Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1916-09-11
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 11 septembre 1916 11 septembre 1916
Description : 1916/09/11 (Numéro 20155). 1916/09/11 (Numéro 20155).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
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LUNDI il SEPTEMBRE 1916
CINQUANTE-SIXIEME ANNEE. N° 20155
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Tontes les lettres destinées à la Rédaction doivent être adressées an Direotenr
le Journal ne pouvant répondre des manuscrits communiqué*
prie les. auteurs d'en garder copie
Adresse TÉLÉGRAPHIQUE lEHPt riBH
Paris 10 septembre
BULLETIN_DU JOUR
L A RÉOUVERTURE DU PARLEMENT SERBE
Le Parlement serbe se réunit demain à Cor-
fou, dans l'île où l'armée serbe réchappée de
l'etïroya'ble retraite d'Albanie s'est reconstituée
sous la protection des alliés. Les soldats du
roi Pierre et du prince Alexandre se trouvent
aujourd'hui surJla frontière de Macédoine et
ont même.repris pied sur une petite portion du
territoire que les Bulgares leur ont volé. Les
députés reprennent leurs travaux aux côtés du
gouvernement et affirment la continuité et la
vie de l'Etat serbe en face de ceux qui croyaient
l'avoir détruit.
La Skoupchtina a siégé pour la derrière fois
:au mois d'apût 1915, à Nich, pour être consultée
sur les concessions territoriales que la Triple-
Entente lui demandait de faire à la Bulgarie.
Malgré l'éteridue des sacrifices, la Chambre et
le gouvernement serbes se conformèrent aux
vœux des alliés. On ne doutait pas à Nich de
l'inutilité du sacrifice et l'on y était persuadé
que la Bulgarie, exploitant les illusions de la
diplomatie de Petrograd, de Londres et de Pa-
ris, préparait une nouvelle trahison. M. Del-
cassé, de même que ses collègues de l'Entente,
se refusaient à croire à la mystification de
Sofia. Les Serbes se rendirent à l'appel qui leur
était adressé au nom de la cause commune,
comme ils s'étaient déjà inclinés dans l'in-
térêt de. la paix devant l'ultimatum austro-
hongrois.
De même qu'en juiMet -1914, la soumission des
Serbes n'écarta pas la guerre, cette fois encore
leur sacrifice ne retint pas la Bulgarie. Un
mois à peine après qu'ils eurent accepté d'aban-
donner à leurs insatiables voisins une partie
des terres qu'ils avaient conquises, les Bulgares
les attaquaient traîtreusement dans le dos. L'ar-
mée du prince Alexandre, que les alliés
n'étaient pas alors à même de secourir à temps,
s'opposa héroïquement à l'invasion. On lui de-
manda de tenir pendant trois semaines; elle
tint pendant cinquante-quatre jours, accom- ,I
plissant des prodiges de bravoure. Mais l'en-
nemi étant trois fois supérieur en nombre et
pourvu d'une artillerie lourde formidable, la
retraite générale devint indispensable. C'était
le désastre! A cette débâcle, la Serbie opposa la
volonté farouche d'une nation qui ne veut pas
mourir. Son seul souci était désormais de sau-
ver l'armée et tout ce qui représentait les for-
ces vives de l'Etat.
Dans sa retraite, l'armée fut suivie par le
gouvernement et par un grand nombre de dé-
putés appartenant à tous. les partis politiques.
Ils étaient 126. Les uns échappèrent par l'Alba-
nie, les autres par Salonique et Athènes. Un
seul passa en Roumanie. Sur ce nombre, i02
s'installèrent à. Nice, 15 en Grèce, 4 en Suisse
et 4 en ItaLie.Le .président de la Skoupchtina. M.
Nikolitch, s'était fixé à Athènes, en attendant
la reprise des séances. Les députés restés en
Serbie, et qui sont au nombre de 40, appartien-
nent à tous les partis politiques. Parmi eux se
trouvent les chefs du parti nationaliste, M'M.
Ribarats et Veillkovitch. Ce dernier exerce les
fott'ct.ionsdB maire de Belgrade. ̃"
Le courage stoïque des troupes seiibes, du
roi Pierre et du prince régent Alexandre a été
un objet d'admiration universelle. Les' mem-
bres du gouvernement et de la Skoupchtina
méritent également qu'on leur rende hom-
mage. Ils ont tous tenu bon sur le chemin de
l'honneur et du devoir. Tl ne s'en est trouvé
qu'un seul pour se laisser abattre et faire dé-
fection, M. Katslerovitch, l'un des ,deux dépu-
tés socialistes serbes. Il est allé àZimmërwald;
il s'est abouché avec ses collègues de Berlin et
a publié un mémoire où il a pris la défense
des ennemis de son pays. C'est l'unique déser-
tion qui s'est produite dans les rangs des re-
présentants dq peuple serbe. Mais M. Katslero-
vitch est fils d'Allemand!
Le mandat de la Skoupchtina actuelle était
expiré déjà en juillet i914, mais les élections
ne apurent avoir lieu à cause de l'agression au-
trichienne. L'ancienne Chambre, conformé-
ment à la Constitution, a donc été prorogée.
C'est en vertu -de ces pouvoirs que le Parlement
va reprendre ses travaux, donnant le spectacle
unique dans l'Histoire d'une représentation
nationale siégeant sur le sol étranger pour trai-
ter les affaires de la patrie envahie.
Le président du conseil, les ministres vont
collaborer avec les députés à l'élaboration d'un
budget dont les sources de recettes sont encore
sous la main de l'ennemi. Ils voteront des lois
qui ne pourront être appliquées dans les limi-
tes territoriales de l'Etat qu'après que l'enva-
hisseur en aura été chassé. Mais aucun de ceux
qui prendront part aux délibérations de Corfou
ne conserve de doute sur la délivrance aussi
impatiemment attendue par ceux qui sont sur
la terre d'exil, que par ceux qui sont courbés
sous le joug autrichien et bulgare. C'est un
spectacle à la fois, grandiose et poignant que
ce Parlement siégeant au seuil de la patrie et
attendant dans. une foi inébranlable que l'ar-
mée serbe, à côté de celle des alliés, lui pré-
pare une rentrée triomphale dans la capitale
du royaume.
Les conditions dans lesquelles elle siège im-
posent à la Skoupchtina des obligations toutes
particulières. Les questions de parti, les que-
relles de personnes, les récriminations sur le
passé lui sont interdites. L'union de tous les
députés est un devoir sacré. Et ils témoigne-
ront de leur confiance dans la victoire, dans les
destinées de leur pays reconstitué et agrandi
en se serrant autour du gouvernement et de la
dynastie. Ils soutiendront de leur unanime pa-
triotisme le courage d'une armée de nouveau
prête à tous les sacrifices pour reconquérir son
pays.
«S>
DÉPÊCHES TÉLÉGBAPHIQUES
DES CORRESPONDAOTS PARTICULIERS DU (EWttîJS
Londres, 10 septembre.
Le vapeur suédois Gamen, de Stockholm, a été
coulé. L'équipage est sauf.
Londres, 10 septembre.
On mande de Bloemfontein que deux hommes,
accusés de fomenter une nouvelle rébellion, ont
comparu devant le juge d'instruction sous l'incul-
pation de haute trahison.' 4
Le général Dewet a été entendu comme témoin
par le juge d'instruction chargé de cette nouvelle
affaire.
Le -général, qui avait précédemment averti le
gouvernement de cette nouvelle tentative de rébel-
lion, a déclaré qu'il avait déconseillé cette aven-
ture.
Athènes, 10 septembre.
Un chalutier fr.anca.is a saisi à Candie un voilier
turc.
Copenhague, 10 septembre.
L'Association des ambulances danoises vient
d'envoyer sa troisième ambulance à Petrograd.
Elle donna à cette occasion hier une réception à
laquelle le ministre britannique, sir Ralph et lady
Paget et le ministre de Russie, le baron Buxhœve-
den. étaient présents.
Les infirmières de l'ambulance qui vient de par-
tir ont servi dans l'hôpital de lady Paget, à Yskyb.
Copenhague, 10 septembre.
Le cabinet Zahle-Bràndès-Scayenius fait de
grands eilorts pour sortir de la situation critique
ans laquelle l'a mis sa politique dans l'affaire des
Antilles danoises. H a maintenant l'intention de
soumettre au Rigsdag (Parlement) un projet de loi
basé sur la proposition des conservateurs, d'après
laquelle sera constituée une commission parlemen-
taire de trente membres (quinze de chaque Cham-
bre) chargée d'examiner les négociations relatives
à la vente des Antilles; les conclusions de cette
commission devront être soumises à un réfé-
rendum.
Cependant, la condition essentielle de cette pro-
position des conservateurs, la formation d'un minis-
tère de coalition, n'étant pas remplie, il semble
peu probable que les deux partis de l'opposition qui
détiennent la majorité au Landsting (Sénat) soient
disposés à accepter le projet gouvernemental.
La Haye, 10 septembre.
D'après la Nieuwe Iiotterdamsche Courant, on
voit journellement arriver dans le Limbourg hol-
landais, et en nombre croissant, des Allemands de
Westphalie et de la Prusse rhénane. Le but de
leur voyage est de pouvoir manger à leur faim et
de remporter des vivres chez eux. On signale
même que certains de ces affamés viennent de
plus loin encore, de Dortmund et de Solingen.
Berne, 10 septembre.
La Suisse ne cherche pas seulement à s'aflran-
chir du charbon et du minerai allemands; elle s'ef-
force également de se libérer de 1 obligation de
prendre chez ses voisins du nord dillérents autres
produits la soude, par exemple. C'est ainsi que
dans le canton d'Argovio,à Zurzach, a été installée
une soudière, dont l'es chaudières sont maintenant
en pleine activité. On signale, en eflet, de cette
dernière localité, qu'une première expédition de
soude a été faite à destination de Bàle. D'autre
part, les diflerentos fabriques de produits chimi-
ques prennent un développement considérable.
Genève, 10 septembre.
On mande de Berlin que le tsar Ferdinand, ac-
compagné du prince héritier,» est arrivé au grand
quartier général allemand du front oriental, où
il aura une' entrevue avec Guillaume II. Le roi
était accompagné de M. Dobrôvitch, chef du cabi-
net secret du roi, et de ses aides de camp.
Montevideo, 9 septembre.
Le ministre de France a remis au président de
la République de l'Uruguay les insignes de grand-
croix de la Légion d'honneur.
Le ministre, M. Lefaivre, a prononcé un dis-
cours dans lequel il a déclaré que l'Uruguay est un
ami préféré de la France, dont il a fait sienne
la fête nationale du 14 juillet. Le président Viera
a répondu par un chaleureux discours dans lequel
il a fait l'éloge de la France.
Un régiment de cavalerie a rendu les honneurs
et a escorté le ministre de France, qui a été cha-
leureusement acclamé par la foule.
Rio-de-Janeiro, 10 septembre.
Hier soir a eu lieu au théâtre municipal la soirée
de gala oflerte en l'honneur de la mission parle-
mentaire belge. On a joué Cadeaux de Noël, de
M. Xavier Leroux, sous la direction de l'auteur.
La représentation de cette pièce, qui avait été in-
terdite a Buenos-Aires comme pouvant être désa-
gréable à l'Allemagne, n'a donné lieu à aucune
protestation des ministres des empires centraux au
Brésil.
«as–
La rééducation des mutilés
Les visiteurs de la foire de Bordeaux, qu'i-
naugurait l'autre jour M. Gaston Doumergue,
ministre des colonies, ne devront pas quitter
les bords de la Gironde sans avoir visité l'é-
cole de rééducation profess'ionnelle des mu-
tijM- dé- la; guôrréj l'une des deux éc.oles;
créées par M. le ministre de l'intérieur a la
suite d'un mouvement d'opinion dont nous
avons plusieurs fois entretenu nos lecteurs.
Il n'est pas d'oeuvre suscitant d'intérêt so-
cial plus immédiat que celle ayant pour but
de permettre aux mutilés de la guerre la re-
prise du travail. Un effort considérable a été
réalisé en France pour la rééducation profes-
sionnelle des mutilés. M. Millerand, alors mi-
nistre de la guerre, eut, le premier, l'idée
d'étudier les moyens pratiques pour rendre
les mutilés au travail professionnel. M. Mau-
rice Barrès intéressa ses lecteurs à la ques-
tion et suscita un grand mouvement de géné-
rosité publique. Enfin, M. Edouard Herriot,
sénateur, maire de Lyon, a mis pour la pre-
mière fois l'idée en pratique. Depuis, M.
Malvy, ministre de l'intérieur, a pris la direc-
tion du mouvement en faveur de la rééduca-
tion professionnelle. Il a créé, comme nous
l'avons dit, l'école nationale de rééducation
de Saint-Maurice et l'école normale de réé-
ducation de Bordeaux. Les ministres du com-
merce et de l'agriculture ont également, avec
l'appui financier du ministère de l'intérieur,
créé des œuvres de rééducation pour mutilés
rattachées à leurs institutions techniques. En-
fin, M. Justin Godart, sous-secrétaire d'Etat
du service de santé, a institué dans son dé-
partement une commission d'orthopédie char-
gée d'étudier les meilleurs modèles d'appa-
reils prothétiques pour chaque profession; et
il a décidé de créer des écoles de rééducation
pour les soldats non réformés.
Les résultats obtenus jusqu'à ce jour sont
appréciables. Ils attestent certainement une
préoccupation générale qui est à l'honneur de
notre pays. Mais il serait, puéril de dissimuler
que nous avons tout d'abord un peu dispersé
nos efforts, en tâtonnant, et en cherchant une
méthode vraiment rationnelle. On nous com-
prendra mieux si nous donnons un exemple.
Il y a, peut-on dire, deux espèces de mutilés
ceux des membres supérieurs et ceux des
membres inférieurs. Or, on a commencé (et
jusqu'à nouvel ordre, on continue en maints
endroits) à appliquer aux uns et aux autres les
mêmes procédés de rééducation, et surtout à
les confondre dans les mêmes ateliers. Ceci
est une grave erreur de psychologie et de pé-
dagogie générale. Les mutilés des membres
inférieurs, ayant la libre disposition de leurs
bras et de leurs mains, font des progrès, relati-
vement faciles et rapides. Ce spectacle décou-
rage les mutilés des membres supérieurs et
leur ôte toute confiance. A la difficulté tech-
nique de leur rééducation s'ajoute une diffi-
culté d'ordre moral et psychique.
C'est pourquoi l'on doit louer l'innovation
faite à Bordeaux par le ministère de l'intérieur,
avec l'appui de la municipalité, du conseil gé-
néral de la Gironde et de la chambre de com-
merce. L'école normale professionnelle de Bor-
deaux aVait pour programme spécial d'établir
les méthodes destinées à guider la rééducation
des mutilés des membres supérieurs pour cha-
que sorte de mutilation et pour chaque métier.
Après l'expérience de Bordeaux, il n'y a point 't
de doute que l'on va s'occuper de créer des
écoles spéciales pour les mutilés des membres
supérieurs. L'école normale de Bordeaux
pourra fournir en tout ou en partie les com-
pétences susceptibles d'assurer la direction des
établissements nouveaux. Il faut faire connaî-
tre les résultats obtenus et les multiplier, non
seulement pour rattraper un peu ou beaucoup
de l'avance de l'Allemagne (qui a déjà plus
de soixante écoles de mutilés), mais aussi et
surtout pour entraîner la conviction des bles-
sés qui doutent et qui hésitent encore à se re-
mettre au travail en passant par une rééduca-
tion nécessaire. Il y a là une quantité de vic-
times de la guerre, qui peuvent devenir une
force économique pour le pays au lieu d'être
seulement une charge. Nous n'avons pas le
droit de les abandonner à un découragement,
hélas trop explicable. Il faut les réconforter,
les soutenir, les persuader. Il faut leur démon-
trer qu'ils sont encore des citoyens utiles et
que leurs mutilations glorieuses ne font qu'a-
jouter à leur dignité en leur assurant notre
resDcct fraternel.
L'ANGLETERRE ET LA GUERRE
M. André Chevrillon n'a pas été satisfait d'un
article paru ici même, il y a huit jours, à propos
de son livre sur l'Angleterre ct la guerre. Il adresse
au directeur du Temps une lettrà si étendue qu'il
n'est vraiment pas possible de la reproduire
incxtenso. Nous allons en citer ou analyser im-
partialement les principaux passages.
M. Chevrillon se plaint que nous ayons isolé de la
phrase où ils figurent les mots suivants: « La
grande leçon de l'événement qui bouleverse le
monde », c'est que « la vérité, pas plus que la rai-
son, n'est souveraine Il nous reproche d'avoir
écrit: « On eût bien étonné Taine si on lui avait
dit qu'il ne fallait pas travailler au triomphe de la
vérité. Du reste en quoi' la présente guerre dé-
montre-t-elle ce que prétend M. Chevrillon? »
placé sans le contexte, déclare notre correspondant,
ce mot fait entendre à vos lecteurs que je ne suis pas
un ami de la vérité. Permettez-moi de repousser cette
accusation en faisant observer que c'est peut-être une
vérité, et pratiquement fort importante, que la vérité et
la raison ne sont point souveraines dans les affaires
humaines éar c'est de cela qu'il s'agit ici et non de
leur valeur idéale. Aussi bien la pure logique pour
laquelle M. Souday combat avec un zèle qui risque de
lui en faire oublier les règles, aurait pu l'avertir qne
c'est justement parce que la vérité n'est point souve-
raine qu'il faut, comme il le désire, travailler au triom-
phe de la vérité. C'est ce que j'essaye de faire pour une
minime part, avec beaucoup d'autres.
M. Chevrillon voudrait attendrir les bonnes âmes
en faisant entendre qu'on a mis sa sincérité en
doute, ce qui est absolument inexact, et en don-
nant à son critique des torts que celui-ci n'a pas.
Il est entendu que M. Chevrillon est un ami de la
vérité. Mais, pour lui, la vérité est qu'il n'y a point
de vérité •: l'amour même qu'il lui porte est donc'
ce qui l'oblige à la combattre. Plaisant sophisme,
qui rappellerait celui du Crétois, si ce n'était sur-
tout un jeu de mots. La vérité dont M. Chevrillon
se proclame l'ami n'est évidemment pas celle dont
il nie la souveraineté. M. Chevrillon oublie par-
fois le sens des mots, au point de croire qu'un
« batteur d'estrade est un homme qui fait des
boniments sur des tréteaux (p. 132 de son vo-
lume). Parfois, il emploie les mots dans des ac-
ceptions différentes d'une ligne à l'autre. Quant
aux règles de la logique, si on 'les méconnaît d'au-
tant mieux qu'on les honore davantage, il faut
que M. Chevrillon les ait bien pieusement hono-
rées, quoi-que d'un culte très secret, car il les viole
avec entrain. D'une distinction banale entre 'la
valeur idéale et l'empire effectif, il tire des con-
séquences fallacieuses. L'empire effectif de la vé-
rité, de 'la raison, de la justice, ne peut jamais
être si absolu qu'il ne connaisse point de rebelles
nul ne l'ignore. Mais parce qu'il y a des malfai-
teurs, M. Chevrillon en conclut-il quo la morale
n'est point souveraine? ou qu'elle n'a qu'une va-
leur idéale? Si elle n'avait pas un certain empire
effectif, elle n'aurait pas la valeur du tout pour
le. politique et l'historien elle serait reléguée
parmi les pures chimères. M. Chevrillon se donne
beaucoup de peine pour établir que l'Allemagne
'n'a .point reconnu la souveraineté de la vérité et
de la raison. C'est enfoncer une porte ouverte, et
nous croyons pouvoir supprimer cette tirade. La'
vérité et la raison n'en étaient pas moins souve-
raines; idéalement d'abord, mais pratiquement
aussi, en France, en Angleterre et ailleurs. Si per-
sonne n'en avait jamais reconnu la souveraineté, si
l'empire n'en'avâît jamais été effectif 'huile, part,-
'la question de savoir s'il y a 'lieu de travailler à
leur triomphe ne se serait même pas posée. M.
Chevrillon commet donc une erreur en affirmant
que la vérité et la raison ne sont pas souveraines
en fait; elles le sont en fait comme en droit, dans
les pays civilisés, et c'est môme à ce signe qu'on
distingue ces pays-là des autres.
M. Chevrillon reproduit ensuite la fameuse
phrase dont nous avions détaché le mot essentiel.
Nous l'avions trouvée un peu longue M. Che-
vrillon lui-même a partagé cet avis, puisqu'il
a coupé trois ou quatre ligues, ainsi qu'on pourra
s'en convaincre en se reportant à la page 231 de
son livre. Enfin, puisqu'il y tient, voici
La grande leçon de l'événement qui bouleverse le
monde, à savoir que le monde n'est pas mené par la
raison, que des puissances irrationnelles sentiment,
orgueil, rêves collectifs, fanatisme, volonté de puis-
sance et de conquête sont toujours latentes au fond
des peuples, déterminant par leurs explosions les grands
mouvements de l'Histoire. que la vérité pas plus
que la raison n'est souveraine, puisque soixante-cinq
millions d'Allemands croient sincèrement ce qui n'est
pas, puisque s'ils sont vainqueurs, leur erreur et le
mensonge de leurs maîtres prévaudront, cette leçon
n'a pas eu de prise sur les théoriciens et les rêveurs
qui n'ont pas senti comme leurs frères de France la
terre trembler et prête à se dérober sous leurs pieds.
C'est une belle phrase. Et c'est toujours la
même question. Sous prétexte que dans certains
cas l'irrationnel garde une action et reste une
menace, faut-il lui sacrifier la raison, la justice,
la liberté? Faut-il se réjouir des périls créés par
l'irrationnel, et en abuses pour parler avec ironie
et mépris de la liberté, de la justice et de la rai-
son ? Le livre de M. Chevrillon incline bien dans
cette dernière direction. Pour tout lecteur de
bonne foi, il tend à condamner, au nom des pré-
tendues leçons de la guerre, les principes ration-
nels, démocratiques et libéraux. C'est ce que nous
avons cru nécessaire d'indiquer au public.
M. Chevrillon assure maintenant qu'il n'a voulu
attaquer que quelques théoriciens et leaders
comme MM. Ramsay Macdonald, E. Morel, etc.:
Les obstinés pacifistes anglais dont je parlais
croyaient établi pour toujours le règne de la raison. Ils
vivaient dans ce qu'on appelle dans leur pays a fool's
paradise. Au lieu de paradis, nous avons aujourd'hui
l'enfer. Quand la guerre sera finie, il serait bon de
se rappeler longtemps cette leçon du réel et de ne pas
laisser d'obstinés rêveurs, au nom des vertus souve-
raines de la vérité et de la raison, nous ramener an
dangereux paradis que la langue anglaise caractérise
si bien.
Dans son livre, M. Chevrillon n'a pas incriminé
seulement ces obstinés pacifistes, que tout le
monde lui abandonne, et qui ne sont pas du
tout des rationalistes (car la raison ordonne de
tenir compte du réel), mais des mystiques et des
songe-creux. Il a bel et bien critiqué toute la
politique démocratique de l'Angleterre contempo-
raine, la politique qui « revenait à l'idéal de jus-
tice et de raison » (page 16), et qui était celle
du gouvernement et par conséquent de la majorité
du pays. Cette politique de « justice et de rai-
son » est-elle nécessairement incompatible avec
la défense nationale? C'est bien ce que M. Che-
vrillon essaye de démontrer, ou d'insinuer. Mais s
ce n'est point notre avis.
Enfin M. Chevrillon se défend d'avoir attaqué
les valeurs de l'intelligence. Attaqué? Non, si l'on
veut. Mais il ne perd pas une occasion d'affirmer
que le premier rôle dans le monde appartient aux
valeurs affectives, etc. Il ne s'en afflige point,
tant s'en faut En ce. qui concerne l'Angleterre,
il constate avec complaisance et à maintes repri-
ses que ces valeurs de pensée n'y étaient pas esti-
mées très haut. Il annonce que cela va changer, et
il ne le regrette point, dit-il. Soit Mais il per-
siste à écrire « .De la décadence il .(l'Anglais)
est bien plus loin que l'Allemand, ne fût-ce que
parce que sa culture est beaucoup plus morale et
beaucoup moins intellectuelle. » (p. 297). Ainsi,
pour M. Chevrillon, la culture intellectuelle est
une preuve de décadence. Avant de nous répondre,
il n'eût pas mal fait de relire son livre, qui n'a
certes pas cette rigueur de composition qu'on ad-
mire chez l'oncle Taine, et qui, à parler net, ne
trouve une vague unité que dans la tendance
générale antiintellectualiste et réactionnaire, mais
dans le détail, se révèle assez désordonné et in-
i cohérent. P. &.
l)1 .G.U. E.8,E..
LA SITUATION MILITAIRE
Les troupes britanniques ont attaqué hier
après-midi, sur un front de 6 kilomètres, du
bois Delville au bois de Leuze et se sont empa-
rés de Ginchy.
Sur ce front de 'combat les Allemands n'ont
donc pu se maintenir que dans des tranchées
formant aujourd'hui un saillant large de deux
cents mètres à peine, à l'ouest de Ginchy, et
qu'ils sont hors d'état de conserver.
Nos alliés ont en même- temps enlevé six
cents mètres de tranchées ennemies au norf' de Pozières, le long de la route de Valencien-
nes. Entre Pozières et le bois Delville, ils s'é-
taient emparés, la nuit précédente, d'une tran-
chée, à l'intérieur du bois des Foureaux.
L'ennemi a reculé, et dans ces combats il a
laissé entre les mains des soldats britanniques
de nombreux prisonniers.
Sur notre ligne de combat, la lutte a été
non moins active. Nous avons fait quel-
ques progrès à l'est de Deniécourt et de
Belloy. L'ennemi a tenté de nous repren-
dre le terrain que nous lui avions enlevé entre
.ces deux villages, au nord-est de Berny. Cette
attaque, qui a échoué, n'a eu comme résultat
que de lui coûter nombre de soldats restés sur
le carreau. En vain, pendant la nuit dernière,
les Allemands ont prononcé, en les accompa-
gnant de jets de liquides enflammés, de puis-
santes attaques sur nos positions entre Belloy
8%.Barleux, ainsi qu'au sud-ouest de Berny, à
l'est de Deniécourt et au sud de Vermandovil-
lers toutes ces attaques ont finalement échoué.
Les gazettes allemandes ont grand'pcine à
présenter à leurs lecteurs les combats de la
Somme sous un jour favorable. Notre infan-
terie serait exténuée et ne pourrait plus atta-
quer sans que le canon lui ait préparé la voie,
de façon qu'elle n'ait plus qu'à cueillir les
défenses allemandes. Les journaux français
n'ont pas besoin de démontrer à leurs lecteurs
'que nos soldats n'ont rien perdu de leur mor-
dant, mais que leurs chefs sont économes de
Ja vie de ces braves gens et ne les lancent à
l'assaut que sur des positions que les obus ont
̃émiettées; ils n'économisent pas leurs muni-
tions, ils économisent leurs Jiommes; nenx-ci
le savent, et quand il s'agit de sortir de leurs
tranchées, il courent à grande vitesse sus à
l'ennemi, qui s'en aperçoit, puisque, rtomiis
le 3 septembre, il a perdu 7,700 prisonniers, et
que le nombre des cadavres qu'il a 1aissâs,.dans
ses tranchées est considérable.
Dans la région de la Meuse, nous avons fait
aussi des progrès; nos soldats ont enlevé tout
un réseau de défenses à l'est de Fléury et en
ont ramené trois cents prisonniers et seule-
ment deux officiers. C'est loin d'être la propor-
tion normale; alors, de deux choses l'une: ou
les officiers sont obligés de payer de leur per-
sonne plus que d'habitude pour maintenir leurs
soldats devant les nôtres, ou une pénurie de
cadres commence à exister chez l'ennemi.
̃ La lutte est toujours très acharnée au nord-
'jG.st de Haîicz; sur' les bords de la Narayouvka,
les Russes ont repoussé une contre-attaque de
troupes allemandes et turques. Il semble que
la résistance de l'ennemi dans cette région
touche à sa fin, au moins si nous nous en rap-
portons à une correspondance russe que nous
transmet l'agence Havas. L'infanterie russe oc-
cuperait déjà plusieurs forts que l'ennemi a
abandonnés après les avoir détruits.
L'action des Russes s'accentue dans les Car-
pathes, au sud-ouest de Kimpolung; les dépê-
ches allemandes annoncent que nos alliés met-
tent en ligne des forces très importantes contre
leurs positions s'étendant du nord-ouest du Ka-
poùl à Dorna-Vatra, et qu'à leur gauche, nos
ennemis ont dû céder a la pression dans la
vallée du Cibo, rivière qui passe à l'ouest du
'Kapoul et se jette dans la Goldene-Bistritza,
près de Kirlibaba.
Nous n'avons pas encore de communiqué
•roumain régulier. Nous devons donc pro-
visoirement nous en tenir aux dépêches enne-
mies et aux correspondances particulières.
Hier, nous avons dit que les Autrichiens, recu-
lant devant les forces roumaines, s'étaient re-
pliés à l'ouest de CziknSzereda, sur le massif
d'Argitta; ils y sont maintenant attaqués; le
morceau doit être dur à enlever et ne le sera
pas en un jour; les rédacteurs de dépêches
de Budapest auront beau jeu pour prétendre
que les attaques roumaines sont infructueuses.
Nous disions également hier qu'un combat
violent était engagé entre Orsoya et Hermann-
stadt, sur la route de Petroseny à Hatseg. L'état-
major autrichien parlait hier de ce combat
en des termes peu clairs1; il commençait par
dire que les Roumains avaient été rejetés par
les troupes autrichiennes au delà de leurs po-
sitions premières, et il ajoutait qu'une nou-
velle et forte attaque contre l'aile droite de
œ groupe avait occasionné le retrait de celui-ci
sur ses anciennes positions. Quel groupe ? En
examinant de très près cette dépêche, on ne
peut en déduire qu'une chose: c'est qu'au dé-
but, les Roumains ont reculé; mais qu'un ren-
fort leur arrivant à leur aile gauche, ils ont
repris l'offensive et refoulé vigoureusement
leurs adversaires.
Quant à ce qui concerne le front du Da-
nube, un radiotélégramme de Bucarest an-
nonce que les troupes russes et roumaines ont
repoussé les Germano-Bulgares à Dobritch,
dans la Dobroudja; c'est un bon début de l'in-
fanterie russe dans cette région.
1
LA SITVATIOH DIPLCMATIQVB
Des troupes turques se battent en Dobroudja
et sur le front russe. Elles ont quitté Cons-
tantinople et la Thrace pour venir au secours
des Bulgares et des Austro-Allemands au lieu
de défendre leur propre territoire. La main-
mise allemande sur les gouvernants de Cons-
tantinople est un fait patent. Mais pour que
le kaiser et les anciens vassaux du Grand-Sei-
gneur aient obtenu que les vrais croyants se
fassent 'tuer à leur service, il faut que la Tur-
quie sente elle-même la gravité du péril qui la
menace en Europe.
Des opérations qui sont en cours' depuis
l'Albanie jusqu'en Bukovine, en passant par
la Macédoine, dépendent les communications
turques avec les empires centraux. Que cel-
les-ci soient coupées et l'empire. ottoman s'é-
croule. D'Allemagne viennent les munitions,
l'artillerie qui lui permettent de soutenir la
lutte. La voie ferrée Constantinople-Vienne
est le cordon ombilical qui nourrit la force mi-
litaire du sultan et lui fournit ses moyens de
résistance. Qu'il soit rompu, c'est la mort. Ce
sont les Dardanelles ouvertes à bref délai et
Constantinople aux mains de l'ennemi!
Que l'armée turque serve à maintenir la
puissance des chrétiens en Orient et des Bul-
gares dans les Balkans, c'est un spectacle peu
banal. La Turquie ne se résigne à démentir
ainsi tout son passé que .parce que sa propre
existence est en jeu. Ce n'est pas par obéis-
sance aveugle à l'empire allemand1 que le sul-
Uan se Drive au profit des roumis d'une ̃partie
de ses meilleurs soldats. C'est son trône qu'il
défend
La partie militaire qui se joue en Orient
n'a pas seulement pour enjeu le sort de la
Turquie. D'elle dépend aussi celui de ki. Bulga-
rie. D'elle dépend également pour les alliés la
liaison de tous leurs fronts du Trentin à la
Baltique. C'est le cercle définitivement fermé
autour des empires centraux, privés de leurs
auxiliaires turcs et bulgares et réduits à leurs
seules forces.
La clef de cette situation, qui réaliserait
sur la carte elle-même l'unité de front, se
trouve en Macédoine, représentée par l'offen-
siv.e du général Sarrail en corrélation avec
l'action russo-bulgare dans la région Danube-
Dobroudja. L'importance capitale de l'armée
de Salonique et son rôle principal pour la pré-
paration de la victoire finale sautent aux yeux
de tous. Rien ne peut donc être négligé pour
assurer son succès.
a£»
COSMIQUE OFFICIEL DU 9 SEPTEMBRE
Onze heures soir
Dans la région de la Somme, assez grande
activité de l'artillerie de part et d'autre. Un
combat à la grenade nous a rendus maîtres
d'un élément de tranchée ennemie à l'est de
Belloy. Nous y avons fait une trentaine de pri-
sonniers. L'ennemi, après avoir exécuté un vio-
lent bombardement, a tenté de nous reprendre
les positions que nous avons récemment con-
quises au nord-est du village de Berny. Il a
été repoussé en subissant de lourdes pertes.
Dans la région de la Meuse, à l'est du vil-
lage de Fleury-devant-Douaumont, nos troupes
ont emporte d'assaut, dans l'après-midi, tout
un système de tranchées allemandes. On an-
nonce déjà que deux cents prisonniers dont
deux officiers ont été ramenés dans nos lignes
à la suite de cette brillante action, et que nous
avons pris plusieurs mitrailleuses.
Rien d'important à signaler sur le reste du
front.
COfflfflUrilQUÉ BRITANNIQUE DU 9 SEPTEMBRE
Onze heures 20 soir
Nous avons attaqué cet après-midi, depuis
le bois Delville jusqu'au bois de Leuze, sur un
front de 6 kilomètres. Après de violents com-
ibats, le village de Ginchy en entier est entre
nos mains, ainsi que le terrain qui va jusqu'au
bois de Leuze. A l'est du bois Delville notre
avance est de 300 mètres sur un front de 500.
Les prisonniers sont nombreux et l'ennemi
a subi de très lourdes pertes.
Au nord-est de Pozières, nous nous sommes
encore empares de 600 mètres de tranchées en
faisant 30 prisonniers. Au moment où l'ennemi
se massait pour une contre-attaque, il a été
pris sous le feu de notre artillerie et a beau-
coup souffert.
Notre artillerie a bombardé les tranchées en-
nemies de Vimy, en face de Souchez, et du
Cabaret-Rouge.
Lutte d'artillerie autour de Galonné, de Cuin-
chy et entre le canal de la Bassée et Neuve-
Chapelle.
De nombreux combats aériens ont eu lieu
dans ta journée çpfi'fêr. Nos avions ont énoôïë
bombardé un aérodrome ennemi. Trois han-
gars ont été détruits. Un de nos appareils man-
que.
COfllfflUNIQUÉ OFFICIEL BELGE DU 9 SEPTEMBRE
Hier, en fin de soirée, une violente lutte d'ar-
tillerie de tranchée et de campagne s'est dérou-
lée dans la région de Boesingthe et a continué
au cours de la nuit. La journée a été générale-
ment calme sur le front belge.
&.
FRONT RUSSE
COMMUNIQUÉ OFFICIEL
Petrograd, 9 septembre.
Dans la direction de Halicz, sur la rivière
Narayouvka, nous avons repoussé, par notre
feu, une contre-attaque des Allemands et des
Turcs.
Des combats acharnés continuent dans cette
direction.
[De son côté, le correspondant du Bousskoïé Slovo
télégraphie que les efforts des Austro-Alleman.ds pour
maintenir Halicz en leur pouvoir s'épuisent rapidement.
Dans la nuit du 7 septembre, l'ennemi a commencé à
faire sauter les forts de la ville, dont plusieurs sont
déjà occupés par l'infanterie russe. Le lendemain ma-
tin, l'adversaire a. fait sauter le grand pont du Dniester.
Les Russes tiennent déjà toute la rive gauche de la ri-
vière. L'artillerie russe tire avec une violence extraoi>
dinaire sur les forces ennemies, qui se retirent peu à
peu de la ville. Une batterie a réussi à cribler de pro-
jectiles deux trains militaires qui emportaient des trou-
pes ennemies de Halicz et a mis en pièces la plupart des
wagons, tuant ceux qui les occupaient. La chute de la
ville est attendue d'une heure à l'autre.]
Sur la frontière hongroise
Dans les Carpathes boisées, au sud de Bara-
nof, nos troupes ont enlevé une série de hau-
teurs et ont capturé plus de 500 hommes, 5 mi-
trailleuses et une batterie de montagne utili-
sable. Plusieurs canons ont été jetés par l'en-
nemi dans des ravins.
Au Caucase et en Mésopotamie
Un combat acharné se poursuit dans la ré-
gion du village d'Oghout.
Un entretien avec le général Broussilof
Notre envoyé spécial sur le front russe nous adresse,
à la date du G septembre, du quartier général du front
sud, la dépêche suivante
Je viens d'avoir l'honneur d'être reçu par le
général Broussilof, don N'éclatante victoire de mai
annihila une armée de 450,000 Autrichiens, et
qui continue à développer vigoureusement jusqu'à
ce jour ses heureuses conséquences.
Le général Broussilof, qui est plein d'opti-
misme, dit qu'il a actuellement devant lui une
armée ennemie en somme plus nombreuse que
celle qu'il a détruite en mai. Elle est composée
des dernières ressources des Austro-Hongrois, de
renforts tirés du front italien, d'Allemands venus
du front russe septentrional( ̃"
«.Plus la liaison sera grande entre les alliés,
me déclara le général, plus leurs mouvements se-
ront coordonnés, et plus la guerre finira vite. Il
faut de toute nécessité que tous les fronts se bat-
tent simultanément et continuellement. Voilà la
condition essentielle d'un succès rapide.
» 'Heureusement, les brillantes offensives franco-
anglaises sur le front ouest empêchent les Alle-
mand d'amener contre nous des renforts assez
nombreux pour arrêter notre avance, qu'ils peu-
vent tout au plus retarder. »
Le général Broussilof considère l'entrée en
scène de la Roumanie comme un événement de
.premier ordre. « Bientôt, dit-il, la coopération de
la brave armée roumaine, qui est excellente et
bien commandée, nous aidera à obtenir des avan-
tages déflnitifs, et l'Autrichc-Kongric, déjà aux
abois, se trouvera hors d'état de résister davan-
I tage. »; ̃.̃̃•'̃
Je. reviendrai, dans une prochaine lettre, sur,
cet entretien d'un haut intérêt. Ludovic Naii-
deau.
Nouvelles austro-allemandes
Les états-majors allemand et autrichien enre-
gistrent l'un et l'autre, à la date du 9 septembre,
Ta nouvelle avance russe dans les Carpathes.
'Vienne écrit « Après de fortes attaques enne-
mies contre les hauteurs à l'est de la vallée du
Cibo, l'ennemi a pris possession de quelques po-
sitions dans ce secteur; sur tous les autres points
de notre front des Carpathes a régné un calme.
relatif. » Et Berlin écrit de son côté « Dans les
Carpathes, i'ennemi met en ligne des forces im-
portantes contre nos positions sur les hauteurs
à l'ouest et au sud-ouest de Schipoth et près de
Dorna-Vatra; au nord-ouest de Kapouf, nous'
avons cédé à la pression. »
Les deux états-majors disent, d'autre part, que
les attaques russes répétées entre la Zlota-Lipa
et le Dniester ont été repoussées, ajoutant que
« l'héroïque conduite des troupes ottomanes qui'
combattent dans cette région mérite une mention
particulière ».
FRONTJTALlEft
COMMUNIQUÉ OFFICIEL
Rome, 9 septembra
Dans la Vallarsa (Adige), dans la soirée du 7,
un détachement ennemi, après une intense pré-
paration d'artillerie, a pris d'assaut nos posi-
tions entre le mont Spil et le mont Corno, et
a réussi à pénétrer dans quelques tranchées.
Nous les avons reprises par une vigoureuse
contre-attaque, et avons infligé de graves per-
tes à l'ennemi; une vingtaine de prisonniers.
sont restés entre nos mains.
Dans la zone de To fana, une attaque contre
les positions conquises par nos alpins dans
la journée du 7, dans'la vallée de Travenanzes,
a été repousEce.
Sur le reste du front, les actions habituelles
des deux artilleries ont été gênées par le mau-
vais temps.
La nôtre a .bombardé la gare de Santa-Lu-
cia-di-l'olmino, où l'on signale un immense
mouvement de trains.
[Santa-Lucia-di-Tolmino est au sud de Totaino, sur
la ligne qui descend vers Gorizia.J
La nuit dernière, un de nos dirigeables, mal-
gré les mauvaises conditions atmosphériques,
a suivi la route du chemin de fer de Duino-
Trieste et est rentré indemne, après avoir lancé
600 kilogrammes d'explosifs sur des installa-
tions qui ont été dévastées.
L'appel sous les drapeaux
Rome, 9 septembre.
Le ministère de la guerre a ordonné l'appel, pour
le 21 du courant, des recrues de première, deuxième
et troisième catégories de la classe 1897, actuelle-
ment en congé provisoire, et des inscrits maritimes
des classes 1882 à 1888, qui avaient été réformés ei
qui sont sujets à une nouvelle revision.
«$>
FRONTdes BALKANS
'̃ •̃̃•'• Hi ïfflffwsédoine
'ciOMM'u~riG'aTS oB'FidBi~ I3R3TANNIQ~
Londres, 9 septembre.
La lutte d'artillerie continue sur tout le front
de Doiran.
Sur le front de la Strouma, dans la soirée du
7 septembre, notre artillerie a fait taire une
batterie ennemie qui bombardait le .pont d'Orl-
jack.
Notre artillerie a dispersé plusieurs détache-
ments.
̃ «s»». ̃
FRONT ROUMAIN
GOiMiMrtTifTiQ-crÉ Officiel h.otj3m^lXit
Bucarest, 8 septembre,
Front nord-ouest. Après des luttes vives,
nous avons occupé les localités de Poplitza
(Olah-Tiplitza), de San-Milai (Czik-Szenit-
Mihal), de Delne (Gzik-Delne), de Gîurh-Szent-
Miclau (Gyergyo-Szent-Miklos).
Des attaques ennemies ont été repoussées au
sud de Mahadia.
[Les localités du premier paragraphe ci-dessus sont
toutes dans la région du massif de Gyérgyo, au nord-est
de la Transylvanie, tandis que Mahadia, ou Mcbadia, est
située au nord d'Orsova, sur le chemin de fer de Te-
mesvar.]
Front sud. Les forces russo-roumaines ont
repoussé les Bulgares à iBazarjic (Dobritch).
Des attaques aériennes ont eu lieu. Des aéro-
planes ennemis ont jeté -des. bombes sur Cons-
tantza, blessant deux femmes et un enfant.
GOIKIMTTITIQ'C-B OPFIClEIi E.XJSE523
Petrograd, 9 septembre.
Le 7 septembre, nos torpilleurs ont bonw
bardé le port de Bfoltchik, occupé par les 'Bul*
gares, au nord de Varna;. ils ont coulé 21 bar-
ques, où les Bulgares chargeaient des blés.
Des hydravions ennemis ont attaqué sans
succès nos torpilleurs.
Nouvelles austro-allemandes
L'état-major allemand qui, le 8 septembre, an-
nonçait que des attaques russo-roumaines avaient
été repoussées au nord de Dobritch, disait, le 9,
que « près de Dobritch la nouvelle attaque enne-
mie a encore échoué ».
De son côté, l'état-major autrichien, à la date
du 0, assure avoir rejeté sur leurs anciennes posi-
tions les troupes roumaines qui avaient attaqué,
sur la route de Petroceny à Hats-zeg, Il affirme
également avoir repoussé les attaques menées;
contre les hauteurs a l'ouest de Czik-Szerada. Et'
il ajoute qu' « en dehors de cela la situation est
sans changement ».
c$» i
Ba~yBB~ &~ Em~Bn~a !&
Ea Egypte
OOMÏxIXrNTQTJÉ OFPICHE1 EXVIT.â.IsrïTipTT33 .'̃
Londres, 9 septembre.
Le 8 septembre, trois de nos avions ont fait
de nouveau un raid sur 'El-Mazarî vingt bom-
bes 'ont été jetées, dont onze ont causé des
| effets visibles dans les camps ennemi».
>«Wi-i»i| iiii(h ̃̃ ̃-̃*̃ l'uiMM Miimi'l mi > m n. uni.- .'̃ ̃̃̃̃». ii mi.. 111^^ i^iwii i> ih^Tp»i«i*mi.i–^W ̃̃̃)ll ̃ ̃ .IIII.WJ. ,t<. .[̃ :lJ,"»j .Jl.-t'îjjfo^gj^gT?^?
PRIX DE L'ABONNEMENT
»Ani8,SE»E
OTIOK POSTALB lSfc; 36 fr. TS fc
LES AIOHNKHEÎIIS DATENT pas 1° ET t6 SB CHAQUE MOIS
Un numéro (départements) 2O centimes
ANNONCES Société GÉNÉRALE des Annonces, 8, place de la EonrsB.
Ze Journal et In Régisseurs déclinent toute responsabilité quant à leur teneur
TÉLÉPHOlfE CtXQ UGSK»
<ïuteaberg 03.07 03.08 08.09 03.32 03.33
LUNDI il SEPTEMBRE 1916
CINQUANTE-SIXIEME ANNEE. N° 20155
PRIX DE L'ABONNEMENT
tusa, SEME et SEBîE-IT-OISE.. Trois mois, 1 <3= fr. Six mois, SB fr. Un ai, 53 fr.
emuT" tt aisace-lobraini.. IV" fr.; S4tr.i 6Sit
«mon postale. 15 fr.; ss fr.; va te.
MES ABOWNEMKHTS DATEÎTT DES 1" ET 16 DE CHAQUE MOIS
Un numéro (à î*ai*îs) s 1 SS centimes
Directeur politique Émile-Adrien Hébrard
Tontes les lettres destinées à la Rédaction doivent être adressées an Direotenr
le Journal ne pouvant répondre des manuscrits communiqué*
prie les. auteurs d'en garder copie
Adresse TÉLÉGRAPHIQUE lEHPt riBH
Paris 10 septembre
BULLETIN_DU JOUR
L A RÉOUVERTURE DU PARLEMENT SERBE
Le Parlement serbe se réunit demain à Cor-
fou, dans l'île où l'armée serbe réchappée de
l'etïroya'ble retraite d'Albanie s'est reconstituée
sous la protection des alliés. Les soldats du
roi Pierre et du prince Alexandre se trouvent
aujourd'hui surJla frontière de Macédoine et
ont même.repris pied sur une petite portion du
territoire que les Bulgares leur ont volé. Les
députés reprennent leurs travaux aux côtés du
gouvernement et affirment la continuité et la
vie de l'Etat serbe en face de ceux qui croyaient
l'avoir détruit.
La Skoupchtina a siégé pour la derrière fois
:au mois d'apût 1915, à Nich, pour être consultée
sur les concessions territoriales que la Triple-
Entente lui demandait de faire à la Bulgarie.
Malgré l'éteridue des sacrifices, la Chambre et
le gouvernement serbes se conformèrent aux
vœux des alliés. On ne doutait pas à Nich de
l'inutilité du sacrifice et l'on y était persuadé
que la Bulgarie, exploitant les illusions de la
diplomatie de Petrograd, de Londres et de Pa-
ris, préparait une nouvelle trahison. M. Del-
cassé, de même que ses collègues de l'Entente,
se refusaient à croire à la mystification de
Sofia. Les Serbes se rendirent à l'appel qui leur
était adressé au nom de la cause commune,
comme ils s'étaient déjà inclinés dans l'in-
térêt de. la paix devant l'ultimatum austro-
hongrois.
De même qu'en juiMet -1914, la soumission des
Serbes n'écarta pas la guerre, cette fois encore
leur sacrifice ne retint pas la Bulgarie. Un
mois à peine après qu'ils eurent accepté d'aban-
donner à leurs insatiables voisins une partie
des terres qu'ils avaient conquises, les Bulgares
les attaquaient traîtreusement dans le dos. L'ar-
mée du prince Alexandre, que les alliés
n'étaient pas alors à même de secourir à temps,
s'opposa héroïquement à l'invasion. On lui de-
manda de tenir pendant trois semaines; elle
tint pendant cinquante-quatre jours, accom- ,I
plissant des prodiges de bravoure. Mais l'en-
nemi étant trois fois supérieur en nombre et
pourvu d'une artillerie lourde formidable, la
retraite générale devint indispensable. C'était
le désastre! A cette débâcle, la Serbie opposa la
volonté farouche d'une nation qui ne veut pas
mourir. Son seul souci était désormais de sau-
ver l'armée et tout ce qui représentait les for-
ces vives de l'Etat.
Dans sa retraite, l'armée fut suivie par le
gouvernement et par un grand nombre de dé-
putés appartenant à tous. les partis politiques.
Ils étaient 126. Les uns échappèrent par l'Alba-
nie, les autres par Salonique et Athènes. Un
seul passa en Roumanie. Sur ce nombre, i02
s'installèrent à. Nice, 15 en Grèce, 4 en Suisse
et 4 en ItaLie.Le .président de la Skoupchtina. M.
Nikolitch, s'était fixé à Athènes, en attendant
la reprise des séances. Les députés restés en
Serbie, et qui sont au nombre de 40, appartien-
nent à tous les partis politiques. Parmi eux se
trouvent les chefs du parti nationaliste, M'M.
Ribarats et Veillkovitch. Ce dernier exerce les
fott'ct.ionsdB maire de Belgrade. ̃"
Le courage stoïque des troupes seiibes, du
roi Pierre et du prince régent Alexandre a été
un objet d'admiration universelle. Les' mem-
bres du gouvernement et de la Skoupchtina
méritent également qu'on leur rende hom-
mage. Ils ont tous tenu bon sur le chemin de
l'honneur et du devoir. Tl ne s'en est trouvé
qu'un seul pour se laisser abattre et faire dé-
fection, M. Katslerovitch, l'un des ,deux dépu-
tés socialistes serbes. Il est allé àZimmërwald;
il s'est abouché avec ses collègues de Berlin et
a publié un mémoire où il a pris la défense
des ennemis de son pays. C'est l'unique déser-
tion qui s'est produite dans les rangs des re-
présentants dq peuple serbe. Mais M. Katslero-
vitch est fils d'Allemand!
Le mandat de la Skoupchtina actuelle était
expiré déjà en juillet i914, mais les élections
ne apurent avoir lieu à cause de l'agression au-
trichienne. L'ancienne Chambre, conformé-
ment à la Constitution, a donc été prorogée.
C'est en vertu -de ces pouvoirs que le Parlement
va reprendre ses travaux, donnant le spectacle
unique dans l'Histoire d'une représentation
nationale siégeant sur le sol étranger pour trai-
ter les affaires de la patrie envahie.
Le président du conseil, les ministres vont
collaborer avec les députés à l'élaboration d'un
budget dont les sources de recettes sont encore
sous la main de l'ennemi. Ils voteront des lois
qui ne pourront être appliquées dans les limi-
tes territoriales de l'Etat qu'après que l'enva-
hisseur en aura été chassé. Mais aucun de ceux
qui prendront part aux délibérations de Corfou
ne conserve de doute sur la délivrance aussi
impatiemment attendue par ceux qui sont sur
la terre d'exil, que par ceux qui sont courbés
sous le joug autrichien et bulgare. C'est un
spectacle à la fois, grandiose et poignant que
ce Parlement siégeant au seuil de la patrie et
attendant dans. une foi inébranlable que l'ar-
mée serbe, à côté de celle des alliés, lui pré-
pare une rentrée triomphale dans la capitale
du royaume.
Les conditions dans lesquelles elle siège im-
posent à la Skoupchtina des obligations toutes
particulières. Les questions de parti, les que-
relles de personnes, les récriminations sur le
passé lui sont interdites. L'union de tous les
députés est un devoir sacré. Et ils témoigne-
ront de leur confiance dans la victoire, dans les
destinées de leur pays reconstitué et agrandi
en se serrant autour du gouvernement et de la
dynastie. Ils soutiendront de leur unanime pa-
triotisme le courage d'une armée de nouveau
prête à tous les sacrifices pour reconquérir son
pays.
«S>
DÉPÊCHES TÉLÉGBAPHIQUES
DES CORRESPONDAOTS PARTICULIERS DU (EWttîJS
Londres, 10 septembre.
Le vapeur suédois Gamen, de Stockholm, a été
coulé. L'équipage est sauf.
Londres, 10 septembre.
On mande de Bloemfontein que deux hommes,
accusés de fomenter une nouvelle rébellion, ont
comparu devant le juge d'instruction sous l'incul-
pation de haute trahison.' 4
Le général Dewet a été entendu comme témoin
par le juge d'instruction chargé de cette nouvelle
affaire.
Le -général, qui avait précédemment averti le
gouvernement de cette nouvelle tentative de rébel-
lion, a déclaré qu'il avait déconseillé cette aven-
ture.
Athènes, 10 septembre.
Un chalutier fr.anca.is a saisi à Candie un voilier
turc.
Copenhague, 10 septembre.
L'Association des ambulances danoises vient
d'envoyer sa troisième ambulance à Petrograd.
Elle donna à cette occasion hier une réception à
laquelle le ministre britannique, sir Ralph et lady
Paget et le ministre de Russie, le baron Buxhœve-
den. étaient présents.
Les infirmières de l'ambulance qui vient de par-
tir ont servi dans l'hôpital de lady Paget, à Yskyb.
Copenhague, 10 septembre.
Le cabinet Zahle-Bràndès-Scayenius fait de
grands eilorts pour sortir de la situation critique
ans laquelle l'a mis sa politique dans l'affaire des
Antilles danoises. H a maintenant l'intention de
soumettre au Rigsdag (Parlement) un projet de loi
basé sur la proposition des conservateurs, d'après
laquelle sera constituée une commission parlemen-
taire de trente membres (quinze de chaque Cham-
bre) chargée d'examiner les négociations relatives
à la vente des Antilles; les conclusions de cette
commission devront être soumises à un réfé-
rendum.
Cependant, la condition essentielle de cette pro-
position des conservateurs, la formation d'un minis-
tère de coalition, n'étant pas remplie, il semble
peu probable que les deux partis de l'opposition qui
détiennent la majorité au Landsting (Sénat) soient
disposés à accepter le projet gouvernemental.
La Haye, 10 septembre.
D'après la Nieuwe Iiotterdamsche Courant, on
voit journellement arriver dans le Limbourg hol-
landais, et en nombre croissant, des Allemands de
Westphalie et de la Prusse rhénane. Le but de
leur voyage est de pouvoir manger à leur faim et
de remporter des vivres chez eux. On signale
même que certains de ces affamés viennent de
plus loin encore, de Dortmund et de Solingen.
Berne, 10 septembre.
La Suisse ne cherche pas seulement à s'aflran-
chir du charbon et du minerai allemands; elle s'ef-
force également de se libérer de 1 obligation de
prendre chez ses voisins du nord dillérents autres
produits la soude, par exemple. C'est ainsi que
dans le canton d'Argovio,à Zurzach, a été installée
une soudière, dont l'es chaudières sont maintenant
en pleine activité. On signale, en eflet, de cette
dernière localité, qu'une première expédition de
soude a été faite à destination de Bàle. D'autre
part, les diflerentos fabriques de produits chimi-
ques prennent un développement considérable.
Genève, 10 septembre.
On mande de Berlin que le tsar Ferdinand, ac-
compagné du prince héritier,» est arrivé au grand
quartier général allemand du front oriental, où
il aura une' entrevue avec Guillaume II. Le roi
était accompagné de M. Dobrôvitch, chef du cabi-
net secret du roi, et de ses aides de camp.
Montevideo, 9 septembre.
Le ministre de France a remis au président de
la République de l'Uruguay les insignes de grand-
croix de la Légion d'honneur.
Le ministre, M. Lefaivre, a prononcé un dis-
cours dans lequel il a déclaré que l'Uruguay est un
ami préféré de la France, dont il a fait sienne
la fête nationale du 14 juillet. Le président Viera
a répondu par un chaleureux discours dans lequel
il a fait l'éloge de la France.
Un régiment de cavalerie a rendu les honneurs
et a escorté le ministre de France, qui a été cha-
leureusement acclamé par la foule.
Rio-de-Janeiro, 10 septembre.
Hier soir a eu lieu au théâtre municipal la soirée
de gala oflerte en l'honneur de la mission parle-
mentaire belge. On a joué Cadeaux de Noël, de
M. Xavier Leroux, sous la direction de l'auteur.
La représentation de cette pièce, qui avait été in-
terdite a Buenos-Aires comme pouvant être désa-
gréable à l'Allemagne, n'a donné lieu à aucune
protestation des ministres des empires centraux au
Brésil.
«as–
La rééducation des mutilés
Les visiteurs de la foire de Bordeaux, qu'i-
naugurait l'autre jour M. Gaston Doumergue,
ministre des colonies, ne devront pas quitter
les bords de la Gironde sans avoir visité l'é-
cole de rééducation profess'ionnelle des mu-
tijM- dé- la; guôrréj l'une des deux éc.oles;
créées par M. le ministre de l'intérieur a la
suite d'un mouvement d'opinion dont nous
avons plusieurs fois entretenu nos lecteurs.
Il n'est pas d'oeuvre suscitant d'intérêt so-
cial plus immédiat que celle ayant pour but
de permettre aux mutilés de la guerre la re-
prise du travail. Un effort considérable a été
réalisé en France pour la rééducation profes-
sionnelle des mutilés. M. Millerand, alors mi-
nistre de la guerre, eut, le premier, l'idée
d'étudier les moyens pratiques pour rendre
les mutilés au travail professionnel. M. Mau-
rice Barrès intéressa ses lecteurs à la ques-
tion et suscita un grand mouvement de géné-
rosité publique. Enfin, M. Edouard Herriot,
sénateur, maire de Lyon, a mis pour la pre-
mière fois l'idée en pratique. Depuis, M.
Malvy, ministre de l'intérieur, a pris la direc-
tion du mouvement en faveur de la rééduca-
tion professionnelle. Il a créé, comme nous
l'avons dit, l'école nationale de rééducation
de Saint-Maurice et l'école normale de réé-
ducation de Bordeaux. Les ministres du com-
merce et de l'agriculture ont également, avec
l'appui financier du ministère de l'intérieur,
créé des œuvres de rééducation pour mutilés
rattachées à leurs institutions techniques. En-
fin, M. Justin Godart, sous-secrétaire d'Etat
du service de santé, a institué dans son dé-
partement une commission d'orthopédie char-
gée d'étudier les meilleurs modèles d'appa-
reils prothétiques pour chaque profession; et
il a décidé de créer des écoles de rééducation
pour les soldats non réformés.
Les résultats obtenus jusqu'à ce jour sont
appréciables. Ils attestent certainement une
préoccupation générale qui est à l'honneur de
notre pays. Mais il serait, puéril de dissimuler
que nous avons tout d'abord un peu dispersé
nos efforts, en tâtonnant, et en cherchant une
méthode vraiment rationnelle. On nous com-
prendra mieux si nous donnons un exemple.
Il y a, peut-on dire, deux espèces de mutilés
ceux des membres supérieurs et ceux des
membres inférieurs. Or, on a commencé (et
jusqu'à nouvel ordre, on continue en maints
endroits) à appliquer aux uns et aux autres les
mêmes procédés de rééducation, et surtout à
les confondre dans les mêmes ateliers. Ceci
est une grave erreur de psychologie et de pé-
dagogie générale. Les mutilés des membres
inférieurs, ayant la libre disposition de leurs
bras et de leurs mains, font des progrès, relati-
vement faciles et rapides. Ce spectacle décou-
rage les mutilés des membres supérieurs et
leur ôte toute confiance. A la difficulté tech-
nique de leur rééducation s'ajoute une diffi-
culté d'ordre moral et psychique.
C'est pourquoi l'on doit louer l'innovation
faite à Bordeaux par le ministère de l'intérieur,
avec l'appui de la municipalité, du conseil gé-
néral de la Gironde et de la chambre de com-
merce. L'école normale professionnelle de Bor-
deaux aVait pour programme spécial d'établir
les méthodes destinées à guider la rééducation
des mutilés des membres supérieurs pour cha-
que sorte de mutilation et pour chaque métier.
Après l'expérience de Bordeaux, il n'y a point 't
de doute que l'on va s'occuper de créer des
écoles spéciales pour les mutilés des membres
supérieurs. L'école normale de Bordeaux
pourra fournir en tout ou en partie les com-
pétences susceptibles d'assurer la direction des
établissements nouveaux. Il faut faire connaî-
tre les résultats obtenus et les multiplier, non
seulement pour rattraper un peu ou beaucoup
de l'avance de l'Allemagne (qui a déjà plus
de soixante écoles de mutilés), mais aussi et
surtout pour entraîner la conviction des bles-
sés qui doutent et qui hésitent encore à se re-
mettre au travail en passant par une rééduca-
tion nécessaire. Il y a là une quantité de vic-
times de la guerre, qui peuvent devenir une
force économique pour le pays au lieu d'être
seulement une charge. Nous n'avons pas le
droit de les abandonner à un découragement,
hélas trop explicable. Il faut les réconforter,
les soutenir, les persuader. Il faut leur démon-
trer qu'ils sont encore des citoyens utiles et
que leurs mutilations glorieuses ne font qu'a-
jouter à leur dignité en leur assurant notre
resDcct fraternel.
L'ANGLETERRE ET LA GUERRE
M. André Chevrillon n'a pas été satisfait d'un
article paru ici même, il y a huit jours, à propos
de son livre sur l'Angleterre ct la guerre. Il adresse
au directeur du Temps une lettrà si étendue qu'il
n'est vraiment pas possible de la reproduire
incxtenso. Nous allons en citer ou analyser im-
partialement les principaux passages.
M. Chevrillon se plaint que nous ayons isolé de la
phrase où ils figurent les mots suivants: « La
grande leçon de l'événement qui bouleverse le
monde », c'est que « la vérité, pas plus que la rai-
son, n'est souveraine Il nous reproche d'avoir
écrit: « On eût bien étonné Taine si on lui avait
dit qu'il ne fallait pas travailler au triomphe de la
vérité. Du reste en quoi' la présente guerre dé-
montre-t-elle ce que prétend M. Chevrillon? »
placé sans le contexte, déclare notre correspondant,
ce mot fait entendre à vos lecteurs que je ne suis pas
un ami de la vérité. Permettez-moi de repousser cette
accusation en faisant observer que c'est peut-être une
vérité, et pratiquement fort importante, que la vérité et
la raison ne sont point souveraines dans les affaires
humaines éar c'est de cela qu'il s'agit ici et non de
leur valeur idéale. Aussi bien la pure logique pour
laquelle M. Souday combat avec un zèle qui risque de
lui en faire oublier les règles, aurait pu l'avertir qne
c'est justement parce que la vérité n'est point souve-
raine qu'il faut, comme il le désire, travailler au triom-
phe de la vérité. C'est ce que j'essaye de faire pour une
minime part, avec beaucoup d'autres.
M. Chevrillon voudrait attendrir les bonnes âmes
en faisant entendre qu'on a mis sa sincérité en
doute, ce qui est absolument inexact, et en don-
nant à son critique des torts que celui-ci n'a pas.
Il est entendu que M. Chevrillon est un ami de la
vérité. Mais, pour lui, la vérité est qu'il n'y a point
de vérité •: l'amour même qu'il lui porte est donc'
ce qui l'oblige à la combattre. Plaisant sophisme,
qui rappellerait celui du Crétois, si ce n'était sur-
tout un jeu de mots. La vérité dont M. Chevrillon
se proclame l'ami n'est évidemment pas celle dont
il nie la souveraineté. M. Chevrillon oublie par-
fois le sens des mots, au point de croire qu'un
« batteur d'estrade est un homme qui fait des
boniments sur des tréteaux (p. 132 de son vo-
lume). Parfois, il emploie les mots dans des ac-
ceptions différentes d'une ligne à l'autre. Quant
aux règles de la logique, si on 'les méconnaît d'au-
tant mieux qu'on les honore davantage, il faut
que M. Chevrillon les ait bien pieusement hono-
rées, quoi-que d'un culte très secret, car il les viole
avec entrain. D'une distinction banale entre 'la
valeur idéale et l'empire effectif, il tire des con-
séquences fallacieuses. L'empire effectif de la vé-
rité, de 'la raison, de la justice, ne peut jamais
être si absolu qu'il ne connaisse point de rebelles
nul ne l'ignore. Mais parce qu'il y a des malfai-
teurs, M. Chevrillon en conclut-il quo la morale
n'est point souveraine? ou qu'elle n'a qu'une va-
leur idéale? Si elle n'avait pas un certain empire
effectif, elle n'aurait pas la valeur du tout pour
le. politique et l'historien elle serait reléguée
parmi les pures chimères. M. Chevrillon se donne
beaucoup de peine pour établir que l'Allemagne
'n'a .point reconnu la souveraineté de la vérité et
de la raison. C'est enfoncer une porte ouverte, et
nous croyons pouvoir supprimer cette tirade. La'
vérité et la raison n'en étaient pas moins souve-
raines; idéalement d'abord, mais pratiquement
aussi, en France, en Angleterre et ailleurs. Si per-
sonne n'en avait jamais reconnu la souveraineté, si
l'empire n'en'avâît jamais été effectif 'huile, part,-
'la question de savoir s'il y a 'lieu de travailler à
leur triomphe ne se serait même pas posée. M.
Chevrillon commet donc une erreur en affirmant
que la vérité et la raison ne sont pas souveraines
en fait; elles le sont en fait comme en droit, dans
les pays civilisés, et c'est môme à ce signe qu'on
distingue ces pays-là des autres.
M. Chevrillon reproduit ensuite la fameuse
phrase dont nous avions détaché le mot essentiel.
Nous l'avions trouvée un peu longue M. Che-
vrillon lui-même a partagé cet avis, puisqu'il
a coupé trois ou quatre ligues, ainsi qu'on pourra
s'en convaincre en se reportant à la page 231 de
son livre. Enfin, puisqu'il y tient, voici
La grande leçon de l'événement qui bouleverse le
monde, à savoir que le monde n'est pas mené par la
raison, que des puissances irrationnelles sentiment,
orgueil, rêves collectifs, fanatisme, volonté de puis-
sance et de conquête sont toujours latentes au fond
des peuples, déterminant par leurs explosions les grands
mouvements de l'Histoire. que la vérité pas plus
que la raison n'est souveraine, puisque soixante-cinq
millions d'Allemands croient sincèrement ce qui n'est
pas, puisque s'ils sont vainqueurs, leur erreur et le
mensonge de leurs maîtres prévaudront, cette leçon
n'a pas eu de prise sur les théoriciens et les rêveurs
qui n'ont pas senti comme leurs frères de France la
terre trembler et prête à se dérober sous leurs pieds.
C'est une belle phrase. Et c'est toujours la
même question. Sous prétexte que dans certains
cas l'irrationnel garde une action et reste une
menace, faut-il lui sacrifier la raison, la justice,
la liberté? Faut-il se réjouir des périls créés par
l'irrationnel, et en abuses pour parler avec ironie
et mépris de la liberté, de la justice et de la rai-
son ? Le livre de M. Chevrillon incline bien dans
cette dernière direction. Pour tout lecteur de
bonne foi, il tend à condamner, au nom des pré-
tendues leçons de la guerre, les principes ration-
nels, démocratiques et libéraux. C'est ce que nous
avons cru nécessaire d'indiquer au public.
M. Chevrillon assure maintenant qu'il n'a voulu
attaquer que quelques théoriciens et leaders
comme MM. Ramsay Macdonald, E. Morel, etc.:
Les obstinés pacifistes anglais dont je parlais
croyaient établi pour toujours le règne de la raison. Ils
vivaient dans ce qu'on appelle dans leur pays a fool's
paradise. Au lieu de paradis, nous avons aujourd'hui
l'enfer. Quand la guerre sera finie, il serait bon de
se rappeler longtemps cette leçon du réel et de ne pas
laisser d'obstinés rêveurs, au nom des vertus souve-
raines de la vérité et de la raison, nous ramener an
dangereux paradis que la langue anglaise caractérise
si bien.
Dans son livre, M. Chevrillon n'a pas incriminé
seulement ces obstinés pacifistes, que tout le
monde lui abandonne, et qui ne sont pas du
tout des rationalistes (car la raison ordonne de
tenir compte du réel), mais des mystiques et des
songe-creux. Il a bel et bien critiqué toute la
politique démocratique de l'Angleterre contempo-
raine, la politique qui « revenait à l'idéal de jus-
tice et de raison » (page 16), et qui était celle
du gouvernement et par conséquent de la majorité
du pays. Cette politique de « justice et de rai-
son » est-elle nécessairement incompatible avec
la défense nationale? C'est bien ce que M. Che-
vrillon essaye de démontrer, ou d'insinuer. Mais s
ce n'est point notre avis.
Enfin M. Chevrillon se défend d'avoir attaqué
les valeurs de l'intelligence. Attaqué? Non, si l'on
veut. Mais il ne perd pas une occasion d'affirmer
que le premier rôle dans le monde appartient aux
valeurs affectives, etc. Il ne s'en afflige point,
tant s'en faut En ce. qui concerne l'Angleterre,
il constate avec complaisance et à maintes repri-
ses que ces valeurs de pensée n'y étaient pas esti-
mées très haut. Il annonce que cela va changer, et
il ne le regrette point, dit-il. Soit Mais il per-
siste à écrire « .De la décadence il .(l'Anglais)
est bien plus loin que l'Allemand, ne fût-ce que
parce que sa culture est beaucoup plus morale et
beaucoup moins intellectuelle. » (p. 297). Ainsi,
pour M. Chevrillon, la culture intellectuelle est
une preuve de décadence. Avant de nous répondre,
il n'eût pas mal fait de relire son livre, qui n'a
certes pas cette rigueur de composition qu'on ad-
mire chez l'oncle Taine, et qui, à parler net, ne
trouve une vague unité que dans la tendance
générale antiintellectualiste et réactionnaire, mais
dans le détail, se révèle assez désordonné et in-
i cohérent. P. &.
l)1 .G.U. E.8,E..
LA SITUATION MILITAIRE
Les troupes britanniques ont attaqué hier
après-midi, sur un front de 6 kilomètres, du
bois Delville au bois de Leuze et se sont empa-
rés de Ginchy.
Sur ce front de 'combat les Allemands n'ont
donc pu se maintenir que dans des tranchées
formant aujourd'hui un saillant large de deux
cents mètres à peine, à l'ouest de Ginchy, et
qu'ils sont hors d'état de conserver.
Nos alliés ont en même- temps enlevé six
cents mètres de tranchées ennemies au norf'
nes. Entre Pozières et le bois Delville, ils s'é-
taient emparés, la nuit précédente, d'une tran-
chée, à l'intérieur du bois des Foureaux.
L'ennemi a reculé, et dans ces combats il a
laissé entre les mains des soldats britanniques
de nombreux prisonniers.
Sur notre ligne de combat, la lutte a été
non moins active. Nous avons fait quel-
ques progrès à l'est de Deniécourt et de
Belloy. L'ennemi a tenté de nous repren-
dre le terrain que nous lui avions enlevé entre
.ces deux villages, au nord-est de Berny. Cette
attaque, qui a échoué, n'a eu comme résultat
que de lui coûter nombre de soldats restés sur
le carreau. En vain, pendant la nuit dernière,
les Allemands ont prononcé, en les accompa-
gnant de jets de liquides enflammés, de puis-
santes attaques sur nos positions entre Belloy
8%.Barleux, ainsi qu'au sud-ouest de Berny, à
l'est de Deniécourt et au sud de Vermandovil-
lers toutes ces attaques ont finalement échoué.
Les gazettes allemandes ont grand'pcine à
présenter à leurs lecteurs les combats de la
Somme sous un jour favorable. Notre infan-
terie serait exténuée et ne pourrait plus atta-
quer sans que le canon lui ait préparé la voie,
de façon qu'elle n'ait plus qu'à cueillir les
défenses allemandes. Les journaux français
n'ont pas besoin de démontrer à leurs lecteurs
'que nos soldats n'ont rien perdu de leur mor-
dant, mais que leurs chefs sont économes de
Ja vie de ces braves gens et ne les lancent à
l'assaut que sur des positions que les obus ont
̃émiettées; ils n'économisent pas leurs muni-
tions, ils économisent leurs Jiommes; nenx-ci
le savent, et quand il s'agit de sortir de leurs
tranchées, il courent à grande vitesse sus à
l'ennemi, qui s'en aperçoit, puisque, rtomiis
le 3 septembre, il a perdu 7,700 prisonniers, et
que le nombre des cadavres qu'il a 1aissâs,.dans
ses tranchées est considérable.
Dans la région de la Meuse, nous avons fait
aussi des progrès; nos soldats ont enlevé tout
un réseau de défenses à l'est de Fléury et en
ont ramené trois cents prisonniers et seule-
ment deux officiers. C'est loin d'être la propor-
tion normale; alors, de deux choses l'une: ou
les officiers sont obligés de payer de leur per-
sonne plus que d'habitude pour maintenir leurs
soldats devant les nôtres, ou une pénurie de
cadres commence à exister chez l'ennemi.
̃ La lutte est toujours très acharnée au nord-
'jG.st de Haîicz; sur' les bords de la Narayouvka,
les Russes ont repoussé une contre-attaque de
troupes allemandes et turques. Il semble que
la résistance de l'ennemi dans cette région
touche à sa fin, au moins si nous nous en rap-
portons à une correspondance russe que nous
transmet l'agence Havas. L'infanterie russe oc-
cuperait déjà plusieurs forts que l'ennemi a
abandonnés après les avoir détruits.
L'action des Russes s'accentue dans les Car-
pathes, au sud-ouest de Kimpolung; les dépê-
ches allemandes annoncent que nos alliés met-
tent en ligne des forces très importantes contre
leurs positions s'étendant du nord-ouest du Ka-
poùl à Dorna-Vatra, et qu'à leur gauche, nos
ennemis ont dû céder a la pression dans la
vallée du Cibo, rivière qui passe à l'ouest du
'Kapoul et se jette dans la Goldene-Bistritza,
près de Kirlibaba.
Nous n'avons pas encore de communiqué
•roumain régulier. Nous devons donc pro-
visoirement nous en tenir aux dépêches enne-
mies et aux correspondances particulières.
Hier, nous avons dit que les Autrichiens, recu-
lant devant les forces roumaines, s'étaient re-
pliés à l'ouest de CziknSzereda, sur le massif
d'Argitta; ils y sont maintenant attaqués; le
morceau doit être dur à enlever et ne le sera
pas en un jour; les rédacteurs de dépêches
de Budapest auront beau jeu pour prétendre
que les attaques roumaines sont infructueuses.
Nous disions également hier qu'un combat
violent était engagé entre Orsoya et Hermann-
stadt, sur la route de Petroseny à Hatseg. L'état-
major autrichien parlait hier de ce combat
en des termes peu clairs1; il commençait par
dire que les Roumains avaient été rejetés par
les troupes autrichiennes au delà de leurs po-
sitions premières, et il ajoutait qu'une nou-
velle et forte attaque contre l'aile droite de
œ groupe avait occasionné le retrait de celui-ci
sur ses anciennes positions. Quel groupe ? En
examinant de très près cette dépêche, on ne
peut en déduire qu'une chose: c'est qu'au dé-
but, les Roumains ont reculé; mais qu'un ren-
fort leur arrivant à leur aile gauche, ils ont
repris l'offensive et refoulé vigoureusement
leurs adversaires.
Quant à ce qui concerne le front du Da-
nube, un radiotélégramme de Bucarest an-
nonce que les troupes russes et roumaines ont
repoussé les Germano-Bulgares à Dobritch,
dans la Dobroudja; c'est un bon début de l'in-
fanterie russe dans cette région.
1
LA SITVATIOH DIPLCMATIQVB
Des troupes turques se battent en Dobroudja
et sur le front russe. Elles ont quitté Cons-
tantinople et la Thrace pour venir au secours
des Bulgares et des Austro-Allemands au lieu
de défendre leur propre territoire. La main-
mise allemande sur les gouvernants de Cons-
tantinople est un fait patent. Mais pour que
le kaiser et les anciens vassaux du Grand-Sei-
gneur aient obtenu que les vrais croyants se
fassent 'tuer à leur service, il faut que la Tur-
quie sente elle-même la gravité du péril qui la
menace en Europe.
Des opérations qui sont en cours' depuis
l'Albanie jusqu'en Bukovine, en passant par
la Macédoine, dépendent les communications
turques avec les empires centraux. Que cel-
les-ci soient coupées et l'empire. ottoman s'é-
croule. D'Allemagne viennent les munitions,
l'artillerie qui lui permettent de soutenir la
lutte. La voie ferrée Constantinople-Vienne
est le cordon ombilical qui nourrit la force mi-
litaire du sultan et lui fournit ses moyens de
résistance. Qu'il soit rompu, c'est la mort. Ce
sont les Dardanelles ouvertes à bref délai et
Constantinople aux mains de l'ennemi!
Que l'armée turque serve à maintenir la
puissance des chrétiens en Orient et des Bul-
gares dans les Balkans, c'est un spectacle peu
banal. La Turquie ne se résigne à démentir
ainsi tout son passé que .parce que sa propre
existence est en jeu. Ce n'est pas par obéis-
sance aveugle à l'empire allemand1 que le sul-
Uan se Drive au profit des roumis d'une ̃partie
de ses meilleurs soldats. C'est son trône qu'il
défend
La partie militaire qui se joue en Orient
n'a pas seulement pour enjeu le sort de la
Turquie. D'elle dépend aussi celui de ki. Bulga-
rie. D'elle dépend également pour les alliés la
liaison de tous leurs fronts du Trentin à la
Baltique. C'est le cercle définitivement fermé
autour des empires centraux, privés de leurs
auxiliaires turcs et bulgares et réduits à leurs
seules forces.
La clef de cette situation, qui réaliserait
sur la carte elle-même l'unité de front, se
trouve en Macédoine, représentée par l'offen-
siv.e du général Sarrail en corrélation avec
l'action russo-bulgare dans la région Danube-
Dobroudja. L'importance capitale de l'armée
de Salonique et son rôle principal pour la pré-
paration de la victoire finale sautent aux yeux
de tous. Rien ne peut donc être négligé pour
assurer son succès.
a£»
COSMIQUE OFFICIEL DU 9 SEPTEMBRE
Onze heures soir
Dans la région de la Somme, assez grande
activité de l'artillerie de part et d'autre. Un
combat à la grenade nous a rendus maîtres
d'un élément de tranchée ennemie à l'est de
Belloy. Nous y avons fait une trentaine de pri-
sonniers. L'ennemi, après avoir exécuté un vio-
lent bombardement, a tenté de nous reprendre
les positions que nous avons récemment con-
quises au nord-est du village de Berny. Il a
été repoussé en subissant de lourdes pertes.
Dans la région de la Meuse, à l'est du vil-
lage de Fleury-devant-Douaumont, nos troupes
ont emporte d'assaut, dans l'après-midi, tout
un système de tranchées allemandes. On an-
nonce déjà que deux cents prisonniers dont
deux officiers ont été ramenés dans nos lignes
à la suite de cette brillante action, et que nous
avons pris plusieurs mitrailleuses.
Rien d'important à signaler sur le reste du
front.
COfflfflUrilQUÉ BRITANNIQUE DU 9 SEPTEMBRE
Onze heures 20 soir
Nous avons attaqué cet après-midi, depuis
le bois Delville jusqu'au bois de Leuze, sur un
front de 6 kilomètres. Après de violents com-
ibats, le village de Ginchy en entier est entre
nos mains, ainsi que le terrain qui va jusqu'au
bois de Leuze. A l'est du bois Delville notre
avance est de 300 mètres sur un front de 500.
Les prisonniers sont nombreux et l'ennemi
a subi de très lourdes pertes.
Au nord-est de Pozières, nous nous sommes
encore empares de 600 mètres de tranchées en
faisant 30 prisonniers. Au moment où l'ennemi
se massait pour une contre-attaque, il a été
pris sous le feu de notre artillerie et a beau-
coup souffert.
Notre artillerie a bombardé les tranchées en-
nemies de Vimy, en face de Souchez, et du
Cabaret-Rouge.
Lutte d'artillerie autour de Galonné, de Cuin-
chy et entre le canal de la Bassée et Neuve-
Chapelle.
De nombreux combats aériens ont eu lieu
dans ta journée çpfi'fêr. Nos avions ont énoôïë
bombardé un aérodrome ennemi. Trois han-
gars ont été détruits. Un de nos appareils man-
que.
COfllfflUNIQUÉ OFFICIEL BELGE DU 9 SEPTEMBRE
Hier, en fin de soirée, une violente lutte d'ar-
tillerie de tranchée et de campagne s'est dérou-
lée dans la région de Boesingthe et a continué
au cours de la nuit. La journée a été générale-
ment calme sur le front belge.
&.
FRONT RUSSE
COMMUNIQUÉ OFFICIEL
Petrograd, 9 septembre.
Dans la direction de Halicz, sur la rivière
Narayouvka, nous avons repoussé, par notre
feu, une contre-attaque des Allemands et des
Turcs.
Des combats acharnés continuent dans cette
direction.
[De son côté, le correspondant du Bousskoïé Slovo
télégraphie que les efforts des Austro-Alleman.ds pour
maintenir Halicz en leur pouvoir s'épuisent rapidement.
Dans la nuit du 7 septembre, l'ennemi a commencé à
faire sauter les forts de la ville, dont plusieurs sont
déjà occupés par l'infanterie russe. Le lendemain ma-
tin, l'adversaire a. fait sauter le grand pont du Dniester.
Les Russes tiennent déjà toute la rive gauche de la ri-
vière. L'artillerie russe tire avec une violence extraoi>
dinaire sur les forces ennemies, qui se retirent peu à
peu de la ville. Une batterie a réussi à cribler de pro-
jectiles deux trains militaires qui emportaient des trou-
pes ennemies de Halicz et a mis en pièces la plupart des
wagons, tuant ceux qui les occupaient. La chute de la
ville est attendue d'une heure à l'autre.]
Sur la frontière hongroise
Dans les Carpathes boisées, au sud de Bara-
nof, nos troupes ont enlevé une série de hau-
teurs et ont capturé plus de 500 hommes, 5 mi-
trailleuses et une batterie de montagne utili-
sable. Plusieurs canons ont été jetés par l'en-
nemi dans des ravins.
Au Caucase et en Mésopotamie
Un combat acharné se poursuit dans la ré-
gion du village d'Oghout.
Un entretien avec le général Broussilof
Notre envoyé spécial sur le front russe nous adresse,
à la date du G septembre, du quartier général du front
sud, la dépêche suivante
Je viens d'avoir l'honneur d'être reçu par le
général Broussilof, don N'éclatante victoire de mai
annihila une armée de 450,000 Autrichiens, et
qui continue à développer vigoureusement jusqu'à
ce jour ses heureuses conséquences.
Le général Broussilof, qui est plein d'opti-
misme, dit qu'il a actuellement devant lui une
armée ennemie en somme plus nombreuse que
celle qu'il a détruite en mai. Elle est composée
des dernières ressources des Austro-Hongrois, de
renforts tirés du front italien, d'Allemands venus
du front russe septentrional( ̃"
«.Plus la liaison sera grande entre les alliés,
me déclara le général, plus leurs mouvements se-
ront coordonnés, et plus la guerre finira vite. Il
faut de toute nécessité que tous les fronts se bat-
tent simultanément et continuellement. Voilà la
condition essentielle d'un succès rapide.
» 'Heureusement, les brillantes offensives franco-
anglaises sur le front ouest empêchent les Alle-
mand d'amener contre nous des renforts assez
nombreux pour arrêter notre avance, qu'ils peu-
vent tout au plus retarder. »
Le général Broussilof considère l'entrée en
scène de la Roumanie comme un événement de
.premier ordre. « Bientôt, dit-il, la coopération de
la brave armée roumaine, qui est excellente et
bien commandée, nous aidera à obtenir des avan-
tages déflnitifs, et l'Autrichc-Kongric, déjà aux
abois, se trouvera hors d'état de résister davan-
I tage. »; ̃.̃̃•'̃
Je. reviendrai, dans une prochaine lettre, sur,
cet entretien d'un haut intérêt. Ludovic Naii-
deau.
Nouvelles austro-allemandes
Les états-majors allemand et autrichien enre-
gistrent l'un et l'autre, à la date du 9 septembre,
Ta nouvelle avance russe dans les Carpathes.
'Vienne écrit « Après de fortes attaques enne-
mies contre les hauteurs à l'est de la vallée du
Cibo, l'ennemi a pris possession de quelques po-
sitions dans ce secteur; sur tous les autres points
de notre front des Carpathes a régné un calme.
relatif. » Et Berlin écrit de son côté « Dans les
Carpathes, i'ennemi met en ligne des forces im-
portantes contre nos positions sur les hauteurs
à l'ouest et au sud-ouest de Schipoth et près de
Dorna-Vatra; au nord-ouest de Kapouf, nous'
avons cédé à la pression. »
Les deux états-majors disent, d'autre part, que
les attaques russes répétées entre la Zlota-Lipa
et le Dniester ont été repoussées, ajoutant que
« l'héroïque conduite des troupes ottomanes qui'
combattent dans cette région mérite une mention
particulière ».
FRONTJTALlEft
COMMUNIQUÉ OFFICIEL
Rome, 9 septembra
Dans la Vallarsa (Adige), dans la soirée du 7,
un détachement ennemi, après une intense pré-
paration d'artillerie, a pris d'assaut nos posi-
tions entre le mont Spil et le mont Corno, et
a réussi à pénétrer dans quelques tranchées.
Nous les avons reprises par une vigoureuse
contre-attaque, et avons infligé de graves per-
tes à l'ennemi; une vingtaine de prisonniers.
sont restés entre nos mains.
Dans la zone de To fana, une attaque contre
les positions conquises par nos alpins dans
la journée du 7, dans'la vallée de Travenanzes,
a été repousEce.
Sur le reste du front, les actions habituelles
des deux artilleries ont été gênées par le mau-
vais temps.
La nôtre a .bombardé la gare de Santa-Lu-
cia-di-l'olmino, où l'on signale un immense
mouvement de trains.
[Santa-Lucia-di-Tolmino est au sud de Totaino, sur
la ligne qui descend vers Gorizia.J
La nuit dernière, un de nos dirigeables, mal-
gré les mauvaises conditions atmosphériques,
a suivi la route du chemin de fer de Duino-
Trieste et est rentré indemne, après avoir lancé
600 kilogrammes d'explosifs sur des installa-
tions qui ont été dévastées.
L'appel sous les drapeaux
Rome, 9 septembre.
Le ministère de la guerre a ordonné l'appel, pour
le 21 du courant, des recrues de première, deuxième
et troisième catégories de la classe 1897, actuelle-
ment en congé provisoire, et des inscrits maritimes
des classes 1882 à 1888, qui avaient été réformés ei
qui sont sujets à une nouvelle revision.
«$>
FRONTdes BALKANS
'̃ •̃̃•'• Hi ïfflffwsédoine
'ciOMM'u~riG'aTS oB'FidBi~ I3R3TANNIQ~
Londres, 9 septembre.
La lutte d'artillerie continue sur tout le front
de Doiran.
Sur le front de la Strouma, dans la soirée du
7 septembre, notre artillerie a fait taire une
batterie ennemie qui bombardait le .pont d'Orl-
jack.
Notre artillerie a dispersé plusieurs détache-
ments.
̃ «s»». ̃
FRONT ROUMAIN
GOiMiMrtTifTiQ-crÉ Officiel h.otj3m^lXit
Bucarest, 8 septembre,
Front nord-ouest. Après des luttes vives,
nous avons occupé les localités de Poplitza
(Olah-Tiplitza), de San-Milai (Czik-Szenit-
Mihal), de Delne (Gzik-Delne), de Gîurh-Szent-
Miclau (Gyergyo-Szent-Miklos).
Des attaques ennemies ont été repoussées au
sud de Mahadia.
[Les localités du premier paragraphe ci-dessus sont
toutes dans la région du massif de Gyérgyo, au nord-est
de la Transylvanie, tandis que Mahadia, ou Mcbadia, est
située au nord d'Orsova, sur le chemin de fer de Te-
mesvar.]
Front sud. Les forces russo-roumaines ont
repoussé les Bulgares à iBazarjic (Dobritch).
Des attaques aériennes ont eu lieu. Des aéro-
planes ennemis ont jeté -des. bombes sur Cons-
tantza, blessant deux femmes et un enfant.
GOIKIMTTITIQ'C-B OPFIClEIi E.XJSE523
Petrograd, 9 septembre.
Le 7 septembre, nos torpilleurs ont bonw
bardé le port de Bfoltchik, occupé par les 'Bul*
gares, au nord de Varna;. ils ont coulé 21 bar-
ques, où les Bulgares chargeaient des blés.
Des hydravions ennemis ont attaqué sans
succès nos torpilleurs.
Nouvelles austro-allemandes
L'état-major allemand qui, le 8 septembre, an-
nonçait que des attaques russo-roumaines avaient
été repoussées au nord de Dobritch, disait, le 9,
que « près de Dobritch la nouvelle attaque enne-
mie a encore échoué ».
De son côté, l'état-major autrichien, à la date
du 0, assure avoir rejeté sur leurs anciennes posi-
tions les troupes roumaines qui avaient attaqué,
sur la route de Petroceny à Hats-zeg, Il affirme
également avoir repoussé les attaques menées;
contre les hauteurs a l'ouest de Czik-Szerada. Et'
il ajoute qu' « en dehors de cela la situation est
sans changement ».
c$» i
Ba~yBB~ &~ Em~Bn~a !&
Ea Egypte
OOMÏxIXrNTQTJÉ OFPICHE1 EXVIT.â.IsrïTipTT33 .'̃
Londres, 9 septembre.
Le 8 septembre, trois de nos avions ont fait
de nouveau un raid sur 'El-Mazarî vingt bom-
bes 'ont été jetées, dont onze ont causé des
| effets visibles dans les camps ennemi».
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