Titre : Ciné France : organe indépendant de défense du cinéma : le journal des spectateurs
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1938-02-11
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327422899
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 11 février 1938 11 février 1938
Description : 1938/02/11 (A3,N30). 1938/02/11 (A3,N30).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k56060165
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, GR FOL-JO-2953
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
= 11-2-38 =
UsuùdJtaâ Amu h Aavoi/i...
Jiu-jitsu diplomatique
En marge du conflit qui ensanglant
la Chine et remplit les écrans de
images de la désolation, S. E. Sigimurc
ambassadeur du lapon à Paris, se 1
vrait la semaine dernière, sous 1
regard des caméras à une démonstre
tion de force comme rarement la diplc
matie donne l'occasion d'en voir.
Ancien champion universitaire d
jiu-jitsu. l'ambassadeur revêtait 1
kimono de lutte, largement échancr
sur l'opulence de sa maturité, pou
livrer un combat très singulier à soi
ressortissant, le professeur du clul
franco-japonais de jiu-jitsu à Paris.
Une prise de vue préalable montrait
dans l'assistance de cette exhibitioi
de souplesse et de défense, l'acteu
Sessue Hayakawa. Et cette confronta
tion du protagoniste de « la Bataille »
avec le diplomate prouva que celui-c
n'est pas moins photogénique que sot
compatriote. La bonne humeur resplen
dissante de l'Excellence extrême-orien
taie répandue sur des traits burinés
en rondeurs prêtait au lapon, sous lei
espèces de son représentant, un rayon
nement sympathique qu'il n'est pas
inutile d'exploiter à l'heure actuelle.
Ayant ainsi triomphé de la malignité
des objectifs, l'ambassadeur s'en pre-
nait en toute cordialité a son adver-
saire qu'il désarticulait le plus propre-
ment du monde, jetait a terre, désos-
sait ramassait, basculait, démantibu-
lait à nouveau avec l'ardeur qu'il eu 1
mise à traiter le maréchal Tchang
Kaï Tchek lui-même.
— La souplesse, expliqua-t-il au>
micros, tout est là I Avec la souplesse,
on peut triompher de tout adversaire
même beaucoup plus fort que soi,
Leçon qui est à méditer, même
dans les cercles qui se tiennent d'or-
dinaire à l'écart des matelas de jiu-
jitsu.
On songeait invinciblement, en re-
gardant l'ambassadeur immobiliser son
i partenaire par des prises savante
i aux réunions diplomatiques où la sot
plesse et la hardiesse de S. I
Sigimura et de ses collègues d
t la carrière japonaise se jouent de
velléités de résistance de partenaire
plus forts et plus nombreux.
Et 'on regrettait que l'on n'eût pa
songé à localiser les conflits interna
tionaux sur les rings de jiu-jitsu, ai
défensif. offensif, tactique et courtois.
S'il y avait eu un matelas à Genève
au lieu d'un vain tapis de table, oi
n'aurait eu, en fait de courses au:
armements, qu'à limiter le tonnage de:
ambassadeurs aux prises les uns avei
les autres et au lieu d'édicter d'inefn
caces restrictions aux fureurs de le
guerre, à préciser seulement les prises
interdites et les prises autorisées.
Les tensions internationales n'au-
raient plus eu d'autres conséquences
déplorables que des torsions diploma-
tiques.
♦
S. E. Sigimura montre la voie,
Il est vrai que les canons et les avions
nippons en ouvrent une assez diffé-
rente.
Autre vedette sans le savoir de la
semaine : la fille de la princesse lu-
liana. Elle joue son rôle qui est consi-
dérable dans les actualités sans se
montrer à l'écran. C'est la vedette invi-
sible.
Autour de son berceau, déborde une
joie délirante, dont la propagation sur
la toile fait rire avec sympathie.
La princesse nouveau-née. un peu
frippée comme on l'est à son âge,
attend de s'être fait une beauté, grâce
au bon lait de Hollande, pour débuter
devant les caméras. On peut lui pré-
dire, sans risques d'erreur, une belle
carrière cinématographique.
Merry BROMBERGER.
Les Pirates du rail
de Christian Jaque
Avant de parler de ce film en détail,
je voudrais poser une question d'ordre
général.
Pourquoi faire des films français qui
se passent hors de France ? Pourquoi
l'Angleterre littéraire de Drôle de Dra-
me ? ou le pays hypothétique et vague-
ment irlandais du Puritain ? Pourquoi
" toutes les petites et les grandes Russies
des Troïkas et des Bas-Fonds ?
Je sais bien, le roman d'O.-P. Gilbert
se passe dans une concession chinoise
_. .et c'était un beau sujet. Mais le talent
de.conteur de.L'écrivain,8,pour complice
notre imagination, il suggère et nous
croyons. Au cinéma, rien n'est plus dan-
gereux que le pittoresque de studio. Si
nous ne sommes pas tout à fait convain-
cus, nous restons entièrement sceptiques
et un peu froids. Les Pirates du rail
sont, à ce sujet, un film bien inégal.
Certaines photos magnifiques : une che-
vauchée, ou l'arri.ée du 112, train mi-
traillé, nous mettent dans l'état d'esprit
nécessaire, nous allors nous passionner
pour cette aventi"a, avoir peur, malheu-
reusement, une maladresse, une maquette
trop parfaite, les longueurs du décou-
page nous ramènent aussitôt à la réa-
lité d'une salle de cinéma.
Et puis, si les critiques ont été mé-
contents des Chinois de la Bonne terre,
que diraient-ils de ceux de M. Chris-
tian Jaque ! Non, ni Lucas Gridoux,
beaucoup trop grimaçant, ni Eric von
Stroheim, quelle que soit sa conscience
d'acteur, ne sont convaincants. Ils parais-
sent inférieurs en couleur locale au plus
petit figurant.
Voici le scénario. Les bandes d'un
pirate, Wang (Inkijinoff I, au sud, les
troupes d'un général chinois révolté,
Tchou-King (. von Stroheim), au nord
attaquent la ligne du chemin de fer
franco-chinois. Les trains sont arrêtés et
mitraillés : l'ingénieur Rolland et sa
femme (Jacques Dumesiii-1 et Suzy Prim)
sont cernés et enfumés ; les lignes té-
léphoniques sont coupées ; la concession
du chemin de fer est assiégée ; la ville
de Yunnan-Fou brûle ; le général ré-
gulier Tsaï (Lucas Gridoux) trahit. C'est
l'ingénieur en chef Pierson (Charles Va-
nel> qui est le chef responsable. Sacri-
fiant les intérêts personnels des hommes
à ceux de la ligne, exemple de courage
et d'autorité, il sauvera la situation grâce
au revirement du pirate Wang à qui le
lie « le serment du sang ». Cependant
sa femme, ayant, malgré les consi-
gnes, quitté la concession pour aller
admonester le gouverneur de Yunnan-
Fou, a été enlevée comme otage par le
général rebelle. Elle sera délivrée et tout
rentrera dans l'ordre.
On regrette que cette histoire d'aven-
ture, que cet hommage aux ingénieut
français, n'ait pas été mieux réussi. IN
les scènes de sadisme, malgré le talei
d'E. von Stroheim, ni celles de folii
malgré les beaux pleurs de Suzy Prin
ne sont très émouvantes.
Charles Vanel est superbe, Inkijinol
aussi, Doumel, dans le rôle de l'ingé
nieur Morganty, a cette espèce de vérit
rassurante des acteurs méridionaux.
Si, en tant qu'humble spectatrice, j
peux dire que je n'ai pas été convaincue
je n'ai aucune qualité pour parler de 1;
vraisemblance du scénario.
Il y a tout de même une chose conte
laquelle je m'élève avec la dernière éner
gie, c'est l'attitude donnée aux femme
dans cette histoire. J'ai connu beaucoui
de femmes de colons, de tous les milieu:
et de toutes nos colonies, elles étaien
des modèles de crânerie, d'énergie, di
courage. Je ne peux pas les imaginer
devant un danger certain et un exempli
à donner aux indigènes, hystériques
pleurnichardes, sottes, couardes commi
on nous les montre dans Les Pirates di
rail. Xa seule qui ait un peu de cran
Mme Pierson (Simone Renant), manque
à la discipline commune, ne remplit pas
ses devoirs et par un héroïsme stupide
met tout le monde en danger.
Ce n'est pas vrai, et c'est une insulte
que des femmes françaises ne méritent
pas.
(Psso.) G. M.
Une Journée
de Printemps
de Archie Mayo
J'ai l'impression que le scénariste fran-
çais qui serait venu offrir cette charmante
histoire à un producteur aurait terminé
sa journée à l'infirmerie spéciale du
dépôt. Il ne se passe strictement rien.
La famille Nilton se réveille : père
et mère heureux et fidèles depuis vingt-
deux ans, le grand fils aîné, une jeune
fille de seize ans, une gamine de treize
qui va encore à l'école. Mais ce n'est pas
un réveil ordinaire, c'est la première
journée de printemps, il fait beau, si
beau qu'ils laissent pour la première
fois leurs manteaux devenus inutiles. Et,
toute la journée, ils rêveront d'évasion :
le père flirte avec une belle actrice, In
mère se laisse faire la cour par un ti-
mide enragé (Roland Young) ; la fille
se jette au cou d'un peintre ; le fils
veut s'enfuir pour l'Europe, et la ca-
dette (Bonita Granville) rêve de poè-
tes et de mort.
C'est comme un coup de soleil, et le
soir tous regagnent le bercail. Le fils au
lieu de gagner l'Europe est tombé amou-
reux de la voisine. L'ingénue pleure son
amour dont le peintre heureusement n'a
pas voulu ; la petite fille va se coucher
dans une véritable transe poétique ; et
! — CINÉ F
Iles deux v'eux époux se pardonnent
leurs fredaines et en rient ensemble.
fous le.- détails sont ravissants de ma-
lice et de fraîcheur. La troupe est ex-
cellente : Olivia de Havilland est l'in-
génue, et Frieda Inescort, sa mère, est.
' I très belle, Ian Hunter est le mari, Alice
Brady comme toujours est très bonne.
I La seule critique que je trouve à for-
muler est un jeu un peu théâtral, dû
peut-être au désir du metteur en scè-
i;, ne de maintenir son histoire hors du
I réel.
(Waner Bros.) G. M.
Voici I Escadre
de Ray- Enrighf
C'est un film de music-hall destiné à
I mettre en vedette Dick Powell, sa voix
I et son charme.
I Nous y voyons des fusiliers-marins
I d'opérette auxquels il arrive toutes
I sortes d'aventures qui toutes se termi-
I nent par des chansons. Histoire alerte
j et bien menée que personne ne prend
I au sérieux. Un excellent gag : après
:| un pique-nique, marins et fillettes se
I sont retirés deux par deux dans des coins
II de rochers pour flirter. L'appareil nous
I p-ornène d'un couple à l'autre, tous
j se disputent. Mais Dick Powell chante,
i et, quand la caméra recommence sa ron-
de, les amoureux réconciliés s'embras-
sent.
Le meilleur comique du film est Hugh
i Herbert dans le rôle de l'imprésario
jj Phinney. C'est le comique qui vient. Il
!| a même maintenant un petit thème mu-
;j sical qui l'accompagne de film en film,
I et rren qu'à l'entendre les spectateurs
|| rient.
Doris Weston imite Alice Faye, mais
j] sans succès.
J'auraÎ6 bien voulu savoir le nom du
| joueur d'harmonica qui est tout sim-
!i| plement admirable et qui, au point de
1 vue musical, enlève la vedette à Dick
jij Powell.
êTËf o . r* \t
LANCE ■ !
H. Griffitb, réalisateur de Café métro-
pole, un spécialiste de comédies.
Mais, une fois de plus, c'est par le scé-
nario que pèche ce film. Malgré tout les
« gags » que l'on a pu y placer, l'his-
toire ne vaut pas grand'rhose, et
Kidnappez-moi, monsieur est sans aucun
doute le plus mauvais film de miss
Grâce Moore, tourné à ce jour.
Une grande cantatr'ce veut aller chan-
ter à Paris. Un imprésario veut la per-
suader d'aller chanter à Buenos-Aires.
Par ruse d'imprésario, Melvyn Douglas
se l'ait présenter à miss Moore qui igno-
rant son identité accepte de se faire enle-
ver par lui et de le suivre en Amérique
du Sud. A bord du paquebot, il lui
avoue la vérité. Fureur de miss Moore,
brouille, pus finalement réconciliation
et mariage.
Tout cela n'est pas bien fort.
Il y a cependant des scènes amusantes
bien venues, et bien jouées, grâce au
souple talent de comédienne de Grâce
Moore, de l'admirable Mielvyn Douglas,
et de l'impayable Stuart Erwin, qui est
toujours aussi drôle.
Mais le chant n'a pas grand'chose à
faire ici et, de plus, les airs ont été assez
mal choisis.
Grâce Moore nous fait entendre au
cours du film la Gavotte de Manon, en
français, et quelques autres airs d'opéra
et d'opérettes. Sa voix est beaucoup
moins bien enregistrée que dans ses films
précédents, et surtout que dans l'inou-
bliable One night of love.
(Columbia.) p. A.
Mollenard
de Robert Siodmak
Pourquoi Mollenard n'est-il pas le
grand film que nous pouvions attendre ?
Il avait en soi tous les éléments qui
devaient permettre une éclatante réussite.
Le sujet* dû à O.-P. Gilbert, reporter
et romancier, éta:t intéressant
Pourquoi faut-il donc que tous ces
éléments cinématographiques aient été si
mal utilisés ? Doit-on en faire le repro-
_!..- . 1 1, 1 . .« ^-i.
Kidnappez-moi
Monsieur
de E,W. Griffirh
Le vieux proverbe latin non bis in
idem (jamais deux fois la même chose),
peut s'appliquer au cinéma. Il existe,
en effet, en matière de films, une règle
confirmée par l'expérience, à savoir qu'on
ne renouvelle jamais un chef-d'oeuvre.
Ceci s'applique aussi bien aux films de
Grâce Moore, qu'à ceux du couple Fred
Astaire-Ginger Rogers, des Miarx Bro-
thers, ou même de Laurel et Hardy.
Il est impossible de recommencer
un coup de maître et, dans un genre très
délimité, de réussir plusieurs fois de
suite un film basé sur des éléments iden-
tiques, avec des vedettes caractérisées.
Les oeuvres qui suivront la meilleure du
genre seront toujours inférieures.
Ces réflexions nous venaient à l'esprit
en voyant le nouveau film de la canta-
trice Grâce Moore : Kidnappez-moi,
monsieur TU take romance.
Que nous sommes donc loin de One
night of love, film que réalisa Victor
Schertzinger, et qui, avec Grâce Moore,
lança au cinéma le film musical ayant
comme vedette une grande cantatrice.
Construire un scénario basé sur le talent
d'une chanteuse n'était pas chose facile.
On le vit bien par la suite, avec les
autres films de Grâce Moore, comme avec
ceux de ses imitatrices, Lily Pons, en
particulier.
Après One night of love, dont le suc-
cès fut universel, Grâce Moore parut
dans Aimez-moi toujours, également de
Victor Schertzinger, puis dans Sa
Majesté s'amuse, de Josef Von Sternberg,
puis, plus récemment, dans Le Coeur en
fête, de Robert Riskin. Cette variété de
metteurs en scène, et également de scéna-
ristes, changés à chaque film, nous
montre les efforts de Grâce Moore pour
renouveler son genre. Et, malgré cela,
à chaque coup, le nouveau film de la
série était inférieur au précédent. ,
Pour Kidnappez-moi, monsieur, on a
:- —.. .— ..». __i t^j i
les Spaak et O.-P. Gilbert lui-rrîênve, ou
au réalisateur, le metteur en, scène alle-
mand Robert Siodmak ? '' .
Le film se divise très nettement en
deux parties, qui semblent cousues bout
à bout, sans aucune connexion logique.
La première partie nous dépeint,
à travers des aventures, le caractère de
Mollenard, forban sans scrupules, de
goûts vulgaires, n'ayant peur de rien. Les
aventures, ce sont des rixes* dans les
bars louches de Shanghaï, des amours
éphémères avec les Chinois, des coups
de revolver—
L'atmosphère existe, en partie... Car
pas un instant, sfauf pour les scènes de
l'incendie, nous n'avons l'impression
d'être à bord d'un navire. De plus, les
scènes sont tellement confuses, tellement
sombres, le son est si peu intelligible,
que l'on ne saisit pas toujours très bien
ce qui se passe.
L'action, le mouvement manquent com-
plètement à cette première partie du
film qui aurait dû être esquissée rapi-
dement, et ne contenir que juste ce qu'il
fallait pour nous faire comprendre ce
qu'est Mollenard.
La seconde partie est un conflit psy-
chologique : bien traité, il pouvait don-
ner un film extrêmement intéressant. Là
encore, on est passé à côté. Il n'y a aucun
doute que le sujet a été mal traité : man-
que d'harmonie, manque d'équilibre,
manque de liaison dans la construction
dramatique, ce sont là les raisons qui
font que ce film n'est pas ce qu'il aurait
...AU PIRE
rien ne ressort : un scénario confus
avec des scènes qui semblent mises bout
à bout. On avait une bonne histoire :
on n'a pas su la raconter. Aucun cres-
cendo dramatique, tout cela reste plat,
neutre, à aucun moment on n'attend
avec impatience ce qui va suivre... On
voudrait être ému : on ne le peut pas.
On devient furieux en pensant à ce que
de telles situations, bien traitées, auraient
pu donner au cinéma. A la place, on a
un film neutre, souvent ennuyeux, et
d'une longueur démesurée, et qui n'en
finit pas.
Et pourtant : il y avait des acteurs,
un scénario,- de beaux décors, toute
l'atmosphère d'un port français du
nord : Dunkerque... où l'on a passé des
semaines à tourner des extérieurs. Robert
Siodmak, qui réalisa autrefois, en Alle-
magne, Tumultes et Autour d'une En-
quête, a cependant fait consciencieuse-
ment son métier. L'atmosphère française
lui a-t-elle échappé ? On peut le penser.
Il nous fallait un Duvivier pour traiter
un tel sujet. Siodmak a mis, en outre,
dans le film, une note socialisante inu-
tile, qui ridiculise sans raison le patro-
nat, et qui est bien invraisemblable.
Est-ce là le plus grand mérite du réali-
sateur ?
Au point de vue moral et français, ce
drame de la famille est réellement péni-
ble, voire choquant. Et ce ne sont pas
les gros mots que l'on a mis dans la
bouche de Mollenard qui ajoutent quel-
que force à l'impuissance des images.
Film antifamilial, déprimant, obscur,
qui a en soi un certain intérêt, mais
qu'il nous est impossible de recomman-
der. Quand donc nous montrera-t-on des
films français optimistes représentant la
marine, marchande aussi bien que mili-
taire, sous son vrai jour ? Des officiers
de marine trompés au cas de ce pauvre
Mollenard, notre marine n'est guère à
l'honneur au cinéma. Le film sur la ma-
rine française reste ainsi à faire... ♦
(Pathé-Consortium.)
Nuits de Princes
de Wladimir Strijewsky
Nuits de Princes est un film -inégal,
un peu éparpillé, allongé de scènes inu-
tiles, lent dans son développement, mais
fait de belles images, de certains passa-
ges remarquables, d'une sobre émotion
et, sans doute, de vérité, même en ce qui
peut paraître parfois conventionnel ou
un peu outré. Strijewsky a fait un em-
prunt discret aux lieux communs du gen-
re ; danses et choeurs, cosaques et
vodka, mais son film est surtout russe
en certains personnages, comme celui
d'Héléna, qui paraissent souffrir de vivre
dans un cloaque et- ne font rien pour en
sortir, dans ces alternatives, également
acceptées, de grand luxe et de misère.
L'interprétation, elle aussi, est inégale.
Kate de Nagy a de très grandes quali-
tés, une belle souplesse de jeu, mais la
première place revient à René Lefévre
qui a cqmposé un rôle d'ingénieur infir-
me et malade avec une vérité saisissante.
Fernand Fabre, Jean Murât, Alcover,
Marina Shubért, à la voix agréable, sont
à leur place et peuvent donner l'illusion
de leurs personnages; on regrette de voir
un artiste intelligent comme Larquey
dans un rôle de médecin russe devenu
chauffeur, rôle auquel ne le prédispo-
A
saient guère son jeu et son allure si ty-
piquement populaire et parisienne. Er-
reur de choix de la part du producteur,
mais aussi manque d'étendue dans le
jeu de l'artiste. On pouvait de même
éviter aux personnages de Pauline Car-
ton et Milly Mathis une telle banalité,
et exprimer en finesse ce qui n'est ici
que trivialité.
En dépit de tout cela, répétons-le, le
film a de la valeur. Toute la partie qui
a trait au personnage de René Lefévre
est remarquable par la sobriété du jeu
et la qualité de la photo. II y.a notam-
ment une image — Lefévre vu de dos,
devant l'âtre — qui est magnifique.
L'évocation de la fuite des jours a per-
mis à Strijewsky une intéressante et cu-
rieuse utilisation de cinéma muet...
Quelle force dramatique prennent tout
de suite ces images libérées de la pa-
role ! Enfin il y a de la vigueur et
même de la violence, une audace peut-
être excessive, telle cette scène où Kate
de Nagy jette, à la tête du gérant, tout
a la fois une coupe de Champagne et
le mot de Cambronne !
Une intrigue plus serrée, un peu d'ho-
mogénéité et de mesure pouvaient faire
de Nuits de Princes un beau film. Mais
ce sont là précisémen: les qualités qui
manquent le plus à l'esprit slave.
(Tobis.)
P. L.
Titin de Martigues
de René Pujol
Le goût évolue, en France.
Malheureusement, c'est dans un sens
unique, vers la descente.
Il n'est que de voir le succès fait à
Titin des Martigues dans son actuelle
« exclusivité » pour en être, hélas! per-
suadés.
D'abord le titre. Pourquoi Titin des
Martigues ? Pour expliquer, ou excuser
l'accent du principal personnage. Ce
Titin est un bonimenteur de foire. C'est
ainsi que nous le verrons dans une fête
foraine parisienne, flanqué de ses deux
acolytes joués l'un par Rellys, un comi-
que assez drôle, l'autre par Larquey,
pauvre grand Larquey fourvoyé ici.
Quant à Titin, c'est Alibert, auteur de
quelques « marseillaiseries » et autres
galéjades qui, toutes, ont du succès. Ali-
bert pousse la romance avec agrément
et n'a pas moins de gentillesse qu'un
autre.
Le film compte encore Jim Gérald, en
patron de baraque ; Aimos, mal à son
aise dans un rôle épisodique de combi-
nard perfide ; Paulette Dubost, Suzanne
Dehelly, toutes deux pleines d'alacrité
et de minaudières oeillades ; enfin Mar-
guerite Pierry et Myno Burney qui
silhouettent avec une originale verdeur
deux Américaines toquées, richissimes et
iheandescentes.
Voilà les personnages posés. -»
Le .décor est multiple : plusieurs* ftfl- „_»"*"*
res (Paris, Marseille, Bordeaux), ,1e
« Vel' d'Hiv' » au moment d'un match
de pancrace, la Côte d'Azur, avec ses
obl'gatoires palaces et bars de nuit.
' D'où vient que l'on... que je ne trouve
à ce film aucun sel, nulle trouvaille,
pas le plus petit atome d'intérêt. Autour
de moi, certains spectateurs se tapent sur
les cuisses, ravis de tant de grosse rigo-
lade.
Le sujet est en petits morceaux déta-
chés. On croit y rencontrer un filet de
logique, mais, sous un prétexte de mou-
vement interne, la logique s'éclipse et
il ne reste que de pâteux tableaux ordon-
nés sans art, où pourtant la saine loufo-
querie d'un Rellys, la verve d'une Mar-
guerite Pierry, ou la truculence de
Suzanne Dehelly se donnent libre cours..
L'intrigue — si l'on peut écrire ce mot
ici —commence entre un patron forain
ruiné, sa fille, le commanditaire libidi-
neux et le fiancé secret de la demoiselle.
Le commanditaire (Aimos) voudrait
épouser la fille de son déb'teur (Pau-
lette Dubost), laquelle aime Alibert.
Suzanne Dehelly est le flirt de Rellys.
Le trio de copains jouera, on ne sait
trop comment, dans un orchestre au
Moulin-Rouge, puis partira en tournée
dans le Midi où deux Américaines l'en-
gageront. C'est à ce propos qu'on verra
Larquey garder ou promener, à travers
Marseille, Toulon ou Cannes, une
douzaine de pékinois et une cage de per-
ruches. Ce « gag » fait long feu et
n'amuse guère. Les scènes des Améri-
■aines et de leurs chevaliers servants
irritent notre besoin de réserve et man-
quent au tact le plus élémentaire. Et
quand l'histoire rebondit pour aboutir
au « Vel' d'Hiv' » par une poursuite
lenre « tarte à la crème », on croit le
Slm fini dans l'idiotie. Non, car le traître
e désiste en faveur du jeune premier.
\libert épousera Paulette, Dehelly sou-
•ira à Rellys, et Jim Gérald bénira ces
leux mariages.
On sent que Titin des Martigues
i manqué de moyens. Et je ne parle
jas des moyens spirituels qui, eux, sont
çratuits, et font par trop défaut. ,
(Films Malesherbes)
Lucie DERAIN.
■Et
UsuùdJtaâ Amu h Aavoi/i...
Jiu-jitsu diplomatique
En marge du conflit qui ensanglant
la Chine et remplit les écrans de
images de la désolation, S. E. Sigimurc
ambassadeur du lapon à Paris, se 1
vrait la semaine dernière, sous 1
regard des caméras à une démonstre
tion de force comme rarement la diplc
matie donne l'occasion d'en voir.
Ancien champion universitaire d
jiu-jitsu. l'ambassadeur revêtait 1
kimono de lutte, largement échancr
sur l'opulence de sa maturité, pou
livrer un combat très singulier à soi
ressortissant, le professeur du clul
franco-japonais de jiu-jitsu à Paris.
Une prise de vue préalable montrait
dans l'assistance de cette exhibitioi
de souplesse et de défense, l'acteu
Sessue Hayakawa. Et cette confronta
tion du protagoniste de « la Bataille »
avec le diplomate prouva que celui-c
n'est pas moins photogénique que sot
compatriote. La bonne humeur resplen
dissante de l'Excellence extrême-orien
taie répandue sur des traits burinés
en rondeurs prêtait au lapon, sous lei
espèces de son représentant, un rayon
nement sympathique qu'il n'est pas
inutile d'exploiter à l'heure actuelle.
Ayant ainsi triomphé de la malignité
des objectifs, l'ambassadeur s'en pre-
nait en toute cordialité a son adver-
saire qu'il désarticulait le plus propre-
ment du monde, jetait a terre, désos-
sait ramassait, basculait, démantibu-
lait à nouveau avec l'ardeur qu'il eu 1
mise à traiter le maréchal Tchang
Kaï Tchek lui-même.
— La souplesse, expliqua-t-il au>
micros, tout est là I Avec la souplesse,
on peut triompher de tout adversaire
même beaucoup plus fort que soi,
Leçon qui est à méditer, même
dans les cercles qui se tiennent d'or-
dinaire à l'écart des matelas de jiu-
jitsu.
On songeait invinciblement, en re-
gardant l'ambassadeur immobiliser son
i partenaire par des prises savante
i aux réunions diplomatiques où la sot
plesse et la hardiesse de S. I
Sigimura et de ses collègues d
t la carrière japonaise se jouent de
velléités de résistance de partenaire
plus forts et plus nombreux.
Et 'on regrettait que l'on n'eût pa
songé à localiser les conflits interna
tionaux sur les rings de jiu-jitsu, ai
défensif. offensif, tactique et courtois.
S'il y avait eu un matelas à Genève
au lieu d'un vain tapis de table, oi
n'aurait eu, en fait de courses au:
armements, qu'à limiter le tonnage de:
ambassadeurs aux prises les uns avei
les autres et au lieu d'édicter d'inefn
caces restrictions aux fureurs de le
guerre, à préciser seulement les prises
interdites et les prises autorisées.
Les tensions internationales n'au-
raient plus eu d'autres conséquences
déplorables que des torsions diploma-
tiques.
♦
S. E. Sigimura montre la voie,
Il est vrai que les canons et les avions
nippons en ouvrent une assez diffé-
rente.
Autre vedette sans le savoir de la
semaine : la fille de la princesse lu-
liana. Elle joue son rôle qui est consi-
dérable dans les actualités sans se
montrer à l'écran. C'est la vedette invi-
sible.
Autour de son berceau, déborde une
joie délirante, dont la propagation sur
la toile fait rire avec sympathie.
La princesse nouveau-née. un peu
frippée comme on l'est à son âge,
attend de s'être fait une beauté, grâce
au bon lait de Hollande, pour débuter
devant les caméras. On peut lui pré-
dire, sans risques d'erreur, une belle
carrière cinématographique.
Merry BROMBERGER.
Les Pirates du rail
de Christian Jaque
Avant de parler de ce film en détail,
je voudrais poser une question d'ordre
général.
Pourquoi faire des films français qui
se passent hors de France ? Pourquoi
l'Angleterre littéraire de Drôle de Dra-
me ? ou le pays hypothétique et vague-
ment irlandais du Puritain ? Pourquoi
" toutes les petites et les grandes Russies
des Troïkas et des Bas-Fonds ?
Je sais bien, le roman d'O.-P. Gilbert
se passe dans une concession chinoise
_. .et c'était un beau sujet. Mais le talent
de.conteur de.L'écrivain,8,pour complice
notre imagination, il suggère et nous
croyons. Au cinéma, rien n'est plus dan-
gereux que le pittoresque de studio. Si
nous ne sommes pas tout à fait convain-
cus, nous restons entièrement sceptiques
et un peu froids. Les Pirates du rail
sont, à ce sujet, un film bien inégal.
Certaines photos magnifiques : une che-
vauchée, ou l'arri.ée du 112, train mi-
traillé, nous mettent dans l'état d'esprit
nécessaire, nous allors nous passionner
pour cette aventi"a, avoir peur, malheu-
reusement, une maladresse, une maquette
trop parfaite, les longueurs du décou-
page nous ramènent aussitôt à la réa-
lité d'une salle de cinéma.
Et puis, si les critiques ont été mé-
contents des Chinois de la Bonne terre,
que diraient-ils de ceux de M. Chris-
tian Jaque ! Non, ni Lucas Gridoux,
beaucoup trop grimaçant, ni Eric von
Stroheim, quelle que soit sa conscience
d'acteur, ne sont convaincants. Ils parais-
sent inférieurs en couleur locale au plus
petit figurant.
Voici le scénario. Les bandes d'un
pirate, Wang (Inkijinoff I, au sud, les
troupes d'un général chinois révolté,
Tchou-King (. von Stroheim), au nord
attaquent la ligne du chemin de fer
franco-chinois. Les trains sont arrêtés et
mitraillés : l'ingénieur Rolland et sa
femme (Jacques Dumesiii-1 et Suzy Prim)
sont cernés et enfumés ; les lignes té-
léphoniques sont coupées ; la concession
du chemin de fer est assiégée ; la ville
de Yunnan-Fou brûle ; le général ré-
gulier Tsaï (Lucas Gridoux) trahit. C'est
l'ingénieur en chef Pierson (Charles Va-
nel> qui est le chef responsable. Sacri-
fiant les intérêts personnels des hommes
à ceux de la ligne, exemple de courage
et d'autorité, il sauvera la situation grâce
au revirement du pirate Wang à qui le
lie « le serment du sang ». Cependant
sa femme, ayant, malgré les consi-
gnes, quitté la concession pour aller
admonester le gouverneur de Yunnan-
Fou, a été enlevée comme otage par le
général rebelle. Elle sera délivrée et tout
rentrera dans l'ordre.
On regrette que cette histoire d'aven-
ture, que cet hommage aux ingénieut
français, n'ait pas été mieux réussi. IN
les scènes de sadisme, malgré le talei
d'E. von Stroheim, ni celles de folii
malgré les beaux pleurs de Suzy Prin
ne sont très émouvantes.
Charles Vanel est superbe, Inkijinol
aussi, Doumel, dans le rôle de l'ingé
nieur Morganty, a cette espèce de vérit
rassurante des acteurs méridionaux.
Si, en tant qu'humble spectatrice, j
peux dire que je n'ai pas été convaincue
je n'ai aucune qualité pour parler de 1;
vraisemblance du scénario.
Il y a tout de même une chose conte
laquelle je m'élève avec la dernière éner
gie, c'est l'attitude donnée aux femme
dans cette histoire. J'ai connu beaucoui
de femmes de colons, de tous les milieu:
et de toutes nos colonies, elles étaien
des modèles de crânerie, d'énergie, di
courage. Je ne peux pas les imaginer
devant un danger certain et un exempli
à donner aux indigènes, hystériques
pleurnichardes, sottes, couardes commi
on nous les montre dans Les Pirates di
rail. Xa seule qui ait un peu de cran
Mme Pierson (Simone Renant), manque
à la discipline commune, ne remplit pas
ses devoirs et par un héroïsme stupide
met tout le monde en danger.
Ce n'est pas vrai, et c'est une insulte
que des femmes françaises ne méritent
pas.
(Psso.) G. M.
Une Journée
de Printemps
de Archie Mayo
J'ai l'impression que le scénariste fran-
çais qui serait venu offrir cette charmante
histoire à un producteur aurait terminé
sa journée à l'infirmerie spéciale du
dépôt. Il ne se passe strictement rien.
La famille Nilton se réveille : père
et mère heureux et fidèles depuis vingt-
deux ans, le grand fils aîné, une jeune
fille de seize ans, une gamine de treize
qui va encore à l'école. Mais ce n'est pas
un réveil ordinaire, c'est la première
journée de printemps, il fait beau, si
beau qu'ils laissent pour la première
fois leurs manteaux devenus inutiles. Et,
toute la journée, ils rêveront d'évasion :
le père flirte avec une belle actrice, In
mère se laisse faire la cour par un ti-
mide enragé (Roland Young) ; la fille
se jette au cou d'un peintre ; le fils
veut s'enfuir pour l'Europe, et la ca-
dette (Bonita Granville) rêve de poè-
tes et de mort.
C'est comme un coup de soleil, et le
soir tous regagnent le bercail. Le fils au
lieu de gagner l'Europe est tombé amou-
reux de la voisine. L'ingénue pleure son
amour dont le peintre heureusement n'a
pas voulu ; la petite fille va se coucher
dans une véritable transe poétique ; et
! — CINÉ F
Iles deux v'eux époux se pardonnent
leurs fredaines et en rient ensemble.
fous le.- détails sont ravissants de ma-
lice et de fraîcheur. La troupe est ex-
cellente : Olivia de Havilland est l'in-
génue, et Frieda Inescort, sa mère, est.
' I très belle, Ian Hunter est le mari, Alice
Brady comme toujours est très bonne.
I La seule critique que je trouve à for-
muler est un jeu un peu théâtral, dû
peut-être au désir du metteur en scè-
i;, ne de maintenir son histoire hors du
I réel.
(Waner Bros.) G. M.
Voici I Escadre
de Ray- Enrighf
C'est un film de music-hall destiné à
I mettre en vedette Dick Powell, sa voix
I et son charme.
I Nous y voyons des fusiliers-marins
I d'opérette auxquels il arrive toutes
I sortes d'aventures qui toutes se termi-
I nent par des chansons. Histoire alerte
j et bien menée que personne ne prend
I au sérieux. Un excellent gag : après
:| un pique-nique, marins et fillettes se
I sont retirés deux par deux dans des coins
II de rochers pour flirter. L'appareil nous
I p-ornène d'un couple à l'autre, tous
j se disputent. Mais Dick Powell chante,
i et, quand la caméra recommence sa ron-
de, les amoureux réconciliés s'embras-
sent.
Le meilleur comique du film est Hugh
i Herbert dans le rôle de l'imprésario
jj Phinney. C'est le comique qui vient. Il
!| a même maintenant un petit thème mu-
;j sical qui l'accompagne de film en film,
I et rren qu'à l'entendre les spectateurs
|| rient.
Doris Weston imite Alice Faye, mais
j] sans succès.
J'auraÎ6 bien voulu savoir le nom du
| joueur d'harmonica qui est tout sim-
!i| plement admirable et qui, au point de
1 vue musical, enlève la vedette à Dick
jij Powell.
êTËf o . r* \t
LANCE ■ !
H. Griffitb, réalisateur de Café métro-
pole, un spécialiste de comédies.
Mais, une fois de plus, c'est par le scé-
nario que pèche ce film. Malgré tout les
« gags » que l'on a pu y placer, l'his-
toire ne vaut pas grand'rhose, et
Kidnappez-moi, monsieur est sans aucun
doute le plus mauvais film de miss
Grâce Moore, tourné à ce jour.
Une grande cantatr'ce veut aller chan-
ter à Paris. Un imprésario veut la per-
suader d'aller chanter à Buenos-Aires.
Par ruse d'imprésario, Melvyn Douglas
se l'ait présenter à miss Moore qui igno-
rant son identité accepte de se faire enle-
ver par lui et de le suivre en Amérique
du Sud. A bord du paquebot, il lui
avoue la vérité. Fureur de miss Moore,
brouille, pus finalement réconciliation
et mariage.
Tout cela n'est pas bien fort.
Il y a cependant des scènes amusantes
bien venues, et bien jouées, grâce au
souple talent de comédienne de Grâce
Moore, de l'admirable Mielvyn Douglas,
et de l'impayable Stuart Erwin, qui est
toujours aussi drôle.
Mais le chant n'a pas grand'chose à
faire ici et, de plus, les airs ont été assez
mal choisis.
Grâce Moore nous fait entendre au
cours du film la Gavotte de Manon, en
français, et quelques autres airs d'opéra
et d'opérettes. Sa voix est beaucoup
moins bien enregistrée que dans ses films
précédents, et surtout que dans l'inou-
bliable One night of love.
(Columbia.) p. A.
Mollenard
de Robert Siodmak
Pourquoi Mollenard n'est-il pas le
grand film que nous pouvions attendre ?
Il avait en soi tous les éléments qui
devaient permettre une éclatante réussite.
Le sujet* dû à O.-P. Gilbert, reporter
et romancier, éta:t intéressant
Pourquoi faut-il donc que tous ces
éléments cinématographiques aient été si
mal utilisés ? Doit-on en faire le repro-
_!..- . 1 1, 1 . .« ^-i.
Kidnappez-moi
Monsieur
de E,W. Griffirh
Le vieux proverbe latin non bis in
idem (jamais deux fois la même chose),
peut s'appliquer au cinéma. Il existe,
en effet, en matière de films, une règle
confirmée par l'expérience, à savoir qu'on
ne renouvelle jamais un chef-d'oeuvre.
Ceci s'applique aussi bien aux films de
Grâce Moore, qu'à ceux du couple Fred
Astaire-Ginger Rogers, des Miarx Bro-
thers, ou même de Laurel et Hardy.
Il est impossible de recommencer
un coup de maître et, dans un genre très
délimité, de réussir plusieurs fois de
suite un film basé sur des éléments iden-
tiques, avec des vedettes caractérisées.
Les oeuvres qui suivront la meilleure du
genre seront toujours inférieures.
Ces réflexions nous venaient à l'esprit
en voyant le nouveau film de la canta-
trice Grâce Moore : Kidnappez-moi,
monsieur TU take romance.
Que nous sommes donc loin de One
night of love, film que réalisa Victor
Schertzinger, et qui, avec Grâce Moore,
lança au cinéma le film musical ayant
comme vedette une grande cantatrice.
Construire un scénario basé sur le talent
d'une chanteuse n'était pas chose facile.
On le vit bien par la suite, avec les
autres films de Grâce Moore, comme avec
ceux de ses imitatrices, Lily Pons, en
particulier.
Après One night of love, dont le suc-
cès fut universel, Grâce Moore parut
dans Aimez-moi toujours, également de
Victor Schertzinger, puis dans Sa
Majesté s'amuse, de Josef Von Sternberg,
puis, plus récemment, dans Le Coeur en
fête, de Robert Riskin. Cette variété de
metteurs en scène, et également de scéna-
ristes, changés à chaque film, nous
montre les efforts de Grâce Moore pour
renouveler son genre. Et, malgré cela,
à chaque coup, le nouveau film de la
série était inférieur au précédent. ,
Pour Kidnappez-moi, monsieur, on a
:- —.. .— ..». __i t^j i
les Spaak et O.-P. Gilbert lui-rrîênve, ou
au réalisateur, le metteur en, scène alle-
mand Robert Siodmak ? '' .
Le film se divise très nettement en
deux parties, qui semblent cousues bout
à bout, sans aucune connexion logique.
La première partie nous dépeint,
à travers des aventures, le caractère de
Mollenard, forban sans scrupules, de
goûts vulgaires, n'ayant peur de rien. Les
aventures, ce sont des rixes* dans les
bars louches de Shanghaï, des amours
éphémères avec les Chinois, des coups
de revolver—
L'atmosphère existe, en partie... Car
pas un instant, sfauf pour les scènes de
l'incendie, nous n'avons l'impression
d'être à bord d'un navire. De plus, les
scènes sont tellement confuses, tellement
sombres, le son est si peu intelligible,
que l'on ne saisit pas toujours très bien
ce qui se passe.
L'action, le mouvement manquent com-
plètement à cette première partie du
film qui aurait dû être esquissée rapi-
dement, et ne contenir que juste ce qu'il
fallait pour nous faire comprendre ce
qu'est Mollenard.
La seconde partie est un conflit psy-
chologique : bien traité, il pouvait don-
ner un film extrêmement intéressant. Là
encore, on est passé à côté. Il n'y a aucun
doute que le sujet a été mal traité : man-
que d'harmonie, manque d'équilibre,
manque de liaison dans la construction
dramatique, ce sont là les raisons qui
font que ce film n'est pas ce qu'il aurait
...AU PIRE
rien ne ressort : un scénario confus
avec des scènes qui semblent mises bout
à bout. On avait une bonne histoire :
on n'a pas su la raconter. Aucun cres-
cendo dramatique, tout cela reste plat,
neutre, à aucun moment on n'attend
avec impatience ce qui va suivre... On
voudrait être ému : on ne le peut pas.
On devient furieux en pensant à ce que
de telles situations, bien traitées, auraient
pu donner au cinéma. A la place, on a
un film neutre, souvent ennuyeux, et
d'une longueur démesurée, et qui n'en
finit pas.
Et pourtant : il y avait des acteurs,
un scénario,- de beaux décors, toute
l'atmosphère d'un port français du
nord : Dunkerque... où l'on a passé des
semaines à tourner des extérieurs. Robert
Siodmak, qui réalisa autrefois, en Alle-
magne, Tumultes et Autour d'une En-
quête, a cependant fait consciencieuse-
ment son métier. L'atmosphère française
lui a-t-elle échappé ? On peut le penser.
Il nous fallait un Duvivier pour traiter
un tel sujet. Siodmak a mis, en outre,
dans le film, une note socialisante inu-
tile, qui ridiculise sans raison le patro-
nat, et qui est bien invraisemblable.
Est-ce là le plus grand mérite du réali-
sateur ?
Au point de vue moral et français, ce
drame de la famille est réellement péni-
ble, voire choquant. Et ce ne sont pas
les gros mots que l'on a mis dans la
bouche de Mollenard qui ajoutent quel-
que force à l'impuissance des images.
Film antifamilial, déprimant, obscur,
qui a en soi un certain intérêt, mais
qu'il nous est impossible de recomman-
der. Quand donc nous montrera-t-on des
films français optimistes représentant la
marine, marchande aussi bien que mili-
taire, sous son vrai jour ? Des officiers
de marine trompés au cas de ce pauvre
Mollenard, notre marine n'est guère à
l'honneur au cinéma. Le film sur la ma-
rine française reste ainsi à faire... ♦
(Pathé-Consortium.)
Nuits de Princes
de Wladimir Strijewsky
Nuits de Princes est un film -inégal,
un peu éparpillé, allongé de scènes inu-
tiles, lent dans son développement, mais
fait de belles images, de certains passa-
ges remarquables, d'une sobre émotion
et, sans doute, de vérité, même en ce qui
peut paraître parfois conventionnel ou
un peu outré. Strijewsky a fait un em-
prunt discret aux lieux communs du gen-
re ; danses et choeurs, cosaques et
vodka, mais son film est surtout russe
en certains personnages, comme celui
d'Héléna, qui paraissent souffrir de vivre
dans un cloaque et- ne font rien pour en
sortir, dans ces alternatives, également
acceptées, de grand luxe et de misère.
L'interprétation, elle aussi, est inégale.
Kate de Nagy a de très grandes quali-
tés, une belle souplesse de jeu, mais la
première place revient à René Lefévre
qui a cqmposé un rôle d'ingénieur infir-
me et malade avec une vérité saisissante.
Fernand Fabre, Jean Murât, Alcover,
Marina Shubért, à la voix agréable, sont
à leur place et peuvent donner l'illusion
de leurs personnages; on regrette de voir
un artiste intelligent comme Larquey
dans un rôle de médecin russe devenu
chauffeur, rôle auquel ne le prédispo-
A
saient guère son jeu et son allure si ty-
piquement populaire et parisienne. Er-
reur de choix de la part du producteur,
mais aussi manque d'étendue dans le
jeu de l'artiste. On pouvait de même
éviter aux personnages de Pauline Car-
ton et Milly Mathis une telle banalité,
et exprimer en finesse ce qui n'est ici
que trivialité.
En dépit de tout cela, répétons-le, le
film a de la valeur. Toute la partie qui
a trait au personnage de René Lefévre
est remarquable par la sobriété du jeu
et la qualité de la photo. II y.a notam-
ment une image — Lefévre vu de dos,
devant l'âtre — qui est magnifique.
L'évocation de la fuite des jours a per-
mis à Strijewsky une intéressante et cu-
rieuse utilisation de cinéma muet...
Quelle force dramatique prennent tout
de suite ces images libérées de la pa-
role ! Enfin il y a de la vigueur et
même de la violence, une audace peut-
être excessive, telle cette scène où Kate
de Nagy jette, à la tête du gérant, tout
a la fois une coupe de Champagne et
le mot de Cambronne !
Une intrigue plus serrée, un peu d'ho-
mogénéité et de mesure pouvaient faire
de Nuits de Princes un beau film. Mais
ce sont là précisémen: les qualités qui
manquent le plus à l'esprit slave.
(Tobis.)
P. L.
Titin de Martigues
de René Pujol
Le goût évolue, en France.
Malheureusement, c'est dans un sens
unique, vers la descente.
Il n'est que de voir le succès fait à
Titin des Martigues dans son actuelle
« exclusivité » pour en être, hélas! per-
suadés.
D'abord le titre. Pourquoi Titin des
Martigues ? Pour expliquer, ou excuser
l'accent du principal personnage. Ce
Titin est un bonimenteur de foire. C'est
ainsi que nous le verrons dans une fête
foraine parisienne, flanqué de ses deux
acolytes joués l'un par Rellys, un comi-
que assez drôle, l'autre par Larquey,
pauvre grand Larquey fourvoyé ici.
Quant à Titin, c'est Alibert, auteur de
quelques « marseillaiseries » et autres
galéjades qui, toutes, ont du succès. Ali-
bert pousse la romance avec agrément
et n'a pas moins de gentillesse qu'un
autre.
Le film compte encore Jim Gérald, en
patron de baraque ; Aimos, mal à son
aise dans un rôle épisodique de combi-
nard perfide ; Paulette Dubost, Suzanne
Dehelly, toutes deux pleines d'alacrité
et de minaudières oeillades ; enfin Mar-
guerite Pierry et Myno Burney qui
silhouettent avec une originale verdeur
deux Américaines toquées, richissimes et
iheandescentes.
Voilà les personnages posés. -»
Le .décor est multiple : plusieurs* ftfl- „_»"*"*
res (Paris, Marseille, Bordeaux), ,1e
« Vel' d'Hiv' » au moment d'un match
de pancrace, la Côte d'Azur, avec ses
obl'gatoires palaces et bars de nuit.
' D'où vient que l'on... que je ne trouve
à ce film aucun sel, nulle trouvaille,
pas le plus petit atome d'intérêt. Autour
de moi, certains spectateurs se tapent sur
les cuisses, ravis de tant de grosse rigo-
lade.
Le sujet est en petits morceaux déta-
chés. On croit y rencontrer un filet de
logique, mais, sous un prétexte de mou-
vement interne, la logique s'éclipse et
il ne reste que de pâteux tableaux ordon-
nés sans art, où pourtant la saine loufo-
querie d'un Rellys, la verve d'une Mar-
guerite Pierry, ou la truculence de
Suzanne Dehelly se donnent libre cours..
L'intrigue — si l'on peut écrire ce mot
ici —commence entre un patron forain
ruiné, sa fille, le commanditaire libidi-
neux et le fiancé secret de la demoiselle.
Le commanditaire (Aimos) voudrait
épouser la fille de son déb'teur (Pau-
lette Dubost), laquelle aime Alibert.
Suzanne Dehelly est le flirt de Rellys.
Le trio de copains jouera, on ne sait
trop comment, dans un orchestre au
Moulin-Rouge, puis partira en tournée
dans le Midi où deux Américaines l'en-
gageront. C'est à ce propos qu'on verra
Larquey garder ou promener, à travers
Marseille, Toulon ou Cannes, une
douzaine de pékinois et une cage de per-
ruches. Ce « gag » fait long feu et
n'amuse guère. Les scènes des Améri-
■aines et de leurs chevaliers servants
irritent notre besoin de réserve et man-
quent au tact le plus élémentaire. Et
quand l'histoire rebondit pour aboutir
au « Vel' d'Hiv' » par une poursuite
lenre « tarte à la crème », on croit le
Slm fini dans l'idiotie. Non, car le traître
e désiste en faveur du jeune premier.
\libert épousera Paulette, Dehelly sou-
•ira à Rellys, et Jim Gérald bénira ces
leux mariages.
On sent que Titin des Martigues
i manqué de moyens. Et je ne parle
jas des moyens spirituels qui, eux, sont
çratuits, et font par trop défaut. ,
(Films Malesherbes)
Lucie DERAIN.
■Et
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