Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1846-06-10
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32747578p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 124053 Nombre total de vues : 124053
Description : 10 juin 1846 10 juin 1846
Description : 1846/06/10 (Numéro 161). 1846/06/10 (Numéro 161).
Description : Collection numérique : Grande collecte... Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail
Description : Collection numérique : La Grande Collecte Collection numérique : La Grande Collecte
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k667474r
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
MERCREDI 10 JUIN 1846.
EDITION »E PARIS.
PUBLICATIONS NOUVELLES
INSÉRÉES DANS LE JOURNAL
. chaque ahbée. -
BIBLIOTHÈQUE BE ROMANS NOUVEAUX
CONTENANT :
'• 42 .vol. de Romans nouveaux;
Bibliothèque Choisie, 2 ou 3 vol. ;
Magasin Théâtral, 1 ou 2 vol.
(contenant les meilleures pièces de Ihcâlrc de
l'année.)
Tous ces volumes pourront être brochés et reliés.
Pour ehacun des volumes de la Bibliothèque Choisie,
pour les volumes du Magasin Théâtral, et pour les
volumes réunis de chaque Roman nouveau, les
abonnés auront droit à une couverture spéciale,
avec titre et tablé des matières.
46 volume^ et 4 volumes d'Annuaires.
20 volumes par année.
URNAL POLITIQUE, LITTERAIRE, UNIVERSEL.
onne à Pans, à l'Administration du Journal, rue de Valois-Palais-Royal, n° 10, Maison de M. Pape.
NUMERO 161.
QUATRE ANNUAIRES*!
Quatre VOLUMES séparés et brochés, ctitt*un
de 400 pages au moins.
EN JBIK DE CHAQUE ANHÉB.
ANNUAÏR.E des Lettres, des Arts et desïhéâtre»
EN SEPTEMBRE DE CHAQUE ANNÉE.
ANNUAIRE roi.iTintE (Députés, Pairs, Instruc
tion publique, Clergé, Armce et Mari eu 1 }.
EN DÉCEMBRE DE CHAQUE AKlfÉE.
ANBÎITAIK.E du Barreau, des Sciences, de l'A
griculture et de la Médecine.
EH MARS DE CHAQUE ANNÉE.
ANNUAIRE des Chemins de fer , des Trnyau*
publics, de la Banque, de l'Industrie et du GonP
merce.
Ces Annuaires réunis remplaceront VAhnanach
Royal, VAlmanach du Commerce et les Annuaires
spéciaux et formeront une précieuse collection.
16 volumes et 4 volumes d'Annuaires,
20 volumes par année. -
S'adreMer franco, pour la Rédaction,
- à M. IU krbuau, Gérant.
Les articles déposés ne seront pas rendus.
ON S'ABONNE BAHS LES nÉPARTEMENS, CHEZ les DinECTECIlS des POSTES ET A toutes LES BESSACElUESj
a lokdbes, che% MM. Cowie et fils, Sainte-Anne 's Lane;
a Strasbourg, chez Alexandre, pour l'Allemagne.
Les Abonnement commencent les 1« et 16 de chaque mois.
PARIS.
trois mois
SIX MOIS :
un an
13 fr.
20
5-2
DÉP ARTBKEKSt
trois mois l.'ifr.
sixmois: 50
un an... 00
ETRAKQER.
trois mois 20 fr.
".six mois 40
nin an 80
ON reçoit les annonces et avis a insérer , tous les jours, de 10 heures du matin à 4 heures,
a 1 administration générale des Annonces, placesde la Bourse f 8,
toute insertion doit être agréée par le gerant.
Pour les Annonces ainsi que pour les Abonnemens, on reçoit des mandats sur, Paris.
S'adresser franco, pour tout çe
qui concerne l'Administration*
à M. Robin , Directeur.
Ou a pu remarquer que le Constitutionnel,
depuis l'agrandissement de son format, était im
primé en caractères neufs. Seulement, comme
les ouvriers fondeurs en caractères viennent de
faire grève, il en est résulté un retard dans les li
vraisons qui devaient nous être faites, et, pen
dant quelques jours encore, quelques articles se
ront, par nécessité, composés en caractères ayant
déjà servi. Hais toutes nos BIBLIOTHEQUES
sont imprimées en caractères neufs.
PARIS, 9 JUIN.
•' La discussion sur les crédits de l'Algérie a
continué aujourd'hui : elle a conservé lé même
caractère qu'hier ; ce n'est point un débat,
mais une série de; discours sans rapport, sans
conaexion aucune entre eux. Chacun des
orateurs est venu émettre ses opinions,, ses
idées personnelles : critiquer ou approuver,
en se servant souvent des documens qui
avaient appuyé les opinions diamétralement
opposées à la sienne.
Il est remarquable, en effet, que la question
algérienne a été si bien étudiée par le gouver
nement, avec une telle nnité de vues et d'i
dées, et une exactitude si grande, que les do
cumens fournis aux chambres par l'admi
nistration sont une mine inépuisable où les
Opinions opposées puisent avec une égale
abondance des preuves de toute espèce qui
se contredisent et sa détruisent mutuelle-
ment.
, M. Desmousseaux.de Givré est venu ter
miner le discours qu'il avait commencé hier,
et avec l- 1 môme succès. Hier, les banquettes
étaient vides, aujourd'hui elles étaient plei
nes; hier, l'orateur paHait dans le désert,
aujourd'hui, au milieu du plus effroyable ta
page; an demeurant, le résultat était le même.
- M. de Tocqueville a prononcé un discours
remarquable à plus d'un titre, ma3s empreint
du défaut habituel de l'orateur, une logi
que plus apparente que réelle. Personne n'a
mïetnt fait ressortir que M. de Tocqueville le
vice capital de notré politique en Algérie,
l'absence complète de direction. L'orateur a
fort bien caractérisé la situation en disant
que ce n'était ni les chambres, ni le gouver
neur-général, ni le ministère, maie simple
ment le hasard'qui avait présidé jusqu'ici
aux destinées de notre colonie. Il a stigmatisé
les vacillations, les tâtonnemens du gouver
nement ou plutôt son manque absolu d'i
dées et de volonté , son ignorance com
plète des élémens les plus simples du pro
blème: Les rapports ministériels à la main il
a fait voir que le ministre de la guerre ne
connaissait pas l'étendue de notre domina
tion, l'état réel de la population arabe et de
la population européenne, ni même la super
ficie, l'origine et la nature des terres qu'il
«st chargé de distribuer aux colons; la lutte
tantôt ouverte, tantôt cachée entre le ca
binet et le gouverneur-général; la conduite
peu digne du ministre n'osant désavouer
ni rappeler le maréchal, et le faisant at
taquer par ses journaux, puis lui prodi
guant ensuite les éloges officiels Tçrsqu'uné
démission offerte lui fait.redouter la présen
ce dans la chambre dé l'homme qui connaît le
mieux les misères et les expëdiens de notre
; politique en Afrique ; les désordres adminis
tratifs et financiers, les petites querelles, les
mesquines rivalités de la bureaucratie im
plantée prématurément en Afrique; M. de
Tocqueville a exposé tout cela avec une fran
chise , une netteté, qui ont fait une vive im
pression sur la chambre.
j Mais nous ne saurions donner les mêmes
: éloges à la seconde partie du discours de l'ora-
; teur , celle où il a voulu indiquer le remède
à tous ces maux. M. de Tocqueville croit que
'les services du gouverneur-général sont dé-
sormaisinutiles; l'ignorance, le manque d'i
dées, le défaut d'unité , voilà ce qu'il repro
che au cabinet. En conséquence, il recom
mande la création d'un ministère spécial;
; c'est-à-dire qu'il veut transporter à Paris ce
; pouvoir si fâclieux du gouverneur-général; à
: Paris, c'est-à-dire loin des localités, hors de
: toute possibilité d'obtenir aucun renseigne
ment précis, et d'agir jamais en connaissance;
de cause, et sans dire, ce qui était pourtant le
fond de la question; comment le nouveau mi
nistre aurait plus de lumières, et serait plus
compétent à lui seul que tous les ministres
actuels;
M. Gauthier de Rumilly a fort bien fait
ressortir cette contradiction de M. de Toc
queville. Substituer au gouverneur-général
un ministre spécial, c'est déplacer la difficul
té, ce n'est pas la résoudre ; c'est même en
reculer la solution. C'est substitaer un novice
s à un homme expérimenté, et lui ôter, en lui
enlevant la vue des lieux et la pratique, des
hommes, tout moyen de s'éclairer. Où d'ail-
: leurs trouvera t-il les agens qu'il emploiera?
* chacun des différens services sera,sous lenom
de direction, un petit ministère : le ministre'
de l'Algérie ne sera que le chef responsable de
- sept ou huit autres ministres subalternes, qui
(tous expédieront de Paris des ordres plus ou
! moins applicables à l'Algérie.
Il serait plus économique et plus sûr de ré
partir entre les ministères les différens servi--
ces de l'Algérie, ainsi que cela a déjà été
fait pour quelques uns. C'est de Pari», a dit
M. de Rumilly, que doit venir la direction,
i c'est en Algérie qu'on doit exécuter. Le, jour
où le ministère aura des vues à lui, un sys
tème arrêté, un plan de conduite, et le cou
rage de faire exécuter ce qu'il veut, toutes
: les difficultés actuelles disparaîtront, et avec
elle la pénisée du ministère spécial, qui est
le symptôme du mal et n'en est pas le re
mède.
M. de Carné est venu ensuite célébrer, à
! propos de l'Algérie, l'action de la Providence
; dans les affaires humaines. La chambre a pa
ru peu comprendre le rapport de cette homé
lie, débitée d'une voix retentissante, avec la
question dont il s'agissait. M. de Tracyest
venu prononcer également un discours dont
nous n'avons pas bien saisi l'objet. L'hono
rable député est l'adversaire absolu de la co
lonisation : il la croit injuste et impossible; il
voudrait l'évacuation de l'Algérie. A quoi
bon alors, avec des idées aussi tranchées, ve-
: nir se livrer à une critique minutieuse de tout
ce qui se fait et ne se fait pas en Algérie? Si
la colonisation est mauvaise en principe, de
quelque façon qu'on procède, on aura tou
jours tort de l'entreprendre.
ÂM. de Tracy a succédé M. Ferdinand
Barrot, dont la parole claire et lucide a tenu
plus d'une heure la chambre attentive. M.
i Ferdinand Barrot est partisan de la colonisa
tion ; il la croit bonne en principe et réalisa
ble dans la pratique. De plus, il a vu les
lieux, il a étudié toutes les question^ qui se
rattachent à l'Algérie avec un soin spécial et
d'une façon approfondie. Aussi, son discours
lumineux, substantiel, rempli d'argumens
i nets, et précis, nourri de faits positifs, a-t-il
: reçu de la chambre le plus favorable accueil.
M. Ferdinand Barrot a exposé sur la co
lonisation, sur le système à suivre pour la
réaliser, sur les progrès lents, mais positifs,
que l'on pouvait accomplir chaque année
sans surcharger l'Etat, les idées les plus sat-
, nés et les plus justes. Il s'est livré en înême
temps à une critique modérée, trop modérée
peut-être, de l'incurie, des hésitations et des
mille ignorances de l'administration, mais
plusieurs des faits qu'il a cités ont produit
une vive impression. M. Ferd. Barrot n'a
point abordé la questidn du ministère spé
cial ; mais ce qu'il croit nécessaire avant tout
à l'Algérie, c'est l'introduction et la régula
risation d'institutions civiles qui préparent
graduellement l'assimilation complète de la
colonie avec la mère-patrie.
Nous ne pouvons qu'applaudir au vœu é-
mis par l'orateur en terminant, que l'esprit
de parti ne s'emparât pas de cette question
d'Algérie, si vitale pour la France^ et que
chacun l'abordât, ' en dehors de toute préoc
cupation politique, et avec le sincère désir
d'accomplir le plus tôt possible cette grande
œuvre nationale de la colonisation algé
rienne.
Les journaux anglais d'hier nous arrivent
par voie extraordinaire Si l'on en croit le Times,
les jours du ministère sont comptés, et sir Robert
:Peel va tomber en minorité à la chambre'des
communes, soit sur la question du bill de coërçi-
: tion pour l'Irlande, soit sur la législation des
sucres :
« Pour échapper au danger gui le menace, il faut
qu'il fasse une nouvelle roncession à ses adversaires.
Il peut retirer le bill de coërcitioa, et, avec l'appui de
ses anciens amis les protectionistes, livrer bataille
aux whigs sur la question des sucres ; mais il est cer
tain qu'il sera vaincu dans la question irlandaise, s'il
persiste. En effet, comme il n'a pu obtenir la première
lecture du bill qu'avec l'appui des whigs, il semble
évident qu'il ne pourra obtenir la seconde si cet ap
pui vient à lui manquer. Il suffira aux protectionis
tes de le laisser seul avec le petit nombre de ses par
tisans personnels contre toute la phalange des whigs
qui est de plus du double.
» Tel est le danger : cependant nous pensons que
sir Robert Peel restera fidèle au bi'.l de coercition, et
qu'il aimera mieux tomber, comme tant d'autres avant
lui, sous le poids d'une difficulté irlandais^. Nous ne
pouvons dire jusqu'à quel point cette détermination
serait prudente, mais nous devons reconnaître qu'elle
6erait convenable. Ni le ministre, ni ses amis ne doi
vent désirer prolonger une lutte aussi inégale que
celle à laquelle ils ont été exposés depuis l'adoption
du bill des céréales et des douanes dans la chambre
des communes. Un ministère ne peut être ainsi à la
merci de ses amis ou de ses adversaires naturels sur
la moindre question. Ainsi, dans quelques jours, le
sort du ministère actuel sera décidé,s'il ne l'est pas dès
à présent.
. » Avant la fin de la semaine nous pouvons voir la
formation d'un autre cabinet et le retour au pouvoir
d'un parti qui, quels que soient ses défauts, arrivera
avec le prestige d'une victoire récente et long-temps
contestée, et le mérite d'avoir contribué loyalement
aux succès d'une mesure la plus large et la plus im
portante des temps modernes. ■>
On a parlé du pillage, par les Maures de la
côte marocaine, d'un navire de commerce anglais,
et du combat qu'ils ont livré aux embarcations
d'un brick de guerre envoyé de Gibraltar pour
recueillir les débris du navire. Nous recevons au
jourd'hui de Malaga des détails précis sur cette
affaire.
« Dans la matinéè du 30 avril, le brick anglais the
Ruth, capitaine Newham., allant de Messine à Liver-
pool. retenu par les, calmes à la hauteur.de Melilla,
en face du cap Très Forças, fut assailli par plusieurs
embarcations marocaines, qui forcèrent l'équipage à
abandonner le navire, et à chercher un refuge dans
les canots. Quelques jours après, l'équipage du Ruth
fut déposé à Gibraltar par un navire qui l'avait re
cueilli en mer:
» Le gouverneur de cette place ordonna immédia
tement qu'un bâtiment de guerre serait envoyé à la
recherche des pirates et de leur prise, et le bnck de
S. M. britannique, the Phantom, partit pour le cap
Tres-Forcas, pointe située à une lieue environ de la
forteresse espagnole de Melilla, dans la province ma
rocaine du Riff.
Le Phanlom trouva le Ruth échoué à peu de distance
du point où il avait été pris, et le commandant Ni-
cholson se mit " en devoir de procéder au sauvetage
des marchandises et de l'armement de ce navire;
mais, aperçu par les Arabes, son canot fat attaqué et
obligé de renoncer à se rendre à bord du RutA, après
avoir vu son second blessé à côté de lui.
» Toutèsies embarcations du Phantom furent alors
mise* à la mer, et avant de parvenir à leur hut, les
Anglais eurent a soutenir une vive fusillade avec les
Maures, qui dut causer de grandes pertes à ces der
niers, car, de son côté, l'équipage du Phantom eut un
midshipman tué et dix hommes blessés. Il ne se re
trouva à bord que fort peu de marchandises ; mais on
a pu rapporter à Gibraltar presque tous les agrès et
apparaux que les Maures n'avaient pas eu le temps
d'enlever au Ruth, dont la coque a été laissée sur la
plage.
» M. Nicholson qui, ainsi que son équipage, a
montré beaucoup de décision dans cette affaire, a im-
méd atement écrit par l'intermédiaire du commandant
de Melilla au gouverneur de la province du Riff, pour
se plaindre de cet acte de piraterie. Mais il est nors
de doute que cette démarche n'aura aucun succès.
Les habitans nomades de ces plages ne reconnaissent
Sas plus l'autorité des délégués de l'empereur du
[aroc que celle .de l'empereur lui-même. »
Le paquebot Tweed est arrivé des Indes occi
dentales. Les bâtimens de guerre américains
dont les noms suivent étaient à l île des Sacrifi-
(Xfcjlfumberland, 56; Potomac, 56; Raritan, 56;
Hliwfluth, 24; John-Adams, 24; Somers, i 4. Ces
navires attendaient le commencement des hosti
lités sur le Rio-Bravo.
L'intention du commodore américain est d'at-
taquer alors Saint-Jean-d'Ulloa et les forts de
Vera-Cruz. Oa dit que les Mexicains travaillent
sans relâche à ce fort, et que l'escadre américaine
ne pourrait s'en emparer s'il était bien défendu.
Nous n'avons point de nouvelles de Lisbonne
postérieures au 30 mai ; mais on en a du 31 de
Porto. Yoici ce qu'on écrit de cette ville au il/or-
ning-Chronicle :
« Des renforts arrivent de tous les côtés à Tannée
des insurgés, surtout de Tras-os-Montès, où les pau
vres fermiers, écrasés par lès impôts de fa compagnie
vinicole, ont enfin résolu de se joindre au cri popu
laire, en sollicitant le redressement de leurs griefs.
L'ère de 1832 est revenue, etOportose trouve en état
de siège. Villa-Nova, où les Anglais pnt des ateliers
énormes, a été abandonné aux vainqueurs. Nous
sommes à leur merci, nous n'avons de refuge qu'au
près de notre excellent consul, mais son pavillon ne
peut nous protéger tous ; il n'y a pas un bâtiment de
guerre anglais dans le port. »
" —On disait à Madrid, le 4 juin, que plusieurs
juntes insurrectionnelles, satisfaite* de la der
nière recomposition du cabinet, offraient leur
concours aux nouveaux ministres. S'il en était
ainsi, la question se trouverait considérablement
simplifiée pour le moment; mais il restera en
suite la question de réforme et de garanties, lors
que les cortèi se rassembleront, à supposer que
l'on parvienne à opérer facilement la pacification
complète du pays
Le Morning-Chronicle confirme une nouvelle à
laquelle nous n'avions pas pu croire, c'est l'envoi
à Buenos Àyres d'un nouvel agent anglais, M.
Hove, chargé par son gouvernement d'entrer en
arrangement avec Rosas De son côté, le gouver
nement français a confié à M. de Mareuil, l'ami
personnel de" Rosas, l'ennemi de Montevideo, la
mission de joindre ses efforts à ceux de M. Hove,
et de négocier avec Rosas. Quand on se souvient
que le dictateur n'a voulu entendre aucune pro
position raisonnable, et qu'il a mis, dans ses der
nières communications officielles, pour condition
préliminaire de toute négociation* le désaveu de
tous les actes des plénipotentiaires français et an
glais, on a peine à concevoir la détermination des
deux gouvernemens. Fallait il donc commencer
l'intervention pour la terminer d'une manière si
déplorable ?
Le Morning-Chronicle, qui a toujours été fa
vorable à Rosas et hostile à Montevideo, félicite
lord Aberdeen, et il ajoute cette phrase signifi
cative :
« L'aveu franc quoique tardif d'une erreur est
souvent une réparation suftisante de ses fâcheu
ses conséquences, et les démarches faites pour
réparer les résultats ruineux d'une politique sug
gérée par des paitis intéressés et appuyés par
des, pariisans seryiles, funt honneur à la promp
titude et à la sagacité du gouvernement. »
En attendant le débat qui aura lieu bientôt à
la chambre des députés sur les affaires du Liban,
nous continuons à recueillir les nouvelles qui
nous parviennent de ce malheureux pays La
ruine et l'extermination des chrétiens s'ackève
sous la direction de Chekib-Effendi. Leur désar
mement les a placés vis à vis des Druses, leurs
ennemis, qui sont restés possesseurs de leurs ar
mes, dans une situation désespérée. Aussi tous
les Maronites qui ont pu réaliser une somme
suffisante, ont quitté leur pays natal. La plas
grande part-e s'est réfugiée en Egypte. Ceux qui
n'ont pas pu quitter leurs terres, sont devenus
serfs des Druses. Ils travaillent pour leurs nou
veaux maîtres, sans recevoir de salaire. Un très
grand nombre a abjuré la religion catholique, et
a embrassé la croyance musulmane. Les plus
adroits se sont convertis au protestantisme; ils
ont fait profession de foi entre les mains du co
lonel Rose, consul britannique à Beyrouth.
La tyrannie des Druses se manifeste par les
actes les plus cruels envers céux qui sont restés
fidèles au catholicisme. On avait cru prévenir
leurs violences, en stipulant que les chrétiens pla
cés sous l'administration du kaïmacan druse pour
raient en appeler de ses sentences au pacha de
Saïda. Précaution vaine I Non-seùlement les Dru
ses, par leurs menaces, empêchent les chrétiens
de recourir k cette autorité, mais quand il arrive
Su'un Maronite, bravant les plus sinistres prér
ictions, porte au tribunal du pacha des griefs
incontestables, il ne manque pas de perdre sa
cause, et, à son retour; les Drusés lui font chère
ment èxpier l'audace d'avoir dénoncé leurs vio
lences. Ils étendent même leur vengeance sur
tous ses proches et tous ses amis. Dernièreniènt,
à l'occasion d'un fait semblable, toute? les pro
priétés des Maronites ont été ravagées' sur tout
l'espace compris dans un district. On annonce
enfin que les cheiks druses se sont assemblés ré-,
cemment, et ont décidé le massacre de tous les
chrétiens. Ainsi triomphent les intrigues des
agens anglais, et s'effacent les derniers vestiges
de l'influence française en Orient.
ÉLECTIONS.
Quarante-six électeurs de Montbéliard vien
nent, après coup, au secours de leur député, M.
Parandier, et écrivent une longue lettre pour
prouver que le tracé du Doubs n'est point, comme
on l'a dit, la cause principale de son élection.
« Le simple récit des faits, disent-ils, suffira pour
détromper ceux qui ont accueilli de bonne foi
une pareille accusation. »
Or, les faits, quels sont-ils ? Les voici 4'aprèl
les signataires de la lettre : « M. Victor Touran-
» gin, préfet du Doubs s écrivit il y a environ un
» an à plusieurs d'entre nous, que le zèle qu'il
» mettait dans la défense du chemin de fer par
» la vallée du Doubs était mal jugé ; qu'on 1 at-
» tribuait moins à son désir de faire prévaloir le
» meilleur tracé possible, qu'à celui de maintenir
» son frère à la députation; que cet état de cho-
» ses le gênait et que son frère, qui partageait sa
» manière de voir à cet égard, était décidé à don-
» ner sa démission. » Vous voyez bien que le tra
cé du Doubs n'est pour rien dans la démission
de M. Silas Touçangin. Est-il pour quelque
chose dans la nomination de M. Parandier? Pas
davantage, et en-voici la preuve : « Dans cette gi-
» tuation nous jetâmes les yeux sur M. Parandier
» que nous connaissions depuis loDg -temps.Elevé
» avec plusieurs d'entre nous, il avait rempli
» avec talent et intégrité les fonctions d'ingénieur
» des ponts et chaussées dans notre arrondisse-
» ment. Il est vrai qu'en le nommant nous espé-
» rions trouver en lui un homme capable de dé-
» fendre, avec intelligence et avec succès le tracé
» par la vallée du Doubs auquel il avait travail-
» ié comme ingénieur..... » En faut-il davantage,
et ne reste-t-il pas maintenant parfaitement éta
bli que le tracé du Doubs a été étranger au choix
de M. Parandier comme à la démission de M. Tou-
rangin?
Nous ne savons ce que fera aux prochaines
élections le collège de Montbéliard. Il est possi
ble qu'il persiste dans son calcul, et que, pour
la seconde fois, il sacrifie à l'intérêt local, bien
ou mal entendu, sa vieille opinion po'itiqne. Tout
— 28 —
LES GRANDS DANSEURS DU ROI.
ses hameçons. Quoique cet argent ne fût pas sien, de l'avoir
simplement dans sa poche, le grandissait d'une coudée ; c'est'
là en effet une des singularités de ce précieux métal, qu'à
l'apparence seule de le posséder, même un pauvre diable
prend de l'importance. Ajoutons que, pour un cas pressant,
n'ayant à rendre compte qu'en masse, notre comptable ne
se serait pas fait faute de frapper sur sa caisse un emprunt.
, — Eh bien 1—fit Dupuis, courant à lui dès qu'il l'aperçut,
—quelles nouvelles? J'ai cru vraiment qu'il vous était arrivé
quelque malencontre, tant il m'étonnait de n'avoir pas en
tendu parler de vous de toute la journée.
— Ah çàl mon garçon,—repartit Pompée,—vousvousima-
ginez donc qu'on n'a que vous à pènser? Les amoureux sont
de drôles de pistolets, ils se figureraient volontiers le Père-
Éternel ayant fait le monde en six jours rien qu'à leur in
tention.
— Enfin, êtes-vous parvenu à pénétrer jusqu'à la mar
quise, l'avez-vous vue, lui avez-vous parlé?
— Fichtre ! — repartit Pompée, — quel morceau que cette
déesse! quels yeuxl quelle taille ! et surtout quel ton !
— Alors elle vous a reçu? Et qu'avezrvous fait?
Certainement, qu'elle m'a reçu, et, je puis lfc dire, avec
affabilité et avec grâce. Du reste, une maison cossue, suisse,
laquais galonnés sur toutes les coutures, des enfilades d'ap
partenons comme à Versailles, et tout cela meublé dans le
dernier goût.
— Mais enfin,—dit Dupuis, que tout ce préambule faisait
bouillir, — le résultat de la conférence?
— Eh bien! — fit Pompée d'un air de négligence, —ça
c'est très bien passé.
— Comment! elle consent à me recevoir? — demanda le
danseur, tout haletant rien qu'à cette idée.
— Pas précisément, — répondit' le cauteleux sergent ; —
cela aurait souffert trop de difficultés.
— Qu'y a-t-il donc eu de décidé alors?
— .Mon cher, — reprit Pompée, continuant de tourner au
tour de là vérité, —cette femme, comme je vous disais, m'a
fait un accueil parfait; mais j'ai bien vu qu'il ne serait pas
absolument facile de l'intimider, si bien que n'espérant pas
de l'amener à la combinaison voulue, je mesuis dittllrie faut
cependant pas que tout se passe en belles paroles, et je tiens
à honneur à ce que, d'une façon ou d'une autre, ce pauvre
Dupuis tire parti de la circonstance:
— Enfin?— fit le danseur, dont la curiosité était poussée
au dernier degré.
— Enfin, et finalement,— répctaPompée,—puisqu'il n'y
avait pas moyen de se payer en nature, dam! j'ai tourné les
choses de manière à être au moins dédommagé en argent.
• — En -argent! — s'écria Dupuis avec une horrible an
goisse.
— Oh ! mon Dieu,—dit Pompée,— je nemesuis pas mon
tré exigeant; je savais vos intentions; c'était seulement pour
dire qu'elle n'aurait pas pris gratis son chocolat à vos
dépens.
—Vous lui ayez demandédel'argent?—reprit Dupuis d'un
ton annonçant une furieuse indignation prête à éclater.
— Oui,—fit négligemment le sergent,—jelui ai fait lâcher
vingt pistoles, qu'elle a, ma foi ! données de très bonne grâce.
Elle s'est montrée belle joueuse ; c'est une justice que je
lui rends.
— Monsieur Pompée ! vous êtes un misérable ! —dit alors
Dupuis, cessant de se contenir, et serrant avec force le bras
du sergent.
— Hein? —fit Pompée, relevant fièrement la tête; —vous
dites?
— Je dis que vous êtes un homme sans foi ni loyauté, et
quevous déshonorez l'uniforme que vous avez l'honneur de
porter !
— Saltimbanque, vous le prenez sur un ton à bientôt re
gretter les paroles incohérentes que vous prononcez.
— C'est justement ce que je désire, — répondit Dupuis,
prenant cette menace pour une provocation ; — et tout maître
d'armes que vous êtes, je compte bien vous donner une le
çon dont vous vous souviendrez.
— Toi, infirme?—dit le sergent du ton de l'aristocratie la
plus dédaigneuse,—et tu t'imagines que j'irai m'aligner avec
un sauteur de chez Nicolet? ,, •
— Ah! —fit Dupuis en se frappant la tête à deux mains de
désespoir, car les idées du temps le laissaient convaincu qu'il
venait de se heurter à un invincible préjugé. ,
— Ainsi voilà!—continua Pompée,—vous vous échauffez le
tempérament à rendre service à un blanc-bec, que vous ho
norez de votre société, et puis c'est sa manière de vous dire
merci.
— Cet argent, vous l'avez? — demanda alors le danseur
d'un air sombre, mais ayant au moins à la surface recouvré
son sang-froid.
— Ah! nous ne sommes donc plus si dégoûtés,—répondit
le sergent,— et nous voudrions bien le tenir, ce numéraire!
— Oui, il m'appartient ; je l'ai payé assez cher, et veuillez
me le remettre.
— Voilà, —dit Pompée en donnant à Dupuis les pistoles
roulées dans un fragment de billet doux.
Dupuis ouvrit convulsivement le papier, et, après avoir
rapidement estimé la somme : •
— Mais il n'y a pas là vingt pistoles, — remarqua-t-il en
continuant de se modérer.
— J'ai ditvingtpistoles, entout,—repartit Pompée, —dix
pour vous, jeune homme, et dix pour le co-partageant? som
me totale est juste, si je sais bien compter.
— Ah oui,— dit ironiquement Dupuis,— nous avions fait
société pour l'exploitation de cette femme, vous êtes un digne
mandataire, Monsieur Pompée!
—C'est-à-dire,—reprit le sergent y mettant de la loyauté,
— que vous ne trouverez peut-être pas toutrà-fait votre part;
vous m'aviez montré hier tant de bonne volonté de m'obli-
ger, que, me trouvant un peu à court, j'ai légèrement écor
né le prêt...
«fan
25 —
FEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL.
— Son nom? —fit Dupuis avec une hésitation qu'on aime
à lui voir.
— Sans doute, son nom et son adresse, puisque j'y vais
de ce pas.
— Mais, mon cher, —objecta le danseur, —comment al
lez-vous faire pour pénétrer jusqu'à elle? car, enfin, chez des
femmes de ^a condition, il y a une étiquette.
— Sois donc tranquille, ça me regarde; tu dis qu'elle s'ap
pelle?
— Mme de Flavacourt,—répondit Dupuis en se décidant.
— Et que ce bel oiseau niche?
— Rue de la Chaussée-d'Antin,
— Marquise Flavacourt, rue Chaussée-d'Antin ; tu peux
être tranquille, mon trésor, pas plus tard que ce soir, je t'en
rendrai bon compte.
Parlant ainsi, le sergent serra la main de Dupuis d'une
manière significative, et ils se séparèrent là-dessus.
CHAPITRE XIII.
00 POMPÉE PARAIT SOXj'S UN NOUVEAU JOUR. — ET DE L'ADMIRABLE FAÇON DONT [SONT GÉRÉES LES AFFAIRES DE DUPlilS.
De toute manière, la visite que Pompée sè proposait de
faire nécessitait un peu de préparation. Il passa donc à sa
caserne, ou il commença par mettre sous enveloppe une
belle feuille de papier à placet, sur laquelle il eut soin de
ne rien écrire; il scella ensuite cette singulière dépêche
d'un magnifique cachet de cire rouge pour lequel il fit in-
dustrieusement servir l'empreinte d'un des boutons armo
riés de son habit. Cela fait, de toute la calligraphie dont il
était capable, il écrivitTadressede la marquise; puis, comme
le guerrier français aime en général à se présenter à son
avantage, il se vergeta soigneusement depuis les guêtres jus
qu'au tricorne, et s'étant ensuite donné un œil de poudre,
partit, muni de sa missive, pour se rendre à l'hôtel Flavar
court, où il ne tarda pas d'arriver. .
Frappant au carreau du suisse :
—Pour Mme la marquise, de la part de M. le maréchal duc
deBiron, colonel des gardes françaises, — dit-il en mon
trant sa lettre et en ayant soin de faire briller le cachet.
Le suisse leva son chapeau en signe de respectueuse dé
férence, et donna un coup de cloche pour avertir les laquais ;
en même temps il indiqua fort poliment à Pompée le perron
par lequel il devait entrer.
Sous le vestibule, le sergent fut reçu par un valet galon
né auquel il répéta son mot de passe. Le valet voulut alors
lui prendre la lettre pour la faire transmettre à sa maîtresse;
mais Pompée refusa de se dessaisir du paquet, disant qu'il
avait ordre de remettre en mains propres, et il glissa adroi
tement, qu'à être portée par un sergent du régiment de M. le
maréchal, et non par un de ses gens, cette dépêche faisaia
d'elle-même comprendre la conséquence dont elle était.
Se rendant à cette raison, le valet introduisit Pompé-
dans une vaste antichambre où une belle collection de gens
de livrée témoignait du bon pied sur lequel était la maison
de la marquise. Après une attente de quelques minutes, le
sergent se vit invité à passer dans un salon; là il fut reçu
par une femme de chambre, qui n'était pas Mlle Lucile, car
on pense bien qu'après ce qui s'était découvert de sa con
duite, cette effrontée n'avait pas fait beaucoup de séjour à
l'hôtel. La camériste ouvrit la porte d'une autre pièce, et
marquant son savoir-vivre, au lieu d'annoncer M. Pompée,
visite qui, de toute manière; eût pu paraître assez étrange à
sa maîtresse, elle dit, en y mettant quelque solennité : De la
part de M. le maréchal de Biron ; ce qui avait un peu meil
leur air, on en conviendra.
Seule, dans un boudoir tapissé de lampas bleu, la mar
quise était occupée à feuilleter quelques Nouvelles à la main,
dont elle avait fait acheter, dès le matin, Un exemplaire,
car les pamphlétaires qui rédigeaient ces insolëns Mémoires
secrets étaient de si adroits fureteurs, et si miraculeusement
informés, qu'il n'eûtpas été impossible que toute l'occurrence
de la nuit précédente y fût déjà consignée. Dieu merci! rien
n'avait transpiré; c'est donc, sans fâcheuse préoccupation que
Mme de Flavacourt reçut la prétendue lettre de il. le duc dè
Biron. Celui-ci, au reste, était assez de sa connaissance et
d'un âge assez mûr (1) pour qu'un envoi fait à'elle de sa
part n'eût rien de bien inattendu et de bien surprenant.
Le Pompée était pourvu d'un si bel aplomb, et doutait si
peu du succès de sa visite, que, pendant le temps employé
par la marquise à décacheter l'enveloppe et à chercher le
contenu écrit qui ne s'y trouvait pas, il s'occupait tranquil
lement à considérer la noble dame, se disant à lui-même :
■—Mille-z-yeux! une belle femme, et dire qu'elle s'est
montrée au naturel à ce sot de Dupuis l
— Mais, mon garçon,—dit à la fin la marquise,—à quoi
pense le maréchal, de m'envoyer du papier blano?
— Du papier blanc? répéta,Pompée ; je n'ai pourtant rien
(1) 69 ans. Né le S férrier 1701, mort en 1783.
EDITION »E PARIS.
PUBLICATIONS NOUVELLES
INSÉRÉES DANS LE JOURNAL
. chaque ahbée. -
BIBLIOTHÈQUE BE ROMANS NOUVEAUX
CONTENANT :
'• 42 .vol. de Romans nouveaux;
Bibliothèque Choisie, 2 ou 3 vol. ;
Magasin Théâtral, 1 ou 2 vol.
(contenant les meilleures pièces de Ihcâlrc de
l'année.)
Tous ces volumes pourront être brochés et reliés.
Pour ehacun des volumes de la Bibliothèque Choisie,
pour les volumes du Magasin Théâtral, et pour les
volumes réunis de chaque Roman nouveau, les
abonnés auront droit à une couverture spéciale,
avec titre et tablé des matières.
46 volume^ et 4 volumes d'Annuaires.
20 volumes par année.
URNAL POLITIQUE, LITTERAIRE, UNIVERSEL.
onne à Pans, à l'Administration du Journal, rue de Valois-Palais-Royal, n° 10, Maison de M. Pape.
NUMERO 161.
QUATRE ANNUAIRES*!
Quatre VOLUMES séparés et brochés, ctitt*un
de 400 pages au moins.
EN JBIK DE CHAQUE ANHÉB.
ANNUAÏR.E des Lettres, des Arts et desïhéâtre»
EN SEPTEMBRE DE CHAQUE ANNÉE.
ANNUAIRE roi.iTintE (Députés, Pairs, Instruc
tion publique, Clergé, Armce et Mari eu 1 }.
EN DÉCEMBRE DE CHAQUE AKlfÉE.
ANBÎITAIK.E du Barreau, des Sciences, de l'A
griculture et de la Médecine.
EH MARS DE CHAQUE ANNÉE.
ANNUAIRE des Chemins de fer , des Trnyau*
publics, de la Banque, de l'Industrie et du GonP
merce.
Ces Annuaires réunis remplaceront VAhnanach
Royal, VAlmanach du Commerce et les Annuaires
spéciaux et formeront une précieuse collection.
16 volumes et 4 volumes d'Annuaires,
20 volumes par année. -
S'adreMer franco, pour la Rédaction,
- à M. IU krbuau, Gérant.
Les articles déposés ne seront pas rendus.
ON S'ABONNE BAHS LES nÉPARTEMENS, CHEZ les DinECTECIlS des POSTES ET A toutes LES BESSACElUESj
a lokdbes, che% MM. Cowie et fils, Sainte-Anne 's Lane;
a Strasbourg, chez Alexandre, pour l'Allemagne.
Les Abonnement commencent les 1« et 16 de chaque mois.
PARIS.
trois mois
SIX MOIS :
un an
13 fr.
20
5-2
DÉP ARTBKEKSt
trois mois l.'ifr.
sixmois: 50
un an... 00
ETRAKQER.
trois mois 20 fr.
".six mois 40
nin an 80
ON reçoit les annonces et avis a insérer , tous les jours, de 10 heures du matin à 4 heures,
a 1 administration générale des Annonces, placesde la Bourse f 8,
toute insertion doit être agréée par le gerant.
Pour les Annonces ainsi que pour les Abonnemens, on reçoit des mandats sur, Paris.
S'adresser franco, pour tout çe
qui concerne l'Administration*
à M. Robin , Directeur.
Ou a pu remarquer que le Constitutionnel,
depuis l'agrandissement de son format, était im
primé en caractères neufs. Seulement, comme
les ouvriers fondeurs en caractères viennent de
faire grève, il en est résulté un retard dans les li
vraisons qui devaient nous être faites, et, pen
dant quelques jours encore, quelques articles se
ront, par nécessité, composés en caractères ayant
déjà servi. Hais toutes nos BIBLIOTHEQUES
sont imprimées en caractères neufs.
PARIS, 9 JUIN.
•' La discussion sur les crédits de l'Algérie a
continué aujourd'hui : elle a conservé lé même
caractère qu'hier ; ce n'est point un débat,
mais une série de; discours sans rapport, sans
conaexion aucune entre eux. Chacun des
orateurs est venu émettre ses opinions,, ses
idées personnelles : critiquer ou approuver,
en se servant souvent des documens qui
avaient appuyé les opinions diamétralement
opposées à la sienne.
Il est remarquable, en effet, que la question
algérienne a été si bien étudiée par le gouver
nement, avec une telle nnité de vues et d'i
dées, et une exactitude si grande, que les do
cumens fournis aux chambres par l'admi
nistration sont une mine inépuisable où les
Opinions opposées puisent avec une égale
abondance des preuves de toute espèce qui
se contredisent et sa détruisent mutuelle-
ment.
, M. Desmousseaux.de Givré est venu ter
miner le discours qu'il avait commencé hier,
et avec l- 1 môme succès. Hier, les banquettes
étaient vides, aujourd'hui elles étaient plei
nes; hier, l'orateur paHait dans le désert,
aujourd'hui, au milieu du plus effroyable ta
page; an demeurant, le résultat était le même.
- M. de Tocqueville a prononcé un discours
remarquable à plus d'un titre, ma3s empreint
du défaut habituel de l'orateur, une logi
que plus apparente que réelle. Personne n'a
mïetnt fait ressortir que M. de Tocqueville le
vice capital de notré politique en Algérie,
l'absence complète de direction. L'orateur a
fort bien caractérisé la situation en disant
que ce n'était ni les chambres, ni le gouver
neur-général, ni le ministère, maie simple
ment le hasard'qui avait présidé jusqu'ici
aux destinées de notre colonie. Il a stigmatisé
les vacillations, les tâtonnemens du gouver
nement ou plutôt son manque absolu d'i
dées et de volonté , son ignorance com
plète des élémens les plus simples du pro
blème: Les rapports ministériels à la main il
a fait voir que le ministre de la guerre ne
connaissait pas l'étendue de notre domina
tion, l'état réel de la population arabe et de
la population européenne, ni même la super
ficie, l'origine et la nature des terres qu'il
«st chargé de distribuer aux colons; la lutte
tantôt ouverte, tantôt cachée entre le ca
binet et le gouverneur-général; la conduite
peu digne du ministre n'osant désavouer
ni rappeler le maréchal, et le faisant at
taquer par ses journaux, puis lui prodi
guant ensuite les éloges officiels Tçrsqu'uné
démission offerte lui fait.redouter la présen
ce dans la chambre dé l'homme qui connaît le
mieux les misères et les expëdiens de notre
; politique en Afrique ; les désordres adminis
tratifs et financiers, les petites querelles, les
mesquines rivalités de la bureaucratie im
plantée prématurément en Afrique; M. de
Tocqueville a exposé tout cela avec une fran
chise , une netteté, qui ont fait une vive im
pression sur la chambre.
j Mais nous ne saurions donner les mêmes
: éloges à la seconde partie du discours de l'ora-
; teur , celle où il a voulu indiquer le remède
à tous ces maux. M. de Tocqueville croit que
'les services du gouverneur-général sont dé-
sormaisinutiles; l'ignorance, le manque d'i
dées, le défaut d'unité , voilà ce qu'il repro
che au cabinet. En conséquence, il recom
mande la création d'un ministère spécial;
; c'est-à-dire qu'il veut transporter à Paris ce
; pouvoir si fâclieux du gouverneur-général; à
: Paris, c'est-à-dire loin des localités, hors de
: toute possibilité d'obtenir aucun renseigne
ment précis, et d'agir jamais en connaissance;
de cause, et sans dire, ce qui était pourtant le
fond de la question; comment le nouveau mi
nistre aurait plus de lumières, et serait plus
compétent à lui seul que tous les ministres
actuels;
M. Gauthier de Rumilly a fort bien fait
ressortir cette contradiction de M. de Toc
queville. Substituer au gouverneur-général
un ministre spécial, c'est déplacer la difficul
té, ce n'est pas la résoudre ; c'est même en
reculer la solution. C'est substitaer un novice
s à un homme expérimenté, et lui ôter, en lui
enlevant la vue des lieux et la pratique, des
hommes, tout moyen de s'éclairer. Où d'ail-
: leurs trouvera t-il les agens qu'il emploiera?
* chacun des différens services sera,sous lenom
de direction, un petit ministère : le ministre'
de l'Algérie ne sera que le chef responsable de
- sept ou huit autres ministres subalternes, qui
(tous expédieront de Paris des ordres plus ou
! moins applicables à l'Algérie.
Il serait plus économique et plus sûr de ré
partir entre les ministères les différens servi--
ces de l'Algérie, ainsi que cela a déjà été
fait pour quelques uns. C'est de Pari», a dit
M. de Rumilly, que doit venir la direction,
i c'est en Algérie qu'on doit exécuter. Le, jour
où le ministère aura des vues à lui, un sys
tème arrêté, un plan de conduite, et le cou
rage de faire exécuter ce qu'il veut, toutes
: les difficultés actuelles disparaîtront, et avec
elle la pénisée du ministère spécial, qui est
le symptôme du mal et n'en est pas le re
mède.
M. de Carné est venu ensuite célébrer, à
! propos de l'Algérie, l'action de la Providence
; dans les affaires humaines. La chambre a pa
ru peu comprendre le rapport de cette homé
lie, débitée d'une voix retentissante, avec la
question dont il s'agissait. M. de Tracyest
venu prononcer également un discours dont
nous n'avons pas bien saisi l'objet. L'hono
rable député est l'adversaire absolu de la co
lonisation : il la croit injuste et impossible; il
voudrait l'évacuation de l'Algérie. A quoi
bon alors, avec des idées aussi tranchées, ve-
: nir se livrer à une critique minutieuse de tout
ce qui se fait et ne se fait pas en Algérie? Si
la colonisation est mauvaise en principe, de
quelque façon qu'on procède, on aura tou
jours tort de l'entreprendre.
ÂM. de Tracy a succédé M. Ferdinand
Barrot, dont la parole claire et lucide a tenu
plus d'une heure la chambre attentive. M.
i Ferdinand Barrot est partisan de la colonisa
tion ; il la croit bonne en principe et réalisa
ble dans la pratique. De plus, il a vu les
lieux, il a étudié toutes les question^ qui se
rattachent à l'Algérie avec un soin spécial et
d'une façon approfondie. Aussi, son discours
lumineux, substantiel, rempli d'argumens
i nets, et précis, nourri de faits positifs, a-t-il
: reçu de la chambre le plus favorable accueil.
M. Ferdinand Barrot a exposé sur la co
lonisation, sur le système à suivre pour la
réaliser, sur les progrès lents, mais positifs,
que l'on pouvait accomplir chaque année
sans surcharger l'Etat, les idées les plus sat-
, nés et les plus justes. Il s'est livré en înême
temps à une critique modérée, trop modérée
peut-être, de l'incurie, des hésitations et des
mille ignorances de l'administration, mais
plusieurs des faits qu'il a cités ont produit
une vive impression. M. Ferd. Barrot n'a
point abordé la questidn du ministère spé
cial ; mais ce qu'il croit nécessaire avant tout
à l'Algérie, c'est l'introduction et la régula
risation d'institutions civiles qui préparent
graduellement l'assimilation complète de la
colonie avec la mère-patrie.
Nous ne pouvons qu'applaudir au vœu é-
mis par l'orateur en terminant, que l'esprit
de parti ne s'emparât pas de cette question
d'Algérie, si vitale pour la France^ et que
chacun l'abordât, ' en dehors de toute préoc
cupation politique, et avec le sincère désir
d'accomplir le plus tôt possible cette grande
œuvre nationale de la colonisation algé
rienne.
Les journaux anglais d'hier nous arrivent
par voie extraordinaire Si l'on en croit le Times,
les jours du ministère sont comptés, et sir Robert
:Peel va tomber en minorité à la chambre'des
communes, soit sur la question du bill de coërçi-
: tion pour l'Irlande, soit sur la législation des
sucres :
« Pour échapper au danger gui le menace, il faut
qu'il fasse une nouvelle roncession à ses adversaires.
Il peut retirer le bill de coërcitioa, et, avec l'appui de
ses anciens amis les protectionistes, livrer bataille
aux whigs sur la question des sucres ; mais il est cer
tain qu'il sera vaincu dans la question irlandaise, s'il
persiste. En effet, comme il n'a pu obtenir la première
lecture du bill qu'avec l'appui des whigs, il semble
évident qu'il ne pourra obtenir la seconde si cet ap
pui vient à lui manquer. Il suffira aux protectionis
tes de le laisser seul avec le petit nombre de ses par
tisans personnels contre toute la phalange des whigs
qui est de plus du double.
» Tel est le danger : cependant nous pensons que
sir Robert Peel restera fidèle au bi'.l de coercition, et
qu'il aimera mieux tomber, comme tant d'autres avant
lui, sous le poids d'une difficulté irlandais^. Nous ne
pouvons dire jusqu'à quel point cette détermination
serait prudente, mais nous devons reconnaître qu'elle
6erait convenable. Ni le ministre, ni ses amis ne doi
vent désirer prolonger une lutte aussi inégale que
celle à laquelle ils ont été exposés depuis l'adoption
du bill des céréales et des douanes dans la chambre
des communes. Un ministère ne peut être ainsi à la
merci de ses amis ou de ses adversaires naturels sur
la moindre question. Ainsi, dans quelques jours, le
sort du ministère actuel sera décidé,s'il ne l'est pas dès
à présent.
. » Avant la fin de la semaine nous pouvons voir la
formation d'un autre cabinet et le retour au pouvoir
d'un parti qui, quels que soient ses défauts, arrivera
avec le prestige d'une victoire récente et long-temps
contestée, et le mérite d'avoir contribué loyalement
aux succès d'une mesure la plus large et la plus im
portante des temps modernes. ■>
On a parlé du pillage, par les Maures de la
côte marocaine, d'un navire de commerce anglais,
et du combat qu'ils ont livré aux embarcations
d'un brick de guerre envoyé de Gibraltar pour
recueillir les débris du navire. Nous recevons au
jourd'hui de Malaga des détails précis sur cette
affaire.
« Dans la matinéè du 30 avril, le brick anglais the
Ruth, capitaine Newham., allant de Messine à Liver-
pool. retenu par les, calmes à la hauteur.de Melilla,
en face du cap Très Forças, fut assailli par plusieurs
embarcations marocaines, qui forcèrent l'équipage à
abandonner le navire, et à chercher un refuge dans
les canots. Quelques jours après, l'équipage du Ruth
fut déposé à Gibraltar par un navire qui l'avait re
cueilli en mer:
» Le gouverneur de cette place ordonna immédia
tement qu'un bâtiment de guerre serait envoyé à la
recherche des pirates et de leur prise, et le bnck de
S. M. britannique, the Phantom, partit pour le cap
Tres-Forcas, pointe située à une lieue environ de la
forteresse espagnole de Melilla, dans la province ma
rocaine du Riff.
Le Phanlom trouva le Ruth échoué à peu de distance
du point où il avait été pris, et le commandant Ni-
cholson se mit " en devoir de procéder au sauvetage
des marchandises et de l'armement de ce navire;
mais, aperçu par les Arabes, son canot fat attaqué et
obligé de renoncer à se rendre à bord du RutA, après
avoir vu son second blessé à côté de lui.
» Toutèsies embarcations du Phantom furent alors
mise* à la mer, et avant de parvenir à leur hut, les
Anglais eurent a soutenir une vive fusillade avec les
Maures, qui dut causer de grandes pertes à ces der
niers, car, de son côté, l'équipage du Phantom eut un
midshipman tué et dix hommes blessés. Il ne se re
trouva à bord que fort peu de marchandises ; mais on
a pu rapporter à Gibraltar presque tous les agrès et
apparaux que les Maures n'avaient pas eu le temps
d'enlever au Ruth, dont la coque a été laissée sur la
plage.
» M. Nicholson qui, ainsi que son équipage, a
montré beaucoup de décision dans cette affaire, a im-
méd atement écrit par l'intermédiaire du commandant
de Melilla au gouverneur de la province du Riff, pour
se plaindre de cet acte de piraterie. Mais il est nors
de doute que cette démarche n'aura aucun succès.
Les habitans nomades de ces plages ne reconnaissent
Sas plus l'autorité des délégués de l'empereur du
[aroc que celle .de l'empereur lui-même. »
Le paquebot Tweed est arrivé des Indes occi
dentales. Les bâtimens de guerre américains
dont les noms suivent étaient à l île des Sacrifi-
(Xfcjlfumberland, 56; Potomac, 56; Raritan, 56;
Hliwfluth, 24; John-Adams, 24; Somers, i 4. Ces
navires attendaient le commencement des hosti
lités sur le Rio-Bravo.
L'intention du commodore américain est d'at-
taquer alors Saint-Jean-d'Ulloa et les forts de
Vera-Cruz. Oa dit que les Mexicains travaillent
sans relâche à ce fort, et que l'escadre américaine
ne pourrait s'en emparer s'il était bien défendu.
Nous n'avons point de nouvelles de Lisbonne
postérieures au 30 mai ; mais on en a du 31 de
Porto. Yoici ce qu'on écrit de cette ville au il/or-
ning-Chronicle :
« Des renforts arrivent de tous les côtés à Tannée
des insurgés, surtout de Tras-os-Montès, où les pau
vres fermiers, écrasés par lès impôts de fa compagnie
vinicole, ont enfin résolu de se joindre au cri popu
laire, en sollicitant le redressement de leurs griefs.
L'ère de 1832 est revenue, etOportose trouve en état
de siège. Villa-Nova, où les Anglais pnt des ateliers
énormes, a été abandonné aux vainqueurs. Nous
sommes à leur merci, nous n'avons de refuge qu'au
près de notre excellent consul, mais son pavillon ne
peut nous protéger tous ; il n'y a pas un bâtiment de
guerre anglais dans le port. »
" —On disait à Madrid, le 4 juin, que plusieurs
juntes insurrectionnelles, satisfaite* de la der
nière recomposition du cabinet, offraient leur
concours aux nouveaux ministres. S'il en était
ainsi, la question se trouverait considérablement
simplifiée pour le moment; mais il restera en
suite la question de réforme et de garanties, lors
que les cortèi se rassembleront, à supposer que
l'on parvienne à opérer facilement la pacification
complète du pays
Le Morning-Chronicle confirme une nouvelle à
laquelle nous n'avions pas pu croire, c'est l'envoi
à Buenos Àyres d'un nouvel agent anglais, M.
Hove, chargé par son gouvernement d'entrer en
arrangement avec Rosas De son côté, le gouver
nement français a confié à M. de Mareuil, l'ami
personnel de" Rosas, l'ennemi de Montevideo, la
mission de joindre ses efforts à ceux de M. Hove,
et de négocier avec Rosas. Quand on se souvient
que le dictateur n'a voulu entendre aucune pro
position raisonnable, et qu'il a mis, dans ses der
nières communications officielles, pour condition
préliminaire de toute négociation* le désaveu de
tous les actes des plénipotentiaires français et an
glais, on a peine à concevoir la détermination des
deux gouvernemens. Fallait il donc commencer
l'intervention pour la terminer d'une manière si
déplorable ?
Le Morning-Chronicle, qui a toujours été fa
vorable à Rosas et hostile à Montevideo, félicite
lord Aberdeen, et il ajoute cette phrase signifi
cative :
« L'aveu franc quoique tardif d'une erreur est
souvent une réparation suftisante de ses fâcheu
ses conséquences, et les démarches faites pour
réparer les résultats ruineux d'une politique sug
gérée par des paitis intéressés et appuyés par
des, pariisans seryiles, funt honneur à la promp
titude et à la sagacité du gouvernement. »
En attendant le débat qui aura lieu bientôt à
la chambre des députés sur les affaires du Liban,
nous continuons à recueillir les nouvelles qui
nous parviennent de ce malheureux pays La
ruine et l'extermination des chrétiens s'ackève
sous la direction de Chekib-Effendi. Leur désar
mement les a placés vis à vis des Druses, leurs
ennemis, qui sont restés possesseurs de leurs ar
mes, dans une situation désespérée. Aussi tous
les Maronites qui ont pu réaliser une somme
suffisante, ont quitté leur pays natal. La plas
grande part-e s'est réfugiée en Egypte. Ceux qui
n'ont pas pu quitter leurs terres, sont devenus
serfs des Druses. Ils travaillent pour leurs nou
veaux maîtres, sans recevoir de salaire. Un très
grand nombre a abjuré la religion catholique, et
a embrassé la croyance musulmane. Les plus
adroits se sont convertis au protestantisme; ils
ont fait profession de foi entre les mains du co
lonel Rose, consul britannique à Beyrouth.
La tyrannie des Druses se manifeste par les
actes les plus cruels envers céux qui sont restés
fidèles au catholicisme. On avait cru prévenir
leurs violences, en stipulant que les chrétiens pla
cés sous l'administration du kaïmacan druse pour
raient en appeler de ses sentences au pacha de
Saïda. Précaution vaine I Non-seùlement les Dru
ses, par leurs menaces, empêchent les chrétiens
de recourir k cette autorité, mais quand il arrive
Su'un Maronite, bravant les plus sinistres prér
ictions, porte au tribunal du pacha des griefs
incontestables, il ne manque pas de perdre sa
cause, et, à son retour; les Drusés lui font chère
ment èxpier l'audace d'avoir dénoncé leurs vio
lences. Ils étendent même leur vengeance sur
tous ses proches et tous ses amis. Dernièreniènt,
à l'occasion d'un fait semblable, toute? les pro
priétés des Maronites ont été ravagées' sur tout
l'espace compris dans un district. On annonce
enfin que les cheiks druses se sont assemblés ré-,
cemment, et ont décidé le massacre de tous les
chrétiens. Ainsi triomphent les intrigues des
agens anglais, et s'effacent les derniers vestiges
de l'influence française en Orient.
ÉLECTIONS.
Quarante-six électeurs de Montbéliard vien
nent, après coup, au secours de leur député, M.
Parandier, et écrivent une longue lettre pour
prouver que le tracé du Doubs n'est point, comme
on l'a dit, la cause principale de son élection.
« Le simple récit des faits, disent-ils, suffira pour
détromper ceux qui ont accueilli de bonne foi
une pareille accusation. »
Or, les faits, quels sont-ils ? Les voici 4'aprèl
les signataires de la lettre : « M. Victor Touran-
» gin, préfet du Doubs s écrivit il y a environ un
» an à plusieurs d'entre nous, que le zèle qu'il
» mettait dans la défense du chemin de fer par
» la vallée du Doubs était mal jugé ; qu'on 1 at-
» tribuait moins à son désir de faire prévaloir le
» meilleur tracé possible, qu'à celui de maintenir
» son frère à la députation; que cet état de cho-
» ses le gênait et que son frère, qui partageait sa
» manière de voir à cet égard, était décidé à don-
» ner sa démission. » Vous voyez bien que le tra
cé du Doubs n'est pour rien dans la démission
de M. Silas Touçangin. Est-il pour quelque
chose dans la nomination de M. Parandier? Pas
davantage, et en-voici la preuve : « Dans cette gi-
» tuation nous jetâmes les yeux sur M. Parandier
» que nous connaissions depuis loDg -temps.Elevé
» avec plusieurs d'entre nous, il avait rempli
» avec talent et intégrité les fonctions d'ingénieur
» des ponts et chaussées dans notre arrondisse-
» ment. Il est vrai qu'en le nommant nous espé-
» rions trouver en lui un homme capable de dé-
» fendre, avec intelligence et avec succès le tracé
» par la vallée du Doubs auquel il avait travail-
» ié comme ingénieur..... » En faut-il davantage,
et ne reste-t-il pas maintenant parfaitement éta
bli que le tracé du Doubs a été étranger au choix
de M. Parandier comme à la démission de M. Tou-
rangin?
Nous ne savons ce que fera aux prochaines
élections le collège de Montbéliard. Il est possi
ble qu'il persiste dans son calcul, et que, pour
la seconde fois, il sacrifie à l'intérêt local, bien
ou mal entendu, sa vieille opinion po'itiqne. Tout
— 28 —
LES GRANDS DANSEURS DU ROI.
ses hameçons. Quoique cet argent ne fût pas sien, de l'avoir
simplement dans sa poche, le grandissait d'une coudée ; c'est'
là en effet une des singularités de ce précieux métal, qu'à
l'apparence seule de le posséder, même un pauvre diable
prend de l'importance. Ajoutons que, pour un cas pressant,
n'ayant à rendre compte qu'en masse, notre comptable ne
se serait pas fait faute de frapper sur sa caisse un emprunt.
, — Eh bien 1—fit Dupuis, courant à lui dès qu'il l'aperçut,
—quelles nouvelles? J'ai cru vraiment qu'il vous était arrivé
quelque malencontre, tant il m'étonnait de n'avoir pas en
tendu parler de vous de toute la journée.
— Ah çàl mon garçon,—repartit Pompée,—vousvousima-
ginez donc qu'on n'a que vous à pènser? Les amoureux sont
de drôles de pistolets, ils se figureraient volontiers le Père-
Éternel ayant fait le monde en six jours rien qu'à leur in
tention.
— Enfin, êtes-vous parvenu à pénétrer jusqu'à la mar
quise, l'avez-vous vue, lui avez-vous parlé?
— Fichtre ! — repartit Pompée, — quel morceau que cette
déesse! quels yeuxl quelle taille ! et surtout quel ton !
— Alors elle vous a reçu? Et qu'avezrvous fait?
Certainement, qu'elle m'a reçu, et, je puis lfc dire, avec
affabilité et avec grâce. Du reste, une maison cossue, suisse,
laquais galonnés sur toutes les coutures, des enfilades d'ap
partenons comme à Versailles, et tout cela meublé dans le
dernier goût.
— Mais enfin,—dit Dupuis, que tout ce préambule faisait
bouillir, — le résultat de la conférence?
— Eh bien! — fit Pompée d'un air de négligence, —ça
c'est très bien passé.
— Comment! elle consent à me recevoir? — demanda le
danseur, tout haletant rien qu'à cette idée.
— Pas précisément, — répondit' le cauteleux sergent ; —
cela aurait souffert trop de difficultés.
— Qu'y a-t-il donc eu de décidé alors?
— .Mon cher, — reprit Pompée, continuant de tourner au
tour de là vérité, —cette femme, comme je vous disais, m'a
fait un accueil parfait; mais j'ai bien vu qu'il ne serait pas
absolument facile de l'intimider, si bien que n'espérant pas
de l'amener à la combinaison voulue, je mesuis dittllrie faut
cependant pas que tout se passe en belles paroles, et je tiens
à honneur à ce que, d'une façon ou d'une autre, ce pauvre
Dupuis tire parti de la circonstance:
— Enfin?— fit le danseur, dont la curiosité était poussée
au dernier degré.
— Enfin, et finalement,— répctaPompée,—puisqu'il n'y
avait pas moyen de se payer en nature, dam! j'ai tourné les
choses de manière à être au moins dédommagé en argent.
• — En -argent! — s'écria Dupuis avec une horrible an
goisse.
— Oh ! mon Dieu,—dit Pompée,— je nemesuis pas mon
tré exigeant; je savais vos intentions; c'était seulement pour
dire qu'elle n'aurait pas pris gratis son chocolat à vos
dépens.
—Vous lui ayez demandédel'argent?—reprit Dupuis d'un
ton annonçant une furieuse indignation prête à éclater.
— Oui,—fit négligemment le sergent,—jelui ai fait lâcher
vingt pistoles, qu'elle a, ma foi ! données de très bonne grâce.
Elle s'est montrée belle joueuse ; c'est une justice que je
lui rends.
— Monsieur Pompée ! vous êtes un misérable ! —dit alors
Dupuis, cessant de se contenir, et serrant avec force le bras
du sergent.
— Hein? —fit Pompée, relevant fièrement la tête; —vous
dites?
— Je dis que vous êtes un homme sans foi ni loyauté, et
quevous déshonorez l'uniforme que vous avez l'honneur de
porter !
— Saltimbanque, vous le prenez sur un ton à bientôt re
gretter les paroles incohérentes que vous prononcez.
— C'est justement ce que je désire, — répondit Dupuis,
prenant cette menace pour une provocation ; — et tout maître
d'armes que vous êtes, je compte bien vous donner une le
çon dont vous vous souviendrez.
— Toi, infirme?—dit le sergent du ton de l'aristocratie la
plus dédaigneuse,—et tu t'imagines que j'irai m'aligner avec
un sauteur de chez Nicolet? ,, •
— Ah! —fit Dupuis en se frappant la tête à deux mains de
désespoir, car les idées du temps le laissaient convaincu qu'il
venait de se heurter à un invincible préjugé. ,
— Ainsi voilà!—continua Pompée,—vous vous échauffez le
tempérament à rendre service à un blanc-bec, que vous ho
norez de votre société, et puis c'est sa manière de vous dire
merci.
— Cet argent, vous l'avez? — demanda alors le danseur
d'un air sombre, mais ayant au moins à la surface recouvré
son sang-froid.
— Ah! nous ne sommes donc plus si dégoûtés,—répondit
le sergent,— et nous voudrions bien le tenir, ce numéraire!
— Oui, il m'appartient ; je l'ai payé assez cher, et veuillez
me le remettre.
— Voilà, —dit Pompée en donnant à Dupuis les pistoles
roulées dans un fragment de billet doux.
Dupuis ouvrit convulsivement le papier, et, après avoir
rapidement estimé la somme : •
— Mais il n'y a pas là vingt pistoles, — remarqua-t-il en
continuant de se modérer.
— J'ai ditvingtpistoles, entout,—repartit Pompée, —dix
pour vous, jeune homme, et dix pour le co-partageant? som
me totale est juste, si je sais bien compter.
— Ah oui,— dit ironiquement Dupuis,— nous avions fait
société pour l'exploitation de cette femme, vous êtes un digne
mandataire, Monsieur Pompée!
—C'est-à-dire,—reprit le sergent y mettant de la loyauté,
— que vous ne trouverez peut-être pas toutrà-fait votre part;
vous m'aviez montré hier tant de bonne volonté de m'obli-
ger, que, me trouvant un peu à court, j'ai légèrement écor
né le prêt...
«fan
25 —
FEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL.
— Son nom? —fit Dupuis avec une hésitation qu'on aime
à lui voir.
— Sans doute, son nom et son adresse, puisque j'y vais
de ce pas.
— Mais, mon cher, —objecta le danseur, —comment al
lez-vous faire pour pénétrer jusqu'à elle? car, enfin, chez des
femmes de ^a condition, il y a une étiquette.
— Sois donc tranquille, ça me regarde; tu dis qu'elle s'ap
pelle?
— Mme de Flavacourt,—répondit Dupuis en se décidant.
— Et que ce bel oiseau niche?
— Rue de la Chaussée-d'Antin,
— Marquise Flavacourt, rue Chaussée-d'Antin ; tu peux
être tranquille, mon trésor, pas plus tard que ce soir, je t'en
rendrai bon compte.
Parlant ainsi, le sergent serra la main de Dupuis d'une
manière significative, et ils se séparèrent là-dessus.
CHAPITRE XIII.
00 POMPÉE PARAIT SOXj'S UN NOUVEAU JOUR. — ET DE L'ADMIRABLE FAÇON DONT [SONT GÉRÉES LES AFFAIRES DE DUPlilS.
De toute manière, la visite que Pompée sè proposait de
faire nécessitait un peu de préparation. Il passa donc à sa
caserne, ou il commença par mettre sous enveloppe une
belle feuille de papier à placet, sur laquelle il eut soin de
ne rien écrire; il scella ensuite cette singulière dépêche
d'un magnifique cachet de cire rouge pour lequel il fit in-
dustrieusement servir l'empreinte d'un des boutons armo
riés de son habit. Cela fait, de toute la calligraphie dont il
était capable, il écrivitTadressede la marquise; puis, comme
le guerrier français aime en général à se présenter à son
avantage, il se vergeta soigneusement depuis les guêtres jus
qu'au tricorne, et s'étant ensuite donné un œil de poudre,
partit, muni de sa missive, pour se rendre à l'hôtel Flavar
court, où il ne tarda pas d'arriver. .
Frappant au carreau du suisse :
—Pour Mme la marquise, de la part de M. le maréchal duc
deBiron, colonel des gardes françaises, — dit-il en mon
trant sa lettre et en ayant soin de faire briller le cachet.
Le suisse leva son chapeau en signe de respectueuse dé
férence, et donna un coup de cloche pour avertir les laquais ;
en même temps il indiqua fort poliment à Pompée le perron
par lequel il devait entrer.
Sous le vestibule, le sergent fut reçu par un valet galon
né auquel il répéta son mot de passe. Le valet voulut alors
lui prendre la lettre pour la faire transmettre à sa maîtresse;
mais Pompée refusa de se dessaisir du paquet, disant qu'il
avait ordre de remettre en mains propres, et il glissa adroi
tement, qu'à être portée par un sergent du régiment de M. le
maréchal, et non par un de ses gens, cette dépêche faisaia
d'elle-même comprendre la conséquence dont elle était.
Se rendant à cette raison, le valet introduisit Pompé-
dans une vaste antichambre où une belle collection de gens
de livrée témoignait du bon pied sur lequel était la maison
de la marquise. Après une attente de quelques minutes, le
sergent se vit invité à passer dans un salon; là il fut reçu
par une femme de chambre, qui n'était pas Mlle Lucile, car
on pense bien qu'après ce qui s'était découvert de sa con
duite, cette effrontée n'avait pas fait beaucoup de séjour à
l'hôtel. La camériste ouvrit la porte d'une autre pièce, et
marquant son savoir-vivre, au lieu d'annoncer M. Pompée,
visite qui, de toute manière; eût pu paraître assez étrange à
sa maîtresse, elle dit, en y mettant quelque solennité : De la
part de M. le maréchal de Biron ; ce qui avait un peu meil
leur air, on en conviendra.
Seule, dans un boudoir tapissé de lampas bleu, la mar
quise était occupée à feuilleter quelques Nouvelles à la main,
dont elle avait fait acheter, dès le matin, Un exemplaire,
car les pamphlétaires qui rédigeaient ces insolëns Mémoires
secrets étaient de si adroits fureteurs, et si miraculeusement
informés, qu'il n'eûtpas été impossible que toute l'occurrence
de la nuit précédente y fût déjà consignée. Dieu merci! rien
n'avait transpiré; c'est donc, sans fâcheuse préoccupation que
Mme de Flavacourt reçut la prétendue lettre de il. le duc dè
Biron. Celui-ci, au reste, était assez de sa connaissance et
d'un âge assez mûr (1) pour qu'un envoi fait à'elle de sa
part n'eût rien de bien inattendu et de bien surprenant.
Le Pompée était pourvu d'un si bel aplomb, et doutait si
peu du succès de sa visite, que, pendant le temps employé
par la marquise à décacheter l'enveloppe et à chercher le
contenu écrit qui ne s'y trouvait pas, il s'occupait tranquil
lement à considérer la noble dame, se disant à lui-même :
■—Mille-z-yeux! une belle femme, et dire qu'elle s'est
montrée au naturel à ce sot de Dupuis l
— Mais, mon garçon,—dit à la fin la marquise,—à quoi
pense le maréchal, de m'envoyer du papier blano?
— Du papier blanc? répéta,Pompée ; je n'ai pourtant rien
(1) 69 ans. Né le S férrier 1701, mort en 1783.
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 84.96%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 84.96%.
- Collections numériques similaires La Grande Collecte La Grande Collecte /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "GCGen1"
- Auteurs similaires Véron Louis Véron Louis /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Véron Louis" or dc.contributor adj "Véron Louis")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k667474r/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k667474r/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k667474r/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k667474r/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k667474r
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k667474r
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k667474r/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest