Titre : La Sylphide : journal de modes, de littérature, de théâtres et de musique / directeur : de Villemessant
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1854-12-20
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34444962f
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 23918 Nombre total de vues : 23918
Description : 20 décembre 1854 20 décembre 1854
Description : 1854/12/20 (A15). 1854/12/20 (A15).
Description : Note : GRAV. Note : GRAV.
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5864947b
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, Z-4145-4208
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 01/12/2010
XVe ANNÉE.
17' LIVRAISON.
20 DÉCEMBRE 1854.
UN PÈLERINAGE A MARLY
UR la lin du mois de
septembre dernier,
les Petites Affiches,
à la page consacrée
aux ventes d'immeu-
bles, contenaientcette
froide et insignifiante
mention, rédigée par
un commissaire-priseur : « A
vendre, deux arpents de bonne
terre, situés à Marly, dans l'an-
cien parc,-à vingt pas de l'ancien bassin. »
Les lecteurs habituels du journal passaient à
la page suivante, sans s'arrêter même une
seconde au mot magique mêlé à ce style
d'huissier. Quatre ou cinq lettrés à peine
faisaient une pause, mais pour s'écrier :
« Voilà donc ce que devient l'histoire ! »
Quant à moi, après m'être mis à l'affût
d'un beau jour d'automne, j'ai voulu voir
Marly et ses ruines encore une fois. Je suis
parti seul, à pied, une branche de coudrier
à la main.
Si j'étais un Allemand de l'école d'Hoff-
mann, j'ajouterais que l'ombre du duc de
Saint-Simon m'accompagnait en causant avec
moi tout le long du chemin.
Vous savez que Marly fut le dernier effort
et le dernier caprice de Louis XIV. Un jour,
le roi se sentit réellement vieux. Versailles
avait trop de majesté ; les palais l'ennuyaient.
Mlle de La Vallière, madame de Fontan-
ges, madame de Montespan, la petite ma-
demoiselle Des OEillets et toutes les autres
avaient été tour à tour cueillies et fanées.
Restait madame de Maintenon, qui regar-
dait comme une corvée d'avoir à amuser le
vieux prince, et qui ne l'amusait guère.
— Je m'ennuie, dit Louis XIV : il faut
m'organiser une solitude.
Ce jour-là, le chasse au cerf fut contre-
mandée, et, contre sa coutume, le roi monta
seul dans son carrosse, sans convier à l'ac-
compagner une seule de ces belles dames qui
sont demeurées jusqu'à la fin de sa vie son
escorte ordinaire. Suivi de quelques-uns de
ses familiers, il partit après avoir donné
l'ordre de diriger la promenade du côté le
plus solitaire des environs de Paris. Le car-
rosse s'arrêta à Luciennes, et le roi mit pied
à terre. Aussitôt l'un des courtisans, instruit
sans doute du but de cette course, s'appro-
cha de lui :
— Sire, lui dit-il respectueusement, votre
majesté ne saurait choisir un site plus agréa-
ble pour y faire bâtir un château.
— J'en conviens, répondit le prince ; mais
ce n'est pas là ce qu'il me faut. Je veux une
thébaïde, quelque chose de sombre et d'aus-
tère. Avançons, messieurs.
On alla tout droit à Marly, terre alors dé-
solée, encombrée de marécages et de collines
0 idues.
— Eh bien, messieurs, dit Louis XIV, nous
viendrons deux ou trois fois l'année faire une
retraite à Marly pour expier nos péchés.
Le soir même, en rentrant de sa prome-
nade, le roi envoya chercher Mansard et lui
ordonna de se mettre immédiatement à l'oeu-
vre pour construire son ermitage.
Cet ermitage, ce rien, comme on l'appe-
lait, coûta plus d'un milliard.
Un milliard pour embellir ce que Saint-
Simon nomme dans sa langue énergique
« un repaire de serpents, de crapauds et de
» grenouilles, réceptacle de toutes les voiries
» des environs, » c'est beaucoup, en vérité.
Toutefois, n'en déplaise au fier gentilhomme,
qui probablement avait eu à supporter à
Marly quelque royale rebuffade, il est fort
douteux que les monceaux d'or dépensés par
17' LIVRAISON.
20 DÉCEMBRE 1854.
UN PÈLERINAGE A MARLY
UR la lin du mois de
septembre dernier,
les Petites Affiches,
à la page consacrée
aux ventes d'immeu-
bles, contenaientcette
froide et insignifiante
mention, rédigée par
un commissaire-priseur : « A
vendre, deux arpents de bonne
terre, situés à Marly, dans l'an-
cien parc,-à vingt pas de l'ancien bassin. »
Les lecteurs habituels du journal passaient à
la page suivante, sans s'arrêter même une
seconde au mot magique mêlé à ce style
d'huissier. Quatre ou cinq lettrés à peine
faisaient une pause, mais pour s'écrier :
« Voilà donc ce que devient l'histoire ! »
Quant à moi, après m'être mis à l'affût
d'un beau jour d'automne, j'ai voulu voir
Marly et ses ruines encore une fois. Je suis
parti seul, à pied, une branche de coudrier
à la main.
Si j'étais un Allemand de l'école d'Hoff-
mann, j'ajouterais que l'ombre du duc de
Saint-Simon m'accompagnait en causant avec
moi tout le long du chemin.
Vous savez que Marly fut le dernier effort
et le dernier caprice de Louis XIV. Un jour,
le roi se sentit réellement vieux. Versailles
avait trop de majesté ; les palais l'ennuyaient.
Mlle de La Vallière, madame de Fontan-
ges, madame de Montespan, la petite ma-
demoiselle Des OEillets et toutes les autres
avaient été tour à tour cueillies et fanées.
Restait madame de Maintenon, qui regar-
dait comme une corvée d'avoir à amuser le
vieux prince, et qui ne l'amusait guère.
— Je m'ennuie, dit Louis XIV : il faut
m'organiser une solitude.
Ce jour-là, le chasse au cerf fut contre-
mandée, et, contre sa coutume, le roi monta
seul dans son carrosse, sans convier à l'ac-
compagner une seule de ces belles dames qui
sont demeurées jusqu'à la fin de sa vie son
escorte ordinaire. Suivi de quelques-uns de
ses familiers, il partit après avoir donné
l'ordre de diriger la promenade du côté le
plus solitaire des environs de Paris. Le car-
rosse s'arrêta à Luciennes, et le roi mit pied
à terre. Aussitôt l'un des courtisans, instruit
sans doute du but de cette course, s'appro-
cha de lui :
— Sire, lui dit-il respectueusement, votre
majesté ne saurait choisir un site plus agréa-
ble pour y faire bâtir un château.
— J'en conviens, répondit le prince ; mais
ce n'est pas là ce qu'il me faut. Je veux une
thébaïde, quelque chose de sombre et d'aus-
tère. Avançons, messieurs.
On alla tout droit à Marly, terre alors dé-
solée, encombrée de marécages et de collines
0 idues.
— Eh bien, messieurs, dit Louis XIV, nous
viendrons deux ou trois fois l'année faire une
retraite à Marly pour expier nos péchés.
Le soir même, en rentrant de sa prome-
nade, le roi envoya chercher Mansard et lui
ordonna de se mettre immédiatement à l'oeu-
vre pour construire son ermitage.
Cet ermitage, ce rien, comme on l'appe-
lait, coûta plus d'un milliard.
Un milliard pour embellir ce que Saint-
Simon nomme dans sa langue énergique
« un repaire de serpents, de crapauds et de
» grenouilles, réceptacle de toutes les voiries
» des environs, » c'est beaucoup, en vérité.
Toutefois, n'en déplaise au fier gentilhomme,
qui probablement avait eu à supporter à
Marly quelque royale rebuffade, il est fort
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