PARI PARI PARI PARI 26£
» Tous, les hommes valides accourent au
à cri Ni un pouce de terrain, ni une'
» pierre de nos forteresses. Sus à l'ennemi
» Guerre outrance
Cette dépêche exagérait malheureusement
la réalîté. La province était dans le désar-
roi, consternée, stupéfiée, et ce n'était pas
la délécation sénile de Tours, MM. Crémieux
et Glais-Uizoin, auxquels on avait adjoint
l'amiral Fourichon, qui pouvait l'arracher à
ce sommeil du tombeau. Le gouvernement
de Paris songea donc, et il aurait dû le faire
plus tôt, nous le répétons, à fortifier sa dou-
rare au moyen d'un élément de patriotisme
plus jeune et plus viril,.et c'est alors que
M. Gambetta reçut la mission de se rendre à
Tours, avec la double investiture de ministre
de l'intérieur et de ministre de la guerre. Le
7 octobre, à dix heures du matin, il monta
dans la nacelle du ballon l'Armand-Barbès,
disant avec un sonrire C'est peut-être
mon avant-dernier panier. » Au moment où le
ballon s'élança dans les airs, parti de la
place Saint-Pierre à Montmartre, une im.
mense acclamation jaillit de toutes les poi-
trines « Vive Gambetta Vive la Républi-
que Vive la France » Gambetta emportait,
au nom du gouvernement de la Défense na-
tionale, la proclamation suivante, adressée à
la province
La population de Paris offre en ce mo-
ment un spectacle unique au monde
» Une ville de deux millïons d'âmes, inves-
tie de toutes parts, privée jusqu'à présent,
par la criminelle incurie du dernier régime,
de toute armée de secours, et qui accepte
avec courage, avec sérénité, tous les périls,
toutes les horreurs d'un siége.
» L'ennemi n'y comptait pas il croyait
trouver Paris sans défense la capitale lui
est apparue hérissée de travaux formidables
et, ce qui vaut mieux encore, défendue par
400,000 citoyens qui ont fuit d'avance le sa-
crifice de leur vie.
» L'ennemi croyait trouver Paris en proie
à l'anarchie; il attendait la sédition, qui
égale et qui déprave; la sédition qui, plus
sûrement que le canon, ouvre à l'ennemi les
places assiégées.
» II l'attendra toujours. Unis, armés, ap-
provisionnés, résolus, pleins de foi dans la
iortune de ta France, les Parisiens savent
qu'il ne dépend que d'eux, de leur bon ordre
et de leur patience d'arrêter, pendant de
longs mois, la marche des envahisseurs.
» Français c'est pour la patrie, pour sa
gloire, pour son avenir que la population
parisienne affronte le fer et le feu de l'é-
Vous qui nous avez déjà donné vos fils,
vous qui nous avez envoyé cette vaillante
garde mobiles dont chaque jour signale l'ar-
deur et les exploits, levez-vous en masse et
venez à nous isolés, nous saurions satuver
l'honneur; mains, avec'vous et par vous, nous
jurons de sauver la France. »
Après le départ de 111. Gambetta, le minis-
tére de l'intérieur fut occupé par M. Jules
Favre; les manifestations continuèrent à se
produire, indice de l'état de surexcitation
dans lequel se trouvait la capitale et de l'im-
patience fébrile qui la tourmentait. Le 8 oc-
tobre, on lisait dans le Jonrnal officiel
« Le gouvernement avait pensé qu'il était
opportun et conforme aux principes de faire
procéder aux élections de la municipalité de
Puris; mais, depuis cette résolution prise, la
situation ayant été profondément modifiée
par l'investissement de la capitale, il est de-
venu évident que les élections faites.sous le
canon seraient un danger pour la République.
Tout doit céder à l'accomplissement du de-
voir militaire et a l'impérieuse nécessité de
la concorde. Les élections ont donc été ajour-
nées elles ont dû l'être.
» D'ailleurs, en préseuce des sommations
que le gouvernement a reçues et dont il est
encore menacé de la part des gardes natio-
naux en armes, son devoir est de faire res-
pecter sa dignité et le pouvoir qu'il tient de
la confiance populaire.
» En conséquence, convaincu que les élec-
tions porteraient une dangereuse atteinte à
la défense, le gouvernement a décidé leur
ajournement jusqu'à la levée du siège. »
Ce même jour, le commandant Sapia, du
146a bataillons, faisait appel à la guerre ci-
vile en distribuant des cartouches a ses hom-
mes et en les engageant à marcher sur l'Hô-
tel de ville; mais il fut arrêté et conduit à
l'état-major de la place par les gardes na-
tionaux eux-mêmes. Le conseil de guerre,
réuni pour le juger, l'acquitta. Nous le re-
trouverons encore au 22 janvier.
Ce fut au lendemain de ces incidents que
M, de Kératry donna sa démission de préfet
de police et partit en buldon pour la province
avec une mission militaire. Il fut remplacé
dans ses fonctions par M. Edmond Adam,
ancien représentant du peuple. En même
temps, M. Ranc cédait à Gustave Chaudey
la pluce de maire du IXe arrondissement. La
municipalité de Paris était alors ainsi com-
poséo
Ier ar·rond. Tenaille-Saligny, avocat à la
cour de cassation.
« Signé GLAIS-BIZOIN. »
'Français,
Maire de Paris, Etienne Arago.
IIe arrond. Tirard, négociant.
IIIe arrond, Bonvalet, négociant.
IVe arrond. Greppo" ancien représentant
du peuple.
Vte arrond. Hérisson, avocat à la cour de
cassation. 1
Vile arrond. Ribeaucourt, docteur en mé-
arrond. Carnot, ancien membre du
gouvernement provisoire de 1848.'
XVe arrond. Corbon, ancien représentant
du peuple.
XVII» arrond, François Favre, homme de
lettres.
XVIIIe arrond. Clemenceau, docteur en mé-
decine.
Cette municipalité, qui n'était plus exacte-
ment celle des premiers jours de septembre
et que les élections allaient modifier, conti-
nua l'organisation du service de la boulange-
rie et de la 'boucherie,
Chaque famille reçut.une carte pour le pain
et une pour la viande, et fut astreinte à se
servir toujours à la même boulangerie et à
la même boucherie, pour le pain tous tes jours,
pour la viande tous les trois jours, Cette
dernière fut d'abord rationnée à 100 grammes
par personne et par jour; mais, à mesure
qu'elle diminua, la ration descendit jusqu'à
25 grammes 75 grammes par personne pour
trois jours. On consomma d'abord les bœufs,
les moutons et.les porcs; puis il fallut se re-
jeter sur la viande de aheval, depuis le milieu
d'octobre jusqu'à la 1in du siéne. Quelques
personnes ne parvinrent jamais à surmonter
la répugnance que leur causait le cheval et
aimèrent mieux s'exposer à mourir de faim
que d'en manger; maïs la grande majorité s'y
habitua très-facilement, et nous devons dire
que, le premier dégoût une fois surmonté, on
trouva cette viande presque aussi bonne que
le bœuf. Aujourd'hui, a Paris, elle n'inspire
plus aucune répulsion. Mais il faut dire aussi
que c'était de la viande de choix, provenant
de chevaux parfaitement sains jeunes, vi-
goureux,et cela pour une excellente raison,
c'est que l'administration s'emparait de tout,
moycnnant indemnité, et que le cheval du
riche dut tomber en holocauste comme celui
du charretier. Dès les cinq heures du matin,
souvent par une pluie battante, on voyait
d'immenses queues se dérouler à la porte des
boucheries chaque nouveau venu prenait sa
place à la suite malheur à l'impatient qui
eût voulu se glisser sournoisement dans le
rang les hommes l'eussent accablé de ho-
rions les femmes ne lui eussent pas laissé
un cheveu sur la tête. Cependant, comme
l'humanité ne perd jamais ses droits sur la
population parisienne, nous avons vu plus
d'une fois une pauvre femme enceinte ou
malade être l'objet d'un tour de faveur. Vers
sept heures arrivait le piquet de gardes na-
tionaux chargé de présider à la distribution
et de maintenir le bon ordre. Chose presque
incroyable, et qui est un témoignage écla-
tant du sentiment qui animait la population,
dans ces foules affamées, impatientes, expo-
sées en plein vent à toutes les rigueurs de la
saison, nous n'avous jamais vu qu'on dût re-
courir à la force pour maintenir la discipline.
Chacun prenait bravement son parti de tou-
tes ces longueurs. On piétinait dans la boue,
on recevait la pluie ou la neige sur le dos,
n'importe on trouvait encore l'occasion de
s'égayer et de rire, car Dieu sait ce qui se
lançait de lazzis dans ces rangs pressés et
confondus.
Au commencement d'octobre, les subsis-
tances courantes commençaient à devenir
rares; voici un aperçu du prix des denrées à
cette époque, aux Halles centrales
Les brochets passables valaient de 7 à
14francs la pièce;
Le goujon, 1 t'r. 50 à 3 francs l'assiettée;
Le beurre frais, en très-petite quantité,
5 francs la livre; le_beurre salé, 3 t'r. 50 à
4 francs;
Mais nous ne sommes encore pour ainsi
dire qu'au commencement du siège, et nous
donnons le prix de la huile; en ville, et sur-
tout dans les quartiers éloignés, c'est bien
autre chose nous avous vu payer 1 fr, 5o
et même 2 francs un simple pied de céleri.
Au reste, nous donnerons un second aperçu
du prix -des denrées à la fin du siége on
verra dans quelle effrayante proportion la
prix du moindre aliment avait monté.
Revienons maintenant aux opérations mili-
taires.
Le 7 octobre, le général Vinoy fit occuper
le village de Cachan; le s, une colonne com-
posée d'infanterie de marine que dirigerait le
chef de bataillon Bouzigou, est d'éclaireurs de
Ve arrond. J.-B. Bocquet.
IXe arrond, Gustave Chaudey.
Xe arrond. O'Reilly.
Xie arrond. Mottu, banquier.
Xile arrond. Alfred Grivot, négociant.
XIIIe arrond. pernotet, ingénieur.
XIVe arrond. Ducoudray.
XVie arrond. Henri Martin.
XIXe arrond. Richard, fabricant.
XXe arrond. Braleret, commerçant.
Les barbillons moyens, de 4 à 7 francs;
Les belles anguilles, de 12 à 15 francs;
Les petites tances, 1 franc
Le chou-fleur, 0 fr. 75 à 1 fr.
Les beaux choux 1 fr. 20 à 1 fr. 50
Le haricot fiageolet, 2 franes le litro;
Les oies, de 10 à 24 francs
Les dindons, 15 francs;
Les lapins, de 6 à 8 francs.
A neuf heures du matin, le général Vinoy,
commandant du 13e corps, donna le signal
de l'attaque. Tandis que deux bataillons du
13e de marche, appuyés par 500 gardiens de
la paix mobilisés, emportent Clamart sans
rencontrer de résistance, le général Susbielle
se porte sur Chàtillon par la droite et ca-
nonne vivement la position en même temps,
les forts de Montronge, de Vanves et d'Issy
appuient le mouvement par des feux habile-
ment combinés. Le général Susbielle lance
alors ses soldats à l'attaque du village. Ils
sont accueillis par une vive fusillade qui part
des maisons et de deux barricades, qu ils en-
lèvent avec un élan irrésistible; puis ils s'a-
vancent jusqu'à l'égide et à la route qui
relie Chatillon et Clumart. Un coup de feu a
blessé le général à la jambe mais il n'en reste
pas moins à cheval et continue à diriger sa
Sur la gauche, le village de Bagneux fut
enlevé par les mobiles de la Côte-d'Or, qui
se conduisirent d'une fnçon brillante. Le ba-
taillon des mobiles de l'Aube ne déploya pas
moins de bravoure, bien que ces jeunes gens
vissent le feu pour la première fois. Le rap-
port du général Vinoy leur rendit cette jus-
tice qu'ils s'étaient montrés sous le feu aussi
solides que de vieilles troupes. Mais ils payèrent
cette gloire d'une perte cruelle leur chef, le
commandant de Dampierre, fut frappé à mort.
Comme il voyait ses soldats hésiter à l'entrée
du village de Bagneux, il s'élança leur tête
sous une grêle de balles « pllons, mes en-
fants, en avant » En même temps il tombait,
atteint d'une balle au ventre; mais le village
était emporté. Ainsi mourait glorieusement,
jeune et riche (il n'avait que trente-trois ans),
ce digne descendant du vieux Dampierre,
mort en combattant les Prussiens sous la
première République, dit M, Jules Claretie,
et enseveli au Panthéon avec son épée de
combat, ses gants de buffle et sa drageonne
en cuir.
la Seine commandes par le colonel Lafon,
opérait une forte reconnaissance sur Bondy
et chassait l'ennemi de cette position. qu'elle
occupait jusqu'au soir. De son côté, le géné-
ral Ducrot marchait sur la Malmaison, qu'il
croyait occupée par les Allemands; mais elle
était abandonnée. Le 10, nos troupes, sous les
ordres du général Blanchard, enlevaient la
maison Millaud, en avant du fort de Mont-
rouge, d'où l'ennemi menaçait Cachan. Ce
qui explique la facilité de ces succès partiels,
c'est qu'en ce moment les troupes alleman-
des massées autour de Paris s'élevaient au
plus à 180,000 hommes. Leur ligne d'inves-
tissement, disséminée sur un si vaste espace;
ne pouvait donc pas offrir une grande résis-
tance, et le gènéral Trochu aurait pu facile-
ment jeter sur un seul point de cette ligne
un nombre au moins égal de combattants.
Mais il fallait de la résolution, de l'énergie et
une confiance que le général n'avait pas. Au
lieu d'agir sur le terrain, il discourait à l'Hô-
tel de ville, où il exerçait malheureusement
trop d'influence sur ses collègues du gouver-
nement M. Rochefort lui-même subissait ce
charme, auquel échappait néanmoins M. Er-
nest Picard, qui, bien que partisan do la paix
à tout prix, poussait le général Trochu à l'ac-
tion. C est peut-être le seul mérite qu'il ait
eu dans ces circonstances. Mais rien ne pou-
vait corriger le vice capital qui paralysait
les talents militaires du général nous vou-
lons dire l'indécision et l'absence de vo-
lonté. Après avoir longuement combiné une
opération, il engageait- nos troupes en trop
grand nombre pour une reconnaissance, en
forces insuffisantes pour livrer une véritable
bataille. C'est ainsi que, le 13 octobre, il re-
nouvela la faute commise le 19 septembre à
Châtillon. Le Il octobre, nos avant-postes
signalèrent de grands mouvements* chez les
Allemands en arrière de nns forts du sud-
ouest, de Chétillon et de Bagneux, sur la
route de Versailles à Choisy. Le bruit courut
qu'ils avaient évacué le plateau de Châtillon;
faire exécuter une reconnaissance offensive
et de réprendre le plateau s'il le pouvait. Le
13, au matin, le général Blanchard poussa en
avant à ta tête de 10,000 à 12,000 hommes di-
visés en-trois colonnes celle de droite (13e
de marche) devait agir dans la direction de
Clamart; celle du centre (général Susbielle),
sur Châtillon; celle de gauche (mobiles de la
Côte-d'Or et de l'Aube), colonel de Grancey,
sur Bagneux.
Nous retrouvons aussi au combat de Ba-
gneux le 35e de ligne et son héroïque colo-
nel, M. de La Mariouse. Placé au centre de
l'action, ce brave régiment s'élançait à l'at-
taque de Chatilion au milieu d'un feu terri-
ble mais l'entreprise était impossible nos
forces étaient insuffisantes, et il fallut bat-
tre en retraite devant les masses ennemies,
après cinq heures d'une lutte aussi glorieuse
qu'inutile. Le général Vinoy n'en constata
pas moins dans son rapport que le but de la
reconnaissance avait été atteint. Nos pertes
sont peu considérables, disait-il col es de
l'ennemi, qui est resté constamment sous
notre feu, quoique n'étant pas encore appré-
ciées en ce moment, ont un grand caractère
de gravité. C'est ainsi qu'il a laissé plus de
300 morts dans Bagneux. »
Faible consolation pour tant d'efforts per-
dus 1
Ce méme jour, 13 octobre, à la tombée de
la nuit, on apercevait d'immenses gerbes de
flamme tourbillonner au-dessus de Saint-
Cloud c'était' le château qui brûlait, incendié
par les obus du Mont-Valérien. On croyait
qu'il servait d'observatoire à l'état-major al-
lemand. Un eût dit qu'une fatalité inexorable
pensât sur cette princière demeure, où le pre-
mier Bonaparte consomma son attentat dé
Brumaire, et d'où Napoléon III déclara la
guerre à la Prusse.
Le lendemain, 14 octobre, les Prussiens
demandaient un armistice pour l'enlèvement
des morts du combatt de Bagneux, ce qui
semble justifier les affirmations du général
Vinoy au sujet des pertes qu'ils durent épron-
ver. Ce même jour, un détachement français
prit possession d'Asnières, qui fut immédia-
temènt barricadé. Nous voulions ainsi inter-
dire à l'ennemi le passage de la Seine de ce
côté.
La nuit du 18 au 19 fitt signalée par la plus
effroyable canonnade que Paris eût encore
entendue, et dont les échos retentissaient
dans les quartiers du sud avec une intensité
qui faisait continuellement trembler les vitres
des maisons; garnies de longues bandes de
papier croisées et collées pour les assurer
contre les violentes vibrations de l'air.
Le 21 octobre eut lieu une grande sortie
sur Rueil, La Jonchère, Buzenval, Bougival
et La Matmaison, et une lutte acharnée s en-
gagea à peu près sur le même terrain qui
devait encore être le théâtre de l'affaire du
19 janvier. Ce fut ce qu'on appela alors le
combat de La Malmaison, qui ne fut en réa-
lité qu'une grande reconnaissance offensive
exécutée par 12,000 hommes sous les ordres
du général Ducro,. Les troupes étaient divi-
sées en trois colonnes celle du général Ber-
thant, comprenant 3,400 hommes d'infanterie,
20 bouches à feu et un escadron de cavalerie,
destinée à opérer entre le chemin de fer d'o
Saint-Germain et la partie supérieure du vil-
lage de Raeil la colonne du général Noël,
forte de 1,350 hommes' d'infanterie avec
10 bouches à feu elle devait opérer sur le
côté sud du parc de La Malmaison et dans le
ravin qui descend de l'étang deSaint-Cucufa
h Bougïval; la colonne du'colonel Cholle-
tou, comprenant 1,600 hommes d'infanterie,
18 bouches à feu et un escadron de cavalerie.
Cette troisième colonne devait prendre posi-
tion en avant de l'ancien moulin au-dessus
de Rueil, dans le but de relier et de soutenir
la colonne de droite et la colonne de gauche.
De plus, deux réserves avaient été disposées,
l'une à gauche sous les ordres du général
Martenot, composée de S,600 hommes d'in-
fanterie et de 18 bouches à feu; l'autre au
centre, commandée par le général Paturel,
et comprenant 2,000 hommes d'infanterie,
2S bouches à feu et deux escadrons de cava-
lerie. Toutes ces troupes réunies ne formaient
pas un total en état de livrer une véritable
bataille; et cependant'tel fut l'élan de nos
soldats qu'il y eut un instant de véritable pu-
nique parmi l'état-major allemand à Ver-
A une heure, toutes nos troupes avaient
pris position, et l'artillerie ouvrait son feu sur
toute la ligne, formant un vaste demi-cercle
de la station de Rueil à la ferme de La Fouil-
leuse. Pendant trois quarts d'heure, elle con-
centra son feu sur Buzenvul, La Malmaison,
La Jonchère et Bougival. En même temps,
nos artilleurs et nos têtes de colonne s'ap-
prochaient des objectifs à atteindre, c'est-à-
dire La Malmaison pour les colonnes Berthaut
et Noël, Buzenval pour la colonne Cholletou.
A un signal convenu, le feu de l'artillerie
cessa instantanément, et nos troupes s'élan-
cèrent avec un admirable entrain sur les
objectifs assignés. Elles emportent rapide-
ment les premières positions de l'ennemi;
puis, après avoir contourné La Malmaison,
elles gravissent les pentes de La Jouchère,
pénètrent dans le parc et soutiennent une
lutte acharnée avec l'ennemi, embusqué sous
bois ou dans les maisons, d'ou notre artillerie
n'avait pas réussi à le déloger. Quatre com-
pagnies de zouaves, sous les ordres du com-
mandant Jacquot, se trouvèrent acculées
dans l'angle formé par le parc de La Malmai-
son, au-dessous de La Jouehère, et cernées
par des forces considérables. Elles allaient
peut-être se voir réduites à mettre bas les
armes, lorsqu'un bataillon de mobiles de
Seine-et-Marne s'élance au pas de course,
fond sur les Prussiens et dégage les zouaves.
Dès le commencement de l'action, quatre
mitrailleuses sous les ordres du capitaine de
Grandchamp et une batterie de 4 commandée
par le capitaine Nismes s'étaient portées au-
dacieusement en avant, sous la direction su-
périeure du commandant Miribel, et, en sou-
tenant l'action de notre infanterie, avaient
infligé des pertes considérables à l'ennemi.
Partout, au début de la lutte, nous avions eu
l'avantage. Mettant à profit la longue portée
de leurs chassepots, nos fantassins lançaient,
la mort dans les rangs ennemis à des distan-
ces considérables. Le 460 régiment prussien
était déjà décimé, lorsque son commandant,
blessé lui-même, ordonna à ses soldats de se
jeter à terre, ne laissant debout que quelques
fusiliers. Trompés par cette ruse, nos fan-
tassions s'élancent à travers bois, croyant le
passage ouvert; mais, à trois cents pas, ils
furent accueillis par une décharge épouvan-
même temps, des renforts considérables ar-
rivuient de toutes parts aux Prussiens, et
nos troupes commencèrent à plier. Le gêné-
» Tous, les hommes valides accourent au
à cri Ni un pouce de terrain, ni une'
» pierre de nos forteresses. Sus à l'ennemi
» Guerre outrance
Cette dépêche exagérait malheureusement
la réalîté. La province était dans le désar-
roi, consternée, stupéfiée, et ce n'était pas
la délécation sénile de Tours, MM. Crémieux
et Glais-Uizoin, auxquels on avait adjoint
l'amiral Fourichon, qui pouvait l'arracher à
ce sommeil du tombeau. Le gouvernement
de Paris songea donc, et il aurait dû le faire
plus tôt, nous le répétons, à fortifier sa dou-
rare au moyen d'un élément de patriotisme
plus jeune et plus viril,.et c'est alors que
M. Gambetta reçut la mission de se rendre à
Tours, avec la double investiture de ministre
de l'intérieur et de ministre de la guerre. Le
7 octobre, à dix heures du matin, il monta
dans la nacelle du ballon l'Armand-Barbès,
disant avec un sonrire C'est peut-être
mon avant-dernier panier. » Au moment où le
ballon s'élança dans les airs, parti de la
place Saint-Pierre à Montmartre, une im.
mense acclamation jaillit de toutes les poi-
trines « Vive Gambetta Vive la Républi-
que Vive la France » Gambetta emportait,
au nom du gouvernement de la Défense na-
tionale, la proclamation suivante, adressée à
la province
La population de Paris offre en ce mo-
ment un spectacle unique au monde
» Une ville de deux millïons d'âmes, inves-
tie de toutes parts, privée jusqu'à présent,
par la criminelle incurie du dernier régime,
de toute armée de secours, et qui accepte
avec courage, avec sérénité, tous les périls,
toutes les horreurs d'un siége.
» L'ennemi n'y comptait pas il croyait
trouver Paris sans défense la capitale lui
est apparue hérissée de travaux formidables
et, ce qui vaut mieux encore, défendue par
400,000 citoyens qui ont fuit d'avance le sa-
crifice de leur vie.
» L'ennemi croyait trouver Paris en proie
à l'anarchie; il attendait la sédition, qui
égale et qui déprave; la sédition qui, plus
sûrement que le canon, ouvre à l'ennemi les
places assiégées.
» II l'attendra toujours. Unis, armés, ap-
provisionnés, résolus, pleins de foi dans la
iortune de ta France, les Parisiens savent
qu'il ne dépend que d'eux, de leur bon ordre
et de leur patience d'arrêter, pendant de
longs mois, la marche des envahisseurs.
» Français c'est pour la patrie, pour sa
gloire, pour son avenir que la population
parisienne affronte le fer et le feu de l'é-
Vous qui nous avez déjà donné vos fils,
vous qui nous avez envoyé cette vaillante
garde mobiles dont chaque jour signale l'ar-
deur et les exploits, levez-vous en masse et
venez à nous isolés, nous saurions satuver
l'honneur; mains, avec'vous et par vous, nous
jurons de sauver la France. »
Après le départ de 111. Gambetta, le minis-
tére de l'intérieur fut occupé par M. Jules
Favre; les manifestations continuèrent à se
produire, indice de l'état de surexcitation
dans lequel se trouvait la capitale et de l'im-
patience fébrile qui la tourmentait. Le 8 oc-
tobre, on lisait dans le Jonrnal officiel
« Le gouvernement avait pensé qu'il était
opportun et conforme aux principes de faire
procéder aux élections de la municipalité de
Puris; mais, depuis cette résolution prise, la
situation ayant été profondément modifiée
par l'investissement de la capitale, il est de-
venu évident que les élections faites.sous le
canon seraient un danger pour la République.
Tout doit céder à l'accomplissement du de-
voir militaire et a l'impérieuse nécessité de
la concorde. Les élections ont donc été ajour-
nées elles ont dû l'être.
» D'ailleurs, en préseuce des sommations
que le gouvernement a reçues et dont il est
encore menacé de la part des gardes natio-
naux en armes, son devoir est de faire res-
pecter sa dignité et le pouvoir qu'il tient de
la confiance populaire.
» En conséquence, convaincu que les élec-
tions porteraient une dangereuse atteinte à
la défense, le gouvernement a décidé leur
ajournement jusqu'à la levée du siège. »
Ce même jour, le commandant Sapia, du
146a bataillons, faisait appel à la guerre ci-
vile en distribuant des cartouches a ses hom-
mes et en les engageant à marcher sur l'Hô-
tel de ville; mais il fut arrêté et conduit à
l'état-major de la place par les gardes na-
tionaux eux-mêmes. Le conseil de guerre,
réuni pour le juger, l'acquitta. Nous le re-
trouverons encore au 22 janvier.
Ce fut au lendemain de ces incidents que
M, de Kératry donna sa démission de préfet
de police et partit en buldon pour la province
avec une mission militaire. Il fut remplacé
dans ses fonctions par M. Edmond Adam,
ancien représentant du peuple. En même
temps, M. Ranc cédait à Gustave Chaudey
la pluce de maire du IXe arrondissement. La
municipalité de Paris était alors ainsi com-
poséo
Ier ar·rond. Tenaille-Saligny, avocat à la
cour de cassation.
« Signé GLAIS-BIZOIN. »
'Français,
Maire de Paris, Etienne Arago.
IIe arrond. Tirard, négociant.
IIIe arrond, Bonvalet, négociant.
IVe arrond. Greppo" ancien représentant
du peuple.
Vte arrond. Hérisson, avocat à la cour de
cassation. 1
Vile arrond. Ribeaucourt, docteur en mé-
arrond. Carnot, ancien membre du
gouvernement provisoire de 1848.'
XVe arrond. Corbon, ancien représentant
du peuple.
XVII» arrond, François Favre, homme de
lettres.
XVIIIe arrond. Clemenceau, docteur en mé-
decine.
Cette municipalité, qui n'était plus exacte-
ment celle des premiers jours de septembre
et que les élections allaient modifier, conti-
nua l'organisation du service de la boulange-
rie et de la 'boucherie,
Chaque famille reçut.une carte pour le pain
et une pour la viande, et fut astreinte à se
servir toujours à la même boulangerie et à
la même boucherie, pour le pain tous tes jours,
pour la viande tous les trois jours, Cette
dernière fut d'abord rationnée à 100 grammes
par personne et par jour; mais, à mesure
qu'elle diminua, la ration descendit jusqu'à
25 grammes 75 grammes par personne pour
trois jours. On consomma d'abord les bœufs,
les moutons et.les porcs; puis il fallut se re-
jeter sur la viande de aheval, depuis le milieu
d'octobre jusqu'à la 1in du siéne. Quelques
personnes ne parvinrent jamais à surmonter
la répugnance que leur causait le cheval et
aimèrent mieux s'exposer à mourir de faim
que d'en manger; maïs la grande majorité s'y
habitua très-facilement, et nous devons dire
que, le premier dégoût une fois surmonté, on
trouva cette viande presque aussi bonne que
le bœuf. Aujourd'hui, a Paris, elle n'inspire
plus aucune répulsion. Mais il faut dire aussi
que c'était de la viande de choix, provenant
de chevaux parfaitement sains jeunes, vi-
goureux,et cela pour une excellente raison,
c'est que l'administration s'emparait de tout,
moycnnant indemnité, et que le cheval du
riche dut tomber en holocauste comme celui
du charretier. Dès les cinq heures du matin,
souvent par une pluie battante, on voyait
d'immenses queues se dérouler à la porte des
boucheries chaque nouveau venu prenait sa
place à la suite malheur à l'impatient qui
eût voulu se glisser sournoisement dans le
rang les hommes l'eussent accablé de ho-
rions les femmes ne lui eussent pas laissé
un cheveu sur la tête. Cependant, comme
l'humanité ne perd jamais ses droits sur la
population parisienne, nous avons vu plus
d'une fois une pauvre femme enceinte ou
malade être l'objet d'un tour de faveur. Vers
sept heures arrivait le piquet de gardes na-
tionaux chargé de présider à la distribution
et de maintenir le bon ordre. Chose presque
incroyable, et qui est un témoignage écla-
tant du sentiment qui animait la population,
dans ces foules affamées, impatientes, expo-
sées en plein vent à toutes les rigueurs de la
saison, nous n'avous jamais vu qu'on dût re-
courir à la force pour maintenir la discipline.
Chacun prenait bravement son parti de tou-
tes ces longueurs. On piétinait dans la boue,
on recevait la pluie ou la neige sur le dos,
n'importe on trouvait encore l'occasion de
s'égayer et de rire, car Dieu sait ce qui se
lançait de lazzis dans ces rangs pressés et
confondus.
Au commencement d'octobre, les subsis-
tances courantes commençaient à devenir
rares; voici un aperçu du prix des denrées à
cette époque, aux Halles centrales
Les brochets passables valaient de 7 à
14francs la pièce;
Le goujon, 1 t'r. 50 à 3 francs l'assiettée;
Le beurre frais, en très-petite quantité,
5 francs la livre; le_beurre salé, 3 t'r. 50 à
4 francs;
Mais nous ne sommes encore pour ainsi
dire qu'au commencement du siège, et nous
donnons le prix de la huile; en ville, et sur-
tout dans les quartiers éloignés, c'est bien
autre chose nous avous vu payer 1 fr, 5o
et même 2 francs un simple pied de céleri.
Au reste, nous donnerons un second aperçu
du prix -des denrées à la fin du siége on
verra dans quelle effrayante proportion la
prix du moindre aliment avait monté.
Revienons maintenant aux opérations mili-
taires.
Le 7 octobre, le général Vinoy fit occuper
le village de Cachan; le s, une colonne com-
posée d'infanterie de marine que dirigerait le
chef de bataillon Bouzigou, est d'éclaireurs de
Ve arrond. J.-B. Bocquet.
IXe arrond, Gustave Chaudey.
Xe arrond. O'Reilly.
Xie arrond. Mottu, banquier.
Xile arrond. Alfred Grivot, négociant.
XIIIe arrond. pernotet, ingénieur.
XIVe arrond. Ducoudray.
XVie arrond. Henri Martin.
XIXe arrond. Richard, fabricant.
XXe arrond. Braleret, commerçant.
Les barbillons moyens, de 4 à 7 francs;
Les belles anguilles, de 12 à 15 francs;
Les petites tances, 1 franc
Le chou-fleur, 0 fr. 75 à 1 fr.
Les beaux choux 1 fr. 20 à 1 fr. 50
Le haricot fiageolet, 2 franes le litro;
Les oies, de 10 à 24 francs
Les dindons, 15 francs;
Les lapins, de 6 à 8 francs.
A neuf heures du matin, le général Vinoy,
commandant du 13e corps, donna le signal
de l'attaque. Tandis que deux bataillons du
13e de marche, appuyés par 500 gardiens de
la paix mobilisés, emportent Clamart sans
rencontrer de résistance, le général Susbielle
se porte sur Chàtillon par la droite et ca-
nonne vivement la position en même temps,
les forts de Montronge, de Vanves et d'Issy
appuient le mouvement par des feux habile-
ment combinés. Le général Susbielle lance
alors ses soldats à l'attaque du village. Ils
sont accueillis par une vive fusillade qui part
des maisons et de deux barricades, qu ils en-
lèvent avec un élan irrésistible; puis ils s'a-
vancent jusqu'à l'égide et à la route qui
relie Chatillon et Clumart. Un coup de feu a
blessé le général à la jambe mais il n'en reste
pas moins à cheval et continue à diriger sa
Sur la gauche, le village de Bagneux fut
enlevé par les mobiles de la Côte-d'Or, qui
se conduisirent d'une fnçon brillante. Le ba-
taillon des mobiles de l'Aube ne déploya pas
moins de bravoure, bien que ces jeunes gens
vissent le feu pour la première fois. Le rap-
port du général Vinoy leur rendit cette jus-
tice qu'ils s'étaient montrés sous le feu aussi
solides que de vieilles troupes. Mais ils payèrent
cette gloire d'une perte cruelle leur chef, le
commandant de Dampierre, fut frappé à mort.
Comme il voyait ses soldats hésiter à l'entrée
du village de Bagneux, il s'élança leur tête
sous une grêle de balles « pllons, mes en-
fants, en avant » En même temps il tombait,
atteint d'une balle au ventre; mais le village
était emporté. Ainsi mourait glorieusement,
jeune et riche (il n'avait que trente-trois ans),
ce digne descendant du vieux Dampierre,
mort en combattant les Prussiens sous la
première République, dit M, Jules Claretie,
et enseveli au Panthéon avec son épée de
combat, ses gants de buffle et sa drageonne
en cuir.
la Seine commandes par le colonel Lafon,
opérait une forte reconnaissance sur Bondy
et chassait l'ennemi de cette position. qu'elle
occupait jusqu'au soir. De son côté, le géné-
ral Ducrot marchait sur la Malmaison, qu'il
croyait occupée par les Allemands; mais elle
était abandonnée. Le 10, nos troupes, sous les
ordres du général Blanchard, enlevaient la
maison Millaud, en avant du fort de Mont-
rouge, d'où l'ennemi menaçait Cachan. Ce
qui explique la facilité de ces succès partiels,
c'est qu'en ce moment les troupes alleman-
des massées autour de Paris s'élevaient au
plus à 180,000 hommes. Leur ligne d'inves-
tissement, disséminée sur un si vaste espace;
ne pouvait donc pas offrir une grande résis-
tance, et le gènéral Trochu aurait pu facile-
ment jeter sur un seul point de cette ligne
un nombre au moins égal de combattants.
Mais il fallait de la résolution, de l'énergie et
une confiance que le général n'avait pas. Au
lieu d'agir sur le terrain, il discourait à l'Hô-
tel de ville, où il exerçait malheureusement
trop d'influence sur ses collègues du gouver-
nement M. Rochefort lui-même subissait ce
charme, auquel échappait néanmoins M. Er-
nest Picard, qui, bien que partisan do la paix
à tout prix, poussait le général Trochu à l'ac-
tion. C est peut-être le seul mérite qu'il ait
eu dans ces circonstances. Mais rien ne pou-
vait corriger le vice capital qui paralysait
les talents militaires du général nous vou-
lons dire l'indécision et l'absence de vo-
lonté. Après avoir longuement combiné une
opération, il engageait- nos troupes en trop
grand nombre pour une reconnaissance, en
forces insuffisantes pour livrer une véritable
bataille. C'est ainsi que, le 13 octobre, il re-
nouvela la faute commise le 19 septembre à
Châtillon. Le Il octobre, nos avant-postes
signalèrent de grands mouvements* chez les
Allemands en arrière de nns forts du sud-
ouest, de Chétillon et de Bagneux, sur la
route de Versailles à Choisy. Le bruit courut
qu'ils avaient évacué le plateau de Châtillon;
faire exécuter une reconnaissance offensive
et de réprendre le plateau s'il le pouvait. Le
13, au matin, le général Blanchard poussa en
avant à ta tête de 10,000 à 12,000 hommes di-
visés en-trois colonnes celle de droite (13e
de marche) devait agir dans la direction de
Clamart; celle du centre (général Susbielle),
sur Châtillon; celle de gauche (mobiles de la
Côte-d'Or et de l'Aube), colonel de Grancey,
sur Bagneux.
Nous retrouvons aussi au combat de Ba-
gneux le 35e de ligne et son héroïque colo-
nel, M. de La Mariouse. Placé au centre de
l'action, ce brave régiment s'élançait à l'at-
taque de Chatilion au milieu d'un feu terri-
ble mais l'entreprise était impossible nos
forces étaient insuffisantes, et il fallut bat-
tre en retraite devant les masses ennemies,
après cinq heures d'une lutte aussi glorieuse
qu'inutile. Le général Vinoy n'en constata
pas moins dans son rapport que le but de la
reconnaissance avait été atteint. Nos pertes
sont peu considérables, disait-il col es de
l'ennemi, qui est resté constamment sous
notre feu, quoique n'étant pas encore appré-
ciées en ce moment, ont un grand caractère
de gravité. C'est ainsi qu'il a laissé plus de
300 morts dans Bagneux. »
Faible consolation pour tant d'efforts per-
dus 1
Ce méme jour, 13 octobre, à la tombée de
la nuit, on apercevait d'immenses gerbes de
flamme tourbillonner au-dessus de Saint-
Cloud c'était' le château qui brûlait, incendié
par les obus du Mont-Valérien. On croyait
qu'il servait d'observatoire à l'état-major al-
lemand. Un eût dit qu'une fatalité inexorable
pensât sur cette princière demeure, où le pre-
mier Bonaparte consomma son attentat dé
Brumaire, et d'où Napoléon III déclara la
guerre à la Prusse.
Le lendemain, 14 octobre, les Prussiens
demandaient un armistice pour l'enlèvement
des morts du combatt de Bagneux, ce qui
semble justifier les affirmations du général
Vinoy au sujet des pertes qu'ils durent épron-
ver. Ce même jour, un détachement français
prit possession d'Asnières, qui fut immédia-
temènt barricadé. Nous voulions ainsi inter-
dire à l'ennemi le passage de la Seine de ce
côté.
La nuit du 18 au 19 fitt signalée par la plus
effroyable canonnade que Paris eût encore
entendue, et dont les échos retentissaient
dans les quartiers du sud avec une intensité
qui faisait continuellement trembler les vitres
des maisons; garnies de longues bandes de
papier croisées et collées pour les assurer
contre les violentes vibrations de l'air.
Le 21 octobre eut lieu une grande sortie
sur Rueil, La Jonchère, Buzenval, Bougival
et La Matmaison, et une lutte acharnée s en-
gagea à peu près sur le même terrain qui
devait encore être le théâtre de l'affaire du
19 janvier. Ce fut ce qu'on appela alors le
combat de La Malmaison, qui ne fut en réa-
lité qu'une grande reconnaissance offensive
exécutée par 12,000 hommes sous les ordres
du général Ducro,. Les troupes étaient divi-
sées en trois colonnes celle du général Ber-
thant, comprenant 3,400 hommes d'infanterie,
20 bouches à feu et un escadron de cavalerie,
destinée à opérer entre le chemin de fer d'o
Saint-Germain et la partie supérieure du vil-
lage de Raeil la colonne du général Noël,
forte de 1,350 hommes' d'infanterie avec
10 bouches à feu elle devait opérer sur le
côté sud du parc de La Malmaison et dans le
ravin qui descend de l'étang deSaint-Cucufa
h Bougïval; la colonne du'colonel Cholle-
tou, comprenant 1,600 hommes d'infanterie,
18 bouches à feu et un escadron de cavalerie.
Cette troisième colonne devait prendre posi-
tion en avant de l'ancien moulin au-dessus
de Rueil, dans le but de relier et de soutenir
la colonne de droite et la colonne de gauche.
De plus, deux réserves avaient été disposées,
l'une à gauche sous les ordres du général
Martenot, composée de S,600 hommes d'in-
fanterie et de 18 bouches à feu; l'autre au
centre, commandée par le général Paturel,
et comprenant 2,000 hommes d'infanterie,
2S bouches à feu et deux escadrons de cava-
lerie. Toutes ces troupes réunies ne formaient
pas un total en état de livrer une véritable
bataille; et cependant'tel fut l'élan de nos
soldats qu'il y eut un instant de véritable pu-
nique parmi l'état-major allemand à Ver-
A une heure, toutes nos troupes avaient
pris position, et l'artillerie ouvrait son feu sur
toute la ligne, formant un vaste demi-cercle
de la station de Rueil à la ferme de La Fouil-
leuse. Pendant trois quarts d'heure, elle con-
centra son feu sur Buzenvul, La Malmaison,
La Jonchère et Bougival. En même temps,
nos artilleurs et nos têtes de colonne s'ap-
prochaient des objectifs à atteindre, c'est-à-
dire La Malmaison pour les colonnes Berthaut
et Noël, Buzenval pour la colonne Cholletou.
A un signal convenu, le feu de l'artillerie
cessa instantanément, et nos troupes s'élan-
cèrent avec un admirable entrain sur les
objectifs assignés. Elles emportent rapide-
ment les premières positions de l'ennemi;
puis, après avoir contourné La Malmaison,
elles gravissent les pentes de La Jouchère,
pénètrent dans le parc et soutiennent une
lutte acharnée avec l'ennemi, embusqué sous
bois ou dans les maisons, d'ou notre artillerie
n'avait pas réussi à le déloger. Quatre com-
pagnies de zouaves, sous les ordres du com-
mandant Jacquot, se trouvèrent acculées
dans l'angle formé par le parc de La Malmai-
son, au-dessous de La Jouehère, et cernées
par des forces considérables. Elles allaient
peut-être se voir réduites à mettre bas les
armes, lorsqu'un bataillon de mobiles de
Seine-et-Marne s'élance au pas de course,
fond sur les Prussiens et dégage les zouaves.
Dès le commencement de l'action, quatre
mitrailleuses sous les ordres du capitaine de
Grandchamp et une batterie de 4 commandée
par le capitaine Nismes s'étaient portées au-
dacieusement en avant, sous la direction su-
périeure du commandant Miribel, et, en sou-
tenant l'action de notre infanterie, avaient
infligé des pertes considérables à l'ennemi.
Partout, au début de la lutte, nous avions eu
l'avantage. Mettant à profit la longue portée
de leurs chassepots, nos fantassins lançaient,
la mort dans les rangs ennemis à des distan-
ces considérables. Le 460 régiment prussien
était déjà décimé, lorsque son commandant,
blessé lui-même, ordonna à ses soldats de se
jeter à terre, ne laissant debout que quelques
fusiliers. Trompés par cette ruse, nos fan-
tassions s'élancent à travers bois, croyant le
passage ouvert; mais, à trois cents pas, ils
furent accueillis par une décharge épouvan-
même temps, des renforts considérables ar-
rivuient de toutes parts aux Prussiens, et
nos troupes commencèrent à plier. Le gêné-
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