Titre : Revue contemporaine
Éditeur : [s.n.?] (Saint-Pétersbourg)
Date d'édition : 1913-08-10
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328566919
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 10 août 1913 10 août 1913
Description : 1913/08/10 (A4,T12,N94). 1913/08/10 (A4,T12,N94).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6248079n
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, 8-Z-18251
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/06/2013
REVUE
CONTEMPORAINE
PARAISSANT TOUS LES SAMEDIS
QUATRIÈME ANNÉE
SAMEDI 10 AOUT 1913
X2 94
Editorial
io Août IÇIJ
On est très fier à Bucarest. Un petit pays de
deuxième ordre a réussi là où l'impuissance de
l'Europe entière s'est manifestée avec fracas. Les
quelque derniers huit jours ont marqué l'apothéose
balkanique de la Roumanie: Te Deum, télégrammes
de félicitations, banquets, discours, articles enthou-
siastes de la presse: tout a été mis en œuvre pour
donner du relief au rôle d'arbitre tenu par la diplo-
matie roumaine, à sa loyauté, à ses visées pacifi-
ques. Bucarest est spontanément devenu un centre
diplomatique important. Une dizaine de grands cordons
sont venus faire de M. Majoresco la figure centrale
des Balkans. Et, si l'on a pu douter un instant des
ratifications définitives, l'adhésion formelle de la Bul-
garie au traité a dissipé toutes les inquiétudes de
l'opinion et des marchés. Quant à la revision du
traité, ce projet, à peine surgi à la surface des chan-
celleries, a vite sombré sans retour dans le domaine
des idées mort-nées, à la suite des irréductibles di-
vergences de vues entre St-Pétersbourg et Vienne.
Ainsi, le traité de Bucarest est bel et bien un
fait accompli. Il est, au point de vue formel, le sta-
tut international appelé à régler les destinées des
Balkans. Mais les dithyrambes qui montent des ré-
dactions européennes vers Bucarest ne doivent pas
nous tromper sur le sens des réalités balkaniques,
violemment modifiées par des négociateurs qu'hallu-
cinait le partage des dépouilles bulgares, et dont l'es-
prit était égaré par l'odeur de la curée. Quiconque
prend la peine de peser les résultats atteints à Bu-
carest, doit refuser énergiquement à la Roumanie le
certificat diplomatique qu'elle postule. La Roumanie
n'a passé qu'un examen tout superficiel en matière
internationale. Elle a surtout voulu faire vite: en
quelque quinze jours, le traité de Bucarest s'est
trouvé hâtivement bàclé; cernée par une coalition
d'ennemis, menacée dans ses œuvres vives, la Bul.
garie a cédé à la fatalité des événements. Le triomp he
est donc bien maigre. Il vaut au point de vue diplo-
matique ce que valent les victoires grecques au point
de vue militaire.
L'idée essentielle, à laquelle il faut toujours re-
venir, c'est que le Vœ Victis n'est jamais que d'une
application éphémère". Tout le traité de Bucarest
n'est construit que sur la détresse bulgare et le
malheur d'un peuple est une base trop fragile pour
permettre d'étayer une combinaison politique durable.
Les négociateurs de Bucarest ont dédaigné de prendre
en considération tous les éléments susceptibles d'as-
surer réellement l'équilibre: ils ont fait table rase
aussi bien des visées traditionnelles des peuples que
des sympathies ethniques et des affinités religieuses;
entre la Serbie et la Bulgarie, ils ont creusé un abîme,
qui sera longtemps infranchissable, par un absurde
partage de la Macédoine. Il n'y a pas, du reste, que
les réalités nationales dont le triumvirat serbo-greco-
roumain a repoussé les exigences les plus naturelles:
il a piétiné jusqu'aux nécessités géographiques par
l'attribution à la Grèce du port de Cavalla dont le
Hinterlciiid est accordé à la Bulgarie. Or, tôt ou
tard, et plutôt tôt que tard, le "naturel revient au
galop", et son galop en politique revêt toujours les
proportions d'un frénétique bouleversement. Œuvre
de théoriciens superbement dédaigneux des voix
obscures des Balkans, le traité de Berlin n'a pas
résisté au réveil des races. La même destinée est
réservée au traité de Bucarest, construction profon-
dément artificielle, spéculation provisoire sur la dé-
bâcle d'une nation vaincue. Il est des conquêtes qui
affaiblissent: c'est le cas des annexions territoriales
de la Serbie et de la Grèce.
CONTEMPORAINE
PARAISSANT TOUS LES SAMEDIS
QUATRIÈME ANNÉE
SAMEDI 10 AOUT 1913
X2 94
Editorial
io Août IÇIJ
On est très fier à Bucarest. Un petit pays de
deuxième ordre a réussi là où l'impuissance de
l'Europe entière s'est manifestée avec fracas. Les
quelque derniers huit jours ont marqué l'apothéose
balkanique de la Roumanie: Te Deum, télégrammes
de félicitations, banquets, discours, articles enthou-
siastes de la presse: tout a été mis en œuvre pour
donner du relief au rôle d'arbitre tenu par la diplo-
matie roumaine, à sa loyauté, à ses visées pacifi-
ques. Bucarest est spontanément devenu un centre
diplomatique important. Une dizaine de grands cordons
sont venus faire de M. Majoresco la figure centrale
des Balkans. Et, si l'on a pu douter un instant des
ratifications définitives, l'adhésion formelle de la Bul-
garie au traité a dissipé toutes les inquiétudes de
l'opinion et des marchés. Quant à la revision du
traité, ce projet, à peine surgi à la surface des chan-
celleries, a vite sombré sans retour dans le domaine
des idées mort-nées, à la suite des irréductibles di-
vergences de vues entre St-Pétersbourg et Vienne.
Ainsi, le traité de Bucarest est bel et bien un
fait accompli. Il est, au point de vue formel, le sta-
tut international appelé à régler les destinées des
Balkans. Mais les dithyrambes qui montent des ré-
dactions européennes vers Bucarest ne doivent pas
nous tromper sur le sens des réalités balkaniques,
violemment modifiées par des négociateurs qu'hallu-
cinait le partage des dépouilles bulgares, et dont l'es-
prit était égaré par l'odeur de la curée. Quiconque
prend la peine de peser les résultats atteints à Bu-
carest, doit refuser énergiquement à la Roumanie le
certificat diplomatique qu'elle postule. La Roumanie
n'a passé qu'un examen tout superficiel en matière
internationale. Elle a surtout voulu faire vite: en
quelque quinze jours, le traité de Bucarest s'est
trouvé hâtivement bàclé; cernée par une coalition
d'ennemis, menacée dans ses œuvres vives, la Bul.
garie a cédé à la fatalité des événements. Le triomp he
est donc bien maigre. Il vaut au point de vue diplo-
matique ce que valent les victoires grecques au point
de vue militaire.
L'idée essentielle, à laquelle il faut toujours re-
venir, c'est que le Vœ Victis n'est jamais que d'une
application éphémère". Tout le traité de Bucarest
n'est construit que sur la détresse bulgare et le
malheur d'un peuple est une base trop fragile pour
permettre d'étayer une combinaison politique durable.
Les négociateurs de Bucarest ont dédaigné de prendre
en considération tous les éléments susceptibles d'as-
surer réellement l'équilibre: ils ont fait table rase
aussi bien des visées traditionnelles des peuples que
des sympathies ethniques et des affinités religieuses;
entre la Serbie et la Bulgarie, ils ont creusé un abîme,
qui sera longtemps infranchissable, par un absurde
partage de la Macédoine. Il n'y a pas, du reste, que
les réalités nationales dont le triumvirat serbo-greco-
roumain a repoussé les exigences les plus naturelles:
il a piétiné jusqu'aux nécessités géographiques par
l'attribution à la Grèce du port de Cavalla dont le
Hinterlciiid est accordé à la Bulgarie. Or, tôt ou
tard, et plutôt tôt que tard, le "naturel revient au
galop", et son galop en politique revêt toujours les
proportions d'un frénétique bouleversement. Œuvre
de théoriciens superbement dédaigneux des voix
obscures des Balkans, le traité de Berlin n'a pas
résisté au réveil des races. La même destinée est
réservée au traité de Bucarest, construction profon-
dément artificielle, spéculation provisoire sur la dé-
bâcle d'une nation vaincue. Il est des conquêtes qui
affaiblissent: c'est le cas des annexions territoriales
de la Serbie et de la Grèce.
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