Titre : Le Parnasse : organe des concours littéraires de Paris
Éditeur : F. Javaux (Paris)
Éditeur : A. ChériéA. Chérié (Paris)
Date d'édition : 1885-01-15
Contributeur : Gantés, Fernand de. Directeur de publication
Contributeur : Berry, Georges (1851-1915). Directeur de publication
Contributeur : Picard, Germain (1836-1900). Directeur de publication
Contributeur : Chérié, Alfred. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34429285z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 1608 Nombre total de vues : 1608
Description : 15 janvier 1885 15 janvier 1885
Description : 1885/01/15 (A9,N93). 1885/01/15 (A9,N93).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6485408m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, FOL-YE-3
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/03/2013
QI, Année. - N 93. 15 Janvier 1885.
LE PARNASSE J
PGANE DES CONCOURS LITTÉRAIRES
PARAISSANT LE 1" ET LE 16 DE CHAQUE MOIS
Avec BULLETIN MUSICAL supplémentaire.
- Rédaction et Administration, PARIS, 40 RUE HALLÉ.
Directeur: A. CHÉRIÉ.
Rédacteur en chef : F.-E. ADAM.
Abonnement partant du 1er de chaqut
mois : 12 francs par an.
Membres du Comité des Concours : FRANÇOIS COPPÉE. - HENRI DE BORNIER. - ARSÈNE HOUSSAYE. - AURÉLIEN SCHOLL.
EUGÈNE MANUEL. - ALFRED DES ESSARTS - GERMAIN PICARD - ALBERT MÉRAT - BERTOL-GRAIVIL
P* R. DU COSTAL - AUGUSTE GÉNÉRÈS - LOUIS TIERCELIN - F. -E. ADAM - THÉODORE MAnER - BERNARD GAUSSERON.
Le 18 Décembre 1884
A L'ACADÉMIE FRANÇAISE
Après tout, les défauts physiques ne doivent pas influer
SUr le jugement d'une œuvre écrite; ma conscience m'a obli-
gé à lire le discours entendu, et j'avoue que la lecture n'a
pas modifié mon impression première sur cette prose qui
parle si mal de vers !
Le lendemain de la réception il s'est trouvé des journaux
et des gens du monde pour chanter la gloire de Cherbuliez
et la défaite de Coppée. Deux camps étaient en présence.
Celui des philistins et celui des autres.
L'intervalle de quinze jours a fait rentrer dans l'oubli le
discours vieillot de M. Cherbuliez, et l'on parle encore de
celui du poète.
Voici pourquoi :
Coppee a écrit simplement, donc grandement; il n'a pas
visé à l'esprit, il a atteint la finesse, ce qui vaut plus.
Il s'est conformé à la tradition de l'éloge et il a fait un
chef-d'œuvre.
Il n'a pas, ou presque pas parlé de sa personne et sa
personnalité a plané sur le discours.
Coppée, contrairement aux accusations qu'on fait aux
poètes en général d'abuser des ligures, a peu usé de ce
procédé; quand il s'en est servi, ç a été avec une lumineuse
netteté de style. Jugez-en.
Lorsqu'il compare sa poésie à celle de l'homme auquel il
succède, combien exquise est l'image du petit oiseau! Après
le grave contemplateur « des glaciers et des hautes futaies,
« vous appelez à vous un rêveur des rues de Paris, ayant
« entendu le rossignol des Alpes emplir de sa voix puis-
« santé les solitudes du vallon nocturne, vous écoutez la
«'petite chanson du bouvreuil en cage sur une fenêtre du
« du faubourg. »
Je m'abstiendrai de tout parallèle avec la citation que
j'ai faite du discours de M. Cherbuliez, mais l'on compren-
dra aisément que j'ai interverti l'ordre des discours et ap-
précié d'abord celui que par euphémisme je nommerai le
moins bon. Il est préférable de garder le mets le plus déli-
cat pour la bonne bouche et vraiment le discours de Cop-
pée est un régal de littérature.
Je ferai cependant quelques critiques.
Le poète est un homme trop modeste, il se compare au
petit oiseau en cage; c'est joli et juste quand on songe à
quelques-unes de ses piécettes mais l'image est insuffisante
quand on pense à certains de ses poèmes qui sont de grandes
œuvres, comme « la Bénédiction, le Naufragé », et au dra-
me poétique « Severo Torelli » ; ce n'est plus ce bou-
vreuil qui module, c'est le génie ailé qui plane et chante
puissamment.
Cette même modestie fait dire à Coppée dans son exorde:
« Mon cœur, pénétré de gratitude, n'éprouve aucune
« crainte : Il circule autour de moi une effluve de sympa-
« thie qui m'échauffe et m'encourage ».
Certes rien n'est plus vrai et la sympathie pour Coppée
vibrait sous la coupole de l'Institut; mais ce n'est pas la
sympathie seule qui lui a ouvert les portes, c'est aussi l'ad-
miration. Je sais bien qu'on ne doit pas parler de soi en
disant : « on m'admire. » toutefois nous trouvons, nous au-
tres, que c'est à l'Académie d'être honorée de posséder un
tel poete.
François Coppée parle en termes élevés de deux grands
morts : de Musset et de Lamartine, il lance un cri d'enthou,
siasme en faveur de Victor Hugo, puis il traite ainsi la
poésie, contemporaine : « Après de pareils génies qui ont
« mis la poésie française au-dessus de toutes les autres, il
« se produit dans la pensée d'un peuple, une sorte de las-
« situde et d'épuisement, de même que, dans une marée
« montante, les petits flots succèdent aux grosses lames.
« Les yeux éblouis d'un sublime coucher de soleil vous vous
« tournez vers l'avenir, vers le levant, vous regardez avec
« mélancolie les tremblantes étoiles qui palpitent encore
« dans le ciel poétique. »
Ainsi Leconte de Lisle n'est qu'un petit flot et Sully Pru-
dhomme une tremblante étoile! Pas du tout! mon cher maî-
tre; notre époque qui les a produits, eux, le Benvenuto
Cellini du vers, Théodore de Banville et vous-même (j'en
pourrais citer d'autres encore), n'est pas à dédaigner, c'est
une grande époque poétique. C'aurait, été une juste audace
de l'affirmer devant une Académie qui, malgré les deux ré-
centes élections académiques, professe une défianceune an-
tipathie injustes contre l'école, ou plutôt les écoles moder-
nes, si vivantes.
Coppée a admirablement parlé de ce poète au talent nua-
geux sur le fauteuil duquel il prend place. Il a fait ressorte
dans l'œuvre de Victor de Laprade son admiration sincère
pour la Nature et l'émotion humaine qu'il ajoute aux des-
criptions des grands spectacles physiques. De Laprade a.
fait un essai en ce sens, ses Symphonies sont sa meilleure
œuvre la seule peut-être où l'originalité soit sensible.
Mais depuis, d'autres poètes me semblent avoir été sinoft
plus haut que les sommets Alpestres foulés par de Laprade,
du moins plus droit au but; les brumes épaisses et mono-
tones qui obscurcissent souvent le vers de de Laprade, ont.
été déchirées et nos contemporains nous montrentmieuxcetfc
divinité réelle, mère de tous les enthousiasmes la Na-
ture.
Coppée a voulu, dans son discours, expliquer ce que sOn
œi: perçant, limpide et profond percevait à travers le&
brouillards de la poésie de son prédécesseur et il a presque
réussi à nous le faire comprendre et aimer.
uiçant à toute voix les vers à un grand arbre; il les a,
M une diction simple et inspirée, rendus sonores. Il ne
r :vait taire plus, ni mieux louer celui qu'il fallait
Ruer.
PAUL R. DU COSTAL.
LE PARNASSE J
PGANE DES CONCOURS LITTÉRAIRES
PARAISSANT LE 1" ET LE 16 DE CHAQUE MOIS
Avec BULLETIN MUSICAL supplémentaire.
- Rédaction et Administration, PARIS, 40 RUE HALLÉ.
Directeur: A. CHÉRIÉ.
Rédacteur en chef : F.-E. ADAM.
Abonnement partant du 1er de chaqut
mois : 12 francs par an.
Membres du Comité des Concours : FRANÇOIS COPPÉE. - HENRI DE BORNIER. - ARSÈNE HOUSSAYE. - AURÉLIEN SCHOLL.
EUGÈNE MANUEL. - ALFRED DES ESSARTS - GERMAIN PICARD - ALBERT MÉRAT - BERTOL-GRAIVIL
P* R. DU COSTAL - AUGUSTE GÉNÉRÈS - LOUIS TIERCELIN - F. -E. ADAM - THÉODORE MAnER - BERNARD GAUSSERON.
Le 18 Décembre 1884
A L'ACADÉMIE FRANÇAISE
Après tout, les défauts physiques ne doivent pas influer
SUr le jugement d'une œuvre écrite; ma conscience m'a obli-
gé à lire le discours entendu, et j'avoue que la lecture n'a
pas modifié mon impression première sur cette prose qui
parle si mal de vers !
Le lendemain de la réception il s'est trouvé des journaux
et des gens du monde pour chanter la gloire de Cherbuliez
et la défaite de Coppée. Deux camps étaient en présence.
Celui des philistins et celui des autres.
L'intervalle de quinze jours a fait rentrer dans l'oubli le
discours vieillot de M. Cherbuliez, et l'on parle encore de
celui du poète.
Voici pourquoi :
Coppee a écrit simplement, donc grandement; il n'a pas
visé à l'esprit, il a atteint la finesse, ce qui vaut plus.
Il s'est conformé à la tradition de l'éloge et il a fait un
chef-d'œuvre.
Il n'a pas, ou presque pas parlé de sa personne et sa
personnalité a plané sur le discours.
Coppée, contrairement aux accusations qu'on fait aux
poètes en général d'abuser des ligures, a peu usé de ce
procédé; quand il s'en est servi, ç a été avec une lumineuse
netteté de style. Jugez-en.
Lorsqu'il compare sa poésie à celle de l'homme auquel il
succède, combien exquise est l'image du petit oiseau! Après
le grave contemplateur « des glaciers et des hautes futaies,
« vous appelez à vous un rêveur des rues de Paris, ayant
« entendu le rossignol des Alpes emplir de sa voix puis-
« santé les solitudes du vallon nocturne, vous écoutez la
«'petite chanson du bouvreuil en cage sur une fenêtre du
« du faubourg. »
Je m'abstiendrai de tout parallèle avec la citation que
j'ai faite du discours de M. Cherbuliez, mais l'on compren-
dra aisément que j'ai interverti l'ordre des discours et ap-
précié d'abord celui que par euphémisme je nommerai le
moins bon. Il est préférable de garder le mets le plus déli-
cat pour la bonne bouche et vraiment le discours de Cop-
pée est un régal de littérature.
Je ferai cependant quelques critiques.
Le poète est un homme trop modeste, il se compare au
petit oiseau en cage; c'est joli et juste quand on songe à
quelques-unes de ses piécettes mais l'image est insuffisante
quand on pense à certains de ses poèmes qui sont de grandes
œuvres, comme « la Bénédiction, le Naufragé », et au dra-
me poétique « Severo Torelli » ; ce n'est plus ce bou-
vreuil qui module, c'est le génie ailé qui plane et chante
puissamment.
Cette même modestie fait dire à Coppée dans son exorde:
« Mon cœur, pénétré de gratitude, n'éprouve aucune
« crainte : Il circule autour de moi une effluve de sympa-
« thie qui m'échauffe et m'encourage ».
Certes rien n'est plus vrai et la sympathie pour Coppée
vibrait sous la coupole de l'Institut; mais ce n'est pas la
sympathie seule qui lui a ouvert les portes, c'est aussi l'ad-
miration. Je sais bien qu'on ne doit pas parler de soi en
disant : « on m'admire. » toutefois nous trouvons, nous au-
tres, que c'est à l'Académie d'être honorée de posséder un
tel poete.
François Coppée parle en termes élevés de deux grands
morts : de Musset et de Lamartine, il lance un cri d'enthou,
siasme en faveur de Victor Hugo, puis il traite ainsi la
poésie, contemporaine : « Après de pareils génies qui ont
« mis la poésie française au-dessus de toutes les autres, il
« se produit dans la pensée d'un peuple, une sorte de las-
« situde et d'épuisement, de même que, dans une marée
« montante, les petits flots succèdent aux grosses lames.
« Les yeux éblouis d'un sublime coucher de soleil vous vous
« tournez vers l'avenir, vers le levant, vous regardez avec
« mélancolie les tremblantes étoiles qui palpitent encore
« dans le ciel poétique. »
Ainsi Leconte de Lisle n'est qu'un petit flot et Sully Pru-
dhomme une tremblante étoile! Pas du tout! mon cher maî-
tre; notre époque qui les a produits, eux, le Benvenuto
Cellini du vers, Théodore de Banville et vous-même (j'en
pourrais citer d'autres encore), n'est pas à dédaigner, c'est
une grande époque poétique. C'aurait, été une juste audace
de l'affirmer devant une Académie qui, malgré les deux ré-
centes élections académiques, professe une défianceune an-
tipathie injustes contre l'école, ou plutôt les écoles moder-
nes, si vivantes.
Coppée a admirablement parlé de ce poète au talent nua-
geux sur le fauteuil duquel il prend place. Il a fait ressorte
dans l'œuvre de Victor de Laprade son admiration sincère
pour la Nature et l'émotion humaine qu'il ajoute aux des-
criptions des grands spectacles physiques. De Laprade a.
fait un essai en ce sens, ses Symphonies sont sa meilleure
œuvre la seule peut-être où l'originalité soit sensible.
Mais depuis, d'autres poètes me semblent avoir été sinoft
plus haut que les sommets Alpestres foulés par de Laprade,
du moins plus droit au but; les brumes épaisses et mono-
tones qui obscurcissent souvent le vers de de Laprade, ont.
été déchirées et nos contemporains nous montrentmieuxcetfc
divinité réelle, mère de tous les enthousiasmes la Na-
ture.
Coppée a voulu, dans son discours, expliquer ce que sOn
œi: perçant, limpide et profond percevait à travers le&
brouillards de la poésie de son prédécesseur et il a presque
réussi à nous le faire comprendre et aimer.
uiçant à toute voix les vers à un grand arbre; il les a,
M une diction simple et inspirée, rendus sonores. Il ne
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