Titre : Patriote algérien : paraissant les mardi et samedi / directeur-gérant M. Vidal-Chalom
Éditeur : [s.n.] (Alger)
Date d'édition : 1889-08-26
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32833915w
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 26 août 1889 26 août 1889
Description : 1889/08/26 (A4,N319). 1889/08/26 (A4,N319).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6358789z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-87303
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 25/10/2012
- 349. - Quatriême année. CINQ CENTIMES Lundi, 36 Août 1889. -.,
LE PATRIOTE ALGERIEN
JOURNAL RÉPUBLICAIN NATIONAL
PRIX DE L'ABONNEMENT
Trois mois : 4,50 fr. Six mois : 9 fr. Un an : 18 fr. -
POUR LA RÉDACTION, S'ADRESSER à M. LE RÉDACTEUR EN CHEF
Les manuscrits non insérés ne seront pas rendw,
Rédacteur en olief : LYS DU PAC
€
RÉDACTION & ADMINISTRATION
4, Place de la Préfecture.
LES ANNONCES SONT REÇUES AU BUREAU DU JOURNAL
ADRESSER LETTRES ET MANDATS A M. L'ADMINISTRATEUR
-Insertions - des Annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats
Alger, le 25 août 4889.
LETTRE
D'UN :
SOCIALISTE
VI.
Alger, le 25 août 1889.
Je disais donc, dans ma dernière
* lettre, que le Citoyen-candidat-cuisinier-
possibiliste réclamait la réglementation
de la journée de travail.
Le Parti Ouvrier demande que cette
journée soit fixée à huit heures. Soit;
mais la mesure en question ne pourrait,
sans doute, concerner le paysan, qui ne
travaille parfois qu'un demi-jour, par
fois point même, dans la saison des
neiges, mais qui est au labeur dès l'aube
pour n'en revenir que le soir, au soleil
couché, ce qui fait bien seize heures de
travail, quand viennent la fenaison, la
moisson et la vendange. ;
Pour rendre à son égard toute régle-
mentation applicable, il faudrait que le
législateur voulût bien tout d'abord ré-
glementer les saisons, la gelée, le vent,
le soleil et la pluie, et qu'il assurât à
l'agriculture le nombre de bras suffi--
sant, proportionnet aux travaux à ac-
complir, au moment où il est besoin
̃ qu'ils soient accomplis. -. -. '.-"
, Il ne peut guère être davantage ques-
tion d'ordonner aux artisans qui tra-
vaillent chez eux, même comme salariés, *
d'interrompre leur ouvrage à la dixième
heure, comme il était interdit de travail-
ler le dimanche.
La loi, si elle était votée, ne pourrait
s'appliquer qu'aux ouvriers employés
dans les fabriques ou usines. Encore
resterait-il à savoir s'il serait permis à
ceux-ci de travailler plus de dix heures,
quand telle serait leur volonté, afin de
grossir leur salaire.
Il n'y a que quelques industries à la
journée de travail, soit de plus de dix
heures, mais si, dans celles -- là, on
contraint les patrons à la diminuer, il faut
s'attendre à les voir diminuer également
les salaires dans une même proportion ;
et si le législateur, prévoyant ce résultat
fatal, veut arbitrairement fixer le chif-
fre du salaire en même temps que le
nombre des heures, le fabricant devra
augmenter le prix du produit, si bien
que l'ouvrier perdra comme consomma-
teur ce qu'il aura gagné comme produc-
teur. Il perdra même davantage, car le
capital engagé devenant plus considéra-
ble, et le bénéfice étant calculé sur le
prix de revient, la prélévation est d'au-
tant plus forte que le prix du produit
est plus elevé.
C'est là, d'ailleurs, le résultat de toute
élévation de la valeur provoquée par la
hausse des salaires ou par toute autre
cause; il n'est besoin que de savoir les
éléments de l'arithmétique pour s'en
convaincre.
Le nombre des heures de travail est
réglé par les nécessités de la produc-
tion, laquelle est, dans le système ac-
tuel, soumise à la spéculation. Quel que
soit le régime économique, il en sera
toujours ainsi. L'influence de la spécu-
lation pourra, devra être éliminée, mais
les nécessités demeureront et régleront
toujours le travail.
*
* *
Si le législateur se mêle d'introduire
dans l'ordre des choses actuel, si mau-
vais qu'il soit, une nouvelle rêglementa-
tion arbitraire, il ne fera que créer de
nouvelles difficultés. -
En réduisant les heures de travail, il
oblige à employer un plus grand nom-
bre d'ouvriers. Tant mieux, dira-t-on.
Tant mieux, peut-être, lorsque l'ouvrage
abondera. Mais, quand la besogne man-
quera et que le fabricant ou entrepre-
neur aura amené de nouveaux venus,
appelés de partout et probablement de
l'étranger-, dans l'usine - ou l'atelier, le
- t) y - -
chômage- sera plus cruel pour un plus
grand nombre. Alors ce sera tant pis.
On n'aura fait qu'accroître et aggraver
une fatalité sociale, car on ne peut im-,
poser aux employeurs l'obligation de
fournir du travail quand ils n'ont plus
de commandes ou quand ils manquent
de matières premières.
La réduction des heures de travail est
donc une de ces mystifications écono-
miques tout à fait semblables aux mysti-
fications politiques, qui constituent de-
puis plus de quatre-vingts ans le pro-
gramme de la bourgeoisie. Des mesures
de ce genre, tout en trompant les peu-
ples, ne font que consacrer le pouvoir
de l'Etat, l'autorité du parlementarisme,
l'exploitation et le salariat, sans modifier
en rien la condition des travailleurs.
Aussi m'est-il permis de trouver sin-
gulier que des socialistes ou soi-disant
tels, inscrivent dans leur programme,
même comme mesure transitoire, en la
réclamant des législateurs, ainsi qu'une
réforme sérieuse, une réglementation qui
ne peut améliorer le sort des salariés et
qui a le tort grave de consacrer le sala-
riat.
Ce n'est qu en donnant une organisa-
tion nouvelle à la société, en universali-
sant les moyens de production, en décen-
tralisant les capitaux et les forces, en
individualisant le travail et en provo-
quant la formation d'associations corpo-
ratives, qu'il sera possible de créer
l'ordre dans la production et d'affran-
chir l'homme de toute exploitation.
Il n'en travaillera peut-être pas moins,
mais il travaillera pour lui-même, et il
pourra d'autant mieux se dédommager
de ses fatigues et ne rien redouter du
chômage, que le produit intégral de son
labeur lui appartiendra. S'il a le droit
au travail qui ne lui est que trop dure-
ment imposé aujourd'hui; il aura aussi,
suivant un mot profond de Veuillot, le
droit au repos.
GERMINAL.
- LES RÉVOQUÉS
LES PERSÉCUTIONS DES PARLEMEN-
TAIRES
Comme suite aux basses œuvres de l'in-
fâme haute cour, nous assistons à une véri-
table hécatombe de fonctionnaires de tous
ordres, coupables de ne pas être les défen-
seurs quand môme de la trhtité Oonstans-
Thévenet-Rouvier. Il faut à ces ministres,
condamnés déjà par tous les honnêtes gens,
des thuriféraires sans vergogne, qui aillent
clamer partout - toutes les - calomnies lancées
contre le général Boulanger et ses amis.
Tout le monde n'est pas capable de ces vi-
lenies. Nos ministres en ont fait l'expérien-
ce, les révocations qui continuent sont la
preuve éclatante que de moins en moins les
fonctionnaires veulent se rendre solidaires
de leurs attentats répétés contre le suffrage
universel.
Le trop fameux Saucissonnier de la place
Beauveau se distingue par sa férocité en-
vers ses subordonnés. Il vient de frapper
en bloc.
M. le baron Gourgaud, maire de Vienne-
en-Val, M. Lefebvre-Gaudrille, maire d'Oi-
son ; M. Allyre-Beaufort, maire de Bazo-
ches-Ies Gallerandes"; M. Bordes, maire de
Razac-d'Eymet ; M. L. de Génis,maire d'Ey-
vignes ; M. Augé, maire de Plaisan; M. du
Pac, maire de la Bastide-de-Besplas ; M. de
Sabbathier, maire - d'Eauze; M. Décepte,
maire de Thoux ; M. de Lacroix, maire de
Castillon-Savès, enfin M. le duc de Marmier,
maire de Ray-sur-Saône, et enfin notre ami
Louis Bretonnière, adjoint au maire de La-
val, qui vient d'écrire au préfet une lettre
très digne et très fière dont nous détachons
le passage suivant :
Le décret qui me frappe, monsieur le pré-
fet, est pour moi un titre de gloire, car je
m'honorerai toujours d'avoir été révoqué
par le ministre de grand chemin que vous
avez le malheur d'avoir pour supérieur hié-
rarchique.
Vous avez déjà, dit-on, failli être une
fois sa victime. Votre loyauté lui portait
sans doute ombrage ! Nous sommes donc
quelque peu compagnons d'infortune. Je
m'en trouve profondément honoré à cette
heure où je ne m'étonne plus guère que
d'une chose : c'est de ne pas voir tous les
gendarmes en prison !
Le ministre du commerce et de l'indutrie,
de son côté, jaloux sans doute de la triste
réputation de son collègue de l'intérieur,
montre un zèle anti-boulangiste tout à fait
réjouissant.
Il vient d' suspendra de leur fonctions
deux inspecteurs principaux des postes et
télégraphes, un commis principal et huit
employés subalternes.
L'un des inspecteurs principaux, victime
de cette inique mesure est M. Cuny, chargé
de la section de Paris à Chartrea, en rèsi -
dence à Nantes, où il avait rempli les fonc-
tions de premier adjoint au maire de la
ville.
Voici par exemple un nommé Eymard,
comptable commis d'ordre au service cen-
tral de l'exploitation des chemins de fer de
l'Etat, qui a fourni dix-neuf ans de bons et
loyaux services et qui est révoqué à cause
de ses sympathies pour le général Boulan-
ger !
La simple récapitulation de ses services
montrera mieux que tous les commentaires,
l'odieux de la mesure prise contre cet hon-
nête et modeste fonctionnaire.
Engagé volontaire à 48 ans en 1870 :
Sept ans dans l'armée où il devint bientôt
s Tgent-major, sept campagnes dont deux
de guerre, agent supérieur à la 9' section
techniqu- des chemins de fer de campagne,
douze ans employé de chemin de fer, dont
onze à l'Etat, cinq années d'ancienneté dans
l'emploi dont il vient d'être révoqué.
M. Lassalle, commis des télégraphes à
Saint-Quentin, a été frappé tout dernière-
ment pour a acte -d'insubordination P. Il a
été rayé des cadres.
Cet acte d'insubordination consistait à
avoir envoyé deux télégrammmes au jour-
nal la Presse et plusieurs lettres à M. Tur-
quet.
M. Lassalle avait, en effet, correspondu
avec la Presse.
Voilà son crime.
- Le crime de M. Henri de Porcy, commis
principal, chef de poste des contributions
indirectes à Puteaux, révoqué également,
est inconnu.
Il a été frappé sans être entendu ; on n'a
tenu compte ni de ses longs services (plus
de 18 années) ni de sa situation de père de
trois jeunes enfants, ni de sa qualité de
Lorrain ayant opté en 1871 pour la nationa-
lité française.
Dans une lettre justement indignée adres-
sée à MM. Dechaud et Roussan, adminis-
trateurs des contributions indirectes au mi-
nistères des finances, M. Henri de Porcy
écait : -
« Vous m'avez appliqué lâchement, par
derrière, le coup de massue qui me jette à
terre, sans ressources ; vous m'avez frustré
des sommes que, depuis dix-sept ans et
deux mois, je laisse à la caisse des retrai-
tes ; voilà ce que vous avez fait, messieurs,
en rendant, non pas un arrêt, mais un ser-
vice à ceux qui ont relevé le régime de l'ar-
bitraire et du bon plaisir à la hauteur d'une
institution,
c'est de protester hautement contre une *
pareille façon d'agir et de donner à ma
protestion la plus grande publicité possi-
ble.
« Je vous mets donc en demeure aujour-
d'hui de me faire connaître :
« 1. La nature des documents qui vous
ont été communiqués. -
« 2. Les motifs de ma radiation des cadres
de l'administration.
« 3. Pourquoi je n'ai pas été appelé à me
défendre. »
M. de Porcy, comme il le dit, est frappé
uniquement au nom de l'arbitraire, comme
tous les autres fonctionnaires révoqués.
Mais nous disons une fois de plus à
ces victimes d'un pouvoir déconsidéré :
Patience, l'heure de la justice est pro-
che. Bientôt bonne et entière justice sera
faite !
CANDIDATURE
A LA
DÉPUTÂTION -
DE LA PREMIÈRE CIRCONSCRIPTION D'ALGER
DÉCLARATION DU COMITÉ RÉVISIONNISTE
Les électeurs de la première circons-
cription du département d'Alger savent
dans quelles conditions le Comité révi-
sionniste s'est formé. :.
Il y a quelques mois, de nombreux
Algériens ont fait acte d'adhésion à la
Ligue des Patriotes. Ils ont créé une
section spéciale à Alger. Dès le début,
ils se sont préoccupés de leur interven-
tion dans la lutte électorale et du choix
d'un candidat : à l'unanimité, ce choix
s'est porté sur notre ami Blasselle, dont
les relations avec les membres du parti
boulangiste étaient connues de tous.
La Ligue fut dissoute. La section d'Al-
ger dut subir la mesure antinationale
qui la frappait. Les Patriotes, s'inspi-
raut du droit qu'ont les électeurs de
s'entendre avant même l'ouverture de la
période électorale, ont décidé de ne pas
tomber dans le piège qui leur était tendu
et de constituer un nouveau parti dans
le but d'inviter les électeurs algériens à
se grouper autour du général Boulan-
ger ; diverses réunions eurent lieu, dans
(22) FEUILLETON DU Patriote Algérien
.tl '!I MM
PAR JULES MARY
« Où étant arrivés, sur les deux heu-
« res de l'après-midi, ils ont notifié aux
a sieur et dame Fargeas, en parlant à
« leurs personnes, un acte respectueux
« par lequel Monsieur Maurice Fargeas,
« leur fils, demande respectueusement
« leur consentement sur le mariage
« qu'il se * propose de contracter avec
« Mademoisalle Louise Guébriand, cou-
« tarière, demeurant à Bois-le-Roi.
* Monsieur et Madame Fargeas, enga-
« gés par les notaires à repondre, ont
« dit, savoir:
« Monsienr Fargeàs :
« Qne, par des motifs déjà connus de
« son fils Ihi-même, il ne trouve pas
je convenable le mariage que ce dernier
« persiste à vouloir contracter, màtytè
« la volonté de son père, et queo
e conséquence il loi refuse son .oonsèn-
« tement.
« Et Madame Fargeas :
« Que, par les mêmes motifs, elle dé-
« sapprouve le mariage et refuse égale-
« ment son consentement.
« Après lecture, les sieur et dame Far-
« geas ont signé.
« Desquelles notifications et réponses
« les notaires soussignés ont dressé le
« présent procès-verbal.
« Fait et passé à Bois-le-Rot, en la
«_ demeure des sieurs et dame Far-
« geas. »
Et quand il eut fini, il la froissa de
nouveau, la jeta et mit le pied dessus.
Son visage était effrayant. Il dit à Mau-
rice, il balbutia plutôt, car sa voix,
sourde et enrouée, sortit péniblement
de sa gorge, tant était grande son émo-
tion :
Mon fils, suivez-moi dans ma
chambre. Ici l'on pourrait nous enten-
dre. le moment est venu de vous faire
une confidence très grave. que j'aurais
dû vous cacher plus longtemps mais
vous m'y forcez et dont toute votre
vie se ressentira, sans doute.
El il sortit, automatiquement, le buste
droit, les bras pendants.
Maurice, une angoisse au cœur, le
suivait:
Qu'allait-on lui dire ? Qu'allait-il donc
apprendre?
En passant dans les salons Fargeas en-
voya un domestique prier sa femme de
se rendre à l'instant chez lui où il l'at-
tendrait avec son fils.
Et il ajouta, s'adressant à celui-ci :
Je veux que votre mère soit là,
pour cette explication :
Mme Fargeas arriva, presque aussi-
tôt. Son visage était déComposé; comme
si elle avait pleuré, ses lèvres et ses
joues étaient gonflées, ses yeux tout
rouges.
Elle joignit les mains en entrant et
regarda son fils avec terreur.
Aviez-vous donc besoin que je fus-
se-là, ait-elle, et ne- pouviez-vous sans
moi?.
Mais Fargeas l'interrompit, d'un mol
brusquement:
Il le faut I.
Et, du geste, il lui indiqua un fan-
teuil, où elle se laissa tomber en rete-
nant-des sanglots prêts à lui échapper.
Une rougeur violente empourpra son
visage, du front au menton, et elle se
cacha la tête dans les mains, voilant ses
yeux, comme si elle n'avait plus voulu
voir son fils et son mari comme si la
révélation que Fargeas se disposait à
faire, allait la frapper, aux yeux de
Maurice, d'une honte abominable.
Ce n'était plus la brillante femme,
belle et jeune, des bals et des fêtes, don-
ués par Fargeas. Elle avait des rides au
front, mille plis jaunes au coin des yeux.
Elle venait de vieillir tout à coup. Elle
était tout humble, se faisait toute petite
pour ainsi dire, Elle semblait essayer de
se cacher. Dans un soupir, elle laissa
échapper ces mots :
Je voudrais bien être morte 1.
Montfaure s'étais assis comme elle et
avait croisé les bras. Seul. Maurice res-
tait debout. Le trouble où il voyait sa
mère l'attristait profondément. Son dé-
sespoir l'inquiétait. Pourquoi Fargeas
l'avait il fait venir ? Etait-il donc utile
qu'elle demeurât-là ?
Il le dit à son père :
A quoi bon affliger ma mère ?
Mais Fargeas, toujours froidement, du
bout des lèvres, répliqua :
Il le faut. N'insistez donc pas 1
Et après avoir réfléchi quelques secon-
des, les yeux fixes et sombres, les coins
de la bouche tombants, il commença :
Vous allez voir par vous-même,
mon fils, pourquoi vous ne pouvez vous
marier et comment l'acte respectueux
que vous venez de m'envoyer par deux
notaires est chose superflue. Je suis vo-
tre père, Maurice, je suis aussi le père
d'Adrienne ; votre mère est cette femme
qne vous voyez pleurer devant vous.
Tout cela est vrai.
, Mais, écoutez 1 vous n'avez pas le
droit de porter ce nom de Fargeas, qui
est le mien, et vous n'avez pas le droit
non plus de porter le nom de votre
mère. Vous êtes sans un nom, si ce
n'est celui qu'on vous a donné à votre
baptême : vous vous appelez Maurice.
et vous n'avez même pas la ressource des
enfants naturels, qui ont au moins un
nom, ceux-là, puisqu'à défaut du père, la
mère leur reste.
- Maurice s'était levé et il regardait al-
ternativement Hélène et Fargeas, sans
comprendre.
Expliquez-vous, mon père. dit-il
après un silence, je ne saisis pas bien le
sens de vos paroles. -
Fargeas se tut. Pendant quelques se-
condes, on n'entendit que la respiration
oppressée des trois personnages de cette
scène bizarre.
Puis, faisant sur lui-même un visible
effort :
Votre mère n'est pas ma femme.
elle n'est que ma maîtresse 1.
Un sanglot de Mme Fargeas l'inter-
rompit :
Il reprit, après un instant: - -
Ce n'est pas tout. Car s'il n y avait
que l'irrégularité de cette situation, vous
pourriez penser avec raison qu'un ma-
riage peut légitimer votre naissance;
vous pourriez également vous dire qu'a-
près tout, à une époque comme la notre,
où les préjugés s'en vont de plus en
plus, le sort a un enfant illégitime n'est
pas fort à plaindre, lorsque cet enfant
est, comme vous, riche autant qu'il le
veut. Malheureusement, car cest un
grand malheur, Maurice, tout mariage
est impossible entre votre mère et moi.
LE PATRIOTE ALGERIEN
JOURNAL RÉPUBLICAIN NATIONAL
PRIX DE L'ABONNEMENT
Trois mois : 4,50 fr. Six mois : 9 fr. Un an : 18 fr. -
POUR LA RÉDACTION, S'ADRESSER à M. LE RÉDACTEUR EN CHEF
Les manuscrits non insérés ne seront pas rendw,
Rédacteur en olief : LYS DU PAC
€
RÉDACTION & ADMINISTRATION
4, Place de la Préfecture.
LES ANNONCES SONT REÇUES AU BUREAU DU JOURNAL
ADRESSER LETTRES ET MANDATS A M. L'ADMINISTRATEUR
-Insertions - des Annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats
Alger, le 25 août 4889.
LETTRE
D'UN :
SOCIALISTE
VI.
Alger, le 25 août 1889.
Je disais donc, dans ma dernière
* lettre, que le Citoyen-candidat-cuisinier-
possibiliste réclamait la réglementation
de la journée de travail.
Le Parti Ouvrier demande que cette
journée soit fixée à huit heures. Soit;
mais la mesure en question ne pourrait,
sans doute, concerner le paysan, qui ne
travaille parfois qu'un demi-jour, par
fois point même, dans la saison des
neiges, mais qui est au labeur dès l'aube
pour n'en revenir que le soir, au soleil
couché, ce qui fait bien seize heures de
travail, quand viennent la fenaison, la
moisson et la vendange. ;
Pour rendre à son égard toute régle-
mentation applicable, il faudrait que le
législateur voulût bien tout d'abord ré-
glementer les saisons, la gelée, le vent,
le soleil et la pluie, et qu'il assurât à
l'agriculture le nombre de bras suffi--
sant, proportionnet aux travaux à ac-
complir, au moment où il est besoin
̃ qu'ils soient accomplis. -. -. '.-"
, Il ne peut guère être davantage ques-
tion d'ordonner aux artisans qui tra-
vaillent chez eux, même comme salariés, *
d'interrompre leur ouvrage à la dixième
heure, comme il était interdit de travail-
ler le dimanche.
La loi, si elle était votée, ne pourrait
s'appliquer qu'aux ouvriers employés
dans les fabriques ou usines. Encore
resterait-il à savoir s'il serait permis à
ceux-ci de travailler plus de dix heures,
quand telle serait leur volonté, afin de
grossir leur salaire.
Il n'y a que quelques industries à la
journée de travail, soit de plus de dix
heures, mais si, dans celles -- là, on
contraint les patrons à la diminuer, il faut
s'attendre à les voir diminuer également
les salaires dans une même proportion ;
et si le législateur, prévoyant ce résultat
fatal, veut arbitrairement fixer le chif-
fre du salaire en même temps que le
nombre des heures, le fabricant devra
augmenter le prix du produit, si bien
que l'ouvrier perdra comme consomma-
teur ce qu'il aura gagné comme produc-
teur. Il perdra même davantage, car le
capital engagé devenant plus considéra-
ble, et le bénéfice étant calculé sur le
prix de revient, la prélévation est d'au-
tant plus forte que le prix du produit
est plus elevé.
C'est là, d'ailleurs, le résultat de toute
élévation de la valeur provoquée par la
hausse des salaires ou par toute autre
cause; il n'est besoin que de savoir les
éléments de l'arithmétique pour s'en
convaincre.
Le nombre des heures de travail est
réglé par les nécessités de la produc-
tion, laquelle est, dans le système ac-
tuel, soumise à la spéculation. Quel que
soit le régime économique, il en sera
toujours ainsi. L'influence de la spécu-
lation pourra, devra être éliminée, mais
les nécessités demeureront et régleront
toujours le travail.
*
* *
Si le législateur se mêle d'introduire
dans l'ordre des choses actuel, si mau-
vais qu'il soit, une nouvelle rêglementa-
tion arbitraire, il ne fera que créer de
nouvelles difficultés. -
En réduisant les heures de travail, il
oblige à employer un plus grand nom-
bre d'ouvriers. Tant mieux, dira-t-on.
Tant mieux, peut-être, lorsque l'ouvrage
abondera. Mais, quand la besogne man-
quera et que le fabricant ou entrepre-
neur aura amené de nouveaux venus,
appelés de partout et probablement de
l'étranger-, dans l'usine - ou l'atelier, le
- t) y - -
chômage- sera plus cruel pour un plus
grand nombre. Alors ce sera tant pis.
On n'aura fait qu'accroître et aggraver
une fatalité sociale, car on ne peut im-,
poser aux employeurs l'obligation de
fournir du travail quand ils n'ont plus
de commandes ou quand ils manquent
de matières premières.
La réduction des heures de travail est
donc une de ces mystifications écono-
miques tout à fait semblables aux mysti-
fications politiques, qui constituent de-
puis plus de quatre-vingts ans le pro-
gramme de la bourgeoisie. Des mesures
de ce genre, tout en trompant les peu-
ples, ne font que consacrer le pouvoir
de l'Etat, l'autorité du parlementarisme,
l'exploitation et le salariat, sans modifier
en rien la condition des travailleurs.
Aussi m'est-il permis de trouver sin-
gulier que des socialistes ou soi-disant
tels, inscrivent dans leur programme,
même comme mesure transitoire, en la
réclamant des législateurs, ainsi qu'une
réforme sérieuse, une réglementation qui
ne peut améliorer le sort des salariés et
qui a le tort grave de consacrer le sala-
riat.
Ce n'est qu en donnant une organisa-
tion nouvelle à la société, en universali-
sant les moyens de production, en décen-
tralisant les capitaux et les forces, en
individualisant le travail et en provo-
quant la formation d'associations corpo-
ratives, qu'il sera possible de créer
l'ordre dans la production et d'affran-
chir l'homme de toute exploitation.
Il n'en travaillera peut-être pas moins,
mais il travaillera pour lui-même, et il
pourra d'autant mieux se dédommager
de ses fatigues et ne rien redouter du
chômage, que le produit intégral de son
labeur lui appartiendra. S'il a le droit
au travail qui ne lui est que trop dure-
ment imposé aujourd'hui; il aura aussi,
suivant un mot profond de Veuillot, le
droit au repos.
GERMINAL.
- LES RÉVOQUÉS
LES PERSÉCUTIONS DES PARLEMEN-
TAIRES
Comme suite aux basses œuvres de l'in-
fâme haute cour, nous assistons à une véri-
table hécatombe de fonctionnaires de tous
ordres, coupables de ne pas être les défen-
seurs quand môme de la trhtité Oonstans-
Thévenet-Rouvier. Il faut à ces ministres,
condamnés déjà par tous les honnêtes gens,
des thuriféraires sans vergogne, qui aillent
clamer partout - toutes les - calomnies lancées
contre le général Boulanger et ses amis.
Tout le monde n'est pas capable de ces vi-
lenies. Nos ministres en ont fait l'expérien-
ce, les révocations qui continuent sont la
preuve éclatante que de moins en moins les
fonctionnaires veulent se rendre solidaires
de leurs attentats répétés contre le suffrage
universel.
Le trop fameux Saucissonnier de la place
Beauveau se distingue par sa férocité en-
vers ses subordonnés. Il vient de frapper
en bloc.
M. le baron Gourgaud, maire de Vienne-
en-Val, M. Lefebvre-Gaudrille, maire d'Oi-
son ; M. Allyre-Beaufort, maire de Bazo-
ches-Ies Gallerandes"; M. Bordes, maire de
Razac-d'Eymet ; M. L. de Génis,maire d'Ey-
vignes ; M. Augé, maire de Plaisan; M. du
Pac, maire de la Bastide-de-Besplas ; M. de
Sabbathier, maire - d'Eauze; M. Décepte,
maire de Thoux ; M. de Lacroix, maire de
Castillon-Savès, enfin M. le duc de Marmier,
maire de Ray-sur-Saône, et enfin notre ami
Louis Bretonnière, adjoint au maire de La-
val, qui vient d'écrire au préfet une lettre
très digne et très fière dont nous détachons
le passage suivant :
Le décret qui me frappe, monsieur le pré-
fet, est pour moi un titre de gloire, car je
m'honorerai toujours d'avoir été révoqué
par le ministre de grand chemin que vous
avez le malheur d'avoir pour supérieur hié-
rarchique.
Vous avez déjà, dit-on, failli être une
fois sa victime. Votre loyauté lui portait
sans doute ombrage ! Nous sommes donc
quelque peu compagnons d'infortune. Je
m'en trouve profondément honoré à cette
heure où je ne m'étonne plus guère que
d'une chose : c'est de ne pas voir tous les
gendarmes en prison !
Le ministre du commerce et de l'indutrie,
de son côté, jaloux sans doute de la triste
réputation de son collègue de l'intérieur,
montre un zèle anti-boulangiste tout à fait
réjouissant.
Il vient d' suspendra de leur fonctions
deux inspecteurs principaux des postes et
télégraphes, un commis principal et huit
employés subalternes.
L'un des inspecteurs principaux, victime
de cette inique mesure est M. Cuny, chargé
de la section de Paris à Chartrea, en rèsi -
dence à Nantes, où il avait rempli les fonc-
tions de premier adjoint au maire de la
ville.
Voici par exemple un nommé Eymard,
comptable commis d'ordre au service cen-
tral de l'exploitation des chemins de fer de
l'Etat, qui a fourni dix-neuf ans de bons et
loyaux services et qui est révoqué à cause
de ses sympathies pour le général Boulan-
ger !
La simple récapitulation de ses services
montrera mieux que tous les commentaires,
l'odieux de la mesure prise contre cet hon-
nête et modeste fonctionnaire.
Engagé volontaire à 48 ans en 1870 :
Sept ans dans l'armée où il devint bientôt
s Tgent-major, sept campagnes dont deux
de guerre, agent supérieur à la 9' section
techniqu- des chemins de fer de campagne,
douze ans employé de chemin de fer, dont
onze à l'Etat, cinq années d'ancienneté dans
l'emploi dont il vient d'être révoqué.
M. Lassalle, commis des télégraphes à
Saint-Quentin, a été frappé tout dernière-
ment pour a acte -d'insubordination P. Il a
été rayé des cadres.
Cet acte d'insubordination consistait à
avoir envoyé deux télégrammmes au jour-
nal la Presse et plusieurs lettres à M. Tur-
quet.
M. Lassalle avait, en effet, correspondu
avec la Presse.
Voilà son crime.
- Le crime de M. Henri de Porcy, commis
principal, chef de poste des contributions
indirectes à Puteaux, révoqué également,
est inconnu.
Il a été frappé sans être entendu ; on n'a
tenu compte ni de ses longs services (plus
de 18 années) ni de sa situation de père de
trois jeunes enfants, ni de sa qualité de
Lorrain ayant opté en 1871 pour la nationa-
lité française.
Dans une lettre justement indignée adres-
sée à MM. Dechaud et Roussan, adminis-
trateurs des contributions indirectes au mi-
nistères des finances, M. Henri de Porcy
écait : -
« Vous m'avez appliqué lâchement, par
derrière, le coup de massue qui me jette à
terre, sans ressources ; vous m'avez frustré
des sommes que, depuis dix-sept ans et
deux mois, je laisse à la caisse des retrai-
tes ; voilà ce que vous avez fait, messieurs,
en rendant, non pas un arrêt, mais un ser-
vice à ceux qui ont relevé le régime de l'ar-
bitraire et du bon plaisir à la hauteur d'une
institution,
pareille façon d'agir et de donner à ma
protestion la plus grande publicité possi-
ble.
« Je vous mets donc en demeure aujour-
d'hui de me faire connaître :
« 1. La nature des documents qui vous
ont été communiqués. -
« 2. Les motifs de ma radiation des cadres
de l'administration.
« 3. Pourquoi je n'ai pas été appelé à me
défendre. »
M. de Porcy, comme il le dit, est frappé
uniquement au nom de l'arbitraire, comme
tous les autres fonctionnaires révoqués.
Mais nous disons une fois de plus à
ces victimes d'un pouvoir déconsidéré :
Patience, l'heure de la justice est pro-
che. Bientôt bonne et entière justice sera
faite !
CANDIDATURE
A LA
DÉPUTÂTION -
DE LA PREMIÈRE CIRCONSCRIPTION D'ALGER
DÉCLARATION DU COMITÉ RÉVISIONNISTE
Les électeurs de la première circons-
cription du département d'Alger savent
dans quelles conditions le Comité révi-
sionniste s'est formé. :.
Il y a quelques mois, de nombreux
Algériens ont fait acte d'adhésion à la
Ligue des Patriotes. Ils ont créé une
section spéciale à Alger. Dès le début,
ils se sont préoccupés de leur interven-
tion dans la lutte électorale et du choix
d'un candidat : à l'unanimité, ce choix
s'est porté sur notre ami Blasselle, dont
les relations avec les membres du parti
boulangiste étaient connues de tous.
La Ligue fut dissoute. La section d'Al-
ger dut subir la mesure antinationale
qui la frappait. Les Patriotes, s'inspi-
raut du droit qu'ont les électeurs de
s'entendre avant même l'ouverture de la
période électorale, ont décidé de ne pas
tomber dans le piège qui leur était tendu
et de constituer un nouveau parti dans
le but d'inviter les électeurs algériens à
se grouper autour du général Boulan-
ger ; diverses réunions eurent lieu, dans
(22) FEUILLETON DU Patriote Algérien
.tl '!I MM
PAR JULES MARY
« Où étant arrivés, sur les deux heu-
« res de l'après-midi, ils ont notifié aux
a sieur et dame Fargeas, en parlant à
« leurs personnes, un acte respectueux
« par lequel Monsieur Maurice Fargeas,
« leur fils, demande respectueusement
« leur consentement sur le mariage
« qu'il se * propose de contracter avec
« Mademoisalle Louise Guébriand, cou-
« tarière, demeurant à Bois-le-Roi.
* Monsieur et Madame Fargeas, enga-
« gés par les notaires à repondre, ont
« dit, savoir:
« Monsienr Fargeàs :
« Qne, par des motifs déjà connus de
« son fils Ihi-même, il ne trouve pas
je convenable le mariage que ce dernier
« persiste à vouloir contracter, màtytè
« la volonté de son père, et queo
e conséquence il loi refuse son .oonsèn-
« tement.
« Et Madame Fargeas :
« Que, par les mêmes motifs, elle dé-
« sapprouve le mariage et refuse égale-
« ment son consentement.
« Après lecture, les sieur et dame Far-
« geas ont signé.
« Desquelles notifications et réponses
« les notaires soussignés ont dressé le
« présent procès-verbal.
« Fait et passé à Bois-le-Rot, en la
«_ demeure des sieurs et dame Far-
« geas. »
Et quand il eut fini, il la froissa de
nouveau, la jeta et mit le pied dessus.
Son visage était effrayant. Il dit à Mau-
rice, il balbutia plutôt, car sa voix,
sourde et enrouée, sortit péniblement
de sa gorge, tant était grande son émo-
tion :
Mon fils, suivez-moi dans ma
chambre. Ici l'on pourrait nous enten-
dre. le moment est venu de vous faire
une confidence très grave. que j'aurais
dû vous cacher plus longtemps mais
vous m'y forcez et dont toute votre
vie se ressentira, sans doute.
El il sortit, automatiquement, le buste
droit, les bras pendants.
Maurice, une angoisse au cœur, le
suivait:
Qu'allait-on lui dire ? Qu'allait-il donc
apprendre?
En passant dans les salons Fargeas en-
voya un domestique prier sa femme de
se rendre à l'instant chez lui où il l'at-
tendrait avec son fils.
Et il ajouta, s'adressant à celui-ci :
Je veux que votre mère soit là,
pour cette explication :
Mme Fargeas arriva, presque aussi-
tôt. Son visage était déComposé; comme
si elle avait pleuré, ses lèvres et ses
joues étaient gonflées, ses yeux tout
rouges.
Elle joignit les mains en entrant et
regarda son fils avec terreur.
Aviez-vous donc besoin que je fus-
se-là, ait-elle, et ne- pouviez-vous sans
moi?.
Mais Fargeas l'interrompit, d'un mol
brusquement:
Il le faut I.
Et, du geste, il lui indiqua un fan-
teuil, où elle se laissa tomber en rete-
nant-des sanglots prêts à lui échapper.
Une rougeur violente empourpra son
visage, du front au menton, et elle se
cacha la tête dans les mains, voilant ses
yeux, comme si elle n'avait plus voulu
voir son fils et son mari comme si la
révélation que Fargeas se disposait à
faire, allait la frapper, aux yeux de
Maurice, d'une honte abominable.
Ce n'était plus la brillante femme,
belle et jeune, des bals et des fêtes, don-
ués par Fargeas. Elle avait des rides au
front, mille plis jaunes au coin des yeux.
Elle venait de vieillir tout à coup. Elle
était tout humble, se faisait toute petite
pour ainsi dire, Elle semblait essayer de
se cacher. Dans un soupir, elle laissa
échapper ces mots :
Je voudrais bien être morte 1.
Montfaure s'étais assis comme elle et
avait croisé les bras. Seul. Maurice res-
tait debout. Le trouble où il voyait sa
mère l'attristait profondément. Son dé-
sespoir l'inquiétait. Pourquoi Fargeas
l'avait il fait venir ? Etait-il donc utile
qu'elle demeurât-là ?
Il le dit à son père :
A quoi bon affliger ma mère ?
Mais Fargeas, toujours froidement, du
bout des lèvres, répliqua :
Il le faut. N'insistez donc pas 1
Et après avoir réfléchi quelques secon-
des, les yeux fixes et sombres, les coins
de la bouche tombants, il commença :
Vous allez voir par vous-même,
mon fils, pourquoi vous ne pouvez vous
marier et comment l'acte respectueux
que vous venez de m'envoyer par deux
notaires est chose superflue. Je suis vo-
tre père, Maurice, je suis aussi le père
d'Adrienne ; votre mère est cette femme
qne vous voyez pleurer devant vous.
Tout cela est vrai.
, Mais, écoutez 1 vous n'avez pas le
droit de porter ce nom de Fargeas, qui
est le mien, et vous n'avez pas le droit
non plus de porter le nom de votre
mère. Vous êtes sans un nom, si ce
n'est celui qu'on vous a donné à votre
baptême : vous vous appelez Maurice.
et vous n'avez même pas la ressource des
enfants naturels, qui ont au moins un
nom, ceux-là, puisqu'à défaut du père, la
mère leur reste.
- Maurice s'était levé et il regardait al-
ternativement Hélène et Fargeas, sans
comprendre.
Expliquez-vous, mon père. dit-il
après un silence, je ne saisis pas bien le
sens de vos paroles. -
Fargeas se tut. Pendant quelques se-
condes, on n'entendit que la respiration
oppressée des trois personnages de cette
scène bizarre.
Puis, faisant sur lui-même un visible
effort :
Votre mère n'est pas ma femme.
elle n'est que ma maîtresse 1.
Un sanglot de Mme Fargeas l'inter-
rompit :
Il reprit, après un instant: - -
Ce n'est pas tout. Car s'il n y avait
que l'irrégularité de cette situation, vous
pourriez penser avec raison qu'un ma-
riage peut légitimer votre naissance;
vous pourriez également vous dire qu'a-
près tout, à une époque comme la notre,
où les préjugés s'en vont de plus en
plus, le sort a un enfant illégitime n'est
pas fort à plaindre, lorsque cet enfant
est, comme vous, riche autant qu'il le
veut. Malheureusement, car cest un
grand malheur, Maurice, tout mariage
est impossible entre votre mère et moi.
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