Titre : La France mutilée : bulletin ["puis" organe] de l'Union fédérale des associations françaises de blessés, mutilés, réformés, anciens combattants de la grande guerre et de leurs veuves, orphelins et ascendants
Auteur : Union fédérale des associations françaises de blessés, mutilés, anciens combattants de la Grande guerre, et de leurs veuves, orphelins et ascendants (Paris). Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Orléans)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1922-03-19
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32778016m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 19 mars 1922 19 mars 1922
Description : 1922/03/19 (A3,N75)-1922/03/25. 1922/03/19 (A3,N75)-1922/03/25.
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k56045917
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-25331
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 17/01/2011
-'3'rAMfe.- — H» 75.
PUÔlilCflTÏOfl HHÔOOWflDAinB. — lie Numéro : 20 Centimes
Dimanche 19 Mars 1922.
/Ut-, "^'M^M/i:^^:!;® ■:
La politique: B'M'estinêiée, Ëlïé a tout
toroiMKié,: .;■-,.-■; ■ ,--'-.'.'-. \.\-;.:: /..'
Â-l%eûrê actuelle,, la question:- de l'ain-'
iïifiïtàe est la plus obscure qui soit.:. Soii dai-
nerBênt; le, 22 février, paraissait daoe la
-presse un ordre du joti*- fortement :naotivé,
émpiapt du .groupe des députés mutilés
et protestant-; contré lAintentibn qu'aurait
êoiéi fe. (aôweriiëiïiên.t d'amnistier- les désef-
'teiiîssi à; l'étranger, les iasoiimiis, et même
à la=faveur des eirçonstaTljpes,: les voiêùrs,
les prévaricatetirSj bref, lés tristes sires qui :
ont-monnayé^agùeTi'e, Ce fut le^pavé dans
laimaTe^aùxigreiiouilleSi- Ètàit-il doiic queè-
tion- de pardonner les fautes impardonna-
bles? Il paraît que ou*. Disons immédiate-
ïûent qu'iine telle ainn'istiè aie serait pas
seulement pour l'avenir l'eneoUirageiMeait
au crime antiipatTiotique et antination al
soiis toutes ses formes,'mais pour te passé;
et le présent l'injure la plus cruelle aux
morts et aux survivants. Le contre-coup en
serait peut-être terrible dans la Nation.
• A l'ordre du joui- -dès députés mutilés,
le ^Gouvernement répohdiit en dotoant l'as-
surance que cela ne serait pas.
Vint alors au début dé mars un double
vote : celui* du groupe des députés combat-
tants;, qui se déclarait hostile à tout projet
d'amnistie, et ensuite celui de la Commis-
sion de législation qui, par 11 voix contre 9,
enterra' T amnistie. Nous ignorons quels
motifs ont amené le groupe des combat
tants à prendre cette position. Il est donc
sage que nous ne cédions pas -à la tenta-
tion de nous livrer au jeu des supposi-
tions. " , :
L'autre voté aurait été,, si nous en
croyons les échos de la presse, inspiré par
un ressentiment politique. Certains dé-
putés ne veuient pas de l'amnistie parce
que, disons les choses comme elles sont,
les condamnés Marty et Badina, en bénéfi-
cieraient. Or, on sait qu'ils se réclament de
l'opinion communiste.
Enfin, le projet .gouvernemental aurait
prévu l'amnistie de faits non réprimés,
■ c'est-à-dire de faits qui, de notoriété pu-
blique, méritent une condamnation, mais
qui n'en ont pdint fait encore l'objet. Cette
disposition du projet aurait été destinée
à amnistier les responsables des tragédies
militaires.
Les journaux rapportent'-qu'à la Com-
mission de législation, deux députés, plai-
dant l'amnistie pour Marty et Badina, au-
raient offert en contre-partie de souscrira
à l'intention du Gouvernement d'amnis-
tier; sans qu'ils aient jamais été poursui-
vis, les auteurs dés tragédies du front.
Si tout ce que nous venons d'écrire est
exact, car* nous tenons à. répéter que nos
informations sont. celles de tout, le
monde et rien de plus, les discussions de
l'amnistie revêtiraient, l'aspect d'un mar-
chandage, les uns! accordant l'amnistie à
leurs adversaires afin de l'obtenir pour
leurs amis, îles autres ne l'accordant, à
personne. Est-ce a. dire que le groupe des
combattants et la Commission de législa-
tion ont entendu, par leur refus, obligée
le Ministre de la Guerre-à poursuivre lô
châtiment des hommes de Vingré, Souain,
Flirey et autres lieux ? Nous ne îie croyons
paà. Aucun indice ne nous permet idè le
supposer.
Nous Tsomine's en plein dans le ^ maquis
politique.. .
Quelle est l'attitude du: Gouvernement ?
Nul ne le sait. Le projet "viéndra-t-il en dis-
cussion ? Mystère.; S'il vient en discussion, -
que fera.la Chambré..? : Oh Pignore; .Une
seule choie demeure certaine : Energique:
nient réclamée par certains journaux,
l'amnistié est violemment combattue par
d'autres et la lutte revêt uh caractère unir j
quiement politique.'Si îa loi viénieh disciïs- !
sion, toutes considérations céderont le pas
aux considérations d'ordre politique, je
veux dire aux haines de partis. C'est plus
qu'il n'en faut: pour vicier le débat, pour
nous assurer lé spectacle de séances ora-
geuses dont le prestige de la Chambre,, se-
lon l'expression traditionnelle, ne sortirait
pas grandi. J'en avertis sincèrement tous
nos camarades députés,
En regard de ces discussions passion-
nées, plaçons le point de vue de l'Union
Fédérale et je ne crois pas.m'avancer in-
considérément en disant que ce point de
vue est celui de l'immense majorité des
combattants.
Qu'est-ce que l'amnistie ? L'amnistie est
un geste de générosité ; elle est la loi de,
paMôri ; mais elle n'empêche pas que
ceux qui en sont les bénéficiaires aient été
légalement condamnés et punie. La loi ne
leur pèrmetteaTpas dé prétendre que l'acte
dont ils durent répondre devant lu. jus-
tice était un acte légitime. L'amnistie
efface la trace légale de la faute ; mais
cilié ne supprime pas son caractère moral
de faute.
*" Pourquoi un Gouvernement proposc-
t-il une amnistie ? Il le fait en temps de
paix; soit pour mettre tin, par une mesuri
de clémence, à une époque de troubles et
de discorde ; telle fut ■l'amnistiei qui mit le
point final à l'affaire Dreyfus ; soit à
l'occasion de certaines manifestations de
concordé ou de joie nationales, dans mi
geste de bonté. 11 le fait encore à là suite
d'événements graves pendant le cours des-
quels des mesures particulièrement sévè-
res de discipline ont dû être appliquées,
mesures ayant entraîné la punition rigou-
reuse de fautes qui, en des temps ofdinai-
■res, n'eussent, revêtu aucun caractère
afflictif, infamant ou déshonorant.
Tel est le caractère de la présente am-
nistié.
Un homme a été en temps de guerre con-
damné aux travaux publics, alors qu'en
temps de paix il n'aurait été l'objet que
d'une sanction disciplinaire. La paix est,
venue. La Franco est, sauvée, La Nation
peut pardonner à des gens dont une dé-
faillance d'un moment a fait des lâches
et. des coupables, alors que la veïlQe encore,
et depuis de longs mois, ifls étaient des hé-
ros. Voilà, le sens de l'amnistie.
Qui a le droit moral d'exercer le pardon ?
La nation tout entière certeis, mais au
premier rang ceux qui. ont combattu. Ce
sont les combattants qui Sont .les plus qua-
lifiés pflui demander aux Pouvoirs publics
le pardon, légal dé ceux UnioïnV été si long-
temps leurs frères: de-çomiat.r Hélas ! qu^il
faut peu de chose; paMois pour faire?\^on/
damne* un: hotnjnie ! À'attitude-des- com-
battants est claire; Il -|r à loh^emps dej;à,
qu'au fond d- eux-mênies, ils-sont -prêts à
faire le geste de pài>àon ; il- serait'indigné
d'e-UTxd^y mêler aujouÉd'liui de bas calculs
ou dé basses rancunes _de politique. En
l'occasion, nous nàusvjiïaçom à là fois
aurdessus des: dens {$$ veulent. V-amnistié.
ptiur^une satisfàciiôn"^'parti''et au-dessus
de Ceux qui la refusent pour.-une satisfac-
tion deqiarlii.
Il est probable que certains de nos cama-
rades de. la Chambre'; qui liront cette
phrase en concevront contre nous, ou peut-
être uniquement contre moi qui- l'écris, '
quelque mécontentement. Je le regrette ;
maiis je m'en _ console ; en pensant que
l'idéal des combattants est au-dessus des
querelles de partis et> que, dans 1© choix,
c'est lui qu'il faut servir. ... .
À ceux qui ne veulent-pas amnistier,
nous disons : Pourquoi voulez-vous ou-
blier que ces gens ont: fait la guerre ?
Pourquoi. voulez-vous*oublief que pendant
longtemps ils ont loyalement servi le
pays y
A ceux qui veulent.^amnistier parce que
les condamnés sont leurs amis, nous di-
sons :.:■.. Vous aurez beau faire, vous ne
transformerez pa^-.. la faute en action
d'éclat,
Noua sommes donc ''prêts, comme nous
l'étions il y a quinze inôis, à amnistier.
Reste la question de isay.oir si nous devons
amnistier dés fautes 'dont les auteurs n'ont
été l'objet d'aucune sanction. A cela, je
suis certain que les congressistes de Nancy,
qui ont ouvert leurs assises en saluant les
victimes innocentes des tragédies militai-
res, répondent : non. Entendons-nous.
L'amnistie est un pardon des fautes de
guerre, c'est-à-dire des fautes que l'on es-
time pardonnables. La faute commise par
les chefs responsables des fusillades par
erreur, eniballement, manque de maîtrise
do soi-même, déviation du sens de l'auto-
rité, manquement aux devoirs du chef, for-
faiture, est-elle une faute pardonnable ?
Je réponds : oui. Cherchons à établir une
équivalence des fautes. Six hommes ont été
fusillés à Vingré, mais combien d'hommes
ont payé de leur vie dans la tranchée la
défaillance d'un camarade coupable de pa-
nique, de fuite, d'abandon de poste ou
d'autres fautes ? Si l'homme de troupe est
amnistié, il n'y a pas de raison de ne pas
amnistier le chef. Ajoutons que l'institu-
tion dos cours martiales compta pour quel-
que chose dans ces tristes affaiires.
_.Si donc les chefs, dont tant 30 monde
connaît las noms, étaient, actuellement
sous le coup d'une condamnation et en
cours d.'accomplissement d'une peine, je
suis certain, connaissant l'esprit d'équité
de nos camarades, que pour eux aussi ils
demanderaient l'amnistie. Mais ces gens
n'ont pas été inquiétés, ils n'ont pas été
poursuivis, ils n'ont été l'objet 'd'aucune
sanction. Est-il équitable de les amnis-
tier avant qit'ils aient payé pour leurs
fautes ? Toute la question est là. Si l'on
•répond oui, on consent, en leur faveur, à
une inégalité de traitement qui ne se jus-
tifié pas. '.'■■'■
Un amnistié est uii homme qui porte au
fond de lui-même le dur souvenir d'une
faute commise et d'une neine subie. En
l'espèce d'alilleurs, le Gouvernement s'op-
posera à la réintégration dans leur grade
et d'ans leurs prérogatives des officiers am-
nistiables. Qui ne voit qu'au regard des
fautifs punis, tes coupables impunis conti-
nueront à jouir dé leur grade, de leurs
prérogatives, et môme dé leur autorité et
du prestige atla-clié : à l'Iiabit qu'ils por-
tent ? Ils n'auront pas été atteints dans
letirs personnes ; ils n'auront pas réparé ;
l'opération pour eux sera toute de béné-
fice, car c'est en vain qu'on pourra préten-
dre qu'ils seront frappés, étant connus,
d'une flétrissure morale.
L'amnistie ne peut Sire•'■appliquée équi-
tablemcnt qu'aux gens qui ont été l'objet
d:'un même traitement.
*
* *
Je crois avoir exposé ainsi le point de vue
des anciens combattants. L'amnistie a pour
nut de clore le passé et de permettre la
préparation de l'avenir. Si nous avons de-
mandé que la justice soit la même pour
tous, c'est afin que certaines fautes ne se
renouvellent pas. Il y a toujours un code
pour punir l'homme de troupe ; on n'en
a jias toujours trouvé un pour punir le
chef quand il était d'un grade élevé. Voilà
ce qu'il faut détruire.
Le général Targe,, commandant le
13" corps, avait été chargé d'enquêter sur
l'affaire de Vingré. Qu'est-ill advenu de son
rapport, ? Si le Gouvernement vont olore le
passé par une amiïistie générale, que le
Ministre de la Guerre prenne d'abord les
sanctions réclamées par l'opinion publi-
que ; qu'il donne à la conscience du pays
cette satisfaction ; c'est là le premier
apaisement, ensuite pourra venir le par-
don.
Pour l'apaisement véritable, que les
partis politiques commencent par s'apai-
ser eux-mêmes ; qu'ils abandonnent leurs
attitudes de bataille et qu'Us se souvien-
nent (te ce que fut la. guerre. Que tout
cela, ee fasse vite, sinon l'agitation con-
tinuera, le trouble naîtra, dans les- es-
prits ; la vision nette des faits et. des cir-
constances s'obscurcira, et au milieu des
querelles dm partis politiques, députés,
sénateurs, à qui nous avons donné man-
dat de refaire le pays, embourbés dans le
passé, oublieront qu'il faut préparer
l'avenir. C'est pour l'avenir que nous tra-
vaillons ; c'est pendant .que les faits sont
présents encore devant nos yeux qu'il faut
en tirer la leçon. N'attendons pas, pour
réorganiser la justice aux armées, que le
temps ait fatigué notre volonté, attiédi
notre ardeur, ômoussé nos idées.
Henri PICHOT.
LES 600 PfiANGS ©ES ORPHELINS
L OUBLI
Les années passent rapides, la mort
fauche des survivants du drame, et des
meilleurs, les plus malheureux et les
moinis prêts à être plaints: par la multi-
tude ; leurs blessures ne se voient pas et
ils ne tendent pas assez la mairi. Si
d'aventure leurs dirigeants, au lieu de so
contenter d'enterrer les voeux stériles, lè-
vent la voix, qui écoute-t-on aujourd'hui,
puisque le même! qui fut attaqué la veille
au sein du Congrèls ou de la réunion se
vante justement d'avoir été flatté par der-
rière et appuyé ? Mieux vaudrait à cer-
tains moments, croirions-nous, abandon-
ner la rude tâche plutôt que d'hésiter
entre deux routes, celle de la tutelle des
droits et celle de l'abdication devant la
honte et l'oubli.
I
Lettre du Président de l'U. F.
au Président du Conseil
MONSIEUR IJE.PBÉSIDENÏ DU CONSEIL,
Cette lettre sera brève.
Vous avez bien voulu, le 6 mars, m'ac-
corder audience ainsi qu'à mes collabora-
teurs du Bureau de l'Union Fédérale.
Nous votis avons exposé la nécessité de
doubler les majorations pour enfants, ac-
coràées par la loi du 31 mars 1919 aux
. veuves de la guerre. Vous avez reconnu la
légitimité de notre revendication.
Nous vous avons prié de vouloir bien
considérer que les mutilés, les veuves de
la. guerre, les ascendants, groupés dans
l'Union Fédérale, ont déclaré publique-
ment au Congrès de Nancy, et l'ont ré-
pété le 19 février dans un ordre du jour
voté par nos 351 groupements, qu'Us
ajournaient leurs propres revendications
pour ne maintenir que celle, des orphelins
de la guerre. Nous avons accompli ee
geste par patriotisme, en considération
des difficultés financières de l'heure.
Or, M. le Ministre des Finances, par
lettre du 26 février au Président de la
Commission des finances de la. Chambre,
ne s'est pas déclaré favorable .au vote de
la proposition Picot. Il aurait craint, pa-
raSUt-il, une réperàtssio-n financière de.
TiOO millions ; il aurait prévu qu'au ras où
la proposition, l'irot serait votée, 1e,s mu-
tilés réclameraient l'augmentation des
majorations qu'ils touchent pour charges
de famille.
*. Monsieur le Président du Conseil,
l'Union. Fédérale n'a qu'une parole et les
dirigeants de l'Union Fédérale n'ont
qu'une parole.
J'ai eu, l'honneur de vous dire le
6 mars : » Pour que les orphelins obtien-
nent justice, les mutilés, les veuves cl les
ascendants font taire leurs légitimes de-
mandes. »
Au nom d£ l'Union Fédérale, je vous
prie respectueusement, Monsieur le Pré-
sident- du Conseil, de vouloir bien user
de votre autorité pour replacer, si vrai-
ment cela était nécessaire, la question sur
son véritable terrain et. en pleine clarté.
Je suis convaincu, Monsieur le Prési-
dent du Conseil, que notre appel sera en-
tendu.
Veuillez agréer, je vous prie, l'expres-
sion de mes sentiments très respectueux.
Henri PICHOT.
II
Lettre du Conseil d'Administration
de l'U. F. au Ministre des Finances
MONSIEUR I.E MINISTRE,
Un communiqué à la presse âoe la Com-
mission des finances de la Chambre, nous
a. appris que vous étiez opposé à la propo-
sition de la loi du colonel Picot, tendant à
porter de 300 à «00 francs la. majoration
pour enfants des pensions de veuves de
guerre, mesure qui se traduirait, selon
vous, par un accroissement de charges de
600 millions.
Nous n'ignorons pas, Monsieur le Mi-
nistre, la gravité de la situation finan-
cière actuelle, et, comme citoyens fran-
çais, nous ne pourrions que nous féliciter
de voir inaugurer une politique d'éco-
nomie qui n'a que trop tardé. C'est dans
le môme esprit que les Associations de
mutilés et victimes de la guerre, adhé-
rentes à l'Union Fédérale, ont déclaré
qu'elles réduisaient au chiffre de 600 fr.
et qu'elles limitaient aux seuls enfante de
veuves, leurs demandes en. ce qui louche
les majorations de pension pour enfants.
Aussi le montant de la dépense serait-il
au plus dji 242 millions pour environ
800.000 orphelins de moins de 18 ans et
non pas île C00 millions, ainsi que les
journaux vous l'ont fait dire, par erreur,
car ee chiffre correspondrait à 2 millions
d'orphelins.
Mais on est en face d'une nécessité iné-
luctable. Le fait brutal, c'est qu'on, ne
peut élever un enfant avec 0 fr. 77 par
jour et. beaucoup de vcAtves, les plus char-
gées d'enfants, n'ont d'autres resssourecs
que le montant de leurs pension.;. Or,
vous savez comme iwus, Monsieur le Mi-
nistre, que les majorations pour orphelins
ne constituent pas des prébendes, 7ii
même seulement le témoignage de la re-
connaissance du pays envers ceux qui
sont morts pùur lui. Ce sont essentielle-
ment des dépenses d'ordre productif
qui doivent, contribuer à former d.es
hommes forts et sains et qui, à ce titre,
sont au moins aussi urgentes que les
primes à l'élevage du bétail et les crédits
pour la reconstitution économique du
pays. Elles ont de plus comme les dépenses
pour la rcstaura.tion. des régions dévastées,
un caractère strictement temporaire. La.
justice et l'intérêt de. la. paix sociale,
eomime ceftti de la. prospérité publique
com.nuind.ent. dvnc d-e consacrer en temps
voulu les sommes nécessaires à une
oeuvre vitale.
La. voix unanime des anciens combat-
tants, des mutilés, des veuves cl des vieux
parents, qui. ont su cc/ntenir leurs légi-
times revendications personnelles afin de
concentrer l'effort d.e la Nation sur les
plus déshérités, sur ces enfants qui sont
l'espoir et l'avenir du pays, celte voix ne
peut, pas ne ]>as être entendue par ceux
qui. ont. la. charge et la responsabilité du
Pouvoir. Tous comptent, que, connaissant
la portée et. la- limite de cet. effort, vous
donnerez noire, adhésion à la proposition
d.e notre porte-parole, le colonel Pici.it,
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre,
l'assurance de ma haute e! respectueuse
considération.
Pour le Conseil d'administration
de l'U. K. :
Le Vice-Président,
CASSIS.
* ■
* *
Comment ceux qui ont à charge de nous
défendre, et ne savent comment s'y pren-
dre-devant la multitude légitime de nos
revendications, oseraient-ils vraiment
aborder la lourde besogne lorisqu'entre
nous, nous sommes si divisés et jaloux ?
A l'heure de l'attaque, il n'y a pas si
longtemps que cela, qui montait le pre-
mier sur le parapet, prenait la tête de la
section ou de la compagnie, et sans atten-
dre les ordres du plus titré, ou du plu)3
ambitieux, faisait la victoire... ou accep-
tait la mort ? En ces jours encore notre
cause est faite de la sincérité de ceux qui
lui ont donné leur vie : rien ne sert de
crier au grand jour si l'on trahit dans
l'ombre, ou si l'on dou|te du succès, pire
chose que la trahison. Le malheur est.
précisément, que la généralité des diri-
geants de nos oeuvres ne semble songer
qu'à eux-mêmes jusqu'au jour où une sa-
tisfaction espérée est arrivée. Comme
toujours alors, le désespoir viendra, qui
amènera, la, défaite et la risée de tous.
Nous no pouvoriB pas demander aux
nôtres d'être des « surbommes », mais
peut-être pourrions-nous exiger d'eux,
avant qu'ils ne se mettent en mouvement,
la promesse formelle que leurs intérêts
seront, les seconds à venir dans leurs pré-
occupations, et, non les premiers, et tou-
jonw après ceux qu'ils ont comme plua
élémentaire devoir de défendre. Autrement
le doute s'emparera de la ma,sse qui déjà
trompée sur la. faillite des promesses au
temps des batailles, croira le plus facile-
ment, du monde que mieux vaut s'abstenir
qu'être frustrée à nouveau.
Pour vaincre, il faut que nos oeuvre»
prennent, conscience /de la aiécessité de
leur victoire, de la fo?-ce morale' qu'elles
représentent, encore à l'heure actuelle,
des possibilités de leur-s efforts, et aient
la certitude qu'elles seront écoutées.
Or, ceux à qui nous nous adressons
pour leur faire entendre nos ' doléances,
nous ignorent parce que, ou bien ils ap-
prennent de nos bouches des réclamations
oiseuses, des paroles inutiles, ou ils com-
prennent que point n'était besoin de les
déranger pour leur faire enregistrer des
flatteries dont ils commencent à avoir
plus que l'habitude. La franchise entre
nous ne signifie pourtant pa.s l'abdication,
la. renonciation à. nos droits, la reculade,
ou la haine mauvaise travailleuse.
D'une fa,çon comme d'une autre, nous
serons bientôt méprisés si nous ne savons
pas nous oublier nous-mêmes pour échap-
per à. l'oubli qui frapperait la masse et
ruinerait, notre raison.
Dans nos Associations, connue dans dos
assises pins hautes et, déjà bien lointaines,
se peut-il que les honvmois en qui nous
a.vion.s mis notre confiance n'aient pas été
à. la, hauteur de nos volontés de combat-
tants victorieux ? Pour noue, pour le
pays, pour le monde libre, il est, temps en-
core de chercher la route qui mène au
port au milieu des tempêtes. Et. les pi-
lotes, — qui au-defiius des vagues dange-
reuses de l'oubli, conduisent la barque, -r
sans songer aux embruns qui les couvrent,,
au paquet de mer qui risque à, les sub-
merger, cl, tiennent ferme la. barre, vers
laquelle dans les hurlements de la tem-
pête s'envolent les prières des petits et se
joignent, les bras des mères, confiants en-
core dans le, malheur, savent trouver là-
bacs au retour, dans le repos, la récom-
pen.'-.i'. promise seule aux. gens de bien, la
calme tranquillité du devoir accompli.
Louis KoyïENMi.u;,
(l.'F.elio du Nord et tilt l'as lie Calait )
PUÔlilCflTÏOfl HHÔOOWflDAinB. — lie Numéro : 20 Centimes
Dimanche 19 Mars 1922.
/Ut-, "^'M^M/i:^^:!;® ■:
La politique: B'M'estinêiée, Ëlïé a tout
toroiMKié,: .;■-,.-■; ■ ,--'-.'.'-. \.\-;.:: /..'
Â-l%eûrê actuelle,, la question:- de l'ain-'
iïifiïtàe est la plus obscure qui soit.:. Soii dai-
nerBênt; le, 22 février, paraissait daoe la
-presse un ordre du joti*- fortement :naotivé,
émpiapt du .groupe des députés mutilés
et protestant-; contré lAintentibn qu'aurait
êoiéi fe. (aôweriiëiïiên.t d'amnistier- les désef-
'teiiîssi à; l'étranger, les iasoiimiis, et même
à la=faveur des eirçonstaTljpes,: les voiêùrs,
les prévaricatetirSj bref, lés tristes sires qui :
ont-monnayé^agùeTi'e, Ce fut le^pavé dans
laimaTe^aùxigreiiouilleSi- Ètàit-il doiic queè-
tion- de pardonner les fautes impardonna-
bles? Il paraît que ou*. Disons immédiate-
ïûent qu'iine telle ainn'istiè aie serait pas
seulement pour l'avenir l'eneoUirageiMeait
au crime antiipatTiotique et antination al
soiis toutes ses formes,'mais pour te passé;
et le présent l'injure la plus cruelle aux
morts et aux survivants. Le contre-coup en
serait peut-être terrible dans la Nation.
• A l'ordre du joui- -dès députés mutilés,
le ^Gouvernement répohdiit en dotoant l'as-
surance que cela ne serait pas.
Vint alors au début dé mars un double
vote : celui* du groupe des députés combat-
tants;, qui se déclarait hostile à tout projet
d'amnistie, et ensuite celui de la Commis-
sion de législation qui, par 11 voix contre 9,
enterra' T amnistie. Nous ignorons quels
motifs ont amené le groupe des combat
tants à prendre cette position. Il est donc
sage que nous ne cédions pas -à la tenta-
tion de nous livrer au jeu des supposi-
tions. " , :
L'autre voté aurait été,, si nous en
croyons les échos de la presse, inspiré par
un ressentiment politique. Certains dé-
putés ne veuient pas de l'amnistie parce
que, disons les choses comme elles sont,
les condamnés Marty et Badina, en bénéfi-
cieraient. Or, on sait qu'ils se réclament de
l'opinion communiste.
Enfin, le projet .gouvernemental aurait
prévu l'amnistie de faits non réprimés,
■ c'est-à-dire de faits qui, de notoriété pu-
blique, méritent une condamnation, mais
qui n'en ont pdint fait encore l'objet. Cette
disposition du projet aurait été destinée
à amnistier les responsables des tragédies
militaires.
Les journaux rapportent'-qu'à la Com-
mission de législation, deux députés, plai-
dant l'amnistie pour Marty et Badina, au-
raient offert en contre-partie de souscrira
à l'intention du Gouvernement d'amnis-
tier; sans qu'ils aient jamais été poursui-
vis, les auteurs dés tragédies du front.
Si tout ce que nous venons d'écrire est
exact, car* nous tenons à. répéter que nos
informations sont. celles de tout, le
monde et rien de plus, les discussions de
l'amnistie revêtiraient, l'aspect d'un mar-
chandage, les uns! accordant l'amnistie à
leurs adversaires afin de l'obtenir pour
leurs amis, îles autres ne l'accordant, à
personne. Est-ce a. dire que le groupe des
combattants et la Commission de législa-
tion ont entendu, par leur refus, obligée
le Ministre de la Guerre-à poursuivre lô
châtiment des hommes de Vingré, Souain,
Flirey et autres lieux ? Nous ne îie croyons
paà. Aucun indice ne nous permet idè le
supposer.
Nous Tsomine's en plein dans le ^ maquis
politique.. .
Quelle est l'attitude du: Gouvernement ?
Nul ne le sait. Le projet "viéndra-t-il en dis-
cussion ? Mystère.; S'il vient en discussion, -
que fera.la Chambré..? : Oh Pignore; .Une
seule choie demeure certaine : Energique:
nient réclamée par certains journaux,
l'amnistié est violemment combattue par
d'autres et la lutte revêt uh caractère unir j
quiement politique.'Si îa loi viénieh disciïs- !
sion, toutes considérations céderont le pas
aux considérations d'ordre politique, je
veux dire aux haines de partis. C'est plus
qu'il n'en faut: pour vicier le débat, pour
nous assurer lé spectacle de séances ora-
geuses dont le prestige de la Chambre,, se-
lon l'expression traditionnelle, ne sortirait
pas grandi. J'en avertis sincèrement tous
nos camarades députés,
En regard de ces discussions passion-
nées, plaçons le point de vue de l'Union
Fédérale et je ne crois pas.m'avancer in-
considérément en disant que ce point de
vue est celui de l'immense majorité des
combattants.
Qu'est-ce que l'amnistie ? L'amnistie est
un geste de générosité ; elle est la loi de,
paMôri ; mais elle n'empêche pas que
ceux qui en sont les bénéficiaires aient été
légalement condamnés et punie. La loi ne
leur pèrmetteaTpas dé prétendre que l'acte
dont ils durent répondre devant lu. jus-
tice était un acte légitime. L'amnistie
efface la trace légale de la faute ; mais
cilié ne supprime pas son caractère moral
de faute.
*" Pourquoi un Gouvernement proposc-
t-il une amnistie ? Il le fait en temps de
paix; soit pour mettre tin, par une mesuri
de clémence, à une époque de troubles et
de discorde ; telle fut ■l'amnistiei qui mit le
point final à l'affaire Dreyfus ; soit à
l'occasion de certaines manifestations de
concordé ou de joie nationales, dans mi
geste de bonté. 11 le fait encore à là suite
d'événements graves pendant le cours des-
quels des mesures particulièrement sévè-
res de discipline ont dû être appliquées,
mesures ayant entraîné la punition rigou-
reuse de fautes qui, en des temps ofdinai-
■res, n'eussent, revêtu aucun caractère
afflictif, infamant ou déshonorant.
Tel est le caractère de la présente am-
nistié.
Un homme a été en temps de guerre con-
damné aux travaux publics, alors qu'en
temps de paix il n'aurait été l'objet que
d'une sanction disciplinaire. La paix est,
venue. La Franco est, sauvée, La Nation
peut pardonner à des gens dont une dé-
faillance d'un moment a fait des lâches
et. des coupables, alors que la veïlQe encore,
et depuis de longs mois, ifls étaient des hé-
ros. Voilà, le sens de l'amnistie.
Qui a le droit moral d'exercer le pardon ?
La nation tout entière certeis, mais au
premier rang ceux qui. ont combattu. Ce
sont les combattants qui Sont .les plus qua-
lifiés pflui demander aux Pouvoirs publics
le pardon, légal dé ceux UnioïnV été si long-
temps leurs frères: de-çomiat.r Hélas ! qu^il
faut peu de chose; paMois pour faire?\^on/
damne* un: hotnjnie ! À'attitude-des- com-
battants est claire; Il -|r à loh^emps dej;à,
qu'au fond d- eux-mênies, ils-sont -prêts à
faire le geste de pài>àon ; il- serait'indigné
d'e-UTxd^y mêler aujouÉd'liui de bas calculs
ou dé basses rancunes _de politique. En
l'occasion, nous nàusvjiïaçom à là fois
aurdessus des: dens {$$ veulent. V-amnistié.
ptiur^une satisfàciiôn"^'parti''et au-dessus
de Ceux qui la refusent pour.-une satisfac-
tion deqiarlii.
Il est probable que certains de nos cama-
rades de. la Chambre'; qui liront cette
phrase en concevront contre nous, ou peut-
être uniquement contre moi qui- l'écris, '
quelque mécontentement. Je le regrette ;
maiis je m'en _ console ; en pensant que
l'idéal des combattants est au-dessus des
querelles de partis et> que, dans 1© choix,
c'est lui qu'il faut servir. ... .
À ceux qui ne veulent-pas amnistier,
nous disons : Pourquoi voulez-vous ou-
blier que ces gens ont: fait la guerre ?
Pourquoi. voulez-vous*oublief que pendant
longtemps ils ont loyalement servi le
pays y
A ceux qui veulent.^amnistier parce que
les condamnés sont leurs amis, nous di-
sons :.:■.. Vous aurez beau faire, vous ne
transformerez pa^-.. la faute en action
d'éclat,
Noua sommes donc ''prêts, comme nous
l'étions il y a quinze inôis, à amnistier.
Reste la question de isay.oir si nous devons
amnistier dés fautes 'dont les auteurs n'ont
été l'objet d'aucune sanction. A cela, je
suis certain que les congressistes de Nancy,
qui ont ouvert leurs assises en saluant les
victimes innocentes des tragédies militai-
res, répondent : non. Entendons-nous.
L'amnistie est un pardon des fautes de
guerre, c'est-à-dire des fautes que l'on es-
time pardonnables. La faute commise par
les chefs responsables des fusillades par
erreur, eniballement, manque de maîtrise
do soi-même, déviation du sens de l'auto-
rité, manquement aux devoirs du chef, for-
faiture, est-elle une faute pardonnable ?
Je réponds : oui. Cherchons à établir une
équivalence des fautes. Six hommes ont été
fusillés à Vingré, mais combien d'hommes
ont payé de leur vie dans la tranchée la
défaillance d'un camarade coupable de pa-
nique, de fuite, d'abandon de poste ou
d'autres fautes ? Si l'homme de troupe est
amnistié, il n'y a pas de raison de ne pas
amnistier le chef. Ajoutons que l'institu-
tion dos cours martiales compta pour quel-
que chose dans ces tristes affaiires.
_.Si donc les chefs, dont tant 30 monde
connaît las noms, étaient, actuellement
sous le coup d'une condamnation et en
cours d.'accomplissement d'une peine, je
suis certain, connaissant l'esprit d'équité
de nos camarades, que pour eux aussi ils
demanderaient l'amnistie. Mais ces gens
n'ont pas été inquiétés, ils n'ont pas été
poursuivis, ils n'ont été l'objet 'd'aucune
sanction. Est-il équitable de les amnis-
tier avant qit'ils aient payé pour leurs
fautes ? Toute la question est là. Si l'on
•répond oui, on consent, en leur faveur, à
une inégalité de traitement qui ne se jus-
tifié pas. '.'■■'■
Un amnistié est uii homme qui porte au
fond de lui-même le dur souvenir d'une
faute commise et d'une neine subie. En
l'espèce d'alilleurs, le Gouvernement s'op-
posera à la réintégration dans leur grade
et d'ans leurs prérogatives des officiers am-
nistiables. Qui ne voit qu'au regard des
fautifs punis, tes coupables impunis conti-
nueront à jouir dé leur grade, de leurs
prérogatives, et môme dé leur autorité et
du prestige atla-clié : à l'Iiabit qu'ils por-
tent ? Ils n'auront pas été atteints dans
letirs personnes ; ils n'auront pas réparé ;
l'opération pour eux sera toute de béné-
fice, car c'est en vain qu'on pourra préten-
dre qu'ils seront frappés, étant connus,
d'une flétrissure morale.
L'amnistie ne peut Sire•'■appliquée équi-
tablemcnt qu'aux gens qui ont été l'objet
d:'un même traitement.
*
* *
Je crois avoir exposé ainsi le point de vue
des anciens combattants. L'amnistie a pour
nut de clore le passé et de permettre la
préparation de l'avenir. Si nous avons de-
mandé que la justice soit la même pour
tous, c'est afin que certaines fautes ne se
renouvellent pas. Il y a toujours un code
pour punir l'homme de troupe ; on n'en
a jias toujours trouvé un pour punir le
chef quand il était d'un grade élevé. Voilà
ce qu'il faut détruire.
Le général Targe,, commandant le
13" corps, avait été chargé d'enquêter sur
l'affaire de Vingré. Qu'est-ill advenu de son
rapport, ? Si le Gouvernement vont olore le
passé par une amiïistie générale, que le
Ministre de la Guerre prenne d'abord les
sanctions réclamées par l'opinion publi-
que ; qu'il donne à la conscience du pays
cette satisfaction ; c'est là le premier
apaisement, ensuite pourra venir le par-
don.
Pour l'apaisement véritable, que les
partis politiques commencent par s'apai-
ser eux-mêmes ; qu'ils abandonnent leurs
attitudes de bataille et qu'Us se souvien-
nent (te ce que fut la. guerre. Que tout
cela, ee fasse vite, sinon l'agitation con-
tinuera, le trouble naîtra, dans les- es-
prits ; la vision nette des faits et. des cir-
constances s'obscurcira, et au milieu des
querelles dm partis politiques, députés,
sénateurs, à qui nous avons donné man-
dat de refaire le pays, embourbés dans le
passé, oublieront qu'il faut préparer
l'avenir. C'est pour l'avenir que nous tra-
vaillons ; c'est pendant .que les faits sont
présents encore devant nos yeux qu'il faut
en tirer la leçon. N'attendons pas, pour
réorganiser la justice aux armées, que le
temps ait fatigué notre volonté, attiédi
notre ardeur, ômoussé nos idées.
Henri PICHOT.
LES 600 PfiANGS ©ES ORPHELINS
L OUBLI
Les années passent rapides, la mort
fauche des survivants du drame, et des
meilleurs, les plus malheureux et les
moinis prêts à être plaints: par la multi-
tude ; leurs blessures ne se voient pas et
ils ne tendent pas assez la mairi. Si
d'aventure leurs dirigeants, au lieu de so
contenter d'enterrer les voeux stériles, lè-
vent la voix, qui écoute-t-on aujourd'hui,
puisque le même! qui fut attaqué la veille
au sein du Congrèls ou de la réunion se
vante justement d'avoir été flatté par der-
rière et appuyé ? Mieux vaudrait à cer-
tains moments, croirions-nous, abandon-
ner la rude tâche plutôt que d'hésiter
entre deux routes, celle de la tutelle des
droits et celle de l'abdication devant la
honte et l'oubli.
I
Lettre du Président de l'U. F.
au Président du Conseil
MONSIEUR IJE.PBÉSIDENÏ DU CONSEIL,
Cette lettre sera brève.
Vous avez bien voulu, le 6 mars, m'ac-
corder audience ainsi qu'à mes collabora-
teurs du Bureau de l'Union Fédérale.
Nous votis avons exposé la nécessité de
doubler les majorations pour enfants, ac-
coràées par la loi du 31 mars 1919 aux
. veuves de la guerre. Vous avez reconnu la
légitimité de notre revendication.
Nous vous avons prié de vouloir bien
considérer que les mutilés, les veuves de
la. guerre, les ascendants, groupés dans
l'Union Fédérale, ont déclaré publique-
ment au Congrès de Nancy, et l'ont ré-
pété le 19 février dans un ordre du jour
voté par nos 351 groupements, qu'Us
ajournaient leurs propres revendications
pour ne maintenir que celle, des orphelins
de la guerre. Nous avons accompli ee
geste par patriotisme, en considération
des difficultés financières de l'heure.
Or, M. le Ministre des Finances, par
lettre du 26 février au Président de la
Commission des finances de la. Chambre,
ne s'est pas déclaré favorable .au vote de
la proposition Picot. Il aurait craint, pa-
raSUt-il, une réperàtssio-n financière de.
TiOO millions ; il aurait prévu qu'au ras où
la proposition, l'irot serait votée, 1e,s mu-
tilés réclameraient l'augmentation des
majorations qu'ils touchent pour charges
de famille.
*. Monsieur le Président du Conseil,
l'Union. Fédérale n'a qu'une parole et les
dirigeants de l'Union Fédérale n'ont
qu'une parole.
J'ai eu, l'honneur de vous dire le
6 mars : » Pour que les orphelins obtien-
nent justice, les mutilés, les veuves cl les
ascendants font taire leurs légitimes de-
mandes. »
Au nom d£ l'Union Fédérale, je vous
prie respectueusement, Monsieur le Pré-
sident- du Conseil, de vouloir bien user
de votre autorité pour replacer, si vrai-
ment cela était nécessaire, la question sur
son véritable terrain et. en pleine clarté.
Je suis convaincu, Monsieur le Prési-
dent du Conseil, que notre appel sera en-
tendu.
Veuillez agréer, je vous prie, l'expres-
sion de mes sentiments très respectueux.
Henri PICHOT.
II
Lettre du Conseil d'Administration
de l'U. F. au Ministre des Finances
MONSIEUR I.E MINISTRE,
Un communiqué à la presse âoe la Com-
mission des finances de la Chambre, nous
a. appris que vous étiez opposé à la propo-
sition de la loi du colonel Picot, tendant à
porter de 300 à «00 francs la. majoration
pour enfants des pensions de veuves de
guerre, mesure qui se traduirait, selon
vous, par un accroissement de charges de
600 millions.
Nous n'ignorons pas, Monsieur le Mi-
nistre, la gravité de la situation finan-
cière actuelle, et, comme citoyens fran-
çais, nous ne pourrions que nous féliciter
de voir inaugurer une politique d'éco-
nomie qui n'a que trop tardé. C'est dans
le môme esprit que les Associations de
mutilés et victimes de la guerre, adhé-
rentes à l'Union Fédérale, ont déclaré
qu'elles réduisaient au chiffre de 600 fr.
et qu'elles limitaient aux seuls enfante de
veuves, leurs demandes en. ce qui louche
les majorations de pension pour enfants.
Aussi le montant de la dépense serait-il
au plus dji 242 millions pour environ
800.000 orphelins de moins de 18 ans et
non pas île C00 millions, ainsi que les
journaux vous l'ont fait dire, par erreur,
car ee chiffre correspondrait à 2 millions
d'orphelins.
Mais on est en face d'une nécessité iné-
luctable. Le fait brutal, c'est qu'on, ne
peut élever un enfant avec 0 fr. 77 par
jour et. beaucoup de vcAtves, les plus char-
gées d'enfants, n'ont d'autres resssourecs
que le montant de leurs pension.;. Or,
vous savez comme iwus, Monsieur le Mi-
nistre, que les majorations pour orphelins
ne constituent pas des prébendes, 7ii
même seulement le témoignage de la re-
connaissance du pays envers ceux qui
sont morts pùur lui. Ce sont essentielle-
ment des dépenses d'ordre productif
qui doivent, contribuer à former d.es
hommes forts et sains et qui, à ce titre,
sont au moins aussi urgentes que les
primes à l'élevage du bétail et les crédits
pour la reconstitution économique du
pays. Elles ont de plus comme les dépenses
pour la rcstaura.tion. des régions dévastées,
un caractère strictement temporaire. La.
justice et l'intérêt de. la. paix sociale,
eomime ceftti de la. prospérité publique
com.nuind.ent. dvnc d-e consacrer en temps
voulu les sommes nécessaires à une
oeuvre vitale.
La. voix unanime des anciens combat-
tants, des mutilés, des veuves cl des vieux
parents, qui. ont su cc/ntenir leurs légi-
times revendications personnelles afin de
concentrer l'effort d.e la Nation sur les
plus déshérités, sur ces enfants qui sont
l'espoir et l'avenir du pays, celte voix ne
peut, pas ne ]>as être entendue par ceux
qui. ont. la. charge et la responsabilité du
Pouvoir. Tous comptent, que, connaissant
la portée et. la- limite de cet. effort, vous
donnerez noire, adhésion à la proposition
d.e notre porte-parole, le colonel Pici.it,
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre,
l'assurance de ma haute e! respectueuse
considération.
Pour le Conseil d'administration
de l'U. K. :
Le Vice-Président,
CASSIS.
* ■
* *
Comment ceux qui ont à charge de nous
défendre, et ne savent comment s'y pren-
dre-devant la multitude légitime de nos
revendications, oseraient-ils vraiment
aborder la lourde besogne lorisqu'entre
nous, nous sommes si divisés et jaloux ?
A l'heure de l'attaque, il n'y a pas si
longtemps que cela, qui montait le pre-
mier sur le parapet, prenait la tête de la
section ou de la compagnie, et sans atten-
dre les ordres du plus titré, ou du plu)3
ambitieux, faisait la victoire... ou accep-
tait la mort ? En ces jours encore notre
cause est faite de la sincérité de ceux qui
lui ont donné leur vie : rien ne sert de
crier au grand jour si l'on trahit dans
l'ombre, ou si l'on dou|te du succès, pire
chose que la trahison. Le malheur est.
précisément, que la généralité des diri-
geants de nos oeuvres ne semble songer
qu'à eux-mêmes jusqu'au jour où une sa-
tisfaction espérée est arrivée. Comme
toujours alors, le désespoir viendra, qui
amènera, la, défaite et la risée de tous.
Nous no pouvoriB pas demander aux
nôtres d'être des « surbommes », mais
peut-être pourrions-nous exiger d'eux,
avant qu'ils ne se mettent en mouvement,
la promesse formelle que leurs intérêts
seront, les seconds à venir dans leurs pré-
occupations, et, non les premiers, et tou-
jonw après ceux qu'ils ont comme plua
élémentaire devoir de défendre. Autrement
le doute s'emparera de la ma,sse qui déjà
trompée sur la. faillite des promesses au
temps des batailles, croira le plus facile-
ment, du monde que mieux vaut s'abstenir
qu'être frustrée à nouveau.
Pour vaincre, il faut que nos oeuvre»
prennent, conscience /de la aiécessité de
leur victoire, de la fo?-ce morale' qu'elles
représentent, encore à l'heure actuelle,
des possibilités de leur-s efforts, et aient
la certitude qu'elles seront écoutées.
Or, ceux à qui nous nous adressons
pour leur faire entendre nos ' doléances,
nous ignorent parce que, ou bien ils ap-
prennent de nos bouches des réclamations
oiseuses, des paroles inutiles, ou ils com-
prennent que point n'était besoin de les
déranger pour leur faire enregistrer des
flatteries dont ils commencent à avoir
plus que l'habitude. La franchise entre
nous ne signifie pourtant pa.s l'abdication,
la. renonciation à. nos droits, la reculade,
ou la haine mauvaise travailleuse.
D'une fa,çon comme d'une autre, nous
serons bientôt méprisés si nous ne savons
pas nous oublier nous-mêmes pour échap-
per à. l'oubli qui frapperait la masse et
ruinerait, notre raison.
Dans nos Associations, connue dans dos
assises pins hautes et, déjà bien lointaines,
se peut-il que les honvmois en qui nous
a.vion.s mis notre confiance n'aient pas été
à. la, hauteur de nos volontés de combat-
tants victorieux ? Pour noue, pour le
pays, pour le monde libre, il est, temps en-
core de chercher la route qui mène au
port au milieu des tempêtes. Et. les pi-
lotes, — qui au-defiius des vagues dange-
reuses de l'oubli, conduisent la barque, -r
sans songer aux embruns qui les couvrent,,
au paquet de mer qui risque à, les sub-
merger, cl, tiennent ferme la. barre, vers
laquelle dans les hurlements de la tem-
pête s'envolent les prières des petits et se
joignent, les bras des mères, confiants en-
core dans le, malheur, savent trouver là-
bacs au retour, dans le repos, la récom-
pen.'-.i'. promise seule aux. gens de bien, la
calme tranquillité du devoir accompli.
Louis KoyïENMi.u;,
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