et ceux de leurs
doctrines. Quel vacarme avant qu'on
eût nettoyé la province par la
quelle on aurait commencé, et quand
et comment achèverait-on dans toutes
les provinces? Où conduire ces exilés?
Hors la frontière, répondra-t-on ; mais
qui les empêchera de rentrer? Point
de mer comme en Sicile, ni de grande
muraille comme à la Chine, tout ou
vert partout, et favorisés de ce nombre
immense de tous états et de tous lieux
dont je viens de parler. »
Et en présence de toutes ces garan
ties et de ces défenses que les inté
rêts privés, nous le répétons, les
droits de la conscience et la liberté
individuelle pouvaient, en ce temps
de despotisme, élever contre l'arbi
traire ae l'autorité, Saint-Simon con
cluait : « C'est une chimère abso
lument impossible. » M. Ferry, au re
bours, va de l'avant. Il sait que sous
la république la liberté n'existe point;
les intérêts privés sont setns défense
devant les caprices d'une majorité ef
frayée et malsaine, et il psut impuné
ment, lui M. Ferry, escorté de MM.
Paul Bert et Spuller, voire mç.tne de
l'avorton de M. • Deschanel, il peut
marcher sur les droits de la _ con
science et se passer de la moindre
apparence de justice.
Saint-Simoii, continuant son dis
cours, supposait pour un instant la
violence « non - seulement faisable,
mais exécutée. » ; ,
« Que dira la cour de Rome, disait-il à
ses deux interlocuteurs autrement ins
truits et intelligents malgré leur folie
froide ou bouillante que nos députés; que
dira la cour de Rome, dont les jésuites
sont en France les plus utiles instru
ments etles plus dévoués à ses préten
tions (c'est un galiiean et un jansé
niste qui parle) et à ses ordres... Que
diront toutes les puissances catholi- .
ques chez qui tous les jésuites ont tant
de crédit? Et les peuples catholiques
de toute l'Europe, ou par la chaire,
le confessionnal, ies classes, les jé
suites, ont autant d'ârnes et de parti
sans que ces mômes moyens l»ur don
nent en France ? Que diront tous ies
ordres réguliers bénédictins, domini
cains, chanoines divers? Ne doit-on
pas juger que tous frémiront d'un coup
qui peut les frapper à leur tour, si la
fantaisie en prend: qu'ils en crain
dront ie menaçant exemple et qu'ils se
réuniront avec tout ce qui se sentira
ou se croira intéressé à l'empêcher ?
Et s'ils ën viennent à bout, quelle folie,
quelle ignominie, se sera-t-on si gra
tuitement préparée ! »
Ce n'est peut-être pas cette dernière
preuve qui toucherait beaucoup noà
ministres de la république. La folie^t
l'ignominie même peuvent-elles faire
peur à des amnistieurs de la Commune?
Mais Saint-Simon ne s'arrêtait pas là., il
continuait : « Quel péril encore, et péril
à ne plus pouvoir espérer sûreté ni
tranquillité après s'être mis le dedans
et le dehors contre soi avec ce qu'on
appelle la religion à la tête ! Je con
clus enfin que cette tentative, si bien
concertée qu'elle pût être, serait la
perte de M. le duc d'Orléans et un tel
bouleversement, que je ne voyais pas
comment ni quand on pourrait- les
calmer. » . *
Enfin, pour terminer, le duc cons
tate que ses deux interlocuteurs ne
purent répondre un seul mot à pas
une des objections qu'il venait d«
faire. Mais ils déclarèrent qu'ils n'é
taient point persuadés, et ils conti
nuaient, dit Saint-Simon, à aboyer à
la lune. Cette expression est bien irré
vérencieuse pour le grave d'Aguesseau;
«Je sortis, continue Saint-Simon, noyé
dans l'étonnement, à la recherche de
ce que le procureur général pouvait
avoir fait de son sens, de ses lumières,
de sa sagesse. »
Il n'y â pas à se noyés d'un tel
étonnemént devant les ministres de la
république : on est accoutumé à voir
le bout de leur sens, de leurs lumiè
res, de leur sagesse.
Malheureusement, ils n'aboient pas
seulement à la lune; et si la folie de
soli ami avait-pu. gagner l'esprit de
d'AgUefiseau, ennemi pf-rsonnel et par
lementaire de-la société», dit encore
l'historien, il ne faut pas s'étonner que
la folie de M. Gambetta ait gagne MM.
Ferry et les autres. Il est inutile en
core de constater qu'il n'y a pas dans
les conseillers de la république un seuS,
homme assçz intelligent pour demeurer
confondu avec Saint-Simon devant ces
extravagances. Mais il est utile, je
crois, de constater le nombre et la
puissance des contre-poids que la mo
narchie absolue apportait aux fan
taisies despotiques et folles que pou
vaient concevoir les dépositaires du
pouvoir. Le suffrage universel a tout
rasé, et le cheval de Caligula peut
être nommé consul. s
■ Léon Aobineau.
On nous écrit de Versailles (Cham
bre des députés), le 7 juillet: ,
(Suite de la discussion sur les lois Ferrv.)
Nous en sommes toujours à l'amendement
de M. Kel'er. M. de la Bassetière répond,
ainsi qu'il en avait pris l'engagement sa
medi dernier, au libelle àn citoyen Paul
Bert. Ce libelle a fait, il est vrai, sourire
de pitié tous ceux qui ont encore, avec la
vue claire des choses, quelque teirfture
d'histoire, religieuse et quelque connaissan
ce en philosophie, en psychologie et en
morale. Mais co-jnme le nombre ,des es
prits ayant une culture môme moyenne va
diminuant de jour en jour, et que des hom
mes de la force des citoyens Paul Bert,
Ferry, Spuller et autres tiennent le haut du
pavé et font l'opinion des masses populai
res, il était bon qu'on répondit à cette mau
vaise parodie des Provinciales et qu'on re
mît à leur place respective les calomnia
teurs et les calomniés.
Malgré la fatigue physique qu'il éprou
vait, fatigue que le mauvais vouloir des ré
publicains augmentait encore, le député'
vendéen a réussi dans la vaste tache qu'il
avait entreprise. Je ne veux pas dire qu'il
ait répondu à toutes les inventions et h tou
tes les calomnies des républicains : il fau
drait pour cela plusieurs discours et plu
sieurs séances; mais il a ruiné par la base
toute l'argumentation du citoyen Paul Bert,
en rappelant que le fameux recueil des Ex
traits des Assertions, livre sur lequel Pascal
s'était appuyé et que le citoyen Paul Bert
avait copié avec l'aveuglement de la haine
et de l'ignorance, n'était qu'un long tissu de
textes habilement tronqués et malignement:
dénaturés. Il n'y a pas un seul savant en
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 87.57%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 87.57%.
- Collections numériques similaires Portraits Portraits /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Portraits"Norvège. Lapon / [mission] Rabot ; [photographie] Rabot ; [reprod. par] Molteni [pour la conférence donnée par] Rabot /ark:/12148/btv1b53290490s.highres Maxence Bibié [sous-secrétaire d'Etat à l'Economie nationale et député de la Dordogne, à son bureau] : [photographie de presse] / [Agence Rol] /ark:/12148/btv1b53285387j.highres
- Auteurs similaires Portraits Portraits /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Portraits"Norvège. Lapon / [mission] Rabot ; [photographie] Rabot ; [reprod. par] Molteni [pour la conférence donnée par] Rabot /ark:/12148/btv1b53290490s.highres Maxence Bibié [sous-secrétaire d'Etat à l'Economie nationale et député de la Dordogne, à son bureau] : [photographie de presse] / [Agence Rol] /ark:/12148/btv1b53285387j.highres
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7030868/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7030868/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7030868/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7030868/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7030868
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7030868
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7030868/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest