Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1874-12-05
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 05 décembre 1874 05 décembre 1874
Description : 1874/12/05 (Numéro 2635). 1874/12/05 (Numéro 2635).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Samedi 5 Décembre 1874
H* 2635. ~ Edition qùoUdlemù!
-J('D
Samedi 5 Décembre 1874
PARIS
Un 88 fr.
Six mois 80
Trois mois 16
Le numéro, à. Paris : 15 cent.,
— Départements : 20 »
' mmMUMJX.
JParis, 10, rue des Saints-Pères.
. Oa s 'abonne, & Rome, via delle Stimate, 22,23,24.
S 1 9 Ë
DÉPARTEMENTS
Un an 88 fr.
Six mois;. 50
Trois mois. 16
Édition scail-rçrt .fldifanf
On an, 32 fr.—Six mois, 17 fr.—Trois mois, 0 fr.
U'Unlvcrt ne rëponil pas des manuscrits qui lui sont adressés.
ANNONCE»
H. Ci, LAGIUME, CEKP f 1 G'®, 6 f pliu de !s Bnni
FRANCE
PARIS, 4 DÉCEMBRE 4847
Le fond du Message, c'est qiu le
septennat est dans l'opinion arrêtée
qu'il vit au profit de tout le monde,
que tout va bien, que tout ira [de
mieux en mieux s'il continue de vi
vre, et que par conséquent son devoir
est de vivre comme il a vécu, sans
eucun changement, en dépit de toutes
contestations et quelque opinion con
traire que puissent prendre la Cham
bre et le pays. Un journal n'a pas
grand'chose à dire, contre tout cela,
ou ne peut pas le dire avec une gran
de efficacité. Que, répondre à une opi
nion si nettement formulée? Un hom
me persuadé qu'il va bien et qui peut
ne permettre à personne de prouver
qu'il va mal, est toujours sûr devoir
le dernier mot, tant qu'il vit. C'était
l'opinion de Mécênas, lequel, selon La-
fontaine, fut « galant homme ».
Qu'on me rende impotent,
Cul-de-jalte, goutteux, manchot, pourvu qu'en
[somme
je vive, o'eBt aBsez, je suis plas que content,
Ce fut aussi l'opinion d'un person
nage de comédie, habillé .de pièces et
de morceaux : sommé de choisir entre
Plusieurs genres dé mort, il délibéra
e mourir de vieillesse. Rien de plus
ancien que ce sentiment. Lafontaine
h'a fait que traduire de vieux vers
cités par Senèque, qui s'en indigne à
tort : « Rendez mes mains débiles, mes
pieds faibles et boiteux, élevez sur
mon dos une bosse, ébranlez mes
dents, tout ira bien si vous me lais
sez la vie. » Senèque demande si c'est
Ainsi que Virgile mendiait la vie :
lorsqu'il s'écriait : « Est-ce donc un si
?;rand malheur que de mourir? » Mais
e septennat répond qu'il ne mendiB
fiàs du tout la vie et qu'il saura fort
bien la prendre et qu'il fera ehcofe
ses six ans. Il faut avouer que. beau-
fcoup de gens ne manquent pas de dire
ïsomme lui, trouvant que six ans
après tout, sont une fort bonne éter
nité. L'emporteront-ils ? C'est la ques
tion. Nous croyons qu'aujourd'hui per
sonne n'est en état de la résoudre. A
côté de ceux qui veulent les six ans,
fee réservant ae voir après, beaucoup
d'autres sont plus que résolus de lais
ser aller, en curieux fatigués ou rési-
fnés. Nous serions, pour frôtre part,
e ce groupe qui n'a pas d'espérance,
et qui ne croit plus pouvoir combattre.
Quand des gens, par une raison ou par
une autre, semblent vouloir mourir,
qu'importe le temps et le genre de
mort ? C'est l'affaire de quelque acci
dent qui arrivera dans plus ou moins
de jours, probablement avant peu.
Dans une~ autre fable, la mort, inutile
ment priée d'ajourner, donne ses rai-
Sons à un mourant qui se plaint de
n'avoir pas été averti, et qui allègue
ses besognes.
Elle lui montre qu'il est à bout :
Ne te donna-t-on pas des aviB quand la oauee
Du marcher et du mouvement,
Quand les esprits, le sentiment,
Tout faillit en toi !...
Qu'est-ce que tont cela, qu'un avertissement ?
11 n'importe à la république
Que tu fasses ton testament.
On voit dans le Message beaucoup
de choses qui faillissent. On s'y réjouit
trop, ce nous semble, de la patience
•t même du contentement de l'ennemi
èxtérieur, et l'on prend trop vite sa
complaisance comme une marque de
force en nous et de bonne volonté en
lui; on se tait trop sur la situation in
térieure qui s'est révélée par les der
nières élections, et qui annonce de
prochains et terribles orages ; on se
réjouit trop de la prospérité matérielle
qui fournit tant à l'impôt et si peu à
la sécurité morale. Mais que dire à
l'illusion impérieuse qui croit vivre de
tout cela?
Nous avons peut-être tort, mais ce
message si confiant nous attriste plus
qu'aucune chose que nous ayons en
core vue depuis la guerre, en France
et ailleurs. Ce n'est pas que l'illusion
soit nouvelle, mais elle est effrayante
par sa persévérance obstinée. Rien ne
dit mieux qu'on ne voit rien à faire.
La scène fuyante de ce monde ra
mène implacablement les hommes
toujours les mêmes et toujours sem
blables sous des habits différents. Il
est affreux de voir sans cesse reparaî
tre ces mêmes nuages sans eau. Des
yeux jeunes et des oreilles inexpéri
mentées peuvent suivre avec intérêt
les formes et les bruits quotidiens de
là politique actuelle : ils croient à ses
programmes et attendent toujours quel
que chose des changements de minis
tère; mais nous qui, depuis près de
quarante ans, avons vu passer quel
ques centaines de ministères, nous
sommes bien forcés de nous apercevoir
que nous n'avons pas encore vu_un mi
nistre nouveau, un homme qui eût la
moindre miette de pain intellectuel à
mettre sous la dent ae l'humanité. Nous
disons, pas un, ni en France, ni ailleurs.
Plus les temps sont périlleux, plus les
hommes sont rares. Ils ne proposent
que fadaises et ne font que simagrées,
la plupart niaises, quelquefois horri
bles, toujours affreusement vulgaires
et toujours ayant déjà servi. Les évé
nements sont épouvantables, les hom
mes sont plats. Nous n'exceptons de ce
caractère général de frivolité et de
nullité finale aucun de ceux que nous
avons entendu nommer habiles, heu
reux et vainqueurs. Ils sont plats, ils
trahissent l'honnêteté qui les consulte,
ils se trahissent eux-mêmes.
La politique, la philosophie et la lit
térature s'agitent dans un fond sta
gnant qu'on ne sait comment décrire,
et qui semble n'être autre chose que
le sentiment et la visibilité du rien. Ce
n'est pas de l'eau, ce n'est pas du sa
ble, ce n'est pas de la fange : avec
tout cela on ferait peut-être quelque
chose; mais ils sont quelque chose
avec quoi on né peut rien faire et qui
n'est rien. Ils sont une apparence qui
produit un bruit confus. On entend
sans comprendre ; on voit sans pouvoir
définir; on touché, et on ne saisit pas.
La révolution a tiré cet être des rui
nes qu'elle a faites, et cet être est le
néant Que v sortira-t-il de ces ébats
stériles et souvent furieux? Rien, rien,
rien ! Rien partout ; rien toujours !
Toute œuvre humaine de ce temps, ou
plus tôt ou plus tard, prend rapide
ment la même pente et gagne l'im
mense avec dés riëns.Depuis un siècle
le monde y tombe et n'a pu le com-'
bler; les doctrines, les armees, les ins
titutions, les hommes, les peuples mê
me ont disparu dans l'abîme, et il
est plus profond que le premier jour.
Si avant qu'on y jette la sonde, on
n'y trouve que des fumées, et l'on ne
peut même plus dire de quel corps,
jadis puissant et énorme, ces fumees
sont le reste. *
Cette fumée, qui disparaîtra sans
laisser une trace dans les airs, atteste
combien le monde est périssable,privé
d'un certain élément qui n'est pas à
lui et qu'il n'est pas en son pouvoir
de mettre en lui. Or, qui écartera du
monde ce principe de mort totale? Qui
recomposera ces fumées qui ne sont
plus même des poussières? Qui créera
de nouveau là vie? Dans les journaux,
dans les livres, dans les Assemblées
politiques et dans les entr'acteS des
cafés chantants nous discutons là-des
sus. Nous discutons profondément,
chaleureusement, sensément, nous re
connaissant, en vertu de la loi, très
aptes à creuser la question et à la ré
soudre. Suivant la parole dite à notre
premier père, nous sommes devenus
un peuple de dieux, et nous nous sen
tons vivre par nous-mêmes. Seulement,
nous nous voyons mourir.
Louis Veuillot.
Plusieurs journaux ont laissé enten
dre que des influences parlementaires
s'étaient exercées pendant les. vacan
ces, en dehors du conseil des minis
tres, sur le maréchal de Mac-Mahon.
D'autres ont été jusqu'à faire supposer
l'existence d'une entente intime entre
le président de la République et M. le
duc de Broglie, qui ramènerait bien
tôt l'ancien vice-président du conseil
des ministres aux affaires. Depuis, il a
été dit qu'à la suite des dissentiments
soulevés au sein du cabinet sur les
termes du Message rédigé par M. le
duc Decazes, le président de la Répu
blique s'était réservé d'en faire lui-
même une nouvelle rédaction qui a
mis d'accord les ministres.
On se demande si tous ces bruits
n'ont pas quelque fondement. Le ca
ractère du Message semble prouver en
effet qu'il n'est pas l'œuvre de M. le
duc Decazes, partisan très prononcé,
dans le conseil, du vote d'urgence des
lois constitutionnelles. Certains indices
de rédaction paraissent également lui
donner une autre origine. Il est assez
remarquable que le dernier ^Message
commence de la même manière que
les Messages des 8 et 17 novembre 1873
précurseurs de la loi du 20 novembre :
tous tjois disent : Au moment où
En dehors de cette similitude de for
mule, on n'a pas de peine à recon
naître une conformité d'idées et même
une parenté de style entre le nouveau
document présidentiel et ceux dont
M. le duc ae Broglie était l'auteur.
Faut-il en conclure à une prochaine
rentrée au pouvoir de M. le duc de
Broglie, qui deviendrait l'administra
teur du « septennat personnel? »
Nous avons, hier, publié le texte du
Message en première page; mais il
nous est parvenu trop tard pour qu'il
ait pu paraître dans les premiers nu
méros du journal, tirés à destination
de la banlieue. Ceux de nos abonnés
qui, pour cette raison, n'ont pas pu
lé lire hier, le trouveront aujourd'hui
au compte rendu de la séance.
On nous écrit de Versailles, le 3 dé
cembre :
A deux heures quarante minutes, M. le
général de Cissey est monté à la tribune et a
donné, au milieu d'un profond silence, lec
ture du Message du maréchal-président à
l'Asiemblée.
Ce document est terne, brumeux, et c'est
à peine si trente ou quarante «nains du centre
droit ont eu la force d'ébaucher un applau
dissement quand la lecture a été terminée.
Quant aux autres .groupes de l'Assemblée,
après s'être efforcés à découvrir un point fixe
dans ce brouillard, ils se sont, de désespoir,
affaissés sur eux-mêmes, et pendant quelque
temps n'ont plus donné signe de vie.
L'Assemblée n 'est sortie de cet état d'af
faissement et n'est revenue à elle que quand
M. Buffet, conformément à l'ordre du jour,
a appelé la discussion de la loi sur la liberté
de l'enseignement supérieur.
Alors M. Paul Bert, un des oracles scien
tifiques de la gauche radicale, est monté à la
tribune et, dans un discours longtemps mé
dité, a combattu le projet de la commission
non pas de face, non pas directement, mais
de côté et par des moyens tortueux et pleins
de ruse. Quand un conventionnel ne pent pas
impunément s'attaquer & la tête de son ad
versaire, il rampe dans l'ombre et essaye de le
mordre au talon.
Certes M. Paul Bert, en sa qualité de jaco
bin, est ami de la liberté d'enseignement, li
berté qui a été, prétend-il, proclamée pour
la première fois par la Convention ; mais (il
y a un mais et un gros mais encore) il a peur
qu'elle n'ait pour résultat d'exciter à la
guerre civile.
Si cette appréhension lui vient de la con
naissance qu'il a d'un certain enseignement
et deis fruits qu'il produit, nous reconnais
sons qu'elle n'est pas sans fondement. Il est
évident que les petits maratistes que fait cha
que jour l'Université sont peu disposés & res
pecter la liberté d'autrui ; ce sont autant de
jeunes tyrans qui n'aspirent qu'à marcher sur
les traces des bêtes féroces de 93 et à inau
gurer une Terreur plus sanguinaire et plus
terrible que la première.
De ce côté donc M. Paul Bert a raison de
craindre ; mais s'il veut bien examiner avec
quelque attention la conduite que tiemient
les élèves qui sortent des maisons d'éduca
tion catholique, il se convaincra facilement
que, loin d'être un élément de guerre civile,
éette jeunesse paisible et studieuse en est au
contraire la courageuse ennemie. Oh trouve
bien, il est vrai, nos fils catholiques sur les
champs de bataille, en face de l'ennemi, mais
jamais parmi les émeutiers.
Et si M. Paul Bert éprouve pour la guerre
civile toute l'horreur qu'il nous dit éprouver,
il devrait, pour être logique, au lieu dë l'en
traver, favoriser le plus, possible l'enseigne
ment catholique et conseiller aux familles de
lui confier leurs enfants ; ce serait uh excellent
moyen et d'augmenter le nombre dés braves
et de diminuer celui des émeutiers, des fusil-
lards et des incendiaires. S'il s'y refuse, nous
en conclurons qu'il n'a agité le spectre de la
guerre civile que pour frapper au cœur la li.
berté ; cé qui nous prouverait une fois de
plus que tout radical, quels que soient les dé
guisements sous lesquels il se cache, ne vise
qu'à la dictature absolue.
Dans plusieurs endroits de son long dis
cours, M. Paul Bert n'a pu dissimuler, mal
gré l'empire qu'il a sur lui-même, ses sym
pathies pour l'Allemagne. Il a, à plusièars
reprises, insisté sur la prétendue infériorité
de notre enseignement supérieur comparé à
celui de nos aimables voisins, et nous a pa-
Iriotiquement invités à prendre les Universi
tés allemandes pour modèles. Il est allé en
core plus loin. Il s'est permis d'évoquér l'au
torité de M. de Bois-Remond, l'âme damnée
de M. de Bismarck, celui qui souffle dans le
peuple allemànd la haine et le mépris de la
France, celui qui, il y à quelque temps, de
mandait pardon à ses auditeurs de citer un
nom français.
-On voit d'ailleurs que les connaissances de
M. Paul Bert sont à la hauteur de ses scru
pules patriotiques. Car tout ce qu'il nous a
dit des universités allemandes est aussi fondé
que son éloge de la Convention.
Mgr l'évêque d'Orléans allait répondre à
l'orateur de la gauche ; mais M. de Labou-
laye ayant demandé la parole en sa qualité
de rapporteur, Mgr Dupanloup s'est retiré.
M. de Laboulaye, disons-le à sa louange, a
parlé en honnête homme et en homme pra
tique. Blessé des comparaisons déplacées de
M. Paul Bert, il s'est plu à jeter de l'eau
froide sur son enthousiasme pour l'Allema
gne enseignante, et lui a rappelé qu'il était au
moins imprudent de parler de la liberté alle
mande en ce moment. Ensuite, replaçant la
question sur son véritable terrain, il a dé
montré la justice et la nécessité de là loi pro
posée. Puis il a terminé son spirituel discours
par faire justice des préjugés que nourrit
M. Paul Bert à l'égard de l'enseignement ca-
holiqué, et que M. Beaussire allait , exploiter
encore.
Quand les c&tholiques s'attaquent
au monopole universitaire, c'est l'or
dinaire, bien qu'ils ne parlent pas
sans preuves, de suspecter leurs juge
ments comme entachés de parti pris.
Mais quelles réclamations pourront
élever les partisans du monopole con
tre des hommes comme M. Paul Bert,
M. Beaussire, M. Laboulayë lui-même,
qui, tous universitaires, se sont char
gés hier de faire le procès à l'ensei
gnement supérieur, tel qu'il est con
stitué?
Il est impossible, croyons-nous,d'ex
poser avec plus de force que ne l'ont
fait ces trois orateurs l'état misérable
où se trouve réduit cet enseignement.
Pas de bâtiments, pas de collections ni
de bibliothèques, pas de professeurs ou
des professeurs médiocres, par *uite,
Sas de cours, ou des cours mal faits,
nalement pas d'élèves, tel est le glo
rieux bilan de l'enseignement supé
rieur tel que l'a / fait le monopole, dressé
par des hommes que certes l'on n'accu
sera pas d'être ses ennemis.
On ne peut donc plus nier le mal
et il y faut un remède. Mus par des
considérations plus hautes que le souci
de soutenir une organisation intellec
tuelle dont les dangers sont publics
et dont ils ne sauraient rien attendre,
les catholiques réclament une loi qui
les mette à même de se soustraire à
cette oppression des écoles d'Etat.
Ont-ils tort? M. Laboulaye répond :
« Les catholiques ont parfaitement le
droit d'exiger que l'enseignement se
donne dans un sens catholique. »
Or, il est manifeste que l'enseigne
ment dans la plupart des écoles de,
l'Etat se donne dans un sens non-seu
lement étranger, mais directement
contraire aux vérités catholiques. Et
comment les catholiques feront-ils
respecter leur droit s'ils ne sont point
autorisés à recevoir l'enseignement
dans des établissements où la religion
ne soit point baffouée? La conséquence
naturelle, c'est qu'on leur doit oc
troyer en ces matières une entière
liberté. ^
C'est aussi la seule chose dont ne
veulent point ceux-là mêmes qui,com
me MM. Paul Bert et Beaussire, con
viennent d'ailleurs le mieux du mon
de des tristes résultats du monopole.
Le dernier de ces deux orateurs,
sentant à merveille où gisait la
condition essentielle de la liberté,
feint pour elle une grande tendresse ;
mais à aucun prix il ne voudrait ac
corder aux facultés nouvelles la colla
tion des grades. Le but de cette résis
tance, on le devine. M. Beaussire sait
bien que si les facultés d'Etat conser
vent le monopole de conférer! les gra
des, c'ëst du même coup supprimer
toute vraie liberté.
Encore qu'il soit plus acharné, s'il
est possible, contre" l'énseignementca-
tholique, M. Paul Bert a pourtant con
damné par avance cette injustice.
Examinant le cas où les professeurs
des facultés d'Etat seraiènt appelés à
examiner lès élèves des facultés libres,
il déclare « qu'il serait loin de consi
dérer cela comme une chose bonne et
juste ». Nous retenons ce mot et ne
voulons pas examiner si M. Paul Bert
est un partisan bien sincère de la li
berté lorsque, la vantant outre mesure
en principe, il insiste en fait sur les
déplorables conséquences qu'elle aura
pour le niveau des études en général
et l'enseignement universitaire en par
ticulier.
Ayant lui-même conscience de la
faiblesse d'une argumentation sem
blable, il s'est avisé d'une manœuvre
qu'il juge sans doute devoir être plus
efficace sur l'esprit de la Chambre.
Par une tactique qui n'est pas diffi
cile à pénétrer, il a réclamé la liberté
pour tout le monde de tout enseigner,
faisant ainsi d'une licence que per
sonne n'admet un épouvantail devant
les regards de ceux qui songent t à
faire jouir les catholiques d'une sage
liberté. En un mot, ce que veut M.
Paul Bert, ce n'est pas la liberté,
mais uné pétaudière. On peut? croire
que ce progrès 'n'est pas souhaitable
et néanmoins se juger fort libéral sans
être suspect d'intolérance, on peut
fort bien, par exemple, reconnaître le
droit d'universités catholiques au libre
enseignement des doctrines de l'Eglise
sur le mariage, tout en le refusant
au mormonisme.
AUOUSTB RODBSBI i.
Notre correspondant de Constantino-
ple nous annonce que l'interdiction
dont V Univers avait été frappé dans
l'empire ottoman, vient d'être levée.
Allons, les Turcs ont encore du bon;
leurs suspensions du moins ont le mé
rite d'être plus brèves que celles que
nous infligent ici des ministres li
béraux et parlementaires. Pourvu
qu'elles ne soient pas, comme ici,
trop rapprochées!
On lit dans le Moniteur
Le projet dé loi sur la presse sera déposé
lundi sur le bureau de l'Assemblée. Ce'pro-
jet contiendra des dispositions dont l'adop
tion par la Chambre pourra permettre au
gouvernement la levée immédiate de l'état de
siège.
Ces informations semblent plus sé
rieuses que celles du Français sur le
même sujet. Nous n'avons donc aucu
ne raison pour ne pas y croire.
Malgré les camouflets qu'ils reçoi
vent journellement des radicaux, les
républicains dits modérés ne veulent
pas rompre avec ces dangereux alliés.
Dans le quartier de la Chaussée-d'An-
tin, M. Delacourtie, républicain modé
ré, maintient sa candidature contre M.
Meunier, candidat conservateur, con
seiller sortant, et il accepte l'appui
compromettant du comité qui patron
nait le candidat radical, M. Vauzy.
Dans le quartier de la Muette, le ré
publicain modéré, M. Leroy-Beaulieu,
rédacteur du Journal des Débats, dont
l'intervention inopportune a empêché
M. Davrillé des Essarts, candidat con
servateur, de passer au premier tour
de scrutin, se désiste ; mais il se garde
bien de faire aucune recommandation
à ses électeurs, et le Journal des Dé
bats enregistre ainsi son désiste
ment :
M. Paul Leroy-Beaulieu remercie les élec
teurs du quartier de la Muette qui ont voté
pour lui dans le scrutin du dimanche 29 no
vembre, et retire sa candidature pour le
scrutin de ballottage du dimanche 6 dé
cembre.
Recommander la candidature radi
cale, ce serait trop compromettant;
recommander la candidature conser
vatrice, ce serait froisser les radicaux,
qui ont tant de ménagements pour
les républicains modérés; on se tait,
et le tour est joué. Le Journal des Dé
bats est coutumier de ces finesses.
Un fait peutrêtre plus curieux en
core que le silence prudent de M. Le
roy-Beaulieu, c'est l'attitude du Moni
teur universel , qui se déclare satisfait.
« Le caractère loyal de M. Leroy-Beau
lieu ne nous avait laissé aucun doute
à cet égard, » dit l'ex feuille officielle.
C'est avoir la satisfaction facile; mais,
en prévision de la conjonction des
centres, il est bon de se ménager le
Journal des Débats et ses amis.
Il y a quelques jours nous citions
d'édifiantes paroles du Siècle relatives
aux obstacles que rencontre le fabu
liste Carteret dans la réalisation de
son dessein d'en « finir avec les ul-
tramontairis. » Voici qui n'est pas
moins édifiant.
On se rappelle qu'au commence
ment de la guerre, un jeune gentils-
homme, M. de Moneys, fut brûlé vif
par des paysans de la Dordogne ; les
excitations des feuilles radicales et offi
cieuses avaient porte leurs fruits. Or,
un journal a trouvé bon de rappeler
ce crime odieux, et il le fait dans les
termes suivants :
Qui ne se souvient que dans des mêmes
contrées, il y a quelques années, uu proprié
taire d'ancienne famille fut impitoyablement
massacré par les paysans ameutés, à qui on
avait fait croire qu'il souhaitait le rétablisse-
ment.des anciens droits seigneuriaux ? C'est
le souvenir des dames de Théon et autres qui
entretient dans hos populations rurales cette
haine invétérée contre l'ancien régime.
Ces lignes, qui ne vont à rien moins
qu'à justifier un crime épouvantable,
sont extraites du Journal des Débats et
signées Eugène Yung. Ils vont bien
messieurs Tes républicains modérés,
lorsque la peur les pousse.
Et pour amener cette honnête inter-
Êrétation, M. Yung a dû fausser dou-
lement les faits : il a transporté dans
la Charente-Inférieure un crime qui
avait eu lieu dans la Dordogne, et il
a attribué à la « haine contre l'ancien
régime» un crime provoqué par les
accusations de trahison portées, à l'an
noncé de nos premiers désastres, con
tre les catholiques, contre ceux-là mê
mes qui se sont le plus vaillamment
battus et qui à Orléans, à Loigny, au
Mans, ont couvert la retraite de nos
armées.
- On lit dans le Journal de Paris :
Du moment que le centre droit avait pro
mis ses voix à M. de Kerdrel et à M. Benoist-
d'Azy, à la condition que la droite tout en
tière voterait pour M. d'Audiffret, la droite
tout entière devait voter pour M. d'Audif
fret...
Et quand il s'agit d'un homme de la valeur
de M. d'Audiffret, ne pas tenir un engage
ment est à la fois déloyal et ridicule.
Avant d'accuser ainsi, le Journal de
Paris aurait dû se rappeler que les en
gagements de la droite modérée lais
saient l'extrême droite parfaitement
libre; elle n'avait rien promis et ne
tenait pas beaucoup plus au succès de
M. dë Kerdrbl qu'a celui de M. le duc
d'Audiffret-Pasquier.
Nous ne voulons pas imiter le lan
gage du Journal de Paris et qualifier
cet oubli assez étrange d'une circon
stance pourtant importante : nous
nous bornons à le signaler;
On lit dans une correspondance pa
risienne de Y Indépendance belge :
M. l'abbé Jourdan, vicaire général de Pa
ris, est nommé à l'évêché de Tarhes, en rem
placement de M. Langénieux, promu à l'ar
chevêché de Reims. M. l'abbé Jourdan était,
en 1870, un catholique libéral, adversaire de
l'infaillibilité du Pape. L'archevêque de Pa
ris, M. Darboy, l'avait emmené avec lui au
concile. Tous les amis du nouvel évêque sont
persuadés que, dans le fond, il n'a pas changé
d'opinion, tout en modifiant son attitude ex
térieure.
Les abbés interdits et masqués qui
collaborent à Y Indépendance belge ca
lomnient sciemment le nouvel évêque
de Tarbes. M. l'abbé Jourdan n'a ja
mais donné sujet de penser qu'il était
un adversaire de l'infaillibilité. Ce qui
n'est pas douteux, c'est qu'il en sera
le défenseur.
On nous adresse la note suivante :
lê Journal de Florence et mgr dupanloup
Vous avez reproduit dans votre numéro du
2 décembre la lettre écrite au Journal de
Florence , le 26 novembre, par Mgr Dupan
loup. Cette lettre commence ainsi : « Vous
avez bien voulu publier sur ma lettre à
M. Minghetti des articles dont je ne puis que
vous être reconnaissant... »
Or, dans son numéro du 18 novembre, le
Journal de Florence insérait une lettre à lui
adressée par un catholique de distinction, qui
se plaint n de l'attitude prise par le Journal
de Flêrence , en certaines circonstances, par
ticulièrement au sujet de YOrénoque, et, ces
jours-ci, & propos de la lettre de Mgr l'évê
que d'Orléans, »
Le Journal de Florence répond longuement
aux deux griefs. Je laisse de côté ce qui con
cerne YOrénoque. Touchant la lettre à M. Min
ghetti, voici les principaux passages de l'ar
ticle :
« Quant au tribut d'éloges que j'ai payé à
la lettre à M. Minghetti , j'y vois encore moins
possibilité de m'accuser. Bien avant que ja
ne prisse la plume pour dire ma pensée sur
ce livre, Pie IX adressait à son auteur un
bref de félicitations... Mais,"dira-t-on, le Pape
n'a pas loué la conclusion de Mgr Dupan
loup. Ls Journal de Florence ne l'a pas louée
non plus : il a dit qu'elle était inacceptable au
point de vue de l'Eglise. Le Pape a entendu
seulement encourager et bénir l'évêque d'Or
léans pour les vérités qu'il a fait retentir aux
oreilles de nos'ministres. Le Journal de Flo
rence en a fait autant.
a .Le catholicisme libéral est bien et dû
ment condamné par le Vatican. S'il existe
encore des hommes ' de cette nuance, il faut
qu' ls se résignent à leur triste sort et passent
dans le camp des ennemis de l'Eglise... M ai m
l'Eglise, en foudroyant le catholicisme libé
ral, n'a dressé aucune liste de catholiques
libéraux et n'a chargé personne de la dresser
pour elle...
n Le mieux dans cette rencontre est déju
ger les livres par ce qu'ifs contiennent et les
hommes par ce qu'ils font, sans recourir à
leur passé, qui peut être réparé par un noble
repentir, sans trop nous préoccuper de leur
avenir, qui peut être signalé par des rechutes.
Si un catholique vient à nous, rie cherchons
pas s'il a appartenu yn jour au catholicisme
libéral, ne lé repoussons pas dans la crainte
qu'il puisse y appartenir le jour aprèi. Eth-
brassons-le et faisons lui l'accueil que nom
devons à un frère : c'est encore le meilleur
moyen de l'arracher à l'erreur, de l'attacher
pour l'avenir à la cause de la vérité.
« Imitons l'Eglise, toujours plus prompte
à pardonner qu'à condamner, toujours iné
branlable sur le terrain des doetrines et tou
jours clémente envers les hommes ; armée de
compassion pour la pécheur et ne désirant
rien mieux que de le voir revenir à elle. . »
Puisque Mgr Dupanloup se déclare recon ■
naissant des articles du Journal de "Flo
rence, nous espérons que les feuilles au ser
vice da prélat, et notamment les Annales reli
gieuses d'Orléans, reproduiront les textes ci-
dessus, fidèlement extraits du numéro du
18 novembre. '
Nous avons publié une dépêche de
l'Agence carliste nous signalant la
vaillante attitude des soldats dé l'ar
mée royale, qui gardent leur belle hu
meur, malgré les privations et le froid,
privés qu'ils sont, pour la plupart, des
couvertures qui leur seraient si néces
saires. A cette constance doit répondre
un nouvel effort de la charité. Ceux de
nos lecteurs qui le peuvent auront à
cœur de verser leur offrande, si légère
qu'elle soit, pour venir en aide à une
pénurie que l'approche de l'hiver rend
chaque jour plus rigoureuse.
Remises entre les mains de Mme la
duchesse de Madrid, ces souscriptions,"
transformées en vêtements dont man
quent aussi bien les blessés que les
soldats, iront droit aux combattants de
la bonne cause. Ne leur refusons pas
ces étrennes, qui, pour eux, sont loin
d'être du superflu.
Lettres de Rome
Rome, 30 novembre.
Le Pape, que l'on disait indisposé,
se trouve parfaitement, plein d'éner
gie et de douceur, de confiance et de
résignation. Rarement un vieillard a
été plus beau à voir. Hier le temps
était doux, le soleil resplendissant, Pie
IX traversait les galeries du Vatican
pour se rendre au jardin; plusieurs
femmes étrangères se sont trouvées
sur son passage. Comme elles s'age
nouillaient autour de lui, il.s'est arrê
té et leur a parlé. On n'entendait point
ses paroles, mais on comprenait à son
geste, à son attitude, à son sourire le
sens de son discours* Il était coiffé de
son chapeau rouge, avait sur les épau
les son manteau de pourpre frangé
d'or, s'appuyait légèrement de la main
gauche sur sa canne et étendait la
main droite vers les pieuses femmes
qu'il allait bénir. Quel sujet pour un
peintre que le Pape au milieu de ce
groupe, dans ces galeries peuplées de
statues antiques, ornées de tombeaux
et d'inscriptions ! Sentir et goûter ces
choses, pouvoir en jouir, c'est là> en
grande partie, ce qui tempère la dou
leur d'être à Rome en ce moment, ce
qui console du spectacle honteux de la
Rome révolutionnaire, ce qui fait es
pérer des jours meilleurs.
Aujourd'hui Sa Sainteté a reçu en
audience de congé Mgr Pichenot, ar
chevêque de Chanibery, qui quitte
Rome demain. Elle a aussi regu une
seconde fois M.L. Chevojon, l'excellent
curé de Notre-Dame des Victoires, ac-
compagnédeM. l'abbéDumax, son pieux
vicaire* sous-dirêcteur général de l'ar-
chi-confrérie, qui lui ont offert la bel
le copie de la statue de la Vierge si ar-
tistement modelée par M. Auguste
Geffroy. Pie IX a eu les paroles les
plus aimables et a beaucoup loué ls
dévotion des bons Français envers
Notre-Dame des Victoires, il sait l'his
toire de cette dévotion et des prodiges
qu'ellé opère continuellement non-
seulement en France, mais dans le
mohde.
Le Pape voit l'état affreux dans le
quel la France est tombée, mais
il voit aussi ce que la foi et la piété
ont d'attrait et de puissance dans notre
pays, èt c'est pour cela qu'il ne déses
père point de nous et qu'il nous bénit
avec tant de tendresse.
Je suis allé aujourd'hui au sémi
naire français, à Santâ-Chiara, jevoulais
présenter mes hommages à l'évêque
ae Bâle. Mgr Lâchât ne s'y trouvait
point. Les Suisses du Vatican l'avaient
supplié de venir dîner avec eux, et il
s'était rendu à leur invitation. Je don
ne ce détail avec intention. Nos lec
teurs, ceux dé Suisse surtout, verront
en esprit ce saint évêque persécuté, au
milieu de ses compatriotes fidèles, qui
partagent si noblement et si courageu
sement la captivité de Pie IX. Quelle
figure que celle de Mgr Lâchât, et
comme on sent bien en,le voyant
qu'on se trouve devant un saint !
On attend à Rome NN. SS. de Séez
et de Rodez.
H* 2635. ~ Edition qùoUdlemù!
-J('D
Samedi 5 Décembre 1874
PARIS
Un 88 fr.
Six mois 80
Trois mois 16
Le numéro, à. Paris : 15 cent.,
— Départements : 20 »
' mmMUMJX.
JParis, 10, rue des Saints-Pères.
. Oa s 'abonne, & Rome, via delle Stimate, 22,23,24.
S 1 9 Ë
DÉPARTEMENTS
Un an 88 fr.
Six mois;. 50
Trois mois. 16
Édition scail-rçrt .fldifanf
On an, 32 fr.—Six mois, 17 fr.—Trois mois, 0 fr.
U'Unlvcrt ne rëponil pas des manuscrits qui lui sont adressés.
ANNONCE»
H. Ci, LAGIUME, CEKP f 1 G'®, 6 f pliu de !s Bnni
FRANCE
PARIS, 4 DÉCEMBRE 4847
Le fond du Message, c'est qiu le
septennat est dans l'opinion arrêtée
qu'il vit au profit de tout le monde,
que tout va bien, que tout ira [de
mieux en mieux s'il continue de vi
vre, et que par conséquent son devoir
est de vivre comme il a vécu, sans
eucun changement, en dépit de toutes
contestations et quelque opinion con
traire que puissent prendre la Cham
bre et le pays. Un journal n'a pas
grand'chose à dire, contre tout cela,
ou ne peut pas le dire avec une gran
de efficacité. Que, répondre à une opi
nion si nettement formulée? Un hom
me persuadé qu'il va bien et qui peut
ne permettre à personne de prouver
qu'il va mal, est toujours sûr devoir
le dernier mot, tant qu'il vit. C'était
l'opinion de Mécênas, lequel, selon La-
fontaine, fut « galant homme ».
Qu'on me rende impotent,
Cul-de-jalte, goutteux, manchot, pourvu qu'en
[somme
je vive, o'eBt aBsez, je suis plas que content,
Ce fut aussi l'opinion d'un person
nage de comédie, habillé .de pièces et
de morceaux : sommé de choisir entre
Plusieurs genres dé mort, il délibéra
e mourir de vieillesse. Rien de plus
ancien que ce sentiment. Lafontaine
h'a fait que traduire de vieux vers
cités par Senèque, qui s'en indigne à
tort : « Rendez mes mains débiles, mes
pieds faibles et boiteux, élevez sur
mon dos une bosse, ébranlez mes
dents, tout ira bien si vous me lais
sez la vie. » Senèque demande si c'est
Ainsi que Virgile mendiait la vie :
lorsqu'il s'écriait : « Est-ce donc un si
?;rand malheur que de mourir? » Mais
e septennat répond qu'il ne mendiB
fiàs du tout la vie et qu'il saura fort
bien la prendre et qu'il fera ehcofe
ses six ans. Il faut avouer que. beau-
fcoup de gens ne manquent pas de dire
ïsomme lui, trouvant que six ans
après tout, sont une fort bonne éter
nité. L'emporteront-ils ? C'est la ques
tion. Nous croyons qu'aujourd'hui per
sonne n'est en état de la résoudre. A
côté de ceux qui veulent les six ans,
fee réservant ae voir après, beaucoup
d'autres sont plus que résolus de lais
ser aller, en curieux fatigués ou rési-
fnés. Nous serions, pour frôtre part,
e ce groupe qui n'a pas d'espérance,
et qui ne croit plus pouvoir combattre.
Quand des gens, par une raison ou par
une autre, semblent vouloir mourir,
qu'importe le temps et le genre de
mort ? C'est l'affaire de quelque acci
dent qui arrivera dans plus ou moins
de jours, probablement avant peu.
Dans une~ autre fable, la mort, inutile
ment priée d'ajourner, donne ses rai-
Sons à un mourant qui se plaint de
n'avoir pas été averti, et qui allègue
ses besognes.
Elle lui montre qu'il est à bout :
Ne te donna-t-on pas des aviB quand la oauee
Du marcher et du mouvement,
Quand les esprits, le sentiment,
Tout faillit en toi !...
Qu'est-ce que tont cela, qu'un avertissement ?
11 n'importe à la république
Que tu fasses ton testament.
On voit dans le Message beaucoup
de choses qui faillissent. On s'y réjouit
trop, ce nous semble, de la patience
•t même du contentement de l'ennemi
èxtérieur, et l'on prend trop vite sa
complaisance comme une marque de
force en nous et de bonne volonté en
lui; on se tait trop sur la situation in
térieure qui s'est révélée par les der
nières élections, et qui annonce de
prochains et terribles orages ; on se
réjouit trop de la prospérité matérielle
qui fournit tant à l'impôt et si peu à
la sécurité morale. Mais que dire à
l'illusion impérieuse qui croit vivre de
tout cela?
Nous avons peut-être tort, mais ce
message si confiant nous attriste plus
qu'aucune chose que nous ayons en
core vue depuis la guerre, en France
et ailleurs. Ce n'est pas que l'illusion
soit nouvelle, mais elle est effrayante
par sa persévérance obstinée. Rien ne
dit mieux qu'on ne voit rien à faire.
La scène fuyante de ce monde ra
mène implacablement les hommes
toujours les mêmes et toujours sem
blables sous des habits différents. Il
est affreux de voir sans cesse reparaî
tre ces mêmes nuages sans eau. Des
yeux jeunes et des oreilles inexpéri
mentées peuvent suivre avec intérêt
les formes et les bruits quotidiens de
là politique actuelle : ils croient à ses
programmes et attendent toujours quel
que chose des changements de minis
tère; mais nous qui, depuis près de
quarante ans, avons vu passer quel
ques centaines de ministères, nous
sommes bien forcés de nous apercevoir
que nous n'avons pas encore vu_un mi
nistre nouveau, un homme qui eût la
moindre miette de pain intellectuel à
mettre sous la dent ae l'humanité. Nous
disons, pas un, ni en France, ni ailleurs.
Plus les temps sont périlleux, plus les
hommes sont rares. Ils ne proposent
que fadaises et ne font que simagrées,
la plupart niaises, quelquefois horri
bles, toujours affreusement vulgaires
et toujours ayant déjà servi. Les évé
nements sont épouvantables, les hom
mes sont plats. Nous n'exceptons de ce
caractère général de frivolité et de
nullité finale aucun de ceux que nous
avons entendu nommer habiles, heu
reux et vainqueurs. Ils sont plats, ils
trahissent l'honnêteté qui les consulte,
ils se trahissent eux-mêmes.
La politique, la philosophie et la lit
térature s'agitent dans un fond sta
gnant qu'on ne sait comment décrire,
et qui semble n'être autre chose que
le sentiment et la visibilité du rien. Ce
n'est pas de l'eau, ce n'est pas du sa
ble, ce n'est pas de la fange : avec
tout cela on ferait peut-être quelque
chose; mais ils sont quelque chose
avec quoi on né peut rien faire et qui
n'est rien. Ils sont une apparence qui
produit un bruit confus. On entend
sans comprendre ; on voit sans pouvoir
définir; on touché, et on ne saisit pas.
La révolution a tiré cet être des rui
nes qu'elle a faites, et cet être est le
néant Que v sortira-t-il de ces ébats
stériles et souvent furieux? Rien, rien,
rien ! Rien partout ; rien toujours !
Toute œuvre humaine de ce temps, ou
plus tôt ou plus tard, prend rapide
ment la même pente et gagne l'im
mense avec dés riëns.Depuis un siècle
le monde y tombe et n'a pu le com-'
bler; les doctrines, les armees, les ins
titutions, les hommes, les peuples mê
me ont disparu dans l'abîme, et il
est plus profond que le premier jour.
Si avant qu'on y jette la sonde, on
n'y trouve que des fumées, et l'on ne
peut même plus dire de quel corps,
jadis puissant et énorme, ces fumees
sont le reste. *
Cette fumée, qui disparaîtra sans
laisser une trace dans les airs, atteste
combien le monde est périssable,privé
d'un certain élément qui n'est pas à
lui et qu'il n'est pas en son pouvoir
de mettre en lui. Or, qui écartera du
monde ce principe de mort totale? Qui
recomposera ces fumées qui ne sont
plus même des poussières? Qui créera
de nouveau là vie? Dans les journaux,
dans les livres, dans les Assemblées
politiques et dans les entr'acteS des
cafés chantants nous discutons là-des
sus. Nous discutons profondément,
chaleureusement, sensément, nous re
connaissant, en vertu de la loi, très
aptes à creuser la question et à la ré
soudre. Suivant la parole dite à notre
premier père, nous sommes devenus
un peuple de dieux, et nous nous sen
tons vivre par nous-mêmes. Seulement,
nous nous voyons mourir.
Louis Veuillot.
Plusieurs journaux ont laissé enten
dre que des influences parlementaires
s'étaient exercées pendant les. vacan
ces, en dehors du conseil des minis
tres, sur le maréchal de Mac-Mahon.
D'autres ont été jusqu'à faire supposer
l'existence d'une entente intime entre
le président de la République et M. le
duc de Broglie, qui ramènerait bien
tôt l'ancien vice-président du conseil
des ministres aux affaires. Depuis, il a
été dit qu'à la suite des dissentiments
soulevés au sein du cabinet sur les
termes du Message rédigé par M. le
duc Decazes, le président de la Répu
blique s'était réservé d'en faire lui-
même une nouvelle rédaction qui a
mis d'accord les ministres.
On se demande si tous ces bruits
n'ont pas quelque fondement. Le ca
ractère du Message semble prouver en
effet qu'il n'est pas l'œuvre de M. le
duc Decazes, partisan très prononcé,
dans le conseil, du vote d'urgence des
lois constitutionnelles. Certains indices
de rédaction paraissent également lui
donner une autre origine. Il est assez
remarquable que le dernier ^Message
commence de la même manière que
les Messages des 8 et 17 novembre 1873
précurseurs de la loi du 20 novembre :
tous tjois disent : Au moment où
En dehors de cette similitude de for
mule, on n'a pas de peine à recon
naître une conformité d'idées et même
une parenté de style entre le nouveau
document présidentiel et ceux dont
M. le duc ae Broglie était l'auteur.
Faut-il en conclure à une prochaine
rentrée au pouvoir de M. le duc de
Broglie, qui deviendrait l'administra
teur du « septennat personnel? »
Nous avons, hier, publié le texte du
Message en première page; mais il
nous est parvenu trop tard pour qu'il
ait pu paraître dans les premiers nu
méros du journal, tirés à destination
de la banlieue. Ceux de nos abonnés
qui, pour cette raison, n'ont pas pu
lé lire hier, le trouveront aujourd'hui
au compte rendu de la séance.
On nous écrit de Versailles, le 3 dé
cembre :
A deux heures quarante minutes, M. le
général de Cissey est monté à la tribune et a
donné, au milieu d'un profond silence, lec
ture du Message du maréchal-président à
l'Asiemblée.
Ce document est terne, brumeux, et c'est
à peine si trente ou quarante «nains du centre
droit ont eu la force d'ébaucher un applau
dissement quand la lecture a été terminée.
Quant aux autres .groupes de l'Assemblée,
après s'être efforcés à découvrir un point fixe
dans ce brouillard, ils se sont, de désespoir,
affaissés sur eux-mêmes, et pendant quelque
temps n'ont plus donné signe de vie.
L'Assemblée n 'est sortie de cet état d'af
faissement et n'est revenue à elle que quand
M. Buffet, conformément à l'ordre du jour,
a appelé la discussion de la loi sur la liberté
de l'enseignement supérieur.
Alors M. Paul Bert, un des oracles scien
tifiques de la gauche radicale, est monté à la
tribune et, dans un discours longtemps mé
dité, a combattu le projet de la commission
non pas de face, non pas directement, mais
de côté et par des moyens tortueux et pleins
de ruse. Quand un conventionnel ne pent pas
impunément s'attaquer & la tête de son ad
versaire, il rampe dans l'ombre et essaye de le
mordre au talon.
Certes M. Paul Bert, en sa qualité de jaco
bin, est ami de la liberté d'enseignement, li
berté qui a été, prétend-il, proclamée pour
la première fois par la Convention ; mais (il
y a un mais et un gros mais encore) il a peur
qu'elle n'ait pour résultat d'exciter à la
guerre civile.
Si cette appréhension lui vient de la con
naissance qu'il a d'un certain enseignement
et deis fruits qu'il produit, nous reconnais
sons qu'elle n'est pas sans fondement. Il est
évident que les petits maratistes que fait cha
que jour l'Université sont peu disposés & res
pecter la liberté d'autrui ; ce sont autant de
jeunes tyrans qui n'aspirent qu'à marcher sur
les traces des bêtes féroces de 93 et à inau
gurer une Terreur plus sanguinaire et plus
terrible que la première.
De ce côté donc M. Paul Bert a raison de
craindre ; mais s'il veut bien examiner avec
quelque attention la conduite que tiemient
les élèves qui sortent des maisons d'éduca
tion catholique, il se convaincra facilement
que, loin d'être un élément de guerre civile,
éette jeunesse paisible et studieuse en est au
contraire la courageuse ennemie. Oh trouve
bien, il est vrai, nos fils catholiques sur les
champs de bataille, en face de l'ennemi, mais
jamais parmi les émeutiers.
Et si M. Paul Bert éprouve pour la guerre
civile toute l'horreur qu'il nous dit éprouver,
il devrait, pour être logique, au lieu dë l'en
traver, favoriser le plus, possible l'enseigne
ment catholique et conseiller aux familles de
lui confier leurs enfants ; ce serait uh excellent
moyen et d'augmenter le nombre dés braves
et de diminuer celui des émeutiers, des fusil-
lards et des incendiaires. S'il s'y refuse, nous
en conclurons qu'il n'a agité le spectre de la
guerre civile que pour frapper au cœur la li.
berté ; cé qui nous prouverait une fois de
plus que tout radical, quels que soient les dé
guisements sous lesquels il se cache, ne vise
qu'à la dictature absolue.
Dans plusieurs endroits de son long dis
cours, M. Paul Bert n'a pu dissimuler, mal
gré l'empire qu'il a sur lui-même, ses sym
pathies pour l'Allemagne. Il a, à plusièars
reprises, insisté sur la prétendue infériorité
de notre enseignement supérieur comparé à
celui de nos aimables voisins, et nous a pa-
Iriotiquement invités à prendre les Universi
tés allemandes pour modèles. Il est allé en
core plus loin. Il s'est permis d'évoquér l'au
torité de M. de Bois-Remond, l'âme damnée
de M. de Bismarck, celui qui souffle dans le
peuple allemànd la haine et le mépris de la
France, celui qui, il y à quelque temps, de
mandait pardon à ses auditeurs de citer un
nom français.
-On voit d'ailleurs que les connaissances de
M. Paul Bert sont à la hauteur de ses scru
pules patriotiques. Car tout ce qu'il nous a
dit des universités allemandes est aussi fondé
que son éloge de la Convention.
Mgr l'évêque d'Orléans allait répondre à
l'orateur de la gauche ; mais M. de Labou-
laye ayant demandé la parole en sa qualité
de rapporteur, Mgr Dupanloup s'est retiré.
M. de Laboulaye, disons-le à sa louange, a
parlé en honnête homme et en homme pra
tique. Blessé des comparaisons déplacées de
M. Paul Bert, il s'est plu à jeter de l'eau
froide sur son enthousiasme pour l'Allema
gne enseignante, et lui a rappelé qu'il était au
moins imprudent de parler de la liberté alle
mande en ce moment. Ensuite, replaçant la
question sur son véritable terrain, il a dé
montré la justice et la nécessité de là loi pro
posée. Puis il a terminé son spirituel discours
par faire justice des préjugés que nourrit
M. Paul Bert à l'égard de l'enseignement ca-
holiqué, et que M. Beaussire allait , exploiter
encore.
Quand les c&tholiques s'attaquent
au monopole universitaire, c'est l'or
dinaire, bien qu'ils ne parlent pas
sans preuves, de suspecter leurs juge
ments comme entachés de parti pris.
Mais quelles réclamations pourront
élever les partisans du monopole con
tre des hommes comme M. Paul Bert,
M. Beaussire, M. Laboulayë lui-même,
qui, tous universitaires, se sont char
gés hier de faire le procès à l'ensei
gnement supérieur, tel qu'il est con
stitué?
Il est impossible, croyons-nous,d'ex
poser avec plus de force que ne l'ont
fait ces trois orateurs l'état misérable
où se trouve réduit cet enseignement.
Pas de bâtiments, pas de collections ni
de bibliothèques, pas de professeurs ou
des professeurs médiocres, par *uite,
Sas de cours, ou des cours mal faits,
nalement pas d'élèves, tel est le glo
rieux bilan de l'enseignement supé
rieur tel que l'a / fait le monopole, dressé
par des hommes que certes l'on n'accu
sera pas d'être ses ennemis.
On ne peut donc plus nier le mal
et il y faut un remède. Mus par des
considérations plus hautes que le souci
de soutenir une organisation intellec
tuelle dont les dangers sont publics
et dont ils ne sauraient rien attendre,
les catholiques réclament une loi qui
les mette à même de se soustraire à
cette oppression des écoles d'Etat.
Ont-ils tort? M. Laboulaye répond :
« Les catholiques ont parfaitement le
droit d'exiger que l'enseignement se
donne dans un sens catholique. »
Or, il est manifeste que l'enseigne
ment dans la plupart des écoles de,
l'Etat se donne dans un sens non-seu
lement étranger, mais directement
contraire aux vérités catholiques. Et
comment les catholiques feront-ils
respecter leur droit s'ils ne sont point
autorisés à recevoir l'enseignement
dans des établissements où la religion
ne soit point baffouée? La conséquence
naturelle, c'est qu'on leur doit oc
troyer en ces matières une entière
liberté. ^
C'est aussi la seule chose dont ne
veulent point ceux-là mêmes qui,com
me MM. Paul Bert et Beaussire, con
viennent d'ailleurs le mieux du mon
de des tristes résultats du monopole.
Le dernier de ces deux orateurs,
sentant à merveille où gisait la
condition essentielle de la liberté,
feint pour elle une grande tendresse ;
mais à aucun prix il ne voudrait ac
corder aux facultés nouvelles la colla
tion des grades. Le but de cette résis
tance, on le devine. M. Beaussire sait
bien que si les facultés d'Etat conser
vent le monopole de conférer! les gra
des, c'ëst du même coup supprimer
toute vraie liberté.
Encore qu'il soit plus acharné, s'il
est possible, contre" l'énseignementca-
tholique, M. Paul Bert a pourtant con
damné par avance cette injustice.
Examinant le cas où les professeurs
des facultés d'Etat seraiènt appelés à
examiner lès élèves des facultés libres,
il déclare « qu'il serait loin de consi
dérer cela comme une chose bonne et
juste ». Nous retenons ce mot et ne
voulons pas examiner si M. Paul Bert
est un partisan bien sincère de la li
berté lorsque, la vantant outre mesure
en principe, il insiste en fait sur les
déplorables conséquences qu'elle aura
pour le niveau des études en général
et l'enseignement universitaire en par
ticulier.
Ayant lui-même conscience de la
faiblesse d'une argumentation sem
blable, il s'est avisé d'une manœuvre
qu'il juge sans doute devoir être plus
efficace sur l'esprit de la Chambre.
Par une tactique qui n'est pas diffi
cile à pénétrer, il a réclamé la liberté
pour tout le monde de tout enseigner,
faisant ainsi d'une licence que per
sonne n'admet un épouvantail devant
les regards de ceux qui songent t à
faire jouir les catholiques d'une sage
liberté. En un mot, ce que veut M.
Paul Bert, ce n'est pas la liberté,
mais uné pétaudière. On peut? croire
que ce progrès 'n'est pas souhaitable
et néanmoins se juger fort libéral sans
être suspect d'intolérance, on peut
fort bien, par exemple, reconnaître le
droit d'universités catholiques au libre
enseignement des doctrines de l'Eglise
sur le mariage, tout en le refusant
au mormonisme.
AUOUSTB RODBSBI i.
Notre correspondant de Constantino-
ple nous annonce que l'interdiction
dont V Univers avait été frappé dans
l'empire ottoman, vient d'être levée.
Allons, les Turcs ont encore du bon;
leurs suspensions du moins ont le mé
rite d'être plus brèves que celles que
nous infligent ici des ministres li
béraux et parlementaires. Pourvu
qu'elles ne soient pas, comme ici,
trop rapprochées!
On lit dans le Moniteur
Le projet dé loi sur la presse sera déposé
lundi sur le bureau de l'Assemblée. Ce'pro-
jet contiendra des dispositions dont l'adop
tion par la Chambre pourra permettre au
gouvernement la levée immédiate de l'état de
siège.
Ces informations semblent plus sé
rieuses que celles du Français sur le
même sujet. Nous n'avons donc aucu
ne raison pour ne pas y croire.
Malgré les camouflets qu'ils reçoi
vent journellement des radicaux, les
républicains dits modérés ne veulent
pas rompre avec ces dangereux alliés.
Dans le quartier de la Chaussée-d'An-
tin, M. Delacourtie, républicain modé
ré, maintient sa candidature contre M.
Meunier, candidat conservateur, con
seiller sortant, et il accepte l'appui
compromettant du comité qui patron
nait le candidat radical, M. Vauzy.
Dans le quartier de la Muette, le ré
publicain modéré, M. Leroy-Beaulieu,
rédacteur du Journal des Débats, dont
l'intervention inopportune a empêché
M. Davrillé des Essarts, candidat con
servateur, de passer au premier tour
de scrutin, se désiste ; mais il se garde
bien de faire aucune recommandation
à ses électeurs, et le Journal des Dé
bats enregistre ainsi son désiste
ment :
M. Paul Leroy-Beaulieu remercie les élec
teurs du quartier de la Muette qui ont voté
pour lui dans le scrutin du dimanche 29 no
vembre, et retire sa candidature pour le
scrutin de ballottage du dimanche 6 dé
cembre.
Recommander la candidature radi
cale, ce serait trop compromettant;
recommander la candidature conser
vatrice, ce serait froisser les radicaux,
qui ont tant de ménagements pour
les républicains modérés; on se tait,
et le tour est joué. Le Journal des Dé
bats est coutumier de ces finesses.
Un fait peutrêtre plus curieux en
core que le silence prudent de M. Le
roy-Beaulieu, c'est l'attitude du Moni
teur universel , qui se déclare satisfait.
« Le caractère loyal de M. Leroy-Beau
lieu ne nous avait laissé aucun doute
à cet égard, » dit l'ex feuille officielle.
C'est avoir la satisfaction facile; mais,
en prévision de la conjonction des
centres, il est bon de se ménager le
Journal des Débats et ses amis.
Il y a quelques jours nous citions
d'édifiantes paroles du Siècle relatives
aux obstacles que rencontre le fabu
liste Carteret dans la réalisation de
son dessein d'en « finir avec les ul-
tramontairis. » Voici qui n'est pas
moins édifiant.
On se rappelle qu'au commence
ment de la guerre, un jeune gentils-
homme, M. de Moneys, fut brûlé vif
par des paysans de la Dordogne ; les
excitations des feuilles radicales et offi
cieuses avaient porte leurs fruits. Or,
un journal a trouvé bon de rappeler
ce crime odieux, et il le fait dans les
termes suivants :
Qui ne se souvient que dans des mêmes
contrées, il y a quelques années, uu proprié
taire d'ancienne famille fut impitoyablement
massacré par les paysans ameutés, à qui on
avait fait croire qu'il souhaitait le rétablisse-
ment.des anciens droits seigneuriaux ? C'est
le souvenir des dames de Théon et autres qui
entretient dans hos populations rurales cette
haine invétérée contre l'ancien régime.
Ces lignes, qui ne vont à rien moins
qu'à justifier un crime épouvantable,
sont extraites du Journal des Débats et
signées Eugène Yung. Ils vont bien
messieurs Tes républicains modérés,
lorsque la peur les pousse.
Et pour amener cette honnête inter-
Êrétation, M. Yung a dû fausser dou-
lement les faits : il a transporté dans
la Charente-Inférieure un crime qui
avait eu lieu dans la Dordogne, et il
a attribué à la « haine contre l'ancien
régime» un crime provoqué par les
accusations de trahison portées, à l'an
noncé de nos premiers désastres, con
tre les catholiques, contre ceux-là mê
mes qui se sont le plus vaillamment
battus et qui à Orléans, à Loigny, au
Mans, ont couvert la retraite de nos
armées.
- On lit dans le Journal de Paris :
Du moment que le centre droit avait pro
mis ses voix à M. de Kerdrel et à M. Benoist-
d'Azy, à la condition que la droite tout en
tière voterait pour M. d'Audiffret, la droite
tout entière devait voter pour M. d'Audif
fret...
Et quand il s'agit d'un homme de la valeur
de M. d'Audiffret, ne pas tenir un engage
ment est à la fois déloyal et ridicule.
Avant d'accuser ainsi, le Journal de
Paris aurait dû se rappeler que les en
gagements de la droite modérée lais
saient l'extrême droite parfaitement
libre; elle n'avait rien promis et ne
tenait pas beaucoup plus au succès de
M. dë Kerdrbl qu'a celui de M. le duc
d'Audiffret-Pasquier.
Nous ne voulons pas imiter le lan
gage du Journal de Paris et qualifier
cet oubli assez étrange d'une circon
stance pourtant importante : nous
nous bornons à le signaler;
On lit dans une correspondance pa
risienne de Y Indépendance belge :
M. l'abbé Jourdan, vicaire général de Pa
ris, est nommé à l'évêché de Tarhes, en rem
placement de M. Langénieux, promu à l'ar
chevêché de Reims. M. l'abbé Jourdan était,
en 1870, un catholique libéral, adversaire de
l'infaillibilité du Pape. L'archevêque de Pa
ris, M. Darboy, l'avait emmené avec lui au
concile. Tous les amis du nouvel évêque sont
persuadés que, dans le fond, il n'a pas changé
d'opinion, tout en modifiant son attitude ex
térieure.
Les abbés interdits et masqués qui
collaborent à Y Indépendance belge ca
lomnient sciemment le nouvel évêque
de Tarbes. M. l'abbé Jourdan n'a ja
mais donné sujet de penser qu'il était
un adversaire de l'infaillibilité. Ce qui
n'est pas douteux, c'est qu'il en sera
le défenseur.
On nous adresse la note suivante :
lê Journal de Florence et mgr dupanloup
Vous avez reproduit dans votre numéro du
2 décembre la lettre écrite au Journal de
Florence , le 26 novembre, par Mgr Dupan
loup. Cette lettre commence ainsi : « Vous
avez bien voulu publier sur ma lettre à
M. Minghetti des articles dont je ne puis que
vous être reconnaissant... »
Or, dans son numéro du 18 novembre, le
Journal de Florence insérait une lettre à lui
adressée par un catholique de distinction, qui
se plaint n de l'attitude prise par le Journal
de Flêrence , en certaines circonstances, par
ticulièrement au sujet de YOrénoque, et, ces
jours-ci, & propos de la lettre de Mgr l'évê
que d'Orléans, »
Le Journal de Florence répond longuement
aux deux griefs. Je laisse de côté ce qui con
cerne YOrénoque. Touchant la lettre à M. Min
ghetti, voici les principaux passages de l'ar
ticle :
« Quant au tribut d'éloges que j'ai payé à
la lettre à M. Minghetti , j'y vois encore moins
possibilité de m'accuser. Bien avant que ja
ne prisse la plume pour dire ma pensée sur
ce livre, Pie IX adressait à son auteur un
bref de félicitations... Mais,"dira-t-on, le Pape
n'a pas loué la conclusion de Mgr Dupan
loup. Ls Journal de Florence ne l'a pas louée
non plus : il a dit qu'elle était inacceptable au
point de vue de l'Eglise. Le Pape a entendu
seulement encourager et bénir l'évêque d'Or
léans pour les vérités qu'il a fait retentir aux
oreilles de nos'ministres. Le Journal de Flo
rence en a fait autant.
a .Le catholicisme libéral est bien et dû
ment condamné par le Vatican. S'il existe
encore des hommes ' de cette nuance, il faut
qu' ls se résignent à leur triste sort et passent
dans le camp des ennemis de l'Eglise... M ai m
l'Eglise, en foudroyant le catholicisme libé
ral, n'a dressé aucune liste de catholiques
libéraux et n'a chargé personne de la dresser
pour elle...
n Le mieux dans cette rencontre est déju
ger les livres par ce qu'ifs contiennent et les
hommes par ce qu'ils font, sans recourir à
leur passé, qui peut être réparé par un noble
repentir, sans trop nous préoccuper de leur
avenir, qui peut être signalé par des rechutes.
Si un catholique vient à nous, rie cherchons
pas s'il a appartenu yn jour au catholicisme
libéral, ne lé repoussons pas dans la crainte
qu'il puisse y appartenir le jour aprèi. Eth-
brassons-le et faisons lui l'accueil que nom
devons à un frère : c'est encore le meilleur
moyen de l'arracher à l'erreur, de l'attacher
pour l'avenir à la cause de la vérité.
« Imitons l'Eglise, toujours plus prompte
à pardonner qu'à condamner, toujours iné
branlable sur le terrain des doetrines et tou
jours clémente envers les hommes ; armée de
compassion pour la pécheur et ne désirant
rien mieux que de le voir revenir à elle. . »
Puisque Mgr Dupanloup se déclare recon ■
naissant des articles du Journal de "Flo
rence, nous espérons que les feuilles au ser
vice da prélat, et notamment les Annales reli
gieuses d'Orléans, reproduiront les textes ci-
dessus, fidèlement extraits du numéro du
18 novembre. '
Nous avons publié une dépêche de
l'Agence carliste nous signalant la
vaillante attitude des soldats dé l'ar
mée royale, qui gardent leur belle hu
meur, malgré les privations et le froid,
privés qu'ils sont, pour la plupart, des
couvertures qui leur seraient si néces
saires. A cette constance doit répondre
un nouvel effort de la charité. Ceux de
nos lecteurs qui le peuvent auront à
cœur de verser leur offrande, si légère
qu'elle soit, pour venir en aide à une
pénurie que l'approche de l'hiver rend
chaque jour plus rigoureuse.
Remises entre les mains de Mme la
duchesse de Madrid, ces souscriptions,"
transformées en vêtements dont man
quent aussi bien les blessés que les
soldats, iront droit aux combattants de
la bonne cause. Ne leur refusons pas
ces étrennes, qui, pour eux, sont loin
d'être du superflu.
Lettres de Rome
Rome, 30 novembre.
Le Pape, que l'on disait indisposé,
se trouve parfaitement, plein d'éner
gie et de douceur, de confiance et de
résignation. Rarement un vieillard a
été plus beau à voir. Hier le temps
était doux, le soleil resplendissant, Pie
IX traversait les galeries du Vatican
pour se rendre au jardin; plusieurs
femmes étrangères se sont trouvées
sur son passage. Comme elles s'age
nouillaient autour de lui, il.s'est arrê
té et leur a parlé. On n'entendait point
ses paroles, mais on comprenait à son
geste, à son attitude, à son sourire le
sens de son discours* Il était coiffé de
son chapeau rouge, avait sur les épau
les son manteau de pourpre frangé
d'or, s'appuyait légèrement de la main
gauche sur sa canne et étendait la
main droite vers les pieuses femmes
qu'il allait bénir. Quel sujet pour un
peintre que le Pape au milieu de ce
groupe, dans ces galeries peuplées de
statues antiques, ornées de tombeaux
et d'inscriptions ! Sentir et goûter ces
choses, pouvoir en jouir, c'est là> en
grande partie, ce qui tempère la dou
leur d'être à Rome en ce moment, ce
qui console du spectacle honteux de la
Rome révolutionnaire, ce qui fait es
pérer des jours meilleurs.
Aujourd'hui Sa Sainteté a reçu en
audience de congé Mgr Pichenot, ar
chevêque de Chanibery, qui quitte
Rome demain. Elle a aussi regu une
seconde fois M.L. Chevojon, l'excellent
curé de Notre-Dame des Victoires, ac-
compagnédeM. l'abbéDumax, son pieux
vicaire* sous-dirêcteur général de l'ar-
chi-confrérie, qui lui ont offert la bel
le copie de la statue de la Vierge si ar-
tistement modelée par M. Auguste
Geffroy. Pie IX a eu les paroles les
plus aimables et a beaucoup loué ls
dévotion des bons Français envers
Notre-Dame des Victoires, il sait l'his
toire de cette dévotion et des prodiges
qu'ellé opère continuellement non-
seulement en France, mais dans le
mohde.
Le Pape voit l'état affreux dans le
quel la France est tombée, mais
il voit aussi ce que la foi et la piété
ont d'attrait et de puissance dans notre
pays, èt c'est pour cela qu'il ne déses
père point de nous et qu'il nous bénit
avec tant de tendresse.
Je suis allé aujourd'hui au sémi
naire français, à Santâ-Chiara, jevoulais
présenter mes hommages à l'évêque
ae Bâle. Mgr Lâchât ne s'y trouvait
point. Les Suisses du Vatican l'avaient
supplié de venir dîner avec eux, et il
s'était rendu à leur invitation. Je don
ne ce détail avec intention. Nos lec
teurs, ceux dé Suisse surtout, verront
en esprit ce saint évêque persécuté, au
milieu de ses compatriotes fidèles, qui
partagent si noblement et si courageu
sement la captivité de Pie IX. Quelle
figure que celle de Mgr Lâchât, et
comme on sent bien en,le voyant
qu'on se trouve devant un saint !
On attend à Rome NN. SS. de Séez
et de Rodez.
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