Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1894-05-23
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 23 mai 1894 23 mai 1894
Description : 1894/05/23 (Numéro 143). 1894/05/23 (Numéro 143).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
̃«LE FIGARO -^MERCREDI 23 MAI IS94
raït, de visu, des qualités sans lesquelles
il n'est pas d'union prospère ou d'exis-
tence heureuse 1
Ces réserves posées, la sincérité
m'oblige à déclarer que l'Exposition
canine mérite qu'on y coure. Etant
donné que le chien le plus laid excite l'a
sympathie dp la généralité, jugez des
enchantements divers que réserve l'ha-
bile groupement de cinq cents toutous
superbes Aussi, quelle que soit votre
provision d'admiration, vous l'aurez vite
"épuisée à l'aspect des meutes, des vau-
traits et des sujets isolés. Entre tous les
animaux, le chien est celui qui présente
les physionomies les plus variées. Il
partage, avec son maître, le don d'avoir
un visage à lui et des yeux qui révèlent
son caractère. Il advient aussi que
toujours comme chez son maître les
,apparences soient trompeuses. Tel bull
d'attitude terrible est la douceur même.
Tel dogue montre'un visage bon garçon
qui, si vous lui tendez la main, vous
tranchera le bras d'un coup de dent
Soyez surtout circonspect dans la classe
des chiens de luxe.
En vertu d'une loi qui se retrouve
chez le roi de la création, l'aménité n'est
pas du tout indiquée parles signes exté-
rieurs, c'est chez les bestioles d'appar-
tement que l'on rencontre le plus d'ai-
greur et le moins de franchise dans
les démonstrations. Une vieille dame,
propriétaire d'un havanais d'humeur
peu accommodante, médisait pourex-
cuser cette insociabilité quel'éloigne-
ment de la maison natale et l'inévitable
captivité qu'exige le concours le ren-
daient acariâtre et mauvais. Cela ne m'é-
tonne pas. Du reste l'Exposition de
l'Orangerie serait beaucoup plus riche
en sujets de toutes les espèces, si beau-
coup de propriétaires tout en recon-
naissant le confortable de l'installation
et lès soins prodigués aux bêtes par un
personnel attentif n'éprouvaient une
certaine répugnance à se séparer de
leurs chiens.
J'ai eu la chance d'acheter; pour
une somme insignifiante, un bull
exceptionnellement petit et trapu, dont
la robe est uniformément blanche,,
sauf un pochon noir qui noye l'œil
gauche dans une ombre pittoresque.
A ses grâces physiques, Dragon (c'est
ainsi qu'il s'appelle ) ajoute un ca-
ractère d'une bonté et d'une intèlli-
gence rares. Quiconque passe cinq mi-
nutes avec Dragon, subit le charme, car
il est d'une drôlerie extrême, et si
je ne craignais d'être accusé d'aveugle-
ment paternel, je raconterais quelques-
uns des faits et gestes de cet incompara-
ble camarade. Je serais je n'en doute
pas élevé au rang de lauréat, si je
l'exposais; .mais j'avoue qu'il n'est pas
de médailles et de coupes capables
de me consoler d'une séparation, si
courte qu'elle soit. Et puis j'ai tout
lieu de croire que Dragon conce-
vrait « de ne pas vivre à mes côtés »
un chagrin qui le pousserait à quel-
que acte désespoir. Quand je m'ab-
sente (ne fût-ce que pour un quart
d'heure), il ouvre, dans les bâillements
répétés, une gueule où, sans exagéra-
ration, deux corps comme le sien tien-
draient à l'aise et il pousse des gémisse-
ments qu'accompagnent des larmes vi-
sibles. Jamais, dans le cours de mon
existence, je n'ai inspiré une amitié
pareille jamais, les bouches qui m'a-
vaient juré une éternelle affection ne se
sont aussi largement fendues dans un
.ennui plus sincère, et je soupçonne que
les yeux humides et centristes, au mo-
ment des adieux, se sont séchés comme
par enchantement dès que j'ai refermé
sur moi la porte du prétendu « nid d'a-
mour ».
Adrien Marx.
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
LITTÉRATURE
C'est un très cur\«ux ouvrage que
celui que M. Jules B>is a publié chez
L. Çhailley, sous ce titre les Petites
Religions de Paris; beaucoup y appren-
dront avec étonnement qu'il existe dans
notre capitale des gens qui sacrifient
encore de bonne foi aux divinités anti-
ques des Païens, des Swedenborgiens,
des Bouddhistes orthodoxes et éclecti-
ques, des Théosophes.des gens qui ado-
rent la lumière d'autres, Satan des
Lucifériens, des Gnotiques, des gens
qui appartiennent au culte d'Isis, de
l'Essénianisme et de l'Humanité. Il y a
bien d'autres religions encore, mais
çeMes-là sont les principales il n'est tel
que le vent des temps d'incrédulité pour
raviver des étincelles dans des cendres
que l'on,croyait éteintes depuis long-
temps. a
Il est très intéressant de suivre M.
Jules Bois dans ses pérégrinations qui
le conduisent jusque dans des mansar-.
des pour y retrouver les prêtres et les
prêtresses de tant de cultes divers. Il
en est de vraiment impressionnants par
leur conviction et leur sincérité je n'af-
firmerai pas que le docteur, Charcot ne
les eût pas un peu considérés comme se
rattachant à sa clientèle, mais quel est
le philosophe qui n'en fait pas plus ou
moins partie? La gaîté elle-même a par-
fois son mot dans ce livre où je trouve
le profil d'un disciple d'Auguste Comte,
du « docte M. Laffitte, qui démolit Vic-
» tor Hugo et Napoléon, appelant Napo-
» léon le jobard de Sainte-Hélène l Jo-
bard nous parait bien vite dit à ce
compte, tous les vaincus, tous les assas-
sinés sont des jobards; César .est le jo-
bard de Brutus, Vercingétorix de César,
saint Louis des croisades, Jeanne d'Arc
des Anglais, Henri IV de Ravaillac,
Charles Ier de Cromwell, sans compter
la grande ère de la Révolution qui de-
yrait, plus que tout autre, s'appeler celle
du Jobardisme Jobards, les nobles, les
Bourgeois, les gens du peuple, les vieil-
lards, les femmes, les enfants guilloti-
nés par les Camille Desmoulins, Robes-
pierre, Danton et le reste qui, devenus
jobards à leur tour, s'entre-guillotinè-
rent jobards, Desaix et tous les soldats
tombés sup les champs de bataille; jo-
bards, les savants qui sont tués dans
leurs laboratoires, les médecins qui
meurent d'une piqûre anatomique jo-
bards, les missionnaires qu'on scie en-
tre deux planches. Que de jobards, bon
Dieu dans le passé, le présent et l'ave-
nir voilà qui me parait lestement jugé.
Pourtant si le positivisme n'avait dé-
couvert que cette vérité vraiment contes-
table, il est douteux que le nom d'Au-
guste Comte fût parvenu jusqu'à nous.
En lisant, dans le livre de M. Jules
Bois, le résumé de tant d'efforts sortis
des âmes et des cerveaux pour s'orien-
ter vers la vérité et adorer ce qui. doit
être adoré; en examinant les complica-
tions d'arguments philosophiques, de
considérations scientifiques, de concep-
tions psychologiques que nous appor-
tent les inventeurs ou rénovateurs de
104 de cultes minuscules, on se de-
mande slï ne serait pas plus simple,
en présence de ce besoin impérieux
d'une religion, de prendre celle qui a ré-;
sùmé tout ce que les autres avaient de
bon; celle qui contient le pardon et;
l'espérance, qui fortifie les faibles et
grandit les humbles, et qui n'a vérita-
blement qu'un tort: celui d'être la nôtre.
ART
Le dernier ouvrage de M. Gustave
Larrôumet Nouvelles études de littéra-
ture et d'art, s'il contient de précieux,
renseignements sur les lettres, des juge-
ments sains et sainement exprimés sur
l'art avant Louis XIV, Lamartine.Weiss,
Taine, Jules Lemaltre, etc., renferme
aussi des renseignements très piquants
sur la vie privée des artistes dont il a
analysé l'oeuvre, témoin ces deux pages
que j'emprunte à sa belle étude sur un
grand et consciencieux artiste de notre
temps, M. E. Frémiet. Il est en effet cu-
rieux, aujourd'hui qu'il est arrivé au
sommet de son art, que les suffrages du
public et de l'Académie qui lui a ouvert
ses portes. l'ont placé au rang mérité,
d'apprendre quels furent les singuliers
débuts de celui qui devait nous donner
les beaux monuments de Jeanne d'Arc
et de Raffet.
Comme il était jeune et sans fortune,
Frémiet dut accepter les besognes qui
s'offrirent d'abord à lui.
Dupuytren et Orfila avaient créé une bran-
che d'industrie, en introduisant dans l'étude
de la médecine les figures de cire coloriée.
Cette industrie relevait de Part,- car il y fal-
lait la plus exacte fidélité. Le jeune Frémiet
fut trop heureux d'être l'un des sculpteurs
qu'elle employait. Avec le genre de modèles
auxquels il avait affaire cadavres dévastés
par la maladie, plaies ou blessures, ruines
humaines, on devine qu'il lui fallut des nerfs
solides et quelque ténacité. Il travaillait d'or-
dinaire dans un atelier du faubourg Saint-
Antoine, alimenté par l'hôpital voisin. Seul,;
au fond d'une cour, il passait là de longues
heures à modeler des pourritures et à copier
des sanies. Une après-midi de mars, où les
premiers souffles du printemps commençaient
à tiédir, il trouvait, en arrivant à l'atelier,
une grande terrine pleine d'un liquide bleuâ-
tre où baignait une blancheur confuse. Sans
y prêter autrement d'attention, le sculpteur
se mettait au travail, lorsqu'entrait le mé-
decin qui l'employait. Ce médecin retrous-
sait sa manche, plongeait la main dans la
terrine et en tirait une peau de femme, bien
complète après avoir constaté l'état de la
préparation, il la replongeait dans le bain,
en disant « Voici le carnaval, elles ne se-
ront pas rares cette année. » Le carnaval,
parait-il, était des plus gais, cette année-là,
et chaque nuit de bal masqué, semant les
pleurésie, faisait entrer à. l'hôpital nombre
de jeunes femmes. Cette peau avait dansé,
soupe et aimé avant d'aboutir à cette terrine.
Préparateur de pièces anatomiques, le jeune
sculpteur était encore, à la Morgue, un auxi-
liaire de la médecine légale. Un soir, on l'ap-
pelait en hâte pour mettre une charbonnière
coupée en morceaux à même de figurer utile-
ment dans une confrontation judiciaire. Il
trouvait le cadavre reconstitué, et, devant
lui, le médecin légiste en tenue de soirée et
attendant avec impatience, car il dînait en
ville. Un coiffeur avait été mandé aussi. L'ar-
tiste se mettait à l'oeuvre (c'est le. sculpteur
que je veux dire) il rougissait les joues et
les lèvres, redonnait à ce visage marbré les
couleurs de la vie. Puis c'était le tour du
coiffeur blême de peur et le peigne trem-
blant dans sa main, il accommodait cette
chevelure. Enfin, le médecin, délicatement,
du bout de ses doigts gantés, plaçait dans les
orbites vides des yeux de verre, en essuyant
avec son mouchoir la buée qui les ternissait.
Le Jardin des Plantes faisait diversion et
compensation à ces travaux funèbres. L'étude
prolongée du cadavre humain avait donné
au sculpteur le désir de représenter l'animal
vivant. Aussi, au printemps et en été, dès
l'aube, il était devant les cages, le crayon à
la main, et, sous les vieux arbres, devant les
formes vigoureuses, les attitudéTsouples, les
pelages mouvants sur les muscles sains, il
oubliait avec bonheur l'hôpital et la Morgue.
Ce n'est là qu'un détail, un épisode de
cette belle étude sur un artiste de haute
valeur dont la jeunesse s'est écoulée en-
tre deux artistes de génie, Rude et Ba-
rye, et qui, dans ce voisinage redouta-
ble, a su rester lui-même et conserver sa
personnalité.
DOCUMENTS HISTORIQUES
Evidemment V affaire de Panama res-
tera toujours le point lumineux du re-
cueil des Causes criminelles et mondai-
nes de 893 que mon confrère Albert
Bataille vient de publier chez Dentu
mais, à côté de ce Léviatîïan des procès,
il en est bien d'autres qui atteignent
aussi des proportions considérables et
qui n'intéresseront guère moins les phi-
losophes, les gens désireux d'émotion
ou les simples curieux certes, l'affaire
du restaurant Véry, la bagarre d'Aigues-
Mortes, les détails sur le peintre Luna,
l'affaire de Rahden, l'assassin de M. Ro-
bert de La Villehervé, et bien d'autres
méritent aussi de fixer l'attention et
leurs récits seront la bonne fortune de
toute bibliothèque. Donc nous recom-
mandons cette nouvelle série avec au-
tant d'insistance que nous l'avons fait
pour les précédentes.
̃̃̃• -̃ **# ̃̃'̃̃̃
Sous ce titre :"£e métal-argent à la fin
du XIX' siècle, un écrivain de talent,
M. Raphaël-Georges Lévy, publie chez
Guillaumin une très intéressante tra-
duction de trois ouvrages parus récem-
ment en Allemagne, et dus à la plume
d'un des membres les plus connus du
Reichstag, M. Louis Bamberger.
Le premier de ces ouvrages nous ra-
conte les « Destinées de l'Union latine »
le second, sur « l'Argent », est un ré-
sumé de la situation monétaire de l'Al-
lemagne, de.l'Autriche et de l'Amérique
du Nord en 1892 le troisième, paru il y
a quelques mois à peine, et qui eut en
Allemagne, dans le monde spécial des
économistes, un succès considérable,
énumère, discute, critique avec beau-
coup de science et d'éclat les « Sophismes
des partisans de l'argent ».
M. Raphaël-Georges Lévy a réuni en
un seul volume ces trois œuvres de po-
lémique et d'histoire.
ROMANS
Nous avons déjà signalé M. Philippe
Chaperon comme un de nos jeunes ro-
manciers intéressants à suivre dans
leur carrière. Rédemption, qu'il vient de
publier chez Lemerre, me confirme
dans cette opinion. C'est un livre écrit
avec sincérité et dont le héros, un an-
cien viveur parisien, veut racheter une
faute passée par une vie d'apôtre. Il ne
va pas, en égoïste, s'enfermer dans un
couvent pour passer le reste de son exis-
tence à ne prier que pour lui-même, il
veut rester dans notre monde et y faire
du bien; secourable à tous, il devient
une sorte de Christ campagnard, et
comme rien ne paraît plus extraordi-
naire que la vertu, il devient suspect;
persécuté et paie de sa vie une émeute
de pauvres diables qui veulent le défend
dre. Voilà l'ensemble de ce livre qui mé--
rite certainement un plus long examen.
Les très nombreux volumes que mes-
sieurs les éditeurs ont publiés en quel-
ques jours m'ont forcé à négliger un
charmant poème en prose, de M. Emile;
Pouvillon: Bernardette, de Lourdes* Ce:
n'est guère que la biographie de la petite
bergère qui mourut comme une, sainte,
le récit des événements que suscita le
récit des apparitions de la grotte de
Lourdes, mais tout cela est si bien dit et
avec tant de charme que l'on publie,'
captivé par la lecture, que l'on a appris
jadis tout cela, tant la poésie de M.
Emile Pouvillon a su le rénover.
Philippe (fui»
MÉMENTO
Poésie. En un volume admirablement
présenté par les éditeurs Bernoux et Cumin
(de Lyon), M. Clair Tisseur vientde publier une
nouvelle édition de ses poésies, sous ce titre:
Pauca Paucis, augmentée d'une seconde série.
M. Clair Tisseur a fait précéder ce recueil
d'une très spirituelle préface dans laquelle il
se plaint de voir les Lyonnais insensibles à la
poésie ;c'est un tort, il est vrai, mais encore
vaut-il mieux ne pas aimer les vers que de
vouer un culte à ceux qui sont mauvais ou à
ceux qui n'en sont pas, ce qui est le cas de
bien" des Parisiens. J'aurais grand plaisir à dire
tout ce que je pense de ceux-ci, à signaler l'à-
mour de la perfection de la forme qu'a déjà I
prouvé l'auteur dans szsModestes Observations
sur l'art de versifier, dont nous avons parlé,
ici mais l'espace m'est mesuré et j& ne puis
qu'annoncer Pauca Paucis aux poètes et à
leurs amis.
-M. Edouard Schuré, l'auteur des Grands
Initiés », n'est pas seulement un philosophe et
un érudit, il est aussi poète, mais ses vers ne
désertent pas les opinions de sa prose et sem-
blent avoir pour but principal de les confirmer;
témoin le recueil qu'il vient de publier à la li-
brairie Perrin, sous ce titre la Vie Mystique,
et qui se divise en plusieurs parties formées
d'une légende bouddhiste, de « la Muse d'Eleu-
sis », de « l'Epreuve du Pharaon et « d'Em-
pédocle ».
Voyages. Chez Hachette Voyage aux
trois Guyanes et aux Antilles, par M. G.
Verschuur.Très intéressant volume,contenant,
entre autres curieux renseignements, des; dé-
tails recueillis sur nos établissements péniten-
tiaires à Cayenne. Nous recommandons spé-
cialement ce volume plein de documents iné-
dits, en rappelant les Antipodes, un très bon
livre du même auteur.
Mentionnons aussi, même librairie A tra-
vers la Russie boréale, intéressante relation de
M. Charles Rabot.
Histoire. Voici un livre dont le titre dit
l'intérêt Le vrai Chevalier de Maison-Rouge,
A.-D. Gonzze de Rougéville (1761-1814), da-
prés des documents inédits par M. G. Lenôtre.
On y suit, jusqu'au jour où il fut fusillé, le fa-
meux « chevalier de l'Œillet », qui eut du
moins l'honneur de tenter d'arracher Marie-
Antoinette au supplice qui l'attendait.
Romans. Du bloc des romans qui vien-
nent de paraître en même temps* il convient
de détacher Frère Pélage, par Mme Jane
Dieulafoy (chez Lemerre) En Avant, par M.
Emile Pierret (même librairie) Par Elles!
par Henri de Chennevières (chez Flammarion)
Bas-bleu et Talon-rouge, par Jaël de Romano
(chez Dentu); Mais il l'aima, par Janine (chez
Lemerre) Ah l jeunesse 1 par Georges Cour*
teline (chez Flammarion); La Kosake, par
Armand Silvestre (chez Charpentier) et Haine
d'amour, par Daniel Lesueur (chez Lemerre).
Ph. G.
LES FÊTES FARGENTEUIL
La neuvaine ordonnée par S. G. MgrGoux,
évêque de Versailles, à l'ocasion de l'osten-
sion de la sainte tunique, a été clôturée hier,
à Argenteuil, par des fêtes solennelles aux-
quelles assistaient ,un cardinal, un archevê-
que et trois évêques S. Em. le cardinal Lan-
génieux, archevêque de Reims, Mgr Ardin, ar-
chevêque de Sens, Mgr Duval, évêque de
Soissons, l'èvêque de J»anéas et l'Ordinaire du
diocèse.. • ̃"̃'̃
Constatons d'abord que la dévotion des fi-
dèles à la robe sans couture de Notre-Sei-
gneur n'a pas été refroidie par l'interminable
discussion motivée, entre deux églises riva-
les, par la question de son authenticité. Deux
chiffres en feront foi plus de 150,000 visi-
teurs, dans l'espace de huit jours, sont venus
la vénérer et, le lundi de la Pentecôte seule-
ment, 26,000 voyageurs ont débarqué à la
gare d'Argenteuil. Les années précédentes,
leur nombre, pendant la durée de fêtes simi-
lairés, n'avait jamais dépassé 14,000. Cette
petite ville devient donc de plus en plus un
véritable lieu de pèlerinage qui pourrait bien
atteindre sous peu, si ce mouvement conti-
nue, à la célébrité de la Salette, de Rocama-
dour ou de Verdelais.
Aussi les habitant» sont-ils dans le ravis-
sement. Une curiosité sympathique semble
les pousser au-devant de leuràhCtes 4'nn jour
et ils regardent passer, avec une satisfaction
visible, les longues théories de pèlerins qui
s'acheminent, à l'arrivée dé chaque train, de
la gare jusqu'à la coquette église. Aux fenê-
tres des maisons pavoisées, au sommet des
mâts, autour de la flèche légère du clocher,
claquent joyeusement les drapeaux tricolores.
Sur la place même de l'église, des boutiques
improvisées, disposées en cercle et où se ven-
dent toutes sortes d'objets de piété, font des
affaires d'or. Quant au clergé, il ne paraît
nullement hanté par le cauchemar de Trêves.
Il rayonne. Il savoure avec délices son triom-
phe.
Douze anciens zouaves pontificaux montent
la garde devant le reliquaire autour duquel
se relayent constamment des prêtres dont la
fonction consiste à faire toucher aux vitres,
qui protègent la sainte tunique, mains cha-
pelets, médailles, etc., que les pèlerins em-
porteront comme autant de précieux souve-
nirs.
,La grand'messe a été célébrée, hier, ponti-
ficalémènt, par Mgr Duval, évêque de Sois-
sons. S. Em. le cardinal archevêque de Reims
« faisant chapelle », suivant l'expression li-
turgique. A l'issue de l'office, tous les évê-
ques présents sont allés processionnellement
vénérer l'insigne relique.
Mgr l'èvêque de Soisson» a également pré-
sidé aux vêpres, qui ont commencé à deux
heures et demie. En face de Sa Grandeur, de
l'autre côté du chœur, un trône avait été dis-
posé pour le cardinal LaHgénîeux. Vers le
milieu du sanctuaire avait pris place Mgr
Ardin, ayant à sa gauche l'èvêque de Ver-
sailles, à sa droite l'évêque de Panéas. Après
le chant du- Magnificat, le R. P. Gardet est
monté en chaire.
La partie capitale du discours de réminent
dominicain a été une véritable et magnifique
leçon de philosophie de' l'histoire à la ma-
nière de Bossuet. S'emparant des faits les
plus saillants de notre histoire nationale, le
Père s'est attaché à montrer, par eux, l'union
toujours intime du Christ et de la France,
nation choisie et bénie entre tous les peuples,
depuis le baptême de Clovis dont on célébrera
bientôt le quatorzième centenaire. C'est la
France qui a donné au Saint-Siège le pou-
voir temporel. C'est a elle que revient le prin-
cipal honneur des croisades entreprises pour
arracher aux Musulmans le tombeau de Jé-
sus-Christ. Chacun dés grands services
qu'elle a rendus à l'Eglise et à son chef su-
prême ont été récompensés par de longues
années de gloire et de prospérité!
Ainsi les deux grands siècles, le treizième
et le dix-septième, ont été, pour la France,
la prompte récompense de ses luttes contre
l'arianisme et contre le protestantisme. Lors-
qu'elle est devenue, au contraire, infidèle à
sa mission, le châtiment ne s'est pas fait at-
tendre. Au soufflet de Nogaret a répondu le
triple soufflet de Crécy, de Poitiers et d'Azin-
court. Mais après l'expiation, Dieu a fait
pour elle ce qu'il ne fit jamais pour aucun
autre peuple, en suscitant pour sa délivrance
une vierge, une enfant Jeanne d'Arc.
A ces preuves manifestes et si souvent re-
nouvelées de la prédilection du Christ pour
notre pays, nous devons répondre par les
protestations incessantes de notre fidélité. Le
prédicateur revient alors àla relique exposée
à la vénération des fidèles. Cette reliqnè, dit-
il, a été violée trois fois i au X" siècle, par
des Barbares qui ne connaissaient pas Dieu;
au XVIe par les Huguenots, qui le mécon-
naissaient; enfin au XVIIP par les révolu-
tionnaires qui l'ont persécuté et chassé de
de la façon la' plus odieuse. Il y a parmi
nous, à l'heure présente, des gens qui ne
connaissent pas Dieu, d'autres qui le mécon-
naissent, d'autres aussi qui le persécutent.
C'est contre tous ceux-là que nous devons
protester par un amour-du Christ, assez ar-
dent pour que l'exemple en soit contagieux.
Ce sera notre coopération incessante au salut
de la patrie.
Le sermon du R. P. Gardet a été suivi d'un
salut solennel et d'une procession à laquelle
ont pris part les Enfants de Marie, bannière
en tête, un nombreux clergé et les cinq pré-
lats qui ont ensuite donné, tous ensemble, la
bénédiction. Et la foule s'est écoulée lente-
ment, après avoir vénéré une dernière fois la
précieuse tunique, mystérieuse et sombre
dans son cadre d'or et de pierreries.
J. de Narfon.
A L'ÉTRANGER
L'ALLIANCE COMMERCIALE AUSTRO-RUSSE
La Russie vient de signer un traité de
commerce avec l'Autriche. On n'aurait
pas besoin de dire un mot de plus car il
y a des choses qui se comprennent tou-
tes seules. Et il n'est besoin d'être ni
économiste ni diplomate pour compren-
dre qu'après avoir voulu une paix com-
merciale avec l'Allemagne, la Russie en
a fait autant avec l'Autriche, qu'elle s'est
rapprochée maintenant de la grande al-
liance qui tient l'Europe centrale et
qu'il y aura des gens dans le vaste em-
pire des Tsars, des gens simples et peu
compliqués, qui se demanderont pour-
quoi l'Autriche qui n'a que des intérêts
politiques opposés à ceux de la Russie
fait des sacrifices que la France refuse
absolument de consentir à l'agriculture
russe.
Si je rencontrais une de ces âmes sim-
ples, je lui dirais d'aller demander des
renseignements à M. Méline et je le sup-
plierais de croire qu'il y a beaucoup de
bons Français qui n'en comprennent
pas plus qu'elle f (J'avoue même que
pendant que je le tiendrais j'aurais
grande envie de demander au bon Russe
quelques explications sur d'autres cho-
ses mais comme elles se passent en
Russie, le bon Russe ne les comprendrait
pas plus que je ne comprends ce qui se
passe en France.)
Le fait est que la signature de ce traité
de commerce a une importance qu'il est
impossible de céler. Il a fallu des raisons
politiques très graves pour amener les
agriculteurs hongrois à faire des sacri-
fices. On comprend encore, en cas de be-
soin, les raisons qui ont fait céder la
Prusse aux exigences russes tout ce
qui peut diminuer pour elle les chances
d'être prise un jour entre deux feux,
elle l'accepte. Mais l'Autriche n'a pas ce
danger à courir. Se prépare-t-il quelque
chose dans les Balkans? C'est encore
bien possible. Mais on ne pouvait pour-
tant pas prévoir dès le 14 mars, date de
l'ouverture des négociations entre les
deux pays, qu'un jour viendrait où le
jeune roi Milan et le vieux roi Alexandre
s'amuseraient à jouer à faire des coups
d'Etat ? Il y a donc autre chose et ce
ne peuvent logiquement être que le désir
de profiter des fautes commises chez
nous et les efforts tentés pour enchaîner
la Russie à la triple alliance.
Il est inutile de ne pas vouloir voir
ce qui se passe autour de nous les
faits parlent, hélas I trop haut. Mais
ne serait-il pas temps de rechercher
un peu à qui incombe la responsa-
bilité de ce qui se passe? Ne fût-ce
que pour ne pas avoir des désillusions
un jour ou l'autre et pour ne pas confier
dans un avenir plus ou moins lointain
les destinées de- la France à qui serait
parfaitement indigne de cet honneur?
Et s'il y a des gens qui disent que
voilà bien du bruit et bien du pessi-
misme pour un traité de commerce, il
faut leur dire qu'ils ne savent rien de ce
qui se passe. (A moins qu'ils ne le sa-
chent que trop bien et qu'ils ne fassent
les ânes pour avoir du son ainsi que
le dit le vulgaire.)
Jacaue» St-Cèr*
NOUVELLES
,FÂR D$P~CHES DE N0~ CORAESPONDéNTB
PAR DÉPÊCHES DE NOS CORRESPONDANTS
Vienne, 22 mai.
La Correspondance politique annonce que
M. Simitch, ministre de Serbie à Vienne, au-
rait notifié hier au comte Kalnoky le chan-
gement de la Constitution serbe.
Bruxelles, 22 mai.
Le ministre des finances a déposé aujour-
d'hui sur le bureau de la Chambre un projet
de loi interdisant la circulation de la mon-
naie de billon française en Belgique.
Saint-Pétersbourg, 22 mai.
Les Novosti déclarent que si l'ex-roi Milan
s'avisait de détrôner, pour occuper sa place,
le roi Alexandre, reconnu par toutes les
puissances, il tomberait dans la même situa-
tion que l'usurpateur Ferdinand de Cobourg.
Londres, 22 mai.
Voici le résumé du traité du roi Léopold
avec la Grande-Bretagne: `:
Le Roi reconnaît la sphère de l'influence
britannique établie dans la convention anglo-
allemande du leur juillet 1890.
La Grande-Bretagne cède bail au roi
Léopold le territoire de Bar El-Gazal. Le bail
durera tant que le Congo restera, soit comme
Etat indépendant, soit comme colonie belge,
sous la souveraineté du roi Léopold ou de ses
successeurs.
Le Congo cède à bail, pour la même durée
de temps, à l'Angleterre, une bande de terri-
toire d'une largeur de 25 kilomètres allant du
point extrême nord du lac Tanganika, jus-
qu'au point extrême sud du lac Albert-
Edouard.
A L'HOTEL DL VILLE
La deuxième session ordinaire du Conseil
municipal s'ouvrira lundi prochain.
En attendant, les Commissions se réunis-
sent quotidiennement et les bureaux expé-
dient ou préparent les affaires.
A citer, parmi celles qui peuvent intéresser
le public
La question de Te«M,traitée par la Commission
assainissement. D'après le docteur Cornil,
il est bon, dès qu'on redoute la fièvre typhoïde,
de laver et de brosser les filtres à l'eau bouillante.
C'est ce qui sera fait dans les écoles, tous les
cinq qu six jours.
La question des décors, traitée par le Conseil
d'hygiène.– M.Armand Gauthier demande le rap-
pel de l'ordonnance sur les théâtres, relative à
l'ininflammabilité des décors et à l'interdiction de
l'établissement de magasins de décors dans l'in-
térieur des théâtres. Cette ordonnance va être
imprimée et communiquée.
La question de Vemprunt. Les souscripteurs
du dernier emprunt, qui n'auraient pas échangé
leurs certificats de souscription contre des titres
provisoires avant le 21 juillet prochain, ne pour-
ront participer au tirage qui aura lieu le 23 du
même mois.
La question de la mairie du dixième arrondis-
sement. Il sera procédé, le 9 juin, à l'adjudi-
cation des lots de charpente, couverture, parque-
tage, fumisterie, peinture, nécessaires à la re-
construction de cette mairie.
La question de l'Ecole Braille. Son agran-
dissement est déclaré d'utilité publique. t,
La question des commissaires-priseurs. Par
suite du renouvellement annuel d'une partie de
ses membres et de l'élection de ses officiers, la
Chambre des commissaires'-priseurs du départe-
ment de la Seine se trouve ainsi composée pour
l'année 1894-1895.
MM. Nottin, président Ory, syndic Tuai, rap-
>orteur Guidou, secrétaire Oudard, trésorier
Schoofs, René Appert, Eugène Bailly, Bartau-
mieux, Coifiie, Huguet, Lucien Veronj Desatt-
bliaux, Bernier, Trouillet, membres.
Dès l'ouverture de la'session; MM. Arsène
Lopin, Piperaud, etc., demanderont la dis-
cussion sur leur proposition concernant les
voitures. Le froid présent sera pour eux un
excellent argument. On "sait ce que réclament
nos édiles la mise à la disposition du pu-
blic de voitures ouvertes ou fermées, selon
le temps. Rien de plus juste. Le préfet de po-
lice ne manquera point de rattacher à cette
question l'ordre du jour voté hier rue Mar-
cadet
L'Union syndicale des Cochers du département
de la Seine, réunie à son siège social
Considérant Qu'elle a fait, auprès- des pouvoirs
publics, les démarches nécessaires jour obtenir
la feuille d'identité qui justifiera que le cocher
est bien titulaire de la voiture qu'il conduit, que
journellement les plaintes du public adressées à
ta Préfecture constatent des détournements
d'objets laissés dans l'intérieur des véhicules
Qu'environ 400 on 500 cochers, possédant des
diplômes, trouvent le moyen de travailler certai-
nes heures dans la journée avec des fiacres que
leur confient certains cochers inconscients moyen-
nant une redevance, ce qui permet à ces gens de
pratiquer le vol, et cela au détriment de notre
honnête corporation
Demande instamment à M. le Préfet de police
de rendre obligatoire la feuille d'identité qui
sera remise, par le loueur, aux cochers travaillant
chez lui, ce qui permettra la possibilité d'un
contrôle et donnera satisfaction au public pari-
sien.
Cette réclamation également est très juste.
Il est inadmissible qu'un cocher sous-loue sa
voiture et échappe ainsi à la responsabilité
que les voyageurs sont en droit de trouver
en lui.
Henri Hamoise.
»
Nouvelles Diverses
LE CADAVRE D'EMILE HENRY
Nous avons dit hier que le cadavre d'Emile
Henry n'ayant pas été réclamé par la famille,
un simulacre d'inhumation avait été fait,
après quoi le corps avait été remis à la Faculté
de médecine.
Ce n'est donc pas sans une certaine surprise
que M. Lépine, préfet de police, à reçu la let-
tre suivante
Paris, 21 mai.
Monsieur le préfet de police,
Contrairement à ce que disent les journaux,
Mme Henry a fait réclamer le corps de son fils.
C'est donc en violation de l'article 12 du Code
pénal qu'il a été livré à l'Ecole de médecine.
Veuillez me faire savoir, monsieur le préfet de
police, comment et quand nous pourrons recueil-
lir les restes de ce malheureux pour les conduire,
sans nul appareil, ainsi que le veut la loi, à la
tombe de son père.
Recevez, etc. Dr GOUPIL.
M. Lépine a immédiatement ouvert une en-
quête. Il en résulte que ni lui, ni le directeur
de la Roquette, ni le chef de la Sûreté, ni le
Parquet n'ont reçu aucun avis delà famille.
Du reste, dans une interview publiée par
un journal du soir, M. le docteur Goupil re-
connaît qu'il a commis une erreur involon-
taire. Il déclare que Me Hornbostel, qui s'était
chargé de remplir les formalités, a été pris en
sortant de l'Elysée d'une attaque d'éclampsie
qui l'a rendu incapable de penser et d'agir.
Bien que tous les dictionnaires prétendent
que l'éclampsie est une maladie particulière
aux femmes en couches, nous ne devons pas
douter, puisque c'est un médecin qui l'af-
firme, que Me Hornbostel n'en ait été. affecté.
Mais, s'il ne peut ni penser ni agir, comment
admettre la lettre qu il a écrite lundi à Mme
Fortuné Henry à Brévannes ?
Dans cette lettre, Me Hornbostel dit que
lorsqu'il avait été reçu dimanche à onze
heures du matin, à l'Elysée, M. Carnot lui
avait nettement déclaré qu'il ne s'opposerait
pas au libre cours de la justice, mais ne lui
avait pas annoncé que l'exécution fût pour
le lendemain matin. C'est ce qui fait, dit-il,
qu'il n'a pu faire à temps les démarches.
Quoi qu'il en toit, se rendant au désir ex-
primé par la lettre du docteur Goupil, M. Lé-
pine a immédiatement écrit au doyen de la
Faculté pour que toute expérience fût cessée
et pour que les restes épars du supplicié fus-
sent rassemblés et remis à Mme Fortuné
Henry ou à son mandataire.
Sur cet ordre, les débris du cadavre, ras-
semblés tant bien que mal, ont été mis en
bière hier après-midi et envoyés, dans un
fourgon des hôpitaux, à M. le docteur
Goupil.
Ce matin, avant le jour, la bière dû être
placée dans le tombeau que la famille Henry
possède au cimetière du Père-Lachaise.
TJNK BOMBE CHEZ L'ABBÉ GARNIER
Nos lecteurs connaissent l'abbé Garnier, le
conférencier populaire, directeur du journal
le Peuple Français, qui n'a pas craint d'en-
gager à maintes reprises la discussion avec
les leaders des partis les plus avancés et
qui a récemment inauguré à Montmartre,
pour y continuer ses conférences, une concur-
rence à la fameuse Maison du Peuple.
L'abbé Garnier vient d'être Tobjet ^'une
tentative criminelle. On a déposé une bombe
à son domicile, 17, avenue Niel.
L'abbé et son frère, Léon Garnier, prêtre
comme lui, .occupent à cette adresse un ap-
partement au deuxième étage au fond de la
cour. Cet appartement a deux entrées; c'est
près de la porte qui ouvre sur une petite an-
tichambre que l'engin a été déposé.
C'est le concierge, M. Chevé (qui, soit dit
entre parenthèses, est titulaire de plusieurs
médailles honorifiques et président d'une
Société de sauvetage), qui a découvert la
bombe et l'a empêchée d.'éclater.
Vers huit heures, a-t-il raconté, comme
je me préparais à ouvrir le compteur pour
allumer les becs de gaz dans l'escalier, un
homme, qui avait l'apparence d'un livreur de
magasins de nouveautés 'et qui était enve-
loppé dans un grand manteau de toile cirée,
entra et me dit « Je monte chez M. l'abbé
Garnier. » Je ne fis aucune observation. Mais
à peine cet homme était-il redescendu que
ma femme qui allumait les becs dans l'esca-
lier m'appela en criant « Il y a le feu chez
» M. l'abbé. L'escalier est plein d'une odeur
» de roussi !» »
« Je montai au galop et arrivai sur le pa-
lier du deuxième au moment où M. Léon
Garnier ouvrait la porte. Nous aperçûmes
alors la bombe dont la mèche brûlait. Il
était temps, car le feu était arrivé à deux
centimètres du couvercle. J'éteignis la mèche
avec mes doigts, en me brûlant un peu. Puis
je pris l'engin, qui était fort lourd, et je le
descendis dans la cour, où je versai dessus
trois seaux 'd'eau. Pendant ce temps, ma
femme se mettait à la recherche d'un gardien
de la paix et -allait avertir le commissaire de
police.
» Ce magistrat m'a félicité de mon cou-
rage, mais m'a blâmé d'avoir inondé la
bombe, ce qui rendrait plus difficile l'examen
du Laboratoire municipal. J'ai répondu que
j'avais agi pour le mieux pour le salut de
mes locataires. »
L'engin a été examiné par M. Girard,"chef
du Laboratoire munUipal.. C'est une longue
boîte en fer-blanc qui avait servi à contenir
du pétrole. On peut voir de ces boîtes aux
devantures des épiciers. Il pesait de douze à
treize livres. Une mèche traversait la bombe.
Al intérieur se trouvaient des tubes en plomb,
remplis de poudre de chasse, du plâtre et,
très probablement, de la poudre chloratée.
L'eau jetée par M. Chevé n'a pas permis de
se rendre bien compte de la charge.
M. l'abbé Garnier était absent au moment
où la bombe a été déposée. Il se trouvait à la
Maison du Peuple français, à Montmartre, où
il faisait une conférence; Ni lui, ni son frère,
l'abbé Léon Garnier, n'ont de soupçons. fis
ont été l'objet de menaces fréquentes et ils ont
reçu le mois dernier une lettre, formée au
moyen de lettres découpées dans lesjournaux
et collées, où on les traitait de calotins, en
leur disant qu'ils sauteraient. Ils ignorent de
qui peut émaner, cette lettre.
M. Chevé s'est souvenu après coup que
l'individu au manteau de toile cirée était déjà
venu, il y a cinq à six semaines, en compa-
gnie d'un camarade, se renseigner sur le lo->
gement et les habitudes de l'abbé Garnier.
Ennuyé de leurs questions, le concierge leur
avait dit de monter. Ils avaient feint de le
faire. De ces indiïidus, l'un avait l'accent
méridional; l'autre» celui qui est venu appor-
ter la bombe, est grand et a les cheveux
blonds. M. Chevé affirme qu'il les reconnaî-
trait parfaitement.
W. le baron Alphonse de Rothschild tra-
versait, hier, à une heure, la rue du 4-Sep-
témbre, dans son coupé, lorsqu'une des roues
de sa voiture s'est détachée..
Le coupé a été traîné sur un parcours de
vingt mètres environ et le cheval s'emballait
déjà lorsque plusieurs passants se sont jetés
à la bride de l'animal et l'ont arrêté net.
M. le baron Alphonse de Rothschild est
sorti du coupé sans mal aucun et s'est dirigé
à pied du côté de la Bourse.
Le cadavre du marchand de vin Boulai
tué à coups de revolver par son fils dans la
nuit du 16 au 17 de ce mois, sera inhumé au-
jourd'hui.
Le corps partira de la Morgue à deux heu-
res, et le service funèbre aura lieu trois
heures et demie à l'église de Grenelle.
VOL DE DIAMANTS
Un voyageur, d'origine anglaise, arrivant
de Londres, hier matin, à la gare du Nord,
vid Calais, demandait avec instance qu'on le
conduisît au commissariat de police. Là, il
déclara qu'à Calais il avait bu avec un au-
tre voyageur et que tous deux étaient montés
ensuite dans le même wagon de 1^ classe.
Il ajouta qu'il était courtier en diamants et
qu'il était porteur d'une sacoche renfermant
pour cent mille francs environ de diamants.
Pendant le trajet, il s'était, a-t-il prétendu,
profondément endormi et ne s'était réveillé
qu'en entrant en gare à Paris. Son compagnon
de route et la sacoche avaient disparu.
Le signalement que le volé a donné de son
voleur a été transmis télégraphiquement à
toutes les gares frontières.
BRULÉE VIVE
Encore une malheureuse femme qui vient
d'être victime de son imprudence.
Mme Adèle Lefebvre, âgée de cinquante-
cinq ans, habitant au cinquième étage, 4, rue
de la Cure, voulut avant-hier soir, pour acti-
ver le feu qu'elle avait allumé dans un four-
neau, verser dessus du pétrole. Le liquide
s'enflamma et le récipient le contenant fit
explosion; En quelques minutes, le mobilier
de la chambre devint la proie des flammes
et, quand les voisins accoururent, ils trou-
vèrent Mme Lefebvre dans un état lamen-
table. Tout son corps n'était qu'une plàie.
Transportée à l'hôpital Beaujon, la pauvre
femme y est morte hier matin.
On a trouvé chez elle pour plus de 50,000 fr.
de valeurs.
LES DÉSESPÉRÉS
th. statuaire de talent, M. Robyn, mé-
daillé du Salon 1893, âgé de cinquante ans,
s'est suicidé, la nuit dernière, dans son ate-
lier, 75, rue Dutot.
Il s'est donné la mort au moyen d'une forte
aiguille qu'il s'est enfoncée dans le cœur. Les
causes du suicide restent inconnues. Depuis
quelques jours, il était devenu taciturne et
vivait complètement isolé, mais rien ne faisait
prévoir ce dénouement fatal.
Mme Godchaux, âgée de cinquante-huit ans,
blanchisseuse, demeurant rue Crozatier, avait
tout récemment perdu son mari. Inconsolable
de cette perte, elle résolut de mourir. Dans le
courant de la nuit, vers deux heures, elle
alla se jeter dans le canal Saint-Martin. Un
passant, M. Arsène Michel, employé de com-
merce, s'élança à son tour dans l'eau, mais
tous deux auraient péri sans l'intervention
du sous-brigadier Irle, qui réussit aies rame-
ner sains et saufs sur la rive.
Enfin, sept heures plus tard, une jeime fille
de dix-huit ans, Marie Gillet, couturière, se
jeta dans la Seine, près du pont de la Con-
corde. Elle a été sauvée paPHeux passants
qui, à l'aide de perches, ont réussi à l'arra-
cher à la-mort. C'est à la suite d'une discus-
sion avec ses parents que Marie Gillet avait
voulu attenter à ses jours. Elle a promis de
ne plus recommencer.
LE FEU
tJn commencement d'incendie s'est déclarS
hier, à une heure, dans l'appartement de M.
le comte de Chaillot, 24, avenue de la Grande-
Armée. Les pompiers s'en sont rendus maî-
tres après trois quarts d'heure de travaiL
Néanmoins, les dégâts matériels sont assez
considérables.
Jean de Paris.
Mémento. –Un gamin, Auguste D. passant
hier rue Tiquetonne, a frappé d'un coup de cou-
teau au bras un jeune homme de seize ans qui
jouait devant la maison de ses parents. Le jeums
meurtrier a été arrêté.
Maison Nouvelle, 1,r,Paix;Chapeau:S::dam esetenf".
Un vieillard d'une soixantaine d'années a été
renversé, hier, à midi, par un fiacre, boulevard
Poissonnière. La victime, grièvement blessée, a
été transportée à Lariboisière.
Chapeau Léon,rue Daunou.Nouvelles créations.
J. de P.
-• -^f
GAZETTE DES- TEÏBUNAUX
Police correctionnelle Les grands ma-
riages du prince de Looz. NOUVELLES
JUDICIAIRES.
Le prince Emmanuel de Looz-Coors-
warem, que l'huissier de service deman-
dait vainement hier à tous les échos de
la 108 Chambre correctionnelle, appar-
tient à une des plus vieilles familles du
Brabant.
Son père, le prince Ernest-Napoléon
de Looz-Coorswarem, avait épousé en
1859 riona Christine Godoy, fille du
prince de Bassano.
Après avoir mené à Paris ce qu'on
appelle vulgairement une vie de bâton
de chaise, le prince Emmanuel, qui a
fait de très bonne heure le désespoir des
siens, s'est lancé depuis trois ou quatre
ans dans l'escroquerie au mariage, et
c'est pour rendre compte à la justice de
la ruine d'un certain nombre de con.
cierges qu'il était cité hier devant les
tribunaux français.
C'est, en effet, l'humble crédulité des
conciergesque le prince de Looz-Coors-
warem ne dédaignait pas d'exploiter de
préférence, en faisant croire à ses dupes
qu'il était dans une passe difficile, mais
à la veille de contracter un riche ma-
riage, tantôt avec l'infante Marie de
Bourbon, tantôt avec la veuve du prince
Paul Demidoff de San Donato, qui de-
vait lui apporter une dot de cinq mil-
lions.
En 1890 le prince habitait alors l'hôtel
du Helder. C'était un malheureux con-
cierge de la rue d'Edimbourg, nommé
Boutin, qui lui confiait à titre de prêt
9,000 francs, toutes ses économies. Le
prince de Looz avait été mis en rapport
avec le crédule pipelet par une dame
Bert, qui habitait la maison et recevait
fréquemment, dit le réquisitoire, la vi-
site du noble emprunteur.
L'infortuné Boutin avait été positive-
ment ébloui par les lettres de la prin-
cesse Demidoff que lui montrait 'en con-
fidence le prince de Looz, et, par des
dépêches datées de Gênes, dans lesquel-
les la princesse parlait de son prochain
mariage en priant son fiancé de hâter la
cérémonie. ,i »#
Une fois nanti des 9,000 francs de M.
Boutin, le prince de Looz partit pour
la princesse Demidoff en Ita-
lie- mais bientôt, il réclama de nou-
veaux.sub2.ides, nécessaires, pour ache-
ter les cadeaux de fiançailles. De Gênes.
de Rômè, de ^ce, le concierge de la rue
d'Edimbourg étaJt bombardé de dépê-
ches dans lesquels le prince'de Looz
raït, de visu, des qualités sans lesquelles
il n'est pas d'union prospère ou d'exis-
tence heureuse 1
Ces réserves posées, la sincérité
m'oblige à déclarer que l'Exposition
canine mérite qu'on y coure. Etant
donné que le chien le plus laid excite l'a
sympathie dp la généralité, jugez des
enchantements divers que réserve l'ha-
bile groupement de cinq cents toutous
superbes Aussi, quelle que soit votre
provision d'admiration, vous l'aurez vite
"épuisée à l'aspect des meutes, des vau-
traits et des sujets isolés. Entre tous les
animaux, le chien est celui qui présente
les physionomies les plus variées. Il
partage, avec son maître, le don d'avoir
un visage à lui et des yeux qui révèlent
son caractère. Il advient aussi que
toujours comme chez son maître les
,apparences soient trompeuses. Tel bull
d'attitude terrible est la douceur même.
Tel dogue montre'un visage bon garçon
qui, si vous lui tendez la main, vous
tranchera le bras d'un coup de dent
Soyez surtout circonspect dans la classe
des chiens de luxe.
En vertu d'une loi qui se retrouve
chez le roi de la création, l'aménité n'est
pas du tout indiquée parles signes exté-
rieurs, c'est chez les bestioles d'appar-
tement que l'on rencontre le plus d'ai-
greur et le moins de franchise dans
les démonstrations. Une vieille dame,
propriétaire d'un havanais d'humeur
peu accommodante, médisait pourex-
cuser cette insociabilité quel'éloigne-
ment de la maison natale et l'inévitable
captivité qu'exige le concours le ren-
daient acariâtre et mauvais. Cela ne m'é-
tonne pas. Du reste l'Exposition de
l'Orangerie serait beaucoup plus riche
en sujets de toutes les espèces, si beau-
coup de propriétaires tout en recon-
naissant le confortable de l'installation
et lès soins prodigués aux bêtes par un
personnel attentif n'éprouvaient une
certaine répugnance à se séparer de
leurs chiens.
J'ai eu la chance d'acheter; pour
une somme insignifiante, un bull
exceptionnellement petit et trapu, dont
la robe est uniformément blanche,,
sauf un pochon noir qui noye l'œil
gauche dans une ombre pittoresque.
A ses grâces physiques, Dragon (c'est
ainsi qu'il s'appelle ) ajoute un ca-
ractère d'une bonté et d'une intèlli-
gence rares. Quiconque passe cinq mi-
nutes avec Dragon, subit le charme, car
il est d'une drôlerie extrême, et si
je ne craignais d'être accusé d'aveugle-
ment paternel, je raconterais quelques-
uns des faits et gestes de cet incompara-
ble camarade. Je serais je n'en doute
pas élevé au rang de lauréat, si je
l'exposais; .mais j'avoue qu'il n'est pas
de médailles et de coupes capables
de me consoler d'une séparation, si
courte qu'elle soit. Et puis j'ai tout
lieu de croire que Dragon conce-
vrait « de ne pas vivre à mes côtés »
un chagrin qui le pousserait à quel-
que acte désespoir. Quand je m'ab-
sente (ne fût-ce que pour un quart
d'heure), il ouvre, dans les bâillements
répétés, une gueule où, sans exagéra-
ration, deux corps comme le sien tien-
draient à l'aise et il pousse des gémisse-
ments qu'accompagnent des larmes vi-
sibles. Jamais, dans le cours de mon
existence, je n'ai inspiré une amitié
pareille jamais, les bouches qui m'a-
vaient juré une éternelle affection ne se
sont aussi largement fendues dans un
.ennui plus sincère, et je soupçonne que
les yeux humides et centristes, au mo-
ment des adieux, se sont séchés comme
par enchantement dès que j'ai refermé
sur moi la porte du prétendu « nid d'a-
mour ».
Adrien Marx.
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
LITTÉRATURE
C'est un très cur\«ux ouvrage que
celui que M. Jules B>is a publié chez
L. Çhailley, sous ce titre les Petites
Religions de Paris; beaucoup y appren-
dront avec étonnement qu'il existe dans
notre capitale des gens qui sacrifient
encore de bonne foi aux divinités anti-
ques des Païens, des Swedenborgiens,
des Bouddhistes orthodoxes et éclecti-
ques, des Théosophes.des gens qui ado-
rent la lumière d'autres, Satan des
Lucifériens, des Gnotiques, des gens
qui appartiennent au culte d'Isis, de
l'Essénianisme et de l'Humanité. Il y a
bien d'autres religions encore, mais
çeMes-là sont les principales il n'est tel
que le vent des temps d'incrédulité pour
raviver des étincelles dans des cendres
que l'on,croyait éteintes depuis long-
temps. a
Il est très intéressant de suivre M.
Jules Bois dans ses pérégrinations qui
le conduisent jusque dans des mansar-.
des pour y retrouver les prêtres et les
prêtresses de tant de cultes divers. Il
en est de vraiment impressionnants par
leur conviction et leur sincérité je n'af-
firmerai pas que le docteur, Charcot ne
les eût pas un peu considérés comme se
rattachant à sa clientèle, mais quel est
le philosophe qui n'en fait pas plus ou
moins partie? La gaîté elle-même a par-
fois son mot dans ce livre où je trouve
le profil d'un disciple d'Auguste Comte,
du « docte M. Laffitte, qui démolit Vic-
» tor Hugo et Napoléon, appelant Napo-
» léon le jobard de Sainte-Hélène l Jo-
bard nous parait bien vite dit à ce
compte, tous les vaincus, tous les assas-
sinés sont des jobards; César .est le jo-
bard de Brutus, Vercingétorix de César,
saint Louis des croisades, Jeanne d'Arc
des Anglais, Henri IV de Ravaillac,
Charles Ier de Cromwell, sans compter
la grande ère de la Révolution qui de-
yrait, plus que tout autre, s'appeler celle
du Jobardisme Jobards, les nobles, les
Bourgeois, les gens du peuple, les vieil-
lards, les femmes, les enfants guilloti-
nés par les Camille Desmoulins, Robes-
pierre, Danton et le reste qui, devenus
jobards à leur tour, s'entre-guillotinè-
rent jobards, Desaix et tous les soldats
tombés sup les champs de bataille; jo-
bards, les savants qui sont tués dans
leurs laboratoires, les médecins qui
meurent d'une piqûre anatomique jo-
bards, les missionnaires qu'on scie en-
tre deux planches. Que de jobards, bon
Dieu dans le passé, le présent et l'ave-
nir voilà qui me parait lestement jugé.
Pourtant si le positivisme n'avait dé-
couvert que cette vérité vraiment contes-
table, il est douteux que le nom d'Au-
guste Comte fût parvenu jusqu'à nous.
En lisant, dans le livre de M. Jules
Bois, le résumé de tant d'efforts sortis
des âmes et des cerveaux pour s'orien-
ter vers la vérité et adorer ce qui. doit
être adoré; en examinant les complica-
tions d'arguments philosophiques, de
considérations scientifiques, de concep-
tions psychologiques que nous appor-
tent les inventeurs ou rénovateurs de
104 de cultes minuscules, on se de-
mande slï ne serait pas plus simple,
en présence de ce besoin impérieux
d'une religion, de prendre celle qui a ré-;
sùmé tout ce que les autres avaient de
bon; celle qui contient le pardon et;
l'espérance, qui fortifie les faibles et
grandit les humbles, et qui n'a vérita-
blement qu'un tort: celui d'être la nôtre.
ART
Le dernier ouvrage de M. Gustave
Larrôumet Nouvelles études de littéra-
ture et d'art, s'il contient de précieux,
renseignements sur les lettres, des juge-
ments sains et sainement exprimés sur
l'art avant Louis XIV, Lamartine.Weiss,
Taine, Jules Lemaltre, etc., renferme
aussi des renseignements très piquants
sur la vie privée des artistes dont il a
analysé l'oeuvre, témoin ces deux pages
que j'emprunte à sa belle étude sur un
grand et consciencieux artiste de notre
temps, M. E. Frémiet. Il est en effet cu-
rieux, aujourd'hui qu'il est arrivé au
sommet de son art, que les suffrages du
public et de l'Académie qui lui a ouvert
ses portes. l'ont placé au rang mérité,
d'apprendre quels furent les singuliers
débuts de celui qui devait nous donner
les beaux monuments de Jeanne d'Arc
et de Raffet.
Comme il était jeune et sans fortune,
Frémiet dut accepter les besognes qui
s'offrirent d'abord à lui.
Dupuytren et Orfila avaient créé une bran-
che d'industrie, en introduisant dans l'étude
de la médecine les figures de cire coloriée.
Cette industrie relevait de Part,- car il y fal-
lait la plus exacte fidélité. Le jeune Frémiet
fut trop heureux d'être l'un des sculpteurs
qu'elle employait. Avec le genre de modèles
auxquels il avait affaire cadavres dévastés
par la maladie, plaies ou blessures, ruines
humaines, on devine qu'il lui fallut des nerfs
solides et quelque ténacité. Il travaillait d'or-
dinaire dans un atelier du faubourg Saint-
Antoine, alimenté par l'hôpital voisin. Seul,;
au fond d'une cour, il passait là de longues
heures à modeler des pourritures et à copier
des sanies. Une après-midi de mars, où les
premiers souffles du printemps commençaient
à tiédir, il trouvait, en arrivant à l'atelier,
une grande terrine pleine d'un liquide bleuâ-
tre où baignait une blancheur confuse. Sans
y prêter autrement d'attention, le sculpteur
se mettait au travail, lorsqu'entrait le mé-
decin qui l'employait. Ce médecin retrous-
sait sa manche, plongeait la main dans la
terrine et en tirait une peau de femme, bien
complète après avoir constaté l'état de la
préparation, il la replongeait dans le bain,
en disant « Voici le carnaval, elles ne se-
ront pas rares cette année. » Le carnaval,
parait-il, était des plus gais, cette année-là,
et chaque nuit de bal masqué, semant les
pleurésie, faisait entrer à. l'hôpital nombre
de jeunes femmes. Cette peau avait dansé,
soupe et aimé avant d'aboutir à cette terrine.
Préparateur de pièces anatomiques, le jeune
sculpteur était encore, à la Morgue, un auxi-
liaire de la médecine légale. Un soir, on l'ap-
pelait en hâte pour mettre une charbonnière
coupée en morceaux à même de figurer utile-
ment dans une confrontation judiciaire. Il
trouvait le cadavre reconstitué, et, devant
lui, le médecin légiste en tenue de soirée et
attendant avec impatience, car il dînait en
ville. Un coiffeur avait été mandé aussi. L'ar-
tiste se mettait à l'oeuvre (c'est le. sculpteur
que je veux dire) il rougissait les joues et
les lèvres, redonnait à ce visage marbré les
couleurs de la vie. Puis c'était le tour du
coiffeur blême de peur et le peigne trem-
blant dans sa main, il accommodait cette
chevelure. Enfin, le médecin, délicatement,
du bout de ses doigts gantés, plaçait dans les
orbites vides des yeux de verre, en essuyant
avec son mouchoir la buée qui les ternissait.
Le Jardin des Plantes faisait diversion et
compensation à ces travaux funèbres. L'étude
prolongée du cadavre humain avait donné
au sculpteur le désir de représenter l'animal
vivant. Aussi, au printemps et en été, dès
l'aube, il était devant les cages, le crayon à
la main, et, sous les vieux arbres, devant les
formes vigoureuses, les attitudéTsouples, les
pelages mouvants sur les muscles sains, il
oubliait avec bonheur l'hôpital et la Morgue.
Ce n'est là qu'un détail, un épisode de
cette belle étude sur un artiste de haute
valeur dont la jeunesse s'est écoulée en-
tre deux artistes de génie, Rude et Ba-
rye, et qui, dans ce voisinage redouta-
ble, a su rester lui-même et conserver sa
personnalité.
DOCUMENTS HISTORIQUES
Evidemment V affaire de Panama res-
tera toujours le point lumineux du re-
cueil des Causes criminelles et mondai-
nes de 893 que mon confrère Albert
Bataille vient de publier chez Dentu
mais, à côté de ce Léviatîïan des procès,
il en est bien d'autres qui atteignent
aussi des proportions considérables et
qui n'intéresseront guère moins les phi-
losophes, les gens désireux d'émotion
ou les simples curieux certes, l'affaire
du restaurant Véry, la bagarre d'Aigues-
Mortes, les détails sur le peintre Luna,
l'affaire de Rahden, l'assassin de M. Ro-
bert de La Villehervé, et bien d'autres
méritent aussi de fixer l'attention et
leurs récits seront la bonne fortune de
toute bibliothèque. Donc nous recom-
mandons cette nouvelle série avec au-
tant d'insistance que nous l'avons fait
pour les précédentes.
̃̃̃• -̃ **# ̃̃'̃̃̃
Sous ce titre :"£e métal-argent à la fin
du XIX' siècle, un écrivain de talent,
M. Raphaël-Georges Lévy, publie chez
Guillaumin une très intéressante tra-
duction de trois ouvrages parus récem-
ment en Allemagne, et dus à la plume
d'un des membres les plus connus du
Reichstag, M. Louis Bamberger.
Le premier de ces ouvrages nous ra-
conte les « Destinées de l'Union latine »
le second, sur « l'Argent », est un ré-
sumé de la situation monétaire de l'Al-
lemagne, de.l'Autriche et de l'Amérique
du Nord en 1892 le troisième, paru il y
a quelques mois à peine, et qui eut en
Allemagne, dans le monde spécial des
économistes, un succès considérable,
énumère, discute, critique avec beau-
coup de science et d'éclat les « Sophismes
des partisans de l'argent ».
M. Raphaël-Georges Lévy a réuni en
un seul volume ces trois œuvres de po-
lémique et d'histoire.
ROMANS
Nous avons déjà signalé M. Philippe
Chaperon comme un de nos jeunes ro-
manciers intéressants à suivre dans
leur carrière. Rédemption, qu'il vient de
publier chez Lemerre, me confirme
dans cette opinion. C'est un livre écrit
avec sincérité et dont le héros, un an-
cien viveur parisien, veut racheter une
faute passée par une vie d'apôtre. Il ne
va pas, en égoïste, s'enfermer dans un
couvent pour passer le reste de son exis-
tence à ne prier que pour lui-même, il
veut rester dans notre monde et y faire
du bien; secourable à tous, il devient
une sorte de Christ campagnard, et
comme rien ne paraît plus extraordi-
naire que la vertu, il devient suspect;
persécuté et paie de sa vie une émeute
de pauvres diables qui veulent le défend
dre. Voilà l'ensemble de ce livre qui mé--
rite certainement un plus long examen.
Les très nombreux volumes que mes-
sieurs les éditeurs ont publiés en quel-
ques jours m'ont forcé à négliger un
charmant poème en prose, de M. Emile;
Pouvillon: Bernardette, de Lourdes* Ce:
n'est guère que la biographie de la petite
bergère qui mourut comme une, sainte,
le récit des événements que suscita le
récit des apparitions de la grotte de
Lourdes, mais tout cela est si bien dit et
avec tant de charme que l'on publie,'
captivé par la lecture, que l'on a appris
jadis tout cela, tant la poésie de M.
Emile Pouvillon a su le rénover.
Philippe (fui»
MÉMENTO
Poésie. En un volume admirablement
présenté par les éditeurs Bernoux et Cumin
(de Lyon), M. Clair Tisseur vientde publier une
nouvelle édition de ses poésies, sous ce titre:
Pauca Paucis, augmentée d'une seconde série.
M. Clair Tisseur a fait précéder ce recueil
d'une très spirituelle préface dans laquelle il
se plaint de voir les Lyonnais insensibles à la
poésie ;c'est un tort, il est vrai, mais encore
vaut-il mieux ne pas aimer les vers que de
vouer un culte à ceux qui sont mauvais ou à
ceux qui n'en sont pas, ce qui est le cas de
bien" des Parisiens. J'aurais grand plaisir à dire
tout ce que je pense de ceux-ci, à signaler l'à-
mour de la perfection de la forme qu'a déjà I
prouvé l'auteur dans szsModestes Observations
sur l'art de versifier, dont nous avons parlé,
ici mais l'espace m'est mesuré et j& ne puis
qu'annoncer Pauca Paucis aux poètes et à
leurs amis.
-M. Edouard Schuré, l'auteur des Grands
Initiés », n'est pas seulement un philosophe et
un érudit, il est aussi poète, mais ses vers ne
désertent pas les opinions de sa prose et sem-
blent avoir pour but principal de les confirmer;
témoin le recueil qu'il vient de publier à la li-
brairie Perrin, sous ce titre la Vie Mystique,
et qui se divise en plusieurs parties formées
d'une légende bouddhiste, de « la Muse d'Eleu-
sis », de « l'Epreuve du Pharaon et « d'Em-
pédocle ».
Voyages. Chez Hachette Voyage aux
trois Guyanes et aux Antilles, par M. G.
Verschuur.Très intéressant volume,contenant,
entre autres curieux renseignements, des; dé-
tails recueillis sur nos établissements péniten-
tiaires à Cayenne. Nous recommandons spé-
cialement ce volume plein de documents iné-
dits, en rappelant les Antipodes, un très bon
livre du même auteur.
Mentionnons aussi, même librairie A tra-
vers la Russie boréale, intéressante relation de
M. Charles Rabot.
Histoire. Voici un livre dont le titre dit
l'intérêt Le vrai Chevalier de Maison-Rouge,
A.-D. Gonzze de Rougéville (1761-1814), da-
prés des documents inédits par M. G. Lenôtre.
On y suit, jusqu'au jour où il fut fusillé, le fa-
meux « chevalier de l'Œillet », qui eut du
moins l'honneur de tenter d'arracher Marie-
Antoinette au supplice qui l'attendait.
Romans. Du bloc des romans qui vien-
nent de paraître en même temps* il convient
de détacher Frère Pélage, par Mme Jane
Dieulafoy (chez Lemerre) En Avant, par M.
Emile Pierret (même librairie) Par Elles!
par Henri de Chennevières (chez Flammarion)
Bas-bleu et Talon-rouge, par Jaël de Romano
(chez Dentu); Mais il l'aima, par Janine (chez
Lemerre) Ah l jeunesse 1 par Georges Cour*
teline (chez Flammarion); La Kosake, par
Armand Silvestre (chez Charpentier) et Haine
d'amour, par Daniel Lesueur (chez Lemerre).
Ph. G.
LES FÊTES FARGENTEUIL
La neuvaine ordonnée par S. G. MgrGoux,
évêque de Versailles, à l'ocasion de l'osten-
sion de la sainte tunique, a été clôturée hier,
à Argenteuil, par des fêtes solennelles aux-
quelles assistaient ,un cardinal, un archevê-
que et trois évêques S. Em. le cardinal Lan-
génieux, archevêque de Reims, Mgr Ardin, ar-
chevêque de Sens, Mgr Duval, évêque de
Soissons, l'èvêque de J»anéas et l'Ordinaire du
diocèse.. • ̃"̃'̃
Constatons d'abord que la dévotion des fi-
dèles à la robe sans couture de Notre-Sei-
gneur n'a pas été refroidie par l'interminable
discussion motivée, entre deux églises riva-
les, par la question de son authenticité. Deux
chiffres en feront foi plus de 150,000 visi-
teurs, dans l'espace de huit jours, sont venus
la vénérer et, le lundi de la Pentecôte seule-
ment, 26,000 voyageurs ont débarqué à la
gare d'Argenteuil. Les années précédentes,
leur nombre, pendant la durée de fêtes simi-
lairés, n'avait jamais dépassé 14,000. Cette
petite ville devient donc de plus en plus un
véritable lieu de pèlerinage qui pourrait bien
atteindre sous peu, si ce mouvement conti-
nue, à la célébrité de la Salette, de Rocama-
dour ou de Verdelais.
Aussi les habitant» sont-ils dans le ravis-
sement. Une curiosité sympathique semble
les pousser au-devant de leuràhCtes 4'nn jour
et ils regardent passer, avec une satisfaction
visible, les longues théories de pèlerins qui
s'acheminent, à l'arrivée dé chaque train, de
la gare jusqu'à la coquette église. Aux fenê-
tres des maisons pavoisées, au sommet des
mâts, autour de la flèche légère du clocher,
claquent joyeusement les drapeaux tricolores.
Sur la place même de l'église, des boutiques
improvisées, disposées en cercle et où se ven-
dent toutes sortes d'objets de piété, font des
affaires d'or. Quant au clergé, il ne paraît
nullement hanté par le cauchemar de Trêves.
Il rayonne. Il savoure avec délices son triom-
phe.
Douze anciens zouaves pontificaux montent
la garde devant le reliquaire autour duquel
se relayent constamment des prêtres dont la
fonction consiste à faire toucher aux vitres,
qui protègent la sainte tunique, mains cha-
pelets, médailles, etc., que les pèlerins em-
porteront comme autant de précieux souve-
nirs.
,La grand'messe a été célébrée, hier, ponti-
ficalémènt, par Mgr Duval, évêque de Sois-
sons. S. Em. le cardinal archevêque de Reims
« faisant chapelle », suivant l'expression li-
turgique. A l'issue de l'office, tous les évê-
ques présents sont allés processionnellement
vénérer l'insigne relique.
Mgr l'èvêque de Soisson» a également pré-
sidé aux vêpres, qui ont commencé à deux
heures et demie. En face de Sa Grandeur, de
l'autre côté du chœur, un trône avait été dis-
posé pour le cardinal LaHgénîeux. Vers le
milieu du sanctuaire avait pris place Mgr
Ardin, ayant à sa gauche l'èvêque de Ver-
sailles, à sa droite l'évêque de Panéas. Après
le chant du- Magnificat, le R. P. Gardet est
monté en chaire.
La partie capitale du discours de réminent
dominicain a été une véritable et magnifique
leçon de philosophie de' l'histoire à la ma-
nière de Bossuet. S'emparant des faits les
plus saillants de notre histoire nationale, le
Père s'est attaché à montrer, par eux, l'union
toujours intime du Christ et de la France,
nation choisie et bénie entre tous les peuples,
depuis le baptême de Clovis dont on célébrera
bientôt le quatorzième centenaire. C'est la
France qui a donné au Saint-Siège le pou-
voir temporel. C'est a elle que revient le prin-
cipal honneur des croisades entreprises pour
arracher aux Musulmans le tombeau de Jé-
sus-Christ. Chacun dés grands services
qu'elle a rendus à l'Eglise et à son chef su-
prême ont été récompensés par de longues
années de gloire et de prospérité!
Ainsi les deux grands siècles, le treizième
et le dix-septième, ont été, pour la France,
la prompte récompense de ses luttes contre
l'arianisme et contre le protestantisme. Lors-
qu'elle est devenue, au contraire, infidèle à
sa mission, le châtiment ne s'est pas fait at-
tendre. Au soufflet de Nogaret a répondu le
triple soufflet de Crécy, de Poitiers et d'Azin-
court. Mais après l'expiation, Dieu a fait
pour elle ce qu'il ne fit jamais pour aucun
autre peuple, en suscitant pour sa délivrance
une vierge, une enfant Jeanne d'Arc.
A ces preuves manifestes et si souvent re-
nouvelées de la prédilection du Christ pour
notre pays, nous devons répondre par les
protestations incessantes de notre fidélité. Le
prédicateur revient alors àla relique exposée
à la vénération des fidèles. Cette reliqnè, dit-
il, a été violée trois fois i au X" siècle, par
des Barbares qui ne connaissaient pas Dieu;
au XVIe par les Huguenots, qui le mécon-
naissaient; enfin au XVIIP par les révolu-
tionnaires qui l'ont persécuté et chassé de
de la façon la' plus odieuse. Il y a parmi
nous, à l'heure présente, des gens qui ne
connaissent pas Dieu, d'autres qui le mécon-
naissent, d'autres aussi qui le persécutent.
C'est contre tous ceux-là que nous devons
protester par un amour-du Christ, assez ar-
dent pour que l'exemple en soit contagieux.
Ce sera notre coopération incessante au salut
de la patrie.
Le sermon du R. P. Gardet a été suivi d'un
salut solennel et d'une procession à laquelle
ont pris part les Enfants de Marie, bannière
en tête, un nombreux clergé et les cinq pré-
lats qui ont ensuite donné, tous ensemble, la
bénédiction. Et la foule s'est écoulée lente-
ment, après avoir vénéré une dernière fois la
précieuse tunique, mystérieuse et sombre
dans son cadre d'or et de pierreries.
J. de Narfon.
A L'ÉTRANGER
L'ALLIANCE COMMERCIALE AUSTRO-RUSSE
La Russie vient de signer un traité de
commerce avec l'Autriche. On n'aurait
pas besoin de dire un mot de plus car il
y a des choses qui se comprennent tou-
tes seules. Et il n'est besoin d'être ni
économiste ni diplomate pour compren-
dre qu'après avoir voulu une paix com-
merciale avec l'Allemagne, la Russie en
a fait autant avec l'Autriche, qu'elle s'est
rapprochée maintenant de la grande al-
liance qui tient l'Europe centrale et
qu'il y aura des gens dans le vaste em-
pire des Tsars, des gens simples et peu
compliqués, qui se demanderont pour-
quoi l'Autriche qui n'a que des intérêts
politiques opposés à ceux de la Russie
fait des sacrifices que la France refuse
absolument de consentir à l'agriculture
russe.
Si je rencontrais une de ces âmes sim-
ples, je lui dirais d'aller demander des
renseignements à M. Méline et je le sup-
plierais de croire qu'il y a beaucoup de
bons Français qui n'en comprennent
pas plus qu'elle f (J'avoue même que
pendant que je le tiendrais j'aurais
grande envie de demander au bon Russe
quelques explications sur d'autres cho-
ses mais comme elles se passent en
Russie, le bon Russe ne les comprendrait
pas plus que je ne comprends ce qui se
passe en France.)
Le fait est que la signature de ce traité
de commerce a une importance qu'il est
impossible de céler. Il a fallu des raisons
politiques très graves pour amener les
agriculteurs hongrois à faire des sacri-
fices. On comprend encore, en cas de be-
soin, les raisons qui ont fait céder la
Prusse aux exigences russes tout ce
qui peut diminuer pour elle les chances
d'être prise un jour entre deux feux,
elle l'accepte. Mais l'Autriche n'a pas ce
danger à courir. Se prépare-t-il quelque
chose dans les Balkans? C'est encore
bien possible. Mais on ne pouvait pour-
tant pas prévoir dès le 14 mars, date de
l'ouverture des négociations entre les
deux pays, qu'un jour viendrait où le
jeune roi Milan et le vieux roi Alexandre
s'amuseraient à jouer à faire des coups
d'Etat ? Il y a donc autre chose et ce
ne peuvent logiquement être que le désir
de profiter des fautes commises chez
nous et les efforts tentés pour enchaîner
la Russie à la triple alliance.
Il est inutile de ne pas vouloir voir
ce qui se passe autour de nous les
faits parlent, hélas I trop haut. Mais
ne serait-il pas temps de rechercher
un peu à qui incombe la responsa-
bilité de ce qui se passe? Ne fût-ce
que pour ne pas avoir des désillusions
un jour ou l'autre et pour ne pas confier
dans un avenir plus ou moins lointain
les destinées de- la France à qui serait
parfaitement indigne de cet honneur?
Et s'il y a des gens qui disent que
voilà bien du bruit et bien du pessi-
misme pour un traité de commerce, il
faut leur dire qu'ils ne savent rien de ce
qui se passe. (A moins qu'ils ne le sa-
chent que trop bien et qu'ils ne fassent
les ânes pour avoir du son ainsi que
le dit le vulgaire.)
Jacaue» St-Cèr*
NOUVELLES
,FÂR D$P~CHES DE N0~ CORAESPONDéNTB
PAR DÉPÊCHES DE NOS CORRESPONDANTS
Vienne, 22 mai.
La Correspondance politique annonce que
M. Simitch, ministre de Serbie à Vienne, au-
rait notifié hier au comte Kalnoky le chan-
gement de la Constitution serbe.
Bruxelles, 22 mai.
Le ministre des finances a déposé aujour-
d'hui sur le bureau de la Chambre un projet
de loi interdisant la circulation de la mon-
naie de billon française en Belgique.
Saint-Pétersbourg, 22 mai.
Les Novosti déclarent que si l'ex-roi Milan
s'avisait de détrôner, pour occuper sa place,
le roi Alexandre, reconnu par toutes les
puissances, il tomberait dans la même situa-
tion que l'usurpateur Ferdinand de Cobourg.
Londres, 22 mai.
Voici le résumé du traité du roi Léopold
avec la Grande-Bretagne: `:
Le Roi reconnaît la sphère de l'influence
britannique établie dans la convention anglo-
allemande du leur juillet 1890.
La Grande-Bretagne cède bail au roi
Léopold le territoire de Bar El-Gazal. Le bail
durera tant que le Congo restera, soit comme
Etat indépendant, soit comme colonie belge,
sous la souveraineté du roi Léopold ou de ses
successeurs.
Le Congo cède à bail, pour la même durée
de temps, à l'Angleterre, une bande de terri-
toire d'une largeur de 25 kilomètres allant du
point extrême nord du lac Tanganika, jus-
qu'au point extrême sud du lac Albert-
Edouard.
A L'HOTEL DL VILLE
La deuxième session ordinaire du Conseil
municipal s'ouvrira lundi prochain.
En attendant, les Commissions se réunis-
sent quotidiennement et les bureaux expé-
dient ou préparent les affaires.
A citer, parmi celles qui peuvent intéresser
le public
La question de Te«M,traitée par la Commission
assainissement. D'après le docteur Cornil,
il est bon, dès qu'on redoute la fièvre typhoïde,
de laver et de brosser les filtres à l'eau bouillante.
C'est ce qui sera fait dans les écoles, tous les
cinq qu six jours.
La question des décors, traitée par le Conseil
d'hygiène.– M.Armand Gauthier demande le rap-
pel de l'ordonnance sur les théâtres, relative à
l'ininflammabilité des décors et à l'interdiction de
l'établissement de magasins de décors dans l'in-
térieur des théâtres. Cette ordonnance va être
imprimée et communiquée.
La question de Vemprunt. Les souscripteurs
du dernier emprunt, qui n'auraient pas échangé
leurs certificats de souscription contre des titres
provisoires avant le 21 juillet prochain, ne pour-
ront participer au tirage qui aura lieu le 23 du
même mois.
La question de la mairie du dixième arrondis-
sement. Il sera procédé, le 9 juin, à l'adjudi-
cation des lots de charpente, couverture, parque-
tage, fumisterie, peinture, nécessaires à la re-
construction de cette mairie.
La question de l'Ecole Braille. Son agran-
dissement est déclaré d'utilité publique. t,
La question des commissaires-priseurs. Par
suite du renouvellement annuel d'une partie de
ses membres et de l'élection de ses officiers, la
Chambre des commissaires'-priseurs du départe-
ment de la Seine se trouve ainsi composée pour
l'année 1894-1895.
MM. Nottin, président Ory, syndic Tuai, rap-
>orteur Guidou, secrétaire Oudard, trésorier
Schoofs, René Appert, Eugène Bailly, Bartau-
mieux, Coifiie, Huguet, Lucien Veronj Desatt-
bliaux, Bernier, Trouillet, membres.
Dès l'ouverture de la'session; MM. Arsène
Lopin, Piperaud, etc., demanderont la dis-
cussion sur leur proposition concernant les
voitures. Le froid présent sera pour eux un
excellent argument. On "sait ce que réclament
nos édiles la mise à la disposition du pu-
blic de voitures ouvertes ou fermées, selon
le temps. Rien de plus juste. Le préfet de po-
lice ne manquera point de rattacher à cette
question l'ordre du jour voté hier rue Mar-
cadet
L'Union syndicale des Cochers du département
de la Seine, réunie à son siège social
Considérant Qu'elle a fait, auprès- des pouvoirs
publics, les démarches nécessaires jour obtenir
la feuille d'identité qui justifiera que le cocher
est bien titulaire de la voiture qu'il conduit, que
journellement les plaintes du public adressées à
ta Préfecture constatent des détournements
d'objets laissés dans l'intérieur des véhicules
Qu'environ 400 on 500 cochers, possédant des
diplômes, trouvent le moyen de travailler certai-
nes heures dans la journée avec des fiacres que
leur confient certains cochers inconscients moyen-
nant une redevance, ce qui permet à ces gens de
pratiquer le vol, et cela au détriment de notre
honnête corporation
Demande instamment à M. le Préfet de police
de rendre obligatoire la feuille d'identité qui
sera remise, par le loueur, aux cochers travaillant
chez lui, ce qui permettra la possibilité d'un
contrôle et donnera satisfaction au public pari-
sien.
Cette réclamation également est très juste.
Il est inadmissible qu'un cocher sous-loue sa
voiture et échappe ainsi à la responsabilité
que les voyageurs sont en droit de trouver
en lui.
Henri Hamoise.
»
Nouvelles Diverses
LE CADAVRE D'EMILE HENRY
Nous avons dit hier que le cadavre d'Emile
Henry n'ayant pas été réclamé par la famille,
un simulacre d'inhumation avait été fait,
après quoi le corps avait été remis à la Faculté
de médecine.
Ce n'est donc pas sans une certaine surprise
que M. Lépine, préfet de police, à reçu la let-
tre suivante
Paris, 21 mai.
Monsieur le préfet de police,
Contrairement à ce que disent les journaux,
Mme Henry a fait réclamer le corps de son fils.
C'est donc en violation de l'article 12 du Code
pénal qu'il a été livré à l'Ecole de médecine.
Veuillez me faire savoir, monsieur le préfet de
police, comment et quand nous pourrons recueil-
lir les restes de ce malheureux pour les conduire,
sans nul appareil, ainsi que le veut la loi, à la
tombe de son père.
Recevez, etc. Dr GOUPIL.
M. Lépine a immédiatement ouvert une en-
quête. Il en résulte que ni lui, ni le directeur
de la Roquette, ni le chef de la Sûreté, ni le
Parquet n'ont reçu aucun avis delà famille.
Du reste, dans une interview publiée par
un journal du soir, M. le docteur Goupil re-
connaît qu'il a commis une erreur involon-
taire. Il déclare que Me Hornbostel, qui s'était
chargé de remplir les formalités, a été pris en
sortant de l'Elysée d'une attaque d'éclampsie
qui l'a rendu incapable de penser et d'agir.
Bien que tous les dictionnaires prétendent
que l'éclampsie est une maladie particulière
aux femmes en couches, nous ne devons pas
douter, puisque c'est un médecin qui l'af-
firme, que Me Hornbostel n'en ait été. affecté.
Mais, s'il ne peut ni penser ni agir, comment
admettre la lettre qu il a écrite lundi à Mme
Fortuné Henry à Brévannes ?
Dans cette lettre, Me Hornbostel dit que
lorsqu'il avait été reçu dimanche à onze
heures du matin, à l'Elysée, M. Carnot lui
avait nettement déclaré qu'il ne s'opposerait
pas au libre cours de la justice, mais ne lui
avait pas annoncé que l'exécution fût pour
le lendemain matin. C'est ce qui fait, dit-il,
qu'il n'a pu faire à temps les démarches.
Quoi qu'il en toit, se rendant au désir ex-
primé par la lettre du docteur Goupil, M. Lé-
pine a immédiatement écrit au doyen de la
Faculté pour que toute expérience fût cessée
et pour que les restes épars du supplicié fus-
sent rassemblés et remis à Mme Fortuné
Henry ou à son mandataire.
Sur cet ordre, les débris du cadavre, ras-
semblés tant bien que mal, ont été mis en
bière hier après-midi et envoyés, dans un
fourgon des hôpitaux, à M. le docteur
Goupil.
Ce matin, avant le jour, la bière dû être
placée dans le tombeau que la famille Henry
possède au cimetière du Père-Lachaise.
TJNK BOMBE CHEZ L'ABBÉ GARNIER
Nos lecteurs connaissent l'abbé Garnier, le
conférencier populaire, directeur du journal
le Peuple Français, qui n'a pas craint d'en-
gager à maintes reprises la discussion avec
les leaders des partis les plus avancés et
qui a récemment inauguré à Montmartre,
pour y continuer ses conférences, une concur-
rence à la fameuse Maison du Peuple.
L'abbé Garnier vient d'être Tobjet ^'une
tentative criminelle. On a déposé une bombe
à son domicile, 17, avenue Niel.
L'abbé et son frère, Léon Garnier, prêtre
comme lui, .occupent à cette adresse un ap-
partement au deuxième étage au fond de la
cour. Cet appartement a deux entrées; c'est
près de la porte qui ouvre sur une petite an-
tichambre que l'engin a été déposé.
C'est le concierge, M. Chevé (qui, soit dit
entre parenthèses, est titulaire de plusieurs
médailles honorifiques et président d'une
Société de sauvetage), qui a découvert la
bombe et l'a empêchée d.'éclater.
Vers huit heures, a-t-il raconté, comme
je me préparais à ouvrir le compteur pour
allumer les becs de gaz dans l'escalier, un
homme, qui avait l'apparence d'un livreur de
magasins de nouveautés 'et qui était enve-
loppé dans un grand manteau de toile cirée,
entra et me dit « Je monte chez M. l'abbé
Garnier. » Je ne fis aucune observation. Mais
à peine cet homme était-il redescendu que
ma femme qui allumait les becs dans l'esca-
lier m'appela en criant « Il y a le feu chez
» M. l'abbé. L'escalier est plein d'une odeur
» de roussi !» »
« Je montai au galop et arrivai sur le pa-
lier du deuxième au moment où M. Léon
Garnier ouvrait la porte. Nous aperçûmes
alors la bombe dont la mèche brûlait. Il
était temps, car le feu était arrivé à deux
centimètres du couvercle. J'éteignis la mèche
avec mes doigts, en me brûlant un peu. Puis
je pris l'engin, qui était fort lourd, et je le
descendis dans la cour, où je versai dessus
trois seaux 'd'eau. Pendant ce temps, ma
femme se mettait à la recherche d'un gardien
de la paix et -allait avertir le commissaire de
police.
» Ce magistrat m'a félicité de mon cou-
rage, mais m'a blâmé d'avoir inondé la
bombe, ce qui rendrait plus difficile l'examen
du Laboratoire municipal. J'ai répondu que
j'avais agi pour le mieux pour le salut de
mes locataires. »
L'engin a été examiné par M. Girard,"chef
du Laboratoire munUipal.. C'est une longue
boîte en fer-blanc qui avait servi à contenir
du pétrole. On peut voir de ces boîtes aux
devantures des épiciers. Il pesait de douze à
treize livres. Une mèche traversait la bombe.
Al intérieur se trouvaient des tubes en plomb,
remplis de poudre de chasse, du plâtre et,
très probablement, de la poudre chloratée.
L'eau jetée par M. Chevé n'a pas permis de
se rendre bien compte de la charge.
M. l'abbé Garnier était absent au moment
où la bombe a été déposée. Il se trouvait à la
Maison du Peuple français, à Montmartre, où
il faisait une conférence; Ni lui, ni son frère,
l'abbé Léon Garnier, n'ont de soupçons. fis
ont été l'objet de menaces fréquentes et ils ont
reçu le mois dernier une lettre, formée au
moyen de lettres découpées dans lesjournaux
et collées, où on les traitait de calotins, en
leur disant qu'ils sauteraient. Ils ignorent de
qui peut émaner, cette lettre.
M. Chevé s'est souvenu après coup que
l'individu au manteau de toile cirée était déjà
venu, il y a cinq à six semaines, en compa-
gnie d'un camarade, se renseigner sur le lo->
gement et les habitudes de l'abbé Garnier.
Ennuyé de leurs questions, le concierge leur
avait dit de monter. Ils avaient feint de le
faire. De ces indiïidus, l'un avait l'accent
méridional; l'autre» celui qui est venu appor-
ter la bombe, est grand et a les cheveux
blonds. M. Chevé affirme qu'il les reconnaî-
trait parfaitement.
W. le baron Alphonse de Rothschild tra-
versait, hier, à une heure, la rue du 4-Sep-
témbre, dans son coupé, lorsqu'une des roues
de sa voiture s'est détachée..
Le coupé a été traîné sur un parcours de
vingt mètres environ et le cheval s'emballait
déjà lorsque plusieurs passants se sont jetés
à la bride de l'animal et l'ont arrêté net.
M. le baron Alphonse de Rothschild est
sorti du coupé sans mal aucun et s'est dirigé
à pied du côté de la Bourse.
Le cadavre du marchand de vin Boulai
tué à coups de revolver par son fils dans la
nuit du 16 au 17 de ce mois, sera inhumé au-
jourd'hui.
Le corps partira de la Morgue à deux heu-
res, et le service funèbre aura lieu trois
heures et demie à l'église de Grenelle.
VOL DE DIAMANTS
Un voyageur, d'origine anglaise, arrivant
de Londres, hier matin, à la gare du Nord,
vid Calais, demandait avec instance qu'on le
conduisît au commissariat de police. Là, il
déclara qu'à Calais il avait bu avec un au-
tre voyageur et que tous deux étaient montés
ensuite dans le même wagon de 1^ classe.
Il ajouta qu'il était courtier en diamants et
qu'il était porteur d'une sacoche renfermant
pour cent mille francs environ de diamants.
Pendant le trajet, il s'était, a-t-il prétendu,
profondément endormi et ne s'était réveillé
qu'en entrant en gare à Paris. Son compagnon
de route et la sacoche avaient disparu.
Le signalement que le volé a donné de son
voleur a été transmis télégraphiquement à
toutes les gares frontières.
BRULÉE VIVE
Encore une malheureuse femme qui vient
d'être victime de son imprudence.
Mme Adèle Lefebvre, âgée de cinquante-
cinq ans, habitant au cinquième étage, 4, rue
de la Cure, voulut avant-hier soir, pour acti-
ver le feu qu'elle avait allumé dans un four-
neau, verser dessus du pétrole. Le liquide
s'enflamma et le récipient le contenant fit
explosion; En quelques minutes, le mobilier
de la chambre devint la proie des flammes
et, quand les voisins accoururent, ils trou-
vèrent Mme Lefebvre dans un état lamen-
table. Tout son corps n'était qu'une plàie.
Transportée à l'hôpital Beaujon, la pauvre
femme y est morte hier matin.
On a trouvé chez elle pour plus de 50,000 fr.
de valeurs.
LES DÉSESPÉRÉS
th. statuaire de talent, M. Robyn, mé-
daillé du Salon 1893, âgé de cinquante ans,
s'est suicidé, la nuit dernière, dans son ate-
lier, 75, rue Dutot.
Il s'est donné la mort au moyen d'une forte
aiguille qu'il s'est enfoncée dans le cœur. Les
causes du suicide restent inconnues. Depuis
quelques jours, il était devenu taciturne et
vivait complètement isolé, mais rien ne faisait
prévoir ce dénouement fatal.
Mme Godchaux, âgée de cinquante-huit ans,
blanchisseuse, demeurant rue Crozatier, avait
tout récemment perdu son mari. Inconsolable
de cette perte, elle résolut de mourir. Dans le
courant de la nuit, vers deux heures, elle
alla se jeter dans le canal Saint-Martin. Un
passant, M. Arsène Michel, employé de com-
merce, s'élança à son tour dans l'eau, mais
tous deux auraient péri sans l'intervention
du sous-brigadier Irle, qui réussit aies rame-
ner sains et saufs sur la rive.
Enfin, sept heures plus tard, une jeime fille
de dix-huit ans, Marie Gillet, couturière, se
jeta dans la Seine, près du pont de la Con-
corde. Elle a été sauvée paPHeux passants
qui, à l'aide de perches, ont réussi à l'arra-
cher à la-mort. C'est à la suite d'une discus-
sion avec ses parents que Marie Gillet avait
voulu attenter à ses jours. Elle a promis de
ne plus recommencer.
LE FEU
tJn commencement d'incendie s'est déclarS
hier, à une heure, dans l'appartement de M.
le comte de Chaillot, 24, avenue de la Grande-
Armée. Les pompiers s'en sont rendus maî-
tres après trois quarts d'heure de travaiL
Néanmoins, les dégâts matériels sont assez
considérables.
Jean de Paris.
Mémento. –Un gamin, Auguste D. passant
hier rue Tiquetonne, a frappé d'un coup de cou-
teau au bras un jeune homme de seize ans qui
jouait devant la maison de ses parents. Le jeums
meurtrier a été arrêté.
Maison Nouvelle, 1,r,Paix;Chapeau:S::dam esetenf".
Un vieillard d'une soixantaine d'années a été
renversé, hier, à midi, par un fiacre, boulevard
Poissonnière. La victime, grièvement blessée, a
été transportée à Lariboisière.
Chapeau Léon,rue Daunou.Nouvelles créations.
J. de P.
-• -^f
GAZETTE DES- TEÏBUNAUX
Police correctionnelle Les grands ma-
riages du prince de Looz. NOUVELLES
JUDICIAIRES.
Le prince Emmanuel de Looz-Coors-
warem, que l'huissier de service deman-
dait vainement hier à tous les échos de
la 108 Chambre correctionnelle, appar-
tient à une des plus vieilles familles du
Brabant.
Son père, le prince Ernest-Napoléon
de Looz-Coorswarem, avait épousé en
1859 riona Christine Godoy, fille du
prince de Bassano.
Après avoir mené à Paris ce qu'on
appelle vulgairement une vie de bâton
de chaise, le prince Emmanuel, qui a
fait de très bonne heure le désespoir des
siens, s'est lancé depuis trois ou quatre
ans dans l'escroquerie au mariage, et
c'est pour rendre compte à la justice de
la ruine d'un certain nombre de con.
cierges qu'il était cité hier devant les
tribunaux français.
C'est, en effet, l'humble crédulité des
conciergesque le prince de Looz-Coors-
warem ne dédaignait pas d'exploiter de
préférence, en faisant croire à ses dupes
qu'il était dans une passe difficile, mais
à la veille de contracter un riche ma-
riage, tantôt avec l'infante Marie de
Bourbon, tantôt avec la veuve du prince
Paul Demidoff de San Donato, qui de-
vait lui apporter une dot de cinq mil-
lions.
En 1890 le prince habitait alors l'hôtel
du Helder. C'était un malheureux con-
cierge de la rue d'Edimbourg, nommé
Boutin, qui lui confiait à titre de prêt
9,000 francs, toutes ses économies. Le
prince de Looz avait été mis en rapport
avec le crédule pipelet par une dame
Bert, qui habitait la maison et recevait
fréquemment, dit le réquisitoire, la vi-
site du noble emprunteur.
L'infortuné Boutin avait été positive-
ment ébloui par les lettres de la prin-
cesse Demidoff que lui montrait 'en con-
fidence le prince de Looz, et, par des
dépêches datées de Gênes, dans lesquel-
les la princesse parlait de son prochain
mariage en priant son fiancé de hâter la
cérémonie. ,i »#
Une fois nanti des 9,000 francs de M.
Boutin, le prince de Looz partit pour
la princesse Demidoff en Ita-
lie- mais bientôt, il réclama de nou-
veaux.sub2.ides, nécessaires, pour ache-
ter les cadeaux de fiançailles. De Gênes.
de Rômè, de ^ce, le concierge de la rue
d'Edimbourg étaJt bombardé de dépê-
ches dans lesquels le prince'de Looz
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