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Du sport ? non ! De la gymnastique ? oui !

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On trouve rarement le mot "sport" dans les dictionnaires médicaux français du 19e siècle alors que la "gymnastique" y avait cours et pouvait même faire l’objet de longs développements célébrant ses vertus et son utilité… À vos barres et agrès !

Dictionnaire illustré de médecine usuelle, Dr Galtier-Boissière, Paris, 1904

Il est tout à fait normal de ne pas trouver le terme "sport" dans ces ouvrages, si l’on en croit un autre dictionnaire forcément très bien renseigné puisqu’il s’agit du Dictionnaire du sport français, courses, chevaux datant de 1872. L’auteur indique qu’il existe des "sports de toutes sortes", "tout l'ensemble des exercices de corps tenant à certains goûts et à certaines manières de vivre", mais qu’en France "on l'applique seulement aux courses et aux chevaux". 25 ans plus tard, et dans un autre genre, le Dictionnaire argot-français et français-argot, indique que désormais le sport désigne "tous les genres d'exercices physiques, canotage, vélocipédie, chasse, etc." Mais les dictionnaires médicaux sont très rares à avoir enregistré ce nouveau terme : s’il est employé çà et là au détour d’une phrase, il ne fait pas encore l’objet d’articles.

Imagerie d'Epinal. N° 306, Fête de gymnastique, Pellerin & Cie, Epinal, 1892

Pas de sport alors pour les médecins du 19e siècle ? Que si ! Mais sous formes d’exercices calibrés, mesurés, sans danger et sans émulation, ce qu’il est convenu alors de nommer la "gymnastique utile".

Il y aurait alors une gymnastique inutile ?

Les dictionnaires médicaux du 19e siècle définissent avec un soin tout particulier la gymnastique. Après avoir rappelé son étymologie grecque, ils donnent parfois un historique et surtout cantonnent la gymnastique à un rôle médical : 

partie de l’hygiène qui concerne les mouvements du corps ou ses exercices, dont le but est sa conservation et l'entretien de la santé."

Invoquant le souvenir de Galien et d’Hippocrate ils expliquent avec un bel ensemble que l’excès de gymnastique a autrefois entraîné des maux physiques voire des déficits cognitifs. Ils blâment donc la "gymnastique athlétique", dite aussi "vicieuse", au profit de la "véritable gymnastique ", la "gymnastique médicale".

Sous l’influence des médecins, qui dénoncent donc des exercices trop intensifs, mal adaptés, ou exerçant une concurrence trop importante entre athlètes, les institutions éducatives et militaires prônent à leur tour la "gymnastique utile".

Mais en quoi consiste donc la gymnastique utile ?

Sur ce point, les rédacteurs de l’article "gymnastique" des dictionnaires médicaux sont loin d’être d’accord. S’ils sont unanimes à reconnaître l’utilité d’une gymnastique correctrice dans certaines affections comme la scoliose et la nécessité de l’exercice régulier pour pallier les méfaits de la sédentarité, certains sont les tenants d’une gymnastique la plus naturelle possible quand d’autres contribuent à inventer des machines complexes pour aider aux étirements (voir le billet « une piscine épargne un hôpital »). La natation par exemple est vue par certains médecins comme un exercice dangereux lors de certaines affections. D’autres enfin soulignent des modifications du corps, notamment chez les femmes, possiblement disgracieuses. L’opinion la plus communément admise est que :

Tous les jeux de l'enfance où il faut courir et lancer un objet, tel que la balle et la paume, le jeu de corde et de volant, la natation, l'escrime, l'équitation, voilà la gymnastique utile ; mais elle n'aura d'effets avantageux que si elle est faite régulièrement une à deux heures par jour."

sport.jpg

Exercices gymnastiques, Lacauchée

Les premiers articles "sport(s)" des dictionnaires médicaux conservent la même ligne. En 1927, le Dictionnaire illustré de médecine usuelle par le docteur Galtier-Boissière indique : "Exercices variés pratiqués par des amateurs, dans un but désintéressé d’activité physique". Après avoir développé les arguments que nous connaissons déjà, l’auteur conclut très logiquement : 

De ces considérations il résulte que la pratique des sports ne devrait être décidée qu’après une consultation médicale qui en aurait reconnu l’opportunité et qui aurait déterminé le choix des exercices."

Pour aller plus loin...

L'Olympiade Culturelle est une programmation artistique et culturelle pluridisciplinaire qui se déploie de la fin de l’édition des Jeux précédents jusqu’à la fin des Jeux Paralympiques.
La série "Histoire du sport en 52 épisodes" de Gallica s'inscrit dans la programmation officielle de Paris 2024.

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