Titre : Les Annales coloniales : organe de la "France coloniale moderne" / directeur : Marcel Ruedel
Auteur : France coloniale moderne. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1910-08-11
Contributeur : Ruedel, Marcel. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32693410p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 11726 Nombre total de vues : 11726
Description : 11 août 1910 11 août 1910
Description : 1910/08/11 (A11,N32). 1910/08/11 (A11,N32).
Description : Collection numérique : Bibliothèque Francophone... Collection numérique : Bibliothèque Francophone Numérique
Description : Collection numérique : Thème : L'histoire partagée Collection numérique : Thème : L'histoire partagée
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k65410566
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-LC12-252
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/09/2013
ONZIÈME ANNÉE N" 32
LE NUMÉRO ? 25 centimes
riHAOUÏ 1910
Les Annales Coloniales
-.d d 2 £ c A*,,
JOURNAL HEBDOMADAIRE DES QUESTIONS EXTERIEURES
ENTENTE DANS TOUTES LES GARES
PARAISSANT LE JEUDI
Adresser les communications au Secrétaire de la Rédaction.
Les Annonces et Réclames sont reçues aux Bureaux du JournaL
DIRECTEURS :
M. RUEDEL Se L. G. THÉBAULT
20, Galerie d'Orléans (Palais-Royal), Paris 1er
Code Français A. Z.
LES :M:A.NU'SCRXTS 3sroisr HTSÉHÉS SONT PAS RENDUS
La Tribune libre des Annales Coloniales éit-ou-verte à toutes les opinions
Ua an 6 mois
S France* 40 fr. S fr. 50
ahAHHANiAMfe | ETRANGER ET COLONIES 25 » 12 fr. 50
On s'abonne sans frais dans tous les Bureaux de Poste
Le programme du Gouverneur
Général de Madagascar
M. Picquié n'a pas manqué à la tra-
dition d'après laquelle les chefs de nos
grandes colonies instruisent l'opinion,
avant d'occuper leur poste, de la ligne
de conduite qu'ils sont, en pl'incipe,dé-
terminés à tenir. Quelques-uns de nos
confrères ont recueilli, de la bouche du
nouveau Gouverneur général de Mada-
gascar, des déclarations d'un haut inté-
rêt, dont on @ ne peut s'empêchel' de dire,
a priori, qu'elles sont prudentes et avi-
sées.
Ce qui frappe tout d'abord, dans le
programme tracé par M. Picquié, c'est
qu'il n'inovera pas. L'œuvre du général
Gallieni et de M. Augagneur sera conti-
nuée. Ainsi, la Grande Ile jouit de ce
privilège rare autant que précieux de
n'être point soumise à ces bouleverse-
ments si néfastes pour les intérêts d'une
colonie, si déprimants pour son person-
nel, qui marquent d'ordinaire les mu-
tations de gouverneurs.Madagascar évo-
lue sans à coup et ce n'est pas un spec-
tacle banal de constater que, depuis dix
ans, ce pays connaît une administration
uniforme dans son ensemble, sans pré-
judice, cependant, des changements exi-
gés par le progrès. Les transitions y ont
toujours été ménagées. Ce que le géné-
ral Gallieni n'avait pu accomplir pen-
dant quatre années de conquête et cinq
ans d'organisation, M. Augagneur l'a
lait. M. Picquié veut poursuivre cette
tache, se conformant de la sorte à la
règle recommandable qui s'oppose à l'é -
dification d'un organisme administra-
tif rigide, impuissant à sui vre les be-
soins toujours nouveaux d'un pays
neuf et à les satisfaire. Comment ne l'en
louerait-on pas ?
En matière économique, c'est au dé-
veloppement des moyens de communi-
cation que s'appliquera par-dessus tout
le Gouverneur Général. C'est là qu'ap-
paraît aussitôl son désir de poursuivre
œuvre de ses prédécesseurs. Mener à
Tamatave le chemin de fer de Bricka-
ville à Tananarive, accroître dans de
larges proportions le réseau routier, tel
sera le but, auquel avaient si largement
travaillé MM. Gallieni et Augagneur.Ce
que le premier appelait « le chemin de
fer du riz » remplira alors l'office pour
lequel il fut créé et les vastes espaces de
l'intérieur, sillonnés par d'excellentes
routes, attireront des efforts qui, de la
part des indigènes comme des Européens,
seront essentiellement productifs.
La colonisation agricole sous toutes
ses formes retiendra l'attention et solli-
citera les initiatives de M. Picquié. Ma-
dagascar continuera ainsi à devenir la
terre des agriculteurs pour laquelle il a
été fait de si grands sacrifices depuis
notre occupation. Cette perspective, un
moment considérée comme un mirage,
finira, à force de patience, de labeur
persévérant et d'encouragements, par se
transformer en une fructueuse réalité.
Le nouveau Gouverneur Général a, en
particulier, l'intention d'organiser la pe-
tite propriété foncière et il ne saurait
rien faire qui fût mieux et plus géné-
reusement la continuation des vues
de ses prédécesseurs,
M. Picquié a tout naturellement une
grande confiance dans le loyalisme des
indigènes à l'égard de la France. Il a
raison. Madagascar jouit d'une paix so-
lide qui sera par la suite.intangible. Les
races malgaches, non embarrassées de
traditions, d'un passé, d'un nationalis-
me sont appelées à se franciser. Infi-
niment perfectibles, très intelligentes
dans leur ensemble, pourvues d'un es-
prit curieux qui les pousse à connaître
et à posséder, elles viennent à nous ra-
pidement et sans arrière pensée.
Cette constatation si satisfaisante, en
nous permettant d'entrevoir pour l'ave-
nir l'existence d'une population vrai-
ment française dans l'Océan Indien, n'ex-
clut pas la prudence pour le présent.
Aussi, féliciterons-nous M. Picquié de
vouloir conserver des forces honorables
et surveiller attentivement l'état des es-
prits, notamment dans le sud-est de
l'île. Sans pousser un vain cri d'alar-
me, que rien ne justific, il est permis
de dire qu'il subsiste, en cette partie de
la colonie, des ferments de barbarie as-
sez forts pour provoquer des complica-
tions passagères à un moment donné.
Sait-on jamais ce qui se passe dans
l'âme d'un peuple, quand il est, surtout,
composé d'individus non civilisés, im-
pressionnables et violents. M. Picquié
est prévenu ; c'est de tous points par-
fait.
L enseignement et l'assistance seront
les uniques armes qu'emploiera de son
plein gré le chef delà colonie. Ici en-
core apparaît la tradition dont s'inspi-
rent les Gouverneurs généraux de
Madagascar. On ne saurait oublier, en
effet, le magnifique effort que lit le gé-
néral Gallieni pour créer l'école laïque,
sans heurter des efforts confessionnels
simultanés qu'en l'état politique du mo-
ment il eût été dangereux d'interdire et
qu'il fallait mieux réglementer, au pro-
lit du développement de l'instruction.
On se souvient aussi de l'incompara-
ble service que rendit à la cause de cet
enseignement laïque M. Augagneur,
par les décisions qu'il sut prendre et qui
ont mis l'école officielle, donc neutre, au
premier rang pour tou jours. M. Picquié
n'a qu'à compléter et c'est ce qu'il se
promet de faire.
Quant àl'assistance médicale, elle est
aujourd'hui si bien installée à Madagas-
car qu'elle fait, peut-on dire, partie de
là vie du peuple. Le général Gallieni
en avait fait un modèle ; M. Augagneur,
médecin par surcroît, lui a donné toule
sa force productive et régénératrice, M.
Picquié entend pousser les groupes d'as-
sistance jusque dans les régions les plus
excentriques, où ils contribueront à re-
lever le sort de l'indigène età asseoir no-
tre influence. On sait que Madagascar
souffre du manque de population et de
la faiblesse do ses races, qui ne se sont
point relevées, encore, des misères su-
bies sous les régimes antérieurs à no-
tre occupation.
L'avenir de l'île réside tout entier dans
l'accroissement du nombre de ses habi-
tants et cet accroissement se produira
de lui-même du jour où, par des mesu-
res sanitaires suffisantes, nous aurons
mis un terme à la fragilité des individus,
supprimé les causes de disparition en
mettant les malgaches en état de plus
forte résistance aux attaques des affec-
tions diverses dont ils meurent si aisé-
ment. Déjà cette œuvre est en excel-
lente voie. Il est agréable de penser
qu'elle sera poursuivie.
Il n'y a donc, dans les déclarations
faites par M. Picquié, que des motifs,
pour les coloniaux, de se réjouir. L'ho-
norable Gouverneur général, qui a
beaucoup d'expérience, connaît en par-
ticulier la Grande Ile. Partant avec le
désir de ne pas révolutionner, mais de
perfectionner, il se trouvera placé dans
les meilleures conditions de succès. Et,
dès lors, il est permis de dire que s'il
rencontre de serienx obstacles, ceux-ci
viendront surtout de la multiplicité, de
la diversité des intérêts européens re-
présentés dans la colonie. A ce point
de vue, il n'y a pas à se le dissimuler,
Madagascar est d'administration déli-
cate. On y rencontre plusieurs courants
d'opinion et, à défau t d'une grande au-
torité, si M. Picquié ne veut pas que
son gouvernement rencontre d'adversai-
res, ce qui est bien difficile, il lui fau-
dra user d'une grande diplomatie. Les
représentants de la colonisation sont
très nombreux à Madagascar ; ils sont
aussi très combatifs parce qu'ils ont
une notion nette de leurs besoins. Mais
ces besoins se heurtent parfois et les opi-
nions sont diverses. On l'a bien vu de-
jaiis dix ans. Fort heureusement, la
situation commerciale est, à l'heure ac-
tuelle, très satisfaisante. La Grande lie
asans peine surmonté lu crise qui, un
moment, se produisit, précisément parce
que l'afflux des efforts privés avait été
quelque peu disproportionné aux res-
sources immédiates qui s'offraient à eux.
Madagascar ne peut, comme 1 Afrique
Occidentale, connaître un développe-
ment économique quasi instantané.
C'est la terre de l'avenir et c'est peu à
peu qu'elle viendra à la pleine prospé-
rité. Telle quelle, déjà, notre colonie
offre de superbes ressources et la pro-
gression constatée des résultats ne peut
que s'accentuer.
Le programme de M. Picquié y pour-
voira, du reste, en améliorant les con-
ditions de progrès dont Madagascar est
redevable au général Gallicni. C'est
pourquoi il faut encore se réjouir des
intentions qu'a le gouverneur général
de se montrer le continuateur de ses
devanciers.
Henri COSNIER,
Député de l'Indre.
-"J'V"
Informations Coloniales
M. Arnaud, inspecteur général de 2e classe
des des colonies, est nommé directeur du con-
trôle au ministère des colonies.
*
* *
M. Méray, inspecteur général de 2° classe
des colonies, est nommé inspecteur général de
lre classe.
M. Pherivong, inspecteur de pe classe des
colonies, est nommé inspecteur général de de
2e classe.
* ,
JI. Tllleber,so its- chef de bureau de lrc classe
faisant fonctions de chef de bureau à Vadmi-
nistration centrale du ministère des colonies,
est nommé chef de bureau de 3e classe. et placé
en service détaché pour exercer les fonctions
de délégué dit département des colonies près les
sociétés congolaises.
*
* *
AT. Rognon, gouverneur des colonies, se-
crétaire général dit gouvernement général de
VAfrique Equatoriale, rejoindra son poste par
le paquebot quittant Bordeaux le 25 septem-
bre 1910.
* *
M. Antonetti, secrétaire général des colo-
nies ysera chargé par le Gouverneur Général de
l'Afrique Occidentale' de la direction des fi-
nances au moment du départ pour la métro-
pole de V Inspecteur des colonies Demaret.
*
* *
M. le lieutenant-colonel Lenfcint va s'em-
barquer pour VIndochine où il pa. prendre
le commandement des batteries dit cap Saint-
Jacques.
* *
Al. Samary gouverneur de la Guyane, est
débarqué à Cayenne le 29 juillet, lll. Thé-
rond, qui avait été chargé de l'intérim du gOIl-
vernement, a quitté la colonie pour rentrer en
France.
* *
Ln Gouverneur Général de VAfrique Oc-
cident aie française a renouvelé pour 191.0 la
mission scienlif Ul'LC conf iée, en 1909, a AI.
Chudeau, docteur ès sciences naturelles. M.
Chudeau, devra, au cours de cette nouvelle
mission, visiter la Mauritanie el la région
de Taoudénil et de Cao, au double point de vue
géologique et minéralogique.
#*#
Le Journal officiel publia un décret por-
tant que les fonds provenant de Vemprunt de
'100 millions contracté en vertu de la loi du
22 janvier 1907 par le gouvernement général
de l'Afrique Occidentale française peuvent
être employés en valeurs du Trésor.
* *
Un décret du 1er août fixe ainsi qu'il suit
les quantités de produits originaires de la
Guinée française qni pourront être admises
en France du 1er juillet '1910 au 30 juin 1911
dans les conditions des décrets des 30 juin
1892, 22 août 1896 et 25 août 1900 :
Café, 3.000 kilogrammes.
Bananes, '1 million de kilogrwnmes.
* *
Le Conseil d'Etat vient cl'approuver en as-
semblée générale le projet de décret portant
réorganisation de Vadministration centrale des
colon.ies.
* *
Le Journal Officiel du 9 août publie un
rapport suivi d'un décret portant réorganisa-
tion du personnel des travaux publics et des
mines des colonies autres que VIndo-Chine, la
Martinique, la Guadeloupe et la Réunion.
*
* *
M. Picquié, Gouverneur général de jJJada-
gascar et Al. Garbil, secrétaire général, l'ega-
gneront leur poste par le paquebot qui quittera
Alarscillc le 25 octobre.
- ---------- -#1 ,,"-
MAUVAISES ÉCONOMIES
Dans une première étude du budget
des troupes coloniales, dont le rappor-
teur désigné est M. Augagneur, la com-
mission du budget a admis certaines ré-
d notions sur les effectifs des troupes à
Madagascar, à la Martinique et à laNou-
velle-Calédonie.
Au mois de mars dernier, sur un
amendement que nous avons présenté
au chapitre des crédits destinés au grou-
pe militaire de l'Afrique orientale, le
Ministre des colonies et la Chambre ont
décidé le remplacement d'un régiment
de tirailleurs sénégalais par un régi-
ment malgache.
Il n'y a, croyons-nous, aucun danger
à consacrer définitivement cette mesure,
peut-être même à l'étendre au dernier
régiment sénégalais en service à Mada-
gascar ; mais en ce qui concerne la
Martinique une nouvelle réduction de
l'effectif n'est-elle pas aussi imprudente
qu'inopportune ?
Qui ne se rappelle, en effet, la néces-
sité urgente où l'on s'est, il y a quel-
ques mois, trouvé d'aller prendre à
Fort-de-France une compagnie d'in-
fanterie coloniale destinée à rétablir'
l'ordre troublé à la Guadeloupe? N'a-t-il
pas fallu même envoyer de France un
croiseur, avec troupes de débarquement
et un renfort de 150 hommes de la gar-
de républicaine ?
La dépense de ce déploiement de for-
ces pèse aujourd'hui si lourdement, pa-
rait-il, sur le budget de la Guadeloupe,
que les services publics sont entravés et
la solde des fonctionnaires impayée ou
payée sur des fonds momentanément
empruntés.
A quoi bon alors chercher une mai-
tre économie sur un corps, non pas
d'occupation, mais de simple police,
s'il faut ensuite un accroissement bien
plus important de dépenses, parce qu'il
faut faire venir de loin et à grands
frais des renforts qui courront le risque
d'arriver trop tara ?
Il est vrai que des gens qui se pré-
Il est vra i qtie es n
tendent bien informés assurent que la
récente agitation signalée à la Guade-
loupe était plus factice que réelle. C'é-
tait surtout une agitation politique com-
pliquée de haine de races, le tout pour
servir à la période électorale des mois
de mars et avril derniers.
On prête à M. Augagneur l'intention
de justifier les diminutions qu'il vient de
faire adopter sur le petit budget mili-
taire des Antilles par une considération
certainement de réelle valeur ; on sup-
primerait dorénavant les troubles dans
les Antilles en supprimant leur indis-
cutable cause, c'est-à-dire les élections.
La commission de réforme électorale
qui va travailler pour la France s'oc-
cuperait aussi des colonies.
Quoi qu'il en soit, pour ce qui concer-
ne les Antilles, il est certain que la di-
minution infligée également à l'effectif
de la Nouvelle-Calédonie ne peut être
justifiée parle môme argument. Si l'on
diminue la troupe il faudra augmen-
ter la gendarmerie. Précisément, dira-
t-on, c'est là que réside l'économie, car
la troupe est payée par la métropole,
tandis que c'est la colonie qui supporte
la dépense delà gendarmerie. - -
Le raisonnement est tout à fait faux.
La Nouvelle-Calédonie, en effet, qui
compte encore un effectif de dix ou dou-
ze mille forçats ou libérés, qui encourt,
de ce chef, c'est-à-dire de la présence
d'une population dangereuse dont la
métropole s'est débarrassée, un excé-
dent de charges de police, dont person-
ne ne peut songer à nier l'importance,
la Nouvelle-Calédonie, disons-nous,plie
depuis longtemps sous la charge de son
budget. C'est le colon calédonien qui
est le plus fort contribuable du monde.
La colonie ne subsiste en ce moment
que grâce aux fonds du dernier emprunt,
répartis en salaires versés en définitive
chez les petits commerçants. La crise
économique est en permanence dans
notre colonie d'Australie. Ce n'est donc
pas le moment de rien retrancher à au-
cun des budgets dont elle subsiste à pei-
ne. Qu'on lui retire des troupes, soit,
mais alors que la Métropole prenne sa
j nste part des dépenses de police dont
elle est elle-même l'unique cause, et
dont la surcharge imposée au budget lo-
cal de la Nouvelle-Calédonie n'est pas
moindre de 500.000 francs.
- J. LEMAIRE.
-– –-
Au Ministère des Colonies
AI. Trouilloi, ministre des colonies, vient
d'appeler à la direction de son cabinet,en rem-
placement de M. Duprat, qui vient de prendre
la direction effective des services de l'Office
Colonial, M. André Ripert,maître des requê-
tes au Conseil d'Etat. !
Cette désignation flatteuse sera unanime-
ment applaudie dans les milieux coloniaux,
car on ne saurait ignorer la place importante
que M. Ripert s'est créée à la section conten-
tieuse du Conseil
Homme aimable , juriste distingué, esprit
précis et clair nous ne doutons pas que 31. Ri-
pert donnera aux colonies toute la mesure de
son intelligence et sera pour le ministre des co-
lonies un auxiliaire précieux dans l'applica-
tion des nouveaux règlements réformant l'ad-
ministration centrale.
Henri COSNIER.
Député de l'Indre.
LA QUESTION DU CONGO
L'annexion de l'ancien Etat indépen-
dant du Congo par la Belgique n'a pas
encore été reconnue par l'Angleterloe
ni par les Etats-Unis. Ces deux puis-
sances, indignées des atrocités commi-
ses à l'égard des populations indigènes,
exigent, avant de reconnaître le nouvel
ordre de choses, que des garanties leur
soient données qu'il y aura effectivement
quelque chose de changé.
La campagne de la Congo Réforme
Association, basée sur des faits consta-
tés ou contrôlés par des enquêtes offi-
cielles, a révélé au monde stupéfait que
les procédés employés au Congo léopol-
dien, pour pénétrer l'Afrique et civili-
ser les indigènes, n'étaient autres, mais
multipliés à l'infini et érigés en système
pendant un quart de siècle déjà que les
crimes reprochés par nous au Sultan
marocain Moulay Hafid et. invoqués
précisément comme motif impérieux
d'une intervention civilisatrice.
r 1. i« i i • ̃•
La spoliation complète des indigène
congolais par la prise de possesion du
sol et de tout ce qu'il renferme ou
produit, la condamnation au travail for-
cé de la population entière, hommes,
femmes et enfants, afin d'exploiter
pour le maitre, c'est-à-dire pour le roi
Léopold et les compagnies commer-
ciales fondées par lui, ce même sol,
sur lequel ils étaient désormais étran-
gers et esclaves, le martyre jusqu'à la
mutilation des mains ou « des pieds cou-
pés, et jusqu'à la mort des malheu-
reux travailleurs, hommes ou en-
fants n'ayant pu fournir la quotité de
caoutchouc exigée, la destruction systé-
L'ALGERIE
A L'EXPOSITION DE BRUXELLES
LE CRIN VÉGÉTAL
Le crin végétal provient du palmier
nain qui recouvre en Algérie de vastes
étendues de terrains. Ce végétal croît
spontanément dans tout le nord de l'Al-
gérie mais plus particulièrement dans
les départements d'Alger et d Oran ; on
le rencontre même en Espagne et dans
les envirous de Nice. Toutes les terres
lui sont propices ; il ne dédaigne même
pas les dunes de la côte, les sommets
rocailleux des montagnes, restant in-
sensible au froid comme à la chaleur,
raccommodant aussi bien delà pluie que
delà sécheresse. Il envahit tout, cou-
vrant de ses broussailles basses, épais-
ses et épineuses des superficies consi-
dérables de terres utilisables pour l'agri-
culture. Son habitat préféré est compris
dans uue zone s'étendant à près de 200
kilomètres de la mer, à l'intérieur de l'Al-
gérie. Le palmier nain ne demande à la
terre que le strict nécessaire pour sa nour-
riture. Il la protège, eu échange, contre
les pluies torrentielles de l'hiver et lui
conserve toutes ses qualités. Il n'est, en
effet, aucun colon ulgerien qui ne sache
que les premières cultures faites sur des
terrains récemment dégarnis des brous-
sailles de palmiers nains, ne donnent de
brillants résultats et l'expression «terre
à palmiers » s'applique toujours aux
meilleures terres, à celles plus particu-
lièrement recherchées par l'agriculture.
Cet avantage, dû à sa présence, est une
des causes de sa destruction et son aire,
sous les progrès de la colonisation, di-
minue de jour en jour.
L'industrie dy crin végétal a pris nais-
sance en 1845. Mais ce ne fut qu'à par-
tir de 1853 que cette matière première
prit rang parmi les exportations algé-
riennes et nous verrons plus loin que ces
exportations augmentèrent dans des pro-
portions considérables.
Dans les premières années de la con-
quête le palmier nain provenant des tei -
res défrichées était mis au rebut et
brûlé sur place avec les autres brous-
sailles. En 1847, MM. Raphaël Delorme
et Pierre Averseng songèrent à réduire
les frais de défrichement et de mise en
valeur d3 leurs propriétés nouvelles en
utilisant le palmier nain. Ils avaient re-
marqué que les indigènes fabriquaient
avec ses feuilles des tapis, des nattes, des
paniers, des hottes pour le transport des
fruits, des balais et même des cordes
d'une solidité particulière. Ils résolu-
rent d'utiliser les propriétés textiles des
ieuilles du palmier nain pour en former
une sorte de crin qui prit le nom de
« crin végétal ». La première usine fut
créée à Chéragas, tout près d'Alger. Cette
industrie occupe actuellement de nom-
breuses fabriques réparties sur tout le
territoire algérien, mais les principaux
centres de fabrication sont dans les dé-
partements d'Alger et d'Oran. Elle est
moins répandue dans le département de
Constantine où quelques usines existent
à Akbou, Amokran, Bône et Talcdempt.
Les usines les plus importantes se
trouvent à Affreville, Arba, Bordj-Mé-
naiel, Cherchell, ElAffroun, Fondouck,
Gué de Constantine, Duperré, Les Puits,
Lavigerie, Ouled Fayet et Voltaire (dé-
parlement d'Alger) ; Arcole, Aïn el Arba,
Bousfer, Nemours, NédromaJ, Oran, Sidi-
Bel-Abbès et Tiaret(département d'Oran).
La récolte de la feuille du palmier nain
a lieu toute l'année, elle est faite presque
exclusivement par les indigènes qui ne
s'en occupent qu'en temps perdu et lors-
que tout autre travail fait défaut, son
prix de revient étant très bas.
Le crin végétal est travaillé avec des
tambours et des peigneuses mécaniques ;
pour les qualités fines on emploie de pré-
férence des peigneuses à main. Broyées,
décortiquées et cardées, les feuilles du
palmier nain fournissent une fibre qui,
après avoir été tressée, devient extrê-
mement nerveuse et flexible au point de
concurrencer avantageusement le crin
animal, sur lequel elle présente encore
la supériorité de coûter beaucoup moins
cher.
'Il n'existe pas de grandes usines ae
crin végétal. Le palmier nain est manu-
facturé dans de petits ateliers établis à
proximité de la matière première. L'énor-
me volume occupé par les feuilles, le bas
prix de leur valeur, ne permettent pas
un transport rémunérateur à de longues
distances. La feuille de palmier nain est
en effet payée à raison d'environ deux
francs le quintal. Dès qu'elle a été trai-
tée dans les petits ateliers et légèrement
desséchée elle se vend à raison de 4 fr. 50
à 5 francs le quintal aux maisons d'ex-
portation installées dans les villes ma-
ritimes.
Ce crin végétal, que nous pourrions
appeler crin brut,subit alors une dessic-
cation complète pendant quelques jours,
puis il est mis en balles pressées, ca. -
dées, pesant 65 kilog. ou de 90 à 120 ki-
log. selon les qualités. Ils se vend alors
aux fabricants à raison de 6 à 8 fr. le quin-
tal. Pour les qualités supérieures le bot-
telage est complété par un emballage
sous toile.
Le crin végétal est utilisé de nos jours,
grâce à ses nombreux avantages, pour
le rembourrage des meubles, la confec-
tion de matelas souples et sains. Il rem-
place avantageusement le crin animal
dans tous ses emplois. Ses propriétés
hygiéniques le rendent inattaquable
par les insectes ; aussi les grandes com-
pagnies maritimes l'utilisent-elles de
préférence pour la fabrication des mate-
las destinés aux émigrants ; un matelas
ainsi confectionné emploie 12 à 15 kilog.
de crin végétal et revient à un franc,
toile non comprise, bien entendu. On l'u-
tilise encore dans de nombreux usages
domestiques pour le frottage des par-
quets et boiseries, le nettoyage des cui-
vres ; comme brosses et lavettes devais-
selle, etc. etc.
La couleur ducriu végétal est d'un vert
cendré. Le crin végétal noir est le résul-
tat de la teinture. Les filasses séchées et
mises en corde sont trempées dans un bain
de sulfate de fer servant démordait puis
plongées dani, une solution de bois de
Campêche.
Il existe plusieurs qualités de crin vé-
gétal. -,
Les qualités courantes ou ordinaires
sont employées par la bourrellerie et la
confection dE:S matelas. Leur prix varie en-
tre 9 et 10 fri mes les cent kilog. en balles.
Celles dite s « supérieures » sont utili-
sées par la tapisserie et le rembourrage
des coussin 5 de wagons. Valeur 11 à 12
francs les cents kilos. Enfin la qualité
extra, qui 50 vend 14; francs à peu près,
, ,
sert aux tapissiers pour les articles su-
périeurs.
Les principaux ports d'exportation
sont Alger et Oran.
En 1855, l'Algérie n'expédiait encore
que 327.713 kilogrammes.
Les envois s'élevaient ensuite aux chif-
fres suivants :
1860..- 1.021.931 kg.
1865. 3.142.717 kg.
1867. 4.835.630 kg.
1870. 5.2-lO.eOO kg.
187 1 9.011.919 kg.
Puis une baisse inaltendue, due à
l'encombrement des marchés et à ce que
le crin végétal n'avait pas encoreobtenu
auprès des fabricants toute la vogue dont
il allait bientôt jouir. En 1873, en effet,
les importations redescendent, à 5.922.515
kilogr. et, en 1874 à 4.534.440 kil. D'ail-
leurs de 1870 à 1879, c'est-à-dire pendant
10 ans la moyenne annuelle des exporta-
tions fut de 80.000 quintaux. Mais pen-
dant les décades suivantes l'augmenta.
tion tut considérable ; c'est ainsi que de
-
1880 à lS8911a moyenne, H,5.000 quint.
1890 à 1899 ] annuelle ?242.000
1900 à 10û9 ( fut de : 379.000
En 1909, tout particulièrement, il fut
exporté 462.476 quintaux.
Hit tout n'est pas encore dit sur l'utili-
sation du crin végétal. Il n',est pas dou-
teux que cette industrie ne prenne en-
core plus d'extension.
La matière première, c'est-à-dire le
palmier nain, n est pas prête de man-
quer. Elle couvre des surfaces immenses
et elle répondra pendant longtemps en-
core à tous les besoins de la consomma-
tion, si considérable qu'ils soient.
Les principaux pays importateurs sont
l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie, la Bel-
gique, l'Italie, les Etats-Unis et la Rus-
sie. Dé 1902 à 1909, la France a absorbé
589.630 quintaux de crin végétal. Les
demandes annuelles oscillent autour de
80.000 quintaux.
L'Algérie se classe première parmi
lesDpays importateurs de crin végétal à
Hambourg. Ce sont surtout les produits
de la région d'Oran qui trouvent en Al-
lemagne la plus grande consommation.
Les produits supérieurs du départe-
ment d'Alger sont moins recherchés; cela
provient de ce qu'en Allemagne le crin
végétal ne s'emploie que pour les mate-
las ordinaires.
L'Angleterre estime que ses achats de
crin végétal faits en Algérie n'ont aucune
tendance à s'accroître, car elle n'utilise
ce produit que pour la fabrication d'é-
toupes de qualité inférieure servant au
rembourrage des meubles bon marché.
Elle emploie de préférence une fibre pro-
venant de Ceylan et nommée, chez nos
voisins « Cpylan coir fibre ». Mais il est
possible qu'un revirement se produise
bientôt et que l'Algérie voie affluer les
commandes anglaises. En Autriche-Hon-
grie, le crin végétal jouit de l'exemption
des droits d'entrée. Il y est connu sous
les noms de crin d'Alger, crin d'Oran
qui indiquent tout à la fois et sa prove-
nance et sa qualité ; celle d'Alger étant
la plus estimée. On l'utilise pour les
mêmes usages qu'ailleurs et son emploi
tend à se généraliser de plus en plus.
Le crin végétal est également libre de
droits d'entrée en Belgique. Dans les
statistiques douanières de ce pays il est
classé parmi les matières textiles brutes,
comme les écorces iilamenteuses, les
fibres et filasses d'aloès, etc. Il est con-
currencé én Belgique par le varech et le'
zostère (varech hollandais): dont les prix
de vente sont à peu près identiques.
L'Italie emploie le crin végétal par
quantités assez considérables pour la
confection des matelas à bas prix utilisés
par les hôpitaux et les émigrants. Il
entre en Italie en franchise de douanes
mais il est réclamé un simple droit sta-
tistique de dix centimes par 100 kilog.
Les Etats-Unis utilisent peu le crin
végétal d'Algérie et lui préfèrent une
fibre végétale du pays connue sous le
nom de « Florida fiber a. Les importa-
tions auraient atteint, d'après les sta-
tistiques douanières américaines :
Eu 1905-1906 : 1.714 tonnes payées
45.508 dollars ;
En 1906-1907 :821 tonnes payées 17.041
dollars.
Il serait difficile d'augmenter les im-
portations de crin végétal d'Algérie aux
Etats-Unis par suite du prix de revient
trop élevé de cette marchandise qui ne
laisse pas une marge de bénéfice suffi-
sante.
L'Algérie exporte encore du crin végé-
tal en Turquie, Egypte, Grèce, Russie,
Suède, Danemark, Norvège, Pays-Bas.
Dans ce dernier pays, le crin végétal, à
l'état brut, est libre de droits d'entrée,
comme presque partout d'ailleurs, mais
livré en tresse, ce qui est presque géné-
ral pour les Pays-Bas,il paie un droit de
5 de sa valeur. Les qualités ordinaires
y sont peu demandées. On préfère les
qualités fines et extra-fines.
En Russie, par exception, le crin vé-
gétal paie un droit de douane de quinze
kopeck par 100 kilog, auxquels il faut
ajouter de 5 à 7 kopecks pour frais di-
vers (100 kopeck valent 1 rouble, soit-
2 fr. 66).
Il faut majorer tous les prix d'achat
que nous avons indiqués, à l'exportation,
des frais de transport. Le fret moyen est
de 14 à 1G francs la tonne de tous ports
d'Algérie à bord Anvers. Nous donnons
ei-après, d'après les renseignements
fournis par la Banque de l'Algérie, les
quantités absorbées par les principaux
pays importateurs de 1900 à 1908.
P. PARIS.
ANNÉES ALLEMAGNE AUTRICHE 1 BELGIQUE ITALIE RUSSIE ÉTATS-UNIS
1900 57.555 31.807 49.438 32.969 11.878 31.759
1901 49.963 32.553 38.075 23.183 4.918 13.170
1902 54.407 40.218 51.858 38.381 11.687 18.743
1903 79.354 44.160 56.943 52.797 19. 5 1 t9 30.233
1904 48.108 49.789 37.212 34.782 '.0.881 14.876
1905 96.869 58.146 56.084 55.886 12.988 32.204
1906 74.442 50.193 54,842 72.812 15.742 29.305
1907 92.312 00.761 46.096 77.766 16.138 39.424
1908 83.120 55.120 45.996 111.323 24.216 23.110
LE NUMÉRO ? 25 centimes
riHAOUÏ 1910
Les Annales Coloniales
-.d d 2 £ c A*,,
JOURNAL HEBDOMADAIRE DES QUESTIONS EXTERIEURES
ENTENTE DANS TOUTES LES GARES
PARAISSANT LE JEUDI
Adresser les communications au Secrétaire de la Rédaction.
Les Annonces et Réclames sont reçues aux Bureaux du JournaL
DIRECTEURS :
M. RUEDEL Se L. G. THÉBAULT
20, Galerie d'Orléans (Palais-Royal), Paris 1er
Code Français A. Z.
LES :M:A.NU'SCRXTS 3sroisr HTSÉHÉS SONT PAS RENDUS
La Tribune libre des Annales Coloniales éit-ou-verte à toutes les opinions
Ua an 6 mois
S France* 40 fr. S fr. 50
ahAHHANiAMfe | ETRANGER ET COLONIES 25 » 12 fr. 50
On s'abonne sans frais dans tous les Bureaux de Poste
Le programme du Gouverneur
Général de Madagascar
M. Picquié n'a pas manqué à la tra-
dition d'après laquelle les chefs de nos
grandes colonies instruisent l'opinion,
avant d'occuper leur poste, de la ligne
de conduite qu'ils sont, en pl'incipe,dé-
terminés à tenir. Quelques-uns de nos
confrères ont recueilli, de la bouche du
nouveau Gouverneur général de Mada-
gascar, des déclarations d'un haut inté-
rêt, dont on @ ne peut s'empêchel' de dire,
a priori, qu'elles sont prudentes et avi-
sées.
Ce qui frappe tout d'abord, dans le
programme tracé par M. Picquié, c'est
qu'il n'inovera pas. L'œuvre du général
Gallieni et de M. Augagneur sera conti-
nuée. Ainsi, la Grande Ile jouit de ce
privilège rare autant que précieux de
n'être point soumise à ces bouleverse-
ments si néfastes pour les intérêts d'une
colonie, si déprimants pour son person-
nel, qui marquent d'ordinaire les mu-
tations de gouverneurs.Madagascar évo-
lue sans à coup et ce n'est pas un spec-
tacle banal de constater que, depuis dix
ans, ce pays connaît une administration
uniforme dans son ensemble, sans pré-
judice, cependant, des changements exi-
gés par le progrès. Les transitions y ont
toujours été ménagées. Ce que le géné-
ral Gallieni n'avait pu accomplir pen-
dant quatre années de conquête et cinq
ans d'organisation, M. Augagneur l'a
lait. M. Picquié veut poursuivre cette
tache, se conformant de la sorte à la
règle recommandable qui s'oppose à l'é -
dification d'un organisme administra-
tif rigide, impuissant à sui vre les be-
soins toujours nouveaux d'un pays
neuf et à les satisfaire. Comment ne l'en
louerait-on pas ?
En matière économique, c'est au dé-
veloppement des moyens de communi-
cation que s'appliquera par-dessus tout
le Gouverneur Général. C'est là qu'ap-
paraît aussitôl son désir de poursuivre
œuvre de ses prédécesseurs. Mener à
Tamatave le chemin de fer de Bricka-
ville à Tananarive, accroître dans de
larges proportions le réseau routier, tel
sera le but, auquel avaient si largement
travaillé MM. Gallieni et Augagneur.Ce
que le premier appelait « le chemin de
fer du riz » remplira alors l'office pour
lequel il fut créé et les vastes espaces de
l'intérieur, sillonnés par d'excellentes
routes, attireront des efforts qui, de la
part des indigènes comme des Européens,
seront essentiellement productifs.
La colonisation agricole sous toutes
ses formes retiendra l'attention et solli-
citera les initiatives de M. Picquié. Ma-
dagascar continuera ainsi à devenir la
terre des agriculteurs pour laquelle il a
été fait de si grands sacrifices depuis
notre occupation. Cette perspective, un
moment considérée comme un mirage,
finira, à force de patience, de labeur
persévérant et d'encouragements, par se
transformer en une fructueuse réalité.
Le nouveau Gouverneur Général a, en
particulier, l'intention d'organiser la pe-
tite propriété foncière et il ne saurait
rien faire qui fût mieux et plus géné-
reusement la continuation des vues
de ses prédécesseurs,
M. Picquié a tout naturellement une
grande confiance dans le loyalisme des
indigènes à l'égard de la France. Il a
raison. Madagascar jouit d'une paix so-
lide qui sera par la suite.intangible. Les
races malgaches, non embarrassées de
traditions, d'un passé, d'un nationalis-
me sont appelées à se franciser. Infi-
niment perfectibles, très intelligentes
dans leur ensemble, pourvues d'un es-
prit curieux qui les pousse à connaître
et à posséder, elles viennent à nous ra-
pidement et sans arrière pensée.
Cette constatation si satisfaisante, en
nous permettant d'entrevoir pour l'ave-
nir l'existence d'une population vrai-
ment française dans l'Océan Indien, n'ex-
clut pas la prudence pour le présent.
Aussi, féliciterons-nous M. Picquié de
vouloir conserver des forces honorables
et surveiller attentivement l'état des es-
prits, notamment dans le sud-est de
l'île. Sans pousser un vain cri d'alar-
me, que rien ne justific, il est permis
de dire qu'il subsiste, en cette partie de
la colonie, des ferments de barbarie as-
sez forts pour provoquer des complica-
tions passagères à un moment donné.
Sait-on jamais ce qui se passe dans
l'âme d'un peuple, quand il est, surtout,
composé d'individus non civilisés, im-
pressionnables et violents. M. Picquié
est prévenu ; c'est de tous points par-
fait.
L enseignement et l'assistance seront
les uniques armes qu'emploiera de son
plein gré le chef delà colonie. Ici en-
core apparaît la tradition dont s'inspi-
rent les Gouverneurs généraux de
Madagascar. On ne saurait oublier, en
effet, le magnifique effort que lit le gé-
néral Gallieni pour créer l'école laïque,
sans heurter des efforts confessionnels
simultanés qu'en l'état politique du mo-
ment il eût été dangereux d'interdire et
qu'il fallait mieux réglementer, au pro-
lit du développement de l'instruction.
On se souvient aussi de l'incompara-
ble service que rendit à la cause de cet
enseignement laïque M. Augagneur,
par les décisions qu'il sut prendre et qui
ont mis l'école officielle, donc neutre, au
premier rang pour tou jours. M. Picquié
n'a qu'à compléter et c'est ce qu'il se
promet de faire.
Quant àl'assistance médicale, elle est
aujourd'hui si bien installée à Madagas-
car qu'elle fait, peut-on dire, partie de
là vie du peuple. Le général Gallieni
en avait fait un modèle ; M. Augagneur,
médecin par surcroît, lui a donné toule
sa force productive et régénératrice, M.
Picquié entend pousser les groupes d'as-
sistance jusque dans les régions les plus
excentriques, où ils contribueront à re-
lever le sort de l'indigène età asseoir no-
tre influence. On sait que Madagascar
souffre du manque de population et de
la faiblesse do ses races, qui ne se sont
point relevées, encore, des misères su-
bies sous les régimes antérieurs à no-
tre occupation.
L'avenir de l'île réside tout entier dans
l'accroissement du nombre de ses habi-
tants et cet accroissement se produira
de lui-même du jour où, par des mesu-
res sanitaires suffisantes, nous aurons
mis un terme à la fragilité des individus,
supprimé les causes de disparition en
mettant les malgaches en état de plus
forte résistance aux attaques des affec-
tions diverses dont ils meurent si aisé-
ment. Déjà cette œuvre est en excel-
lente voie. Il est agréable de penser
qu'elle sera poursuivie.
Il n'y a donc, dans les déclarations
faites par M. Picquié, que des motifs,
pour les coloniaux, de se réjouir. L'ho-
norable Gouverneur général, qui a
beaucoup d'expérience, connaît en par-
ticulier la Grande Ile. Partant avec le
désir de ne pas révolutionner, mais de
perfectionner, il se trouvera placé dans
les meilleures conditions de succès. Et,
dès lors, il est permis de dire que s'il
rencontre de serienx obstacles, ceux-ci
viendront surtout de la multiplicité, de
la diversité des intérêts européens re-
présentés dans la colonie. A ce point
de vue, il n'y a pas à se le dissimuler,
Madagascar est d'administration déli-
cate. On y rencontre plusieurs courants
d'opinion et, à défau t d'une grande au-
torité, si M. Picquié ne veut pas que
son gouvernement rencontre d'adversai-
res, ce qui est bien difficile, il lui fau-
dra user d'une grande diplomatie. Les
représentants de la colonisation sont
très nombreux à Madagascar ; ils sont
aussi très combatifs parce qu'ils ont
une notion nette de leurs besoins. Mais
ces besoins se heurtent parfois et les opi-
nions sont diverses. On l'a bien vu de-
jaiis dix ans. Fort heureusement, la
situation commerciale est, à l'heure ac-
tuelle, très satisfaisante. La Grande lie
asans peine surmonté lu crise qui, un
moment, se produisit, précisément parce
que l'afflux des efforts privés avait été
quelque peu disproportionné aux res-
sources immédiates qui s'offraient à eux.
Madagascar ne peut, comme 1 Afrique
Occidentale, connaître un développe-
ment économique quasi instantané.
C'est la terre de l'avenir et c'est peu à
peu qu'elle viendra à la pleine prospé-
rité. Telle quelle, déjà, notre colonie
offre de superbes ressources et la pro-
gression constatée des résultats ne peut
que s'accentuer.
Le programme de M. Picquié y pour-
voira, du reste, en améliorant les con-
ditions de progrès dont Madagascar est
redevable au général Gallicni. C'est
pourquoi il faut encore se réjouir des
intentions qu'a le gouverneur général
de se montrer le continuateur de ses
devanciers.
Henri COSNIER,
Député de l'Indre.
-"J'V"
Informations Coloniales
M. Arnaud, inspecteur général de 2e classe
des des colonies, est nommé directeur du con-
trôle au ministère des colonies.
*
* *
M. Méray, inspecteur général de 2° classe
des colonies, est nommé inspecteur général de
lre classe.
M. Pherivong, inspecteur de pe classe des
colonies, est nommé inspecteur général de de
2e classe.
* ,
JI. Tllleber,so its- chef de bureau de lrc classe
faisant fonctions de chef de bureau à Vadmi-
nistration centrale du ministère des colonies,
est nommé chef de bureau de 3e classe. et placé
en service détaché pour exercer les fonctions
de délégué dit département des colonies près les
sociétés congolaises.
*
* *
AT. Rognon, gouverneur des colonies, se-
crétaire général dit gouvernement général de
VAfrique Equatoriale, rejoindra son poste par
le paquebot quittant Bordeaux le 25 septem-
bre 1910.
* *
M. Antonetti, secrétaire général des colo-
nies ysera chargé par le Gouverneur Général de
l'Afrique Occidentale' de la direction des fi-
nances au moment du départ pour la métro-
pole de V Inspecteur des colonies Demaret.
*
* *
M. le lieutenant-colonel Lenfcint va s'em-
barquer pour VIndochine où il pa. prendre
le commandement des batteries dit cap Saint-
Jacques.
* *
Al. Samary gouverneur de la Guyane, est
débarqué à Cayenne le 29 juillet, lll. Thé-
rond, qui avait été chargé de l'intérim du gOIl-
vernement, a quitté la colonie pour rentrer en
France.
* *
Ln Gouverneur Général de VAfrique Oc-
cident aie française a renouvelé pour 191.0 la
mission scienlif Ul'LC conf iée, en 1909, a AI.
Chudeau, docteur ès sciences naturelles. M.
Chudeau, devra, au cours de cette nouvelle
mission, visiter la Mauritanie el la région
de Taoudénil et de Cao, au double point de vue
géologique et minéralogique.
#*#
Le Journal officiel publia un décret por-
tant que les fonds provenant de Vemprunt de
'100 millions contracté en vertu de la loi du
22 janvier 1907 par le gouvernement général
de l'Afrique Occidentale française peuvent
être employés en valeurs du Trésor.
* *
Un décret du 1er août fixe ainsi qu'il suit
les quantités de produits originaires de la
Guinée française qni pourront être admises
en France du 1er juillet '1910 au 30 juin 1911
dans les conditions des décrets des 30 juin
1892, 22 août 1896 et 25 août 1900 :
Café, 3.000 kilogrammes.
Bananes, '1 million de kilogrwnmes.
* *
Le Conseil d'Etat vient cl'approuver en as-
semblée générale le projet de décret portant
réorganisation de Vadministration centrale des
colon.ies.
* *
Le Journal Officiel du 9 août publie un
rapport suivi d'un décret portant réorganisa-
tion du personnel des travaux publics et des
mines des colonies autres que VIndo-Chine, la
Martinique, la Guadeloupe et la Réunion.
*
* *
M. Picquié, Gouverneur général de jJJada-
gascar et Al. Garbil, secrétaire général, l'ega-
gneront leur poste par le paquebot qui quittera
Alarscillc le 25 octobre.
- ---------- -#1 ,,"-
MAUVAISES ÉCONOMIES
Dans une première étude du budget
des troupes coloniales, dont le rappor-
teur désigné est M. Augagneur, la com-
mission du budget a admis certaines ré-
d notions sur les effectifs des troupes à
Madagascar, à la Martinique et à laNou-
velle-Calédonie.
Au mois de mars dernier, sur un
amendement que nous avons présenté
au chapitre des crédits destinés au grou-
pe militaire de l'Afrique orientale, le
Ministre des colonies et la Chambre ont
décidé le remplacement d'un régiment
de tirailleurs sénégalais par un régi-
ment malgache.
Il n'y a, croyons-nous, aucun danger
à consacrer définitivement cette mesure,
peut-être même à l'étendre au dernier
régiment sénégalais en service à Mada-
gascar ; mais en ce qui concerne la
Martinique une nouvelle réduction de
l'effectif n'est-elle pas aussi imprudente
qu'inopportune ?
Qui ne se rappelle, en effet, la néces-
sité urgente où l'on s'est, il y a quel-
ques mois, trouvé d'aller prendre à
Fort-de-France une compagnie d'in-
fanterie coloniale destinée à rétablir'
l'ordre troublé à la Guadeloupe? N'a-t-il
pas fallu même envoyer de France un
croiseur, avec troupes de débarquement
et un renfort de 150 hommes de la gar-
de républicaine ?
La dépense de ce déploiement de for-
ces pèse aujourd'hui si lourdement, pa-
rait-il, sur le budget de la Guadeloupe,
que les services publics sont entravés et
la solde des fonctionnaires impayée ou
payée sur des fonds momentanément
empruntés.
A quoi bon alors chercher une mai-
tre économie sur un corps, non pas
d'occupation, mais de simple police,
s'il faut ensuite un accroissement bien
plus important de dépenses, parce qu'il
faut faire venir de loin et à grands
frais des renforts qui courront le risque
d'arriver trop tara ?
Il est vrai que des gens qui se pré-
Il est vra i qtie es n
tendent bien informés assurent que la
récente agitation signalée à la Guade-
loupe était plus factice que réelle. C'é-
tait surtout une agitation politique com-
pliquée de haine de races, le tout pour
servir à la période électorale des mois
de mars et avril derniers.
On prête à M. Augagneur l'intention
de justifier les diminutions qu'il vient de
faire adopter sur le petit budget mili-
taire des Antilles par une considération
certainement de réelle valeur ; on sup-
primerait dorénavant les troubles dans
les Antilles en supprimant leur indis-
cutable cause, c'est-à-dire les élections.
La commission de réforme électorale
qui va travailler pour la France s'oc-
cuperait aussi des colonies.
Quoi qu'il en soit, pour ce qui concer-
ne les Antilles, il est certain que la di-
minution infligée également à l'effectif
de la Nouvelle-Calédonie ne peut être
justifiée parle môme argument. Si l'on
diminue la troupe il faudra augmen-
ter la gendarmerie. Précisément, dira-
t-on, c'est là que réside l'économie, car
la troupe est payée par la métropole,
tandis que c'est la colonie qui supporte
la dépense delà gendarmerie. - -
Le raisonnement est tout à fait faux.
La Nouvelle-Calédonie, en effet, qui
compte encore un effectif de dix ou dou-
ze mille forçats ou libérés, qui encourt,
de ce chef, c'est-à-dire de la présence
d'une population dangereuse dont la
métropole s'est débarrassée, un excé-
dent de charges de police, dont person-
ne ne peut songer à nier l'importance,
la Nouvelle-Calédonie, disons-nous,plie
depuis longtemps sous la charge de son
budget. C'est le colon calédonien qui
est le plus fort contribuable du monde.
La colonie ne subsiste en ce moment
que grâce aux fonds du dernier emprunt,
répartis en salaires versés en définitive
chez les petits commerçants. La crise
économique est en permanence dans
notre colonie d'Australie. Ce n'est donc
pas le moment de rien retrancher à au-
cun des budgets dont elle subsiste à pei-
ne. Qu'on lui retire des troupes, soit,
mais alors que la Métropole prenne sa
j nste part des dépenses de police dont
elle est elle-même l'unique cause, et
dont la surcharge imposée au budget lo-
cal de la Nouvelle-Calédonie n'est pas
moindre de 500.000 francs.
- J. LEMAIRE.
-– –-
Au Ministère des Colonies
AI. Trouilloi, ministre des colonies, vient
d'appeler à la direction de son cabinet,en rem-
placement de M. Duprat, qui vient de prendre
la direction effective des services de l'Office
Colonial, M. André Ripert,maître des requê-
tes au Conseil d'Etat. !
Cette désignation flatteuse sera unanime-
ment applaudie dans les milieux coloniaux,
car on ne saurait ignorer la place importante
que M. Ripert s'est créée à la section conten-
tieuse du Conseil
Homme aimable , juriste distingué, esprit
précis et clair nous ne doutons pas que 31. Ri-
pert donnera aux colonies toute la mesure de
son intelligence et sera pour le ministre des co-
lonies un auxiliaire précieux dans l'applica-
tion des nouveaux règlements réformant l'ad-
ministration centrale.
Henri COSNIER.
Député de l'Indre.
LA QUESTION DU CONGO
L'annexion de l'ancien Etat indépen-
dant du Congo par la Belgique n'a pas
encore été reconnue par l'Angleterloe
ni par les Etats-Unis. Ces deux puis-
sances, indignées des atrocités commi-
ses à l'égard des populations indigènes,
exigent, avant de reconnaître le nouvel
ordre de choses, que des garanties leur
soient données qu'il y aura effectivement
quelque chose de changé.
La campagne de la Congo Réforme
Association, basée sur des faits consta-
tés ou contrôlés par des enquêtes offi-
cielles, a révélé au monde stupéfait que
les procédés employés au Congo léopol-
dien, pour pénétrer l'Afrique et civili-
ser les indigènes, n'étaient autres, mais
multipliés à l'infini et érigés en système
pendant un quart de siècle déjà que les
crimes reprochés par nous au Sultan
marocain Moulay Hafid et. invoqués
précisément comme motif impérieux
d'une intervention civilisatrice.
r 1. i« i i • ̃•
La spoliation complète des indigène
congolais par la prise de possesion du
sol et de tout ce qu'il renferme ou
produit, la condamnation au travail for-
cé de la population entière, hommes,
femmes et enfants, afin d'exploiter
pour le maitre, c'est-à-dire pour le roi
Léopold et les compagnies commer-
ciales fondées par lui, ce même sol,
sur lequel ils étaient désormais étran-
gers et esclaves, le martyre jusqu'à la
mutilation des mains ou « des pieds cou-
pés, et jusqu'à la mort des malheu-
reux travailleurs, hommes ou en-
fants n'ayant pu fournir la quotité de
caoutchouc exigée, la destruction systé-
L'ALGERIE
A L'EXPOSITION DE BRUXELLES
LE CRIN VÉGÉTAL
Le crin végétal provient du palmier
nain qui recouvre en Algérie de vastes
étendues de terrains. Ce végétal croît
spontanément dans tout le nord de l'Al-
gérie mais plus particulièrement dans
les départements d'Alger et d Oran ; on
le rencontre même en Espagne et dans
les envirous de Nice. Toutes les terres
lui sont propices ; il ne dédaigne même
pas les dunes de la côte, les sommets
rocailleux des montagnes, restant in-
sensible au froid comme à la chaleur,
raccommodant aussi bien delà pluie que
delà sécheresse. Il envahit tout, cou-
vrant de ses broussailles basses, épais-
ses et épineuses des superficies consi-
dérables de terres utilisables pour l'agri-
culture. Son habitat préféré est compris
dans uue zone s'étendant à près de 200
kilomètres de la mer, à l'intérieur de l'Al-
gérie. Le palmier nain ne demande à la
terre que le strict nécessaire pour sa nour-
riture. Il la protège, eu échange, contre
les pluies torrentielles de l'hiver et lui
conserve toutes ses qualités. Il n'est, en
effet, aucun colon ulgerien qui ne sache
que les premières cultures faites sur des
terrains récemment dégarnis des brous-
sailles de palmiers nains, ne donnent de
brillants résultats et l'expression «terre
à palmiers » s'applique toujours aux
meilleures terres, à celles plus particu-
lièrement recherchées par l'agriculture.
Cet avantage, dû à sa présence, est une
des causes de sa destruction et son aire,
sous les progrès de la colonisation, di-
minue de jour en jour.
L'industrie dy crin végétal a pris nais-
sance en 1845. Mais ce ne fut qu'à par-
tir de 1853 que cette matière première
prit rang parmi les exportations algé-
riennes et nous verrons plus loin que ces
exportations augmentèrent dans des pro-
portions considérables.
Dans les premières années de la con-
quête le palmier nain provenant des tei -
res défrichées était mis au rebut et
brûlé sur place avec les autres brous-
sailles. En 1847, MM. Raphaël Delorme
et Pierre Averseng songèrent à réduire
les frais de défrichement et de mise en
valeur d3 leurs propriétés nouvelles en
utilisant le palmier nain. Ils avaient re-
marqué que les indigènes fabriquaient
avec ses feuilles des tapis, des nattes, des
paniers, des hottes pour le transport des
fruits, des balais et même des cordes
d'une solidité particulière. Ils résolu-
rent d'utiliser les propriétés textiles des
ieuilles du palmier nain pour en former
une sorte de crin qui prit le nom de
« crin végétal ». La première usine fut
créée à Chéragas, tout près d'Alger. Cette
industrie occupe actuellement de nom-
breuses fabriques réparties sur tout le
territoire algérien, mais les principaux
centres de fabrication sont dans les dé-
partements d'Alger et d'Oran. Elle est
moins répandue dans le département de
Constantine où quelques usines existent
à Akbou, Amokran, Bône et Talcdempt.
Les usines les plus importantes se
trouvent à Affreville, Arba, Bordj-Mé-
naiel, Cherchell, ElAffroun, Fondouck,
Gué de Constantine, Duperré, Les Puits,
Lavigerie, Ouled Fayet et Voltaire (dé-
parlement d'Alger) ; Arcole, Aïn el Arba,
Bousfer, Nemours, NédromaJ, Oran, Sidi-
Bel-Abbès et Tiaret(département d'Oran).
La récolte de la feuille du palmier nain
a lieu toute l'année, elle est faite presque
exclusivement par les indigènes qui ne
s'en occupent qu'en temps perdu et lors-
que tout autre travail fait défaut, son
prix de revient étant très bas.
Le crin végétal est travaillé avec des
tambours et des peigneuses mécaniques ;
pour les qualités fines on emploie de pré-
férence des peigneuses à main. Broyées,
décortiquées et cardées, les feuilles du
palmier nain fournissent une fibre qui,
après avoir été tressée, devient extrê-
mement nerveuse et flexible au point de
concurrencer avantageusement le crin
animal, sur lequel elle présente encore
la supériorité de coûter beaucoup moins
cher.
'Il n'existe pas de grandes usines ae
crin végétal. Le palmier nain est manu-
facturé dans de petits ateliers établis à
proximité de la matière première. L'énor-
me volume occupé par les feuilles, le bas
prix de leur valeur, ne permettent pas
un transport rémunérateur à de longues
distances. La feuille de palmier nain est
en effet payée à raison d'environ deux
francs le quintal. Dès qu'elle a été trai-
tée dans les petits ateliers et légèrement
desséchée elle se vend à raison de 4 fr. 50
à 5 francs le quintal aux maisons d'ex-
portation installées dans les villes ma-
ritimes.
Ce crin végétal, que nous pourrions
appeler crin brut,subit alors une dessic-
cation complète pendant quelques jours,
puis il est mis en balles pressées, ca. -
dées, pesant 65 kilog. ou de 90 à 120 ki-
log. selon les qualités. Ils se vend alors
aux fabricants à raison de 6 à 8 fr. le quin-
tal. Pour les qualités supérieures le bot-
telage est complété par un emballage
sous toile.
Le crin végétal est utilisé de nos jours,
grâce à ses nombreux avantages, pour
le rembourrage des meubles, la confec-
tion de matelas souples et sains. Il rem-
place avantageusement le crin animal
dans tous ses emplois. Ses propriétés
hygiéniques le rendent inattaquable
par les insectes ; aussi les grandes com-
pagnies maritimes l'utilisent-elles de
préférence pour la fabrication des mate-
las destinés aux émigrants ; un matelas
ainsi confectionné emploie 12 à 15 kilog.
de crin végétal et revient à un franc,
toile non comprise, bien entendu. On l'u-
tilise encore dans de nombreux usages
domestiques pour le frottage des par-
quets et boiseries, le nettoyage des cui-
vres ; comme brosses et lavettes devais-
selle, etc. etc.
La couleur ducriu végétal est d'un vert
cendré. Le crin végétal noir est le résul-
tat de la teinture. Les filasses séchées et
mises en corde sont trempées dans un bain
de sulfate de fer servant démordait puis
plongées dani, une solution de bois de
Campêche.
Il existe plusieurs qualités de crin vé-
gétal. -,
Les qualités courantes ou ordinaires
sont employées par la bourrellerie et la
confection dE:S matelas. Leur prix varie en-
tre 9 et 10 fri mes les cent kilog. en balles.
Celles dite s « supérieures » sont utili-
sées par la tapisserie et le rembourrage
des coussin 5 de wagons. Valeur 11 à 12
francs les cents kilos. Enfin la qualité
extra, qui 50 vend 14; francs à peu près,
, ,
sert aux tapissiers pour les articles su-
périeurs.
Les principaux ports d'exportation
sont Alger et Oran.
En 1855, l'Algérie n'expédiait encore
que 327.713 kilogrammes.
Les envois s'élevaient ensuite aux chif-
fres suivants :
1860..- 1.021.931 kg.
1865. 3.142.717 kg.
1867. 4.835.630 kg.
1870. 5.2-lO.eOO kg.
187 1 9.011.919 kg.
Puis une baisse inaltendue, due à
l'encombrement des marchés et à ce que
le crin végétal n'avait pas encoreobtenu
auprès des fabricants toute la vogue dont
il allait bientôt jouir. En 1873, en effet,
les importations redescendent, à 5.922.515
kilogr. et, en 1874 à 4.534.440 kil. D'ail-
leurs de 1870 à 1879, c'est-à-dire pendant
10 ans la moyenne annuelle des exporta-
tions fut de 80.000 quintaux. Mais pen-
dant les décades suivantes l'augmenta.
tion tut considérable ; c'est ainsi que de
-
1880 à lS8911a moyenne, H,5.000 quint.
1890 à 1899 ] annuelle ?242.000
1900 à 10û9 ( fut de : 379.000
En 1909, tout particulièrement, il fut
exporté 462.476 quintaux.
Hit tout n'est pas encore dit sur l'utili-
sation du crin végétal. Il n',est pas dou-
teux que cette industrie ne prenne en-
core plus d'extension.
La matière première, c'est-à-dire le
palmier nain, n est pas prête de man-
quer. Elle couvre des surfaces immenses
et elle répondra pendant longtemps en-
core à tous les besoins de la consomma-
tion, si considérable qu'ils soient.
Les principaux pays importateurs sont
l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie, la Bel-
gique, l'Italie, les Etats-Unis et la Rus-
sie. Dé 1902 à 1909, la France a absorbé
589.630 quintaux de crin végétal. Les
demandes annuelles oscillent autour de
80.000 quintaux.
L'Algérie se classe première parmi
lesDpays importateurs de crin végétal à
Hambourg. Ce sont surtout les produits
de la région d'Oran qui trouvent en Al-
lemagne la plus grande consommation.
Les produits supérieurs du départe-
ment d'Alger sont moins recherchés; cela
provient de ce qu'en Allemagne le crin
végétal ne s'emploie que pour les mate-
las ordinaires.
L'Angleterre estime que ses achats de
crin végétal faits en Algérie n'ont aucune
tendance à s'accroître, car elle n'utilise
ce produit que pour la fabrication d'é-
toupes de qualité inférieure servant au
rembourrage des meubles bon marché.
Elle emploie de préférence une fibre pro-
venant de Ceylan et nommée, chez nos
voisins « Cpylan coir fibre ». Mais il est
possible qu'un revirement se produise
bientôt et que l'Algérie voie affluer les
commandes anglaises. En Autriche-Hon-
grie, le crin végétal jouit de l'exemption
des droits d'entrée. Il y est connu sous
les noms de crin d'Alger, crin d'Oran
qui indiquent tout à la fois et sa prove-
nance et sa qualité ; celle d'Alger étant
la plus estimée. On l'utilise pour les
mêmes usages qu'ailleurs et son emploi
tend à se généraliser de plus en plus.
Le crin végétal est également libre de
droits d'entrée en Belgique. Dans les
statistiques douanières de ce pays il est
classé parmi les matières textiles brutes,
comme les écorces iilamenteuses, les
fibres et filasses d'aloès, etc. Il est con-
currencé én Belgique par le varech et le'
zostère (varech hollandais): dont les prix
de vente sont à peu près identiques.
L'Italie emploie le crin végétal par
quantités assez considérables pour la
confection des matelas à bas prix utilisés
par les hôpitaux et les émigrants. Il
entre en Italie en franchise de douanes
mais il est réclamé un simple droit sta-
tistique de dix centimes par 100 kilog.
Les Etats-Unis utilisent peu le crin
végétal d'Algérie et lui préfèrent une
fibre végétale du pays connue sous le
nom de « Florida fiber a. Les importa-
tions auraient atteint, d'après les sta-
tistiques douanières américaines :
Eu 1905-1906 : 1.714 tonnes payées
45.508 dollars ;
En 1906-1907 :821 tonnes payées 17.041
dollars.
Il serait difficile d'augmenter les im-
portations de crin végétal d'Algérie aux
Etats-Unis par suite du prix de revient
trop élevé de cette marchandise qui ne
laisse pas une marge de bénéfice suffi-
sante.
L'Algérie exporte encore du crin végé-
tal en Turquie, Egypte, Grèce, Russie,
Suède, Danemark, Norvège, Pays-Bas.
Dans ce dernier pays, le crin végétal, à
l'état brut, est libre de droits d'entrée,
comme presque partout d'ailleurs, mais
livré en tresse, ce qui est presque géné-
ral pour les Pays-Bas,il paie un droit de
5 de sa valeur. Les qualités ordinaires
y sont peu demandées. On préfère les
qualités fines et extra-fines.
En Russie, par exception, le crin vé-
gétal paie un droit de douane de quinze
kopeck par 100 kilog, auxquels il faut
ajouter de 5 à 7 kopecks pour frais di-
vers (100 kopeck valent 1 rouble, soit-
2 fr. 66).
Il faut majorer tous les prix d'achat
que nous avons indiqués, à l'exportation,
des frais de transport. Le fret moyen est
de 14 à 1G francs la tonne de tous ports
d'Algérie à bord Anvers. Nous donnons
ei-après, d'après les renseignements
fournis par la Banque de l'Algérie, les
quantités absorbées par les principaux
pays importateurs de 1900 à 1908.
P. PARIS.
ANNÉES ALLEMAGNE AUTRICHE 1 BELGIQUE ITALIE RUSSIE ÉTATS-UNIS
1900 57.555 31.807 49.438 32.969 11.878 31.759
1901 49.963 32.553 38.075 23.183 4.918 13.170
1902 54.407 40.218 51.858 38.381 11.687 18.743
1903 79.354 44.160 56.943 52.797 19. 5 1 t9 30.233
1904 48.108 49.789 37.212 34.782 '.0.881 14.876
1905 96.869 58.146 56.084 55.886 12.988 32.204
1906 74.442 50.193 54,842 72.812 15.742 29.305
1907 92.312 00.761 46.096 77.766 16.138 39.424
1908 83.120 55.120 45.996 111.323 24.216 23.110
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 94.37%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 94.37%.
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/7
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k65410566/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k65410566/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k65410566/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k65410566/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k65410566
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k65410566
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k65410566/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest