Revêtant des atours poétiques et célestiels, l’hibiscus s’impose dans l’imaginaire collectif comme un arbuste hautement symbolique.
« Des hibiscus sortent de l’eau pure, n’ont aucun artifice sauf le travail de la nature » : ce célèbre vers du poète chinois Li Bai, de la dynastie Tang, dépeint l’hibiscus comme l’incarnation terrestre de la perfection et de la grâce divines – poncif poétique devenu dès lors très en vogue dans la poésie sinophone. Jean Cocteau, des siècles plus tard, utilise dans son film Le Testament d’Orphée cette même imagerie éthérée de l’hibiscus : fleur totémique du poète, elle est garante et symbole de son immortalité. Ce caractère divin de l’hibiscus se retrouve aussi en Asie du Sud-Est, où ses fleurs à corolles rouges sont offertes en offrande à la déesse hindoue Kālī, personnification de la destruction et de la création.
Le nom de cette plante provient du grec « hibiscos » qui se traduit par « guimauve ». Appartenant à la famille des Malvacées, cette plante, généralement arbustive, est cultivée depuis l’Antiquité pour ses fleurs ornementales et ses fruits comestibles : son genre comprend près de 200 espèces de plantes herbacées, d’arbustes et d’arbres, originaires de régions tropicales ou subtropicales. Au cours des siècles, elle a été introduite dans d’autres parties du monde, notamment en Europe et en Amérique du sud.
L’espèce la plus communément cultivée est l’Hibiscus Rosa-sinensis – la « Rose de Chine » – qui est originaire du sud-ouest de la Chine. Ce bel arbuste au feuillage persistant vert brillant peut atteindre deux mètres de haut ; ses feuilles ovales et pointues sont dentées sur les bords. Les fleurs aux corolles rouge sang arborent cinq pétales entourant un long bouquet d’étamines : elles sont éphémères mais se renouvellent tout au long de la saison. Il en existe de nombreuses variétés présentant des tons allant du blanc au jaune-orangé.
Son port de tête altier, ses larges pétales somptueuses ont inspiré plus d’un artiste : l’hibiscus occupe notamment une place de choix dans l’estampe japonaise, au sein du Kachō-ga – genre pictural représentant des fleurs et des oiseaux. L’hibiscus, devenu un motif japonisant à part entière, est très prisé dans les œuvres de style Art nouveau et art décoratif.
Outre sa beauté formelle, l’hibiscus est aussi recherché pour ses vertus médicinales : les calices de l’hibiscus sabdariffa possèdent des propriétés hypotensives et diurétiques ; séchées, elles s’emploient pour préparer une tisane très appréciée en Afrique subsaharienne où, selon les régions, cette infusion rafraichissante est appelée « karkadé » ou « bissap ».
Pierre Adrien Chabal-Dussurgey, Mauve. Hibiscus Syriacus 7, lithographie, [1869]
Hautement symbolique en Corée, l’hibiscus syriacus (Mugunghwa) – « fleur éternelle qui ne se fane jamais » – est enfin devenue, à la suite de l’occupation japonaise, l’emblème national du pays, illustrant symboliquement le caractère tenace et impérissable de son peuple.
Image du fugace et de l’intemporel, de la beauté et de la grâce, l’hibiscus nous envoûte par son charme ineffable.