Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1849-01-06
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 06 janvier 1849 06 janvier 1849
Description : 1849/01/06 (Numéro 6). 1849/01/06 (Numéro 6).
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
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«us directions des poste». —A Londres» eb .es MU. Comi^.$t/
jUi.-A Slrssboorg, cbex Alexandre, pcurl'ALtem&tfiffs f ■
- f'adrewor franco, pour la réà*ctioirjg, \ I V
à h. merruau , gérant. y^-,'
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Lu annonçai (ont reçues, de ii à 4 heurel,
an bnreaa dn Journal.
Toite lanrtloa doit être igréê» p»r 1* {tout.. 1
f «dresser franco, pour l'adminiitratioH» ' !
1 H. DEMAIN, directeur.
PARIS, S JANVIER.
Après, l'heureuse épreuve de leurs forces
et de leur union, que les opinions modérées
ont faite dans l'élection pour la présidence,
la confiance s'est ranimée, la : bourse a re
pris courage, les capitaux ont paru vouloir
ge remettre en mouvementl'industrie a
reçu des commandes, le travail a retrouvé
quelque activité. Rien n'était , au fond,
mieux justifié que ce retour de la confiance
publique. Il y a, par le résultat de l'élection
pour la présidence, un grand fait constaté : la
yictoire éclatante de la société sur les doc-:
trines subversives, la prépondérance écrar
santé du parti modéré, eii face de la petite
faction des socialistes, des montagnards et
des républicains de naissance, théoriciens de
la ruine, praticiens du désordre, conspira^
teurs émèrites, dictateurs révolutionnaires*
Cette victoire devait inspirer à la société
française un profond sentiment de sa puis
sance, une grande confiance dans sa propre
durée.
Cependant, quoique rien ne soit venu di
minuer la portée et obscurcir le sens de l'é
lection du 10 décembre, le mouvement des
affaires semble vouloir s'arrêter de nouveau;
la bourse fléchit, la confiance paraît,tout
près de s'éteindre. Comment s'expliquer un
retour si fâcheux vers le passé? Ecartons
les petites raisons^ les bruits qui courent, les
désappointemens de ceux qui croient qu'un
Simple vote suffit pour réparer en un jour
dix mois de souffrances, et que le bien se
fait d'un coup de baguette comme dans le
pays des fées. Allons droit à la raison sé
rieuse, au fait capital qui comprime de nou
veau le travail et ie crédit dans leur essor.
Ce qui a fait rentrer le découragement
dans les esprits, c'est le vote récent de l'As
semblée nationale sur l'impôt du sel ; c'est
la situation difficile des pouvoirs les uns vis-
à-vis des autres et à l'égard du pays, situa
tion dont ce vote regrettable a été le symp
tôme et la révélation.
Le vote sur l'impôt du sel a été considéré
partout, en France , comme une atteinte
portée au crédit, comme une menace d'ag
gravation pour les autres impôts. La cham
bre a du même coup enlevé au pays 50 mil
lions et la confiance; elle a frappé les finan
ces publiques par la diminution des ressour
ces et l'affaiblissement du crédit; elle a por
té un grave préjudice à l'industrie, en fai
sant renaître le doute et l'inquiétude dans
les esprits* au moment où ils s'ouvraient à
peine à l'espérance.
L'Assemblée, qui comptait >sur. cette me
sure pour rétablir sa popularité ébranlée,
s'est donc, tout au contraire, aliéné lès po
pulations par ce faux calcul. On a vu d'ail
leurs, dans son vote, non-seulement une
îecherche trop ardente de popularité person
nelle aux dépens du budget, mais encore
une sorte de disposition à la lutte contre le
nouveau ministère, une velléité de conflit.
Il faut donc que l'Assemblée le sache bien ;
elle est pour beaucoup, nops le lui disons
avec respect mais a\cc sincérité, elle est
pour beaucoup dans l'affaiblissement delà
confiance, dans le découragement des es
prits, dans la langueur du travail.
Nous croyons, il est vrai, qu'on s'exagè
re le penchant d'opposition que l'on suppose
à l'Assemblée. Elle a donné hier 140 voix
de majorité au ministère, et cette majorité
se retrouverait probablement dans toutes
les occasions décisives. Nous comptons, pour
notre part, sur sa sagesse et sur sa pruden
ce. Toutefois, la France se rappelle les faus
ses démarches qu'une partie considérable de
l'Assemblée a faites dans la lutte qui a pré
cédé l'élection pour la présidence, et le dés
accord éclatant qui s'est manifesté par le
résultat, entsç cette majorité de l'Assem
blée et la majorité nationale, La France
vient de voir la chambre commettre une
grave erreur dans la question du sel, et se
. laisser troubler par l'approche des élections,
au point de sacrifier les finances publiques.
La France en conclut que la chambre, nom
mée dans des circonstances- toutes différen
tes de celles où nous sommes placés aujour
d'hui, ne comprend plus avec la même
promptitude et la même sûreté qu'autrefois,
les sentimens véritables du pays, et que les
représentans ont eux-mêmes la conscience
de ce dissentiment.
Ce défaut d'accord préexistant et de com
plète harmonie peut devenir un danger, et
produire tout au moins des votes qui ne
soient pas approuvés par l'opinion publique.
Ajoutons que la situation réciproque du
"pouvoir exécutif et de l'Assemblée consti
tuante est mal définie, toute provisoire , fé
conde en méprises et en regrettables conflits.
.Voilà les vraies causes de la défiance et du
malaise public. Plus la chambre prolongera
son existence, plus elle laissera subsister
l'incertitude sur ses desseins à cet égard, plus
le mal s'aggravera. Aussi, nous adjurons
l'Assemblée nationale, au nom mêmçde tout
le bien qu'elle a fait, des services qu'elle a
rendus au pays, et du souvenir qu'elle voudra
laisser après elle dans l'histoire, de se hâter de
faire venir à l'ordre du jour la proposition de
M. Rateau, et d'assigner elle-même immédia
tement la date précise de sa séparation et des
élections nouvelles. Qu'elle se garde^des in
trigues, des petits calculs de parti, des ambi
tions personnellesrésoluesà exploiteras der
niers jours; qu'une discussion franche/loyale,
explicite, précède son vote ; que tout soit dit
librement et sans clameur^ pour ou contre
la dissolution spontanée de l'Assemblée au
mois de mars; que l'Assemblée décide en
suite, sans arrière-pensée, en face du pays,
selon le sentiment public ; qu'elfë cfëjermine
à un jour rapproché sa séparation, et elle
verra la France respirer, les faux bruits s'é
vanouir, la confiance renaître.,-On rendra
justice et à son dévoûment passé et à,son
abnégation présente. La reconnaissance re
prendra ses droits, et le vote qui provoquera
des élections nouvelles effacera en grande
partie les fâcheux effets du vote sur l'impôt
du sel.
Nous publions aujourd'hui quelques-unes
des nombreuses pétitions adressées à l'As
semblée nationale pour lui demander de se
dissoudre. Il n'y a : pas en ce moment un
seul département où des pétitions sembla
bles ne circulent et ne reçoivent de tous les
citoyens le plus favorable accueil. Le senti
ment du pays se prononce hautement pour
une mesure que les considérations les plus
graves réclament et que les circonstances
rendent indispensable.
-L'article 45 de la Constitution porte que
l'élection du président aura lieu le'second
dimanche du mois de mai. C'est donc-au
mois de mai 1852 que la France de^ra élire
le successeur de M. Louis-Napoléon Bona
parte. L'Assemblée législative élue en' 1849,
pour trois ans, verra expirer ses pouvoirs
dans cette même année 1852. Fautril que
les secondes, élections générales, aient Heu
avant ou après l'élection du second prési
dent, et par conséquent avant ou après le
mois de mai 1852? :
Il ne peut y avoir de doutes sur une pa
reille question; il est indispensable que les
élections de l'Assemblée législative précè
dent l'élection du président. Supposons'qu'on
ait décidé le contraire, que l'on- procède à
l'élection du second président avant la dis
solution de l'Assemblée législative, et qu'au
cun candidat ne réunisse la majorité, l'é
lection du président reviendra à l'Assemblée
législative. On aurait donc ce spectacle
étrange d'un pouvoij-, virtuellement déchu,
qui serait chargé d'enfanter un autr'ç pou
voir. Une assemblée à la veille dè se sépa
rer, que les circonstances auraient peut-être
discréditée ou mise en désaccord avec les
sentimens du pays, nommerait quinze jours
avant sa propre dissolution, l'homme des
tiné à gouverner la France pendant quatre'
années. Quel crédit pourrait s'attacher à
une pareille nomination, et quels dangers
n'y aurait-il pas là pour la, patrie ?
Nous ne parlons pas seulement des ré
clamations que le choix de l'Assemblée,
quel qu'il fût, soulèverait de la part de tous
les partis : avant l'élection, l'Assemblée tout
entière serait mise en suspicion. On ne man
querait pas d'afficher la crainte que dans le
choix à faire entre les ' candidats, certains
membres de l'Assemblée ne se laissassent
guider moins par l'intérêt du pays que par
le désir d'avoir quelques semaines plus tard
l'appui du nouveau, pouvoir dans, les élec
tions générales : on appréhenderait une
sorte de marché entre les candidatures pré
sidentielles et -les candidatures législatives.
L'affermissement de la Constitution, le
soin de la tranquillité générale, et un gravé
intérêt de moralité publique, demandent
donc impérieusement que les secondes élec
tions générales précèdent la future élection
pour la présidence. Il faut doi£élections aient lieu avant le mois de mai
1852 ; et comme la durée de l'Assemblée
législative est de trois années complètes sans
que la Constitution ait admis une déroga
tion pour la première assemblée comme elle
l'a fait pour la première présidence, il faut
de toute nécessité que l'Assemblée législa
tive ait pris naissance avant le mpis de mai
1849: ; '•
L'Assemblée constituante a donc les mains
liées par son propre ouvrage; elle aurait pu
déterminer une époque invariable pour les
élections générales, et appliquer à la future
Assemblée ce qu'elle a décidé pour la pre
mière présidence qui expirera au mois de
mai de sa quatrième année, sans avoir du
ré quatre ans; l'Assemblée ne l'a pas voulu.
Loin de là, l'article51 delà Constitution ne
se borne pas à stipuler que l'Assemblée na-' .
tionale est élue pour trois ans, il porte que
chaque nouvelle assemblée est convoquée
de plein droit pour le lendemain du jour où
finit le mandat de l'Assemblée précédente;
et qu|à défaut d'une convocation légale, les
électeurs se réunissent de plein droit le tren
tième jour qui précède la fin de la législa
ture. Or, comment calculer le jour des élec
tions, ou le jour de la convocation autre
ment que sur une révolution de trois années
complètes.
En résumé, il est nécessaire que la réu
nion d'une nouvelle assemblée législative
précède l'élection du second président ; il est
par conséquent nécessaire que les pouvoirs
de la future assemblée expirent avant le
mois de mai 1852, et, comme aux termes
de la Constitution, cette Assemblée doit sié
ger trois années complètes, if est nécessaire
qu'elle ait commencé à siéger avant Je mois
de mai de 1849. C'est la Constitution qui le
veut ainsi. En outre, la Constitution, sans le
stipuler formellement, semble vouloir, par
un paragraphe de l'article 51, que les élec
tions aient lieu habituellement trente jours
au plus tard avant la réunion de l'Assem
blée; on,voit que les élections ne sauraient
être reculées au delà du mois de mars. D'au
tres considérations puissantes indiquent d'ail
leurs cette époque.
Nous dira-t-on qu'on peut mettre un in
tervalle considérable entre les deux grandes
élections de 1852, cinq à six mois, par
exemple? Sans nous arrêter à chercher si
on n'éviterait pas un mal pour tomber dans
un pire, nous répondrons par les dangers
de là situation actuelle. Pour que les pou
voirs de l'Assemblée législative expirent à
la fin de 1852, il faut que l'Assemblée con
stituante prolonge son existence jusqu'à la
fin de 1849. Nous ne croyons pas qu'il-y ait
en France un homme sage et sensé 1 qui soit
de cet avis.
En dernière analyse, nous ne faisons que
demander à l'Assemblée constituante de
s'appliquer à elle-même ce qu'elle a réglé
pour toutes les assemblées suivantes. Dans
l'art. 51 de la-Constitution* elle a décidé
que qqarante-cinq jours au moins avant la
fin de la législature, l'Assemblée législative
déterminerait par une loi l'époque des nou
velles élections. Bien plus, dans la crainte .
qu'une assemblée, amoureuse d'elle-même,
ne négligeât ce soin important, la Constitu- '
tion déclare, qu'à défant du décret, les élec
teurs se réuniront de plein droit le trentième
jour qui précède la fin de la législature.
L'Assemblée, en prenant ces deux décisions,
a été dirigée par des considérations de la
plus haute gravité ; qu'elle s'inspire de sa
propre sagesse, et qu'elle donne l'exemple 1
de la conduite qu'elle a imposée aux assem
blées qui la suivront.
La séance s'est ouverte aujourd'hui par
une interpellation à laquelle l'orateur au
rait bien you I u donner de l'importance ; un
républicain de la veille, M. Froussard, avec
cette susceptibilité que les hommes de son
parti ne manquent pas de montrer toutes les
fois qu'ils croient pouvoir s'attaquer direc
tement ou ihdirectemënt au gouvernement
que le suffrage universel a constitué malgré
eux, est venu révéler à l'Assemblée que les
invalidés, en recevant hier le général Jérô
me Bonaparte, avaient laissé échapper des
cris de : Vive l'Empereur ! Nous ne doutons
pas que ces cris n'aient été purement rétros
pectifs. L'Assemblée n'a pas trouvé que le
fait signalé par M. Froussard valût la peine
qu'on s'y arrêtât, et, après quelques mots
de M. Barrot, qui a rappelé qu'il y avait
quelque indulgence à accorder pour des sou
venirs si profondément gravés dans le cœur
de nos vieux soldats, elle a passé purement
et simplement à l'ordre du jour.
L'ordre du jour appelait un projet de dé
cret qui soulève des questions difficiles, le
projet relatif au rétablissement du travail
dans les prisons.
L'organisation du travail dans les prisons
excitait depuis long-temps de vives réclama
tions de la part de l'industrie libre, lorsqu'é-
clala la révolution de février ; le Gouverne
ment provisoire , voulant venir en aide aux
ateliers qui se fermaient de tous côtés, sus
pendit, par un décret du 24 mars, le travail
des détenus ; le 28 août dernier, le Gouver
nement proposa un décret qui tendait à ré
tablir le travail, en laissant aux préfets le
soin de déterminer la nature et les tarifs des
fabrications qui pourraient être exécutées
dans les prisons, et en leur donnant, en ou
tre, la faculté d'interdire la mise en vente ,
dans certaines villes, des objets manufac
turés.
La commission à laquelle ce projet fut
renvoyé, tout en reconnaissant la nécessité
.de rétablir le travail dans les prisons , soit l
comme moyen de discipline et de moralisa-
tion, soit comme moyen d'alléger les char
ges de l'Etat, a cependant ét,é d'avis de re
pousser l'expédient proposé par le Gouver
nement, parce qu'il lui a semblé impropre à
combattre le mal auquel on voulait remé
dier ; on ne ferait, suivant elle, que dépla
cer la difficulté : car l'entrepreneur, ne pou
vant exercer une industrie acclimatée dans
le pays, organiserait une concurrence à cel
le d'un département plus éloigné, et, en réa
lité, plus digne de protection, puisque ce
département ne profite pas des débouchés
que procure le voisinage d'une maison cen -
traie.
Mais la commission ne s'est pas bornée à
rejeter la solution qui était proposée ; elle
en a formulé une autre qui lui paraît de na
ture à concilier des élémens en apparence
inconciliables ; le moyen consisterait à fai
re consommer par l'Etat, et principalement
par les armées de terre et de mer, les pro T
duits fabriqués dans les maisons de force et
de correction. Il est certain que, par cette
combinaison, là lutte cesserait entre le tra
vail libre et le travail des prisons, le produit
confectionné par le détenu ne pouvant plus
être mis en vente à côté, d'un article simi
laire confectionné par l'ouvrier libre et ve-
nirlie pcfint important était de savoir si ce
nouveau système, pouvait s'harmoniser avec
notre, organisation administrative; nous
voyons dans le rapport consciencieux et pré
cis, rédigé par M. Roulier, que la commis
sion s'est entendue à ce sujet avec les minis
tres de la guerre et de la marine, et qu'elle
s'est convaincue de la possibilité de réserver
aux condamnés la confection des vêtemens
et des chaussures destinés aux armées; le
rapporteur ajoute que ce système présente
rait en outre l'avantage de supprimer les
compagnies hors rang, chargées aujour
d'hui de confectionner ces différens objets,
ce qui permettrait, en rendant au service les
soldats qui les composent, de diminuer no
tre effectif, et par suite notre budget mili
taire." '
La discussion qui s'est engagée aujour
d'hui n'a encore amçné que l'adoption de'
l'article l or , portant que le travail sera réta
bli dans les prisons ; reste maintenant à dé
terminer selon quel mode et dans quel sys
tème il sera rétabli ; c'est dans cette ques
tion que se trouve la principale difficultés
~ M. de Lamoricière a pris plusieurs fois la
parole pour montrer comment le , moyen
présenté par la commission pourrait être
mis progressivement en pratique ; mais M.
le ministre de la guerre a fait quelques ré
serves, et M. le général Baraguay-d'Hilliers
s'est ensuite attaché à prouver qu'en tous
cas, même en faisant exécuter les- vêtemens
destinés à l'armée, on ne pouvait songer à
supprimer les compagnies Ilors rang qui é-
taientehargées de la confection cte beaucoup
d'autres objets, et qui pouvaient seules être
en mesure de pourvoir à tous les détails
d'entretien des effets d'habillement et d'é
quipement.
On voit, d'après ce simple exposé, que la
solution proposée par la commission, solu
tion dés plus heureuses en principe, présen
te cependant, au point de vue de l'applica
tion, des doutes et des embarras qui ont be
soin d'être éclaircis ; aussi M. le ministre de
l'intérieur, tout en déclarant que la pensée
de faire consommer par l'Etat les produits
du travail des détenus était susceptible d'ê
tre appliquée dans certaines limites, s'est
élevé contre ce que lé projet de la commis
sion présente d'impératif ; il est assez proba
ble qu'on finira par une transaction entre le
projet du gouvernement et lé projet de la
commission.
Il y a eu réunion dans les bureaux pour nom
mer une commission de quinze membres char
gée de préparer la loi organique sur l'enseigne
ment. Yoici le résumé de quelques-unes des dis
cussions importantes qui ont eu lieu à l'occasion
de cette nomination. Nous appelons surtout l'at
tention de nos lecteurs sur 1 opinion trfs remar
quable émise par M. dé Montalembert. dans le
5 e bureau. L'honorable orateur, mettant de côté
la question de la liberté de renseignement et
du droit de l'Etat, s'est attaché avec autant d'es
prit que de justesse de raisonnement*, à démon-,
trer, par les précédens, et par l'analyse même
des élémens de la discussion, qu'il était impos
sible que la question de l'ense gnement en gé
néral fût discutée par l'Assemblée actuelle, et
qu'il y avait lieu dé penser qu'elle ne serait
peut-etre pas même, d'ici à plusieurs années,
résolue par l'Assemblée qui lui succédera.
H* r .Jui£pau. — La discussion s'engage sur là loi
d'enseignement entre MM. Payer, Laboulie, Eva-
riste Bavoux, Roux-Lavergne, Amable Dubois ef
Ronjat.
M Payer développe les motifs et les moyens d'une
organisation universitaire qui, tout en donnant rai
son à l'Université, donne aussi satisfaction aux jus
tes réclamations de la liberté.
M. Evariste Bavoux est frappé de la renaissance
du sentiment religieux en Frànce. Aujourd'hui, dit-
il, l'opinion publique a pour ainsi dire désarmé vis-
à vis du clergé. Il n'a plus les prédilections du Gou
vernement dans les affaires civiles^ temporelles; le
pays n'a plus d'ombrage politique de ce côté, et alors
il s'abandonne à ses sympathies religieuses, à ce
sentiment qui élève la pensée de l'homme vers Dieu.
L'orateur s'applaudit de ces dispositions, à la con
dition que les causes qui l'inspirent soient religieu
sement conservées,t'esl-h-dire que le clergé reste à
son autel, où il sera respecté et honoré, et s'abstien
ne soigneusement de toute participation aux affaires
publiques, où il rie trouverait que suspicion et ré
sistance, et ferait renaître bientôt un antagonisme
fâcheux. Sous ces conditions, M. Bavoux est donc
d'avis de régler les intérêts de la religion, de l'Etat
et de la liberté dans cette grave question de l'ensei
gnement. Il avoue pourtant ses prédilections uni
versitaires dans ce triple problème.
M. Roux-Lavergne plaide, au contraire, la cause
de la liberté d'enseignement. Membre de l'Univer
sité comme M. Payer, il le remercie de sa tolérance
en faveur de droits autres que ceux de l'Université.
Quant à lui, il croit qu'il y a une grande impor-
tance à ce que les enfans, les élèves, soient pénétrés
dès leur bas âge de l'influence religieuse. Professeur
de philosophie dans un collège, il avait pour Collè
gue un homme pénétré d'autres convictions que les
siennes ; qu'en résultait-il ? antagonisme, contradic
tion dans leur enseignement commun aux mêmes
élèves. • ,
M. Amable Dubois insiste sur la nécessité d'une
surveillance de l'Etat, non-seulement sur les condi
tions de capacité, mais aussi sur la moralité des ins
tituteurs.
M. de Laboulie est partisan de la liberté d'ensei
gnement. ■ r
M. Ronjat çroit devoir recommander l'enseigne
ment républicain.
M. Payer est nommé commissaire au scrutin de
ballottage contre M. EvaristeJBavoux.
La séance du 4° bureau a été presqu'entièrement
remplie par uu discours de M. Jules Simon. 11 établit
d'abord |e principe qu'il était impossible à l'Etat
d'abdiquer son autorité sur l'enseignement; 41 a po
sé la lutte entre l'Université, d'une part, représen
tant ce principe d'autorité, et le clergé de l'autre,
représentant 16 principe de la liberté. Mais, avant
tout, il avait besoin de dire que dans cette lutte, on
n'avait pas apporté de part et d'autre toute la sim
plicité d'ame désirable. Cependant, laissant cela de
côté sur l'interruption d'un membre, M. de Tredern,
qui s'était écrié que ce n'était pas la question ,
M. Simon a passé aux moyens d'organiser la li
berté en rapport avec la Constitution. Selon lui,
personne né contestera que le droit d'enseigner im
plique de sa nature la moralité, la capacité, la sur
veillance et la pénalité. Toute la question se réduit
donc à savoir par qui ces facultés seront constatées,
ces conditions remplies : au nom de l'Université, il
renonce à la surveillance par elle, aux certificats de
moralité donnés par elle. L'attaque incessante porte
sur ces termes : l'Université est juge et partie, l'en
seignement libre est surveillé par son adversaire.
Eh bienl l'Université est lasse d'une lutte sans pro
fit .pour personne; elle ne réclame pas le pouvoir
pour elle, mais on ne i-aurait y renom er pôur l'E
tat. Maiutenant, qu'on cherche des'moyensceriains,
raisonnables, d'obtenir les, résultats désirés, c'est
l'œuvre de la commission. "Quant aux certificats de
baccalauréat ou des grades universitaires, l'Univer
sité ne saurait renoncer au droit de les délivrer.
Ilsserveut d'introduction à l'enseignement libre,
aux carrières libérales. Détruire l'unité par des ju
rys différens, c'est détruire l'unité de niveau, c'est
provoquer la déchéance d< s études et même du pays.
Traitant ensuite la question de concurrence, il la
redoute : l'avantage est tout au clergé qui donne l'é
ducation Si moindres frais, dont l'influence est gran
de, qui a ses niissionnaires et ses représentans dans
chaque famille. Il ne craint pis le clergé, sous le
rapport des études; mais si on ne soutient pas vail
lamment l'Université, il lui est- impossib'e de soute
nir la concurrence." Cependant, il en convient, l'en
seignement universitaire a besoia de nombreuses
réformes. - ■' ., .
Après ce discours, il. Boulay (de la Meurthe) se
borne à établir le droit de l'Assemblée à nommer
une commission et îi reconnaître le droit du minis
tre qui, en donnant à un de ses actes la publicité,
ne saurait avoir mérité un blâme: mais, selon lui,
il y a un fait dominant : le temps manquera pour
achever une loi complète, il faut >e borner à faire
la partie qui concerne l'enseignement primaire,
Seule partie urgente.
M. Desmolles dit quelques mots pour placer le
pays entre l'Université et- le clergé, et ne veut le
monopole nulle part; enfin M. sibour clôt la discus
sion : le clergé, comme clergé, n'est pas ennemi de
l'Université, dont les principaux adversaires ont été
des laïques. Il reconnaît le droit de l'État; mais il
le tient non en; propre, mais comme délégué des
pères de famille, et, par conséquent, obligé de don-
neraux ènfans l'enseignement voulu par les pères.
Mais si l'autorité de l'État représente le droit des
majorités, la liberté doit sauvegarder ceux de la mi
norité : elle do t être complète sous une surveillance
impartiale, de manière à assurer même la liberté
des méthodes, sans laquelle il ^i'y aurait pas une
vraie concurrence, qui doit empêcher l'Université
elle-même de s'endormir dans un fatal statu quo.
M. J. Simona été nommé commissaire par 30 voix
sur 45.
5 e bureau. — M. Bourbeau insiste sur la nécessité
de constituer fortement l'enseignement national en
donnant plus d'autorité au conseil de l'Université et
aux conseils académiques.
M. Bichard. développe la condition de la liberté
d'enseignement. ' : ;
M. La Bordère s'étend sur les réformes à introdui
re dans l'enseignement primaire et sur les dangers
de l'indépendance absolue des professedfc de l'Etat.
' M. de Montalembert s'abstient de traiter des néces-,
sités de la liberté ou des mérites de l'Université, et
élève une question préjudicielle. Il soutient qu'il
sera absoluméht impossible à l 'Assemblée de faire
une loi sur l'enseignement, et cela en dehors de la
situation politique et des périls du moment actuel,
mais àcause de la nature même de la question. Aux
termes du décret que l'Assemblée prétend exécuter,
c'est une loi sur l'enselgnement'en g.'néral qu'elle
doit faire, c'est-à-dire sur l'instruction primaire,
secondaire et supérieure. Or, la seule commission
de la loi sur l'instruction primaire, dont M. Barthé
lémy Saint-Hilaire a exposé hier les travaux, a mis
six mois pour aboutir à un avant-projet en MO ar
ticles. Et cependant elle travaillait sur une base où
lia liberté et l'autorité de l'Etat étaient déjà partiel— J
ilement conciliées par la loi de 4833.Dans le domai-i
? ne de l'instruction secondaire , au contraire", tout )
test à faire ou a refaire. La chambre des'pairs a con-1
■sacré vingt-quatre séances à cette seule branche dp,
i la question en 1844, la chambre des députés pres-
:qu'autanten 1837. ......
Ni l'une ni l'autre de ces discussions n'ont abouti
à aucun résultat définitif. Il reste encore l'enseigne
ment, supérieur : les lois présentées par M. de Sal-;
vandy sur les Facultés de médecine et de droit, les
(discussions élevées au sein du comité des culte»
de l'instruction publique sur les Facultés de théolo
gie» indiquent assez quelles difficultés on rencon
trera dans ce nouvel ordre de questions. L'orateur
affirme qu'il est insensé de vouloir toucher à ce vasta'
ensemble, dans la position où se trouve l'Assemblée
constituante. Il prédit que la future Assemblée légis
lative, au bout des trois ans de son mandat, n'aura
point encore terminé les discussions relatives à tou
tes les branches de l'enseignement; et il prend à.té-,
moin de sa prédiction ceux des membres du bureau
qui pourront être réélus à la prochaine Assemblée.
M. Bonjean adhère aux observations de M. de Mon
talembert, qui sont combattues par M. Dezeimeris, .
M. Bourbeau est nommé commissaire par 33 voix 1
contre 6, données à MM. Béchard et de Montalem--
bert. • 1
11 e bureau.—hSL séance du 41 8 bureau a été mar
quée par un incident soulevé par M. le ministre de-
l'intérieur. M: Léon Faucher, après avoir dit que lu
nomination d'une commission pour préparer la loi-
sur l'enseignement, entraînait l'engagement de faire
cettç loi organique, qui rie pouvait pas arriver à la
discussion publique avant trois mois, allait faire
connaître l'opinion du Gouvernement sur la propo
sition de l'honorable SL Rateau, quand il a été rap
pelé par le président à l'ordre du jour du bureau.-
Après M. Pleignard, MM. BerenQer, Gouttay, Girerd,
ont insisté pour que la question soulevée par M. le
ministre fût abandonnée, car elle leur paraissait
une violation d'un décret de l'Assemblée,' et que le-
bureau ne pouvait d'ailleurs nommer un commis-,
saire pour ainsi dire négatif, puisqu'il serait chargé
de dire à la commission nommée pour préparer la
loi sur l'enseignement, que cette loi ne devait,pas
être faite. L'honorable M.Moté, puisque là ques-'
tion était soulevée, ce qu'il n'aurait pas fait, aurait'
voulu qu'elle fût appréciée et que la discussion eût
un libre cours,-pour que,lesopinions pussent se ma
nifester; mais M. le ministre de l'intérieur a alors dé
claré que devant les dispositions du bureau,, il ne
croyait pas devoir insister, obligé qu'il serait, d'en
trer dans de longs développemens pour faire con
naître l'opinion du Gouvernement.
MM. Arnaud (dç,l'Arriège), Lagarde et Bûchez ont
été successivement entendus sur la loi h faire.
M. Arnaud e st de cette opinion que l'initiative doit
partir de la famille qui conserve la direction intel
lectuelle et morale de l'enfant. L'Etat ne doit in
tervenir que quant à la surveillant^ de réduction , ,
surveillance qui ne doit pas se transforme/ pn di
rection. L'Université fonctionnera à côté'desétablis-
semens libres ; si la liberté de "l'enseignement doit
la tuer, l'honorable membre ne la regrettei a pas.
M. Lagarde croit que l'enfant apparlient&i'î 1 t' a ",
mille et à l'Etat. Les droits des deux sont,conciliés
par h-s disposions de l.i Constitution. Il ,\eu( que
les effets de l'enseignement primaire remorfteilt jus
qu'à la salle d'asile. Il demande des réformes dans
l'Université, ma s il croit qu'il serait dangereux de
la briser. La nécessité de ta gratuité de l'enseigne
ment primaire lui paraît démontrée. i
Après avoir entendu M. Bûchez, qui est «ntrédans
des considérations générales iur les différentes espè
ces d'enseignement, le bureau à nommé M. Lagar
de commissaire. r
- 4 3 e bureau. — Deux grandes questions se présen
teront à la commission : l'enseignement primaire et
l'enseignement secondaire.
Quant à la première question , M. Avond s'élive
contre la gratuité absolue de l'enseignement pli-
maire et contre l'obligation imposée, au père d'en
voyer son fils à l'école primaire, oblig.ition que dé
crétait le pi ojet de loi présenté par M. Carnot.
Quant à l'enseignement secondaire , M. Avond se
prononce pour la liberté d'enseignement. .
M. Fresncau a pris ensuite la parole. L'honorable
membre a développé longuement les mêmes idées
que M. Avond, seulement il diffère avec la préopi
nant sur un point. M, Fresneau pense que la loi
qu'on va faire ne doit s'occuper que d'une chose :
organiser le principe de la liberté de l'enseigne
ment
M. Liouvïlle .a commencé par traiter quelques
points étrangers.à la délibération, puis il a abordé
le projet dont on s'occupait, et tout en se déclarant
vieil ami de la liberté d'enseignement, M. Liouville
a défendu l'Université. L'honorable membre, dans le
cours de ses développemens, s'est plaint qu'aucun
savant ne figurait dans la composition des deux ,
commissions qui ont été'constituées par M. de Fal- ■
loux.
Au premier tour de scrutin, les voixse sont répar
ties entre MM. Fresneau, Liouville et Aug. Avond.
Au second tour de scrutin, M. Liouville a été
nommé contre M. Avond et Fresneau, à la simple
majorité.
Le comité des finances a examiné la question
soulevée par M. Rodât, relative au rétablisse
ment du timbre des journaux. On a pensé que la
' loi organique indiquant que la presse serait or
ganisée et qu'une commission devait être nom
mée dans les bureaux,'il pouvait être inutile
3ue le comité des finances entrât dans l'examen
e celte question. Cependant sur l'observation
de différens membres,. une sous-commission, a
été nommée pour entendre, l'auteur de la pro
position et présenter un projet de délibération
au comité.
Cette sous-commission est composée de MM.
Davv, Grellet et Druet-Desvaux.
Le comité s'est aussi occupé de l'examen de
différentes propositions relatives à la réduction
de l'indemnité des représentans et à la relenuo
sur le traitement des fonctionnaires. Une discus
sion complète a eu lieu sur ce, sujet. 11 en est
résulté que les propositions présentées ne doi
vent pas être prises en considération.
Les orateurs qui ont pris la parole se sont at
tachés surtout à démontrer que renouveler sans
cesse des propositions semblables, c'était cher
cher à déconsidérer l'Assemblée, mettre une
question d'argent à la place d'une question po-
PEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL, 6 JANV.
LE CABINET NOIR.
TROISIEME PARTIE.
LES APOTRES DE NURESIBERG.
CHAPITRE XI.
suite dtj manuscrit. —. l 'ORIGINE du
cabinet NOin.
« Quelques rapides préparatifs, et un billet
laissé' au valet de chambre du comte rendirent
Karl à sa liberté. Mais cette fois, du moins, il
n'avait point souci de cette existence matérielle
dont les exigences viennent si durement com
pliquer un grand chagrin. Quelques économies,
faites sur le traitement de sa place, l'avaient
mis jusqu'à nouvel ordre au-dessus du besoin.
Voir notre numéro du 8 janvier.
Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage,
Mt interdit», et ccrait ponrsnirie comme contrefaçon.
» Le lendemain il était dans sa chambre il l'au
berge de VAigle-noir où il avait été prendre re
fuge, et continuait encore d'être vivement ému
par le dénoûment si brutal qu'avait eu son ro
man , lorsqu'à son grand étonnement parut de
vant lui le comte de Nesselbourg qui lui parla
comme il suit :
— Que s'est-il donc passé, mon cher Karl en
tre vous et Mme de Nesselbourg. que vous ayez
cru devoir si brusquement quitter ma maison?
■ — Depuis quelque temps, j'avais cru m'aper-
cevoir que Mme la comtesse n'avait pas ma
présence pour agréable; ayant eu l'occasion de
mieux m'en assurer, j'ai dû prendre le parti que
ce malheur me conseillait.
— Et la cause de cette froideur qu'elle vous
témoignait, vous ne vous la représentez pas?
— Non, vraiment, — répondit tout haut le se
crétaire, cependant qu'à part lui il se disait : —
Se douterait-il?...
— Eh bien! moi, je vais vous la dire : vous
êtes pour Mme de Netselbourg un garçon beau
coup trop observateur et beaucoup trop clair
voyant.
— Mais en tenant pour vraie cette perspica
cité, en quoi pourrait-elle nuire à Mme la com
tesse ? . ■ • ■' ' "
— Est-ce que les femmes n'ont pas toujours
mille et un secrets qu'il ne leur est pas agréa
ble de voir pénétrer ?
' — Je ne sache pourtant pas de secret que
j'aie pu être sur le chemin de deviner. .
— Vous mentez, mon cher, — dit vivement
M. de Nesselbourg.
— Monsieur , — fit Karl, en se levant avec
animation, — j'ai cessé d'être à votre service ",
et j'ai l'honneur de vous recevoir chez moi.
— Je veux dire, — reprit le comte, — que
vous avez remarqué tout aussi bien que moi ce
qui crevait les yeux de tout le monde, et c'est
parce qu'on avait peur que vous ne le vissiez
trop bien, qu'on a pris le parti de voùs éloigner.
— Mais encore, qu'ai-jc donc vu? — demanda
Karl avec impatience.
. — Parbleu, qu'entre ma femme et M. son
cousin régnait une tendre intelligence; me com
prenez-vous maintenant?
— Si c'est de cela qu'il s'agit, permettez-moi,
Monsieur, de vous faire remarquer que la cour
de M. deGrundheim était souverainement in
discrète, qu'elle se faisait même ouvertement
sous vos yeux; tant vous paraissiez y attacher
peu d'importance, tant votre confiante gaîlé pa
raissait même l'encourager.
— Jeune homme,—reprit le comte, — ou ma
femme traitait les «soupirs de messire Conrad
sans conséquence, et j'aurais alors été souverai-
nçment ridicule de m'en préoccuper ; ou la pas
sion du jeune impertinent lui était contagieuse
et alors toutes mes colères conjugales n'eussent
fait que rendre souterrain Y inconvénient dont je
me fusse aperçu.
^ Cependant, Monsieur le comte, on arrête
une femme sur sa pente, et souvent l'extrême li
berté peut faire le danger.
— En fait de femmes sages, — repartit sen
tencieusement le commissaire impérial, — je ne
connais que celles dont la sagesse peut marcher
seule et sans lisières. Avec les autres, j'aime au
tant savoir tout d'abord à quoi m'en tenir, et
mon principe est de leur lâcher la bride sur le
cou.
— Ceci est pourtant bien absolu; toutes les
femmes ne peuvent pas être des Lucrèces, et il
me semble qu'un peu d'aide à leur vertu n'est
pas pour rien gâter.
— Moi je n'aide pas, j'observe, je m'assure
et me venge, si je suis trompé.
» Tout cela fut dit d'un air de Barbe-Bleue à
faire effet même sur un homme moins naïf que
ne l'était le poète. Dominé par un bon mouve
ment, au lieu de chercher à envenimer les soup
çons que semblait avoir ce jaloux, Karl c'èîlara
qu'avec toute la finesse de vue dont on parais
sait vouloir le gratifier, il n'avait rie"n découvert
dans la conduite de la comtesse qui ftït de na
ture à l'inculper.
— C'est ce que nous saurions mieux,—reprit
le commissaire impérial , — si nous pouvions
avoir connaissance de certaines lettres qu'elle
adiesse à Vienne à Mme la chanoinesse de Val-
dorf, une de ces amies de cœur, la peste des
maris.
— Mais ces lettres sont-elles donc devenues
plus fréquentes en ces temps-ci?
-^-Voyez-vous, jeune homme, que la comtesse
avait raison, et que vous êtes plus que vous ne
voulez en avoir l'air," observateur dangereux!
Eh bien! oui, ces lettres, depuis quelque temps,
sont devenues très fréquentes, et les femmes ne
sont pas prises tout à coup de cette furieuse ac
tivité de correspondance, sans qu'il y ait un se
cret en chemin.
— Je vais peut-être dire une sottise; mais, en
certains cas, l'autorité conjugale ne peut-elle
pas aller jusqu'à exiger la communication ?......
— Faire de la jalousie parlée,—s'écria le
comte avec- dédain, — se commettre avec «l'a
dresse Mine d'une femme! y pensez-vous?
— Vous pensez encore moins à quelque pro
cédé violent, celui d'intercepter quelque chose
de cette correspondance ; cela ne se fait guère
qu'en diplomatie.
— Non, je ne voudrais rien intercepter, mais
je voudrais tout lire, et en cela vous pourriez me
venir en aide... oui, vous, mon cher, quoique cela
vous paraisse étrange. Chaque jour le monde se
perfectionne, et je veux vous confier un secret
que vous me garderez.
— Assurément, si je m'y engage. ^
— Et mettons même que vous ne me le gar
derez pas : voilà toujours ce que je puis vous
dire : avec leur air épais et tout commercial, ce .
sont, ma, foi ! d'habiles gens que ces Hambour-
geois ! ■ ■ •
» Ce début était si étrange et s'éloignait si fort
de la direction antérieure de la conversation,
que Karl se mit à.regarder le comte d'un air stu
péfait ; battait-il la campagne, ou voulait-il se
moquer de lui? ,
» Sans paraîtrese préoccuper de cet effet de son
exorde,—oui vraiment,—reprit le comte,^-pour
. le besoin deleurs opérations de bourse et de négo
ce, ces marchands, à force,de s'ingénier, ont fiti
par mettre la main sur un procédé'fort curieux^
samedi « Janvier im».
WCMEBO 6.
• »mxx as Zi'Asoi
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PARIS.
DÉPART. ÉTRAN6.
TROIS MOIS ...
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BUREAUX A TARIS :
Jtui du M Février, 10 (ci-dcTUt d« Y*loi*j).
r On Abonni dam les dèpartetnras, »«x messagerlat fi;
«us directions des poste». —A Londres» eb .es MU. Comi^.$t/
jUi.-A Slrssboorg, cbex Alexandre, pcurl'ALtem&tfiffs f ■
- f'adrewor franco, pour la réà*ctioirjg, \ I V
à h. merruau , gérant. y^-,'
J.M article) dépoiéi ne feront pai rcnâag.
PARIS.
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JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
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bureaux a paris :
Rut du 34 Février, 10 (cj-derant de V»loii).
Lu annonçai (ont reçues, de ii à 4 heurel,
an bnreaa dn Journal.
Toite lanrtloa doit être igréê» p»r 1* {tout.. 1
f «dresser franco, pour l'adminiitratioH» ' !
1 H. DEMAIN, directeur.
PARIS, S JANVIER.
Après, l'heureuse épreuve de leurs forces
et de leur union, que les opinions modérées
ont faite dans l'élection pour la présidence,
la confiance s'est ranimée, la : bourse a re
pris courage, les capitaux ont paru vouloir
ge remettre en mouvementl'industrie a
reçu des commandes, le travail a retrouvé
quelque activité. Rien n'était , au fond,
mieux justifié que ce retour de la confiance
publique. Il y a, par le résultat de l'élection
pour la présidence, un grand fait constaté : la
yictoire éclatante de la société sur les doc-:
trines subversives, la prépondérance écrar
santé du parti modéré, eii face de la petite
faction des socialistes, des montagnards et
des républicains de naissance, théoriciens de
la ruine, praticiens du désordre, conspira^
teurs émèrites, dictateurs révolutionnaires*
Cette victoire devait inspirer à la société
française un profond sentiment de sa puis
sance, une grande confiance dans sa propre
durée.
Cependant, quoique rien ne soit venu di
minuer la portée et obscurcir le sens de l'é
lection du 10 décembre, le mouvement des
affaires semble vouloir s'arrêter de nouveau;
la bourse fléchit, la confiance paraît,tout
près de s'éteindre. Comment s'expliquer un
retour si fâcheux vers le passé? Ecartons
les petites raisons^ les bruits qui courent, les
désappointemens de ceux qui croient qu'un
Simple vote suffit pour réparer en un jour
dix mois de souffrances, et que le bien se
fait d'un coup de baguette comme dans le
pays des fées. Allons droit à la raison sé
rieuse, au fait capital qui comprime de nou
veau le travail et ie crédit dans leur essor.
Ce qui a fait rentrer le découragement
dans les esprits, c'est le vote récent de l'As
semblée nationale sur l'impôt du sel ; c'est
la situation difficile des pouvoirs les uns vis-
à-vis des autres et à l'égard du pays, situa
tion dont ce vote regrettable a été le symp
tôme et la révélation.
Le vote sur l'impôt du sel a été considéré
partout, en France , comme une atteinte
portée au crédit, comme une menace d'ag
gravation pour les autres impôts. La cham
bre a du même coup enlevé au pays 50 mil
lions et la confiance; elle a frappé les finan
ces publiques par la diminution des ressour
ces et l'affaiblissement du crédit; elle a por
té un grave préjudice à l'industrie, en fai
sant renaître le doute et l'inquiétude dans
les esprits* au moment où ils s'ouvraient à
peine à l'espérance.
L'Assemblée, qui comptait >sur. cette me
sure pour rétablir sa popularité ébranlée,
s'est donc, tout au contraire, aliéné lès po
pulations par ce faux calcul. On a vu d'ail
leurs, dans son vote, non-seulement une
îecherche trop ardente de popularité person
nelle aux dépens du budget, mais encore
une sorte de disposition à la lutte contre le
nouveau ministère, une velléité de conflit.
Il faut donc que l'Assemblée le sache bien ;
elle est pour beaucoup, nops le lui disons
avec respect mais a\cc sincérité, elle est
pour beaucoup dans l'affaiblissement delà
confiance, dans le découragement des es
prits, dans la langueur du travail.
Nous croyons, il est vrai, qu'on s'exagè
re le penchant d'opposition que l'on suppose
à l'Assemblée. Elle a donné hier 140 voix
de majorité au ministère, et cette majorité
se retrouverait probablement dans toutes
les occasions décisives. Nous comptons, pour
notre part, sur sa sagesse et sur sa pruden
ce. Toutefois, la France se rappelle les faus
ses démarches qu'une partie considérable de
l'Assemblée a faites dans la lutte qui a pré
cédé l'élection pour la présidence, et le dés
accord éclatant qui s'est manifesté par le
résultat, entsç cette majorité de l'Assem
blée et la majorité nationale, La France
vient de voir la chambre commettre une
grave erreur dans la question du sel, et se
. laisser troubler par l'approche des élections,
au point de sacrifier les finances publiques.
La France en conclut que la chambre, nom
mée dans des circonstances- toutes différen
tes de celles où nous sommes placés aujour
d'hui, ne comprend plus avec la même
promptitude et la même sûreté qu'autrefois,
les sentimens véritables du pays, et que les
représentans ont eux-mêmes la conscience
de ce dissentiment.
Ce défaut d'accord préexistant et de com
plète harmonie peut devenir un danger, et
produire tout au moins des votes qui ne
soient pas approuvés par l'opinion publique.
Ajoutons que la situation réciproque du
"pouvoir exécutif et de l'Assemblée consti
tuante est mal définie, toute provisoire , fé
conde en méprises et en regrettables conflits.
.Voilà les vraies causes de la défiance et du
malaise public. Plus la chambre prolongera
son existence, plus elle laissera subsister
l'incertitude sur ses desseins à cet égard, plus
le mal s'aggravera. Aussi, nous adjurons
l'Assemblée nationale, au nom mêmçde tout
le bien qu'elle a fait, des services qu'elle a
rendus au pays, et du souvenir qu'elle voudra
laisser après elle dans l'histoire, de se hâter de
faire venir à l'ordre du jour la proposition de
M. Rateau, et d'assigner elle-même immédia
tement la date précise de sa séparation et des
élections nouvelles. Qu'elle se garde^des in
trigues, des petits calculs de parti, des ambi
tions personnellesrésoluesà exploiteras der
niers jours; qu'une discussion franche/loyale,
explicite, précède son vote ; que tout soit dit
librement et sans clameur^ pour ou contre
la dissolution spontanée de l'Assemblée au
mois de mars; que l'Assemblée décide en
suite, sans arrière-pensée, en face du pays,
selon le sentiment public ; qu'elfë cfëjermine
à un jour rapproché sa séparation, et elle
verra la France respirer, les faux bruits s'é
vanouir, la confiance renaître.,-On rendra
justice et à son dévoûment passé et à,son
abnégation présente. La reconnaissance re
prendra ses droits, et le vote qui provoquera
des élections nouvelles effacera en grande
partie les fâcheux effets du vote sur l'impôt
du sel.
Nous publions aujourd'hui quelques-unes
des nombreuses pétitions adressées à l'As
semblée nationale pour lui demander de se
dissoudre. Il n'y a : pas en ce moment un
seul département où des pétitions sembla
bles ne circulent et ne reçoivent de tous les
citoyens le plus favorable accueil. Le senti
ment du pays se prononce hautement pour
une mesure que les considérations les plus
graves réclament et que les circonstances
rendent indispensable.
-L'article 45 de la Constitution porte que
l'élection du président aura lieu le'second
dimanche du mois de mai. C'est donc-au
mois de mai 1852 que la France de^ra élire
le successeur de M. Louis-Napoléon Bona
parte. L'Assemblée législative élue en' 1849,
pour trois ans, verra expirer ses pouvoirs
dans cette même année 1852. Fautril que
les secondes, élections générales, aient Heu
avant ou après l'élection du second prési
dent, et par conséquent avant ou après le
mois de mai 1852? :
Il ne peut y avoir de doutes sur une pa
reille question; il est indispensable que les
élections de l'Assemblée législative précè
dent l'élection du président. Supposons'qu'on
ait décidé le contraire, que l'on- procède à
l'élection du second président avant la dis
solution de l'Assemblée législative, et qu'au
cun candidat ne réunisse la majorité, l'é
lection du président reviendra à l'Assemblée
législative. On aurait donc ce spectacle
étrange d'un pouvoij-, virtuellement déchu,
qui serait chargé d'enfanter un autr'ç pou
voir. Une assemblée à la veille dè se sépa
rer, que les circonstances auraient peut-être
discréditée ou mise en désaccord avec les
sentimens du pays, nommerait quinze jours
avant sa propre dissolution, l'homme des
tiné à gouverner la France pendant quatre'
années. Quel crédit pourrait s'attacher à
une pareille nomination, et quels dangers
n'y aurait-il pas là pour la, patrie ?
Nous ne parlons pas seulement des ré
clamations que le choix de l'Assemblée,
quel qu'il fût, soulèverait de la part de tous
les partis : avant l'élection, l'Assemblée tout
entière serait mise en suspicion. On ne man
querait pas d'afficher la crainte que dans le
choix à faire entre les ' candidats, certains
membres de l'Assemblée ne se laissassent
guider moins par l'intérêt du pays que par
le désir d'avoir quelques semaines plus tard
l'appui du nouveau, pouvoir dans, les élec
tions générales : on appréhenderait une
sorte de marché entre les candidatures pré
sidentielles et -les candidatures législatives.
L'affermissement de la Constitution, le
soin de la tranquillité générale, et un gravé
intérêt de moralité publique, demandent
donc impérieusement que les secondes élec
tions générales précèdent la future élection
pour la présidence. Il faut doi£
1852 ; et comme la durée de l'Assemblée
législative est de trois années complètes sans
que la Constitution ait admis une déroga
tion pour la première assemblée comme elle
l'a fait pour la première présidence, il faut
de toute nécessité que l'Assemblée législa
tive ait pris naissance avant le mpis de mai
1849: ; '•
L'Assemblée constituante a donc les mains
liées par son propre ouvrage; elle aurait pu
déterminer une époque invariable pour les
élections générales, et appliquer à la future
Assemblée ce qu'elle a décidé pour la pre
mière présidence qui expirera au mois de
mai de sa quatrième année, sans avoir du
ré quatre ans; l'Assemblée ne l'a pas voulu.
Loin de là, l'article51 delà Constitution ne
se borne pas à stipuler que l'Assemblée na-' .
tionale est élue pour trois ans, il porte que
chaque nouvelle assemblée est convoquée
de plein droit pour le lendemain du jour où
finit le mandat de l'Assemblée précédente;
et qu|à défaut d'une convocation légale, les
électeurs se réunissent de plein droit le tren
tième jour qui précède la fin de la législa
ture. Or, comment calculer le jour des élec
tions, ou le jour de la convocation autre
ment que sur une révolution de trois années
complètes.
En résumé, il est nécessaire que la réu
nion d'une nouvelle assemblée législative
précède l'élection du second président ; il est
par conséquent nécessaire que les pouvoirs
de la future assemblée expirent avant le
mois de mai 1852, et, comme aux termes
de la Constitution, cette Assemblée doit sié
ger trois années complètes, if est nécessaire
qu'elle ait commencé à siéger avant Je mois
de mai de 1849. C'est la Constitution qui le
veut ainsi. En outre, la Constitution, sans le
stipuler formellement, semble vouloir, par
un paragraphe de l'article 51, que les élec
tions aient lieu habituellement trente jours
au plus tard avant la réunion de l'Assem
blée; on,voit que les élections ne sauraient
être reculées au delà du mois de mars. D'au
tres considérations puissantes indiquent d'ail
leurs cette époque.
Nous dira-t-on qu'on peut mettre un in
tervalle considérable entre les deux grandes
élections de 1852, cinq à six mois, par
exemple? Sans nous arrêter à chercher si
on n'éviterait pas un mal pour tomber dans
un pire, nous répondrons par les dangers
de là situation actuelle. Pour que les pou
voirs de l'Assemblée législative expirent à
la fin de 1852, il faut que l'Assemblée con
stituante prolonge son existence jusqu'à la
fin de 1849. Nous ne croyons pas qu'il-y ait
en France un homme sage et sensé 1 qui soit
de cet avis.
En dernière analyse, nous ne faisons que
demander à l'Assemblée constituante de
s'appliquer à elle-même ce qu'elle a réglé
pour toutes les assemblées suivantes. Dans
l'art. 51 de la-Constitution* elle a décidé
que qqarante-cinq jours au moins avant la
fin de la législature, l'Assemblée législative
déterminerait par une loi l'époque des nou
velles élections. Bien plus, dans la crainte .
qu'une assemblée, amoureuse d'elle-même,
ne négligeât ce soin important, la Constitu- '
tion déclare, qu'à défant du décret, les élec
teurs se réuniront de plein droit le trentième
jour qui précède la fin de la législature.
L'Assemblée, en prenant ces deux décisions,
a été dirigée par des considérations de la
plus haute gravité ; qu'elle s'inspire de sa
propre sagesse, et qu'elle donne l'exemple 1
de la conduite qu'elle a imposée aux assem
blées qui la suivront.
La séance s'est ouverte aujourd'hui par
une interpellation à laquelle l'orateur au
rait bien you I u donner de l'importance ; un
républicain de la veille, M. Froussard, avec
cette susceptibilité que les hommes de son
parti ne manquent pas de montrer toutes les
fois qu'ils croient pouvoir s'attaquer direc
tement ou ihdirectemënt au gouvernement
que le suffrage universel a constitué malgré
eux, est venu révéler à l'Assemblée que les
invalidés, en recevant hier le général Jérô
me Bonaparte, avaient laissé échapper des
cris de : Vive l'Empereur ! Nous ne doutons
pas que ces cris n'aient été purement rétros
pectifs. L'Assemblée n'a pas trouvé que le
fait signalé par M. Froussard valût la peine
qu'on s'y arrêtât, et, après quelques mots
de M. Barrot, qui a rappelé qu'il y avait
quelque indulgence à accorder pour des sou
venirs si profondément gravés dans le cœur
de nos vieux soldats, elle a passé purement
et simplement à l'ordre du jour.
L'ordre du jour appelait un projet de dé
cret qui soulève des questions difficiles, le
projet relatif au rétablissement du travail
dans les prisons.
L'organisation du travail dans les prisons
excitait depuis long-temps de vives réclama
tions de la part de l'industrie libre, lorsqu'é-
clala la révolution de février ; le Gouverne
ment provisoire , voulant venir en aide aux
ateliers qui se fermaient de tous côtés, sus
pendit, par un décret du 24 mars, le travail
des détenus ; le 28 août dernier, le Gouver
nement proposa un décret qui tendait à ré
tablir le travail, en laissant aux préfets le
soin de déterminer la nature et les tarifs des
fabrications qui pourraient être exécutées
dans les prisons, et en leur donnant, en ou
tre, la faculté d'interdire la mise en vente ,
dans certaines villes, des objets manufac
turés.
La commission à laquelle ce projet fut
renvoyé, tout en reconnaissant la nécessité
.de rétablir le travail dans les prisons , soit l
comme moyen de discipline et de moralisa-
tion, soit comme moyen d'alléger les char
ges de l'Etat, a cependant ét,é d'avis de re
pousser l'expédient proposé par le Gouver
nement, parce qu'il lui a semblé impropre à
combattre le mal auquel on voulait remé
dier ; on ne ferait, suivant elle, que dépla
cer la difficulté : car l'entrepreneur, ne pou
vant exercer une industrie acclimatée dans
le pays, organiserait une concurrence à cel
le d'un département plus éloigné, et, en réa
lité, plus digne de protection, puisque ce
département ne profite pas des débouchés
que procure le voisinage d'une maison cen -
traie.
Mais la commission ne s'est pas bornée à
rejeter la solution qui était proposée ; elle
en a formulé une autre qui lui paraît de na
ture à concilier des élémens en apparence
inconciliables ; le moyen consisterait à fai
re consommer par l'Etat, et principalement
par les armées de terre et de mer, les pro T
duits fabriqués dans les maisons de force et
de correction. Il est certain que, par cette
combinaison, là lutte cesserait entre le tra
vail libre et le travail des prisons, le produit
confectionné par le détenu ne pouvant plus
être mis en vente à côté, d'un article simi
laire confectionné par l'ouvrier libre et ve-
nir
nouveau système, pouvait s'harmoniser avec
notre, organisation administrative; nous
voyons dans le rapport consciencieux et pré
cis, rédigé par M. Roulier, que la commis
sion s'est entendue à ce sujet avec les minis
tres de la guerre et de la marine, et qu'elle
s'est convaincue de la possibilité de réserver
aux condamnés la confection des vêtemens
et des chaussures destinés aux armées; le
rapporteur ajoute que ce système présente
rait en outre l'avantage de supprimer les
compagnies hors rang, chargées aujour
d'hui de confectionner ces différens objets,
ce qui permettrait, en rendant au service les
soldats qui les composent, de diminuer no
tre effectif, et par suite notre budget mili
taire." '
La discussion qui s'est engagée aujour
d'hui n'a encore amçné que l'adoption de'
l'article l or , portant que le travail sera réta
bli dans les prisons ; reste maintenant à dé
terminer selon quel mode et dans quel sys
tème il sera rétabli ; c'est dans cette ques
tion que se trouve la principale difficultés
~ M. de Lamoricière a pris plusieurs fois la
parole pour montrer comment le , moyen
présenté par la commission pourrait être
mis progressivement en pratique ; mais M.
le ministre de la guerre a fait quelques ré
serves, et M. le général Baraguay-d'Hilliers
s'est ensuite attaché à prouver qu'en tous
cas, même en faisant exécuter les- vêtemens
destinés à l'armée, on ne pouvait songer à
supprimer les compagnies Ilors rang qui é-
taientehargées de la confection cte beaucoup
d'autres objets, et qui pouvaient seules être
en mesure de pourvoir à tous les détails
d'entretien des effets d'habillement et d'é
quipement.
On voit, d'après ce simple exposé, que la
solution proposée par la commission, solu
tion dés plus heureuses en principe, présen
te cependant, au point de vue de l'applica
tion, des doutes et des embarras qui ont be
soin d'être éclaircis ; aussi M. le ministre de
l'intérieur, tout en déclarant que la pensée
de faire consommer par l'Etat les produits
du travail des détenus était susceptible d'ê
tre appliquée dans certaines limites, s'est
élevé contre ce que lé projet de la commis
sion présente d'impératif ; il est assez proba
ble qu'on finira par une transaction entre le
projet du gouvernement et lé projet de la
commission.
Il y a eu réunion dans les bureaux pour nom
mer une commission de quinze membres char
gée de préparer la loi organique sur l'enseigne
ment. Yoici le résumé de quelques-unes des dis
cussions importantes qui ont eu lieu à l'occasion
de cette nomination. Nous appelons surtout l'at
tention de nos lecteurs sur 1 opinion trfs remar
quable émise par M. dé Montalembert. dans le
5 e bureau. L'honorable orateur, mettant de côté
la question de la liberté de renseignement et
du droit de l'Etat, s'est attaché avec autant d'es
prit que de justesse de raisonnement*, à démon-,
trer, par les précédens, et par l'analyse même
des élémens de la discussion, qu'il était impos
sible que la question de l'ense gnement en gé
néral fût discutée par l'Assemblée actuelle, et
qu'il y avait lieu dé penser qu'elle ne serait
peut-etre pas même, d'ici à plusieurs années,
résolue par l'Assemblée qui lui succédera.
H* r .Jui£pau. — La discussion s'engage sur là loi
d'enseignement entre MM. Payer, Laboulie, Eva-
riste Bavoux, Roux-Lavergne, Amable Dubois ef
Ronjat.
M Payer développe les motifs et les moyens d'une
organisation universitaire qui, tout en donnant rai
son à l'Université, donne aussi satisfaction aux jus
tes réclamations de la liberté.
M. Evariste Bavoux est frappé de la renaissance
du sentiment religieux en Frànce. Aujourd'hui, dit-
il, l'opinion publique a pour ainsi dire désarmé vis-
à vis du clergé. Il n'a plus les prédilections du Gou
vernement dans les affaires civiles^ temporelles; le
pays n'a plus d'ombrage politique de ce côté, et alors
il s'abandonne à ses sympathies religieuses, à ce
sentiment qui élève la pensée de l'homme vers Dieu.
L'orateur s'applaudit de ces dispositions, à la con
dition que les causes qui l'inspirent soient religieu
sement conservées,t'esl-h-dire que le clergé reste à
son autel, où il sera respecté et honoré, et s'abstien
ne soigneusement de toute participation aux affaires
publiques, où il rie trouverait que suspicion et ré
sistance, et ferait renaître bientôt un antagonisme
fâcheux. Sous ces conditions, M. Bavoux est donc
d'avis de régler les intérêts de la religion, de l'Etat
et de la liberté dans cette grave question de l'ensei
gnement. Il avoue pourtant ses prédilections uni
versitaires dans ce triple problème.
M. Roux-Lavergne plaide, au contraire, la cause
de la liberté d'enseignement. Membre de l'Univer
sité comme M. Payer, il le remercie de sa tolérance
en faveur de droits autres que ceux de l'Université.
Quant à lui, il croit qu'il y a une grande impor-
tance à ce que les enfans, les élèves, soient pénétrés
dès leur bas âge de l'influence religieuse. Professeur
de philosophie dans un collège, il avait pour Collè
gue un homme pénétré d'autres convictions que les
siennes ; qu'en résultait-il ? antagonisme, contradic
tion dans leur enseignement commun aux mêmes
élèves. • ,
M. Amable Dubois insiste sur la nécessité d'une
surveillance de l'Etat, non-seulement sur les condi
tions de capacité, mais aussi sur la moralité des ins
tituteurs.
M. de Laboulie est partisan de la liberté d'ensei
gnement. ■ r
M. Ronjat çroit devoir recommander l'enseigne
ment républicain.
M. Payer est nommé commissaire au scrutin de
ballottage contre M. EvaristeJBavoux.
La séance du 4° bureau a été presqu'entièrement
remplie par uu discours de M. Jules Simon. 11 établit
d'abord |e principe qu'il était impossible à l'Etat
d'abdiquer son autorité sur l'enseignement; 41 a po
sé la lutte entre l'Université, d'une part, représen
tant ce principe d'autorité, et le clergé de l'autre,
représentant 16 principe de la liberté. Mais, avant
tout, il avait besoin de dire que dans cette lutte, on
n'avait pas apporté de part et d'autre toute la sim
plicité d'ame désirable. Cependant, laissant cela de
côté sur l'interruption d'un membre, M. de Tredern,
qui s'était écrié que ce n'était pas la question ,
M. Simon a passé aux moyens d'organiser la li
berté en rapport avec la Constitution. Selon lui,
personne né contestera que le droit d'enseigner im
plique de sa nature la moralité, la capacité, la sur
veillance et la pénalité. Toute la question se réduit
donc à savoir par qui ces facultés seront constatées,
ces conditions remplies : au nom de l'Université, il
renonce à la surveillance par elle, aux certificats de
moralité donnés par elle. L'attaque incessante porte
sur ces termes : l'Université est juge et partie, l'en
seignement libre est surveillé par son adversaire.
Eh bienl l'Université est lasse d'une lutte sans pro
fit .pour personne; elle ne réclame pas le pouvoir
pour elle, mais on ne i-aurait y renom er pôur l'E
tat. Maiutenant, qu'on cherche des'moyensceriains,
raisonnables, d'obtenir les, résultats désirés, c'est
l'œuvre de la commission. "Quant aux certificats de
baccalauréat ou des grades universitaires, l'Univer
sité ne saurait renoncer au droit de les délivrer.
Ilsserveut d'introduction à l'enseignement libre,
aux carrières libérales. Détruire l'unité par des ju
rys différens, c'est détruire l'unité de niveau, c'est
provoquer la déchéance d< s études et même du pays.
Traitant ensuite la question de concurrence, il la
redoute : l'avantage est tout au clergé qui donne l'é
ducation Si moindres frais, dont l'influence est gran
de, qui a ses niissionnaires et ses représentans dans
chaque famille. Il ne craint pis le clergé, sous le
rapport des études; mais si on ne soutient pas vail
lamment l'Université, il lui est- impossib'e de soute
nir la concurrence." Cependant, il en convient, l'en
seignement universitaire a besoia de nombreuses
réformes. - ■' ., .
Après ce discours, il. Boulay (de la Meurthe) se
borne à établir le droit de l'Assemblée à nommer
une commission et îi reconnaître le droit du minis
tre qui, en donnant à un de ses actes la publicité,
ne saurait avoir mérité un blâme: mais, selon lui,
il y a un fait dominant : le temps manquera pour
achever une loi complète, il faut >e borner à faire
la partie qui concerne l'enseignement primaire,
Seule partie urgente.
M. Desmolles dit quelques mots pour placer le
pays entre l'Université et- le clergé, et ne veut le
monopole nulle part; enfin M. sibour clôt la discus
sion : le clergé, comme clergé, n'est pas ennemi de
l'Université, dont les principaux adversaires ont été
des laïques. Il reconnaît le droit de l'État; mais il
le tient non en; propre, mais comme délégué des
pères de famille, et, par conséquent, obligé de don-
neraux ènfans l'enseignement voulu par les pères.
Mais si l'autorité de l'État représente le droit des
majorités, la liberté doit sauvegarder ceux de la mi
norité : elle do t être complète sous une surveillance
impartiale, de manière à assurer même la liberté
des méthodes, sans laquelle il ^i'y aurait pas une
vraie concurrence, qui doit empêcher l'Université
elle-même de s'endormir dans un fatal statu quo.
M. J. Simona été nommé commissaire par 30 voix
sur 45.
5 e bureau. — M. Bourbeau insiste sur la nécessité
de constituer fortement l'enseignement national en
donnant plus d'autorité au conseil de l'Université et
aux conseils académiques.
M. Bichard. développe la condition de la liberté
d'enseignement. ' : ;
M. La Bordère s'étend sur les réformes à introdui
re dans l'enseignement primaire et sur les dangers
de l'indépendance absolue des professedfc de l'Etat.
' M. de Montalembert s'abstient de traiter des néces-,
sités de la liberté ou des mérites de l'Université, et
élève une question préjudicielle. Il soutient qu'il
sera absoluméht impossible à l 'Assemblée de faire
une loi sur l'enseignement, et cela en dehors de la
situation politique et des périls du moment actuel,
mais àcause de la nature même de la question. Aux
termes du décret que l'Assemblée prétend exécuter,
c'est une loi sur l'enselgnement'en g.'néral qu'elle
doit faire, c'est-à-dire sur l'instruction primaire,
secondaire et supérieure. Or, la seule commission
de la loi sur l'instruction primaire, dont M. Barthé
lémy Saint-Hilaire a exposé hier les travaux, a mis
six mois pour aboutir à un avant-projet en MO ar
ticles. Et cependant elle travaillait sur une base où
lia liberté et l'autorité de l'Etat étaient déjà partiel— J
ilement conciliées par la loi de 4833.Dans le domai-i
? ne de l'instruction secondaire , au contraire", tout )
test à faire ou a refaire. La chambre des'pairs a con-1
■sacré vingt-quatre séances à cette seule branche dp,
i la question en 1844, la chambre des députés pres-
:qu'autanten 1837. ......
Ni l'une ni l'autre de ces discussions n'ont abouti
à aucun résultat définitif. Il reste encore l'enseigne
ment, supérieur : les lois présentées par M. de Sal-;
vandy sur les Facultés de médecine et de droit, les
(discussions élevées au sein du comité des culte»
de l'instruction publique sur les Facultés de théolo
gie» indiquent assez quelles difficultés on rencon
trera dans ce nouvel ordre de questions. L'orateur
affirme qu'il est insensé de vouloir toucher à ce vasta'
ensemble, dans la position où se trouve l'Assemblée
constituante. Il prédit que la future Assemblée légis
lative, au bout des trois ans de son mandat, n'aura
point encore terminé les discussions relatives à tou
tes les branches de l'enseignement; et il prend à.té-,
moin de sa prédiction ceux des membres du bureau
qui pourront être réélus à la prochaine Assemblée.
M. Bonjean adhère aux observations de M. de Mon
talembert, qui sont combattues par M. Dezeimeris, .
M. Bourbeau est nommé commissaire par 33 voix 1
contre 6, données à MM. Béchard et de Montalem--
bert. • 1
11 e bureau.—hSL séance du 41 8 bureau a été mar
quée par un incident soulevé par M. le ministre de-
l'intérieur. M: Léon Faucher, après avoir dit que lu
nomination d'une commission pour préparer la loi-
sur l'enseignement, entraînait l'engagement de faire
cettç loi organique, qui rie pouvait pas arriver à la
discussion publique avant trois mois, allait faire
connaître l'opinion du Gouvernement sur la propo
sition de l'honorable SL Rateau, quand il a été rap
pelé par le président à l'ordre du jour du bureau.-
Après M. Pleignard, MM. BerenQer, Gouttay, Girerd,
ont insisté pour que la question soulevée par M. le
ministre fût abandonnée, car elle leur paraissait
une violation d'un décret de l'Assemblée,' et que le-
bureau ne pouvait d'ailleurs nommer un commis-,
saire pour ainsi dire négatif, puisqu'il serait chargé
de dire à la commission nommée pour préparer la
loi sur l'enseignement, que cette loi ne devait,pas
être faite. L'honorable M.Moté, puisque là ques-'
tion était soulevée, ce qu'il n'aurait pas fait, aurait'
voulu qu'elle fût appréciée et que la discussion eût
un libre cours,-pour que,lesopinions pussent se ma
nifester; mais M. le ministre de l'intérieur a alors dé
claré que devant les dispositions du bureau,, il ne
croyait pas devoir insister, obligé qu'il serait, d'en
trer dans de longs développemens pour faire con
naître l'opinion du Gouvernement.
MM. Arnaud (dç,l'Arriège), Lagarde et Bûchez ont
été successivement entendus sur la loi h faire.
M. Arnaud e st de cette opinion que l'initiative doit
partir de la famille qui conserve la direction intel
lectuelle et morale de l'enfant. L'Etat ne doit in
tervenir que quant à la surveillant^ de réduction , ,
surveillance qui ne doit pas se transforme/ pn di
rection. L'Université fonctionnera à côté'desétablis-
semens libres ; si la liberté de "l'enseignement doit
la tuer, l'honorable membre ne la regrettei a pas.
M. Lagarde croit que l'enfant apparlient&i'î 1 t' a ",
mille et à l'Etat. Les droits des deux sont,conciliés
par h-s disposions de l.i Constitution. Il ,\eu( que
les effets de l'enseignement primaire remorfteilt jus
qu'à la salle d'asile. Il demande des réformes dans
l'Université, ma s il croit qu'il serait dangereux de
la briser. La nécessité de ta gratuité de l'enseigne
ment primaire lui paraît démontrée. i
Après avoir entendu M. Bûchez, qui est «ntrédans
des considérations générales iur les différentes espè
ces d'enseignement, le bureau à nommé M. Lagar
de commissaire. r
- 4 3 e bureau. — Deux grandes questions se présen
teront à la commission : l'enseignement primaire et
l'enseignement secondaire.
Quant à la première question , M. Avond s'élive
contre la gratuité absolue de l'enseignement pli-
maire et contre l'obligation imposée, au père d'en
voyer son fils à l'école primaire, oblig.ition que dé
crétait le pi ojet de loi présenté par M. Carnot.
Quant à l'enseignement secondaire , M. Avond se
prononce pour la liberté d'enseignement. .
M. Fresncau a pris ensuite la parole. L'honorable
membre a développé longuement les mêmes idées
que M. Avond, seulement il diffère avec la préopi
nant sur un point. M, Fresneau pense que la loi
qu'on va faire ne doit s'occuper que d'une chose :
organiser le principe de la liberté de l'enseigne
ment
M. Liouvïlle .a commencé par traiter quelques
points étrangers.à la délibération, puis il a abordé
le projet dont on s'occupait, et tout en se déclarant
vieil ami de la liberté d'enseignement, M. Liouville
a défendu l'Université. L'honorable membre, dans le
cours de ses développemens, s'est plaint qu'aucun
savant ne figurait dans la composition des deux ,
commissions qui ont été'constituées par M. de Fal- ■
loux.
Au premier tour de scrutin, les voixse sont répar
ties entre MM. Fresneau, Liouville et Aug. Avond.
Au second tour de scrutin, M. Liouville a été
nommé contre M. Avond et Fresneau, à la simple
majorité.
Le comité des finances a examiné la question
soulevée par M. Rodât, relative au rétablisse
ment du timbre des journaux. On a pensé que la
' loi organique indiquant que la presse serait or
ganisée et qu'une commission devait être nom
mée dans les bureaux,'il pouvait être inutile
3ue le comité des finances entrât dans l'examen
e celte question. Cependant sur l'observation
de différens membres,. une sous-commission, a
été nommée pour entendre, l'auteur de la pro
position et présenter un projet de délibération
au comité.
Cette sous-commission est composée de MM.
Davv, Grellet et Druet-Desvaux.
Le comité s'est aussi occupé de l'examen de
différentes propositions relatives à la réduction
de l'indemnité des représentans et à la relenuo
sur le traitement des fonctionnaires. Une discus
sion complète a eu lieu sur ce, sujet. 11 en est
résulté que les propositions présentées ne doi
vent pas être prises en considération.
Les orateurs qui ont pris la parole se sont at
tachés surtout à démontrer que renouveler sans
cesse des propositions semblables, c'était cher
cher à déconsidérer l'Assemblée, mettre une
question d'argent à la place d'une question po-
PEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL, 6 JANV.
LE CABINET NOIR.
TROISIEME PARTIE.
LES APOTRES DE NURESIBERG.
CHAPITRE XI.
suite dtj manuscrit. —. l 'ORIGINE du
cabinet NOin.
« Quelques rapides préparatifs, et un billet
laissé' au valet de chambre du comte rendirent
Karl à sa liberté. Mais cette fois, du moins, il
n'avait point souci de cette existence matérielle
dont les exigences viennent si durement com
pliquer un grand chagrin. Quelques économies,
faites sur le traitement de sa place, l'avaient
mis jusqu'à nouvel ordre au-dessus du besoin.
Voir notre numéro du 8 janvier.
Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage,
Mt interdit», et ccrait ponrsnirie comme contrefaçon.
» Le lendemain il était dans sa chambre il l'au
berge de VAigle-noir où il avait été prendre re
fuge, et continuait encore d'être vivement ému
par le dénoûment si brutal qu'avait eu son ro
man , lorsqu'à son grand étonnement parut de
vant lui le comte de Nesselbourg qui lui parla
comme il suit :
— Que s'est-il donc passé, mon cher Karl en
tre vous et Mme de Nesselbourg. que vous ayez
cru devoir si brusquement quitter ma maison?
■ — Depuis quelque temps, j'avais cru m'aper-
cevoir que Mme la comtesse n'avait pas ma
présence pour agréable; ayant eu l'occasion de
mieux m'en assurer, j'ai dû prendre le parti que
ce malheur me conseillait.
— Et la cause de cette froideur qu'elle vous
témoignait, vous ne vous la représentez pas?
— Non, vraiment, — répondit tout haut le se
crétaire, cependant qu'à part lui il se disait : —
Se douterait-il?...
— Eh bien! moi, je vais vous la dire : vous
êtes pour Mme de Netselbourg un garçon beau
coup trop observateur et beaucoup trop clair
voyant.
— Mais en tenant pour vraie cette perspica
cité, en quoi pourrait-elle nuire à Mme la com
tesse ? . ■ • ■' ' "
— Est-ce que les femmes n'ont pas toujours
mille et un secrets qu'il ne leur est pas agréa
ble de voir pénétrer ?
' — Je ne sache pourtant pas de secret que
j'aie pu être sur le chemin de deviner. .
— Vous mentez, mon cher, — dit vivement
M. de Nesselbourg.
— Monsieur , — fit Karl, en se levant avec
animation, — j'ai cessé d'être à votre service ",
et j'ai l'honneur de vous recevoir chez moi.
— Je veux dire, — reprit le comte, — que
vous avez remarqué tout aussi bien que moi ce
qui crevait les yeux de tout le monde, et c'est
parce qu'on avait peur que vous ne le vissiez
trop bien, qu'on a pris le parti de voùs éloigner.
— Mais encore, qu'ai-jc donc vu? — demanda
Karl avec impatience.
. — Parbleu, qu'entre ma femme et M. son
cousin régnait une tendre intelligence; me com
prenez-vous maintenant?
— Si c'est de cela qu'il s'agit, permettez-moi,
Monsieur, de vous faire remarquer que la cour
de M. deGrundheim était souverainement in
discrète, qu'elle se faisait même ouvertement
sous vos yeux; tant vous paraissiez y attacher
peu d'importance, tant votre confiante gaîlé pa
raissait même l'encourager.
— Jeune homme,—reprit le comte, — ou ma
femme traitait les «soupirs de messire Conrad
sans conséquence, et j'aurais alors été souverai-
nçment ridicule de m'en préoccuper ; ou la pas
sion du jeune impertinent lui était contagieuse
et alors toutes mes colères conjugales n'eussent
fait que rendre souterrain Y inconvénient dont je
me fusse aperçu.
^ Cependant, Monsieur le comte, on arrête
une femme sur sa pente, et souvent l'extrême li
berté peut faire le danger.
— En fait de femmes sages, — repartit sen
tencieusement le commissaire impérial, — je ne
connais que celles dont la sagesse peut marcher
seule et sans lisières. Avec les autres, j'aime au
tant savoir tout d'abord à quoi m'en tenir, et
mon principe est de leur lâcher la bride sur le
cou.
— Ceci est pourtant bien absolu; toutes les
femmes ne peuvent pas être des Lucrèces, et il
me semble qu'un peu d'aide à leur vertu n'est
pas pour rien gâter.
— Moi je n'aide pas, j'observe, je m'assure
et me venge, si je suis trompé.
» Tout cela fut dit d'un air de Barbe-Bleue à
faire effet même sur un homme moins naïf que
ne l'était le poète. Dominé par un bon mouve
ment, au lieu de chercher à envenimer les soup
çons que semblait avoir ce jaloux, Karl c'èîlara
qu'avec toute la finesse de vue dont on parais
sait vouloir le gratifier, il n'avait rie"n découvert
dans la conduite de la comtesse qui ftït de na
ture à l'inculper.
— C'est ce que nous saurions mieux,—reprit
le commissaire impérial , — si nous pouvions
avoir connaissance de certaines lettres qu'elle
adiesse à Vienne à Mme la chanoinesse de Val-
dorf, une de ces amies de cœur, la peste des
maris.
— Mais ces lettres sont-elles donc devenues
plus fréquentes en ces temps-ci?
-^-Voyez-vous, jeune homme, que la comtesse
avait raison, et que vous êtes plus que vous ne
voulez en avoir l'air," observateur dangereux!
Eh bien! oui, ces lettres, depuis quelque temps,
sont devenues très fréquentes, et les femmes ne
sont pas prises tout à coup de cette furieuse ac
tivité de correspondance, sans qu'il y ait un se
cret en chemin.
— Je vais peut-être dire une sottise; mais, en
certains cas, l'autorité conjugale ne peut-elle
pas aller jusqu'à exiger la communication ?......
— Faire de la jalousie parlée,—s'écria le
comte avec- dédain, — se commettre avec «l'a
dresse Mine d'une femme! y pensez-vous?
— Vous pensez encore moins à quelque pro
cédé violent, celui d'intercepter quelque chose
de cette correspondance ; cela ne se fait guère
qu'en diplomatie.
— Non, je ne voudrais rien intercepter, mais
je voudrais tout lire, et en cela vous pourriez me
venir en aide... oui, vous, mon cher, quoique cela
vous paraisse étrange. Chaque jour le monde se
perfectionne, et je veux vous confier un secret
que vous me garderez.
— Assurément, si je m'y engage. ^
— Et mettons même que vous ne me le gar
derez pas : voilà toujours ce que je puis vous
dire : avec leur air épais et tout commercial, ce .
sont, ma, foi ! d'habiles gens que ces Hambour-
geois ! ■ ■ •
» Ce début était si étrange et s'éloignait si fort
de la direction antérieure de la conversation,
que Karl se mit à.regarder le comte d'un air stu
péfait ; battait-il la campagne, ou voulait-il se
moquer de lui? ,
» Sans paraîtrese préoccuper de cet effet de son
exorde,—oui vraiment,—reprit le comte,^-pour
. le besoin deleurs opérations de bourse et de négo
ce, ces marchands, à force,de s'ingénier, ont fiti
par mettre la main sur un procédé'fort curieux^
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