Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1867-12-20
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 20 décembre 1867 20 décembre 1867
Description : 1867/12/20 (Numéro 245). 1867/12/20 (Numéro 245).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Vendredi SO Décembre 1861
N° 245. — Edition quotidienne
Vendredi SO décembre 1861
PARIS
On an >s ,. 60 fr.
Six mois. 31
Trois mole »... .......... 16
Le numéro : 15 centimes
Paris, 10, rue des Saints-Pères
On s'&bonnefc Home, an bureau de la Civiltà cattolica
via del Gesa» 61
• \
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DÉPARTEMENTS
Un su.,.66 ft
Six" mais.............i». Si
Trois mois ■ . ,. 18
Édition semi-quotidienne
Un an, 36 fr. Six iaols, 19 fr. —Trois mol3,10 (t.
. V Vniaers ne répond, pss desmamuclitj qui lui «ont »dre»2*
ANNIOIDCaBS
Il. Cil. LàGRâNGl & CEliï, 6, plaça de la Bourse
France
PARIS, 19 DÉCEMBRE 186?
1 Ë$WaJL,jE1W
Les Italiens et M. Menabrea lui-même
seraient fort étonnés sans doute, s'ils lisaient
dans l8--4&wfeM)M-pnnçaia le
cours qui sont prononcés dans la salle des
Cinq-Cents, à Florence. Nous avons rapporté
hier une phrase du président du conseil, dé
clarant qu' « avant tout il faut que la France
évacue le territoire pontifical. » Voici ce que
devient cette déclaration, grâce aux habiletés
du Moniteur :
Appréciant lu convention de septembre, qui ne
contient aucune clause résolutoire, le général Me
nabrea la considère comme existant toujours en
droit; tout au plus peut-il dire qu'elle est mo
mentanément suspendue. En ce qui concerne
les négociations à venir, il exprime l'opinion
que l'Italie doit rechercher avec prudence et ar-f
deur les moyens d'exister parallèlement avec le
gouvernement pontifical et d'obtènir ainsi l'éva
cuation du territoire romain par les troupes
fi ançaises.
Dans la suite de son discours, dont la té
légraphie nous transmet ce matin le résumé,
le général Menabrea a répété qu'il accepte le
vote de 1861, et, pour justifier sa conduite
vis-à-vis la France, il a dit que le gouverne
ment n'avait pas manqué de répondre à quel
ques paroles blessantes prononcées par des
ministres français. Quelles nouvelles expli
cations nous donnera le Moniteur pour atté
nuer l'impertinence du langage ministériel?
Nous reconnaissons volontiers qu'il convient
à une nation généreuse et puissante de paraî
tre longanime en face de ceux qui l'insul
tent, mais cette générosité ne peut aller jus
qu'à nous faire souffrir d'être à ce point hu-
rtiîliés parîSsi+Etiirôg qui nous doivent'tout.'
Le Constitutionnel, qui d'ordinaire suit do
cilement le Moniteur, aujourd'hui le devance
maladroitement. A propos de deux lettres de
Garibaldi adressées à des Anglais, le journal
Boniface-Limayrac fait témérairement la ré
flexion suivante :
« C'est le digne complément de ces discours
français et italiens qui comparaient la pré
sence du Souverain-Pontife à Rome à l'occu
pation de Cherbourg ou de Paris par les An
glais. »
Le Constitutionnel ne 'sait-il pas que M.
Menabrea. plaît au Moniteur, ou ne se sou-
vient-il plus que M. Menabrea est l'auteur
de « ces discours italiens qui compa
raient, etc. » Menabrea et Garibaldi, c'est
donc tout un, d'après le Constitutionnel. Voi
là une vérité que nous ne nous attendions
pas à recueillir d'une telle bouche. Et désor
mais nous saurons que lorsqu'il donnera des
louanges à M. Menairea, le Constitutionnel
voudra faire du même coup l'éloge de Gari
baldi.
Nous n'avons rien -à dire du discours de
M. Rattazzi. Ce que nous en connaissons
nous paraît l'œuvre d'un médiocre avocat,
peu franc.
La Correspondance -provinciale, de Berlin,
annonce que la représentation diplomatique
de la Confédération du Nord sera organisée
sous peu. Les représentants actuels de la
Prusse seront accrédités en qualité d'ambas
sadeurs de la Confédération du Nord. Tout
cela est du formalisme ridicule, et personne
n'y sera trompé. Imagine-t-on en Allemagne
que nous ignorions toute lavanité de ce mot :
Confédération du Nord?
ÎJne commission de la Chambre des dépu
lés dt3 Saxe vient d'être saisie d'un projet
présenté par le gouvernement et tendant à
introduire le système du jury dans l'prgani-
sation judiciaire du royaume.
Les nouvelles officielles des troupes expé
ditionnaires d'Abyssinie constatent, dit le
Moniteur , le bon accueil que l'avant-garde
britannique a reçu des populations, à son ar
rivée à Senafe. Plusieurs chefs des tribus
voisines ont envoyé des messagers chargés»
d'offrir leurs bons offices aux Anglais.
Le bruit courait que l'empereur Theodo-
ros avait brûlé la ville de Debratebor et éta
bli un camp à quelques milles de là. On
prête, d'ailleurs, au négus l'intention de;
s'opposer à l'entrée des troupes royales à
Magdala; mais il paraît rencontrer de la part
des habitants de la campagne une hostilité
qui l'empêcherait définitivement de s'établir
sur ce point.-
A uguste R oussel.
JLettre pastorale
DE L'ÉVÊQUE DE LIMOGES
sur quelques .devoirs qui résultent
' qhs événements récemment accomplis dans l'état
pontifical
et mandement
prescrivant"un triduum de prières en exécution
de l 'encyclique de notre saint-pèhe le pape
du 17 octobre 1867
Vous avez suivi avec anxiété, Nos Très-
Chers Frères, les événements qui viennent de
s'accomplir dans le patrimoine de Saint-Pier
re. Cette agression sacrilège, dont le but, les
acteurs et les complices, effrayai ent l'imagi
nation et révoltaient la conscience, n'a trouvé;
nulle part la neutralité ou l'indifférence. Les
ennemis de Jésus-Christ et de son Eglise,
aveuglés par leur haine impie, ont pris ou-
•vertement le parti des envahisseurs ; et quand,
avec son honneur, le drapeau de la France a ,
été engagé dans la lutte, il a fallu, pour les
rappeler au sentiment vulgaire de la pudeur,
leur citer un article du Code pénal. Certains
égoïstes, troublés dans leur repos, ont parlé
timidement, il est vrai, de concessions hon
teuses et d'une paix impossible entre l'ordre
«t le désordre, la vertu et le vice, la vérité et
'l'erreur: dicentes pax, pax ; et non erat pax (1).
Mais combien d'honnête3 gens, dont quel
ques-uns avaient été jusque-là incertains ou
égarés, se sont prononcés hautement pour la
cause la plus juste, la plus faible et la plus'
indignement attaquée ! Parmi eux, les cœurs
vraiment français et vraiment catholiques
ont, à ce double titre, éprouvé plus vivement
les tressaillements de la commotion uni ver
selle.
Mais ce n'est pas tout d'avoir été profon-
'âément sensible aux péripéties d'un drame si
imposant, aux alternatives émouvantes d'une
cause qui est éminemment la nôtre. Ne lais
sons faillir ni notre vigilance, ni notre dé
vouement, ni notre prière. Car l'ennemi
vaincu n'a pas désarmé. Comme un lion
blessé, il rugit' dans ses antres secrets, il
rôde menaçant et irrité autour des frontières
eiu. petit Etat qui garantit, avec l'indépen
dance du Souverain Pontife, notre dignité
morale et notre liberté religieuse : au besoin,
il prendra la toison blanche de l'agneau, pro
testera de son amour pour l'Eglise, de son
Respect pour Pie IX,et se présentant dans les
conseils de la diplomatie, il tendra la main et
(1) Jêr.^VI, 14.
dômanderaleprixdesadéfaitequ'il n'a pas reçu-
cette fois.Donc, que les catholiques soient sur
leurs gardes ; armés du bouclier de la foi et-
du glaive de la: parole, qu'ils ne laissent pas
sommeiller l'opinion puBlique dont le réveil
heureux a été pour le gouvernement, dans
les difficultés présentes, une force et un ap-
de la protection de Dieu, eïaeTassistance de
ses fils généreux jusqu'à la prodigalité, dé
voués jusqu'au sacrifice.
A cette occasion, nous vous remercions,
N. T.-C. F., d'avoir si libéralement répondu
à notre récent appel, et d'avoir mérité une
place dans cette grande manifestation catho
lique qui cause à l'impiété d'amers déplaisirs.
Il n'est pas inutile d'ajouter ici que ceux qui
secourent généreusement leur Père, n'ou
blient pas leurs frères malheureux. Pie IX,
malgré sa détresse, refuserait les aumônes
qui seraient enlevées aux nécessités des indi
gents qu'il aime tarit à soulager. Du reste,
les pauvres ne s'y trompent pas. Us savent
que ce sera toujours dans les maisons chré
tiennes qu'ils trouveront l'accueil le plus
sympathique, et l'assistance la plus délicate
et la plus empressée.
Les circonstances actuelles ne nous rap
pellent pas seulement nos obligations géné
rales et permanentes ; elles nous imposent
encore des devoirs particuliers que nous n'a
vons nul désir de taire ou de décliner, que
nous embrassons,au contraire, par le cœur et
par la conscience.
Nous devons avant tout, N. T. C. F., de
solennelles actions de grâces au Dieu des ar
mées qui a inspiré au cœur des vaillants dé
fenseurs de l'Eglise cette indomptable ar
deur, cette abnégation chrétienne, ce mépris
du danger, cette soit du martyre, qui ont dé
cuplé leurs forces et transfiguré jusque dans
la mort leursftraits de prédestinés. Comment
Rome a-t-elle pu sortir saine et sauve de la
double et formidable épreuve qui devait as
surer sa ruine, alors qu'il y avait contre elle
« au dehors les combats, au-dedans les crain
tes (1), » au dehors les attaques mulli-
pliées et acharnées snr tant de points à la
lois ; au-dedans de plus terribles machina
tions et de plus odieux complots tramés dans
l'ombre par l'audaceet la perfidie? Ah ! Dieu
seul sait ce qu'il a fallu d'activité, de persé
vérance, d'énergie morale et de force physi
que aux héroïques soldats du Christ pour en
durer tant de privalions, braver tant de pé
rils, faire face à tant d'ënnemis, et par une
série de combats heureux, où. la valeur sup
pléait au nombre, soutenir une lutte inégale
sans cesse renaissante, qui devait enfin cou
ronner une grande et décisive victoire. « Bé
nissons le Dieu d'Israël qui a visité et déli
vré son peuple (2), » e^t, « chantons le'Sei-
gneur qui a manife sté glorieusement sa puis
sance (3) Cantemus Domino, gloriosè, enim
magni/icatus est.
Notre joie à nous, Français et catholiques,
doit être plus vive, notre fierté plus légitime,
notre reconnaissance plus profonde et plus
expansive. Car la fille aînée de l'Eglise, la
noble France de Clovis, de Charlemagne et
de saint Louis était là, au poste de péril et
d'honneur que lui ont légué toutes les tradi
tions de son histoire : elle était là, aux por
tes de la Ville-Eternelle qu'elle devait s&u=
ver encore, qu'elle protégera toujours... elle
était là sur ce champ de bataille de Mentana
avec ses bataillons invincibles, avec son in
trépide légion de volontaires, avec la phalan
ge sacrée « formée par un héros pour la dé
fense d'un saint, » avec ces soldats du Pape
qui ont conquis l'estime et l'admiration de
nos généraux et de nos guerriers, si bons
juges de la valeur militaire. La bannière
pontificale et le drapeau français y flottaient
ensemble, et confondaient leurs plis rayon
nants d'un éclat pareil comme pour mieux
attester l'identité de la cause et la fraternité
des sentiments dans la participation à la mê
me gloire.
Mais, hélas! l'allégresse du triomphe n'a
pas été sans mélange d'amertume et de
deuil ; ces succès nous ont coûté du sang,
un sang pur et généreux, un sang qui est i
nôtre, parce qu'il a été répandu par nos frè
res dans la patrie et dans la religion, pour
nous, pour les intérêts sacrés de nos âmes,
pour l'honneur et les engagements da notre
pays, pour la dignité et l'indépendance de
l'Église dans son Chef suprême, pour Jésus-
Christ dans la personne de son Vicaire. Ah ! J
sans doute, ce sang versé avec tant de géné
rosité, et pour une cause si sainte, aura par
ticipé à la vertu souverainement méritoire du
martyre enduré pour la foi. Cependant, s'il y
manquait encore quelque expiation aux yeux
de la justice divine, nous y suppléerions par
la vertu surabondante et les mérites infinis
du sang de Jésus-Christ lui-même. A l'exem
ple de l'illustre chef du peuple de Dieu, nous
prodiguerons nos pieux suffrages en faveur
des nouveaux Machabées. Nous offrirons nos
prières, nos bonnes œuvres, de ferventes
communions, l'auguste sacrifice de l'autel, à
l'intention des nobles victimes ensevelies
dans leur triomphe, des blessés qu,e Pie IX
visitait naguère en pleurant, et qui l'accla
maient avec amour ; des héros chrétiens que
la Providence a préservés, les réservant peut-
être' à de plus rudes épreuves, et de toutes
ces dignes familles dont nous avons admiré le
dévouement, ressenti les angoisses et partagé
le deuil. Puissent ces prières, qui sorlent de
nos cœurs, être pour eux tous un hommage
et une bénédiction ! Pour nous, elles sont
l'acquit d'une dette de gratitude que nous
sommes heureux de reconnaître, qu'il nous
sera doux de payer (4)-
Nous croirions, N. T.-C. F., faillir .à l'es
prit miséricordieux de Jésus-Christ, qui vit
si admirablement dans son représentant su
prême, si nous venions à oublier dans nos
humbles supplications ceux qui lui ont voué
une haine toute gratuite ; ces ennemis, pri
sonniers ou blessés, que Pie IX visite, Gon-
sole et secourt paternellement, dans son inef
fable mansuétude, ces pauvres égarés qu'il
éclairs d'une parole de ses lèvres ou d'un
geste de sa main bénissante, ces persé
cuteurs et ingrats qui s'étonns^t de tomber
à ses genoux sous la pression irrésistible du
repentir, dé la vénération et de l'amour.
Pourquoi faut-il qu'en pardonnant avec
Pie IX à tant de criminels, nous soyons obli
gés avec lui, de rappeler et de flétrir leurs
odieux attentats? On ..ne sait vraiment de
duel nom caractériser ce mélange équivoque
de bandes indisciplinées et de troupes régu
lières qui croyaient aller à de faciles triom
phes et à de lucratifs pillages. Toujours est-
il queehez un certain nombre de ces tristes
reqrues, l'impiété du sectaire se trouvait
jointe à la rapacité du brigand. A côté de
(1) Cor., VII. 5.
(2) Luc, I, 68.
(3) Exod., XV, 1.
(4) Nous célébrerons pontificalemenf, vendre
di 29 novembre, dans notre église cathédrale,
un service p&ur tes morts de l'armée pontificale
et de l'armée française.
J soldats, qui avaient perdu ce nom honorable
en dépouillant leur uniforme pour revêtir la
livrée du sicaire, à côté de jeunes gens en
traînés par des passions ardentes, et des doc
trines funestes, à côté de malheureux paysans
arrachés par la violence à leurs travaux
champêtres, on voyait avec effroi de ces êtres
hideux qui ne.,s'appartiennent plus, que l'hu
manité repousse, voués au crime par d'abo
minables serments, vendus à la révolution
comme exécuteurs de ses hautes œuvres,
dressés dans les sociétés secrètes à blasphé
mer, à maudire et à tuer.
On frémit à la pensée du sort que réser
vaient à Rome, à ses monuments, à ses chefs-
d'œuvre incomparables ces hordes de nou
veaux Vandales. Jugez-en, N. T.-C. F-, par
les exactions, les spoliations, Tes violences et
les ruines qui ont signalé leur passage dans
les campagnes que parcouraient ces étran
ges libérateurs, dans les villes 'qui, pour les
adoucir, leur ouvraient leurs portes. Vous
comprenez aussi, sans qu'il soit nécessaire
d'insister sur ces affligeants détails, que leur
haine et leur fureur se portaient de préférence
contre les lieux et les objets consacrés à la
religion. Pour certaines âmes dépravées la
profanation a des charmes, et le sacrilège
d'abominables attraits. Aussi, afin de ne lais
ser aucun doute à cet égard, le récit indigné
et désolé de nos soldats s'accorde avec la pa
role grave et mesurée des rapports officiels,
pour nous dépeindre, dans certains lieux que
ces impies avaient souillés de leur présence,
les églises dépouillées et violées, les statues
mutilées, les croix abattues, les vases sacrés
dérobés au tabernacle, les saintes hosties fou
lées aux pieds, profanées et outragées avec
des raffinements dignes de l'enfer.
0 Dieu, vous avez souffert toutes ces inju
res sans répondre à ces provocations insen
sées! Est-ce pour laisser-à ees-epinainels le
temps et le mérite du repentir, ou pour leur
permettre de combler la mesure de leurs ini
quités ? Est-ce pour donner à vos ministres
un avertissement qu'il leur est utile de médi
ter, si me persecuti sunt, et vos persequentur,
s'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront
aussi (I), ou pour'enflammer l'amour de vos
enfants fidèles et le courage de vos soldats,
témoins indignés de tant de scandales? Est-
ee pour détromper les âmes honnêtes, trop
confiantes aux protestations hypocrites de
l'impiété, et pour les convaincre que votre
cause et la cause de l'Eglise sont identiques,
que les ennemis de. la puissance temporelle
de votre représentant sur la terre sont les
ennemis de son indépendance et de son au-
j torité spirituelle, et les ennemis personnels
' de Jésus-Christ votre fils? Il ne nous appar
tient pas, N. T.-C. F., de scruter les mystè
res de Dieu, les conseils de sa sagese et les
décrets de sa justice patiente, parce qu'elle
est éternelle ; mais npus avons le devoir que
vos âmes chrétiennes sauront comprendre et
voudront remplir, d'adorer humblement sa
majesté méconnue, et de lui offrir, en répa
ration des outrages scandaleux qui lui ont
été infligés, les ardentes et solennelles pro
testations de notre foi et de notre amour.
Aussi les trois jours de supplications publi
ques prescrits par notre bien-aimé Père,
qu'il nous reste à vous annoncer, N. T.-C.
F., révêtiront le caractère, hélasi. trop justi
fie, d'amende honorable".
* Pendant què les choses saintes étaient ainsi
profanées, et que des. hordes avides de sang
et de rapines épouvantaient la capitale et les
provinces de l'Etat pontifical, que faisait
Pie XI? Comme son Maître dans son agonie,
il prolongeait ses prières, factus [in agoniâ
prvlixiùs orubat (2). Dans les jours même que
toute protection humaine lui faisait défaut,
lorsque ses peu nombreuses mais héroïques
milices faisaient des prodiges de valeur pour
repousser de toutes parts des nuées d'enva
hisseurs lorsqu'il voyait à deux ou trois jour
nées de marche du Vatican, auprès de ses
frontières ouvertes qu'elle allait bienlôt fran
chir, au mépris du droit des gens, une armée
de cinquante mille hommes, le sublime Pon
tife, dominant ses ennemis de toute la force de
son droit et de toute la hauteur de sa foi, le
vait les yeux vers le ciel et le3 abaissait sur
ses enfants. Il nous exprimait ainsi les deux
sources de sa confiance et les deux objets de
son amour. Le secours puissant qu'il espère,
il l'attend de Dieu, il vssÈ l'obtenir par nos
prières. Aussi, dans uns éloquente Encycli
que que vous avez lue et admirée, N. T.-C.
F., il prescrit une prière universelle.
Ne pensez pas que ce soit pour écarter des
maux qui lui seraient personnels. Le servi
teur ne doit pas être mieux.traité q"uele-maî-
tre; personne ne l'a mieux compris que
Pie IX. Il est, lui aussi, un homme de dou
leurs : les ingratitudes, les trahisons, les
craintes, les angoisses : il connaît tous ces
déchirements du cœur, toutes ces tristesses
de la vie, virum dolorum et scientem infirmita-
tem (S).
Sa tiare a été souvent une couronne'd'épi
nes ; son manteau royal a élé lacéré, ils ne
lui én ont laissé que quelques lambeaux;
dans son palais, il éprouve l'indigence et
mange le pain de la tribulation ; sur la voie
douloureuse de l'exil il a bu l'eau du torrent.
C'est pour cela que Dieu l'a exalté, qu'il
l'exaltera encore, propterea exaltabit caput (4).
Voyez comme son front resplendit, comme
tous les yeux, toutes les intelligences, tous
les cœurs sont tournés vers lui. En vérité,
les consolations ont égalé las épfeuves. Ne
pleurez donc pas sur lui, mais pleurez sur
vous et sur vos enfants, et détournez, par
vos expiations et par vos prières, - les châti
ments qui les menacent pour le temps et
pour l'éternité...
La loi des aliénés se trouve, en réalité,
remise à l'étude par l'effet du vote ré
cent du Sénat sur la pétition du docteur
Turck, et elle subira, sans aucun doute,
des remaniements considérables. D'a
près le rapport présenté par l'honora
ble M. Suin, il ne s'agirait pas, il est
vrai, de refondre, mais uniquement de
pérfectionner la loi du 30 juin 1838,
d'en assurer, en un mot, l'exécution in
telligente et ,loyale, et de simples dé
crets suffiraient à cette tâche, sans que
le pouvoir législatif eût à intervenir. Bien
que renfermées dans ce cercle limité, les
réformes proposéés parles conclusions de
la commission et le vote du Sénat qui a
accueilli ces conclusions ont une portée
grave. La loi existante est piquée à la
moelle; elle est atteinte' dans ce systè
me de clandestinité qui en était le dan
ger et l'un des vices capitaux.
La législation de 1838 a fondé une
sorte d'autocratie delà sciencealiéniste.
(!) Joan.. XV 80.
(-2) Luc, XX'H, 43.
(3) Is. LUI, 3.
(4) Ps., G1X, 8.
Sur un simple certificat de médecin^ et
à la demande d'un parent ou même d'un
tiers officieux, elle a autorisé l'interne
ment de toute personne soupçonnée
d'insanité d esprit ; l'action préventive
et oreservatrice de l'autorité judiciaire
a <.'Ui,e£M.rttq et la justiçe, dans ce sys
tème, n'a jamais pu être appelée à in
tervenir qu après coup, pour faire ces
ser une séquestration arbitraire sous
couvert d'aliénisme, et pour réparer
des désastres matériels et moraux trop
souvent irréparables.
La justice agira préventivement ; le
Sénat a exprimé son adhésion au chef
de la pétition du docteur Turclt, qui ré
clamait que le juge de paix intervienne
avan' l'internement. Le juge de paix,
ou tout autre magistrat de l'ordre judi
ciaire, s'assurera personnellement de
l'état mental du malade, en le soumet
tant à un interrogatoire ; il recevra le
serment de l'homme de l'art chargé de
l'examen médical et procédera, s'iMe
juge opportun, à une discrète enquête
dans la famille ou dans le voisinage.
Sans comporter une publicité alarmante
pour de douloureuses et respectables
susceptibilités, cette tutélair-e appari
tion du magistrat, dès^ le début, aura
inévitablement pour résultat de décon
certer et de prévenir des machinations
coupables, des fraudes odieuses, qui ne
sauraient que bien difficilement se pro
duire sous l'œil ouvert de la justice.
Voilà, certes, un correctif dont la né
cessite était évidente et dontl'impor-
"tasSeWlst majeure. Mais la loi de 1838
donne d'autres prises aux plus amères
critiques et appêlle, sur d'autres points
encore, des réformes non moins indis
pensables. Nous y sigaalerons^ une la
cune qui se conçoit à peine : l'absence
de toute pénalité contre les particuliers
qui peuvent abuser de ses dispositions
dans l'intérêt de leur cupidité ou de
leurs haines privées. La prévoyance de
la loi s'est portée du côté où l'abus était
le moins à craindre; l'article 30 punitde
peines correctionnelles le fait des direc
teurs ou préposés des établissements
d'aliénés, qui retiendraient indûment
un de leurs pensionnaires dont la sortie
aurait été ordonnée par le préfet ou par
le tribunal. Des prévarications de cette
nature sont peu à redouter ; quelle ap
parence qu'un directeur d'asile, placé
sous la dépendance de l'administration,
ose braver un ordre d'élargissement
émané de l'autorité administrative ou
judiciaire ? , .
L'article 41 de la loi de 1838 prévoit
encore et réprime, toujours de la part
des administrateurs des asiles, l'infrac
tion à certaines dispositions réglemen
taires concernant la tenue des registres,
qui Joivent présenter ie mouvement
d'entrée et de sortie des malades, ainsi
que les phases de l'affection et distrai
tement.— Mais, quant au fait qu'il était
surtout essentiel de prévenir, au moins
par l'intimidation d'une pénalité rigou
reuse, quant à l'internement fraudu
leux, dans une maison d'aliénés, d'un
homme sain d'esprit, la loi est restée
muette et désarmée de toute disposition
répressive! Un homme faisait obstacle;
il gênait une ambition ou une passion;
on a perfidement présenté comme un
symptôme de démence une névrose dont
il était atteint. Finalement on l'a rendu
fou en le faisant enfermer et traiter
comme tel, et ce meurtre intellectuel,
ce crinae nouveau, ce crime jusqu'ici
innommé que la loi de 1838 a rendu pos
sible, elle a eu l'incroyable distraction
de ne pas même le prévoir et de ne s'ar
mer à son encontre d'aucune pénalité
spéciale !
A première vue et dans le premier
étonnement d'une aussi énorme lacune,
on est tenté d'imaginer que le droit com
mun peut suppléer à l'insuffisance de la
loi spéciale, et que l'article 341 du code
pénal, qui punit des travaux forcés à
temps les arrestations ou détentions illé
gales, commises par de simples particu
liers, serait sans difficulté -applicable à
l'internement frauduleux d'une per
sonne dans une maison de fous, comme
à tout autre mode de séquestration—Ce
serait, hélas ! une déception de le penser
et de croire qu'on pût ici prendre assis
tance du droit commun et de l'article^du
code pénal. La cour de^ cassation s'est
prononcée; par un arrêt du 18 février
1842, elle a déclaré Iadisposition de l'ar
ticle 341 inapplicable et cassé un arrêt
de la chambre des mises en accusation
de la cour de Rouen, qui avait jugé le
contraire. Il s'agissait de deux époux
qui, de complicité, avaient fait renfer
mer un parent sain d'esprit dans .un
asile d'aliénés.
La mauvaise foi et l'intention fraudu
leuse des époux Rosny (c'était le nom
des prévenus) n'étaient pas, au moins
en l'état, mises en question; la cour ré
gulatrice ne cassa pas moins l'arrêt qui
les avait, peur ce fait, renvoyés devant
la cour d'assises. Et cette solution, que
l'on y prenne garde, était absolument
et très-irréprochablèment juridique. En
effet,'le crime prévu et puni des travaux
forcés à temps par l'art. 341 ^ du Code
pénal est proprement ce que l'on appe
lait autrefois le crime de mise en charte
privée. Pour avoir changé de nom, il n'a
pas changé de nature, et il est de son es
sence que l'individu séquestré soit déte
nu dans un domicile privé, où il se
trouve sans communication avec les
tiers, et pleinement à la discrétion du
séquestrateur ou de ses complices.
Les asiles d'aliénés sont manifeste
ment dans d'autres conditions ; ces éta
blissements, qu'ils soient publies ou
même privés, ont toujours un certain
caractère de publicité, en ce sens qu'ils
sont autdTrisés par l'administration et
sujets à sa surveillance. Les malades ou
prétendus tels qui y sont détenus ne se
trouvent, ni directement ni indirecte
ment, sous la mitn et à lia discrétion de
la personne qui y a fait opérer leur pla
cement. L'internement frauduleux dans
une maison de fous a donc cette singu
lière fortune fd'être un crime à part, un
crime sui generis , qu'aucun texte de loi
n'a qualifié; et qui échappe pour cette
cause a toute répression, fes arguments
d'analogie et de similitude plus ou
moins prochaine n'ayant pas cours en
matière de droit pénal.
Ce crime a un degré de plus de per
versité que la séquestration ordinaire,
en ce qu'il s'enveloppe le plus souvent
d'un prétexte d'hypocrite sollicitude ;
il est jîlus funeste pour la victime dont
il peut flétrir à toujours l'intelligenc&et
le cœur, qu'il peut moralement et socia-
lementânnuler;...mais,une fois encore,
aucun texte lagal ne l'a défini et ne l'a
étreint.
La loi spéciale est muette, la disposi
tion générale du code pénal lui est inap
plicable, et il passe impunément à tra
vers le réseau de nos lois criminelles.
Le gouvernement est saisi d'un tra
vail de remaniement de la loi de 1838 ;
il est impossible que son attention ne
se fixe pas sur un vice aussi saillant que
ce manque de toute garantie répressive.
Nous avons cru, pour notre part, devoir
signaler cette regrettable lacune, d'au
tant que la question n'a été jusqu'ici
traitée qu'à bâtons rompus dans les ar
ticles des journaux, et que le Sénat a
voté sans discussion les conclusions de
la commission et du rapport. Cette sup-
pressîofTdïi débat jjûbiïc â dû plaire à
la science aliéniste, qui n'aime pas que
l'on regarde au fond de ses fragilités ;
mais elle laisse la question inépuisée et
impose à la presse l'obligation de discu
ter les points restés dans l'ombre.
En tous cas, des résultats importants
sont acquis ; et d'abord, le contrôle pré
ventif de l'autorité judiciaire : les ma
lades de l'intelligence ne seront désor
mais livrés à la médecine officielle
qu'avec le visa préalable du magistrat.
En outre, la commission a émis, et le
Sénat a implicitement sanctionné le
vœu, qu'on laissât dans leurs familles
les aliénés réputés incurables et inoffen
sifs, ep. allouant, pour leur traitement à
domicile, des subventions aux parents
indigents. L'omnipotent monopole de
la médecine aliéniste est entamé, et le
droit, ou pour mieux dire quelque
chose de plus sacré que le droit, le de
voir des familles, est affirmé dans une
certaine mesure. Au point de vue moral
de la question, ce résultat n'est pas le
moins important.
P h. S erret.
12Avenir national doniie sur la séance
du conseil supérieur de l'enseignement
une appréciation analogue à celle du
Journal des Débats, que nous avons citée
hier. Le Siècle reproduit l'analyse du
Journal des Débats, en y ajoutant quel
ques paroles.... épaisses.
Le Moniteur de ce matin publie en en
tier le procès-verbal, qui ne contient
encore qu'un résumé de l'exposé du mi
nistre, dont M. de Royer avait cepen
dant demandé l'impression et la distri
bution : impression, distribution, que
nous désirons d'autaut plus, que les ré
sumés de procès-verbaux laissent tou
jours à désirer.
Celui de la séance du conseil supé
rieur ne serait même pas, dit-on, à
l'abri de tout reproche les Prélats qui
ont assisté aux deux séances du 9 et
du II décembre ne retrouvent plus;
du moins* si l'on en croit quelques jour
naux, le caractère de leurs paroles et de
leurs observations dans l'analyse qu'on
en a faite.
lîIndépendance belge dit à oe sujet ':
Il paraît positif que l'Archevêque de Paris
et l'Evêque de Châlons réclament contre
l'approbation que M. Duruy dit avoir été
donnée par eux à son plan d'éducation secon
daire des filles. Des cinq prélats membres
du conseil supérieur de l'instruction publi
que, ces deux là seuls se trouvaient à la
séance dont il s'agit. Ils auraient été, dit-on,
appelés à s'exprimer sur l'initiative prise par
M. Dupanloup plutôt que sur les idées per
sonnelles d'éducation de? filles de M- Du
ruy, et, comme il n'y avait aucune déci
sion à prendre au sein du conseil, ils n'au
raient point attaché d'au-tre importance à ces
conversations qui n'étaient pas destinées à
la publicité et dans lesquelles ils avaient fait
toutes leurs réserves à l'égard du plan du
ministre de l'instruction publique.
Le procès-verbal ayant atténué ces réserves
et mis sous un jour trop favorable les idées
de M. Duruy, l'Evêque de Châlons (après la
note de VEtendard qui constatait l'adhésion
pleine et complète des Evêques au système
de M. Duruy) aurait envoyé une protesta
tion à M. Nisard. Voilà ce qui se dit et ce
que je vous transmets.
M. Nisard est le secrétaire du oonseil
supérieur.
La Situation ajoute aux renseigne-;
ments de Y Indépendance, et, assurant'
qu'elle répète les conversations du salon
de M. le ministre des cultes, elle dit :
Dans une première séance, à laquelle as
sistaient Mgr Darboy et un autre Evêque,
M. Duruy aurait, en exposant les avantages
des nouveaux cours qu'il vient de fonder
pour les jeunes personnes, essayé d'incrimi
ner les lettres de plusieurs prélats prenant
surtout à pkrtie Mgr Dupanloup. _
L'Archevêque de Paris défendit son col
lègue avec fermeté, mais avec cet esprit de
conciliation qu'il apporte en toutes choses.
La séance suivante, Mgr Darboy n'y était
pas; mais, en entendant lire le procès-verbal
delà dernière réunion, un évêque qui n'avait
pas pu s'y rendre fut étonné de la manière
dont les faits étaient racontés, et, ne voulant
pas croire que ce fût le compte-rendu fidèle
des parolusjde l'orateur, il fit appel aux sou
venirs d'un autre évêque qui avait pris part
à la discussion.
Celui-ci affirma alors que le rédacteur du
procès-verbal avait sensiblement -modifié les
termes mêmes de la question. Mgr Darboy
a, dit-on, été très-ému de cet incident qui
pourrait amener d'assâz. sérieuses
tions.— A. Delrieux. ■
Le procès-verbal que nous ai
hier indique les noms des PrJ;
la Sitiiation ne désigne pas.
S'il y avait quelque chose de
dans les bruits que rapportent ■
journaux, on aurait .lieu de s'étonnCr de
la publicité insolite donnée au procès-
verbal de la séance du conseil supérieur.
Léon Aubinea.it.
On nous écrit de Munich, le 17 dé
cembre :
Je ne sais si l'on a bien remarqué en
France la'conduite qu'a tenu^M.de Bis
mark à propos de la principauté de
Waldeck. Le terrible appétit qui a dé
voré si facilement des royaumes, et qui
semble en convoiter d'autres, dédaigne
cet Etat vraiment lilliputien; les an-
nexeurs sont pris de scrupule et, ce qui
est plus étrange, à ceux qui disaient
que les habitants de l'enclave de Wal
deck n'auraient pas de patrie, l'homme
qui tend à tout absorber dans la Prusse
a répondu : « Ils seront Allemands ! »
La modération n'a pas ici grand mé
rite, mais elle doit avoir un but. Or,
voici ce que me disait à cet égard un
homme d'Etat de premier ordre, très-
activement occupé à présent même de
toutes les grandes affaires européen
nes : Le grand ministre prussien se pré
pare là, selon lui, un argument qu'il
fera valoir au besoin contre ceux qui vou
draient presser outre-mesure les autres
annexions plus importantes. Il ne fau
drait pas avoir l'air de redouter l'étran
ger quand on refusera d'aller trop vite, et
l'on dira alors : « Voyez notre conduite
« à l'égard du Waldeck. Nous n'avions
« là personne à craindre, et cependant
« nous l'avons laissé subsister. » — Il
y a, en effet, en Prusse, des "ambitions
plus hâtées que celle de M. de Bismark,
et, quant à lui, il ne veut pas la guerre ;
il en aurait plutôt périr.
Gomme tous les Prussiens que l'on
rencontre sont parfaitement convaincus
que leur seul aspect suffira pour mettre
une armée française en déroute et
qu'ils parlent ouvertement d'aller à Pa
ris en conquérants, comme s'il s'agis
sait d'aller voir une seconde Exposition,
je me suis récrié sur cet esprit pacifique
et prudent que mon interlocuteur prê
tait au bouillant ministre. Il m'a répon
du qu'avant Sadowa M. de Bismark
était comme un joueur qui n'a rien en
poche et qui fait son va-tout sur une
seule carte. Aujourd'hui il a gagné, il
tient à son avoir et n'aimerait pas à
l'aventurer. 11 est personnellement trop
intelligent pour prendre part aux fan
faronnades de ses capitans; il voit mieux
le pour et le contre, et, comme l'assi
milation est loin d'être faite, il sait bien
qu'il aura des soulèvements dans les
pays déjà conquis, le jour même où la
guerre commencerait.
Et puis, pourquoi se presser ? Le Sud
ne vient-il pas à lui tout seul? La re
connaissance rte suffira-t-elle pas à jeter
dans ses bras les Bavarois, les Badois et
les Wurtembergeois? Il s'intéresse tant
à eux et à leur bien-être !
Par le Zollverein et son Parlement, il
a prouvé combien il tenait à ce que leur
commerce et leur industrie prospéras
sent. Il a montré plus de zèle à cet égard
que leurs propres gouvernements, et il
a même forcé la main aux plus récalci
trants. Et leurs armées? avec quelle
bonté il s'en occupe ! Il les réorganise ;
il les traite comme la sienne propre ; il
veille' à ce que leurs fusils aient toutes
les qualités requises. En toutes choses il
est comme un père, et, le jour venu, il
n'aura qu'à ouvrir les bras pour pres
ser sur son cœur ces enfants qu'une
dure nécessité tient encore trop éloignés
de lui.
Non, la France peut être bien tran
quille, il ne l'attaquera pas, et il évi
tera, s'il le peut, les occasions qui pour
raient s'offrir à lui, de lui causer une
inquiétude prématurée. Si seulement
elle le laisse faire, il se bornera à par
faire l'assimilation de ce qu'il possède
déjà; il prépare le terrain ailleurs, et il
ne frappera le grand coup que quand il
sera trop tard pour s'y opposer. Les pe
tites armées qu'il soigne si bien seront
dignes d'entrer da"ns les rangs de la
sienne, et alors on pourra, sans trop de
présomption, s'occuper de l'Alsace et
autres lieux germaniques.
L'Autriche paraît menacée d'une, in
vasion saxonne. — On télégraphie do
Dresde au Fremden-Blatt que le baron
de Beust, frère du chancelier impérial;
va se rendre à Vienne, où il deviendra
conseiller de Sa Majesté.—Le général
de Gablenz, Saxon d'origine et protes
tant, aurait le ministère de la guerre,
—Enfin on parle de placer dans la diplo
matie autrichienne le comte Vitzthum,'
jadis ministre de Saxe à Londres, pro
testant aussi et vrai pendant de M. de
Beust, qu'il admire de tout son cœur et
dont il imite de son mieux l'activité dé-;
vorante, allant partout pour voir si on.
n'a pas besoin de lui, se mêlant de tout,»
et fort aimé par son ancien chef.
B. D'AGREVAIi."
Mgr l'Evêque d'Amiens, qui avait déjà
écrit à Mgr d'Orléans, vient d'adresser à
Mgr de Tours la lettre suivante :
k Amiens, 10 décembre 1867.
« Monseigneur,
» Souffrez que j'adresse à Votre Grandeur
mes félicitations et mes remercîmenis pour
Yexeelente lettre qu'elle a publiée sur la gra
ve question qui, en ce moment, préocupe si
vivement l'Episcopat.
« Les intérêts les plus graves ne m'ont pas
permis de rien publier encore. J'aurais peut-
être blessé, à Amiens, des hommes que je rie
voudrais même pas contrister; mais tout le
monde a su ce que je pense de la fatale con-
N° 245. — Edition quotidienne
Vendredi SO décembre 1861
PARIS
On an >s ,. 60 fr.
Six mois. 31
Trois mole »... .......... 16
Le numéro : 15 centimes
Paris, 10, rue des Saints-Pères
On s'&bonnefc Home, an bureau de la Civiltà cattolica
via del Gesa» 61
• \
'//!
DÉPARTEMENTS
Un su.,.66 ft
Six" mais.............i». Si
Trois mois ■ . ,. 18
Édition semi-quotidienne
Un an, 36 fr. Six iaols, 19 fr. —Trois mol3,10 (t.
. V Vniaers ne répond, pss desmamuclitj qui lui «ont »dre»2*
ANNIOIDCaBS
Il. Cil. LàGRâNGl & CEliï, 6, plaça de la Bourse
France
PARIS, 19 DÉCEMBRE 186?
1 Ë$WaJL,jE1W
Les Italiens et M. Menabrea lui-même
seraient fort étonnés sans doute, s'ils lisaient
dans l8--4&wfeM)M-pnnçaia le
cours qui sont prononcés dans la salle des
Cinq-Cents, à Florence. Nous avons rapporté
hier une phrase du président du conseil, dé
clarant qu' « avant tout il faut que la France
évacue le territoire pontifical. » Voici ce que
devient cette déclaration, grâce aux habiletés
du Moniteur :
Appréciant lu convention de septembre, qui ne
contient aucune clause résolutoire, le général Me
nabrea la considère comme existant toujours en
droit; tout au plus peut-il dire qu'elle est mo
mentanément suspendue. En ce qui concerne
les négociations à venir, il exprime l'opinion
que l'Italie doit rechercher avec prudence et ar-f
deur les moyens d'exister parallèlement avec le
gouvernement pontifical et d'obtènir ainsi l'éva
cuation du territoire romain par les troupes
fi ançaises.
Dans la suite de son discours, dont la té
légraphie nous transmet ce matin le résumé,
le général Menabrea a répété qu'il accepte le
vote de 1861, et, pour justifier sa conduite
vis-à-vis la France, il a dit que le gouverne
ment n'avait pas manqué de répondre à quel
ques paroles blessantes prononcées par des
ministres français. Quelles nouvelles expli
cations nous donnera le Moniteur pour atté
nuer l'impertinence du langage ministériel?
Nous reconnaissons volontiers qu'il convient
à une nation généreuse et puissante de paraî
tre longanime en face de ceux qui l'insul
tent, mais cette générosité ne peut aller jus
qu'à nous faire souffrir d'être à ce point hu-
rtiîliés parîSsi+Etiirôg qui nous doivent'tout.'
Le Constitutionnel, qui d'ordinaire suit do
cilement le Moniteur, aujourd'hui le devance
maladroitement. A propos de deux lettres de
Garibaldi adressées à des Anglais, le journal
Boniface-Limayrac fait témérairement la ré
flexion suivante :
« C'est le digne complément de ces discours
français et italiens qui comparaient la pré
sence du Souverain-Pontife à Rome à l'occu
pation de Cherbourg ou de Paris par les An
glais. »
Le Constitutionnel ne 'sait-il pas que M.
Menabrea. plaît au Moniteur, ou ne se sou-
vient-il plus que M. Menabrea est l'auteur
de « ces discours italiens qui compa
raient, etc. » Menabrea et Garibaldi, c'est
donc tout un, d'après le Constitutionnel. Voi
là une vérité que nous ne nous attendions
pas à recueillir d'une telle bouche. Et désor
mais nous saurons que lorsqu'il donnera des
louanges à M. Menairea, le Constitutionnel
voudra faire du même coup l'éloge de Gari
baldi.
Nous n'avons rien -à dire du discours de
M. Rattazzi. Ce que nous en connaissons
nous paraît l'œuvre d'un médiocre avocat,
peu franc.
La Correspondance -provinciale, de Berlin,
annonce que la représentation diplomatique
de la Confédération du Nord sera organisée
sous peu. Les représentants actuels de la
Prusse seront accrédités en qualité d'ambas
sadeurs de la Confédération du Nord. Tout
cela est du formalisme ridicule, et personne
n'y sera trompé. Imagine-t-on en Allemagne
que nous ignorions toute lavanité de ce mot :
Confédération du Nord?
ÎJne commission de la Chambre des dépu
lés dt3 Saxe vient d'être saisie d'un projet
présenté par le gouvernement et tendant à
introduire le système du jury dans l'prgani-
sation judiciaire du royaume.
Les nouvelles officielles des troupes expé
ditionnaires d'Abyssinie constatent, dit le
Moniteur , le bon accueil que l'avant-garde
britannique a reçu des populations, à son ar
rivée à Senafe. Plusieurs chefs des tribus
voisines ont envoyé des messagers chargés»
d'offrir leurs bons offices aux Anglais.
Le bruit courait que l'empereur Theodo-
ros avait brûlé la ville de Debratebor et éta
bli un camp à quelques milles de là. On
prête, d'ailleurs, au négus l'intention de;
s'opposer à l'entrée des troupes royales à
Magdala; mais il paraît rencontrer de la part
des habitants de la campagne une hostilité
qui l'empêcherait définitivement de s'établir
sur ce point.-
A uguste R oussel.
JLettre pastorale
DE L'ÉVÊQUE DE LIMOGES
sur quelques .devoirs qui résultent
' qhs événements récemment accomplis dans l'état
pontifical
et mandement
prescrivant"un triduum de prières en exécution
de l 'encyclique de notre saint-pèhe le pape
du 17 octobre 1867
Vous avez suivi avec anxiété, Nos Très-
Chers Frères, les événements qui viennent de
s'accomplir dans le patrimoine de Saint-Pier
re. Cette agression sacrilège, dont le but, les
acteurs et les complices, effrayai ent l'imagi
nation et révoltaient la conscience, n'a trouvé;
nulle part la neutralité ou l'indifférence. Les
ennemis de Jésus-Christ et de son Eglise,
aveuglés par leur haine impie, ont pris ou-
•vertement le parti des envahisseurs ; et quand,
avec son honneur, le drapeau de la France a ,
été engagé dans la lutte, il a fallu, pour les
rappeler au sentiment vulgaire de la pudeur,
leur citer un article du Code pénal. Certains
égoïstes, troublés dans leur repos, ont parlé
timidement, il est vrai, de concessions hon
teuses et d'une paix impossible entre l'ordre
«t le désordre, la vertu et le vice, la vérité et
'l'erreur: dicentes pax, pax ; et non erat pax (1).
Mais combien d'honnête3 gens, dont quel
ques-uns avaient été jusque-là incertains ou
égarés, se sont prononcés hautement pour la
cause la plus juste, la plus faible et la plus'
indignement attaquée ! Parmi eux, les cœurs
vraiment français et vraiment catholiques
ont, à ce double titre, éprouvé plus vivement
les tressaillements de la commotion uni ver
selle.
Mais ce n'est pas tout d'avoir été profon-
'âément sensible aux péripéties d'un drame si
imposant, aux alternatives émouvantes d'une
cause qui est éminemment la nôtre. Ne lais
sons faillir ni notre vigilance, ni notre dé
vouement, ni notre prière. Car l'ennemi
vaincu n'a pas désarmé. Comme un lion
blessé, il rugit' dans ses antres secrets, il
rôde menaçant et irrité autour des frontières
eiu. petit Etat qui garantit, avec l'indépen
dance du Souverain Pontife, notre dignité
morale et notre liberté religieuse : au besoin,
il prendra la toison blanche de l'agneau, pro
testera de son amour pour l'Eglise, de son
Respect pour Pie IX,et se présentant dans les
conseils de la diplomatie, il tendra la main et
(1) Jêr.^VI, 14.
dômanderaleprixdesadéfaitequ'il n'a pas reçu-
cette fois.Donc, que les catholiques soient sur
leurs gardes ; armés du bouclier de la foi et-
du glaive de la: parole, qu'ils ne laissent pas
sommeiller l'opinion puBlique dont le réveil
heureux a été pour le gouvernement, dans
les difficultés présentes, une force et un ap-
de la protection de Dieu, eïaeTassistance de
ses fils généreux jusqu'à la prodigalité, dé
voués jusqu'au sacrifice.
A cette occasion, nous vous remercions,
N. T.-C. F., d'avoir si libéralement répondu
à notre récent appel, et d'avoir mérité une
place dans cette grande manifestation catho
lique qui cause à l'impiété d'amers déplaisirs.
Il n'est pas inutile d'ajouter ici que ceux qui
secourent généreusement leur Père, n'ou
blient pas leurs frères malheureux. Pie IX,
malgré sa détresse, refuserait les aumônes
qui seraient enlevées aux nécessités des indi
gents qu'il aime tarit à soulager. Du reste,
les pauvres ne s'y trompent pas. Us savent
que ce sera toujours dans les maisons chré
tiennes qu'ils trouveront l'accueil le plus
sympathique, et l'assistance la plus délicate
et la plus empressée.
Les circonstances actuelles ne nous rap
pellent pas seulement nos obligations géné
rales et permanentes ; elles nous imposent
encore des devoirs particuliers que nous n'a
vons nul désir de taire ou de décliner, que
nous embrassons,au contraire, par le cœur et
par la conscience.
Nous devons avant tout, N. T. C. F., de
solennelles actions de grâces au Dieu des ar
mées qui a inspiré au cœur des vaillants dé
fenseurs de l'Eglise cette indomptable ar
deur, cette abnégation chrétienne, ce mépris
du danger, cette soit du martyre, qui ont dé
cuplé leurs forces et transfiguré jusque dans
la mort leursftraits de prédestinés. Comment
Rome a-t-elle pu sortir saine et sauve de la
double et formidable épreuve qui devait as
surer sa ruine, alors qu'il y avait contre elle
« au dehors les combats, au-dedans les crain
tes (1), » au dehors les attaques mulli-
pliées et acharnées snr tant de points à la
lois ; au-dedans de plus terribles machina
tions et de plus odieux complots tramés dans
l'ombre par l'audaceet la perfidie? Ah ! Dieu
seul sait ce qu'il a fallu d'activité, de persé
vérance, d'énergie morale et de force physi
que aux héroïques soldats du Christ pour en
durer tant de privalions, braver tant de pé
rils, faire face à tant d'ënnemis, et par une
série de combats heureux, où. la valeur sup
pléait au nombre, soutenir une lutte inégale
sans cesse renaissante, qui devait enfin cou
ronner une grande et décisive victoire. « Bé
nissons le Dieu d'Israël qui a visité et déli
vré son peuple (2), » e^t, « chantons le'Sei-
gneur qui a manife sté glorieusement sa puis
sance (3) Cantemus Domino, gloriosè, enim
magni/icatus est.
Notre joie à nous, Français et catholiques,
doit être plus vive, notre fierté plus légitime,
notre reconnaissance plus profonde et plus
expansive. Car la fille aînée de l'Eglise, la
noble France de Clovis, de Charlemagne et
de saint Louis était là, au poste de péril et
d'honneur que lui ont légué toutes les tradi
tions de son histoire : elle était là, aux por
tes de la Ville-Eternelle qu'elle devait s&u=
ver encore, qu'elle protégera toujours... elle
était là sur ce champ de bataille de Mentana
avec ses bataillons invincibles, avec son in
trépide légion de volontaires, avec la phalan
ge sacrée « formée par un héros pour la dé
fense d'un saint, » avec ces soldats du Pape
qui ont conquis l'estime et l'admiration de
nos généraux et de nos guerriers, si bons
juges de la valeur militaire. La bannière
pontificale et le drapeau français y flottaient
ensemble, et confondaient leurs plis rayon
nants d'un éclat pareil comme pour mieux
attester l'identité de la cause et la fraternité
des sentiments dans la participation à la mê
me gloire.
Mais, hélas! l'allégresse du triomphe n'a
pas été sans mélange d'amertume et de
deuil ; ces succès nous ont coûté du sang,
un sang pur et généreux, un sang qui est i
nôtre, parce qu'il a été répandu par nos frè
res dans la patrie et dans la religion, pour
nous, pour les intérêts sacrés de nos âmes,
pour l'honneur et les engagements da notre
pays, pour la dignité et l'indépendance de
l'Église dans son Chef suprême, pour Jésus-
Christ dans la personne de son Vicaire. Ah ! J
sans doute, ce sang versé avec tant de géné
rosité, et pour une cause si sainte, aura par
ticipé à la vertu souverainement méritoire du
martyre enduré pour la foi. Cependant, s'il y
manquait encore quelque expiation aux yeux
de la justice divine, nous y suppléerions par
la vertu surabondante et les mérites infinis
du sang de Jésus-Christ lui-même. A l'exem
ple de l'illustre chef du peuple de Dieu, nous
prodiguerons nos pieux suffrages en faveur
des nouveaux Machabées. Nous offrirons nos
prières, nos bonnes œuvres, de ferventes
communions, l'auguste sacrifice de l'autel, à
l'intention des nobles victimes ensevelies
dans leur triomphe, des blessés qu,e Pie IX
visitait naguère en pleurant, et qui l'accla
maient avec amour ; des héros chrétiens que
la Providence a préservés, les réservant peut-
être' à de plus rudes épreuves, et de toutes
ces dignes familles dont nous avons admiré le
dévouement, ressenti les angoisses et partagé
le deuil. Puissent ces prières, qui sorlent de
nos cœurs, être pour eux tous un hommage
et une bénédiction ! Pour nous, elles sont
l'acquit d'une dette de gratitude que nous
sommes heureux de reconnaître, qu'il nous
sera doux de payer (4)-
Nous croirions, N. T.-C. F., faillir .à l'es
prit miséricordieux de Jésus-Christ, qui vit
si admirablement dans son représentant su
prême, si nous venions à oublier dans nos
humbles supplications ceux qui lui ont voué
une haine toute gratuite ; ces ennemis, pri
sonniers ou blessés, que Pie IX visite, Gon-
sole et secourt paternellement, dans son inef
fable mansuétude, ces pauvres égarés qu'il
éclairs d'une parole de ses lèvres ou d'un
geste de sa main bénissante, ces persé
cuteurs et ingrats qui s'étonns^t de tomber
à ses genoux sous la pression irrésistible du
repentir, dé la vénération et de l'amour.
Pourquoi faut-il qu'en pardonnant avec
Pie IX à tant de criminels, nous soyons obli
gés avec lui, de rappeler et de flétrir leurs
odieux attentats? On ..ne sait vraiment de
duel nom caractériser ce mélange équivoque
de bandes indisciplinées et de troupes régu
lières qui croyaient aller à de faciles triom
phes et à de lucratifs pillages. Toujours est-
il queehez un certain nombre de ces tristes
reqrues, l'impiété du sectaire se trouvait
jointe à la rapacité du brigand. A côté de
(1) Cor., VII. 5.
(2) Luc, I, 68.
(3) Exod., XV, 1.
(4) Nous célébrerons pontificalemenf, vendre
di 29 novembre, dans notre église cathédrale,
un service p&ur tes morts de l'armée pontificale
et de l'armée française.
J soldats, qui avaient perdu ce nom honorable
en dépouillant leur uniforme pour revêtir la
livrée du sicaire, à côté de jeunes gens en
traînés par des passions ardentes, et des doc
trines funestes, à côté de malheureux paysans
arrachés par la violence à leurs travaux
champêtres, on voyait avec effroi de ces êtres
hideux qui ne.,s'appartiennent plus, que l'hu
manité repousse, voués au crime par d'abo
minables serments, vendus à la révolution
comme exécuteurs de ses hautes œuvres,
dressés dans les sociétés secrètes à blasphé
mer, à maudire et à tuer.
On frémit à la pensée du sort que réser
vaient à Rome, à ses monuments, à ses chefs-
d'œuvre incomparables ces hordes de nou
veaux Vandales. Jugez-en, N. T.-C. F-, par
les exactions, les spoliations, Tes violences et
les ruines qui ont signalé leur passage dans
les campagnes que parcouraient ces étran
ges libérateurs, dans les villes 'qui, pour les
adoucir, leur ouvraient leurs portes. Vous
comprenez aussi, sans qu'il soit nécessaire
d'insister sur ces affligeants détails, que leur
haine et leur fureur se portaient de préférence
contre les lieux et les objets consacrés à la
religion. Pour certaines âmes dépravées la
profanation a des charmes, et le sacrilège
d'abominables attraits. Aussi, afin de ne lais
ser aucun doute à cet égard, le récit indigné
et désolé de nos soldats s'accorde avec la pa
role grave et mesurée des rapports officiels,
pour nous dépeindre, dans certains lieux que
ces impies avaient souillés de leur présence,
les églises dépouillées et violées, les statues
mutilées, les croix abattues, les vases sacrés
dérobés au tabernacle, les saintes hosties fou
lées aux pieds, profanées et outragées avec
des raffinements dignes de l'enfer.
0 Dieu, vous avez souffert toutes ces inju
res sans répondre à ces provocations insen
sées! Est-ce pour laisser-à ees-epinainels le
temps et le mérite du repentir, ou pour leur
permettre de combler la mesure de leurs ini
quités ? Est-ce pour donner à vos ministres
un avertissement qu'il leur est utile de médi
ter, si me persecuti sunt, et vos persequentur,
s'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront
aussi (I), ou pour'enflammer l'amour de vos
enfants fidèles et le courage de vos soldats,
témoins indignés de tant de scandales? Est-
ee pour détromper les âmes honnêtes, trop
confiantes aux protestations hypocrites de
l'impiété, et pour les convaincre que votre
cause et la cause de l'Eglise sont identiques,
que les ennemis de. la puissance temporelle
de votre représentant sur la terre sont les
ennemis de son indépendance et de son au-
j torité spirituelle, et les ennemis personnels
' de Jésus-Christ votre fils? Il ne nous appar
tient pas, N. T.-C. F., de scruter les mystè
res de Dieu, les conseils de sa sagese et les
décrets de sa justice patiente, parce qu'elle
est éternelle ; mais npus avons le devoir que
vos âmes chrétiennes sauront comprendre et
voudront remplir, d'adorer humblement sa
majesté méconnue, et de lui offrir, en répa
ration des outrages scandaleux qui lui ont
été infligés, les ardentes et solennelles pro
testations de notre foi et de notre amour.
Aussi les trois jours de supplications publi
ques prescrits par notre bien-aimé Père,
qu'il nous reste à vous annoncer, N. T.-C.
F., révêtiront le caractère, hélasi. trop justi
fie, d'amende honorable".
* Pendant què les choses saintes étaient ainsi
profanées, et que des. hordes avides de sang
et de rapines épouvantaient la capitale et les
provinces de l'Etat pontifical, que faisait
Pie XI? Comme son Maître dans son agonie,
il prolongeait ses prières, factus [in agoniâ
prvlixiùs orubat (2). Dans les jours même que
toute protection humaine lui faisait défaut,
lorsque ses peu nombreuses mais héroïques
milices faisaient des prodiges de valeur pour
repousser de toutes parts des nuées d'enva
hisseurs lorsqu'il voyait à deux ou trois jour
nées de marche du Vatican, auprès de ses
frontières ouvertes qu'elle allait bienlôt fran
chir, au mépris du droit des gens, une armée
de cinquante mille hommes, le sublime Pon
tife, dominant ses ennemis de toute la force de
son droit et de toute la hauteur de sa foi, le
vait les yeux vers le ciel et le3 abaissait sur
ses enfants. Il nous exprimait ainsi les deux
sources de sa confiance et les deux objets de
son amour. Le secours puissant qu'il espère,
il l'attend de Dieu, il vssÈ l'obtenir par nos
prières. Aussi, dans uns éloquente Encycli
que que vous avez lue et admirée, N. T.-C.
F., il prescrit une prière universelle.
Ne pensez pas que ce soit pour écarter des
maux qui lui seraient personnels. Le servi
teur ne doit pas être mieux.traité q"uele-maî-
tre; personne ne l'a mieux compris que
Pie IX. Il est, lui aussi, un homme de dou
leurs : les ingratitudes, les trahisons, les
craintes, les angoisses : il connaît tous ces
déchirements du cœur, toutes ces tristesses
de la vie, virum dolorum et scientem infirmita-
tem (S).
Sa tiare a été souvent une couronne'd'épi
nes ; son manteau royal a élé lacéré, ils ne
lui én ont laissé que quelques lambeaux;
dans son palais, il éprouve l'indigence et
mange le pain de la tribulation ; sur la voie
douloureuse de l'exil il a bu l'eau du torrent.
C'est pour cela que Dieu l'a exalté, qu'il
l'exaltera encore, propterea exaltabit caput (4).
Voyez comme son front resplendit, comme
tous les yeux, toutes les intelligences, tous
les cœurs sont tournés vers lui. En vérité,
les consolations ont égalé las épfeuves. Ne
pleurez donc pas sur lui, mais pleurez sur
vous et sur vos enfants, et détournez, par
vos expiations et par vos prières, - les châti
ments qui les menacent pour le temps et
pour l'éternité...
La loi des aliénés se trouve, en réalité,
remise à l'étude par l'effet du vote ré
cent du Sénat sur la pétition du docteur
Turck, et elle subira, sans aucun doute,
des remaniements considérables. D'a
près le rapport présenté par l'honora
ble M. Suin, il ne s'agirait pas, il est
vrai, de refondre, mais uniquement de
pérfectionner la loi du 30 juin 1838,
d'en assurer, en un mot, l'exécution in
telligente et ,loyale, et de simples dé
crets suffiraient à cette tâche, sans que
le pouvoir législatif eût à intervenir. Bien
que renfermées dans ce cercle limité, les
réformes proposéés parles conclusions de
la commission et le vote du Sénat qui a
accueilli ces conclusions ont une portée
grave. La loi existante est piquée à la
moelle; elle est atteinte' dans ce systè
me de clandestinité qui en était le dan
ger et l'un des vices capitaux.
La législation de 1838 a fondé une
sorte d'autocratie delà sciencealiéniste.
(!) Joan.. XV 80.
(-2) Luc, XX'H, 43.
(3) Is. LUI, 3.
(4) Ps., G1X, 8.
Sur un simple certificat de médecin^ et
à la demande d'un parent ou même d'un
tiers officieux, elle a autorisé l'interne
ment de toute personne soupçonnée
d'insanité d esprit ; l'action préventive
et oreservatrice de l'autorité judiciaire
a <.'Ui,e£M.rttq et la justiçe, dans ce sys
tème, n'a jamais pu être appelée à in
tervenir qu après coup, pour faire ces
ser une séquestration arbitraire sous
couvert d'aliénisme, et pour réparer
des désastres matériels et moraux trop
souvent irréparables.
La justice agira préventivement ; le
Sénat a exprimé son adhésion au chef
de la pétition du docteur Turclt, qui ré
clamait que le juge de paix intervienne
avan' l'internement. Le juge de paix,
ou tout autre magistrat de l'ordre judi
ciaire, s'assurera personnellement de
l'état mental du malade, en le soumet
tant à un interrogatoire ; il recevra le
serment de l'homme de l'art chargé de
l'examen médical et procédera, s'iMe
juge opportun, à une discrète enquête
dans la famille ou dans le voisinage.
Sans comporter une publicité alarmante
pour de douloureuses et respectables
susceptibilités, cette tutélair-e appari
tion du magistrat, dès^ le début, aura
inévitablement pour résultat de décon
certer et de prévenir des machinations
coupables, des fraudes odieuses, qui ne
sauraient que bien difficilement se pro
duire sous l'œil ouvert de la justice.
Voilà, certes, un correctif dont la né
cessite était évidente et dontl'impor-
"tasSeWlst majeure. Mais la loi de 1838
donne d'autres prises aux plus amères
critiques et appêlle, sur d'autres points
encore, des réformes non moins indis
pensables. Nous y sigaalerons^ une la
cune qui se conçoit à peine : l'absence
de toute pénalité contre les particuliers
qui peuvent abuser de ses dispositions
dans l'intérêt de leur cupidité ou de
leurs haines privées. La prévoyance de
la loi s'est portée du côté où l'abus était
le moins à craindre; l'article 30 punitde
peines correctionnelles le fait des direc
teurs ou préposés des établissements
d'aliénés, qui retiendraient indûment
un de leurs pensionnaires dont la sortie
aurait été ordonnée par le préfet ou par
le tribunal. Des prévarications de cette
nature sont peu à redouter ; quelle ap
parence qu'un directeur d'asile, placé
sous la dépendance de l'administration,
ose braver un ordre d'élargissement
émané de l'autorité administrative ou
judiciaire ? , .
L'article 41 de la loi de 1838 prévoit
encore et réprime, toujours de la part
des administrateurs des asiles, l'infrac
tion à certaines dispositions réglemen
taires concernant la tenue des registres,
qui Joivent présenter ie mouvement
d'entrée et de sortie des malades, ainsi
que les phases de l'affection et distrai
tement.— Mais, quant au fait qu'il était
surtout essentiel de prévenir, au moins
par l'intimidation d'une pénalité rigou
reuse, quant à l'internement fraudu
leux, dans une maison d'aliénés, d'un
homme sain d'esprit, la loi est restée
muette et désarmée de toute disposition
répressive! Un homme faisait obstacle;
il gênait une ambition ou une passion;
on a perfidement présenté comme un
symptôme de démence une névrose dont
il était atteint. Finalement on l'a rendu
fou en le faisant enfermer et traiter
comme tel, et ce meurtre intellectuel,
ce crinae nouveau, ce crime jusqu'ici
innommé que la loi de 1838 a rendu pos
sible, elle a eu l'incroyable distraction
de ne pas même le prévoir et de ne s'ar
mer à son encontre d'aucune pénalité
spéciale !
A première vue et dans le premier
étonnement d'une aussi énorme lacune,
on est tenté d'imaginer que le droit com
mun peut suppléer à l'insuffisance de la
loi spéciale, et que l'article 341 du code
pénal, qui punit des travaux forcés à
temps les arrestations ou détentions illé
gales, commises par de simples particu
liers, serait sans difficulté -applicable à
l'internement frauduleux d'une per
sonne dans une maison de fous, comme
à tout autre mode de séquestration—Ce
serait, hélas ! une déception de le penser
et de croire qu'on pût ici prendre assis
tance du droit commun et de l'article^du
code pénal. La cour de^ cassation s'est
prononcée; par un arrêt du 18 février
1842, elle a déclaré Iadisposition de l'ar
ticle 341 inapplicable et cassé un arrêt
de la chambre des mises en accusation
de la cour de Rouen, qui avait jugé le
contraire. Il s'agissait de deux époux
qui, de complicité, avaient fait renfer
mer un parent sain d'esprit dans .un
asile d'aliénés.
La mauvaise foi et l'intention fraudu
leuse des époux Rosny (c'était le nom
des prévenus) n'étaient pas, au moins
en l'état, mises en question; la cour ré
gulatrice ne cassa pas moins l'arrêt qui
les avait, peur ce fait, renvoyés devant
la cour d'assises. Et cette solution, que
l'on y prenne garde, était absolument
et très-irréprochablèment juridique. En
effet,'le crime prévu et puni des travaux
forcés à temps par l'art. 341 ^ du Code
pénal est proprement ce que l'on appe
lait autrefois le crime de mise en charte
privée. Pour avoir changé de nom, il n'a
pas changé de nature, et il est de son es
sence que l'individu séquestré soit déte
nu dans un domicile privé, où il se
trouve sans communication avec les
tiers, et pleinement à la discrétion du
séquestrateur ou de ses complices.
Les asiles d'aliénés sont manifeste
ment dans d'autres conditions ; ces éta
blissements, qu'ils soient publies ou
même privés, ont toujours un certain
caractère de publicité, en ce sens qu'ils
sont autdTrisés par l'administration et
sujets à sa surveillance. Les malades ou
prétendus tels qui y sont détenus ne se
trouvent, ni directement ni indirecte
ment, sous la mitn et à lia discrétion de
la personne qui y a fait opérer leur pla
cement. L'internement frauduleux dans
une maison de fous a donc cette singu
lière fortune fd'être un crime à part, un
crime sui generis , qu'aucun texte de loi
n'a qualifié; et qui échappe pour cette
cause a toute répression, fes arguments
d'analogie et de similitude plus ou
moins prochaine n'ayant pas cours en
matière de droit pénal.
Ce crime a un degré de plus de per
versité que la séquestration ordinaire,
en ce qu'il s'enveloppe le plus souvent
d'un prétexte d'hypocrite sollicitude ;
il est jîlus funeste pour la victime dont
il peut flétrir à toujours l'intelligenc&et
le cœur, qu'il peut moralement et socia-
lementânnuler;...mais,une fois encore,
aucun texte lagal ne l'a défini et ne l'a
étreint.
La loi spéciale est muette, la disposi
tion générale du code pénal lui est inap
plicable, et il passe impunément à tra
vers le réseau de nos lois criminelles.
Le gouvernement est saisi d'un tra
vail de remaniement de la loi de 1838 ;
il est impossible que son attention ne
se fixe pas sur un vice aussi saillant que
ce manque de toute garantie répressive.
Nous avons cru, pour notre part, devoir
signaler cette regrettable lacune, d'au
tant que la question n'a été jusqu'ici
traitée qu'à bâtons rompus dans les ar
ticles des journaux, et que le Sénat a
voté sans discussion les conclusions de
la commission et du rapport. Cette sup-
pressîofTdïi débat jjûbiïc â dû plaire à
la science aliéniste, qui n'aime pas que
l'on regarde au fond de ses fragilités ;
mais elle laisse la question inépuisée et
impose à la presse l'obligation de discu
ter les points restés dans l'ombre.
En tous cas, des résultats importants
sont acquis ; et d'abord, le contrôle pré
ventif de l'autorité judiciaire : les ma
lades de l'intelligence ne seront désor
mais livrés à la médecine officielle
qu'avec le visa préalable du magistrat.
En outre, la commission a émis, et le
Sénat a implicitement sanctionné le
vœu, qu'on laissât dans leurs familles
les aliénés réputés incurables et inoffen
sifs, ep. allouant, pour leur traitement à
domicile, des subventions aux parents
indigents. L'omnipotent monopole de
la médecine aliéniste est entamé, et le
droit, ou pour mieux dire quelque
chose de plus sacré que le droit, le de
voir des familles, est affirmé dans une
certaine mesure. Au point de vue moral
de la question, ce résultat n'est pas le
moins important.
P h. S erret.
12Avenir national doniie sur la séance
du conseil supérieur de l'enseignement
une appréciation analogue à celle du
Journal des Débats, que nous avons citée
hier. Le Siècle reproduit l'analyse du
Journal des Débats, en y ajoutant quel
ques paroles.... épaisses.
Le Moniteur de ce matin publie en en
tier le procès-verbal, qui ne contient
encore qu'un résumé de l'exposé du mi
nistre, dont M. de Royer avait cepen
dant demandé l'impression et la distri
bution : impression, distribution, que
nous désirons d'autaut plus, que les ré
sumés de procès-verbaux laissent tou
jours à désirer.
Celui de la séance du conseil supé
rieur ne serait même pas, dit-on, à
l'abri de tout reproche les Prélats qui
ont assisté aux deux séances du 9 et
du II décembre ne retrouvent plus;
du moins* si l'on en croit quelques jour
naux, le caractère de leurs paroles et de
leurs observations dans l'analyse qu'on
en a faite.
lîIndépendance belge dit à oe sujet ':
Il paraît positif que l'Archevêque de Paris
et l'Evêque de Châlons réclament contre
l'approbation que M. Duruy dit avoir été
donnée par eux à son plan d'éducation secon
daire des filles. Des cinq prélats membres
du conseil supérieur de l'instruction publi
que, ces deux là seuls se trouvaient à la
séance dont il s'agit. Ils auraient été, dit-on,
appelés à s'exprimer sur l'initiative prise par
M. Dupanloup plutôt que sur les idées per
sonnelles d'éducation de? filles de M- Du
ruy, et, comme il n'y avait aucune déci
sion à prendre au sein du conseil, ils n'au
raient point attaché d'au-tre importance à ces
conversations qui n'étaient pas destinées à
la publicité et dans lesquelles ils avaient fait
toutes leurs réserves à l'égard du plan du
ministre de l'instruction publique.
Le procès-verbal ayant atténué ces réserves
et mis sous un jour trop favorable les idées
de M. Duruy, l'Evêque de Châlons (après la
note de VEtendard qui constatait l'adhésion
pleine et complète des Evêques au système
de M. Duruy) aurait envoyé une protesta
tion à M. Nisard. Voilà ce qui se dit et ce
que je vous transmets.
M. Nisard est le secrétaire du oonseil
supérieur.
La Situation ajoute aux renseigne-;
ments de Y Indépendance, et, assurant'
qu'elle répète les conversations du salon
de M. le ministre des cultes, elle dit :
Dans une première séance, à laquelle as
sistaient Mgr Darboy et un autre Evêque,
M. Duruy aurait, en exposant les avantages
des nouveaux cours qu'il vient de fonder
pour les jeunes personnes, essayé d'incrimi
ner les lettres de plusieurs prélats prenant
surtout à pkrtie Mgr Dupanloup. _
L'Archevêque de Paris défendit son col
lègue avec fermeté, mais avec cet esprit de
conciliation qu'il apporte en toutes choses.
La séance suivante, Mgr Darboy n'y était
pas; mais, en entendant lire le procès-verbal
delà dernière réunion, un évêque qui n'avait
pas pu s'y rendre fut étonné de la manière
dont les faits étaient racontés, et, ne voulant
pas croire que ce fût le compte-rendu fidèle
des parolusjde l'orateur, il fit appel aux sou
venirs d'un autre évêque qui avait pris part
à la discussion.
Celui-ci affirma alors que le rédacteur du
procès-verbal avait sensiblement -modifié les
termes mêmes de la question. Mgr Darboy
a, dit-on, été très-ému de cet incident qui
pourrait amener d'assâz. sérieuses
tions.— A. Delrieux. ■
Le procès-verbal que nous ai
hier indique les noms des PrJ;
la Sitiiation ne désigne pas.
S'il y avait quelque chose de
dans les bruits que rapportent ■
journaux, on aurait .lieu de s'étonnCr de
la publicité insolite donnée au procès-
verbal de la séance du conseil supérieur.
Léon Aubinea.it.
On nous écrit de Munich, le 17 dé
cembre :
Je ne sais si l'on a bien remarqué en
France la'conduite qu'a tenu^M.de Bis
mark à propos de la principauté de
Waldeck. Le terrible appétit qui a dé
voré si facilement des royaumes, et qui
semble en convoiter d'autres, dédaigne
cet Etat vraiment lilliputien; les an-
nexeurs sont pris de scrupule et, ce qui
est plus étrange, à ceux qui disaient
que les habitants de l'enclave de Wal
deck n'auraient pas de patrie, l'homme
qui tend à tout absorber dans la Prusse
a répondu : « Ils seront Allemands ! »
La modération n'a pas ici grand mé
rite, mais elle doit avoir un but. Or,
voici ce que me disait à cet égard un
homme d'Etat de premier ordre, très-
activement occupé à présent même de
toutes les grandes affaires européen
nes : Le grand ministre prussien se pré
pare là, selon lui, un argument qu'il
fera valoir au besoin contre ceux qui vou
draient presser outre-mesure les autres
annexions plus importantes. Il ne fau
drait pas avoir l'air de redouter l'étran
ger quand on refusera d'aller trop vite, et
l'on dira alors : « Voyez notre conduite
« à l'égard du Waldeck. Nous n'avions
« là personne à craindre, et cependant
« nous l'avons laissé subsister. » — Il
y a, en effet, en Prusse, des "ambitions
plus hâtées que celle de M. de Bismark,
et, quant à lui, il ne veut pas la guerre ;
il en aurait plutôt périr.
Gomme tous les Prussiens que l'on
rencontre sont parfaitement convaincus
que leur seul aspect suffira pour mettre
une armée française en déroute et
qu'ils parlent ouvertement d'aller à Pa
ris en conquérants, comme s'il s'agis
sait d'aller voir une seconde Exposition,
je me suis récrié sur cet esprit pacifique
et prudent que mon interlocuteur prê
tait au bouillant ministre. Il m'a répon
du qu'avant Sadowa M. de Bismark
était comme un joueur qui n'a rien en
poche et qui fait son va-tout sur une
seule carte. Aujourd'hui il a gagné, il
tient à son avoir et n'aimerait pas à
l'aventurer. 11 est personnellement trop
intelligent pour prendre part aux fan
faronnades de ses capitans; il voit mieux
le pour et le contre, et, comme l'assi
milation est loin d'être faite, il sait bien
qu'il aura des soulèvements dans les
pays déjà conquis, le jour même où la
guerre commencerait.
Et puis, pourquoi se presser ? Le Sud
ne vient-il pas à lui tout seul? La re
connaissance rte suffira-t-elle pas à jeter
dans ses bras les Bavarois, les Badois et
les Wurtembergeois? Il s'intéresse tant
à eux et à leur bien-être !
Par le Zollverein et son Parlement, il
a prouvé combien il tenait à ce que leur
commerce et leur industrie prospéras
sent. Il a montré plus de zèle à cet égard
que leurs propres gouvernements, et il
a même forcé la main aux plus récalci
trants. Et leurs armées? avec quelle
bonté il s'en occupe ! Il les réorganise ;
il les traite comme la sienne propre ; il
veille' à ce que leurs fusils aient toutes
les qualités requises. En toutes choses il
est comme un père, et, le jour venu, il
n'aura qu'à ouvrir les bras pour pres
ser sur son cœur ces enfants qu'une
dure nécessité tient encore trop éloignés
de lui.
Non, la France peut être bien tran
quille, il ne l'attaquera pas, et il évi
tera, s'il le peut, les occasions qui pour
raient s'offrir à lui, de lui causer une
inquiétude prématurée. Si seulement
elle le laisse faire, il se bornera à par
faire l'assimilation de ce qu'il possède
déjà; il prépare le terrain ailleurs, et il
ne frappera le grand coup que quand il
sera trop tard pour s'y opposer. Les pe
tites armées qu'il soigne si bien seront
dignes d'entrer da"ns les rangs de la
sienne, et alors on pourra, sans trop de
présomption, s'occuper de l'Alsace et
autres lieux germaniques.
L'Autriche paraît menacée d'une, in
vasion saxonne. — On télégraphie do
Dresde au Fremden-Blatt que le baron
de Beust, frère du chancelier impérial;
va se rendre à Vienne, où il deviendra
conseiller de Sa Majesté.—Le général
de Gablenz, Saxon d'origine et protes
tant, aurait le ministère de la guerre,
—Enfin on parle de placer dans la diplo
matie autrichienne le comte Vitzthum,'
jadis ministre de Saxe à Londres, pro
testant aussi et vrai pendant de M. de
Beust, qu'il admire de tout son cœur et
dont il imite de son mieux l'activité dé-;
vorante, allant partout pour voir si on.
n'a pas besoin de lui, se mêlant de tout,»
et fort aimé par son ancien chef.
B. D'AGREVAIi."
Mgr l'Evêque d'Amiens, qui avait déjà
écrit à Mgr d'Orléans, vient d'adresser à
Mgr de Tours la lettre suivante :
k Amiens, 10 décembre 1867.
« Monseigneur,
» Souffrez que j'adresse à Votre Grandeur
mes félicitations et mes remercîmenis pour
Yexeelente lettre qu'elle a publiée sur la gra
ve question qui, en ce moment, préocupe si
vivement l'Episcopat.
« Les intérêts les plus graves ne m'ont pas
permis de rien publier encore. J'aurais peut-
être blessé, à Amiens, des hommes que je rie
voudrais même pas contrister; mais tout le
monde a su ce que je pense de la fatale con-
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