MAI, MAL MAL
409
mauvaise vie Quelque malheureuse Dont le no-
ble talent est celui de coureuse, HAUTEROCHE, Espr.
follet, i, 4. Moi, j'ai peint tout cela d'une couleur
affreuse, Et la femme, entre nous, comme une mal-
heureuse, ÇOLLIN D'HARLEV. Vieux cêlib. i, 6. || Pro-
verbes. Lesmalheureuxn'unt point de parents, c'est--
a-dire toutle monde les abandonne. || Le gibet n'est
fait que pour les malheureux, c'est-à-dire les riches
s'en sauvent par l'argent.
— SYN. MALHEUREUX, MISÉRABLE. Étymologique-
ment, le malheureux est celui qui a mauvaise
chance ; le misérable est celui qui est digne de pi-
tié: Toutes les fois que l'idée de chance, de sort,
se présente, c'est malheureux qu'il faut employer ;
on est malheureux au jeu, et non misérable. Toutes
les fois que l'idée de pitié, de misère, prévaut, c'est
Ûe misérable qu'il faut se servir ; le jeu ruine et
rend misérable ; si on disait malheureux, on expri-
merait une nuance différente. Quand malheureux et
misérable sont termes de colère, ils sont équivalents.
— HIST. xm" s. Et Ysengrin [le loup] tôt coi se
gist Grant pièce après, et puis si dist : Haï! maleû-
reus chaitis! Ben. 7665. ||xve s. Dame, dist le che-
valier, toute personne doit doubter [craindre] sa
perte; car la pierre chetvoulentiers sur le plus mal-
heureux, Perceforest, t. m, f° 34. || xvies. Camillus,
. ayant ouy ces paroles, trouva l'acte bien malheu-
reux et meschant, AMYOT, Cam. 18. Qui ont perdu
d'un malheureux plomb ce frère, MONT, I, 22. Que
la malheureuse avene Ne foisonne sur la plaine, Ny
toute autre herbe qui nuit, DU BELLAY, VU, 6, recto.
Qui avec malheureux couché, il a froid quoy qu'il
luy touche, GÊNIN, Récréât, t. n, p. 248. Plus mal-
heureux que le bois dont on fait le gibet, COTGRAVE.
— ÉTYM. Mal, et heureux; bourguign. maulhu-
rous; Berry, malhureux; wallon, mdl'hureûs; pi-
card, malhureux; provenç. malauros, malahuros.
L'ancienne langue employait beaucoup une autre
forme, malheuré.
MALHONNÊTE (ma-lo-nê-f), adj. || 1° Qui man-
que à l'honneur, à la probité. Un homme de bien
ne saurait empêcher par toute sa modestie, qu'on
ne dise de lui ce qu'un malhonnête homme fait dire
de soi, LA BRUY. V. Il est difficile qu'un malhon-
nête homme ait assez d'esprit : un génie qui est
droit et perçant conduit enfin à la règle, à la pro-
bité, à la vertu, ID. XI. Toutes les fois que l'on dé-
fend une chose naturellement permise ou nécessaire,
on ne fait que rendre malhonnêtes gens ceux qui la
font, MONTESQ. Esp. xxi, 20. || Une malhonnête
femme, une femme qui manque aux lois de la pu-
deur. Apprenez, lui dit la belle.dame chez laquelle
il soupait, que celles qu'on appelle quelquefois de
malhonnêtes femmes ont presque toujours le mérite
d'un très-honnête homme, VOLT. Babouc. || En cet
emploi, malhonnête précède toujours son substantif,
qui est un nom de personne. || Il se dit aussi des
choses. Une action malhonnête. Fervaques avait été
conseiller au parlement deMetz, après avoir éprouvé
à un siège qu'il n'était pas propre à la guerre, sans
avoir pourtant rien fait de malhonnête, ST-SIM. 65,
173. Pourquoi me soupçonner d'un dessein malhon-
nête, quand je fais une action honnête ? VOLT. Ecoss.
n, 6. || 2° Qui manque àla civilité. Un homme mal-
honnête. Oui, c'est vous, malhonnête que vous
êtes, MARIVAUX, l'Épreuve, 4 8. ||En cet emploi, il
suit, toujours son substantif, qui est un nom de
personne. 1| 11 se dit aussi des choses. Un procédé
malhonnête. || 3° Malhonnête homme se disait au
xvi;e siècle pour homme peu distingué, par oppo-
sition à honnête homme. Lesfemmes dont on ne parle
point, c'est qu'elles font leurs affaires plus secrète-
ment, et avec quelque malhonnête homme sans con-
séquence, BUSSY, Hist. amour, des Gaules, t. n, p. 52.
— REM. Vous êtes un malhonnête, passez votre
chemin; taisez-vous, malhonnête; cela se dit popu-
' lairement; mais cela ne se dit pas autrement.
— SYN. MALHONNÊTE, DÉSHONNÊTE. Ces deux mots
ne diffèrent que par le préfixe. Malhonnête désigne
les manquements contre la bonne foi, la probité, et
aussi contre la civilité; déshonnête, les manque-
ments contre la pureté, la pudeur.
— ÉTYM. Mal, et honnête.
MALHONNÊTEMENT (ma-lo-nê-te-man), adv.
D'une manière contraire à la probité. En user mal-
honnêtement. || D'une manière incivile. Il répondit
malhonnêtement.
— ÉTYM. Malhonnête, et le suffixe ment.
MALHONNÊTETÉ (ma-lo-nê-te-té), s. (.111° Man-
que d'honnêteté, de civilité, de bienséance. Un
homme qui avait la malhonnêteté d'être jaloux de
sa femme, HAMILT. Gramm. s. || Parole ou action
incivile. Faire des malhonnêtetés à quelqu'un.
|| 2° Manque de probité. || Acte où manque la probité.
— ÉTY'M. Mal pour ?naje au féminin, et honnêteté.
MALICE (ma-li-s'), s. f. || 1° Inclination à mal-
faire. 11 te restait encor, pour comble de malice, A
te lier d'amour avecque Massinisse, MAIRET, Sophon.
I, 4. La justice du simple rendra sa voie heureuse,
le méchant périra par sa malice, SACI, 2?ib2e, Prov.
de Salom. xi, 5. Ne nous traitez pas selon notre ma-
lice, mais selon vos miséricordes, ID. ib. Machab. i,
xm, 46. Nous faire plaindre l'aveuglement de ceux
qui apportent la seule autorité pour preuve dans les
matières physiques au lieu du raisonnement et des
expériences, et nous donner de l'horreur pour la ma-
lice des autres, qui emploient le raisonnement seul
dans la théologie, au lieu de l'autorité de l'Ecriture
et des Pères, PASC. Fragm. d'un traité dévide. On
verra, par cette réponse, et notre innocence et la ma-
lice de ceux qui nous ont imputé des impiétés dont
ils sont les uniques inventeurs, ID. Prov. xvn. Nous
voyons que les premiers hommes, lorsque le monde
pbis innocent était encore dans son enfance, rem-
plissaient des neuf cents ans par leur vie, et que,
lorsque la malice s'est accrue, la vie en même temps
s'est diminuée, BOSS. Yolande de Monterby. Lors-
qu'une âme si pure se croyait tellement plongée
dans la malice, ID. États d'orais. ix, 3. Une pleine
résistance à ce remords suppose la malice la
plus invétérée et la plus insurmontable, BOUR-
DAL. 9e dim. après la Pentec. Dominic. t. ni,
p. 174. Que les guerres sont permises pour assurer
la paix, pour protéger l'innocence, pour arrê-
ter la malice qui se déborde, et pour retenir la cu-
pidité dans les bornes de la justice, FLECH. Turenne.
Un coeur noble ne peut soupçonner en autrui La bas-
sesse et la malice Qu'il ne se sent point en lui, RAC.
Esth. m, 9. Ce que j'en fais, c'est par malice ; Je n'aime
point Lubin, mais je veux me venger, DANCOURT,
Com, des comédiens, divert. se. 3. Les discours sont
si sujets à interprétation, il y a tant de différence
entre l'indiscrétion et la malice, MONTESQ. Esp. xn,i 2.
Je reconnais bien là sa malice, VOLT. Facét. Dialr.
du doct.Akakia. || Malice noire, profonde perversité.
Je vous conjure d'oublier le crime de vos frères et cette
malice noire dont ils ont usé contre vous, SACI, Bible,
Genèse, L, 4 7., Son coeur n'enferme pas une malice
noire, RAC. Brit. v, 3. Et jamais ma noire malice
N'a fait pâlir la vérité, CHAUL. à Lafare. || Malice
noire, action de méchanceté horrible et réfléchie.
|| 2e II se dit aussi des choses. La malice de ses dis-
cours. La malice de cette hérésie [pélagianisme]
consistait en ce que, niant la grâce de Dieu, elle
attribuait tout le bien à notre mérite, BOSS. Réfut.
catéch. Ferry, i, n, 12. Les dérèglements n'ont
paspour cela perdu leur malice, MASS. Carême,
Élus. || Dans le langage des casuistes et autres, la
malice du péché, ce que le péché a de malfaisant. Le
dérèglement, l'iniquité, la laideur, la malice même
du péché, BOSS. 3e sermon, Circonc. 4.||3" Ac-
tion faite avec malice. Une coupable malice. On
sait toutes les malices dont il est capable. || Fig.
Aux malices du sort enfin dérobez-vous, RAC.
Esth.iu,!. || 4° Inclination à faire de petites méchan-
cetés,'par badinage. Mais je veux que le sort, par un
heureux caprice, Fasse de vos écrits prospérer la ma-
lice, BOIL. Sat. ix. Sa malice fut plus légère, plus
piquante, plus féconde en idées originales et plaisan-
tes qu'elle n'avait jamais été, MARMONTEL, Mém. vu.
De la faiblesse sans bonté, de la malice sans noir-
ceur, des ressentiments sans colère, l'insouciance
d'un avenir qui ne devait pas être le sien, ID. ib.
xu. || 5° Petite méchanceté, faite par badinage. Qui,
cherchant dans ses vers la seule vérité, Fit, sans
être malin, ses plus grandes malices, BOIL. Épître
x. Le roi se permettait rarement des malices, mais
il y avait des gens pour lesquels il y succombait,
ST-SIM. 97, 24. Les gens malins feraient tout le con-
traire, ne fût-ce que pour me faire des malices,
VOLT. Prine. d'ac.t. 4 4. Et leur rendre, à mon tour,
malice pour malice, COLLIND'HARLEV. Malice pour
malice, i, 13. || Entendre malice à quelque chose, y
donner un sens détourné, un sens malin. || Ne pas
entendre malice à quelque chose, faire ou dire quel-
que chose sans mauvaise intention. || Ne pas entendre
malice, signifie aussi être simple, niais. || Fig. et fami-
lièrement. Un innocent fourré de malice, celui qui
est malicieux et qui feint d'être simple et bon. || La
belle malice ! Voyez la malice ! se dit, par plaisan-
terie, en imputant à malice ce à quoi os ne veut
pas répondre sérieusement. L'auteur n'est ni poli
ni gai.... il m'appelle Capanée, quoique je n'aie ja-
mais été au siège de Thèbes; il voudrait. me faire
passer pour un impie; voyez la malice! VOLT. Lett.
d'Argental, 20 juin 1767.
— SYN. MALICE, MALIGNITÉ. Cts deux mots sont
très-voisins, puisqu'ils dérivent tous deux de l'ad-
jectif latin ma2«s, méchant, et ne diffèrent que par
la terminaison. Mais on remarquera d'abord que
malignité a beaucoup moins le sens favorable que ma-
lice a quelquefois, celui de petite méchanceté, d'es-
pièglerie. Puis on peut dire en général que la malice
désigne malfaire, mal agir, et la malignité l'incli-
nation à faire du mal.
— HIST. xne s. Ne nos rendez pas selonc nos ma
lices, mais selonc ta debonnaireté, Machab. i,
4 3. Une seule tesche [tache] avoit maie, Dont li
sodomite sont pale ; Ne sot l'en en lui aultre vice,
Ne ne-faisoit aultre malice, Brut, f° 4 02, dans LA-.
CURNE. Pur co s'est mult li reis de s'ire refrénez,
E desfais li malices qui dune ert [était] aprestez, Th.
le mart. 43. E ore t'ad rendud Deu ta malice sur le
chief, Rois, p. 233. || xme s. Que trestous leur malices,
leur retourne à contraire, Berte, LXIX. Et quant il
voit que il s'atornent à malisse.... dont enprent-il si
cruel vengance , HENRI DE VAL. I. || XIV 6 S. Et
cest moien est ou milieu de deus malices ou vices
desquelles une est selon.... ORESME, Elh. 46. Pour quoy
nous, qui ne voulons souffrir, telles fraudes et ma-
lices estre faits ou préjudice de nous et de nostre
peuple.... Ordonn. des rois, t. v, p. 404. ||xve's. Et
tant fit par son subtil malice et engin que.... FROISS.
I, i, 6. Plus defollye que de malice, COMM. V, 4 7.
|| xvie s. Lorsque le chancre est ja accreu, il répu-
gne par sa malice à tous remèdes, PARÉ, V, 26.
— ÉTYM. Bourguig. maglice; provenç. malicia,
malissa; espagn. malicia; ital. maJizio; du lat. ma-
litia; de malus, méchant (voy. MAL). On remarquera
dans rhistoriquequemo2iceestquelquefoismasculin.
-[ MALICET (ma-li-sè), s. m. Nom d'une espèce
de farine. Quel diable d'amphigouri me faites-vous
sur les grains? il y a à la halle àt'.!5 sortes de fa-
rine : il y a la farine dite malicet, du nom de .
celui qui la fournit, qui est plus belle, plus chère,
et peut-être dans des sacs cachetés.... DIDER. Mém.
Lett. 4 4 9, du 15 nov. 1768.
MALICIEUSEMENT (ma-li-si-eû-ze-man ), adv.
D'une manière malicieuse. Vous abusez malicieuse-
ment de quelques paroles ambiguës d'une de ses
lettres, qui, étant capables d'un bon sens, doivent
être prises en bonne part, selon l'esprit de l'Eglise,
et ne peuvent être prises autrement que selon
l'esprit de votre société, PASC. Prov. xvi. Ils [les pro-
testants] nous ont malicieusement imposé que nous
ruinions l'adoration du seul Dieu et cette salutaire
confiance au seul Jésus-Christ, BOSS. Réfut. cqléch.
Ferry, Préambule.
— HIST. xnie s. Le [la] justice doit moult regarder
à l'entencion que li pères ot à oster l'enfant hors de
se [sa] garde, se le [la] coze fu fête malicieusement
ou non, et selonc ce que il trueve, il en doit ovrer,
BEAUM. xxi, 21. || xive s. La confession ainsi mali-
cieusement faite ne serait pas valable, Mênagier, i,
3. || xvi° s. Ils [ceux qui rabaissent les grands hom-
mes] ne font pas tant malicieusement, que lourde-
ment et grossièrement, les ingénieux à tout [avec]
leur mesdisance, MONT, I, 265. •
— ÉTYM. Malicieuse, et le suffixe ment; provenç,
maliciosamen ; espagn. maliciosamente ; ital. ma-
liziosamenle.
MALICIEUX, EUSE ( ma-li-si-eû, eû-z'), adj.
|| 1° Qui a de la malice. Il faisait assez bien de mé-
chants vers ; d'ailleurs nullement homme d'honneur,
malicieux comme un vieux singe, et envieux comme
un chien, SCARR. Rom. com. i, 5. On prétend que
vous êtes un ignorant; cela ne me fait rien ; mais
on ajoute que vous êtes malicieux, et cela me fâ-
che, car je suis bon homme, VOLT. Écoss.i, t.
|| Substantivement. C'est un malicieux. || Cheval
malicieux, cheval qui rue de côté, qui use d'a-
dresse contre celui qui le monte ou qui l'appro-
che. || Où il y a de la malice. Intention malicieuse.
Arrêter le progrès d'une procédure malicieuse,
BOSS. le Tellier. || 2° Qui fait de petites méchance-
tés par badinage. Un enfant malicieux. Il est ma-
licieux comme un petit dragon, BOURSAULT, Fabl.
d'Ésope, ni, 6. Qu'il ne leur est permis de se mon-
trer sensibles qu'avec délicatesse, instruites qu'avec
modestie, passionnées qu'avec pudeur, malicieuses
qu'avec l'air d'un badinage innocent et léger, MAB-
MONTEL, Élém. litt. OEuv. t. vu, p. 4 06, dans POUGENS.
— HIST. xne s. Sis maris [son mari] fut durs e
pesme [très-méchant] emalicius, Jîois, p. 96. Qui a
les ieulz gros et grans, si doit estre lenz et pesànz;
et qui les a enfosséset petis, si doit estre malesieus
et engignierres [trompeur], Fisiognomia, p. 26.
Garde que tu ne dies malicieus moz; car li pro-
phètes dit : Diex destruit les lèvres malicieuses,
u. — 52
DICT. DE LA LANGUE FRANÇAISE.
409
mauvaise vie Quelque malheureuse Dont le no-
ble talent est celui de coureuse, HAUTEROCHE, Espr.
follet, i, 4. Moi, j'ai peint tout cela d'une couleur
affreuse, Et la femme, entre nous, comme une mal-
heureuse, ÇOLLIN D'HARLEV. Vieux cêlib. i, 6. || Pro-
verbes. Lesmalheureuxn'unt point de parents, c'est--
a-dire toutle monde les abandonne. || Le gibet n'est
fait que pour les malheureux, c'est-à-dire les riches
s'en sauvent par l'argent.
— SYN. MALHEUREUX, MISÉRABLE. Étymologique-
ment, le malheureux est celui qui a mauvaise
chance ; le misérable est celui qui est digne de pi-
tié: Toutes les fois que l'idée de chance, de sort,
se présente, c'est malheureux qu'il faut employer ;
on est malheureux au jeu, et non misérable. Toutes
les fois que l'idée de pitié, de misère, prévaut, c'est
Ûe misérable qu'il faut se servir ; le jeu ruine et
rend misérable ; si on disait malheureux, on expri-
merait une nuance différente. Quand malheureux et
misérable sont termes de colère, ils sont équivalents.
— HIST. xm" s. Et Ysengrin [le loup] tôt coi se
gist Grant pièce après, et puis si dist : Haï! maleû-
reus chaitis! Ben. 7665. ||xve s. Dame, dist le che-
valier, toute personne doit doubter [craindre] sa
perte; car la pierre chetvoulentiers sur le plus mal-
heureux, Perceforest, t. m, f° 34. || xvies. Camillus,
. ayant ouy ces paroles, trouva l'acte bien malheu-
reux et meschant, AMYOT, Cam. 18. Qui ont perdu
d'un malheureux plomb ce frère, MONT, I, 22. Que
la malheureuse avene Ne foisonne sur la plaine, Ny
toute autre herbe qui nuit, DU BELLAY, VU, 6, recto.
Qui avec malheureux couché, il a froid quoy qu'il
luy touche, GÊNIN, Récréât, t. n, p. 248. Plus mal-
heureux que le bois dont on fait le gibet, COTGRAVE.
— ÉTYM. Mal, et heureux; bourguign. maulhu-
rous; Berry, malhureux; wallon, mdl'hureûs; pi-
card, malhureux; provenç. malauros, malahuros.
L'ancienne langue employait beaucoup une autre
forme, malheuré.
MALHONNÊTE (ma-lo-nê-f), adj. || 1° Qui man-
que à l'honneur, à la probité. Un homme de bien
ne saurait empêcher par toute sa modestie, qu'on
ne dise de lui ce qu'un malhonnête homme fait dire
de soi, LA BRUY. V. Il est difficile qu'un malhon-
nête homme ait assez d'esprit : un génie qui est
droit et perçant conduit enfin à la règle, à la pro-
bité, à la vertu, ID. XI. Toutes les fois que l'on dé-
fend une chose naturellement permise ou nécessaire,
on ne fait que rendre malhonnêtes gens ceux qui la
font, MONTESQ. Esp. xxi, 20. || Une malhonnête
femme, une femme qui manque aux lois de la pu-
deur. Apprenez, lui dit la belle.dame chez laquelle
il soupait, que celles qu'on appelle quelquefois de
malhonnêtes femmes ont presque toujours le mérite
d'un très-honnête homme, VOLT. Babouc. || En cet
emploi, malhonnête précède toujours son substantif,
qui est un nom de personne. || Il se dit aussi des
choses. Une action malhonnête. Fervaques avait été
conseiller au parlement deMetz, après avoir éprouvé
à un siège qu'il n'était pas propre à la guerre, sans
avoir pourtant rien fait de malhonnête, ST-SIM. 65,
173. Pourquoi me soupçonner d'un dessein malhon-
nête, quand je fais une action honnête ? VOLT. Ecoss.
n, 6. || 2° Qui manque àla civilité. Un homme mal-
honnête. Oui, c'est vous, malhonnête que vous
êtes, MARIVAUX, l'Épreuve, 4 8. ||En cet emploi, il
suit, toujours son substantif, qui est un nom de
personne. 1| 11 se dit aussi des choses. Un procédé
malhonnête. || 3° Malhonnête homme se disait au
xvi;e siècle pour homme peu distingué, par oppo-
sition à honnête homme. Lesfemmes dont on ne parle
point, c'est qu'elles font leurs affaires plus secrète-
ment, et avec quelque malhonnête homme sans con-
séquence, BUSSY, Hist. amour, des Gaules, t. n, p. 52.
— REM. Vous êtes un malhonnête, passez votre
chemin; taisez-vous, malhonnête; cela se dit popu-
' lairement; mais cela ne se dit pas autrement.
— SYN. MALHONNÊTE, DÉSHONNÊTE. Ces deux mots
ne diffèrent que par le préfixe. Malhonnête désigne
les manquements contre la bonne foi, la probité, et
aussi contre la civilité; déshonnête, les manque-
ments contre la pureté, la pudeur.
— ÉTYM. Mal, et honnête.
MALHONNÊTEMENT (ma-lo-nê-te-man), adv.
D'une manière contraire à la probité. En user mal-
honnêtement. || D'une manière incivile. Il répondit
malhonnêtement.
— ÉTYM. Malhonnête, et le suffixe ment.
MALHONNÊTETÉ (ma-lo-nê-te-té), s. (.111° Man-
que d'honnêteté, de civilité, de bienséance. Un
homme qui avait la malhonnêteté d'être jaloux de
sa femme, HAMILT. Gramm. s. || Parole ou action
incivile. Faire des malhonnêtetés à quelqu'un.
|| 2° Manque de probité. || Acte où manque la probité.
— ÉTY'M. Mal pour ?naje au féminin, et honnêteté.
MALICE (ma-li-s'), s. f. || 1° Inclination à mal-
faire. 11 te restait encor, pour comble de malice, A
te lier d'amour avecque Massinisse, MAIRET, Sophon.
I, 4. La justice du simple rendra sa voie heureuse,
le méchant périra par sa malice, SACI, 2?ib2e, Prov.
de Salom. xi, 5. Ne nous traitez pas selon notre ma-
lice, mais selon vos miséricordes, ID. ib. Machab. i,
xm, 46. Nous faire plaindre l'aveuglement de ceux
qui apportent la seule autorité pour preuve dans les
matières physiques au lieu du raisonnement et des
expériences, et nous donner de l'horreur pour la ma-
lice des autres, qui emploient le raisonnement seul
dans la théologie, au lieu de l'autorité de l'Ecriture
et des Pères, PASC. Fragm. d'un traité dévide. On
verra, par cette réponse, et notre innocence et la ma-
lice de ceux qui nous ont imputé des impiétés dont
ils sont les uniques inventeurs, ID. Prov. xvn. Nous
voyons que les premiers hommes, lorsque le monde
pbis innocent était encore dans son enfance, rem-
plissaient des neuf cents ans par leur vie, et que,
lorsque la malice s'est accrue, la vie en même temps
s'est diminuée, BOSS. Yolande de Monterby. Lors-
qu'une âme si pure se croyait tellement plongée
dans la malice, ID. États d'orais. ix, 3. Une pleine
résistance à ce remords suppose la malice la
plus invétérée et la plus insurmontable, BOUR-
DAL. 9e dim. après la Pentec. Dominic. t. ni,
p. 174. Que les guerres sont permises pour assurer
la paix, pour protéger l'innocence, pour arrê-
ter la malice qui se déborde, et pour retenir la cu-
pidité dans les bornes de la justice, FLECH. Turenne.
Un coeur noble ne peut soupçonner en autrui La bas-
sesse et la malice Qu'il ne se sent point en lui, RAC.
Esth. m, 9. Ce que j'en fais, c'est par malice ; Je n'aime
point Lubin, mais je veux me venger, DANCOURT,
Com, des comédiens, divert. se. 3. Les discours sont
si sujets à interprétation, il y a tant de différence
entre l'indiscrétion et la malice, MONTESQ. Esp. xn,i 2.
Je reconnais bien là sa malice, VOLT. Facét. Dialr.
du doct.Akakia. || Malice noire, profonde perversité.
Je vous conjure d'oublier le crime de vos frères et cette
malice noire dont ils ont usé contre vous, SACI, Bible,
Genèse, L, 4 7., Son coeur n'enferme pas une malice
noire, RAC. Brit. v, 3. Et jamais ma noire malice
N'a fait pâlir la vérité, CHAUL. à Lafare. || Malice
noire, action de méchanceté horrible et réfléchie.
|| 2e II se dit aussi des choses. La malice de ses dis-
cours. La malice de cette hérésie [pélagianisme]
consistait en ce que, niant la grâce de Dieu, elle
attribuait tout le bien à notre mérite, BOSS. Réfut.
catéch. Ferry, i, n, 12. Les dérèglements n'ont
paspour cela perdu leur malice, MASS. Carême,
Élus. || Dans le langage des casuistes et autres, la
malice du péché, ce que le péché a de malfaisant. Le
dérèglement, l'iniquité, la laideur, la malice même
du péché, BOSS. 3e sermon, Circonc. 4.||3" Ac-
tion faite avec malice. Une coupable malice. On
sait toutes les malices dont il est capable. || Fig.
Aux malices du sort enfin dérobez-vous, RAC.
Esth.iu,!. || 4° Inclination à faire de petites méchan-
cetés,'par badinage. Mais je veux que le sort, par un
heureux caprice, Fasse de vos écrits prospérer la ma-
lice, BOIL. Sat. ix. Sa malice fut plus légère, plus
piquante, plus féconde en idées originales et plaisan-
tes qu'elle n'avait jamais été, MARMONTEL, Mém. vu.
De la faiblesse sans bonté, de la malice sans noir-
ceur, des ressentiments sans colère, l'insouciance
d'un avenir qui ne devait pas être le sien, ID. ib.
xu. || 5° Petite méchanceté, faite par badinage. Qui,
cherchant dans ses vers la seule vérité, Fit, sans
être malin, ses plus grandes malices, BOIL. Épître
x. Le roi se permettait rarement des malices, mais
il y avait des gens pour lesquels il y succombait,
ST-SIM. 97, 24. Les gens malins feraient tout le con-
traire, ne fût-ce que pour me faire des malices,
VOLT. Prine. d'ac.t. 4 4. Et leur rendre, à mon tour,
malice pour malice, COLLIND'HARLEV. Malice pour
malice, i, 13. || Entendre malice à quelque chose, y
donner un sens détourné, un sens malin. || Ne pas
entendre malice à quelque chose, faire ou dire quel-
que chose sans mauvaise intention. || Ne pas entendre
malice, signifie aussi être simple, niais. || Fig. et fami-
lièrement. Un innocent fourré de malice, celui qui
est malicieux et qui feint d'être simple et bon. || La
belle malice ! Voyez la malice ! se dit, par plaisan-
terie, en imputant à malice ce à quoi os ne veut
pas répondre sérieusement. L'auteur n'est ni poli
ni gai.... il m'appelle Capanée, quoique je n'aie ja-
mais été au siège de Thèbes; il voudrait. me faire
passer pour un impie; voyez la malice! VOLT. Lett.
d'Argental, 20 juin 1767.
— SYN. MALICE, MALIGNITÉ. Cts deux mots sont
très-voisins, puisqu'ils dérivent tous deux de l'ad-
jectif latin ma2«s, méchant, et ne diffèrent que par
la terminaison. Mais on remarquera d'abord que
malignité a beaucoup moins le sens favorable que ma-
lice a quelquefois, celui de petite méchanceté, d'es-
pièglerie. Puis on peut dire en général que la malice
désigne malfaire, mal agir, et la malignité l'incli-
nation à faire du mal.
— HIST. xne s. Ne nos rendez pas selonc nos ma
lices, mais selonc ta debonnaireté, Machab. i,
4 3. Une seule tesche [tache] avoit maie, Dont li
sodomite sont pale ; Ne sot l'en en lui aultre vice,
Ne ne-faisoit aultre malice, Brut, f° 4 02, dans LA-.
CURNE. Pur co s'est mult li reis de s'ire refrénez,
E desfais li malices qui dune ert [était] aprestez, Th.
le mart. 43. E ore t'ad rendud Deu ta malice sur le
chief, Rois, p. 233. || xme s. Que trestous leur malices,
leur retourne à contraire, Berte, LXIX. Et quant il
voit que il s'atornent à malisse.... dont enprent-il si
cruel vengance , HENRI DE VAL. I. || XIV 6 S. Et
cest moien est ou milieu de deus malices ou vices
desquelles une est selon.... ORESME, Elh. 46. Pour quoy
nous, qui ne voulons souffrir, telles fraudes et ma-
lices estre faits ou préjudice de nous et de nostre
peuple.... Ordonn. des rois, t. v, p. 404. ||xve's. Et
tant fit par son subtil malice et engin que.... FROISS.
I, i, 6. Plus defollye que de malice, COMM. V, 4 7.
|| xvie s. Lorsque le chancre est ja accreu, il répu-
gne par sa malice à tous remèdes, PARÉ, V, 26.
— ÉTYM. Bourguig. maglice; provenç. malicia,
malissa; espagn. malicia; ital. maJizio; du lat. ma-
litia; de malus, méchant (voy. MAL). On remarquera
dans rhistoriquequemo2iceestquelquefoismasculin.
-[ MALICET (ma-li-sè), s. m. Nom d'une espèce
de farine. Quel diable d'amphigouri me faites-vous
sur les grains? il y a à la halle àt'.!5 sortes de fa-
rine : il y a la farine dite malicet, du nom de .
celui qui la fournit, qui est plus belle, plus chère,
et peut-être dans des sacs cachetés.... DIDER. Mém.
Lett. 4 4 9, du 15 nov. 1768.
MALICIEUSEMENT (ma-li-si-eû-ze-man ), adv.
D'une manière malicieuse. Vous abusez malicieuse-
ment de quelques paroles ambiguës d'une de ses
lettres, qui, étant capables d'un bon sens, doivent
être prises en bonne part, selon l'esprit de l'Eglise,
et ne peuvent être prises autrement que selon
l'esprit de votre société, PASC. Prov. xvi. Ils [les pro-
testants] nous ont malicieusement imposé que nous
ruinions l'adoration du seul Dieu et cette salutaire
confiance au seul Jésus-Christ, BOSS. Réfut. cqléch.
Ferry, Préambule.
— HIST. xnie s. Le [la] justice doit moult regarder
à l'entencion que li pères ot à oster l'enfant hors de
se [sa] garde, se le [la] coze fu fête malicieusement
ou non, et selonc ce que il trueve, il en doit ovrer,
BEAUM. xxi, 21. || xive s. La confession ainsi mali-
cieusement faite ne serait pas valable, Mênagier, i,
3. || xvi° s. Ils [ceux qui rabaissent les grands hom-
mes] ne font pas tant malicieusement, que lourde-
ment et grossièrement, les ingénieux à tout [avec]
leur mesdisance, MONT, I, 265. •
— ÉTYM. Malicieuse, et le suffixe ment; provenç,
maliciosamen ; espagn. maliciosamente ; ital. ma-
liziosamenle.
MALICIEUX, EUSE ( ma-li-si-eû, eû-z'), adj.
|| 1° Qui a de la malice. Il faisait assez bien de mé-
chants vers ; d'ailleurs nullement homme d'honneur,
malicieux comme un vieux singe, et envieux comme
un chien, SCARR. Rom. com. i, 5. On prétend que
vous êtes un ignorant; cela ne me fait rien ; mais
on ajoute que vous êtes malicieux, et cela me fâ-
che, car je suis bon homme, VOLT. Écoss.i, t.
|| Substantivement. C'est un malicieux. || Cheval
malicieux, cheval qui rue de côté, qui use d'a-
dresse contre celui qui le monte ou qui l'appro-
che. || Où il y a de la malice. Intention malicieuse.
Arrêter le progrès d'une procédure malicieuse,
BOSS. le Tellier. || 2° Qui fait de petites méchance-
tés par badinage. Un enfant malicieux. Il est ma-
licieux comme un petit dragon, BOURSAULT, Fabl.
d'Ésope, ni, 6. Qu'il ne leur est permis de se mon-
trer sensibles qu'avec délicatesse, instruites qu'avec
modestie, passionnées qu'avec pudeur, malicieuses
qu'avec l'air d'un badinage innocent et léger, MAB-
MONTEL, Élém. litt. OEuv. t. vu, p. 4 06, dans POUGENS.
— HIST. xne s. Sis maris [son mari] fut durs e
pesme [très-méchant] emalicius, Jîois, p. 96. Qui a
les ieulz gros et grans, si doit estre lenz et pesànz;
et qui les a enfosséset petis, si doit estre malesieus
et engignierres [trompeur], Fisiognomia, p. 26.
Garde que tu ne dies malicieus moz; car li pro-
phètes dit : Diex destruit les lèvres malicieuses,
u. — 52
DICT. DE LA LANGUE FRANÇAISE.
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