Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1930-08-13
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 164718 Nombre total de vues : 164718
Description : 13 août 1930 13 août 1930
Description : 1930/08/13 (Numéro 225). 1930/08/13 (Numéro 225).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k296323z
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
0
FIGARO I
Fondé le i+ Janvier i8afc g 0
Aucuns Directeurs H. DE VlLLEMESSANT S 0
F.Masnard.O.Calmette. A.Capus. R.oe Flers o
o
O
ABONNEMENTS 3 nitis S mois -un g
.P8ris,Départem.etColonies. 30" 54» I0O" o 0
ÉTRANGES o
Pays à tarif postal réduit 52» iOQ" 190» S ô
Pays à tarif postal augmenté. 72» 140" 260» g 0
On s'abonne dans tous les Bureaux de Poste S
de France ï
Chèque postal 242-53 Paris S
o
0
105e Année. N° 225 de 1930
Édite en f'Hôtef de
FIGARO
14, Rond-Point des Champs-Elysées
PARIS (Vffl«).
ADMINISTRATION-RÉDACTION-PUBLICITÉ
ANNONCES
14. Rond-Point DES Champs-Elysées. PARIS
Ték'ptiones Elysées 98-31 à 98-88
Adresse télégraphique "FIGARO 45- PARIS
L*OUÉ PAR CEUX»CI, BLÂMÉ PAR CEUX.LÂ, ME MOQUANT DES SOTS, BRAVANT LES MÉCHANTS, JE HE
PRESSE DE RIRE DE TOUT.. DE PEUR D'ÊTRE OBLIGÉ D'EN PLEURER.
POUVEZ. VOUS, FIGARO, TRAITER SI LÉGÈREMENT UN DESSEIN Qm NOUS COÛTE X TOUS LE BONHEUR ï
-̃ BEAUMARCHAIS.
MERCREDI 15 AOUT 1950
MERCREDI 13 AOUT 1930
aDI&ŒECTJÈTTJa" ^JEtjAJSFÇOIS COTT
SOMMAIRE DE FIGARO
PAGE 2. Les Cours. -les Ambassades. le Monde
et la Ville. Les Echos. La Saison.
La grande quinzaine de Deauville.
PAGE 3. L'anniversaire de la Constitution de
Weimar à Paris. Nouvelles diverses.
Au conseil de Rambouillet. Les grèves du
Nord. Le drame de Viry-Châtillon.
Dernière Heure.
PAGE 4. Raymond de Passillé Le scandale
de la Bourse de commerce et ses conséquences.
Jules Laurent La Vie universitaire.
Revue de la presse. Rose Macaulay L'Ile
des Orphelins.
PAGE 5. Robert Brussel Le mouvement mu-
sical. Henri Davignon Les mémoires d'un
journaliste belge. James de Coquet Les
Premières. Les Alguazils Courrier des
lettres.
PAGE 6. La Bourse La Cote des Valeurs.
Le programme des spectacles. Courrier des
théâtres.
PAGE 7. La Vie spotive. ,~n.t~
,r v;%fefe^a-^sî-i.£:Jija$'
LA POLITIQUE
Les aventures
des lois
Un des auteurs de la loi sur les assu-
rances'sociales remarquait récemment
v que toutes les grandes réformes avaient
donné lieu à des difficultés. C'est une
manière de se consoler avec une indulgente tendresse
pour une œuvre dont on est responsable. Mais ce
n'est qu'une partie de la vérité historique. Les lois,
depuis un demi-siècle, ont en effet souvent com-
mencé par des difficultés elles ont continué par
des déceptions et fini par des surprises pénibles.
La loi sur l'école obligatoire, bien qu'elle soule-
vât des objections, n'a pas eu à ses débuts d'inten-
tions révolutionnaires. Les devoirs envers Dieu
étaient même inscrits dans les programmes. Avec
1'ajdë dès instituteurs socialistes et" communistes, elle
est devenue un instrument de luttes de classes et,
de l'aveu même des maîtres en révolte contre l'Etat,
un moyen de détruire la société dite bourgeoise.
La loi sur les syndicats professionnels, rédigée
avec sein par des juristes, était destinée à être une
loi d'apaisement social, une loi facilitant l'organisa-
tion du travail et l'harmonie des rapports entre
patrons et employés. Ses auteurs avaient de si
bonnes intentions que lorsqu'au Sénat quelques
hommes politiques versés dans la connaissance du
droit exprimèrent des craintes sur la formation hypo-
thétique d'une confédération générale du travail, la
Haute Assemblée se refusa à considérer la simple
possibilité d'une pareille déformation de la loi. Et
cependant les syndicats, dirigés par les marxistes
de toutes nuances, sont devenus eux aussi un instru-
ment de propagande révolutionnaire.
La loi sur les associations a été conçue comme
un progrès, comme un élément de paix civile, comme
un moyen de collaboration régulière. Elle n'a pas
suffi aux fonctionnaires, hantés par le désir de de-
venir des militants, et elle leur a fourni un argu-
ment pour se constituer en syndicats illégaux et
tolérés. Par ailleurs, la même loi sur les associations
interprétée par ies combistes et malgré l'intervention
autorisée de son auteur, est devenue une loi de per-
sécution religieuse.
La loi sur le repos hebdomadaire a été présentée,
au temps où s'improvisait ce ministère du bonheur
qui est le ministère du travail, comme une invention
merveilleuse. On oubliait soudain la vénérable anti-
quité du repos dominical. On prétendait faire
mieux en substituant un texte législatif à un usage
ancien. La loi n'a fonctionné qu'après des amé- '1
nagements, des décrets, des dérogations variées qui
en laissent subsister le principe tout en organisant
les exceptions. Des observations analogues peuvent
être faites sur la loi de huit heures, et plus encore
sur la loi des retraites ouvrières, à laquelle les futurs
retraités ont manifesté une remarquable indifférence.
Nous voilà partis pour l'aventure des assurances
sociales, qui débutent par des grèves et qui finiront
par des adaptations multiples.
Ces expériences prouvent que nous sommes loin
de la conception des lois telles que les définissait:
Montesquieu, et que les législateurs ont une superbe
négligence pour les rapports nécessaires qui résultent •
de la nature des choses. Le nombre des lois aug-
mente sans cesse. Le Parlement se croirait désho-
noré s'il n'en fabriquait à la douzaine. Il a fini par
penser que c'était sa raison d'être. Les socialistes
ont compris tout le parti qu'ils pouvaient tirer de
ces dispositions. Puisque la loi n'est plus la consé-
cration prudente des mœurs et des coutumes, elle
est devenue le produit de l'esprit de système. Les
partis révolutionnaires ont cessé dès lors d'être des
réfractaires romantiques. Ils sont devenus des bu-
reaucrates législatifs, et c'est par des textes, ornés
de tout l'appareil de la légalité, qu'ils troublent
méthodiquement le travail et limitent arbitrairement
la liberté. ANDRÉ CHAUMEIX.
La candidature
du général von >Seeckt
Le général von Seeckt, ancien chef d'état-mnjor
de la Reichswehr, est candidat aux prochaines
élections au Reichstag. Le parti populiste le pré-
sente en tête de sa liste, ce qui revient à dire que
le général Von Seeckt est sûr d'être élu. Cette can-
didature rendra-t-elle au parti populiste un peu du
lustre dont il a tant besoin C'est une autre ques-
tion mais le fait essentiel, celui qui compte seul,
c'est l'entrée du général von Seeckt dans la vie pu-
litique active.
Car ce n'est certainement pas sans un dessein
bien arrêté que l'ancien chef de la Reichswehr
se présente. On sait depuis longtemps qu'il a de
très hautes ambitions. On le connaît pour un
homme énergique, méthodique, froid, ayant des
idées précises et arrêtées, et le mystère même dont
il s'est plu à s'envelopper, depuis qu'il a pris sa
retraite, a contribué à accroître son prestige et à
alimenter autour de lui la curiosité publique.
Mais quels -sont .les desseins .du,, général von
"SeecSt ?/On ne risque guère de se tromper en di-
sant ç[ii'il est candidat à la succession du maréchal
Hirirîénburg et qu'il est en même temps, aux yeux
des milieux nationalistes et réactionnaires, le sau-
veur qui tirera l'Allemagne du chaos.
Sa candidature au Reichstag, au moment précis
cù la menace de la dictature entre de plus en plus
dans le domaine des possibilités, prend toute sa
valeur et toute sa signification. Dix ans de Répu-
blique n'empêchent point qu'une dictature civile
soit inconcevable en Allemagne. Si le Reich se
donne un. maître, ce sera un maitre botté et épe-
ronné. Et ce sera le général von Seeckt, ou per-
sonne.
Cette dictature sera-t-elle ouverte ou dissimulée '?
Prendra-t-elle une forme légale ou illégale ? Il est
trop tôt pour le prévoir. Ce que l'on peut dire, c'est
que jamais, depuis 1918, le régime républicain et
démocratique n'a été aussi ébranlé en Allemagne.
Financièrement, économiquement, la situation est
si sombre que les masses seraient prêtes à accueil-
lir tous ceux qui feraient figure de sauveur à
preuve l'énorme faveur dont jouissent les natio-
naux-socialistes. Politiquement, le prochain Reichs-
tag 'promet d'èti'e plus ingouvernable encore que le
précédent, ce qui revient à dire qu'une nouvelle
dissolution, après le 14 septembre, pourrait être
nécessaire à bref délai. Quand donc le moment
a-t-ii été plus favorable pour lô$ fauteurs de coup
d'Etat ? A cela s'ajoute le grand âge du maréchal-
.pt:éJùi,ent>yil!é.v;ln.tu.a|Hé à J&aqiie instant possible
d« sa succession ouverte.
Déjà on voit le parti populiste, qui présente le
généra) von Seeckt, entamer des négociations en
vue d'une action électorale commune avec les Hu-
genberg et les Hitler. Qu'est-ce que cela veut dire,
sinon qu'une entente s'établit entre le général von
Seeckt et les nationalistes des diverses nuances ?
Sur les conséquences de cette situation nouvelle,
il n'y a pas à insister. Le discours que prononçait
dimanche M. Treviranus était suffisamment expli-
cite. Le parti populiste, de son côté, met au premier
plan de son programme la revision des traités. -Le
nouveau parti de l'Etat allemand formule la même
revendication. Comme toujours, le front des partis
germaniques, en politique extérieure, est parfaite-
ment homogène. Si l'on ajoute à cela que ce parti
de l'Etat, qui se donne pour républicain, vient ce-
pendant de déclarer qu'il « adoptera une attitude
conforme aux nécessités du moment en ce qui
concerne les couleurs républicaines et la républica-
nisation du Reich, des Etats fédérés et des
'communes, on verra que les modérés eux-mêmes,
ou ce qui en reste, envisagent la nécessité de se
plier aux transformations profondes que les mois
à venir risquent d'apporter au régime politique de
l'Allemagne. Et l'apparition du général von Seeckt
sur la scène électorale est, à elle seule, un symp-
tôme et un avertissement.
Z ̃̃ ̃*̃ R. H.
tij£ SïlJSlTÉ DU PKPÊ
La maladie du Souverain Pontife démentie
Rome, 12 août. Le Pape ayant reçu longuement
en audience privée Mgr Vanneufville, chanoine de
Saint-Jean de Latran, le prélat français, interrogé
à propos des bruits qui viennent d'être répandus
de nouveau à l'étranger sur la santé du Pape, a
fait les déclarations que voici
« On a lu au Vatican ces informations ultra fan-
taisistes on en sourit comme d'un comble d'in-
vraisemblance. Pour moi, qui ai eu le bonheur de
voir et d'entendre à loisir, tout à l'heure, Sa Sain-
teté Pie XI, je résumerai les impressions que j'em-
porte de cet entretien en vous disant que la santé
physique du Souverain Pontife, comme sa jeunesse
intellectuelle, m'ont rempli d'émerveillement. Je
n'ai pu m'empêcher de le féliciter de cette santé
merveilleuse.
> Le Saint-Père m'a répondu que c'était là en
effet pour lui un sujet de reconnaissance incessante
envers la divine Providence. Il attribue cette santé
si forte aux prières que ses fils du monde entier
ne cessent de lui assurer.
» Au reste tout le monde peut constater le labeur
énorme et quotidien auquel le Pape continue de
faire front avec une aisance déconcertante, labeur
qui en épuiserait de plus jeunes que lui et qui ne
l'empêche pas cependant, au soir de journées véri-
tablement écrasantes je l'ai observé une fois de
plus de poursuivre son prodigieux effort de
documentation et de lecture. Sa capacité de lecture
est d'ailleurs admirable et elle s'étend aux publi-
cations les plus récentes.
» Ces jours-ci, les audiences dites de Tabella,
pour les préfets et secrétaires de congrégations,
vont s'interrompre comme,tous les ans. Or le repos
du Pape consistera à reprendre l'étude de dossiers
et de documents que ses occupations quotidiennes
trop absorbantes l'avaient forcé de laisser en sus-
pens, et à préparer ainsi le travail de la période
qui suivra les vacances de la Curie romaine.
» En vérité, si c'était là le fait d'un homme dont
la santé serait compromise, il faudrait alors con-
clure à un miracle continu. »
It'esprit de sagesse
eontre l'esprit de dépense
Hier a été inaugurée une politique dans laquelle
on ne saurait trop encourager le gouvernement
à persévérer. Il va réduire les dépenses publiques.
La jonglerie- avec les milliards serait-elle terminée ?
De budget en budget, le' total de nos charges
augmentait traitements majorés, gratuité éten-
due. rentes, pensions, subventions croissaient à
l'envi. Loin de diminuer le nombre des fonctionnai-
res, l'Etat vient de lever encore cette armée de com-
mis, dactylos, actuaires, chefs de bureau, direc-
teurs, etc., destinés à assurer le service des assu-
rances.
Des motifs divers, cependant, ont reculé de dix
ans la réorganisation de nos frontières et la réfec-
tion de notre flotte; ce n'est pas l'éloquence vé-
hémente de M, Treviranus, ni l'écho de son dis-
cours ouaté par M. Wirth qui peuvent inciter à
la nonchalance, au lendemain de l'évacuation.
Certes, il y a dans le budget de l'Etat des crédits
intangibles. Quand même, cSjïiine dans ceux des
particuliers, il s'y trouve des dépenses qui parais-
sent indispensables parce qu'on s'est habitué à
les faire. On les inscrit par commodité, le député
en ajoute par complaisance électorale. Le contri-
buable paiera.
Ces errements doivent cesser. Même les budgets
de la défense nationale, si l'on comprend bien la
note ministérielle, vont subir l'épreuve de la revi-
sion. Ailleurs, il y a de larges possibilités d'ajourne-
ment et de réduction. Sur 56 milliards de dépen-
ses, il faut en découvrir fi à renvoyer à plus tard.
On les trouvera. Et ces suppressions de crédits
seront admises, quelques grincements de dents
qu'elles provoquent d'abord.
Eb quoi, le pays a pu se résigner à l'effort de
1926, le contribuable français a accepté de formi-
dables impôts, la Chambre du cartel a écouté la
voix de M. Poincaré depuis quatre ans nous su-
bissons, non sans fierté, la courbature de ce réta-
blissement magnifique.
Aujourd'hui, un autre péril nous menace l'aug-
mentation incessante des dépenses publiques. Le
gouvernement proclame les finances en danger
il saisit l'opinion. Et parce que nous ne sommes
pas au bord du gouffre côtoyé, nous continuerions
a accepter que l'œuvre financière de 1926, à peine
achevée, fût compromise à jamais par la prodiga-
lité parlementaire, hélas avalisée trop souvent
par les gouvernements ? La France, qiji supporte
l'écrasant fardeau des milliards à payer, n'applau-
dirait pas à l'entreprise d'économies qui empêche-
rait un alourdissement nouveau ? Ce serait para-
doxal. r
M. Tardieu, à Nancy, a crié « Halte-là » A
Rambouillet, hier, a été accompli le premier acte
du gouvernement conforme à cet avertissement.
Décision unanime, dit le communiqué, de reviser
l'ensemble des dépenses.
De cette unanimité ministérielle, dans l'effort de
compression entrepris, doit sortir la majorité de
sagesse qui mettra un frein à l'esprit de. -dépense
dénoncé l'autre semaine par M. Paul Reynaud.
Henri Vonoven. ljj.
Le gouvernement
tient séance à Rambouillet
L'important conseil des ministres dont nous
avions annoncé la réunion s'est tenu hier, à Ram-
bouillet, sous la présidence de M. Doumergue.
Commencé à 9 h. 45, le matin, il a duré jusqu'à
midi et demi il a repris, à 2 heures, jusqu'à
3 h. 15. '̃
Finances et agriculture,
Au cours" "dé ces séances, d'après le communiqué
remis à la presse, M. Briand, selon l'usage, a fait
tin exposé de la situation extérieure (l'a-t-on félicité
des résultats de sa politique ?), et M. Raoul Péret
a indiqué l'état de la réorganisation judiciaire. Tout
sera yprêt pour le 1" octobre.
Sur la situation budgétaire, la note officielle s'ex-
prime ainsi
'« M. Germain-Martin a exposé les conditions
dans lesquelles devra être réalisé l'équilibre bud-
gétaire. Alors que de 1926 à 1930 le montant des
crédits a augmenté de 13 milliards et que le budget
de 1930 a augmenté de 5 milliards par rapport au
budget précédent, les demandes des services pour
l'exercice 1931 sont en augmentation de près de
6 milliards par rapport à l'exercice en cours.
» Le conseil a estimé que cette augmentation
continue ne pouvait durer. Il a décidé qu'il allait
être procédé à une revision intégrale de l'ensemble
des dotations et demandes d'augmentations de cha-
que ministère, de facon à établir un compte équi-
libre.
» Le gouvernement a été unanime à penser que,
quelles que soient les difficultés de compression
ctans un budget dont 48 0/0 sont absorbés par la
dette publique, il est possible, en dehors de tout
impôt nouveau et de tout emprunt pour couvrir les
dépenses permanentes, de [aire face a l'ensemble
des besoins tels qu'ils résultent soit des lois ré-
cemment volées, soit des nécessités de sécurité et
de bonne marche des services publics.
» Le président du conseil, le ministre du budget
et le ministre des finances veilleront à l'exécution
de cette décision. » -{>
Sur la situation agricole, le communiqué porte
'« M. Fernand David, ministre de l'agriculture,
après avoir souligné les conditions exceptionnell-
lement pénibles de la moisson, a rappelé que la
soudure se fait sans difficulté, ainsi qu'il l'avait
prévu. Il s'agit essentiellement pour les mois à
venir de faciliter la stabilisation des cours à un
taux équitable pour les producteurs. Deux sortes
de mesures peuvent y contribuer au mieux de l'in-
térêt général. D'une part, après l'essai infructueux
des adjudications publiques par l'intendance, le
ministre tend actuellement au stockage par des
marchés de gré à gré passés avec les grandes asso-
ciations agricoles. D'autre part, il cherche à faci-
liter les opérations de crédit qui permettront les
livraisons échelonnées à la consommation. »
Nous donnons plus loin les nominations dans les
finances, dans l'armée, dans la marine, etc.
Les grèves du JStord
La détente s'accentue
LILLE, 12 août. La reprise du travail s'est en-
core accentuée dans le textile. Un millier d'ouvriers
ont réintégré les usines. Le nombre des grévistes
est de 15.200.
Dans la métallurgie, 50 rentrées seulement ont
été enregistrées. Tous les abords des établissements
industriels étaient gardés par d'importantes forces
de police. On ne signale que des incidents sans
gravité.
Dans la banlieue, de nombreux ouvriers ont éga-
lement repris le travail.
A 14 h. 30, la préfecture faisait savoir qu'au total
2.000 grévistes du textile et 450 métallurgistes
avaient repris le travail à Lille et dans la ban-
lieue.
A Roubaix, on a constaté ce matin 250 rentrées,
dont une centaine dans quatre usines ayant donné
satisfaction à leur personnel. Dans d'autres éta-
blissements, la. direction a promis d'examiner les
revendications et de donner sa réponse à Ja-fin de-
là semaine, ce qui a décidé le personnel à repren-
dre le travail.
Les frontaliers n'ont pas encore osé utiliser les
autobus un certain nombre de travailleurs belges
ont élu domicile à Roubaix pour éviter d'être mo-
lestés en cours de route.
A Tourcoing, la situation n'a guère changé. Ce
matin, le train de Menin, qui avait amené 300 ou-
vriers belges lundi, en a transporté 500. En outre,
deux autobus occupés par près de 200 ouvriers ont
également franchi la frontière sans incidents.
De nombreux gardes mobiles précédaient en ca-
mionnettes les deux véhicules qui, à midi, firent
un second voyage. Le service de surveillance aux
postes frontière a été considérablement renforcé.
Un ordre du jour flétrit la prime de fidélité
D'autre part, une réunion des directeurs, contre-
maîtres et surveillants de l'industrie textile a eu
lieu, au cours de laquelle une motion a été votée
contre la prime de fidélité. Voici le texte de l'ordre
du jour adpoté à l'unanimité par l'assemblée
« Les directeurs, contremaîtres et surveillants du
textile, réunis en assemblée générale au nombre de
1.100, donnent leur pleine et entière approbation
au bureau syndical sur la circulaire Prime de fidé-
lité, signée Hautson et Salomon, et distribuée à
Roubaix et Tourcoing le 5 et G. juillet 1930
» Décident de pressentir leurs patrons respectifs
dans la semaine qui suit, pour demander
» 1 ° Lfàbolition. de. la prime de fidélité, qui est
incompatible avec la dignité du personnel de^Hi-
rection et de maîtrise
$ 2" Que les appointements du personnel de di-
rection et de maîtrise soient révisés et qu'un accord
intervienne entre les industriels et le syndicat des
contremaîtres et techniciens à cet effet
» 3° Qu'un accord intervienne également pour
faire cesser les abus de droit qui se renouvellent
chaque fois qu'une grève éclate
» 4° Donnent mandat au secrétaire général de faire
connaître aux industriels les vœux émis par le per-
sonnel de direction et de maîtrise
»5° Décident, en outre, de se réunir à nouveau
le vendredi 15 août, au Palais d'Eté, cinéma, rue
Charles-Wattinne, à Tourcoing, pour prendre con-
naissance des réponses patronales et prendre toutes
décisions que comportera la situation qui leur sera
faite.
» Se séparent en renouvelant leur confiance au
bureau syndicat et comptent sur la sagesse du pa-
tronat pour faire cesser un conflit qui n'a que trop
duré. »
EN MARGE
Boudoirs d'aujourd'hui
Un comité récemment formé, qui s'intéresse à l'art
décoratif, vient de faire connaître le sujet du concours
qu'il institue et c'est, aux termes du communiqué
« Ensemble d'une pièce féminine à usage de boudoir,
dans l'appartement d'une femme de notre temps. » L'in-
tention est nette et même soulignée on a préféré le
pléonasme à l'amphibologie.
Cet appel à la grâce est significatif. Le comité « Ce
temps-ci », qui compte parmi ses membres plusieurs
reines du goût, et qui a pour président le conservateur
du Musée Carnavalet, invite, en somme, nos décorateurs
à atténuer cette austère rigueur, cette morne sécheresse
dont ils ont abusé depuis quelques années.
Il va de soi que personne ne songe à reconstituer des
intérieurs à la Crébillon fils. On boude sans doute encore
sous Doumergue, mais on ne boude plus de la. même façon
que sous Louis XV. Toutefois, la vie d'aujourd'hui ne
se déroule pas seulement entre un studio et un garage,
une salle de bains et un terrain de golf. Les plus trépi-,
dantes des élégantes de 1930 éprouvent le besoin de
faire halte parfois, de renoncer pendant quelques heures'
aux allures virilisées. Et elles souhaitent de trouver alors
un aimable asile sur les frontières de la vie extérieure
et de la vie intime.
Des moralistes de salon ou de coulisses, de casino
ou de bar, répètent à l'envi des banalités sur les jeunes
femmes et les jeunes filles d'aujourd'hui, lesquelles,
selon eux, appartiendraient à une espèce toute nouvelle.
Faut-il croire à cette nouveauté? Sont-elles, ces Eves
du jour, si différentes de leurs mères ou de leurs aïeules,
ou de ces charmantes ancêtres pour qui un siècle galant
inventa le boudoir ? Refusons-nous à le penser. Il y a
dans l'éternel féminin quelque chose d'instinctif, de
spontané, de frémissant, qui peut être contenu mais non
pas supprimé sous ies contraintes momentanées d'un
snobisme.
Le jour où ia mode permettrait à nos jeunes contem-
poraines d'être moins fanfaronnes d'indépendance, de
volonté, de force, et leur autoriserait la sensibilité, la
langueur, la faiblesse, elles n'auraient pas grand effort
à faire sur elles-mêmes pour se conformer à ses pres-
criptions. Et on les verrait redevenir très «femmes» 1
dans le sens qu'on donnait au mot au temps de Louis-
Philippe ou de. Napoléon III. D'autant que nombre
d'entre elles commencent peut-être à s'apercevoir qu'à
sacrifier sur certains autels la plupart des privilèges que
le passé leur avait reconnus, elles ont commis une impru-
dence, pour ne pas dire une erreur.
Raymond Lécuyer.
Une initiative ̃
du P. 3amsôn
Un organe professionnel de la souffrance.
Par GEORGES GOYAU
Une revue vient de se fonder, pour une pro-
fession qui compte peu d'amateurs, mais que
beaucoup sont forcés d'accepter cette profes-
sion s'appelle la souffrance.
Le doux abbé Perreyve, il y aura bientôt trois
quarts de siècle, avait fait bon usage de sa lente
et fatale consomption, en écrivant la Journée
des Malades. Il voulait que ce petit livre fût un
compagnon pour ceux qui, comme lui, s'alite-
raient un compagnon qui leur dirait, prenant
congé d'eux au jour de la guérison « Vous me
retrouverez tôt ou tard, à une date que Dieu
connaît » un compagnon qui les aiderait, peut-
être, a franchir le défilé de l'agonie.
Revivre ainsi s'appelle la revue dont lé"
R. P. Samson est le créateur a des ambitions
plus vastes que ne l'étaient celles de l'abbé Per-
reyve. L'illustre prédicateur vise les malades.
mais il s'adresse aux autres, aussi il apporte
une philosophie de la vie, une hygiène du vou-
loir-vivre, qui ne serviront pas moins à préser-
ver la santé qu'à la recouvrer il aspire à nouer
d'innombrables communions d'âmes, grâce aux-
quelles ceux qui souffrent deviendront des bien-
faiteurs pour ceux qui consolent, et ceux qui
consolent, des bienfaiteurs pour ceux qui souf-
frent.
~R*9
'̃̃ ̃ r*
La consolation, dans les derniers siècles de
l'antiquité romaine, était devenue un genre litté-
raire. Les artifices de rhétorique s'y donnaient
carrière Sénèque y excellait. Un certain fata-
lisme se drapait de grandiloquence la jactance
stoïcienne se plaisait à braver la destinée une
insensibilité volontaire à l'endroit de la souf-
france marquait je ne sais quelle victoire du
« surhomme » sur les Dieux qui faisaient souf-
frir. L'acceptation dont on leur donnait le spec-
tacle avait des accents de demi-provocation
moins soumise qu'arrogante, elle relevait les
têtes plutôt qu'elle ne les courbait. Il fallait que
les hommes eussent l'impression, et les Dieux
aussi, que le corps meurtri, que le cœur broyé,
demeuraient pourtant inaccessibles à la mor-
sure de la souffrance une fierté presque mo-
queuse se targuait de faire barricade contre les
attentats de cette perverse ennemie. Et les « con-
solations » les plus goûtées étaient probable-
ment celles qui préparaient leurs destinataires a
certaines gymnastiques de volonté, à certaines
attitudes d'athlétisme moral, impatient de se
mesurer avec les puissances d'en haut.
Un jour vint où le mot de saint Paul. sur la
folie de la croix commenca de faire le tour de la
Méditerranée avant de faire le tour du monde
et les idées humaines sur la souffrance se modi-
fièrent. On vit en elle une amie. On confessa
bientôt l'inanité menteuse de ces paradoxes
d'énergie qui portaient l'homme à prendre des
airs d'insurgé contre des maux qu'inévitable-
ment il subissait la souffrance fut proclamée
« bonne ». Sous le reflet des lueurs qui tom-
baient du Calvaire, on découvrit son efficacité
sociale on la sentit susceptible d'être mysté-
rieusement affectée au service d'autrui.
Soudainement l'horizon spirituel s'élargit la
souffrance, au lieu de demeurer un ingrat et
stérile chômage, se révéla comme un labeur pro-
ductif des milliers et des milliers d'êtres, qui
s'étaient crus inutiles" parce que malades, parce
que paralysés, parce que terrassés par la dou-
leur, découvrirent qu'ils pouvaient encore être
utiles, et qu'ils devaient l'être.
Au treizième siècle, sous les voûtes des hôpi-
taux de Palestine, on entendait s'élever, chaque
jour, à la tombée du soir, la voix des Hospita-
liers de Saint-Jean de Jérusalem cette voix
s'en allait trouver, dans les lits où les clouait
leur détresse physique, les pauvres gens qu'ils
soignaient. Et respectueusement la voix disait
« Seigneurs malades, priez pour la paix
que Dieu nous la mande de ciel en terre.
» Seigneurs malades, priez pour le fruit de la
terre que Dieu le multiplie en cette manière
que Dieu en soit servi, et la chrétienté soutenue.
» Seigneurs malades, priez pour les pèle-
rins. »
Les versets continuaient de se dérouler, pour
toutes les nécessités du monde chrétien. On
élevait ces gueux à la dignité de « seigneurs »,
parce qu'ils souffraient, parce que, par leurs
souffrances, ils étaient comme préposés aux in-
térêts de la « chrétienne gent i,, ainsi que
l'étaient les seigneurs aux intérêts de ce « pro-
chain » que le manoir protégeait. '̃'̃̃̃̃̃
Car la souffrance acceptée passait désormais
pour un moyen d'acheter des grâces, dont au-
trui profiterait pour une méthode de rachat,
dont autrui serait bénéficiaire. On goûtait la joie
de se faire victime, ou tout simplement de con-
sentir à l'être, pour créer à travers le monde
de la joie spirituelle Huysmans dans sa Sainte
Lidwine, Coppée dans sa Bonne Souffrance,
Emile Baumann en toute son œuvre de roman-
cier, ont pu nous montrer, à tous les paliers de
la société chrétienne, des âmes se faisant ré-
demptrices, rien qu'en disant Amen. Immobile
sur son grabat, le paralytique peut prendre
conscience que cette immobilité même peut être
utilisée, que sa misère, que sa souffrance, peu-
vent se transformer en une fonction sociale, et
qu'il peut trouver, dans son état même d'acca-
blement, un mystérieux moyen de soulever des
FIGARO I
Fondé le i+ Janvier i8afc g 0
Aucuns Directeurs H. DE VlLLEMESSANT S 0
F.Masnard.O.Calmette. A.Capus. R.oe Flers o
o
O
ABONNEMENTS 3 nitis S mois -un g
.P8ris,Départem.etColonies. 30" 54» I0O" o 0
ÉTRANGES o
Pays à tarif postal réduit 52» iOQ" 190» S ô
Pays à tarif postal augmenté. 72» 140" 260» g 0
On s'abonne dans tous les Bureaux de Poste S
de France ï
Chèque postal 242-53 Paris S
o
0
105e Année. N° 225 de 1930
Édite en f'Hôtef de
FIGARO
14, Rond-Point des Champs-Elysées
PARIS (Vffl«).
ADMINISTRATION-RÉDACTION-PUBLICITÉ
ANNONCES
14. Rond-Point DES Champs-Elysées. PARIS
Ték'ptiones Elysées 98-31 à 98-88
Adresse télégraphique "FIGARO 45- PARIS
L*OUÉ PAR CEUX»CI, BLÂMÉ PAR CEUX.LÂ, ME MOQUANT DES SOTS, BRAVANT LES MÉCHANTS, JE HE
PRESSE DE RIRE DE TOUT.. DE PEUR D'ÊTRE OBLIGÉ D'EN PLEURER.
POUVEZ. VOUS, FIGARO, TRAITER SI LÉGÈREMENT UN DESSEIN Qm NOUS COÛTE X TOUS LE BONHEUR ï
-̃ BEAUMARCHAIS.
MERCREDI 15 AOUT 1950
MERCREDI 13 AOUT 1930
aDI&ŒECTJÈTTJa" ^JEtjAJSFÇOIS COTT
SOMMAIRE DE FIGARO
PAGE 2. Les Cours. -les Ambassades. le Monde
et la Ville. Les Echos. La Saison.
La grande quinzaine de Deauville.
PAGE 3. L'anniversaire de la Constitution de
Weimar à Paris. Nouvelles diverses.
Au conseil de Rambouillet. Les grèves du
Nord. Le drame de Viry-Châtillon.
Dernière Heure.
PAGE 4. Raymond de Passillé Le scandale
de la Bourse de commerce et ses conséquences.
Jules Laurent La Vie universitaire.
Revue de la presse. Rose Macaulay L'Ile
des Orphelins.
PAGE 5. Robert Brussel Le mouvement mu-
sical. Henri Davignon Les mémoires d'un
journaliste belge. James de Coquet Les
Premières. Les Alguazils Courrier des
lettres.
PAGE 6. La Bourse La Cote des Valeurs.
Le programme des spectacles. Courrier des
théâtres.
PAGE 7. La Vie spotive. ,~n.t~
,r v;%fefe^a-^sî-i.£:Jija$'
LA POLITIQUE
Les aventures
des lois
Un des auteurs de la loi sur les assu-
rances'sociales remarquait récemment
v que toutes les grandes réformes avaient
donné lieu à des difficultés. C'est une
manière de se consoler avec une indulgente tendresse
pour une œuvre dont on est responsable. Mais ce
n'est qu'une partie de la vérité historique. Les lois,
depuis un demi-siècle, ont en effet souvent com-
mencé par des difficultés elles ont continué par
des déceptions et fini par des surprises pénibles.
La loi sur l'école obligatoire, bien qu'elle soule-
vât des objections, n'a pas eu à ses débuts d'inten-
tions révolutionnaires. Les devoirs envers Dieu
étaient même inscrits dans les programmes. Avec
1'ajdë dès instituteurs socialistes et" communistes, elle
est devenue un instrument de luttes de classes et,
de l'aveu même des maîtres en révolte contre l'Etat,
un moyen de détruire la société dite bourgeoise.
La loi sur les syndicats professionnels, rédigée
avec sein par des juristes, était destinée à être une
loi d'apaisement social, une loi facilitant l'organisa-
tion du travail et l'harmonie des rapports entre
patrons et employés. Ses auteurs avaient de si
bonnes intentions que lorsqu'au Sénat quelques
hommes politiques versés dans la connaissance du
droit exprimèrent des craintes sur la formation hypo-
thétique d'une confédération générale du travail, la
Haute Assemblée se refusa à considérer la simple
possibilité d'une pareille déformation de la loi. Et
cependant les syndicats, dirigés par les marxistes
de toutes nuances, sont devenus eux aussi un instru-
ment de propagande révolutionnaire.
La loi sur les associations a été conçue comme
un progrès, comme un élément de paix civile, comme
un moyen de collaboration régulière. Elle n'a pas
suffi aux fonctionnaires, hantés par le désir de de-
venir des militants, et elle leur a fourni un argu-
ment pour se constituer en syndicats illégaux et
tolérés. Par ailleurs, la même loi sur les associations
interprétée par ies combistes et malgré l'intervention
autorisée de son auteur, est devenue une loi de per-
sécution religieuse.
La loi sur le repos hebdomadaire a été présentée,
au temps où s'improvisait ce ministère du bonheur
qui est le ministère du travail, comme une invention
merveilleuse. On oubliait soudain la vénérable anti-
quité du repos dominical. On prétendait faire
mieux en substituant un texte législatif à un usage
ancien. La loi n'a fonctionné qu'après des amé- '1
nagements, des décrets, des dérogations variées qui
en laissent subsister le principe tout en organisant
les exceptions. Des observations analogues peuvent
être faites sur la loi de huit heures, et plus encore
sur la loi des retraites ouvrières, à laquelle les futurs
retraités ont manifesté une remarquable indifférence.
Nous voilà partis pour l'aventure des assurances
sociales, qui débutent par des grèves et qui finiront
par des adaptations multiples.
Ces expériences prouvent que nous sommes loin
de la conception des lois telles que les définissait:
Montesquieu, et que les législateurs ont une superbe
négligence pour les rapports nécessaires qui résultent •
de la nature des choses. Le nombre des lois aug-
mente sans cesse. Le Parlement se croirait désho-
noré s'il n'en fabriquait à la douzaine. Il a fini par
penser que c'était sa raison d'être. Les socialistes
ont compris tout le parti qu'ils pouvaient tirer de
ces dispositions. Puisque la loi n'est plus la consé-
cration prudente des mœurs et des coutumes, elle
est devenue le produit de l'esprit de système. Les
partis révolutionnaires ont cessé dès lors d'être des
réfractaires romantiques. Ils sont devenus des bu-
reaucrates législatifs, et c'est par des textes, ornés
de tout l'appareil de la légalité, qu'ils troublent
méthodiquement le travail et limitent arbitrairement
la liberté. ANDRÉ CHAUMEIX.
La candidature
du général von >Seeckt
Le général von Seeckt, ancien chef d'état-mnjor
de la Reichswehr, est candidat aux prochaines
élections au Reichstag. Le parti populiste le pré-
sente en tête de sa liste, ce qui revient à dire que
le général Von Seeckt est sûr d'être élu. Cette can-
didature rendra-t-elle au parti populiste un peu du
lustre dont il a tant besoin C'est une autre ques-
tion mais le fait essentiel, celui qui compte seul,
c'est l'entrée du général von Seeckt dans la vie pu-
litique active.
Car ce n'est certainement pas sans un dessein
bien arrêté que l'ancien chef de la Reichswehr
se présente. On sait depuis longtemps qu'il a de
très hautes ambitions. On le connaît pour un
homme énergique, méthodique, froid, ayant des
idées précises et arrêtées, et le mystère même dont
il s'est plu à s'envelopper, depuis qu'il a pris sa
retraite, a contribué à accroître son prestige et à
alimenter autour de lui la curiosité publique.
Mais quels -sont .les desseins .du,, général von
"SeecSt ?/On ne risque guère de se tromper en di-
sant ç[ii'il est candidat à la succession du maréchal
Hirirîénburg et qu'il est en même temps, aux yeux
des milieux nationalistes et réactionnaires, le sau-
veur qui tirera l'Allemagne du chaos.
Sa candidature au Reichstag, au moment précis
cù la menace de la dictature entre de plus en plus
dans le domaine des possibilités, prend toute sa
valeur et toute sa signification. Dix ans de Répu-
blique n'empêchent point qu'une dictature civile
soit inconcevable en Allemagne. Si le Reich se
donne un. maître, ce sera un maitre botté et épe-
ronné. Et ce sera le général von Seeckt, ou per-
sonne.
Cette dictature sera-t-elle ouverte ou dissimulée '?
Prendra-t-elle une forme légale ou illégale ? Il est
trop tôt pour le prévoir. Ce que l'on peut dire, c'est
que jamais, depuis 1918, le régime républicain et
démocratique n'a été aussi ébranlé en Allemagne.
Financièrement, économiquement, la situation est
si sombre que les masses seraient prêtes à accueil-
lir tous ceux qui feraient figure de sauveur à
preuve l'énorme faveur dont jouissent les natio-
naux-socialistes. Politiquement, le prochain Reichs-
tag 'promet d'èti'e plus ingouvernable encore que le
précédent, ce qui revient à dire qu'une nouvelle
dissolution, après le 14 septembre, pourrait être
nécessaire à bref délai. Quand donc le moment
a-t-ii été plus favorable pour lô$ fauteurs de coup
d'Etat ? A cela s'ajoute le grand âge du maréchal-
.pt:éJùi,ent>yil!é.v;ln.tu.a|Hé à J&aqiie instant possible
d« sa succession ouverte.
Déjà on voit le parti populiste, qui présente le
généra) von Seeckt, entamer des négociations en
vue d'une action électorale commune avec les Hu-
genberg et les Hitler. Qu'est-ce que cela veut dire,
sinon qu'une entente s'établit entre le général von
Seeckt et les nationalistes des diverses nuances ?
Sur les conséquences de cette situation nouvelle,
il n'y a pas à insister. Le discours que prononçait
dimanche M. Treviranus était suffisamment expli-
cite. Le parti populiste, de son côté, met au premier
plan de son programme la revision des traités. -Le
nouveau parti de l'Etat allemand formule la même
revendication. Comme toujours, le front des partis
germaniques, en politique extérieure, est parfaite-
ment homogène. Si l'on ajoute à cela que ce parti
de l'Etat, qui se donne pour républicain, vient ce-
pendant de déclarer qu'il « adoptera une attitude
conforme aux nécessités du moment en ce qui
concerne les couleurs républicaines et la républica-
nisation du Reich, des Etats fédérés et des
'communes, on verra que les modérés eux-mêmes,
ou ce qui en reste, envisagent la nécessité de se
plier aux transformations profondes que les mois
à venir risquent d'apporter au régime politique de
l'Allemagne. Et l'apparition du général von Seeckt
sur la scène électorale est, à elle seule, un symp-
tôme et un avertissement.
Z ̃̃ ̃*̃ R. H.
tij£ SïlJSlTÉ DU PKPÊ
La maladie du Souverain Pontife démentie
Rome, 12 août. Le Pape ayant reçu longuement
en audience privée Mgr Vanneufville, chanoine de
Saint-Jean de Latran, le prélat français, interrogé
à propos des bruits qui viennent d'être répandus
de nouveau à l'étranger sur la santé du Pape, a
fait les déclarations que voici
« On a lu au Vatican ces informations ultra fan-
taisistes on en sourit comme d'un comble d'in-
vraisemblance. Pour moi, qui ai eu le bonheur de
voir et d'entendre à loisir, tout à l'heure, Sa Sain-
teté Pie XI, je résumerai les impressions que j'em-
porte de cet entretien en vous disant que la santé
physique du Souverain Pontife, comme sa jeunesse
intellectuelle, m'ont rempli d'émerveillement. Je
n'ai pu m'empêcher de le féliciter de cette santé
merveilleuse.
> Le Saint-Père m'a répondu que c'était là en
effet pour lui un sujet de reconnaissance incessante
envers la divine Providence. Il attribue cette santé
si forte aux prières que ses fils du monde entier
ne cessent de lui assurer.
» Au reste tout le monde peut constater le labeur
énorme et quotidien auquel le Pape continue de
faire front avec une aisance déconcertante, labeur
qui en épuiserait de plus jeunes que lui et qui ne
l'empêche pas cependant, au soir de journées véri-
tablement écrasantes je l'ai observé une fois de
plus de poursuivre son prodigieux effort de
documentation et de lecture. Sa capacité de lecture
est d'ailleurs admirable et elle s'étend aux publi-
cations les plus récentes.
» Ces jours-ci, les audiences dites de Tabella,
pour les préfets et secrétaires de congrégations,
vont s'interrompre comme,tous les ans. Or le repos
du Pape consistera à reprendre l'étude de dossiers
et de documents que ses occupations quotidiennes
trop absorbantes l'avaient forcé de laisser en sus-
pens, et à préparer ainsi le travail de la période
qui suivra les vacances de la Curie romaine.
» En vérité, si c'était là le fait d'un homme dont
la santé serait compromise, il faudrait alors con-
clure à un miracle continu. »
It'esprit de sagesse
eontre l'esprit de dépense
Hier a été inaugurée une politique dans laquelle
on ne saurait trop encourager le gouvernement
à persévérer. Il va réduire les dépenses publiques.
La jonglerie- avec les milliards serait-elle terminée ?
De budget en budget, le' total de nos charges
augmentait traitements majorés, gratuité éten-
due. rentes, pensions, subventions croissaient à
l'envi. Loin de diminuer le nombre des fonctionnai-
res, l'Etat vient de lever encore cette armée de com-
mis, dactylos, actuaires, chefs de bureau, direc-
teurs, etc., destinés à assurer le service des assu-
rances.
Des motifs divers, cependant, ont reculé de dix
ans la réorganisation de nos frontières et la réfec-
tion de notre flotte; ce n'est pas l'éloquence vé-
hémente de M, Treviranus, ni l'écho de son dis-
cours ouaté par M. Wirth qui peuvent inciter à
la nonchalance, au lendemain de l'évacuation.
Certes, il y a dans le budget de l'Etat des crédits
intangibles. Quand même, cSjïiine dans ceux des
particuliers, il s'y trouve des dépenses qui parais-
sent indispensables parce qu'on s'est habitué à
les faire. On les inscrit par commodité, le député
en ajoute par complaisance électorale. Le contri-
buable paiera.
Ces errements doivent cesser. Même les budgets
de la défense nationale, si l'on comprend bien la
note ministérielle, vont subir l'épreuve de la revi-
sion. Ailleurs, il y a de larges possibilités d'ajourne-
ment et de réduction. Sur 56 milliards de dépen-
ses, il faut en découvrir fi à renvoyer à plus tard.
On les trouvera. Et ces suppressions de crédits
seront admises, quelques grincements de dents
qu'elles provoquent d'abord.
Eb quoi, le pays a pu se résigner à l'effort de
1926, le contribuable français a accepté de formi-
dables impôts, la Chambre du cartel a écouté la
voix de M. Poincaré depuis quatre ans nous su-
bissons, non sans fierté, la courbature de ce réta-
blissement magnifique.
Aujourd'hui, un autre péril nous menace l'aug-
mentation incessante des dépenses publiques. Le
gouvernement proclame les finances en danger
il saisit l'opinion. Et parce que nous ne sommes
pas au bord du gouffre côtoyé, nous continuerions
a accepter que l'œuvre financière de 1926, à peine
achevée, fût compromise à jamais par la prodiga-
lité parlementaire, hélas avalisée trop souvent
par les gouvernements ? La France, qiji supporte
l'écrasant fardeau des milliards à payer, n'applau-
dirait pas à l'entreprise d'économies qui empêche-
rait un alourdissement nouveau ? Ce serait para-
doxal. r
M. Tardieu, à Nancy, a crié « Halte-là » A
Rambouillet, hier, a été accompli le premier acte
du gouvernement conforme à cet avertissement.
Décision unanime, dit le communiqué, de reviser
l'ensemble des dépenses.
De cette unanimité ministérielle, dans l'effort de
compression entrepris, doit sortir la majorité de
sagesse qui mettra un frein à l'esprit de. -dépense
dénoncé l'autre semaine par M. Paul Reynaud.
Henri Vonoven. ljj.
Le gouvernement
tient séance à Rambouillet
L'important conseil des ministres dont nous
avions annoncé la réunion s'est tenu hier, à Ram-
bouillet, sous la présidence de M. Doumergue.
Commencé à 9 h. 45, le matin, il a duré jusqu'à
midi et demi il a repris, à 2 heures, jusqu'à
3 h. 15. '̃
Finances et agriculture,
Au cours" "dé ces séances, d'après le communiqué
remis à la presse, M. Briand, selon l'usage, a fait
tin exposé de la situation extérieure (l'a-t-on félicité
des résultats de sa politique ?), et M. Raoul Péret
a indiqué l'état de la réorganisation judiciaire. Tout
sera yprêt pour le 1" octobre.
Sur la situation budgétaire, la note officielle s'ex-
prime ainsi
'« M. Germain-Martin a exposé les conditions
dans lesquelles devra être réalisé l'équilibre bud-
gétaire. Alors que de 1926 à 1930 le montant des
crédits a augmenté de 13 milliards et que le budget
de 1930 a augmenté de 5 milliards par rapport au
budget précédent, les demandes des services pour
l'exercice 1931 sont en augmentation de près de
6 milliards par rapport à l'exercice en cours.
» Le conseil a estimé que cette augmentation
continue ne pouvait durer. Il a décidé qu'il allait
être procédé à une revision intégrale de l'ensemble
des dotations et demandes d'augmentations de cha-
que ministère, de facon à établir un compte équi-
libre.
» Le gouvernement a été unanime à penser que,
quelles que soient les difficultés de compression
ctans un budget dont 48 0/0 sont absorbés par la
dette publique, il est possible, en dehors de tout
impôt nouveau et de tout emprunt pour couvrir les
dépenses permanentes, de [aire face a l'ensemble
des besoins tels qu'ils résultent soit des lois ré-
cemment volées, soit des nécessités de sécurité et
de bonne marche des services publics.
» Le président du conseil, le ministre du budget
et le ministre des finances veilleront à l'exécution
de cette décision. » -{>
Sur la situation agricole, le communiqué porte
'« M. Fernand David, ministre de l'agriculture,
après avoir souligné les conditions exceptionnell-
lement pénibles de la moisson, a rappelé que la
soudure se fait sans difficulté, ainsi qu'il l'avait
prévu. Il s'agit essentiellement pour les mois à
venir de faciliter la stabilisation des cours à un
taux équitable pour les producteurs. Deux sortes
de mesures peuvent y contribuer au mieux de l'in-
térêt général. D'une part, après l'essai infructueux
des adjudications publiques par l'intendance, le
ministre tend actuellement au stockage par des
marchés de gré à gré passés avec les grandes asso-
ciations agricoles. D'autre part, il cherche à faci-
liter les opérations de crédit qui permettront les
livraisons échelonnées à la consommation. »
Nous donnons plus loin les nominations dans les
finances, dans l'armée, dans la marine, etc.
Les grèves du JStord
La détente s'accentue
LILLE, 12 août. La reprise du travail s'est en-
core accentuée dans le textile. Un millier d'ouvriers
ont réintégré les usines. Le nombre des grévistes
est de 15.200.
Dans la métallurgie, 50 rentrées seulement ont
été enregistrées. Tous les abords des établissements
industriels étaient gardés par d'importantes forces
de police. On ne signale que des incidents sans
gravité.
Dans la banlieue, de nombreux ouvriers ont éga-
lement repris le travail.
A 14 h. 30, la préfecture faisait savoir qu'au total
2.000 grévistes du textile et 450 métallurgistes
avaient repris le travail à Lille et dans la ban-
lieue.
A Roubaix, on a constaté ce matin 250 rentrées,
dont une centaine dans quatre usines ayant donné
satisfaction à leur personnel. Dans d'autres éta-
blissements, la. direction a promis d'examiner les
revendications et de donner sa réponse à Ja-fin de-
là semaine, ce qui a décidé le personnel à repren-
dre le travail.
Les frontaliers n'ont pas encore osé utiliser les
autobus un certain nombre de travailleurs belges
ont élu domicile à Roubaix pour éviter d'être mo-
lestés en cours de route.
A Tourcoing, la situation n'a guère changé. Ce
matin, le train de Menin, qui avait amené 300 ou-
vriers belges lundi, en a transporté 500. En outre,
deux autobus occupés par près de 200 ouvriers ont
également franchi la frontière sans incidents.
De nombreux gardes mobiles précédaient en ca-
mionnettes les deux véhicules qui, à midi, firent
un second voyage. Le service de surveillance aux
postes frontière a été considérablement renforcé.
Un ordre du jour flétrit la prime de fidélité
D'autre part, une réunion des directeurs, contre-
maîtres et surveillants de l'industrie textile a eu
lieu, au cours de laquelle une motion a été votée
contre la prime de fidélité. Voici le texte de l'ordre
du jour adpoté à l'unanimité par l'assemblée
« Les directeurs, contremaîtres et surveillants du
textile, réunis en assemblée générale au nombre de
1.100, donnent leur pleine et entière approbation
au bureau syndical sur la circulaire Prime de fidé-
lité, signée Hautson et Salomon, et distribuée à
Roubaix et Tourcoing le 5 et G. juillet 1930
» Décident de pressentir leurs patrons respectifs
dans la semaine qui suit, pour demander
» 1 ° Lfàbolition. de. la prime de fidélité, qui est
incompatible avec la dignité du personnel de^Hi-
rection et de maîtrise
$ 2" Que les appointements du personnel de di-
rection et de maîtrise soient révisés et qu'un accord
intervienne entre les industriels et le syndicat des
contremaîtres et techniciens à cet effet
» 3° Qu'un accord intervienne également pour
faire cesser les abus de droit qui se renouvellent
chaque fois qu'une grève éclate
» 4° Donnent mandat au secrétaire général de faire
connaître aux industriels les vœux émis par le per-
sonnel de direction et de maîtrise
»5° Décident, en outre, de se réunir à nouveau
le vendredi 15 août, au Palais d'Eté, cinéma, rue
Charles-Wattinne, à Tourcoing, pour prendre con-
naissance des réponses patronales et prendre toutes
décisions que comportera la situation qui leur sera
faite.
» Se séparent en renouvelant leur confiance au
bureau syndicat et comptent sur la sagesse du pa-
tronat pour faire cesser un conflit qui n'a que trop
duré. »
EN MARGE
Boudoirs d'aujourd'hui
Un comité récemment formé, qui s'intéresse à l'art
décoratif, vient de faire connaître le sujet du concours
qu'il institue et c'est, aux termes du communiqué
« Ensemble d'une pièce féminine à usage de boudoir,
dans l'appartement d'une femme de notre temps. » L'in-
tention est nette et même soulignée on a préféré le
pléonasme à l'amphibologie.
Cet appel à la grâce est significatif. Le comité « Ce
temps-ci », qui compte parmi ses membres plusieurs
reines du goût, et qui a pour président le conservateur
du Musée Carnavalet, invite, en somme, nos décorateurs
à atténuer cette austère rigueur, cette morne sécheresse
dont ils ont abusé depuis quelques années.
Il va de soi que personne ne songe à reconstituer des
intérieurs à la Crébillon fils. On boude sans doute encore
sous Doumergue, mais on ne boude plus de la. même façon
que sous Louis XV. Toutefois, la vie d'aujourd'hui ne
se déroule pas seulement entre un studio et un garage,
une salle de bains et un terrain de golf. Les plus trépi-,
dantes des élégantes de 1930 éprouvent le besoin de
faire halte parfois, de renoncer pendant quelques heures'
aux allures virilisées. Et elles souhaitent de trouver alors
un aimable asile sur les frontières de la vie extérieure
et de la vie intime.
Des moralistes de salon ou de coulisses, de casino
ou de bar, répètent à l'envi des banalités sur les jeunes
femmes et les jeunes filles d'aujourd'hui, lesquelles,
selon eux, appartiendraient à une espèce toute nouvelle.
Faut-il croire à cette nouveauté? Sont-elles, ces Eves
du jour, si différentes de leurs mères ou de leurs aïeules,
ou de ces charmantes ancêtres pour qui un siècle galant
inventa le boudoir ? Refusons-nous à le penser. Il y a
dans l'éternel féminin quelque chose d'instinctif, de
spontané, de frémissant, qui peut être contenu mais non
pas supprimé sous ies contraintes momentanées d'un
snobisme.
Le jour où ia mode permettrait à nos jeunes contem-
poraines d'être moins fanfaronnes d'indépendance, de
volonté, de force, et leur autoriserait la sensibilité, la
langueur, la faiblesse, elles n'auraient pas grand effort
à faire sur elles-mêmes pour se conformer à ses pres-
criptions. Et on les verrait redevenir très «femmes» 1
dans le sens qu'on donnait au mot au temps de Louis-
Philippe ou de. Napoléon III. D'autant que nombre
d'entre elles commencent peut-être à s'apercevoir qu'à
sacrifier sur certains autels la plupart des privilèges que
le passé leur avait reconnus, elles ont commis une impru-
dence, pour ne pas dire une erreur.
Raymond Lécuyer.
Une initiative ̃
du P. 3amsôn
Un organe professionnel de la souffrance.
Par GEORGES GOYAU
Une revue vient de se fonder, pour une pro-
fession qui compte peu d'amateurs, mais que
beaucoup sont forcés d'accepter cette profes-
sion s'appelle la souffrance.
Le doux abbé Perreyve, il y aura bientôt trois
quarts de siècle, avait fait bon usage de sa lente
et fatale consomption, en écrivant la Journée
des Malades. Il voulait que ce petit livre fût un
compagnon pour ceux qui, comme lui, s'alite-
raient un compagnon qui leur dirait, prenant
congé d'eux au jour de la guérison « Vous me
retrouverez tôt ou tard, à une date que Dieu
connaît » un compagnon qui les aiderait, peut-
être, a franchir le défilé de l'agonie.
Revivre ainsi s'appelle la revue dont lé"
R. P. Samson est le créateur a des ambitions
plus vastes que ne l'étaient celles de l'abbé Per-
reyve. L'illustre prédicateur vise les malades.
mais il s'adresse aux autres, aussi il apporte
une philosophie de la vie, une hygiène du vou-
loir-vivre, qui ne serviront pas moins à préser-
ver la santé qu'à la recouvrer il aspire à nouer
d'innombrables communions d'âmes, grâce aux-
quelles ceux qui souffrent deviendront des bien-
faiteurs pour ceux qui consolent, et ceux qui
consolent, des bienfaiteurs pour ceux qui souf-
frent.
~R*9
'̃̃ ̃ r*
La consolation, dans les derniers siècles de
l'antiquité romaine, était devenue un genre litté-
raire. Les artifices de rhétorique s'y donnaient
carrière Sénèque y excellait. Un certain fata-
lisme se drapait de grandiloquence la jactance
stoïcienne se plaisait à braver la destinée une
insensibilité volontaire à l'endroit de la souf-
france marquait je ne sais quelle victoire du
« surhomme » sur les Dieux qui faisaient souf-
frir. L'acceptation dont on leur donnait le spec-
tacle avait des accents de demi-provocation
moins soumise qu'arrogante, elle relevait les
têtes plutôt qu'elle ne les courbait. Il fallait que
les hommes eussent l'impression, et les Dieux
aussi, que le corps meurtri, que le cœur broyé,
demeuraient pourtant inaccessibles à la mor-
sure de la souffrance une fierté presque mo-
queuse se targuait de faire barricade contre les
attentats de cette perverse ennemie. Et les « con-
solations » les plus goûtées étaient probable-
ment celles qui préparaient leurs destinataires a
certaines gymnastiques de volonté, à certaines
attitudes d'athlétisme moral, impatient de se
mesurer avec les puissances d'en haut.
Un jour vint où le mot de saint Paul. sur la
folie de la croix commenca de faire le tour de la
Méditerranée avant de faire le tour du monde
et les idées humaines sur la souffrance se modi-
fièrent. On vit en elle une amie. On confessa
bientôt l'inanité menteuse de ces paradoxes
d'énergie qui portaient l'homme à prendre des
airs d'insurgé contre des maux qu'inévitable-
ment il subissait la souffrance fut proclamée
« bonne ». Sous le reflet des lueurs qui tom-
baient du Calvaire, on découvrit son efficacité
sociale on la sentit susceptible d'être mysté-
rieusement affectée au service d'autrui.
Soudainement l'horizon spirituel s'élargit la
souffrance, au lieu de demeurer un ingrat et
stérile chômage, se révéla comme un labeur pro-
ductif des milliers et des milliers d'êtres, qui
s'étaient crus inutiles" parce que malades, parce
que paralysés, parce que terrassés par la dou-
leur, découvrirent qu'ils pouvaient encore être
utiles, et qu'ils devaient l'être.
Au treizième siècle, sous les voûtes des hôpi-
taux de Palestine, on entendait s'élever, chaque
jour, à la tombée du soir, la voix des Hospita-
liers de Saint-Jean de Jérusalem cette voix
s'en allait trouver, dans les lits où les clouait
leur détresse physique, les pauvres gens qu'ils
soignaient. Et respectueusement la voix disait
« Seigneurs malades, priez pour la paix
que Dieu nous la mande de ciel en terre.
» Seigneurs malades, priez pour le fruit de la
terre que Dieu le multiplie en cette manière
que Dieu en soit servi, et la chrétienté soutenue.
» Seigneurs malades, priez pour les pèle-
rins. »
Les versets continuaient de se dérouler, pour
toutes les nécessités du monde chrétien. On
élevait ces gueux à la dignité de « seigneurs »,
parce qu'ils souffraient, parce que, par leurs
souffrances, ils étaient comme préposés aux in-
térêts de la « chrétienne gent i,, ainsi que
l'étaient les seigneurs aux intérêts de ce « pro-
chain » que le manoir protégeait. '̃'̃̃̃̃̃
Car la souffrance acceptée passait désormais
pour un moyen d'acheter des grâces, dont au-
trui profiterait pour une méthode de rachat,
dont autrui serait bénéficiaire. On goûtait la joie
de se faire victime, ou tout simplement de con-
sentir à l'être, pour créer à travers le monde
de la joie spirituelle Huysmans dans sa Sainte
Lidwine, Coppée dans sa Bonne Souffrance,
Emile Baumann en toute son œuvre de roman-
cier, ont pu nous montrer, à tous les paliers de
la société chrétienne, des âmes se faisant ré-
demptrices, rien qu'en disant Amen. Immobile
sur son grabat, le paralytique peut prendre
conscience que cette immobilité même peut être
utilisée, que sa misère, que sa souffrance, peu-
vent se transformer en une fonction sociale, et
qu'il peut trouver, dans son état même d'acca-
blement, un mystérieux moyen de soulever des
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 66.75%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 66.75%.
- Collections numériques similaires Fonds régional : Bourgogne Fonds régional : Bourgogne /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "Bourgogn1"Édit... portant suppression de l'office de président au bailliage de Mascon... [Enregistré au Parlement le 1er avril 1716.] /ark:/12148/bd6t54204073d.highres Lettres patentes du Roy, sur arrest du Conseil, pour l'abonnement de la capitation de Bourgogne & de Bresse de l'année 1716. Données à Paris le 29. fevrier 1716. /ark:/12148/bd6t542040720.highres
- Auteurs similaires Fonds régional : Bourgogne Fonds régional : Bourgogne /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "Bourgogn1"Édit... portant suppression de l'office de président au bailliage de Mascon... [Enregistré au Parlement le 1er avril 1716.] /ark:/12148/bd6t54204073d.highres Lettres patentes du Roy, sur arrest du Conseil, pour l'abonnement de la capitation de Bourgogne & de Bresse de l'année 1716. Données à Paris le 29. fevrier 1716. /ark:/12148/bd6t542040720.highres
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/8
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k296323z/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k296323z/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k296323z/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k296323z/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k296323z
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k296323z
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k296323z/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest