Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1934-05-13
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 13 mai 1934 13 mai 1934
Description : 1934/05/13 (Numéro 26553). 1934/05/13 (Numéro 26553).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
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CHÈQUE POSTAL i Paris, Numéro 60
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TËlÀHOIE CIHQ U6HES, Taitbout 76.60 76.61 76.62 76.63 76.64
SOMMAIRE
PAGE 1
Le Problème du désarmement La. Défense, na-
tionàle. en Belgique.
PAGE 2
'•En Allemagne. Lettre d'Angleterre l'Opinion an-
) glaise et la France, Robert-L. Cru. Nouvelles
de l'Etranger. La France a" outre-mer..
PAGE 3
'En passant « Contempt of court », PIERRE MILLE.
Nouvelles du Jour. Le Congrès extraordi-
naire du parti radical et radical socialiste.
Chronique maritime, les Origines du cuirassé,
Edmond DELAGE.
PAGE 4
'Congrès de l'Union nationale des combattants. ̃
Le Nouveau régime des pensions civiles et mili-
taires. La Défaillance de la Banque des coo-
pératives. La Vie économique. A l'Hôtel
de Ville,
PAGE 5
%es Exploratiôns russes dans l'Arctique, André
PIERRE. Armée, Marine.: Air. L'Af-
faire Stavisky. ̃. Académies. Are et Curio-
sité.
'Feuilleton « « Tommy and C° », par Jérôme K. JE-
ROME, traduit de fanglais par Mm° Marguerite
Seligman. (N° 5.)
PAGE 6
'Echos et. Informations.. Faits-divers; Tribu-
naux, Conseil d'Etat, Théâtres. ?– T. S,. F
PAGE 7
'Dépêches et Informations financières^ Bulletin
météorologiquq^rrr.Autompbilisme. Les Echecs,
André Chéro'n. Nouvelles commerciales,
PAGE 8
LA JOURNÉE DERNIÈRES NOUVELLES. -Le Congrès
radical socialiste de Clermont-Ferrand. Les
y ceux du congrès de l'Union nationale des an-
ciens combattants, <–• Un accord commerce
franco-brésilien.
~-n~
Paris, le 12 mai
BULLETÏNJDU JOUR
BULLETIN DU JOUR
INQUIÉTUDES ALLEMANDES
La' date du 29 mai ayant été maintenue, en
conclusion des entretiens Barthou-Henderson,
pour la réunion de la commission générale de
la conférence du désarmement, on se trouve
maintenant devant une situation nette. Ayant
'écarté la tactique consistant à ajourner une fois
de plus les travaux de Genève sous prétexte
d'amorcer de nouvelles conversations par la
voie diplomatique entre les gouvernements
des principales puissances, alors que l'on sait
pertinemment qu'en raison du réarmement
effectif de l'Allemagne de telles négociations
ne sauraient aboutir, le problème ne pouvant
être pratiquement résolu que sur le plan de la
conférence au sein de laquelle sont représen-
tées toutes les puissances intéressées, chacun
JSé-trouve placé-devant- ses responsabilités. La
France, qui a les meilleures raisons du monde
pour s'en tenir inébranlablement à la position
qu'elle a prise par sa réponse du 17 avril à
l'Angleterre, a apporté quelque clarté dans un
idébat où il n'y avait qu'équivoque et confu-
sion. Les Anglais, qui ont voulu chercher la
solution là où elle ne pouvait raisonnablement
être trouvée, commencent à se rendre compte
que le problème de la sécurité prime actuelle-
ment tous les autres, et cela du fait de l'Alle-
magne. Quant aux Allemands, le langage de
Ha presse officieuse nationale-socialiste dissi-
mule assez mal les inquiétudes que l'on éprouve
à Berlin en ce qui concerne les développements
tde la situation.
Il est toujours facile pour un gouvernement
autoritaire affranchi de tout contrôle parle-
mentaire, et qui manœuvre l'opinion publique
id'un grand pays par des moyens de force aux-
'quels aucune opposition ne saurait résister, de
faire illusion par une série de coups de théâtre
impressionnants. L'Allemagne a quitté avec
éclat la table de la conférence et la Société des
ïiatioris elle-même, affirmant qu'elle ne.retour-
terait à Genève que lorsqu'on aurait fait droit
à toutes ses revendications; avant tout accord
ide principe, elle a commencé à réarmer en
[violation manifeste des clauses militaires du
traité de Versailles; elle est allée jusqu'à pré-
voir dans le budget du Reich d'énormes cré-
dits pour le renforcement de son armée, de
isa marine et pour la création d'une puissante
-force aérienne; ses usines travaillent à plein
rendement pour la doter d'un armement fpr-
ïnidable. Toute cette politique de défi, qui est
bien dans la manière allemande, est relative-
ment facile à pratiquer. Elle n'exige que de
l'audace, un certain manque de scrupules et la
Volonté de méconnaître les règles élémentaires
;de toute véritable coopération internationale.
Encore s'agit-il de savoir où elle risque de me-
ner la puissance qui s'y résout. Pour réarmer
massivement dans de telles conditions, il faut
disposer d'énormes ressources, et nul n'ignore
que le troisième Reich se heurte dès à présent
'à de sérieuses difficultés financières. Dans
quelle mesure pourra-t-il soutenir son effort?
D'autre part, le réarmement de fait de l'Alle-
magne pourrait avoir pour cette puissance
•même d'inquiétants lendemains, car la Société
des nations n'est nullement désarmée pour
faire obstacle à une telle aventure. Enfin, en
(admettant que tout cela puisse se faire sans
accident grave, il n'en restera pas moins que
l'on devra se préoccuper à Berlin de ce qu'en
pensent les autres puissances, de ce que les
nations voisines du Reich et directement mena-
fcées par le réarmement de celui-ci croiront
devoir décider pour se garantir dans la mesure
du possible contre quelque tragique aventure.
Qu'on le veuille ou non, c'est l'Allemagne qui,
'en réarmant, pose pour l'Europe entière le pro-
blème de la sécurité dans des conditions telles
qu'il doit, par la force des choses, rapprocher
les nations qui veulent la paix et qui ne peu-
vent la maintenir que par une politique étroi-
tement concertée.
Quel que soit l'aveuglement actuel à Berlin,
on ne saurait croire que les Allemands envi-
sagent d'un cœur léger le total isolement mo-
.ral et politique* de leur pays, isolement -dé-
terminé par leurs propres fautes. Les démar-
ches de M. von Ribbentrop à Londres trahis-
sent les inquiétudes qu'ils éprouvent en ce qui
concerne les effets directs et indirects de leur
tactique des coups, de poing répétés sur la ta-
ble. On a supposé que l'homme de confiance du
chancelier Hitler apportait au gouvernement
britannique quelques suggestions de nature à
permettre au cabinet de Berlin de faire rebon-
dir le débat avec de meilleures chances de suc-
cès. On a indiqué que M. von Ribbentrop avait
mission de promettre aux Anglais le retour du
Reich à Genève à certaines conditions, de lais-
ser entrevoir une réduction importante des
formations paramilitaires, enfin d'offrir des
concessions de nature à faciliter un accord.
Rien de tout cela n'a reçu confirmation. M. von
Ribbentrop a déclaré lui-même qu'il avait voulu
simplement prendre contact avec les principaux
ministres anglais, mais que la position de l'Al-
lemagne n'était en rien modifiée et que les re-
vendications du Reich subsistaient entièrement.
Quel était alors l'objet de sa démarche ? Tout
porte à penser qu'il ne s'agissait pas d'autre
chose que de l'éternelle mj-nœuvre allemande
tendant à désolidariser l'Angleterre 'd'avec la
France ei,. à préparer la formation d'un front
anglo-germano-italien, chimère à laquelle l'Al-
lemagne a constamment sacrifié les plus sûres
réalités..
Le moment était particulièrement mal choisi
pour tenter une telle opération diplomatique,
alors que l'opinion britannique s'affirme cha-
que jour plus hostile au régime hitlérien, qu'un
esprit anglais ne peut concevoir, et que l'Angle-
terre se sent directement menacée par le ren-
forcement de la marine de guerre du Reich et lp.
création d'une puissante aviation allemandé.
A Londres, on semble avoir très bien compris
le jeu par trop simpliste de M. von Ribbentrop,
qui n'avait pas d'autre objet que de travailler
l'opinion britannique en faveur de la cause de.
l'Allemagne et de rejeter sur la France des res-
ponsabilités qui incombent au seul gouverne-
ment de Berlin. L'homme de confiance du chan-
celier Hitler a trouvé un accueil extrêmement
réservé au Foreign Office et ailleurs. D'une ma-
nière générale, les Anglais semblent enclins à
considérer que le déplacement de M. von Ribr
bentrop fut inopportun ou du moins inutile.-
Leur réplique aux arguments qu'a pu faire.
valoir le porte-parole du « Führer » était d'ail-
leurs facile si le Reich croit avoir des droits
spéciaux à défendre, il n'a qu'à retourner à 1^.
conférence et à reprendre sa place à la Société
des nations pour les faire valoir. Mais le retour.
à Genève est précisément la seule solution que
le chancelier Hitler, prisonnier de ses propres
fautes, entend écarte-r.
L'échec de M. von Ribbentrop à Londres dôri
riera-t-il à réfléchir à Berlin ? Ce qui est cer-
tain, en tout cas, c'est que les préoccupations
des Anglais sont maintenant ailleurs. Elles
portent entièrement sur le problème de la sé-
curité. Le discours prononcé par M. Stanley
Baldwin à l'association féminine du parti
conservateur est significatif à cet égard. Le
lord président du conseil a déclaré que si
un accord sur le désarmement se révèle im-
possible, l'Angleterre ne se contentera de rien
de moins, en matière d'aviation, que d'une posi-
tion d'égalité avec la plus grande puissance
capable d'attaquer les côtes anglaises. C'est, on
le voit, l'annonce d'un puissant effort pour ren-
forcer la défense du Royaume-Uni, et les
Anglais n'oublient pas que c'est 1 ''Allemagne,
qui les contraint, ainsi a mieux assurer leur
sécurité.
DÉPÊCHES DEJ.' ÉTRANGER
Berlin, 12 mai.
Sollicité par le statthalt'er du Reich dans le pays
de Bade, d'assister, le 12 mail, à l'inauguration du
musée badois de l'armée, à Carlsruhe, le président
von Hindenburg a répondu que son grand âge ne.
lui permettait pas de donner suite a cette invi-
tation,
Berlin, 12 mal,
Le docteur* Frick, ministre • de d'intérieur du
Reich, a chargé le général de police Daluegge de
la direction du nouveau service de police au mi-
r.istère de l'intérieur du Reic'h.
Madrid, 12 mal.
M. Alcala Zamora, président de la République,
est parti au débjUt) de J'après-midi pour Priego,
son village, natal, «où il passera quelques jours. •
Lisbonne, .12 niai.
M. Jessé Curély, ministre de France, a remis
'au nom du gouvernement français, les insignes
de grand-officier de la Légion d'honneur à M. ,T.
Caeiro da Mata, ministre des affaires étrangères,
et à M. S. F. Ramires, ministre, du commerce et
de l'industrie.
LE CONGRÈS RADICAL
II semble que la plupart des radicaux assem-
blés à .Clermont-Ferrand aient le sentiment
des responsabilités qu'ils assumeraient si, par
les décisions qu'ils vont prendre, ils contre-
carraient l'œuvre du redressement national,
entreprise par M. Gaston Doumergue avec le
concours des représentants de tous les partis
non révolutionnaires, et notamment du parti
radical. Des rumeurs et des cris ont signifié
que cette collaboration à l'effort ministériel
mécontente et même indigne quelques mili-
tants » qui conçoivent le radicalisme comme
un des éléments du socialisme. Mais le bruit
ne fait pas la raison, ni même la force.
M. Edouard Herriot paraît bien avoir été le plus
fort quand il a parlé raisonnablement, quand
il a dit ̃:̃ « J'ai donné ma parole d'honneur,
appuyé par le parti à l'unanimité; j'ai le res-
pect de la parole donnée. Si le parti tout entier
me demandait de. la retirer, j4 ne la retirerais
pas. »! Mais si le président dû parti radical a
eu juste notion de l'honneur personnel, son
parti pouvait estimer que des considérations
politiques autorisaient les radicaux à revenir
sur les résolutions prises précédemment. Ce ne
sera évidemment pas pour, épargner à M. E.
Herriot un parjure que le parti radical déci-:
dera, aujourd'hui ou demain, de soutenir loya-
lement le gouvernement d'.union nationale; ce
sera surtout parce qu'il juge qu'il est honnête,
qu'il est prudent, qu'il est ,« radical »; d'agir
ainsi. Ou le radicalisme exprime une des
façons d'être républicain et d'être Français, ou
il n'est qu'une conception révolutionnaire. Le.
radicalisme est, selon ses traditions et ses
proclamations successives, à la fois patriote
et républicain. Il ne saurait donc, sans décider
qu'il -a changé de nature et de programme,
faire autre chose qu'il ne fait en prenant sa
part des travaux difficiles du gouvernement
d'union nationale.
Le congrès radical à encore d'autres préoc-
cupations. Il veut d'abord s' « épurer » lui-
même. Il a prononcé, dès hier, l'exclusion de
deux parlementaires compromis dans les scan-
dales actuels. On fait prévoir, que d'autres sen-
tences sévères seront encore rendues. Il n'ap-
partient qu'aux radicaux d'en connaître et d'en
décider, et il serait indiscret d'intervenir, même
par-de simples commentaires, dans les délibé-
rations de ce tribunal que constitue, en ces'
conjonctures, le congrès de Clermont-Ferrand.
M. Albert Bayet, qui a été chargé d'établir la,
procédure de, cette « -épuration », a employé
une formule historique, solennelle et rigou-
reuse, en invitant les congressistes à punir les
défaillants et les fautifs Il faut, a-t-il dit,
que la vertu soit à l'ordre du jour. » Des cou-
pables seront donc châtiés par leurs pairs. II
faut souhaiter que ces jugements comportent
un enseignement et une morale dont auront à
profiter les mœurs de tous les clubs, de tous
les comités, de tous les groupements politi-
ques, et que « solidarité » n'y soit plus jamais
synonyme de « complaisance ». Il faut, en
effet, que la vertu soit à l'ordre du jour, mais
pas seulement lorsque de fâcheux événements
révèlent publiquement qu'elle a été sacrifiée
à l'intérêt personnel.
Ainsi, le parti radical sortira du congrès de
Clermont-Ferrand tel qu'il y est entré, c'est-à-
dire résolu à ne rien changer à ses disciplines
présentes. C'est du moins ce que prévoit la
République, où une partie des radicaux expri-
ment leurs vues. On y lit ce matin qu'il ne faut
pas s'attendre a voir congrès radical donnii
une approbation éclatante à là politique de î
pP a s ntar ~es d'hasl~ ~w
trêve », pas. plus que « des marques d'hGsti-*s
lité ». Les congressistes se borneront à donner
« une sorte de consentement dans l'abandon à
ce qu'on considère n'avoir pu être évité ». Qu'il
soit permis de représenter à la Républtque que
ce consentement-là n'est pas franchement répu-
blicain. Il manque de loyauté et de courage.
« Consentir », « dans l'abandon »n à ce qu'on
ne peut empêcher, c'est guetter la première
occasion de trahir. Y a-t-il vraiment des radi-
caux qui nourrissent ces desseins ? Si oui, ils
ne sauraient « mettre la vertu à l'ordre du jour »'
sans hypocrisie et sans duplicité. Car être ver-
tueux ne signifie pas seulement qu'on ne tra-
fique pas d'un mandat parlementaire; être ver-
tueux exprime encore qu'on ne tient pas la
politique pour un jeu de dés pipés, qu'on s'in-
terdit d'avoir recours à l'intrigue perfide pour
parvenir au but qu'on s'est fixé. Si le parti radi-
cal participait à l'union nationale avec cette
restriction mentale, il se déshonorerait et jus-
tifierait le mépris que lui témoignent les partis
manœuvrant à sa gauche. Nous voulons croire
que la République a porté-sur le parti radical
un jugement téméraire et qu'en le. montrant
insincère, et même. cauteleux, elle l'a, calomnié.
DESCJ-UFFRES
Là « Société d'études et d'informations écono-
miques j>~ poursuit à travers les budgets son,
étude Consacrée à la progression! des dépenses,
parcomparaison à l'année 1913. Sous ce titre
«Des chiures M, nous avons commenté (1) les
résultats de ce remarquable travail en ce qui
concerne. l'éducation nationale. Un nouveau
fascicule, non moins intéressant, embrasse l'en-
seignement technique.
Enseignement de date récente; car il doit son
statut décisif à la loi Astier-Cuminal du 25 juil-.
let 1910. En 1920, les services administratifs en
sont transférés du ministère du commerce à
celui de l'instruction publique; en 1925, un plan
quinquennal de réformes est dressé; l'article 25
de la loi du 13 juillet établit, la même année, la
taxe. d'apprentissage inscrite au budget de l'Etat
afin de contribuer au développement de ce ser-
vice qui forme des ouvriers qualifiés et des ca-
dres-expérimentés pour l'industrie et le com-
merce. Au sommet, le Conservatoire national
des arts et métiers; fondé en 1794 par la Con-
vention, maintenant université véritable d'arts
et sciences appliqués; et une Ecole normale,
créée eni 1912, dont les promotions sortantes ne
cessent de croître (59 élèves en 1928, 65 dès
1929) et qui prépare les professeurs de l'ensei-
gnement technique à tous les degrés. Le degré
supérieur est représenté par les écoles natio-
nales des arts et métiers: 6 en 1919, elles avaient
1,051 élèves; 7 depuis la transformation de
l'Ecole technique de Strasbourg en 1925, elles en
avaient 2,264 en 1928 et 2,126 en 1931. Joignez
deux écoles assimilées celle des arts et indus-
tries textiles de Roubaix, dont l'effectif tombe, il
est vrai, -.entre, 1928 et 1931, de 817 à 621, et
l'Ecole supérieure de [céramique de Sèvres, qui,
au contraire, a passé de 22 élèves à 24. Dans le
mitan, les écoles nationales professionnelles
(6 en 1919 et 17 en 1933) d'où sortent futurs-
contremaîtres, chefs d'ateliers (ou aussi com-
merçants et hôteliers), et dont la population a
varié comme il suit en 1928, 3,446 en 1931,
3,931. Il y faut ajouter les deux écoles d'horlo-
gerie Besançon et Cluses (318 élèves en 1928,
347 en 1931). Au degré inférieur, les écoles pra-
tiques et écoles de métiers qui ont pour pro-
gramme l'apprentissage avec un complément
d'instruction générale 82 en 1920, elles sont à
présent 242, y compris les 13 établissements des
provinces recouvrées. Leur effectif, qui était de
32,077 unités em 1928, fléchissait un peu. en 1931,
à 31,149. Enfin et en bref, outre l'orientation
professionnelle, des cours professionnels, 250 en
1919 et 784 en 1933 (172,550 élèves dès 1929), et
tout un réseau d'enseignements fixes pu am-
bulants. Ici, développement à souhait.
En regard, les dépenses relatives à l'enseigne-
ment technique figurent, au budget de 1913,
pour un total de 9 millions 875,000 francs; en
1933, elles s'élèvent à 215 millions 812,000
coefficient d'augmentation 21,8. La réduction à
204 millions 451,802, pour 1934, n'empêche pas
de considérer qu'en, l'espace de huit années la
dotation a bondi, comme on dit en Bourse, de
94 millions 212,000 en 1926, à 226 millions
883,000 en, 1932. De la sorte, malgré deux frei-
nages successifs, dans les budgets de 1933 et
1934, on est conduit à chercher les causes prin-
cipales de cette ascension, sinon de cette en-
volée. Et tout en tenant compte de l'accroisse-
ment de la clientèle, on les trouve d'abord dans
l'élévation des traitements et quelque gonfle-
ment des effectifs du personnel. Les traitements
em 1913 se chiffraient par 5,364,000 francs et
118 millions en 1933 soit un coefficient de
22,2. Pour ce qui est des indemnités, de 29î,000
elles sont montées à 11 millions 101,000 coeffi-
cient 37,3. Faute de place et dans la crainte de
fatiguer nos lecteurs par l'aridité des chiffres,
nous nous bornerons, pour chaque étage, à quel-
ques exemples significatifs. Au Conservatoire
des arts et métiers, dans l'année qui précéda la
grande guerre, 17 professeurs touchaient une
moyenne de 10,000 francs; ils sont 24 à présent,
et touchent'72,000 francs; l'unique préparateur
percevait 2,300; ils sont 10 à cette heure, qui
reçoivent, en pratique, un traitement moyen de
22,770 augmentation moyenne de 12,1. On pré-
voit, d'autre part, en 1933, la création de 33 em-
plois de dames vérificatrices auxiliaires; en
1934, on prévoit la suppression de 133. Le bud-
get de l'Ecole normale en 1913. porte un crédit
de 25,000 partagé entre 5 maîtres de confé-
rences aujourd'hui, les cours reviennent à
391,000 francs.
Dans les écoles provinciales d'arts et métiers,
directeurs, sous-directeurs, économes, concier-
ges et maîtresses lingères atteignent tous le pla-
fond fixé pour leur emploi. Celle de Paris
laisse apparaître, par rapport à 1913, des coef-
ficients d'augmentation de l'ordre suivant
directeur, de 4,5 à 7,5; ingénieur de 8,1 à 10,3;
professeurs de 8,1 à 13,6 (4,400 francs en 1913,
de 36,000 à 60,000 en 1934). Aux écoles hstio-1
nales professionnelles, le baromètre marque
une hausse, pour ne citer .que quelques cas, de
3à"S,2, de 5,5 à 8,6, de 8,7 à 11,8. Encore celle de
Saint-Ouem bénéficiert-elle de traitements plus
élevés. Les directeurs des écoles d'horlogerie
atteignent le coefficient 7,3 et les professeurs de
théorie à Cluses, de technique à Besançon, 9,4.
Quant aux écoles pratiques, les directeurs vont
de 6,2 à 18,3 et les professeurs de 8 à 10,5. D'où
il résulte, à la vérité, que si cet enseignement
est jeune, ses coefficients sont adultes.
N'entrons pas plus avant dans le détail des c
chiffres et venons-en aux réflexions que sug-
gère cette analyse.
Après elle un problème se pose ou plutôt
Après cela, un problème se pose ou plutôt
s'impose à la décision gouvernementale. La
crise économique, au rebours des écrits de
Malherbe, ne durera pas éternellement. Et la
transformation du monde moderne assigne une
place considérable à l'enseignement technique.
11 représente, en effet, une des deux faces de la
civilisation, l'autre face, plus essentielle en-
core, si l'on ose ainsi parler, étant la préparation
des valeurs spirituelles. Les récents décrets-lois,
(1) Le Temvs, 14 .et 22 décembre 1933, 2-3 jaur
Vier 1934,
3a:?. s le commun besoin, ont "allégé les" chargés
ip F instruction publique; d'autres doivent inter-
venir pour une réorganisation systématique et le
retranchement des organes parasites. f)r, à lire
le budget de 1934, on s'avise qu'jaux 118 mil-
lions absorbés par les traitements de l'ensei-r
gnement technique qui englobe 200,000 élèves
snviron, se juxtaposent 108 millions exigés par
!es traitements du primaire supérieur qui,durant
['année scolaire 1932-1933, réunit 90,616 élèves
exactement. Et l'on se persuade, de surcroît,
que celui-ci double celui-là. Cette année même,
la commission des finances refusait uri crédit
de plus demandé par le précédent gouverne-
ment à titre d'encouragement à l'organisation
liatérielle de V enseignement professionnel dans
les établissements publics d'enseignement pri-
maire supérieur.
La vérité est que ce compartiment, à cette
heure, fait doublement double emploi. Dû à une
cpneeption justifiable alors que l'école primaire
était isolée et la préparation professionnelle
dans les limbes, il offre aujourd'hui l'image
d'une superfétation hybride par ses sections
industrielles, commerciales, hôtelières, etc., en-
seignement professionnel à côté; par ses sec-
tions générales, enseignement secondaire en
perspective. La formation pratique y est rudi-
mentaire, la culturg utilitaire encyclopédique
et sans racines. On distingue mal sa raison
d'être à présent que l'école communale dé-
bouche sur le lycée où les sujets intelligents et
pauvres accèdent de plain-pied, où les institu-
teurs de demain recevront leur armature intel-
lectuelle avec les autres éducateurs. Et il ne
devient pas moins malaisé d'admettre que l'en-
seignement professionnel, d'orès et déjà en
possession de ses méthodes, ne puisse instruire
fe'vfxiUirs .coinmîs- des postes comme il prépare"
"f'cŒurs .úommi'S'dt)~postes comme Il prepare'
les employés de magasin. Le maintien quand
même d'un entredeux en porte-à-faux consti-
tuerait un péché contre l'économique autant
que contre la démocratie. Au surplus, ainsi que
nous le disait un jour le recteur Paul Appell,
bon républicain autant que grand savant,
qu'est-ce qu'un enseignement primaire et 4 la
fois supérieur?
LES PLUS DOUX CHANTS
Tintements argentins.des verbes en mi Volutes
mélodieuses des participes passifs 1 Et vous,
voyelles contractes; accords, bouquets sonores.
Vous nous fûtes inquiétants; mais c'était en nos
ans d'innocence; ou à la saison des premières
amours. L'amertume s'est évanouie et le miel est
resté. Quand on ouvre un poète grec, et qu'on eh
discerne encore le sens, on ne peut plus s'en
séparer. C'est une. magie; un envoûtement. Vayez
André Thérive, et son Anthologie non classique
des anciens poètes grecs, dont M. Jacques Boulen-
ger nous di'sait les harmonieuses truculences. On
croit le voir, sous, la lampe, se récréant, loin du tas
des livres nouveaux. Caressant ligne à ligne les
textes rares d'Aristée de Proconèse et de Phi-
loxène de Cythère. Oh. 1 Les jolies syllabes, entre .e
lesquelles passent l'air et la lumière; et les petites
notes grêles du barbitos. Songeries ? Mais oui.
Nous savons bien que si- Pindare et Sophocle nous
entendaient lire leurs vers, ils tendraïeat-lioreille,
fronceraient- le, sourcil, et nous, demanderaient, en
bon grec, .ce que nous voulions dire. Qu'importe 1
N'est-ce pas toujours de la musique?
Saluons la naissance d'un nouvel hellénisme
moins géométrique que l'ancien; moins académi-
que plus vivant que l'hellénisme de musée de
Mme Dacier et de M. Patin. Ce sera toujours l'évo-.
cation d'une humanité moins tourmentée que la
nôtre moins « économique » moins serrée dans
ses vêtements; qui n'ajoutait pas de bruits inutiles
aux bruits de la terre, et du vent; d'un temps où
la nuit était faite pour dormir; et où il n'y avait
point de courts-circuits.
Les amoureux de la Grèce ont failli passer pour
des ennemis de la Cité nouvelle. Ils se serrent les
uns contre les autres, comme les initiés d'une reli-
gion suspecte, ou de superstitions ridicules. Qu'il
leur arrive d'être ridicules, c'est bien possible. Ils
le sentent eux-mêmes. Mais leur. naïveté même
leur est agréable. Je sais quelqu'un qui s'obligea,
dans un restaurant d'Athènes peuplé' de grosses
mouches, à boire jusqu'au fond, tout seul, une
bouteillle de blanc res-inato, sans faire la grimace.
Il pensait boire à la coupe du Banquet; et il n'eut
point mal au cœur.
Musique des îles Deux hellénistes, MM. Jean
Larnac et Robert Salmon, viennent de publier un
petit ouvrage sur Sappho. Sujet ardu; chaussée
glissante. 'Mais que ne peut-on dire, dans la mu-
sique des noms grecs ? Ils ont découvert une
solution ingénieuse, dont ils ne fournissent pas, on
le.craint, une démonstration sans ifissure, aux pro-
blèmes que posent la biographie et la, réputation
de la poétesse.
Mais est-il tien dg plus charmant que ie<$
hypothèses ? Surtout quand, au lieu d'un os
de plésiosaure, on manie dès fragments de
Sàppho. D'après eux, Sappho, à l'âge de douze ans,
devint prêtresse d'Aphrodite. L'enfant brune, ou
pareille « à une olive », ce qui est mieux dit
qu'olivâtre, vêtue du chiton flottant, sans cein-
ture, avait pour tâche de laver, parfumer, d'ha-
biller, de suivre dans les processions, le xoanon
de la déesse, l'horrible statue de bois doré, aux
larges hanches, aux oreilles éléphantesques, qui
symbolisait la joie d'aimer. Ainsi, toutes les
erreurs qu'elle a pu commettre eurent une double
origine le serment qu'elle prêta de s'écarter tou-
jours du mâle brutal et, d'autre part, l'ardeur,
religieuse, dont la grande Aphrodite la .tourmen-
tait.
Cette solution coquette donne tout apaisement.
Mais on n'était déjà, plus très sévère à la plus
mélodieuse des 'lyriques S Pour toi, ô Dika,
prends un rameau de bel anis, et, de tes douces
mains, tresses-en une couronne autour de ta
jolie chevelure. » Atthis, Dika, Gongyla, Anac-
toria. Tous les mots grecs d'un livre sur Sappho
forment un hymne ensorcelant. Erésos, Mytilèné,
Syracuse. Est-ce que cela. ne fond pas sur les
•lèvres, comme des fruits ? Sappho avait trois
frères, Charaxos, Larichios et Eurygios. Sa mère
était Cleis, son père Scamandronymos. Cleis, aussi,
fut le nom de sa fille, qui naquit voilà deux mille
cinq cent vingt-cinq ans. Car Sappho se maria, on
est tenté de l'oublier, avec un riche marchand de
vin d'Andros, Kerkylos. Elle l'épousa au mois Ga-
jjnélion. « J'ai une fille, une jolie petite fille, aussi
délicieuse qu'un bouquet de chrysanthèmes ma
chèçe Cleis, que je n'échangerais, pas contre toutes
les richesses de Lydie. » '• ̃•"• .'̃-̃'
'^Pourquoi. chercher des plaisirs nouveau*? En
écoutant ces chants, on 'deviendrait apostat à la
musique des usines. Le cœur se fond. La vie
redeviendrait tolérable si l'on pouvait se griser de
grec une heure par jour. Qu'on le prononce comme
on pourra. R. K;
LES DETTES DE GUERRE
Le New York Times du 12 mai, dans un édi-
torial consacré aux dettes 'de guerre, enregistre
«, l'immense ressentiment et l'appréhension qu'a
déjà produits la loi Johnson >>.
Tandis que le sénateur Johnson tient la Grande-Bre-
tagne pour coupable de s'être livrée à une farce
frauduleuse », écrit ce journal, un journal anglais
traite l'Amérique de « brigand de grand chemin». De
tels échanges dé pavés à travers l'Océan ne sont pas
d'un bon augure. Ils rendront cependant les éléments
les plus sensés des deux pays plus impatients que
jamais d'arriver à un règlement raisonnable et définitif
d'une 'querelle qui devient de plus en plus fâcheuse.
Il s'agit actuellement d'une de ces questions qui, tant
qu'elles ne sont pas réglées, tro.ubleal inip.itpyabjejneat
le xep.os âes aatioass
LE PROBLEME DU DÉSARMEMENT
Un exposé dé ffi. Baldwin
Au cours d'un meeting organisé à Londres par
les associations féminines du parti conservateur,
M. Baldwin, lord-président du conseil, a, passé
en revue la politique du gouvernement actuel et
s'est particulièrement expliqué sur le problème
du désarmement et la prochaine réunion de la
conférence. de Genève.
Les seules propositions qui subsistent devant la con-
férence, a-t-il dit, sont celles que le gouvernement
britannique a formulées. Il est impossible de dire en
ce moment si elles aboutiront ou non. Nous le saurons
avant longtemps, mais la déclaration que j'ai faite
réoemment aux Communes au nom du gouvernement
demeure.
J'ai dit et je redis que si l'on ne parvient pas à un
accord et que si, en particulier, un accord se révèle
impossible au sujet des armements aériens, notre pays
ne se contentera de rien de moins, en matière d'avia-
tion, que'de l'égalité avec la plus grande puissance
capable d'attaquer nos côtes avec ses'appareils, Je sais
parfaitement que les avis peuvent différer sur le mo-
ment où il conviendrait d'entreprendre l'exécution de
ce programme. Je vous demande de faire confiance
au gouvernement car il désire tout autant que vous la
sécurité de notre pays. et la paix du monde. Si cer-
tains d'entre nous sont trop vieux pour se battre, nous
n'avons cependant pas plus que vous le désir de voir
nos fils se battre. J'associe la défense du pays et la
convention du désarmement et je vous demande, à
cette heure où, pour notre bien ou pour notre mal,
nous affrontons ce qui semble être la dernière phase
des négociations du désarmement, d'accorder votre
confiance au gouvernement et d,e lui donner le plein
appui de l'opinion publique.'
De son côté, Sir 'John Sinion, parlant devant
l'association libérale de Spen Valley, Heck-
molitwieke, a fait allusion au désarmement. Il a
déclaré qu'à son avis le projet de convention
britannique et le mémorandum supplémentaire
du 29 janvier dernier constituaient toujours les
bases les plus sûres d'un accord.
La défense aérienne de l'Angleterre
Notre correspondant particulier de Londres nous
téléphone samedi matin 12 mai
L'opinion anglaise accueille favorablement la
déclaration faite hier par M. Baldwin au meeting
des femmes conservatrices à l'Albert Hall. Ses pa-
roles paraissent correspondre non seulement à
l'unanimité du sentiment des ministres anglais,
mais encore aux tendances de la majeure partie
des électeurs, convaincus que l'Angleterre ne doit
pas rester dans une situation d'infériorité en ma-
tière d'aviation. On peut conclure de cet état
d'esprit que les représentants de la Grande-Bre-
tagne à Genève, à la fin du mois de mail, propo-
seraient probablement la conclusion d'une con-
vention sur les points où les principales puis-
sances sont d'accord et 'que, dans tous les cas, ils
insisteront pour. ja. réalisation de la parité
aérienne.
Divers journaux soulignent l'importance 'de la
défense aérienne pour l'Angleterre. Le Daily Tele-
graph par exemple déclare que « l'air est devenu
notre ligne de défense comme autrefois la mer ».
Toutefois, le correspondant parisien du Times
observe, que la sécurité terrestre est aussi impor-
tante pour la France que la sécurité aérienne.
pour l'Angleterre et qu'il faut des garanties pouu
une comme pour l'autre. Le Morning Post déve-
loppe la thèse des ultraconservateurs en repro-
chant au gouvernement de M. MacDonald d'avoir,
attendu jusqu'à présent dans l'espoir d'une con-
vention qui s'avère, irréalisable, et > en réclamant
yen!ioll (lui1 i des :en"réoktmant
1 augmenfatiton immédiate, des armements anglais.
t
De son côté le correspondant à Londres de l'agence
Havas téléphone
On dément, dans les cercles autorisés britan-
niques, la nouvelle publiée à l'étranger annonçant
que 1 Angleterre a l'intention de proposer un-plan
de désarmement aérien « comportant toutes les
garanties d'exécution et les sanctions que demande
la France en échange d'un désarmement » La
situation demeure telle qu'elle a .été précédem-
ment définie. Le cabinet fera à nouveau le point
au cours du conseil des ministres de mercredi
prochain.
La mission de M. von Ribbentrop
'« Ma visite à Londres avait un but de pure in-
formation, a déclaré M. von Ribbentrop, dans un
entretien avec un représentant de l'agence Reuter.
Elle devait me permettre un contact personnel
avec le gouvernement anglais à l'effet d'échanger
des vues sur la situation du désarmement et avec
le désir commun d'arriver à une solution satisfai-
sante, » PI a ajouté
En ce qui concerne les revendications du gouver-
nement allemand, il n'y a aucun changement; ces re-
vendications constituent un minimum et sont tenues
pour raisonnables par la plupart des pays du monde.
J'ai foi en le bon sens du vieux monde pour réaliser en
fin de compte une convention de désarmement.
LA DÉFENSE NATIONALE EN BELGIQUE
Un discours de M. Devèze
{Par téléphone, de notre correspondant particulier)
Bruxelles, 12 mai.
L'amicale des officiers de la campagne 1914-
1918, que préside le comte Adrien Van der Burch,
a donné un déjeuner en l'honneur du capitaine
de réserve Albert Devèze, ministre de la défense
nationale et promoteur de l'organisation défensive
du pays à ses frontières mêmes. Plusieurs cen-
taimes d'officiers de réserve ont participé à cette
manifestation qui a la portée d'une réaction con-
tre les tendances qui se manifestent dans 'certains
milieux à en revenir au projet Galet-Nuyten de
1930 et à retarder les mesures d'exécution décret
tées par le ministre pour, les travaux à la fron-
tière de l'Est.
Le' comte Adrien Van der Burch a rendu un
̃éclatant hommage à M. Devèze et a dit la volonté
du pays et des vétérans d'assurer la défense effec-
tive de tout le territoire à la frontière de l'Est,
en liaison avec les alliés de la Belgique dans la
grande guerre. M. Devèze, dans sa réponse, a rap-
pelé qu'il a gagné ses étoiles d'officier sur le
champ de bataille et qu'il a avec tous ses cama-
rades une étroite communauté de souvenirs, de
volontés et d'espoirs identiques. Dès 1920, il s'est
préoccupé de réorganiser la défense nationale, En
1923, il fit voter la loi portant le service de 12 à
14 mois et assurant la vie des divisions de ré-
serve, mais cette loi ne répondait pas à son pro-
gramme complet, et il a remis sa démission au roi.
M. Devèze a rappelé que lorsqu'il a repris la di-
rection du département de la défense nationale,
en décembre 1932, il a mis comme condition d'être
en mesure d'assurer la défense du territoire sur
la rive droite de la Meuse par la construction d'ou-
vrages dans le Luxembourg et par la fortification
du plateau de Herve. Les études en cours por-
taient sur les ouvrages à construire, sur le type
et Femplacesnent des abris. Le ministre a tenu
personnellement la main à ce que études et tra-
vaux fussent conduits énergiquement. C'est au
cours de ces études qu'il lui est apparu indispen-
sable de demander 759 millions de crédits complé-
mentaires pour organiser défensivement la fron-
tière de l'Est et y établir en permanence des uni-
tés de couverture.
J'ai vérifié la nécessité des crédits, a-t-il dit. Le pre-
mier ministre les a acceptés. Le gouvernement s'y est
rallié sans contestation, et sa décision a été consacrée
sous- la présidence du roi Albert. Au Parlement, l'accord
national s'est manifesté. Dans les deux Chambres, la
résistance de l'opposition n'a été que de surface; on a
reconnu l'opportunité de ce grand sacrifice; les hommes
politiques ont fait leur devoir. Je me suis mis tout de
suite à l'œuvre. Je ne peux préciser publiquement où
nous en sommes; ce qui vous intéresse, c'est de savoir
ce qui reste à faire. Il faut d'urgence prendre les der-
nières résolutions, faire aboutir les dernières études,
arrêter les derniers détails, au sujet des ouvrages de
Hervé, afin d'être en mesure de passer aux adjudica-
tions là où elles ne sont pas encore ordonnées. Il faut
réaliser vigoureusement en décision et en exécution ce
qui. demeure encore à faire dans le Luxembourg. Par
la création du 14° régiment de ligne il faut remplacer
dans leurs divisions actives et de réserve le 10. de ligne
et son succédané. Devenus chasseurs ardennais, ces
xjSgimenis epnt dé.gniUvement affectés à une mission
spéciale celle de défendre l'immerase trouée qui,
de la Vesdre à Arlon, subsisterait dans la cou-
verture du territoire en collaboration avec tes forces
amies qui, sur notre -.appel, viendraient aussitôt a notre
aide et qui ne pourraient prendre place en ligne que
sous leur protection. Pour cela, pas un instant à per-
dre. Les divisions de l'armée de campagne doivent être
équivalentes pour être interchangeables. Jusqu'au mo-
ment où six classes de milice auront passé par de
14° de ligne les solutions que l'on adoptera seront donc
nécessairement des conditions de fortune acceptables
si elles sont temporaires.
Après avoir souligné l'importance des mesures
qu'il préconise pour permettre l'application de
l'accord défensif franco-belge et assurer la dé-
fense effective du territoire, M. Devèze a dit qu'il
ferait son devoir jusqu'au bout.
La ligne directrice que je me suis tracée je la suivrai
jusqu'au bout; c'est l'unique raison d'être de ma pré-
sence au ministère. Elle ne peut être accomplie que
dans l'union disciplinée, la collaboration étroite et cor-
diale dans le domaine de leurs attributions de toutes
les autorités compétentes. Elles requiert une atmosphère'
de calme et de confiance, la certitude que toutes les
forces convergent vers le même but. J'y consacre mes
efforts, soucieux de l'autorité dont je suis dépogitaire.-
et en rendant hommage aux officiers qui m'assurent
leur concours technique indispensable.
Le ministre, après avoir dit que le moral de
l,'armée est splendide, et rendu hommage aux offia
ciers belges de troupe et au cadre des sous-offi-.
ciers, a déclaré que, si quelque nouveau péril me-:
naçait le pays, l'armée nouvelle serait digne de'
l'ancienne et saurait faire son devoir.
TRIBUNE LIBRE
L'urgente restauration des valeurs spirituelles
La crise morale, qui est à l'origine de la plu-
part des maux dont nous souffrons, n'est que
l'un des aspects d'un fait beaucoup plus gêné-,
rai le déclin. dans l'estime publique des va-;
leurs spirituelles.
J'entends par là la méconnaissance de la
primauté de l'esprit, le dédain des qualités mo-
rales, l'affaiblissement et, pour beaucoup, la
disparition du sentiment religieux, voire même
de toute inquiétude touchant nos destinées,
l'absence d'idéal et, comme corollaire, la con-
damnation, pour le moins tacite, je ne dis pas
seulement de l'esprit de sacrifice, mais de dé-
vouement, voire du simple désintéressement.
En dépit de nombreuses et vaillantes excep-
tions, ce déclin des valeurs spirituelles est
incontestable.
Sous l'influence du matérialisme qui, au der-*
nier siècle, a cru pouvoir rayer l'esprit du cycle
de nos préoccupations, le plus grand nombre
s'est habitué à ne plus faire confiance qu'aux
sensations et, par suite, à se cantonner dans
l'unique souci du bien-être. D'autant que les
applications scientifiques indéfiniment multi-
pliées, en même temps qu'elles en augmen-
taient le nombre, nous mettaient en mesure de
satisfaire tous nos besoins.
De là cette course effrénée à l'argent à la-
quelle nous assistons depuis la fin e la guerre,
la seule considération des avantages matériels
qu'il procure, fût-ce en violation des règles mo-
rales les plus élémentaires, l'estime dans la-
quelle est tenue lajscience elle-même unique-
ment" pour ses applications, pratiques que d'au-
cuns confondent avec le progrès. C'est ainsi
que la poursuite de l'utile l'emporte, de nos
jours, dans l'admiration de tous sur la recher-
che désintéressée du savant ou de l'artiste^
qu'une pure passion anime.
De son côté, le développement hypertrophi-
que du machinisme, chaque nation ayant pré-
tendu se. suffire à elle-même et inonder les
autres de ses produits, a non moins travaillé
contre l'esprit en transformant l'ouvrier en au-
tomate, que la taylorisation achève.
La technique, si l'on n'y met bon ordre, est
en train, en effet, d'anéantir tout ce qui donne'
du prix à l'existence la pensée, le sentiment,
la liberté, en un mot la vie de l'esprit. A
l'homme doué de sensibilité, de raison et d'ini-
tiative, elle tend à substituer non pas seulement
Vhomo œconomicus producteur et consomma-
teur, mais l'homme-machine. A cet homme,
elle ravit sa personnalité et tend, comme l'a
montré le film « Metropolis », à n'en faire
qu'un rouage d'un immense mécanisme.
Les loisirs mêmes que lui procure la ma-
chine ne permettent pas à l'homme moderne de
récupérer son âme; au sortir du bureau, de
l'atelier ou de l'usine, il est de nouveau happé
par elle sous la forme des innombrables dis-
tractions que lui offrent les dernières inven-
tions mécaniques, telles que l'automobile,
l'avion, le cinématographe et là T.S.F.
Loin de nous faire rentrer en nous-mêmes
et de nous inviter à réfléchir, ces divertisse-
ments très violents ou rapides suppriment i us-
qu'à la moindre velléité de vie intérieure. Elles
nous 'tirent, en quelque sorte, hors de nous-
mêmes, sans compter qu'elles émiettent notre
attention, sollicités que nous sommes en sens
divers par leurs multiples appels. Si nous y
ajoutons les effroyables complications de la vie
moderne auxquelles le cerveau humain a beau-
coup de peine à s'adapter, on comprendra que
les possibilités de méditer ou, pour reprendre
le mot de Barrès, de faire oraison, nous soient
enlevées. Que comptent dans le breuhaha de;
nos jours, qu'entrecoupe la sonnerie du télé-
phone, les valeurs spirituelles ?.
Aussi bien, le corps, auquel nous consacrons
les soins raffinés que commandent l'hygiène et
les sports, retient nos meilleures complai-
sances au détriment de l'esprit, dont le prestige
tend à diminuer, sinon à disparaître aux veux
de nos contemporains, comme s'il n'était pas
le principal, que dis-je ? la seule réalité dont
nous soyons sûrs, et peut-être le fond des
choses, l'essence même de l'univers, le com-
mencement et la fin.
On ne peut tourner plus manifestement le
dos à la vérité. Au lieu de nous servir de là
machine en vue de permettre à tous de se cul-
tiver, d'enrichir leur personnalité, de se déve-
lopper moralement et intellectuellement, nous
nous sommes asservis à elle. A notre bien-être
ou à ce que nous prenons pour tel, nous sacri-
fions nos biens les plus précieux et nos joies
les plus hautes. Nous avons ravalé l'homme à
n'être plus conduit que par le goût du plaisir
ou, ce qui revient au même, par l'appétit du
gain. Autrement dit, nous nous sommes tous,
plus ou moins, laissé devancer par le progrès
mécanique. L'homme moderne n'est pas, psy-
chologiquement parlant, à la hauteur de ses
inventions, en ce sens qu'il n'a pas su les do-
miner, ce qui est, tout compte, fait, le grand
drame de l'heure.
Est-ce à dire qu'il faille désespérer de là
civilisation occidentale, qui est d'origine chré-
tienne, donc spirituelle ? `? A-t-elle définitive-
ment fait faillite pour laisser la place à un
automatisme où les plaisirs des sens apporte-
ront seuls quelque répit ? Je ne le crois pas.
La machine qui est aujourd'hui un instru-
ment d'oppression, peut le devenir de libération
si nous savons nous en servir et nous servir des
loisirs qu'elle nous réserve pour nous hausser,
au-dessus des intérêts matériels et des jouis-
sances qu'ils représentent.
Mais, pour ce faire, il importe de restaurer,
dans sa plénitude, la. vie de l'esprit, que la
complexité du monde actuel, l'excès de sen-
sualité, la critique exaspérée de tout ce qui
la dépasse, la quête exclusive de l'argent, une
démoralisation contagieuse et le bas matéria-
lisme ambiant, issu lui-même d'une philoso-
phie aujourd'hui bien périmée, ont, comme
nous venon.s dé 1§ direu contribué à étouffer^
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Le Journal décline toute responsabilité quant à leur teneur
CHÈQUE POSTAL i Paris, Numéro 60
7ONPA.TEVB. i Auguste_NEFBTZBR (issi)
jSus-gieits Dirbotbuks ̃
Adrien HÉBRA5,B (isev-isii)
Emile HÉBRAH.D (îeis-isss)
Adrien HÉBRARD (1925-1029)
loxtis-m:iijXj (1929-1931)
I3mEC:TETIS!.S: 7
âraoques OHA-STEITET et Emile M:iK,BA.XJ2S
Le Journal ne répond pas des manuscrits communiqués,
ADRESSE télégraphique temps PARIS
TËlÀHOIE CIHQ U6HES, Taitbout 76.60 76.61 76.62 76.63 76.64
SOMMAIRE
PAGE 1
Le Problème du désarmement La. Défense, na-
tionàle. en Belgique.
PAGE 2
'•En Allemagne. Lettre d'Angleterre l'Opinion an-
) glaise et la France, Robert-L. Cru. Nouvelles
de l'Etranger. La France a" outre-mer..
PAGE 3
'En passant « Contempt of court », PIERRE MILLE.
Nouvelles du Jour. Le Congrès extraordi-
naire du parti radical et radical socialiste.
Chronique maritime, les Origines du cuirassé,
Edmond DELAGE.
PAGE 4
'Congrès de l'Union nationale des combattants. ̃
Le Nouveau régime des pensions civiles et mili-
taires. La Défaillance de la Banque des coo-
pératives. La Vie économique. A l'Hôtel
de Ville,
PAGE 5
%es Exploratiôns russes dans l'Arctique, André
PIERRE. Armée, Marine.: Air. L'Af-
faire Stavisky. ̃. Académies. Are et Curio-
sité.
'Feuilleton « « Tommy and C° », par Jérôme K. JE-
ROME, traduit de fanglais par Mm° Marguerite
Seligman. (N° 5.)
PAGE 6
'Echos et. Informations.. Faits-divers; Tribu-
naux, Conseil d'Etat, Théâtres. ?– T. S,. F
PAGE 7
'Dépêches et Informations financières^ Bulletin
météorologiquq^rrr.Autompbilisme. Les Echecs,
André Chéro'n. Nouvelles commerciales,
PAGE 8
LA JOURNÉE DERNIÈRES NOUVELLES. -Le Congrès
radical socialiste de Clermont-Ferrand. Les
y ceux du congrès de l'Union nationale des an-
ciens combattants, <–• Un accord commerce
franco-brésilien.
~-n~
Paris, le 12 mai
BULLETÏNJDU JOUR
BULLETIN DU JOUR
INQUIÉTUDES ALLEMANDES
La' date du 29 mai ayant été maintenue, en
conclusion des entretiens Barthou-Henderson,
pour la réunion de la commission générale de
la conférence du désarmement, on se trouve
maintenant devant une situation nette. Ayant
'écarté la tactique consistant à ajourner une fois
de plus les travaux de Genève sous prétexte
d'amorcer de nouvelles conversations par la
voie diplomatique entre les gouvernements
des principales puissances, alors que l'on sait
pertinemment qu'en raison du réarmement
effectif de l'Allemagne de telles négociations
ne sauraient aboutir, le problème ne pouvant
être pratiquement résolu que sur le plan de la
conférence au sein de laquelle sont représen-
tées toutes les puissances intéressées, chacun
JSé-trouve placé-devant- ses responsabilités. La
France, qui a les meilleures raisons du monde
pour s'en tenir inébranlablement à la position
qu'elle a prise par sa réponse du 17 avril à
l'Angleterre, a apporté quelque clarté dans un
idébat où il n'y avait qu'équivoque et confu-
sion. Les Anglais, qui ont voulu chercher la
solution là où elle ne pouvait raisonnablement
être trouvée, commencent à se rendre compte
que le problème de la sécurité prime actuelle-
ment tous les autres, et cela du fait de l'Alle-
magne. Quant aux Allemands, le langage de
Ha presse officieuse nationale-socialiste dissi-
mule assez mal les inquiétudes que l'on éprouve
à Berlin en ce qui concerne les développements
tde la situation.
Il est toujours facile pour un gouvernement
autoritaire affranchi de tout contrôle parle-
mentaire, et qui manœuvre l'opinion publique
id'un grand pays par des moyens de force aux-
'quels aucune opposition ne saurait résister, de
faire illusion par une série de coups de théâtre
impressionnants. L'Allemagne a quitté avec
éclat la table de la conférence et la Société des
ïiatioris elle-même, affirmant qu'elle ne.retour-
terait à Genève que lorsqu'on aurait fait droit
à toutes ses revendications; avant tout accord
ide principe, elle a commencé à réarmer en
[violation manifeste des clauses militaires du
traité de Versailles; elle est allée jusqu'à pré-
voir dans le budget du Reich d'énormes cré-
dits pour le renforcement de son armée, de
isa marine et pour la création d'une puissante
-force aérienne; ses usines travaillent à plein
rendement pour la doter d'un armement fpr-
ïnidable. Toute cette politique de défi, qui est
bien dans la manière allemande, est relative-
ment facile à pratiquer. Elle n'exige que de
l'audace, un certain manque de scrupules et la
Volonté de méconnaître les règles élémentaires
;de toute véritable coopération internationale.
Encore s'agit-il de savoir où elle risque de me-
ner la puissance qui s'y résout. Pour réarmer
massivement dans de telles conditions, il faut
disposer d'énormes ressources, et nul n'ignore
que le troisième Reich se heurte dès à présent
'à de sérieuses difficultés financières. Dans
quelle mesure pourra-t-il soutenir son effort?
D'autre part, le réarmement de fait de l'Alle-
magne pourrait avoir pour cette puissance
•même d'inquiétants lendemains, car la Société
des nations n'est nullement désarmée pour
faire obstacle à une telle aventure. Enfin, en
(admettant que tout cela puisse se faire sans
accident grave, il n'en restera pas moins que
l'on devra se préoccuper à Berlin de ce qu'en
pensent les autres puissances, de ce que les
nations voisines du Reich et directement mena-
fcées par le réarmement de celui-ci croiront
devoir décider pour se garantir dans la mesure
du possible contre quelque tragique aventure.
Qu'on le veuille ou non, c'est l'Allemagne qui,
'en réarmant, pose pour l'Europe entière le pro-
blème de la sécurité dans des conditions telles
qu'il doit, par la force des choses, rapprocher
les nations qui veulent la paix et qui ne peu-
vent la maintenir que par une politique étroi-
tement concertée.
Quel que soit l'aveuglement actuel à Berlin,
on ne saurait croire que les Allemands envi-
sagent d'un cœur léger le total isolement mo-
.ral et politique* de leur pays, isolement -dé-
terminé par leurs propres fautes. Les démar-
ches de M. von Ribbentrop à Londres trahis-
sent les inquiétudes qu'ils éprouvent en ce qui
concerne les effets directs et indirects de leur
tactique des coups, de poing répétés sur la ta-
ble. On a supposé que l'homme de confiance du
chancelier Hitler apportait au gouvernement
britannique quelques suggestions de nature à
permettre au cabinet de Berlin de faire rebon-
dir le débat avec de meilleures chances de suc-
cès. On a indiqué que M. von Ribbentrop avait
mission de promettre aux Anglais le retour du
Reich à Genève à certaines conditions, de lais-
ser entrevoir une réduction importante des
formations paramilitaires, enfin d'offrir des
concessions de nature à faciliter un accord.
Rien de tout cela n'a reçu confirmation. M. von
Ribbentrop a déclaré lui-même qu'il avait voulu
simplement prendre contact avec les principaux
ministres anglais, mais que la position de l'Al-
lemagne n'était en rien modifiée et que les re-
vendications du Reich subsistaient entièrement.
Quel était alors l'objet de sa démarche ? Tout
porte à penser qu'il ne s'agissait pas d'autre
chose que de l'éternelle mj-nœuvre allemande
tendant à désolidariser l'Angleterre 'd'avec la
France ei,. à préparer la formation d'un front
anglo-germano-italien, chimère à laquelle l'Al-
lemagne a constamment sacrifié les plus sûres
réalités..
Le moment était particulièrement mal choisi
pour tenter une telle opération diplomatique,
alors que l'opinion britannique s'affirme cha-
que jour plus hostile au régime hitlérien, qu'un
esprit anglais ne peut concevoir, et que l'Angle-
terre se sent directement menacée par le ren-
forcement de la marine de guerre du Reich et lp.
création d'une puissante aviation allemandé.
A Londres, on semble avoir très bien compris
le jeu par trop simpliste de M. von Ribbentrop,
qui n'avait pas d'autre objet que de travailler
l'opinion britannique en faveur de la cause de.
l'Allemagne et de rejeter sur la France des res-
ponsabilités qui incombent au seul gouverne-
ment de Berlin. L'homme de confiance du chan-
celier Hitler a trouvé un accueil extrêmement
réservé au Foreign Office et ailleurs. D'une ma-
nière générale, les Anglais semblent enclins à
considérer que le déplacement de M. von Ribr
bentrop fut inopportun ou du moins inutile.-
Leur réplique aux arguments qu'a pu faire.
valoir le porte-parole du « Führer » était d'ail-
leurs facile si le Reich croit avoir des droits
spéciaux à défendre, il n'a qu'à retourner à 1^.
conférence et à reprendre sa place à la Société
des nations pour les faire valoir. Mais le retour.
à Genève est précisément la seule solution que
le chancelier Hitler, prisonnier de ses propres
fautes, entend écarte-r.
L'échec de M. von Ribbentrop à Londres dôri
riera-t-il à réfléchir à Berlin ? Ce qui est cer-
tain, en tout cas, c'est que les préoccupations
des Anglais sont maintenant ailleurs. Elles
portent entièrement sur le problème de la sé-
curité. Le discours prononcé par M. Stanley
Baldwin à l'association féminine du parti
conservateur est significatif à cet égard. Le
lord président du conseil a déclaré que si
un accord sur le désarmement se révèle im-
possible, l'Angleterre ne se contentera de rien
de moins, en matière d'aviation, que d'une posi-
tion d'égalité avec la plus grande puissance
capable d'attaquer les côtes anglaises. C'est, on
le voit, l'annonce d'un puissant effort pour ren-
forcer la défense du Royaume-Uni, et les
Anglais n'oublient pas que c'est 1 ''Allemagne,
qui les contraint, ainsi a mieux assurer leur
sécurité.
DÉPÊCHES DEJ.' ÉTRANGER
Berlin, 12 mai.
Sollicité par le statthalt'er du Reich dans le pays
de Bade, d'assister, le 12 mail, à l'inauguration du
musée badois de l'armée, à Carlsruhe, le président
von Hindenburg a répondu que son grand âge ne.
lui permettait pas de donner suite a cette invi-
tation,
Berlin, 12 mal,
Le docteur* Frick, ministre • de d'intérieur du
Reich, a chargé le général de police Daluegge de
la direction du nouveau service de police au mi-
r.istère de l'intérieur du Reic'h.
Madrid, 12 mal.
M. Alcala Zamora, président de la République,
est parti au débjUt) de J'après-midi pour Priego,
son village, natal, «où il passera quelques jours. •
Lisbonne, .12 niai.
M. Jessé Curély, ministre de France, a remis
'au nom du gouvernement français, les insignes
de grand-officier de la Légion d'honneur à M. ,T.
Caeiro da Mata, ministre des affaires étrangères,
et à M. S. F. Ramires, ministre, du commerce et
de l'industrie.
LE CONGRÈS RADICAL
II semble que la plupart des radicaux assem-
blés à .Clermont-Ferrand aient le sentiment
des responsabilités qu'ils assumeraient si, par
les décisions qu'ils vont prendre, ils contre-
carraient l'œuvre du redressement national,
entreprise par M. Gaston Doumergue avec le
concours des représentants de tous les partis
non révolutionnaires, et notamment du parti
radical. Des rumeurs et des cris ont signifié
que cette collaboration à l'effort ministériel
mécontente et même indigne quelques mili-
tants » qui conçoivent le radicalisme comme
un des éléments du socialisme. Mais le bruit
ne fait pas la raison, ni même la force.
M. Edouard Herriot paraît bien avoir été le plus
fort quand il a parlé raisonnablement, quand
il a dit ̃:̃ « J'ai donné ma parole d'honneur,
appuyé par le parti à l'unanimité; j'ai le res-
pect de la parole donnée. Si le parti tout entier
me demandait de. la retirer, j4 ne la retirerais
pas. »! Mais si le président dû parti radical a
eu juste notion de l'honneur personnel, son
parti pouvait estimer que des considérations
politiques autorisaient les radicaux à revenir
sur les résolutions prises précédemment. Ce ne
sera évidemment pas pour, épargner à M. E.
Herriot un parjure que le parti radical déci-:
dera, aujourd'hui ou demain, de soutenir loya-
lement le gouvernement d'.union nationale; ce
sera surtout parce qu'il juge qu'il est honnête,
qu'il est prudent, qu'il est ,« radical »; d'agir
ainsi. Ou le radicalisme exprime une des
façons d'être républicain et d'être Français, ou
il n'est qu'une conception révolutionnaire. Le.
radicalisme est, selon ses traditions et ses
proclamations successives, à la fois patriote
et républicain. Il ne saurait donc, sans décider
qu'il -a changé de nature et de programme,
faire autre chose qu'il ne fait en prenant sa
part des travaux difficiles du gouvernement
d'union nationale.
Le congrès radical à encore d'autres préoc-
cupations. Il veut d'abord s' « épurer » lui-
même. Il a prononcé, dès hier, l'exclusion de
deux parlementaires compromis dans les scan-
dales actuels. On fait prévoir, que d'autres sen-
tences sévères seront encore rendues. Il n'ap-
partient qu'aux radicaux d'en connaître et d'en
décider, et il serait indiscret d'intervenir, même
par-de simples commentaires, dans les délibé-
rations de ce tribunal que constitue, en ces'
conjonctures, le congrès de Clermont-Ferrand.
M. Albert Bayet, qui a été chargé d'établir la,
procédure de, cette « -épuration », a employé
une formule historique, solennelle et rigou-
reuse, en invitant les congressistes à punir les
défaillants et les fautifs Il faut, a-t-il dit,
que la vertu soit à l'ordre du jour. » Des cou-
pables seront donc châtiés par leurs pairs. II
faut souhaiter que ces jugements comportent
un enseignement et une morale dont auront à
profiter les mœurs de tous les clubs, de tous
les comités, de tous les groupements politi-
ques, et que « solidarité » n'y soit plus jamais
synonyme de « complaisance ». Il faut, en
effet, que la vertu soit à l'ordre du jour, mais
pas seulement lorsque de fâcheux événements
révèlent publiquement qu'elle a été sacrifiée
à l'intérêt personnel.
Ainsi, le parti radical sortira du congrès de
Clermont-Ferrand tel qu'il y est entré, c'est-à-
dire résolu à ne rien changer à ses disciplines
présentes. C'est du moins ce que prévoit la
République, où une partie des radicaux expri-
ment leurs vues. On y lit ce matin qu'il ne faut
pas s'attendre a voir congrès radical donnii
une approbation éclatante à là politique de î
pP a s ntar ~es d'hasl~ ~w
trêve », pas. plus que « des marques d'hGsti-*s
lité ». Les congressistes se borneront à donner
« une sorte de consentement dans l'abandon à
ce qu'on considère n'avoir pu être évité ». Qu'il
soit permis de représenter à la Républtque que
ce consentement-là n'est pas franchement répu-
blicain. Il manque de loyauté et de courage.
« Consentir », « dans l'abandon »n à ce qu'on
ne peut empêcher, c'est guetter la première
occasion de trahir. Y a-t-il vraiment des radi-
caux qui nourrissent ces desseins ? Si oui, ils
ne sauraient « mettre la vertu à l'ordre du jour »'
sans hypocrisie et sans duplicité. Car être ver-
tueux ne signifie pas seulement qu'on ne tra-
fique pas d'un mandat parlementaire; être ver-
tueux exprime encore qu'on ne tient pas la
politique pour un jeu de dés pipés, qu'on s'in-
terdit d'avoir recours à l'intrigue perfide pour
parvenir au but qu'on s'est fixé. Si le parti radi-
cal participait à l'union nationale avec cette
restriction mentale, il se déshonorerait et jus-
tifierait le mépris que lui témoignent les partis
manœuvrant à sa gauche. Nous voulons croire
que la République a porté-sur le parti radical
un jugement téméraire et qu'en le. montrant
insincère, et même. cauteleux, elle l'a, calomnié.
DESCJ-UFFRES
Là « Société d'études et d'informations écono-
miques j>~ poursuit à travers les budgets son,
étude Consacrée à la progression! des dépenses,
parcomparaison à l'année 1913. Sous ce titre
«Des chiures M, nous avons commenté (1) les
résultats de ce remarquable travail en ce qui
concerne. l'éducation nationale. Un nouveau
fascicule, non moins intéressant, embrasse l'en-
seignement technique.
Enseignement de date récente; car il doit son
statut décisif à la loi Astier-Cuminal du 25 juil-.
let 1910. En 1920, les services administratifs en
sont transférés du ministère du commerce à
celui de l'instruction publique; en 1925, un plan
quinquennal de réformes est dressé; l'article 25
de la loi du 13 juillet établit, la même année, la
taxe. d'apprentissage inscrite au budget de l'Etat
afin de contribuer au développement de ce ser-
vice qui forme des ouvriers qualifiés et des ca-
dres-expérimentés pour l'industrie et le com-
merce. Au sommet, le Conservatoire national
des arts et métiers; fondé en 1794 par la Con-
vention, maintenant université véritable d'arts
et sciences appliqués; et une Ecole normale,
créée eni 1912, dont les promotions sortantes ne
cessent de croître (59 élèves en 1928, 65 dès
1929) et qui prépare les professeurs de l'ensei-
gnement technique à tous les degrés. Le degré
supérieur est représenté par les écoles natio-
nales des arts et métiers: 6 en 1919, elles avaient
1,051 élèves; 7 depuis la transformation de
l'Ecole technique de Strasbourg en 1925, elles en
avaient 2,264 en 1928 et 2,126 en 1931. Joignez
deux écoles assimilées celle des arts et indus-
tries textiles de Roubaix, dont l'effectif tombe, il
est vrai, -.entre, 1928 et 1931, de 817 à 621, et
l'Ecole supérieure de [céramique de Sèvres, qui,
au contraire, a passé de 22 élèves à 24. Dans le
mitan, les écoles nationales professionnelles
(6 en 1919 et 17 en 1933) d'où sortent futurs-
contremaîtres, chefs d'ateliers (ou aussi com-
merçants et hôteliers), et dont la population a
varié comme il suit en 1928, 3,446 en 1931,
3,931. Il y faut ajouter les deux écoles d'horlo-
gerie Besançon et Cluses (318 élèves en 1928,
347 en 1931). Au degré inférieur, les écoles pra-
tiques et écoles de métiers qui ont pour pro-
gramme l'apprentissage avec un complément
d'instruction générale 82 en 1920, elles sont à
présent 242, y compris les 13 établissements des
provinces recouvrées. Leur effectif, qui était de
32,077 unités em 1928, fléchissait un peu. en 1931,
à 31,149. Enfin et en bref, outre l'orientation
professionnelle, des cours professionnels, 250 en
1919 et 784 en 1933 (172,550 élèves dès 1929), et
tout un réseau d'enseignements fixes pu am-
bulants. Ici, développement à souhait.
En regard, les dépenses relatives à l'enseigne-
ment technique figurent, au budget de 1913,
pour un total de 9 millions 875,000 francs; en
1933, elles s'élèvent à 215 millions 812,000
coefficient d'augmentation 21,8. La réduction à
204 millions 451,802, pour 1934, n'empêche pas
de considérer qu'en, l'espace de huit années la
dotation a bondi, comme on dit en Bourse, de
94 millions 212,000 en 1926, à 226 millions
883,000 en, 1932. De la sorte, malgré deux frei-
nages successifs, dans les budgets de 1933 et
1934, on est conduit à chercher les causes prin-
cipales de cette ascension, sinon de cette en-
volée. Et tout en tenant compte de l'accroisse-
ment de la clientèle, on les trouve d'abord dans
l'élévation des traitements et quelque gonfle-
ment des effectifs du personnel. Les traitements
em 1913 se chiffraient par 5,364,000 francs et
118 millions en 1933 soit un coefficient de
22,2. Pour ce qui est des indemnités, de 29î,000
elles sont montées à 11 millions 101,000 coeffi-
cient 37,3. Faute de place et dans la crainte de
fatiguer nos lecteurs par l'aridité des chiffres,
nous nous bornerons, pour chaque étage, à quel-
ques exemples significatifs. Au Conservatoire
des arts et métiers, dans l'année qui précéda la
grande guerre, 17 professeurs touchaient une
moyenne de 10,000 francs; ils sont 24 à présent,
et touchent'72,000 francs; l'unique préparateur
percevait 2,300; ils sont 10 à cette heure, qui
reçoivent, en pratique, un traitement moyen de
22,770 augmentation moyenne de 12,1. On pré-
voit, d'autre part, en 1933, la création de 33 em-
plois de dames vérificatrices auxiliaires; en
1934, on prévoit la suppression de 133. Le bud-
get de l'Ecole normale en 1913. porte un crédit
de 25,000 partagé entre 5 maîtres de confé-
rences aujourd'hui, les cours reviennent à
391,000 francs.
Dans les écoles provinciales d'arts et métiers,
directeurs, sous-directeurs, économes, concier-
ges et maîtresses lingères atteignent tous le pla-
fond fixé pour leur emploi. Celle de Paris
laisse apparaître, par rapport à 1913, des coef-
ficients d'augmentation de l'ordre suivant
directeur, de 4,5 à 7,5; ingénieur de 8,1 à 10,3;
professeurs de 8,1 à 13,6 (4,400 francs en 1913,
de 36,000 à 60,000 en 1934). Aux écoles hstio-1
nales professionnelles, le baromètre marque
une hausse, pour ne citer .que quelques cas, de
3à"S,2, de 5,5 à 8,6, de 8,7 à 11,8. Encore celle de
Saint-Ouem bénéficiert-elle de traitements plus
élevés. Les directeurs des écoles d'horlogerie
atteignent le coefficient 7,3 et les professeurs de
théorie à Cluses, de technique à Besançon, 9,4.
Quant aux écoles pratiques, les directeurs vont
de 6,2 à 18,3 et les professeurs de 8 à 10,5. D'où
il résulte, à la vérité, que si cet enseignement
est jeune, ses coefficients sont adultes.
N'entrons pas plus avant dans le détail des c
chiffres et venons-en aux réflexions que sug-
gère cette analyse.
Après elle un problème se pose ou plutôt
Après cela, un problème se pose ou plutôt
s'impose à la décision gouvernementale. La
crise économique, au rebours des écrits de
Malherbe, ne durera pas éternellement. Et la
transformation du monde moderne assigne une
place considérable à l'enseignement technique.
11 représente, en effet, une des deux faces de la
civilisation, l'autre face, plus essentielle en-
core, si l'on ose ainsi parler, étant la préparation
des valeurs spirituelles. Les récents décrets-lois,
(1) Le Temvs, 14 .et 22 décembre 1933, 2-3 jaur
Vier 1934,
3a:?. s le commun besoin, ont "allégé les" chargés
ip F instruction publique; d'autres doivent inter-
venir pour une réorganisation systématique et le
retranchement des organes parasites. f)r, à lire
le budget de 1934, on s'avise qu'jaux 118 mil-
lions absorbés par les traitements de l'ensei-r
gnement technique qui englobe 200,000 élèves
snviron, se juxtaposent 108 millions exigés par
!es traitements du primaire supérieur qui,durant
['année scolaire 1932-1933, réunit 90,616 élèves
exactement. Et l'on se persuade, de surcroît,
que celui-ci double celui-là. Cette année même,
la commission des finances refusait uri crédit
de plus demandé par le précédent gouverne-
ment à titre d'encouragement à l'organisation
liatérielle de V enseignement professionnel dans
les établissements publics d'enseignement pri-
maire supérieur.
La vérité est que ce compartiment, à cette
heure, fait doublement double emploi. Dû à une
cpneeption justifiable alors que l'école primaire
était isolée et la préparation professionnelle
dans les limbes, il offre aujourd'hui l'image
d'une superfétation hybride par ses sections
industrielles, commerciales, hôtelières, etc., en-
seignement professionnel à côté; par ses sec-
tions générales, enseignement secondaire en
perspective. La formation pratique y est rudi-
mentaire, la culturg utilitaire encyclopédique
et sans racines. On distingue mal sa raison
d'être à présent que l'école communale dé-
bouche sur le lycée où les sujets intelligents et
pauvres accèdent de plain-pied, où les institu-
teurs de demain recevront leur armature intel-
lectuelle avec les autres éducateurs. Et il ne
devient pas moins malaisé d'admettre que l'en-
seignement professionnel, d'orès et déjà en
possession de ses méthodes, ne puisse instruire
fe'vfxiUirs .coinmîs- des postes comme il prépare"
"f'cŒurs .úommi'S'dt)~postes comme Il prepare'
les employés de magasin. Le maintien quand
même d'un entredeux en porte-à-faux consti-
tuerait un péché contre l'économique autant
que contre la démocratie. Au surplus, ainsi que
nous le disait un jour le recteur Paul Appell,
bon républicain autant que grand savant,
qu'est-ce qu'un enseignement primaire et 4 la
fois supérieur?
LES PLUS DOUX CHANTS
Tintements argentins.des verbes en mi Volutes
mélodieuses des participes passifs 1 Et vous,
voyelles contractes; accords, bouquets sonores.
Vous nous fûtes inquiétants; mais c'était en nos
ans d'innocence; ou à la saison des premières
amours. L'amertume s'est évanouie et le miel est
resté. Quand on ouvre un poète grec, et qu'on eh
discerne encore le sens, on ne peut plus s'en
séparer. C'est une. magie; un envoûtement. Vayez
André Thérive, et son Anthologie non classique
des anciens poètes grecs, dont M. Jacques Boulen-
ger nous di'sait les harmonieuses truculences. On
croit le voir, sous, la lampe, se récréant, loin du tas
des livres nouveaux. Caressant ligne à ligne les
textes rares d'Aristée de Proconèse et de Phi-
loxène de Cythère. Oh. 1 Les jolies syllabes, entre .e
lesquelles passent l'air et la lumière; et les petites
notes grêles du barbitos. Songeries ? Mais oui.
Nous savons bien que si- Pindare et Sophocle nous
entendaient lire leurs vers, ils tendraïeat-lioreille,
fronceraient- le, sourcil, et nous, demanderaient, en
bon grec, .ce que nous voulions dire. Qu'importe 1
N'est-ce pas toujours de la musique?
Saluons la naissance d'un nouvel hellénisme
moins géométrique que l'ancien; moins académi-
que plus vivant que l'hellénisme de musée de
Mme Dacier et de M. Patin. Ce sera toujours l'évo-.
cation d'une humanité moins tourmentée que la
nôtre moins « économique » moins serrée dans
ses vêtements; qui n'ajoutait pas de bruits inutiles
aux bruits de la terre, et du vent; d'un temps où
la nuit était faite pour dormir; et où il n'y avait
point de courts-circuits.
Les amoureux de la Grèce ont failli passer pour
des ennemis de la Cité nouvelle. Ils se serrent les
uns contre les autres, comme les initiés d'une reli-
gion suspecte, ou de superstitions ridicules. Qu'il
leur arrive d'être ridicules, c'est bien possible. Ils
le sentent eux-mêmes. Mais leur. naïveté même
leur est agréable. Je sais quelqu'un qui s'obligea,
dans un restaurant d'Athènes peuplé' de grosses
mouches, à boire jusqu'au fond, tout seul, une
bouteillle de blanc res-inato, sans faire la grimace.
Il pensait boire à la coupe du Banquet; et il n'eut
point mal au cœur.
Musique des îles Deux hellénistes, MM. Jean
Larnac et Robert Salmon, viennent de publier un
petit ouvrage sur Sappho. Sujet ardu; chaussée
glissante. 'Mais que ne peut-on dire, dans la mu-
sique des noms grecs ? Ils ont découvert une
solution ingénieuse, dont ils ne fournissent pas, on
le.craint, une démonstration sans ifissure, aux pro-
blèmes que posent la biographie et la, réputation
de la poétesse.
Mais est-il tien dg plus charmant que ie<$
hypothèses ? Surtout quand, au lieu d'un os
de plésiosaure, on manie dès fragments de
Sàppho. D'après eux, Sappho, à l'âge de douze ans,
devint prêtresse d'Aphrodite. L'enfant brune, ou
pareille « à une olive », ce qui est mieux dit
qu'olivâtre, vêtue du chiton flottant, sans cein-
ture, avait pour tâche de laver, parfumer, d'ha-
biller, de suivre dans les processions, le xoanon
de la déesse, l'horrible statue de bois doré, aux
larges hanches, aux oreilles éléphantesques, qui
symbolisait la joie d'aimer. Ainsi, toutes les
erreurs qu'elle a pu commettre eurent une double
origine le serment qu'elle prêta de s'écarter tou-
jours du mâle brutal et, d'autre part, l'ardeur,
religieuse, dont la grande Aphrodite la .tourmen-
tait.
Cette solution coquette donne tout apaisement.
Mais on n'était déjà, plus très sévère à la plus
mélodieuse des 'lyriques S Pour toi, ô Dika,
prends un rameau de bel anis, et, de tes douces
mains, tresses-en une couronne autour de ta
jolie chevelure. » Atthis, Dika, Gongyla, Anac-
toria. Tous les mots grecs d'un livre sur Sappho
forment un hymne ensorcelant. Erésos, Mytilèné,
Syracuse. Est-ce que cela. ne fond pas sur les
•lèvres, comme des fruits ? Sappho avait trois
frères, Charaxos, Larichios et Eurygios. Sa mère
était Cleis, son père Scamandronymos. Cleis, aussi,
fut le nom de sa fille, qui naquit voilà deux mille
cinq cent vingt-cinq ans. Car Sappho se maria, on
est tenté de l'oublier, avec un riche marchand de
vin d'Andros, Kerkylos. Elle l'épousa au mois Ga-
jjnélion. « J'ai une fille, une jolie petite fille, aussi
délicieuse qu'un bouquet de chrysanthèmes ma
chèçe Cleis, que je n'échangerais, pas contre toutes
les richesses de Lydie. » '• ̃•"• .'̃-̃'
'^Pourquoi. chercher des plaisirs nouveau*? En
écoutant ces chants, on 'deviendrait apostat à la
musique des usines. Le cœur se fond. La vie
redeviendrait tolérable si l'on pouvait se griser de
grec une heure par jour. Qu'on le prononce comme
on pourra. R. K;
LES DETTES DE GUERRE
Le New York Times du 12 mai, dans un édi-
torial consacré aux dettes 'de guerre, enregistre
«, l'immense ressentiment et l'appréhension qu'a
déjà produits la loi Johnson >>.
Tandis que le sénateur Johnson tient la Grande-Bre-
tagne pour coupable de s'être livrée à une farce
frauduleuse », écrit ce journal, un journal anglais
traite l'Amérique de « brigand de grand chemin». De
tels échanges dé pavés à travers l'Océan ne sont pas
d'un bon augure. Ils rendront cependant les éléments
les plus sensés des deux pays plus impatients que
jamais d'arriver à un règlement raisonnable et définitif
d'une 'querelle qui devient de plus en plus fâcheuse.
Il s'agit actuellement d'une de ces questions qui, tant
qu'elles ne sont pas réglées, tro.ubleal inip.itpyabjejneat
le xep.os âes aatioass
LE PROBLEME DU DÉSARMEMENT
Un exposé dé ffi. Baldwin
Au cours d'un meeting organisé à Londres par
les associations féminines du parti conservateur,
M. Baldwin, lord-président du conseil, a, passé
en revue la politique du gouvernement actuel et
s'est particulièrement expliqué sur le problème
du désarmement et la prochaine réunion de la
conférence. de Genève.
Les seules propositions qui subsistent devant la con-
férence, a-t-il dit, sont celles que le gouvernement
britannique a formulées. Il est impossible de dire en
ce moment si elles aboutiront ou non. Nous le saurons
avant longtemps, mais la déclaration que j'ai faite
réoemment aux Communes au nom du gouvernement
demeure.
J'ai dit et je redis que si l'on ne parvient pas à un
accord et que si, en particulier, un accord se révèle
impossible au sujet des armements aériens, notre pays
ne se contentera de rien de moins, en matière d'avia-
tion, que'de l'égalité avec la plus grande puissance
capable d'attaquer nos côtes avec ses'appareils, Je sais
parfaitement que les avis peuvent différer sur le mo-
ment où il conviendrait d'entreprendre l'exécution de
ce programme. Je vous demande de faire confiance
au gouvernement car il désire tout autant que vous la
sécurité de notre pays. et la paix du monde. Si cer-
tains d'entre nous sont trop vieux pour se battre, nous
n'avons cependant pas plus que vous le désir de voir
nos fils se battre. J'associe la défense du pays et la
convention du désarmement et je vous demande, à
cette heure où, pour notre bien ou pour notre mal,
nous affrontons ce qui semble être la dernière phase
des négociations du désarmement, d'accorder votre
confiance au gouvernement et d,e lui donner le plein
appui de l'opinion publique.'
De son côté, Sir 'John Sinion, parlant devant
l'association libérale de Spen Valley, Heck-
molitwieke, a fait allusion au désarmement. Il a
déclaré qu'à son avis le projet de convention
britannique et le mémorandum supplémentaire
du 29 janvier dernier constituaient toujours les
bases les plus sûres d'un accord.
La défense aérienne de l'Angleterre
Notre correspondant particulier de Londres nous
téléphone samedi matin 12 mai
L'opinion anglaise accueille favorablement la
déclaration faite hier par M. Baldwin au meeting
des femmes conservatrices à l'Albert Hall. Ses pa-
roles paraissent correspondre non seulement à
l'unanimité du sentiment des ministres anglais,
mais encore aux tendances de la majeure partie
des électeurs, convaincus que l'Angleterre ne doit
pas rester dans une situation d'infériorité en ma-
tière d'aviation. On peut conclure de cet état
d'esprit que les représentants de la Grande-Bre-
tagne à Genève, à la fin du mois de mail, propo-
seraient probablement la conclusion d'une con-
vention sur les points où les principales puis-
sances sont d'accord et 'que, dans tous les cas, ils
insisteront pour. ja. réalisation de la parité
aérienne.
Divers journaux soulignent l'importance 'de la
défense aérienne pour l'Angleterre. Le Daily Tele-
graph par exemple déclare que « l'air est devenu
notre ligne de défense comme autrefois la mer ».
Toutefois, le correspondant parisien du Times
observe, que la sécurité terrestre est aussi impor-
tante pour la France que la sécurité aérienne.
pour l'Angleterre et qu'il faut des garanties pouu
une comme pour l'autre. Le Morning Post déve-
loppe la thèse des ultraconservateurs en repro-
chant au gouvernement de M. MacDonald d'avoir,
attendu jusqu'à présent dans l'espoir d'une con-
vention qui s'avère, irréalisable, et > en réclamant
yen!ioll (lui1 i des :en"réoktmant
1 augmenfatiton immédiate, des armements anglais.
t
De son côté le correspondant à Londres de l'agence
Havas téléphone
On dément, dans les cercles autorisés britan-
niques, la nouvelle publiée à l'étranger annonçant
que 1 Angleterre a l'intention de proposer un-plan
de désarmement aérien « comportant toutes les
garanties d'exécution et les sanctions que demande
la France en échange d'un désarmement » La
situation demeure telle qu'elle a .été précédem-
ment définie. Le cabinet fera à nouveau le point
au cours du conseil des ministres de mercredi
prochain.
La mission de M. von Ribbentrop
'« Ma visite à Londres avait un but de pure in-
formation, a déclaré M. von Ribbentrop, dans un
entretien avec un représentant de l'agence Reuter.
Elle devait me permettre un contact personnel
avec le gouvernement anglais à l'effet d'échanger
des vues sur la situation du désarmement et avec
le désir commun d'arriver à une solution satisfai-
sante, » PI a ajouté
En ce qui concerne les revendications du gouver-
nement allemand, il n'y a aucun changement; ces re-
vendications constituent un minimum et sont tenues
pour raisonnables par la plupart des pays du monde.
J'ai foi en le bon sens du vieux monde pour réaliser en
fin de compte une convention de désarmement.
LA DÉFENSE NATIONALE EN BELGIQUE
Un discours de M. Devèze
{Par téléphone, de notre correspondant particulier)
Bruxelles, 12 mai.
L'amicale des officiers de la campagne 1914-
1918, que préside le comte Adrien Van der Burch,
a donné un déjeuner en l'honneur du capitaine
de réserve Albert Devèze, ministre de la défense
nationale et promoteur de l'organisation défensive
du pays à ses frontières mêmes. Plusieurs cen-
taimes d'officiers de réserve ont participé à cette
manifestation qui a la portée d'une réaction con-
tre les tendances qui se manifestent dans 'certains
milieux à en revenir au projet Galet-Nuyten de
1930 et à retarder les mesures d'exécution décret
tées par le ministre pour, les travaux à la fron-
tière de l'Est.
Le' comte Adrien Van der Burch a rendu un
̃éclatant hommage à M. Devèze et a dit la volonté
du pays et des vétérans d'assurer la défense effec-
tive de tout le territoire à la frontière de l'Est,
en liaison avec les alliés de la Belgique dans la
grande guerre. M. Devèze, dans sa réponse, a rap-
pelé qu'il a gagné ses étoiles d'officier sur le
champ de bataille et qu'il a avec tous ses cama-
rades une étroite communauté de souvenirs, de
volontés et d'espoirs identiques. Dès 1920, il s'est
préoccupé de réorganiser la défense nationale, En
1923, il fit voter la loi portant le service de 12 à
14 mois et assurant la vie des divisions de ré-
serve, mais cette loi ne répondait pas à son pro-
gramme complet, et il a remis sa démission au roi.
M. Devèze a rappelé que lorsqu'il a repris la di-
rection du département de la défense nationale,
en décembre 1932, il a mis comme condition d'être
en mesure d'assurer la défense du territoire sur
la rive droite de la Meuse par la construction d'ou-
vrages dans le Luxembourg et par la fortification
du plateau de Herve. Les études en cours por-
taient sur les ouvrages à construire, sur le type
et Femplacesnent des abris. Le ministre a tenu
personnellement la main à ce que études et tra-
vaux fussent conduits énergiquement. C'est au
cours de ces études qu'il lui est apparu indispen-
sable de demander 759 millions de crédits complé-
mentaires pour organiser défensivement la fron-
tière de l'Est et y établir en permanence des uni-
tés de couverture.
J'ai vérifié la nécessité des crédits, a-t-il dit. Le pre-
mier ministre les a acceptés. Le gouvernement s'y est
rallié sans contestation, et sa décision a été consacrée
sous- la présidence du roi Albert. Au Parlement, l'accord
national s'est manifesté. Dans les deux Chambres, la
résistance de l'opposition n'a été que de surface; on a
reconnu l'opportunité de ce grand sacrifice; les hommes
politiques ont fait leur devoir. Je me suis mis tout de
suite à l'œuvre. Je ne peux préciser publiquement où
nous en sommes; ce qui vous intéresse, c'est de savoir
ce qui reste à faire. Il faut d'urgence prendre les der-
nières résolutions, faire aboutir les dernières études,
arrêter les derniers détails, au sujet des ouvrages de
Hervé, afin d'être en mesure de passer aux adjudica-
tions là où elles ne sont pas encore ordonnées. Il faut
réaliser vigoureusement en décision et en exécution ce
qui. demeure encore à faire dans le Luxembourg. Par
la création du 14° régiment de ligne il faut remplacer
dans leurs divisions actives et de réserve le 10. de ligne
et son succédané. Devenus chasseurs ardennais, ces
xjSgimenis epnt dé.gniUvement affectés à une mission
spéciale celle de défendre l'immerase trouée qui,
de la Vesdre à Arlon, subsisterait dans la cou-
verture du territoire en collaboration avec tes forces
amies qui, sur notre -.appel, viendraient aussitôt a notre
aide et qui ne pourraient prendre place en ligne que
sous leur protection. Pour cela, pas un instant à per-
dre. Les divisions de l'armée de campagne doivent être
équivalentes pour être interchangeables. Jusqu'au mo-
ment où six classes de milice auront passé par de
14° de ligne les solutions que l'on adoptera seront donc
nécessairement des conditions de fortune acceptables
si elles sont temporaires.
Après avoir souligné l'importance des mesures
qu'il préconise pour permettre l'application de
l'accord défensif franco-belge et assurer la dé-
fense effective du territoire, M. Devèze a dit qu'il
ferait son devoir jusqu'au bout.
La ligne directrice que je me suis tracée je la suivrai
jusqu'au bout; c'est l'unique raison d'être de ma pré-
sence au ministère. Elle ne peut être accomplie que
dans l'union disciplinée, la collaboration étroite et cor-
diale dans le domaine de leurs attributions de toutes
les autorités compétentes. Elles requiert une atmosphère'
de calme et de confiance, la certitude que toutes les
forces convergent vers le même but. J'y consacre mes
efforts, soucieux de l'autorité dont je suis dépogitaire.-
et en rendant hommage aux officiers qui m'assurent
leur concours technique indispensable.
Le ministre, après avoir dit que le moral de
l,'armée est splendide, et rendu hommage aux offia
ciers belges de troupe et au cadre des sous-offi-.
ciers, a déclaré que, si quelque nouveau péril me-:
naçait le pays, l'armée nouvelle serait digne de'
l'ancienne et saurait faire son devoir.
TRIBUNE LIBRE
L'urgente restauration des valeurs spirituelles
La crise morale, qui est à l'origine de la plu-
part des maux dont nous souffrons, n'est que
l'un des aspects d'un fait beaucoup plus gêné-,
rai le déclin. dans l'estime publique des va-;
leurs spirituelles.
J'entends par là la méconnaissance de la
primauté de l'esprit, le dédain des qualités mo-
rales, l'affaiblissement et, pour beaucoup, la
disparition du sentiment religieux, voire même
de toute inquiétude touchant nos destinées,
l'absence d'idéal et, comme corollaire, la con-
damnation, pour le moins tacite, je ne dis pas
seulement de l'esprit de sacrifice, mais de dé-
vouement, voire du simple désintéressement.
En dépit de nombreuses et vaillantes excep-
tions, ce déclin des valeurs spirituelles est
incontestable.
Sous l'influence du matérialisme qui, au der-*
nier siècle, a cru pouvoir rayer l'esprit du cycle
de nos préoccupations, le plus grand nombre
s'est habitué à ne plus faire confiance qu'aux
sensations et, par suite, à se cantonner dans
l'unique souci du bien-être. D'autant que les
applications scientifiques indéfiniment multi-
pliées, en même temps qu'elles en augmen-
taient le nombre, nous mettaient en mesure de
satisfaire tous nos besoins.
De là cette course effrénée à l'argent à la-
quelle nous assistons depuis la fin e la guerre,
la seule considération des avantages matériels
qu'il procure, fût-ce en violation des règles mo-
rales les plus élémentaires, l'estime dans la-
quelle est tenue lajscience elle-même unique-
ment" pour ses applications, pratiques que d'au-
cuns confondent avec le progrès. C'est ainsi
que la poursuite de l'utile l'emporte, de nos
jours, dans l'admiration de tous sur la recher-
che désintéressée du savant ou de l'artiste^
qu'une pure passion anime.
De son côté, le développement hypertrophi-
que du machinisme, chaque nation ayant pré-
tendu se. suffire à elle-même et inonder les
autres de ses produits, a non moins travaillé
contre l'esprit en transformant l'ouvrier en au-
tomate, que la taylorisation achève.
La technique, si l'on n'y met bon ordre, est
en train, en effet, d'anéantir tout ce qui donne'
du prix à l'existence la pensée, le sentiment,
la liberté, en un mot la vie de l'esprit. A
l'homme doué de sensibilité, de raison et d'ini-
tiative, elle tend à substituer non pas seulement
Vhomo œconomicus producteur et consomma-
teur, mais l'homme-machine. A cet homme,
elle ravit sa personnalité et tend, comme l'a
montré le film « Metropolis », à n'en faire
qu'un rouage d'un immense mécanisme.
Les loisirs mêmes que lui procure la ma-
chine ne permettent pas à l'homme moderne de
récupérer son âme; au sortir du bureau, de
l'atelier ou de l'usine, il est de nouveau happé
par elle sous la forme des innombrables dis-
tractions que lui offrent les dernières inven-
tions mécaniques, telles que l'automobile,
l'avion, le cinématographe et là T.S.F.
Loin de nous faire rentrer en nous-mêmes
et de nous inviter à réfléchir, ces divertisse-
ments très violents ou rapides suppriment i us-
qu'à la moindre velléité de vie intérieure. Elles
nous 'tirent, en quelque sorte, hors de nous-
mêmes, sans compter qu'elles émiettent notre
attention, sollicités que nous sommes en sens
divers par leurs multiples appels. Si nous y
ajoutons les effroyables complications de la vie
moderne auxquelles le cerveau humain a beau-
coup de peine à s'adapter, on comprendra que
les possibilités de méditer ou, pour reprendre
le mot de Barrès, de faire oraison, nous soient
enlevées. Que comptent dans le breuhaha de;
nos jours, qu'entrecoupe la sonnerie du télé-
phone, les valeurs spirituelles ?.
Aussi bien, le corps, auquel nous consacrons
les soins raffinés que commandent l'hygiène et
les sports, retient nos meilleures complai-
sances au détriment de l'esprit, dont le prestige
tend à diminuer, sinon à disparaître aux veux
de nos contemporains, comme s'il n'était pas
le principal, que dis-je ? la seule réalité dont
nous soyons sûrs, et peut-être le fond des
choses, l'essence même de l'univers, le com-
mencement et la fin.
On ne peut tourner plus manifestement le
dos à la vérité. Au lieu de nous servir de là
machine en vue de permettre à tous de se cul-
tiver, d'enrichir leur personnalité, de se déve-
lopper moralement et intellectuellement, nous
nous sommes asservis à elle. A notre bien-être
ou à ce que nous prenons pour tel, nous sacri-
fions nos biens les plus précieux et nos joies
les plus hautes. Nous avons ravalé l'homme à
n'être plus conduit que par le goût du plaisir
ou, ce qui revient au même, par l'appétit du
gain. Autrement dit, nous nous sommes tous,
plus ou moins, laissé devancer par le progrès
mécanique. L'homme moderne n'est pas, psy-
chologiquement parlant, à la hauteur de ses
inventions, en ce sens qu'il n'a pas su les do-
miner, ce qui est, tout compte, fait, le grand
drame de l'heure.
Est-ce à dire qu'il faille désespérer de là
civilisation occidentale, qui est d'origine chré-
tienne, donc spirituelle ? `? A-t-elle définitive-
ment fait faillite pour laisser la place à un
automatisme où les plaisirs des sens apporte-
ront seuls quelque répit ? Je ne le crois pas.
La machine qui est aujourd'hui un instru-
ment d'oppression, peut le devenir de libération
si nous savons nous en servir et nous servir des
loisirs qu'elle nous réserve pour nous hausser,
au-dessus des intérêts matériels et des jouis-
sances qu'ils représentent.
Mais, pour ce faire, il importe de restaurer,
dans sa plénitude, la. vie de l'esprit, que la
complexité du monde actuel, l'excès de sen-
sualité, la critique exaspérée de tout ce qui
la dépasse, la quête exclusive de l'argent, une
démoralisation contagieuse et le bas matéria-
lisme ambiant, issu lui-même d'une philoso-
phie aujourd'hui bien périmée, ont, comme
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