Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, Z-51248
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
JOURNAL DES FEMMES.
N" M — OCTOBRE 1S46.
LE TALISMAN.
1.
Maître Nobilibus.
En 1573', on voyait à Grenoble, sur la rive gauche de l'Isère, an peu au-dessous de l'ancien pont de bois, une maison qui s'é- tendait le long du fleuve et dont les murs, noircis par le temps, étaient incessamment battus des flots limoneux, mal contenus par de grossières digues. Sur le milieu de la façade, une tour octogone, s'avançant en saillie, donnait à cette habitation un ca- ractère bizarre qui surprenait au premier abord.
Dès que la nuit commençait à tomber, le peuple redoutait de passer devant cette sombre demeure, sur laquelle on racontait des choses étranges.
Un vieux militaire, qui avait servi comme anspessade sous Henri IV, et à qui on avait donné pour retraite la garde de la tourelle qui était à l'entrée du pont, prétendait avoir vu briller, passé le couvre-feu, une lumière dans la tour dont nous avons parlé. D'autres fois, à une profonde obscurité il avait vu succé- der des clartés bleuâtres qui paraissaient et disparaissaient, comme les exhalaisons qui s'enflamment au-dessus des marais pendant les nuits d'été.
Ces récils, auxquels se mêlaient des commentaires non moins curieux, avaient environné cette habitation d'un prestige de ter- reur qui s'étendait sur maître Nobilibus, cordelier, qui en avait fait sa demeure.
Ce cordelier était un homme de taille moyenne, dont les membres grêles et chétifs soutenaient une tête énorme pres-
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