1068
DÉP
dans les plaisirs. || Proverbe. Journée gagnée,
journée dépensée, se dit de ceux qui n'épargnent rien,
qui dépensent l'argent à mesure qu'ils le gagnent.
DÉPENSER (dé-pan-ser), v. a. || 1° Employer de
l'argent à quelque chose. 11 ne dépense pas un sou
mal à propos. || Absolument. Je n'aime pas à dépen-
ser. Il n'y a qu'à dépenser; les richesses nous vien-
nent comme un torrent, TÉvi.Dial. desmortsanc. 42,
Pompée, César. Il ne faut point de bourse à qui
veut dépenser, REGNARD, Vendanges, 4. || Il ne dé-
pense guère en espions, se dit d'un homme qui
n'est pas informé des choses qu'il lui serait impor-
tant de découvrir. ||-Fig. La mémoire du temps passé
Que j'ai follement dépensé, RÉGNIER, Stances relig.
Pour dépenser sa vie en peu d'instants.... Dans un
grenier qu'on est bien à vingt ans ! BËRANG. Gren.
Jeunesse aux jours dorés, je t'ai donc dépensée,
v. HUGO, F. d'aut. 36. || 2° Se dépenser, v. réfl.
Etre dépensé. L'argent se dépense vite en voyage.
|| Proverbe. Autant dépense chiche que large; quand
on se met en frais, il n'en coûte pas plus de bien
faire les choses que de les faire mal.
— REM. Vaugelas dit que de son temps dépendre
(voy. DÉPENDRE 3) et dépenser sont usités, mais que
dépendre se dit plus à la cour, et dépenser à la ville.
Ménage et Th. Corneille constatent que dépendre
est tombé en désuétude. Quant à Malherbe, voici
ce que Racan rapporte dans sa Vie de Malherbe:
«Un jour M. de Bellegarde, qui était, comme l'on
sait, Gascon, lui [à Malherbe] envoya demander le-
quel était le mieux dit de dépensé ou dépendu; il
répondit sur-le-champ que dépensé était plus fran-
çais, mais que pendit, dépendu, rependu, et tous
les.composés de ce vilain mot qui lui vinrent en la
bouche, étaient plus propres pour les Gascons. »
— HIST. XVe s. Et tous despensant si largement
qu'il sembloit queargent leurplust des nues, FROISS.
1, î, 66. || xvi" s. Ils m'empeschoient de dormir, me
despensoient en fauconniers et en hongres.... D'AUB.
Foen. î, 6.
— ÊTYM. Dépense ; provenç. despensar; anc. es-
pagn. despesar.
DÉPENSIER, 1ÈRE (dé-pan-sié, siê-r'), adj.
|| i° Qui ainie la dépense, qui dépense excessive-
ment. Vous êtes dépensière, MOL. Tart. I, 4. Il y a
une autre sorte de curiosité qui est une curiosité
dépensière : on ne saurait avoir trop de raretés,
trop de bijoux, trop de pierreries.... BOSS. Concupisc.
8.' Il était extrêmement dépensier, surtout quand il
s'agissait de ses plaisirs, MARIVAÏÏX, Paysan pan.
l" part. p. 30, dans POUGENS. || Substantivement.
C'est un grand dépensier. C'est une dépensière.
|| 2° S. f. Dépensière, la religieuse qui, dans un
couvent de femmes, a soin de la cave et de toute
la dépense. || 3° S. m. Celui qui, dans une commu-
nauté, dans un établissement public, est chargé de
la dépense. || Le dépensier d'un vaisseau, celui qui
distribue les vivres, aujourd'hui cambusier. || Dans
les lycées, homme chargé de faire les achats pour
la cuisine sous la surveillance de l'économe.
— HIST. xne s. Les napes metent sergant et des-
pencier; Au dois [dais, table] s'asient li vaillant
chevalier, Raoul de C. 76. Ceste meslée fust jà ven-
due chier, Quant là acorent sergant et despencier,
ib. 4 00. || xvie s. Ayant espousé une femme jeune et
despensiere, AMYOT, Pe'ri'c. 68. Les despensiers em-
boufls de bonbance, RONS. 94). Les bourdons ou
frelons sont au reste grands despensiers, devorans
le miel, o. DE SERRES, 445. Plusieurs mesprisent ce
mesnage, comme fantasque, pénible, despensier
[coûteux], ID. 460. Une humeur vaine et despen-
siere, MONT, m, 290. Despensiers et fille de cham-
bre ont bien volontiers grand langue, LEROUX DE
LINCY, Prou., t. il, p. <65. Despensiers et marmitons
sont souvent grands compaignons, ID. ib.
— ÉTYM. Lat. dispensare, qui signifie adminis-
trer et partager de l'argent, et qui est du même ra-
dical que dependere, d'où dépense; provenç. despe-
cier, despessier, despenser; anc. catal. despensier,
despenser , dispenser ; espagn. despensero ; ital.
dispen-siere. Dans l'ancien français, despensier si-
gnifiait celui qui administre la dépense d'une mai-
son; avec le sens de celui qui dépense, on disait
despendere, despendeor.
t DÉPENSIF, IVE (dé-pan-sif, si-v'), adj. Qui
cause de la dépense, coûteux.
— HIST. xvie s. Ceux-ci [sont en servage] de l'y-
vrongnerie, ceux-là d'une ambition et magnificence
sotte et depensive, LA BOETIE, 4 4 6.
— ÉTYM. Dépenser.
DÉPERDITION (dé-pèr-di-sion; en vers, de cinq
syllabes), s. f. || i° Perte qui se fait graduellement.
La déperdition de la chaleur. || Terme de chimie.
DÉP
On dit qu'il y a déperdition, lorsque, dans une opé-
ration, on ne retire pas toute la substance qu'on
avait mise. || Terme de botanique. Déperdition in-
sensible, nom donné à une partie de la transpira-
tion des plantes, laquelle, beaucoup plus lente que
l'exhalation aqueuse , se fait au travers de leurs
tissus sans pores apparents. || 2° Perte, diminution.
C'est un fait bien constaté que les étoiles de dixième,
de onzième grandeur, et même au-dessous, ont été
vues au travers de la partie centrale des comètes,
sans déperdition sensible de leur éclat, BABINET,
dans Presse scientifique, t. i, p. 4 34. || Terme de
chirurgie. Déperdition de substance, plaie avec
destruction des tissus lésés.
— HIST. xvie s. Fracture du crâne avec déperdi-
tion ou enleveure, en laquelle la pièce est empor-
tée, dont il y a perdition de substance, PARÉ, VIII, 4.
— ÉTYM. Anc. français, deperdre, du latin deper-
dere, de la préposition de, et perdere, perdre; pro-
venç. deperdicio ; espagn. desperdicion.
DÉPÉRI, IE (dé-pé-ri, rie), part, passé de dépérir.
Qui a perdu la plus grande partie de ses forces. Ses
brebis, de langueur sèches et dépéries, X la merci
des loups erraient par les prairies, SEGRAIS, Athys,
i. Croissy prit congé du roi de Suède qu'il laissa
au milieu des ruines de Stralsund avec une garni-
son dépérie des deux tiers, VOLT. Ch. XII, 8.
DÉPÉRQt (dé-pé-rir), v. n. || 1° Périr peu à peu,
s'affaiblir graduellement. Sa santé dépérit tous les
jours. La nôtre [armée] était fort dépérie depuis la
dernière victoire, VOIT. Lett. 74. Elle va toujours
en dépérissant, BOSS. in, Paq. 3. Je sens de jour
en jour dépérir mon génie, BOIL. Ëpîtr. vm. On en
voit quelquefois [des enfants] qui dépérissent d'une
langueur secrète, parce que d'autres sont plus ai-
més et plus caressés qu'eux, FËN. Éduc. des filles,
ch. 6. Il sèche et dépérit au milieu de son abon-
dance, MASS. Pet. car. Tent. Pendant que la métro-
pole dépérissait, il n'était pas possible que les colo-
nies prospérassent, RATNAL, Hist. phil.ym, 34. Ses
jours [de Démodocus] dépérissaient, il marchait à
grands pas vers le tombeau, CHATEAUB. Mart. il,
2)6. L'État n'a point dépéri, Je reviens gras et fleuri,
BÉRANO. Ventru. || 2° Terme de jurisprudence. Les
preuves dépérissent par la longueur du temps, c'est-
à-dire se perdent à mesure que les témoins dispa-
raissent. || Ces créances dépérissent, elles deviennent
difficiles à recouvrer. || 3° Se détériorer, se déla-
brer, tomber en ruine. Ces meubles, ces monuments
dépérissent.
—REM. Dépérir se conjugue avec l'auxiliaire avoir,
quand on veut marquer mieux la manière en tant
qu'elle a été continue ou successive : il a dépéri
rapidement; avec l'auxiliaire être, quand on vect
marquer l'état ou résultat final, complet : l'agricul-
ture est dépérie.
— HIST. xvie s. Les choses mal acquises dépéris-
sent, RAB. Pant. m, 4. Pour chasser les connins
[lapins] desperissans la vigne, brouttans les pre-
miers de ses rameaux, o. DE SERRES, 4 98.
— ÉTYM. Provenç. dépérir; du latin deperire, de
la préposition de, et perire, périr.
DÉPÉRISSEMENT (dé-pé-ri-se-man), s.m. || i° État
de ce qui dépérit ou de ce qui est dépéri. De peur
qu'il ne tombe dans le dépérissement, PASC. Préf.
Vide. Il apprendrait par ce moyen les accroissements
et les dépérissements de ses peuples et ce qui les
cause, VAUB. Dîme, p. 482. Comme ce dépérisse-
ment [du corps] est une suite de mon âge de soixante-
quatre ans, de longs travaux dont ma pauvre tête
est fatiguée.... D'ALEMB. Lett. au roi de Prusse,
29 juin 4 784. Le dépérissement d'esprit et dé corps
qu'entraîne le chagrin joint à la vieillesse, CONDOR-
CET, Bourdelin. Ceux qui sont préposés à la con-
servation des bois se plaignent eux-mêmes de leur
dépérissement, BUFF. Expér. sur les végét. 2e Mém.
Hiéroclès, aux yeux de la foule, paraissait encore
tout-puissant; mais un oeil exercé voyait en lui des
signes de dépérissement et de décadence, CHATEAUB.
Mart. il, 255. || 2° Terme de jurisprudence. Le dé-
périssement des preuves, l'affaiblissement qu'elfes
reçoivent par la perte de ce qui peut les constater.
|| 3° Délabrement, détérioration. Il ordonne, pour
éviter ce désordre ou dépérissement, que l'aîné
aura seul la maison, PATRU, Plaidoyer 42, dans
RICHELET.
— ÉTYM. Dépérir. On a dit, au xvi" siècle, depe-
rition : Que durant le siège des autres [places]
l'admirai s'advanceroit vers les estrangers, et les
recevroit sans peine quand les forces seraient en de-
perition, D'AUB. Hist. i, 4 57.
f DÉPERSÉCUTER (dé-pér-sé-ku-té), v. a. Cesser
de persécuter. Peut-être y aura-t-il enfin des âmes
DEP
raisonnables qui rougiront de cet exemple de bar-
barie au xvme siècle, et qui tâcheront d'effacer cette
flétrissure en faisant dépersécuter le compagnon df
cet infortuné, VOLT, dans LAVEAUX.
— ÉTYM. Dé.... préfixe, et persécuter.
f DÉPERSUADER (dé-pér-su-a-dé) , v. a. Ôter
une persuasion. Depuis cette rare crédulité de-Mon-
seigneur dont Mme la duchesse de Bourgogne l'a-
vait dépersuadé, je n'avais osé me commettre à
Meudon, ST-SIM. 294, 24 7. Avant de le déclarer in-
nocent, il faut que je le croie; et je crois si décidé-
ment le contraire que vous aurez peine à me dé-
persuader, 3. J.ROUSSJ. àd'Ivernois,20juill. 4765.
— ÉTYM. Dé.... préfixe, et persuader.
DÉPÊTRÉ, ÉE (dé-pê-tré, trée), part, passé. Dé-
barrassé d'entraves. Un cheval dépêtré. || Fig. Rus-
tic voudrait être dépêtré d'elle, LA FONT. Diable.
DÉPÊTRER (dé-pê-tré), v. a. || i° Débarrasser les
pieds d'une entrave. Dépêtrer un boeuf. || 2" Fig. Dé-
livrer. Nous faisons nos efforts pour le dépêtrer d'un
engagement si dangereux, SÉV. 36. || 3° Se dépêtrer,
«. réfl. Se tirer hors. Se dépêtrer d'un bourbier.
|| Fig. Se débarrasser. Moi pour m'en dépêtrer, je
lui dis tout exprès: Je vous baise tes mains.... RÉ-
GNIER, Sat. VIII. La pauvreté est si gluante qu'on
ne s'en saurait dépêtrer, D'ABLANCOURT, Lucien,
dans RICHELET. Je ne me puis dépêtrer de cet homme,
LA FONT. Coc. Plus vous raisonnerez, plus vous pes-
terez contre cette jeune veuve, plus je croirai que
vous aurez de peine à vous dépêtrer d'elle, BRUEYS,
Muet, i, 4.
— HIST. xvi« s. Ainsi Hannibal s'estant à la fin
despestrè de Marcellus, et ayant son armée délivre....
AMYOT, Marcell. 44. Estans bien aises quand ilz se
pouvoient despestrer de leurs autres affaires pour
s'y en aller, ID. Lucull. 83. Prenons de bonne heure
congé de la compaignie; despestrons-nous de ces vio-
lentes prinses qui nous engagent ailleurs et esloin-
gnentde nous, MONT, i, 279. Il sent avoir du mal, et
vouldroit enestredepestré ; mais de ce mal pourtant,
son coeur n'en est pas abbattu etaffoibli, ID. H, 241.
— ÉTYM. Dé.... préfixe, et pestrer, qui tient au
bas-latin pastorium, entrave qu'on met au cheval
(comparez EMPÊTRER); ital. spastojare. L'étymolo-
giedede, et petra, hors de la pierre, ne peut se sou-
tenir, soit à cause de l's (de pestrer), soit à cause du
sens. L'italien spastojare, formé régulièrement de
pastorium, indique, comme le sens, que depestrer
est du même radical ; mais il faut supposer une forme
anomale pastrium au lieu de pastorium. Pasto-
rium vient de pastor, pasteur, et signifie l'usten-
sile qui fait paître le cheval en un lieu déterminé.
f DÉPÉTRIFIER (dé-pé-tri-fi-é), v. a. Faire sor-
tir de la stupéfaction. || Se dépétrifier, v. réfl. Sortir
de la stupéfaction. Dépétrifiez-vous, jeune amant,
touchez là, DDFRÉNY, Mar. fait et rompu, n, 3.
— ÉTYM. Dé.... préfixe, et pétrifier.
DÉPEUPLÉ, ÉE (dé-peu-plé, plée), part, passé.
Qui a perdu ses habitants. Cette Syrie, me disais-je,
aujourd'hui presque dépeuplée, comptait cent villes
puissantes, VOLNEY, Ruines, n. || Fig. Que me font
ces vallons, ces palais, ces chaumières, Vains ob-
jets dont pour moi le charme est envolé? Fleuves, ro-
chers, forêts, solitudes si chères, Un seul être vous
manque, et tout est dépeuplé I LAMART. Méd. i, 4.
DÉPEUPLEMENT (dé-peu-ple-man), a. m. Action
de dépeupler un pays; état d'un lieu dépeuplé. Les
guerres continuelles causent le dépeuplement des
États. Le pape choisit St Bernard pour être l'organe
d'un nouveau dépeuplement [ une croisade, que
Voltaire nomme ainsi par dénigrement] , VOLT.
Jfoeurs, 64. || Dépeuplement d'une forêt, coupe ou
destruction des arbres. || Dépeuplement d'un étang,
pêche qui en enlève la plus grande partie des pois-
sons. || Dépeuplement d'un canton de chasse, des-
truction du gibier dans ce canton.
— ÉTYM. Dépeupler.
DÉPEUPLER (dé-peu-plé), v. a. || Ie Dégarnir
d'habitants une ville, un pays. Quoi I ces tyrans
cruels.... Qui dépeuplent la terre.... VOLT. Ali. n, 2.
On avait banni, dans tous ces États, un usage in-
sensé qui énervait et dépeuplait plusieurs pays mé-
ridionaux, m. Princ. de Babyl. 6. || Par extension.
Quoi ! Roxane, seigneur, quVAmurat a choisie
Entre tant de beautés dont l'Europe et l'Asie Dépeu-
plent leurs états et remplissent sa cour, RAC. Bajan.
i, 4. || 2° Dégarnirunlieudela plus grande partiedes
animaux qui s'y trouvaient. Dépeupler une forêt,
un étang. || Dépeupler une pépinière, en tirer trop de
plants ou beaucoup de plants. || 3° Se dépeupler,
v. réfl. Perdre ses habitants, hommes ou animaux.
Le pays s'est dépeuplé. Cette garenne commence
à se dépeupler. On voyait, chez les Carthaginois.
DÉP
dans les plaisirs. || Proverbe. Journée gagnée,
journée dépensée, se dit de ceux qui n'épargnent rien,
qui dépensent l'argent à mesure qu'ils le gagnent.
DÉPENSER (dé-pan-ser), v. a. || 1° Employer de
l'argent à quelque chose. 11 ne dépense pas un sou
mal à propos. || Absolument. Je n'aime pas à dépen-
ser. Il n'y a qu'à dépenser; les richesses nous vien-
nent comme un torrent, TÉvi.Dial. desmortsanc. 42,
Pompée, César. Il ne faut point de bourse à qui
veut dépenser, REGNARD, Vendanges, 4. || Il ne dé-
pense guère en espions, se dit d'un homme qui
n'est pas informé des choses qu'il lui serait impor-
tant de découvrir. ||-Fig. La mémoire du temps passé
Que j'ai follement dépensé, RÉGNIER, Stances relig.
Pour dépenser sa vie en peu d'instants.... Dans un
grenier qu'on est bien à vingt ans ! BËRANG. Gren.
Jeunesse aux jours dorés, je t'ai donc dépensée,
v. HUGO, F. d'aut. 36. || 2° Se dépenser, v. réfl.
Etre dépensé. L'argent se dépense vite en voyage.
|| Proverbe. Autant dépense chiche que large; quand
on se met en frais, il n'en coûte pas plus de bien
faire les choses que de les faire mal.
— REM. Vaugelas dit que de son temps dépendre
(voy. DÉPENDRE 3) et dépenser sont usités, mais que
dépendre se dit plus à la cour, et dépenser à la ville.
Ménage et Th. Corneille constatent que dépendre
est tombé en désuétude. Quant à Malherbe, voici
ce que Racan rapporte dans sa Vie de Malherbe:
«Un jour M. de Bellegarde, qui était, comme l'on
sait, Gascon, lui [à Malherbe] envoya demander le-
quel était le mieux dit de dépensé ou dépendu; il
répondit sur-le-champ que dépensé était plus fran-
çais, mais que pendit, dépendu, rependu, et tous
les.composés de ce vilain mot qui lui vinrent en la
bouche, étaient plus propres pour les Gascons. »
— HIST. XVe s. Et tous despensant si largement
qu'il sembloit queargent leurplust des nues, FROISS.
1, î, 66. || xvi" s. Ils m'empeschoient de dormir, me
despensoient en fauconniers et en hongres.... D'AUB.
Foen. î, 6.
— ÊTYM. Dépense ; provenç. despensar; anc. es-
pagn. despesar.
DÉPENSIER, 1ÈRE (dé-pan-sié, siê-r'), adj.
|| i° Qui ainie la dépense, qui dépense excessive-
ment. Vous êtes dépensière, MOL. Tart. I, 4. Il y a
une autre sorte de curiosité qui est une curiosité
dépensière : on ne saurait avoir trop de raretés,
trop de bijoux, trop de pierreries.... BOSS. Concupisc.
8.' Il était extrêmement dépensier, surtout quand il
s'agissait de ses plaisirs, MARIVAÏÏX, Paysan pan.
l" part. p. 30, dans POUGENS. || Substantivement.
C'est un grand dépensier. C'est une dépensière.
|| 2° S. f. Dépensière, la religieuse qui, dans un
couvent de femmes, a soin de la cave et de toute
la dépense. || 3° S. m. Celui qui, dans une commu-
nauté, dans un établissement public, est chargé de
la dépense. || Le dépensier d'un vaisseau, celui qui
distribue les vivres, aujourd'hui cambusier. || Dans
les lycées, homme chargé de faire les achats pour
la cuisine sous la surveillance de l'économe.
— HIST. xne s. Les napes metent sergant et des-
pencier; Au dois [dais, table] s'asient li vaillant
chevalier, Raoul de C. 76. Ceste meslée fust jà ven-
due chier, Quant là acorent sergant et despencier,
ib. 4 00. || xvie s. Ayant espousé une femme jeune et
despensiere, AMYOT, Pe'ri'c. 68. Les despensiers em-
boufls de bonbance, RONS. 94). Les bourdons ou
frelons sont au reste grands despensiers, devorans
le miel, o. DE SERRES, 445. Plusieurs mesprisent ce
mesnage, comme fantasque, pénible, despensier
[coûteux], ID. 460. Une humeur vaine et despen-
siere, MONT, m, 290. Despensiers et fille de cham-
bre ont bien volontiers grand langue, LEROUX DE
LINCY, Prou., t. il, p. <65. Despensiers et marmitons
sont souvent grands compaignons, ID. ib.
— ÉTYM. Lat. dispensare, qui signifie adminis-
trer et partager de l'argent, et qui est du même ra-
dical que dependere, d'où dépense; provenç. despe-
cier, despessier, despenser; anc. catal. despensier,
despenser , dispenser ; espagn. despensero ; ital.
dispen-siere. Dans l'ancien français, despensier si-
gnifiait celui qui administre la dépense d'une mai-
son; avec le sens de celui qui dépense, on disait
despendere, despendeor.
t DÉPENSIF, IVE (dé-pan-sif, si-v'), adj. Qui
cause de la dépense, coûteux.
— HIST. xvie s. Ceux-ci [sont en servage] de l'y-
vrongnerie, ceux-là d'une ambition et magnificence
sotte et depensive, LA BOETIE, 4 4 6.
— ÉTYM. Dépenser.
DÉPERDITION (dé-pèr-di-sion; en vers, de cinq
syllabes), s. f. || i° Perte qui se fait graduellement.
La déperdition de la chaleur. || Terme de chimie.
DÉP
On dit qu'il y a déperdition, lorsque, dans une opé-
ration, on ne retire pas toute la substance qu'on
avait mise. || Terme de botanique. Déperdition in-
sensible, nom donné à une partie de la transpira-
tion des plantes, laquelle, beaucoup plus lente que
l'exhalation aqueuse , se fait au travers de leurs
tissus sans pores apparents. || 2° Perte, diminution.
C'est un fait bien constaté que les étoiles de dixième,
de onzième grandeur, et même au-dessous, ont été
vues au travers de la partie centrale des comètes,
sans déperdition sensible de leur éclat, BABINET,
dans Presse scientifique, t. i, p. 4 34. || Terme de
chirurgie. Déperdition de substance, plaie avec
destruction des tissus lésés.
— HIST. xvie s. Fracture du crâne avec déperdi-
tion ou enleveure, en laquelle la pièce est empor-
tée, dont il y a perdition de substance, PARÉ, VIII, 4.
— ÉTYM. Anc. français, deperdre, du latin deper-
dere, de la préposition de, et perdere, perdre; pro-
venç. deperdicio ; espagn. desperdicion.
DÉPÉRI, IE (dé-pé-ri, rie), part, passé de dépérir.
Qui a perdu la plus grande partie de ses forces. Ses
brebis, de langueur sèches et dépéries, X la merci
des loups erraient par les prairies, SEGRAIS, Athys,
i. Croissy prit congé du roi de Suède qu'il laissa
au milieu des ruines de Stralsund avec une garni-
son dépérie des deux tiers, VOLT. Ch. XII, 8.
DÉPÉRQt (dé-pé-rir), v. n. || 1° Périr peu à peu,
s'affaiblir graduellement. Sa santé dépérit tous les
jours. La nôtre [armée] était fort dépérie depuis la
dernière victoire, VOIT. Lett. 74. Elle va toujours
en dépérissant, BOSS. in, Paq. 3. Je sens de jour
en jour dépérir mon génie, BOIL. Ëpîtr. vm. On en
voit quelquefois [des enfants] qui dépérissent d'une
langueur secrète, parce que d'autres sont plus ai-
més et plus caressés qu'eux, FËN. Éduc. des filles,
ch. 6. Il sèche et dépérit au milieu de son abon-
dance, MASS. Pet. car. Tent. Pendant que la métro-
pole dépérissait, il n'était pas possible que les colo-
nies prospérassent, RATNAL, Hist. phil.ym, 34. Ses
jours [de Démodocus] dépérissaient, il marchait à
grands pas vers le tombeau, CHATEAUB. Mart. il,
2)6. L'État n'a point dépéri, Je reviens gras et fleuri,
BÉRANO. Ventru. || 2° Terme de jurisprudence. Les
preuves dépérissent par la longueur du temps, c'est-
à-dire se perdent à mesure que les témoins dispa-
raissent. || Ces créances dépérissent, elles deviennent
difficiles à recouvrer. || 3° Se détériorer, se déla-
brer, tomber en ruine. Ces meubles, ces monuments
dépérissent.
—REM. Dépérir se conjugue avec l'auxiliaire avoir,
quand on veut marquer mieux la manière en tant
qu'elle a été continue ou successive : il a dépéri
rapidement; avec l'auxiliaire être, quand on vect
marquer l'état ou résultat final, complet : l'agricul-
ture est dépérie.
— HIST. xvie s. Les choses mal acquises dépéris-
sent, RAB. Pant. m, 4. Pour chasser les connins
[lapins] desperissans la vigne, brouttans les pre-
miers de ses rameaux, o. DE SERRES, 4 98.
— ÉTYM. Provenç. dépérir; du latin deperire, de
la préposition de, et perire, périr.
DÉPÉRISSEMENT (dé-pé-ri-se-man), s.m. || i° État
de ce qui dépérit ou de ce qui est dépéri. De peur
qu'il ne tombe dans le dépérissement, PASC. Préf.
Vide. Il apprendrait par ce moyen les accroissements
et les dépérissements de ses peuples et ce qui les
cause, VAUB. Dîme, p. 482. Comme ce dépérisse-
ment [du corps] est une suite de mon âge de soixante-
quatre ans, de longs travaux dont ma pauvre tête
est fatiguée.... D'ALEMB. Lett. au roi de Prusse,
29 juin 4 784. Le dépérissement d'esprit et dé corps
qu'entraîne le chagrin joint à la vieillesse, CONDOR-
CET, Bourdelin. Ceux qui sont préposés à la con-
servation des bois se plaignent eux-mêmes de leur
dépérissement, BUFF. Expér. sur les végét. 2e Mém.
Hiéroclès, aux yeux de la foule, paraissait encore
tout-puissant; mais un oeil exercé voyait en lui des
signes de dépérissement et de décadence, CHATEAUB.
Mart. il, 255. || 2° Terme de jurisprudence. Le dé-
périssement des preuves, l'affaiblissement qu'elfes
reçoivent par la perte de ce qui peut les constater.
|| 3° Délabrement, détérioration. Il ordonne, pour
éviter ce désordre ou dépérissement, que l'aîné
aura seul la maison, PATRU, Plaidoyer 42, dans
RICHELET.
— ÉTYM. Dépérir. On a dit, au xvi" siècle, depe-
rition : Que durant le siège des autres [places]
l'admirai s'advanceroit vers les estrangers, et les
recevroit sans peine quand les forces seraient en de-
perition, D'AUB. Hist. i, 4 57.
f DÉPERSÉCUTER (dé-pér-sé-ku-té), v. a. Cesser
de persécuter. Peut-être y aura-t-il enfin des âmes
DEP
raisonnables qui rougiront de cet exemple de bar-
barie au xvme siècle, et qui tâcheront d'effacer cette
flétrissure en faisant dépersécuter le compagnon df
cet infortuné, VOLT, dans LAVEAUX.
— ÉTYM. Dé.... préfixe, et persécuter.
f DÉPERSUADER (dé-pér-su-a-dé) , v. a. Ôter
une persuasion. Depuis cette rare crédulité de-Mon-
seigneur dont Mme la duchesse de Bourgogne l'a-
vait dépersuadé, je n'avais osé me commettre à
Meudon, ST-SIM. 294, 24 7. Avant de le déclarer in-
nocent, il faut que je le croie; et je crois si décidé-
ment le contraire que vous aurez peine à me dé-
persuader, 3. J.ROUSSJ. àd'Ivernois,20juill. 4765.
— ÉTYM. Dé.... préfixe, et persuader.
DÉPÊTRÉ, ÉE (dé-pê-tré, trée), part, passé. Dé-
barrassé d'entraves. Un cheval dépêtré. || Fig. Rus-
tic voudrait être dépêtré d'elle, LA FONT. Diable.
DÉPÊTRER (dé-pê-tré), v. a. || i° Débarrasser les
pieds d'une entrave. Dépêtrer un boeuf. || 2" Fig. Dé-
livrer. Nous faisons nos efforts pour le dépêtrer d'un
engagement si dangereux, SÉV. 36. || 3° Se dépêtrer,
«. réfl. Se tirer hors. Se dépêtrer d'un bourbier.
|| Fig. Se débarrasser. Moi pour m'en dépêtrer, je
lui dis tout exprès: Je vous baise tes mains.... RÉ-
GNIER, Sat. VIII. La pauvreté est si gluante qu'on
ne s'en saurait dépêtrer, D'ABLANCOURT, Lucien,
dans RICHELET. Je ne me puis dépêtrer de cet homme,
LA FONT. Coc. Plus vous raisonnerez, plus vous pes-
terez contre cette jeune veuve, plus je croirai que
vous aurez de peine à vous dépêtrer d'elle, BRUEYS,
Muet, i, 4.
— HIST. xvi« s. Ainsi Hannibal s'estant à la fin
despestrè de Marcellus, et ayant son armée délivre....
AMYOT, Marcell. 44. Estans bien aises quand ilz se
pouvoient despestrer de leurs autres affaires pour
s'y en aller, ID. Lucull. 83. Prenons de bonne heure
congé de la compaignie; despestrons-nous de ces vio-
lentes prinses qui nous engagent ailleurs et esloin-
gnentde nous, MONT, i, 279. Il sent avoir du mal, et
vouldroit enestredepestré ; mais de ce mal pourtant,
son coeur n'en est pas abbattu etaffoibli, ID. H, 241.
— ÉTYM. Dé.... préfixe, et pestrer, qui tient au
bas-latin pastorium, entrave qu'on met au cheval
(comparez EMPÊTRER); ital. spastojare. L'étymolo-
giedede, et petra, hors de la pierre, ne peut se sou-
tenir, soit à cause de l's (de pestrer), soit à cause du
sens. L'italien spastojare, formé régulièrement de
pastorium, indique, comme le sens, que depestrer
est du même radical ; mais il faut supposer une forme
anomale pastrium au lieu de pastorium. Pasto-
rium vient de pastor, pasteur, et signifie l'usten-
sile qui fait paître le cheval en un lieu déterminé.
f DÉPÉTRIFIER (dé-pé-tri-fi-é), v. a. Faire sor-
tir de la stupéfaction. || Se dépétrifier, v. réfl. Sortir
de la stupéfaction. Dépétrifiez-vous, jeune amant,
touchez là, DDFRÉNY, Mar. fait et rompu, n, 3.
— ÉTYM. Dé.... préfixe, et pétrifier.
DÉPEUPLÉ, ÉE (dé-peu-plé, plée), part, passé.
Qui a perdu ses habitants. Cette Syrie, me disais-je,
aujourd'hui presque dépeuplée, comptait cent villes
puissantes, VOLNEY, Ruines, n. || Fig. Que me font
ces vallons, ces palais, ces chaumières, Vains ob-
jets dont pour moi le charme est envolé? Fleuves, ro-
chers, forêts, solitudes si chères, Un seul être vous
manque, et tout est dépeuplé I LAMART. Méd. i, 4.
DÉPEUPLEMENT (dé-peu-ple-man), a. m. Action
de dépeupler un pays; état d'un lieu dépeuplé. Les
guerres continuelles causent le dépeuplement des
États. Le pape choisit St Bernard pour être l'organe
d'un nouveau dépeuplement [ une croisade, que
Voltaire nomme ainsi par dénigrement] , VOLT.
Jfoeurs, 64. || Dépeuplement d'une forêt, coupe ou
destruction des arbres. || Dépeuplement d'un étang,
pêche qui en enlève la plus grande partie des pois-
sons. || Dépeuplement d'un canton de chasse, des-
truction du gibier dans ce canton.
— ÉTYM. Dépeupler.
DÉPEUPLER (dé-peu-plé), v. a. || Ie Dégarnir
d'habitants une ville, un pays. Quoi I ces tyrans
cruels.... Qui dépeuplent la terre.... VOLT. Ali. n, 2.
On avait banni, dans tous ces États, un usage in-
sensé qui énervait et dépeuplait plusieurs pays mé-
ridionaux, m. Princ. de Babyl. 6. || Par extension.
Quoi ! Roxane, seigneur, quVAmurat a choisie
Entre tant de beautés dont l'Europe et l'Asie Dépeu-
plent leurs états et remplissent sa cour, RAC. Bajan.
i, 4. || 2° Dégarnirunlieudela plus grande partiedes
animaux qui s'y trouvaient. Dépeupler une forêt,
un étang. || Dépeupler une pépinière, en tirer trop de
plants ou beaucoup de plants. || 3° Se dépeupler,
v. réfl. Perdre ses habitants, hommes ou animaux.
Le pays s'est dépeuplé. Cette garenne commence
à se dépeupler. On voyait, chez les Carthaginois.
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