GAZETTE DES LETTRES
D.ESrçSOENCES & DES ARTS
y~- " l \ ***** ^A - ÎO MAI 1877.
tioria de la Littérature provinciale, Eug. ROULLEAUX. — II. Landethette, poésie,
A. DUBARRY. — III. Le\foajifcda ^tfu$lyL. D. — IV. Le Salon de 1877 : 1, A. DESCUBES. — V. Echos de
laProUnce, J. DABFEUiMte^~* ¥1 Ajles' Petits côtés de l'histone, X... — Vil. Variétés , Religions et
mythologies comparées, HenryTToussAYE —VIII. La Naissance de Vénus, V. D'AURIAC. — IX. Les
Logiates, A. M. — X. Petite Gazette. <— Livres et Revues.
DES FONCTIONS
DE LA
LITTÉRATURE PROVINCIALE 01
(3ëQ?f2w philosophe du siècle dernier, Vau-
gh IcSJn venargues, je crois, a dit que les Let-
tfj£^3$ très étaient un reflet des moeurs. Le
contraire me parait plus exact. Je n'entends
pas par Lettres cette littérature qui est» en
effet, un remous de l'opinion, qui s'inspire dans
la rue, fredonne dans la mansarde, fronde dans
les salons et hurle à l'atelier ; mais cette ex-
pression noble et méditative du génie humain
qui marque les étapes de l'histoire et gradue
les efforts de l'humanité» Un météore n'est pas
la lumière ; sa clarté subite ne fait qu'appro-
fondir les ténèbres. Telle est la Presse, qui
éblouit souvent sans éclairer.
La Littérature, au contraire, prend les sen-
timents et les faits à leur origine, qui les rap-
proche de Dieu, les suit dans leurs développe-
ments et dans leurs conséquences, qui forment
les phénomènes sociaux, et elle tire de leur
exposition et de leurs rapports le caractère des
époques passées et la moralité des époques
futures. Elle serait plutôt, à proprement par-
ler, une protestation contre les moeurs, qu'elle
(1) Cet article »st eitrftttdes Mémoires delà SocUtA litté-
râtre de l'Ain, Nous IMMOM, bien entendu, à l'auteur l'entière
reiponiàbllite de iei opinion», N. D. h. D,
prétend reformer ou améliorer, qu'un reflet de
ces moeurs, au-dessus desquelles elle plane
par la pureté de ses conceptions et la dignité
de son langage.
Si les Lettres n'étaient qu'un reflet des
moeurs, elles seraient convaincues d'impuis-
sance. Cela équivaudrait à dire que le génie
humain est frappé de stérilité, que les civilisa-
tions s'engendrent à fleur de sol, au hasard des
climats et des races. Que signifie alors cette
unité de législation vers laquelle tend l'huma-
nité, sous la pression de cette force mystérieuse
qui est le témoignage de l'unité de notre ori-
gine? N'est-ce pas la vraie formule du pro-
grès que l'assouplissement successif des peu-
ples et des sociétés à la discipline de l'intelli-
gence, dont la littérature est l'organe, et Dieu
la source?
Oui, la fonction des Lettres est de diriger
les moeurs, et non deJes lefléter. La peinture
n'est pas un reflet, et les Lettres né sont pas
seulement une peinture, puisqu'elles ajoutent à
l'e\posé des faits l'indication des lois.
II n'est pas difficile de se rendre compte de
l'influence des Lettres sur les moeurs; nous
n'avons qu'à regarder autour de nous. Pensez-
vous que Voltaire, Rousseau, leurs satellites
Diderot» Condorcet, d'Alembert, et tous ceuv
qui prétendent reconstruire le temple de Salotnun
avec les dêb» is de la Tour de Babel, aient été ou
soient simplement des végétations de leur épo-
que, des échos d'une période sociale? Ces
cryptogames ont poussé par tous les temps et
sur toutes les civilisations. Chaque siècle a eu
ses schismes, ses hérésies, ses cris de révolte,
ses clameurs perdues dans les déserts de la
