Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1846-06-20
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32747578p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 124053 Nombre total de vues : 124053
Description : 20 juin 1846 20 juin 1846
Description : 1846/06/20 (Numéro 171). 1846/06/20 (Numéro 171).
Description : Collection numérique : Grande collecte... Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail
Description : Collection numérique : La Grande Collecte Collection numérique : La Grande Collecte
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6674843
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
SAMEDI 20 JUIN 16Ï6.
EDITION DE PARIS.
NUMERO Ïïi.
PUBLICATIONS NOUVELLES
INSÉRÉES DANS -LE JOURNAL
chaque aunèe.
BIBLIOTHÈQUE DE ROMANS NOUVEAUX'
COSIGNANT :
42 vol. de Romans nouveaux;
Bibliothèque:Choisie, 2 ou 3 vol. ;
Magasin Dramatique, 1 ou 2 vol.
(contenant les meilleures pièces de théâtre de
l l'année.)
'Tous ces volâmes pourront être brochés et relié*
Ponr chacun des volumes de la Bibliothèque Choisie,
pour les nolumesdu Magasin Dramatique, et pour les
volumes réunis de chaque ltoman nouveau, les
abonnés auront droit à une couverture spéciale,
avec titre et table des matières.
46 volumes et 4 volumes d'Annuaires,
.20 volumes par année.
JOURNAL POLITIQUE, LITTERAIRE, UNIVERSEL.
On s'abonne à Paris, à l'Administration du Journal, rue de Valois-Palais-Royal, n° 10. Maison de M. Pape,
QUATRE ANNUAIRES.
Quatre VOLUMES séparés et brochés, chacun
de 460 pages au inoint.
SS IT>IH DB CHAQUE AHHfiB.
AM TOAIKE des Lettres, des Arts et des Théâtre»,
EN SSFTBIBBBE DB CBAQTTB ANKÉB.
a .NDÎVAXRH politique (Députés, Pairs, Iustruo-
tion publique, Clergé, Année et Marine).
SB DÉCEMBBE DB GPAQTTB ABHÉB.
ANNUAIRE du Barreau, des Soiences, da l'A
griculture et de la Médecine.
HH MARS DB aBAQVB AMH&B.
ANS3UAÏBJ3 des Chemins de fer , de« TravM*
publia, de la Banque, de l'ludiisuie et du Coup,
inerte.
sp
précieuse <
46 volumes et 4 volumes d 1 Annuaires î
20 volumes par année.
s 'adresser franco, ponr la Rédaction,
& II. M errbao, Gérant.
Les articles déposés ne seront pas rendus.
.on s'adosse sans LES depaiïtemens, chez les directeurs bes postes et a toutes les messageries;
a Londres, chex MU. Cotoie et filt, Sainté-Anne's lane;
a Strasbourg, chet Alexandre, pour l'alleuagkb.
Les Abonnement commencent les l" ei ie de chaque moit.
PAHXS.
trois mois...
fixmois
K AN
«" Fit.
26
sa
DÉPAHTBMBW8.
TROIS MOIS,....
8JIK0IS..
UN AN....
18 pb.
80
80
ÉTRANGER.
trois mois 20 th.
six mois,.... 40
on an 80
ON reçoit les annonces et avis a insérer , tous les jours, "de 10 heures du malin k 4 Heures,
à l'administration générale des Annonces, place de la Bourse', 8.
toute insertion doit être aoréée par le cérant.
Pour, les Annonces ain$i que pour let Abonnement , on reçoit des mandats tur Parit.
S'adresser franco, pour taut M
qui concerne ( Administration,
& M. R osin , Directeur.
Extérieur.
. A ngleterre. — londres, 47 juin. — On lit
darts le Standard : * Notre station navale do l'océan
Pacifique, sous les ordres du contre-amiral sir George
Ssymour, se compose de .9 vaisseaux à voiles portant
281 canons, et ayant 2,750 hommes d'équipage; 2 na
vires à, vapeur- armés de 40 canons, et portant 285
hommes ; 2 vaisseaux de surveillance ayant 20 canons
et 300 hommes. Total : 43 navires, 314 canons, 3.235
hommes. Toutefois, il faut encore ajouter à cette es
cadre 5 vaisseaux qui sont en route pour aller la ren
forcer; Sur ces 5 navires, il y en a 3 à voiles qui
portent ensemble 96 canons et 940 hommes,; et 2 à
vapeur armés de 4 4 canons, et ayant 320. hommes
d 'équipage. Total général, pour les vaisseaux de la
6tàt 424 canons, 4,495 hommes.
^.'escadre américaine dans l'océan Pacifique se com
pose des navires suivanî : le Congrès, frégite de 56
canons; la Constitution, de 60; le Savanmh, de 54; le
Portsmouth, corvette de 22 canons; le Warren, idem;
le Levant, corvette de 20 canons; la Cyane, de 24; le
Requin, schooner de 42 canons, et l'Eric, navire de
transport armé de 5 pièces. Teus çes navires ont des
étjttipagas nombreux et excellons ; en outre, ils soat
armte avec du très gros calibre, principalement les
corvette3. Sans doute, notre escadre actuelle dans
l'océan Pacifique serait déjà en état de lutter avec cel
le d ©3 Elats-Uais; mais il faut reconnaître que les
vaisseaux américains, armés comme ils le sont et
ayant des équipages bien supérieurs aux nôtres, pour
raient nous donner bieh de la tablature dans le cas
d 'ho3tilités. »
" rOHTUGAX. LISBONNE, 4 0 juin. —■ Le3 théâ
tres «ont rouverts, et le Diario annonce, chaque iour
quelque soumission nouvelle des juntes. On avait
craint un'moment une rupture avec la junte de San-
tarem, qui mettait à sa soumission des conditions
inacceptables; mais elle s'est dissoute le 4 juin.
La suspension des paiemens de la Banque en numé
raire nuit beaucoup aux affaires. Ses billets perdent
jusqu'à 6 4/2 0/0.
ALLEMAGNE. — manheim, M juin. — Les atta
ques auxquelles laforce armée est en butte, continuent;
tout récemment pendant la nuit, la sentinelle placée
devant la maison, d'arrêt, a été assaillie à coups de
pierres par des malfaiteurs, et tellement blesîie, qu'il
a fallu la transporter S l'hôpital militaire. On a de la
peine à concevoir comment de pareils attentats peu
vent sè commettre dans une ville populeuse et malgré
les mesures de précaution prises par l'autorité.
■ ETATS-ROMAINS. — B ologne, 44 juin. — Mon-
signor Savelli est arrivé ici avant-hier soir, et hier il
est entré en fonctions dans la nouvelle charge de pro
légat apostolique pour les quatre Légations.
Une' notification vient d'êtee publiée concernant l'or
ganisation provisoire de l'administration gouvernative
des quatre Légations pendant l'interrègne.
' Elle est à peu près la même qui a été en vigueur
depuis janvier 4832 jusqu'en juin 4836, époque à la
quelle le cardinal Lambruschini, ex-secrétaire d'Etat,
rétablit les. cardinaux légats dans chaque province à
la place des vice-légats séculiers.
On s'attend à quelques démonstrations des citoyens
pour demander le rétablissement de la garde civique
et autres réformes, seul moyen d'éviter un mouve
ment général, dont les symptômes se manifestent sur
plusieurs points.
PARIS, 19 JUIN
. Nous ayons raconté, il y a peu de jours,
que, dans l'une des séances de la cour des
pairs, le souvenir da procès de l'illustre ma
réchal Ney avait été déplorablement rappelé
par M. le chancelier, à l'occasion de la dé
gradation qui devait être infligée à Lecomte
avant son supplice.
La cour des pairs avait couvert de ses mur
mures les impradentés paroles de son prési
dent et empêché ainsi l'explosion de l'indi
gnation du prince de la Moskowa, présent à
cette séance. Mais.il était impossible au fils
de l'illustre et héroïque victime d'une san
glante réaction, de ne pas protester publi
quement contre l'incroyable rapprochement
qu'on avait osé faire, ét surtout contre l'es
pèce de solidarité qu'on semblait vouloir éta
blir, sous prétexte de jurisprudènee, entre la
chambre des pairs renouvelée de. 1850, et la
chambre des pairs des premiers jours de la
Restauration.
La séance publique d'aujourd'hui, consa
crée à l'examen de projets de loi et particu
lièrement du projet sur les fêtes de juillet, a
offert au prince de la Moskowa la première
occasion de faire entendre son énergique,
et douloureuse protestation.
A l'ouverture de la séance, un grand nom
bre de députés se pressaient dans les couloirs
de la chambre des pairs ; une sorte de frémis
sement a couru dans l'assemblée, lorsque le
prince de la Moskowa, pâle, ému, mais fer
me, est monté à la tribune. Ce n'était plus un
jeune orateur venant dire son avis à la tri
bune, au milieu d'une controverse politique;
c'était un fils, obligé d'évoquer l'ombre san
glante d&son père, pour condamner ses juges
au remords et au silence, et pour venger sa mé
moire d'une injure, involontaire «ans doute,
mais qu'il fallait effacer.
On lira avec émotion les paroles graves,
nobles, amères, qu'un profond sentiment du
devoir sacré qu'il avait à remplir, a inspirées
au fils du maréchal Ney. La chambre des
pairs les a plusieurs fois applaudies. Quels
que soient dans notre temps l'indifférence
publique, les préoccupations de l'égoïsme, le
dédain de toute gloire, la réaction qui nous
entraîne, il y a cependant toujours au fond
des cœurs un vif souvenir de nos grandeurs
passées, une reconnaissance involontaire pour
les héroïques soldats qui ont combattu pour
la patrie. A de certains momens ce vieux le
vain patriotique et révolutionnaire fermente
de lui-même, et montre qu'on n'a pas éteint
dans le cœar de cette nation tout sentiment
généreux. ~
Un pair de France avait demandé la pa
role pour répondre au prince de la Moskowa.
Nous ne savons ce que cet orateur aurait eu
l'étrange courage de d*fe; mais la chambre
des pairs, s'animant des vieux souvenirs qu'on
venait de réveiller chez elle, n'a pas permis,
pour son propre honneur, qu'on entendît cet
essai de réfutation. Les murmures, les cris à
l'ordre, le bruit des pupitres,lestrépigne-
mens ont couvert toutes les paroles, de l'ora
teur. Plus il essayait d'élever la voix, plus ce
tumulte intelligent et obstiné s'accroissait,
comme unes protestation véhémente d'une
assemblée entière, contre un passé qu'elle
répudiait. Cette scène n'a pas manqué de
grandeur. Elle est an hommage à la mémoire
du maréchal Ney, et une sorte de révision
d'n proi'è» pai" acclamations.
A ia. fin, Torateùr qui provoquait ce tu
multe a quitté la tribune, et. M; lé chance
lier a prononcé quelques mots. Il n'en a pas
dit on seul pour contredira M. le prince de
la Moskowa; il a déclaré seulement que ses
paroles avaient été mal entendues ou mal in*
terprétées, ce qui est évidemment l'expres
sion d'un regret. Quant à la théorie qu'il a
ensuite développée sur le secret des séances à
huis-clos, elle était tout-à-fait hors de propos.
Il ne s'agissait ici ni d'un vote^ ni d'une
délibération, ni d'un aete de la cour. En ré
vélant les paroles impradentés prononcées
par M. le chancelier, M. le prince de la
Moskowa ne violait aucun secret de la cour,
car ces paroles ne s'appliquaient pas même à
la rédaction de l'arrêt, puisque la dégra
dation n'y devait pas être mentionnée.
L'incident avait pour objet non l'une des
circonstances du procès Lecomte, mais des.
paroles,malheureuses, que celui qui souffrait
de l'ipjare devait publiquement repousser.
- La chambre des députés s'est occupée dans sa
séance d'aujourd'hui, de l'examen du budget defl
recettes. Les-votes se sont succédé avec aisez de
rapidité. Des observations ont été présentées sur:
l'administration des domaines, et MM. Lherbette
etLuneaù ont signalé différentes irrégularité*. Plu -
sieurs amendetnens ont été présentés, et des dé->
bats assez confus se sont élevés sur quelques
chapitres. Malgré cela on a fort avancé le budget
des recettes, et l'on n'aura plus à statuer demain
que sur les derniers chapitres et sur un certain
nombre d'amendemeas.
Le budget du ministère des finances a passé si
rapidement l'autre jour, que personne n'a songé
à interpeler la commission des rentes, et à lui de
mander ce qu'il y a de vrai ou de faux dans les
bruits qui ont couru récemment. Il nous parait
pourtant impossible que la session se termine
sans que cette grave question soit soulevée. C'est,
il faut en convenir, une singulière comédie que
toute cette affaire Une proposition est déposée
en faveur de la prompte conversion des rentes
5 0/0. Dans les bureaux, les ministres la combat
tent avec acharnement. A la tribune, ils osent à
peine s'y opposer, et quarante de leurs amis vo
tent avec 1 opposition. Voilk donc la proposition
prise en considération à une grande majorité.
On croit peut-être, dès lors, que la chambre
va nomjner Une commission favorable à la pro
position. Point. Le vote psbîic était pour les élec
teurs. Le vote secret des bureaux est à une tout
autre adresse, et, à la grande surprise de ceux
qui n'ont pas le mot de l'énigme, six membres
sur neuf sont contraires à la proposition. Ont-ils
du mo>ns le courage, la franchise de porter leur
avis devant la chambre, et de la mettre en mesure
de confirmer ou de casser leur arrêt? En aucune
façon.
• Proposant le rejet absolu, ils pourraient avoir
achevé leur tâche en huit jours. An lieu de cela,
iU traînent en longueur pendant plus de deux
mois, et fini*sent par accoucher d'un rapport
qu'ils vont déposer furtivement aux archives.
Est-il possible de se jouer plus complètement de
la chambre et du p»ys?
Nous ne savons ce qu'à cette époque avancés
de la session il est possible de faire. Mais noas
espérons qu'il se trouvera quelqu'un pour faire
tomber tous les masques et pour montrer aux
électeurs jusqu'à quel point on les trompe. Dans
tous les cas, il est clair aujourd'hui qu'en réalité
le parti conservateur ne veut pas la conversion.
Tout ce que nous demandons, c'est qu'il l'avoue
franchement. .
Oa a distribué aujourd'hui à la chambre le
rapport de M. Mou'in fait au nom de Sa commis
sion chargée d'examiner la proposition de M de
Gasparin relative aux conditions d'admission et
d'avancement dans les emplois publics. Les con
clusions de ce rapport sont que la proposition
n'est ni nécessaire ni utile, qu elle ne guérit au
cun mal et affaiblit la responsabilité ministérielle;
par conséquent la commission propose le rejet de
la proposition.
Déjà, il y a peu de jours, une autre commis
sion avait conclu'confrë la conversion des ren
tes comme inopportune et illégale. La majorité,
comme on voit, complète sou testament politique.
La dernière chance que les pairs protectio-
nistes s'étaient réservée est perdue, et l'on peut
considérer comme définitivement adopté le bill
curies céréales. Après le rejet de l'amendement
tendant à maintenir pour trois ans l'échelle mo
bile avec des droits réduits, lord Wicklow avait
Îroposé l'établissement d'un droit fixe très mo-
éré. Ce droit aurait eu, selon lui, l'avaniage de
conserver, dans certaine mesure, une source de
revenus qui aurait permis de diminuer l 'income-
taoc sans maintenir les céréales à un prix élevé.
On avait calculé qu'un certain nombre de pairs
whigs pourraient se rallier à cet amendement.
Il n en a rien été. A la vérité, la minorité a été
plus considérable que la veille ; mais, d'un autre
côté, la majorité s'est également augmentée, ce
qui prouve que les deux parties avaient réuni
toutes leurs forces sur ce dernier enjeu. Som
me toute, le ministère a conservé l'avantage qu'il
avait obtenu sur l'amendement précédent. La
proposition de lord Wicklow a été rejetée par 4 40
voix contre 407.
Il faut remercier M. de Maleville, M. de
Lamartine, M. Berryer d'avoir enfin porté
devant le pays la question de Syrie ; cette
grande question où la faiblesse et l'incapacité
ministérielle éclatent autant et plus que dans
toute autre. A cette époque avancée de la
session il était difficile d'entrer dans tous les
détails, et les défenseurs des chrétiens du Li
ban n'ont pu faire usage de toutes leurs ar
mes. Voici pourtant les points qui, quant à
présent, nous paraissent parfaitement établis»
Trois gouyernemens, le gouvernement
turc, le gouvernement anglais, le gouverne
ment français, ont apparu, depuis quatre
ans, dans la question de Syrie. Le gouverne
ment turc, tout le monde en convient à Paris
comme à Londres et à Vienne, n'a jamais eu
qu'une pensée, celle de supprimer absolu
ment l'indépendance de la montagne, et d'é
tablir la domination directe des pachas sur
les Maronites, aussi bien que sur les Drozes.
C'est dans cette pensée que le goavernement
turc n'a cessé d'entretenir l'anarchie dans ces
malheureuses contrées, et d'y exciter la guer
re civile. C'est dans cette pensée qu'il a armé
successivement ou simultanément les Druzes
contre les Maronites, et les Maronites contre
les Druzes. A cet égard, "nous te répétons,
M. Guizot parle comme lord Aberdeen, et
M. Straiford-Canning comme M. de Bourque-
ney.
Qaant au gouvernement anglais, tous les
documens prouvent clairement, irrésistible
ment, que, depuis 1842,11 n'a voulu qu'âne
chose : te servir des Druzes comme d'uni con
trepoids con're le* Maronites et con re l'in
fluence française. C'est pour cela qu'il a tenu
et qu'il tient encore à l'arrangement absurde
et anarchique des deux kaïtnacans. C'est pour
cela qu'au lieu de chercher à rapprocher les
deux races, on l'a vu fomentant leurs inimi
tiés, poursuivant la famille Chaab d'une
haine active et implacable, ne négligeant rien
en un mot de ce qui pouvait empêcher le ré
tablissement de l'ancieii ordre de choses.
Après le gouvernement turc, il faut le dire,
le gouvernement anglais a eu la plus grande
part dans les désastres, dans les massacres des
dernières années, et le colonel Rose n'est
guères moins coupable que Chekib-Effendi.
Maintenant, entre le gouvernement turc
voulant la domination turque, et le gouver
nement anglais voulant la suprématie druze,
veut-on savoir quelle a été l'attitude de la
France? Bien peu de mots suffisent pour en
donner une idée juste. Il y a à Paris un mi
nistre des affaires étrangères qui, lorsque les
chambres ne lè pressent pas fln peu, ne fait
rien, n'écrit rien, n'a d'avis sur rien, et laisse
le monde aller au gré du hasard. Le lende
main d'une discussion tant soit peu ani
mée, ce ministre pourtant se réveille, prend
sa plume la mieux taillée, et écrit à son am
bassadeur à Constantinople une belle dépêche
toute pleine de nobles pensées et de phrases
éloquentes, mais qui, touj ours, en 1 844comme
en -1843, en 1845 comme en 1844, aboutit à
cette formule invariable : « Je ne suis pas encore
assez éclairé pour vous tracer votre ligne de con
duite. » L h dépêche arrive à Constantinople
où elle trouble un peu la béatitude toute mu
sulmane de notre ambassadeur. Néanmoins,
il faut avoir l'air de dire ou de faire quelque
chose. C'est alors que notre ambassadeur écrit
les admirables notes où il pose sa based'opéra-
tions eu désignant les Chaab sans les nommer,
où il met suffisamment en évidence la pensée du
gouvernement du Roi sans attacher d'une ma
nière trop absolue son crédit et son influence
à telle ou telle solution , où il travaille à l'amé-
lioration.des mesures de détail, en réservant
son opinion sur le fond . Cela fait, M. l'ambas-
fadeur envoie copie de ses notes à nos consuls
eu les suppliant avant tout de garder une très
grande réserve, et de ne lui faire aucune
affaire. C'est ainsi que nos consuls restent en
présence dé la perfidie turque et de l'activité
anglaise, sans direction, sans instructions,
sans crédit.
Qu'on se rassure pourtant et qu'on attende :
un jour viendra où l'influence delà France
aura tout-à-fait péri en Orient, et où la
moitié de la population chrétienne sera ex
terminée. Les quatre puissances alors vou
dront bien reconnaître que l'arrangement
de 1842 n'est pas excellent, et qu'il icouvient-
d'en essayer un nouveau. Cs ]Our-là, M- Gui
zot se présentera à la chambre la tête hauts
et le ton fier,'pour annoncer que la question
est vidée selon le désir de la France, et que
« l'Ordre règne dans le Liban. »
ÉLECTIONS.
Nous avons dit qu'à Saint-Gaudens (Haute^Garotl-
ne) M. Dabeaux, candidat de l'opposition modérée,
avait les plus grandes chances contre M. Àmilhau,;
député ministériel, et contre M. Lapene, légitimiste
rallié. La situation de M. Dabeaux s'améliore chaque-
jour, et tout annonce qu'il sera nommé. Si M- Amilr
hau succombe, ce ne sera pas d'ailleurs faute d'user
de tous les moyens et de frapper à toutes les portes.
Ainsi voici un fait qu'un de nos correspondans tiouï
atteste, et qui nous paraît caractéristique.
Le fils d'un électeur ayant écrit à M. Amilhau pour
demander un brevet de surnuméraire ou un emploi
dans l'administration des postes, M. Amilhau, dit-on„
fit écrire au solliciteur que l'arrêté ministériel lui avait
été remis èn blanc et qu'il l'avait en portefeuille; mais
qu'il fallait, pour que cet arrêté fût expédié, l'enga
gement écrit de deux électeurs, amis de M. Dabeaux,
qui promettraient de voter pour M. Amilhau, Oa
ajoute qu'à la réception de cette lettre le postulant
s est mis en campagne, et qu'il s'est adressé à deujç
électeurs qui sont tout prêts à se nommer, si le fait
était contesté. Nous ne saurions trop engager ces élec
teurs à ne pas attendre, et à répéter bien haut, ce»'
qu'ils ont entendu et ce qu'ils ont lu. C'est seulement
: à l'aide de telles déclarations, nettes et publiques,
qu'il est possible de mettre un terme à la corruption
qui nocs ronge. , '
Il est une autre espèce de corruption assèz généra
lement employée. Celle-ci consiste, quand des délits 1
forestiers ou autres ont eu lieu, à suspendre les pour
suites, et à laisser entendre, qu'après les élections, on
se montrera plus ou moins Eévère, selon les services
que les délinquans ou leur famille auront pu rendre 4
la bonne politique. De cette façon, ce n'est pas; seule
ment l'administration, c'est la justice qui travaille aux
succès des candidats ministériels. Nous avons reçu, de»
dix départemens, des lettres où des faits de ce genr»
sont racontés.
— Parmi les députés nommés en 4842 par l'oppo
sition, et qui, à peine arrivés à Paris, se sont ralliés
au ministère, il n'en est aucun peut-être don| la con
version ait été aussi brusque que celle de M. Duthil,
et accompagnée d'aussi curieuses circonstances. Né-
rac avait pour représentant M. Barsalôu, beau-frèrei
de M. Dumon, que l'administrai ion appuyait de tou
tes ses forces. En 4842, il se forma contre M-. Barsa-»
lou une coalition de toutes les oppositions et M. Du
thil devint le candidat de cette coalition. Il fut dono
élu non seulement par l'opposition modérée, mais par
les radicaux et par 16s légitimistes auxquels il fit les
plus belles promesses! Peut-être en faisant ces pro
messes, M. Duthil.était-il sincère. Ce qu il ya do
certain, c'est qu'il les oublia dans la malle-posie, et
qu'en arrivant à Paris, il s'en tint pour absolument
dégagé; mais voici le plus piquant. Le sous-préfet da
Nérac, par ordre du ministre de 1 intérieur, avait
soutenu de son mieux M. Barsalôu. Pour prix de sa
conversion, M. Duthil demanda et obtint que le sous-
préfet fût puni de son obéissance et envoyé, contr»
son gré, dans une autre sous-préfecture. G est ua
exemple et une leçon qui profitera, nous i esparuna,
aux fonctionnaires trop dévoués.
Qaoi qu'il eh soit, il n 'est plus question de M. Barsa*
lou, et M. Duthil est bien et dûment aujourd'hui la
candidat ministériel. La coalition qui, en 4842,.avait
élu ce député, doit tènir à honneur de lui infliger un
juste châtiment, et nous savons qu'elle s'y prépare.
Pour notre part, nous appuierons tout candidat dent
elle fera choix en espérant qu'elle aura la main plus
heureuse qu'en 4842.
Le Compter de Loir et Cher signale les manoeuvres
qui sont employées à Romorantin et à Vendôme ea.
faveur des candidats ministériels. <■
t Les agens-voyers, dit-il, ontlemot d'ordre. Vçuâ
- 64 -
LES GRANDS DANSEURS DU ROI.
coton ; ils ont maintenant pour premier un insulaire qu'on
nomme l'Anglais à la fraise jaune. On en faisait beaucoup
de récit ; il ne me va pas, mor : c'est fort, c'est nerveux, ça
a du jarret, aussi ça plaît assez au parterre ; mais pour les
loges et les femmes qui penchent plus pour le galant et la
grâce, elles ont toujours leur idole qu'on ne leur z'a pas ren
due. Savez vous , lieutenant, que du départ d'une certaine
personne, on dit qu'il y a sept ou huit bourgeoises qui ont
fait des maladies ?
— Monsieur Pompée, ■—répondit Dupuis en riant, -— je
suis assez riche pour acquitter mes dettes, mais pas assez pour
payer des flatteurs ; ainsi, cette gasconnade, si vous le per
mettez, passera par dessus le marché. Sur ce, beaucoup de
succès dans vos amours, et à revoir.
Pompée, au dénoument de cette conversation, salua aussi
respectueusement qu'à son début ; il était donc encore en
position quand Dupuis revint sur ses pas et lui dit :
— Cet Anglais, est-ce qu'il danse tous les soirs?
— Absolument, les mêmes jours et aux mêmes heures, —
répondit Pompée, ge servant d'une réticence de fort bon
goût.
— Merci, mon cher, repartit Dupuis d'un air réfléchi, et
ainsi finit la rencontre.
CHAPITRE XXXI.
OU DUPUIS RETOURNE EN ARRIÈRE. — DE L'ANGLAIS A LA FRAISE JAUNE. — D'UNE VENGEANCE DE FEMME,
»*CN BOUQUET ET DE SES CONSÉQUENCES.
Quoiqu'habitant Versailles, Dupuis ne s 'était pas défait
de son logement de la rue des Fossés-du-Temple ; outre qu'il
lui était commode, d'avoir à Paris un pied-à-terre, il tenait à
ce petit réduit, où, jusqu'à l'époque de sa nouvelle fortune,
s'était concentrée presque toute sa vie.
Il eut à se féliciter, ce jour-là, de s'être ainsi ménagé un
asile. Surpris, presqu'aussitôt après sa rencontre avec Pom
pée, par un de ces orages parisiens qui ont toujours l'air de
commencer le Déluge, en vertu du décorum militaire, qui or
donna au porteur d'un uniforme de se laisser stoïquement
mouiller jusqu'aux os, il fut transpercé de si belle manière,
qu'à part une urne qu'il n'avait pas sous le bras, on l'eût pris
plutôt pour un Fleuve mythologique que pour un officier de
l'armée du roi.
Il avait en sa mansarde une petite provision de linge et
ses anciens habits de ville; il alla donc y refaire une toi
lette, et comme la pluie continuait toujours de tomber à tor-
rens et que l'atmosphère s'était considérablement refroidie,
il alluma du feu, se fit apporter à manger de chez le traiteur
qui le servait à une autre époque, enfin reprit si bien tout
le trantran de son petit ménage d'artiste, que, pour un-mo
ment, il put se croire redevenu le Dupuis d'autrefois.
Ces sortes d'excursions dans le passé ont leur charme,
mais un charme un peu douloureux : ce sont de ces plaisirs
qui, comme les bons vins, tournent à l'amer quand on les fait
trop durer. Le temps s'était fixé à la pluie pour le reste de la
soirée; le jour allait déjà baissant ; ainsi, chez notre solitaire,
tout poussait au noir et au sombre, et il était vraiment dési
rable qu'il sê secouât en quelque manière, afin de changer
le cours de ses idées.
Pour triompher de cette lugubre disposition, Dupuis
. pensa à aller finir sa soirée dans quelque théâtre. Il n'y en
avait pas de plus proche que celui de ses anciens exploits;
et d'ailleurs, son successeur, cet Anglais à la fraise jaune,
lui trottait malgré lui dans la tête. S'enveloppant donc d'un
manteau que comportaient à la fois et l'état du ciel et son
désir, facile à comprendre, de garder l'incognito, pour plus
de sûreté, il se disposait à monter dans une de ces loges du
cintre, fréquentées surtout par des gens qui ne s'occupent
que de leurs affaires, à savoir les amoureux. Mais comme il
se glissait furtivement le long du corridor, il fut avisé par
Nicolet, qui toujours errait par son théâtre, et alors il n'y
eut pas à s'en défendre, il fallut qu'il allât s'installer danr là
loge de la direction.
, Cette place pourvoyait, au reste, assez bien à sa crainte
d'être reconnu. Boudoir élégant et coquet qui n'était pas
sans donner quelques appréhensions jalouses à Mme Nicolet,
la loge de M. le directeur était située derrière la toile, un
peu en arrière de l'avant-scène, presque de plain pied avec
je théâtre, et, en s'y asseyant, le dos tourné à la salle, on
était, pour celle-ci, à peu près hors de vue.
Tout en conduisant son hôte à ce secret asile, Nieolet lui
avait beaucoup parlé de l'Anglais à la fraise jaune, qu'il
avait l'air de regarder comme une acquisition excellente; il
lui vanta aussi une nouveauté de son invention qui, disait-il,
faisait fureur. Or, voici ce que l'habile directeur appelait
une nouveauté.
61 -
i UiJlWjlt" 1
FEU/LLETON DU CONSTITUTIONNEL.
— Cependant, Madame, —>> repartit Dupuis dans la der
nière stupéfaction, — il est impossible que je sois pour vous,
à ce point méconnaissable ; du reste, je puis prouver que je
n'ai point rêvé cette lettre. Elle ne me quitte jamais, tant elle
m'est chère, et vous reconnaîtrez peut-être votre écriture, si
vous ne vous rappelez point mes traits.
Parlant ainsi, Dupuis avait pris dans une des poches de sa
veste des tablettes de nacre de perle et en avait tiré la pré
cieuse épître que la marquise prit de ses mains avec quel-
qu'empressement.
Après y avoir jeté un coup-d'œil, cette singulière femme,
du plus grand sang-froid du monde, la roula dans ses beaux
doigts, et, l'ayant réduite au plus petit volume possible, elle
la serra dans cette bienheureuse place, où Mlle d'Hautefort
défiait le dévêt roi Louis XIII de venir prendre ses billets,
quand elle ne voulait pas qu'il les lût.
— En vérité, Madame, ce badinage est bien cruel, —dit
alors le pauvre amoureux qui ne pouvait croire à un sérieux
larcin, — veuillez, je vous en supplie, me restituer cette
lettre et en même temps me faire connaître par où j'ai pu mé
riter vos dédains et votre outli.
— Monsieur Dupuis, dit alors la marquise, ne marchan
dant plus à le reconnaître sitôt qu'elle le vit désarmé,—vous
êtes devenu, à ce que je vois, officier, et de plus gentilhom
me , si je suis bien informé ?
— Oui, Madame; ainsi que j'avais l'honneur de vous le
marquer dans une lettre qui vous est parvenue, j'espère, une
grande révolution s'est faite dans ma yie.
—Eh bien I moi, Monsieur, il s'en est faite une non moins
grande dans mes sentiments : en vous, j'appréciais le premier
danseur du monde et j'aurais fait peut-être la folie de me
donner à lui, mais pour les officiers de hasard, les gentils
hommes de contrebande, et les mignons de la du Barry, dis
pensez-moi de vous dire ce que j'en pense et les mouvemens
secrets que mon cœur a pour eux.
Cela dit, la marquise lui tourna le dos, et elle profita de
ce que la foule lui revenait pour feindre une grande curiosité
et un grand intérêt relativement à la personne qui venait de
s'évanouir; chacun s'empressant de répondre à ses questions,
force fut au malheureux Dupuis de boire sa honte et de sè
retirer sans pouvoir ajouter un mot.
CHAPITRE XXIX.
JEUNESSE ET INNOCENCE DE DUtUlS. — DU COEUR DES FEMMES ÉT DÉ LEUR CHAPITRE DANS £E LITRE DES Caractère!.
Après le terrible coup qu'il venait de recevoir, Dupuis es
saya bien encore de se faire illusion. Il supposa qu'au fonddu
traitement que lui avait infligé son inhumaiae, il y avait plus
de dépit que de vrai dédain. « Sans doute, — pensa-t-il, —
» elle m'en veut de ce que jé n'ai pas tout quittépour voler à son
» rendez-vous : peut-être aussi se figure-t-elleque je l'ai sa-
» crifiée dans mon entrevue avec Mme du Barry; qui sait mê-
» me si elle ne serait pas jalouse?» Et comme, relativement
à tous ces griefs, il se sentait parfaitement net et irréprocha
ble, il ne désespéra pas qu'une longue lettre justificative dans
laquelle il expliquerait toute sa conduite et tous les mobiles
qui l'avaient dirigé ne parvînt à conjurer la colère de sa belle
ennemie.
Mais ni cette lettre ni vingt autres démarches expiatoires,
dans le détail desquels il serait trop long d'entrer, ne furent
efficaces pour le soulagement du triste amoureux ; du reste, il
aurait mieux dû connaître sa marquise depuis le temps qu'il
la pratiquait.
Il ne savait pas, le sot garçon, que les femmes de vive itna^
gination, comme celle-ci s'était montrée à lui, se laissent
surtout charmer par l'extraordinaire. Des officiers, des gen
tilshommes , en un mot des gens de leur monde, les gran
des dames en trouvent sur leur chemin autant et plus
qu'elles ne veulent. 11 n'y a donc pas pour elles tant à s'em
presser de ramasser ces brillantes fleurs de leur jardin, qui y
poussent-comme naturellement et dont elles savent par cœur
et les couleurs et les parfums. Mais que, dans une promenade
hors de leur enclos , vienne à se rencontrer la plus humble
fleur des champs, pour le seul fait d'être nouvelle etinconnue,
la pauvre plante va fixer leurs regards, et elles auront aussitôt
la passion d'en avoir une guirlande pour leur prochaine pa
rure; C'était là l'histoire de Dupuis. Par sa sauvagerie* et la
délicatesse prodigieusement inattendue de ses sentimens, il
avait commencé, par frapper l'attention de la brûlante Ita
lienne; puis, par la commisération et ce vif intérêt qu'inspire
toujours un malheur immérité et bravement soutenu , elle
avait achevé de s'attendrir.
Maintenant, que faisait ce maladroit? Il dérangeait tout le
roman, se greffait de noblesse et de gentilhommerie, et ayant
par devers lui la belle recommandation de la du Barry, venait
dire à la fantasque dame : me voilà fait comme tous les gens
que vous connaissez; à votre taille et hauteur, et, pour me
cueillir, vous ne serez pas même dans la nécessité de vous
baisser/ .
EDITION DE PARIS.
NUMERO Ïïi.
PUBLICATIONS NOUVELLES
INSÉRÉES DANS -LE JOURNAL
chaque aunèe.
BIBLIOTHÈQUE DE ROMANS NOUVEAUX'
COSIGNANT :
42 vol. de Romans nouveaux;
Bibliothèque:Choisie, 2 ou 3 vol. ;
Magasin Dramatique, 1 ou 2 vol.
(contenant les meilleures pièces de théâtre de
l l'année.)
'Tous ces volâmes pourront être brochés et relié*
Ponr chacun des volumes de la Bibliothèque Choisie,
pour les nolumesdu Magasin Dramatique, et pour les
volumes réunis de chaque ltoman nouveau, les
abonnés auront droit à une couverture spéciale,
avec titre et table des matières.
46 volumes et 4 volumes d'Annuaires,
.20 volumes par année.
JOURNAL POLITIQUE, LITTERAIRE, UNIVERSEL.
On s'abonne à Paris, à l'Administration du Journal, rue de Valois-Palais-Royal, n° 10. Maison de M. Pape,
QUATRE ANNUAIRES.
Quatre VOLUMES séparés et brochés, chacun
de 460 pages au inoint.
SS IT>IH DB CHAQUE AHHfiB.
AM TOAIKE des Lettres, des Arts et des Théâtre»,
EN SSFTBIBBBE DB CBAQTTB ANKÉB.
a .NDÎVAXRH politique (Députés, Pairs, Iustruo-
tion publique, Clergé, Année et Marine).
SB DÉCEMBBE DB GPAQTTB ABHÉB.
ANNUAIRE du Barreau, des Soiences, da l'A
griculture et de la Médecine.
HH MARS DB aBAQVB AMH&B.
ANS3UAÏBJ3 des Chemins de fer , de« TravM*
publia, de la Banque, de l'ludiisuie et du Coup,
inerte.
sp
précieuse <
46 volumes et 4 volumes d 1 Annuaires î
20 volumes par année.
s 'adresser franco, ponr la Rédaction,
& II. M errbao, Gérant.
Les articles déposés ne seront pas rendus.
.on s'adosse sans LES depaiïtemens, chez les directeurs bes postes et a toutes les messageries;
a Londres, chex MU. Cotoie et filt, Sainté-Anne's lane;
a Strasbourg, chet Alexandre, pour l'alleuagkb.
Les Abonnement commencent les l" ei ie de chaque moit.
PAHXS.
trois mois...
fixmois
K AN
«" Fit.
26
sa
DÉPAHTBMBW8.
TROIS MOIS,....
8JIK0IS..
UN AN....
18 pb.
80
80
ÉTRANGER.
trois mois 20 th.
six mois,.... 40
on an 80
ON reçoit les annonces et avis a insérer , tous les jours, "de 10 heures du malin k 4 Heures,
à l'administration générale des Annonces, place de la Bourse', 8.
toute insertion doit être aoréée par le cérant.
Pour, les Annonces ain$i que pour let Abonnement , on reçoit des mandats tur Parit.
S'adresser franco, pour taut M
qui concerne ( Administration,
& M. R osin , Directeur.
Extérieur.
. A ngleterre. — londres, 47 juin. — On lit
darts le Standard : * Notre station navale do l'océan
Pacifique, sous les ordres du contre-amiral sir George
Ssymour, se compose de .9 vaisseaux à voiles portant
281 canons, et ayant 2,750 hommes d'équipage; 2 na
vires à, vapeur- armés de 40 canons, et portant 285
hommes ; 2 vaisseaux de surveillance ayant 20 canons
et 300 hommes. Total : 43 navires, 314 canons, 3.235
hommes. Toutefois, il faut encore ajouter à cette es
cadre 5 vaisseaux qui sont en route pour aller la ren
forcer; Sur ces 5 navires, il y en a 3 à voiles qui
portent ensemble 96 canons et 940 hommes,; et 2 à
vapeur armés de 4 4 canons, et ayant 320. hommes
d 'équipage. Total général, pour les vaisseaux de la
6tàt
^.'escadre américaine dans l'océan Pacifique se com
pose des navires suivanî : le Congrès, frégite de 56
canons; la Constitution, de 60; le Savanmh, de 54; le
Portsmouth, corvette de 22 canons; le Warren, idem;
le Levant, corvette de 20 canons; la Cyane, de 24; le
Requin, schooner de 42 canons, et l'Eric, navire de
transport armé de 5 pièces. Teus çes navires ont des
étjttipagas nombreux et excellons ; en outre, ils soat
armte avec du très gros calibre, principalement les
corvette3. Sans doute, notre escadre actuelle dans
l'océan Pacifique serait déjà en état de lutter avec cel
le d ©3 Elats-Uais; mais il faut reconnaître que les
vaisseaux américains, armés comme ils le sont et
ayant des équipages bien supérieurs aux nôtres, pour
raient nous donner bieh de la tablature dans le cas
d 'ho3tilités. »
" rOHTUGAX. LISBONNE, 4 0 juin. —■ Le3 théâ
tres «ont rouverts, et le Diario annonce, chaque iour
quelque soumission nouvelle des juntes. On avait
craint un'moment une rupture avec la junte de San-
tarem, qui mettait à sa soumission des conditions
inacceptables; mais elle s'est dissoute le 4 juin.
La suspension des paiemens de la Banque en numé
raire nuit beaucoup aux affaires. Ses billets perdent
jusqu'à 6 4/2 0/0.
ALLEMAGNE. — manheim, M juin. — Les atta
ques auxquelles laforce armée est en butte, continuent;
tout récemment pendant la nuit, la sentinelle placée
devant la maison, d'arrêt, a été assaillie à coups de
pierres par des malfaiteurs, et tellement blesîie, qu'il
a fallu la transporter S l'hôpital militaire. On a de la
peine à concevoir comment de pareils attentats peu
vent sè commettre dans une ville populeuse et malgré
les mesures de précaution prises par l'autorité.
■ ETATS-ROMAINS. — B ologne, 44 juin. — Mon-
signor Savelli est arrivé ici avant-hier soir, et hier il
est entré en fonctions dans la nouvelle charge de pro
légat apostolique pour les quatre Légations.
Une' notification vient d'êtee publiée concernant l'or
ganisation provisoire de l'administration gouvernative
des quatre Légations pendant l'interrègne.
' Elle est à peu près la même qui a été en vigueur
depuis janvier 4832 jusqu'en juin 4836, époque à la
quelle le cardinal Lambruschini, ex-secrétaire d'Etat,
rétablit les. cardinaux légats dans chaque province à
la place des vice-légats séculiers.
On s'attend à quelques démonstrations des citoyens
pour demander le rétablissement de la garde civique
et autres réformes, seul moyen d'éviter un mouve
ment général, dont les symptômes se manifestent sur
plusieurs points.
PARIS, 19 JUIN
. Nous ayons raconté, il y a peu de jours,
que, dans l'une des séances de la cour des
pairs, le souvenir da procès de l'illustre ma
réchal Ney avait été déplorablement rappelé
par M. le chancelier, à l'occasion de la dé
gradation qui devait être infligée à Lecomte
avant son supplice.
La cour des pairs avait couvert de ses mur
mures les impradentés paroles de son prési
dent et empêché ainsi l'explosion de l'indi
gnation du prince de la Moskowa, présent à
cette séance. Mais.il était impossible au fils
de l'illustre et héroïque victime d'une san
glante réaction, de ne pas protester publi
quement contre l'incroyable rapprochement
qu'on avait osé faire, ét surtout contre l'es
pèce de solidarité qu'on semblait vouloir éta
blir, sous prétexte de jurisprudènee, entre la
chambre des pairs renouvelée de. 1850, et la
chambre des pairs des premiers jours de la
Restauration.
La séance publique d'aujourd'hui, consa
crée à l'examen de projets de loi et particu
lièrement du projet sur les fêtes de juillet, a
offert au prince de la Moskowa la première
occasion de faire entendre son énergique,
et douloureuse protestation.
A l'ouverture de la séance, un grand nom
bre de députés se pressaient dans les couloirs
de la chambre des pairs ; une sorte de frémis
sement a couru dans l'assemblée, lorsque le
prince de la Moskowa, pâle, ému, mais fer
me, est monté à la tribune. Ce n'était plus un
jeune orateur venant dire son avis à la tri
bune, au milieu d'une controverse politique;
c'était un fils, obligé d'évoquer l'ombre san
glante d&son père, pour condamner ses juges
au remords et au silence, et pour venger sa mé
moire d'une injure, involontaire «ans doute,
mais qu'il fallait effacer.
On lira avec émotion les paroles graves,
nobles, amères, qu'un profond sentiment du
devoir sacré qu'il avait à remplir, a inspirées
au fils du maréchal Ney. La chambre des
pairs les a plusieurs fois applaudies. Quels
que soient dans notre temps l'indifférence
publique, les préoccupations de l'égoïsme, le
dédain de toute gloire, la réaction qui nous
entraîne, il y a cependant toujours au fond
des cœurs un vif souvenir de nos grandeurs
passées, une reconnaissance involontaire pour
les héroïques soldats qui ont combattu pour
la patrie. A de certains momens ce vieux le
vain patriotique et révolutionnaire fermente
de lui-même, et montre qu'on n'a pas éteint
dans le cœar de cette nation tout sentiment
généreux. ~
Un pair de France avait demandé la pa
role pour répondre au prince de la Moskowa.
Nous ne savons ce que cet orateur aurait eu
l'étrange courage de d*fe; mais la chambre
des pairs, s'animant des vieux souvenirs qu'on
venait de réveiller chez elle, n'a pas permis,
pour son propre honneur, qu'on entendît cet
essai de réfutation. Les murmures, les cris à
l'ordre, le bruit des pupitres,lestrépigne-
mens ont couvert toutes les paroles, de l'ora
teur. Plus il essayait d'élever la voix, plus ce
tumulte intelligent et obstiné s'accroissait,
comme unes protestation véhémente d'une
assemblée entière, contre un passé qu'elle
répudiait. Cette scène n'a pas manqué de
grandeur. Elle est an hommage à la mémoire
du maréchal Ney, et une sorte de révision
d'n proi'è» pai" acclamations.
A ia. fin, Torateùr qui provoquait ce tu
multe a quitté la tribune, et. M; lé chance
lier a prononcé quelques mots. Il n'en a pas
dit on seul pour contredira M. le prince de
la Moskowa; il a déclaré seulement que ses
paroles avaient été mal entendues ou mal in*
terprétées, ce qui est évidemment l'expres
sion d'un regret. Quant à la théorie qu'il a
ensuite développée sur le secret des séances à
huis-clos, elle était tout-à-fait hors de propos.
Il ne s'agissait ici ni d'un vote^ ni d'une
délibération, ni d'un aete de la cour. En ré
vélant les paroles impradentés prononcées
par M. le chancelier, M. le prince de la
Moskowa ne violait aucun secret de la cour,
car ces paroles ne s'appliquaient pas même à
la rédaction de l'arrêt, puisque la dégra
dation n'y devait pas être mentionnée.
L'incident avait pour objet non l'une des
circonstances du procès Lecomte, mais des.
paroles,malheureuses, que celui qui souffrait
de l'ipjare devait publiquement repousser.
- La chambre des députés s'est occupée dans sa
séance d'aujourd'hui, de l'examen du budget defl
recettes. Les-votes se sont succédé avec aisez de
rapidité. Des observations ont été présentées sur:
l'administration des domaines, et MM. Lherbette
etLuneaù ont signalé différentes irrégularité*. Plu -
sieurs amendetnens ont été présentés, et des dé->
bats assez confus se sont élevés sur quelques
chapitres. Malgré cela on a fort avancé le budget
des recettes, et l'on n'aura plus à statuer demain
que sur les derniers chapitres et sur un certain
nombre d'amendemeas.
Le budget du ministère des finances a passé si
rapidement l'autre jour, que personne n'a songé
à interpeler la commission des rentes, et à lui de
mander ce qu'il y a de vrai ou de faux dans les
bruits qui ont couru récemment. Il nous parait
pourtant impossible que la session se termine
sans que cette grave question soit soulevée. C'est,
il faut en convenir, une singulière comédie que
toute cette affaire Une proposition est déposée
en faveur de la prompte conversion des rentes
5 0/0. Dans les bureaux, les ministres la combat
tent avec acharnement. A la tribune, ils osent à
peine s'y opposer, et quarante de leurs amis vo
tent avec 1 opposition. Voilk donc la proposition
prise en considération à une grande majorité.
On croit peut-être, dès lors, que la chambre
va nomjner Une commission favorable à la pro
position. Point. Le vote psbîic était pour les élec
teurs. Le vote secret des bureaux est à une tout
autre adresse, et, à la grande surprise de ceux
qui n'ont pas le mot de l'énigme, six membres
sur neuf sont contraires à la proposition. Ont-ils
du mo>ns le courage, la franchise de porter leur
avis devant la chambre, et de la mettre en mesure
de confirmer ou de casser leur arrêt? En aucune
façon.
• Proposant le rejet absolu, ils pourraient avoir
achevé leur tâche en huit jours. An lieu de cela,
iU traînent en longueur pendant plus de deux
mois, et fini*sent par accoucher d'un rapport
qu'ils vont déposer furtivement aux archives.
Est-il possible de se jouer plus complètement de
la chambre et du p»ys?
Nous ne savons ce qu'à cette époque avancés
de la session il est possible de faire. Mais noas
espérons qu'il se trouvera quelqu'un pour faire
tomber tous les masques et pour montrer aux
électeurs jusqu'à quel point on les trompe. Dans
tous les cas, il est clair aujourd'hui qu'en réalité
le parti conservateur ne veut pas la conversion.
Tout ce que nous demandons, c'est qu'il l'avoue
franchement. .
Oa a distribué aujourd'hui à la chambre le
rapport de M. Mou'in fait au nom de Sa commis
sion chargée d'examiner la proposition de M de
Gasparin relative aux conditions d'admission et
d'avancement dans les emplois publics. Les con
clusions de ce rapport sont que la proposition
n'est ni nécessaire ni utile, qu elle ne guérit au
cun mal et affaiblit la responsabilité ministérielle;
par conséquent la commission propose le rejet de
la proposition.
Déjà, il y a peu de jours, une autre commis
sion avait conclu'confrë la conversion des ren
tes comme inopportune et illégale. La majorité,
comme on voit, complète sou testament politique.
La dernière chance que les pairs protectio-
nistes s'étaient réservée est perdue, et l'on peut
considérer comme définitivement adopté le bill
curies céréales. Après le rejet de l'amendement
tendant à maintenir pour trois ans l'échelle mo
bile avec des droits réduits, lord Wicklow avait
Îroposé l'établissement d'un droit fixe très mo-
éré. Ce droit aurait eu, selon lui, l'avaniage de
conserver, dans certaine mesure, une source de
revenus qui aurait permis de diminuer l 'income-
taoc sans maintenir les céréales à un prix élevé.
On avait calculé qu'un certain nombre de pairs
whigs pourraient se rallier à cet amendement.
Il n en a rien été. A la vérité, la minorité a été
plus considérable que la veille ; mais, d'un autre
côté, la majorité s'est également augmentée, ce
qui prouve que les deux parties avaient réuni
toutes leurs forces sur ce dernier enjeu. Som
me toute, le ministère a conservé l'avantage qu'il
avait obtenu sur l'amendement précédent. La
proposition de lord Wicklow a été rejetée par 4 40
voix contre 407.
Il faut remercier M. de Maleville, M. de
Lamartine, M. Berryer d'avoir enfin porté
devant le pays la question de Syrie ; cette
grande question où la faiblesse et l'incapacité
ministérielle éclatent autant et plus que dans
toute autre. A cette époque avancée de la
session il était difficile d'entrer dans tous les
détails, et les défenseurs des chrétiens du Li
ban n'ont pu faire usage de toutes leurs ar
mes. Voici pourtant les points qui, quant à
présent, nous paraissent parfaitement établis»
Trois gouyernemens, le gouvernement
turc, le gouvernement anglais, le gouverne
ment français, ont apparu, depuis quatre
ans, dans la question de Syrie. Le gouverne
ment turc, tout le monde en convient à Paris
comme à Londres et à Vienne, n'a jamais eu
qu'une pensée, celle de supprimer absolu
ment l'indépendance de la montagne, et d'é
tablir la domination directe des pachas sur
les Maronites, aussi bien que sur les Drozes.
C'est dans cette pensée que le goavernement
turc n'a cessé d'entretenir l'anarchie dans ces
malheureuses contrées, et d'y exciter la guer
re civile. C'est dans cette pensée qu'il a armé
successivement ou simultanément les Druzes
contre les Maronites, et les Maronites contre
les Druzes. A cet égard, "nous te répétons,
M. Guizot parle comme lord Aberdeen, et
M. Straiford-Canning comme M. de Bourque-
ney.
Qaant au gouvernement anglais, tous les
documens prouvent clairement, irrésistible
ment, que, depuis 1842,11 n'a voulu qu'âne
chose : te servir des Druzes comme d'uni con
trepoids con're le* Maronites et con re l'in
fluence française. C'est pour cela qu'il a tenu
et qu'il tient encore à l'arrangement absurde
et anarchique des deux kaïtnacans. C'est pour
cela qu'au lieu de chercher à rapprocher les
deux races, on l'a vu fomentant leurs inimi
tiés, poursuivant la famille Chaab d'une
haine active et implacable, ne négligeant rien
en un mot de ce qui pouvait empêcher le ré
tablissement de l'ancieii ordre de choses.
Après le gouvernement turc, il faut le dire,
le gouvernement anglais a eu la plus grande
part dans les désastres, dans les massacres des
dernières années, et le colonel Rose n'est
guères moins coupable que Chekib-Effendi.
Maintenant, entre le gouvernement turc
voulant la domination turque, et le gouver
nement anglais voulant la suprématie druze,
veut-on savoir quelle a été l'attitude de la
France? Bien peu de mots suffisent pour en
donner une idée juste. Il y a à Paris un mi
nistre des affaires étrangères qui, lorsque les
chambres ne lè pressent pas fln peu, ne fait
rien, n'écrit rien, n'a d'avis sur rien, et laisse
le monde aller au gré du hasard. Le lende
main d'une discussion tant soit peu ani
mée, ce ministre pourtant se réveille, prend
sa plume la mieux taillée, et écrit à son am
bassadeur à Constantinople une belle dépêche
toute pleine de nobles pensées et de phrases
éloquentes, mais qui, touj ours, en 1 844comme
en -1843, en 1845 comme en 1844, aboutit à
cette formule invariable : « Je ne suis pas encore
assez éclairé pour vous tracer votre ligne de con
duite. » L h dépêche arrive à Constantinople
où elle trouble un peu la béatitude toute mu
sulmane de notre ambassadeur. Néanmoins,
il faut avoir l'air de dire ou de faire quelque
chose. C'est alors que notre ambassadeur écrit
les admirables notes où il pose sa based'opéra-
tions eu désignant les Chaab sans les nommer,
où il met suffisamment en évidence la pensée du
gouvernement du Roi sans attacher d'une ma
nière trop absolue son crédit et son influence
à telle ou telle solution , où il travaille à l'amé-
lioration.des mesures de détail, en réservant
son opinion sur le fond . Cela fait, M. l'ambas-
fadeur envoie copie de ses notes à nos consuls
eu les suppliant avant tout de garder une très
grande réserve, et de ne lui faire aucune
affaire. C'est ainsi que nos consuls restent en
présence dé la perfidie turque et de l'activité
anglaise, sans direction, sans instructions,
sans crédit.
Qu'on se rassure pourtant et qu'on attende :
un jour viendra où l'influence delà France
aura tout-à-fait péri en Orient, et où la
moitié de la population chrétienne sera ex
terminée. Les quatre puissances alors vou
dront bien reconnaître que l'arrangement
de 1842 n'est pas excellent, et qu'il icouvient-
d'en essayer un nouveau. Cs ]Our-là, M- Gui
zot se présentera à la chambre la tête hauts
et le ton fier,'pour annoncer que la question
est vidée selon le désir de la France, et que
« l'Ordre règne dans le Liban. »
ÉLECTIONS.
Nous avons dit qu'à Saint-Gaudens (Haute^Garotl-
ne) M. Dabeaux, candidat de l'opposition modérée,
avait les plus grandes chances contre M. Àmilhau,;
député ministériel, et contre M. Lapene, légitimiste
rallié. La situation de M. Dabeaux s'améliore chaque-
jour, et tout annonce qu'il sera nommé. Si M- Amilr
hau succombe, ce ne sera pas d'ailleurs faute d'user
de tous les moyens et de frapper à toutes les portes.
Ainsi voici un fait qu'un de nos correspondans tiouï
atteste, et qui nous paraît caractéristique.
Le fils d'un électeur ayant écrit à M. Amilhau pour
demander un brevet de surnuméraire ou un emploi
dans l'administration des postes, M. Amilhau, dit-on„
fit écrire au solliciteur que l'arrêté ministériel lui avait
été remis èn blanc et qu'il l'avait en portefeuille; mais
qu'il fallait, pour que cet arrêté fût expédié, l'enga
gement écrit de deux électeurs, amis de M. Dabeaux,
qui promettraient de voter pour M. Amilhau, Oa
ajoute qu'à la réception de cette lettre le postulant
s est mis en campagne, et qu'il s'est adressé à deujç
électeurs qui sont tout prêts à se nommer, si le fait
était contesté. Nous ne saurions trop engager ces élec
teurs à ne pas attendre, et à répéter bien haut, ce»'
qu'ils ont entendu et ce qu'ils ont lu. C'est seulement
: à l'aide de telles déclarations, nettes et publiques,
qu'il est possible de mettre un terme à la corruption
qui nocs ronge. , '
Il est une autre espèce de corruption assèz généra
lement employée. Celle-ci consiste, quand des délits 1
forestiers ou autres ont eu lieu, à suspendre les pour
suites, et à laisser entendre, qu'après les élections, on
se montrera plus ou moins Eévère, selon les services
que les délinquans ou leur famille auront pu rendre 4
la bonne politique. De cette façon, ce n'est pas; seule
ment l'administration, c'est la justice qui travaille aux
succès des candidats ministériels. Nous avons reçu, de»
dix départemens, des lettres où des faits de ce genr»
sont racontés.
— Parmi les députés nommés en 4842 par l'oppo
sition, et qui, à peine arrivés à Paris, se sont ralliés
au ministère, il n'en est aucun peut-être don| la con
version ait été aussi brusque que celle de M. Duthil,
et accompagnée d'aussi curieuses circonstances. Né-
rac avait pour représentant M. Barsalôu, beau-frèrei
de M. Dumon, que l'administrai ion appuyait de tou
tes ses forces. En 4842, il se forma contre M-. Barsa-»
lou une coalition de toutes les oppositions et M. Du
thil devint le candidat de cette coalition. Il fut dono
élu non seulement par l'opposition modérée, mais par
les radicaux et par 16s légitimistes auxquels il fit les
plus belles promesses! Peut-être en faisant ces pro
messes, M. Duthil.était-il sincère. Ce qu il ya do
certain, c'est qu'il les oublia dans la malle-posie, et
qu'en arrivant à Paris, il s'en tint pour absolument
dégagé; mais voici le plus piquant. Le sous-préfet da
Nérac, par ordre du ministre de 1 intérieur, avait
soutenu de son mieux M. Barsalôu. Pour prix de sa
conversion, M. Duthil demanda et obtint que le sous-
préfet fût puni de son obéissance et envoyé, contr»
son gré, dans une autre sous-préfecture. G est ua
exemple et une leçon qui profitera, nous i esparuna,
aux fonctionnaires trop dévoués.
Qaoi qu'il eh soit, il n 'est plus question de M. Barsa*
lou, et M. Duthil est bien et dûment aujourd'hui la
candidat ministériel. La coalition qui, en 4842,.avait
élu ce député, doit tènir à honneur de lui infliger un
juste châtiment, et nous savons qu'elle s'y prépare.
Pour notre part, nous appuierons tout candidat dent
elle fera choix en espérant qu'elle aura la main plus
heureuse qu'en 4842.
Le Compter de Loir et Cher signale les manoeuvres
qui sont employées à Romorantin et à Vendôme ea.
faveur des candidats ministériels. <■
t Les agens-voyers, dit-il, ontlemot d'ordre. Vçuâ
- 64 -
LES GRANDS DANSEURS DU ROI.
coton ; ils ont maintenant pour premier un insulaire qu'on
nomme l'Anglais à la fraise jaune. On en faisait beaucoup
de récit ; il ne me va pas, mor : c'est fort, c'est nerveux, ça
a du jarret, aussi ça plaît assez au parterre ; mais pour les
loges et les femmes qui penchent plus pour le galant et la
grâce, elles ont toujours leur idole qu'on ne leur z'a pas ren
due. Savez vous , lieutenant, que du départ d'une certaine
personne, on dit qu'il y a sept ou huit bourgeoises qui ont
fait des maladies ?
— Monsieur Pompée, ■—répondit Dupuis en riant, -— je
suis assez riche pour acquitter mes dettes, mais pas assez pour
payer des flatteurs ; ainsi, cette gasconnade, si vous le per
mettez, passera par dessus le marché. Sur ce, beaucoup de
succès dans vos amours, et à revoir.
Pompée, au dénoument de cette conversation, salua aussi
respectueusement qu'à son début ; il était donc encore en
position quand Dupuis revint sur ses pas et lui dit :
— Cet Anglais, est-ce qu'il danse tous les soirs?
— Absolument, les mêmes jours et aux mêmes heures, —
répondit Pompée, ge servant d'une réticence de fort bon
goût.
— Merci, mon cher, repartit Dupuis d'un air réfléchi, et
ainsi finit la rencontre.
CHAPITRE XXXI.
OU DUPUIS RETOURNE EN ARRIÈRE. — DE L'ANGLAIS A LA FRAISE JAUNE. — D'UNE VENGEANCE DE FEMME,
»*CN BOUQUET ET DE SES CONSÉQUENCES.
Quoiqu'habitant Versailles, Dupuis ne s 'était pas défait
de son logement de la rue des Fossés-du-Temple ; outre qu'il
lui était commode, d'avoir à Paris un pied-à-terre, il tenait à
ce petit réduit, où, jusqu'à l'époque de sa nouvelle fortune,
s'était concentrée presque toute sa vie.
Il eut à se féliciter, ce jour-là, de s'être ainsi ménagé un
asile. Surpris, presqu'aussitôt après sa rencontre avec Pom
pée, par un de ces orages parisiens qui ont toujours l'air de
commencer le Déluge, en vertu du décorum militaire, qui or
donna au porteur d'un uniforme de se laisser stoïquement
mouiller jusqu'aux os, il fut transpercé de si belle manière,
qu'à part une urne qu'il n'avait pas sous le bras, on l'eût pris
plutôt pour un Fleuve mythologique que pour un officier de
l'armée du roi.
Il avait en sa mansarde une petite provision de linge et
ses anciens habits de ville; il alla donc y refaire une toi
lette, et comme la pluie continuait toujours de tomber à tor-
rens et que l'atmosphère s'était considérablement refroidie,
il alluma du feu, se fit apporter à manger de chez le traiteur
qui le servait à une autre époque, enfin reprit si bien tout
le trantran de son petit ménage d'artiste, que, pour un-mo
ment, il put se croire redevenu le Dupuis d'autrefois.
Ces sortes d'excursions dans le passé ont leur charme,
mais un charme un peu douloureux : ce sont de ces plaisirs
qui, comme les bons vins, tournent à l'amer quand on les fait
trop durer. Le temps s'était fixé à la pluie pour le reste de la
soirée; le jour allait déjà baissant ; ainsi, chez notre solitaire,
tout poussait au noir et au sombre, et il était vraiment dési
rable qu'il sê secouât en quelque manière, afin de changer
le cours de ses idées.
Pour triompher de cette lugubre disposition, Dupuis
. pensa à aller finir sa soirée dans quelque théâtre. Il n'y en
avait pas de plus proche que celui de ses anciens exploits;
et d'ailleurs, son successeur, cet Anglais à la fraise jaune,
lui trottait malgré lui dans la tête. S'enveloppant donc d'un
manteau que comportaient à la fois et l'état du ciel et son
désir, facile à comprendre, de garder l'incognito, pour plus
de sûreté, il se disposait à monter dans une de ces loges du
cintre, fréquentées surtout par des gens qui ne s'occupent
que de leurs affaires, à savoir les amoureux. Mais comme il
se glissait furtivement le long du corridor, il fut avisé par
Nicolet, qui toujours errait par son théâtre, et alors il n'y
eut pas à s'en défendre, il fallut qu'il allât s'installer danr là
loge de la direction.
, Cette place pourvoyait, au reste, assez bien à sa crainte
d'être reconnu. Boudoir élégant et coquet qui n'était pas
sans donner quelques appréhensions jalouses à Mme Nicolet,
la loge de M. le directeur était située derrière la toile, un
peu en arrière de l'avant-scène, presque de plain pied avec
je théâtre, et, en s'y asseyant, le dos tourné à la salle, on
était, pour celle-ci, à peu près hors de vue.
Tout en conduisant son hôte à ce secret asile, Nieolet lui
avait beaucoup parlé de l'Anglais à la fraise jaune, qu'il
avait l'air de regarder comme une acquisition excellente; il
lui vanta aussi une nouveauté de son invention qui, disait-il,
faisait fureur. Or, voici ce que l'habile directeur appelait
une nouveauté.
61 -
i UiJlWjlt" 1
FEU/LLETON DU CONSTITUTIONNEL.
— Cependant, Madame, —>> repartit Dupuis dans la der
nière stupéfaction, — il est impossible que je sois pour vous,
à ce point méconnaissable ; du reste, je puis prouver que je
n'ai point rêvé cette lettre. Elle ne me quitte jamais, tant elle
m'est chère, et vous reconnaîtrez peut-être votre écriture, si
vous ne vous rappelez point mes traits.
Parlant ainsi, Dupuis avait pris dans une des poches de sa
veste des tablettes de nacre de perle et en avait tiré la pré
cieuse épître que la marquise prit de ses mains avec quel-
qu'empressement.
Après y avoir jeté un coup-d'œil, cette singulière femme,
du plus grand sang-froid du monde, la roula dans ses beaux
doigts, et, l'ayant réduite au plus petit volume possible, elle
la serra dans cette bienheureuse place, où Mlle d'Hautefort
défiait le dévêt roi Louis XIII de venir prendre ses billets,
quand elle ne voulait pas qu'il les lût.
— En vérité, Madame, ce badinage est bien cruel, —dit
alors le pauvre amoureux qui ne pouvait croire à un sérieux
larcin, — veuillez, je vous en supplie, me restituer cette
lettre et en même temps me faire connaître par où j'ai pu mé
riter vos dédains et votre outli.
— Monsieur Dupuis, dit alors la marquise, ne marchan
dant plus à le reconnaître sitôt qu'elle le vit désarmé,—vous
êtes devenu, à ce que je vois, officier, et de plus gentilhom
me , si je suis bien informé ?
— Oui, Madame; ainsi que j'avais l'honneur de vous le
marquer dans une lettre qui vous est parvenue, j'espère, une
grande révolution s'est faite dans ma yie.
—Eh bien I moi, Monsieur, il s'en est faite une non moins
grande dans mes sentiments : en vous, j'appréciais le premier
danseur du monde et j'aurais fait peut-être la folie de me
donner à lui, mais pour les officiers de hasard, les gentils
hommes de contrebande, et les mignons de la du Barry, dis
pensez-moi de vous dire ce que j'en pense et les mouvemens
secrets que mon cœur a pour eux.
Cela dit, la marquise lui tourna le dos, et elle profita de
ce que la foule lui revenait pour feindre une grande curiosité
et un grand intérêt relativement à la personne qui venait de
s'évanouir; chacun s'empressant de répondre à ses questions,
force fut au malheureux Dupuis de boire sa honte et de sè
retirer sans pouvoir ajouter un mot.
CHAPITRE XXIX.
JEUNESSE ET INNOCENCE DE DUtUlS. — DU COEUR DES FEMMES ÉT DÉ LEUR CHAPITRE DANS £E LITRE DES Caractère!.
Après le terrible coup qu'il venait de recevoir, Dupuis es
saya bien encore de se faire illusion. Il supposa qu'au fonddu
traitement que lui avait infligé son inhumaiae, il y avait plus
de dépit que de vrai dédain. « Sans doute, — pensa-t-il, —
» elle m'en veut de ce que jé n'ai pas tout quittépour voler à son
» rendez-vous : peut-être aussi se figure-t-elleque je l'ai sa-
» crifiée dans mon entrevue avec Mme du Barry; qui sait mê-
» me si elle ne serait pas jalouse?» Et comme, relativement
à tous ces griefs, il se sentait parfaitement net et irréprocha
ble, il ne désespéra pas qu'une longue lettre justificative dans
laquelle il expliquerait toute sa conduite et tous les mobiles
qui l'avaient dirigé ne parvînt à conjurer la colère de sa belle
ennemie.
Mais ni cette lettre ni vingt autres démarches expiatoires,
dans le détail desquels il serait trop long d'entrer, ne furent
efficaces pour le soulagement du triste amoureux ; du reste, il
aurait mieux dû connaître sa marquise depuis le temps qu'il
la pratiquait.
Il ne savait pas, le sot garçon, que les femmes de vive itna^
gination, comme celle-ci s'était montrée à lui, se laissent
surtout charmer par l'extraordinaire. Des officiers, des gen
tilshommes , en un mot des gens de leur monde, les gran
des dames en trouvent sur leur chemin autant et plus
qu'elles ne veulent. 11 n'y a donc pas pour elles tant à s'em
presser de ramasser ces brillantes fleurs de leur jardin, qui y
poussent-comme naturellement et dont elles savent par cœur
et les couleurs et les parfums. Mais que, dans une promenade
hors de leur enclos , vienne à se rencontrer la plus humble
fleur des champs, pour le seul fait d'être nouvelle etinconnue,
la pauvre plante va fixer leurs regards, et elles auront aussitôt
la passion d'en avoir une guirlande pour leur prochaine pa
rure; C'était là l'histoire de Dupuis. Par sa sauvagerie* et la
délicatesse prodigieusement inattendue de ses sentimens, il
avait commencé, par frapper l'attention de la brûlante Ita
lienne; puis, par la commisération et ce vif intérêt qu'inspire
toujours un malheur immérité et bravement soutenu , elle
avait achevé de s'attendrir.
Maintenant, que faisait ce maladroit? Il dérangeait tout le
roman, se greffait de noblesse et de gentilhommerie, et ayant
par devers lui la belle recommandation de la du Barry, venait
dire à la fantasque dame : me voilà fait comme tous les gens
que vous connaissez; à votre taille et hauteur, et, pour me
cueillir, vous ne serez pas même dans la nécessité de vous
baisser/ .
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 86.18%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 86.18%.
- Collections numériques similaires La Grande Collecte La Grande Collecte /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "GCGen1"
- Auteurs similaires La Grande Collecte La Grande Collecte /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "GCGen1"
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k6674843/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k6674843/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k6674843/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k6674843/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k6674843
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k6674843
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k6674843/f1.image × Aide