Titre : Le Ménestrel : journal de musique
Éditeur : Heugel (Paris)
Date d'édition : 1863-11-08
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb344939836
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 44462 Nombre total de vues : 44462
Description : 08 novembre 1863 08 novembre 1863
Description : 1863/11/08 (A30,N49)-1863/11/14. 1863/11/08 (A30,N49)-1863/11/14.
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5615739j
Source : Bibliothèque nationale de France, TOL Non conservé au département des périodiques
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 01/12/2010
895 - 50- ANNÉE (N° 49) Dimanche 8 Novembre 1865
MUSIQUE ET THEATRES
J. L. HEUGEL —~— J. D'ORTIGUE
Directe Les Bureaux, 2 bis, rue Vivienne Rédacteur en chef
COLLABORATEURS DU JOURNAL:
MM. TRE ANNE, AZEVEDO, H. BARBEDETTE, H. BLAZE DE BURY, GUSTAYE BERTRAND, PAUL BERNARD,
OSCAR COMETTANT, D. DENNE-BARON, G. DUPREZ, P. A. FIORENTINO, DE GASPERINI,
G. HÉQTJET, LÉON HALÉYY, B. JOUVIN, MARMONTEL, AMÉDÉE MÉREAUX, A. DE PONTMARTIN,
J. D'ORTIGUE, G. DE SAINT-YALRY ET P. RICHARD
Adresser FRANCO à M. J. L. HEUGEL, directeur du MÉNESTREL, les Lettres et les Manuscrits. (Pour les conditions d'abonnement, voir aux Annonces.)
SOMMAIRE-TEXTE
I, Laure Cinti-Damoreau, notice biographique (3° article), P. A. FIORENTINO.— II. 1" repré-
sentation des TROYENS, d'HECTOR BERLIOZ, au Théâtre-Lyrique, A. DE GASPERINI . —
III. Théâtre-Italien : M. Bagier et son administration, reprise de POLIUTO et de
NORMA.M.FRASCHINI, Mm" Julienne Dejean, de Lagrange, Vahderbeek, PAUL BERNARD.
— IV. Semaine théâtrale : GUSTAVE BERTRAND. — V. Nouvelles et Annonces.
J-=tt—€
MUSIQUE DE PIANO
Nos abonnés à la musique de PIANO recevront avec le numéro de ce jour :
LE GÉANT
Quadrille aérostatique, par CHARDON, avec dessin, le'gende et règlement de bord,
par NADAR ; suivra immédiatement après : la transcription variée de CH. NECSTEDT,
sur Bi tanti palpiti de G. Rossroi.
CHANT
Nous publierons dimanche prochain, pour nos abonnés à la musique de CHANT,
kFioraja, polacca de MICHEL BERGSON, composée pour Mme MIOLAN-CARVALHO.—
Suivra immédiatement après : Félicités de ma misère! paroles d'ÉMitE BARATEAU,
musique d'ÉaiiLE DORAND.
Nous ferons connaître à nos abonnés les primes 1863-1864 qui
leur seront offertes du 1er au 10 décembre, à l'occasion de la
31° année d'existence du journal le Ménestrel.
LAURE CINTI-DAMOREAU
in
Un léger nuage, que le public n'aperçut même pas, vint trou-
Mer la sérénité et l'enjouement naturel de notre jeune prima
donna. Après bien des pérégrinations et bien des revers, les Ita-
liens s'étaient réfugiés dans le théâtre Louvois. Ils y avaient débuté
Par un ouvrage de Paër, les Bannis de Florence [I Fuorusciti di
Pwenze), qui semblait une allusion à leurs déménagements suc-
cessifs et à ce dernier asile qu'on leur accordait. De 1819 à 1825,
eP»que de leur retour à la salle Favart, MUc Cinti, qui grandissait
® beauté et en talent, prit la part la plus active et la plus bril- '
ante à tous leurs travaux et à tous leurs succès. Elle était très-aimée
«e ses camarades ; un seul homme ne semblait pas lui témoigner
Une bien vive sympathie, et cet homme était justement son di-
recteur.
En ce moment, les deux troupes étaient régies par la même admi-
nistration, et le Théâtre-Italien n'était qu'une annexe de l'Opéra.
Viotti, qui avait la haute main sur les artistes des deux compagnies
italienne et française, était mal disposé pour M" 0 Cinti ; il lui pré-
férait une autre cantatrice, jeune aussi, pleine de charme, qui
devait plus tard occuper dans le monde une position dont elle
s'est montrée digne à tous les titres. On voyait monter l'orage, et,
comme il arrive toujours, la personne qui aurait dû le plus s'en gar-
der était celle qui s'en doutait le moins. Les avertissements ne
manquèrent pas à M 11, 0 Cinti ; on lui fit entrevoir les dangers qu'elle
courait et qui la menaçaient de fort près. Elle ne s'en émut guère ;
avec ce fonds d'insouciance et de laisser-aller, qui ne l'a point
quittée jusqu'aux derniers jours de sa vie, elle n'a jamais voulu
croire au mal, elle n'a jamais rien fait pour se défendre contre une
attaque où se préserver d'une intrigue, et plus elle a été trompée,
plus sa confiance a été aveugle et profonde.
Le coup partit au moment où la jeune artiste devait le moins s'y
attendre. Elle rentrait après une soirée triomphale : on l'avait
applaudie, rappelée; on lui avait jeté des bouquets dont elle avait
plein les bras. Sa mère va au-devant d'elle ; on s'embrasse à plu-
sieurs reprises, et les yeux de M'le Cinti se portent sur un papier
plié en quatre qu'on avait posé sur la cheminée. Elle l'ouvre, elle
le parcourt, elle le tend, sans dire un mot, à sa mère. C'est sa
lettre de congé. Elle ne fait plus partie du Théâtre-Italien!
Le lendemain, la mère et la fille n'eurent point à délibérer de
quel côté elles dirigeraient leurs démarches. Un ami arrive tout
essoufflé. — Vous savez la nouvelle? — Je suis renvoyée, dit l'ar-
tiste en souriant. L'ami la regarde avec surprise ; il croit qu'elle
veut se moquer de lui, et il ajoute : — Viotti est révoqué et rem-
placé par Habeneck. C'était un vrai changement à vue. Le premier
soin d'Habeneck fut de réparer la faute de son prédécesseur. Cette
révolution de coulisses demeura un' secret de famille. Rien n'en
transpira au dehors, et personne n'a su que MUe Cinti, au plus fort
de ses succès, a failli quitter le théâtre où elle brillait, et peut-être
son pays, par le caprice et l'entêtement d'un directeur, homme
lui-même d'un grand talent.
A quelque temps de là, elle fut appelée à l'Opéra pour y chanter
le Rossignol, dans une représentation au bénéfice des incendiés de
Salins. Ce n'est qu'en tremblant qu'elle accepta cet honneur. Elle
n'avait joué qu'aux Italiens jusqu'alors; elle avait l'habitude, le
goût, le style de la musique italienne ; paraître tout à coup, sans
étude préparatoire, sur la première scène lyrique de France, lui
paraissait une hardiesse inexcusable. Avec le sentiment de la per-
fection qu'elle portait en elle, elle doutait et se méfiait de ses
forces à chaque nouvelle épreuve. Ce n'est point qu'elle man-
MUSIQUE ET THEATRES
J. L. HEUGEL —~— J. D'ORTIGUE
Directe Les Bureaux, 2 bis, rue Vivienne Rédacteur en chef
COLLABORATEURS DU JOURNAL:
MM. TRE ANNE, AZEVEDO, H. BARBEDETTE, H. BLAZE DE BURY, GUSTAYE BERTRAND, PAUL BERNARD,
OSCAR COMETTANT, D. DENNE-BARON, G. DUPREZ, P. A. FIORENTINO, DE GASPERINI,
G. HÉQTJET, LÉON HALÉYY, B. JOUVIN, MARMONTEL, AMÉDÉE MÉREAUX, A. DE PONTMARTIN,
J. D'ORTIGUE, G. DE SAINT-YALRY ET P. RICHARD
Adresser FRANCO à M. J. L. HEUGEL, directeur du MÉNESTREL, les Lettres et les Manuscrits. (Pour les conditions d'abonnement, voir aux Annonces.)
SOMMAIRE-TEXTE
I, Laure Cinti-Damoreau, notice biographique (3° article), P. A. FIORENTINO.— II. 1" repré-
sentation des TROYENS, d'HECTOR BERLIOZ, au Théâtre-Lyrique, A. DE GASPERINI . —
III. Théâtre-Italien : M. Bagier et son administration, reprise de POLIUTO et de
NORMA.M.FRASCHINI, Mm" Julienne Dejean, de Lagrange, Vahderbeek, PAUL BERNARD.
— IV. Semaine théâtrale : GUSTAVE BERTRAND. — V. Nouvelles et Annonces.
J-=tt—€
MUSIQUE DE PIANO
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LE GÉANT
Quadrille aérostatique, par CHARDON, avec dessin, le'gende et règlement de bord,
par NADAR ; suivra immédiatement après : la transcription variée de CH. NECSTEDT,
sur Bi tanti palpiti de G. Rossroi.
CHANT
Nous publierons dimanche prochain, pour nos abonnés à la musique de CHANT,
kFioraja, polacca de MICHEL BERGSON, composée pour Mme MIOLAN-CARVALHO.—
Suivra immédiatement après : Félicités de ma misère! paroles d'ÉMitE BARATEAU,
musique d'ÉaiiLE DORAND.
Nous ferons connaître à nos abonnés les primes 1863-1864 qui
leur seront offertes du 1er au 10 décembre, à l'occasion de la
31° année d'existence du journal le Ménestrel.
LAURE CINTI-DAMOREAU
in
Un léger nuage, que le public n'aperçut même pas, vint trou-
Mer la sérénité et l'enjouement naturel de notre jeune prima
donna. Après bien des pérégrinations et bien des revers, les Ita-
liens s'étaient réfugiés dans le théâtre Louvois. Ils y avaient débuté
Par un ouvrage de Paër, les Bannis de Florence [I Fuorusciti di
Pwenze), qui semblait une allusion à leurs déménagements suc-
cessifs et à ce dernier asile qu'on leur accordait. De 1819 à 1825,
eP»que de leur retour à la salle Favart, MUc Cinti, qui grandissait
® beauté et en talent, prit la part la plus active et la plus bril- '
ante à tous leurs travaux et à tous leurs succès. Elle était très-aimée
«e ses camarades ; un seul homme ne semblait pas lui témoigner
Une bien vive sympathie, et cet homme était justement son di-
recteur.
En ce moment, les deux troupes étaient régies par la même admi-
nistration, et le Théâtre-Italien n'était qu'une annexe de l'Opéra.
Viotti, qui avait la haute main sur les artistes des deux compagnies
italienne et française, était mal disposé pour M" 0 Cinti ; il lui pré-
férait une autre cantatrice, jeune aussi, pleine de charme, qui
devait plus tard occuper dans le monde une position dont elle
s'est montrée digne à tous les titres. On voyait monter l'orage, et,
comme il arrive toujours, la personne qui aurait dû le plus s'en gar-
der était celle qui s'en doutait le moins. Les avertissements ne
manquèrent pas à M 11, 0 Cinti ; on lui fit entrevoir les dangers qu'elle
courait et qui la menaçaient de fort près. Elle ne s'en émut guère ;
avec ce fonds d'insouciance et de laisser-aller, qui ne l'a point
quittée jusqu'aux derniers jours de sa vie, elle n'a jamais voulu
croire au mal, elle n'a jamais rien fait pour se défendre contre une
attaque où se préserver d'une intrigue, et plus elle a été trompée,
plus sa confiance a été aveugle et profonde.
Le coup partit au moment où la jeune artiste devait le moins s'y
attendre. Elle rentrait après une soirée triomphale : on l'avait
applaudie, rappelée; on lui avait jeté des bouquets dont elle avait
plein les bras. Sa mère va au-devant d'elle ; on s'embrasse à plu-
sieurs reprises, et les yeux de M'le Cinti se portent sur un papier
plié en quatre qu'on avait posé sur la cheminée. Elle l'ouvre, elle
le parcourt, elle le tend, sans dire un mot, à sa mère. C'est sa
lettre de congé. Elle ne fait plus partie du Théâtre-Italien!
Le lendemain, la mère et la fille n'eurent point à délibérer de
quel côté elles dirigeraient leurs démarches. Un ami arrive tout
essoufflé. — Vous savez la nouvelle? — Je suis renvoyée, dit l'ar-
tiste en souriant. L'ami la regarde avec surprise ; il croit qu'elle
veut se moquer de lui, et il ajoute : — Viotti est révoqué et rem-
placé par Habeneck. C'était un vrai changement à vue. Le premier
soin d'Habeneck fut de réparer la faute de son prédécesseur. Cette
révolution de coulisses demeura un' secret de famille. Rien n'en
transpira au dehors, et personne n'a su que MUe Cinti, au plus fort
de ses succès, a failli quitter le théâtre où elle brillait, et peut-être
son pays, par le caprice et l'entêtement d'un directeur, homme
lui-même d'un grand talent.
A quelque temps de là, elle fut appelée à l'Opéra pour y chanter
le Rossignol, dans une représentation au bénéfice des incendiés de
Salins. Ce n'est qu'en tremblant qu'elle accepta cet honneur. Elle
n'avait joué qu'aux Italiens jusqu'alors; elle avait l'habitude, le
goût, le style de la musique italienne ; paraître tout à coup, sans
étude préparatoire, sur la première scène lyrique de France, lui
paraissait une hardiesse inexcusable. Avec le sentiment de la per-
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