A1M
st'on de la Vallière. \\ 2° S'aimer dans un lieu, s'y
plaire. Pourquoi me chasses-tu? Pourquoi fuis-tu
mes pas?—Tu me plais loin de moi.—Je m'aime où
tu n'es pas, MOL. Mélic. i, i. Il s'aime mieux' dans
un tronc d'arbre ou dans une grotte que dans un pa-
lais ou sur un trône, PASC. Prov. 9. C'est là-dessus
que roule le siècle: on le sent, on s'en plaint et on s'y
aime, MASS. Myst. Visit. \] 3° En parlant des oiseaux
et des plantes. Les pigeons s'aiment où il y a de l'eau.
Les oliviers s'aiment dans les lieux sablonneux.
|| 4° S'aimer l'un l'autre. Ils s'aiment comme frères.
Les hommes sont cause que les femmes né s'aiment
point, LA BRUY. 3. Ceuxqui s'aiment d'abord avec la
plus violente passion, contribuent bientôt, chacun
de leur part, à s'aimer moins, et ensuite a ne s'ai-
mer plus, LA BRUY. 4. Il Proverbes. Qui bien
aime bien châtie ; c'est une preuve d'amitié que de
reprendre quelqu'un de ses défauts. || Qui m'aime
me suive ; ceux qui nous aiment doivent prendre
nos intérêts , se joindre à nous. || Qui m'aime
aime mon chien ; quand on aime une personne,
on aime ce qui lui appartient. || Aimer mieux deux
oeufs qu'une prune; préférer un grand avantage à
un moindre.
— REM. 1. Des grammairiens ontprétendu que avec
aimer suivi d'un infinitif, s'il s'agit non d'une action
a faire, mais d'une impression reçue ou d'un état,
on peut supprimer la préposition à, par exemple :
11 aime entendre une bonne musique. L'usage est
Contre un pareil emploi. Tout ce qu'on peut accor-
der, c'est que la poésie use de cette licence, qui,
n'ayant rien de contraire à la grammaire, ne serait
qu'un archaïsme. || 2. Qn remarquera que aimer
mieux , suivi d'un infinitif, ne prend ni à, ni
de : Saint Louis aimait mieux mourir que pécher.
|| 3. Faut-il dire : Il aime mieux faire cela que de
faire autre chose ; ou bien : il aime mieux faire cela
que faire autre chose? L'usage des auteurs montre
qu'on peut" à volonté mettre ou omettre ce de. La
seule remarque à faire , c'est qu'il .vaut mieux le
mettre quand la première alternative est une lon-
. gue proposition, et le supprimer quand elle est courte.
On dira plutôt: J'aime mieux mourir que pécher,
qu'on ne dirait : J'aime mieux mourir que de pé-
cher. || 4. Aimer mieux, présente quelquefois une
construction difficile. Par exemple : J'aime mieux
que vous alliez à Paris que que vous perdiez votre
temps chez vous. Ces deux que sont lourds. Pour les
éviter , on en a parfois supprimé un : J'aimerais
mieux souffrir la peine la plus dure Qu'il eût reçu
pour moi la moindre égratignure, MOL. Tart. ni, 6.
J'aimerais mieux mourir qu'un autre que moi vous
eût mandé..., SËV. 29 avril 4687. Ce moyen est mau-
vais ; les deux que sont nécessaires. On a eu recours
à non pas intercalé entre les deux verbes. J'aime
bien mieux qu'elle aille le chercher .que non pas
qu'elle l'attende chez moi, DANCOURT, Chevalier à
la mode, v, 4. J'aurais mieux aimé qu'elles eussent
été des lanternes que non pas qu'elles fussent des
carrières, VOLT. Dict. phil. Monde.' Cette tournure
est bonne ; seulement elle a un peu vieilli : on pour-
rait la remettre en honneur ; car elle s'applique à
tous les cas. En certaines circonstances, on substi-
tue au second subjonctif un infinitif précédé de de:
Il vaut mieux que vous soyez' heureux que de briller
à la cour. Enfin, et c'est aujourd'hui le procédé gé-
néral de remédier à cette difficulté, on substitue au
second que la conjonction ri : J'aime mieux que vous
alliez à Paris que si vous perdiez votre temps chez
vous. Et songez qu'il vaut mieux encor qu'il en mé-
suse Que si de l'en frustrer il faut qu'on vous ac-
cuse, MOL. Tari, iv, i. Il vaut mieux que l'innocent
périsse que si toute la nation allait se révolter con-
tre César,, MASS. Petit carême, vendredi saint. Voy.
JULLÏES , Gramm. p. 274. || 6. Aimer de suivi d'un in-
finitif est devenu un archaïsme; mais, soutenu par
d'excellents auteurs et n'ayant rien d'incorrect, la
poésie et le haut style ont toujours licence de s'en
servir.
— SYN. i° AIMER, CHÉRIR. Aiirïer a un sens plus
étendu que chérir. Quand il s'agit de la passion de
l'amour, aimer dit tout ce qui peut être dit ; chérir n'a-
jouterait rien, et même affaiblirait le sens, car ici il
serait moins précis. Maîtresse chérie n'exprime pas
plus que maîtresse aimée; etfemme chérie est moins
précis que femme aimée ; car dans femme aimée il
s'agit de l'amour entre les deux sexes, et femme
chérie peut s'appliquer à nos mères, à nos soeurs.
Mais aimer ayant des acceptions étendues et com-
portant tous les degrés du. sentiment qui no'isin-
cline vers son objet, chérir en marque le plus haut
degré. || 2° AIMER MIEUX, AIMER PLUS. Il y a un cas ou
ces deux locutions se confondent : c'est quand aime-
AIM
mieux répond à aimer bien ; alors aimer mieux est
tout à fait synonyme de aimer plus. Je vous aimais
bien déjà, mais depuis que vous vous êtes ainsi com-
porté , je vous aime mieux. Dans l'autre emploi, ai-
mer mieux marque non pas une affection, un sen-
timent, mais, seulement une préférence d'option;
quelquefois il arrive qu'on a à choisir entre deux
maux. Au contraire, aimer plus marque non pas une
option, mais une affection, une inclination, un
sentiment, M. Guizot donne cet exemple-ci : Une
âme honnête et juste aimerait mieux être déshono-
rée par les calomnies les plus atroces, que de se
déshonorer elle-même par la moindre des injustices,
parce qu'elle aime plus la justice que son honneur
même.
— HIST. x« s. Ne ule cose non la pouret oncquè
pleierfque] La polie (jeune fille] non amast le deo
menestier, Eulalie.
—XP s. Et ditaucomte: Jene vous aimneaht, CU.
de Roi. xxn. Car autrement ne m'amerat-ilmie, ib.
xxxvi. Li douze pair, que Charles aimet tant, ib. XLI.
— xn" s. Ne vos am [aime] de néant,Bonc. p. 16. Je
suisRolant,qui tant vous a amé,iî>. p. 9<.Licristien
qui ne vous aiment mie, tfr. p. U6. Mieux [j'] ameroie
destruire ces irois, ib. pJ 30. [les mauvais amants] Dont
jà dame n'iert [ne sera] amée, Couci, i. Onques
n'amai sans poor [peur], ib. Amer qui me toit [en-
lève] la vie, ib. m. Ele voit bien et conoist et entent
Qu'il n'en est plus qui si amtleaument, ib. v. Assez
[j'] aim mieuz mourir en bon désir, Que vivre irez
et m'amie haïr, ib. ix. S'onques amis eut joie pour
amer [en raison deson amour].... ib. x. Et tous les
biens qu'on peut avoir d'amer, Aura mes cuers qui
adès s'i atent, ib. xm. Et vous, seigneur, qui par
amour amez, Faites ainsi, se jouir en voulez,
t&. xiv. Onques Tristans, cil qui but le breuvage,
Plus loiaument n'ama sans repentir, ib. xix. Ou cil
qui aime du cuer à son povoir, ib. xx. Puisque chas-
cun vous aime si sans prendre [rien obtenir].... {6.
xxiv. Et jà de sa prison [je] Ne quier issir se morz ou
amez non, ib: ix. Sisui je riche et de moult haut pa-
rage, Qu'on m'ameroit à petit de biauté, QUESNES,
iîomoncero, p. -109. On n'aime pas dame pour
parenté [sa famille], Ainz quant ele est bêle, cour-'
toiseetsage,iD. ib. p. no. Et cil qui plus les aimment
sont plus ensoupeçon, Sax. XXII. Et tous les Heru-
pois que il moult aime et prise, ib. xxm. Homs qui
bien aime est trestoz enragiez, La prise d'Orenge,
36G.
— XIIIC s. Dame, ceaditBerte, et jeles amerai,
Berfe, vu. J'aim miex que elle meure, ib. xi. Elle
amast assez mieux que elle eûst mentit [elle aime-
rait mieux avoir menti], «6.LUI. Il l'amoient[Berte]
de cuer comme bien enseignée, ib. LX. Jà est-ce la
chose du monde Que le miex ains et plus desirre ;
Qar m'i menez, biau très doz sire, Ren. 102U. Seli
cors en prison remeint,Gardés au mains qui li cuers
m'aint, la Rose, 4024..Mes or veilfje veux], por ce
que je t'ains, Estrede toi si bien certains, tb.(979.
Ele [l'envie] fondoit d'ire etardoit, Quant aucuns
qu'ele regardoit, Estoit ou preus, ou biaus,ougens,
Ou amés, ou loés des gens, ib. 290. Et de ceste
vertu descendent deus autres, qui grant mestier
poent avoir à maintenir son estât et à li avancier et
fere amer de Diu et du siècle, BEAUM. 2(. Biau filz,
fist il, je te prie que tu te faces amer au peuple de
ton royaume, JOINV. t93. Or vous demande je, fist-
il, lequel vous ameriez miex, ou que vous feussiez
mesiaus [lépreux],ou que vous eussiez fait un péché
mortel, ID, -I 94.
— xve s. Mieux [j'] aimeroie à mourir, FROISS. I,
I, ii. Qui m'aime, si me suive, ID. II, H, 32. Elle
laissoit le boire et le manger pour aimer par amour,
LOUIS xi, Nouv. LXXXVIII.'
— xvie s. J'ayme mieulx que le sachez par sa con-
fession que par ma parôlle, RAB. Garg.i, 46. Car
vraie amour qui le sien cueur enflame, Plaignoit
celluy qu'au monde plus elle ame, J. MAROT, V,
86. C'est àbon droictque je vous sers et ame,iD. v,
256. Il aime ailleurs, et de luy suishaye, ID.V, 325.
Si quelque ennuy ne vient ramentevoir Le povre
humain d'invoquer Dieu, qui l'ame.... MAROT, H,
266. Toutesfois si les lecteurs aiment mieux d'ouir
un récit des tesmoignages de la loy.... je tas-
cherayde satisfaire à ceci,CALViN, Instil. 327.Frere
bienayïié, MONT, I, 22. Je n'aime ny à conseiller
ny à suyvre une vertu si sauvage, ID. I, 224. Us
ayment mieulx la mort que de relascher.... ID. I,
24<. Les femmes s'aiment lé mieulx où elles ont plus
de tort, ID. II, 84. J'aimeroy bien mieulx régler mes
affaires par le sort des dez que par ces songes, ID.
45. Je m'aijierois mieulx bon escuyer,que bonlogi-
eien,ii). iv,74. Les amants.pour l'affection véhémente
AIN 93
qu'ilz porteraient à leurs aimez, ne les abandonr.e-
roient jamais, AMYOT, Pëlop. 33. H n'est rien si
cruel ne si aimant le sang qu'est un tyran couard,
iv.Artax. 37. Les Lacedemoniens aimaritsmieux que
leurs citoyens fussent obéissants que qu'ils eussent
la présidence sur tous les Grecs, ID. Arist: s. Elles
aiment d'avoir quelque-chose qui donne plus de lus-
tre à leur beauté, LANGUE, 96. M. deChasteaubriant
s'y aimoittant, qu'il y a séjourné, CARL. m,. 5.
— ÉTYM. Provenç. et espagn. amqr; ital. amare;
de amare, aimer. On remarquera que l'ancien fran-
çais conjuguait aimer au singulier du présent de
l'indicatif : J'aim, tu aims, il aint, ou j'am, tu
ams, il ant. Pourtant on trouve aussi la forme
actuelle.
y AIN (in), *. m. Terme de manufacture par lequel
on désigne un certain nombre des fils delà chaîne j
en sorte que les draps employés pour les troupes
étant de ts ains et de 22 ains dans le même lé, ces
derniers sont plus fins, LEGOARANT.
—ÉTYM. D'après M. Legoarant, ain serait provenu
d'une abréviation de centain (Cail 1 et définitive-
ment ain) ou centaine, les toiles se désignant par
les centaines de fils dont la chaîne était composée '
t AINARD (è-nar), s. m. Ganse dont les pêcheurs
se servent pour attacher le bord de leur filet sur une
ralingue qui la borde.
AINE (ê-n'), s. m. Le pli de la cuisse au bas du
ventre. Des taureaux auxquels ils [les bourreaux]
mirent dans l'aine des fers ardents, VOLT. Phil.
v, st.
— HIST. XIIe s. Si le navrunt el aine.... Job, 444.
|! xnie s. N'onc por Adonis n'ot tel paine, Quant li
senglers l'ot mors en l'aine, Dont il morut à grant
hascie, la Rose, t0550.
—ÉTYM. Wallon, ineet ewèx; provenç. mod. len-
gue, pour l'engue; espagn. engle ; ital. inguine ;
d'inguen, aine; sanscr. anji, parties honteuses.
fAINE (ê-n'), s. f. Il IeTechnologie. Petit bâton
qu'on passe dans la tète des harengs destinés à
être fumés. || 2° Aine et demi-aine, pièce de peau
de mouton qui sert à joindre une éclisse et une tê-
tière dans un soufflet d'orgue.
AÎNÉ, ÉE (è-né, née), adj. || 1° Celui des enfants
qui est né le premier. Fils aîné. Fille aînée. Frère
aîné. Soeur aînée. || 2° Lefilsatné de l'Église, qua-
lification donnée autrefois au roi de France. |l 3° La
fille aînée des rois de France, titre que prenait au-
trefois l'Université. || 4° S. m. Fils aîné. C'est là
l'aîné de mes fils. De deux princes jumeaux nous
déclarer l'aîné, CORN. Rodog. 1, 1. Quel intérêt Nous
fait tous deux aînés quand et comme il vous plaît?
ID. ib. iv, 6. Il 5e S. f. Aînée, fille aînée. Il a marié
l'aînée de ses filles. || 6° Frère aîné. Il est jaloux de
son aîné. || 7° Qui est plus âgé qu'un autre. C'est
mon aîné. Respectons nos aînés. |l 8° Aîné de Nor-
mandie, aîné particulièrement avantagé. J'ai vu 54
lettres de cachet dans ma famille, et j'en ai eu i 7 pour
ma part; ainsi, vous voyez que j'ai été partagé eu
aîné de Normandie, MIRABEAO, Collection, t. iv,
p. J06.
— HIST. xm* s. X cinq labiaus de gueule l'ainsnés
fils le porta [porta sonécu], Berte, cxxxi. Li aisnés
ot non Robiers, etli mains né Loeys, Chr. de Rains,
p. 2. En tel point que ses ainsnés.fix n'avoit pas
aage d'entrer en l'ommage de ce que.se [sa] mère
a voit aquesté, BEAUM. XII, to. Tant fust ce que eles
fussent ains nées des premiers mariages, m. xin,
6. Son ainzné frère qui eust mis contredit et cha-
Ionge, s'il faire le peust, Ass. de Jérus. 1, 220.
H -xve s. La roine et son ains-né fils, FROISS. I,
I, 9.
— ÉTYM. L'historique, décomposant le mot, mon-
tre l'étymologie : oins, avant (voy. AINS) et ne':
né avant (voy. NÉ). Espagn. entenado, enfant d'un
premier lit; ital. antenalo, ancêtre. .
AÎNESSE (è-nè-s'), s. f. Priorité d'âge entre
frères et soeurs. Le dernier peut-être d'une famille
nombreuse, ou du moins exclu des droits et des
prérogatives de l'aînesse J vous, vous seriez vu ré-
duit dans le monde à une portion de cadet tou-
jours fort mince dans les maisons les plus anciennes,
MASS. Revenus ecclésiastiques. Et ce vieux droit d'aî-
nesse est parfois si puissant Que pour remplir un
trône il rappelle un absent, CORN. Nie. IV, 3. L'in-
vention des arts étant un droit d'aînesse, Nous de-
vons l'apologue à l'ancienne Grèce, LA FONT. Fab.
ni, -l.
— HIST. xme s. Entre femeles n'a point de en-
neece, Liv. dejusl. 233. Li fiés qui vient as hoirs en
descendant, il y a ainsneece, BEAUM. XIV, 8.
— ÉTYM. Aine. On voit que l'ancienne forme est
ainsneece, et que aînesse est une contraction; par
st'on de la Vallière. \\ 2° S'aimer dans un lieu, s'y
plaire. Pourquoi me chasses-tu? Pourquoi fuis-tu
mes pas?—Tu me plais loin de moi.—Je m'aime où
tu n'es pas, MOL. Mélic. i, i. Il s'aime mieux' dans
un tronc d'arbre ou dans une grotte que dans un pa-
lais ou sur un trône, PASC. Prov. 9. C'est là-dessus
que roule le siècle: on le sent, on s'en plaint et on s'y
aime, MASS. Myst. Visit. \] 3° En parlant des oiseaux
et des plantes. Les pigeons s'aiment où il y a de l'eau.
Les oliviers s'aiment dans les lieux sablonneux.
|| 4° S'aimer l'un l'autre. Ils s'aiment comme frères.
Les hommes sont cause que les femmes né s'aiment
point, LA BRUY. 3. Ceuxqui s'aiment d'abord avec la
plus violente passion, contribuent bientôt, chacun
de leur part, à s'aimer moins, et ensuite a ne s'ai-
mer plus, LA BRUY. 4. Il Proverbes. Qui bien
aime bien châtie ; c'est une preuve d'amitié que de
reprendre quelqu'un de ses défauts. || Qui m'aime
me suive ; ceux qui nous aiment doivent prendre
nos intérêts , se joindre à nous. || Qui m'aime
aime mon chien ; quand on aime une personne,
on aime ce qui lui appartient. || Aimer mieux deux
oeufs qu'une prune; préférer un grand avantage à
un moindre.
— REM. 1. Des grammairiens ontprétendu que avec
aimer suivi d'un infinitif, s'il s'agit non d'une action
a faire, mais d'une impression reçue ou d'un état,
on peut supprimer la préposition à, par exemple :
11 aime entendre une bonne musique. L'usage est
Contre un pareil emploi. Tout ce qu'on peut accor-
der, c'est que la poésie use de cette licence, qui,
n'ayant rien de contraire à la grammaire, ne serait
qu'un archaïsme. || 2. Qn remarquera que aimer
mieux , suivi d'un infinitif, ne prend ni à, ni
de : Saint Louis aimait mieux mourir que pécher.
|| 3. Faut-il dire : Il aime mieux faire cela que de
faire autre chose ; ou bien : il aime mieux faire cela
que faire autre chose? L'usage des auteurs montre
qu'on peut" à volonté mettre ou omettre ce de. La
seule remarque à faire , c'est qu'il .vaut mieux le
mettre quand la première alternative est une lon-
. gue proposition, et le supprimer quand elle est courte.
On dira plutôt: J'aime mieux mourir que pécher,
qu'on ne dirait : J'aime mieux mourir que de pé-
cher. || 4. Aimer mieux, présente quelquefois une
construction difficile. Par exemple : J'aime mieux
que vous alliez à Paris que que vous perdiez votre
temps chez vous. Ces deux que sont lourds. Pour les
éviter , on en a parfois supprimé un : J'aimerais
mieux souffrir la peine la plus dure Qu'il eût reçu
pour moi la moindre égratignure, MOL. Tart. ni, 6.
J'aimerais mieux mourir qu'un autre que moi vous
eût mandé..., SËV. 29 avril 4687. Ce moyen est mau-
vais ; les deux que sont nécessaires. On a eu recours
à non pas intercalé entre les deux verbes. J'aime
bien mieux qu'elle aille le chercher .que non pas
qu'elle l'attende chez moi, DANCOURT, Chevalier à
la mode, v, 4. J'aurais mieux aimé qu'elles eussent
été des lanternes que non pas qu'elles fussent des
carrières, VOLT. Dict. phil. Monde.' Cette tournure
est bonne ; seulement elle a un peu vieilli : on pour-
rait la remettre en honneur ; car elle s'applique à
tous les cas. En certaines circonstances, on substi-
tue au second subjonctif un infinitif précédé de de:
Il vaut mieux que vous soyez' heureux que de briller
à la cour. Enfin, et c'est aujourd'hui le procédé gé-
néral de remédier à cette difficulté, on substitue au
second que la conjonction ri : J'aime mieux que vous
alliez à Paris que si vous perdiez votre temps chez
vous. Et songez qu'il vaut mieux encor qu'il en mé-
suse Que si de l'en frustrer il faut qu'on vous ac-
cuse, MOL. Tari, iv, i. Il vaut mieux que l'innocent
périsse que si toute la nation allait se révolter con-
tre César,, MASS. Petit carême, vendredi saint. Voy.
JULLÏES , Gramm. p. 274. || 6. Aimer de suivi d'un in-
finitif est devenu un archaïsme; mais, soutenu par
d'excellents auteurs et n'ayant rien d'incorrect, la
poésie et le haut style ont toujours licence de s'en
servir.
— SYN. i° AIMER, CHÉRIR. Aiirïer a un sens plus
étendu que chérir. Quand il s'agit de la passion de
l'amour, aimer dit tout ce qui peut être dit ; chérir n'a-
jouterait rien, et même affaiblirait le sens, car ici il
serait moins précis. Maîtresse chérie n'exprime pas
plus que maîtresse aimée; etfemme chérie est moins
précis que femme aimée ; car dans femme aimée il
s'agit de l'amour entre les deux sexes, et femme
chérie peut s'appliquer à nos mères, à nos soeurs.
Mais aimer ayant des acceptions étendues et com-
portant tous les degrés du. sentiment qui no'isin-
cline vers son objet, chérir en marque le plus haut
degré. || 2° AIMER MIEUX, AIMER PLUS. Il y a un cas ou
ces deux locutions se confondent : c'est quand aime-
AIM
mieux répond à aimer bien ; alors aimer mieux est
tout à fait synonyme de aimer plus. Je vous aimais
bien déjà, mais depuis que vous vous êtes ainsi com-
porté , je vous aime mieux. Dans l'autre emploi, ai-
mer mieux marque non pas une affection, un sen-
timent, mais, seulement une préférence d'option;
quelquefois il arrive qu'on a à choisir entre deux
maux. Au contraire, aimer plus marque non pas une
option, mais une affection, une inclination, un
sentiment, M. Guizot donne cet exemple-ci : Une
âme honnête et juste aimerait mieux être déshono-
rée par les calomnies les plus atroces, que de se
déshonorer elle-même par la moindre des injustices,
parce qu'elle aime plus la justice que son honneur
même.
— HIST. x« s. Ne ule cose non la pouret oncquè
pleierfque] La polie (jeune fille] non amast le deo
menestier, Eulalie.
—XP s. Et ditaucomte: Jene vous aimneaht, CU.
de Roi. xxn. Car autrement ne m'amerat-ilmie, ib.
xxxvi. Li douze pair, que Charles aimet tant, ib. XLI.
— xn" s. Ne vos am [aime] de néant,Bonc. p. 16. Je
suisRolant,qui tant vous a amé,iî>. p. 9<.Licristien
qui ne vous aiment mie, tfr. p. U6. Mieux [j'] ameroie
destruire ces irois, ib. pJ 30. [les mauvais amants] Dont
jà dame n'iert [ne sera] amée, Couci, i. Onques
n'amai sans poor [peur], ib. Amer qui me toit [en-
lève] la vie, ib. m. Ele voit bien et conoist et entent
Qu'il n'en est plus qui si amtleaument, ib. v. Assez
[j'] aim mieuz mourir en bon désir, Que vivre irez
et m'amie haïr, ib. ix. S'onques amis eut joie pour
amer [en raison deson amour].... ib. x. Et tous les
biens qu'on peut avoir d'amer, Aura mes cuers qui
adès s'i atent, ib. xm. Et vous, seigneur, qui par
amour amez, Faites ainsi, se jouir en voulez,
t&. xiv. Onques Tristans, cil qui but le breuvage,
Plus loiaument n'ama sans repentir, ib. xix. Ou cil
qui aime du cuer à son povoir, ib. xx. Puisque chas-
cun vous aime si sans prendre [rien obtenir].... {6.
xxiv. Et jà de sa prison [je] Ne quier issir se morz ou
amez non, ib: ix. Sisui je riche et de moult haut pa-
rage, Qu'on m'ameroit à petit de biauté, QUESNES,
iîomoncero, p. -109. On n'aime pas dame pour
parenté [sa famille], Ainz quant ele est bêle, cour-'
toiseetsage,iD. ib. p. no. Et cil qui plus les aimment
sont plus ensoupeçon, Sax. XXII. Et tous les Heru-
pois que il moult aime et prise, ib. xxm. Homs qui
bien aime est trestoz enragiez, La prise d'Orenge,
36G.
— XIIIC s. Dame, ceaditBerte, et jeles amerai,
Berfe, vu. J'aim miex que elle meure, ib. xi. Elle
amast assez mieux que elle eûst mentit [elle aime-
rait mieux avoir menti], «6.LUI. Il l'amoient[Berte]
de cuer comme bien enseignée, ib. LX. Jà est-ce la
chose du monde Que le miex ains et plus desirre ;
Qar m'i menez, biau très doz sire, Ren. 102U. Seli
cors en prison remeint,Gardés au mains qui li cuers
m'aint, la Rose, 4024..Mes or veilfje veux], por ce
que je t'ains, Estrede toi si bien certains, tb.(979.
Ele [l'envie] fondoit d'ire etardoit, Quant aucuns
qu'ele regardoit, Estoit ou preus, ou biaus,ougens,
Ou amés, ou loés des gens, ib. 290. Et de ceste
vertu descendent deus autres, qui grant mestier
poent avoir à maintenir son estât et à li avancier et
fere amer de Diu et du siècle, BEAUM. 2(. Biau filz,
fist il, je te prie que tu te faces amer au peuple de
ton royaume, JOINV. t93. Or vous demande je, fist-
il, lequel vous ameriez miex, ou que vous feussiez
mesiaus [lépreux],ou que vous eussiez fait un péché
mortel, ID, -I 94.
— xve s. Mieux [j'] aimeroie à mourir, FROISS. I,
I, ii. Qui m'aime, si me suive, ID. II, H, 32. Elle
laissoit le boire et le manger pour aimer par amour,
LOUIS xi, Nouv. LXXXVIII.'
— xvie s. J'ayme mieulx que le sachez par sa con-
fession que par ma parôlle, RAB. Garg.i, 46. Car
vraie amour qui le sien cueur enflame, Plaignoit
celluy qu'au monde plus elle ame, J. MAROT, V,
86. C'est àbon droictque je vous sers et ame,iD. v,
256. Il aime ailleurs, et de luy suishaye, ID.V, 325.
Si quelque ennuy ne vient ramentevoir Le povre
humain d'invoquer Dieu, qui l'ame.... MAROT, H,
266. Toutesfois si les lecteurs aiment mieux d'ouir
un récit des tesmoignages de la loy.... je tas-
cherayde satisfaire à ceci,CALViN, Instil. 327.Frere
bienayïié, MONT, I, 22. Je n'aime ny à conseiller
ny à suyvre une vertu si sauvage, ID. I, 224. Us
ayment mieulx la mort que de relascher.... ID. I,
24<. Les femmes s'aiment lé mieulx où elles ont plus
de tort, ID. II, 84. J'aimeroy bien mieulx régler mes
affaires par le sort des dez que par ces songes, ID.
45. Je m'aijierois mieulx bon escuyer,que bonlogi-
eien,ii). iv,74. Les amants.pour l'affection véhémente
AIN 93
qu'ilz porteraient à leurs aimez, ne les abandonr.e-
roient jamais, AMYOT, Pëlop. 33. H n'est rien si
cruel ne si aimant le sang qu'est un tyran couard,
iv.Artax. 37. Les Lacedemoniens aimaritsmieux que
leurs citoyens fussent obéissants que qu'ils eussent
la présidence sur tous les Grecs, ID. Arist: s. Elles
aiment d'avoir quelque-chose qui donne plus de lus-
tre à leur beauté, LANGUE, 96. M. deChasteaubriant
s'y aimoittant, qu'il y a séjourné, CARL. m,. 5.
— ÉTYM. Provenç. et espagn. amqr; ital. amare;
de amare, aimer. On remarquera que l'ancien fran-
çais conjuguait aimer au singulier du présent de
l'indicatif : J'aim, tu aims, il aint, ou j'am, tu
ams, il ant. Pourtant on trouve aussi la forme
actuelle.
y AIN (in), *. m. Terme de manufacture par lequel
on désigne un certain nombre des fils delà chaîne j
en sorte que les draps employés pour les troupes
étant de ts ains et de 22 ains dans le même lé, ces
derniers sont plus fins, LEGOARANT.
—ÉTYM. D'après M. Legoarant, ain serait provenu
d'une abréviation de centain (Cail 1 et définitive-
ment ain) ou centaine, les toiles se désignant par
les centaines de fils dont la chaîne était composée '
t AINARD (è-nar), s. m. Ganse dont les pêcheurs
se servent pour attacher le bord de leur filet sur une
ralingue qui la borde.
AINE (ê-n'), s. m. Le pli de la cuisse au bas du
ventre. Des taureaux auxquels ils [les bourreaux]
mirent dans l'aine des fers ardents, VOLT. Phil.
v, st.
— HIST. XIIe s. Si le navrunt el aine.... Job, 444.
|! xnie s. N'onc por Adonis n'ot tel paine, Quant li
senglers l'ot mors en l'aine, Dont il morut à grant
hascie, la Rose, t0550.
—ÉTYM. Wallon, ineet ewèx; provenç. mod. len-
gue, pour l'engue; espagn. engle ; ital. inguine ;
d'inguen, aine; sanscr. anji, parties honteuses.
fAINE (ê-n'), s. f. Il IeTechnologie. Petit bâton
qu'on passe dans la tète des harengs destinés à
être fumés. || 2° Aine et demi-aine, pièce de peau
de mouton qui sert à joindre une éclisse et une tê-
tière dans un soufflet d'orgue.
AÎNÉ, ÉE (è-né, née), adj. || 1° Celui des enfants
qui est né le premier. Fils aîné. Fille aînée. Frère
aîné. Soeur aînée. || 2° Lefilsatné de l'Église, qua-
lification donnée autrefois au roi de France. |l 3° La
fille aînée des rois de France, titre que prenait au-
trefois l'Université. || 4° S. m. Fils aîné. C'est là
l'aîné de mes fils. De deux princes jumeaux nous
déclarer l'aîné, CORN. Rodog. 1, 1. Quel intérêt Nous
fait tous deux aînés quand et comme il vous plaît?
ID. ib. iv, 6. Il 5e S. f. Aînée, fille aînée. Il a marié
l'aînée de ses filles. || 6° Frère aîné. Il est jaloux de
son aîné. || 7° Qui est plus âgé qu'un autre. C'est
mon aîné. Respectons nos aînés. |l 8° Aîné de Nor-
mandie, aîné particulièrement avantagé. J'ai vu 54
lettres de cachet dans ma famille, et j'en ai eu i 7 pour
ma part; ainsi, vous voyez que j'ai été partagé eu
aîné de Normandie, MIRABEAO, Collection, t. iv,
p. J06.
— HIST. xm* s. X cinq labiaus de gueule l'ainsnés
fils le porta [porta sonécu], Berte, cxxxi. Li aisnés
ot non Robiers, etli mains né Loeys, Chr. de Rains,
p. 2. En tel point que ses ainsnés.fix n'avoit pas
aage d'entrer en l'ommage de ce que.se [sa] mère
a voit aquesté, BEAUM. XII, to. Tant fust ce que eles
fussent ains nées des premiers mariages, m. xin,
6. Son ainzné frère qui eust mis contredit et cha-
Ionge, s'il faire le peust, Ass. de Jérus. 1, 220.
H -xve s. La roine et son ains-né fils, FROISS. I,
I, 9.
— ÉTYM. L'historique, décomposant le mot, mon-
tre l'étymologie : oins, avant (voy. AINS) et ne':
né avant (voy. NÉ). Espagn. entenado, enfant d'un
premier lit; ital. antenalo, ancêtre. .
AÎNESSE (è-nè-s'), s. f. Priorité d'âge entre
frères et soeurs. Le dernier peut-être d'une famille
nombreuse, ou du moins exclu des droits et des
prérogatives de l'aînesse J vous, vous seriez vu ré-
duit dans le monde à une portion de cadet tou-
jours fort mince dans les maisons les plus anciennes,
MASS. Revenus ecclésiastiques. Et ce vieux droit d'aî-
nesse est parfois si puissant Que pour remplir un
trône il rappelle un absent, CORN. Nie. IV, 3. L'in-
vention des arts étant un droit d'aînesse, Nous de-
vons l'apologue à l'ancienne Grèce, LA FONT. Fab.
ni, -l.
— HIST. xme s. Entre femeles n'a point de en-
neece, Liv. dejusl. 233. Li fiés qui vient as hoirs en
descendant, il y a ainsneece, BEAUM. XIV, 8.
— ÉTYM. Aine. On voit que l'ancienne forme est
ainsneece, et que aînesse est une contraction; par
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