Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1849-01-30
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 30 janvier 1849 30 janvier 1849
Description : 1849/01/30 (Numéro 30). 1849/01/30 (Numéro 30).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
mardi 50 janvier «849.
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PARIS.
DÉPART. 1
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BUREAUX A PARIS :
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lui directions d«s poste*. —A Londres, chox HM. Cnrii il
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. ffriiMié* franco, ^nrJ*rfd*ûtiaa,,
à H. M ehroau , gérant.
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■a bureau du Journal.
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S'adrsieer franco, pour l'administratio*,
i m. demain , .directeur.
Ï>ABIS, 29 JANVIE J
"Notis, avons félicité l'AssémbRe consti-
tuanted'ayoir4éféré aux vpeux du pays ep pre-
nantèn considération le principe delà pjropo-
tion deM.Ràteau, nôns avons à là féliciter d'a
voir persisté aujourd'hui dans sa première dé
cision,.malgré tons les efforts- tentés pour l'é
branler. La première fois, elle avait fait preu
ve dé sagesse, 'elle a fait aujourd'hui preuve
dé sagesse et dé fésoïtitionj et ce second vote
«n portant là satisfaction dans lé pays y- por
tera aussi , la sécurité, La France sentira
qu'elle ' peut se reposer sur le patriotisme
d'une assemblée, gui' dans une question si
-délicate, où. l'on a cherché à engager toutes
ses susceptibilités, a su s'élever par deuxfois
au-dessus des mesquines considérations per
sonnelles, rompre le réseau d'intrigues dans
lequel on l'enlaçait, et prononcer résolu
ment dans le sens des intérêts et de la vo
lonté du pays.
Les circonstances du vote en relèvent
l'importance -et la signification. Jamais, de
puis qu'elle siège, l'Assemblée n'avait été
aussi nombreuse: 821 représentai ont pris
part au voté) et la proposition de dissoudre
prochainement!'Assemblée a obtenu 416 voix
■contre405, pour la seconde lecture.,Le scrutin
secret a été, cette fois encore, réclamé par le
parti qui s'était opposé à son introduction dans
le règlement, et qui non-seulement paraît
S 'être éclairé sur le mérite de ce mode de vo
ter, mais semble y trouver des avantages
tout particuliers, M. Combarel de Leyval a
demandé aux âdversaires dé là proposition
pourquoi, s'ils croyaient n'avoir affaire qu'à
line agitation factice, réprouvée par la ma
jorité du pays, ils recouraient au scrutin se-
çret et enlevaient à la nation le moyen de
■connaître les véritables interprètes de sa pen
sée.'
„ Cette question n'a pas reçu de réponse, et
n'en pouvait pas recevoir. Personne ne sau
rait contester avec bonnefoi la réalité du
mouvement qiji se produit d'un bout de la
France à l'autre ; personne ne se méprend
sur les véritables sentimens du.pays; et ce
qui donne aux "pétitions ' une autorité très
grande, c'est moins encorde nombre chà-
que jour, croissant des signatures, que le
caractère calme èt respectueux qu'elles ont
foutes revêtu. M. Jules Favrè a essayé de
passionner l'Assemblée en exagérant, àvéc
sa prolixité ordinaire, le caractère commi
natoire dequelques pétitions, dont il s'est
gatdé dé.'rien citer ; mais quelqueè excep
tions qu'on n'ose ëncore mettre en lumière,
rfe suffisent pas : à faire calomnier un grand
mouvement national. ;
C'était vraiment le' pays, qui faisait, appel
à l'Assemblée, c'était vraiment la .voix pays qu'on voulait, empêcher d'arriver jus
qu'à ses mandataires : et voilà pourquoi on
fuyait le grand jour ; voilà pourquoi ceux
qui 6e prétendent les amis exclusifs de la
piiblicité invoquaient le mystère ; ils préfé
raient le reniement de leurs doctrines à ,1a
défaite : et. se dérobant modestement à la re
connaissance dpût ils se disaient assurés, ils
né voulaient donner à là nation que des sau
veurs anonymes. (Jette misérable et dernière
ressource est devenue inutile entre, leurs
m^ns. Quoiqu'on eût assuré aux calculs de
l'intérêt privé le voile du secret, lé cri du
bon sens et de là conscience a été entendu,
et la bonne cause a triomphé. .
Redirons-nous les divers incidens de cette
discussion ardente, passionnée, où le parti
qui vient d'éprouver un échec trahissait,
jiar son impatience, par ses cris, par ses cla
meurs quelquefois irréfléchies, le pressenti
ment de.sa défaite? Ce serait inutile, lesar-
gumens des uns, le.s sophismes des autres,
sont connus et appréciés de la France en-
tjèreiet l'Assembléè yient de prononcer une
seconde.fois, entre les_unse,tje$.autres, le
jugement que le pays en avait déj * porté.
M. Fresneau, avec une .'logique nerveuse, a
démontré que l'Assemblée actuellenepouvait
jamais acquérir le caractère d'une assemblée
législative, ^prolongation de.sa durée était
la prolongation d'une situation exception
nelle et anormale, la substitution du provi
soire au régime de la Constitution. M. Vic
tor Hugo, dans un discours concis et élevé,
rappelant que le jour du danger pour un
gouvernement était celui où il doutait de
gfra' principe; a demandé à l'Assemblée si ce
n'était pas la défiance du suffrage universel,
la mise en interdit de la France, qui étaient
au fond du discours des adversaires de la
proposition, II aïnvité l'Assemblée à pren
dre conseil des. fautes du Gouvernementpro-
visoire,à në pas ajourner : la venue de la lé
gislative, comme sa propre réunion, avait été
ajournée,, de crainte quela sympathie popu
laire! ne se ,retirât d'elle, et ne lui ënlèvât-
sa force. M. Combarel de Leyval, animé par
les interruptions qui .venaient à chaque ins
tant couvrir sà voix, a mis dans une discus
sion vigoureuse l'Assemblée en présence du.
Président et de la situation»
La Constitution n'ajpas> voulu que le Pré
sident fût un simple exécuteur des volontés
dé l'Assemblée ; elle a cherché à en faire un
véritable et sérieux contrepoids de là légis
lature. Le pouvoir 'exécutif a usé de son
droit, èt fidèle à fcon .origine, fidèle au mou
vement qui l'avait enfanté,, il a appelé au
ministère des hommes qui étaient en mino
rité dans l'Assemblée. Si l'Assemblée n'a
pas protesté, c'est parce qu'elle n'avait
pas la confiance qu'elle serait suivie par
le pays. Aujourd'hui encore la majorité
ne confond pas, dans son opposition, le
chef du pouvoir exécutif et le ministère,
auquel il réitère l'àssurance de sa confiance;
élle veut séparer l'un de l'autre, preuve évi
dente qu'il ne s'agit pour elle que de lapos-
session du pouvoir. Elle se flatte que si le
chef du pouvoir exécutif accepte ses offres
de concours, le pays prendra le change, et
que , sous le couvert de l'élu du 10 décem
bre, il laissera revivre la politique qu'il a
voulu condamner dans cette élection mémo
rable. Ce qu'on cherche dans la prolonga
tion de l'Assemblée, c'est à rendre into
lérable, et impossible la situation du mi~
nistère, afin.de l'obliger à la retraite,
et cette retraite: ce -serait un démenti
donné aux six millions de voix qui ont
choisi M. Louis-Napoléon Bonaparte. Im
poser à l'élu du 10 décembre ,. contre
ses sympathies, contre sa volonté, contre son
mandat, un changement en contradiction
avec le vœu manifeste du pays, ou prolonger
un antagonisme sans issue et plein de périls:
voilà à quoi aboutissent sciemment «u non
tous les adversaires de la dissolution de
l'Assemblée.
M. Jules Favre, qui est le seul orateur
que l'on ait entendu contre la proposition,
n'a point trouvé, malgré toute sa subtilité,
une autre issue de la situation. Il faut que le
ministère se retire et nous fasse place, telle
est la pensée qui s'est reproduite sous miîle
formes pendant toute la longueur de son
interminable . discours. Ce n'était point
une discussion, c'était une série de pro
vocations adressées au ministère, en de
hors du ministère, au-dedans et au-dehors
de l'Assemblée : c'était un effort perpétuel
pour irriter et aggraver le débat,, dans l'es
poir que quelque incident viendrait mettre
en jeu les passions et les susceptibilités de
l'Assemblée.
Pour réfuter un pareil discours, il suf
firait d'en rapprocher: les diverses parties et
de faire apparaître les contradictions que
masque à peine une. excessive diffusion. Le
vote de' l'Assemblée nous paraît une ré
ponse suffisante : non-seulement M. Jules
Favre n'a point ébranlé une seule conviction
par ses subtilités^ mais il a eu beau attiser le
feu, les passions ne se sont pas allumées à sa
parole; tant le motif qui l'appelait à la tri
bune était percé à jour, tant il était évident
que la question de principe pour liii ne cou
vrait qu'une question de pouvoir, tant écla-
' tait ce qu'il y avait de factice dans ses accu
sations et dans ses protestations.
Lenombre des orateurs inscrits faisaitpré-
sager une longue discussion; maisun côtéde
l'Assemblée croyait utile que l'Assemblée vo
tât sous l'influence des émotions du dehors.
Il a voulu faire clore la discussion, l'épreuve
lui a été contraire ; tous les orateurs delà
Montagne ont renoncé alors à la parole et
le débat a fini de lui-même. Une. longue
discussion s'est alors engagée sur la position
de la question. .On voulait mettre aux voix
la proposition de M. Rateau, ce qui eût ré
duit à l'impossibilité de voter, les auteurs des
amendemens qui, en adoptant le principe de
la proposition , souhaitent que l'époque de:
la dissolution soit déterminée sous une au
tre forme. Il a été décidé que l'on voterait
sur les conclusions de la commission , qui
repousse à la fois la proposition Rateau et
toutes les propositions analogues. Ce sont ces
conclusions qui ont été repoussées par 416
voix, contre 405.
Il nous reste h parler de deux incidens,
l'un à la fin, l'autre à l'ouverture dé la
séance. Un peu-avant le volé, M. le général
Cavàignac est venu prononcer à la tribune
quelques, paroles dont nous n'avons bien
sàisi ni le 'sens précis, ni l'opportunité. Si
l'honorable général a voulu dire quel'éleo
tion du 40 décembre; ne l'a pàs mis en de
hors des Instiitfffôtis^f ni'en état d'hostilité
vis-à-vis du candidat qui lui a été préféré,
il a raison, et personne n'en , avait douté.
Mais il n'en est pas moins vrai que le 10 dé
cembre, le pays a fait pencher la balance
eù sens inverse des préférences dè l'Assem
blée. •
! Au débufde la séance, M. Barrot a don
né à l'Assemblée, dans le langage le plus di
gne, et le plus rassurant, des explications
claires et complètes sur les précautions que lç
Gouvernement avait prises pour maintenir la
tranquillité, et sur les faits qui avaient
motivé ces précautions. On trouvera plus
loin, dinsi que dans le compte-rendu de la
séance, tous les détails qui sont relatifs à la
nouvelle organisation de la garde mobiie.
C'est en vain que M. Degousée, emporté
par une impétuosité qui lui a. déjà, plus
d'une fois, fait dépasser la juste .mesure,
a voulu faire prendre à cèt incident une
tournure irritante; c'est en vainque M. Jules
Favré, fidèle à sa tactique, a cherché à le
ranimer et à l'envenimer : les loyales et sin
cères déclarations de M. Odilon Barrot
avaient porté la conviction et le calme dans
tous les esprits.
Le Gouvernement à dû prendre, en ce
qui concerné la garde mobile, des mesures
qui attestent sa sollicitude toute pater
nelle pour cette jeune milice, qui avait si.
bien mérité du pays, par sa conduite hé
roïque pendant les journées de juin. Ces
mesures ont été aussitôt attaquées avec
mauvaise .foi par lès fauteurs de désordre,
qui sont parvenus à exciter dans quelques
bataillons de la garde mobile une certaine
agitation. Cest, comme à l'ordinaire,en ca
lomniant les intentions du Gouvernement,
en publiant des récits mensongers et des
commentaires malveillansdeses actes, qu'ils
ont essayé de souffler au sein de la garde
mobile l'esprit d'insubordination, en lui sug
gérant des démarches imprudentes et des
manifestations coupables.
Hâtons-nous de dire que leur tactique n'a
pas réussi. L'immense majorité de la garde
mobile a repoussé de perfides conseils et de
dangereuses manœuvres. La garde mobiie
ne saurait oublier quels sont les ennemis
qu'elle a eu à combattre derrière les barri
cades. Elle n'oubliera pas que le parti qui
lui fait maintenant des avances, et qui s'ef
force de l'égarer n'avait pas assez d'injures
et de colère contre elle après les journées de
juin. La garde mobile, en défendant l'ordre
et la société, en combattant fraternellement
avec l'armée et avec la garde nationale, s'était
attiré bien des haines, qui, long-temps après
ty.bataille, éclataient dans de lâches guet-
apens. Ces jeunes et braves soldats étaient in
sultés dans les rues : on les appelait les bou
cliers de juin et les assassins de leurs frères ;
plusieurs d'entre eux tombèrent victimes dé
ces odieuses rancunes. Aujourd'hui que la
garde mobile est mécontente, on feint d'ou
blier d'anciens ressentimens, on la flatte,
on la caressé, on s'efforce de l'entraîner
dans le piège dé manifestations séditieuses.
Nous avons raconté avec l'exactitude la
plus complète ce qui s'est passé entre M. le
général Changarnier et le commandant de
la garde mobile Aladenize. On sait que quel
ques officiers, irrités à tort des mesures du
Gouvernement, avaient eu la faiblesse de don
ner les mains à une sorte de petite conspira
tion. Des rassemblemens devaient avoir lieu
dans les Champs-Elysées pour réclamer tu-
multuairement contre lë nouvel arrêté. Le
Gouvernement à dû prévenir le mal qui pou
vait suivre l'exécution de ce complot où pre
naient part, sous l'inspiration dés meneurs,un
certainnombredejeunes gensquine compre
naient pas que les mesures du Gouvernement,
loin de leur être hostiles, étaient le plus sûr
moyen d'assurer leur existence en la régula
risant. Un journaï'a annoncé qu'hier quatre
commandans, MM; Duseigneur,. Arrighi,
Bassac et Camuset, ont été incarcérés à
l'Abbaye. Le fait est exact. Mais l'autorité
a dû, bien qu'à regret, prendre cette précau
tion dans leur propre intérêt même. Ces
quatre officiers, avaient été mis en état d'ar
restation en même temps que le comman
dant Aladenize. M. le général Changarnier,
sur leurs explications, les avait rendus à
fElELM'ON DU CONSTITUTIONNEL, 30 JANV.
' LE CABTOET MME.
TROISIÈME PARTIE.
LA. GEORGIENNE.
CHAPITRE XXX
sardanapale.
(Suite.)
. Quelques personnes quireqcontrèrcnt, un quart
d!heure plus tard, le viejl .avare arpentent les
galeries du Palais-Royal, ' assurèrent que tout,.en
lui, accusait l'allure d'un homme ivre ou d'un
fou. -, ^ , . . .. V,
' Après avoir fait plusieurs fois le tour dés ar-
cades, il alla s'asseoir sur un banc dans le jar
din, où, malgré la température très froide iie la
soirée, il demeura assis pendant près d'une demi-
heure, gesticulant, se parlant haut à lui-même,
en un mot, marquant tout le symptôme de la
plus vive agitation. . . . ;
On raconte encore, qu'ayant fini par amassèr
autour de lui un certain nombre dé persQnn.es,
il se leva brusquementj montfi ; îitt 129, où il
Toir notre numéro du 29 jcpTier.
Toute reproduction, même partielle de cet ouvrage,
cit'interdite, et «erait ourguiTiçcommo contrefaçon,
jeta successivement sur le tapis une.dizaine de ^
napoléons qu'il perdit avec un sang-froid qu'on
n'aurait pas pu attendre de son avarice. Seule
ment, quand il eut sacrifié cette somme comme
s'il avait obtenu le résultat d'une expérience :
— Allons, c'est bien, — l'aurait-on entendu
dire,—c'est une veine épuisée 1
Sorti de la maison de jeu, il entra chez plu
sieurs joailliers, où il fit en diamans et en bijoux
des achats considérables dont il chargea ses po
ches, passa ensuite chez Chevet, et y commanda
un souper froid qu'il ordonna de porter à son
hôtel de la rue"de la Chaise, lui-même s'y r.en-:
dit en voiture, ce qui était contre toutes ses
habitudes; il pouvait être huit heures, huit heu
res un quart quand il y arriva.
. Il apprit que Giorgina, accompagnée de Mlle
Dàliron, venait de partir pour l'Opéra, ce qui ne
. lui parut pas extraordinaire ; il savait ce projet
de spectacle dès la matinée.
J)ès lors, il employa tous lçs domestiques ïè
la maison à aller faire plusieurs, emplettes fort
extraordinaires,. et tout ce que l'on pouvait at
tendre de la bizarrerie de pon humeur parut "en
cette occasion, dépassé. Ainsi, une heure après,
l'un des gens qu'il avait dépêchés dans le quar
tier, arrivait faisant apporter, avec lui toutes
les fusées, pétards, lampions et menues pièces
d'artifice qu'il avait pu se procurer chez les
épiciers du voisinage, si bien qu'on ne douta
pas que ce singulier homme . n'eût l'intention
de donner une fête dans son hôtel, quoique la
température extérieure non plus que la saison
politique ne parussent pas très favorables à des
la liberté. Malheureusement , au lieu dë
donner l'exemple de l'obéissance et de la
discipline, ils ont eu le. tort de se rendre dans
un café voisin, et de. là ils ont envoyé: des
ordres aux officiers subalternes pour faire
mettre à exécution le complot qui avait été
forojé.. Force fut alors de prendre à leur
égard? une décision que commandait la pru
dence.>
Dans la journée d'hier, cent cinquante
gardes mobiles qjji prenaient sans titre au-
■' cun la dénomination de délégués, se rendi
rent à l'Èlysée-Nationàl. Ils ont demandé à
voir le Président de la République. Ils vou
laient, dit-on, exiger l'élargissement.de leurs
officiers. Le Président de la République a
refusé de les recevoir : mais.le.général Chan
garnier est .descendu pour leur parler. Dans
une allocution empreinte de cette franchise
cordiale qui caractérise toutes ses paroles,
M. le général Changarnier leur a expliqué
qu'un déplorable malentendu pouvait seul
exciter ces désordres, qu'il n'était point
question de méconnaître leurs services et de
les licencier, et que le Gouvernement, qui
saurait d'ailleurs maintenir avec énergie la
discipline et l'ordre, n'avait Songé qu'à fixer
la position légale de la garde mobile.
Nous ajouterons avec regret que ces pré
tendus délégués, que ces loyales paroles au
raient dû éclairer, se sont retirés en pous
sant des .clameurs séditieuses. Quelques-uns
ont cru devoir faire une démarche auprès
de deux des chefs de la Montagne, et ils sont
rentrés dans leur caserne de la rue Saint-
Thomas-du-Louvre, en criant, : Vive la
révolution démocratique et sociale !
Ce matin, la fermentation qui s'était ma
nifestée dans deux ou trois casfjmes, a né
cessité quelques mesures de précaution. Ces
casernes ont été surveillées par des détache-
mens de troupes de ligne. Tout annonce
au reste quele malentendu qui a suscité cette
agitation dans deux ou trois bataillons
n'existe plus. On a fait comprendre à cette
fraction de la garde mobile l'esprit et l'utilité
de la décision qu'a prise le Gouvernement.
Ces jeunes militaires ont trop de bon sens,
de patriotisme et d'intelligence pour persister
dans une erreur qui ne serait profitable qu'à
leurs ennemis d'hier, devenus leurs amis
d'aujourd'hui. Ce matin, trois bataillons de
la garde mobile ont été passés en revue par
le général Changarnier. On les a placés sur
la place de la Concorde parmi les divers
corps de l'armée qui y avaient été réunis, et
le meilleur esprit régnait dans leurs rangs.
Une proclamation du général Changarnier
a été adressée à la garde mobile. Nous nous
empressons de la publier :
ordre du jour.
Officiers, sous-officiers et volontaires de la garde
nationale mobile.
Si j'en croyais vos calomniateurs, vous vous lais
seriez aller à des conseils pernirieux et intéressés;
vous feriez prêts à troubler l'ordre que jusqu'à pré
sent vôhs si intrépidement défendu, à attaquer
la République, les institutions placées ,tous votre
sauvegarda, et la société qui s'est enorgueillie de
vos succès et qui vous appelle s's héroïques cnfatis.
Au nom de la patrie, que nous saurons dé
fendre contre tous ses ennemis,. écoutez ma voix,
et repoussez ces fauteurs d'anarchie qui, en vous en
traînant à, votre perte,voudraient se venger de votre
glorieux passé.
Au quartier général des Tuileries, la 29 janvieT
1849.
Le général commandant en chef les gardes
nationales de là Seine, la garde natio
nale mobile et les troupes de la 4" divi
sion militaire. Sigué, changarnier
Nous souhaitons sincèrement que ce no
ble langage soit entendu de tous les gardes
mobiles. Qu'ils soient bien convaincus qu'en
leur parlant en termes si touchans de leurs
services et de la confiance qu'ils inspirent au
pays, M. le général Changarnier est l'inter
prète du Gouvernement et de tous les bons
citoyens.
L'arrê,té du Gouvernement n'a d'autre
but que de régulariser la position de la gar
de mobile. Après la révolution de février ,
les engagemens n'avaient été faits que pour
une année. A l'expiration de cette £?hnée,
dans les termes stricts de la légalité, le li-,
cenciement pouvait avoir lieu. Renvoyer la
garde mobile, c'aurait été certainement le
premier acte du parti qui voudrait en ce
moment soulever l'irritation dans ses rangs,
et qui ne lui a jamais pardonné 6a con
duite en juin. Telle ne pouvait être l'inten-
tion-d'un Gouvernement issu du vote du 10
décembre, et qui devait se rappeler que la
France entière s'était associée aux éloges
décernés à la garde mobile après ces fatales
et glorieuses journées.
Aussi, le Gouvernement n'a-t-il fait que
réorganiser la garde mobile ; elle ne conte
nait plus que treize mille hommes; il a ré
duit à douze le nombre des bataillons , au
lieu de vingt-quatre. Mais aucun soldât ne
sera renvoyé , tous pourront prendre place
dans les nouveaux cadres. Quant à ceux qui
ne souscriront pas un nouvel engagement,
f ils recevront leur paie comme un dédom
magement jusqu'à la fin de leur engagement.
Le Gouvernement à anticipé stir l'époque
où la réorganisation, devait êtrè nécessaire
ment faite pour - assurer ce pécule aux jeu
nes soldats qui sortiront volontairement de
la garde mobile.
La solde delà garde mobile reste encore
supérieure à celle que recevait la garde im
périale sous l'empereur Napoléon. U fallait
qu'elle cessât d'être trop au-dessus de la
solde des troupes de ligne. L'équité le vou
lait, et la raison l'indiquait. D'ailleurs, le
sort des sous-officiers se trouve amélioré de
fait, puisque , comme dans l'armée , leur
solde devier t supérieure à celle des simplès
soldats. i
Pour réorganiser la garde mobile, il fal
lait toucher au corps d'officiers. On l'a fait
avec tous les ménagemens que commandait
la justice. Les uns sont maintenus, les au~
■tres- rentrent dans l'armée dont ils faisaient
partie avant la formation de la garde mobile.
Quelques-uns, sans doute, sont rendus à la
vie privée ; mais ils ne pouvaient conserver
une position qui, dans l'armée, ne s'acquiert
qu'après quinze, vingt, trente années de ser
vice. Eux seuls, en' définitive, sont atteints,
et nous aimons à les croire trop bons ci
toyens pour, craindre que, pour venger une
injure imaginaire, ils cherchent à exciter
parmi leurs camarades l'indiscipline et la
révolte. '
Au surplus, la garde mobile doit connaî
tre où sont ses véritables amis. Elle ne peut 1
hésiter entre les hommes qui ont combattu
avec elle en juin et les hommes qu'elle a
vaincus sur les barricades, qui l'ont pour
suivie de leur haine et qui l'eussent licenciée
s'ils avaient été vainqueurs. D'un côté, se
trouvent les gardes nationaux qui ont si fra
ternellement ouvert leurs rangs à ces jeunes
compagnons de leurs périls et de leurs fati
gues ; l'armée, qui a vu la garde mobile se
comporter au feu comme une vieille troupe;
Paris entier, la France entière qui a fait en
tendre sa grande voix dans l'élection du 10
décembre, et qui veut énergiquementrordre
dans la liberté; de l'autre, s'agile ce parti
de brouillons et de turbulens, vaincu au 17
avril, vaincu au 15 mai, vaincu au 23 juin,
vaincu au 10 décembre, qui n'oubliera ja
mais qu'au premier rang des défenseurs de
la civilisation menacée, il a toujours ren
contré la garde mobile. C'est à la garde mo
bile de choisir.
Une proclamation vient d'être adressée à
la population parisienne par M. lé ministre
de l'intérieur. M. le ministre de l'intérieur,
dans un langage plein d'élévation et d'éner
gie, explique les circonstances dans les
quelles le Gouvernement a cru devoir faire
appel une fois de plus au patriotisme et au
dévôûment des bons citoyens pour convain
cre de leur impuissance les fauteurs d'anar
chie.
MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR.
PROCLAMATION.
Citoyens de Paris,
Nous avons appelé la garde nationale sous les ar
mes. Nous l'avons appelée à la défense de l'ordre
social, menacé encore une fois par les mêmes enne
mis qui l'attaquèrent dans les journées de juin.
Les projets de ces hommes n'ont pas changé. Ce
qu'ils veulent empêcher à tout prix, c'est l'établisse
ment d'un gouvernement régulier et honnête. Ce
qu'il leur faut, c'est ut régime d'agitation perpé
tuelle, l'anarchie,.la destruction delà propriété, le
renversement de ious les principes. C'est le despo
tisme d'une minorité qu'ils espèrent fonder, en usur
pant comme un privilège la propriété commune, le
nom sacré de la République.
Pour colorer la révolte contre les lois, ils disent
que nous avotïs violé la Constitution et que nous
voulons détruire le Gouvernement républicain. C'est
là une calomnie méprisable. La République n'a pas
de plus fermes appuis que ceux qni cherchent à la
préserver des excès révolutionnaires, aveclexquelson
a trojî confondu cette forme de Gouvernement. La
Constitution. Mlle président de la République a juré
de la respecter et de la faire respecter ; il tiendra
son serment. Ses ministres ont un passé qui ne laisse
à personne le droit de suspecter leurs intentions; et
ils ne peuvent pas donner une plus grande preuve
de leur attachement aux institutions républicaines,
que l'énergie avec laquelle ils sont déterminés à ré
primer tout désordre, quelles qu'én soient les pro
portions.
Habitans de Paris, H ne suffit pas que la société
sôit forte, il faut encore qu'elle montre sa force; le
projets de réjouissance.
Deux heures plus tard, deux ou trois voitures
chargées de fourrages qu'il avait dû payer un
prix fou pour se les procurer en si peu de temps et
à une heure aussi avancée de la soirée, entraient
avec fracas dans la cour de son hôtel, et, au lieu
d'être portés dans les greniers, tout ce foin et
toute cette paille furent, par son ordre, emma
gasinés dans les appartenons du rez-de-chaus
sée et jusque dans les pièces qu'y occupait sa
maîtresse.
Sur ces entrefaites, le souper étant arrivé, il
fit dresser le couvert dans un des grands salons,
le seul qui ne se trouvât pas alors transformé
en magasin à fourrages; ordonna que les lustres
et.girandoles fussent garnis de bougies et allu-
méè; puis, comme il n'était pas encore l'heure
que Giorgina fût de retour du théâtre, il occupa
son temps à augmenter la combustibilité de ses
lampions eu les ém f chant avec de l'essence de '
térébenthine, dont il avait fait prendre, dans ce »■
but , plusieurs litres. Tout ainsi disposé , il jj
ordonna d'illuminer toutes les fenêtres, aussi
bien que la porte de l'hôtel; ensuite il alja pren
dre dans la garde-robe de la Géorgienne une
magnifique robe de chambre à dessins ' persans, .
. que son ampleur ne rendait pas trop messéante-
à sa taille, et, ainsi affubié, se mit à écrire une
lettre qu'il fit aussitôt porter à la poste. On y
lisait pour suscription : A Monsieur i Monsieur
le secrétaire général du canscii général, d'admi
nistration des hospice! de Paris.
Cette lettre venait d'être achèvée et envoyée,
au moment où il entendit dans la cour le bruit
de la voiture qui ramenait Giorgina.
Prenant aussitôt un flambeau de chaque main
comme fait un hôte bien appris qui reçoit la vi
site d'un personnage auguste, il alla au-devant
de la reine du lieu, et l'on peut se figurer l'éton-
nementde celle-ci, lorsque,s'élant déjà deman
dé ce que pouvait signifier l'illumination qui
éclairait la cour de l'hôtel, elle se vit accueilli
sur le perron par Dubignon, grotèsquemént vêtu
d'une de ses robes et lui montrant entre deux
lumières son maigre et pâle visage empreint
d'une gravité majestueuse qui excluait tout à fait
la supposition d'une bouffonnerie dont il aurait
conçu la pensée.
. Ce qui parut encore plus étrange à ja Géor
gienne, et surtout ce qui fut moins de son goût
que tout le reste des excentricités dont elle était
témoin, ce fut de voir son appartement devenu
quelque chose entre la grange et l'écurie.
— Etes-vous fou, Monsieur ? — ne put-elle
s'empêcher de dire.
— Non, mais je suis prévoyant et pbijantrope;
d'jci à quelques jours, une grande bataille sera
livrée sous Paris ; je veux que cette maison soit
transformée en une ambulance^ ; et, "faute d'ob -
jets de literie que je n'ài pu me procurer en
quantité suffisante , j'ai fait apporter de quoi y
suppléer.
. — Ce sera gai, —dit alors Giorgina, n'entrant
pas le moins du monde dans cette philantropie.
— Alors comme alors, — répondit Dubignon,
— et j'espère bien qu'à ce moment, vos belles
mains ne dédaigneront pas de faire de la char
pie; inais, en attendant, il faut un peu se réjouir.
repos et la sécurité sont à ce prix. Que tous les bons
citoyens secondent le gouvernement dans la répres
sion des troubles qui agiteraient la place: publiqtttâ
C'est la République, c'est-; la société elle-même, «f>
sont le^bases éternelles du pçuvoir/que les pertur
bateurs mettent eh question.,. Jja vicloiré.de l'ordrfr
doit être décisive et irrévoealjlp. Que, chacun fasse"
donc Son devoir, le gouvernement ne manquera pas
au sien. ; - : . r
Le ministre de l'intérieur, L éon fauciiek.
Les gardes nationaux ont répondu en
très grand nombre à l'appel qui leur a .été.
fait aujourd'hui dans l'intérêt de l'ordre?
public. Nous espérons que les craintes qfui
ont provoqué la convocation, cesseront avec
la journée, et le , chiffre de leur présence
dans les rangs, est fait pour contribuer à ce
résultat si désirable. Mais, s'il en était au
trement, s'ils devaient continuer ou recom
mencer ce service pénible, qu'il notis sôit
permis de demander à leur dévoûraent cîtiM
que de redoubler d'exactitude. Ils ont dû
remarquer quelles excellentes dispositions
avaient été adoptées, par l'autorité, dans la'
distribution des forces militaires. Sur tous
les points, à côté d'une troupe de garde na
tionale, se trouvait de la troupe de ligue.
Ce rapprochement provoquait naturellement
des scènes de fraternisation qui réchauffent
le cœur et aident à supporter le froid, l'hu-,
midité, la pluie, le stationnement les pieds!
dans l'eau. Les compagnies, qui étaient nom-'
breuses, étaient j ustement lières de présen
ter cet effectif imposant à leurs frères de
\'armée. Ceux-ci, qui n'ont pas besoin
d'être stimulés par l'exemple à l'accomplis
sement du devoir, étaient néanmoins heu
reux de compter tant de braves citoyens
réunis près d'eux pour la bonnè cause. Le
grand nombre de gardes nationaux sous les
armes, est le moyen le plus puissant de sé
curité. Il fait mieux que d'assurer la vic
toire, il a pour effet presque certain de pré
venir la lutte.
Ajoutonsquetouteslesprécautions avaient
été prises par le général en chef pour ren
dre le service des troupes le moins pénible
possible. Tous les régimens sont à l'abri,
mais ils se gardent militairement, et sont
prêts à sortir et à combattre la nuit comme
le jour. Tous les quartiers sont occupés par
les points principaux qui les commandent.
On ne saurait trop féliciter le commandant
en chef de la promptitude et de la parfaite
exécution de toutes les mesures qu'il a pri
ses. Par celte conduire, il a fait tout ce qui
était humainement possible", pour .prévenir
un mouvement au lieu d'avoir àleréprimer.
i Et il introduisit la Géorgienne dans le salon
splendidement illuminé, où était dressé le sou
per.
— Voilà, qui est mieux, — dit la courtisane,
qui se retrouvait dans son élément ; — mais a-
vant de profiter de votre galanterie, vous per
mettrez bien que j'aille quitter mes falbalas et
mes plumes, et prendre, comme vous avez fait
vous-même, un plus commode négligé.
— Oui, divine, allez, et revenez Yjte.
Et Giorgina sortit, suivie de MlleDaliron.
— Chère belle, dit la courtisane à Herrainie
aussitôt qu'elles furent seules, et tout en s'occu-
pant de sa toilette,—vous allez me gronder bien
fort.
— Et pourquoi vous gronder?
— C'est que j'ai commis une bévue énorme.
Pouvais-je me douter que ce vieux fou nous fe
rait ce soir, la surprise de se trouver ici à notre
retour du spectacle et probablement y passerait
la nuit ?
— Sans doute cela n'était pas fort présumable;
mais qu'importe?.il-n'est pas toujours aussi ga
lant à beaucoup près.
— Mon Dieu, quelle déplorable idée j'ai eu
làl — reprit Giorgina se parlant à elle-même.
— Mais enfin, qu'y a-t-il donc?
— Eh bien! — dit la Géorgienne en précipi
tant ses paroles, instinct assez ridicule des gens
qui ont un aveu difficile à faire, comme si les
mots en courant laissaient moins de tfaces, —
tourmentée ce soir par ce jeune colonel dont vous-
savez la passion pour moi, je lut ai permis de
s'introduire par le jardin avec promesse de la
Aujourd'hui, vers une heure, M. le Pré
sident de la République est sorti de l'Ely
sée, à cheval, pour parcourir la capitale.
Il portait l'uniforme de général de la gafde
nationale avec le grand cordon de la Légion-
d'IIonneur. Parmi les officiers qui l'accom
pagnaient, nous ayons remarqué MM. Fleu-
ry, Edgard Ney, Bacciocclii et de Persigny.,
Il n'avait pour toute escorte que quatre ca
valiers de la garde républicaine marchant
en avant et sept ou huit dragons qui le sui
vaient. '
Le Président a parcouru la place de la
Concorde et la rué de Rivoli ; il s'est en
suite dirigé vers les boulevards et a traversé
la place de la Bourse.
Partout les cris de : Vive le Président ! se
sont fait entendre unis aux cris de : Vive la
République! Quelques groupes, au milieu
desquels on distinguait des chefs de clubs
bjen connus, ont essayé de mêler d'autres
cris à ces acclamations, mais ils n'ont pas
trouvé d'écho. La population honnête et
modérée applaudissait partout à la tenue
ferme et calme du Président ; elle lui savait
gré de se confier résolument à elle.
wrrmiwi
La reconnaissance du général Gourgaud, com- .
me colonel de la 4 r ? légion, a été faite ce matin
devant la légion au grand complet, réuuie dans
la cour des Tuileries.
La légion s'est partagée ensuite' pour aller oc
cuper les positions suivantes : un bataillon à la
mairie, un.bataillon dans le jardin dos Tuile
ries, un bataillon à l'église de la Madeleine, un
.bataillon dans l'allée de Marigny, pour protéger
la demeure du Président de la République.
Au moment où la 1" légion prenait les ar
mes, à raison de cette reconnaissance, l'ordre
était donné de battre le rappel dans les autres
légions. Bientôt les mairies ont été occupées, et
de forts détachemens ont pu être placés à proxir:
mité de l'Assemblée nationale, à la Bourse, à
la Banque et sur les autres points désignés par
le général en chef.
En même temps, la troupe de ligne prenait
position sur les places, sur les boulevards et dans
recevoir un quart-d'heure, pour entendre des
choses très graveset très particulières qu'il dit
avoir à me communiquer.
— Il faut que vous ayez perdu la tête.
— Nôn, car je me proposais bien de lui rabat,
tre un peu de sa joie, ei vous faisait trouver
avec nous en tête-à-tête, sans qu'il y parût rien
d'arrangé.
— Alors, pourquoi ce rendez-vous?
— Ah! parce que j'ai bien remarqué que la
princesse de F... n'avaitpas cessé toute la soirée
d'avoir des yeux pour lui, itqueje ne voulais
pas qu'il se retournât du côté de celle pédante ;
d'ailleurs il part demain pour rejoindre son ré
giment, et avec son bras encore en écharj e et
sa blessure à peine fermée, il y a tout à parier
que je ne le reverrai pas.
— Et à quelle heure doit-il venir?
— Minuit sonnant il doit être dans le grand
parterre ; il sait les êtres, ayant fait dresser de
puis long-temps un plan de la'maison^ où il m'a
avoué avoir eu le dessein de me faire enlever, si
je ne J'eusse un peu accueilli;
— C'est bien ; vers minuit, — dit Herminic,
personne résolue en toute chose,— si nous som
mes encore à table, ce qui est très probable, je
sortirai sous un prétexte et irai le prévenir du
contre-temps.
— Bonne chérie, toujours m'a providence ! —
dit Giorgina en embrassant sa confidente.
Et, bras dessus, bras dessous, elles se renda
ient dans la salle du banquet. y
En se mettant à table, les deux femmes eu
rent la surprise de plusieurs bijoux que Dubi-
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PARIS.
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F Ob «"«honm dinfe M' ttpartànaifCau mesngnla *t
lui directions d«s poste*. —A Londres, chox HM. Cnrii il
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. ffriiMié* franco, ^nrJ*rfd*ûtiaa,,
à H. M ehroau , gérant.
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■a bureau du Journal.
.Tcatc insertion toit tira «igréâc par U {irast. -
S'adrsieer franco, pour l'administratio*,
i m. demain , .directeur.
Ï>ABIS, 29 JANVIE J
"Notis, avons félicité l'AssémbRe consti-
tuanted'ayoir4éféré aux vpeux du pays ep pre-
nantèn considération le principe delà pjropo-
tion deM.Ràteau, nôns avons à là féliciter d'a
voir persisté aujourd'hui dans sa première dé
cision,.malgré tons les efforts- tentés pour l'é
branler. La première fois, elle avait fait preu
ve dé sagesse, 'elle a fait aujourd'hui preuve
dé sagesse et dé fésoïtitionj et ce second vote
«n portant là satisfaction dans lé pays y- por
tera aussi , la sécurité, La France sentira
qu'elle ' peut se reposer sur le patriotisme
d'une assemblée, gui' dans une question si
-délicate, où. l'on a cherché à engager toutes
ses susceptibilités, a su s'élever par deuxfois
au-dessus des mesquines considérations per
sonnelles, rompre le réseau d'intrigues dans
lequel on l'enlaçait, et prononcer résolu
ment dans le sens des intérêts et de la vo
lonté du pays.
Les circonstances du vote en relèvent
l'importance -et la signification. Jamais, de
puis qu'elle siège, l'Assemblée n'avait été
aussi nombreuse: 821 représentai ont pris
part au voté) et la proposition de dissoudre
prochainement!'Assemblée a obtenu 416 voix
■contre405, pour la seconde lecture.,Le scrutin
secret a été, cette fois encore, réclamé par le
parti qui s'était opposé à son introduction dans
le règlement, et qui non-seulement paraît
S 'être éclairé sur le mérite de ce mode de vo
ter, mais semble y trouver des avantages
tout particuliers, M. Combarel de Leyval a
demandé aux âdversaires dé là proposition
pourquoi, s'ils croyaient n'avoir affaire qu'à
line agitation factice, réprouvée par la ma
jorité du pays, ils recouraient au scrutin se-
çret et enlevaient à la nation le moyen de
■connaître les véritables interprètes de sa pen
sée.'
„ Cette question n'a pas reçu de réponse, et
n'en pouvait pas recevoir. Personne ne sau
rait contester avec bonnefoi la réalité du
mouvement qiji se produit d'un bout de la
France à l'autre ; personne ne se méprend
sur les véritables sentimens du.pays; et ce
qui donne aux "pétitions ' une autorité très
grande, c'est moins encorde nombre chà-
que jour, croissant des signatures, que le
caractère calme èt respectueux qu'elles ont
foutes revêtu. M. Jules Favrè a essayé de
passionner l'Assemblée en exagérant, àvéc
sa prolixité ordinaire, le caractère commi
natoire dequelques pétitions, dont il s'est
gatdé dé.'rien citer ; mais quelqueè excep
tions qu'on n'ose ëncore mettre en lumière,
rfe suffisent pas : à faire calomnier un grand
mouvement national. ;
C'était vraiment le' pays, qui faisait, appel
à l'Assemblée, c'était vraiment la .voix
qu'à ses mandataires : et voilà pourquoi on
fuyait le grand jour ; voilà pourquoi ceux
qui 6e prétendent les amis exclusifs de la
piiblicité invoquaient le mystère ; ils préfé
raient le reniement de leurs doctrines à ,1a
défaite : et. se dérobant modestement à la re
connaissance dpût ils se disaient assurés, ils
né voulaient donner à là nation que des sau
veurs anonymes. (Jette misérable et dernière
ressource est devenue inutile entre, leurs
m^ns. Quoiqu'on eût assuré aux calculs de
l'intérêt privé le voile du secret, lé cri du
bon sens et de là conscience a été entendu,
et la bonne cause a triomphé. .
Redirons-nous les divers incidens de cette
discussion ardente, passionnée, où le parti
qui vient d'éprouver un échec trahissait,
jiar son impatience, par ses cris, par ses cla
meurs quelquefois irréfléchies, le pressenti
ment de.sa défaite? Ce serait inutile, lesar-
gumens des uns, le.s sophismes des autres,
sont connus et appréciés de la France en-
tjèreiet l'Assembléè yient de prononcer une
seconde.fois, entre les_unse,tje$.autres, le
jugement que le pays en avait déj * porté.
M. Fresneau, avec une .'logique nerveuse, a
démontré que l'Assemblée actuellenepouvait
jamais acquérir le caractère d'une assemblée
législative, ^prolongation de.sa durée était
la prolongation d'une situation exception
nelle et anormale, la substitution du provi
soire au régime de la Constitution. M. Vic
tor Hugo, dans un discours concis et élevé,
rappelant que le jour du danger pour un
gouvernement était celui où il doutait de
gfra' principe; a demandé à l'Assemblée si ce
n'était pas la défiance du suffrage universel,
la mise en interdit de la France, qui étaient
au fond du discours des adversaires de la
proposition, II aïnvité l'Assemblée à pren
dre conseil des. fautes du Gouvernementpro-
visoire,à në pas ajourner : la venue de la lé
gislative, comme sa propre réunion, avait été
ajournée,, de crainte quela sympathie popu
laire! ne se ,retirât d'elle, et ne lui ënlèvât-
sa force. M. Combarel de Leyval, animé par
les interruptions qui .venaient à chaque ins
tant couvrir sà voix, a mis dans une discus
sion vigoureuse l'Assemblée en présence du.
Président et de la situation»
La Constitution n'ajpas> voulu que le Pré
sident fût un simple exécuteur des volontés
dé l'Assemblée ; elle a cherché à en faire un
véritable et sérieux contrepoids de là légis
lature. Le pouvoir 'exécutif a usé de son
droit, èt fidèle à fcon .origine, fidèle au mou
vement qui l'avait enfanté,, il a appelé au
ministère des hommes qui étaient en mino
rité dans l'Assemblée. Si l'Assemblée n'a
pas protesté, c'est parce qu'elle n'avait
pas la confiance qu'elle serait suivie par
le pays. Aujourd'hui encore la majorité
ne confond pas, dans son opposition, le
chef du pouvoir exécutif et le ministère,
auquel il réitère l'àssurance de sa confiance;
élle veut séparer l'un de l'autre, preuve évi
dente qu'il ne s'agit pour elle que de lapos-
session du pouvoir. Elle se flatte que si le
chef du pouvoir exécutif accepte ses offres
de concours, le pays prendra le change, et
que , sous le couvert de l'élu du 10 décem
bre, il laissera revivre la politique qu'il a
voulu condamner dans cette élection mémo
rable. Ce qu'on cherche dans la prolonga
tion de l'Assemblée, c'est à rendre into
lérable, et impossible la situation du mi~
nistère, afin.de l'obliger à la retraite,
et cette retraite: ce -serait un démenti
donné aux six millions de voix qui ont
choisi M. Louis-Napoléon Bonaparte. Im
poser à l'élu du 10 décembre ,. contre
ses sympathies, contre sa volonté, contre son
mandat, un changement en contradiction
avec le vœu manifeste du pays, ou prolonger
un antagonisme sans issue et plein de périls:
voilà à quoi aboutissent sciemment «u non
tous les adversaires de la dissolution de
l'Assemblée.
M. Jules Favre, qui est le seul orateur
que l'on ait entendu contre la proposition,
n'a point trouvé, malgré toute sa subtilité,
une autre issue de la situation. Il faut que le
ministère se retire et nous fasse place, telle
est la pensée qui s'est reproduite sous miîle
formes pendant toute la longueur de son
interminable . discours. Ce n'était point
une discussion, c'était une série de pro
vocations adressées au ministère, en de
hors du ministère, au-dedans et au-dehors
de l'Assemblée : c'était un effort perpétuel
pour irriter et aggraver le débat,, dans l'es
poir que quelque incident viendrait mettre
en jeu les passions et les susceptibilités de
l'Assemblée.
Pour réfuter un pareil discours, il suf
firait d'en rapprocher: les diverses parties et
de faire apparaître les contradictions que
masque à peine une. excessive diffusion. Le
vote de' l'Assemblée nous paraît une ré
ponse suffisante : non-seulement M. Jules
Favre n'a point ébranlé une seule conviction
par ses subtilités^ mais il a eu beau attiser le
feu, les passions ne se sont pas allumées à sa
parole; tant le motif qui l'appelait à la tri
bune était percé à jour, tant il était évident
que la question de principe pour liii ne cou
vrait qu'une question de pouvoir, tant écla-
' tait ce qu'il y avait de factice dans ses accu
sations et dans ses protestations.
Lenombre des orateurs inscrits faisaitpré-
sager une longue discussion; maisun côtéde
l'Assemblée croyait utile que l'Assemblée vo
tât sous l'influence des émotions du dehors.
Il a voulu faire clore la discussion, l'épreuve
lui a été contraire ; tous les orateurs delà
Montagne ont renoncé alors à la parole et
le débat a fini de lui-même. Une. longue
discussion s'est alors engagée sur la position
de la question. .On voulait mettre aux voix
la proposition de M. Rateau, ce qui eût ré
duit à l'impossibilité de voter, les auteurs des
amendemens qui, en adoptant le principe de
la proposition , souhaitent que l'époque de:
la dissolution soit déterminée sous une au
tre forme. Il a été décidé que l'on voterait
sur les conclusions de la commission , qui
repousse à la fois la proposition Rateau et
toutes les propositions analogues. Ce sont ces
conclusions qui ont été repoussées par 416
voix, contre 405.
Il nous reste h parler de deux incidens,
l'un à la fin, l'autre à l'ouverture dé la
séance. Un peu-avant le volé, M. le général
Cavàignac est venu prononcer à la tribune
quelques, paroles dont nous n'avons bien
sàisi ni le 'sens précis, ni l'opportunité. Si
l'honorable général a voulu dire quel'éleo
tion du 40 décembre; ne l'a pàs mis en de
hors des Instiitfffôtis^f ni'en état d'hostilité
vis-à-vis du candidat qui lui a été préféré,
il a raison, et personne n'en , avait douté.
Mais il n'en est pas moins vrai que le 10 dé
cembre, le pays a fait pencher la balance
eù sens inverse des préférences dè l'Assem
blée. •
! Au débufde la séance, M. Barrot a don
né à l'Assemblée, dans le langage le plus di
gne, et le plus rassurant, des explications
claires et complètes sur les précautions que lç
Gouvernement avait prises pour maintenir la
tranquillité, et sur les faits qui avaient
motivé ces précautions. On trouvera plus
loin, dinsi que dans le compte-rendu de la
séance, tous les détails qui sont relatifs à la
nouvelle organisation de la garde mobiie.
C'est en vain que M. Degousée, emporté
par une impétuosité qui lui a. déjà, plus
d'une fois, fait dépasser la juste .mesure,
a voulu faire prendre à cèt incident une
tournure irritante; c'est en vainque M. Jules
Favré, fidèle à sa tactique, a cherché à le
ranimer et à l'envenimer : les loyales et sin
cères déclarations de M. Odilon Barrot
avaient porté la conviction et le calme dans
tous les esprits.
Le Gouvernement à dû prendre, en ce
qui concerné la garde mobile, des mesures
qui attestent sa sollicitude toute pater
nelle pour cette jeune milice, qui avait si.
bien mérité du pays, par sa conduite hé
roïque pendant les journées de juin. Ces
mesures ont été aussitôt attaquées avec
mauvaise .foi par lès fauteurs de désordre,
qui sont parvenus à exciter dans quelques
bataillons de la garde mobile une certaine
agitation. Cest, comme à l'ordinaire,en ca
lomniant les intentions du Gouvernement,
en publiant des récits mensongers et des
commentaires malveillansdeses actes, qu'ils
ont essayé de souffler au sein de la garde
mobile l'esprit d'insubordination, en lui sug
gérant des démarches imprudentes et des
manifestations coupables.
Hâtons-nous de dire que leur tactique n'a
pas réussi. L'immense majorité de la garde
mobile a repoussé de perfides conseils et de
dangereuses manœuvres. La garde mobiie
ne saurait oublier quels sont les ennemis
qu'elle a eu à combattre derrière les barri
cades. Elle n'oubliera pas que le parti qui
lui fait maintenant des avances, et qui s'ef
force de l'égarer n'avait pas assez d'injures
et de colère contre elle après les journées de
juin. La garde mobile, en défendant l'ordre
et la société, en combattant fraternellement
avec l'armée et avec la garde nationale, s'était
attiré bien des haines, qui, long-temps après
ty.bataille, éclataient dans de lâches guet-
apens. Ces jeunes et braves soldats étaient in
sultés dans les rues : on les appelait les bou
cliers de juin et les assassins de leurs frères ;
plusieurs d'entre eux tombèrent victimes dé
ces odieuses rancunes. Aujourd'hui que la
garde mobile est mécontente, on feint d'ou
blier d'anciens ressentimens, on la flatte,
on la caressé, on s'efforce de l'entraîner
dans le piège dé manifestations séditieuses.
Nous avons raconté avec l'exactitude la
plus complète ce qui s'est passé entre M. le
général Changarnier et le commandant de
la garde mobile Aladenize. On sait que quel
ques officiers, irrités à tort des mesures du
Gouvernement, avaient eu la faiblesse de don
ner les mains à une sorte de petite conspira
tion. Des rassemblemens devaient avoir lieu
dans les Champs-Elysées pour réclamer tu-
multuairement contre lë nouvel arrêté. Le
Gouvernement à dû prévenir le mal qui pou
vait suivre l'exécution de ce complot où pre
naient part, sous l'inspiration dés meneurs,un
certainnombredejeunes gensquine compre
naient pas que les mesures du Gouvernement,
loin de leur être hostiles, étaient le plus sûr
moyen d'assurer leur existence en la régula
risant. Un journaï'a annoncé qu'hier quatre
commandans, MM; Duseigneur,. Arrighi,
Bassac et Camuset, ont été incarcérés à
l'Abbaye. Le fait est exact. Mais l'autorité
a dû, bien qu'à regret, prendre cette précau
tion dans leur propre intérêt même. Ces
quatre officiers, avaient été mis en état d'ar
restation en même temps que le comman
dant Aladenize. M. le général Changarnier,
sur leurs explications, les avait rendus à
fElELM'ON DU CONSTITUTIONNEL, 30 JANV.
' LE CABTOET MME.
TROISIÈME PARTIE.
LA. GEORGIENNE.
CHAPITRE XXX
sardanapale.
(Suite.)
. Quelques personnes quireqcontrèrcnt, un quart
d!heure plus tard, le viejl .avare arpentent les
galeries du Palais-Royal, ' assurèrent que tout,.en
lui, accusait l'allure d'un homme ivre ou d'un
fou. -, ^ , . . .. V,
' Après avoir fait plusieurs fois le tour dés ar-
cades, il alla s'asseoir sur un banc dans le jar
din, où, malgré la température très froide iie la
soirée, il demeura assis pendant près d'une demi-
heure, gesticulant, se parlant haut à lui-même,
en un mot, marquant tout le symptôme de la
plus vive agitation. . . . ;
On raconte encore, qu'ayant fini par amassèr
autour de lui un certain nombre dé persQnn.es,
il se leva brusquementj montfi ; îitt 129, où il
Toir notre numéro du 29 jcpTier.
Toute reproduction, même partielle de cet ouvrage,
cit'interdite, et «erait ourguiTiçcommo contrefaçon,
jeta successivement sur le tapis une.dizaine de ^
napoléons qu'il perdit avec un sang-froid qu'on
n'aurait pas pu attendre de son avarice. Seule
ment, quand il eut sacrifié cette somme comme
s'il avait obtenu le résultat d'une expérience :
— Allons, c'est bien, — l'aurait-on entendu
dire,—c'est une veine épuisée 1
Sorti de la maison de jeu, il entra chez plu
sieurs joailliers, où il fit en diamans et en bijoux
des achats considérables dont il chargea ses po
ches, passa ensuite chez Chevet, et y commanda
un souper froid qu'il ordonna de porter à son
hôtel de la rue"de la Chaise, lui-même s'y r.en-:
dit en voiture, ce qui était contre toutes ses
habitudes; il pouvait être huit heures, huit heu
res un quart quand il y arriva.
. Il apprit que Giorgina, accompagnée de Mlle
Dàliron, venait de partir pour l'Opéra, ce qui ne
. lui parut pas extraordinaire ; il savait ce projet
de spectacle dès la matinée.
J)ès lors, il employa tous lçs domestiques ïè
la maison à aller faire plusieurs, emplettes fort
extraordinaires,. et tout ce que l'on pouvait at
tendre de la bizarrerie de pon humeur parut "en
cette occasion, dépassé. Ainsi, une heure après,
l'un des gens qu'il avait dépêchés dans le quar
tier, arrivait faisant apporter, avec lui toutes
les fusées, pétards, lampions et menues pièces
d'artifice qu'il avait pu se procurer chez les
épiciers du voisinage, si bien qu'on ne douta
pas que ce singulier homme . n'eût l'intention
de donner une fête dans son hôtel, quoique la
température extérieure non plus que la saison
politique ne parussent pas très favorables à des
la liberté. Malheureusement , au lieu dë
donner l'exemple de l'obéissance et de la
discipline, ils ont eu le. tort de se rendre dans
un café voisin, et de. là ils ont envoyé: des
ordres aux officiers subalternes pour faire
mettre à exécution le complot qui avait été
forojé.. Force fut alors de prendre à leur
égard? une décision que commandait la pru
dence.>
Dans la journée d'hier, cent cinquante
gardes mobiles qjji prenaient sans titre au-
■' cun la dénomination de délégués, se rendi
rent à l'Èlysée-Nationàl. Ils ont demandé à
voir le Président de la République. Ils vou
laient, dit-on, exiger l'élargissement.de leurs
officiers. Le Président de la République a
refusé de les recevoir : mais.le.général Chan
garnier est .descendu pour leur parler. Dans
une allocution empreinte de cette franchise
cordiale qui caractérise toutes ses paroles,
M. le général Changarnier leur a expliqué
qu'un déplorable malentendu pouvait seul
exciter ces désordres, qu'il n'était point
question de méconnaître leurs services et de
les licencier, et que le Gouvernement, qui
saurait d'ailleurs maintenir avec énergie la
discipline et l'ordre, n'avait Songé qu'à fixer
la position légale de la garde mobile.
Nous ajouterons avec regret que ces pré
tendus délégués, que ces loyales paroles au
raient dû éclairer, se sont retirés en pous
sant des .clameurs séditieuses. Quelques-uns
ont cru devoir faire une démarche auprès
de deux des chefs de la Montagne, et ils sont
rentrés dans leur caserne de la rue Saint-
Thomas-du-Louvre, en criant, : Vive la
révolution démocratique et sociale !
Ce matin, la fermentation qui s'était ma
nifestée dans deux ou trois casfjmes, a né
cessité quelques mesures de précaution. Ces
casernes ont été surveillées par des détache-
mens de troupes de ligne. Tout annonce
au reste quele malentendu qui a suscité cette
agitation dans deux ou trois bataillons
n'existe plus. On a fait comprendre à cette
fraction de la garde mobile l'esprit et l'utilité
de la décision qu'a prise le Gouvernement.
Ces jeunes militaires ont trop de bon sens,
de patriotisme et d'intelligence pour persister
dans une erreur qui ne serait profitable qu'à
leurs ennemis d'hier, devenus leurs amis
d'aujourd'hui. Ce matin, trois bataillons de
la garde mobile ont été passés en revue par
le général Changarnier. On les a placés sur
la place de la Concorde parmi les divers
corps de l'armée qui y avaient été réunis, et
le meilleur esprit régnait dans leurs rangs.
Une proclamation du général Changarnier
a été adressée à la garde mobile. Nous nous
empressons de la publier :
ordre du jour.
Officiers, sous-officiers et volontaires de la garde
nationale mobile.
Si j'en croyais vos calomniateurs, vous vous lais
seriez aller à des conseils pernirieux et intéressés;
vous feriez prêts à troubler l'ordre que jusqu'à pré
sent vôhs si intrépidement défendu, à attaquer
la République, les institutions placées ,tous votre
sauvegarda, et la société qui s'est enorgueillie de
vos succès et qui vous appelle s's héroïques cnfatis.
Au nom de la patrie, que nous saurons dé
fendre contre tous ses ennemis,. écoutez ma voix,
et repoussez ces fauteurs d'anarchie qui, en vous en
traînant à, votre perte,voudraient se venger de votre
glorieux passé.
Au quartier général des Tuileries, la 29 janvieT
1849.
Le général commandant en chef les gardes
nationales de là Seine, la garde natio
nale mobile et les troupes de la 4" divi
sion militaire. Sigué, changarnier
Nous souhaitons sincèrement que ce no
ble langage soit entendu de tous les gardes
mobiles. Qu'ils soient bien convaincus qu'en
leur parlant en termes si touchans de leurs
services et de la confiance qu'ils inspirent au
pays, M. le général Changarnier est l'inter
prète du Gouvernement et de tous les bons
citoyens.
L'arrê,té du Gouvernement n'a d'autre
but que de régulariser la position de la gar
de mobile. Après la révolution de février ,
les engagemens n'avaient été faits que pour
une année. A l'expiration de cette £?hnée,
dans les termes stricts de la légalité, le li-,
cenciement pouvait avoir lieu. Renvoyer la
garde mobile, c'aurait été certainement le
premier acte du parti qui voudrait en ce
moment soulever l'irritation dans ses rangs,
et qui ne lui a jamais pardonné 6a con
duite en juin. Telle ne pouvait être l'inten-
tion-d'un Gouvernement issu du vote du 10
décembre, et qui devait se rappeler que la
France entière s'était associée aux éloges
décernés à la garde mobile après ces fatales
et glorieuses journées.
Aussi, le Gouvernement n'a-t-il fait que
réorganiser la garde mobile ; elle ne conte
nait plus que treize mille hommes; il a ré
duit à douze le nombre des bataillons , au
lieu de vingt-quatre. Mais aucun soldât ne
sera renvoyé , tous pourront prendre place
dans les nouveaux cadres. Quant à ceux qui
ne souscriront pas un nouvel engagement,
f ils recevront leur paie comme un dédom
magement jusqu'à la fin de leur engagement.
Le Gouvernement à anticipé stir l'époque
où la réorganisation, devait êtrè nécessaire
ment faite pour - assurer ce pécule aux jeu
nes soldats qui sortiront volontairement de
la garde mobile.
La solde delà garde mobile reste encore
supérieure à celle que recevait la garde im
périale sous l'empereur Napoléon. U fallait
qu'elle cessât d'être trop au-dessus de la
solde des troupes de ligne. L'équité le vou
lait, et la raison l'indiquait. D'ailleurs, le
sort des sous-officiers se trouve amélioré de
fait, puisque , comme dans l'armée , leur
solde devier t supérieure à celle des simplès
soldats. i
Pour réorganiser la garde mobile, il fal
lait toucher au corps d'officiers. On l'a fait
avec tous les ménagemens que commandait
la justice. Les uns sont maintenus, les au~
■tres- rentrent dans l'armée dont ils faisaient
partie avant la formation de la garde mobile.
Quelques-uns, sans doute, sont rendus à la
vie privée ; mais ils ne pouvaient conserver
une position qui, dans l'armée, ne s'acquiert
qu'après quinze, vingt, trente années de ser
vice. Eux seuls, en' définitive, sont atteints,
et nous aimons à les croire trop bons ci
toyens pour, craindre que, pour venger une
injure imaginaire, ils cherchent à exciter
parmi leurs camarades l'indiscipline et la
révolte. '
Au surplus, la garde mobile doit connaî
tre où sont ses véritables amis. Elle ne peut 1
hésiter entre les hommes qui ont combattu
avec elle en juin et les hommes qu'elle a
vaincus sur les barricades, qui l'ont pour
suivie de leur haine et qui l'eussent licenciée
s'ils avaient été vainqueurs. D'un côté, se
trouvent les gardes nationaux qui ont si fra
ternellement ouvert leurs rangs à ces jeunes
compagnons de leurs périls et de leurs fati
gues ; l'armée, qui a vu la garde mobile se
comporter au feu comme une vieille troupe;
Paris entier, la France entière qui a fait en
tendre sa grande voix dans l'élection du 10
décembre, et qui veut énergiquementrordre
dans la liberté; de l'autre, s'agile ce parti
de brouillons et de turbulens, vaincu au 17
avril, vaincu au 15 mai, vaincu au 23 juin,
vaincu au 10 décembre, qui n'oubliera ja
mais qu'au premier rang des défenseurs de
la civilisation menacée, il a toujours ren
contré la garde mobile. C'est à la garde mo
bile de choisir.
Une proclamation vient d'être adressée à
la population parisienne par M. lé ministre
de l'intérieur. M. le ministre de l'intérieur,
dans un langage plein d'élévation et d'éner
gie, explique les circonstances dans les
quelles le Gouvernement a cru devoir faire
appel une fois de plus au patriotisme et au
dévôûment des bons citoyens pour convain
cre de leur impuissance les fauteurs d'anar
chie.
MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR.
PROCLAMATION.
Citoyens de Paris,
Nous avons appelé la garde nationale sous les ar
mes. Nous l'avons appelée à la défense de l'ordre
social, menacé encore une fois par les mêmes enne
mis qui l'attaquèrent dans les journées de juin.
Les projets de ces hommes n'ont pas changé. Ce
qu'ils veulent empêcher à tout prix, c'est l'établisse
ment d'un gouvernement régulier et honnête. Ce
qu'il leur faut, c'est ut régime d'agitation perpé
tuelle, l'anarchie,.la destruction delà propriété, le
renversement de ious les principes. C'est le despo
tisme d'une minorité qu'ils espèrent fonder, en usur
pant comme un privilège la propriété commune, le
nom sacré de la République.
Pour colorer la révolte contre les lois, ils disent
que nous avotïs violé la Constitution et que nous
voulons détruire le Gouvernement républicain. C'est
là une calomnie méprisable. La République n'a pas
de plus fermes appuis que ceux qni cherchent à la
préserver des excès révolutionnaires, aveclexquelson
a trojî confondu cette forme de Gouvernement. La
Constitution. Mlle président de la République a juré
de la respecter et de la faire respecter ; il tiendra
son serment. Ses ministres ont un passé qui ne laisse
à personne le droit de suspecter leurs intentions; et
ils ne peuvent pas donner une plus grande preuve
de leur attachement aux institutions républicaines,
que l'énergie avec laquelle ils sont déterminés à ré
primer tout désordre, quelles qu'én soient les pro
portions.
Habitans de Paris, H ne suffit pas que la société
sôit forte, il faut encore qu'elle montre sa force; le
projets de réjouissance.
Deux heures plus tard, deux ou trois voitures
chargées de fourrages qu'il avait dû payer un
prix fou pour se les procurer en si peu de temps et
à une heure aussi avancée de la soirée, entraient
avec fracas dans la cour de son hôtel, et, au lieu
d'être portés dans les greniers, tout ce foin et
toute cette paille furent, par son ordre, emma
gasinés dans les appartenons du rez-de-chaus
sée et jusque dans les pièces qu'y occupait sa
maîtresse.
Sur ces entrefaites, le souper étant arrivé, il
fit dresser le couvert dans un des grands salons,
le seul qui ne se trouvât pas alors transformé
en magasin à fourrages; ordonna que les lustres
et.girandoles fussent garnis de bougies et allu-
méè; puis, comme il n'était pas encore l'heure
que Giorgina fût de retour du théâtre, il occupa
son temps à augmenter la combustibilité de ses
lampions eu les ém f chant avec de l'essence de '
térébenthine, dont il avait fait prendre, dans ce »■
but , plusieurs litres. Tout ainsi disposé , il jj
ordonna d'illuminer toutes les fenêtres, aussi
bien que la porte de l'hôtel; ensuite il alja pren
dre dans la garde-robe de la Géorgienne une
magnifique robe de chambre à dessins ' persans, .
. que son ampleur ne rendait pas trop messéante-
à sa taille, et, ainsi affubié, se mit à écrire une
lettre qu'il fit aussitôt porter à la poste. On y
lisait pour suscription : A Monsieur i Monsieur
le secrétaire général du canscii général, d'admi
nistration des hospice! de Paris.
Cette lettre venait d'être achèvée et envoyée,
au moment où il entendit dans la cour le bruit
de la voiture qui ramenait Giorgina.
Prenant aussitôt un flambeau de chaque main
comme fait un hôte bien appris qui reçoit la vi
site d'un personnage auguste, il alla au-devant
de la reine du lieu, et l'on peut se figurer l'éton-
nementde celle-ci, lorsque,s'élant déjà deman
dé ce que pouvait signifier l'illumination qui
éclairait la cour de l'hôtel, elle se vit accueilli
sur le perron par Dubignon, grotèsquemént vêtu
d'une de ses robes et lui montrant entre deux
lumières son maigre et pâle visage empreint
d'une gravité majestueuse qui excluait tout à fait
la supposition d'une bouffonnerie dont il aurait
conçu la pensée.
. Ce qui parut encore plus étrange à ja Géor
gienne, et surtout ce qui fut moins de son goût
que tout le reste des excentricités dont elle était
témoin, ce fut de voir son appartement devenu
quelque chose entre la grange et l'écurie.
— Etes-vous fou, Monsieur ? — ne put-elle
s'empêcher de dire.
— Non, mais je suis prévoyant et pbijantrope;
d'jci à quelques jours, une grande bataille sera
livrée sous Paris ; je veux que cette maison soit
transformée en une ambulance^ ; et, "faute d'ob -
jets de literie que je n'ài pu me procurer en
quantité suffisante , j'ai fait apporter de quoi y
suppléer.
. — Ce sera gai, —dit alors Giorgina, n'entrant
pas le moins du monde dans cette philantropie.
— Alors comme alors, — répondit Dubignon,
— et j'espère bien qu'à ce moment, vos belles
mains ne dédaigneront pas de faire de la char
pie; inais, en attendant, il faut un peu se réjouir.
repos et la sécurité sont à ce prix. Que tous les bons
citoyens secondent le gouvernement dans la répres
sion des troubles qui agiteraient la place: publiqtttâ
C'est la République, c'est-; la société elle-même, «f>
sont le^bases éternelles du pçuvoir/que les pertur
bateurs mettent eh question.,. Jja vicloiré.de l'ordrfr
doit être décisive et irrévoealjlp. Que, chacun fasse"
donc Son devoir, le gouvernement ne manquera pas
au sien. ; - : . r
Le ministre de l'intérieur, L éon fauciiek.
Les gardes nationaux ont répondu en
très grand nombre à l'appel qui leur a .été.
fait aujourd'hui dans l'intérêt de l'ordre?
public. Nous espérons que les craintes qfui
ont provoqué la convocation, cesseront avec
la journée, et le , chiffre de leur présence
dans les rangs, est fait pour contribuer à ce
résultat si désirable. Mais, s'il en était au
trement, s'ils devaient continuer ou recom
mencer ce service pénible, qu'il notis sôit
permis de demander à leur dévoûraent cîtiM
que de redoubler d'exactitude. Ils ont dû
remarquer quelles excellentes dispositions
avaient été adoptées, par l'autorité, dans la'
distribution des forces militaires. Sur tous
les points, à côté d'une troupe de garde na
tionale, se trouvait de la troupe de ligue.
Ce rapprochement provoquait naturellement
des scènes de fraternisation qui réchauffent
le cœur et aident à supporter le froid, l'hu-,
midité, la pluie, le stationnement les pieds!
dans l'eau. Les compagnies, qui étaient nom-'
breuses, étaient j ustement lières de présen
ter cet effectif imposant à leurs frères de
\'armée. Ceux-ci, qui n'ont pas besoin
d'être stimulés par l'exemple à l'accomplis
sement du devoir, étaient néanmoins heu
reux de compter tant de braves citoyens
réunis près d'eux pour la bonnè cause. Le
grand nombre de gardes nationaux sous les
armes, est le moyen le plus puissant de sé
curité. Il fait mieux que d'assurer la vic
toire, il a pour effet presque certain de pré
venir la lutte.
Ajoutonsquetouteslesprécautions avaient
été prises par le général en chef pour ren
dre le service des troupes le moins pénible
possible. Tous les régimens sont à l'abri,
mais ils se gardent militairement, et sont
prêts à sortir et à combattre la nuit comme
le jour. Tous les quartiers sont occupés par
les points principaux qui les commandent.
On ne saurait trop féliciter le commandant
en chef de la promptitude et de la parfaite
exécution de toutes les mesures qu'il a pri
ses. Par celte conduire, il a fait tout ce qui
était humainement possible", pour .prévenir
un mouvement au lieu d'avoir àleréprimer.
i Et il introduisit la Géorgienne dans le salon
splendidement illuminé, où était dressé le sou
per.
— Voilà, qui est mieux, — dit la courtisane,
qui se retrouvait dans son élément ; — mais a-
vant de profiter de votre galanterie, vous per
mettrez bien que j'aille quitter mes falbalas et
mes plumes, et prendre, comme vous avez fait
vous-même, un plus commode négligé.
— Oui, divine, allez, et revenez Yjte.
Et Giorgina sortit, suivie de MlleDaliron.
— Chère belle, dit la courtisane à Herrainie
aussitôt qu'elles furent seules, et tout en s'occu-
pant de sa toilette,—vous allez me gronder bien
fort.
— Et pourquoi vous gronder?
— C'est que j'ai commis une bévue énorme.
Pouvais-je me douter que ce vieux fou nous fe
rait ce soir, la surprise de se trouver ici à notre
retour du spectacle et probablement y passerait
la nuit ?
— Sans doute cela n'était pas fort présumable;
mais qu'importe?.il-n'est pas toujours aussi ga
lant à beaucoup près.
— Mon Dieu, quelle déplorable idée j'ai eu
làl — reprit Giorgina se parlant à elle-même.
— Mais enfin, qu'y a-t-il donc?
— Eh bien! — dit la Géorgienne en précipi
tant ses paroles, instinct assez ridicule des gens
qui ont un aveu difficile à faire, comme si les
mots en courant laissaient moins de tfaces, —
tourmentée ce soir par ce jeune colonel dont vous-
savez la passion pour moi, je lut ai permis de
s'introduire par le jardin avec promesse de la
Aujourd'hui, vers une heure, M. le Pré
sident de la République est sorti de l'Ely
sée, à cheval, pour parcourir la capitale.
Il portait l'uniforme de général de la gafde
nationale avec le grand cordon de la Légion-
d'IIonneur. Parmi les officiers qui l'accom
pagnaient, nous ayons remarqué MM. Fleu-
ry, Edgard Ney, Bacciocclii et de Persigny.,
Il n'avait pour toute escorte que quatre ca
valiers de la garde républicaine marchant
en avant et sept ou huit dragons qui le sui
vaient. '
Le Président a parcouru la place de la
Concorde et la rué de Rivoli ; il s'est en
suite dirigé vers les boulevards et a traversé
la place de la Bourse.
Partout les cris de : Vive le Président ! se
sont fait entendre unis aux cris de : Vive la
République! Quelques groupes, au milieu
desquels on distinguait des chefs de clubs
bjen connus, ont essayé de mêler d'autres
cris à ces acclamations, mais ils n'ont pas
trouvé d'écho. La population honnête et
modérée applaudissait partout à la tenue
ferme et calme du Président ; elle lui savait
gré de se confier résolument à elle.
wrrmiwi
La reconnaissance du général Gourgaud, com- .
me colonel de la 4 r ? légion, a été faite ce matin
devant la légion au grand complet, réuuie dans
la cour des Tuileries.
La légion s'est partagée ensuite' pour aller oc
cuper les positions suivantes : un bataillon à la
mairie, un.bataillon dans le jardin dos Tuile
ries, un bataillon à l'église de la Madeleine, un
.bataillon dans l'allée de Marigny, pour protéger
la demeure du Président de la République.
Au moment où la 1" légion prenait les ar
mes, à raison de cette reconnaissance, l'ordre
était donné de battre le rappel dans les autres
légions. Bientôt les mairies ont été occupées, et
de forts détachemens ont pu être placés à proxir:
mité de l'Assemblée nationale, à la Bourse, à
la Banque et sur les autres points désignés par
le général en chef.
En même temps, la troupe de ligne prenait
position sur les places, sur les boulevards et dans
recevoir un quart-d'heure, pour entendre des
choses très graveset très particulières qu'il dit
avoir à me communiquer.
— Il faut que vous ayez perdu la tête.
— Nôn, car je me proposais bien de lui rabat,
tre un peu de sa joie, ei vous faisait trouver
avec nous en tête-à-tête, sans qu'il y parût rien
d'arrangé.
— Alors, pourquoi ce rendez-vous?
— Ah! parce que j'ai bien remarqué que la
princesse de F... n'avaitpas cessé toute la soirée
d'avoir des yeux pour lui, itqueje ne voulais
pas qu'il se retournât du côté de celle pédante ;
d'ailleurs il part demain pour rejoindre son ré
giment, et avec son bras encore en écharj e et
sa blessure à peine fermée, il y a tout à parier
que je ne le reverrai pas.
— Et à quelle heure doit-il venir?
— Minuit sonnant il doit être dans le grand
parterre ; il sait les êtres, ayant fait dresser de
puis long-temps un plan de la'maison^ où il m'a
avoué avoir eu le dessein de me faire enlever, si
je ne J'eusse un peu accueilli;
— C'est bien ; vers minuit, — dit Herminic,
personne résolue en toute chose,— si nous som
mes encore à table, ce qui est très probable, je
sortirai sous un prétexte et irai le prévenir du
contre-temps.
— Bonne chérie, toujours m'a providence ! —
dit Giorgina en embrassant sa confidente.
Et, bras dessus, bras dessous, elles se renda
ient dans la salle du banquet. y
En se mettant à table, les deux femmes eu
rent la surprise de plusieurs bijoux que Dubi-
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