Titre : Dictionnaire de la langue française.... Tome 4 / par É. Littré,...
Auteur : Littré, Émile (1801-1881). Auteur du texte
Éditeur : L. Hachette (Paris)
Date d'édition : 1873-1874
Notice d'ensemble : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb30824717s
Notice d'oeuvre : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb12250808s
Type : monographie imprimée monographie imprimée
Langue : français
Format : 4 vol. ; gr. in-4 4 vol. ; gr. in-4
Description : [Dictionnaire de la langue française (français)] [Dictionnaire de la langue française (français)]
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k54066991
Source : Bibliothèque nationale de France, département Collections numérisées, 2008-57472
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 16/12/2008
4530
REC
— HIST. xiv" s. Par dessus son commandement
TOUS ne devez avoir reculenient, refTus, retarde-
ment ou delay, ilénagier, i, 6. [| xvie s. Ils ne font
point ces cessions et ces reculemens là pour révé-
rence qu'ils portent à la vertu.... AMYOT, Coin,
discern. le fiât. 29. Les reculements de messieurs
de Montmorency et de Brion [reculés, mis à l'écart
par François Ier], MONT, il, l>4. Que les hommes
ne peuvent bien s'accommoder et faire leur proflit
sans le dommage et reculement les uns des autres,
CHARRON, De la Sagesse, i, 41.
— ÊTYM. Reculer.
l. RECULER (re-ku-lé),u. a. || 1° Porter en arrière.
Reculez la table. Reculez cette chaise de la chemi-
née. || 2° Reporter plus loin. 11 faut reculer cette
muraille. || Reculer les bornes, les frontières d'un
État, l'agrandir. Trajan, qui avait rétabli la gloire
du nom romain chez les étrangers, et reculé les
frontières de l'empire par des victoires signalées,
C0ND1L. Étud. hist. m, 3. Et toujours créateur même
alors qu'il imite, De son art étonné recule la li-
mite, MILLEV. lavent, poét. || 3° Écarter, éloigner.
Mais il est des objets que l'art judicieux Doit of-
frir à l'oreille et reculer des yeux, BOIL. Art p. m.
La lumière du jour ....ne renaît que pour éclairer
sa nudité, son impuissance [du voyageur perdu
dans le désert], et pour lui présenter l'horreur de
sa situation en reculant à ses yeux les barrières du
vide, BUFF. Quadrup. t. v, p. 16. ||4° Éloigner quel-
qu'un du but, une affaire de son issue. La disgrâce
de son protecteur l'a bien reculé. Cette indiscrétion
de ma part servirait plutôt à reculer vos affaires
qu'à'les avancer, VOLT. Lelt. d'Argence, 3 sept. i7?o.
|| 5" Ajourner, retarder. Tous mes soins, tous mes
voeux hâtent cette vengeance, Ta perte la recule, et
ton salut l'avance, CORN. Pomp. iv, 4. N'eûl-il [Ho-
race] que d'un moment reculé sa défaite, Rome
eût été du moins un peu plus tard sujette, ID.
Hor. m, 6. C'est un accident qui a fait reculer son
mariage, MOL. Méd. m. lui, u, o. Je crois que la
pension des menins n'a point été retranchée ni
reculée, SÉV. 23 avr. 1690. [Philopoemen] à voir
agir les Romains dans la Macédoine, jugea bien
que la liberté de la Grèce allait expirer, et qu'il ne
lui restait plus qu'à reculer le moment de sa chute,
BOSS. Hist. m, o. Sans reculer plus loin l'effet de
ma parole, Je vous rends dans trois mois au pied
du Capitule, RAC. Milhr. m, l. Lorsque étendu sur
le lit de votre douleur, la mort sera à la porte,
vous la croirez encore loin; vous reculerez encore
l'affaire de votre salut et la proposition qu'on vous
fera, d'appeler un ministre de Jésus-Christ, MASS.
Carême, Impén. fin. || 6° Porter au loin dans le
temps. Ces peuples [les Japonais] ont eu aussi ia
manie de reculer leur origine, DIDER. Opin. desanc.
philos. [Japonais]. || 7° Y. n. Aller en arrière, exé-
cuter la progression en sens inverse de la direction
ordinaire et naturelle. La voiture recula. Ce, cheval
a de la peine à reculer. Reculez un peu pour la troi-
sième [révérence], mL.Bourg. gent. m, 19. || Fig. Les
femmes qui se sentent finir d'avance par la perte de
leurs agréments, voudraient reculer vers la jeunesse,
MONTESQ. Lett. pers. 62. || Terme de marine. On dit
que les vents reculent, lorsque, au lieu de tournerde
gauche à droite, comme lorsqu'ils vont du sud au
nord en passant^ par l'ouest, ils reviennent du nord
au sud en passant de même par l'ouest. || S. m.
Terme de manège. Le reculer, action par laquelle
le cheval se déplace dans un ordre inverse à celui
des mouvements progressifs. |j 8° Il se dit des ar-
mes à feu que l'explosion fait aller en arrière. Un
canon recule par l'effet de la réaction égale à l'ac-
tion. || 9° Se retirer en arrière. Pourrait-on reculer
en combattant sous vous? CORN. Médée, iv, 3. Ah!
coquin!ah! canaille! vous en voulez par là. 1 sou-
tenez, marauds ; soutenez.... comment, vous recu-
lez! MOL. Fourber. n, 9. si je me défends, ce n'est
qu'en reculant, ID. F. sav. iv,- 3. Hé quoi! loin d'ap-
procher, vous reculez tous deux! RAC. Théb. iv, 3. Et
loi, soleil.... Toi qui n'osas du père éclairer lefeslin,
Recule, ils t'ont appris ce funeste chemin, ID. lphig.
v, 4. Le flot qui l'apporta recule épouvanté, ID. Phè-
dre, v, 6. || Il ne recule jamais, on ne l'a jamais
vu reculer, se dit d'un homme très-brave. C'est
Merci avec ses braves Bavarois, enflés de tant de
succès et de la prise de Fribourg ; Merci qu'on ne
vit jamais reculer dans les combats, BOSS. Louis de
Bourbon. || Cela s*, dit aussi de celui qui soutient
son opinioD avec fermeté. |j On dit dans le même
sens : U aimerait mieux se faire hacher en pièces,
que de reculer. ]| 10" Fig. Renoncer, céder, en par-
lant des personnes. J'accepte la proposition, et ne
suis point personne à reculer lorsqu'on m'attaque
REC •
d'amitié, MOL. Fourber. m, 1. Vous reculez,luidis-je
en l'interrompant, vous reculez, mon père: vous
abandonnez le principe général, PASC. Prov. îv.
Poursuis, Néron ; avec de tels ministres Par des faits
glorieux tu te vas signaler ; Poursuis ; tu n'as pas
fait ce pas pour reculer, RAC. Brit. v, 6. U était
dangereux pour vous de reculer, ID. Bajaz. v, 4. ;
C'est un mauvais orgueil de croire qu'on ne peut
avoir tort ; c'est une faiblesse de n'oser reculer,
quand on sent qu'on nous a fait faire une mauvaise
démarche, MASS. Pet. carême, Écueils piél. grands.
Je crois qu'il ne peut plus reculer sur ce point, :
DESTOUCHES, Irrésolu, I, 2. Quand il devrait un peu
m'en coûter [pour le Corneille avec les commentai-
res], je ne reculerai pas, VOLT. Lelt. d'Argental, 28
juill. 1761. Savoir reculer à propos pour gagner
ensuite plus de terrain, D'ALEMB. Éloges,L. Virjus.
|| Reculer pour mieux sauter, temporiser pour
mieux prendre ses avantages. Si je recule, c'est
pour mieux sauter, CÏRANO DE BERG. Pédant joué,
iv, 2. On recule souvent, dit-on, pour mieux sau-
ter, TH. CORN. D. Ces. d'Avalos, n, 1.1| 11 a reculé
pour mieux sauter, il a sacrifié un petit avantage :
présent pour en obtenir plus tard un beaucoup plus
grand. |j Cela se dit aussi quand, après un mauvais
succès, on en obtient un signalé; et, en sens in- ■
verse, quand on évite un petit inconvénient pour
tomber dans un plus grand. || 11° Il se dit des cho-
ses qui ne réussissent pas. Ses affaires reculent
au lieu d'avancer. || 12° Être ajourné. Le baptême de ■
M. le duc de Chartres recule; et je ne puis partir
qu'il ne soit fait, MAINTENON, Lett. à l'abbé Gobelin,
3 sept. (676. || 13° Perdre l'avance qu'on avait. La
civilisation recula dans ce pays sous la domination
des conquérants étrangers. Qui n'avance pas dans
les voies de Dieu recule, MASS. Profess. relig. 2.
Les Espagnols avancent quand nous reculons ; ils
ont fait plus de progrès en deux ans que nous n'en
avons fait en vingt, VOLT. Lett. d'Argental, 6 mai
1768. || 14° Aller plus loin, s'écarter. L'homme a
fait reculer peu à peu les bêles féroces, il a purgé la
terre de ces animaux gigantesques.... BUFF. Anim.
domestiques. || 15° Différer, éviter de faire. On le
presse d'agir, il recule toujours. Il recula devant
une proposition si hardie. || Reculer à, ne pas se
soumettre à, craindre de. Hé bien! oui, puis
qu'il veut te choisir pour juge, je n'y recule point,
MOL. l'Av. iv, 4. Comme je l'avais sur moi, et qu'ap-
paremment je reculais à l'ôter, n'y a-t-il plus rien
à mettre, disais-je, est-ce là tout? MARIVAUX,
Marianne, 3" part. || Il ne recule à rien, il n'est au-
cun travail qu'il n'accepte. Je ne recule à rien,
tout tombe sur mon dos, HAUTEROCHE, Deuil, se. 9.
|| La Fontaine a dit dans ce sens: reculer de. Avant
le coup demandez la cédule: De la donner je ne
crois qu'il recule, LA FONT. Sav. |j II n'y a plus
moyen de reculer, il n'y a plus à reculer, on ne
peut plus échapper, différer. Mes révérends pères,
il n'y à plus moyen de reculer : il faut passer pour
'des calomniateurs convaincus, et recourir à votre
maxime, que cette sorte de calomnie n'est pas un
crime, PASC. Provinc. xv. Comment lui déclarer,
votre mariage? cependant il n'y a plus à reculer,
D'ALLAINVAL, te. des bourg, i, 2. || Reculer trop
loin à, trop différer. Ayant rejeté les yeux sur votre
lettre, j'ai vu qu'elle était datée du 7 courant, et que
ce serait reculer trop loin à vous faire connaître que
je l'ai reçue, CORN. Lett. au P. Boulard, 30 mars
1652. || 16° Se reculer, v. rèjl. Aller en arrière, s'é-
carter. Et pour la décevoir, il use d'une feinte, Se
recule en passant, et se laisse frapper, MAIRET,
If. d'Asdrub. v, l. Les premiers jours, il fallait voir
comme elle se reculait d'auprès de moi, et puis
elle reculait plus doucement, et puis petit à petit
elle ne reculait plus, MARIV. Double inconst. i, 6.
|| 17° Être différé. C'est toujours dans cette vue de
vous plaire que je me conserve et que j'ai soin de
moi, étant très-persuadée que l'heure de ma mort
ne se peut ni avancer, ni reculer, SÉV. 3)8. Le retour
du roi se recule toujours, ID. I™ juillet 1676.
— HIST. xu" s. Cuidiez vos ore qu'alasse recu-
lant? Jenel feroie por l'onor d'Abilant, Licoronemens
Looys, v. 24 38. Plus d'une archiée ont païen reculé,
"Bot. d'Aleschans, v. 6856. || xiu° s. L'en doit bien
reculer pour le plus loin saillir, fierté, xm. Et fist le
flun escluseret reculer contremont, Chr. de Rains,
102. Chascuns Turs de bien faire moult forment se
pena, Dusqu'au chief d'une rue nos François recula,
Ch. d'Ant. vi, 919. Si brisa leur navie [contre une
lie], et périt grand multitude de l'ost, si que il n'en
escliappa que environ xxx mille hommes, qui se
reculèrent [réfugièrent] sur ceste islé, MARC POL,
p. 546. || xive s. Et les étrusques légions n'ont mie
REC
reculé, BERCHEURE, f° 44, recto. || xv* s. Ils ressoi-
gnent et reculent, car ils nesont pas genspourcom-
battre à nous, FROISS. I, I, 121. Ils se reculèrent droil
vers les seigneurs, COMM. I, H. Il [LouisXI] reculla
de luy toutes gens que ilavoit acoustumé, ID. VI, 7
|J xvi' s. Hz reculoient tousjours à mettre la main
à l'oeuvre, AMYOT, Cam. S2. Les ennemis s'espoavan-
terent si fortqu'ilz reculèrent arrière.... il en fît fouir
les uns jusques aux plus reculez quartiers de la
ville, les autres de frayeur se rendirent, ID. Cor. 10.
Hz se retirèrent en reculant pas à pas en arrière,
ID. Pëlop. 69. Il n'y avoit sorte de combat à laquelle
il reculast, ID. Marcel. 2. Toutes choses estaient si
prestes, qu'il ne pouvoit reculer à ce voyage, ID.
Cimon, 34. A mesure que la mémoire leur fournit la
chose entière et présente, ils reculent si arrière que
leur narration..., MONT, I, S4. Le reculer leurestanl
interdict par la foule, ID. II, 38. Nynostre hardiesse,
ny nostre couardisenela peuventadvanceroureculer
[la mort], ID. m, 13{/Ûe cheval qui recule au plus
tost te délivre, COTÔRAVE. Pour néant recule qui.
malheur attend, ID. Qui contre esguillon reculedeux
fois se poind, ID.
— ÊTYM. Re..., et culer; wallon, reskoulé; bour-
guig. requeulai; provenç. etespagn. recular; ital.
rinculare.
f 2. RECULER (re-ku-lé), s. m. Sorte de lime
d'horloger.
RECULONS (À) (re-ku-lon), loc. adv. \] 1° En
allant en arrière. Les cordiers filent à reculons. Le
travail qui s'est fait à reculons [dans un siège]
PELLISSON, Lelt. hist. t. m, p. 332. Les sages quelque-
fois, ainsi que l'écrevisse, Marchant à reculons, tour-
nent le dos au port, LA FONT. Fabl. xu, 10. On n'a pas
la ressource de descendre à reculons, parce que ce
couloir se subdivise en plusieurs endroits et qu'il
faut avoir la tête en avant, pourvoir où l'on s'enfile,
SAUSSURE, Yoy. Alpes, t. i, p. 268, dans POUGENS.
|| Ils sont comme des cordiers, ils gagnent leur vie
à reculons, se dit de gens qui font mal leurs affaires.
|| Fig. et familièrement. Cette affaire marche à re-
culons, au lieu d'avancer vers une solution, elle
s'en éloigne. Le mariage de notre petite Mme de
Rabutin ne va-t-il point à reculons? SÉV. 18 sept.
1676. || 2° Dans une posture où l'on tourne le dos à
la route que l'on suit. On l'a remise dans le même
tombereau [Mme de Erinvilliers] où je l'ai vue,
jetée à reculons sur de la paille, SÉV. 296. Quelque
mal de coeur que me causât le balancement de la
voiture et cette allure à reculons, j'en souffris l'in-
commodité , MARMONTEL, Mém. n.
— HIST. xmc s. Et Ysengrin escout la teste, Et
rechine, etfet lede chiere, A reculons se tretariere,
Ren. 1102. ...Cacus ot emblés Ses bues [lesboeufs
d'Hercule], et les ot assemblés En son recept qui
moult fut Ions, Par les queues à reculons, la Rose,
16784. [L'hippopotame] manjue blés de champ, où
il va à reculons por les agaiz des homes, BRUN, LA-
TINI, Trésor, p. 189. || xvie s. Ce n'est pas merveille
si, à reculons, des enfants aux pères, l'affection
n'est pas si grande, MONT, II, 69. Comme on dict
, d'Epimenides, qu'il devinoit à reculons [les choses
passées], ID. m, 137.
— ÉTYM. Bourguig. ai requélon. À reculons et
l'ancien d genoillons, qui signifiait à genoux, sont
composés l'un de recul, l'autre de genoil, et de la
finale on, au pluriel, pour marquer la réitération.
A califourchon s'écrivait jadis à califourchons.
î RECULTIVER (re-kul-ti-vé), v. a. Cultiver de
nouveau.
— HIST. xvi" s. Recultiver, COTGRAVE.
t RÉCUPÉRATION (ré-ku-pé-ra-sion), s. f.
Action de récupérer.
— HIST. xvie s. Récupération, OUDIN, dict.
— ÉTYM. Ital. recuperazione ; du lat. recupera-
tionem, de recuperare, récupérer.
RÉCUPÉRÉ, ÉE (ré-ku-pé-ré, rée), part, passé
de récupérer. Argent récupéré. .
RÉCUPÉRER (re-ku-pé-ré. La syllabe pé prend
un accent grave quand la syllabe qui suit est
muette: je récupère, excepté au futur et au condi-
tionnel : je récupérerai, récupérerais), v. a. Recou-
vrer. Une peut récupérer ses avances. |j Se récupérer,
v. réfl. Se dédommager. Se récupérer de ses pertes.
|| Absolument. Il parvint à se récupérer.
— ÉTYM. Lat. recuperare, dont l'ancienne langue s
fait recouvrer (voy. ce mot).
f RÉCURAGE (ré-ku-ra-j'), s. m. Action de ré-
curer. Il Chambre où l'on rince les feuilles de fer à
blanchir.
RÉCURÉ, ÉE (ré-ku-ré, rëe),part. passé de récu-
rer. Casseroles récurées.
RÉCURER (ré-ku-ré), v. a. || 1° Nettoyer. Recurez
REC
— HIST. xiv" s. Par dessus son commandement
TOUS ne devez avoir reculenient, refTus, retarde-
ment ou delay, ilénagier, i, 6. [| xvie s. Ils ne font
point ces cessions et ces reculemens là pour révé-
rence qu'ils portent à la vertu.... AMYOT, Coin,
discern. le fiât. 29. Les reculements de messieurs
de Montmorency et de Brion [reculés, mis à l'écart
par François Ier], MONT, il, l>4. Que les hommes
ne peuvent bien s'accommoder et faire leur proflit
sans le dommage et reculement les uns des autres,
CHARRON, De la Sagesse, i, 41.
— ÊTYM. Reculer.
l. RECULER (re-ku-lé),u. a. || 1° Porter en arrière.
Reculez la table. Reculez cette chaise de la chemi-
née. || 2° Reporter plus loin. 11 faut reculer cette
muraille. || Reculer les bornes, les frontières d'un
État, l'agrandir. Trajan, qui avait rétabli la gloire
du nom romain chez les étrangers, et reculé les
frontières de l'empire par des victoires signalées,
C0ND1L. Étud. hist. m, 3. Et toujours créateur même
alors qu'il imite, De son art étonné recule la li-
mite, MILLEV. lavent, poét. || 3° Écarter, éloigner.
Mais il est des objets que l'art judicieux Doit of-
frir à l'oreille et reculer des yeux, BOIL. Art p. m.
La lumière du jour ....ne renaît que pour éclairer
sa nudité, son impuissance [du voyageur perdu
dans le désert], et pour lui présenter l'horreur de
sa situation en reculant à ses yeux les barrières du
vide, BUFF. Quadrup. t. v, p. 16. ||4° Éloigner quel-
qu'un du but, une affaire de son issue. La disgrâce
de son protecteur l'a bien reculé. Cette indiscrétion
de ma part servirait plutôt à reculer vos affaires
qu'à'les avancer, VOLT. Lelt. d'Argence, 3 sept. i7?o.
|| 5" Ajourner, retarder. Tous mes soins, tous mes
voeux hâtent cette vengeance, Ta perte la recule, et
ton salut l'avance, CORN. Pomp. iv, 4. N'eûl-il [Ho-
race] que d'un moment reculé sa défaite, Rome
eût été du moins un peu plus tard sujette, ID.
Hor. m, 6. C'est un accident qui a fait reculer son
mariage, MOL. Méd. m. lui, u, o. Je crois que la
pension des menins n'a point été retranchée ni
reculée, SÉV. 23 avr. 1690. [Philopoemen] à voir
agir les Romains dans la Macédoine, jugea bien
que la liberté de la Grèce allait expirer, et qu'il ne
lui restait plus qu'à reculer le moment de sa chute,
BOSS. Hist. m, o. Sans reculer plus loin l'effet de
ma parole, Je vous rends dans trois mois au pied
du Capitule, RAC. Milhr. m, l. Lorsque étendu sur
le lit de votre douleur, la mort sera à la porte,
vous la croirez encore loin; vous reculerez encore
l'affaire de votre salut et la proposition qu'on vous
fera, d'appeler un ministre de Jésus-Christ, MASS.
Carême, Impén. fin. || 6° Porter au loin dans le
temps. Ces peuples [les Japonais] ont eu aussi ia
manie de reculer leur origine, DIDER. Opin. desanc.
philos. [Japonais]. || 7° Y. n. Aller en arrière, exé-
cuter la progression en sens inverse de la direction
ordinaire et naturelle. La voiture recula. Ce, cheval
a de la peine à reculer. Reculez un peu pour la troi-
sième [révérence], mL.Bourg. gent. m, 19. || Fig. Les
femmes qui se sentent finir d'avance par la perte de
leurs agréments, voudraient reculer vers la jeunesse,
MONTESQ. Lett. pers. 62. || Terme de marine. On dit
que les vents reculent, lorsque, au lieu de tournerde
gauche à droite, comme lorsqu'ils vont du sud au
nord en passant^ par l'ouest, ils reviennent du nord
au sud en passant de même par l'ouest. || S. m.
Terme de manège. Le reculer, action par laquelle
le cheval se déplace dans un ordre inverse à celui
des mouvements progressifs. |j 8° Il se dit des ar-
mes à feu que l'explosion fait aller en arrière. Un
canon recule par l'effet de la réaction égale à l'ac-
tion. || 9° Se retirer en arrière. Pourrait-on reculer
en combattant sous vous? CORN. Médée, iv, 3. Ah!
coquin!ah! canaille! vous en voulez par là. 1 sou-
tenez, marauds ; soutenez.... comment, vous recu-
lez! MOL. Fourber. n, 9. si je me défends, ce n'est
qu'en reculant, ID. F. sav. iv,- 3. Hé quoi! loin d'ap-
procher, vous reculez tous deux! RAC. Théb. iv, 3. Et
loi, soleil.... Toi qui n'osas du père éclairer lefeslin,
Recule, ils t'ont appris ce funeste chemin, ID. lphig.
v, 4. Le flot qui l'apporta recule épouvanté, ID. Phè-
dre, v, 6. || Il ne recule jamais, on ne l'a jamais
vu reculer, se dit d'un homme très-brave. C'est
Merci avec ses braves Bavarois, enflés de tant de
succès et de la prise de Fribourg ; Merci qu'on ne
vit jamais reculer dans les combats, BOSS. Louis de
Bourbon. || Cela s*, dit aussi de celui qui soutient
son opinioD avec fermeté. |j On dit dans le même
sens : U aimerait mieux se faire hacher en pièces,
que de reculer. ]| 10" Fig. Renoncer, céder, en par-
lant des personnes. J'accepte la proposition, et ne
suis point personne à reculer lorsqu'on m'attaque
REC •
d'amitié, MOL. Fourber. m, 1. Vous reculez,luidis-je
en l'interrompant, vous reculez, mon père: vous
abandonnez le principe général, PASC. Prov. îv.
Poursuis, Néron ; avec de tels ministres Par des faits
glorieux tu te vas signaler ; Poursuis ; tu n'as pas
fait ce pas pour reculer, RAC. Brit. v, 6. U était
dangereux pour vous de reculer, ID. Bajaz. v, 4. ;
C'est un mauvais orgueil de croire qu'on ne peut
avoir tort ; c'est une faiblesse de n'oser reculer,
quand on sent qu'on nous a fait faire une mauvaise
démarche, MASS. Pet. carême, Écueils piél. grands.
Je crois qu'il ne peut plus reculer sur ce point, :
DESTOUCHES, Irrésolu, I, 2. Quand il devrait un peu
m'en coûter [pour le Corneille avec les commentai-
res], je ne reculerai pas, VOLT. Lelt. d'Argental, 28
juill. 1761. Savoir reculer à propos pour gagner
ensuite plus de terrain, D'ALEMB. Éloges,L. Virjus.
|| Reculer pour mieux sauter, temporiser pour
mieux prendre ses avantages. Si je recule, c'est
pour mieux sauter, CÏRANO DE BERG. Pédant joué,
iv, 2. On recule souvent, dit-on, pour mieux sau-
ter, TH. CORN. D. Ces. d'Avalos, n, 1.1| 11 a reculé
pour mieux sauter, il a sacrifié un petit avantage :
présent pour en obtenir plus tard un beaucoup plus
grand. |j Cela se dit aussi quand, après un mauvais
succès, on en obtient un signalé; et, en sens in- ■
verse, quand on évite un petit inconvénient pour
tomber dans un plus grand. || 11° Il se dit des cho-
ses qui ne réussissent pas. Ses affaires reculent
au lieu d'avancer. || 12° Être ajourné. Le baptême de ■
M. le duc de Chartres recule; et je ne puis partir
qu'il ne soit fait, MAINTENON, Lett. à l'abbé Gobelin,
3 sept. (676. || 13° Perdre l'avance qu'on avait. La
civilisation recula dans ce pays sous la domination
des conquérants étrangers. Qui n'avance pas dans
les voies de Dieu recule, MASS. Profess. relig. 2.
Les Espagnols avancent quand nous reculons ; ils
ont fait plus de progrès en deux ans que nous n'en
avons fait en vingt, VOLT. Lett. d'Argental, 6 mai
1768. || 14° Aller plus loin, s'écarter. L'homme a
fait reculer peu à peu les bêles féroces, il a purgé la
terre de ces animaux gigantesques.... BUFF. Anim.
domestiques. || 15° Différer, éviter de faire. On le
presse d'agir, il recule toujours. Il recula devant
une proposition si hardie. || Reculer à, ne pas se
soumettre à, craindre de. Hé bien! oui, puis
qu'il veut te choisir pour juge, je n'y recule point,
MOL. l'Av. iv, 4. Comme je l'avais sur moi, et qu'ap-
paremment je reculais à l'ôter, n'y a-t-il plus rien
à mettre, disais-je, est-ce là tout? MARIVAUX,
Marianne, 3" part. || Il ne recule à rien, il n'est au-
cun travail qu'il n'accepte. Je ne recule à rien,
tout tombe sur mon dos, HAUTEROCHE, Deuil, se. 9.
|| La Fontaine a dit dans ce sens: reculer de. Avant
le coup demandez la cédule: De la donner je ne
crois qu'il recule, LA FONT. Sav. |j II n'y a plus
moyen de reculer, il n'y a plus à reculer, on ne
peut plus échapper, différer. Mes révérends pères,
il n'y à plus moyen de reculer : il faut passer pour
'des calomniateurs convaincus, et recourir à votre
maxime, que cette sorte de calomnie n'est pas un
crime, PASC. Provinc. xv. Comment lui déclarer,
votre mariage? cependant il n'y a plus à reculer,
D'ALLAINVAL, te. des bourg, i, 2. || Reculer trop
loin à, trop différer. Ayant rejeté les yeux sur votre
lettre, j'ai vu qu'elle était datée du 7 courant, et que
ce serait reculer trop loin à vous faire connaître que
je l'ai reçue, CORN. Lett. au P. Boulard, 30 mars
1652. || 16° Se reculer, v. rèjl. Aller en arrière, s'é-
carter. Et pour la décevoir, il use d'une feinte, Se
recule en passant, et se laisse frapper, MAIRET,
If. d'Asdrub. v, l. Les premiers jours, il fallait voir
comme elle se reculait d'auprès de moi, et puis
elle reculait plus doucement, et puis petit à petit
elle ne reculait plus, MARIV. Double inconst. i, 6.
|| 17° Être différé. C'est toujours dans cette vue de
vous plaire que je me conserve et que j'ai soin de
moi, étant très-persuadée que l'heure de ma mort
ne se peut ni avancer, ni reculer, SÉV. 3)8. Le retour
du roi se recule toujours, ID. I™ juillet 1676.
— HIST. xu" s. Cuidiez vos ore qu'alasse recu-
lant? Jenel feroie por l'onor d'Abilant, Licoronemens
Looys, v. 24 38. Plus d'une archiée ont païen reculé,
"Bot. d'Aleschans, v. 6856. || xiu° s. L'en doit bien
reculer pour le plus loin saillir, fierté, xm. Et fist le
flun escluseret reculer contremont, Chr. de Rains,
102. Chascuns Turs de bien faire moult forment se
pena, Dusqu'au chief d'une rue nos François recula,
Ch. d'Ant. vi, 919. Si brisa leur navie [contre une
lie], et périt grand multitude de l'ost, si que il n'en
escliappa que environ xxx mille hommes, qui se
reculèrent [réfugièrent] sur ceste islé, MARC POL,
p. 546. || xive s. Et les étrusques légions n'ont mie
REC
reculé, BERCHEURE, f° 44, recto. || xv* s. Ils ressoi-
gnent et reculent, car ils nesont pas genspourcom-
battre à nous, FROISS. I, I, 121. Ils se reculèrent droil
vers les seigneurs, COMM. I, H. Il [LouisXI] reculla
de luy toutes gens que ilavoit acoustumé, ID. VI, 7
|J xvi' s. Hz reculoient tousjours à mettre la main
à l'oeuvre, AMYOT, Cam. S2. Les ennemis s'espoavan-
terent si fortqu'ilz reculèrent arrière.... il en fît fouir
les uns jusques aux plus reculez quartiers de la
ville, les autres de frayeur se rendirent, ID. Cor. 10.
Hz se retirèrent en reculant pas à pas en arrière,
ID. Pëlop. 69. Il n'y avoit sorte de combat à laquelle
il reculast, ID. Marcel. 2. Toutes choses estaient si
prestes, qu'il ne pouvoit reculer à ce voyage, ID.
Cimon, 34. A mesure que la mémoire leur fournit la
chose entière et présente, ils reculent si arrière que
leur narration..., MONT, I, S4. Le reculer leurestanl
interdict par la foule, ID. II, 38. Nynostre hardiesse,
ny nostre couardisenela peuventadvanceroureculer
[la mort], ID. m, 13{/Ûe cheval qui recule au plus
tost te délivre, COTÔRAVE. Pour néant recule qui.
malheur attend, ID. Qui contre esguillon reculedeux
fois se poind, ID.
— ÊTYM. Re..., et culer; wallon, reskoulé; bour-
guig. requeulai; provenç. etespagn. recular; ital.
rinculare.
f 2. RECULER (re-ku-lé), s. m. Sorte de lime
d'horloger.
RECULONS (À) (re-ku-lon), loc. adv. \] 1° En
allant en arrière. Les cordiers filent à reculons. Le
travail qui s'est fait à reculons [dans un siège]
PELLISSON, Lelt. hist. t. m, p. 332. Les sages quelque-
fois, ainsi que l'écrevisse, Marchant à reculons, tour-
nent le dos au port, LA FONT. Fabl. xu, 10. On n'a pas
la ressource de descendre à reculons, parce que ce
couloir se subdivise en plusieurs endroits et qu'il
faut avoir la tête en avant, pourvoir où l'on s'enfile,
SAUSSURE, Yoy. Alpes, t. i, p. 268, dans POUGENS.
|| Ils sont comme des cordiers, ils gagnent leur vie
à reculons, se dit de gens qui font mal leurs affaires.
|| Fig. et familièrement. Cette affaire marche à re-
culons, au lieu d'avancer vers une solution, elle
s'en éloigne. Le mariage de notre petite Mme de
Rabutin ne va-t-il point à reculons? SÉV. 18 sept.
1676. || 2° Dans une posture où l'on tourne le dos à
la route que l'on suit. On l'a remise dans le même
tombereau [Mme de Erinvilliers] où je l'ai vue,
jetée à reculons sur de la paille, SÉV. 296. Quelque
mal de coeur que me causât le balancement de la
voiture et cette allure à reculons, j'en souffris l'in-
commodité , MARMONTEL, Mém. n.
— HIST. xmc s. Et Ysengrin escout la teste, Et
rechine, etfet lede chiere, A reculons se tretariere,
Ren. 1102. ...Cacus ot emblés Ses bues [lesboeufs
d'Hercule], et les ot assemblés En son recept qui
moult fut Ions, Par les queues à reculons, la Rose,
16784. [L'hippopotame] manjue blés de champ, où
il va à reculons por les agaiz des homes, BRUN, LA-
TINI, Trésor, p. 189. || xvie s. Ce n'est pas merveille
si, à reculons, des enfants aux pères, l'affection
n'est pas si grande, MONT, II, 69. Comme on dict
, d'Epimenides, qu'il devinoit à reculons [les choses
passées], ID. m, 137.
— ÉTYM. Bourguig. ai requélon. À reculons et
l'ancien d genoillons, qui signifiait à genoux, sont
composés l'un de recul, l'autre de genoil, et de la
finale on, au pluriel, pour marquer la réitération.
A califourchon s'écrivait jadis à califourchons.
î RECULTIVER (re-kul-ti-vé), v. a. Cultiver de
nouveau.
— HIST. xvi" s. Recultiver, COTGRAVE.
t RÉCUPÉRATION (ré-ku-pé-ra-sion), s. f.
Action de récupérer.
— HIST. xvie s. Récupération, OUDIN, dict.
— ÉTYM. Ital. recuperazione ; du lat. recupera-
tionem, de recuperare, récupérer.
RÉCUPÉRÉ, ÉE (ré-ku-pé-ré, rée), part, passé
de récupérer. Argent récupéré. .
RÉCUPÉRER (re-ku-pé-ré. La syllabe pé prend
un accent grave quand la syllabe qui suit est
muette: je récupère, excepté au futur et au condi-
tionnel : je récupérerai, récupérerais), v. a. Recou-
vrer. Une peut récupérer ses avances. |j Se récupérer,
v. réfl. Se dédommager. Se récupérer de ses pertes.
|| Absolument. Il parvint à se récupérer.
— ÉTYM. Lat. recuperare, dont l'ancienne langue s
fait recouvrer (voy. ce mot).
f RÉCURAGE (ré-ku-ra-j'), s. m. Action de ré-
curer. Il Chambre où l'on rince les feuilles de fer à
blanchir.
RÉCURÉ, ÉE (ré-ku-ré, rëe),part. passé de récu-
rer. Casseroles récurées.
RÉCURER (ré-ku-ré), v. a. || 1° Nettoyer. Recurez
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