Les origines de la vie
Au reste je ne dis pas que dans chaque individu mâle et femelle, les molécules organiques renvoyées de toutes les parties du corps ne se réunissent pas pour former dans ces mêmes individus de petits corps organisés ; ce que je dis, c’est que lorsqu’ils sont réunis, soit dans le mâle, soit dans la femelle, tous ces petits corps organisés ne peuvent pas se développer d’eux-mêmes, qu’il faut que la liqueur du mâle rencontre celle de la femelle, et qu’il n’y a en effet que ceux qui se forment dans le mélange des deux liqueurs séminales qui puissent se développer ; ces petits corps mouvants, auxquels on a donné le nom d’animaux spermatiques, qu’on voit au microscope dans la liqueur séminale de tous les animaux mâles, sont peut-être de petits corps organisés provenant de l’individu qui les contient, mais qui d’eux-mêmes ne peuvent se développer ni rien produire ; nous ferons voir qu’il y en a de semblables dans la liqueur séminale des femelles, nous indiquerons l’endroit où l’on trouve cette liqueur de la femelle ; mais quoique la liqueur du mâle et celle de la femelle contiennent toutes deux des espèces de petits corps vivants et organisez, elles ont besoin l’une de l’autre, pour que les molécules organiques qu’elles contiennent puissent se réunir et former un animal.
On pourrait dire qu’il est très possible, et même fort vraisemblable, que les molécules organiques ne produisent d’abord par leur réunion qu’une espèce d’ébauche de l’animal, un petit corps organisé, dans lequel il n’y a que les parties essentielles qui soient formées.
Buffon, Histoire naturelle, 1749-1789
> Texte intégral dans Gallica : Paris, Impr. royale, 1749-1789