Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1870-05-30
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 30 mai 1870 30 mai 1870
Description : 1870/05/30 (Numéro 1118). 1870/05/30 (Numéro 1118).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6983910
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Lundi 30 Mai 1870
N' 1118. — Edition quotidienne.'
Lundi 50 Mai ÏSfi
Ceux de nos souscripteurs dont l'abon
nement expire le 3 i mai sont priés de
le renouveler le plus promptementpossible,
s'ils ne veulent pas éprouver de retard
dans i envoi dujé&fkal.
Il est indispensable de joindre la der
nière bande à la demande de renouvelle
ment,, ainsi qu'aux réclamations pour
changement d'adresse ou autres.
Le mode - le plus simple et le plus
prompt est l'envoi d'un bon sur la poste
ou d'un mandat à vue sur Paris, à Tordre
du Gérant.
FRANCE
PARIS, 29 MAI 1810
Nous avons dit que M. Louis Veuillot
avait eu l'honneur de déposer derniè
rement aux pieds du Saint-Père cent
mille francs provenant de la souscrip
tion ouverte dans l'Univers. M. Louis
Veuillot avait accompagné cette of
frande de l'Adresse suivante :
Très Saint-Père,
Prosterné à vos pieds, j'apporte une nou
velle offrande fournie par la souscription ou
verte dans les bureaux de 1 ' Unit'ers afin de
vous aider à subvenir aux frais du Concile.
Cette souscription qui continue est alimen
tée par l'obole du pauvre, surtout par l'obole
du prêtre, plus pauvre en France que les
plus pauvres, mais plus généreux que les
çlus opulents. Ces oboles sont- des actes de
loi et d'amour envers le Vicaire de Jésus-
Christ.
Elles ecmfessent votre mission d'autorité
et de salut. Elles remercient notre Sauveur
"qui a donné Pierre au monde, et qui, en nos
jours inquiets, vous a mis sur ce trône de
Lumière et de justice pour abattre, pour con
firmer et pour édifier, de telle sorte que par
ce magistère infaillible nos esprits reçoivent
la certitude et nos âmes la paix.
Pour les souscripteurs, pour mes collabo
rateurs de l'Univers et pour moi, leur heu
reux intermédiaire, j'implore humblement la
bénédiction apostolique.
Louis Veuillot.
R.om»-, 8 mai.
Notre Saint-Père a daigné répondre
à celte Adresse par le Bref suivant :
Dilrctp filio Aloisio Veuillot.
PIUS PP. IX.
Dilecle Fili, salutem et Apostoli-
cam Benedictionem.
Signifieationes illas dévot ion is et
amoris quas proprio, et sociorum tuo-
rum nomine a te fadas excepimus
dum amplam a fidelibus commissam
ephemeridi tuœ stipem nobis offerebas,
acceptissimas quidem habuimus ; nee
parum ipso munere delectati sumus,
sive uti pignore filialis pietatis pluri-
morum, sive etiam uti fruetu certami-
nis a te jamdiu pro religione et hac
sancta Sedê suscepti. Splendidius ta-
men istud et nobilius fieri nobis est
visum, cuûi didicimus, a popello prse-
sertim et ab inope Galliarum clero
hœc Nobis collata fuisse subsidia,
siquidem eo plures in hoc opus con-
venisse oportet, quo tenuiores esse de-
buerunt singulorum symbolœ ; unde
patet, antiquam fidei simplicitatem
vigere ixi plerisque, et ejusmodi esse
Clerum, qui arctso animorum cum ista
veritatis cathedra conjunctioni contir-
mandai promovendteque naviter adla-
boret. Quare vix quidquam suavius
contingere Nobis potest per haec tem-
pora, qui mœrentes conspicimus
quantum gliscentes passim errores ani-
mabus periculum confient, et quo nisu
Ecclesiœ et sanctee hujus Sedis osores
filios Nostros a Nobis divellere conen-
tur. .
Quamobrem gratulamur tibi sociis-
que tuis ob faustum laborum vestro-
rum exitum, gratulamur iliis, qui eos
in propriee pietatis confirmationem
convertunt; gratulamur Clero, qui eo-
rum vestroque proposito adstipulatur
éxemplo zeloque suo ; et omnibus mer-
eedem religione sua et caritate di-
gnam adprecamur. Divini vero favoris
auspicem paternœque nostrse benevo-
Ientiee pignu3 tibi, dilecte flli, sociis
familieeque tuae ac ceteris, quos com-
mendavimus benedictionem apostoli-
eam peremanter impertimus.
Datum Romee apud sanctum Petrum
die 19 maii anno 1870.
Pontifie;!tus nostri anno vieesimo
quarto.
1 Pius PP. IX.
de res&6«iceâ^que ces secours ont été
réunis pour Nous. Le nombre de ceux
qui ont concouru à cette œuvre est
d'autant.plus grand, que les of
frandes individuelles ont dû être plus
petites, d'où il résulte clairement
que l'antique simplicité de la foi vit
dans la plupart, et que ce clergé
est tel qu'il travaille ardemment à con
firmer et à promouvoir l'union étroite
des ârnes avec cette- Chaire de vérité.
Rien ne peut Nous être plus doux en ce
temps où, le cœur rempli d'afllietion,
Nous voyons quel péril font courir aux
âmes les erreurs qui se multiplient
partout, et par quels efforts les enne
mis de l'Eglise et de ce Saint-Siège tra
vaillent à séduire nos fils et à les sé
parer de Nous.
C'est pourquoi Nous vous félicitons,
vous et vos collaborateurs, de l'heu
reux résultat de vos travaux ; Nous fé
licitons ceux qui les font servir à l'af
fermissement de leur propre piété ;
Nous félicitons le clergé qui, uni "dans
une action commune, vous soutient par
son exemple et par son zèle, et Nous
demandons pour tous une récompense
digne de leur religion et de leur cha
rité. Gomme gage de la faveur divine
Nous donnons"âvec 'amour la bénédic
tion apostolique à vous, cher fils, à vos
collaborateurs, à votre famille et aux
autres, objets de nos louanges.
Donné à Rome, près Saint-Pierre, le
10 mai 1870, de notre Pontificat l'an
vingt-quatre.
PIE IX, PAPE
Rome pendant le C'.oiicllc
CIV
Voici la traduction de ce bref :
notre cher fds Lotus Veuillot
PIE IN, PAPE
Cher Fils, salut et bénédiction
apostolique.
Les marques de dévouement et
d'amour que Nous avons reçues de
vous, en votre nom et au nom de vos
collaborateurs, lorsque vous Nous of
friez la riche souscription confiée à
votre journal par les fidèles, Nous ont
été très agréables, et l'offrande elle-
même Nous a fait un vif plaisir, parce
qu'elle est le gage de la piété filiale
d'un grand nombre el aussi parce
qu'elle est le fruit du combat que vous
soutenez depuis longtemps pour la
religion et pour ce Saint-Siège.
Ce don Nous a paru encore plus beau
et plus noble, lorsque Nous avons ap
pris que c'est principalement par le
clergé secondaire de France, si dénué
Hoirie, 25 mai,
On a entendu le trentième discours, et
le résultat est l'augmentation con
stante des discours à entendre. La mi
norité s'apprêtant à parler tout en
tière provoque à parler un nombre au
moins égal d'orateurs de la majorité.
Devant l objection obstinée, il y a d'a
bord une envie de ne -répondre à rien,
et ensuite une volonté de répondre
à tout, deux fois plutôt qu'une. Non
seulement la nature humaine ne hait
pas de parler et surtout de discou
rir, mais, ce qui l'honore davantage,
elle a du zèle pour la vérité. La liste
des orateurs en révèle plus d'un qui
n'a pas dû se proposer d'aborder la tri
bune. Il a cédé néanmoins, allongeant
pour sa part le temps qu'il voudrait
abréger. Il a sans doute espéré d'ache
ver une objection prête à renaître, et
prévenir une objection future. Tou
jours est-il que sur ce point ceux qui
voudraient finir font tout juste comme
ceux qui veulent résolûment ne finir
pas.
La fin des séances est laborieuse.
Toujours un certain nombre de Pères
Quittent la salle avant que le dernier
iseours soit terminé. Quand ce sont
des membres de la minorité qui se
retirent, on sait qu'un membre de
la majorité est à l'ambon. Lors
que les déserteurs appartiennent à la
majorité, c'est le signe qu'un membre
de la minorité fait en ce moment pe
ser la , parole. Généralement toutefois
la majorité écoute mieux. Elle est plus
tranquille et plus douce.
Malgré les assertions contraires, on
voit qu'il y a discussion. Puisque l'op
position parle avec tant de persévé
rance, elle est donc entendue ; ou,
alors, parlant pour ne rien dire, elle
n'a rien à dire. Je ne suis point là, je
ne lis poinf les procès-verbaux, je ne
peux rendre témoignage, mais je n'af
firme pas moins que l'on discute, et
qu'à cet égard le vœu de l'opposition
est rempli. J'ajoute qu'elle n'a point
le rôle éclatant. Les effets des pre
miers jours ne se reproduisent plus, et
maintenant ce sont les discours et les
réponses de la majorité dont l'impres
sion perce les murs. Ceux qui auraient
tant voulu des luttes corps à corps s'a
perçoivent maintenant que le péril eût
été pour eux. Le choix tant critiqué
du Concile a mis dans les commis
sions, non-seulement, des savants, mais
des orateurs dont le mérite ne redoute
aucune comparaison avec les talents
et !e latin qu'on a tant vantés après le
feu des premières escarmouches. Le
règlement se trouve plus protecteur des
intérêts de l'opposition que si elle l'a
vait fait elle-même. Il lui donne le
temps de se préparer; elle en a besoin.
Elle peut s'en apercevoir aux réponses
qui lui sont données dans les vingt-
quatre heures. Elle les recevrait aussi
solides et plus chaudes si la nuit ne
les reposait pas.
Etrange désir de mener le débat con
ciliaire comme un débat de parlement,
où l'on court les fortunes de la guerre,
ne refusant pas la ruse, cherchant tou
jours un peu . à enlever les choses par
surprise ou d'assaut ! On croyait avoir
des athlètes, un peuple aux environs,
on réclamait ^la lutte corps à corps et
le droit d'ouvrir les fenêtres. Mais ce
détail d'un plan contraireà la nature
même de l'Assemblée, et comme tel
impraticable dans son ensemble, ne
pouvait rien produire isolément, l'eût-
on ré: 1 ' -'. ?• m s .sma Assemblée où la
résolution n'est pas immédiate ni dé
cisive, et où la recherche pure du vrai
et du bien est le vœu absolu des cons
ciences, l'esprit de parti doit finir par
être absolument vaincu. Qu'importe
alors l'avantage partiel remporté çà
ou là, grâce aux muscles de tel ou tel
combattant ! On combat devant la cons
cience, en pleine lumière ; il faut avoir
pour soi la doctrine et la raison; l'élo
quence n'est qu'une servante qui n'a
pas voix au conseil.
Personne ne blâme une opposition
de conscience, chose naturelle, légi
time, souvent très-utile. Le mal c'est
l'opposition systématique, Y esprit d'op
position, l'application malheureuse et
désordonnée à faire de l opposition. Voi
là ce que le public chrétien n'aurait
pas voulu voir au Concile, et ce que le
sentiment catholique espérait qui n'y
serait pas. L'opposition proprement
dite est une mauvaise vieillerie, qui
dans l'Eglise êst assurée de rencontrer
à son tour une opposition carrée.
La première opposition dans l'Eglise
a été une opposition à l'Eglise. Elle
s'est appelée la nouveauté, et le pre
mier opposant a été qualifié de nova
teur. 11 a voulu introduire quelque
chose qui n'existait pas ou empêcher
le développement nécessaire" de quel
que chose qui existait, et qu'il niait. Cré ée
de Dieu pour grandir, l'Eglise con
tint en elle dès le commencement
tout ce qu'elle sera jusqu'à la fin de«
âges. Elle a besoin do tous ses élé
ments et n'a besoin d'aucun élément
et de notre bienveillance paterne lle, n ouveau. Lui vouloir donner, c'est lui
i .-m-? i-. T Vouloir ôter. Elle le sait par la foi,
elle le sent par un instinct sublime,
elle le connaît manifestement par l'il
lumination divine qui lui est promise.
Et le novateur, soit qu'il veuille ajou
ter, soit qu'il veuille retrancher, soit
qu'il veuille transformer, court à un
écueil où il se brisera. Vingt siècles
attestent cette merveille. Depuis vingt
siècles, l'édifice qui semble crouler de
vétusté se soutient et grandit par la
séve de son antiquité. Le temps pas
sant sur ces murailles n'en arrache
que les plantes parasites. Les siècles
dont il écrase toute construction hu
maine, s'accumulent ici comme pa
rure, Dieu les suspend au fronton de
son Eglise immortelle comme des
guirlandes d'où s'échappent les fruits,
les parfums et les fleurs.
L'esprit d'opposition semble ne re
garder l'Eglise qu'avec les yeux du
monde. Il croit qu'elle va crouler. Cer
tainement ses intentions sont bonnes.
Mais avec ses bonnes intentions, il
ne veut pas moins quelque chose que
l'Eglise ne veut pas, ou, ce qui revient
au même, il ne veut pas quelque cho
se que l'Eglise veut. Il propose une
nouveauté, la périodicité conciliaire;
il refuse un développement, l'ascen
sion au degré dogmatique d'une vérité
qui de tout temps, partout, pour tous,
fut plus que voisine de la foi.
L'Eglise, si j'ose risquer cette com
paraison, est comme un homme affec
té d'un mal dont il connaît parfaite
ment la nature, mais qui ne connaît
pas moins parfaitement sa constitution
propre, et le régime et le remède qu'il
lui faut ; et, de plus, il a un médecin
qui l'a toujours guéri. Au milieu de la
crise survient un empirique plein d'af
fection et de zèle, personne n'en dou
te, mais entêté d'une de ces panacées
en vogue qui guérissent, dit-on, tout
le monde. Il propose sa panacée, il
veut qu'on l'accepte et que l'on com
mence par changer le vieux régime
et abandonner toute l'ancienne hygiè
ne. Le malade répugne à cet essai pé
rilleux, le vrai médecin défend d'en
courir l'aventure, la panacée est re
fusée, et l'excellent empirique se fâche
tout à fait. Il fait cent discours sur la
constitution du malade, il déclame
terriblement contre le vieux médecin
qui tient bon pour le vieux régime ; il
crie que tout est perdu, ameute les do
mestiques, les amis, les enfants, rêve
d'employer la contrainte, menace de
quitter la maison ; bref, tout ce qu'ins
pire la colère. Peine perdue, le vieux
médecin sera obéi, le vieux régime
sera gardé, et l'empirique lui-même,
lorsqu'il sera malade, ne voudra ni
d'un autre régime ni d'un autre mé
decin. Mais, en attendant, le goût de
la nouveauté lui ayant soufflé l'esprit
d'opposition, et l'esprit d'opposition
lui ayant valu un échec général, il est
tourmenté d'une mauvaise humeur gé
nérale. De là des écarts qui affligent
ses amis et des intempérances qu'il
regrettera.
je vous ai plus d'une fois annoncé
qu'il y aurait une tactique pour traî
ner le Concile en longueur. Elle est.
pratiquée et ne désespère pas encore
du triomphe.— Gagnons la fin de juin,
disait-on après la présentation du
schéma , nous aurons gagné l'année.
Et pourquoi gagner, c'est-à-dire per
dre l'année? Parce que l'on espère quel
que événement extérieur qui modi
fiera ou la majorité, ou l'esprit de la
majorité et fera accepter enfin la pa
nacée, c'est-à-dire la périodicité et la
eo-souveraineté du Concile. Telle est
l'admirable Revakscière qui doit met-
Ire un terme à tous les maux du
monde en changeant la constitution
de l'Eglise. Elle la changerait, en effet!
On marche néanmoins. L'infaillibi
lité se fait à la manière de tout ce qui
germe. On sait que la maturité vient
parce que l'on voit passer le temps.
Plusieurs Pères m'ont dit maintes fois
qu'ils croiraient perdre leur temps, s'ils
pouvaient- croire que Dieu perd le
sien. Mais Dieu travaille, et l'homme
qui se croise les bras sur l'ordre de
Dieu travaille avec Dieu comme celui
qui déploie l'énergie entière de ses
forces.
J'entendais tout à l'heure à peu prè
la même chose d'un de ces graves
moines gui ne se pressent jamais et ne
perdent jamais une minute. Le temps,
selon lui, nous est donna pour fassions toutes choses avec maturité,
et c'est la voie courte, parce que les
choses faites avec maturité sont moins
à refaire, grande économie de temps.
A propos du Concile, ce moine me par
lait aussi de la patience; il me disait
que la patience de l'homme est une
bonne et active ouvrière.
De la patience nécessaire dans le
Concile et aux environs, l'entretien
s'était porté sur la fabrication *de l'es
sence de roses, à quoi ce Pure s'entend
fort bien, car c'est un des métiers
qu'il fait pour vivre. U fait du blé, du
vin et de l'essence de roses ; ce qui, par
parenthèse, a longtemps divisé les
philosophes de son endroit, car les
uns luj reprochaient d'être un moine
fainéaÂl, et de priver le monde d'une
acthiié. et les autres d'être un moine
laborieux et de faire concurrence au
peuple. Il leur a dit : Entendez-'vous ; Ils
se sont accordés à lui reprocher d'être
moine, le crime suffit. Mais comme il
a plus d'esprit qu'eux, il use de patience.
Il finit par leur faire accepter du pain,
du vin, de l'essence de roses et l'extrê-
me-onction, après quoi ils se tai
sent.
Je,lu,), demandaijjombien.il faut de
roses pour produire un de ces petits
flacons d'essenee pure que les orien
taux vendent si cher. Il me répondit :
il ne faut pas de roses; Le bon Dieu a
mis l'essence de la rosé dans le géra
nium, qui pousse et prospère en des
lieux ou la rose ne réussirait pas si
bien, qui craint moins les intempéries
et qui est plus abondant.
Je prends donc du géranium, non
pas le premier venu, mais une espèce
particulière. Je l'ai semé dans un
champ choisi, je lui ai donné une cul
ture spéciale, je le fais faucher quand
le moment est venu. Je connais que le
moment est venu, lorsque les tiges
commencent à fleurir. Plus tôt il serait
trop tôt, plus tard il serait trop tard ;
je ne coupe pas pour une première ni
pour une seconde tige fleurie, je^ n'at
tends pas que tout le champ soit en
fleur.
Je fais couper par le pied, et je
prends tout ce qui est dans le champ,
tiges et feuilles, tiges hâtives et tiges
tardives. Je n'épluche pas. S'il y a des
tiges flétries et des feuilles desséchées,
je les prends. Je prends les racines
que la taux arrache, et s'il y a quelques
herbes vaines qui se soient rpêlées au
géranium, je les prends. Parce qu'elles
ont poussé dans le champ, elles ne
nuisent pas. Peut-être sont-elles néces
saires, peut-être contiennent-elles un
suc, un amer particulier qui a sa vertu;
peut-être que l'essence serait impar
faite, si un peu do cet élément n' Ren
trait pas. Mais je ne prends rien du
champ qui est à côté "et qui porte
d'autres plantes.
J'ai tout coupé. Je charge tout sur
une immense charrette, je verse tout
dans un immense alambic, et je me
croise les bras. Il se fait là un travail
dont je connais la marche, mais dont
j'ignore le mystère. Ces feuilles et ces
tiges qui ne sont pas au même degré
de maturité, ces racines, ces brins
morts, cette partie minime d'herbes
vaines, tout ce produit du champ fer
mente dans l'alambic, se dégage, se
mêle, s'expulse, se réunit. Des atomes
se séparent à jamais, d'autres s'appel
lent, se joignent, et se confondent in
dissolublement. Une partie de cette
matière devient vapeur, une partie
devient boue et sera poussière, une
partie, suintant lentement à travers de
longs circuits, devient une matière
toute nouvelle : c'est l'essence. Mon
champ m'en a donné un petit flacon.
Mais de ce petit flacon les manipula
teurs en tireront plusieurs autres plus
grands, et ce sera toujours de l'essence ;
et de chacun de cesflacons plus grands,
tirés du premier petit flacon, l'on tirera
des bouteilles plus grandes, et ce sera
encore de l'essence; et avec cette es
sence on donnera le durable parfum
de la rose à mille objets qui le com
muniqueront encore; et ainsi le par
fum de la rose remplira pour de lon
gues aimées un espace qui sera des
millions et des millions de fois plus
vaste que le champ de géranium d'où
je l'ai tiré. Il semblait que j'eusse ré
duit à rien toute ma moisson. Je l'ai
mise, en effet, dans un flacon que peut
cacher la main fermée d'un enfant;
mais cependant je l'ai immensément
étendue et je tiens là de quoi envoyer
le parfum de mon champ à toutes les
extrémités de la terre.
— Voilà le Concile ! m'écriai-je.
— Voilà le Concile , reprit le bon
moine. Voilà le Concile dans la main
du Pape, et le Pape et le Concile dans
la main de Dieu. Voilà le Concile et le
Pape, avec le secours du temps et. le
secours du Saint-Esprit, dégageant de
la pensée humaine, qui est encore une
sorte de matière, ce qu'elle renferme de
la pensée de Dieu. Toute comparaison
cloche entre les choses humaines et
les choses de Dieu, et tout mystère
reste mystère, car le mystère est de sa
nature divin et insondable, et l'esprit
de l'homme ni n'en peut toucher le
fond ni n'en peut faire le tour. Mais
suivez la comparaison, vous en verrez
la justesse générale. Pour moi, c'est
assez, sans que je puisse me targuer
de répondre à tous les pourquoi. J'y
trouve la raison suffisante de ce
que nous voyons, l'explication de
l'opportunité , l'explication des â-
l'explication
lenteurs
cretés,
etc., etc. Sauf en certaines circons
tances de son choix , comme' aux
noces de Cana, oit-Teau fut changée
en vin sans passer par l'alambic du
cep, Dieu i-especte la liberté, même
dans les choses. A plus forte raison la
respecte-t-il dans l'homme, à plus
forte raison dans le prêtre. Il ne veut
pas forcer un Concile à donner ses ca
nons plus vite qu'il ne force un plant
de géranium à fournir sa parcelle de
rose ; et il faut beaucoup de matière
pour donner une goutte d'essence et
beaucoup de temps pour dégager l'es
sence de la matière qui la contient et
qui la retient. Une fois dégagée, cette
essence sera assez libre, assez élasti
que, assez durable, elle ira assez loin.
Et pour conclure, attendons tranquil
lement : le temps était venu, les tiges
avaient fleuri, la matière est dans l'a
lambic, l'essence sortira.
Ainsi me parla mon bon vieux moi
ne, cet homme inutile qui fait du blé,
du vin et de l'essence de rose, et qui
dit la messe et donne le corps et le
sang de Jésus-Christ. J'aurais causé
une heure entre M. de Villemessant
et-M. Emile de Girardin sur le chemin
du Sénat que j'y aurais pris moins de
plaisir. On annonce encore cent dis
cours avant la proclamation du dog
me. Je. i^^mux bien, et je passerais
par cent cinquante, quoique j'attende
debout à la porte en dehors : le dog
me. sortira.,
On se répète dans Rome une parole
éloquente qui a franchi hier le seuil
du Concile. Le digne Evêque d'Urgel
monta à la tribune pour se féliciter de
voir les deux grands voeux catholi
ques de la noble Espagne au moment
d'être accomplis, car le dogme de
l'Immaculée Conception de la sainte
Vierge "est proclamé, et le dogme de
l'infaillibilité du Pape va l'être bientôt.
Et je finis mon article comme le pieux
Evaque a commencé son dicours :
L .ETl'S MOHIAit !
Louis Veuillot.
La séance d'hier a une fois de plus
montré l'inconvénient du droit d'ini
tiative personnelle et l'abus des inter
pellations. Un des modérés, un des
sages delaChambre, un homme quine
manque pas de quelque crédit et qui en
aurait davantage s'il parlait moins sou
vent et s'il ne perlait pas avec tant de
soin ses harangues, M. Lafond de Saint-
Mûr désirait paraître à la tribune. Il a
déposé une interpellation sur l'organi
sation judiciaire. Il a dit des choses
sensées, il en a dit de contestables ; son
discours, bien étudié et bien appris,
roulant sur des renseignements géné
ralement assez exacts, a exprimé cer
tains vœux et certains désirs fort légi
times, dont plusieurs méritent consi
dération . Le tout en langage propre et
avec un débit convenable. Quand l'o
rateur a eu occupé la tribune pendant
deux heures, M. le garde des sceaux,
rendant bon témoignage de la justesse
des pensées qui venaient d'être déve
loppées, ne niant pas l'utilité de quel
ques réformes, ni la réalité de divers
abus a fait remarquer que l'organisa
tion judiciaire était chose grave, qui
devait être étudiée avec soin et où les
réformes devaient être appliquées
d'ensemble. En conséquence, il a de
mandé à M. Lafond de Saint-Mûr de
vouloir bien retirer son interpella
tion.
M. Jules Simon, qui a l'œil au grain
et qui, de son côté, sollicite la suppres
sion immédiate de huit cours impéria
les et de beaucoup de tribunaux, au
rait bien voulu trouver peu parlemen
taire la demande de M. le garde des
sceaux, à laquelle s'était ompressé
d'obtempérer M. Lafond de Saint-
Mûr. I)e la part de M. Jules Simon, ce
n'était qu'un scrupule philosophique.
Il savait d'avance que son objection ne
tenait pas ; mais il est bon de prendre
toute occasion de parler. Le Corps lé
gislatif est pour entendre.
De tout ce débat sur l'organisation
judiciaire, il reste acquis au public, ce
qu'il savait d'ailleurs à l'avance, que
le nombre des tribunaux est trop
grand en France et que les magistrats
protestent unanimement contre la li
mite d'âge fixée par le décret du 1 er
mars 1852.
M. Martel en demande avec feu et
d'urgence l'abolition. M. Pinard se
contente de demander que la limite
appliquée aux membres de la cour de
cassation soit étendue à tous les ma
gistrats.
Après tout, le plus clair bénéfice de
l'interpellation de M. Lafond de
Saint-Mûr a été de provoquer une
proposition de M. llaspail. Les pro
positions de M. Raspail charment tou
jours la Chambre. M. Jules Simon hier
s'est même distingué en riant plus
qu'il ne convient à un philosophe.Cela
a été d'autant plus remarqué que l'ho
norable châtelain d'Areueil-Cachan de
mandait à supprimer complètement le
code pénal et. le "code d'instruction
criminelle au moyen de deux jurys,
l'un préventif, chargé de prévenir toute
faute par des moyens de morale et
d'humanité, l'autre de réparation et
de réhabilitation, destiné à traiter les
instincts curables et même les incura
bles, jusqu'à ce qu'ils croient les uns
et les au très guéris et réhabilités.
Nous ne priverons pas nos lecteurs
de cette belle conception, et nous re
produirons le projet de M. Raspail
avec les commentaires qu'il va ajouté,
tels que les reproduit le Journal of
ficiel. .
-Une proposition de M. Le Hon sur
rA;igé4&^*M.-renH'0yéG à la commis
sion d'initiative parlementaire. M. J.
Favre a prétendu à ce propos que le
cabinet s'était engagéàfaire voter dans
cette session même une loi assurant à
l'Algérie le bénéfice de la représenta
tion nationale. M. Ollivier reconnaît
l'engagement, mais non pas l'étroit
délai qu'on voudrait lui imposer ; et
M. le maréchal Le Bœuf déclare que
le conseil d'Etat est saisi de projets du
gouvernement relatifs à l'élection des
conseils généraux et à l'institution de
préfectures en Algérie. -
Après un petit incident relatif aux
traitements des fonctionnaires des
contributions directes, la loi sur les
machines meurtrières a été votée sans
discussion, et le Corps législatif est
entré dans une longue discussion sur
les chemirs ruraux. M. Ordinaire de
mandait que les communes fussent li
bres d'y appliquer lç tiers de leurs
prestations.
On n'ignore pas que du bon état des
chemins dépend le progrès de l'agricul
ture, aussi ne faut-il pas s'étonner de
l'intérêt que le Corps législatif prend à
tout ce qui les concerne. La commis
sion proposait d'écarter la proposition
de M. Ordinaire. M. Dein, membre de
la minorité de la commission, l'a re
prise en l'amendant et malgré l'oppo
sition du rapporteur, la proposition de
M. Dein a été renvoyée à la commis
sion.
La Chambre a réglé ensuite, non
sans peine son ordre du jour. Il a été
qnestion d'une pétition contre la déri
vation des eaux de la Vanne enlevées
au département de l'Yonne, pour être
conduites à Paris.
M. Glais-Bizoin a rappelé la loi sur
l'abolition dn timbre des journaux. M.
Segris a déclaré que cette suppression
ne saurait avoir lieu avant le mois de
janvier 1872, et il demandait quelque
ajournement de la loi. MM. Gluis-Bi-
zoin, Haentiens et de Tillancourt ont
témoigné d'une grande vivacité à ce
propos. Enfin, sur la demande de M.
Segris, la discussion a été fixée nu
14 juin.
Léon Aumxeau.
L E T T R E
«le l!si' r\i'ïhevèn««s «le Cassahr-B*
Au cl erg/; de son diocèse,
Sl'K LE OQNi'.ÎLK CF.flCMBNIQlïE IH : VATICAN"
Vous connaissez, messieurs et ehors Coo-
pérateurs, et vous déplorez comme nous lr-
dénigrement systématique à l'aide duquel
l'esprit de parti, pour ne pas dire l'esprit de
secte, travaille à rendre suspects les actes du
Concile œcuménique du Vatican, et, s'il était
possible, à ruiner d'avance l'autorité sacrée
de ses enseignements et de ses décrets.
Tout ce qui concerne l'auguste et sain!"
Assemblée n'a cessé d'être, depuis ses pre
mières réunions, l'objet de préventions plei
nes d'aigreur, de critiques malveillantes et
de récits mensongers. Cette acrimonie et cet
te hostilité persévérantes ne se trouvent pas
seulement dans la presse an tichrétienne ;
nous avons le regret profond delà rencontrer
dans des publications dont les auteurs font
profession de notre foi catholique, et dont,
plusieurs même comptent dans les rangs du
clergé. Ils prétendent servir Dieu en signa
lant son Eglise à d'odieuses défiances, et en
coalisant contre elle toutes les oppositions
qu'ils peuvent lui susciter.
A les entendre, l'installation matérielle du
Concile rend impossible toute discussion sé
rieuse ; — les délibérations sont conduites
avec une précipitation et une partialité qui n«
permettent pas aux opinions moins agréables-
à la Curie romaine (i) de se produire ot de s?,
détendre ; —la majorité abuse de sa supério
rité numérique pour opprimer la minorité et
la réduire au silence ; — les Pèrss qui com
posent cette majorité sont du reste, en géné
ral, trop peu compétents pour apprécier les
besoins intellectuels et les nécessités politi
ques du temps où nous vivons, les exigences
de l'opinion publique et les concessions que
doit lui l'aire l'Eglise dans son propre inté
rêt.
Voilà ce qu'on dit, messieurs et chers Oo-
pérateurs, et voici ce qui est vrai (2).
I
L'installation matérielle du Concile lais
sait à désirer dons le principe, personne ne le
conteste. Mais il est certain que depuis long
temps on a fait disparaître les inconvénients
qu'elle présentait d'abord. La salle conci
liaire, à laquelle on avait donné une trop
grande étendue, a été réduite à des propor
tions très convenables. Telle qu'elle est main
tenant, tout orateur qui aura une voix ordi
naire et parlera distinctement s'y fera en ten
dre, sans effort, de tout son auditoire.
Il y a du reste dans les graves différences
que présente la prononciation du latin, sui
vant nos diverses nationalités, une difficulté
■indépendante de toutes les conditions d'acon-
'stique et que notre Assemblée porterait par
tout avec soi.- — Tout le monde sait qu'il est.
des orateurs qui, à raison de la -faiblesse ou
de quelque autre défaut de leur organe, ne
peuvent se bien faire entendre nulle part.
Mais ces discussions, que l'on peut enten
dre et suivre facilement, sont-elles assez li
bres?
Elles le sont parfaitement, nous vous l'af
firmons, messieurs et churs.Coopéfateurs. et
nous n'hésitons point à dire que l'immense
majorité de nos vénérables collègues partage
?t cet égard notre conviction. Nous avons as
sisté à toutes les congrégations générales,
sans en excepter une seule, et c'est comma
(i) Ce mot couvre très incomplètement les in
dignes attaques qui sont dirigées contre la per
sonne môme du Souverain Pontife.
(2} Nous allons entrer dans de bien mince*
détails, mais on les a rendus nécessaires. — Nous
aurons soin d'ailleurs de ne point nous écarter
de la réserve et de la discrétion qu'imposent à
tous les Evôques, relativement à nos travaux
conciliaires, les prescriptions
N' 1118. — Edition quotidienne.'
Lundi 50 Mai ÏSfi
Ceux de nos souscripteurs dont l'abon
nement expire le 3 i mai sont priés de
le renouveler le plus promptementpossible,
s'ils ne veulent pas éprouver de retard
dans i envoi dujé&fkal.
Il est indispensable de joindre la der
nière bande à la demande de renouvelle
ment,, ainsi qu'aux réclamations pour
changement d'adresse ou autres.
Le mode - le plus simple et le plus
prompt est l'envoi d'un bon sur la poste
ou d'un mandat à vue sur Paris, à Tordre
du Gérant.
FRANCE
PARIS, 29 MAI 1810
Nous avons dit que M. Louis Veuillot
avait eu l'honneur de déposer derniè
rement aux pieds du Saint-Père cent
mille francs provenant de la souscrip
tion ouverte dans l'Univers. M. Louis
Veuillot avait accompagné cette of
frande de l'Adresse suivante :
Très Saint-Père,
Prosterné à vos pieds, j'apporte une nou
velle offrande fournie par la souscription ou
verte dans les bureaux de 1 ' Unit'ers afin de
vous aider à subvenir aux frais du Concile.
Cette souscription qui continue est alimen
tée par l'obole du pauvre, surtout par l'obole
du prêtre, plus pauvre en France que les
plus pauvres, mais plus généreux que les
çlus opulents. Ces oboles sont- des actes de
loi et d'amour envers le Vicaire de Jésus-
Christ.
Elles ecmfessent votre mission d'autorité
et de salut. Elles remercient notre Sauveur
"qui a donné Pierre au monde, et qui, en nos
jours inquiets, vous a mis sur ce trône de
Lumière et de justice pour abattre, pour con
firmer et pour édifier, de telle sorte que par
ce magistère infaillible nos esprits reçoivent
la certitude et nos âmes la paix.
Pour les souscripteurs, pour mes collabo
rateurs de l'Univers et pour moi, leur heu
reux intermédiaire, j'implore humblement la
bénédiction apostolique.
Louis Veuillot.
R.om»-, 8 mai.
Notre Saint-Père a daigné répondre
à celte Adresse par le Bref suivant :
Dilrctp filio Aloisio Veuillot.
PIUS PP. IX.
Dilecle Fili, salutem et Apostoli-
cam Benedictionem.
Signifieationes illas dévot ion is et
amoris quas proprio, et sociorum tuo-
rum nomine a te fadas excepimus
dum amplam a fidelibus commissam
ephemeridi tuœ stipem nobis offerebas,
acceptissimas quidem habuimus ; nee
parum ipso munere delectati sumus,
sive uti pignore filialis pietatis pluri-
morum, sive etiam uti fruetu certami-
nis a te jamdiu pro religione et hac
sancta Sedê suscepti. Splendidius ta-
men istud et nobilius fieri nobis est
visum, cuûi didicimus, a popello prse-
sertim et ab inope Galliarum clero
hœc Nobis collata fuisse subsidia,
siquidem eo plures in hoc opus con-
venisse oportet, quo tenuiores esse de-
buerunt singulorum symbolœ ; unde
patet, antiquam fidei simplicitatem
vigere ixi plerisque, et ejusmodi esse
Clerum, qui arctso animorum cum ista
veritatis cathedra conjunctioni contir-
mandai promovendteque naviter adla-
boret. Quare vix quidquam suavius
contingere Nobis potest per haec tem-
pora, qui mœrentes conspicimus
quantum gliscentes passim errores ani-
mabus periculum confient, et quo nisu
Ecclesiœ et sanctee hujus Sedis osores
filios Nostros a Nobis divellere conen-
tur. .
Quamobrem gratulamur tibi sociis-
que tuis ob faustum laborum vestro-
rum exitum, gratulamur iliis, qui eos
in propriee pietatis confirmationem
convertunt; gratulamur Clero, qui eo-
rum vestroque proposito adstipulatur
éxemplo zeloque suo ; et omnibus mer-
eedem religione sua et caritate di-
gnam adprecamur. Divini vero favoris
auspicem paternœque nostrse benevo-
Ientiee pignu3 tibi, dilecte flli, sociis
familieeque tuae ac ceteris, quos com-
mendavimus benedictionem apostoli-
eam peremanter impertimus.
Datum Romee apud sanctum Petrum
die 19 maii anno 1870.
Pontifie;!tus nostri anno vieesimo
quarto.
1 Pius PP. IX.
de res&6«iceâ^que ces secours ont été
réunis pour Nous. Le nombre de ceux
qui ont concouru à cette œuvre est
d'autant.plus grand, que les of
frandes individuelles ont dû être plus
petites, d'où il résulte clairement
que l'antique simplicité de la foi vit
dans la plupart, et que ce clergé
est tel qu'il travaille ardemment à con
firmer et à promouvoir l'union étroite
des ârnes avec cette- Chaire de vérité.
Rien ne peut Nous être plus doux en ce
temps où, le cœur rempli d'afllietion,
Nous voyons quel péril font courir aux
âmes les erreurs qui se multiplient
partout, et par quels efforts les enne
mis de l'Eglise et de ce Saint-Siège tra
vaillent à séduire nos fils et à les sé
parer de Nous.
C'est pourquoi Nous vous félicitons,
vous et vos collaborateurs, de l'heu
reux résultat de vos travaux ; Nous fé
licitons ceux qui les font servir à l'af
fermissement de leur propre piété ;
Nous félicitons le clergé qui, uni "dans
une action commune, vous soutient par
son exemple et par son zèle, et Nous
demandons pour tous une récompense
digne de leur religion et de leur cha
rité. Gomme gage de la faveur divine
Nous donnons"âvec 'amour la bénédic
tion apostolique à vous, cher fils, à vos
collaborateurs, à votre famille et aux
autres, objets de nos louanges.
Donné à Rome, près Saint-Pierre, le
10 mai 1870, de notre Pontificat l'an
vingt-quatre.
PIE IX, PAPE
Rome pendant le C'.oiicllc
CIV
Voici la traduction de ce bref :
notre cher fds Lotus Veuillot
PIE IN, PAPE
Cher Fils, salut et bénédiction
apostolique.
Les marques de dévouement et
d'amour que Nous avons reçues de
vous, en votre nom et au nom de vos
collaborateurs, lorsque vous Nous of
friez la riche souscription confiée à
votre journal par les fidèles, Nous ont
été très agréables, et l'offrande elle-
même Nous a fait un vif plaisir, parce
qu'elle est le gage de la piété filiale
d'un grand nombre el aussi parce
qu'elle est le fruit du combat que vous
soutenez depuis longtemps pour la
religion et pour ce Saint-Siège.
Ce don Nous a paru encore plus beau
et plus noble, lorsque Nous avons ap
pris que c'est principalement par le
clergé secondaire de France, si dénué
Hoirie, 25 mai,
On a entendu le trentième discours, et
le résultat est l'augmentation con
stante des discours à entendre. La mi
norité s'apprêtant à parler tout en
tière provoque à parler un nombre au
moins égal d'orateurs de la majorité.
Devant l objection obstinée, il y a d'a
bord une envie de ne -répondre à rien,
et ensuite une volonté de répondre
à tout, deux fois plutôt qu'une. Non
seulement la nature humaine ne hait
pas de parler et surtout de discou
rir, mais, ce qui l'honore davantage,
elle a du zèle pour la vérité. La liste
des orateurs en révèle plus d'un qui
n'a pas dû se proposer d'aborder la tri
bune. Il a cédé néanmoins, allongeant
pour sa part le temps qu'il voudrait
abréger. Il a sans doute espéré d'ache
ver une objection prête à renaître, et
prévenir une objection future. Tou
jours est-il que sur ce point ceux qui
voudraient finir font tout juste comme
ceux qui veulent résolûment ne finir
pas.
La fin des séances est laborieuse.
Toujours un certain nombre de Pères
Quittent la salle avant que le dernier
iseours soit terminé. Quand ce sont
des membres de la minorité qui se
retirent, on sait qu'un membre de
la majorité est à l'ambon. Lors
que les déserteurs appartiennent à la
majorité, c'est le signe qu'un membre
de la minorité fait en ce moment pe
ser la , parole. Généralement toutefois
la majorité écoute mieux. Elle est plus
tranquille et plus douce.
Malgré les assertions contraires, on
voit qu'il y a discussion. Puisque l'op
position parle avec tant de persévé
rance, elle est donc entendue ; ou,
alors, parlant pour ne rien dire, elle
n'a rien à dire. Je ne suis point là, je
ne lis poinf les procès-verbaux, je ne
peux rendre témoignage, mais je n'af
firme pas moins que l'on discute, et
qu'à cet égard le vœu de l'opposition
est rempli. J'ajoute qu'elle n'a point
le rôle éclatant. Les effets des pre
miers jours ne se reproduisent plus, et
maintenant ce sont les discours et les
réponses de la majorité dont l'impres
sion perce les murs. Ceux qui auraient
tant voulu des luttes corps à corps s'a
perçoivent maintenant que le péril eût
été pour eux. Le choix tant critiqué
du Concile a mis dans les commis
sions, non-seulement, des savants, mais
des orateurs dont le mérite ne redoute
aucune comparaison avec les talents
et !e latin qu'on a tant vantés après le
feu des premières escarmouches. Le
règlement se trouve plus protecteur des
intérêts de l'opposition que si elle l'a
vait fait elle-même. Il lui donne le
temps de se préparer; elle en a besoin.
Elle peut s'en apercevoir aux réponses
qui lui sont données dans les vingt-
quatre heures. Elle les recevrait aussi
solides et plus chaudes si la nuit ne
les reposait pas.
Etrange désir de mener le débat con
ciliaire comme un débat de parlement,
où l'on court les fortunes de la guerre,
ne refusant pas la ruse, cherchant tou
jours un peu . à enlever les choses par
surprise ou d'assaut ! On croyait avoir
des athlètes, un peuple aux environs,
on réclamait ^la lutte corps à corps et
le droit d'ouvrir les fenêtres. Mais ce
détail d'un plan contraireà la nature
même de l'Assemblée, et comme tel
impraticable dans son ensemble, ne
pouvait rien produire isolément, l'eût-
on ré: 1 ' -'. ?• m s .sma Assemblée où la
résolution n'est pas immédiate ni dé
cisive, et où la recherche pure du vrai
et du bien est le vœu absolu des cons
ciences, l'esprit de parti doit finir par
être absolument vaincu. Qu'importe
alors l'avantage partiel remporté çà
ou là, grâce aux muscles de tel ou tel
combattant ! On combat devant la cons
cience, en pleine lumière ; il faut avoir
pour soi la doctrine et la raison; l'élo
quence n'est qu'une servante qui n'a
pas voix au conseil.
Personne ne blâme une opposition
de conscience, chose naturelle, légi
time, souvent très-utile. Le mal c'est
l'opposition systématique, Y esprit d'op
position, l'application malheureuse et
désordonnée à faire de l opposition. Voi
là ce que le public chrétien n'aurait
pas voulu voir au Concile, et ce que le
sentiment catholique espérait qui n'y
serait pas. L'opposition proprement
dite est une mauvaise vieillerie, qui
dans l'Eglise êst assurée de rencontrer
à son tour une opposition carrée.
La première opposition dans l'Eglise
a été une opposition à l'Eglise. Elle
s'est appelée la nouveauté, et le pre
mier opposant a été qualifié de nova
teur. 11 a voulu introduire quelque
chose qui n'existait pas ou empêcher
le développement nécessaire" de quel
que chose qui existait, et qu'il niait. Cré ée
de Dieu pour grandir, l'Eglise con
tint en elle dès le commencement
tout ce qu'elle sera jusqu'à la fin de«
âges. Elle a besoin do tous ses élé
ments et n'a besoin d'aucun élément
et de notre bienveillance paterne lle, n ouveau. Lui vouloir donner, c'est lui
i .-m-? i-. T Vouloir ôter. Elle le sait par la foi,
elle le sent par un instinct sublime,
elle le connaît manifestement par l'il
lumination divine qui lui est promise.
Et le novateur, soit qu'il veuille ajou
ter, soit qu'il veuille retrancher, soit
qu'il veuille transformer, court à un
écueil où il se brisera. Vingt siècles
attestent cette merveille. Depuis vingt
siècles, l'édifice qui semble crouler de
vétusté se soutient et grandit par la
séve de son antiquité. Le temps pas
sant sur ces murailles n'en arrache
que les plantes parasites. Les siècles
dont il écrase toute construction hu
maine, s'accumulent ici comme pa
rure, Dieu les suspend au fronton de
son Eglise immortelle comme des
guirlandes d'où s'échappent les fruits,
les parfums et les fleurs.
L'esprit d'opposition semble ne re
garder l'Eglise qu'avec les yeux du
monde. Il croit qu'elle va crouler. Cer
tainement ses intentions sont bonnes.
Mais avec ses bonnes intentions, il
ne veut pas moins quelque chose que
l'Eglise ne veut pas, ou, ce qui revient
au même, il ne veut pas quelque cho
se que l'Eglise veut. Il propose une
nouveauté, la périodicité conciliaire;
il refuse un développement, l'ascen
sion au degré dogmatique d'une vérité
qui de tout temps, partout, pour tous,
fut plus que voisine de la foi.
L'Eglise, si j'ose risquer cette com
paraison, est comme un homme affec
té d'un mal dont il connaît parfaite
ment la nature, mais qui ne connaît
pas moins parfaitement sa constitution
propre, et le régime et le remède qu'il
lui faut ; et, de plus, il a un médecin
qui l'a toujours guéri. Au milieu de la
crise survient un empirique plein d'af
fection et de zèle, personne n'en dou
te, mais entêté d'une de ces panacées
en vogue qui guérissent, dit-on, tout
le monde. Il propose sa panacée, il
veut qu'on l'accepte et que l'on com
mence par changer le vieux régime
et abandonner toute l'ancienne hygiè
ne. Le malade répugne à cet essai pé
rilleux, le vrai médecin défend d'en
courir l'aventure, la panacée est re
fusée, et l'excellent empirique se fâche
tout à fait. Il fait cent discours sur la
constitution du malade, il déclame
terriblement contre le vieux médecin
qui tient bon pour le vieux régime ; il
crie que tout est perdu, ameute les do
mestiques, les amis, les enfants, rêve
d'employer la contrainte, menace de
quitter la maison ; bref, tout ce qu'ins
pire la colère. Peine perdue, le vieux
médecin sera obéi, le vieux régime
sera gardé, et l'empirique lui-même,
lorsqu'il sera malade, ne voudra ni
d'un autre régime ni d'un autre mé
decin. Mais, en attendant, le goût de
la nouveauté lui ayant soufflé l'esprit
d'opposition, et l'esprit d'opposition
lui ayant valu un échec général, il est
tourmenté d'une mauvaise humeur gé
nérale. De là des écarts qui affligent
ses amis et des intempérances qu'il
regrettera.
je vous ai plus d'une fois annoncé
qu'il y aurait une tactique pour traî
ner le Concile en longueur. Elle est.
pratiquée et ne désespère pas encore
du triomphe.— Gagnons la fin de juin,
disait-on après la présentation du
schéma , nous aurons gagné l'année.
Et pourquoi gagner, c'est-à-dire per
dre l'année? Parce que l'on espère quel
que événement extérieur qui modi
fiera ou la majorité, ou l'esprit de la
majorité et fera accepter enfin la pa
nacée, c'est-à-dire la périodicité et la
eo-souveraineté du Concile. Telle est
l'admirable Revakscière qui doit met-
Ire un terme à tous les maux du
monde en changeant la constitution
de l'Eglise. Elle la changerait, en effet!
On marche néanmoins. L'infaillibi
lité se fait à la manière de tout ce qui
germe. On sait que la maturité vient
parce que l'on voit passer le temps.
Plusieurs Pères m'ont dit maintes fois
qu'ils croiraient perdre leur temps, s'ils
pouvaient- croire que Dieu perd le
sien. Mais Dieu travaille, et l'homme
qui se croise les bras sur l'ordre de
Dieu travaille avec Dieu comme celui
qui déploie l'énergie entière de ses
forces.
J'entendais tout à l'heure à peu prè
la même chose d'un de ces graves
moines gui ne se pressent jamais et ne
perdent jamais une minute. Le temps,
selon lui, nous est donna pour
et c'est la voie courte, parce que les
choses faites avec maturité sont moins
à refaire, grande économie de temps.
A propos du Concile, ce moine me par
lait aussi de la patience; il me disait
que la patience de l'homme est une
bonne et active ouvrière.
De la patience nécessaire dans le
Concile et aux environs, l'entretien
s'était porté sur la fabrication *de l'es
sence de roses, à quoi ce Pure s'entend
fort bien, car c'est un des métiers
qu'il fait pour vivre. U fait du blé, du
vin et de l'essence de roses ; ce qui, par
parenthèse, a longtemps divisé les
philosophes de son endroit, car les
uns luj reprochaient d'être un moine
fainéaÂl, et de priver le monde d'une
acthiié. et les autres d'être un moine
laborieux et de faire concurrence au
peuple. Il leur a dit : Entendez-'vous ; Ils
se sont accordés à lui reprocher d'être
moine, le crime suffit. Mais comme il
a plus d'esprit qu'eux, il use de patience.
Il finit par leur faire accepter du pain,
du vin, de l'essence de roses et l'extrê-
me-onction, après quoi ils se tai
sent.
Je,lu,), demandaijjombien.il faut de
roses pour produire un de ces petits
flacons d'essenee pure que les orien
taux vendent si cher. Il me répondit :
il ne faut pas de roses; Le bon Dieu a
mis l'essence de la rosé dans le géra
nium, qui pousse et prospère en des
lieux ou la rose ne réussirait pas si
bien, qui craint moins les intempéries
et qui est plus abondant.
Je prends donc du géranium, non
pas le premier venu, mais une espèce
particulière. Je l'ai semé dans un
champ choisi, je lui ai donné une cul
ture spéciale, je le fais faucher quand
le moment est venu. Je connais que le
moment est venu, lorsque les tiges
commencent à fleurir. Plus tôt il serait
trop tôt, plus tard il serait trop tard ;
je ne coupe pas pour une première ni
pour une seconde tige fleurie, je^ n'at
tends pas que tout le champ soit en
fleur.
Je fais couper par le pied, et je
prends tout ce qui est dans le champ,
tiges et feuilles, tiges hâtives et tiges
tardives. Je n'épluche pas. S'il y a des
tiges flétries et des feuilles desséchées,
je les prends. Je prends les racines
que la taux arrache, et s'il y a quelques
herbes vaines qui se soient rpêlées au
géranium, je les prends. Parce qu'elles
ont poussé dans le champ, elles ne
nuisent pas. Peut-être sont-elles néces
saires, peut-être contiennent-elles un
suc, un amer particulier qui a sa vertu;
peut-être que l'essence serait impar
faite, si un peu do cet élément n' Ren
trait pas. Mais je ne prends rien du
champ qui est à côté "et qui porte
d'autres plantes.
J'ai tout coupé. Je charge tout sur
une immense charrette, je verse tout
dans un immense alambic, et je me
croise les bras. Il se fait là un travail
dont je connais la marche, mais dont
j'ignore le mystère. Ces feuilles et ces
tiges qui ne sont pas au même degré
de maturité, ces racines, ces brins
morts, cette partie minime d'herbes
vaines, tout ce produit du champ fer
mente dans l'alambic, se dégage, se
mêle, s'expulse, se réunit. Des atomes
se séparent à jamais, d'autres s'appel
lent, se joignent, et se confondent in
dissolublement. Une partie de cette
matière devient vapeur, une partie
devient boue et sera poussière, une
partie, suintant lentement à travers de
longs circuits, devient une matière
toute nouvelle : c'est l'essence. Mon
champ m'en a donné un petit flacon.
Mais de ce petit flacon les manipula
teurs en tireront plusieurs autres plus
grands, et ce sera toujours de l'essence ;
et de chacun de cesflacons plus grands,
tirés du premier petit flacon, l'on tirera
des bouteilles plus grandes, et ce sera
encore de l'essence; et avec cette es
sence on donnera le durable parfum
de la rose à mille objets qui le com
muniqueront encore; et ainsi le par
fum de la rose remplira pour de lon
gues aimées un espace qui sera des
millions et des millions de fois plus
vaste que le champ de géranium d'où
je l'ai tiré. Il semblait que j'eusse ré
duit à rien toute ma moisson. Je l'ai
mise, en effet, dans un flacon que peut
cacher la main fermée d'un enfant;
mais cependant je l'ai immensément
étendue et je tiens là de quoi envoyer
le parfum de mon champ à toutes les
extrémités de la terre.
— Voilà le Concile ! m'écriai-je.
— Voilà le Concile , reprit le bon
moine. Voilà le Concile dans la main
du Pape, et le Pape et le Concile dans
la main de Dieu. Voilà le Concile et le
Pape, avec le secours du temps et. le
secours du Saint-Esprit, dégageant de
la pensée humaine, qui est encore une
sorte de matière, ce qu'elle renferme de
la pensée de Dieu. Toute comparaison
cloche entre les choses humaines et
les choses de Dieu, et tout mystère
reste mystère, car le mystère est de sa
nature divin et insondable, et l'esprit
de l'homme ni n'en peut toucher le
fond ni n'en peut faire le tour. Mais
suivez la comparaison, vous en verrez
la justesse générale. Pour moi, c'est
assez, sans que je puisse me targuer
de répondre à tous les pourquoi. J'y
trouve la raison suffisante de ce
que nous voyons, l'explication de
l'opportunité , l'explication des â-
l'explication
lenteurs
cretés,
etc., etc. Sauf en certaines circons
tances de son choix , comme' aux
noces de Cana, oit-Teau fut changée
en vin sans passer par l'alambic du
cep, Dieu i-especte la liberté, même
dans les choses. A plus forte raison la
respecte-t-il dans l'homme, à plus
forte raison dans le prêtre. Il ne veut
pas forcer un Concile à donner ses ca
nons plus vite qu'il ne force un plant
de géranium à fournir sa parcelle de
rose ; et il faut beaucoup de matière
pour donner une goutte d'essence et
beaucoup de temps pour dégager l'es
sence de la matière qui la contient et
qui la retient. Une fois dégagée, cette
essence sera assez libre, assez élasti
que, assez durable, elle ira assez loin.
Et pour conclure, attendons tranquil
lement : le temps était venu, les tiges
avaient fleuri, la matière est dans l'a
lambic, l'essence sortira.
Ainsi me parla mon bon vieux moi
ne, cet homme inutile qui fait du blé,
du vin et de l'essence de rose, et qui
dit la messe et donne le corps et le
sang de Jésus-Christ. J'aurais causé
une heure entre M. de Villemessant
et-M. Emile de Girardin sur le chemin
du Sénat que j'y aurais pris moins de
plaisir. On annonce encore cent dis
cours avant la proclamation du dog
me. Je. i^^mux bien, et je passerais
par cent cinquante, quoique j'attende
debout à la porte en dehors : le dog
me. sortira.,
On se répète dans Rome une parole
éloquente qui a franchi hier le seuil
du Concile. Le digne Evêque d'Urgel
monta à la tribune pour se féliciter de
voir les deux grands voeux catholi
ques de la noble Espagne au moment
d'être accomplis, car le dogme de
l'Immaculée Conception de la sainte
Vierge "est proclamé, et le dogme de
l'infaillibilité du Pape va l'être bientôt.
Et je finis mon article comme le pieux
Evaque a commencé son dicours :
L .ETl'S MOHIAit !
Louis Veuillot.
La séance d'hier a une fois de plus
montré l'inconvénient du droit d'ini
tiative personnelle et l'abus des inter
pellations. Un des modérés, un des
sages delaChambre, un homme quine
manque pas de quelque crédit et qui en
aurait davantage s'il parlait moins sou
vent et s'il ne perlait pas avec tant de
soin ses harangues, M. Lafond de Saint-
Mûr désirait paraître à la tribune. Il a
déposé une interpellation sur l'organi
sation judiciaire. Il a dit des choses
sensées, il en a dit de contestables ; son
discours, bien étudié et bien appris,
roulant sur des renseignements géné
ralement assez exacts, a exprimé cer
tains vœux et certains désirs fort légi
times, dont plusieurs méritent consi
dération . Le tout en langage propre et
avec un débit convenable. Quand l'o
rateur a eu occupé la tribune pendant
deux heures, M. le garde des sceaux,
rendant bon témoignage de la justesse
des pensées qui venaient d'être déve
loppées, ne niant pas l'utilité de quel
ques réformes, ni la réalité de divers
abus a fait remarquer que l'organisa
tion judiciaire était chose grave, qui
devait être étudiée avec soin et où les
réformes devaient être appliquées
d'ensemble. En conséquence, il a de
mandé à M. Lafond de Saint-Mûr de
vouloir bien retirer son interpella
tion.
M. Jules Simon, qui a l'œil au grain
et qui, de son côté, sollicite la suppres
sion immédiate de huit cours impéria
les et de beaucoup de tribunaux, au
rait bien voulu trouver peu parlemen
taire la demande de M. le garde des
sceaux, à laquelle s'était ompressé
d'obtempérer M. Lafond de Saint-
Mûr. I)e la part de M. Jules Simon, ce
n'était qu'un scrupule philosophique.
Il savait d'avance que son objection ne
tenait pas ; mais il est bon de prendre
toute occasion de parler. Le Corps lé
gislatif est pour entendre.
De tout ce débat sur l'organisation
judiciaire, il reste acquis au public, ce
qu'il savait d'ailleurs à l'avance, que
le nombre des tribunaux est trop
grand en France et que les magistrats
protestent unanimement contre la li
mite d'âge fixée par le décret du 1 er
mars 1852.
M. Martel en demande avec feu et
d'urgence l'abolition. M. Pinard se
contente de demander que la limite
appliquée aux membres de la cour de
cassation soit étendue à tous les ma
gistrats.
Après tout, le plus clair bénéfice de
l'interpellation de M. Lafond de
Saint-Mûr a été de provoquer une
proposition de M. llaspail. Les pro
positions de M. Raspail charment tou
jours la Chambre. M. Jules Simon hier
s'est même distingué en riant plus
qu'il ne convient à un philosophe.Cela
a été d'autant plus remarqué que l'ho
norable châtelain d'Areueil-Cachan de
mandait à supprimer complètement le
code pénal et. le "code d'instruction
criminelle au moyen de deux jurys,
l'un préventif, chargé de prévenir toute
faute par des moyens de morale et
d'humanité, l'autre de réparation et
de réhabilitation, destiné à traiter les
instincts curables et même les incura
bles, jusqu'à ce qu'ils croient les uns
et les au très guéris et réhabilités.
Nous ne priverons pas nos lecteurs
de cette belle conception, et nous re
produirons le projet de M. Raspail
avec les commentaires qu'il va ajouté,
tels que les reproduit le Journal of
ficiel. .
-Une proposition de M. Le Hon sur
rA;igé4&^*M.-renH'0yéG à la commis
sion d'initiative parlementaire. M. J.
Favre a prétendu à ce propos que le
cabinet s'était engagéàfaire voter dans
cette session même une loi assurant à
l'Algérie le bénéfice de la représenta
tion nationale. M. Ollivier reconnaît
l'engagement, mais non pas l'étroit
délai qu'on voudrait lui imposer ; et
M. le maréchal Le Bœuf déclare que
le conseil d'Etat est saisi de projets du
gouvernement relatifs à l'élection des
conseils généraux et à l'institution de
préfectures en Algérie. -
Après un petit incident relatif aux
traitements des fonctionnaires des
contributions directes, la loi sur les
machines meurtrières a été votée sans
discussion, et le Corps législatif est
entré dans une longue discussion sur
les chemirs ruraux. M. Ordinaire de
mandait que les communes fussent li
bres d'y appliquer lç tiers de leurs
prestations.
On n'ignore pas que du bon état des
chemins dépend le progrès de l'agricul
ture, aussi ne faut-il pas s'étonner de
l'intérêt que le Corps législatif prend à
tout ce qui les concerne. La commis
sion proposait d'écarter la proposition
de M. Ordinaire. M. Dein, membre de
la minorité de la commission, l'a re
prise en l'amendant et malgré l'oppo
sition du rapporteur, la proposition de
M. Dein a été renvoyée à la commis
sion.
La Chambre a réglé ensuite, non
sans peine son ordre du jour. Il a été
qnestion d'une pétition contre la déri
vation des eaux de la Vanne enlevées
au département de l'Yonne, pour être
conduites à Paris.
M. Glais-Bizoin a rappelé la loi sur
l'abolition dn timbre des journaux. M.
Segris a déclaré que cette suppression
ne saurait avoir lieu avant le mois de
janvier 1872, et il demandait quelque
ajournement de la loi. MM. Gluis-Bi-
zoin, Haentiens et de Tillancourt ont
témoigné d'une grande vivacité à ce
propos. Enfin, sur la demande de M.
Segris, la discussion a été fixée nu
14 juin.
Léon Aumxeau.
L E T T R E
«le l!si' r\i'ïhevèn««s «le Cassahr-B*
Au cl erg/; de son diocèse,
Sl'K LE OQNi'.ÎLK CF.flCMBNIQlïE IH : VATICAN"
Vous connaissez, messieurs et ehors Coo-
pérateurs, et vous déplorez comme nous lr-
dénigrement systématique à l'aide duquel
l'esprit de parti, pour ne pas dire l'esprit de
secte, travaille à rendre suspects les actes du
Concile œcuménique du Vatican, et, s'il était
possible, à ruiner d'avance l'autorité sacrée
de ses enseignements et de ses décrets.
Tout ce qui concerne l'auguste et sain!"
Assemblée n'a cessé d'être, depuis ses pre
mières réunions, l'objet de préventions plei
nes d'aigreur, de critiques malveillantes et
de récits mensongers. Cette acrimonie et cet
te hostilité persévérantes ne se trouvent pas
seulement dans la presse an tichrétienne ;
nous avons le regret profond delà rencontrer
dans des publications dont les auteurs font
profession de notre foi catholique, et dont,
plusieurs même comptent dans les rangs du
clergé. Ils prétendent servir Dieu en signa
lant son Eglise à d'odieuses défiances, et en
coalisant contre elle toutes les oppositions
qu'ils peuvent lui susciter.
A les entendre, l'installation matérielle du
Concile rend impossible toute discussion sé
rieuse ; — les délibérations sont conduites
avec une précipitation et une partialité qui n«
permettent pas aux opinions moins agréables-
à la Curie romaine (i) de se produire ot de s?,
détendre ; —la majorité abuse de sa supério
rité numérique pour opprimer la minorité et
la réduire au silence ; — les Pèrss qui com
posent cette majorité sont du reste, en géné
ral, trop peu compétents pour apprécier les
besoins intellectuels et les nécessités politi
ques du temps où nous vivons, les exigences
de l'opinion publique et les concessions que
doit lui l'aire l'Eglise dans son propre inté
rêt.
Voilà ce qu'on dit, messieurs et chers Oo-
pérateurs, et voici ce qui est vrai (2).
I
L'installation matérielle du Concile lais
sait à désirer dons le principe, personne ne le
conteste. Mais il est certain que depuis long
temps on a fait disparaître les inconvénients
qu'elle présentait d'abord. La salle conci
liaire, à laquelle on avait donné une trop
grande étendue, a été réduite à des propor
tions très convenables. Telle qu'elle est main
tenant, tout orateur qui aura une voix ordi
naire et parlera distinctement s'y fera en ten
dre, sans effort, de tout son auditoire.
Il y a du reste dans les graves différences
que présente la prononciation du latin, sui
vant nos diverses nationalités, une difficulté
■indépendante de toutes les conditions d'acon-
'stique et que notre Assemblée porterait par
tout avec soi.- — Tout le monde sait qu'il est.
des orateurs qui, à raison de la -faiblesse ou
de quelque autre défaut de leur organe, ne
peuvent se bien faire entendre nulle part.
Mais ces discussions, que l'on peut enten
dre et suivre facilement, sont-elles assez li
bres?
Elles le sont parfaitement, nous vous l'af
firmons, messieurs et churs.Coopéfateurs. et
nous n'hésitons point à dire que l'immense
majorité de nos vénérables collègues partage
?t cet égard notre conviction. Nous avons as
sisté à toutes les congrégations générales,
sans en excepter une seule, et c'est comma
(i) Ce mot couvre très incomplètement les in
dignes attaques qui sont dirigées contre la per
sonne môme du Souverain Pontife.
(2} Nous allons entrer dans de bien mince*
détails, mais on les a rendus nécessaires. — Nous
aurons soin d'ailleurs de ne point nous écarter
de la réserve et de la discrétion qu'imposent à
tous les Evôques, relativement à nos travaux
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