Titre : La Rampe : revue des théâtres, music-halls, concerts, cinématographes / Georges Schmitt, directeur-rédacteur en chef ; Bernard de Puybelle, directeur-administratateur
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1923-01-14
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32847829g
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 15683 Nombre total de vues : 15683
Description : 14 janvier 1923 14 janvier 1923
Description : 1923/01/14 (A9,N315). 1923/01/14 (A9,N315).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5725580j
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-60609
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 01/12/2010
LA RAMPE
LES NUITS DE VIENNE
Elektra de Strauss. — Les danses d'Anita Berber
Où sont les nuits féeriques de Vienne, les lumières sur la neige, 1er
traîneaux glissant à toute vitesse vers l'Opéra, emportant un soir de
gala des femmes couvertes de pierreries sous les fourrures qui les emmi-
touflent ? Où sont les nuits du Saclier et du Bristol, et leurs coûteuses
roses de France, que remplacent aujourd'hui des fleurs de papier peint
dans les cornets d'argent.
Vienne est triste comme un cimetière de rois. Une lumière quasi
voilée dé crêpe éclaire à peine le Ring ; une neige crasseuse couvre le
sol depuis huit jours sans que pelles ni balais veuillent nettoyer le trot-
toir. La bise cingle les passants au visage, adieu voilures de luxe, traî-
neaux, beaux attelages d'autrefois, dans Vienne en république, il ne reste
le soir que dès tramways qui, par économie, s'arrêtent à onze heures.
II en est sept. C'est l'heure des théâtres, et l'heure où]des ombres rôdent
autour des grands hôtels et des restaurants de
nuit. Des mains se tendent, des voix supplient,
les fantômes de Vienne sont des fantômes qui
ont faim. Par pudeur et par noblesse, l'immense
détresse de l'Autriche se cache le jour et se
dévoile la nuit. Pour entrer à l'Opéra, il faut
traverser ce cortège tragique des meurt-de-faim.
Je ne connais rien de plus terrible que ce deuil
aux portes du théâtre.
La lumière violente qui éclaire l'édifice rejette
dans les ténèbres et dans la neige ces malheu-
reux; la foule envahit le théâtre, il n'y aura plus
une place libre ce soir, on donne Y Elektra de
Strauss. Afin d'assister à cette représentation
si attendue, des gens se sont privés de manger,
d'autres sont venus à pied des faubourgs loin-
tains, d'autres ont sacrifié le présent de Noël,
mais, en échange du sacrifice, ils auront eu la
joie d'entendre cette musique de Strauss dont-ils
sont fous, cette musique qui est aussi celle du
grand maître, la consolatrice de tout un peuple !
La salle de l'Opéra de Vienne est magnifique;
l'or en fut patiné par le temps. L'aspect du pu-
blic qui la remplit jusqu'au faîte me fait songera
la salle Wagram un jour de meeting pomilaire.
Peu ou point ds toilettes ; ni habits ni smo-
kings, mais des paletots de tous les jours. Sur
le dôme de la loge impériale, posé là comme des
champignons monstrueux, des chapeaux mou;,
des chapeaux melons entourent familièrement
a couronne du Saint-Empire !
Strauss est à 1 orchestre, sec, maigre et vi-
goureux. Vingt fois, on le rappelle. Vingt fois,
il revient saluer ce public frémissant et sensible
qui acclame en lui l'artiste et le consolateur.
Car ce drame d Elektra, que Strauss a mis en
ooéra sans rien lui enlever de son caractère farou-
che, est bien fait pour émouvoir les âmes qui ont
touché le fond de 1 abîme de la douleur. La
guerre, la mort, la ruine, la révolte, la vengeance, la malédiction des
dieux, tout ce qui accable la famille d'Agamennon depuis la guerre de
Troie, frappe la dynasties de Habsbourg, et tous les coeurs crient et
gémissent avec Elektra. Lu douleur d'un peuple Irouve sa poétique
image dans le vieux drame antique que Strauss a rendu si humain.
Le sujet (YElcI^tra, emprunté à la tragédie grecque est trop connu
pour que je 1» rappelle, je n'en dirai rien si ce n'est qu'au théâtre, il offre
d.s longueurs, et que ces récitatifs lasseraient probablement un autre
auditoire que celui de Vienne qui se rassasie de so propre souffrance,
à travers la fable et l'histoire
La pièce n'a que deux actes, et l'entracte n'est que de cinq minutes ;
\î décor, d'architecture primitive grecque est le même durant toute la
pièce, mais le metteur en scène a su tirer un parti admirable des escaliers
q :i descendent des portes du palais de Clytemnestre jusqu'aux fontaines
d: Il ville, et rendent vraisemblables les péripéties de l'action
La puissance de 1 orchestre, sa fougue, sa passion écrasent souvent
la voix des acteurs, mais sans atténuer l'effet de leur jeu lyrique el réa-
liste. Les acteurs de l'Opéra à Vienne, en particulier Mme Culheil-
Schoder, protagoniste du rôle d Elektra ne jouent pas comme nos
acteurs classiques, avec mesure, pompe et dignité ! Ce sont des êtres
déchaînés. Reines ou princesses, ce sont d'abord des femmes, et quelles
femmes ! Elektra paraît, ses vêlements sont en lambeaux, elle est à
demi nue, ses cheveux sont répandus sur ses épaules ; elle ne pense qu'à
son père, à ce glorieux Agamennon que Clytemnestre a traîtreusement
assassiné, et c'est par une danse pyrrhique du plus curieux effet, que la
princesse exprime son enthousiasme guerrier, avant de s'abandonner
à la rage et au désespoir.
Et que dire du jeu de Clylemnestrc, celte reine sensuelle qui apparaît
dans les atours d'une asiatique. Elle chancelle devant sa fille, au sortir
d'une nuit d'amour, alors qu'elle est ivre de plaisir, de luxure et de
sang. Rien, en France» ne peut donner l'idée de ce réalisme effrayant,
Ce jeu désordonné, cette passion déchaînée des acteurs, ce réalisme
qui mélange si curieusement l'humain au document historique, donne
une vie incroyable à ce théâtre antique dont nous avons chez nous une
pâle interprétation ! Je ne vois que de Max, dont le pathétisme soit fait
de cette liberté, de cette audace et de cette sincérité.
Il est à Vienne un autre spectacle qui fait courir toute la ville, c'est
l'exhibition à l'Apollo et dans la plus grande salle de concerts d'une
danseuse nue, Anila Berber. Y courir n est pas assez dire, on s'y précipite,
avec des jumelles de course, alin de ne rien
perdre de ce spectacle, qualifié « d'art et de
beauté ». Que cette danseuse soit belle, personne
ne le nie, que ce soit une artiste de talent, c'est
autre chose, et l'on ne saurait retrouver pour
louer sa grâce et sa danse, les phrases.cliarmantes
par lesquelles Anatole France évoquait autrefois
Thaïs.
Elle est nue ! Je dirai qu'elle est seulement
vêtue d'une émeraude dans le nombril el d'un
rien qui lui sert de modestie. Mais des femmes
nues, on en voit par douzaines dans toules les
revues de fin d'année ! Pourquoi sortir Anîta
Berber de l'anonymat qui sied aux danseuses du
Casino de Paris. Parce que ses danses, ou
plutôt ses tableaux vivants par leur audace,
ont fait scandale à Vienne ! Jugez-en :
Dans ce récital, que cette belle fille offre au
public avec son danseur, nu aussi et doré par
surcroît, elle mime un tableau qui s'appelle
Astarlé. Astarté s'arrête dans les cieux el, par un
escalier d'or, la danseuse, enveloppée dans un
manteau scintillant, descend sur la scène, et là,
évoluant comme un mannequin de grande mai-
son, laisse choir son manteau et jaillit nue,
longue et nerveuse comme une Diane de
Jean Goujon. Aussitôt, elle entre en chasse,
poursuit dans la forêt la bête, saute, fait des
écarls de jambes à ravir les vieux messieurs.
Ayant ainsi montré en mouvement les beautés
de son académie, elle tombe sur un divan noir
et là se livre sur elle-même à ce doux attentat
qui ferait frémir M. Joseph Prudhomme, s'il
était Viennois !
Grâce aux lorgnettes, nul ne peut échapper
à l'émoi que cause la vue d'un plaisir si
aimablement donné ! Est-ce là tout ?... Non
pas, il y a un numéro de danse qui s'appelle
Cocaïne, où Anila Berber atimaraît en corset, les
seins nus, ballant au rythme de sa fureur et de sa pâmoison, un autre
s'appelle Morphine, qu elle danse avec une frénésie et une sombre ar-
deur dans la robe de velours noir qu elle arrache en mourant. Un autre
numéro, le plus audacieux, et qui apparaît comme une profanation,,
c'est l'Enigme qu'Anita Berber danse sur la musique de Beethoven,
la sonate au Clair de Lune. Elle apparaît comme un sphinx, étendue
sur le sol ; passe un Pierrot funambulesque, la femme saute sur |ui,
s'enroule à lui, l'étreinl et se renverse en une pose si provocante que nul
n'ignore ses intentions et ceci fait... et puis encore cela, le Pierrot
épuisé dénoue la cordelière qui ceint les reins de sa maîtresse et
s'étrangle avec ! Morale : On ne badine pas avec l'amour.
La danseuse reprend sa pose de sphinx sur le corps de son amant et
attend, énigmatique, qu'un autre mâle passe à portée de sa main.
Comment concevoir que l'attrait de ce programme de danses, évo-
catrices de la débauche et du vice, attire quatre fois de suite, quatre
mille personnes, que par ces temps de misère ne feraient sortir de chez
elles, ni le plus grand poète, ni le plus grand musicien du monde ?
La seule explication, c'est que Vienne affamée de pain est affamée
d'amour ; que la sensualité est une force qui l'emporte sur tout le reste ;
qu'elle se nourrit et s'empoisonne de tout ce qu'on lui donne, et que des
spectacles pareils sont le douloureux régal du sadisme qui plaît aux
névrosés. Dans Vienne épuisée par la souffrance et la misère, les visions
erotiques qui passent voilent la pensée obsédante de la mort. Peut-on
en vouloir à ceux qui souffrent des pires souffrances, d'enchanter leur
douleur par des tableaux sortis des lectures de Sacher Masoch et de
Krafl-Ehing J
GABRIELLE RÉVAL.
i(i
ANÎTA BERBER
LES NUITS DE VIENNE
Elektra de Strauss. — Les danses d'Anita Berber
Où sont les nuits féeriques de Vienne, les lumières sur la neige, 1er
traîneaux glissant à toute vitesse vers l'Opéra, emportant un soir de
gala des femmes couvertes de pierreries sous les fourrures qui les emmi-
touflent ? Où sont les nuits du Saclier et du Bristol, et leurs coûteuses
roses de France, que remplacent aujourd'hui des fleurs de papier peint
dans les cornets d'argent.
Vienne est triste comme un cimetière de rois. Une lumière quasi
voilée dé crêpe éclaire à peine le Ring ; une neige crasseuse couvre le
sol depuis huit jours sans que pelles ni balais veuillent nettoyer le trot-
toir. La bise cingle les passants au visage, adieu voilures de luxe, traî-
neaux, beaux attelages d'autrefois, dans Vienne en république, il ne reste
le soir que dès tramways qui, par économie, s'arrêtent à onze heures.
II en est sept. C'est l'heure des théâtres, et l'heure où]des ombres rôdent
autour des grands hôtels et des restaurants de
nuit. Des mains se tendent, des voix supplient,
les fantômes de Vienne sont des fantômes qui
ont faim. Par pudeur et par noblesse, l'immense
détresse de l'Autriche se cache le jour et se
dévoile la nuit. Pour entrer à l'Opéra, il faut
traverser ce cortège tragique des meurt-de-faim.
Je ne connais rien de plus terrible que ce deuil
aux portes du théâtre.
La lumière violente qui éclaire l'édifice rejette
dans les ténèbres et dans la neige ces malheu-
reux; la foule envahit le théâtre, il n'y aura plus
une place libre ce soir, on donne Y Elektra de
Strauss. Afin d'assister à cette représentation
si attendue, des gens se sont privés de manger,
d'autres sont venus à pied des faubourgs loin-
tains, d'autres ont sacrifié le présent de Noël,
mais, en échange du sacrifice, ils auront eu la
joie d'entendre cette musique de Strauss dont-ils
sont fous, cette musique qui est aussi celle du
grand maître, la consolatrice de tout un peuple !
La salle de l'Opéra de Vienne est magnifique;
l'or en fut patiné par le temps. L'aspect du pu-
blic qui la remplit jusqu'au faîte me fait songera
la salle Wagram un jour de meeting pomilaire.
Peu ou point ds toilettes ; ni habits ni smo-
kings, mais des paletots de tous les jours. Sur
le dôme de la loge impériale, posé là comme des
champignons monstrueux, des chapeaux mou;,
des chapeaux melons entourent familièrement
a couronne du Saint-Empire !
Strauss est à 1 orchestre, sec, maigre et vi-
goureux. Vingt fois, on le rappelle. Vingt fois,
il revient saluer ce public frémissant et sensible
qui acclame en lui l'artiste et le consolateur.
Car ce drame d Elektra, que Strauss a mis en
ooéra sans rien lui enlever de son caractère farou-
che, est bien fait pour émouvoir les âmes qui ont
touché le fond de 1 abîme de la douleur. La
guerre, la mort, la ruine, la révolte, la vengeance, la malédiction des
dieux, tout ce qui accable la famille d'Agamennon depuis la guerre de
Troie, frappe la dynasties de Habsbourg, et tous les coeurs crient et
gémissent avec Elektra. Lu douleur d'un peuple Irouve sa poétique
image dans le vieux drame antique que Strauss a rendu si humain.
Le sujet (YElcI^tra, emprunté à la tragédie grecque est trop connu
pour que je 1» rappelle, je n'en dirai rien si ce n'est qu'au théâtre, il offre
d.s longueurs, et que ces récitatifs lasseraient probablement un autre
auditoire que celui de Vienne qui se rassasie de so propre souffrance,
à travers la fable et l'histoire
La pièce n'a que deux actes, et l'entracte n'est que de cinq minutes ;
\î décor, d'architecture primitive grecque est le même durant toute la
pièce, mais le metteur en scène a su tirer un parti admirable des escaliers
q :i descendent des portes du palais de Clytemnestre jusqu'aux fontaines
d: Il ville, et rendent vraisemblables les péripéties de l'action
La puissance de 1 orchestre, sa fougue, sa passion écrasent souvent
la voix des acteurs, mais sans atténuer l'effet de leur jeu lyrique el réa-
liste. Les acteurs de l'Opéra à Vienne, en particulier Mme Culheil-
Schoder, protagoniste du rôle d Elektra ne jouent pas comme nos
acteurs classiques, avec mesure, pompe et dignité ! Ce sont des êtres
déchaînés. Reines ou princesses, ce sont d'abord des femmes, et quelles
femmes ! Elektra paraît, ses vêlements sont en lambeaux, elle est à
demi nue, ses cheveux sont répandus sur ses épaules ; elle ne pense qu'à
son père, à ce glorieux Agamennon que Clytemnestre a traîtreusement
assassiné, et c'est par une danse pyrrhique du plus curieux effet, que la
princesse exprime son enthousiasme guerrier, avant de s'abandonner
à la rage et au désespoir.
Et que dire du jeu de Clylemnestrc, celte reine sensuelle qui apparaît
dans les atours d'une asiatique. Elle chancelle devant sa fille, au sortir
d'une nuit d'amour, alors qu'elle est ivre de plaisir, de luxure et de
sang. Rien, en France» ne peut donner l'idée de ce réalisme effrayant,
Ce jeu désordonné, cette passion déchaînée des acteurs, ce réalisme
qui mélange si curieusement l'humain au document historique, donne
une vie incroyable à ce théâtre antique dont nous avons chez nous une
pâle interprétation ! Je ne vois que de Max, dont le pathétisme soit fait
de cette liberté, de cette audace et de cette sincérité.
Il est à Vienne un autre spectacle qui fait courir toute la ville, c'est
l'exhibition à l'Apollo et dans la plus grande salle de concerts d'une
danseuse nue, Anila Berber. Y courir n est pas assez dire, on s'y précipite,
avec des jumelles de course, alin de ne rien
perdre de ce spectacle, qualifié « d'art et de
beauté ». Que cette danseuse soit belle, personne
ne le nie, que ce soit une artiste de talent, c'est
autre chose, et l'on ne saurait retrouver pour
louer sa grâce et sa danse, les phrases.cliarmantes
par lesquelles Anatole France évoquait autrefois
Thaïs.
Elle est nue ! Je dirai qu'elle est seulement
vêtue d'une émeraude dans le nombril el d'un
rien qui lui sert de modestie. Mais des femmes
nues, on en voit par douzaines dans toules les
revues de fin d'année ! Pourquoi sortir Anîta
Berber de l'anonymat qui sied aux danseuses du
Casino de Paris. Parce que ses danses, ou
plutôt ses tableaux vivants par leur audace,
ont fait scandale à Vienne ! Jugez-en :
Dans ce récital, que cette belle fille offre au
public avec son danseur, nu aussi et doré par
surcroît, elle mime un tableau qui s'appelle
Astarlé. Astarté s'arrête dans les cieux el, par un
escalier d'or, la danseuse, enveloppée dans un
manteau scintillant, descend sur la scène, et là,
évoluant comme un mannequin de grande mai-
son, laisse choir son manteau et jaillit nue,
longue et nerveuse comme une Diane de
Jean Goujon. Aussitôt, elle entre en chasse,
poursuit dans la forêt la bête, saute, fait des
écarls de jambes à ravir les vieux messieurs.
Ayant ainsi montré en mouvement les beautés
de son académie, elle tombe sur un divan noir
et là se livre sur elle-même à ce doux attentat
qui ferait frémir M. Joseph Prudhomme, s'il
était Viennois !
Grâce aux lorgnettes, nul ne peut échapper
à l'émoi que cause la vue d'un plaisir si
aimablement donné ! Est-ce là tout ?... Non
pas, il y a un numéro de danse qui s'appelle
Cocaïne, où Anila Berber atimaraît en corset, les
seins nus, ballant au rythme de sa fureur et de sa pâmoison, un autre
s'appelle Morphine, qu elle danse avec une frénésie et une sombre ar-
deur dans la robe de velours noir qu elle arrache en mourant. Un autre
numéro, le plus audacieux, et qui apparaît comme une profanation,,
c'est l'Enigme qu'Anita Berber danse sur la musique de Beethoven,
la sonate au Clair de Lune. Elle apparaît comme un sphinx, étendue
sur le sol ; passe un Pierrot funambulesque, la femme saute sur |ui,
s'enroule à lui, l'étreinl et se renverse en une pose si provocante que nul
n'ignore ses intentions et ceci fait... et puis encore cela, le Pierrot
épuisé dénoue la cordelière qui ceint les reins de sa maîtresse et
s'étrangle avec ! Morale : On ne badine pas avec l'amour.
La danseuse reprend sa pose de sphinx sur le corps de son amant et
attend, énigmatique, qu'un autre mâle passe à portée de sa main.
Comment concevoir que l'attrait de ce programme de danses, évo-
catrices de la débauche et du vice, attire quatre fois de suite, quatre
mille personnes, que par ces temps de misère ne feraient sortir de chez
elles, ni le plus grand poète, ni le plus grand musicien du monde ?
La seule explication, c'est que Vienne affamée de pain est affamée
d'amour ; que la sensualité est une force qui l'emporte sur tout le reste ;
qu'elle se nourrit et s'empoisonne de tout ce qu'on lui donne, et que des
spectacles pareils sont le douloureux régal du sadisme qui plaît aux
névrosés. Dans Vienne épuisée par la souffrance et la misère, les visions
erotiques qui passent voilent la pensée obsédante de la mort. Peut-on
en vouloir à ceux qui souffrent des pires souffrances, d'enchanter leur
douleur par des tableaux sortis des lectures de Sacher Masoch et de
Krafl-Ehing J
GABRIELLE RÉVAL.
i(i
ANÎTA BERBER
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