Titre : La Presse
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1867-03-27
Contributeur : Girardin, Émile de (1806-1881). Directeur de publication
Contributeur : Laguerre, Georges (1858-1912). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 27 mars 1867 27 mars 1867
Description : 1867/03/27. 1867/03/27.
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Grande collecte... Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail
Description : Collection numérique : La Grande Collecte Collection numérique : La Grande Collecte
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/03/2008
Nercred! S7 mars 18$7
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~UREAUX C'RBONSESi~T, ):3, ME MPNïM
Mercredi %7 mar§ t@@7
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M~S~r~q~ro~ë !e ~tda ~diBerJtar&lacU~n dies.ApMnce~j
MM. lès abonnés dont l'abonnement expire
le 3! mars, sent priés do le renouveler
de suite, s'ils ne veulent pas éprouver de
retard dans la Foeeption du journal.
Les abonnés nouveaux ont droit a rece-
voir la C~Lapointe; ~c~e Gerëst, par M. A..Esparbié;
les .4MM.)ws de pMss~e, par M. Georges Tath,
et teut ce qui a paru de la CA~doÏM e!c
~aw~e-~t'~rsy, par M. PeNSON DU TERRAIL.
PARIS, 26 MARS 1867
M QUESTION MOMENT
Les divers intérêts d'un grand pays, au
dehors et au dedans, sont solidaires les uns
des autres. Ce sont les parties d'un même
tout, lès aspects variés d'un même ensem-
ble et les questions de politique étrangère,
quoique distinctes en apparence, sêïutta-
chent presque toujours les unes aux autres
par des tiens plus ou moins visibles, mais
réels et puissants.
C'est ainsi que dans la discussion provo-
quée au Corps législatif par les interpella-
tions sur les a8'a ires d'Allemagne et d'Italie,
la question d'Orient, quoique étrangère
au débat, s'imposait néanmoins, par son
importance propre, a ta pensée des orateurs.
Voici en quelsteroMS s'est exprimé sur ce.
sujet M. Thiers dans son éloquent discours
su '.[l).ièrslla}J:S ~on ~19qù~Iit disgours
du t4 mars
Quel est l'intérêt de l'Europe? D'empêcher qu'il
Be se passe en Orient quelque chose d'analogue à
ce qui se pas voir tomber Constant'nople entre les mains des
Russes. Sieettë Russie qui va du cap Nord ait dé-
troit de Behring, que parcourent des Meuves qui se
jettent TÎana la-Battiq~e etia mer Noire, occupait
Constantinople,~lte aurait plus de cent miflious de
sujets, et ators !a prédiction sinistre de Napotëon
serait accomplie. Le bon sens, c'est donc d'y
maintenir Ié< Tnrca, parce qu'ils y sont. On dit
Mais ce sont des barbares. Eh! oui; mais cepen-
dant tout barbares qu'ils soat, ils ne le sont pas
plus que ceux qui veulent les remplacer. Je sais
~én qu'Us ne sont pas chrétiens je sais bien que
l'Evangile est supérieur au Coran; mais, après tout,
j'aime autant un Turc Ëdële au Ceran qu'un chré-
tien in6dë)e à Evangile. '<
Ua Russie a adopté une politique de sympa-
thie ponnës chrétiens eUe prépare l'avenir en
'whercbantà~es détacher de 1 empire ottoman.
Ce qui frappe dans ce langage si ferme et
si précis, c'est que l'émanent homme d'Etat
qui le tenait se montrait inspiré, avant tout,
de l'intérêt français. C'est cette préoccupa-
tion d'une justesse supérieure, et d'un si ad-
mirable bon sens, qui donnait aux paroles de
M. Thiers, dans le grand débat qui vient de
Enir, cette force de persuasion à laquelle
rendent hommage ses adversaires eux-mê-
"mes,'
Pendant qu'au nom de l'intérêt français,
l'illustre orateur condamnait la formation
d'un empirëmilitaire en Allemagne, et celle
de l'unité.italienne, il faisait toucher du
dongt, en quelque sorte, les nouveaux pé-
rils que l'application à la question d'Orient
du prétendu principe des nationalités fera
courir à la liberté, et & la paix du monde
qu'il a.déjà singulièrement troub'ée. II n'est
personne désormais qui ne reconnaisse que
l'eSet certain des grandes agglomérations de
peupfes, préconisées par la politique du
jour, sera~ de détruire rapidement l'in-
Ruence de la France en Europe, ou du
moins de l'amoindrir considérablement.
C'est ense 'plaçant à ce point de vue, h
la fois si éle~et si politique, que M. Thiers
a pu dire avee une haute raison qu'il préfe-
.FEUBJ.EION DE LA ~AS~E
DBS7KAMI8M
fBAWn~ RE PtiMF-mRn
ttHAttLAmB~~ rjLMuM m8Mt
PREMIÈRE PARTIR
Revenons~ Munito. `
Où' étatt-il aUe en s'arrachant a cette fas-
cination vertigineuse que la vue de !a Seine
coulant silencieuse, neire et profonde entre
ses deux rives de pierres, avait exercée sur
'tai?"
U traversa le pont, puitia place de !à
Concorde, arriva à Ja Madeleine, suivit un
moment le boutevard, puis entra dans la
rueCaùmàrtml
H était alors plus de deux heures du ma-
tin. Le boulevard était à peu près désert, et
ta rue Caumartin tout a fait.
Munito, après avoir un moment hésité,
reprit son chemin d'un pas rapide, et tou-
jours en proie à une sorte d'exaltation.
Vers le milieu de larueGaumartIn, a
gauche; s'élevait une maison neuve sous la
porte cochère de laquelle le bohémien s ar-
'rêta.
Cette maison était située juste en face de
celle qu'habitait Pauline Régis.
Munito sonna.
Une main indolente et ensommei!!ée tira
maMe cordon, car Munito eatenditun bruit
sec et la porte ne s'ouvrit pas.
Alors il sonna plus fort, et avec une n4-
vreuse impatience.
'Cette fois la porteS'ouvrit; mais lecon-
Gierge, tout a faitj'év6i!!é, sauta à bas de e
son lit, comme Munito entrait sous la voûte,
et demanda a qui il avait aS'aire.
–C'est moi, dit le bohémienr
–Qui, vous?
B<~MdoctN)n tat~rdi~ aux journaux qui a'ent
pM t~S a~& !a ~oc~S de& Gens de rettres,
rait à Constantmopte t'em~ire turc, qui s'y
j trouve déj~, à un empire chrétien impossi-
ble. La domination des sultans, qui ne le
voit? n'aura d'autre héritier sur les rives
du Bosphore que le despotisme des czàrs.
Que l'on examine/en enet, cette idée
d'un empire formé despopulations chrétien-
nes actueHemeat soumises au sultan, et l'on.
reconnaîtra que les divisions de races, de
croyances, de cultes, de rites séparant pro-
fondément ces populations; que la force
numérique de chacune d'elles est relative-
ment faible que leur infériorité, au point
de vue de la civilisati.on et de l'aptitude
gouvernementale, est attestée par le témoi-
gnage unanime de tous ics voyageurs; qu'en
un mot, tout démontre l'impossibilité abso-
lue de constituer, avrc ces seuls éléments si
hétérogènes, si antipathiques les uns aux
autres/un grand Etat solide et compact,
portant en lui-même les principes de vie et
de durée qui donneraient de la sécurité aux
puissances européennes.
I! y a plus encore. Grâce à des agissements
préparés de longue main, grâce à la compli-
cité d'une partie du clergé grec, les races
gréco-slaves paraissent constamment dispo-
sées à recourir à la protection de la Russie.
En vain la France, l'Autriche, l'Angleterre
ont pris chaudement la défense de leurs in-
térêts, les Gréco-Slaves se tournent de pré-
férence vers la Russie, dont la diplomatie ne
leur marchande pas les plus séduisames.
promesses. Donnez aujourd'hui à ces ra-
ces l'autonomie absolue, et elles s'en servi-
ront pour se déchirer entre elles et se jeter
ensuite, par haine les unes des ~autres,
entre les Jjras du czar. Aurait-on déjà ou-
blié l'effet saisissant produit, il y a quelque
quinze ans, par l'arrivée a Constantinople
d'un grand-duc héritier de Russie, et l'em-
pressement affecté d'une partie de la popu-
lation grecque~ le considérer et presque a
le traiter hautement comme son futur em-
pereur ? q
Les pubitcistës et les politiques qui con-
spirent au renversement de la puissance
ottomane, et rêvent une restauration de
l'empire grec, ne peuvent cependant pas
ignorer dans quel abaissement étaient tom-
bées ces populations lorsqu'il y a quatre
siècles les Turcs en firent si facilement là
conquête. Le joug de la servitude, qui pesa
ensuite si longtemps sur elles, n'était cer-
tainement pas fait pour les relever ni les
rendre meilleures. La'liberté, ou pour par-
ler exactement la pratique de la liberté, leur
rendra 'seule les vertus viriles et les senti-
ments de dignité nationale qui semblent ef-
facés de leur esprit.
Mais ce progrès si nécessaire exige l'ac-
tion du temps, et ne saurait se réaliser
en un jour, comme par l'eSët soudain d'un
coup de baguette magique.
La nécessité du maintien de l'empire ot-
toman admise, comment concilier ce grand
intérêt européen avec l'intérêt n@n moins
respectable de ces mêmes populations chré-
tiennes ? Et d'abord, quel est le sort fait
aujourd'hui aces populations? Car ce sont
ces deux buts qui forment lepivot de.Ia po-
litique traditionnelie de la France vis-a-
vis du sultan et vis-a-vis des chrétiens de
la Turquie.
Lorsque la Pologne.Eervait de barrière a
la puissance moscovite, dont le nom était à
peine connu; lorsque l'Europe n'avaitpointa
redouter de voir Constantinople tomber aux
mains d'un maître dont le pouvoir absolu
s'étend des bords de la Newa aux rives delà
mer Noire et sur toute l'Asie septentrionale,
la politique française a l'égard de la Turquie
était bien simple. Elle pouvait se formuler en
quelques mots se maintenir en bons termes
avec le sultan qui, depuis François F' était
–Le frère deM~Dolorès.
Le concierge referma son carreau d'un
air de mauvaise humeur et se recoucha.
Mais eu montant l'escalier, Munit? l'en-
tendit qui disait sa femme: 1
Tous ces bohémiens ne me convien-
nent guère. J'en parlerai au propriétaire
et il leur donnera congé.
Munito haussa les épaules et monta jus-
qu'au troisième étage.
II n'y avait qu'une porte sur le pallier.
Au heu de sonner, Munito tira une clé de
sa poche, l'introduisit dans la Serrure et
entra.
I! se trouva alors au seuil d'une anti-
chambre assez vaste, éclairée par une lam-
pe à verres de couleurs.
Après l'antichambre, Munito traversa un.
salon meublé avec ce luxe futile et un peu
peu bizarre qu'afnchent certaines femmes de
mœursiégères.
La, pareillement, brûlait une lampe a ver-
res dépolis qui projetait une clarté mate
autour d'elle.
A l'extrémité du salon était une porte sur
laquelle le bohémien frappa deux coups.
–Est-ce toi ? dit une voix de femme.
C'est moi, dit Munito.
Et H poussa cette porte.
H se trouva alors au seul! d'une petite
pièce singulièrement décorée.
On eût dit une pagede indienne ou, mieux
'encore, un temple moresque.
Les murs, le plafond, les vitres des croi-
sées étaient couverts de peintures bizarres,
représentant des scènes empruntées à quel-
que religion mystérieuse et certainement
inconnue à Paris.
Le sol était couvert d'un tapis à couleurs
violentes et parsemé des mêmes signes.
Pour tous meubles, des nattes, des cous-
sins, un narguUeh à double tuyau.
Appendus au mur un tambour de Basque
et des castagnettes, et au-dessous une gui-
tare espagnole.
Au milieu de cette pièce, à demi couchée
sur le tapis, et la tête appuyée sur une pile
de coussins, se tenait une créature éblouis-
sante de beauté.
Avez-vous vu le fruit mûr etdoréacôLé
du fruit vert?
La femme épanouie dans toute sa splen-
deur auprès de !a. j&une nile encore chétive
etdontlea épaules n'ont point acquis toute
la pureté de leur galbe ? 9
pour nous un allié souvent utile, jamais oné-
reux, et faire servir noire influence à Cons-
,tantinop!e à protéger le plus possible les
chrétiens de l'empire. De là !es capitula-
tions. De là aussi le respect qui, depuis les
Croisades, entoure le nom de la France
dans l'AnatpHe, en Palestine et en Egypte.
Cette politique, généreuse et protectrice,
que la France a eu l'honneur de pratiquer en
Turquie avant les autres nations occidenta-
les, et a laquelle chacun ,dja nos divers gou-;
vernements, y compris la Convention elle-
même, tint a honneur de demeurer fidèle,
cette politique séculaire n'a certes pas été
stérile pour les chrétiens.
Mais,-aujourd'hui, après les événements
accomplis en Allemagne et en Italie, qui ont t
si gravement modifié la force relative des
Etats du centre de l'Europe; en présence
des tentatives de saulèvement qui se pro-
duisent dans certaines provinces de la
Turquie, et dans lesquelles la main de
l'étranger se laisse si clairement apercevoir;
après les déclarations si explicites d'Alexan-
dre 1"' et de l'empereur Nicolas, la politique
française, si elle peut, quant à son but, res-
ter la même qu'il y a cinquante ans, ne
pourrait du mo*ns suivre la même ligne
droite et simple. A côté de l'intérêt des chré-
tiens, ii y a celui de la sécurité de l'empire
ottoman.
Sans doute la chute de Sébastopol a châ-
tié d'une manière éclatante l'orgueil du
souverain qui avait envoyé au sultan l'am-
bassadeur Menschikoff, de fastueuse mé-
moire. Mais dix années se sont écoulées de-
puis cette leçon. La Russie, suivant son
expression, s'est recueillie; et elle vient
de montrer, depuis quelques mois, que son
ambition suppose le moment favorable pour
se réveiller, Le péril, contre lequel la France
et. l'Angleterre s'étaient armées, a reparu.
Comment le conjurer ?
L'intérêt des chrétiens de la Turquie é-
tant le prétexte dont se sert la Russie pour
miner l'empire ottoman et le ruiner dans
l'opinion, ce qu'il faut d'abord, c'est pro-
téger cet intérêt sans détruire l'autorité du
sultan; c'est obtenir de ce souverain l'é-
galité des droits pour les chrétiens et tes
musulmans, non l'égalité nominale, inscrite
théoriquement dans une charte, mais l'éga-
lité réelle et en action.
Or, depuis-près de trente ans, le gouver-
nement turc partage sur ce point les idées
des puissances occidentales. Le hatt-i-chérif
de GuI-Hané, du 3 novembre 839, atteste
que dès cette époque la Porte était pénétrée
de la nécessité d'élever ses populations
chrétiennes politiquement et civileaient,
mais graduellement, au niveau de la race
jusqu'alors dominante. Les mêmes princi-
pes d'équité et de progrès présrdèrent à la
rédaction du hatt-i-chérif du 7 septembre
'i854. Enfin, une idée vraiment civilisatrice
et libérale dictalehatt-i-humaïoumdu ')8 8
février') 856.
Cet. acte célèbre (dont les'dispositions
étaient d'ailleurs appuyées par les articles
d'un traité conclu à la même date entre
la Turquie et les puissances européennes),
que l'on recommence à citer aujourd'hui
dans les dépêches et les documents diplo-
matiques, maintenait d'abord les garanties
promises à tous les sujets du sultan par le
hatt-i-humaïoum de GuI-Hané,et en, con-
formité du tanzimat, sans distinction de
classes ni de cuttes, pour la sécurité de
leurs personnes, et de leurs biens, et pour
la conservation de leur honneur. Le sultan
tenait à montrer la continuité de ses senti-
ments de justice bienveillante envers tous
ses sujets indistinctement.
L'article ~déclarait solennellement ces
garanties confirmées et consolidées, et an- i
N'en déplaise aux vieillards blases-, la
vraie femme, celle dont la beauté enivre
comme le bouquet d'un vin capiteux, c'est
celle de trente ans.
La beauté de M"~ de Plamche-MIbray au-
rait pâli auprès de la beauté de celle chez
qui Munito pénétrait cette heure.
Et pourtant c'était le menae type oriental,
les mêmes grands yeux d'un bleu sombre,
les mêmes lèvres rouges et provoquantes',
mais ce type, déjà si remarquable chez la
baronne, était peut-être encore plus pur chez
cette autre femme.
Et puis la misère d'autrefois, les plaisirs
violents, les fatigues d'aujourd'hui, avaient
allangui le regard tout en lui laissant sa
sombre énergie.
Il se dégageait de cette créature comme
un acre parfum de volupté sinistre et mys-
térieuse, qui montait a la tête et pénétrait
par tous les pores.
A la vue de Munito, ses lèvres laissèrent
échapper le tuyau du narguileh.
Elle se leva, développant ainsi toutes les
richesses de sa taille, aux ondulations féii-
'nes, et laissant voir son petit pied nu qui
passait sous la jupe d'une robe de velours
noir serrée par une cordelière de soie rouge,
et qui, avec une chemisette de batiste iratjs-
parente, composait son unique vêtement.
Sa chevelure d'ébène dénouée tombait en
Sots tumultueux jusque sur ses talons et
couvrait ses épaules demi-nues.
Etait-ce donc là la petite Stie qui dansait
a Auxerre sur les tréteaux du pauvre sal-
timbanque Fanfreluche?
Et si c'était elle, que, signifiait le luxe
étrange qui l'entourait?
Dolorès, c'était son nom, s'était éveillée
un matin, rassasiée de misère, avide de
plaisir et d'or.
Eile avait alors vingt ans et dans le cœur
un amour en cendres.
Elie avait aimé un homme de sa race qui
l'avait battue longtemps, puis l'avait aban-
donnée pour une autre de' ses pareilles.
La bohémienne dansa pour la dernière
fois sur la -corde, au Château-d'Eau, avant
qu'on ne fit disparaître, au profit de la ca-
serne Napoléon, ces pittoresques baraques,
tous ces petits théâtres en plein vent qui
jouaient tout le jour, comme leurs voisins
du bou!eva)'d du Temple, les grands ihéà-
tres, allumaient leur rampe chaque soir.
Un jeune homme ennuyé et riche qui pas-
nonçait que des mesures efficaces seraient
prises pour qu'elles' reçussent leur plein et
entiereffet.
L'arLide 2 confirmait et maintenait tous
les privilèges et immunités de l'ordre spi-
rituel accordés a& SH~î~o par les sultans,
et a< des dates postérieures, à toutes les
communautés chrétiennes ou d'autres rites
non musulmans établis dans l'empire sous
l'égide protectrice du prince régnant. .1
L'article. 3 portait que chaque commu-
nauté chrétienne, ou d'autre rite non mu-
suiman, serait tenue, dans un délai fixe, et
avec le concours d'une commission formée
a~/toc dans son sein, de procéder avec la
haute approbation du sultan, et sous la sur-
veillance de la Porte, a l'examen de ses im-
munités et privilèges actuels, aiin d'y dis-
cuter et soumettre à la Porte 'les réformes
exigées par le progrès des lumières et du
temps. C'était déclarer que l'on conserve-
rait ce qui était bien et ~u'on ne détruirait
que les abus. C'était en même temps faire
intervenir les chrétiens comme tels dans la
discussion -et la gestion des intérêts de leur
communion.
Puis venaient des dispositions spéciales
sur la nomination des patriarches, des mé-
tropolitains, etc.; sur les redevances ecclé-
sia-stiques, les propriétés des divers clergés
chrétiens, sur la construction et la répara-
tion des édifices religieux, sur la liberté
absolue des manifestations extérieures d'un
culte dans les localités où ce culte serait
seul pratiqué sur la réparation des écoles
et des hôpitaux, etc. La liberté, des cultes
était formellement reconnue par l'article 4 4,
et l'article 43 interdisait toute qualifica-
tion injurieuse ayant trait à la diversité des
cultes. Chaque communauté pouvait avoir
ses écoles, et l'article 17 instituait un con-
seil m.ixte d'instruction publique. Il suffit
de parcourir cette énumération des libertés
concédées pour voir qu'il y a en Europe
plus d'un pays qui se croit civilisé et qui
est loin de posséder les mêmes libertés.
De plus, les articles 5 et 4 déclaraient
l'égale admissibilité de tous les sujets du
suttan aux fonctions et emplois publics, et
aux écoles du gouvernement. C'était rayer
d'un trait de pisme la vieille exclusion des
raïas, et rompre avec des préjugés qui a-
vaient presque la force d'un principe.
Les articles 8 eH 9 instituaient des tri-
bunaux mixtes pour les musulmans et les
chrétiens ayant des affaires communes; dé-
crétaient la publicité des audieuces, et auto-
risaient les témoins à prêter serment selon
la formule admise dans leur religion. Pour
apprécier cette dernière concession, il suffit
de se rappeler ce qu'il a fallu d'efforts et de
luttes en Angleterre, avant d'arracher aux
partisans de l'Eglise établie, la même con-
cession. Et cependant l'Angleterre est la
terre classique de la liberté! l
Les articles suivants ordonnaient la ré-
daction d'un code, la réforme pénitentiaire,
l'abolition de la torture, et une organisation
de la police propre à donner des garanties
à la sécurité et a la liberté individuelle. =
Tous les sujets du sultan devaient être
soumis aux obligations de recrutement,
mais le principe du remplacement était ad-
mis.,Ainsi, le droit de porter l'épée pour la
défense du territoire n'était plus le privilège
exclusif des musulmans.
L'article 34 accordait le droit de pro-
priété aux étrangers, mais seulement après
que des arrangements auraient eu lieu avec
les puissances étrangères. Cette réserve était
unecoasëquence de l'existence des capitu-
lations qui font aux étrangers une situa-
tion a certains égards privilégiée dans
l'empire. C'est un point fort grave qui mé-
sait par la, descendit de son poney-chaise,
s'arrêta devant la baraque, vit danser la
bohémienne ets'enéprit.
Huit jours après, Dolorès avait un mobi-
lier, une voiture, des diamants et des den-
telles.
Cinq ans plus tard, Dolorès était une des
femmes galantes les plus célèbres de Paris i
mais, Paris, on oublie vite; et les réputa-
tions qui se font en vingt-quatre heures pas-
sent avec la même,rapidité.
Un matin, la senora Dolorès,, comme on
l'appelait, disparut.
Paris s'en émut et la chercha puis, com-
me il ne la retrouva point, il n'y pensa
plus.
Un-boyard avait pris sur elle une revan-
che de Sébastopol; la Russie avait enlevé
Dolorès a la France.
Dolorès'avait eu alors une série d'aventu-
res à défrayer de nouveaux contes des~t'Më
et MKe j~VM!Caucase, et Schamyl l'avait aim~e puis, à
Pétersbourg, elle avait tourné la tête à un
aide de camp de l'empereur, et lui avait
dévoré une douzaine de villages et six mille
paysans.
Chassée par la famille du jeune of6cier,
elle était descendue vers Constantinople,
avait ruiné un Madgyar à Odessa, deux pa-
chas Smyrne, séjourné au harem d'unbey
célèbre, et pris la fuite, une nuit, en traver-
sant le Bosphore à la nage.
Le navire qui la ramenait en France fut
pris et pillé par des pirates, et cette fortune
aux sources diverses, ces rubis et ces dia-
mants qu'elle rapportait de Pétersbourg, du
Caucase, de Gonstantmople et de Smyrne,
devinrent la proie des forbans grecs.
Elle amva a Marseille pauvre, mais plus
.belle que jamais.
Elle y vécut trois ans, reconstruisant peu
àpeul'édi6ceécrou!é.
Puis, un matin, le mal de Paris la reprit,
et .elle y revint.
Mais, au milieu de cette existence pitto-
resque et tourmentée, Dolorès la gitana
était restée 6dè!e aux attachements de son
enfance elle n'avait jamais perdu complé-
tement de vue son frère Munito, trop fier
pour accepter tout ou partie de son opulence
et continuant son métier de saltimbanque.
Ch&que fois qu'elle avait pu revenir de
ses lointains voyages, elle s'était rendue à
Toulon pour y voir le pauvre Fanfreluche.
ri te un examen à part, et sur lequel nous
reviendrons.
-'Ennn, d'autres dispositions prescrivaient
]a suppression des abus dans la perception
des Impôts, le remplacement dd~ système
des fermes par la perception directe, les
travaux publics, la publication du budget,
)a création des banques et institutions, de
crédit, celle de routes etde canaux, et l'abo-
lition des entraves qui gêmient le dévelop-
pement de l'agriculture.
Ce rapide sommaire indique combien la
reforme inaugurée parle hatt-1-humaïoum
était complète. C'était en réalité une révolu-
tion pacifique et progressive, mais a peu
près radicale. Qu'est devenue, à l'exécution,
cette espèce de charte du 18 février ') 856 ? `t
Quels obstacles a-t-elle rencontrés? Qu'y
aurait-il à faire pour que ce grand acte pro-
duisît tous les bienfaits, tous les résultats
heureux que promettent les termes mêmes
dan's lesquels il est conçu? En un mot, dans
quelle situation a-t-il placé les chrétiens de
l'empire ottoman?
C'est ce qu'il importe d'examiner.
FRANCIS MAUX.
–&
~POffnFC 'P~T~BADSïmîTC
UL~&~nLB i&L&bna.rsl~Utb
!I6UE
Florence, 88 mars.
La Chambre des députés a validé jusqu'à.ce mo-
ment 403 élections.
PRtNOPtUTÉS caNUBtENHES
Bucharest,'26mars.
La Chambre a adopté par 75 voix contre 82 le
projet de loi qui transporte & Jassy le siège de la
cour de cassation. r
La session de la Chambre \'ient d'être prolongée
jusqu'au H avril.
PRUSSE
1.. Berlin, 25 mars.
Des journaux de Berlin et de l'étranger ont ra-
conté que lors de l'illumination pour l'anniversaire
de la naissance du roi, l'ambassade d'Autriche a-
vait mis, sur le transparent de son hôte! les pre-
mières paroles ds l'hymne national prussien.
Ce bruit est erroné. Il a pris naissance dans ce
fait que le propriétane Romberg, avait ordonné ds son chef, et à l'insu de
l'ambassadeur, de placer les paroles en question
sur le transparent de la façade.
Berlin, Somars.
Dans un discours adressé aux ministres, le jour
de l'anniversaire de sa naissance, le roi a fait res-
sortir particulièrement le caractère pacifique de la
mission prochaine de la Prusse.
La Prusse, a dit Sa Majesté, doit jeter les semen-
ces d'un développement pacifique dans le sol-alle-
mand labouré par les armes prussiennes. Telle est
la tache que j'ai à remplir pendant les années que
j'ai encore à vivre.
TURQUiE
Constantinople, 28 mars.
Le journal la Tur~MM, parlant du discours de
lord Stanley, d'après lequel la France aurait pro-
posé à la Porte de céder Candie à !a Grèce, se dé-
clare autorisé à déclarer que jamais ni le gouver-
nement français, ni aucun autre, n'a fait à la Porte
une proposition semblable.
(Agence 7i'
~~s~ POLITIQUE
L'Agence Havas a distribué hier un télé-
gramme de Vienne, prétendant démentir une
dépêche publiée par ~'oun~ ~Presse, de
Parts. La dépêche dont il s'agit n'a jamais
paru dans nos colonnes, mais dans celles de
la Presse, de Vienne, et c'est à ce journal
Enfin, depuis un an, Dolorès était & Pa-
ris. Mais l'homme qui régnait alors sur son
cœur était un Espagnol farouche et jaloux
qui la laissait a peine sortir, et cela expli-
quait comment le monde oisif et élégant
qui jadis l'avait accueillie avec enthousias-
me ne savait même plus qu'elle existait.
Depuis un mois, Munito était de retour h
Paris.
Les deux bohémiens s'étaient rapprochés
dans un but commun
Empêcher M"~ de PIanche-Mibray d'é-
pouser M. de Maugeville et intéresser la
jeune femme a Fanfreluche.
Munito, en possession de la clé que lui
avait donnée M. de Villenave, avait vu sa
sœur avant d'aller à cette aventure nocturne
dans laquelle nous l'ayons suivi.
Dolorès lui avait dit
Quoi qu'il arrive, tu viendras me le
dire, n'est-ce pas?
Munito l'avait promis, et Dolorès l'avait
attendu.
Aussi, en le voyant entrer, elle se leva vi-
vement et lui dit ce mot unique
–Eh bien? 1.
Munito était pâle et sombre.
Il raconta d'une voix brève/saccadée,
émue, son entretien avec la baronne. `
Les étonnements, la colère, l'émotion de
M' de PIanche-Mibray passèrent tour à
tour dans sa voix, son geste et son regard.
Ce fut avec un enthousiasme farouche
qu'il parla d'elle et de sa beauté.
Et, tout à coup, Dolorès l'interrompit.
Munito, dit-elle, regarde-moi.
Que veux-tu?
Tu as promis a M. de Villenàve de le
servir?
–Oui.
–-Et tu tiendras ta parole?
J'ai juré.
Munito, tu te mens à toi-même.
-Pourquoi? 2
Mais parce que cette femme que nous
haïssions tous deux.
–Eh bien?
Tu l'aimes maintenant.
Munito cacha son visage bouleversé dans
ses mains.
–Oh! tais-toi, dit-il, tais-toi!
–Tu l'aimes, répéta Dolorès, et tu 00
serviras point M. de Villenave.
–J'ai juré.
Tu n'auras pas tenir ton serment.
que s'adressait le démenti du gouvernénieïBt~T
autricnien.
C'-est donc gratuitement et a tort q~I'j~
gencellavàs s'est permis d'intercaler d~
ce télégramme les mots: ~Presse,
et nous a ainsi imputé une erreur qu~l]~
n'avôns-pas commise.
Un crédit supplémentaire de 88,004 fr..
90 c. est demandé par le ministre de l'inté-
rieur, pour payer les suppléments consacrés
par le ~oK!YeM/- à la publication des débats
du Corps législatif, pendant la session de
')866. Un crédit de ~30,000 fr. avait déjà
été voté.
La publication des. débats d'une seule
session, dans un journal déjà aSranchi du
timbre et du droit de poste, aura donc coûté
au Trésor plus de 85,000 fr.
Ne pourrait-on compenser cette dépense
avec le produit que les annonces, l'exemption
des impôts et la publication du ~oHt soM* donnent aux propriétaires du ~/OM:'Ne pourrait-on, tout au moins, mettre en
adjudication la publication des comptes-ren-
dus ? On,l'obtiendrait certainement meil-
leure et à meilleur marché ?
Ne pourrait-on enfin adopter le système
suivi enJBelgique, et faire des débats des
Chambres l'objet d'une publication spéciale
dont l'Imprimerie impériale serait chargée,
et qui serait mise à la disposition du pu'
bHc au prix coûtant? 9
Hier, a la salle des Conférences, un mem-
bre du Corps législatif annonçait à plusieurs
de ses collègues que, depuis la publication
du traité qui place l'armée badoise sous les
ordres du roi de Prusse, le drapeau prussien~
avait été arboré, a côté du drapeau badois,
à l'extrémité du pont de Kehl,enfacedu
drapeaufrançais.
Nous sommes convaincu que cet honora-
ble député a été le jouet d'une illusion et
que ses yeux l'ont-trompé. Lorsque, dans la
session dernière, M. Thiers a demandé à M.
le ministre d'Etat si le gouvernement fran-
çais permettrait à la Prusse de s'établir dans
le grand-duché de Bade, M. le ministre d'E-
tat a répondu « Non, jamais. ))
Le drapeau prussien Hotte sur Mayehce et
sur Luxembourg, et cela est déplorable il
est impossible qu'il soit à Kehi.
Une feuille viennoise, le Wa~~e~, donne
de ]a Constitution fédérale de l'Allemagne du
Nord une définition aussi énergique que pré-
cise
Le projet-de la Constitution du nord de l'Alle-
magne, que M. de Bismark, en uniforme de cuiras-
sier, a recommandé, dit-elle, à l'adoption du Reich-
stag à Berlin, est une constitution du despotisme
miniaire, accompagnée de dispositions douanières
et commerciales, à titre de soupapes de sûreté.
C'est une constitution sans droits du peuple, sans
vote d'impôts, sans contrôle des Snances, sans res-
ponsabilité des ministres; c'est une constitution
fédérale sans tribunal fédéral, dans laquelle l'Etat
le.plus puissant a seul le droit de parler, et les au-
tres n'ont qu'à obéir c'est une constitution dont
l'existence dépend des deux tiers dés voi~ du. gou-
vernement enfin, c'est un ensemble qui brise tous
les droits des constitutions partielles et qui ne re-
porté sur le tout aucun de ces droits.
Telle est l'œuvre que M. de Bismark a im-
posée anx plénipotentiaires des Etats confédé-
rés, et que les représentants de la libérale Al-
lemagne votent en ce moment!
On lit dans lé S:'éc~6 d'hier
En Prusse, l'attention est concentrée sur les dé-
bats du Parlement allemand. Ce Parlement ne réa-
lise jusqu'à présent aucune des espérances que l'on
avait fondées sur ses délibérations. Les dotéances
de la cause polonaise, présentées avec éloquence,
ont été repoussées par des invectives peu-dignes
d'un grand pays. On a été jusqu'à contester à Po-
sen qu'il fût encore une terre polonaise.
Il tressaillit et la regarda.
Voyons, dit froidement la gitana, que
voulons-nous tous deux, ou plutôt que vou-
lions-nous ?
Quelle s'intéressât à Fanû-eluche.
–Bon. Après? 2 ï 1
Et qu'elle n'épousât point le neveu de
l'homme qui a fait-envoyer Fanfreluche au
bagne.. 'j.
Eh bien elle ne l'épousera pas voila
tout..
–Mais. mon serment.
Elle redressa sa taille Sexible et souple,
etsonceils'enuàmma:
–Veux-tu quejete débarrasse de M. d«
Villenave? dit-elle. ,[
–Toi?
Veux-tu que dan: huit jours il ne se
souvienne pas plus de M" de Planche-Mi
bray que si elle n'avait jamais existé?
Tu ferais cela ?
–Imbécile! dit Dolorès.
Et elle posa sa belle main sur l'épaule du
bohémien et fourra ses doigts rosés dans sa
barbe noire et touSue, en manière de ca-
resse..
Puis, après un silence
Quand dois-tu revoir M. de Ville-
nave?.
–Demain.
Tu n'iras pas..
–Que ferai-je donc?
–Rien, je m'en charge.
Et elle passa dans la pièce voisine, s'as-
sit devant une table et écrivit le billet sui-
vant r
« Si M. de Villenave veut avoir des nou-
velles de Munito, il n'a qu'à se rendre au bal
de l'Opéra, demain soir samedi. On luien
donnera. ))
Puis elle mit le billet sous enveloppe et
le tendit a Munito.
–Tu peux lui faire tenir cela demain
soir, dit-elle..
–Et puis?
–Et puis tu attendras. Monsieur de
Villenave, a nous deux 1
Et elle eut un regard de tigresse amou-
reuse qui nt frémir Munito.
PONSON DU TERRAIL.
MMC(B~ i~'
~UREAUX C'RBONSESi~T, ):3, ME MPNïM
Mercredi %7 mar§ t@@7
3 MOIS (P9Met~4ttem6Bt~~ne) 4~S~!
MMNCES. 8. PL M~B~
-~toe quiMncerM l'Administr~ioB~daJountatdott~ti.e adressé au Gefaat
3~ ~me~ `
M~S~r~q~ro~ë !e ~tda ~diBerJtar&lacU~n dies.ApMnce~j
MM. lès abonnés dont l'abonnement expire
le 3! mars, sent priés do le renouveler
de suite, s'ils ne veulent pas éprouver de
retard dans la Foeeption du journal.
Les abonnés nouveaux ont droit a rece-
voir la C~
les .4MM.)ws de pMss~e, par M. Georges Tath,
et teut ce qui a paru de la CA~doÏM e!c
~aw~e-~t'~rsy, par M. PeNSON DU TERRAIL.
PARIS, 26 MARS 1867
M QUESTION MOMENT
Les divers intérêts d'un grand pays, au
dehors et au dedans, sont solidaires les uns
des autres. Ce sont les parties d'un même
tout, lès aspects variés d'un même ensem-
ble et les questions de politique étrangère,
quoique distinctes en apparence, sêïutta-
chent presque toujours les unes aux autres
par des tiens plus ou moins visibles, mais
réels et puissants.
C'est ainsi que dans la discussion provo-
quée au Corps législatif par les interpella-
tions sur les a8'a ires d'Allemagne et d'Italie,
la question d'Orient, quoique étrangère
au débat, s'imposait néanmoins, par son
importance propre, a ta pensée des orateurs.
Voici en quelsteroMS s'est exprimé sur ce.
sujet M. Thiers dans son éloquent discours
su '.[l).ièrslla}J:S ~on ~19qù~Iit disgours
du t4 mars
Quel est l'intérêt de l'Europe? D'empêcher qu'il
Be se passe en Orient quelque chose d'analogue à
ce qui se pas
Russes. Sieettë Russie qui va du cap Nord ait dé-
troit de Behring, que parcourent des Meuves qui se
jettent TÎana la-Battiq~e etia mer Noire, occupait
Constantinople,~lte aurait plus de cent miflious de
sujets, et ators !a prédiction sinistre de Napotëon
serait accomplie. Le bon sens, c'est donc d'y
maintenir Ié< Tnrca, parce qu'ils y sont. On dit
Mais ce sont des barbares. Eh! oui; mais cepen-
dant tout barbares qu'ils soat, ils ne le sont pas
plus que ceux qui veulent les remplacer. Je sais
~én qu'Us ne sont pas chrétiens je sais bien que
l'Evangile est supérieur au Coran; mais, après tout,
j'aime autant un Turc Ëdële au Ceran qu'un chré-
tien in6dë)e à Evangile. '<
Ua Russie a adopté une politique de sympa-
thie ponnës chrétiens eUe prépare l'avenir en
'whercbantà~es détacher de 1 empire ottoman.
Ce qui frappe dans ce langage si ferme et
si précis, c'est que l'émanent homme d'Etat
qui le tenait se montrait inspiré, avant tout,
de l'intérêt français. C'est cette préoccupa-
tion d'une justesse supérieure, et d'un si ad-
mirable bon sens, qui donnait aux paroles de
M. Thiers, dans le grand débat qui vient de
Enir, cette force de persuasion à laquelle
rendent hommage ses adversaires eux-mê-
"mes,'
Pendant qu'au nom de l'intérêt français,
l'illustre orateur condamnait la formation
d'un empirëmilitaire en Allemagne, et celle
de l'unité.italienne, il faisait toucher du
dongt, en quelque sorte, les nouveaux pé-
rils que l'application à la question d'Orient
du prétendu principe des nationalités fera
courir à la liberté, et & la paix du monde
qu'il a.déjà singulièrement troub'ée. II n'est
personne désormais qui ne reconnaisse que
l'eSet certain des grandes agglomérations de
peupfes, préconisées par la politique du
jour, sera~ de détruire rapidement l'in-
Ruence de la France en Europe, ou du
moins de l'amoindrir considérablement.
C'est ense 'plaçant à ce point de vue, h
la fois si éle~et si politique, que M. Thiers
a pu dire avee une haute raison qu'il préfe-
.FEUBJ.EION DE LA ~AS~E
DBS7KAMI8M
fBAWn~ RE PtiMF-mRn
ttHAttLAmB~~ rjLMuM m8Mt
PREMIÈRE PARTIR
Revenons~ Munito. `
Où' étatt-il aUe en s'arrachant a cette fas-
cination vertigineuse que la vue de !a Seine
coulant silencieuse, neire et profonde entre
ses deux rives de pierres, avait exercée sur
'tai?"
U traversa le pont, puitia place de !à
Concorde, arriva à Ja Madeleine, suivit un
moment le boutevard, puis entra dans la
rueCaùmàrtml
H était alors plus de deux heures du ma-
tin. Le boulevard était à peu près désert, et
ta rue Caumartin tout a fait.
Munito, après avoir un moment hésité,
reprit son chemin d'un pas rapide, et tou-
jours en proie à une sorte d'exaltation.
Vers le milieu de larueGaumartIn, a
gauche; s'élevait une maison neuve sous la
porte cochère de laquelle le bohémien s ar-
'rêta.
Cette maison était située juste en face de
celle qu'habitait Pauline Régis.
Munito sonna.
Une main indolente et ensommei!!ée tira
maMe cordon, car Munito eatenditun bruit
sec et la porte ne s'ouvrit pas.
Alors il sonna plus fort, et avec une n4-
vreuse impatience.
'Cette fois la porteS'ouvrit; mais lecon-
Gierge, tout a faitj'év6i!!é, sauta à bas de e
son lit, comme Munito entrait sous la voûte,
et demanda a qui il avait aS'aire.
–C'est moi, dit le bohémienr
–Qui, vous?
B<~MdoctN)n tat~rdi~ aux journaux qui a'ent
pM t~S a~& !a ~oc~S de& Gens de rettres,
rait à Constantmopte t'em~ire turc, qui s'y
j trouve déj~, à un empire chrétien impossi-
ble. La domination des sultans, qui ne le
voit? n'aura d'autre héritier sur les rives
du Bosphore que le despotisme des czàrs.
Que l'on examine/en enet, cette idée
d'un empire formé despopulations chrétien-
nes actueHemeat soumises au sultan, et l'on.
reconnaîtra que les divisions de races, de
croyances, de cultes, de rites séparant pro-
fondément ces populations; que la force
numérique de chacune d'elles est relative-
ment faible que leur infériorité, au point
de vue de la civilisati.on et de l'aptitude
gouvernementale, est attestée par le témoi-
gnage unanime de tous ics voyageurs; qu'en
un mot, tout démontre l'impossibilité abso-
lue de constituer, avrc ces seuls éléments si
hétérogènes, si antipathiques les uns aux
autres/un grand Etat solide et compact,
portant en lui-même les principes de vie et
de durée qui donneraient de la sécurité aux
puissances européennes.
I! y a plus encore. Grâce à des agissements
préparés de longue main, grâce à la compli-
cité d'une partie du clergé grec, les races
gréco-slaves paraissent constamment dispo-
sées à recourir à la protection de la Russie.
En vain la France, l'Autriche, l'Angleterre
ont pris chaudement la défense de leurs in-
térêts, les Gréco-Slaves se tournent de pré-
férence vers la Russie, dont la diplomatie ne
leur marchande pas les plus séduisames.
promesses. Donnez aujourd'hui à ces ra-
ces l'autonomie absolue, et elles s'en servi-
ront pour se déchirer entre elles et se jeter
ensuite, par haine les unes des ~autres,
entre les Jjras du czar. Aurait-on déjà ou-
blié l'effet saisissant produit, il y a quelque
quinze ans, par l'arrivée a Constantinople
d'un grand-duc héritier de Russie, et l'em-
pressement affecté d'une partie de la popu-
lation grecque~ le considérer et presque a
le traiter hautement comme son futur em-
pereur ? q
Les pubitcistës et les politiques qui con-
spirent au renversement de la puissance
ottomane, et rêvent une restauration de
l'empire grec, ne peuvent cependant pas
ignorer dans quel abaissement étaient tom-
bées ces populations lorsqu'il y a quatre
siècles les Turcs en firent si facilement là
conquête. Le joug de la servitude, qui pesa
ensuite si longtemps sur elles, n'était cer-
tainement pas fait pour les relever ni les
rendre meilleures. La'liberté, ou pour par-
ler exactement la pratique de la liberté, leur
rendra 'seule les vertus viriles et les senti-
ments de dignité nationale qui semblent ef-
facés de leur esprit.
Mais ce progrès si nécessaire exige l'ac-
tion du temps, et ne saurait se réaliser
en un jour, comme par l'eSët soudain d'un
coup de baguette magique.
La nécessité du maintien de l'empire ot-
toman admise, comment concilier ce grand
intérêt européen avec l'intérêt n@n moins
respectable de ces mêmes populations chré-
tiennes ? Et d'abord, quel est le sort fait
aujourd'hui aces populations? Car ce sont
ces deux buts qui forment lepivot de.Ia po-
litique traditionnelie de la France vis-a-
vis du sultan et vis-a-vis des chrétiens de
la Turquie.
Lorsque la Pologne.Eervait de barrière a
la puissance moscovite, dont le nom était à
peine connu; lorsque l'Europe n'avaitpointa
redouter de voir Constantinople tomber aux
mains d'un maître dont le pouvoir absolu
s'étend des bords de la Newa aux rives delà
mer Noire et sur toute l'Asie septentrionale,
la politique française a l'égard de la Turquie
était bien simple. Elle pouvait se formuler en
quelques mots se maintenir en bons termes
avec le sultan qui, depuis François F' était
–Le frère deM~Dolorès.
Le concierge referma son carreau d'un
air de mauvaise humeur et se recoucha.
Mais eu montant l'escalier, Munit? l'en-
tendit qui disait sa femme: 1
Tous ces bohémiens ne me convien-
nent guère. J'en parlerai au propriétaire
et il leur donnera congé.
Munito haussa les épaules et monta jus-
qu'au troisième étage.
II n'y avait qu'une porte sur le pallier.
Au heu de sonner, Munito tira une clé de
sa poche, l'introduisit dans la Serrure et
entra.
I! se trouva alors au seuil d'une anti-
chambre assez vaste, éclairée par une lam-
pe à verres de couleurs.
Après l'antichambre, Munito traversa un.
salon meublé avec ce luxe futile et un peu
peu bizarre qu'afnchent certaines femmes de
mœursiégères.
La, pareillement, brûlait une lampe a ver-
res dépolis qui projetait une clarté mate
autour d'elle.
A l'extrémité du salon était une porte sur
laquelle le bohémien frappa deux coups.
–Est-ce toi ? dit une voix de femme.
C'est moi, dit Munito.
Et H poussa cette porte.
H se trouva alors au seul! d'une petite
pièce singulièrement décorée.
On eût dit une pagede indienne ou, mieux
'encore, un temple moresque.
Les murs, le plafond, les vitres des croi-
sées étaient couverts de peintures bizarres,
représentant des scènes empruntées à quel-
que religion mystérieuse et certainement
inconnue à Paris.
Le sol était couvert d'un tapis à couleurs
violentes et parsemé des mêmes signes.
Pour tous meubles, des nattes, des cous-
sins, un narguUeh à double tuyau.
Appendus au mur un tambour de Basque
et des castagnettes, et au-dessous une gui-
tare espagnole.
Au milieu de cette pièce, à demi couchée
sur le tapis, et la tête appuyée sur une pile
de coussins, se tenait une créature éblouis-
sante de beauté.
Avez-vous vu le fruit mûr etdoréacôLé
du fruit vert?
La femme épanouie dans toute sa splen-
deur auprès de !a. j&une nile encore chétive
etdontlea épaules n'ont point acquis toute
la pureté de leur galbe ? 9
pour nous un allié souvent utile, jamais oné-
reux, et faire servir noire influence à Cons-
,tantinop!e à protéger le plus possible les
chrétiens de l'empire. De là !es capitula-
tions. De là aussi le respect qui, depuis les
Croisades, entoure le nom de la France
dans l'AnatpHe, en Palestine et en Egypte.
Cette politique, généreuse et protectrice,
que la France a eu l'honneur de pratiquer en
Turquie avant les autres nations occidenta-
les, et a laquelle chacun ,dja nos divers gou-;
vernements, y compris la Convention elle-
même, tint a honneur de demeurer fidèle,
cette politique séculaire n'a certes pas été
stérile pour les chrétiens.
Mais,-aujourd'hui, après les événements
accomplis en Allemagne et en Italie, qui ont t
si gravement modifié la force relative des
Etats du centre de l'Europe; en présence
des tentatives de saulèvement qui se pro-
duisent dans certaines provinces de la
Turquie, et dans lesquelles la main de
l'étranger se laisse si clairement apercevoir;
après les déclarations si explicites d'Alexan-
dre 1"' et de l'empereur Nicolas, la politique
française, si elle peut, quant à son but, res-
ter la même qu'il y a cinquante ans, ne
pourrait du mo*ns suivre la même ligne
droite et simple. A côté de l'intérêt des chré-
tiens, ii y a celui de la sécurité de l'empire
ottoman.
Sans doute la chute de Sébastopol a châ-
tié d'une manière éclatante l'orgueil du
souverain qui avait envoyé au sultan l'am-
bassadeur Menschikoff, de fastueuse mé-
moire. Mais dix années se sont écoulées de-
puis cette leçon. La Russie, suivant son
expression, s'est recueillie; et elle vient
de montrer, depuis quelques mois, que son
ambition suppose le moment favorable pour
se réveiller, Le péril, contre lequel la France
et. l'Angleterre s'étaient armées, a reparu.
Comment le conjurer ?
L'intérêt des chrétiens de la Turquie é-
tant le prétexte dont se sert la Russie pour
miner l'empire ottoman et le ruiner dans
l'opinion, ce qu'il faut d'abord, c'est pro-
téger cet intérêt sans détruire l'autorité du
sultan; c'est obtenir de ce souverain l'é-
galité des droits pour les chrétiens et tes
musulmans, non l'égalité nominale, inscrite
théoriquement dans une charte, mais l'éga-
lité réelle et en action.
Or, depuis-près de trente ans, le gouver-
nement turc partage sur ce point les idées
des puissances occidentales. Le hatt-i-chérif
de GuI-Hané, du 3 novembre 839, atteste
que dès cette époque la Porte était pénétrée
de la nécessité d'élever ses populations
chrétiennes politiquement et civileaient,
mais graduellement, au niveau de la race
jusqu'alors dominante. Les mêmes princi-
pes d'équité et de progrès présrdèrent à la
rédaction du hatt-i-chérif du 7 septembre
'i854. Enfin, une idée vraiment civilisatrice
et libérale dictalehatt-i-humaïoumdu ')8 8
février') 856.
Cet. acte célèbre (dont les'dispositions
étaient d'ailleurs appuyées par les articles
d'un traité conclu à la même date entre
la Turquie et les puissances européennes),
que l'on recommence à citer aujourd'hui
dans les dépêches et les documents diplo-
matiques, maintenait d'abord les garanties
promises à tous les sujets du sultan par le
hatt-i-humaïoum de GuI-Hané,et en, con-
formité du tanzimat, sans distinction de
classes ni de cuttes, pour la sécurité de
leurs personnes, et de leurs biens, et pour
la conservation de leur honneur. Le sultan
tenait à montrer la continuité de ses senti-
ments de justice bienveillante envers tous
ses sujets indistinctement.
L'article ~déclarait solennellement ces
garanties confirmées et consolidées, et an- i
N'en déplaise aux vieillards blases-, la
vraie femme, celle dont la beauté enivre
comme le bouquet d'un vin capiteux, c'est
celle de trente ans.
La beauté de M"~ de Plamche-MIbray au-
rait pâli auprès de la beauté de celle chez
qui Munito pénétrait cette heure.
Et pourtant c'était le menae type oriental,
les mêmes grands yeux d'un bleu sombre,
les mêmes lèvres rouges et provoquantes',
mais ce type, déjà si remarquable chez la
baronne, était peut-être encore plus pur chez
cette autre femme.
Et puis la misère d'autrefois, les plaisirs
violents, les fatigues d'aujourd'hui, avaient
allangui le regard tout en lui laissant sa
sombre énergie.
Il se dégageait de cette créature comme
un acre parfum de volupté sinistre et mys-
térieuse, qui montait a la tête et pénétrait
par tous les pores.
A la vue de Munito, ses lèvres laissèrent
échapper le tuyau du narguileh.
Elle se leva, développant ainsi toutes les
richesses de sa taille, aux ondulations féii-
'nes, et laissant voir son petit pied nu qui
passait sous la jupe d'une robe de velours
noir serrée par une cordelière de soie rouge,
et qui, avec une chemisette de batiste iratjs-
parente, composait son unique vêtement.
Sa chevelure d'ébène dénouée tombait en
Sots tumultueux jusque sur ses talons et
couvrait ses épaules demi-nues.
Etait-ce donc là la petite Stie qui dansait
a Auxerre sur les tréteaux du pauvre sal-
timbanque Fanfreluche?
Et si c'était elle, que, signifiait le luxe
étrange qui l'entourait?
Dolorès, c'était son nom, s'était éveillée
un matin, rassasiée de misère, avide de
plaisir et d'or.
Eile avait alors vingt ans et dans le cœur
un amour en cendres.
Elie avait aimé un homme de sa race qui
l'avait battue longtemps, puis l'avait aban-
donnée pour une autre de' ses pareilles.
La bohémienne dansa pour la dernière
fois sur la -corde, au Château-d'Eau, avant
qu'on ne fit disparaître, au profit de la ca-
serne Napoléon, ces pittoresques baraques,
tous ces petits théâtres en plein vent qui
jouaient tout le jour, comme leurs voisins
du bou!eva)'d du Temple, les grands ihéà-
tres, allumaient leur rampe chaque soir.
Un jeune homme ennuyé et riche qui pas-
nonçait que des mesures efficaces seraient
prises pour qu'elles' reçussent leur plein et
entiereffet.
L'arLide 2 confirmait et maintenait tous
les privilèges et immunités de l'ordre spi-
rituel accordés a& SH~î~o par les sultans,
et a< des dates postérieures, à toutes les
communautés chrétiennes ou d'autres rites
non musulmans établis dans l'empire sous
l'égide protectrice du prince régnant. .1
L'article. 3 portait que chaque commu-
nauté chrétienne, ou d'autre rite non mu-
suiman, serait tenue, dans un délai fixe, et
avec le concours d'une commission formée
a~/toc dans son sein, de procéder avec la
haute approbation du sultan, et sous la sur-
veillance de la Porte, a l'examen de ses im-
munités et privilèges actuels, aiin d'y dis-
cuter et soumettre à la Porte 'les réformes
exigées par le progrès des lumières et du
temps. C'était déclarer que l'on conserve-
rait ce qui était bien et ~u'on ne détruirait
que les abus. C'était en même temps faire
intervenir les chrétiens comme tels dans la
discussion -et la gestion des intérêts de leur
communion.
Puis venaient des dispositions spéciales
sur la nomination des patriarches, des mé-
tropolitains, etc.; sur les redevances ecclé-
sia-stiques, les propriétés des divers clergés
chrétiens, sur la construction et la répara-
tion des édifices religieux, sur la liberté
absolue des manifestations extérieures d'un
culte dans les localités où ce culte serait
seul pratiqué sur la réparation des écoles
et des hôpitaux, etc. La liberté, des cultes
était formellement reconnue par l'article 4 4,
et l'article 43 interdisait toute qualifica-
tion injurieuse ayant trait à la diversité des
cultes. Chaque communauté pouvait avoir
ses écoles, et l'article 17 instituait un con-
seil m.ixte d'instruction publique. Il suffit
de parcourir cette énumération des libertés
concédées pour voir qu'il y a en Europe
plus d'un pays qui se croit civilisé et qui
est loin de posséder les mêmes libertés.
De plus, les articles 5 et 4 déclaraient
l'égale admissibilité de tous les sujets du
suttan aux fonctions et emplois publics, et
aux écoles du gouvernement. C'était rayer
d'un trait de pisme la vieille exclusion des
raïas, et rompre avec des préjugés qui a-
vaient presque la force d'un principe.
Les articles 8 eH 9 instituaient des tri-
bunaux mixtes pour les musulmans et les
chrétiens ayant des affaires communes; dé-
crétaient la publicité des audieuces, et auto-
risaient les témoins à prêter serment selon
la formule admise dans leur religion. Pour
apprécier cette dernière concession, il suffit
de se rappeler ce qu'il a fallu d'efforts et de
luttes en Angleterre, avant d'arracher aux
partisans de l'Eglise établie, la même con-
cession. Et cependant l'Angleterre est la
terre classique de la liberté! l
Les articles suivants ordonnaient la ré-
daction d'un code, la réforme pénitentiaire,
l'abolition de la torture, et une organisation
de la police propre à donner des garanties
à la sécurité et a la liberté individuelle. =
Tous les sujets du sultan devaient être
soumis aux obligations de recrutement,
mais le principe du remplacement était ad-
mis.,Ainsi, le droit de porter l'épée pour la
défense du territoire n'était plus le privilège
exclusif des musulmans.
L'article 34 accordait le droit de pro-
priété aux étrangers, mais seulement après
que des arrangements auraient eu lieu avec
les puissances étrangères. Cette réserve était
unecoasëquence de l'existence des capitu-
lations qui font aux étrangers une situa-
tion a certains égards privilégiée dans
l'empire. C'est un point fort grave qui mé-
sait par la, descendit de son poney-chaise,
s'arrêta devant la baraque, vit danser la
bohémienne ets'enéprit.
Huit jours après, Dolorès avait un mobi-
lier, une voiture, des diamants et des den-
telles.
Cinq ans plus tard, Dolorès était une des
femmes galantes les plus célèbres de Paris i
mais, Paris, on oublie vite; et les réputa-
tions qui se font en vingt-quatre heures pas-
sent avec la même,rapidité.
Un matin, la senora Dolorès,, comme on
l'appelait, disparut.
Paris s'en émut et la chercha puis, com-
me il ne la retrouva point, il n'y pensa
plus.
Un-boyard avait pris sur elle une revan-
che de Sébastopol; la Russie avait enlevé
Dolorès a la France.
Dolorès'avait eu alors une série d'aventu-
res à défrayer de nouveaux contes des~t'Më
et MKe j~VM!
Pétersbourg, elle avait tourné la tête à un
aide de camp de l'empereur, et lui avait
dévoré une douzaine de villages et six mille
paysans.
Chassée par la famille du jeune of6cier,
elle était descendue vers Constantinople,
avait ruiné un Madgyar à Odessa, deux pa-
chas Smyrne, séjourné au harem d'unbey
célèbre, et pris la fuite, une nuit, en traver-
sant le Bosphore à la nage.
Le navire qui la ramenait en France fut
pris et pillé par des pirates, et cette fortune
aux sources diverses, ces rubis et ces dia-
mants qu'elle rapportait de Pétersbourg, du
Caucase, de Gonstantmople et de Smyrne,
devinrent la proie des forbans grecs.
Elle amva a Marseille pauvre, mais plus
.belle que jamais.
Elle y vécut trois ans, reconstruisant peu
àpeul'édi6ceécrou!é.
Puis, un matin, le mal de Paris la reprit,
et .elle y revint.
Mais, au milieu de cette existence pitto-
resque et tourmentée, Dolorès la gitana
était restée 6dè!e aux attachements de son
enfance elle n'avait jamais perdu complé-
tement de vue son frère Munito, trop fier
pour accepter tout ou partie de son opulence
et continuant son métier de saltimbanque.
Ch&que fois qu'elle avait pu revenir de
ses lointains voyages, elle s'était rendue à
Toulon pour y voir le pauvre Fanfreluche.
ri te un examen à part, et sur lequel nous
reviendrons.
-'Ennn, d'autres dispositions prescrivaient
]a suppression des abus dans la perception
des Impôts, le remplacement dd~ système
des fermes par la perception directe, les
travaux publics, la publication du budget,
)a création des banques et institutions, de
crédit, celle de routes etde canaux, et l'abo-
lition des entraves qui gêmient le dévelop-
pement de l'agriculture.
Ce rapide sommaire indique combien la
reforme inaugurée parle hatt-1-humaïoum
était complète. C'était en réalité une révolu-
tion pacifique et progressive, mais a peu
près radicale. Qu'est devenue, à l'exécution,
cette espèce de charte du 18 février ') 856 ? `t
Quels obstacles a-t-elle rencontrés? Qu'y
aurait-il à faire pour que ce grand acte pro-
duisît tous les bienfaits, tous les résultats
heureux que promettent les termes mêmes
dan's lesquels il est conçu? En un mot, dans
quelle situation a-t-il placé les chrétiens de
l'empire ottoman?
C'est ce qu'il importe d'examiner.
FRANCIS MAUX.
–&
~POffnFC 'P~T~BADSïmîTC
UL~&~nLB i&L&bna.rsl~Utb
!I6UE
Florence, 88 mars.
La Chambre des députés a validé jusqu'à.ce mo-
ment 403 élections.
PRtNOPtUTÉS caNUBtENHES
Bucharest,'26mars.
La Chambre a adopté par 75 voix contre 82 le
projet de loi qui transporte & Jassy le siège de la
cour de cassation. r
La session de la Chambre \'ient d'être prolongée
jusqu'au H avril.
PRUSSE
1.. Berlin, 25 mars.
Des journaux de Berlin et de l'étranger ont ra-
conté que lors de l'illumination pour l'anniversaire
de la naissance du roi, l'ambassade d'Autriche a-
vait mis, sur le transparent de son hôte! les pre-
mières paroles ds l'hymne national prussien.
Ce bruit est erroné. Il a pris naissance dans ce
fait que le propriétane
l'ambassadeur, de placer les paroles en question
sur le transparent de la façade.
Berlin, Somars.
Dans un discours adressé aux ministres, le jour
de l'anniversaire de sa naissance, le roi a fait res-
sortir particulièrement le caractère pacifique de la
mission prochaine de la Prusse.
La Prusse, a dit Sa Majesté, doit jeter les semen-
ces d'un développement pacifique dans le sol-alle-
mand labouré par les armes prussiennes. Telle est
la tache que j'ai à remplir pendant les années que
j'ai encore à vivre.
TURQUiE
Constantinople, 28 mars.
Le journal la Tur~MM, parlant du discours de
lord Stanley, d'après lequel la France aurait pro-
posé à la Porte de céder Candie à !a Grèce, se dé-
clare autorisé à déclarer que jamais ni le gouver-
nement français, ni aucun autre, n'a fait à la Porte
une proposition semblable.
(Agence 7i'
~~s~ POLITIQUE
L'Agence Havas a distribué hier un télé-
gramme de Vienne, prétendant démentir une
dépêche publiée par ~'oun~ ~Presse, de
Parts. La dépêche dont il s'agit n'a jamais
paru dans nos colonnes, mais dans celles de
la Presse, de Vienne, et c'est à ce journal
Enfin, depuis un an, Dolorès était & Pa-
ris. Mais l'homme qui régnait alors sur son
cœur était un Espagnol farouche et jaloux
qui la laissait a peine sortir, et cela expli-
quait comment le monde oisif et élégant
qui jadis l'avait accueillie avec enthousias-
me ne savait même plus qu'elle existait.
Depuis un mois, Munito était de retour h
Paris.
Les deux bohémiens s'étaient rapprochés
dans un but commun
Empêcher M"~ de PIanche-Mibray d'é-
pouser M. de Maugeville et intéresser la
jeune femme a Fanfreluche.
Munito, en possession de la clé que lui
avait donnée M. de Villenave, avait vu sa
sœur avant d'aller à cette aventure nocturne
dans laquelle nous l'ayons suivi.
Dolorès lui avait dit
Quoi qu'il arrive, tu viendras me le
dire, n'est-ce pas?
Munito l'avait promis, et Dolorès l'avait
attendu.
Aussi, en le voyant entrer, elle se leva vi-
vement et lui dit ce mot unique
–Eh bien? 1.
Munito était pâle et sombre.
Il raconta d'une voix brève/saccadée,
émue, son entretien avec la baronne. `
Les étonnements, la colère, l'émotion de
M' de PIanche-Mibray passèrent tour à
tour dans sa voix, son geste et son regard.
Ce fut avec un enthousiasme farouche
qu'il parla d'elle et de sa beauté.
Et, tout à coup, Dolorès l'interrompit.
Munito, dit-elle, regarde-moi.
Que veux-tu?
Tu as promis a M. de Villenàve de le
servir?
–Oui.
–-Et tu tiendras ta parole?
J'ai juré.
Munito, tu te mens à toi-même.
-Pourquoi? 2
Mais parce que cette femme que nous
haïssions tous deux.
–Eh bien?
Tu l'aimes maintenant.
Munito cacha son visage bouleversé dans
ses mains.
–Oh! tais-toi, dit-il, tais-toi!
–Tu l'aimes, répéta Dolorès, et tu 00
serviras point M. de Villenave.
–J'ai juré.
Tu n'auras pas tenir ton serment.
que s'adressait le démenti du gouvernénieïBt~T
autricnien.
C'-est donc gratuitement et a tort q~I'j~
gencellavàs s'est permis d'intercaler d~
ce télégramme les mots: ~Presse,
et nous a ainsi imputé une erreur qu~l]~
n'avôns-pas commise.
Un crédit supplémentaire de 88,004 fr..
90 c. est demandé par le ministre de l'inté-
rieur, pour payer les suppléments consacrés
par le ~oK!YeM/- à la publication des débats
du Corps législatif, pendant la session de
')866. Un crédit de ~30,000 fr. avait déjà
été voté.
La publication des. débats d'une seule
session, dans un journal déjà aSranchi du
timbre et du droit de poste, aura donc coûté
au Trésor plus de 85,000 fr.
Ne pourrait-on compenser cette dépense
avec le produit que les annonces, l'exemption
des impôts et la publication du ~oHt
adjudication la publication des comptes-ren-
dus ? On,l'obtiendrait certainement meil-
leure et à meilleur marché ?
Ne pourrait-on enfin adopter le système
suivi enJBelgique, et faire des débats des
Chambres l'objet d'une publication spéciale
dont l'Imprimerie impériale serait chargée,
et qui serait mise à la disposition du pu'
bHc au prix coûtant? 9
Hier, a la salle des Conférences, un mem-
bre du Corps législatif annonçait à plusieurs
de ses collègues que, depuis la publication
du traité qui place l'armée badoise sous les
ordres du roi de Prusse, le drapeau prussien~
avait été arboré, a côté du drapeau badois,
à l'extrémité du pont de Kehl,enfacedu
drapeaufrançais.
Nous sommes convaincu que cet honora-
ble député a été le jouet d'une illusion et
que ses yeux l'ont-trompé. Lorsque, dans la
session dernière, M. Thiers a demandé à M.
le ministre d'Etat si le gouvernement fran-
çais permettrait à la Prusse de s'établir dans
le grand-duché de Bade, M. le ministre d'E-
tat a répondu « Non, jamais. ))
Le drapeau prussien Hotte sur Mayehce et
sur Luxembourg, et cela est déplorable il
est impossible qu'il soit à Kehi.
Une feuille viennoise, le Wa~~e~, donne
de ]a Constitution fédérale de l'Allemagne du
Nord une définition aussi énergique que pré-
cise
Le projet-de la Constitution du nord de l'Alle-
magne, que M. de Bismark, en uniforme de cuiras-
sier, a recommandé, dit-elle, à l'adoption du Reich-
stag à Berlin, est une constitution du despotisme
miniaire, accompagnée de dispositions douanières
et commerciales, à titre de soupapes de sûreté.
C'est une constitution sans droits du peuple, sans
vote d'impôts, sans contrôle des Snances, sans res-
ponsabilité des ministres; c'est une constitution
fédérale sans tribunal fédéral, dans laquelle l'Etat
le.plus puissant a seul le droit de parler, et les au-
tres n'ont qu'à obéir c'est une constitution dont
l'existence dépend des deux tiers dés voi~ du. gou-
vernement enfin, c'est un ensemble qui brise tous
les droits des constitutions partielles et qui ne re-
porté sur le tout aucun de ces droits.
Telle est l'œuvre que M. de Bismark a im-
posée anx plénipotentiaires des Etats confédé-
rés, et que les représentants de la libérale Al-
lemagne votent en ce moment!
On lit dans lé S:'éc~6 d'hier
En Prusse, l'attention est concentrée sur les dé-
bats du Parlement allemand. Ce Parlement ne réa-
lise jusqu'à présent aucune des espérances que l'on
avait fondées sur ses délibérations. Les dotéances
de la cause polonaise, présentées avec éloquence,
ont été repoussées par des invectives peu-dignes
d'un grand pays. On a été jusqu'à contester à Po-
sen qu'il fût encore une terre polonaise.
Il tressaillit et la regarda.
Voyons, dit froidement la gitana, que
voulons-nous tous deux, ou plutôt que vou-
lions-nous ?
Quelle s'intéressât à Fanû-eluche.
–Bon. Après? 2 ï 1
Et qu'elle n'épousât point le neveu de
l'homme qui a fait-envoyer Fanfreluche au
bagne.. 'j.
Eh bien elle ne l'épousera pas voila
tout..
–Mais. mon serment.
Elle redressa sa taille Sexible et souple,
etsonceils'enuàmma:
–Veux-tu quejete débarrasse de M. d«
Villenave? dit-elle. ,[
–Toi?
Veux-tu que dan: huit jours il ne se
souvienne pas plus de M" de Planche-Mi
bray que si elle n'avait jamais existé?
Tu ferais cela ?
–Imbécile! dit Dolorès.
Et elle posa sa belle main sur l'épaule du
bohémien et fourra ses doigts rosés dans sa
barbe noire et touSue, en manière de ca-
resse..
Puis, après un silence
Quand dois-tu revoir M. de Ville-
nave?.
–Demain.
Tu n'iras pas..
–Que ferai-je donc?
–Rien, je m'en charge.
Et elle passa dans la pièce voisine, s'as-
sit devant une table et écrivit le billet sui-
vant r
« Si M. de Villenave veut avoir des nou-
velles de Munito, il n'a qu'à se rendre au bal
de l'Opéra, demain soir samedi. On luien
donnera. ))
Puis elle mit le billet sous enveloppe et
le tendit a Munito.
–Tu peux lui faire tenir cela demain
soir, dit-elle..
–Et puis?
–Et puis tu attendras. Monsieur de
Villenave, a nous deux 1
Et elle eut un regard de tigresse amou-
reuse qui nt frémir Munito.
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