GEN
déterminatif. Vous autres fortes têtes, Vous voilà,
TOUS prenez tous les gens pour des bêtes, GRESSET,
Méch. i, 4. |j 7. Si, avec tous, gens n'est pas ac-
compagné de l'article ou de ce qui en tient lieu,
tous se met au féminin, quand même gens aurait
aprî.3 lui une qualification marquée par de Le
chat grippe-fromage, Triste oiseau le hibou, ronge-
maille le rat, Dame belette au long corsage, Toutes
gens d'esprit scélérat, Hantaient le tronc pourri
d'un pin vieux et sauvage, LA FONT. Fabl. vin, 22.
Cependant, en cet emploi, en nuançant autrement
l'idée, on peut mettre tous au masculin: Le maire,
le notaire, les conseillers municipaux, tous gens
bien connus, c'est comme-si l'on disait : tous,
gens bien connus. j| 8. Gens est toujours masculin
quand il désigne une profession, une qualité: gens
de lettres, gens de guerre, gens de cour, etc.
||9. Dans le xvir et le xviir 8 siècle, plusieurs
disaient gens avec un nombre déterminé ; ce qui
d'ailleurs n'était qu'un archaïsme (voy. l'historique).
Mettre des compliments d'amour suivis entre deux
gens qui.... CORN. Veuve, Examen. Il y a là vingt
gens qui sont fort assurés de n'entrer point, MOL.
l'Impromptu, s. Deux gens qui auraient le malheur
d'être sourds, aveugles et muets, DIDER. Lett. sur
les aveugles. Mais Vaugelas, Ménage et Bouhours
se sont accordés pour prononcer que cela ne valait
rien et que c'était une faute de dire : dix gens, six
gens, quatre gens. Cette décision est bonne, malgré
les autorités, attendu que gens est un nom collectif.
Mais on peut dire mille gens, quand on donne au mot
mille un sens indéfini : J'ai vu mille gens sur la place.
Moi, je serais cocu?—Vous voilà bien malade ! Mille
gens le sont bien, sans vous faire bravade, Qui de
mine, de coeur, de biens et de maison, Ne feraient
avec vous nulle comparaison, MOL. ÉC. des f. iv, 8.
On dit dans le même sens un millier de gens : Il y a
un millier de gens qui voudraient être à votre place.
|| 10. Si gens est précédé d'un adjectif, on pourra
très-bien y joindre tel nom de nombre qu'on vou-
dra : dix jeunes gens ; trois vieilles gens ; ces qua-
tre honnêtes gens. || 11. On dit habituellement : ce
sont des.jeunes gens et non de jeunes gens, à
cause que, l'adjectif étant accolé, jeunes gens est
regardé comme un mot unique. Autrefois on disait
souvent (et il n'y aurait aucune faute à le dire en-
core aujourd'hui) : de jeunes gens. Ses travaux et
ses peines [de l'amour] Veulent de jeunes gens,
HALH. il, 4 2. Avint qu'un soir Camille régala De
jeunes gens, LA FONT. Court. Une exactitude qui ne
convient pas à de jeunes gens, SÉV. 433. || 12. Jeunes
gens est toujours masculin.
^- SYN. GENS, PERSONNES. Ce qui distingue ces
deux mots, c'est que gens est toujours un nom col-
)ectif, et personnes, même au pluriel, un nom tou-
jours individuel. Aussi l'on dit vingt personnes,
mais non vingt gens ; et, réciproquement, on dit les
gens de guerre et non les personnes de guerre.
— HIST. xu° s. De près l'enchâssent les gent de
bonne foi, Ronc. p. 4 83. Mais tant enquierent fé-
lon, Losengier et maies gens, Couci, xv. || xm' s. Et
moult i ot gens navrés et mortes, VILLEH. XLIX. En
la terre le conte de Champagne se croisa Garniers li
vesques de Troies.... et maintes autres bonnes gens
dont li livres ne fait mie mention, ID. III. Les gent
de celle terre en pleurèrent forment, Berte, vu.
Que m'est-il avenu? qu'ont ces gens empensé? ib.
xv.-Je suis"des gens le roi cui douce France apent,
ib. ex, Puisqu'ainsi est que [vous] estes des gens à
nostre roy, t&. cxvi. Pour ces trois gens Oui ont pel
de beste afublée, Le dit du buef. Aucunes fois avient
il que deus gens qui sont en mariage se départent
par lor volenté et par le gré d? sainte Eglise, BEAUM.
XVIII, 2). Et borgesiè ne geus de basse main ne
pueple [ne doivent pas estre ensi menés] corne che-
valiers, Âss. de Jèr. i, 24. Le roy d'Ermenie amena
si grant foison de gens d'armes que il ot pooir de
combattre au soudanc du Coyne [d'Iconiumj, JOINV.
212. Ce sont les gens ou monde qui plus honneurent
gens anciennes, ID. 222. ||xv° s. Adonc s'ordonne-
rent-ils moult sagement [les Anglois de Berghes]
....et firent retraire toutes les dames et les femmes
de la ville en l'église et aussi tous les enfans et
les anciennes gens, FROISS. H, II, 242. Toutes gens
dont il avoit l'obéissance, ID. n, n, 4. Là estaient
avec le duc d'Anjou grands gens et nobles, ID. n,
n, 3. Et vinrent les gens d'Eglise à rencontre du
corps, ID. II, II, 67. Si se doit-on grandement esmer-
veiller comment si belles gens d'armes se purent
partir sans bataille, ID. I, I, 03. Nous ne sommes
pas gens pour combattre le roi de France, ID. II, II,
24 2. Seule, sans per, de toutes gens louée, Et de tous
biens entièrement douée. CH D'ORL. Bail. 23. Je ne
GEN
suy pas de ces gens-là A qui fortune plaist et rit, ID.
Rondeau. Les princes venans à l'aage d'homme, la
pluspart des gens taschent à leur complaire, COMM.
Prol. Et pour aller prendre possession dudit pays
estoit allé monseigneur de Chasteauguyon et autres
pour le duc de Bourgogne pour faire gens, ID. V,
2. En ladicte bataille estaient mors huyt mil
hommes du party dudit duc prenans gages de luy
et autres menues gens assez, ID. V, 3. L'entre-
prise sembloit à toutes gens sages et expérimentez,
très dangereuse, ID. VU, 4. Parce que souvent
petits gens en menoient gfand'noise, ID. ib. Ve-
nez-y tost sans nul. estrif, Clercz de pratiques
diligens Qui congnoissez si bien vos gens, VILLON,
Repues franches. \\ XYie s. Les vieilles gens tu rens
fortes et vives : Les jeunes gens tu fais récréatives,
A chasse, à vol, à tournois ententives Et esbats
maints, MAROT, II, 268. Par gens brutaux passés au
gros tamis, ID. V, 353. Exécrable lignée de meschans
gens, CALV. Instit. 286. Il voit les embusches que
font de loin les fines gens pour attraper les simples
en leurs rets, ID. Inst. 306. Ces bonnes gents [hom-
mes d'honneur], MONT, I, 24.^11 ne peut tenir la
bride à ses gents, ID. I, 27. Gehts de pied.... gents
de cheval, ID. I, 48. Un tas de gens, ID. i, 248. Sot-
tes gents, ID. I, 248 [Un roi doit] tenir tousjours au-
près de luy gens de sçavoir et de vertu, AMYOT,
Moral. Épit. p. 4 2. Gens de M. de Roquelaure ; qui
toque l'un toque l'autre [s'est dit de gens qui pren-
nent fait et cause les uns pour les autres], OUDIN,
Curios. fr. Gens de bien sont toujours gracieux,
COTGRAVE. X gens de bien on ne perd rien, m. De
gens de bien vient tout bien, ID. Tant de gens, tant
de guises, ID.
—ÉTYM. Gens est le pluriel de gent ); picard, égeins.
f 2. GENS (jms')> *• f- Mot latin qui se dit en
fait d'histoire romaine, et qui est l'appellation
technique de la réunion des anciennes familles pa-
triciennes qui portaient le même nom et qui
étaient censées issues de la même souche. Une
gens comprenait plusieurs familles. La gens Fabia.
La gens Cornelia. || Au pluriel, on dit les gentes
(prononcez jin-tès').
— ÉTYM. Lat. gens, race, nation (voy. GENT 4).
4. GENT (jan), s. f. \\ i° Au sing. Nation, race,
ô combien lors aura de veuves La gent qui porte
le turban! MALH. m, 4. Car elle avait appris de la
bouche des Parques, Que du haut sang troyen ,
semence des monarques, Descendrait une_ gent in-
vincible aux combats, CARD. DUPERRON, Enéide, i.
De cette gent farouche adoucira les moeurs, SEGRAIS,
Enéide, v. || Cet emploi, dans le style noble, tombe
en désuétude; cela est fâcheux. || 2° Au sing. Le
style familier use aujourd'hui de ce mot pour si-
gnifier race, espèce. Il dit qu'^Enéas et sa gent Ne
valait pas beaucoup d'argent, SCARRON, Virg. vin.
La gent à grègues retroussées [les pages], ID. dans
LE ROUX, Dict. comique. Vive la gent qui fend les
airs ! LA FONT. Fabl. n, s. La gent trotte-menu s'en
vient chercher sa perte, ID. ib. m, 48. Longtemps
entre nos coqs le combat se maintint.... La gent qui
porte crête au spectacle accourut, ID. ib. vu, 4 3.
Ils devraient, ces auteurs, demeurer dans leur
grec, Et se contenter du respect De la gent qui
porte férule; D'un savant traducteur on a beau
faire choix, C'est les traduire en ridicule Que de les
traduire en françois, PERRAULT, Parallèle des an-
ciens et des modernes, à la fin de la préface.
Pour peu qu'ils fussent au fait de ce qui se passe
aujourd'hui chez la gent comique, ils y trouve-
raient bientôt un sens clair, LE SAGE, Diable boit.
chap. 4 6. Contre la gent hypocrite Voyez son malin
courroux, BÉRANG. Ermite. ||Fig. La gent mouton-
nière, ceux qui suivent l'impulsion donnée par les
autres. || 3° Au plur. Le droit des gens, le droit des
nations (ici gens s'écrit toujours sans t); dans le
droit romain, et par suite dans l'ancien droit fran-
çais et dans beaucoup de locutions qui en provien-
nent, il signifie droit naturel, c'est-à-dire les règles
de l'équité naturelle qui sont communes à toutes
les nations. || Aujourd'hui, on entend par droit
des gens le droit de nation à nation, tant le droit
diplomatique positif résultant des traités, ' que le
droit international, ensemble de règles coutumières
ou écrites qui règlent les rapports d'une nation avec
les étrangers en temps de paix ou même en temps
de guerre.
— HIST. xi° s. Ne n'ai tel gent qui la sue [la
sienne] derompe, Ch. de Roi. n. S'il ont grant gent
[des troupes nombreuses], d'ice, signur, cui chaut î
ib. CCXLI. || xir» s. Franc, dit Rolant, bone gent
honorée, Ronc. p. 48. Par le consed de fausse
gent vilaine, Couci, xiv. A vous, amans, plus qu'a
GEN
1861
nule autre gent Est bien raison que ma dolor [je]
complaigne, t"6. xxn. Il départi ses oz [armée] et
renvoia sa gent, Sas. xn. || xmc s. Et par ce qu'il
savent certainement que nule gent n'ont si grant
pooir par mer comme vous avés, VILLEH. XII. Or
vous faites aimer [de] gent letrée et gent laie,'Berte,
vui. Car gent françoise sont de grant.beubancerie,
t'6. LXXII. Mes vers la gent très bien te celé, Et quier
autre achoison [occasion] que celé Qui celé part te
face aler, la Rose, 2399. Si ne croi mie que Dieux
l'ost [l'ôte] D'avec les sainz, ainz l'i a mis, Qu'il a
toz j.ors esté amis 5 sainte Eglise et à gent d'ordre
[moines], RUTEB. 42. || xiv" s. Et voion entre les
homes que ceulz qui sont d'une gent ou d'un lignage
aiment l'un l'autre, ORESME, Elh. 229. ||X.Y°S. Avec
lui moult belle gent d'armes, FROISS. I, I, -H 7.... Si
très tost que [le héraut des Anglais] approcha, ces
Flamands l'enclouirent, et là l'occirent comme folle
gent et de petite connoissance, ID. 11, 11, 207. Ha!
qu'est-ce que de vaillante gent ! l'un en vault mille,
et mille faillis n'en vaillent un bon, Voucic. 11, 20.
Il XVIe s. Bienheureuse est la gent qui n'est point
morte Sans veoir premier vostre ferme unité, MAROT,
H, 84 4. Oeluy qui est terrible, qui transfère les cou-
ronnes et royaumes d'une gent | nation] à autre,
AMYOT, Moral Éptt. p. 4. Pour nous assujettir à
cette gent payenne, GARNIER, Bradant. 1.
— ETYM. Provenç. gent, gen; espagn. portug. et
ital. gewe; du latin gentem, nation, du radical gen,
gin qui est dans gignere, engendrer, genilus, en-
gendré; grec, Y£VSsanscrit, jan.
2 GENT, ENTE (jan, jan-f), adj. Terme du style
archaïque ou du style badin. Gentil, joli. Une gente
demoiselle. Une gente fillette. Ces femmes.... Qui
gentes en habits et sades en façons, RÉGNIER, Sad. ix.
Mesdemoiselles du Vige.in Ont le coeur noble et le
corps gent, VOIT. Poésies OEuvres, t. n, p. 43), dans
POUGENS. Que dit-elle de moi cette gente assassine?
MOL. l'Ét. I, 0.
HIST. xi° s. Ancm [nous] aurons un eschec [bu-
tin] bel et gent, Ch. de Roi. LXXXIX. Je vous durrai
[donnerai] moi 11ers [femmes] gentes et belles, ib.
CCXLVII. Il xu° s. Biaus sire rois, vous m'avez fait
gent don, Ronc. p. 40. Après [il] leur dist une gente
raison, ib. p. 98. Où est belle Aude au gent cors ho-
noré ? ib. p. 4 60. Et ses biaus bras et son cors bel
et gent, Couci, v. Il est biaus et je suis gente; Quant
l'uns à l'autre atalente, Pour quoi nous as despartis ?
Dame de Faiel, dans Couci. \\ xine s. Au manger sist
li rois et sa gente mesnie, Berte, 11. Espousa rois
Pépins Berte la belle et gente, ib. x. Droit vers Pa-
ris [ils] s'en vont, la cité noble et gente, ib. cxxxiv
Li chevaliers fu biaus et gens, la Rose, 4266. || xvs.
Et là venit le comte de Flandre à lui [Charles VI]
qui lui asseoit sur son poing unfaucon pelerinmouk
gent et moult bel, FROISS. 11, n, 164. || xvie s. Vostre
gent corps de moy se part et emble, MAROT, I, 344 .
— ÉTYM. Provenç. ge t, au fém. genla ; anc. es-
pagn. gent ; anc. ital. gente (que le Dictionnaire de
la Crusca dit venir du provençal). Gent ne repré-
sente pas directement gentilis, qui, ayant l'accent
sur ti, a donné gentil ; mais on peut admettre que
le français et le provençal ont reculé l'accent do
gentilis, ont dit gentïlis, et ont fait gent ; c'est
ainsi que mansuetus a fourni l'espagnol manso.
Diez, qui reconnaît cette possibilité, préfère cepen-
dant tirer gent de genitus (ce qui est bon lettre pour
lettre), signifiant celui qui est né, qui est de bonne
naissance, et, par suite, gent, gentil; cela est.ap-
puyé par le féminin provençal genta. Pourtant re-
marquez que, dans l'historique qui remonte haut, on
ne trouve jamais le sens d'engendré et toujours celui
de gentil. L'anglais gentle ne peut venir en preuve
de l'étymologie par gentilis; car gentle ou genleel
proviennent du français. Cet adjectif avait un com-
ptratif gentior, plus gent, et un adverbe gentement.
GENTIANE (jan-si-a-n'), s. f. Genre de plantes
qui croissent surtout dans les montagnes; on y dis-
tingue la gentiane, jaune ou grande gentiane, gen-
tiane, lutea, L.
— HIST. xvie s. De là est venu que la gentiane a
pris son nom de Gentius, roy des Illyriens, PARS, Préf.
— ÉTYM. Lat. gentiana, de Gentius, roi d'Illyrie.
t GENTIANÉES (jan-si-a-née), s. f. pi. Famille de
plantes dicotylédonées, dont la gentiane est le type.
f GENTIANELLE (jan-si-a-nè-I'), s. f. Espèce de
gentiane, dite aussi amarelle, gentiana amarella, L.
— ÉTYM. Diminutif de gentiane.
t GENTIANIN (jan-si-a-nin), s. m. ou GENTIA-
NINE (jan-si-a-ni-n'), s. f. Terme de chimie. Mé-
lange de -divers principes extraits de la racine ae
gentiane.
déterminatif. Vous autres fortes têtes, Vous voilà,
TOUS prenez tous les gens pour des bêtes, GRESSET,
Méch. i, 4. |j 7. Si, avec tous, gens n'est pas ac-
compagné de l'article ou de ce qui en tient lieu,
tous se met au féminin, quand même gens aurait
aprî.3 lui une qualification marquée par de Le
chat grippe-fromage, Triste oiseau le hibou, ronge-
maille le rat, Dame belette au long corsage, Toutes
gens d'esprit scélérat, Hantaient le tronc pourri
d'un pin vieux et sauvage, LA FONT. Fabl. vin, 22.
Cependant, en cet emploi, en nuançant autrement
l'idée, on peut mettre tous au masculin: Le maire,
le notaire, les conseillers municipaux, tous gens
bien connus, c'est comme-si l'on disait : tous,
gens bien connus. j| 8. Gens est toujours masculin
quand il désigne une profession, une qualité: gens
de lettres, gens de guerre, gens de cour, etc.
||9. Dans le xvir et le xviir 8 siècle, plusieurs
disaient gens avec un nombre déterminé ; ce qui
d'ailleurs n'était qu'un archaïsme (voy. l'historique).
Mettre des compliments d'amour suivis entre deux
gens qui.... CORN. Veuve, Examen. Il y a là vingt
gens qui sont fort assurés de n'entrer point, MOL.
l'Impromptu, s. Deux gens qui auraient le malheur
d'être sourds, aveugles et muets, DIDER. Lett. sur
les aveugles. Mais Vaugelas, Ménage et Bouhours
se sont accordés pour prononcer que cela ne valait
rien et que c'était une faute de dire : dix gens, six
gens, quatre gens. Cette décision est bonne, malgré
les autorités, attendu que gens est un nom collectif.
Mais on peut dire mille gens, quand on donne au mot
mille un sens indéfini : J'ai vu mille gens sur la place.
Moi, je serais cocu?—Vous voilà bien malade ! Mille
gens le sont bien, sans vous faire bravade, Qui de
mine, de coeur, de biens et de maison, Ne feraient
avec vous nulle comparaison, MOL. ÉC. des f. iv, 8.
On dit dans le même sens un millier de gens : Il y a
un millier de gens qui voudraient être à votre place.
|| 10. Si gens est précédé d'un adjectif, on pourra
très-bien y joindre tel nom de nombre qu'on vou-
dra : dix jeunes gens ; trois vieilles gens ; ces qua-
tre honnêtes gens. || 11. On dit habituellement : ce
sont des.jeunes gens et non de jeunes gens, à
cause que, l'adjectif étant accolé, jeunes gens est
regardé comme un mot unique. Autrefois on disait
souvent (et il n'y aurait aucune faute à le dire en-
core aujourd'hui) : de jeunes gens. Ses travaux et
ses peines [de l'amour] Veulent de jeunes gens,
HALH. il, 4 2. Avint qu'un soir Camille régala De
jeunes gens, LA FONT. Court. Une exactitude qui ne
convient pas à de jeunes gens, SÉV. 433. || 12. Jeunes
gens est toujours masculin.
^- SYN. GENS, PERSONNES. Ce qui distingue ces
deux mots, c'est que gens est toujours un nom col-
)ectif, et personnes, même au pluriel, un nom tou-
jours individuel. Aussi l'on dit vingt personnes,
mais non vingt gens ; et, réciproquement, on dit les
gens de guerre et non les personnes de guerre.
— HIST. xu° s. De près l'enchâssent les gent de
bonne foi, Ronc. p. 4 83. Mais tant enquierent fé-
lon, Losengier et maies gens, Couci, xv. || xm' s. Et
moult i ot gens navrés et mortes, VILLEH. XLIX. En
la terre le conte de Champagne se croisa Garniers li
vesques de Troies.... et maintes autres bonnes gens
dont li livres ne fait mie mention, ID. III. Les gent
de celle terre en pleurèrent forment, Berte, vu.
Que m'est-il avenu? qu'ont ces gens empensé? ib.
xv.-Je suis"des gens le roi cui douce France apent,
ib. ex, Puisqu'ainsi est que [vous] estes des gens à
nostre roy, t&. cxvi. Pour ces trois gens Oui ont pel
de beste afublée, Le dit du buef. Aucunes fois avient
il que deus gens qui sont en mariage se départent
par lor volenté et par le gré d? sainte Eglise, BEAUM.
XVIII, 2). Et borgesiè ne geus de basse main ne
pueple [ne doivent pas estre ensi menés] corne che-
valiers, Âss. de Jèr. i, 24. Le roy d'Ermenie amena
si grant foison de gens d'armes que il ot pooir de
combattre au soudanc du Coyne [d'Iconiumj, JOINV.
212. Ce sont les gens ou monde qui plus honneurent
gens anciennes, ID. 222. ||xv° s. Adonc s'ordonne-
rent-ils moult sagement [les Anglois de Berghes]
....et firent retraire toutes les dames et les femmes
de la ville en l'église et aussi tous les enfans et
les anciennes gens, FROISS. H, II, 242. Toutes gens
dont il avoit l'obéissance, ID. n, n, 4. Là estaient
avec le duc d'Anjou grands gens et nobles, ID. n,
n, 3. Et vinrent les gens d'Eglise à rencontre du
corps, ID. II, II, 67. Si se doit-on grandement esmer-
veiller comment si belles gens d'armes se purent
partir sans bataille, ID. I, I, 03. Nous ne sommes
pas gens pour combattre le roi de France, ID. II, II,
24 2. Seule, sans per, de toutes gens louée, Et de tous
biens entièrement douée. CH D'ORL. Bail. 23. Je ne
GEN
suy pas de ces gens-là A qui fortune plaist et rit, ID.
Rondeau. Les princes venans à l'aage d'homme, la
pluspart des gens taschent à leur complaire, COMM.
Prol. Et pour aller prendre possession dudit pays
estoit allé monseigneur de Chasteauguyon et autres
pour le duc de Bourgogne pour faire gens, ID. V,
2. En ladicte bataille estaient mors huyt mil
hommes du party dudit duc prenans gages de luy
et autres menues gens assez, ID. V, 3. L'entre-
prise sembloit à toutes gens sages et expérimentez,
très dangereuse, ID. VU, 4. Parce que souvent
petits gens en menoient gfand'noise, ID. ib. Ve-
nez-y tost sans nul. estrif, Clercz de pratiques
diligens Qui congnoissez si bien vos gens, VILLON,
Repues franches. \\ XYie s. Les vieilles gens tu rens
fortes et vives : Les jeunes gens tu fais récréatives,
A chasse, à vol, à tournois ententives Et esbats
maints, MAROT, II, 268. Par gens brutaux passés au
gros tamis, ID. V, 353. Exécrable lignée de meschans
gens, CALV. Instit. 286. Il voit les embusches que
font de loin les fines gens pour attraper les simples
en leurs rets, ID. Inst. 306. Ces bonnes gents [hom-
mes d'honneur], MONT, I, 24.^11 ne peut tenir la
bride à ses gents, ID. I, 27. Gehts de pied.... gents
de cheval, ID. I, 48. Un tas de gens, ID. i, 248. Sot-
tes gents, ID. I, 248 [Un roi doit] tenir tousjours au-
près de luy gens de sçavoir et de vertu, AMYOT,
Moral. Épit. p. 4 2. Gens de M. de Roquelaure ; qui
toque l'un toque l'autre [s'est dit de gens qui pren-
nent fait et cause les uns pour les autres], OUDIN,
Curios. fr. Gens de bien sont toujours gracieux,
COTGRAVE. X gens de bien on ne perd rien, m. De
gens de bien vient tout bien, ID. Tant de gens, tant
de guises, ID.
—ÉTYM. Gens est le pluriel de gent ); picard, égeins.
f 2. GENS (jms')> *• f- Mot latin qui se dit en
fait d'histoire romaine, et qui est l'appellation
technique de la réunion des anciennes familles pa-
triciennes qui portaient le même nom et qui
étaient censées issues de la même souche. Une
gens comprenait plusieurs familles. La gens Fabia.
La gens Cornelia. || Au pluriel, on dit les gentes
(prononcez jin-tès').
— ÉTYM. Lat. gens, race, nation (voy. GENT 4).
4. GENT (jan), s. f. \\ i° Au sing. Nation, race,
ô combien lors aura de veuves La gent qui porte
le turban! MALH. m, 4. Car elle avait appris de la
bouche des Parques, Que du haut sang troyen ,
semence des monarques, Descendrait une_ gent in-
vincible aux combats, CARD. DUPERRON, Enéide, i.
De cette gent farouche adoucira les moeurs, SEGRAIS,
Enéide, v. || Cet emploi, dans le style noble, tombe
en désuétude; cela est fâcheux. || 2° Au sing. Le
style familier use aujourd'hui de ce mot pour si-
gnifier race, espèce. Il dit qu'^Enéas et sa gent Ne
valait pas beaucoup d'argent, SCARRON, Virg. vin.
La gent à grègues retroussées [les pages], ID. dans
LE ROUX, Dict. comique. Vive la gent qui fend les
airs ! LA FONT. Fabl. n, s. La gent trotte-menu s'en
vient chercher sa perte, ID. ib. m, 48. Longtemps
entre nos coqs le combat se maintint.... La gent qui
porte crête au spectacle accourut, ID. ib. vu, 4 3.
Ils devraient, ces auteurs, demeurer dans leur
grec, Et se contenter du respect De la gent qui
porte férule; D'un savant traducteur on a beau
faire choix, C'est les traduire en ridicule Que de les
traduire en françois, PERRAULT, Parallèle des an-
ciens et des modernes, à la fin de la préface.
Pour peu qu'ils fussent au fait de ce qui se passe
aujourd'hui chez la gent comique, ils y trouve-
raient bientôt un sens clair, LE SAGE, Diable boit.
chap. 4 6. Contre la gent hypocrite Voyez son malin
courroux, BÉRANG. Ermite. ||Fig. La gent mouton-
nière, ceux qui suivent l'impulsion donnée par les
autres. || 3° Au plur. Le droit des gens, le droit des
nations (ici gens s'écrit toujours sans t); dans le
droit romain, et par suite dans l'ancien droit fran-
çais et dans beaucoup de locutions qui en provien-
nent, il signifie droit naturel, c'est-à-dire les règles
de l'équité naturelle qui sont communes à toutes
les nations. || Aujourd'hui, on entend par droit
des gens le droit de nation à nation, tant le droit
diplomatique positif résultant des traités, ' que le
droit international, ensemble de règles coutumières
ou écrites qui règlent les rapports d'une nation avec
les étrangers en temps de paix ou même en temps
de guerre.
— HIST. xi° s. Ne n'ai tel gent qui la sue [la
sienne] derompe, Ch. de Roi. n. S'il ont grant gent
[des troupes nombreuses], d'ice, signur, cui chaut î
ib. CCXLI. || xir» s. Franc, dit Rolant, bone gent
honorée, Ronc. p. 48. Par le consed de fausse
gent vilaine, Couci, xiv. A vous, amans, plus qu'a
GEN
1861
nule autre gent Est bien raison que ma dolor [je]
complaigne, t"6. xxn. Il départi ses oz [armée] et
renvoia sa gent, Sas. xn. || xmc s. Et par ce qu'il
savent certainement que nule gent n'ont si grant
pooir par mer comme vous avés, VILLEH. XII. Or
vous faites aimer [de] gent letrée et gent laie,'Berte,
vui. Car gent françoise sont de grant.beubancerie,
t'6. LXXII. Mes vers la gent très bien te celé, Et quier
autre achoison [occasion] que celé Qui celé part te
face aler, la Rose, 2399. Si ne croi mie que Dieux
l'ost [l'ôte] D'avec les sainz, ainz l'i a mis, Qu'il a
toz j.ors esté amis 5 sainte Eglise et à gent d'ordre
[moines], RUTEB. 42. || xiv" s. Et voion entre les
homes que ceulz qui sont d'une gent ou d'un lignage
aiment l'un l'autre, ORESME, Elh. 229. ||X.Y°S. Avec
lui moult belle gent d'armes, FROISS. I, I, -H 7.... Si
très tost que [le héraut des Anglais] approcha, ces
Flamands l'enclouirent, et là l'occirent comme folle
gent et de petite connoissance, ID. 11, 11, 207. Ha!
qu'est-ce que de vaillante gent ! l'un en vault mille,
et mille faillis n'en vaillent un bon, Voucic. 11, 20.
Il XVIe s. Bienheureuse est la gent qui n'est point
morte Sans veoir premier vostre ferme unité, MAROT,
H, 84 4. Oeluy qui est terrible, qui transfère les cou-
ronnes et royaumes d'une gent | nation] à autre,
AMYOT, Moral Éptt. p. 4. Pour nous assujettir à
cette gent payenne, GARNIER, Bradant. 1.
— ETYM. Provenç. gent, gen; espagn. portug. et
ital. gewe; du latin gentem, nation, du radical gen,
gin qui est dans gignere, engendrer, genilus, en-
gendré; grec, Y£VS
2 GENT, ENTE (jan, jan-f), adj. Terme du style
archaïque ou du style badin. Gentil, joli. Une gente
demoiselle. Une gente fillette. Ces femmes.... Qui
gentes en habits et sades en façons, RÉGNIER, Sad. ix.
Mesdemoiselles du Vige.in Ont le coeur noble et le
corps gent, VOIT. Poésies OEuvres, t. n, p. 43), dans
POUGENS. Que dit-elle de moi cette gente assassine?
MOL. l'Ét. I, 0.
HIST. xi° s. Ancm [nous] aurons un eschec [bu-
tin] bel et gent, Ch. de Roi. LXXXIX. Je vous durrai
[donnerai] moi 11ers [femmes] gentes et belles, ib.
CCXLVII. Il xu° s. Biaus sire rois, vous m'avez fait
gent don, Ronc. p. 40. Après [il] leur dist une gente
raison, ib. p. 98. Où est belle Aude au gent cors ho-
noré ? ib. p. 4 60. Et ses biaus bras et son cors bel
et gent, Couci, v. Il est biaus et je suis gente; Quant
l'uns à l'autre atalente, Pour quoi nous as despartis ?
Dame de Faiel, dans Couci. \\ xine s. Au manger sist
li rois et sa gente mesnie, Berte, 11. Espousa rois
Pépins Berte la belle et gente, ib. x. Droit vers Pa-
ris [ils] s'en vont, la cité noble et gente, ib. cxxxiv
Li chevaliers fu biaus et gens, la Rose, 4266. || xvs.
Et là venit le comte de Flandre à lui [Charles VI]
qui lui asseoit sur son poing unfaucon pelerinmouk
gent et moult bel, FROISS. 11, n, 164. || xvie s. Vostre
gent corps de moy se part et emble, MAROT, I, 344 .
— ÉTYM. Provenç. ge t, au fém. genla ; anc. es-
pagn. gent ; anc. ital. gente (que le Dictionnaire de
la Crusca dit venir du provençal). Gent ne repré-
sente pas directement gentilis, qui, ayant l'accent
sur ti, a donné gentil ; mais on peut admettre que
le français et le provençal ont reculé l'accent do
gentilis, ont dit gentïlis, et ont fait gent ; c'est
ainsi que mansuetus a fourni l'espagnol manso.
Diez, qui reconnaît cette possibilité, préfère cepen-
dant tirer gent de genitus (ce qui est bon lettre pour
lettre), signifiant celui qui est né, qui est de bonne
naissance, et, par suite, gent, gentil; cela est.ap-
puyé par le féminin provençal genta. Pourtant re-
marquez que, dans l'historique qui remonte haut, on
ne trouve jamais le sens d'engendré et toujours celui
de gentil. L'anglais gentle ne peut venir en preuve
de l'étymologie par gentilis; car gentle ou genleel
proviennent du français. Cet adjectif avait un com-
ptratif gentior, plus gent, et un adverbe gentement.
GENTIANE (jan-si-a-n'), s. f. Genre de plantes
qui croissent surtout dans les montagnes; on y dis-
tingue la gentiane, jaune ou grande gentiane, gen-
tiane, lutea, L.
— HIST. xvie s. De là est venu que la gentiane a
pris son nom de Gentius, roy des Illyriens, PARS, Préf.
— ÉTYM. Lat. gentiana, de Gentius, roi d'Illyrie.
t GENTIANÉES (jan-si-a-née), s. f. pi. Famille de
plantes dicotylédonées, dont la gentiane est le type.
f GENTIANELLE (jan-si-a-nè-I'), s. f. Espèce de
gentiane, dite aussi amarelle, gentiana amarella, L.
— ÉTYM. Diminutif de gentiane.
t GENTIANIN (jan-si-a-nin), s. m. ou GENTIA-
NINE (jan-si-a-ni-n'), s. f. Terme de chimie. Mé-
lange de -divers principes extraits de la racine ae
gentiane.
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