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Titre : Le Mois littéraire et pittoresque

Éditeur : Maison de la Bonne Presse (Paris)

Éditeur : Maison de la Bonne PresseMaison de la Bonne Presse (Paris)

Date d'édition : 1915-01-01

Contributeur : Mucha, Alphonse (1860-1939). Illustrateur

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32817762d

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32817762d/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 25241

Description : 01 janvier 1915

Description : 1915/01/01 (A17,N190)-1915/02/28.

Description : Note : GG14181.

Description : Collection numérique : Documents consacrés à la Première Guerre mondiale

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k65568042

Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, 4-Z-1268

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 04/11/2013

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Le numéro : 1 fr.

ANNÉE *9*5

N.

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Nouvelle Bibliothèque pour tous

HISTOIRE ET BIOGRAPHIES Les Papes à travers les âges : I. De saint Pierre à saint Hygin. E. LACOVTE.

Le P. Vincentde Paul Bailly (1 832-1912). E. LACOSTE.

Louis Veuillot (1813-1883). FRAÇOIS VKUILLOT.

Pantéleïmon (1793-1868). Histoire d'un moine sclzisllzatique. PAUL CHRISTOKF.

Michelle Coli i n (1812-1894). Une chrétienne de nos jours. E. DESSIAUX.

POUR LA JEUNESSE 1 Sainte Elisabeth. UNE MAMAN. ¡.

COLLECTION APOLOGÉTIQUE Lourdes ; Les Guérisons (3 volumes). D BUISSARIE.

Le miracle permanent d'Andria. — Une gloire napolitaine, saint Janvier et le miracle (2 volumes) LÉON CAVÈSE.

Les Congrès eucharistiques interna- tionaux : 1re série : Les Origines. De Lille

(1881) à Paray-le-Monial (1897). Auteurs divers. COLLECTION SCIENTIFIQUE Ouvrages de l'abbé TH. MOREUX D'où venons-nous? — Qui sommes-nous? - Où sommesnous? — Qù allons-nous? (4 volumes).

AUTEURS DIVERS La Cellule: Son origine. Dr-abbê MAUMUS.

Les Merveilles de la vie végétale. A. ACLOQUE.

Notre Pain quotidien. A. ROUSSET.

Comment le rail a vaincu la distance et l'altitude: Les chemins de fer, leur développement des origines à nos jours, le rail. M. HEGELBACIIER.

COLLECTION ARTISTIQUE Ouvrages d'ABEL FABRE Pages d'Art chrétien (4 volumes) : 1re série, 101 photographies; 2e série, 90 photographies; 3e série, 120 photographies; 4e série, 80 photographies.

Chaque volume in-8°, 2 colonnes, papier glacé, nombreuses gravures: broché, 1 franc, port, 0 fr. 20; relié toile, 1 fr. 50, port, 0 fr. 35.

5, RUE BAYARD, PARIS-Vlll, ET DANS TOUTES LES GARES


MMAE

Frontispice. Le grand-duc Nicolas, médaillon de la couverture.

La guerre. L'air de la bataille, Notes d'un commandant de compagnie, par GABRIEL MARRI, avec une composition de JULES V ATEZ et 3 photographies. 257 — La mort des monuments, par ABEL FABRE, avec 2 photographies. 265 — Souvenirs d'ambulance, par CH. D'AVONE, avec 5 photographies. 269 — La guerre en caricatures. 7 croquis, français, italiens, américains, polonais. 276 Nouvelle. La légende de Titurel, par ANDRÉ LAMANDÉ, avec une composition de FRElDA. , , 278 Poésie. Trois petits gueux, par M.-L. ETIENNE 282 Art. Les trésors d'art de Lyon, par ALPHONSE GERMAIN, avec 4 photographies 283 Roman. Sonnez encore! (suite), par J. ROMAIN-LE MONNIER, avec 3 compositions de J.-M. BRETON., c" -" 295 Varia. Le fétichisme, souvenirs du Dahomey, par R. PERREUR D'ALBRET, avec 7 photographies , 309 Pages oubliées. Mux soldats, par ALBERT DE MUN; te vœu de Vivien, par JULES LEMAÎTRE, avec 2 portraits. - 318

CONDITIONS D'ABONNEMENT FRANCE, COLONIES et BELGIQUE: Un an, 12 francs A ÉTRANGER: Un an. 14 francs Le Numéro, 1 franc Ç Le Numéro, 1 fr. 25 Il n'y a pas d'abonnement d'une durée inférieure à un an, mais ils peuvent partir de n'importe quel mois.

Tous les abonnés du MOIS reçoivent gratuitement comme supplément hebdomadaire la SEMAINE LITTÉRAIRE.

MAISON DE LA BONNE PRESSE, 5 RUE BAYARD, PARIS-VIIIe


NOS COLLABORATEURS M. GEORGES GOURDON A propos de la traduction italienne de sa Jeanne d'Arc, les Etudes, des 5 et 20 décembre 1914, écrivent : Un juge éminent, le R. P. Longhaye, a naguère fait connaître à nos lecteurs le poète catholique et français qu'est Georges Gourdon. C'est une joie de voir que son œuvre, déjà appréciée en Allemagne, où elle a fait l'objet d'une thèse de doctorat, est en train de conquérir l'Italie.

J. B.

M. FRANÇOIS VEUILLOT M. Yves de la Brière écrit dans les Etudes, des 20 août et 20 septembre 1914 : La Vie complète de Louis Veuillot en quatre forts volumes in-octavo n'est accessible qu'à un public particulièrement initié. Pour mettre les mêmes faits à la portée d'un public plus étendu, M. François Veuillot a eu l'excellente pensée de faire paraître à Il Bonne Presse un récit court et populaire de l'existence, si féconde et mouvementée, de Louis Veuillo. Cet ouvrage, illustré avec goût, est d'une lecture instructive, attachante et fortifiante.

M. GUSTAVE ZIDLER M. H. de la Rouvière écrit dans les Etudes des 5 et 20 novembre 1914, à propos du Cantique du Doux Parler: Dans les poésies de M. Gustave Zidler, au souffle un peu court, l'idée est ingénieuse et le trait heureux, le rythme a la grâce et l'aisance, le vers est souvent d'excellente frappe. Ce volume, qui a été adopté au Canada comme prix de parler français, excitera les jeunes Canadiens à lutter pacifiquement pour leur langue. En France, il ravivera notre affection pour nos cousins d'au delà l'Océan.

M. THÉODORE BOTREL Les vers suivants de notre collaborateur, le barde Botrel, ont été télégraphiés à S. M. la reine des Belges, à l'occasion de la SainteElisabeth, en novembre dernier : Bleue ainsi que le ciel léger de notre France, Blanche ainsi que le cœur de nos enfants pieux, Rouge ainsi que le sang de nos morts glorieux, Trois fleurs d'amour, d'espoir et de reconnaissance Sont écloses, pour vous, dans nos cœurs anxieux.

M. FRANÇOIS LAURENTIE Nous avons encore le regret d'apprendre la mort d'un de nos collaborateurs, M. Fran- çois Laurentie, glorieusement tombéau champ d'honneur en janvier 1915.

Nous le recommandons dès maintenant aux prières de nos lecteurs en attendant de lui consacrer, dans le prochain numéro, une page de notre galerie des Ecrivains catholiques tués à l'ennemi.

M. FRÉDÉRIC LOLIÉE Nous avons appris avec regret la mort de M. Frédéric Loliée, écrivain distingué, qui avait collaboré au Mois dès les débuts, de 1899 à 1902, et qui est décédé le 19 janvier 1915.

Il était le neveu de M. Godefroy, et l'avait aidé pour sa volumineuse Histoire de la littérature française.

A ses obsèques, le 22 janvier, M. René Vallery-Radot, vice-président de la Société des gens de lettres, lui a rendu un hommage dont voici le début :

Après les dernières prières dites dans cette église et où le mot repos a été répété doucement pour celui qui a tant travaillé et lutté, chacun de nous éprouve la grande tristesse que provoque le contraste entre l'évocation d'une vie qui fut si active, si féconde en œuvres diverses, si pleine encore de projets, et la vue de ce cercueil.

Qui de nous n'a devant les veux ce vaillant confrère de petite taille, à la physionomie spirituelle, au regard en éveil et d'une curiosité si ardente qu'elle semblait presque fiévreuse? Sa parole était vive, ses petites phrases rapides. Il semblait que ses idées, dans la hâte de sortir, de se répandre, de s'envoler au loin, fussent comme des abeilles pressées de quitter leur ruche pour aller faire leur miel. Mais si le travail des abeilles est joie (vous vous rappelez le vers de Victor Hugo), le travail de notre confrère, si grande que fùt sa passion pour les lettres et son enchantement pour certains plans d'ouvrages, était maintes fois traversé par les préoccupations qui pèsent sur la vie d'un écrivain dont la fierté légitime est de vivre et de faire vivre les siens par les seules ressources de son labeur incessant.

Pour remplir tant de tâches littéraires qu'il assumait — et les plus lourdes étaient souvent les plus tentantes, — il lui fallait ce qu'il appelait un jour avec une énergique tristesse « la sombre contention de la volonté ». Dans cette alliance imprévue de mots, n'y avait-il pas comme un redoublement de cette faculté du vouloir qu'il portait en soi à un degré prodigieux? Nul vaste dessein ne l'effrayait. Il se sentait la force de tout aborder et de tout mener à bien.

Dès sa jeunesse, il avait emmagasiné une foule de notions littéraires. Son premier maître avait été son oncle, Frédéric Godefroy, qui publia, en 1867, une histoire de la littérature; française par extraits choisis depuis le XVI. siècle jusqu'à nos jours. Que de fois j'ai vu, dans mon enfance, Frédéric Godefroy arriver en grand enquêteur, dans la bibliothèque impériale du Louvre pour questionner sur bien des points mon père, bibliothécaire aussi lettré que serviable. Frédéric Loliée, au cours de ses premières études, fut ainsi témoin de ce que peuvent les longs efforts, les recherches nombreuses. Il vivait devant le spectacle de ces vrais cabinets de travail qui témoignent de l'encombrement des projets par les volumes accumulés. Sa vocation littéraire naquit, se développa comme la chose la plus naturelle du monde. « Et moi aussi je ferai des livres », disait-il dès sa prime jeunesse. Après avoir apporté une large part restée anonyme dans les


derniers travaux de son oncle, il chercha à se frayer une voie personnelle.

C'est ici, Messieurs, qu'apparut une lutte singulière, et qui dut être parfois douloureuse, entre les deux tendances contraires de son esprit.

L'une était attirée sans cess vers l'analyse et la poursuite des documents. L'autre n'était satisfaite que par la synthèse. Cette double méthode de travail, par l'analyse patiente d'abord qui rassemblait tous les matériaux et par la brusque synthèse qui mettait en œuvre et édifiait, fit

surgirdeux ouvrages. Leur force imposante a une place à part dans l'œuvre de Frédéric Loliée. Par son Histoire des littératures comparées, il a mis en lumière les origines et les filiations d'œuvres, il a indiqué les influences réciproques. Et comme toujours, après avoir, commencé par mettre dans ces notes, en ordre dispersé, tout ce qu'il avait analysé, il sut, par une violente tactique, faire la concentration de ces forces sur les points décisifs.

Le second livre est son Dictionnaire des Ecrivains et des Littératures. L'éten- due de cette enquête, vous la connaissez, vous qui avez souvent sous la main cet instrument de travail tenant si peu de place et rempli de tant de choses!

A ses impressions personnelles, Frédéric Loliée savait joindre un noble souci d'équité. Vouloir résumer tout ce qu'il est nécessaire de savoir sur les hommes célèbres ou simplementconnus; mettre en évidence le trait caractéristique d'un auteur; appliquer aux contemporains un jugement que bien souvent la postérité ratifiera ; faire plus encore: aborder les plus vastes études d'ensemble comme un aperçu de la littérature française, par exemple, en moins de

mille lignes ; éviter avec soin toute abstraction, mais fortifier chaque idée émise par un exemple probant; éclairer les phases différentes de cet immense sujet qui a ses flux et ses reflux d'idées et de sentiments par des noms qui brillent ainsi que des phares à l'entrée des ports de refuge; — c'était une tâche à défier les plus forts, les plus intrépides. Frédéric Loliée sut l'accomplir.

Il prit dix ans de peineà préparer pour le grand public ce livre d'une lecture si facile. On trouve là tout ce que doit connaître un homme d'éducation moyenne sur le travail formidable de l'humanité.

Mais tout en préparant un tel ouvrage, Fré-

déric Loliée collaborait aux journaux et aux revues. Sa plume alerte était toujours prête.

M. AUGE DE LASSUS Les diverses Sociétés littéraires et artistiques dont notre regretté collaborateur Lucien Augé de Lassus faisait partie, pour la plupart en qualité de président ou de vice-président, ont pris l'initiative d'un monument élevé à sa mémoire, et ont à cet effet constitué un

M. AUGÉ DE LASSUS

Comité sous la présidence du maître Camill Saint-Saëns. Le Mois a été invité à faire partie de ce Comité.

« LE PRÊTRE AUX ARMÉES » Ce bulletin, bi-mensuel, pour les prêtres, religieux et séminaristes-soldats, paraît depuis le 15 février. Le prix d'abonnement est de 1 fr. 50.

Nous serons très reconnaissants aux amis qui, en nous envoyant des adresses précises de prêtres-soldats (avec le secteur postal), nous mettront ainsi en mesure de leur faire connaître cette publication par l'envoi du premier numéro.


DÉSIR RÉALISÉ Le Bulletin de la Société générale d'éducation (35, rue de Grenelle, Paris) a écrit très aimablement, en son numéro de décembre 1914 : Le Mois littéraire et pittoresque garde toujours, aux premiers rangs des revues, la place à part qu'il s'est légitimement faite dans le public catholique.

Rien de ce qui-se présente dans l'actualité artistique ou scientifique ne lui échappe, et il sait. le faire connaître à ses lecteurs avec exactitude, avec précision et en même temps avec intérêt. Il aide ceux qui veulent bien le suivre à se former sur ces questions qui ont eur importance, non seulement des idées, mais des idées justes.

C'est ainsi, par exemple, que sans quitter leur maison, les lecteurs du Mois auront pu visiter le nouveau musée qui s'est ouvert, en 1914, à Paris, le musée André-Jacquemart.

Des nouvelles, des études historiques, dues aux meilleurs auteurs contemporains, les savantes études esthétiques de M: l'abbé Fabre, achèvent de faire de cette charmante revue la plus agréable et la plus vivante des encyclopédies.

Comme la plupart des revues, le Mois a vu sa publication arrêtée par la guerre, en août.

Tous ses lecteurs souhaitent vivement, avec nous, de le revoir bientôt.C'est fait depuis un mois.

Musée de la guerre.

On a eu l'ingénieuse pensée d'organiser une collection intéressante de souvenirs tant français ou des pays alliés qu'allemands ou autrichiens. Tous les envois seront acceptés avec reconnaissance : armes, vêtements, ustensiles, gravures, vignettes postales, etc.

Ce musée, qui sera organisé quai de Passy, à Paris, sera payant et le produit sera affecté à la célébration de messes pour les morts de la guerre. Nous le recommandons à la sollicitude de nos lecteurs, autant que les circon- stances et les règlements leur permettront de faire cette gracieuseté. Par là même, ils travailleront à une œuvre patriotique et surtout religieuse.

On peut adresser les envois à M. l'abbé Honoré, soit'22, cours la Reine, soit 12, rue Berton, à Paris.

He cinématographe et l'école.

Au cours d'un intéressant article sur les dangers qu'offre le cinéma pour la jeunesse, quand ces spectaeles ne sont pas sévèrement réglés et surveillés, et, d'autre part, sur les réels avantage qu'offre à l'école l'enseignement par l'image, la Civiltà Cattolica veut bien signaler les créations parfaitement artis-

tiques, religieuses et morales de la Bonne Presse. Après avoir cité certains films religieux où le goût et le sens religieux n'étaient pas suffisamment respectés, la revue ajoute : Par bonheur, la Maison de la Bonne Presse para sans retard à ces inconvénients et créa deux scènes vraiment belles, respectant avec toute la dignité possible le texte évangélique, interprété d'une façon profondément religieuse et artistique: la Nativité et la Passion de NotreSeigneur. Il est évident que tout en matière sacrée ne peut ni ne doit pas être représenté par le cinématographe ; les vues fixes qui font revivre les chefs-d'œuvre de l'art sacré et des grands maîtrés offrent une aide de premier ordre à l'enseignement religieux, qu'on ne doit jamais disjoindre d'un sain critère artistique. La Maison de la Bonne Presse, louable aussi en cela, en possède en abondance et de fort belles.

Nous remercions nos éminents confrères de la Civiltà Cattolica de cet éloge qui nous encourage à travailler mieux encore dans le sens qu'indique le célèbre organe romain de la Compagnie de Jésus.

La guerre sur l'écran.

On lit dans la Semaine religieuse d'Avranches, du 4 février : L'œuvre diocésaine de projections vient de se procurer la collection de vues sur la guerre de 1914-1915,éditée par la Maison de la Bonne Presse. Ces vues sont d'une netteté remarquable et d'un intérêt poignant. Elles ont été projetées pour la première fois dans le diocèse, à Agon. Elles ont eu le plus vif succès.

N'était-il pas opportun, en effet, de resserrer en quelque sorte les liens qui nous unissent à notre belle patrie en vivant quelques instants de sa vie souffrante et, espérons-le, bientôt triomphante ? Une première série de vues sur la guerre de 1914, habilement projetée sur un écran parfaitement lumineux, nous a fait assister à des scènes à la fois douloureuses et émouvantes de la guerre. La parole, toujours sympathique de M. le curé, animait pour ainsi dire ces projections déjà si intéressantes par elles-mêmes. Nous retiendrons surtout ce que nous pouvons appeler nos raisons divines et humaines de vaincre, à savoir : l'intervention de la Sainte Vierge et du Sacré Cœur que nous rappellent les vues de Pontmain, Lourdes, La Salette, Montmartre; la valeur indiscutable de nos grands chefs et de notre état-major; la supériorité actuelle de notre matériel de guerre.

Ce programme, à la fois religieux et patriotique, ne pouvait qu'être intéressant et varié.

Cette magnifique série de vues se complète chaque jour; demander la liste à la Maison de la Bonne Presse, 5, rue Bayard. Prix de chaque vue : 0 fr. 80 en noir, 2 francs en couleurs. —; Il n'est pas fait de location.


LA BONNE PHESSE ET lA GUERRE Ses morts.

ALBERT HÉBERT (1914), tué à l'ennemi, en août 1914, à la bataille de Charleroi.

FRANCISQUE ROFFÉ (1906), tué à l'ennemi, le 25 août 1914, à Ban-de-Laveline (Vosges).

CAMILLE-AUGUSTE ROMMEVAUX (1909), tué à l'ennemi, le 1er septembre 1914, à Dannevoux (Metse).

FRANCIS LEROUX (1913), mort à Meillac, le 16 septembre 1914, de maladie aggravée au service.

HENRI ROUZEAU (1906), mort de ses blessures, le 20 septembre 1914, à l'hôpital d'Angers.

Louis ANDRÉ (1900), tué à l'ennemi, en septembre 1914, sur le plateau de Lironville.

ARMAND KABOUL (1909), mort de ses blessures, à l'hôpital de Montdidier, le 17 octobre 1914.

MARCELLIN VAUTHERIN (1908), mort de maladie, le 9 novembre 1914, à SainteMenehould.

VICTOR FOUCHER (1908), tué à l'ennemi, le 12 novembre 1914, à Hennemont (Meuse).

EDOUARD OBERMEYER (1898), prisonnier, mort de ses blessures, en novembre 1914.

PHILIPPE DUPONT ( 1914), tué à l'ennemi, le 22 décembre 1914, à Zuydschote (Belgique).

MARCEL MELIN (1911), tué à l'ennemi, le 14 février 1915, près d'Arras.

HENRI PÉCHON (1913), mort de maladie, à Poitiers, le 24 février 1915.

t

La Croix » à la guerre.

âu siège d''Étain.

D'un récit de M. Gerson, ministre israélite d'Etain, au cours de son interview dans l'Univers israélite du 4 décembre 1914, ces détails qui intéresseront nos lecteurs : - Quel était, avant l'évacuation, l'état moral de la ville?

— La ville? Allez, Monsieur, une belle ville! Etain! Les braves gens! Nous n'avions

plus de journaux. Seule, une dame catholique très pratiquante recevait la Croix qu'elle me prêtait régulièrement. Et j'en faisais la lecture à mes voisins de la Grande-Rue et à qui voulait m'entendre. C'était une manière de « remonter le moral ». On m'écoutait religieusement. « Ça allait bien », « ça n'allait pas mal du tout même! » Je dispensais la joie et la vie.

'f.>ans les tranchées.

Lettre d'un sergent-major : Je suis très heureux de pouvoir vous faire plaisir et tiens à vous faire savoir que votre vénéré quotidien ainsi que l'intéressant Pèlerin sont l'objet, dans ma compagnie, d'un très vif intérêt, ma mère, fidèle lectrice, se chargeant de m'envoyer régulièrement les Croix, suppléments et Pèlerins qui paraissent. J'ajouterai que j'ai été obligé de créer un tour de service, lequel me permet sans contestation de faire plaisir. E. V.

Dans les cantonnements.

D'une lettre du prêtre-capitaine 1f¡é, du diocèse de Pamiers 14 février.

Au village voisin, nous coudoyons les Bretons et les Normands. Chaque matin, il y a plusieurs communions, et le soir, la prière en commun ou individuelle attire auprès de Notre-Seigneur de nombreux soldats. Au chant des cantiques, les Bretons manifestent un entrain et un ensemble remarquables.

Depuis quelque temps, je me suis abonné à la Croix de Paris et au Pèlerin. On les lit avec intérêt et édification.

1 Sur le front.

D'un journaliste ami, en février 1915 : La Croix est ici on ne peut plus appréciée.

On en goûte fort le ton, on en admire surtout le ramassé. Des journaux qui nous arrivent, c'est le seul dans lequel on ait confiance et que l'on lise jusqu'au bout. La plupart des autres, franchement, nous dégoûtent et, pour un peu, nous décourageraient.

Je sais bien que livres et chansons depuis des temps ont mis ces types en vedette. Oui, mais les temps sont changés. Le luron, le blagueur, le fanfaron, le rigolo, le lascar?

Unités perdues dans l'immense cohorte. Le soldat, celui qui a aujourd'hui l'honneur de se battre, est plus simple infiniment; il est surtout plus grand que ça. Chapuzot luimême se tient très bien. D'ailleurs, il a pris de l'âge, Chapuzot. Il est pour le moins de la territoriale. Et voilà justement ce qu'il faudrait considérer : la composition actuelle de l'armée française. Ceux de l'active, des jolis régiments partis en musique, sont morts.

Nous vivons sur leurs tombes. Ceux qui tiennent le coup, à présent, sont des enfants,


les 1914, timides encore, encore fragiles, au point que j'en voyais deux, la se aine dernière, qui avaient attrapé une entorse rien qu'en retirant leurs jarrets de la vase. Et puis des réservistes, marqués déjà du pli des soucis.

Et puis des territoriaux, des territoriaux gris, aux yeux lents, qui regardent silencieusement tomber la braise et mijoter la marmite de campement. Pourquoi veut-on faire de ces êtres-là, qui depuis des mois sont torturés moralement et physiquement, qui ont tous leurs amours derrière eux et la mort en face, qui luttent en France, dans des pays français ';? ravagés, pourquoi veut-on en faire une bande de farceurs imperturbables qui rigolent devant les hachis des obus ou restent, aux pires instants, des amateurs forcenés du bouchon et de la manille ?

Nos bons confrères feraient mieux de se grandir à leur taille et d'être sérieux. Car, en définitive, même aux jours de repos dans les cantonnements, le soldat est grave. Telle est la note dominante, le trait caractéristique de son caractère. Le sceau du sacrifice est sur lui. Il est digne, oui, digne, voilà le mot. Ce n'est pas un titi, c'est un soldat d'holocauste, celui que Dieu a voulu qu'il soit.

Ma foi, je ne sais pas pourquoi je vous dis tout ça. C'est probablement parce que nous nous sommes souvent entretenus de la dignité de notre profession et que ces remarques vous intéresseront plus particulièrement. A l'occasion, faites-les connaître.Je vous dirai encore autre chose : c'est que les susdits canards sont déprimants avec leurs bateaux, le bateau russe, le bateau japonais, le bateau italien, le bateau roumain.

Mettons que ça ne soit pas des bateaux et que les Roumains ou les Italiens entrent un jour dans la danse. Il n'en est pas moins vrai que l'insistance, le manque de discrétion avec lesquels ces journaux annonçaient, appelaient, appellent le concours de nouveaux belligérants, finissent par faire.croire aux soldats que les alliés ne pourront jamais s'en tirer sans nouvelle aide. Et comme cette aide se fait attendre; comme, d'autre part, il sait mieux que quiconque le difficile de sa tâche et ce que lui oppose le Boche, dame! le soldat français ne tire pas grand courage de tous ces articles et de toutes ces promesses inconsidérées. C. G.

n Hollande.

On écrit de Hollande à la Bonne Presse : J'espère qu'une paix favorable vous permettra de continuer bientôt l'édition de vos belles publications. Ce que nous avons de religion ici, nous le devons à la France. C'est dans les livres français que nous devons puiser l'esprit religieux que nos ancêtres ont déjà reçu aux maisons d'éducation françaises.

L' « AIMaQac du rèletir » est fêté sur le front

D'un artilleur : « J'ai eu la malchance de feuilleter l'Almanach du Pèlerin devant un officier, un Breton, catholique pratiquant, qui, en l'apercevant, me l'a immédiatement mais poliment mobilisé; et je suis maintenant forcé d'attendre pour me régaler à mon tour; mes camarades me l'ont déjà retenu avec entrain. Voyez quel succès! »

D'un territorial : « L'Almanach du Pèlerin fait particulièrement des heureux; il passe dans toutes les mains, et je crois qu'il ne sera pas long à faire le tour de la compagnie; tous les hommes, sans distinction de partis, le trouvent très intéressant. » D'un réserviste breton : « Je viens ce rece- voir l'Almanach du Pèlerin, et on me prie, au nom de la 23e compagnie du 248e, de vous en remercier, car, pour moi, je ne l'ai pas eu encore un seul instant dans les mains. Je n'ai pas besoin de vous dire que le commencement de son voyage a été pour le chef de compagnie qui est un sous-lieutenant, et pour la suite j'ai fait une liste de poilus qui veulent tous lire le Pardon de Guingamp, c'est l'histoire qui les intéresse le plus. »

L'unité, 0 fr. 50; port, 0 fr. 10. Remises exceptionnelles : 8 exemplaires, 3 francs; 18, 6 francs; 84, 25 francs; 180, 5o francs; 360, 100 francs; 960, 25o francs. — Port en sus, 15 exemplaires, 0 fr. 60 en gare; 25 exemplaires, 0 fr. 80; 5o exemplaires, 1 fr. 25. — Paris, 5, rue Bayard.

AVIS

Nous sommes avertis qu'une publication, où sont recueillies de prétendues prophéties plus ou moins authentiques, parait avec la mention : La Bonne Presse. Nous tenons à déclarer que « la Maison de la Bonne Presse » est absolument étrangère à cette publication.

Le timbre de la Croix-Rouge française.

L'Etat le vend 0 fr. 15 dans ses bureaux de poste. Le public sait-il que le tiers de ce prix, un sou par timbre, est destiné à la Croix-Rouge, c'est-à-dire à nos chers blessés?

Si nos ménagères, nos commerçants et nos industriels, nos Sociétés, si tout le monde employait pour sa correspondance ce seul timbre, on aurait bientôt de quoi procurer à nos héros pansements et médicaments qui leur rendront la force et la vie. Que chacun, au moment d'entrer dans son bureau de poste, pense au bien qu'il peut faire si facilement.


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1914

1 1 IM3/

5, Rue Bayard-PARIS

Nous ne saurions trop recommander cette nouvelle publication de la Bonne Presse; elle s'adresse à tous, sans différence d'âge et de condition. Chaque fascicule mensuel, édité dans le format si commode et si apprécié des Romans à 20 centimes, forme un tout complet et contient, sous une jolie couverture tricolore de Lecoultre, la matière d'un volume à 3 fr. 50.

(Prix du numéro : o- fr. 20; port en sus : 0 fr. 10.

A partir de cinq exemplaires du même numéro, l'exemplaire est laissé à 0 fr. 12, port en sus.) Voici le passage principal de la préface publiée en tête du premier numéro qui vient de paraître :

On trouvera dans ce recueil la « petite histoire » de la Grande Guerre du XXe siècle écrite au jour le jour : récits tragiques, faits d'armes glorieux et douloureux aussi, lettres des soldats et de leurs familles, jugements d'hommes politiques et d'écrivains dont l'opinion compte.

Ce sera l'écho de toutes les émotions qui secouent la France depuis le jour où elle a vu ses frontières menacées et envahies.

Dans ces pages on entendra en quelque sorte la palpitation du cœur de la patrie, frémissante à la nouvelle qu'on entre en lice et que le règlement de comptes a sonné, — calme et résolue en prenant les armes, — indignée quand l'Allemagne déchire les traités signés par elle-même, en déclarant qu'elle n'a pas le culte des « chiffons de papier », — agitée d'une sainte colère devant le martyre de l'héroïque Belgique, — stupéfaite et

angoissée quand les hordes barbares dévastent le sol de la patrie et menacent la capitale, — exultante quand elle arrête l'élan de l'envahisseur, — glorieuse de son sang vaillamment répandu, joyeuse quand même, et confiante dans l'héroïsme de ses enfants, — enfin pleine d'espoir dans la bonté de sa cause et dans le triomphe final de son bon droit sur la force brutale.

Le cours régulier de la vie ordinaire s'est trouvé subitement suspendu. La nation tout entière, dressée pour une guerre comme le monde n'en a jamais vu, a tout laissé pour la défense de ses foyers brusquement attaqués.

Et c'est une affreuse mêlée de peuples dans une ruée sans pareille, où il semble que tous les progrès des sciences et des arts n'aient eu pour objet que de préparer le massacre et la destruction.

Au milieu des diverses agitations de ces heures tragiques, une note consolante domine : c'est la trêve des partis dans l'union de tous sous le drapeau de la France, c'est surtout le réveil religieux, symbole et gage des résurrections durables. Dieu reprend sa place dans les cœurs en attendant de la reprendre dans les institutions.

Les pages qui vont suivre seront le reflet de tous ces sentiments. Il est possible que la « grande histoire » ait plus tard à faire un choix dans cette frondaison hâtivement poussée ; il est probable qu'elle devra rectifier certains faits et certains jugements; mais une chose que les historiens ne modifieront pas, qu'ils transmettront à nos descendants dans toute la splendeur de sa radieuse figure, c'est l'âme de la patrie, vivante, ardente, héroïque, prête à tous les sacrifices pour le triomphe de la vérité et de la justice.

Le présent recueil est le fruit d'un triage opéré dans des périodiques et des lettres innombrables, par un bureau de documentation très ingénieusement organisé. En présenter les auteurs est impossible : ils sont trop. Disons seulement qu'on trouvera ici, groupés par catégories, des écrits judicieusement choisis sur toutes les phases du conflit actuel.

On se rendra vite compte du puissant intérêt qu'offre cette collection.

Nous osons affirmer à ceux qui voudront bien parcourir les pages ainsi découpées qu'ils ne perdront pas leur temps, qu'ils se feront une idée juste, complète et réconfortante des événements présents, et qu'ils seront reconnaissants aux ciseaux mobilisés par le Secrétariat de la Grande Guerre du labeur qu'ils se sont imposé, labeur peu apparent peut-être, mais très réel et aussi très fécond.

E. LACOSTE.


NOS ÉCRIVAINS tombés au cfyanrçp d'honneur.

ERNEST PSICHARI Le 22 août 1914, au combat de Saint.Vincent-Rossignol, près de Virton (Belgique), le lieutenant d'artillerie colonial Ernest Psichari, petit-fils de Renan, est tombé glorieusement.

Il avait fait, en 1913, un brillant début dans les lettres par la publication de l'Appel des armes, un des plus beaux livres « militaires » qui aient paru depuis longtemps. Il fut distingué par l'Académie française pour son grand prix de littérature; mais elle lui préféra malheureusement ce Romain Rolland, dont la germanophilie foncière vient de s'afficher d'une façon scandaleuse.

L'Appel des armes est une exaltation de la guerre et du métier militaire, une apologie enthousiaste de la discipline des camps. Il est piquant d'y voir un petit-fils de Renan, de l'auteur de l'Avenir de la science, bafouer l'idole du progrès, le scientisme, le laïcisme, et se mettre à l'école de Joseph de Maistre.

Et c'est une consolation que d'y entendre à maintes reprises le descendant du triste auteur de la Vie de Jésus affirmer sa foi catholique et glorifier l'Eglise pour son intransigeance et son immutabilité.

Comme le dit quelque part M. Ernest Psichari, « le fils a pris le parti de ses pères contre son père ». Le petit-fils de Renan a senti se réveiller en lui la foi de ses lointains ascendants bretons, il a rectifié la lignée un instant déviée, renoué la tradition rompue.

L'auteur de l'Appel des armes mettait ce cri dans la bouche de son héros : « Si vous le, voulez, Seigneur Dieu, donnez-moi la .grâce de mourir dans une grande victoire, et faites qu'alors je voie au ciel votre splendeur. »

Psichari est tombé avant la victoire: mais nous ne doutons pas que Dieu n'ait exaucé son dernier souhait, car nous savons par luimême la force et la vivacité de ses sentiments chrétiens. Son grand ami Péguy et lui se sont retrouvés là-haut dans la splendeur qui ne connaît pas de déclin.

Il était âgé de trente et un ans. On dit qu'il avait avec son aïeul Renan une ressemblance physique très frappante.

Le R. P. Janvier écrivait au directeur de la Croix le 11 novembre : Je vous serais infiniment reconnaissant de recommander spécialement aux prières des catholiques le lieutenant d'artillerie coloniale Ernest Psichari, Tertiaire dominicain de la Fraternité du Saint-Sacrement de Paris. Filleul et petit-fils de Renan, ce jeune homme montrait une âme d'une ardente et admirable générosité.

Converti et dirigé par un Dominicain très distingué de la province de Lyon, il aspirait au

sacrifice total de lui-même et brûlait de s'offrir en holocauste au Christ. Malgré les occupations multiples de son métier, il récitait chaque jour le bréviaire et la surabondance de sa vie intérieure se répandait déjà dans sa génération. Au moment où la guerre éclata, il songeait à rompre totalement avec le monde en entrant dans la vie religieuse. Dieu a voulu récompenser et couronner prématurément ce jeune et vaillant serviteur. Que tous vos lecteurs lui accordent un souvenir dans leurs prières et s'efforèent d'imiter ses hautes vertus.

La Croix a publié aussi cette lettre : Versailles, 14 novembre Iqq.

Monsieur,

J'étais le plus ancien, le plus intime ami d'Ernest Psichari. Cette amitié, qui fait ma fierté comme ma douleur, me crée envers cette mémoire très pure un devoir auquel je ne voudrais pas faillir. Certes, j'ai le cœur trop navré pour songer actuellement à rassembler les traits qui caractérisent l'histoire et l'âme de mon ami; je ne veux pas non plus contrarier le souci qu'il avait de garder dans le silence, pour Dieu seul, les nobles secrets de sa vie intérieure. Mais je lis dans certains journaux des articles bien intentionnés, à coup'sûr, propres pourtant à donner d'Ernest Psichari une image inexacte et amoindrie. C'est pourquoi je vous prie d'accueillir les lignes suivantes, destinées seulement à rétablir la vérité sur quelques points.

Ernest Psichari était autre chose qu'un héros plein de jeunesse et de flamme, « fou de rêve et d'action ». C'était un soldat chrétien, un chevalier de l'ancienne France. Il n'avait rien d'un romantique. Par la simplicité et la droiture avec lesquelles il allait à Dieu, par le naturel exquis qu'il mettait dans l'exercice le plus fervent et le plus pieux des dons surnaturels, par la profondeur et la générosité de sa foi, il était bien le frère du centurion de l'Evangile, qu'il aimait lui-même à prendre pour modèle et pour patron.

A voir l'état de grande liberté intérieure et, si je puis dire, d'innocence enfantine auquel Dieu élevait son âme, ses amis pressentaient bien qu'il devenait mûr pour le ciel. Ce n'est pas seulement du côté des héros, c'est du côté des saints qu'il faut chercher ses exemples. L' « élan tout direct et tout franc », le « goût du risque physique » n'étaient que les plus extérieures de ses vertus. Son vrai fond, c'était un ardent amour de Jésus-Christ, qui surélevait à l'infini son héroïsme naturel.

Les premières fois que la grâce de Dieu se fit sentir à son cœur, c'est en pleine solitude, dans les déserts de la Mauritanie. Son Appel des armes se rapporte à un stade antérieur; il n'avait consenti, après beaucoup d'hésitations, à publier ce livre que par souci de sincérité et pour montrer les préparations éloignées de l'œuvre divine dans une âme encore aveugle. Il n'eût pas souffert qu'on cherchât dans ce livre sa pensée définitive. Il n'admettait pas qu'on le rangeât parmi les adversaires de l'intelligence et de la raison, parmi les partisans exclusifs de l'instinct, du sentiment, de l'esprit de la race.

M. Maurice Barrès doit connaître sa pensée sur ces questions, par une lettre qu'il lui adressa à propos de la Colline inspirée.


C'est dans un livre en préparation, qui devait s'appeler le Voyage du centurion, qu'Ernest Psichari a livré sa vraie pensée. Si, comme je l'espère, on publie bientôt ces précieux fragments, on verra que pour lui il n'y avait pas de paix possible hors de la vérité. Il avait voulu la vérité pour elle-même. Il a vécu d'elle, il est mort pour elle, car il ne séparait pas l'amour de la France de l'amour de l'Eglise, et sa mort admirable n'a pas seulement la valeur d'un don offert pour le service de la patrie, mais encore celle d'un témoignage rendu à Dieu et d'un sacrifice véritable, librement consenti et consommé en union avec le sacrifice de l'autel.

Ernest Psichari ne croyait pas qu'il était apparu « pour justifier son grand-père ». Il savait, il voyait de plus en plus clairement que « sa vie et son oeuvre » ne pouvaient pas être « tenues pour un des testaments du génie si multiforme de Renan ». S'il espérait de quelque manière « racheter son aïeul », ce n'était pas pour amnistier celui-ci. Avec la délicatesse et la sûreté d'un sentiment naturellement juste et encore affiné par la grâce, il gardait pour son grandpère le respect prescrit par la loi de Dieu et une sorte de tendresse compatissante, qui lui faisait ressentir avec vivacité toute parole blessante imprudemment prononcée devant lui sur la personne de Renan, mais il jugeait en même temps sans aucune illusion la vie et l'œuvre de Renan. Il avait pris une conscience aiguë de l'offense que Dieu en avait.reçue, du scandale que les âmes en avaient souffert. Et il avait formé la résolution de donner sa vie pour réparer.

Par cette résolution très grave et très mûrie, « l'enfant », comme dit M. Barrés, savait bien tout ce qu'il payerait pour le « vieillard ». On sait qu'Ernest Psichari était Tertiaire dominicain, il avait été reçu dans le Tiers-Ordre à Rijckholt, en Hollande. Mais c'est une offrande plus parfaite qu'il méditait. Puisque l'attrait qu'il éprouvait pour la vie sacerdotale et religieuse n'est plus un secret, et que la Croix en a déjà parlé, je puis bien déclarer que cette pensée de réparation était le motif premier pour lequel il s'était promis de se consacrer à Dieu.

S'il n'avait pas déjà réalisé cette intention, c'est qu'il voulait se donner le temps de préparer peu à peu sa mère. L'idée qu'on se ferait d'Ernest Psichari serait incomplète, en effet, si l'on négligeait de mentionner l'amour merveilleusement tendre et profond qu'il avait pour sa mère. Elle était sa plus chère confidente, il l'entourait des soins les plus attentifs; c'est à elle qu'il communiquait d'abord ses travaux et ses idées ; c'est à elle que doit s'adresser maintenant la pieuse et respectueuse sympathie de tous ceux qui l'ont aimé.

Jacquks MARITAIN, Enfin, citons ces quelques lignes de Maurice Barrés, dans l'Echo de Paris, du 14 novembre : A quelle mystérieuse suite de recommencements se plaît la nature, écrivais-je, il y a trois ans, lors des débuts littéraires d'Ernest Psichari, et comme il est beau que les richesses cachées dans le germe primitif viennent successivement fleurir, tomber et refleurir dans la suite de la descendance Le petit-fils de Renan aura passé

au milieu de nous en courant, mais que sa destinée interrompue est belle! Couronné par la mort, le jeune héros rejoint son aïeul qui le reçoit avec respect. L'enfant complète, perfectionne, oserais-je dire, répare l'œuvre immense du vieillard.

Le germe des idées sur la patrie que nous avons combattues se trouve peut-être dans les pages, selon nous incomplètes, où Renan définit la nation comme une âme et un principe spirituel. Pour nous, la patrie est avant tout une terre et une entente avec ceux qui nous engendrèrent selon la chair. Mais dans cette même conférence que je n'ai pas sous la main et que je dois citer de mémoire, l'illustre philosophe déclarait : «Nous serons une patrie et nous nous aimerons en proportion des sacrifices que nous aurons acceptés et des maux que nous aurons soufferts ensemble. » Grande parole qui définit notre réconciliation, notre union.

Ces jeunes morts glorieux, Ernest Psichari et Charles Péguy, qui s'aimaient fraternellement, ont pu croire justement qu'ils distinguaient et choisissaient entre leurs ainés, et celui-ci plus âpre, parfois terrible, celui-là grave et tendre, ils ont l'un et l'autre coupé, tranché, sacrifié dans la chair vivante. Ils étaient deux guerriers.

Mais est venue la grande guerre de Revanche, et dès leur départ ils ont fait l'union. Rien qu'en prenant les armes pour la réparation du droit et la délivrance de l'Alsace-Lorraine, ils ont réparé et délivré l'âme française, ils ont restitué la patrie une et indivisible.

De cette réussite sacrée, je suis sur qu'ils eurent l'intuition dans leurs dernières veillées du bivouac, car les circonstances sublimes nous ramènent dans les régions les plus profondes de notre conscience et ncus aident à comprendre tout ce qui nous est parent. Ils ont senti tous leurs sentiments s'accorder; ils ont senti les nôtres unanimement les entourer d'une brûlante amitié. Et puis, je sais de source certaine qu'ils sont tombés en connaissant que leur sacrifice n'avait pas été inutile. Les compagnons d'armes de Péguy me racontent qu'il a succombé au dernier jour de la retraite de la Marne, après avoir entendu l'ordre du jour du généralissime disant : « Demain, les armées passeront de la défensive à l'offensive. » C'était assez pour que cette magnifique intelligence, dans sa dernière nuit, entendît les ailes de la victoire. Quant au lieutenant Ernest Psichari, son père m'écrit : «D'après des mots que j'ai recueillis, il est mort, croyant à la victoire fermement. » Cette certitude qui les remplissait et qui les consolait dans leur sacrifice permettra pour jamais à leurs amis, à leurs mères elles-mêmes, de se les représenter, ces jeunes héros, le front calme dans la mort.

HOMMAGE A CH. PÉGUY Le Conseil municipal d'Orléans a été saisi, par plusieurs de ses membres, d'une proposition tendant à donner à une des rues de la ville le nom de l'écrivain Charles Péguy, né dans cette ville le 7 janvier' 1873 et mort au champ d'honneur le 5 septembre 1914, et à faire apposer sur sa maison natale, faubourg Bourgogne, une plaque çommémorative.


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Malgré de terribles menaces, les paquebots n'en continuent pas moins à sillonner-les mers et à emporter vers des destinations lointaines les créations de l'élégance française. Dans de grandes caisses de bois blanc sont mollement étendus les modèles nouveaux que le goût parisien vient de créer, et ces chiffons soyeux, séduisants et féminins, naviguent insouciants parmi les mines terribles et les inquiétants

sous-marins, portant au loin les séductions inédites que la couture parisienne crée incessamment.

Notre goût français demeure maître sur le marché de l'élégance mondiale, et les salons de nos grands couturiers ont reçu cette année la visite d'un aussi grand nombre d'acheteurs étrangers que les années précédentes.

Pour eux les petites mains ont fait des chefs-d'œuvre; en sentant sous leurs doigts fragiles la caresse délicate des chiffons et des dentelles, nos ouvrières ont retrouvé tout leur génie créateur, et des modèles séduisants et tout à fait nouveaux sont sortis de leur cerveau reposé depuis de longs mois.

Nous assistons aussi à une évolution complète de la mode, à une transformation totale de notre silhouette.

Les modèles qui sortent tout parés du cerveau de nos créatrices seront-ils de suite au goût de nos Parisiennes, je ne sais! Il est même probable qu'il faudra, avant qu'elles ne les acceptent, une certaine accoutumance ; celle-ci se fera à la longue. Mais, tels qu'ils sont, ils plaisent beaucoup à l'étranger, et nous constatons avec plaisir et orgueil que la mode française n'a rien perdu de l'attrait qu'elle exerçait avant la guerre. Finie, disparue, effacée du panorama de nos nouveautés, la silhouette gracile, allongée, gainée, dans le cercle d'un fourreau étriqué.

La mode 1830 est presque entièrement revenue avec ses jupes évasées, ses corsages collants, ses cols exhaussés.

Voici les détails sur les modèles dernier cri puisés aux meilleures sources dans une de nos bonnes maisons de couture française. Les corsages sont plats, ne faisant aucun blousant à la taille; beaucoup sont bordés comme les cor-

sages amazones et se terminent en ceinture sur la jupe. D'autres ont la ceinture faite d'un biais de couleur de 0m,06 avec dépassant noir de chaque côté d'un centimètre de haut.

Les tailles sont longues, au-dessous de la ligne courante. Quant aux fonds de corsage, ils se coupent toujours en mousseline

apprêtée ou en toile de soie, se fermant devant par des agrafes.

Les manches sont longues et plates, montées soità l'entournure, soit à om ,o5 au-dessous, de manière à dessiner une épaule très tombante. Pour les tissus tels que serge, satin, taffetas, voile, la manche se taille en plein biais; s'il s'agit d'étoffes plus légères, telles que tulle ou dentelle, on les taille en droit fil sur un transparent de mousseline.

La caractéristique des corsages style 1915 réside aussi dans le genre du col, qui diffère bien sensiblement du modèle de l'année pré-


cédente; le décolleté en avant est beaucoup moins accentué; le cou s'encadre d'un col haut à pointe ou évasé, remontant dans les cheveux et partant en arrière du dos juste à la naissance des épaules.

Quant à la façon de la jupe, elle attire incontestablement notre attention, et nous stupéfie par sa transformation rapide. Elle rappelle la crinoline, faisant ainsi un contraste inattendu avec les jupes des saisons passées.

Ah! nous sommes loin des « entraves » et elles nous apparaissent d'une élégance bien désuète aujourd'hui.

Il nous faut la liberté donnée par une cir-

plissé et dos en forme partant des côtés; souvent ces jupes sont montées sur des empiècements plats en taffetas, en soierie unie ou en lainage soutaché (fig. 1). Cette robe est en bengaline bleu foncé; le corsage simple se rehausse de l'élégance d'un col en soie bleue soulignée de queues de rat même ton. Cette broderie se rappelle à la jupe par un haut empiècement fantaisie. La tunique drapée se fixe par un brandebourg en cordonnet de même teinte.

Ces formes concernent surtout la toilette simple et le modèle tailleur.

S'agit-il de modèles plus habillés, de toi-

conférence oscillant pour le bas de la jupe entre 3m,5o et 4m,50 et pour la tunique entre 4 et 5 mètres et par des jupes si courtes qu'elles laissent voir la cheville !

Jupes courtes et larges avec tuniques très amples, voici donc la ligne du jour.

Comment couper ces jupes nouvelles?

La plupart sont en forme avec couture simple au milieu du dos. Beaucoup d'entre nous possèdent encore dans leurs armoires des jupes façonnées ainsi datant de 1895.La mode n'est qu'un éternel recommencement, qu'une constante modification!

D'autres jupes sont droit fil avec devant

lettes d'après-dîner, on aura la robe à tunique très froncée, bouffant largement sur les hanches de façon à fournir du bas une ampleur très exagérée.

Les jaquettes des tailleurs sont très longues et les basques en sont en forme ou plissées.

Ce qui n'empêche pas cependant que nous ne voyons encore et même fréquemment de petits casaquins courts, coquets, faisant boléros sur le devant.

Les tissus nous présentent une moins grande variété que les façons, car ces premiers relèvent surtout de l'habileté du travail masculin. Tant de fabriques de tissages sont arrê-


tées pour l'instant et ne peuvent plus répondre au besoin de notre industrie! Tandis que la couture qui reste le domaine féminin a à sa disposition des milliers de petites mains qui ne demandent qu'à s'employer le plus activement possible.

L'ingéniosité de nos façons compensera donc la pénurie de nos tissus nouveaux, et nos créations n'auront point à en souffrir.

Peu de brochés, mais surtout des taffetas pékinés, quadrillés, dans les noirs, noir et blanc; pas de satin; des voiles, mousselines de soie, des serges, de la gabardine, des larnages écossais. Comme garniture, nous utiliserons la dentelle : de la dentelle noire ou du blanc, du linon brodé, la dentelle Malines et la dentelle brodée sur tulle araignée.

La grande nouveauté consiste à remplacer le picot qui bordait ordinairement la dentelle par un biais de taffetas noir.

Si nous avons, au renouvèau de la saison, un costume tailleur à nous commander, il nous faudra donc, si nous désirons suivre les indications de la mode courante et nous tenir dans le goût du jour, modifier complètement nos données habituelles d'élégance.

Le modèle le plusgénéralementétablietcelui auquel les femmes raisonnables demeurent presque toutes fidèles est en serge bleue; il dessine une jaquette droite avec basques en forme descendant au-dessous du genou; sur le corsage passe un galon mohair noir dessinant sur le vêtement le mouvement d'une courte jaquette arrêtée aux hanches. La basque du vêtement, qui est en forme, s'écarte devant pour laisser voir la jupe; celle-ci est faite droit fil devant avec dos en forme rejoignant le devant par des coutures sur les hanches.

Cette jupe mesure du bas une largeur de 3m,go.

Une silhouette tout à fait effacée nous réapparaît soudain avec les jupes à volants de taffetas plissé, évoquant la clochette de 1830: jupe courte et cloche, dont les pieds semblent les petits battants agiles.

Voici, en soie bengaline loutre, un modèle récemment sorti; le corsage plat, bordé d'un biais, se ferme au-dessous de bras, laissant apparaître une guimpe et des manches de tulle ; la guimpe, que l'on aperçoit dans l'arrondi du corsage, se termine par un col Médicis en dentelle montant très haut. La jupe est faite de trois volants plissés, le premier fixé à un empiècement froncé prenant les hanches. Les volants posés à plat donnent un tour de4m,5o.

Toujours beaucoup de gilets en taffetas ou en satin posés dans l'intérieur des corsages. Avec la serge unie, le gilet de taffetas écossais fait un effet charmant dans la simplicité du tailleur (fig. 2). Signalons cette toilette en serge vieux rouge dont la tunique

plissée s'écarte sur un gilet de taffetas écossais blanc et noir découvrant lui-même un col lingerie de piqué blanc; une ceinture en cuir blanc prend la taille et rappelle la clarté du col et des manches longues.

Voici refleurir les moisclairs, égayés par la vision de nos virginales communiantes. Qu'elles seront belles et recueillies cette année, ces cérémonies d'une poésie si attendrissante, et comme ces jeunes cœurs prieront avec une ferveur émue pour ceux dont la place est vide auprès d'elles! La mode récente marque avec un doigt léger et mesuré son empreinte sur la toilette de mousseline, c'est-à-dire que quelques jupes se coupent légèrement en forme, alors que d'autres se froncent au bas d'empiècements plats. Mais ces transformations sont à peine perceptibles, et la plupart des toilettes de communiantes continuent à se tailler droit fil avec coutures biaisées du haut, ainsi que les précédentes années.

Les corsages sont toujours blousants et de forme vague et souple, marquant la taille bien en place. Ce qu'il faut signaler dans l'actualité de garniture des toilettes de communiantes, c'est la grande faveur du tulle employé en empiècement, en ruchettes, en petits plissés. Ce décor fragile et mousseux est d'une séduction particulièrement exquise dans la fraîcheur blanche de la mousseline fine. On revoit également les voiles de tulle si à la mode il y a quelques dizaines d'années, mais j'espère que cette fantaisie ne durera pas ; il faut réserver le voile de tulle à la parure de la mariée, et garder pour la toilette de communion la fraicheur virginale et discrète du voiie de mousseline semblable à la robe. La couronne de fleurs ceignant le front est adoptée dans certaines paroisses alors que dans d'autres on reste fidèle au bonnet avec bord de roses de tulle. Les ceintures nouvelles sont en faille ou en ottoman, coupées dans le tissu et ourlées de chaque côté; on les fait larges, de façon qu'elles drapent, outre le tour de la taille, un peu du haut de la jupe ; elles forment en arrière un nœud noué à la main, terminé par une frangette ou par trois ruchettes de tulle mousseux. Mise DE MOISLY.

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MENUS ET RECETTES D'UNE MÉNAGÈRE.

DÉJEUNER HUITRES DE MARENNES OLIVES, BEURRE OMELETTE AUX FINES HERBES MERLANS.AU GRATIN DORADE SAUCE BLANCHE POMMES DE TERRE NOUVELLES AU BEURRE DESSERTS Fromage de Brie.

Chaussons aux pommes.

Oranges, mandarines.

DINER VERMICELLE AU BOUILLON DE LÉGUMES SAUMON SAUCE ANGLAISE MULET SAUCE BLANCHE ÉPINARDS SUR CROUTONS PETITS POIS A L'ANGLUSE DESSERTS Fromage Port du Salut.

Marmelade d'oranges.

Gâteaux divers.

DÉJEUNER SARDINES, BEURRE ŒUFS SUR PLAT AUX TOMATES MORUE MAÎTRE D'HÔTEL SOLE NORMANDE TOPINAMBOURS EN SALADE DESSERTS Fromage Camembert.

Confiture d'abricots.

Gâteaux secs.

DINER PANADE AUX JAUNES D'ŒUFS MAYONNAISE DE LANGOUSTE TURBOT SAUCE MOUSSELINE MACARONI A LA SAUCE BLANCH2 HARICOTS VERTS AU BEURRE DESSERTS Fromage Gervais au sucre.

Gâteau de semoule vanillé.

Pommes de Calville.

RECETTES

Sauce omnibus. — Prendre une tasse de lait bouillant, y faire fondre 225 grammes de chocolat, une pincée de vanille, mettre sur feu très doux, couvrir et ne pas laisser bouillir, mais chauffer afin de dissoudre le chocolat; ajouter deux cuillerées à café de farine de riz, 120 grammes de sucre en poudre, et 7 décilitres de crème chaude, faire cuire cinq minutes, passer au tamis, garder à côté du feu. Cette sauce est excellente pour toutes sortes de poudings, gâteaux, croquettes.

Sauce provençale. — Mettez sur le feu dans une casserole deux cuillerées de bonne huile d'olives. Joignez de l'échalote, de l'ail, des champignons hachés, faites revenir très légèrement, ajoutez alors une pincée de farine, et mouillez ensuite avec du vin blanc et du bouillon, sel, poivre, bouquet de thym, laurier, persil. Cette saucedoit bouillir une demi-heure à tout petit feu.

Dégraissez-la pour qu'il n'y ait pas trop d'huile.

Elle peut se servir avec différentes viandes rôties.

Sauce tomate. — Otez les pépins et le jus d'une certaine quantité de tomates, mettez-les ainsi dans une casserole, avec du beurre, oignons, bouquet garni, sel, poivre, girofle, mouillez avec du bouillon, faites bouillir pendant une heure.

Passez ensuite le tout à l'étamine pour en obtenir une purée que vous éclaircissez ensuite en y ajoutant du bouillon, si cela est nécessaire.

Gâteau de ménage, pour le thé et le café.

— Prenez 500 grammes de farine, 125 grammes de beurre frais, 1/2 demi-litre de lait, une cuillerée pleine de levure de bière, une pincée de sel, pétrissez le tout sur un plat jusqu'à ce que la pâte s'en détache, comme l'on pétrit la pâte à pain, c'est-à-dire en la battant. Beurrez une plaque de tôle, étendez-y la pâte en l'étirant avec la main, et faites-la lever dans une pièce chauffée près d'un fourneau.

Quand la pâte est bien levée, arrosez avec un peu de lait, mettez cette galette au four.

Crème vanille. — Pour une dizaine de personnes, casser six jaunes d'œufs, ajouter un seul blanc, bien mêler le tout en remuant et sucrant de sucre en poudre. Faire bouillir un demi-litre de lait dans lequel vous aurez mis un bâton de vanille, retirer ce dernier, et laisser tiédir le lait avant de le jeter sur les jaunes d'œufs qui cuiraient, si le lait était bouillant.

Bien remuer le liquide et mettre dans un plat ou dans des petits pots et faire prendre au bainmarie avec feu dessous et dessus.

Beignets de fruits à l'eau-de-vie. — Prenez des prunes, des abricots, des pêches, des cerises conservées à l'eau-de-vie; ajoutez aussi des fruits confits. Enveloppez ces morceaux un à un dans du pain à chanter, trempez dans la pâte à beignets ordinaire et faites frire. Servez en saupoudrant de sucre.

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CARNET D'UNE PARISIENNE

Haut les cœurs!

Il est évident qu'il y a encore quelque chose à faire pour que tout le monde se mette au diapason de nos admirables troupes de première ligne. Petit à petit, cependant, on voit disparaître le fâcheux pessimisme qui a sévi surtout parmi ceux qui avaient le moins à souffrir de la guerre, cela tient à ce que les événements sont tels, qu'il devient tout à fait impossible de noircir l'horizon, comme des personnes le faisaient, il n'y a pas longtemps.

On semble donc en avoir fini avec la mollesse de l'Angleterre, la lenteur de la Russie, l'anéantissement de la Belgique et l'hostilité systématique des neutres. Les cauchemars aériens et sous-marins eux-mêmes n'ont plus cours qu'en de rares cénacles apeurés, où l'on finira bien par se rabattre sur quelque vague prédiction de cataclysme géologique, vendue à beaux deniers comptants par une des sibylles dont le négoce dolosif paraît avoir acquis l'indulgence de la Préfecture de police.

Si je ne me trompe, on entend même un peu moins parler de la « longueur désespérante » des hostilités. Il est bien vrai pourtant que ce thème-là était le plus facilement excusable, étant donné que personne n'avait imaginé une guerre aussi longue et que beaucoup de gens aisés ou fortunés, de commerçants ou assimilés, ayant été surpris sans provision financière, se trouvent dans une situation, pour certains, aussi précaire que celle des victimes directes de l'invasion.

Enfin, chose à peine croyable, les plus moroses daignent nous accorder une artillerie et des munitions suffisantes et admettent que nous possédions en quantités voulues de quoi habiller, équiper et armer tous les hommes du « service armé ».

Indice plus caractéristique encore : on ne rencontre plus que des pessimistes invétérés, des mécontents typiques, pour professer l'opinion que tous les hommes valides qui respirent dans les limites du territoire national doivent se trouver en même temps sur la ligne de feu; de sorte que la chasse à « ceux qui ne sont pas encore partis » a cessé d'être le sport à la mode.

Bref, au jugement d'observateurs impartiaux, cela va de mieux en mieux et nous serions même très rapprochés des limites de la perfection si, par bonheur, venait à dispa- raitre une habitude qui menace de tourner à la manie. pour ne pas dire : monomanie.

Cette habitude consiste à énumérer, chaque fois qu'on se trouve en public, les malheurs, les ruines, les deuils dont la connaissance vous est venue plus ou moins directement.

Le nombre des personnes atteintes de cette manie est considérable; il grandit tous les jours, par contagion sans doute.

Le fait est qu'on ne peut entrer dans un salon, non plus que dans un magasin, etc., même un tramway ou un wagon du Métropolitain, sans entendre le récit d'un pillage, d'un bombardement ou bien l'énumération des morts et des blessés qu'une personne quelconque connaît. quand elle n'en a pas entendu parler elle-même!

A Dieu ne plaise que je dénie aux trop nombreuses familles éprouvées età leurs amis le droit de parler de leurs malheurs, mais il me semble bien que ceux-là le font entre eux, loin de la foule.

Ce que je ne puis m'empêcher de regretter, c'est la banalité de ces récits faits par des personnes qui, en dehors de l'émotion généralisée, n'apportent là, il faut bien le dire, qu'un besoin inconscient de parler de quelque chose et s'en vont ainsi semant autour d'elles une atmosphère de tristesse où les âmes faibles peuvent rencontrer le germe du découragement.

Les peuples heureux n'ont pas d'histoire, aussi trouve-t-on peu de choses à dire sur les millions de soldats auxquels il n'est arrivé aucun accident de guerre, et pourtant que de réconfort et d'espoir à glaner autour d'euxl Prions avec ferveur pour nos morts, nos blessés, nos malades et pour tous ceux qui souffrent de la guerre, mais, de grâce, trouvons d'autres sujets quand il s'agit de conversations banales et, en public, laissons systématiquement de côté ces choses attristantes et peut-être déprimantes pour certaines des personnes qui nous entendent.

RENÉE DE BERTHAUCOURT.

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L'AIR DE LA BATAILLE (NOTES D'UN COMMANDANT DE COMPAGNIE)

Q

UAND nous quittâmes les wagons fleuris qui nous avaient amenés de l'extrême Sud-Ouest de la

France jusqu'en cette infime gare d'un bourg frontière, rien ne nous indiquait que nous nous engagions sur le sentier de la guerre. Nous avions assez l'allure d'un train de pèlerinage, tous les hommes, en passant à Paray-le-Monial, s'étant décorés de scapulaires.

Pourtant la réalité nous apparut, une après-midi, tandis que, en colonne par quatre, nous suivions une large route jaune, bordée de taillis et coquette comme une allée de parc. Soudain, et sans motif apparent, coup de sifflet : « Sabre en main !

L'arme sur l'épaule droite! » Qu'y a-t-il?

Le poteau-frontière est là, étendu comme le cadavre d'un fusillé, sur le dos et les bras en croix. La minute est assez dramatique : nous sommes en guerre, nous marchons sur le sol ennemi! Attention!

rassemblons nos facultés.

Halte au seuil du prochain village. Ma compagnie couvre le cantonnement ; nous sommes à un carrefour largement ouvert vers l'Ouest, vers la France. Une section est préposée à la garde des routes convergentes. Le reste de la compagnie, les faisceaux formés, se disperse dans le bois; elle y découvre des objets usagers et militaires, paquets de pansements allemands, chargeurs, bandes de cartouches à mitrailleuses. Il fait un temps splendide, et la circonstance mérite bien d'être soulignée par quelque manifestation symbolique. Rassemblementl J'ai précisément parmi les gradés un instituteur qui sait la Marseillaise tout entière : la compagnie formant les trois côtés d'un carré, au garde-à-vous, mon sergent entonne les couplets successifs : tout le monde reprend au refrain. Au couplet

Amour sacré de la patrie, Conduis, soutiens nos bras vengeurs!

je fais présenter les armes!. Et voilà la terre d'Alsace reconquise.

Trois semaines durant nous avons circulé dans des paysages gracieux et graves, sur des routes bordées de cerisiers, où, fréquemment, s'érige une croix archaïque de silhouette rhénane, portant unesortede reliquaire avec une inscription gothique, moitié allemande et moitié latine, promettant des indulgences. Nous avons bivouaqué sur des coteaux couronnés de bouleaux et de chênes, surveillant sur les routes de l'Est l'arrivée possible de renforts allemands au débouché de la forêt de la Harth, pendant que nos avant-gardes filaient sur Colmar. Nous avons vu Mulhouse comme Moïse vit la Terrepromise, car, tandis que quelques régiments de notre division cantonnaient dans les casernes de la ville évacuée par les Allemands, nous autres, réservistes indésirables, on nous laissait aux portes de Dornach. Mais nous avons traversé Altkirch et séjourné à Bernwiller où règne le souvenir de Henner; cantonné à Spechbach haut et bas, Ueberkùmmen, Baschwiller à la belle église!.

Chacun de ces villages alsaciens ressemble comme un frère à celui de Hansi.

Maisons à toit énorme, écorné aux pignons, superposé à un moignon de toit faisant saillie au premier étage. Toute la charpente apparente est peinte en brun foncé. L'ensemble est vigoureux, sourcilleux, blafard, d'une propreté extrême, des fleurs partout.

La race est ici étonnamment marquée; jeunes filles fortes et fines, gamins pieds nus aux yeux clairs, au regard solide et résolu ; le type des vieux et vieilles a été


admirablement restitué par Henner, et ce type n'a rien à voir avec le type allemand. On s'en rend compte en examinant la décoration murale des 'maisons villageoises. Images religieuses provenant du quartier Saint-Sulpice, portraits de grands-pères en uniformes du second Empire et portraits des fils de la maison, l'un fantassin à Belfort et l'autre à Fribourg; cherchez l'inévitable groupe des élèves de l'école communale présidé en son centre par M. l'Instituteur. Le contraste est frappant entre le facies de cet immigré et les bonnes petites têtes carrées de ses écoliers. Les « Marches de l'Est » ne sont pas une fiction de littérateur.

On nous accueille avec réserve dans les agglomérations rurales; presque tout le monde y est Alsacien, les gens de plus de cinquante ans parlent tous français.

Mais on se méfie! On a vu le premier raid sur Mulhouse, puis la retraite. Et voici de nouveau les culottes rouges !

Est-ce définitif, cette fois? Et si nous évacuons de nouveau, quelle abominable vengeance de la part des Allemands à l'égard de ceux qui se seront compromis avec les Français! Pour ces motifs, et par naturel tempérament, les paysans d'Alsace sont peu expansifs. Pourtant à la longue, entre eux et nous, le liant s'établit.

A B., un dimanche, on voit nombre de boutonnières avec le ruban vert et noir, que les titulaires n'osaient pas arborer sous la domination allemande. Le colonel prescrit que tous ces vieux braves auront droit au salut militaire et aux honneurs de la part des sentinelles. A la messe, par égard pour nous, le curé prêche en français; le suisse porte avec ostentation la médaille de 70; et chez l'habitant, toutes portes closes, on nous parle des Prussiens en termes méprisants et haineux!

Il paraît que nous constituons la réserve de l'armée d'Alsace— un beau nom —sous les ordres du général P., un grand nom!

Nous étions à Bernwiller, sommeillant, fumant, droguant dans un pré: tout le

régiment était là, plus le groupe d'artillerie divisionnaire. Le canon tapait fort vers Mulhouse: du monumentdeHenner, on distinguait le feu des pièces et le point d'éclatement des obus. On entendait le teuf-teuf des mitrailleuses!. Nous restions là, sans en penser davantage!

Tout à coup, de je ne sais quelle origine, des bruits circulent dans les groupes.

Des régiments auraient fléchi !. La bataille compromise!. Un commandant zélé fait exécuter sur place aux compagnies de son bataillon un petit exercice schématique de retraite par échelons. Les bruits fâcheux prennent de la consistance, et peu à peu nous voilà très silencieux, un point d'angoisse au cœur.

Soudain, un dragon avec un pli pour le colonel. Tous les yeux sont fixés sur eux. Le chef lit rapidement, et immédiatement prononce : « Aux faisceaux !

Nous partons. » Ça y était! Nous marchons très vite, dépassés en chemin par des artilleurs à l'air sérieux, dévalant les pentes à un trot fou. Personne ne dit mot dans la colonne, quoiqu'on soit au pas de route. Nous croisons des soldats débandés, à l'air hagard, des blessés aux yeux enflammés, deux gendarmes conduisant des prisonniers allemands militaires et des espions civils. L'émotion grandit; on ne marche plus, on court.

Tout à coup, derrière nous, le son prolongé d'une corne d'auto. Debout dans la voiture, comme une statue en mouvement, le général P. traversait ses troupes en les dominant. Jamais je n'ai vu une pareille attitude de fierté, sûre d'ellemême et discrète en même temps, un air aussi éloquent de certitude et de maîtrise. Cet homme était la personnification du commandement victorieux. Nous nous en sentîmes le moral transformé, l'équilibre était reconquis! Tous nous nous sentions commandés, et en soi-même chacun éprouvait l'allégresse d'obéir en absolue confiance, de subir une impulsion qu'on prolongeait jusqu'au delà du but : nous avions une mentalité de vainqueurs !


LES ADIEUX AVANT DE PARTIR POUR LE FRONT (Envoi de M. Jules Vatez, de la ligne de feu.)

A la nuit tombante, on nous arrêta en colonne double à la crête d'un plateau.

La fureur de la bataille s'apaisait; des incendies flambaient dans Mulhouse, là,

à trois kilomètres de nous; des coups de canon isolés, des salves d'infanterie espacées, des caquetages de mitrailleuses.

Puis le tumulte s'éteignit. Il faisait tou


à fait noir, on bivouaqua. Ma 22e était compagnie de tête et la première à marcher le lendemain. J'avais à fournir deux petits postes, et mes sentinelles pendant cette nuit allaient être, de toute l'armée, les Français les plus en avant dans la marche contre l'Allemand. Je le leur fis remarquer avant de les établir à leur emplacement; j'observai que j'avais la voix sèche et vibrante, et je vis sur leur visage leur volonté mobilisée, leur j âme prête à tout. Installé à la lisière d'un boqueteau, je ne dormis point et pas une seconde je ne sentis la fatigue; je fis quatre rondes, le service était exactement assuré. Le hennissement d'un cheval mit sur pied toute la compagnie en armes.

Il y avait maldonne, car c'était ma monture, humble chose!.

Au tout petit jour, les lorgnettes immobiles étaient braquées sur Mulhouse. A nos pieds Dornach; au delà la grande ville, tache grise où rien ne bougeait que quelques lourdes fumées de brasiers. En regardant plus fixement et l'éclairage se précisant, on discerna des déplacements horizontaux de formes floues, écharpes de brouillards, fumées d'usines. C'étaient des drapeaux; et les premiers rayons du soleil nous montrèrent Mulhouse en fête, largement pavoisée aux trois couleurs. Les Prussienss'étaientretirés; l'arrivée surleur droite de notre division, nos 75 se profilant sur la crête à 2 000 mètres d'eux avaient déclanché leur mouvement de retraite; ils avaient gagné la forêt de la Harth.

C'est ce que nous apprit quelques semaines plus tard le rapport du général P.

Le bivouac abandonné, la division fut concentrée à quelques kilomètres en arrière. Nous rencontrâmes au prochain village plusieurs régiments qui nous firent de beaux récits de la bataille de la veille, et nous demeurâmes béants devant ces rescapés lyriques. Ils avaient durement « écopé », mais leur moral était exalté au paroxysme: ils ne rêvaient que revanche.

Notre régiment reçut l'ordre d'aller occuper I. et spécialement le Signal

d'I., où les nôtres, les jours précédents, avaient particulièrement souffert, et où on soupçonnait que les Prussiens tenaient toujours le bois. Je suis d'avant-garde; nous partons. Tout le monde, jusqu'au dernier embusqué, a été dûment averti.

« Nous marchons contre un patelin dominé par un bois : le bois et le patelin sont occupés par les Boches qui ont si durement étrillé les camarades que nous venons de voir. Ouvrez l'œil ! »

Jamais je n'ai vu un service d'avantgarde et de patrouilles assuré avec un pareil zèle; mes bonshommes furetaient comme des braconniers. La marche fut longue. : pas un traînard! Sur la route, des sacs abandonnés, quelques-uns tachés de sang, des fusils brisés, un cheval mort, gonflé, les jambes contractées et rigides, les quatre fers en l'air, luisant comme un phoque et empestant l'air à deux cents mètres. C'est un cheval allemand, matriculé à la fesse.

Arrivée à I. Renseignements pris, c'est une petite ville industrielle, population d'immigrés; pas un Alsacien! Le personnel du chemin de fer, des ouvriers et employés d'usines, tous Boches. Une compagnie de chasseurs occupe les accès.

J'entre dans le tas avec les éclaireurs de pointe. Quelle désagréable impression on éprouve devant tous ces regards haineux et sournois qui semblent vous coucher en joue! Près de la gare, une persienne s'entr'ouvre tout doucement. Une vieille femme, tête grise, fanée et très digne, se risque timidement. Elle me fait signe; j'approche en louvoyant et elle me dit à voix très basse : — Je voudrais dire un mot à votre commandant.

Je le fais prévenir; il arrive avec le même cérémonial, comprend d'un coup d'oeil et commande : — Halte! Formez les faisceaux!

Puis, feignant de chercher, de s'orienter, il désigne la petite porte à claire-voie d'un jardin contigu à la maison de cujus agitur et crie très haut :


— La corvée d'eau ici !

Les hommes, surpris, mais satisfaits, démontent leurs sacs, se munissent de seaux, de marmites, envahissent le jardin, et, parmi eux, le commandant. Sur le seuil, la vieille Alsacienne, qui a saisi le mouvement, affecte de guider vers le puits et la cave la corvée des assoiffés, cependant qu'elle coule dans l'oreille du commandant :

AUTOMOBILE BLINDÉE A MITRAILLEUSE

— Ils sont dans le boisl Ils vont vous tuer tous, comme ceux d'hier!

Je n'avais rien entendu, mais j'avais un peu vu, et quand le commandant sortit, je compris à son visage « qu'il y avait du vilain ». Dans le moment même, une automobile militaire arrivait, pilotée par un capitaine d'état-major. Il stoppa.

— Croyez-vous, nous dit-il, que je puisse aller d'ici à Altkirch sans accroc?

Alors, le commandant tourne la tête et, du regard désignant le bois qui dominait la route, cligna de l'œil impercepti- blement, et répondit : — Oui, mais vous ferez bien de mettre la quatrième vitesse.

L'autre, une demi-seconde, nous fixa, puis, d'un plissement de paupière ayant accusé le coup, il démarra et fila.

Devant ces allées et venues, ces palabres, voilà les indigènes qui dressent l'oreille. Un cercle s'esquisse autour du groupe formé par le commandant, moi, mes quatre chefs de sections, à qui je

donne quelques instructions. Nos Boches tournent le dos — preuve qu'ils écoutent — et affectent de causer entre eux. Leur cercle insensiblement se resserre autour de nous; une tête tend à s'intercaler entre l'adjudant et moi!. Froidement, l'adjudant fait un pas en avant, empoigne à deux mains son sabre, et d'un revers énorme, avec un bruit de porte violemment fermée, appliqua le fourreau et le sabre y contenu sur la tête du Boche indiscret, lui faisant, momentanément, perdre le goût d'écouter ce qui ne le regardait pas. Ce geste nous donna de l'air!


LE GÉNÉRAL JOFFRE EN OBSERVATION DERRIÈRE UNE BATTERIE D'ARTILLERIE LOURDE

Reprise de la marche en avant : voici la lisière du bois redoutable! Premier incident à la voie du chemin de fer. Un bonhomme, vêtu bourgeoisement, visage mauvais et têtu, figure jaunâtre et poil de suie, est déployé devant le passage à niveau, les bras écartés, refusant sans mot dire d'ouvrir sa barrière. Je marche sur lui, et, le regardant dans la figure, je lui dis, très sec, en manœuvrant mon étui-revolver : — Ouvrez immédiatement! Et laissez ouvert!

Je ne sais pas s'il entend le français, mais il me comprend sûrement. Son regard fuit le mien; pourtant il plie, et, à regret, fait fonctionner sa barricade.

Pour plus de sûreté, je lui laisse comme acolyte une sentinelle fusil chargé. Soudain une idée se présente : a-t-on songé à fouiller la gare? Mon avant-garde est

trop loin pour s'en assurer, je fais aviser le commandant. Elle ne l'avait pas été, mais elle le tut. On trouva un appareil téléphonique dans la cave; on saisit une abondante correspondance militaire, quelques armes. A titre de vengeance, tout le mobilier fut détruit! On laissa les murs, les parquets et les plafonds : — La femme de ménage n'aura plus qu'un coup de balaiàdonnerl fit remarquer quelqu'un.

Des infirmiers changèrent de linge aux frais du chef de gare; à titre de trophée, on recueillit ses trois casquettes.

Cependant, mes éclaireurs de pointe travaillaient. On leur avait ad joint quatre dragons; nous cheminions en plein bois quand tout à coup un des cavaliers s'arrête. pile, au confluent d'un lacet avec le chemin que nous suivions : — Quelqu'un nous observait, dans ce


sentier, à ce tournant! Il s'est défilé en courant. Je crois que c'était un militaire!

— L'escouade de pointe en tirailleurs; les autres dans le fossé et chargez les armes. Cycliste, allez rendre compte au commandant. Vous, les dragons, tâchez d'établir le contact avec cette patrouille ennemie.

Je reste là, immobile, les yeux fixés sur cette région du fourré d'où vont partir

les coups de fusil, attaché à ce cavalier qui peu à peu disparaît dans la verdure.

Sans bruit, je me porte sur la ligne des tirailleurs; je la dépasse, je m'accroupis, prêt à bondir, à foncer, le revolver à la main !. Et puis, je m'hypnotise sur le tournant dangereux; je n'ai plus la notion du temps et je tombe dans une sorte d'extase. Soudain, derrière nous, bruit de chevaux! C'est un peloton de dragons

LE GÉNÉRAL PAU EN TOURNÉE D'INSPECTION

qui vient nous déblayer la place : il avance en colonne par deux, bien en ordre, le sous-officier revolver haut, les cavaliers sabre main. Ces hommes droits en selle, prêts à frapper, l'éclat des lames, tout cela nous fait l'effet d'un tonique. Et puis, ces cavaliers passant à la pointe d'avant-garde, nous leur transmettons la responsabilité. A eux l'inattendu, les coups d'origine invisible. Nous, on nous préviendra s'il arrive quelque chose; nous

redevenons un élément dans la colonne, une troupe d'infanterie quelconque. Nos dragons flairent, furettent, guignent, et les voilà partis, sabots claquants, faisant dégringoler les cailloux du chemin.

Et nous demeurons, marron s sur le tas renseignés, par-ci, par-là, par la liaison des dragons. Une demi-heure, trois quarts d'heure. Soudain, en arrière, un feu à volonté très vif!. J'y vole!. C'est une section du gros qui tire contre un


aéro allemand, un sale Taube, noir et sinistre comme un corbeau, qui d'ailleurs semble se moquer un peu de nos balles. Dans le même temps, à un galop pétaradant, mes cavaliers dévalent, les yeux brillants, le sabre attentif. « Où sont-ils? » Je les informe, et les voilà déçus ! Eux m'apprennentqu'ilsont fouillé le bois dans tous les sens, jusqu'au plateau, qu'ils n'ont vu personne, mais qu'ils ont l'impression d'avoir refoulé et dispersé des patrouilles ennemies. Nous reprenons la marche en avant. Et nous arrivons au signal d'I., ayant buté sur quelques sacs abandonnés, sur quelques fusils cassés, entrevu sous bois quelques formes de soldats couchés et immobiles. des cadavres! Pendant que le régiment serrait sur nous, j'envoyai mes quatre sections patrouiller aux limites du plateau : rien! Nous demeurâmes au signal quatre heures. Après quoi, on nous désigna de lointains cantonnements, et nous redescendîmes sur 1.

La traversée fut dramatique, quasi tragique. Nous voyant rebrousser chemin, les habitants nous crurent vaincus et en fuite. Je me rappellerai toute ma vie l'expression de terreur et de désespoir de la vieille Alsacienne qui nous vit repasser devant la gare dévastée. Pour ne point achever de la compromettre, nous passâmes sans la regarder. Les Boches indigènes la tenaient à l'œil! Les misérables ont dû l'attacher au poteau de torture après notre départ.

Des groupes hostiles se formaient. On ne criait pas encore, mais on nous montrait presque le poing; en tout cas, les yeux ne cachaient rien. La colonne s'écoula. La dernière voiture n'était pas à cinquante mètres de la dernière maison qu'un groupe apparut dans un pré latéral, groupe composé de deux gendarmes escortant huit prisonniers civils. A cette vue, un hurlement de fureur éclata sous les murs d' I. : les Boches avaient reconnu dans la chiourme quelqu'un des leurs 1 Ils sautent sur un tas de décombres

et de fagots, s'y choisissent des triques, et marchent sur les deux gendarmes dans le but évident de leur casser la tête et de mettre en liberté les captifs. Ils avaient compté sans le peloton d'arrière-garde.

Le maréchal des logis et ses huit hommes partent carrément à la charge, tirant en l'air quelques coups de revolver pleins de promesse. Ils cernent cette bande de sauvages, pendant que la section de garde au convoi, ayant fait demi-tour, leur entre dans le flanc, baïonnette au canon.

Personne ne fut tué, mais ils furent aigrement piqués et houspillés. On en cueillit trente. Il me semble que jamais correction sommaire n'eût été plus justifiée; les Allemands ont rarement d'aussi bons prétextes pour sévir! JQ, crois qu'on ne les a payés que de quelques coups de pied.

Pendant que tout ceci se passait à la gauche du régiment, les compagnies de tête étaient engagées dans la plus invraisemblable des pagayes. Trois divisions, débouchant de trois routes confluant sur un chemin départemental, émettaient la prétention de suivre celui-ci toutes trois à la fois pour se rendre à des cantonnements différents : ce fut un beau travail d'état-major!

Nous pataugions. Le colonel vint me faire un bout de conversation.

— Eh bien! vous vous demandez si nous avons été vainqueurs aujourd'hui?

— Mon Dieu, mon colonel, je ne me le demande pas beaucoup! Je pense que nous avons fait une opération blanche.

— Vous faites erreur ! Nous avons été vainqueurs et nous avons repoussé l'ennemi assez loin.

— J'étais à l'avant-garde et je ne me suis pas douté de cette retraite.

— C'est apparemment parce que vous portiez au loin la terreur et qu'ils ont lâché pied en vitesse; mais soyez assuré qu'ils ont gagné la forêt de la Harth.

Allons, ça va bien! Hier et aujourd'hu nous avons pris l'air de la bataille. La prochaine fois, le baptême!

GABRIEL MARRI.


LA MORT DES MONUMENTS

L

'HORRIBLE guerre qui, par ses cruautés, nous ramène aux grandes invasions germaniques du ve siècle ne fera

pas que des veuves et des orphelins. Aux pleurs des mères, des épouses et des petits enfants, elle ajoutera, par les ruines qu'elle aura faites, ces larmes des choses que le poète antique a vues couler. Les cathédrales, et, aussi beaux qu'elles, les hôtels de ville et les beffrois de la Belgique et du Nord-Est de la France entrent en agonie.

Au récit des bombardements dont on nous entretient sans cesse, la pensée se reporte à celui, le premier en date, qui vit crouler la plus parfaite des créations humaines : le Parthénon. On ne sait pas assez que le chef-d'œuvre grec périt lui aussi d'une main allemande :

Le doge Morosini installa une batterie d'obusiers sur la colline des Muses. Le 26 septembre 1687, à 7 heures du soir, une bombe trop bien dirigée par un artilleur allemand à la solde de Venise tombe sur le Parthénon où les Turcs avaient déposé de la poudre.

Le Parthénon saute, trois cents hommes sont tués. Morosini complète sa destruction en essayant d'arracher un trophée au fronton Ouest. Le char d'Athéna qu'il convoitait échappe aux mains de ses ouvriers et s'écrase sur le sol. Le doge repart, n'ayant conquis ni Athènes ni ses chefs-d'œuvre qu'il laissait détruits sans excuse (1).

Aujourd'hui, l'Acropole, veuve de son temple, dont les tambours de colonnes jonchent le sol, pleure toujours l'œuvre irréprochable de Phidias, et les savants à lunettes d'or d'outre-Rhin s'essayent vainement à reconstituer ce qu'un de leurs ancêtres a brisé.

(1) GUSTAVE FOUGÈRES, Athènes, p. 161.

Ruines de Grèce dues à la guerre turcovénitienne ; ruines plus anciennes de Rome et d'Orient que d'incultes barbares au moins ont amoncelées ; ruines de notre vieille France du moyen âge commencées par les protestants, continuées par le goût classique du XVIIIe siècle, achevées par les révolutionnaires et par les entrepreneurs qui, sous le premier Empire, démolirent, après les avoir achetées comme biens nationaux, des perles demeurées intactes, comme Cluny et Saint-Nicaise de Reims; ruines actuelles de la grande guerre qui commence.

Quelle mélancolie de penser que rien, pas même une civilisation faite de science et d'érudition, n'a pu sauver ces fleurs du génie humain, dont, semble-t-il, l'ennemi lui-même aurait dû assurer la garde !

Ces créations, d'essence supérieure, tenaient de leur perfection même une sorte d'extranaturalisation qui les rendait fraternelles à tout homme. C'est ainsi qu'un artiste français regardait comme l'atteignant en propre la disparition d'un chef-d'œuvre italien ou hollandais, allemand ou espagnol. Quand une suffragette lacéra à Londres la Vénus de Velasquez, tout artiste se sentit malheureux à la pensée d'une si grande perte.

L'art n'a pas de patrie. Est-ce que le Louvre est français seulement?

En dépit d'un siècle entier consacré à l'organisation de musées où toiles peintes et pierressculptéessontreligieusement col- lectionnées, datées, étiquetées, nous voici revenus aux époques de barbarie. Les Gaulois, dit-on, éclataient de rire quand ils voyaient sur l'Acropole les statues des dieux que la piété grecque y avait rassemblées. Et sans doute durent-ils peu


PORTAIL DE LA CATHÉDRALE DE REIMS APRÈS LE BOMBARDEMENT DU 19 SEPTEMBRE 1914

les respecter. Mais c'étaient des sauvages que l'art insoupçonné amusait comme un jouet d'enfant, jouet dont on rit d'abord et que l'on brise ensuite.

Depuis, lors, que de deuils et que de pertes ! Le cimetière des œuvres d'art mortes s'étend à l'infini.

Mortes, les statues grecques de la belle époque, car les antiques que l'on nous montre, au Vatican comme au Louvre, le Doryphore de Polyclète, le Marsyas de Myron, l'Apollon saurochione de Praxitèle, le Méléagre de Scopas, Y Athlète de Lysippe, l'Apollon du Belvédère de Léocharès, et les autres, ne sont que des copies tardives, exécutées par des marbriers romains pour de riches particuliers, où nous ne retrouvons plus la verdeur nerveuse des bronzes originaux disparus.

Morte, la peinture grecque, aussi bien

les tableaux d:Apelle que les fresques de Polygnote, et c'est à peine si le décor des vases grecs, qui en sont un écho industriel affaibli, et les décorations populaires de Pompéi nous permettent d'en deviner la hauteur de style et la perfection achevée.

Ce que les incendies, l'usure du temps, la barbarie des envahisseurs, ont fait pour l'art antique, le fanatisme religieux, l'incompréhension d'une société trop brusquement renouvelée, la haine révolutionnaire l'ont perpétré à leur tour pour l'art des pays chrétiens. Et voici que de nouvelles ruines s'amoncellent, semées par des hommes qu'on aurait pu croire incapables d'une pareille cruauté.

Il est donc vrai que tout meurt ici-bas, même les plus belles choses, d'une mort lente et naturelle, quand la main de l'homme ne la précipite pas. Il suffit


d'aller en Italie, au Campo Santo de Pise ou au cloître de Sainte-Marie-Nouvelle de Florence, pour voir comment meurent les fresques. Ici, c'est l'air marin d'un rivage trop proche; là, le salpêtre d'une persistante humidité. Victimes de ces bourreaux inconscients, les fresques de Paolo Uccello sont mortes et celles des Giottesques sont en train de mourir.

A Santa Croce de Florence, il y a des « Giotto » admirables, les plus beaux de ce maître et les mieux appréciables : ils ont été refaits en 1853 par un peintre italien 1 Il est d'ailleurs aisé de le deviner à certaines brutalités d'exécution. Les autres fresques du grand Primitif à Padoue permettent de se rendre compte de leur véritable état de conservation. Là, les couleurs décollées tombent par terre, laissant parfois apparaître un dessous bleu qui les soutenait. Que sera dans quelques années seulement la Cène de Léonard de Vinci à Milan ? Elle n'est déjà plus qu'une ombre.

Tel est le sort qui attend toutes les fresques anciennes, et, à une date plus éloignée, tous les tableaux sur toile ou sur panneau de ces quatre derniers siècles.

On ne les conservera à l'admiration des hommes qu'en les repeignant. Pour certains, c'est déjà fait, et ceux-là on les admire de confiance; mais les visiteurs avertis savent qu'ils ont tout juste la valeur d'une copie. Le grand Saint Michel de Raphaël, au Louvre, est dans ce cas.

Où est maintenant la statuaire de NotreDame de Paris? Une seule statue authentique demeure : c'est la Vierge-Reine mutilée qui se dresse au trumeau du portail du croisillon Nord du transept. Toutes les autres ont disparu pendant la tourmente révolutionnaire. Disparues, les statues des piédroits des portails. Disparues, les statues des rois qui s'alignaient au-dessus, sur la façade occidentale.

C'étaient des rois de Juda, ancêtres du Christ : on les prit pour des rois de France, conformément à une tradition erronée, et cela les perdit. Les statues

actuelles sont de Viollet-le-Duc, je veux dire des sculpteurs qui travaillèrent sous sa direction, comme Geoffroy Dechaume, de 1845 à 1864.

Notre-Dame de Paris était donc morte au commencement du XIXe siècle. La science de Viollet-le-Duc la ressuscita.

Car on peut faire revivre les monuments défunts; mais, hélas! ce ne sont plus les

INTÉRIEUR DU PORTAIL DE LA CATHÉDRALE DE REIMS APRÈS LE BOMBARDEMENT DU 19 SEPTEMBRE 1914

mêmes. Il y a des vertus et des grâces, des bonheurs et des élans qu'on ne retrouve plus. Pas un artiste ne croit que la statuaire parisienne du XIIIe siècle revit sous nos yeux à Notre-Dame.

Nous assistons maintenant à la mort des monuments civils et religieux du moyen âge qui faisaient de la Flandre française, et surtout de la Belgique, une des régions les plus intéressantes du monde. Je me souviens encore de l'émer-


veillement de mes yeux de Languedocien quand il me fut donné de voir en trois voyages les richesses d'art du pays des Flandres. J'y étais allé pour la peinture, et c'est l'architecture qui me séduisit.

Après les féeries de l'Orient et de l'Italie, qui auraient dû me blaser, je retrouvais mes plus beaux enthousiasmes devant les hôtels de ville fastueux, les Halles fantastiques, les beffrois gigantesques. Gand, Bruges, Anvers, Louvain, Bruxelles., il faudrait les citer toutes, jusqu'aux plus petites, comme Nieuport et Dixmude, qui ne sont plus.

Les édifices civils, en Belgique, sont plus intéressants que les religieux et de beaucoup plus originaux. Ils nous étonnent en tout cas davantage, nous qui venons de régions où cette sorte d'architecture, qu'on pourrait appeler communale, n'a

pas eu ce développement. Nous avons mieux que les Belges comme églises : nous n'avons pas le pareil de leurs monuments civils. Ceux-ci ont été très restaurés, trop, car la Belgique a eu plus que nous la manie du vieux-neuf pour satisfaire à une prétendue unité de style. Même en tenant compte de cette partie apocryphe, les monuments flamands le disputent en intérêt aux cathédrales de France.

Qu'en restera-t-il? Les lourds canons d'Allemagne semblent s'acharner sur eux avec une rage persistante. C'est une seconde mort qui les attend, non plus la mort lente par l'effritement du calcaire, sous la morsure des pluies et des gelées, mais la mort violente sous le choc brutal des obus.

ABEL FABRE.


L'AMBULANCE DE L'ASSOMPTION A LOURDES (EN FACE DE LA GROTTE)

SOUVENIRS D'AMBULANCE

1

M

A Sœur, combien nous annoncet-on de blessés pour ce soir?

— Une soixantaine.

— Et à quelle heure?

— Vers 5 heures. Tout sera prêt pour les recevoir.

En passant devant les trois salles du rez-de-chaussée, j'aperçois, en effet, les Sœurs qui achèvent la préparation, sous le regard du Crucifix. Elles ont revêtu, pour le travail, l'uniforme obligatoire des infirmières, blouse, tablier et cornette de,linon blanc, qui les font ressembler à des religieuses contemplatives, mais, sur leur brassard, la croix rouge, s'enlevant comme un flot de sang, rappelle aussitôt leur ministère de charité et l'héroïsme de ceux qu'elles sont venues soigner.

Le parquet a été nettoyé, les lits, encore vides, sont faits, et du linge propre attend les blessés. Des plantes vertes ou des fleurs, çà et là, égayent ces grandes salles. Il en est de même dans les chambres du premier étage et dans les dortoirs du second.

J'y monte. Dans la salle à laquelle nous avons donné le vocable de Notre-Dame de France, quelques soldats, des premiers

arrivés au milieu de septembre, sont assis sur leur lit et se distraient en lisant. Un seul est encore couché, mais on espère qu'il se lèvera bientôt; la blessure à la cuisse est en bonne voie de guérison. Son lit a été roulé par le prêtre infirmier dans l'embrasure de la fenêtre, et là le malade peut jouir d'un spectacle unique.

L'ambulance est installée dans le vaste couvent — hélas 1 dépeuplé par la persécution—qui fait face à la Grotte de Lourdes.

Construit par les Bénédictines du TrèsSaint-Sacrement — il porte encore à son pignon un ostensoir gigantesque, — il fut acquis par un noble Anglais et loué aux Augustines de l'Assomption jusqu'au jour où des lois sectaires ne leur permirent plus d'y poursuivre leur œuvre d'enseignement.

L'édifice, régulier, s'étage sur le flanc de la colline immédiatement au-dessus de la ligne du chemin de fer de Pau, et il présente sa façade au Midi, devant le mont des Espelugues. Au point de vue sanitaire, c'estune situation exceptionnelle, qui ravit tous les visiteurs. Dès que le soleil arrive au-dessus des montagnes, ses rayons emplissent toutes les pièces de lumière et de chaleur, sources incomparables de vie et de santé.


Et quel spectacle grandiose en ce magnifique décor ! La neige ayant déjà fait ses premières apparitions, nous contemplons les sommets des Pyrénées couverts d'une blanche parure, et le soleil, qui en parcourt peu à peu tous les vallonnements, y fait jaillir des éclats comme de pierres précieuses. C'est un éblouissement.

Plus près de nous, à nos pieds, dans un murmure sans fin, le Gave roule ses flots en légères cascades, ombragé d'arbres verts, et toute cette vallée pittoresque,

avec le château fort à gauche, est d'un aspect enchanteur.

Mais ce qui attire surtout le regard de nos blessés, c'est, devant eux, presque à leur portée, la Grotte béniedontils avaient si souvent entendu parler, car beaucoup n'étaient jamais venus à Lourdes. Ils la voient, au bord du torrent, au bas des vastes et claires constructions de la basilique et de ses rampes, dans la pénombre un peu grise que lui fait sa situation en plein Nord, à l'abri du rocher et des

Phot. Veillon.

CE QUE NOUS APERCEVIONS DE NOTRE AMBULANCE

arbres, mais irradiée par la lumière de centaines de cierges qui brûlent jour et nuit devant la statue de l'Immaculée. Ils pressentent, au pèlerinage ininterrompu de fidèles qu'ils aperçoivent agenouillés ou baisant la pierre, que c'est là un réservoir de grâces et une source de bénédictions. Et de l'intérieur des salles, comme de la terrasse qui longe la façade ou des bosquets qui l'encadrent, ils sont poussés à s'unir à cette prière continue et récitent dévotement leur Ave.

A la fenêtre, le blessé alité, je le vois, égrène, lui aussi, son chapelet, les yeux ardemment fixés sur la Grotte.

II Un sifflement aigu et un bruit d'halètement, d'abord sourd, mais qui se rapproche. C'est le train sanitaire qui arrive de Pau et qui monte avec peine, comme à bout de souffle.

Le voici sous nos fenêtres. De longs wagons de première et de deuxième classe, avec une grande croix rouge sur les parois, sont remplis de soldats assis ou debout.

En tête et en queue, des fourgons où, par les portes ouvertes, nous distinguons des couchettes autour desquelles circulent les infirmiers. Quel triste chargement de douleurs et de misères!


QUELQUES-UNS DES MAJORS, AUMÔNIERS, INFIRMIERS, INFIRMIÈRES ET BLESSÉS DE L'AMBULANCE DE L'ASSOMPTION A LOURDES

Nos mouchoirs s'agitent: c'est notre salut d'arrivée. Les pauvres blessés regardent étonnés et répondent de même façon, sans connaître ceux d'entre eux qui seront désignés pour cette ambulance, la première de Lourdes qu'ils aperçoivent.

Mais que de faces noires nous voyons dans ce train qui se dirige vers la gare!

Nous aurons certainement à hospitaliser quelques-uns de ces Sénégalais qui sont venus nous aider à défendre la France.

Une heure après, les automobiles militaires nous amènent les blessés, et un groupe de vingt-cinq noirs s'y trouve, en effet. Les majors, les Sœurs, les aumôniers, les infirmiers sont à la porte d'entrée, devant la cour, pour les recevoir.

Sur l'ordre des médecins, à chaque arrivée, un tri se fait ; les plus valides montent aux étages, les salles du rez-de-chaussée étant réservées aux « brancards », comme dit le Dr Q., c'est-à-dire à ceux dont les graves blessures nécessitent, pourle transport, un brancard ou une civière.

Un lit est désigné à chacun, et aussitôt

l'on s'empresse autour d'eux; on aide à les laver et à les coucher. Pour éviter de toucher les plaies avant l'examen et le pansement du major, on est forcé parfois de couper leurs habits. Mais quel véritable soulagement pour eux de se trouver enfin dans un bon lit, avec du linge frais et propre, dans une salle où il fait bon, devant des figures accueillantes et dévouées! Et après le repas chaud qu'on leur donne tout de suite, ils s'endorment, apaisés, réconfortés, confiants.

Je vois encore, sur les blancs oreillers — choisis peut-être exprès! — les têtes crépues de nos noirs qui semblent, en dormant, continuer à remercier.

III

Pendant que les majors, en cette claire matinée, font le tour des salles pour examiner et panser chaque blessé, un bruit circule: — L'hôpital est consigné pour cet aprèsmidi : il y aura inspection.


Notre ambulance a déjà eu plusieurs fois l'honneur de ces visites. La première, sans être officielle, fut la plus goûtée : celle de Mgr l'évêque. Dès le début de l'ambulance à peine organisée, le prélat tint à venir apporter ses encouragements et ses bénédictions. Avec une extrême bienveillance et une exquise charité, il visita tous les blessés, interrogeant chacun et lui remettant un pieux souvenir.

Notre ambulance n'existait pas encore quand M. Barthou, ancien ministre, vint visiter Lourdes. A l'asile, sur l'esplanade du Rosaire, où plus de 500 soldats et officiers sont hospitalisés généreusement, il les questionna aussi.

— A quelle heure avez-vous été blessé?

dit-il à un paysan, encore tout enfiévré.

— A 8 heures du matin, Monsieur le ministre.

— Et à quelle heure vous a-t-on relevé?

— A 5 heures du soir.

— Et que faisiez-vous, sur le champ de bataille, pendant tout ce temps?

— Je priais.

Le visiteur s'inclina légèrement et, grave, lui répondit : — C'est très bien, mon ami.

En partant, l'ancien ministre, qui est de la région, dit aux blessés : — Vous .êtes dans un beau pays ; vous avez des soins dévoués; vous pouvez boire de l'eau de Lourdes ; ayez confiance, vous guérirez plus vite!

Nous rappelions tous ces souvenirs en attendant la venue du médecin inspecteur — grade de général-r-:- qu'on nous avait annoncé.

Il vint, mais son inspection fut courte.

Accompagné de notre administrateur, M. de B., et d'un aumônier, le P. H., il fit le tour des salles et se déclara satisfait, et de la tenue de l'ambulance, et de son exceptionnelle situation.

Quelques jours plus tard — est-ce à la suite de son rapport? — on décidait de donner à notre formation sanitaire plus d'importance encore, en y installant une salle d'opérations.

IV

« Demain, jour des Morts, à 8 heures, messe de Requiem et absoute solennelle pour l'âme des soldats défunts, spécialement de ceux décédés à Lourdes. »

Tel est l'avis manuscrit, affiché à la porte de la chapelle, dans le grand corridor d'entrée, au centre de la maison.

Les majors et les blessés l'ont remarqué, et ils se promettent d'être fidèles à ce pieux rendez-vous de la foi et de la charité ; plusieurs, du reste, ont déjà communié ce matin.

Aussi, le 2 novembre, la chapelle estelle pleine. Les noirs sont présents, non seulement ceux qui sont baptisés, mais les idolâtres eux-mêmes qui tiennent à examiner de près les rites catholiques et à jouir de leur sublimité.

Devant l'autel, se dresse un modeste catafalque improvisé, avec drap mortuaire, plantes vertes, faisceaux d'étendards tricolores. Sur le simulacre de la bière et la croix blanche du poêle, un drapeau national avec une palme de laurier. C'est simple et saisissant.

Après la messe, pendant laquelle toutes ces voix d'hommes ont chanté les sublimes accents de la douleur chrétienne, l'officiant a laissé parler son cœur, en rappelant le caractère et le sens de l'émouvante cérémonie de la prière pour les morts : une de celles qui affirment le plus le dogme rassurant de la communion des saints, « par laquelle les plus riches donnent et payent pour les plus pauvres, comme dans un régiment la bravoure des uns rejaillit en gloire sur tous les autres soldats ».

— Ceci est consolant, me dit un des majors à la sortie. Notre tour viendra peut-être demain, mais nous sommes sûrs de ne pas être oubliés non plus.

— L'Église, Docteur, n'attend pas que vous soyez mort pour prier pour vous.

Tous les jours, elle demande à Dieu, par ses oraisons, de nous faire triompher de nos ennemis et de nous rendre sains


LE 19 AOUT ET LE 15 SEPTEMBRE 1914, LES HUSSARDS DE TARBES SONT ALLÉS A LOURDES FAIRE BÉNIR SOLENNELLEMENT LEURS ÉPÉES ET SE CONSACRER A LA VIERGE IMMACULÉE. — Mir SCHŒPFER BÉNIT, TANDIS QUE LE RÉGIMENT DÉFILE.


UN SÉNÉGALAIS MATERNELLEMENT SOIGNÉ

et saufs à nos familles. Vous vous rappelez nos belles cérémonies de la fête de saint Michel, à la Grotte et sur l'esplanade du Rosaire : cette procession ensoleillée sous les arbres qui commençaient à perdre leurs feuilles jaunes; ces litanies de tout un peuple, indigènes, émigrés, réfugiés, mobilisés et blessés, qui imploraient le grand archange; cette solennelle et émouvante allocution finale de l'évêque de Lourdes, deux fois Français puisqu'il est Alsacien, qui nous bénit au nom de Dieu.

- Et avant cette fête, rappela l'aumônier, car, vous n'étiez pas arrivés, nous eûmes, par deux fois, le magnifique spectacle d'un escadron de hussards, venant offrir ses armes à la Vierge de Massabielle et les faisant bénir par le Pontife. J'entends encore, sur l'esplanade, devant

tous ses hommes à cheval, formant le carré, le fier commandant, après avoir salué de l'épée le prélat en mitre et en crosse, appeler sur sa troupe la bénédiction de Dieu, en disant : « Monseigneur, ministre du Christ toujours vivant, bénissez ceux qui vont mourir pour la France! » C'est autrement réconfortant que le sec et froid Morituri te salutant de la Rome antique !

V

Ce matin, un groupe me paraît soucieux, dans un coin du corridor. Je m'approche. Ce sont les « évacués » de demain.

Ils sont tristes de laisser l'ambulance.

Mais comme ils sont reconnaissants de tous les soins qu'on a donnés à leur corps


et du réconfort qu'on a procuré à leur âme!

— Où qu'on nous envoie, comme les autres je reviendrai vous voir, nous déclare l'un d'eux.

Il cite, en effet, l'exemple des premiers convalescents qu'on a dirigés sur Argelès, Pierrefitte, Cauterets, et qui reviennent de temps en temps, selon les rares congés qu'ils obtiennent.

— Nous aurions tort de nous plaindre, affirme un second. Nous sommes à peu près guéris ; il faut faire place aux autres et ne pas priver de pauvres malheureux de soins auxquels ils ont droit comme nous.

Celui qui parle est un jeune artilleur, dont la blessure au pied n'est pas complètement guérie. Il boite encore un peu.

Il doit, néanmoins, partir lui aussi. Malgré ses regrets — il eût tant aimé rester à Lourdes, près de nous! — il a cette délicatesse de penser au prochain et cette charité de se sacrifier pour lui.

J'apprends, du reste, des traits touchants de son âme bien née. Sa blessure a exigé beaucoup de soins, et il a voué aux deux Sœurs, chargées de sa salle, une reconnaissance presque filiale, — le

mot est de lui. Il s'ingéniait à les satisfaire, il s'intéressait à leur conversation, il n'oubliait aucune des petites gâteries dont il était l'objet et les rappelait sans cesse. Quand il put se lever, il s'entendit avec son voisin, afin de faire tous deux son lit pour éviter cette peine à ses infirmières. Celles-ci protestèrent qu'elles n'étaient là que pour rendre ces services.

— Ma Sœur, répliqua-t-il, vous en avez de si nombreux à rendre, à moi et aux autres, qu'un de moins doit vous importer fort peu !

Et, devant son insistance, on dut s'incliner.

Nous les voyons partir, nous aussi, avec regrets, ces chers blessés, auxquels nous nous étions attachés. Mais la patrie les réclame encore pour sa défense et nous devons, comme eux, faire notre sacrifice.

Du moins, nous les recommandons à Dieu, à Notre-Dame de Lourdes, à saint Michel, à Jeanne d'Arc. Que la protection divine, par l'intercession de notre Reine, de nos protecteurs, de nos saints et de nos saintes, les garde et les ramène bientôt, — victorieux!

CH. D'AVONE.


LA GUERRE EN CARICATURES

LA CROIX-ROUGE

— Cache ton drapeau! Tu vas te faire tuer.

(Dessin de FORAIN, dans l'Opinion.)

LE DÉFENSEUR DE LA CULTURE (New-York Tribune.)

LE GRAND DUC — Remercie pour moi Von der Goltz(PANDOLO, du Pasquino.)


LA NOUVELLE TRIPLICE (Du Punch.)

L'AUTRICHE. — C'est une campagne de punition.

(Du Punch.)

LAIGLE AUTRICHIEN

(Du Punch.)

LA MORT. — Marche: je te suivrai jusqu'à ce que te sujets te pendent.

(MUCHA, Varsovie.)


LA LÉGENDE DE TITUREL

T

ITUREL était, à huit ans, un lis frêle de chevalerie. Il croissait à l'ombre d'un monastère, et le

monde lui était inconnu. Parfois, des troubadours s'arrêtaient chez les moines, contaient la vie des humbles et chantaient les gestes des preux. Le long des murs ornés d'ogives et des cloîtres aux parfums d'encens, leurs voix émouvaient toujours.

C'était à l'époque où, par le pays de France, on exaltait les chevaliers qui partaient, pénitence faite, à la recherche du Saint-Graal, la coupe précieuse dans laquelle Joseph d'Arimathie avait, disaiton, recueilli le sang du Sauveur. On prétendait aussi que cette coupe, possédant une vertu magique, donnait une vie de béatitude aux hommes assez purs pour l'approcher. Mais le Graal était perdu.

De nombreux seigneurs l'avaient cherché. Les uns étaient venus de l'Aquitaine, d'autres de la Lorraine, d'autres encore des Apennins. Tous portaient le cilice, vivaient dans l'humilité, fréquentaient les églises. Leurs vertus les enveloppaient comme une colonne de lumière, et pourtant nul d'entre eux n'avait été reconnu digne de retrouver le Graal.

Titurel songeait souvent à la coupe sacrée que chantaient les poètes. A l'aube, devant la campagne rajeunie; le soir, aux autels de la chapelle, il entrevoyait, à travers des pays inconnus, une moisson de conquêtes merveilleuses. Il amplifiait la légende, et, sans en comprendre le symbole divin, il l'emparadisait. A ses yeux, le Graal, tel un ostensoir, étincelait. Il en devenait le prêtre fidèle, et, vêtu de pourpre ou en blanc chevalier, il le promenait par le monde. Il le tenait dans ses petites mains, au-dessus de sa tête, très haut, et accomplissait des miracles. Les aveugles s'enivraient de lumière, les boiteux jetaient leurs béquilles, les fleuves suspendaient leur cours.

— Père Bonaventure, dit un jour Titurel à son chapelain, je retrouverai le Graal.

Le P. Bonaventure sourit avec mélancolie et lui évoqua la troupe nombreuse des chevaliers qui, partis pleins d'ardeur, le corps et l'âme disciplinés, étaient revenus après de longues années de recherches infructueuses. Enfin, il ajouta en manière de conclusion : — Soyez pur, mon ami, et souvenezvous que le grain jeté en terre doit mourir avant de germer.

Titurel n'oublia pas les paroles du P. Bonaventure, et son adolescence fut une trame de jours vertueux. On l'aimait pour sa candeur aimable, on l'admirait pour son audace tranquille et sa façon de regarder bien en face, avec des yeux clairs qui, doucement, pénétraient jusqu'aux replis intimes des âmes.

Le supérieur du couvent en voulut faire un moine. Titurel refusa, et, à vingt ans, endossant l'armure blanche des chevaliers, il partit pour la conquête du Graal.

Comme il, n'avait pas vu son père depuis longtemps, il s'arrêta au château familial. Ses parents lui firent fête; les seigneurs des environs vinrent le saluer, et les riches princesses, souriantes dans leurs beaux atours, rêvaient, en le voyant, de noces splendides et prochaines. Une d'entre elles plut à Titurel, et le jeune homme, ému par les douceurs de la saison et les vertus de la jeune fille, l'aima tendrement. Ses rêves de conquêtes ne l'avaient pourtant pas abandonné. Il attendait avec impatience le jour où, uni à la princesse, il rechercherait le Graal. Mais l'amour est égoïste chez les humains. La princesse posa ce dilemme au chevalier : — Tu couleras des jours heureux avec moi sous le ciel angevin et tu cha seras tes rêves, ou tu renonceras à mon amour.

Titurel en fut affecté. Il ne savait à


quoi se résoudre. Vingt fois, en un mouvement de désespoir et de résolution farouche, il s'enfuit dans la campagne, et vingt fois il revint vers celle qu'il aimait. Les jours d'angoisse commençaient pour lui. Il ne devait pas sacrifier l'idéal de sa vie à son amour, et il ne pouvait plus rompre avec cet amour sans briser, du même coup, des fibres délicates dans son âme. Alors, il se souvint des paroles du P. Bonaventure, et, l'Esprit aidant, il parcourut le monde.

Il traversa des forêts redoutables, des plaines arides, et pénétra dans la voie des tribulations. Son premier amour apaisé, il ne lui restait au cœur qu'une légère mélancolie, avec la volonté tenace d'accomplir sa mission. Sa robustesse physique était surprenante, et comme son esprit demeurait pur, il chantait en marchant. Longtemps, il mena une vie errante de moine-soldat. Son père mourut, et Titurel revint en Anjou pleurer sur son père.

Un matin, pour une première fois, il se sentit las. Son amour était mort, ses parents reposaient sous la terre, et le Graal restait inconnu. Ne devait-il pas, à son tour, comme tant d'autres, abandonner ses recherches et vivre en bon chevalier sur la terre des aïeux?

Mais une Voix se fit entendre : — Titurel, tu te dois au bonheur des hommes. Affermis ton cœur et repars.

Titurel hésita. Autour de lui, la vie se déroulait en une aimable magnificence.

Les comtes des environs organisaient des tournois où il eût brillé; de belles jeunes filles le regardaient avec complaisance; le roi de France lui demanda des conseils.

Et puis le manoir de son père captivait sa sollicitude. Il était spacieux, agréable, défiant par sa solidité les siècles à venir.

Son donjon imposait le respect à vingt lieues sur la Loire, et ses murailles crénelées couronnaient le pays d'un diadème de pierres.

De nouveau, la Voix retentit : - Vends les griffons de ta meute, tes

armes de parade, tes chevaux et le manoir familial. Distribue tes richesses aux pauvres, car ton cœur se trouve là où est ton argent. Prends le cilice, fais pénitence et repars.

Titurel vendit le château de son père; il en donna l'argent aux malheureux, et, seul désormais au monde, il se remit à la recherche du Graal.

Il explora les mines de Cornouailles, fouilla les mers du Nord, combattit les barbares aux Marches deThulé. Il remonta le cours du Rhin, pénétra dans des burgs fameux et courut à Cologne où l'on bâtissait une cathédrale. Il y travailla, roulant le sable, pétrissant le mortier, meurtrissant ses épaules aux cordes qui tiraient les pierres. Jamais il ne se plaignit.

Même en travaillant, il modulait des psaumes, et sa joie égayait l'âme des autres ouvriers.

Un prince de Souabe que des païens avaient pillé lui réclama son concours.

Titurel accourut, fut cerné, se défendit seul contre cent, fut blessé à l'épaule, mit l'adversaire en fuite et releva le courage de ses compagnons d'armes. Le prince, reconnaissant, voulut lui donner sa fille en mariage. Le peuple, à son passage, jetait des branches, semait des fleurs et chantait des louanges. Titurel étouffa en son cœur le démon de l'orgueil, remercia le prince et reprit sa marche errante.

Sa piété croissait avec les jours. Il doubla la rigueur des macérations qu'il s'infligeait tous les matins afin d'augmenter ses souffrances, et, par là, ses mérites. Il traversa la Méditerranée et s'endormit, un soir, près d'Alexandrie.

Les heures de la journée s'étaient déroulées chaudes et voluptueuses. Il eut des rêves dionysiaques et s'éveilla. Des femmes, belles, dansaient devant lui, dénouaient leurs chevelures, et la nuit s'alanguissait sous les charmes de leurs parfums. Titurel triompha de la tentation et s'enfuit au désert.

Il en sortit, la chair domptée et l'âme


TITUREL S'ÉTENDIT SUR LA TERRE POUR MOURIR


ardente, chercha en vain le Graal et se sentit las.

Alors la Voix se fit entendre, et Titurel, ayant retrouvé l'enthousiasme et l'enfance divine du cœur, continua ses recherches.

Par les campagnes, les léproseries se multipliaient comme des fleurs du mal.

Les malheureux atteints de l'horrible maladie n'attendaient que de la charité -chrétienne des soulagements. Titurel se fit leur fidèle serviteur. Il les soignait, les vêtait, ne craignait pas de baiser leur visage, qui n'était souvent qu'un foyer d'infection, et bien qu'elles lui inspirassent du dégoût, il s'adonnait aux besognes les plus basses par amour du Seigneur.

Il devint vieux. Son corps était sec et roide, sa peau desséchée. Il marchait péniblement, le dos courbé, la barbe en désordre ; et le Graal restait toujours inconnu.

Un solitaire, un peu magicien, apprit à Titurel que la coupe sainte se trouvait en Espagne, au sommet d'une montagne où, jadis, les Arabes s'étaient battus. Il s'y rendit et en commença l'ascension.

Il s'arc-boutait aux rochers, se déchirait aux ronces, et, dans les passages les plus dangereux, s'aidait avec les mains et se traînait sur les genoux. A la septième heure du jour, il tomba sur le sol, les membres brisés, tendit les mains vers le ciel et fit cette prière : — Mon Dieu, je vous ai tout donné.

Pour vous, j'ai brisé mon premier amour, j'ai vendu mes terres, et les pauvres se sont réjouis avec mes aumônes. J'ai fermé mes oreilles à la volupté, et mes yeux se sont clos de crainte devant l'orgueil. Les infirmes m'ont eu pour serviteur. N'ai-je pas encore terminé mes souffrances? Ne suis-je pas digne d'approcher du Saint-Graal? Me réservezvous, mon Dieu, une nouvelle épreuve?

La Voix qui avait toujours répondu à son appel resta muette. Titurel s'émut; sa bouche prononça des paroles ardentes,

mais nul écho ne vint troubler le silence du ciel.

Alors l'épreuve suprême commença.

Titurel douta de lui-même, de sa mission, de l'existence du Graal. Son passé lui semblait un désert aride, son avenir une illusion dissipée. Il essaya de .ramener en un faisceau ses énergies défaillantes, et ne le put. En vain il voulut prier. Aucune émotion ne jaillissait de son cœur. Un lourd accablement pesait sur tous ses membres. Il douta même de Dieu.

La vie n'ayant plus pour lui aucun sens, il s'étendit sur la terre pour mourir.

Une musique suave s'éleva, des tombeaux se fendirent, des morts ressuscitèrent, et les plaines, déroulées à l'infini, s'emplirent d'une foule immense.

Ces milliers de gens formaient une masse indistincte et sombre. Peu à peu, tout s'illumina, chaque personne prit du relief et Titurel les reconnut.

Quelle prodigieuse moisson de souvenirs! Des lépreux montraient leur chair guérie, des femmes leurs enfants retrouvés, des princes leurs villes reconquises. Des moines levaient vers lui leur face bienheureuse, des soldats émus tendaient leurs bras ; sa belle fiancée souriait à travers ses larmes, et tous lui disaient : — Paix en ton âme et joie en ton esprit! Le Graal que tu cherchais était en toi. Tu es passé parmi nous et, sans le savoir, tu as accompli des miracles.

- A moi, tu as guéri mes blessures.

- A moi tu as donné l'espoir.

- A moi, tu as rendu mes enfants.

- A moi, tu as montré Dieu.

Et tous de redire : — Paix en ton âme et joie en ton esprit !

Titurel s'éveilla; la vision disparut, la musique cessa. Mais un flot d'amour jaillit de son cœur comme une source vive. Il se mit à genoux et, les yeux vers le ciel, il vit le Seigneur, entouré de ses saintes phalanges, qui le bénissait.

ANDRÉ LAMANDÉ.


TROIS PETITS GUEUX

J'ai rencontré trois petits gueux S'en allant dans la neige blanche; J'ai rencontré trois petits gueux Se tenant tous trois par la manche.

Leurs vieux habits étaient en loques, Leurs gros souliers avaient des trous.

Leurs vieux habits étaient en loques Et laissaient passer leurs genoux.

La bise les rendait tout bleus, Leurs menottes étaient gelées.

La bise les rendait tout bleus, Soufflant sur leurs têtes bouclées.

Le plus grand traînant les deux autres, Ils avançaient péniblement.

Le plus grand, traînant les deux autres, Les encourageait doucement.

« Où donc allez-vous, petits gueux, Quand tout se cache et tout se terre?

Où donc allez-vous, petits gueux?

Pourquoi quittez-vous votre mère ? »

« Hier, notre mère est partie Où notre père s'en alla.

Hier, notre mère est partie Au Paradis, nous laissant là.

» Chez nous, maintenant il fait froid, Et quand le soir vient, tout est sombre.

Chez nous, maintenant il fait froid: Nous avons peur tout seuls dans l'ombre.

» Mon petit frère a faim et pleure, Il veut maman pour le coucher.

Mon petit frère a faim et pleure, Alors, nous allons la chercher.

» Est-ce bien loin, le Paradis?

Nous cheminons depuis l'aurore.

Est-ce bien loin, le Paradis ?

N'y sommes-nous donc pas encore ? »

« Le Paradis, petit bonhomme, Pour vous n'est pas très loin, je crois.

Le Paradis, petit bonhomme, S'ouvrira bientôt pour vous trois. »

Et trottinant et trébuchant, Cinglés par la bise glaciale, Et trottinant et trébuchant, Ils s'en vont, bravant la rafale.

Mais las, bientôt, pleins de détresse, Leurs frêles corps se sont courbés, Mais las, bientôt, pleins de détresse, Sous un grand arbre ils sont tombés.

Pour mieux les préserver du froid, Comme font les plus tendres mères, Pour mieux les préserver du froid, L'aîné, dans ses bras, tient ses frères.

L'Ange de mort, faisant sa ronde, Sur la neige les vit, dormant, L'Ange de mort, faisant sa ronde, Eut pitié de leur dénûment.

Dans le silence de la nuit On entend un bruissement d'ailes.

Dans le silence de la nuit S'ouvrent les voûtes éternelles.

Doucement, à travers la neige, Leur âme blanche monte aux cieux.

Doucement, à travers la neige, Au Paradis ils vont joyeux!

On n'est plus, là, riche ni gueux, Les enfants sont rendus aux mères ; On n'est plus, là, riche ni gueux, C'est le terme de nos misères.

Puisse l'Ange aux ailes d'ébène Tarder, si vous êtes heureux !

Puisse l'Ange aux ailes d'ébène Se hâter pour les miséreux!

M.-L. ETIENNE.


LES TRÉSORS D'ART DE LYON

L

LYON n'enchante guère, en général, les visiteurs de villes célèbres à monuments, chefs-d'œuvre et vieux

souvenirs consacrés. Pour les uns, ce n'est qu'une fourmilière en pleine activité; pour d'autres, c'est un lieu, sinon franchement maussade, du moins sans agréments; et presque tous se figurent que, dans ce centre d'affaires, passionnés et curieux d'art ne sauraient glaner beaucoup. Il s'en faut que ce soit exact.

De tout temps, il y eut un foyer d'art dans l'ancienne capitale de la Gaule, qui, sous Louis XII, mérita l'épithète de Florence française; toujours une élite y a maintenu le goût des belles choses, toujours un public y a suivi avec sympathie les multiples manifestations de l'architecture, de la peinture et de la sculpture.

Aussi, malgré les dégâts commis au cours des siècles, ses édifices et ses musées renferment-ils des séries d'œuvres très remarquables. Il y en a également dans maintes collections particulières, dont plusieurs ont une haute importance; mais, pour donner une idée de ces dernières, un article suffirait à peine ; contentons-nous donc d'explorer les trésors dont tout le monde peut jouir et qui sont répartis entre monuments et musées.

La cathédrale Saint-Jean, élevée en partie dans la seconde moitié du XIIe siècle et très avancée au XIIIe, est de celles qui honorent notre pays. Sa façade ne saurait exalter, parce qu'elle a été très abîmée en 1562 par les huguenots; mais, pour peu qu'on l'étudié un instant, on reconnaît vite la sage entente de son ordonnance et le bon équilibre des différentes parties de son décor. Si, malgré ses mutilations, elle garde un aspect noble, un ensemble satisfaisant, c'est grâce à son arrangement judicieux. Sa nef, supérieurement combinée, est imposante et rassérénante. Son chœur, où le plein cintre et la nervure s'allient sans disso-

nance, et son abside égayées de roses sont d'un dessin bien compris (1).

Des très rares statues restées debout, les mieux venues et, par malheur, les plus difficiles à contempler, se détachent sur la façade méridionale; très haut placées, elles ne pouvaient être mises en pièces; les iconoclastes s'en sont vengés en les criblant à coups d'arquebuse de telle sorte que plusieurs en ont perdu leur tête. Taillées au XIIIe siècle, elles en portent l'empreinte; poses et draperies coopèrent à leur effet décoratif. Il y a six figures d'hommes et une d'enfant, personnages bibliques parmi lesquels on discerne Moïse, Samuel et David jeune réunis sur le même socle, et David roi.

A l'intérieur, certains chapiteaux du XIIe siècle amusent l'œil par leur archaïsme ingénu, entre autres la Marche des Mages, l'Adoration des Mages, la Vierge dans son lit soignée par saint Joseph et une servante, les deux sages-femmes procédant à la toilette de l'Enfant Jésus.

Comme la plupart des sculptures de cette époque, ces tableaux naïfs témoignent d'un extrême désir d'arriver à des figurations vivantes et fournissent d'utiles indications pour l'étude des premières phases de notre art. De tels motifs aident beaucoup à faire comprendre comment un art sort de la barbarie. Il y a déjà du naturel dans les effigies de chameau et de coq gravées.plutôt que sculptées près du chevet; et les animaux décapités de la corniche de la basse-nef méridionale, le quadrupède à prétention de monstre juché au-dessus de David, à la façade Sud, et plus encore le chien qui veille au-dessus de Samuel, semblent très capables de se mouvoir. Ce sont des ébauches d'individualités que les têtes (xme s.) des consoles du triforium et de

(1) C'est dans le style roman qu'ont été édifiées les parties basses de l'abside et les deux chapelles latérales du chœur.


la galerie supérieure de la grande nef; et il y en a d'autres, plus savoureuses encore, parmi les sculptures de la façade qui, très probablement, datent du XIVe siècle.

Sous les consoles des statues détruites, se cachent de charmants petits bas-reliefs, vraies miniatures de pierre. Ce sont, de gauche à droite : Aristote servant de cheval à Campaspe, une Promenade sentimentale, un Homme couronnant une femme qui joint les mains comme en extase, une Chasse à la licorne, deux Hommes flanquant une jeune femme qui tient une couronne de fleurs, trois Personnages, dont l'un assis et deux debout, une Femme jouant de la viole dans un gracieux encadrement folié, un Homme assis entre des pampres, toutes ces scènes ont une animation bien entendue et des traits ou des postures cherchés avec un grand souci de vérité. La première historie une moralité tirée d'un fabliau du trouvère Henri d'Andely. Aristote, racontait-on, pour frapper les esprits, après avoir gourmandé son élève séduit par la courtisane Campaspe, s'était laissé ensorceler à son tour et il avait même consenti à servir de monture à celle qu'il se targuait d'abord de honnir. Le philosophe fait le cheval avec une joie non déguisée et les petits personnages qui, du haut du médaillon, l'observent malicieusement, sont indiqués avec esprit. La Promenade sentimentale, autre exemple imaginé peutêtre pour mettre en garde contre les entraînements des passions, nous montre un damoiseau et une damoiselle s'oubliant dans une douce conversation. Surpris sous leur aspect ordinaire — elle porte son écureuil familier, lui son faucon, — ils ont une saveur de chose vue. Ils illustreraient fort bien un roman comme Lancelot du Lac. La Chasse à la licorne a toute l'apparence d'un épisode réel; ses divers acteurs jouent leur rôle avec des mouvements très exacts et des mines convaincues. Cependant, pour qu'un tel motif se trouve à cette place, il faut bien qu'il traduise autre chose qu'une légende.

Or nous savons par Honorius d'Autun que la licorne symbolisait l'Incarnation.

Le Christ ayant pris une forme humaine dans le sein d'une Vierge et s'étant livré à ceux qui le pourchassaient, le moyen âge le figurait sous l'image de la licorne, parce que cette dernière, selon les croyances d'alors, se laissait approcher par les vierges et prendre sur leur sein. C'était une de ces analogies alambiquées dont usaient volontiers nos ancêtres. Il est donc plausible d'admettre que ce basrelief a un sens symbolique, et, certes, cela n'enlève rien à son charme. Quant aux autres motifs, le sens en est perdu, mais n'importe; nous n'avons nul besoin, pour en saisir la valeur, de savoir ce qu'ils signifient. C'est pour leur humanité et leur partum d'art que nous aimons la femme à la couronne, la poétique joueuse de viole et l'inconnu plongé dans le rêve ou la méditation. Ces deux dernières figures sont entourées d'un délicieux décor naturel; et il y a aussi, entre plusieurs des scènes susdites, quatre motifs de pure ornementation où prédomine la verdure. Sur celui qui avoisine la Promenade sentimentale, un masque galamment tracé se métamorphose en feuilles d'une manière très rythmique.

Dans les menus bas-reliefs des soubassements, contemporains des motifs des consoles, on découvre plus d'un profil dûment caractérisé, maints gestes bien appropriés et d'attrayantes silhouettes d'animaux. Très variés sont les motifs de ces soubassements. A côté de ceux qui reproduisent les thèmes sacrés ou les pieuses légendes, il y en a qui soulignent les conséquences des funestes passions; d'autres retracent des exploits fabuleux, des luttes contre des monstres, ou manifestent la grandeur, la sainteté du travail; d'autres, de pur décor, transportent en pleine fantaisie, et, comme partout, certains nous demeurent fermés. Dans l'une des arcatures, un couple, gentiment installé et drapé avec soin, poursuit une conversation aimable et passionnée.


Phot. Mon. Hist."-" LYON — LA CATHÉDRALE, FACADE OUEST

Dans un compartiment du portail central (côté gauche), un homme s'apprête à en assommer un autre occupé à cueillir

des fleurs. Au portail de gauche, des forgerons accomplissent leur besogne.

Samson étouffe un lion; ailleurs, deux


personnages dénudés luttent avec ardeur, un musicien tire des sons de sa viole. Et ces multiples figurines, la plupart très parlantes, délectent par leurs gestes et leurs postures.

Au portail gauche, retour du côté gauche, une tête de moine prélude aux bons portraits du temps de Charles VIII; et, sur l'une des faces, un masque ornemental, verveux, bien en chair, annonce les mascarons du XVIe siècle. Tout près de là, un second masque, non moins réjoui, tire une langue hyperbolique; deux têtes juxtaposées sont de mordantes caricatures. Plus loin, un singe chevauche une chèvre et une chimère emporte un imaginatif. La faune, aux spécimens assez nombreux, est d'une plaisante vérité. L'échassier qui, d'un mouvement très décoratif, infléchit son col entre ses pattes pour happer un serpent; le rapace qui déchiquète un rongeur; l'oiseau ravisseur d'une anguille; l'aigle à queue de dragon debout sur un cadavre d'adolescent; les quadrumanes accroupis; l'écureuil gambadant entre des branches de frêne; le cerf au repos; les deux poulets procédant à leur toilette; le pélican qui fouille dans ses entrailles; l'escargot conquérant une feuille; autant de motifs bien vus et charmeurs comme des croquis alertement enlevés. Ces animaux, dont l'observation était facile, sont très supérieurs aux dromadaires et aux éléphants presque toujours tracés d'après d'insuffisants dessins et aux bêtes fantastiques de tout genre, encore que certaines de celles-ci, l'aigle à queue de dragon, par exemple, soient ingénieusement conditionnées. L'art de nos modernes animaliers est en germe dans ces essais, dont les meilleurs ne manquent pas de finesse. Comme toutes les imageries des immenses surfaces, celle de la façade de Saint-Jean est d'inégale valeur, mais les divers éléments en ont été travaillés avec beaucoup de sollicitude (i).

(1) La façade de Saint-Jean soulève un problème curieux. On reconnaît plusieurs sculp-

Les ornementations tirées de la nature se recommandent également par leur taire autant que par leur agencement.

Les chapiteaux des grands piliers et du tritorium (XIIIe siècle) sont recouverts d'aimables touffes, et de somptueuses parures (fin XVe) rehaussent l'ancienne chapelle du cardinal de Bourbon. On y admire surtout les superbes enroulements de pampres qui tapissent la paroi à gauche de l'autel et la svelte balustrade aux cerfs ailés que borde une combinaison de chardons et de vigne sauvage.

Parmi les décorations purement ornementales, il en est une très ancienne et d'une sorte particulière; c'est celle de l'abside qui consiste en incrustations de ciment bicolore, système dérivé de l'Orient.

Les vitraux ont souffert pendant les troubles révolutionnaires, et il a fallu restaurer ceux qui échappèrent à la destruction totale. Les plus prenants, les plus harmonieux appartiennent soit au XIIe siècle, soit au XIIIe, soit au xve. Retenons, parmi ceux de la période archaïque, le vitrail de Saint Pierre et saint Paul et celui de Saint Jean l'Evangéliste, où le Saint apparaît avec une respectable barbe. Arrêtons-nous ensuite à la Fuite en Egypte, à la Légende de Lazare, dont les scènes sont d'une intense réalité, et au panneau qui comprend l'Annonciation, la Nativité, Jésus en croix, la Résurrection, l'Ascension, motifs flanqués d'images symboliques, au nombre desquelles la Jeune fille et la licorne, dont on a vu plus haut le sens; le lion

tures de ses soubassements sur les portails de la Calerde et des Libraires à Rouen; on ne trouve d'analogues à la cathédrale de Cologne, et l'on constate que onze scènes de la vie du Précurseur sur l'une des portes du baptistère de Florence rappellent les bas-reliefs consacrés à la légende de ce même Saint. Sied-il d'attribuer ces diverses sculptures à un même atelier ambulant, ou furent-elles exécutées par plusieurs groupes d'imagiers dont les uns s'inspiraient des autres, quand ils ne les copiaient pas? Et quelle ville eut la primeur de ces ouvrages? Lyon ou Rouen?


Lardanchet, éditeur.

LYON — ÉGLISE SAINT-MARTIN D'AINAY, FAÇADE PRINCIPALE


et les lionceaux, figure de la Résurrection ; le kladrius, oiseau fabuleux des bestiaires, grâce auquel on croyait discerner le véritable état d'un malade. Et n'omettons ni la délicate rose flamboyante de la chapelle du Saint-Sacrement ni les verrières de la chapelle Saint-Michel.

Enfin ne quittons pas la cathédrale sans accorder un regard au retable (XVIe s.) de la chapelle de l'Annonciade, au tableau de l'école de Rubens conservé dans le transept de droite et aux boiseries du chœur (XVIlle s.) qui proviennent de l'ancienne abbaye de Cluny. Le tableau, un Mariage mystique de sainte Catherine, a la mise en scène pompeuse qu'affectionnait le beau peintre d'Anvers et quelques tonalités de bon aloi. C'est une bonne peinture; nettoyée et placée plus bas, elle gagnerait très probablement.

Tout à côté de Saint-Jean, la Manécanterie (fin XIe s.), ancienne école de chant et vestige du grand cloître du Chapitre, captive par sa façade romane, d'une décoration merveilleusement conçue en sa simplicité et plus que jamais touchante en sa détresse. Quels artistes que ceux d'alors ! Que de sensations ils savaient éveiller avec quelques accords de lignes!

Le parti roman et le parti basilical s'allient au mieux dans Saint-Martin d'Ainay, construit en 1070 et 1107, par les soins de l'abbé Josserand, plus tard archevêque de Lyon (1). C'était jadis une abbatiale bénédictine. Son harmonie sévère comme une règle monacale est pour plaire aux esprits méditatifs, aux âmes ascétiques Malheureusement sa façade a subi des altérations en 1830, son vaisseau a perdu deux tours, sa nef est massive et obscure. Son clocher pyramidal a des fenêtres d'un profil très trouvé. Son chœur a, comme l'abside de Saint-Jean, des incrustations en ciment

(1) C'est la seconde église édifiée en ce lieu, elle a été consacrée en 1106, par le pape Pascal II; quant à l'abbaye, elle a été dépecée en 1790.

(arabesques, animaux et masques) et un souvenir de l'antiquité païenne : deux colonnes de granit affectées autrefois à l'autel du temple de Rome et d'Auguste.

Après les avoir tronquées par le milieu, on les a disposées de manière à soutenir la tour-lanterne de la croisée. Nombre de chapiteaux et des pilastres, notamment ceux des nefs et du transept, ont des motifs corinthiens ou des animaux affrontés selon le mode byzantin ; ce sont les mieux traités. Les autres, surtout dans le chœur, répètent, sous des traits bieninformes, les thèmes empruntés aux saintes Ecritures. Ce sont les premiers bégayements d'un art encore dans l'enfance.

L'église Saint-Paul, reconstruite à peu près en même temps que Saint-Martin d'Ainay (1081-1106), a été modifiée plus tard et n'y a rien gagné. Elle vaut avant tout par ses parties romanes : la coupole dela croisée, la porte latérale dite de SaintLaurent à l'archivolte finement décorée, les cordons de têtes étonnamment fouillées de la façade Nord. La tour occidentale date du x Vc siècle et la flèche du XIXe.

De l'église Saint-Pierre, également commencée au xue siècle, mais reconstruite au xvme et maintenant désaffectée (1), il ne reste qu'un tronçon de tour et un porche. L'huis se profile avec aisance et les chapiteaux de ses colonnes (1173) s'agrémentent de touffes de feuilles élégamment tournées selon le mode antique. Deux de ces décors portent de minuscules têtes en guise de fruits.

La crypte de Saint-Irénée, église entièrement refaite au XIXtl siècle, est d'une époque très reculée, mais elle a été si souvent restaurée et arrangée que l'on n'ose la considérer comme vraiment ancienne; elle n'en conserve pas moins une grandeur touchante. Les seuls vestiges du passé que conserve l'église sont deux

(1) On achève de la transformer en salle de musée.


Lardunchet, éditeur.

LYON — ÉGLISE SAINT-NIZIER, FAÇADE PRINCIPALE


pierres tombales (bas côtés de la net), l'une du XIVe siècle, l'autre du xve, où se silhouettent des évêques dans le goût de leur époque.

L'église Saint-Bonaventure (1325-1471) a été bâtie par les Franciscains, selon le parti de la croisée d'ogives et de l'arcboutant, dans un parfait esprit de pauvreté et selon un idéal d'ascètes inflexibles, donc sans ornements ni lignes gracieuses; par endroit, son architecture est même quelque peu indigente. On l'a odieusement traitée sous la Révolution et depuis on s'est appliqué bien en vain à l'embellir; toutefois, sa nef et ses bas côtés ont conservé leur caractère.

L'église Saint-Nizier (1303-1517) appartient, sauf son portail, au style flamboyant; c'est une œuvre opulente et délicate, d'un luxe de haut goût et d'une pondération très lyonnaise. Les formes en sont souples, aimables, bien concertées; les ornements synthétisés avec esprit. La nef, agréablement voûtée en arc surbaissé, le chœur et le triforium, où tout s'accorde au mieux, produisent un splendide effet d'ensemble. A l'extérieur, le regard est tour à tour sollicité par l'originale abside, la svelte tourelle du « guetteur » (1), les clochetons et les fleurons j uchés sur les hauteurs et l'exquise balustrade établie pour l'entretien des verrières. La façade, comme celle de Saint-Jean, a souffert de la rage huguenote; mais on en a remplacé, au XIXe siècle, les statues brisées. Sous François Ier, on édifia le portail central selon la manière renouvelée de l'antique, et, s'il détonne en cet édifice, c'est du moins un hors d'œuvre très remarquable ; aussi l'a-t-on attribué longtemps à Philibert de l'Orme (2). Saint-Nizier se rattache à la catégorie des temples que l'on pourrait appeler jubilatoires : tout y est empreint d'une avenante majesté, tout y

(1) Cette tourelle émerge à l'extrémité septentrionale du transept.

(2) Aucun document n'atteste que le maître en ait tracé les plans.

concourt à donner une impression de délices, un avant-goût des béatitudes célestes.

Le transept de droite a reçu, après la Révolution, la Vierge sculptée par Coysevox pour occuper une niche à l'angle de la rue du Bât-d'Argent et de la place du Plâtre. C'est une jeune mère accorte, traitée avec infiniment de verve et très « nature » dans son attitude familière, qui s'équilibre sans hiatus avec celle du petit Jésus. Son entourage architectural a été tiré de l'antique selon la formule du XVIIIe siècle par Antoine-Michel Perrache, le fils du sculpteur.

L'église de l'Hôtel-Dieu (Notre-Dame de la Pitié), édifiée dans le second quart du XVIIe siècle d'après les dessins du sculpteur Mimerel, réunit toutes les caractéristiques du parti en honneur sous Louis XIII. Son ornementation, bien disposée, a beaucoup de pittoresque et ne manque pas de puissance. Sa chaire, œuvre de Marc Chabry fils, est parée avec luxuriance, non sans sacrifices du « panache»; tout y respire l'allégresse, et de robustes angelots très forts en gym- nastique s'y livrentà d'aimables sports (1).

L'une des chapelles abrite une Vierge de Mimerel trop matérialisée pour que l'on en puisse louer autre chose que le costume. Cette statue avait été faite pour un édicule de Simon Maupin dont on avait gratifié le pont du Change en 1659.

Depuis, cet ouvrage a été transporté au bas de la montée du Chemin neuf, où il recouvre une fontaine.

L'église Saint-Bruno ou des Chartreux a reçu un commencement d'exécution du crépuscule du XVIe siècle, mais sa construction définitive s'est effectuée entre 1734 et 1743. L'intérieur seul mérite un regard; Delamonce y a enjolivé de rocaille le système dit improprement Jésuite et il a créé un dôme bien près d'atteindre au grandiose. On y remarque

(1) Cette chaire avait été exécutée pour les Carmes déchaussés.


deux statues de Sarazin, Saint JeanBaptiste et Saint Bruno, très à l'effet scenique, et deux tableaux conventionnels de Charles Trémolière, l'Ascension et l'Assomption (1737), dont les cadres en bois doré sont de très habiles ouvrages (1).

L'église Saint-Polycarpe (XVIIe siècle) compte avant tout par sa façade érigée bien plus tard par un élève de Soufflot : Toussaint Loyer. C'est un décor très sortable et bien équilibré entre de robustes pilastres corinthiens. Les guirlandes de la grande porte et l'entablement constituent de bons morceaux; les deux anges de Chabry fils ont encore une certaine gtâce en dépit de leurs mutilations.

A l'intérieur se trouvent les deux seules statues de Michel Perrache qui aient échappé aux coups des sans-culottes : la Vierge et Saint Joseph en bois doré, figures vivantes mais vulgaires. NotreDame de Saint-Vincent (ancienne église des Augustins), élevée entre 1759 et 1789 par Léon Roux, a subi de telles restaurations de nos jours qu'elle n'intéresse plus guère que par ses sculptures modernes. Notre-Dame de Fourvière est trop connue de nos lecteurs pour qu'il soit nécessaire de leur rappeler les caractères de ce monument; ils savent aussi quel intérêt présente l'Immaculée-Conception de Bossan. Bornons-nous à leur signaler une église de la fin du XIXe siècle, très digne d'admiration , Saint-Joseph des Brotteaux, élevée d'après le parti roman d'une manière originale et forte par l'éminent Gaspard André. C'est également à ce maitre que l'on doit le temple protestant du quai de la Guillotière, dont le portail plein cintre est si chrétien, si noble et si harmonieux.

Plusieurs des églises précitées et quelques autres possèdent des oeuvres du XIXe siècle qu'il convient certes de ne pas négliger. C'est, à Saint-Jean, la chaire

(1) L'Angevin Trémolière, élève de J.-B. Van Loo, passa quelques années à Lyon.

élevée d'après les dessins de l'architecte Ant.-Marie Chenavard, père du peintre, et la Vierge-Mère du délicat Louis Janmot, attendrissante en sa mélancolie et suavement présentée, entre deux anges adorateurs, sur un triptyque de bois dont Bossan créa le modèle. C'est, à SaintMartin d'Ainay, dans l'abside et les chapelles absidales, trois bonnes peintures murales d'Hippolyte Flandrin : Saint Benoît à gauche, le Christ avec la Vierge et des saints au milieu, et Saint Badulphe à droite. C'est, à Saint-Nizier, l'athlétique et coloré Saint Pothin, de Chinard, dans le transept de gauche; la Vierge, de Bonassieux, au pignon; la Sainte Anne, le Saint Joachim et le Saint Nizier, de Fabisch, au fronton du portail central; figures consciencieuses qui répondent à leur destination au moins par leur contexture. Ce sont deux tableaux de Victor Orsel, secs mais d'un dessin épuré: le Choléra, de Notre-Dame de Fourvière, et la Charité, dans la chapelle de ce nom.

Ce sont les deux Cènes fresquées par Louis Janmot, l'une à la chapelle de l'Antiquaille, où malheureusement on l'a recouverte d'une médiocre copie; l'autre, la plus subjuguante, à SaintPolycarpe, qu'elle illumine de son rayonnement spirituel, et deux tableaux du même, l'Assomption mystiquement idéalisée de l'église de La Mulatière, et le Christ entre la Vierge et plusieurs saints, hélas! très assombris, à SaintFrançois de Sales. C'est encore, en cette dernière église, le Sacré-Cœur, de Cabuchet, l'inoubliable interprète du bienheureux Vianney. C'est, au Grand Séminaire, la Vierge de Bonassieux, maternelle affinée et d'une simplification voulue qui la rend décorative. Ce sont plusieurs figures de Fabisch : la Vierge monumentale de l'ancienne chapelle de Fourvière, celle de Notre-Dame de Saint-Vincent et, à l'église de l'Hôtel-Dieu, Jésus chez Marthe et Marie, où l'on reconnaît de grands efforts pour arriver à l'expression juste en même temps qu'au style. Ce


sont les belles orfèvreries exécutées d'après les modèles de Bossan : châsse de SaintIrénée, ostensoirs de l'Immaculée-Conception, de Fourvière, de Saint-François de Sales. Ce sont les excellentes sculptures de Dufraine au collège d'Oullins, à l'Adoration réparatrice (Anges adorateurs); à l'Hôtel-Dieu (Mère de douleur); à Fourvière, à Saint-Georges, à NotreDame de Saint-Vincent (surtout celles de la façade), à Saint-Polycarpe (apôtres de

la chaire). Ce sont enfin les austères et pieuses compositions de Paul Borel à l'oratoire des Carmes (aujourd'hui dépôt d'archives), à l'hôpital Saint-Joseph, à Saint-Paul, au collège d'Oullins; et ces dernières comprennent les plus réussies: motifs inspirés par le Christ et les disciples dEmmaüs et Miracle des saintes Espèces.

L'hôtel de ville, construit de 1646 à 1672 sur les plans de S. Maupin, a été

LYON — HÔTEL DE VILLE, FAÇADE SUD ET PAVILLON SUD-EST

restauré après un incendie, d'abord par Claude Simon, puis, au début du xviiii siècle, par J. Hardouin-Mansart.

C'est un édifice de belle mine, très Louis XIII dans ses lignes essentielles et imprégné dans quelques endroits, notamment dans les cours, de la manière italienne. Sa porte en chêne où, sur deux médaillons de bronze, des lions servent de monture à des enfants, son vestibule à voûte surbaissée, son double portique à trois arcades, ont un aspect vraiment

monumental; et il y a plaisir à se promener dans sa grande cour aux détails bien venus, aux mascarons saisissants, dont plusieurs ont des mines hargneuses, mécontentes, grognonnes, dextrement mises en relief. On a dû réfectionner la plupart de ses salles; une seule a conservé son air de jadis : celle de l'Abondance, au rez-de-chaussée, côté Sud. Il en faut louer les cariatides qui soutiennent le plafond à poutrelles apparentes et la magnifique cheminée fleurie de sculptures.


Plusieurs salons intéressent aussi par leur décor et leurs cheminées de haut goût. Tels celui du pavillon Sud-Ouest, Louis XIII comme la susdite salle; celui du pavillon Nord-Ouest, Louis XIV par ses boiseries et son plafond sculpté, où se déroule une allégorie de Thomas Blanchet (i); celui du Consulat, aux boiseries restaurées avec probité par Denuelle en 1863. Dans ce dernier salon, la cheminée s'enrichit de deux statues en bois doré: la Rhétorique et la Vérité. Nicolas Lefebvre les façonna selon l'esprit de son époque, en 1660. Enfin, il y a de parfaites boiseries XVIIe siècle dans la salle des archives et dans le modeste cabinet situé non loin de là, dont deux amours et des grotesques égayent le plafond.

Des peintures de Blanchet ornent l'escalier d'honneur (Incendie de Lyon sous Néron), le salon du Consulat (Grandeur consulaire de Lyon) et celui de la Conversation (la Justice poursuivant les vices); elles reflètent la manière de Le Brun et n'ont qu'une médiocre importance. Sous le vestibule trônent, depuis la Révolution, deux très bons groupes des frères COJstou, le Rhône et la Saône, qui, sous l'ancien régime, rehaussaient la statue de Louis XIV sur la place Bellecour. Le Rhône, œuvre de Guillaume, offre une belle image de force sereine et un splendide exemple de vie stylisée.

La Saône, réalisée par Nicolas, vaut surtout par sa silhouette ondulée, très féminine et câlinement décorative.

Le palais Saint-Pierre ou des Arts, ancienne abbaye de Bénédictines, est à peu près contemporain de l'hôtel de ville (1659 vers 1687), mais il a été construit dans le style du grand siècle avec aussi quelques emprunts à l'Italie. Les plans en ont été donnés par François de Royers de la Vallenière. Sa façade Nord, décorée de pilastres doriques et corinthiens et agrémentée d'un belvédère,

(1) Thomas Blanchet (1617-1689) était venu de Paris, il eut beaucoup de succès à Lyon.

présente une masse bien ordonnée et de grande allure. Son vaste cloître, dont les arcades s'ouvrent sur une cour délectablement parée de verdure et de statues, ainsi que son grand escalier, dont Blanchet combina la parure, ont presque de la majesté. Son ancien réfectoire, où s'alignent à présent les bustes des Lyonnais célèbres, se dis ingue par d'heureuses proportions et plairait tout à fait sans les sculptures théâtrales qui lui ont été infligées (1). Mais ce n'est qu'un détail; dans son ensemble, l'édifice mérite bien réellement le nom de palais : l'harmonie en est noble et l'effet imposant.

La loge du Change, aujourd'hui temple protestant, a pour auteur Soufflot. Son aspect n'a certes rien de séduisant, sa façade principale paraît même glaciale et un peu renfrognée; néanmoins le monument se tient grâce à sa disposition judicieuse, et le sobre décor de ses portes latérales n'est nullement dédaignable.

Deux statues de Perrache, l'Europe et l'Asie, ornaient au début sa façade; elles ont été détruites en 1793, comme la plupart des travaux de ce sculpteur.

La grande façade de l'hôtel-Dieu, sur le quai, est également due à Soufflot, et l'on ne saurait lui dénier de la grandeur.

Quant au dôme, s'il en a tracé le plan, c'est son élève Toussaint Loyer qui l'a fait édifier en se permettant plus d'une initiative. Enfin Soufflot a restauré le palais de l'archevêché, qui, des constructions du xve siècle, n'a plus qu une tourelle, et il lui a imprimé la marque de son époque (2).

(1) C'est à Blanchêt qu'incomba la décoration de cette salle (1684-86). Les sculptures furent exécutées par Simun Guillaume, les peintures par P. L. Crétey. Ces dernières sont également gâtées par l'emphase et le convenu. Il y en a trois à la voûte : l'Assomption, l'Ascension et Elie enlevé dans le ciel, et deux sur les parois: la Multiplication des pains et la Cene, l'une et l'autre obscurcies et en mauvais état.

(2) Ce monument est aujourd'hui la Bibliothèque de la ville.


Entre tous les édifices civils du XIXe siècle, deux surtout fixent l'attention : le palais du Commerce, intelligemment conçu par Dardel d'après les type les plus français du style XVIe siècle, et le théâtre des Célestins, œuvre très personnelle de G. André, qui s'y est affirmé ordonnateur pratique autant qu'artiste. Le premier de ces monuments comprend l'admirable musée des tissus et la Bourse, à laquelle les symboliques Heures de Bonassieux donnent un prix inattendu.

Lyon a subi mille transformations depuis l'Empire, et les anciennes maisons y sont devenues rares; il n'y en a plus d'entières que sur la rive droite de la Saône, dans les quartiers Saint-Paul, Saint-Jean et Saint-Georges. Quelques façades du xve siècle ont encore leur parure d'ornements, de menues figurines de têtes ou d'animaux, quai de Bondy, 2; quai de Pierre-Scize, 101; rue Juiverie, 22; rue des Trois-Maries, 7; rue Lainerie, 14; cette dernière tout égayée d'une véritable floraison sculpturale. Toutes ces demeures intéressent, mais les plus attachantes sont celles du XVIe siècle : l'hôtel Paterin, rue Juiverie, 4, justement renommé pour son escalier et sa cour (1); l'hôtel Gadagne, rue de ce nom, 10, 12 et 14, que l'on aménage en vue d'y installer le musée du vieux Lyon; les vestiges de l'hôtel Bullioud, rue Juiverie, 8, élevé par Philibert de l'Orme et dont on vante la galerie de la seconde cour; la maison des Dugas, rue Juiverie, 23, constellée de têtes de lions énergiquement mises en relief; l'hôtel des frères Baronnat, aux vastes baies d'un fier contour, rue Juiverie, 22, et montée du Change, 3 ; l'hôtel d'Estaing, rue Saint-Jean, 37; l'hôtel de Valois (très restauré), rue Tramassac, 22; la façade (restaurée) du 11, rue SaintGeorges, où grimacent trois grotesques; les façades du 1, du 3 et du 5, rue des

(1) Cet hôtel, appelé très improprement de Henri IV, date du temps de François Ier.

Trois-Maries. La porte de cette dernière maison abrite une souriante Vierge; au-dessus de celle du 1, un bas-relief, ancienne enseigne restaurée, réunit les Trois-Maries, dont l'une, la Mère du Sauveur, n'a plus de tête. On prodiguait jadis les figures de Vierges et de Saints à l'extérieur des logis, mais les sectaires leur ont fait une guerre acharnée. Et les vauriens ont sans do ute contribué beaucoup à diminuer le nombre des enseignes sculptées qui, parfois, avaient tant de saveur, témoin le plantureux Bœuf, à l'entrée de la rue de ce nom ; le Phénix, rue Saint-Georges, 3, tous deux du xvie siècle, et l'Ostarde d'or (1708), même rue, 19.

Dans le centre, il n'y a qu'une maison à signaler: celle du 13 de la rue de la Poulaillerie. La porte est en arc brisé, la voûte de l'allée a des nervures fortement accusées; les autres vestiges sont d'un type Renaissance. Les fenêtres de sa face Nord reposent sur des masques ou des animaux fantastiques; dans sa cour, deux figures délabrées, le Rhône et la Saône, forment le couronnement d'un motif dont il n'y a plus trace. Les conseillers de la ville y ont tenu leurs séances dans les dernières années du XVIe siècle et les premières du XVIIe.

Parmi les monuments modernesconçus comme décors, on ne peut guère louer que la Fontaine des Jacobins, due à Gaspard André. Par ses proportions comme par ses contours, surtout par sa partie centrale combinée avec un sens parfait de la mesure, elle supporte la comparaison avec les meilleures œuvres de ce genre. Certains édifices banals du XIXe siècle ont été enrichis de bonnes statues bien façonnées pour l'effet à produire. Telles sont les figures symboliques de Dufraine, surtout celle de l'homme, au palais de Justice (façade de la rue Saint-Jean), et la Ville de Lyon, du même, sur la Fontaine de la place Morand.

(A suivre.) ALPHONSE GERMAIN.


(Suite.)

CHAPITRE IX sos LES RUINES DU CLOCHER

Q

UAND Lucien Talvas, essoufflé de sa course rapide, arriva sur la place de Jumilly, le désastre lui parut plus

effrayant encore qu'il ne se l'était figuré.

La façade de l'église n'était plus qu'un amas de décombres : de pierres, de poutres enchevêtrées, de débris de chevrons et d'ardoises.

Derrière, on entendait des voix de travail leurs, des bruits de pics et de haches, que dominait par instants un commandement rapide. Des hommes de bonne volonté, des ouvriers de la minoterie, des paysans accourus des fermes les plus voisines, s'employaient au sauvetage des sonneurs, sous la direction de l'abbé Roncin.

Une haie de curieuses, de badauds, foule sans cesse accrue de nouveaux arrivants, encombrait les abords de l'église.

Arthur Lorin pérorait au milieu de ces oisifs : — Le clocher se penchait comme un peuplier sous la tempête, on aurait dû, depuis longtemps, interdire les sonneries.

— Une chance que ce soit arrivé ce soir, dit une femme.

— Plutôt qu'à la sortie de la procession.

— Vous figurez-vous la paroisse tout entière écrasée sous cette masse, emprisonnée dans l'église?

— Le clocher est tombé sur la nef, et non en dehors, comme on aurait pu le croire; la charpente est brisée, la voûte effondrée;. les pauvres sonneurs doivent être en bouillie.

— Combien sont-ils pris là-dessous?

— Les deux Talvas et le petit Chevrel, l'enfant de chœur.

— Quel malheur! Grand Dieu! Quel malheur!

— Et M. le maire qui n'est pas là!

— Le garde champêtre Malabert organise les travaux.

- Le médecin est-il prévenu?

- A quoi bon? Ils sont tous morts, les trois sonneurs.

Lucien n'a pas entendu ces propos de bavards, ignorants des détails de l'accident et de ses conséquences et qui, pourtant, veulent jouer aux renstignés.

Il évite de fendre la foule, contourne l'édifice en écrasant une jonchée d'ardoises et pénètre dans l'église par la porte de la sacristie qu'il trouve ouverte. Le voici qui descend le sanctuaire. La nef est encombrée de platras, de débris de toute sorte jusque sur la moitié de sa longueur. La voûte, de bois peint et d'argile tassée, est effondrée depuis la chaire jusqu'aux fonts baptismaux.

Par l'ouverture béante, il aperçoit dans le ciel noir les premières étoiles.

Des voix réclament des lan ernes.

Quelques travailleurs se détachant de l'équipe croisent Lucien sans le reconnaître.

Le curé aperçoit le nouveau venu : — Par ici, mon ami. il y a de la besogne.

Des hommes arrachent des pierres, les rejettent en tas dans l'allée centrale, d'autres s'efforcent de dégager les pièces de bois, les planches enchevêtrées qui leur font une barricade les empêchant d'arriver à la base de la tour.

L'abbé Roncin, la soutane déchirée, les yeux pleins de larmes, réagit contre l'émotion qui l'étreint et s'efforce de mettre de l'ordre et de la méthode dans les travaux de sauvetage.

Bardoux est à ses côtés. Lucien le reconnaît, monté sur un tas de chevrons et de poutrelles. Il grimpe auprès de lui et ques tionne : — Sont-ils vivants ?

Siméon Bardoux ne s'étonne point de la


présence de Lucien. Il lui répond d'une voix brisée d'émotion : — Je ne sais pas. Il faut tout déblayer d'abord.

— Il faut savoir. Je veux savoir.

— C'est impossible.

— Avez-vous entendu des cris, des gémissements?

— Non. avec ce bruit.

— Ecoutez donc! De grâce, écoutons.

La voix de Siméon Bardoux s'éleva, grave, puissante, autoritaire.

— Halte! que personne ne bouge.

Comme quelques-uns s'obstinaient encore à dtranger des pièces de bois, le meunier s'irrita : — Silence donc!

Il répéta, de toute sa force, pour les bavards du dehors : — S lence!Toutes les oreilles se tendirent.

Alors, du fond des décombres, des gémissements faibles, intermittents, s'élevèrent, perçus par les plus rapprochés.

L'abbé Roncin et Lucien les entendirent les premiers.

- Ils vivent! crièrent-ils. Hardi, les amis, et de la prudence!

La foule, au dehors, répondit par une acclamation.

Des lanternes arrivaient.

— Courage, mon ami, dit le curé au fils de Talvas, nous allons les sauver.

Les travailleurs venaient de déplacer une grosse poutre, et ils pensaient ouvrir une brèche et accéder ainsi sous la tour, quand un éboulement se produisit barrant le passage.

Lucien s'irrita : — C'est par en haut qu'il faut tenter l'accès, cria-t-il, sinon nous allons écraser mon père et mon frère.Le curé venait d'avoir la même pensée.

Une lanterne à la main, il commençait l'escalade des débris. Du dehors, Arthur Lorin vit l'ascension des lumières, et il en tira aussitôt cette conséquence : — Le clocher s'est couché sur l'église, il reste donc un trou vide à la place de la tour, et le curé va se faire descendre là-dedans comme dans un puits.

— Il paraît que Lucien, le fils aîné de Talvas, le carrossier, est ici.

— Triste voyage qu'il a fait là.

— Regardez. voilà les lumières qui descendent.

Lucien voulut être des premiers à tenter le périlleux passage. Suivi d'un ouvrier couvreur et du charpentier Brûlard, il se laissait glisser d'une pièce de bois à l'autre, écartant celle-ci, faisant clouer celle-là pour éviter qu'elle ne retombe.

Une sorte de puits fut ainsi établi.

Un cri s'éleva.

— Le petit Chevrel est vivant!

— Sauvé par un quartier de plancher qui est resté coincé entre deux madriers et a empêché les pierres de l'écraser.

Le père Talvas fut trouvé debout, serré comme dans un étau entre le pilier des fonts et un amas de solives.

Ces deux premiers « rescapés » furent hissés avec des cordes et redescendus par dehors avec de grandes précautions.

Quant à l'iniortuné Pierre, son infirmité ne lui avait pas permis de se jeter de côté assez vite lors de la catastrophe; on le trouva les cuisses prises sous le rebord de la moyenne cloche.

— Onze cents kilos de bronze à déplacer pour le dégager! dit Lorin à ses auditeurs.

Le sauvetage du pauvre garçon ne s'acheva que vers minuit, après des efforts surhumains pour soulever la cloche et au milieu de dangers sans cesse renouvelés.

Des voisines charitables étaient allées chez les Talvas préparer des lits pour les blessés.

Un cycliste de bonne volonté partit pour Forges à la recherche d'un médecin.

Les curieux se dispersèrent; un bon nombre avaient suivi Lorin à l'hôtel du Gué pour boire un coup et discuter sur l'événement et ses conséquences.

Déjà la politique envenimait l'affaire. Les uns accusaient la municipalité d'avoir trop tardé à faire au clocher les travaux de consolidation nécessaires. Les autres rejetaient la faute sur le curé et le sonneur, à qui M. Leplat aurait dû interdire de mettre en branle les deux grosses cloches. Le maire, rentré dans la nuit par le dernier train, fut mis au courant par Malabert, son dévoué garde. Il se rendit près de l'église sans y pénétrer, vit la brèche du toit et s'en alla réveiller l'instituteur pour pénétrer dans la mairie.

Avant de rentrer chez lui, il signa un arrêté interdisant, pour raison de sécurité


LE PÈRE TALVAS FUT TPOUVÉ SOUS UN AMAS DE SOLIVES


publique, l'entrée dans l'église et l'accès des abords du monument.

— Vous le signifierez au curé dès la première heure et l'afficherez ensuite, dit-il au secrétaire.

Et il s'alla coucher sans s'informer des blessés.

Lucien passa la nuit à leur chevet dans l'attente du médecin.

Quelle triste soirée de fiançailles! Et quels deui!s probables allaient retarderson mariage!

Le jeune homme épiait surtout le retour de la connaissance chez son père.

— Mon Dieu, suppliait-il, faites qu'il ne meure pas avant que j'aie pu lui prouver que je suis, malgré tout, un fils tendre et reconnaissant.

Le docteur arriva dès l'aube.

Il rassura Lucien sur l'état du père Talvas « Une compression de la poitrine, une forte commotion qui se traduira par une fièvre viol nte, mais dont il pourra se tirer grâce à sa constitution. » Et il prescrivit des applications de sangsues et des compresses glacées.

A la vue des membres écrasés du pauvre Pierre, le médecin fit une grimace significative.

— Nid à gangrène, murmura-t-il, ou à tétanos.

Puis il dit à haute voix : — Il faut conduire ce garçon à l'hôpital.

Nulle part ail'eurs il ne peut recevoir les soins et subir l'opération que nécessite son état.

Sur la table, le médecin rédigea un certificat.

— Vous allez vous présenter avec ceci à la mairie, et obtenir un bon d'urgence qui vous dispensera des formalités nombreuses qui précèdent une admission, surtout quand le malade n'est pas de la ville même de Forges.

Ne perdez pas de temps surtout; si dans vingt-quatre heures l'amputation n'est pas faite, l'infection aura envahi tout l'organisme.

— Vous ne pourriez pas la tenter ici, docteur? hasarda timidement Lucien.

— Autant me demander d'achever le blessé! Ce n'est pas une jambe. ce sont des cuisses à sectionner. Il faut des aides expérimentés une installation qu'on ne saurait improviser Au revoir. Je vais avertir un de mes confrères de se tenir prêt à tout événement, et toucher un mot à la

supérieure de l'hôpital. Courage, mon ami, à tantôt; je vous attendrai toute la journée.

Le médecin croisa dans la cour le meunier du Moulin-Vieux, Bardoux, qui, suivi d'Annette apportant du lait et des provisions, venait contrain re doucement Lucien de prendre quelque nourriture et lui proposer de le remplacer auprès des blessés, si quelques formalités l'obi geaient à s'en éloigner.

Quand 7 heures sonnèrent à l'horloge des Talvas, et lorsqu'une certaine animation se manifesta dans la bourgade, Luien, porteur du certificat médical, se dirigea vers la mairie. Il rencontra un domestique des Ardels, envoyé par M. Chardon pour lui rapporter le chapeau abandonné la veille, et surtout pour prendre des nouvelles de l'événement. Le serviteur était en outre chargé de transmettre à M. Lucien Talvas toute la sympathie de ses maîtres.

Le jeune homme remercia, dit que le médecin gardait quelque espoir de sauver son père et son frère, et le messag r reprit Le chemin des Ardels.

Un peu au delà de la place, Lucien Talvas croisa le secrétaire de mairie qui s'avançait porteur d'un papier encollé qu'il tenait par les deux angles, du bout des doigts.

— Un affichage important, dit-il Je serai à vous tout à l'heure.

Une copie de l'arrêté fut envoyée au curé par le premier gamin que croisa le secrétaire.

L'abbé Roncin s'attendait à quelque mesure de ce genre, car il faisait des préparatifs en vue de célébrer la messe en plein air, au reposoir édifié devant le presbytère.

CHAPITRE X

BIENFAISANCE ADMINISTRATIVE

— Vous venez pour la déclaration de décès, demanda l'instituteur à Lucien, en lui ouvrant la porte de la mairie.

— Cette douleur m'est épargnée. Je viens pour un bon d'hôpital.

— Au profit de qui ? Du petit Chevrel ? On disait qu'il n'a subi que des contusions sans gravité.

— Il va aussi bien que possible. C'est pour mon malheureux frère, Pierre -1 alvas.

Le visage du fonctionnaire prit une expression plus froide.

lia pourtant un domicile?


— Sans doute, mais le médecin a déclaré que son cas nécessitait.

— Tous les médecins d sent la même chose, pour avoir les mala les à leur portée, sans courir dans nos campagnes.

— J'ai le certificat du docteur.

— Donnez.

Le regard du secrétaire de mairie courut droit à la signature.

*— Dr Beau oin! dit-il en rejetant le papier sur la table -ans le lire.

Il ajouta, levant les épaules dans un geste signifiant qu'il ne pouvait rien à l'affaire : — M. le maire décidera. Il vient tous les dimanches à lia mairie vers 10 heures, je lui soumettrai le cas.

Lucien voulut discuter.

— Il y a urgence, dit-il; si l'opération est remise à demain, mon frère est perdu. Il faudrait qu'il soit transporté à l'hôpital ce matin même, avant la grande chaleur.

— Allez trouver M. le maire chez lui. S'il consent à vous recevoir et à signer la pièce, je ne ferai aucune difficulté pour apposer le cachet de la mairie.

Lucien, étonné de ce peu d'empressement devant un cas aussi grave, quitta la maison commune pour se diriger vers le château de Jumilly.

Il croisa sur la place des gendarmes d'Auvernay qui pénétraient chez Arthur Lorin pour interroger l'aubergiste. On le leur avait désigné comme l'homme de Jumilly le mieux placé pour éclairer leur enquête et les renseigner sur les causes et les circonstances de la catastrophe.

Le garde champêtre, Malabert, habitait le pavillon à l'entrée de l'avenue du château de Jumilly. Le minotier, devenu châtelain, s'était ainsi donné un concierge dévoué, dont la commune payait le traitement. Il n'y a pas de petites économie. Lucien fut arrêté au passage. La consigne était de ne laisser pénétrer personne au château.

— Monsieur est rentré tard, il repose. Il ne reçoit ici que les visites personnelles.

Pour le commerce, allez au bureau de la minoterie, Monsieur y passe de 9 à 10. Pour les affaires d'administration, à la mairie, de 10 à 11.

— Mais il s'agit d'un cas exceptionnel, il y a extrême urgence, dit le jeune homme, voulant forcer la porte. Je verrai bien au château si l'on voudra m'entendre.

— Vous ne passerez pas.

— J'irai, vous dis-je.

— Je suis également garde champêtre, cria Malabert, et je verbaliserai contre vous pour violences et violation de domicile.

— N'insistez pas, mon pauvre ami, dit la femme du garde, ou vous ne serez pas reçu au château, ou M. Leplat, furieux d'être relancé jusque chez lui, refusera ce que vous avez à lui demander. Ce n'est que deux heures à attendre, patientez.

— La gangrène n'attendra pas! dit Lucien en se retirant découragé.

Il alla crier sa surprise et sa rancœur à Bardoux qui lui répondit avec l'indignation froide de ceux qui en ont vu bien d'autres : — Il en est ainsi, mon pauvre ami, pour tous ceux qui ne sont pas du clan de notre potentat.

— Le peuple ne se révolte pas ? Les ouvriers de Forges feraient une émeute pour beaucoup moins.

Lucien attendit avec impatience. Il soulevait de temps à autre les couvertures qui cachaient les membres de son pauvre frère.

Les cuisses se violaçaient, La chair se gonflait.

-Ça presse! Ça presse! hum! murmurait-il en piétinant près du lit.

M. Leplat se rendit à la mairie un peu plus tôt que de coutume, le secrétaire l'informa de la démarche du fils du sonneur.

— La loi nous oblige-t-elle à signer ce bon d'hôpital? demanda le maire.

— Cela dépend des cas. Le blessé a des ressources ou il n'en a pas.

— Assez!. Le sacristain est riche, il possède sa maison et son jardin.

— Néanmoins, les communes peuvent demander l'admission d'urgence, sauf à réclamer par la suite le remboursement des frais d'hospitalisation. C'est une faveur.

— Je n'en accorderai point à ces Talvas, à ce boiteux surtout qui colportait les bulletins et circulaires de mes adversaires.

— Le certificat est du Dr Beaudoin.

— Raison de plus pour confirmer ma décision. Vous allez répondre que la famille peut faire hospitaliser le malade à ses frais.

M. Leplat, désireux d'éviter les explications et peut-être les reproches du solliciteur, monta dans sa voiture qui l'attendait à la porte de la mairie et disparut du côté de Forges. Il allait s'enquérir auprès du sous-


LUCIEN CROISA LES GENDARMES D'AUVERNAY QUI PÉNÉTRAIENT CHEZ A. LORIN POUR INTERROGER L'AUBERGISTE


préfet des mesures à prendre et de la conduite à tenir vis-à-vis du clergé qui ne manquerait pas de réclamer le déblayement de l'entrée de l'église, et peut-être la réfection du clocher.

Lucien arrivant à la mairie à 10 heures précises reçut cette froide réponse : — M. le maire a examiné votre cas. Votre père est propriétaire, non inscrit à la liste d'assistance. En pareille occurrence, l'hospitalisation ne saurait être réclamée par la commune. Vous pouvez faire admettre votre frère comme malade libre.

— Mais c'est vouloir nous imposer un retard de deux jours! s'écria Lucien. Nous ne demandons pas l'aumône. Nous rembourserons la commune. Nous ne voulons que gagner du temps. Il faut que l'amputation soit faite aujourd'hui même.

— Je n'y peux rien! dit le secrétaire avec une désolation feinte.

— Si M. le maire était là, ou s'il devait revenir, je lui expliquerais.

— M. le maire est parti en voyage.

— Il n'a pu décider en pleine connaissance de cause. si l'adjoint.

— M. Chardon? Il ne prendra point de décision contraire à celle de M. le maire.

— Pour moi, son futur gendre. pour ne.

pas mettre un deuil entre nos fiançailles et le mariage de sa fille.

— Comment! fit le secrétaire soudain intéressé, vous allez épouser Mlle Chardon ?

— Très prochainement.

— Sapristi! Pourquoi ne l'avez-vous pas dit plus tôt?. M. Leplat connaît-il ce projet d'alliance ?. C'est embarrassant.

Allez voir aux Ardels. J'expliquerai le cas à M. le maire. M. Chardon et M. Leplat s'en arrangeront entre eux par la suite. L'accident s'est produit dans un lieu public.

par la chute d'un bâtiment communal.

Monsieur votre frère a été blessé en accomplissant un service public Allez voir M. Chardon.

Le secrétaire fouillait un tiroir tout en parlant. Il en retira une formule imprimée qu'il voulut bien confier à Lucien.

— Dans le cas ou Monsieur votre beau-père jugerait à propos de signer le billet, recommandez-lui de donner au blessé la qualifica tion de « sonneur municipal » et d'ajouter que l'accident s'est produit au cours d'une des sonneries réglementaires prescrites par

les arrêtés municipaux. A tout à l'heure, Monsieur.

Lucien était trop préoccupé pour remarquer ce qu'avait d'étrange la subite complaisance du secrétaire jusqu'alors si froid et si fermé. Il prit la feuille, nota dans son esprit les recommandations et monta lui-même aux Ardels.

Ce fut Mlle Olga qui le reçut.

— Vous venez déjeuner avec nous? C'est gentil! Vous nous aviez quittés si brusquement, hier.

- L'inquiétude.

- Je ne vous en fais pas reproche, au contraire. Vous avez le cœur sensible, et cela me plaît. Vos malades vont mieux? Ils auraient pu n'en pas échapper vivants.

— Le docteur a bon espoir pour mon père.

— Tant mieux. Le sonneur est un bon bonhomme.

- Mais mon pauvre frère est bien bas.

- C'est dommage. Il n'était déjà pas très robuste. Il boitait?.

— S'il en réchappe, ce sera bien pis, la cloche moyenne lui a écrasé les deux cuisses.

— Oh! c'est affreux! Et il n'est pas mort sur le coup?

— Aucun organe vital n'est atteint, mais le docteur redoute la gangrène. Il voulrait opérer au plus vite l'amputation.

— De la jambe?

- Des deux cuisses, opération difficile que le médecin ne veut tenter qu'à la clinique de l'hôpital de Forges.

— Affreuxl Affreux!. Ensuite ce pauvre garçon sera cul-de-jatte?

— Hélas!

— Si son père ne se rétablit pas. qui prendra soin de lui?

— Moi! déclara Lucien.

— Vous voulez dire que vous le placerez aux incurables, car vous ne songez pas à vous encombrer d'un infirme, je suppose.

— Pierre est mon frère.

— Bien sûr! vous n'allez pas l'abandonner,

vous payerez sa pension — ce qui sera une rude charge — vous lui enverrez quelques chatteries et l'irez voir de temps en temps.

— Ce n'est pas ainsi que je comprends mon devoir. Je peux faire à Pierre une place à mon foyer, lui procurer avec la vie matérielle un peu des douceurs de l'intimité, la consolation d'une affection vigilante.


— Sentimental! fit Mlle Olga en haussant légèrement les épaules.

Elle se leva et alla redresser une fleur dans un vase sur la cheminée.

Lucien, ne perdant pas de vue le but de sa visite, s'enquit de M. Chardon.

— Il est parti pour Saint-Vidal avec la jument grise et le tilbury. On vend le foin de la grande prairie où se tient la foire et il voudrait l'acheter.

— Sera-t-il bientôt de retour?

— Pas avant ce soir. La vente n'a lieu qu'à 2 heures.

— Tout conspire contre nous, murmura Lucien désespéré. Le maire s'enfuit sans s'occuper des blessés, l'adjoint est à cinq lieues. Qui me signera le bon d'hospitalisation ? Mon pauvre Pierre!

La voix de Lucien s'arrêta dans un sanglot.

Mlle Olga revint près de son fiancé et lui frappa doucement sur l'épaule.

— C'est la fatalité! dit-elle en guise de consolation. Pourquoi se révolter contre le destin? Le hasard arrange bien les choses: il veut laisser votre frère s'éteindre doucement dans son lit, au lieu de lui imposer les tortures d'une opération inutile et de vous infliger, à vous, la douleur de le voir mourir sous le scalpel des chirurgiens.

Le jeune homme se leva, choqué de ce langage, ses énergies stimulées par le rappel du danger.

— Je tenterai l'impossible, s'il le faut. Je conduirai mon frère jusqu'à la porte de l'hôpiial, et là, il faudra bien qu'on le reçoive, qu'on l'admette au moins dans la salle d'opération. Après. si on ne veut pas lui donner de chambre, je l'emporterai dans mon propre lit. les Sœurs gardes-malades ne se refuseront pas à le soigner.

- Vous êtes entêté, je le vois.

- Je suis un Talvas. Les Talvas ont coutume d'aller jusqu'au bout de leur devoir.

Mlle Chardon fit une moue. Ce jeune homme ne serait pas en toute circonstance le mouton docile qu'elle croyait trouver en lui, le caractère d'une trempe molle qu'elle se promettait de façonner. Mais il n'y avait pas là de quoi rompre et se priver des charmes de la vie à Forges. Il fallait aussi tenir compte de la surexcitation inévitable dans des circonstances aussi tragiques.

Elle répondit donc avec douceur :

— Vous croyez de votre devoir de transporter votre frère à Forges. Il est vrai qu'il pourra recevoir des soins plus éclairés qu'ici. Comment allez-vous l'y conduire?

— Dans une carriole, étendu sur un matelas.

— Vous n'avez pas de voiturier sous la main!. Ma mère s'est fait conduire à la messe de Jumilly avec la carriole neuve, votre chef-d'œuvre. Retournez par la route, vous aurez chance de la rencontrer. Je suis persuadée qu'elle voudra mettre notre attelage à votre disposition. Mais je crains que vous n'imposiez à votre malade des tortures inutiles.

— A la grâce de Dieu ! murmura Lucien en s'éloignant.

CHAPITRE XI LES DÉMOLISSEURS D'ÉGLISE

De grandes affiches blanches annonçaient aux habitants de Jumilly l'approbation des votes du Conseil municipal concernant la route latérale à l'Hauviette par la rive gauche jusqu'au Vau-Fleury, la décision administrative déclarant ce chemin d utilité publique, fixant la dépense et nommant un jury chargé de l'estimation des terrains à exproprier.

Le hasard avait désigné pour cette évaluation deux propiiétaires des plateaux d'Au- vernay, un vétérinaire, un camionneur de Forges, et un percepteur en retraite, tous amis ou commensaux de M. Leplat.

Cette nouvelle changea le cours des préoccupations des habitants de Jumilly qui ne s'entretenaient depuis huit jours que de la chute du clocher et de ses conséquences, de la mort du cadet des Talvas, survenue à Forges, dans la chambre où son frère l'avait transporté en attendant que les administrateurs de l'hospice se fussent prononcés sur son admission.

Le père Lucas se rétablissait peu à peu, mais il demeurait très faible. La mère Giraud le soignait, ou plutôt restait chez lui, car elle était sourde, fainéante et malpropre. Le ménage et les repas étaient faits alternativement par la servante du presbytère et par la petite-fille de Bardoux qui se remplaçaient à tour de rôle chez le sacristain.

Enfin l'opinion commençait à s'inquiéter de la décision qu'allait prendre le soir même le Conseil municipal au sujet de l'église.


Depuis le sauvetage des sonneurs, aucun travail de déblayement n'avait été entrepris.

Un nouveau quartier de toiture, dont la charpente restait en port.-à-faux, s'était abattu le mardi, ajoutant de nouveaux décombres à la montagne de débris qui remplissait la nef.

L'abbé Roncin avait fait établir, à hauteur de la chaire, un barrage de planches clouées qui interdirait l'accès dans la partie encombrée de l'édifice, et réservait pour le culte le chœur et les transepts.

Des personnes pieuses avaient voulu pénétrer dans les chapelles pour assister à la messe quotidienne, mais le garde champêtre Malabert, stylé à cet effet, les avait brutalement expulsées en vertu de l'arrêté du maire.

Le curé fut averti qu'on le rendrait responsable des infractions, l'accuserait d'homicide par imprudence, s'il s'obst inait à célébrer le culte d, ns un bâtiment dangereux et à y convoquer des citoyens.

Vu la gravité des circonstances et l'urgence, le minotier-maire avait convoqué le Conseil municipal un jour de la semaine, à 5 heures du soir.

Malabert, en distribuant les feuilles de convocation, avait annoncé à un certain nombre d'édiles que tous les élus ne donneraient sans doute pas l'exemple d'une exactitude militaire, et qu'il serait plus agréable, pour les premiers arrivés, d'attendre l'ouverture de la séance chez leur collègue Lorin, à l'hôtel du Gué.

Il y eut ainsi une sorte de réunion préparatoire chez l'aubergiste. Celui-ci ne se priva point de lancer des insinuations tendancieuses.

— L'abbé Roncin est un ambitieux qui rêve d'avoir une église neuve. Qui sait s'il n'a point désiré la chute du clocher pour se donner motif à en réclamer un autre?

Comme quelques-uns protestaient, il ajouta : — Le clocher penchait du côté de Forges, cela, vous l'avez vu comme moi. Comment se fait-il qu'il soit tombé d'un autre côté, sur la toiture et la voûte de l'église? J'exigerais qu'on tire de côté les poutres maîtresses, et qu'une enquête soit ouverte.

— Il faut une enquête, approuvèrent les conseillers en choquant leurs verres.

— Ce serait curieux si cette enquête révélait que des traits de scie ont été donnés à

certaines pièces de charpente. On a vu des choses plus invraisemblables se produire.

— Oh ! oh ! firent quelques auditeurs, effrayés de la calomrie.

— Le résultat est acquis, quelle qu'ait été la cause. Quant à moi, je n'endetterai pas la commune.

— Nous allons voir ce que le maire va proposer.

— Une supposition : si mon auberge tombait à la rivière, le curé m'apporterait-il le produit du denier du culte pour la rebâtir?

— Non! — Il dirait comme ça: « Que les clients de Lorin s'arrangent pour lui donner de quoi. s'ils tiennent à sa maison. » Moi je raisonne de même pour sa boutique.

— Oh! Tutur! fit un conseiller indigné d'entendre ainsi qualifier l'église.

— Je parle par comparaison, reprit l'aubergiste. Pour moi, je ne vois que la logique : « Que ceux qui se servent d'un bâtiment l'en- tretiennent. » Voilà! Il doit être l'heure.

Verres et tasses se vidèrent, et, lentement, les conseillers municipaux se rendirent à la mairie.

M. Leplat les attendait, compulsant un volumineux dossier. M. Chardon, qui venait d'arriver, n'avait pas encore eu le temps de s'asseoir.

La séance fut longue.

Le maire commença par lire une interminable énumération des dépenses engagées par la commune, de tous les centimes additionnels pour vicinalité, assistance, travaux publics, amortissements d'emprunts, etc. Il y ajouta la nomenclature des centimes départementaux et relut le devis d'entretien des chemins communaux.

Cette danse de chiffres eut pour effet d'ahurir complètement les conseillers de Jumilly, gens simples, peu habitués aux calculs et aux statistiques administratives.

Quand M. Leplat jugea l'intoxication suffisante, il termina brusquement par cette conclusion : - Vous avez vu, Messieurs, quelles charges énormes pèsent sur les contribuables; que ceux d'entre vous qui veulent en ajouter de nouvelles lèvent la main.

Les conseillers s'entre-regardèrent, timides, effrayés. Pas un bras ne bougea.

M. Leplat se tourna vers le secrétaire et dicta : — Ecrivez : « Le Conseil municipal de


Jumilly, à l'unanimité, considérant que l'état des finances de la commune ne permet d'entreprendre aucune construction nouvelle ou restauration des bâtiments communaux, décide de laisser les choses en l'état et passe à l'ordre du jour. » Pas d'observations, Messieurs?. Nous allons maintenant examiner la demande du jeune Narcisse Chandail qui sollicite une bourse à l'école vétérinaire.

— Est-ce qu'on ne va pas s'occuper de l'église ? demanda Brault, un vieux conseiller à tête chauve.

— Mais c'est voté! riposta Lorin en lui poussant un coup de coude dans les côtes pour le faire taire.

— La place ne peut pas rester encombrée, fit Siquot.

— Certes non, répondit vivement le maire.

Nous allons la faire déblayer en prenant sur les ressources ordinaires.

— Que ferez-vous des matériaux?

— Brùlard, l'entrepreneur, se charge d'en opérer le triage et l'enlèvement gratis si on lui laisse les bois utilisables. Il en tirera le parti qu'il pourra et vendra le reste pour chauffage.

— Et les plâtras? demanda Lorin.

— Il les déversera dans le chemin du gué, derrière ta maison, mon vieux Tutur.

— A la bonne heure! Il y avait des ornières épouvantables. Je propose l'approbation des décisions de M. le maire, conclut l'aubergiste en levant la main.

La troupe entière l'imita.

— Tout cela, c'est bon, fit Brault, obstiné dans son idée, mais ça ne dit pas quand vous ferez recouvrir le reste de l'église, ni où vous prendrez le bois pour la charpente neuve.

— Veux-tu faire tuer les ouvriers et ruiner la commune? riposta Lorin. Monter une charpente neuve sur des murs croulants?

Non, non, ma conscience me le reprocherait toute ma vie.

M. Leplat remercia Lorin d'un sourire.

— Je vais plus loin, déclara l'aubergiste; vous avez vu qu'un quartier de toiture s'est écroulé tout seul, il dégringole des ardoises et des plâtras tous les jours.

— C'est exact, dit le maire en soulevant quelques feuillets de son dossier, les rapports du garde champêtre en font foi.

— J'estime donc, poursuivit Tutur, que l'on devrait descendre avec précaution ce qui reste encore debout, et trier les matériaux

avant qu'ils ne soient brisés en dégringolant les uns sur les autres.

— Vous ne trouverez pas d'ouvriers assez imprudents pour s'aventurer sur le reste de la toiture.

— Ils étayeront auparavant.

— Coquin de Tutur! Il a réponse à tout.

Il aurait dû se faire architecte ou entrepreneur.

— Je ne cache pas ma pensée, moi, dit l'aubergiste en se levant et en plaquant sa main sur sa poitrine, j'ai prédit ce qui est arrivé. Je vous ai blâmé, Monsieur le maire, pour ne pas avoir interdit les sonneries, je vous blâmerais encore si vous ne preniez pas les mesures nécessaires pour éviter de nouvelles catastrophee.

— J'ai pris un arrêté, Malabert veille à son exécution.

— Croyez vous qu'il sera longtemps respecté? Je ne connais qu'un moyen: quand un monument menace ruine, on le désaffecte.

— C'est bien mon idée, répondit M. Leplat; ces messieurs seront peut-être d'un avis différent.

D; quoi s'agit-il? demanda Siquot, qui avait l'oreille un peu dure.

— Nous disons, lui expliqua bénévolement M. Leplat en criant dans sa direction, nous disons qu'il est préférable de mettre toute l'église sur le même pied, plutôt que d'en laisser un bout d'une manière et l'autre partie dans un état différent.

— C'est juste ! opina Brault satisfait.

— Mettrez-vous le déblayement en adjudication? demanda M. Chardon.

— Il est préférable de traiter de gré à gré, répondit M. Leplat. Vu l'urgence, nous obtiendrons l'autorisation de la préfecture.

— Nous votons donc la démolition, dit Chardon.

— S'agit-il d'abattre les parties qui restent encore debout? questionna Brault, inquiet.

— Il faut bien niveler la place avant de rebâtir quelque chose, fit Lorin, haussant les épaules avec mépris.

Les velléités d'opposition furent arrêtées du coup.

Le secrétaire se remit à écrire sous la dictée du maire.

« Considérant que les parties demeurées debout constituent un danger permanent, le Conseil, à l'unanimité, décide le déblayement


général de la place, autorise M. le maire à passer des marchés de gré à gré pour la descente, le triage et l'enlèvement des matériaux. »

— Pas d'opposition? demanda M. Leplat pour la forme.

Toutes les mains se levèrent. On signa séance tenante le procès-verbal, et, comme il restait encore une heure de jour, les conseillers municipaux s'en allèrent passer l'inspection des décombres et supputer la valeur des matériaux.

Le père Brault s'évertua dans la description d'un projet de mur en planches qui séparerait la partie intacte de l'église d'avec celle que l'on allait démolir, et qui laisserait — en tassant le monde — assez de place pour le service du culte, dans le choeur, un bout de nef et les transepts.

D.s commères qui s'étaient approchées, curieuses, entendirent les explications du brave homme, et le bruit se répandit que le Conseil allait partager l'église en deux, et procéder sans retard à ce travail.

Une équipe d'ouvriers de Forges, ceux-là même qui avaient édifié les bâtiments de la minoterie, débarquèrent à Jumilly avec des chèvres, des crics, des outils de tout genre.

L'entrée de la tour fut dégagée. Les trois cloches n'avaient aucun mal, ayant été soutenues dans leur chute par le plancher du beffroi.

Elles furent enlevées par une large brèche ouverte dans le mur latéral et déposées sur l'herbe, sous les marronniers.

Trois dimanches de suite l'abbé Roncin célébra la messe en plein air, mais le quatrième un violent orage dispersa les assistants et interrompit le Saint Sacrifice.

Les fidèles commencèrent à réclamer la réouverture de l'église et la construction d'une cloison en planches, en attendant la réfection de la toiture effondrée.

Les conseillers n'avaient pas très bien compris ce qu'on leur avait fait voter; Leplat, Chardon, Lorin et le secrétaire se gardaient bien d'être explicites.

Malheureusement, personne, pas même l'abbé Roncin qui ne croyait pas à la méchanceté des autres, n'eut la pensée d'aller copier la fameuse délibération.

Un matin, Lucas qui essayait ses premiers pas de convalescent dans son jardin vit des échelles appliquées au chevet de l'église, à la

chapelle du transept, et des ouvriers s'employant à découvrir de trois côtés à la fois.

Il soupçonna la machination, comprit le danger. L'indignation fouetta ses énergies engourdies depuis l'accident. Il appela la mère Giraud et l'envoya au presbytère.

L'abbé Roncin voulut parlementer avec les ouvriers, leur démontrer leur erreur. Ils lui rirent au nez.

— Nous avons des ordres, répondirent-ils.

Protester auprès du maire? Peine perdue.

Attaquer sa décision comme abusive? Le perfide sectaire n'avait pas manqué de se faire couvrir par son Conseil municipal d'abord et par la préfecture ensuite. Il ne restait qu'un recours : la population.

Jomard, Rémontin, Saunier et Dufay, qui composaient le Conseil curial, furent convoqués en toute hâte chez Bardoux, leur président. Il fallait réparer le temps perdu par excès de confiance.

Avec Bardoux, homme de décision, l'on ne perdait point le temps en discussions inutiles. Un plan fut vite élaboré.

L'abbé Roncin se chargea d'aller relever à la mairie la fameuse délibération et de copier le texte du contrat passé avec l'entrepreneur pour la démolition. Dufay, Jomard, Saunier et Rémontin se partagèrent la commune et partirent en campagne sur-le-champ.

Ils se rendirent chez les divers conseillers municipaux à l'exception du trio sectaire, et posèrent cette question : — Avez-vous voté la destruction totale de l'église ?

Les braves conseillers se montrèrent effarés en apprenant que l'entrepreneur avait traité pour le rasement complet des murs des transepts et du chœur.

Ils signèrent volontiers une protestation contre l'interprétation exagérée donnée à leur vote et contre l'ambiguïté des termes d'une délibération en désaccord avec leur pensée.

Ils ne virent pas qu'ils se décernaient à eux-mêmes un brevet d'incompétence et de naïveté, mais l'heure n'était pas aux subtilités.

A cette protestation fut jointe une demande de convocation adressée à la sous-préfecture.

A midi, les émissaires étaient de retour chez Bardoux qui, muni des pièces et accompagné de Brault, monta dans la voiture de ce dernier pour se rendre à Forges.

Les ouvriers découvraient toujours. M. Leplat


et Lorin, avertis de l'émoi de l'abbé Roncin et de sa visite à la mairie, se gaussaient de la douleur du prêtre et se félicitaient de l'adresse avec laquelle ils avaient enlevé le vote de la désaffectation et de la démolition de l'église.

Vers 3 heures, la sonnerie du téléphone de la minoterie retentit, on demandait M. Leplat.

Le comptable brancha la communication sur le château.

M. le maire quitta les amis avec lesquels il s'entretenait en fumant d'excellents cigares et en dégustant des liqueurs, et se dirigea vers son cabinet.

On l'en vit ressortir de fort méchante humeur et la figure congestionnée.

— La bourse des farines a mal marché 1 pensèrent les amis.

— Allez me chercher Malabert, commanda le maître, et que l'on attelle aussitôt.

Puis il donna une explication à ses convives : — Je ne comprends rien à ce qui se passe.

On me téléphone de la sous-préfecture de surseoir aux travaux de l'église.

Il se gardait bien d'employer le mot : démolition.

— Etes-vous bien sûr qu'il ne s'agit pas d'une mystification?

— J'ai reconnu la voix du secrétaire général. Il m'annonce également la convocation du Conseil municipal pour après-demain soir. Si c'est un coup des cléricaux, ils me le payeront. Je vais aux informations. Vous m'excuserez.

M. Leplat rentra de Forges furieux et déconfit. Le sous-préfet lui avait mis sous les yeux les protestations des conseillers municipaux et leur demande de convocation immédiate.

Il en avait ri d'abord, se promettant bien d'expliquer les choses de telle manière que le blâme contenu dans ces protestations se changerait en approbation.

Mais le sous-préfet, moins rassuré, lui fit pressentir le danger le plus grave : son marché avec l'entrepreneur était dénoncé et attaqué devant les tribunaux administratifs comme irrégulier et entaché de malversation.

Le minotier pâlit, puis se ressaisit.

— C'est un coup de Bardoux, mon concurrent de meunerie et mon adversaire politique, mais il n'est pas de taille.

— Il me paraît avoir des gens derrière lui,

à commencer par Me Théot qui dirige la procédure.

— Diable! il faudra jouer serré.

— Débrouillez-vous, Monsieur le maire.

Vous avez peut-être un peu trop brusqué dans un pays qui tient encore à ses habitudes religieuses.

M. Leplat vit bien le surlendemain que Bardoux avait des appuis derrière lui.

Le meunier vint assister à la séance du Conseil municipal en accompagnant Brault et les autres membres pour les préserver de l'influence de Lorin.

Pendant ce temps, de solides gars dirigés par Lucas, arrimaient des poutres entre deux marronniers et hissaient la petite cloche qui fut suspendue à un mètre de terre.

Alors le tocsin retentit.

En quelques minutes cent cinquante personnes furent rassemblées. Malabert était accouru pour verbaliser, Lucas n'en sonna que plus fort.

— Allez à la mairie! criait-il. Allez voir M. Leplat, Chardon et Tutur qui veulent voter la démolition de l'église.

Voyant tout ce monde, Brault et les autres conseillers poltrons se conduisirent comme des héros.

M. Leplat, qui s'était promis de les faire rentrer sous terre et d'annihiler leur protestation, rengaina ses apostrophes.

Il adopta une autre tactique : laisser la direction de la discussion à l'opposition qui ne manquerait pas de s'enferrer.

Le secrétaire invita « ces messieurs » à préciser l'objet de la délibération.

— C'est bien simple, dit Brault. Nous allons voter l'annulation de la délibération de l'autre jour.

M. Leplat ricana.

— Elle est approuvée et a reçu un commencement d'exécution.

Brault fut décontenancé, mais Bardoux lui souffla : — Le procès.

Le conseiller reprit : — Le marché que M. le maire a passé avec l'entrepreneur est consenti à des prix dérisoires et ruineux pour la commune. Il est illégal, nous n'avons pas été consultés sur le minimum de prix.

— Bravo ! cria une voix. Le maire a fait racheter les matériaux par son jardinier.

— Hou! hou! hou!


PENDANT CE TEMPS, DE SOLIDES GAS HISSAIENT LA CLOCHE QUI FUT SUSPENDUE A UN MÈTRE DE TERRE

s*


— Si l'on ne fait pas silence, je vais lever la séance! hurla le maire furibond.

— Camarades 1 dit Brault, fier de se voir le héros du jour, je propose un vote de blâme à M. le maire.

— Ouil oui! oui!

M. Leplat était cramoisi, il passa son doigt dans son col pour faire sauter le bouton et ne pas étouffer. Puis, beau lutteur, il se calma: — Formulez votre proposition, dit-il à Brault.

Il croyait ainsi embarrasser son adversaire.

Il avait compté sans Me Théot. Brault sortit un papier de sa poche, le lut, ses collègues approuvèrent, et il le passa au secrétaire.

— Transcrivez, dit-il.

Dehors un mot fut lancé : — Démission!

La foule reprit en clameur : — Démission! Démission!

M. Leplat pâlit, mais demeura immobile.

Brault n'avait pas fini.

— Il faut un autre vote, dit-il, que chacun à l'appel de son nom, réponde devant la population qui est présente et qui nous écoute : « Voulez-vous, oui ou non, la démolition complète de l'église?

— Cette question a été tranchée, je ne la poserai pas, déclara M. Leplat.

— Vous l'avez fait décider par surprise. Je vais en poser une autre: « Voulez-vous la réparation de l'église? »

— Pas aux frais de la commune! cria Chardon.

— Et toi, Lorin ? Devant tes clients, réponds donc!

— Moi?. fit Tutur effrayé, je veux bien ce que tout le monde voudra.

- Aux voix! Aux voix! cria l'assistance.

- La question ne sera pas posée, hurla

M. Leplat en refermant son dossier dans un mouvement de colère. Je me retire.

— C'est cela! Va-t'en! Démission! cria la foule.

Le maire glissa un mot à l'oreille de Chardon qui se leva et prit son chapeau.

— Je me retire également.

M. Leplat porta la main vers son panama et prononça : - La séance.

- Continue! s'écria Brault qui venait de bondir, poussé par le meunier du MoulinVieux. Messieurs, je vous invite à nommer un président pour recueillir les votes.

Leplat, Chardon et le secrétaire échangèrent un regard déconfit. La manœuvre avait raté. Me Théot l'avait sans doute prévue et avait stylé leurs adversaires. Le maire et l'adjoint sortirent par une porte de derrière, et par les jardins gagnèrent la passerelle du gué.

En quelques minutes les conseillers demeurés en séance votèrent le principe de la restauration de l'église, la vérification immédiate de la solidité des poutres demeurées intactes, sa réouverture au culte en cas d'avis favorable de la Commission d'architectes, et la construction d'une cloison provisoire dans la nef, en attendant la restauration de la partie de toiture enfoncée par la chute du clocher.

Le peuple fit une ovation à Brault et à Bardoux, et s'en alla manifester devant le presbytère et auprès de Talvas qui voulut carillonner pour célébrer la libération de la commune.

— Et maintenant, lui dirent quelques amis, tu ne vas pas laisser ton gars épouser la fille de ce renégat de Chardon, démolisseur d'églises.

(A suivre.) J. ROMAIN-LE MONNIER.


SOUVENIRS DU DAHOMEY

LE FÉTICHISME

Hé, hé, Okouo, Okou dagbé Kkoméïon!

Hé, hé, Okouo, Gouno lé To Khoméïon!

Hé, hé, Salut, Grand Salut, ô Khoméïon ! (1) Hé, hé, Salut, Khoméïon, Père des Dahoméens !

L

e crépuscule si rapide de l'Equateur allait tomber sur les rives marécageuses de l'Ouémé où je faisais une

croisière à bord de l'Ambre, lorsque ce chant bien connu parvint à mes oreilles.

Je vis presque aussitôt émerger à la pointe d'un tournant du fleuve une grande pirogue indigène avec, à la proue, le petit drapeau blanc des féticheurs. La pirogue piqua droit sur nous, et, peu d'instants après, mon ami Dovénot, féticheur du Serpent de Gbada, que j'attendais avec tant d'impatience, montait lestement à bord.

Nous échangeâmes rapidement les souhaits de bienvenue, obligatoires au Dahomey, puis Dovénot m'ayant fait un signe d'intelligence, nous passâmes à l'arrière. Dès que nous fûmes seuls : — Le vieux de Togbota t'attendra ce soir, murmura-t-il à voix basse; mais il demande que tu viennes en secret et sans escorte.

— Eïon dagbé! (2) répondis-je, et merci de la bonne nouvelle, Dovénot.

Je désirais, en effet, depuis longtemps, avoir un entretien avec le vieux féticheur de Togbota; mais il s'était toujours prudemment dérobé, sous divers prétextes.

On m'avait dit de lui des choses étranges et qui piquaient vivement ma curiosité.

(1) Khoméïon était le surnom que m'avaient donné les Dahoméens. Il vient de « Khomé, poitrine, cœur » et de « eion, bon ».

(2) « Eïon dagbé, fort bien. »

Je savais qu'il avait autrefois présidé à de nombreux sacrifices humains sur la lagune sacrée où, avant la conquête, des théories de jeunes filles avaient été livrées aux dents aiguës de gigantesques caïmans, fétiches des anciens rois. On disait, d'autre part, que sa science des secrets de la religion fétichiste était profonde, qu'il connaissait le sens mystérieux de ces cérémonies, tantôt burlesques, tantôt terrifiantes, auxquelles j'avais si souvent assisté, mais dont la signification réelle m'avait jusqu'alors échappé. J'exerçais depuis longtemps sur les actes des féticheurs la plus vigilante des surveillances, et c'était bien fini des atroces crimes rituels d'autrefois. Tout se passait, en somme, avec ordre et décence. Mais, si je pouvais, dans ces conditions, laisser les indigènes pratiquer en toute liberté la religion de leurs ancêtres, je n'en sentais pas moins le devoir impérieux que j'avais de me renseigner pleinement sur les secrets de ce culte, mobile et, par suite, atténuation, sinon excuse, de bien des actes que j'étais appslé à juger.

J'avais, je dois l'avouer, échoué en grande partie dans mes recherches. Les féticheurs ont une langue liturgique spé ciale que les indigènes ne comprennent pas plus que nos paysans le latin de l'Église. Les chefs suprêmes gardent, au reste, jalousement le secret des rites, et ce n'est pas là une des moindres causes de l'influence énorme qu'ils exercent. Ils le savent fort bien. Quant aux féticheurs ordinaires, beaucoup sont d'une ignorance crasse et accomplissent souvent avec la plus extrême fantaisie des rites dont ils ignorent le sens réel.

Seuls, quelques rares initiés connaissent les traditions et le but originel des cérémonies d'une religion, barbare aujour-


AVANT LA CONQUÊTE FRANÇAISE : LA PRÉPARATION D'UN SACRIFICE HUMAIN AU DAHOMEY

d'hui, mais que je soupçonnais n'avoir pas été autrefois sans grandeur.

Le vieux grand-prêtre de Togbota pouvait mieux qu'un autre m'éclairer. Aussi est-ce avec une véritable joie que, vers 8 heures du soir, accompagné de Dovénot et de mon fidèle Panhouton, je pris place dans la pirogue qui devait nous conduire de Gangban, où je laissai mon escorte, à la lagune sacrée.

Panhouton était un jeune Dahoméen qui m'avait accompagné partout dans le Bas-Dahomey et jusque dans les hauts pays de l'Hinterland, et qui connaissait à merveille tous les dialectes de la région.

J'avais, pour me contormer au désir du vieux féticheur, revêtu un long pagne indigène et dissimulé mes traits sous un large chapeau de rafia.

La nuit était sombre, mais délicieusement calme. Seuls, les coassements des grenouilles, les sons cristallins des criscrisou les brusques plongeons des caïmans chasseurs en troublaient le silence.

Dovénot et Panhouton pagayaient

vigoureusement. Nous arrivâmes rapidement à Fanvié, et, laissant ce village sur la droite, nous débarquâmes bientôt sur la rive opposée. La pirogue fut ti ée sur le ri vage, et nous nous engageâmes sous les grands arbres de l'épaisse forêt qui s'étend entre l'Ouémé et le Sô. Une demiheure après, nous nous embarquions de nouveau sur le chenal étroit, coupé çà et là de jolis lacs, qui conduit à Togbota.

Quand nous approchâmes du village, quelques ombres se détachèrent du rivage et, après avoir échangé quelques mots avec Dovénot, s'éloignèrent sans bruit.

Pas une lumière ne brillait dans les cases dont les arêtes se profilaient sur le gris argenté d'un léger brouillard. Seuls, quelques cris d'enfants ou l'appel mélancolique des chevreaux indiquaient qu'elles étaient habitées. Mon guide, que j'interrogeai à voix basse, me dit que les tamstams lugubres des féticheurs avaient annoncé aux indigènes que les génies malfaisants étaient déchaînés et erreraient en grand nombre cette nuit-là sur la


lagune. Aussi les noirs restaient-ils dans leurs cases, terrifiés et muets.

Je souris dé cette ruse ingénieuse du -vieux féticheur, destinée, sans doute, à mieux protéger mon incognito.

La lune se leva, étincelante, un peu avant notre arrivée aux grandes cases

fétiches. Elle fut saluée par les hurlements frénétiques des singes sacrés, errant dans les grands arbres. Les mêmes hommes qui nous avaient arrêtés à l'entrée du village vinrent sans bruit nous aider à atterrir et se chargèrent de deux dames-jeannes d'alcool que j'avais apportées en cadeau, suivant l'usage.

Quelques instants après, nous entrions dans une grande case rectangulaire dont les parois étaient revêtues d'images fantastiques grossièrement peintes ou sculptées et barbouillées de couleurs violentes, que laissait deviner plutôt que voir la lueur rougeâtre d'une lampe à huile de palme.

Au fond de la case, sur un large tara

AMAZONE DU ROI BEHANZIN

de bambous, était assis un grand vieillard couvert d'un long pagne bleu, avec, sur la tête, le bonnet blanc des féticheurs, et, au cou, un collier de dents de caïmans, enchâssées de verroteries, sur lesquelles tranchaient, de distance en distance, des touffes de plumes rouges de perroquet.

Ce qui me frappa dès l'entrée, c'était l'étrange immobilité de son corps et de

son visage dont pas un trait ne bougeait.

Ses yeux mêmes étaient fixes et comme dardés sur les miens. La couleur, chose extraordinaire en ce pays, et que je n'ai remarquée que chez de rares indigènes, parvenus à l'extrême degré de la vieillesse, en était nettement bleue, mais d'un bleu

si clair, si passé, si lavé, en quelque sorte, qu'ils eussent semblémorts, si une flamme intérieure intense n'eût incendié le centre des prunelles.

Après les saluts d'usage et la remise des cadeaux, mon guide se retira.

Le vieillard m'indiqua un haut siège en cathèdre, en face de lui, et nous commençâmes à causer.

Savoix était faible, mais distincte. On sentait qu'elle avait dû être autrefois singulièrement harmonieuse.

Je lui dis dans quel but j'étais venu le voir. Je lui racontai mes tentatives pour m'éclairer sur sa religion, sur ses rites et aussi sur ses dieux bizarres qui semblaient inspirer aux indigènes,tantôt

un réel mépris, tantôt une terreur profonde.

Au début de mon exposé, le grand vieillard était resté silencieux et comme figé dans son attitude impassible. Mais, quand j'eus parlé des dieux, il m'arrêta d'un geste. Puis, se dressant et étendari un long bras décharné que bossuaient d'énormes bracelets d'argent et de cuivre :


— Mais il n'y a qu'un dieu, dit-il : Mahou!

Il fit une pause et reprit : — C'est lui qui a créé le monde, le ciel, la terre, tout ce qui existe. Sa puissance et sa bonté sont sans bornes!

Cette déclaration et le ton solennel avec lequel elle me fut faite me plongèrent dans une véritable stupeur. J'avais, en effet, entendu déjà prononcer ce nom

de Mahou, mais j'avais toujours cru qu'il désignait une des nombreuses divinités indigènes. Ici, il s'agissait bien d'un Dieu unique : ce barbare parlait mieux qu'un philosophe de Rome ou de la Grèce antique!

— Eh quoi! lui dis-je. Veux-tu dire qu'il n'est pour vous, féticheurs, qu'un seul dieu?

— Mahou seul est dieu, reprit-il ; mais

FÉTICHES DAHOMÉENS Au premier plan, chef porté en hamac.

— baissant la voix — il n'est pas bon de parler de lui !

Comme je restai muet, cherchant à comprendre le sens de cette phrase mystérieuse, le vieillard se leva.

— Khoméïon, me dit-il, je vois que ces paroles te semblent étranges, mais sors avec moi. Je m'expliquerai par un symbole et tu me comprendras.

Nous fîmes quelques pas au dehors, le long du sentier qui côtoie la* lagune sacrée où la lune étincelait.

— Ecoute, me dit le vieillard, celui qui

a tout créé a en même temps établi pour toutes choses un ordre immuable et bon. Mais vois ce sentier. Eh bien! suppose que, devant toi, un de ces misérables insectes, négligeables et presque invisibles qui rampent ou grouillent autour de nous, se dresse tout à coup sur ses petites pattes et te dise : « Khoméïon, passe à droite, je te prie; Khoméïon, passe à gauche. » Toi qui es blanc et grand chef, toi qui as arrêté ta route, toi qui sais où tu vas et pourquoi, te laisseras-tu détourner de ton chemin par ce chétif,


AUTRES FÉTICHES DAHOMÉENS

ce grotesque? Non, tu feras justice de son outrecuidance : tu le rejetteras du pied dans la poussière et tu passeras. Or, entre l'homme et l'Auteur des choses, la distance est infiniment plus grande qu'entre ce vil insecte et toi. Zommaï! (1) Nos pères l'ont dit, nous devons aimer le Créateur pour ses bontés, nous devons l'honorer dans notre cœur, mais sans nous permettre jamais, nous, infimes, de scruter ses mystères; sans avoir jamais l'audace de lever les yeux vers lui et à plus forte raison de prétendre entrer en communication directe avec lui, même pour le prier. La prière n'est-elle pas, d'ailleurs, une sorte de conseil indirect et, par suite, un sacrilège, un véritable crime de lèse-majesté? Non, nous devons

(1) Zommaï veut dire littéralement « En avant! » On pourrait le traduire ici par « Haut les cœurs ! »

rester vis-à-vis de lui dans le plus humble et le plus respectueux des silences, sans que jamais son nom sacré vienne se poser sur nos lèvres d'esclaves !

Le vieillard prononça ces paroles avec une véritable majesté.

Etait-ce l'effet de l'harmonie de ses gestes, de l'éclat de ses yeux, était-ce le ton inspiré de ce grand vieillard dont la sombre silhouette se détachait si vivement sur l'éclat argenté du lac, était-ce la splendeur du cadre, le charme des nuits étoilées d'Afrique? Je ne sais, mais je comprends mieux quelle fascination pouvait exercer le féticheur sur ses adeptes de couleur. Comment, d'autre part, concilier ces traces évidentes de la vérité primitive, ces croyances pleines d'une incontestable grandeur avec les grossières cérémonies auxquelles j'avais assisté, avec les idoles hideuses devant lesquelles j'avais vu des foules se prosterner.?.


Après un instant de silence : — Si tu n'admets aucun culte vis-à-vis de la divinité, lui dis-je, quelles sont donc ces idoles que l'on rencontre à chaque pas et dont j'aperçois même quelques-unes auprès de tes cases?

J'avais à peine dit ces paroles que la physionomie du prêtre des idoles changea à vue d'œil et du tout au tout.

Ses yeux se plissèrent et prirent une

UN FÉTICHEUR DE SERPENT A OUÏDA ET SON ENFANT PRÉFÉRÉ

expression singulièrement rusée en même temps que moqueuse et cruelle, ses lèvres s'allongèrent en une moue méprisante, et, s'adossant à un arbre, il se mit à rire silencieusement.

Puis : — y égué! (1) fit-il. Tu veux parler des

(1) Yégué! est une interjection très simple comme oh! ah! etc., et dont le sens varie selon l'intonation.

fétiches et des legbas. De ceux-là on peut causer.

Et sans me laisser le temps de l'interroger: — Rentrons, fit-il. C'est le moins de nous asseoir pour parler de ces bandits.

D'ailleurs, je ne serais pas fâché de voir ce qu'il y a dans certaines dames-jeannes que j'ai reluquées tout à l'heure.

Nous revînmes à la case. Il frappa dans ses mains, et sans qu'il fût besoin d'autres indications, un domestique, qui connaissait sans doute merveilleusement les goûts de son maître, vint aussitôt ouvrir une des dames-jeannes.

Celle-ci était pleine de cet alcool de traite de 93° que l'on ramène à un degré normal en y ajoutant deux ou trois fois son volume d'eau.

Mais le vieux féticheur n'avait cure d'une telle profanation. Il fit remplir du liquide brûlant une calebasse et lampa le tout sans sourciller, en ayant soin cependant de m'adresser aux dernières gouttes la plus abominable des grimaces, ainsi que le veut le code de politesse du Dahomey.

La qualité d'une eau-de-vie, pour les Dahoméens, se mesure, en effet, à sa force, et la grimace finale, obligatoire pour un homme de bonne éducation, doit être proportionnée à l'action plus ou moins brûlante produite sur le gosier.

A en juger par les contorsions du vieillard, mon eau-de-vie devait être exquise et lui un homme d'une politesse raffinée.

Nous reprîmes notre causerie : — Khoméïon, me dit le vieillard, les fétiches sont innombrables, comme les maux qui nous affligent, dans l'ordre moral aussi bien que dans l'ordre physique. C'est ainsi que la foudre, la peste, la petite vérole, le meurtre, le mensonge, l'adultère, etc., sont les oeuvres de ces mauvais génies. C'est par eux que le mal est venu sur la terre.

Je l'interrompis : — Mais tu me disais tout à l'heure que tout ce qui existe est l'œuvre de


PROCESSION DE FÉTICHEUSES DAHOMÉENNE

Mahou. Comment expliques-tu que lui très bon ait pu créer ces maudits et par eux le mal ?

Le front du vieillard s'assombrit : — Ne parlons pas de lui.

Il reprit après un instant de silence : — Ne t'ai-je pas dit que nous n'avions pas à scruter ses desseins mystérieux? Je ne comprends pas plus que toi pourquoi il a créé les fétiches, mais lui le sait, et on oeuvre est bonne, puisqu'il est la bonté. Les fétiches existent, c'est tout ce que j'ai à savoir.

— Parle-moi donc d'eux seuls.

— Eh bien! reprit-il, les fétiches sont des êtres méchants, mais très supérieurs en puissance aux hommes. Ils sont invisibles et volent çà et là dans l'espace, avec la rapidité de la foudre. Le sommet des grands arbres est leur demeure préférée. C'est à leur faîte qu'ils trônent, comme des oiseaux de proie guettant leurs victimes.

— C'est donc eux que j'ai vu représenter sous forme de statues grossières et hideuses au pied des arbres élevés?

— Non. On ne peut représenter l'invi-

sible. Ces statues représentent des legbas, c'est-à-dire les serviteurs visibles des fétiches. Il serait inconvenant et mauvais de s'adresser directement aux fétiches.

C'est sur les legbas que nous déposons l'huile ou le sang des sacrifices; ils sont nos intermédiaires.

— Pour prier les fétiches?

Le vieux féticheur se mit à ricaner.

—Ehnon ! fit-il. Autrefois, en effet, dans les temps très reculés, nos pères avaient la naïveté de prier des fétiches; mais plus ils les priaient, plus ceux-ci les accablaient de maux. C'est alors qu'un grand prophète nommé Covénot, qui fut le fondateur de la ville qui porte ce nom (i), enseigna à nos ancêtres comment il fallait s'y prendre pour éviter leurs maléfices. C'est lui qui fut le vrai fondateur sinon de notre religion, du moins de ses rites publics. Il réunit un jour une foule nombreuse et s'étant muni d'un chevreau il se rendit droit à l'arbre où trônait un

(1) Covénot est un village situé à quelques kilomètres de Zagnanado, ancien palais d'été des rois du Dahomey et où existe encore un collège de féticheurs, célèbre dans tout le pays.


des fétiches de la petite vérole. Là, il égorgea le chevreau et badigeonna soigneusement la tête du legba d'huile de palme et du stng de la victime. Il y colla aussi quelques touffes du poil de la bête.

Puis, s'adressant au legba, il lui dit : « Legba, dis à ton maître ce que je viens de faire. Dis-lui aussi que je lui offre ce sacrifice pour qu'il m'épargne la petite vérole. Mais écoute bien ceci : Je sais que ton maître est d'une incorrigible méchanceté. Je sais qu'au lieu de m'être

reconnaissant de ce que je viens de faire, il doit, en ce moment, obéissant à sa nature mauvaise, ricaner et dire : «Tiens!

j'avais donc oublié Covénotl Je devine qu'il s'apprête à me lancer son affreuse maladie! Mais qu'il y songe : à partir de ce jour, il y a quelque chose de changé ici. Oui, en vérité, nous ne serons plus aussi naïfs que nos ancêtres. Si ton maître m'envoie le mal dont il est le dispensateur, je ne lui offrirai plus de sacrifices, et le peuple qui m'entoure pas davantage.

DANSE DE FÉTICHEURS DAHOMÉENS

Ses autels deviendront déserts et les autres maudits, ses frères, qui habitent dans les arbres voisins, se gausseront d'un fétiche délaissé et sans culte. Si, au contraire, il m'épargne, mon peuple et moi nous lui apporterons fidèlement notre dîme. Ses autels regorgeront de sacrifices, et ce sera à ses maudits collègues de crever de jalousie. » C'est ainsi que Covénot jeta les bases de notre religion et nous apprit à détourner de nous les maléfices des fétiches.

Cette seconde partie de mon entretien avec le vieux féticheur de Togbota m'amusa autant que la première m'avait étonné. Quel mélange surprenant d'idées élevées, désintéressées, généreuses, et de pensées triviales et d'une roublardise si naïve! J'avais, en tout cas, la clé de l'énigme qui m'avait tant intrigué.

— C'est fort ingénieux, dis-je au vieillard. Covénot vous a enseigné à prendre tout bonnement les fétiches par leur faible, qui me semble être la vanité!


— C'est, je crois, celui de toutes les créatures, ricana le vieux féticheur. C'est, en tout cas, celui des noirs. Et si tu veux bien me permettre un conseil, Khoméïon, en souvenir de cette causerie, emploie vis-à-vis de tes administrés le truc de Covénot, et tu en feras cequetu voudras.

C'est aussi ma recette, fit-il en clignant de l'œil.

Je ris de bon cœur à cette boutade.

Puis : — Une dernière question, lui dis-je : le Créateur, en même temps que les mauvais génies, n'a-t-il pas créé de bons fétiches qui sont les dispensateurs du bien comme les autres le sont du mal?

— Oh! il en existe des légions! Mais, reprit-il avec un malin sourire, nous les connaissons beaucoup moins.

— Vous leur rendez cependant un culte ?

— Mais non, fit-il d'un air détaché.

Pourquoi prendrions-nous cette peine?

Il est dans leur nature de faire le bien, nous les laissons faire.

— Sans même les remercier?

— Peuh. Buvons plutôt, dit-il, en tendant sa calebasse à son serviteur!

Le pauvre théologien avait épuisé toute sa science et le rigide ascète me donnait la mesure de sa vertu.

La nuit était avancée. Je fis mes adieux au vieillard avec qui j'eus d'ailleurs, plus tard, de longs entretiens.

Mes compagnons et moi, nous reprîmes notre pirogue et traversâmes rapidement la nappe étincelante de clarté de la lagune.

A peine étions-nous entrés sous la voûte sombre des arbres du chenal que nous entendîmes, derrière nous, sonner de joyeux tams-tams. Les féticheurs avaient sans doute levé l'interdit et annoncé que les mauvais génies avaient regagné leurs repaires. Et prêtres et gens du village avaient fusionné pour fêter mes damesjeannes et danser au clair de la lune.

R. PERREUR D'ALBRET, ancien résident du protectorat de Porto-Novo (Dahomey).


- - à

Aux soldats.

L'honneur est grand de vous parler, à cette heure où vit en vous toute l'âme de la France.

Il est grand surtout pour le vétéran de la guerre douloureuse, dont le coeur, meurtri par l'inoubliable blessure, bat, à grands coups, d'espérance et de fierté, en saluant les vengeurs de la patrie.

Qui de vous, depuis le général en chef jusqu'au simple soldat, ne porte en lui, gravée par l'histoire de sa race, l'image de la patrie, terre des pères, ensemble sacré de nos demeures et de nos champs, mère des vivants et gardienne

etc ALBEKT DE MUN (1841-1914)

des morts, chérie d'un instinctif et puissant amour!

C'est elle que vous allez venger des coups affreux qui l'accablèrent, il y a quarante-quatre ans, et de la plaie saignante ouverte à son flanc!

C'est elle que vous allez venger des injures, dont l'insolence germanique l'a si longtemps ou-

tragée, et de la perpétuelle menace suspendue sur sa vie par le sabre allemand.

Votre mission sainte est plus haute encore.

Une fois de plus, les soldats de la France combattent pour la civilisation du monde et pour la liberté. La victoire allemande ne serait pas seulement l'anéantissement de la France, courbée sous un joug de fer: ce serait l'Europe elle-même livrée à la dure domination de la force brutale désormais maîtresse souveraine de la terre et des mers.

C'est pourquoi, soldats, vous êtes debout, et l'Europe est debout avec vous, soulevée contre la tyrannie de l'empire allemand, impatiente de son joug, révoltée de l'horrible barbarie qui déshonore déjà ses armées, révélation sang'ante de celle qui couve sous son apparente culture.

Vous écrivez la page la plus illustre de l'histoire. Grandissez vos cœurs à cette pensée et laissez-la remplir vos âmes du grand souffle qui fit, à travers les siècles, notre nation glo-

rieuse entre les nations. Derrière vous, la patrie, fraternellement unie, vous soutient de sa confiante admiration. Devant vous, l'Alsace et la Lorraine, torturées depuis quarantequatre ans, vous appellent d'un cri passionné.

A côté de vous, les Belges, couverts d'honneur par leur résistance héroïque, les Anglais, pressés par le noble souci de leur grandeur nationale, vous tendent les mains et joignent leurs armes aux vôtres. A l'orient de l'Europe, les Russes, provoqués par l'orgueil allemand, viennent à votre rencontre, pendant que les Serbes, avecun courage indomptable, tiennent l'Autriche en échec.

Jamais plus grand spectacle ne s'offrit au monde. Vous êtes, dans ce drame immense, les premiers exposés au choc formidable. Sur vous s'appuie l'avenir de l'Europe. C'est votre gloire.

Pour la soutenir, vous souffrirez. Ce n'est pas l'heure solennelle du combat qui sera la plus rude. Quand elle sonnera, l'élan de la race et la force de l'éducation militaire vous emporteront tout entiers. Car vous êtes des braves.

Mais écoutez le vieux soldat qui vous parle.

Le courage de chaque jour est plus difficile que la bravoure du combat. Donner sa vie à toute heure, dans le sacrifice ignoré, dans la discipline joyeuse, dans les marches dures et longues, les bivouacs pénibles, la faim, la soif et la fatigue, voilà ce qui fait les soldats invincibles.

Soyez ces héros. La France compte sur vous! Le monde vous regarde! En avant, pour la patrie et pour la liberté!

ALBERT DE MUN.

(Bulletin des armées de la République, 18 août 1914.) Le oœu de Vivicq.

Vivien fut élevé dans le château de son oncle Guillaume et de sa tante Blanchefleur.

Son temps se partageait entre le cheval, le maniement des armes et les exercices de dévotion.

Il se représentait la terre divisée en deux camps : les chrétiens, amis de Dieu ; les païens, ses ennemis; en haut, Dieu, la Vierge et l'assemblée des saints se penchant sur le monde et s'intéressant à la lutte, et parfois y intervenant par des miracles.

Vivien était délicat de visage et blanc de peau comme une fille, avec des muscles plus durs que l'acier. Il unissait la piété d'un petit


moine à la bravoure d'un chevalier coureur d'aventures. Et il se préparait à la chevalerie comme à un sacrement.

Lorsque Vivien, à genoux devant son oncle Guillaume au Court-Nez, eut reçu de lui l'accolade, il se leva et dit : — Bel oncle, je fais un voeu. Devant dame Blanchefleur, ma tante et marraine, qui m'a si tendrement nourri, devant vous, devant tous vos pairs, je promets à Dieu que, de toute ma vie, je ne reculerai d'un pas en face des païens.

— Voilà, fit doucement Guillaume, un serment malencontreux. Il n'est homme si brave qui ne fuie quand on le serre de trop près.

Moi-même, dans la bataille, je n'attends pas d'être mortellement blessé. Beau neveu, il faut avoir souci de soi pour aider les autres.

Et la fuite est bonne qui sauve la vie.

— Oncle Guillaume, sachez-le bien, jamais, devant Persans, Turcs ou Sarrasins, je ne céderai d'un pas. J'en fais la promesse au Maître du ciel.

— Alors, mon pauvre petit, tu ne vivras guère!

Dame Blanchefleur s'était mise à pleurer : — Mon enfant, dit-elle, tu nous prépares un grand chagrin.

— Marraine, j'ai juré, et je ne peux ni ne veux m'en dédire.

— Le Pape de Rome pourra te délier de ton vœu.

— Le Pape de Rome est loin. Et il ne me déliera pas contre mon gré.

— Adieu donc, beau neveu. Je prierai doublement pour toi.

Peu de temps après, Vivien décida son oncle Guillaume, ses six autres oncles et tous ses cousins à partir ensemble, avec dix mille vassaux, à la recherche des païens. Car, pour lui, la vie du chevalier, c'était d'avancer sur la terre le royaume de Dieu.

Ils guerroyèrent en Espagne pendant sept ans. Jamais Vivien ne transgressa son vœu.

Jamais il ne recula d'un pas. Une fois, dans la mêlée, plutôt que de reculer, il sauta pardessus les oreilles de son destrier et retomba sur le cheval d'un chef sarrasin : de quoi ce païen fut à ce point surpris que Vivien l'égorgea sans difficulté.

Ils revinrent au pays de Provence et, pour se reposer, plantèrent leurs tentes en Aliscans.

Un matin, ils virent aborder une flotte sarrasine qui jetait en quantité, sur le rivage, des soldats noirs comme des diables. Les chrétiens étaient las d'une si rude guerre. Les païens paraissaient innombrables. Mais Vivien dit à ses compagnons : — N'ayez pas peur de ces mécréants, que Dieu n'aime guère. Plusieurs de nous mour-

ront ici, mais au paradis s'en iront leurs âmes. D'ailleurs, si nous ne fuyons pas, Dieu sera pour nous.

— Neveu, dit Guillaume, c'est une folie.

Les païens sont trop. Nous ferions mieux de nous en aller.

— J'ai fait, répondit Vivien, le vœu de ne jamais fuir.

— Ce n'est pas fuir, dit Guillaume, que de refuser la bataille.

— Faites ce que vous voudrez, dit Vivien.

Je resterai ici à cause de mon vœu.

— Et moi, je resterai à cause de toi, dit Guillaume.

— Et nous aussi, dirent les autres preux.

La ligne noire des païens s'avançait sur le sable jaune.

Les sept oncles de Vivien s'embrassèrent.

Suivis de leurs vassaux, ils allèrent à la rencontre des Sarrasins. Et ils se tenaient, autant qu'ils le pouvaient, autour de Vivien, pour lui rendre moins difficile l'accomplissement de son vœu. Car l'obligation de ne jamais reculer d'un pas exposait l'enfant à des coups plus nombreux et plus rudes. Déjà, il était couvert de blessures. Son sang coulait par maintes fêlures de son heaume et par maints trous de sa tunique de mailles.

A un moment, comme il ferraillait avec l'émir Déramé, son cheval fit un écart, et comme Vivien présentait le flanc, l'émir en profita pour lui trouer le poumon d'un coup de lance.

Mais l'enfant se retint à l'encolure du cheval, qui l'emporta hors de la mêlée et le déposa, dans la campagne, au bord d'une fontaine, à l'ombre d'un grand chêne rond.

Or, les païens étaient vaincus. Mais Guillaume ayant perdu de vue son neveu, le cherchait avec angoisse. Il le découvrit enfin au bord de la fontaine et il le crut mort.

Il se mit à genoux, le baisa sur la bouche.

Puis il posa la main sur la poitrine de l'enfant et sentit la vie sauteler au cœur.

— Neveu, vis-tu encore?

Vivien ouvrit les yeux.

— Oui, mais j'ai bien peu de force.

Oncle Guillaume, puisqu'il n'est pas ici de chapelain, confessez-moi, car je vais mourir.

Et l'enfant, mains jointes, commençi à dire ses péchés.

— Oncle, lorsque je pris les armes, je promis à Dieu de ne jamais fuir. Or, je crains d'avoir reculé un peu, tout à l'heure.

De combien, je ne sais pas. Mais j'ai bien peur d'avoir faussé mon vœu.

— Rassure-toi, dit Guillaume, je te regardais à ce moment-là. Ton cheval s'est porté de côté, mais non pas en arrière.

— Oncle, j'ai bien peur d'avoir reculé, et


cela me désespère. Mais je prie le Seigneur Jésus de me pardonner en considération de ma mort.

Mais Vivien ne mourut pas cette fois Transporté au château d'Orange, sa tante et marraine Blanchefleur le soigna si bien que ses blessures guérirent.

Un soir qu'il était auprès d'elle dans sa chambre : — Tante, lui dit-il, je crois que je pourrai bientôt repartir en guerre.

— Tu es trop faible encore, dit Blanchefleur. Et puis, n'as-tu pas assez fait pour la cause de Dieu ?

— Je n'aurai pas assez fait tant qu'il me restera une goutte de sang et un souffle de vie.

— Mais n'es-tu pas las de tuer des hommes et encore des hommes, toi qui es d'âme si douce et qui ressembles à une petite fille?

— Il est vrai que je suis courtois avec mes pairs, charitable aux pauvres gens, équitable pour tous, et que je n'ai jamais fait de mal à aucun chrétien. Mais je suis ainsi parce que je connais la loi divine. Je dois donc travailler à imposer cette loi et à exterminer ses ennemis.

— Il y a peut-être aussi, dit Blanchefleur, des païens courtois et charitables.

— Cela me paraît impossible, dit Vivien; mais, si cela est quelquefois vrai, Dieu leur en tiendra compte.

— Si encore, reprit Blanchefleur, tu n'avais pas fait ce vœu, qui augmente pour toi les chances de mort.

— Un chevalier doit être plus brave que les autres hommes, et je voudrais être plus brave que tous les chevaliers.

— Mais c'est de l'orgueil, Vivien!

— Non, marraine, puisque c'est Dieu qui m'a inspiré cette pensée. Et puis. vous êtes ma dame, et c'est aussi en pensant à vous que j'ai fait ma promesse. Je veux que vous soyez fière à cause de moi.

— Fière, je le suis. mais si angoissée!

Hélas! ton pauvre petit corps est déjà tout raviné de cicatrices.

— Il y a encore de la place pour de nouvelles blessures, s'il plaît à Dieu. Et vous les guérirez, marraine.

— Vivien, mon doux enfant, ne m'abandonne plus.

— Marraine, ne pleurez pas, car vos pleurs me font mal sans changer ma volonté.

— Si tu repars, mon Vivien, tu ne reviendras plus jamais.

— Cela se peut bien. Mais qu'importe ? Cette vie d'expiation n'est que transitoire. La vie parfaite est ailleurs. Vous prierez pour moi, marraine?

— Jour et nuit, Vivien.

— Je pourrai donc me dire, toutes les fois que je serai dans un grand danger, que, à ce moment-là même, vous pensez à moi?

- Certes, tu le pourras.

- Alors, marraine, je partirai bien tranquille.

Il partit en effet, avec ses oncles et leurs vassaux.

Ils allèrent jusqu'en Afrique, et, dans le désert, un jour de grande chaleur, ils rencontrèrent l'armée sarrasine.

Le choc fut rude. Les oncles de Vivien l'entouraient et le secouraient de leur mieux, pour qu'il pût tenir sa promesse. Mais il vint un moment où Vivien, faible encore de ses blessures, et pressé par un géant païen semblable à une tour, ne put plus ni avancer ni

même rester en place. Il fallait reculer ou mourir.

— Je vais donc mourir, se dit l'enfant.

Mais il gardait un peu d'espoir, parce qu'il songeait que dame Blanchefleur, en cet instant, priait pour lui dans l'ora- toire de son château d'Orange.

Tout à coup, une clameur d'effroi s'éleva ds rangs ennemis.

JULES LEMAÎTRE (1853-1914)

C'est que les Sarrasins venaient d'apercevoir, au-dessus de l'armée des chrétiens, une autre armée aux formes plus grandes et plus redoutables.

Aux cris poussés par ses compagnons, le géant païen se retourna, vit qu'ils regardaient en l'air, et aperçut à son tour l'armée aérienne.

Vivien put avancer d'un pas. Bientôt l'épouvante saisit les païens. Les chevaliers chrétiens les poursuivirent et en firent un grand carnage.

Et ainsi, une fois encore, Vivien tint son serment.

Un clerc expliqua dans la suite qu'on avait vu quelquefois se produire au désert, par l'effet de la grande chaleur, des illusions pareilles à celle qui avait effrayé les Sarrasins.

Mais il plut davantage à Vivien de croire que Dieu avait fait un miracle pour lui et que ce miracle était dû aux prières de sa marraine.

JULES LEMAÎTPE.


Les Nouveaux Livres Nous ne rendons compte que des ouvrages dont il sera envoyé deux exemplaires à M. le Directeur du Mois littéraire et pittoresque, 5, rue Bayard, Paris, VIIIe.

ACTUALITÉS PATRIOTISME ET ENDURANCE, LETTRE PASTORALE (Noël 1914, par le cardinal D.-J. MERCIER, archevêque de Malines, primat de Belgique. — In-12, 32 pages, 0 fr, 10; port, 0 fr. 05. Maison de la Bonne Presse, Paris, 5, rue Bayard.

Edition élégante et bon marché d'un document remarquable, qui a fait l'admiration de tous, même des ennemis du catholicisme, et dont la publication fut un des gestes les plus courageux enregistrés par l'histoire de ces sept derniers mois. J. D.

QUI A ÉTÉ L'INSTIGATEUR DE LA GUERRE ?

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En six chapitres très clairs, l'auteur démontre successivement que le clergé français n'a pas été l'instigateur d'une guerre voulue et préparée par l'Allemagne, pas davantage les religieux ni même les Jésuites, non plus que le Pape, et que l'Allemagne, par son hostilité contre l'Eglise, justifierait celle-ci de toutes les attaques dont elle est l'objet. Livre populaire à répandre.

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Le titre de ce petit mois de saint Joseph indique la manière dont le sujet a été envisagé par l'auteur. Pour chaque jour, une courte lecture ou sujet de méditation s'offre au lecteur, suivie d'un trait et d'une prière. Un cantique inédit, des litanies de saint Joseph et deux prières complètent cet opuscule. X. X.

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COMMENT LE RAIL A VAINCU LA DISTANCE ET L'ALTITUDE, par MARCEL HÉGELBACHER. Un vol.

grand in-8' de 108 pages à deux colonnes; nombreuses illu trations (N uvelle Bibliothèque pour tous: Collection scientifique). Broché, 1 franc; port, 0 fr. 20. Relié, 1 fr. SOt; port, 0 fr. 30. Maison de la Bonne Presse, 5, rue Bavard, Paris.

Le chemin dé fer est, de toutes les inventions moderne, celle qui a amené les plus grandes perturbations dans les conditions de l'existence humaine. On reste stupéfait des progrès accomplis par ce moyen de locomotion quand on songe qu'il y a cent ans il n'y avait pas encore une ligne ferrée assurant le transport des personnes. A l'heure actuelle, le chemin de fer se rencontre partout, au sommet des montagnes les plus élevées, sous les océans, au milieu des déserts les plus affreux; le rail a vaincu la distance et affronté avec succès tous les éléments terrestres, et c'est d'un grand intérêt et d'une g ande instruction que de parcourir, guidé par un ingénieur aussi simplement aimable que discrètement savant, aussi au courant de toutes choses que l'est M. Marcel Hégelbacher, les diverses étapes de cette conquête de la terre par le chemin de fer, depuis les origines jusqu'aux plus étonnants perfectionnements modernes, jusqu'aux plus monstrueuses locomotives, jusqu'aux plus effarants rapides, qui nous entraînent à travers le monde avec une vitesse à faire frémir, et dont la seule vue nous emplit d'émotion.

Les exposés techniques de cet historique sont rendus compréhensibles pour tous par la parfaite clarté de l'auteur, qui s'est ingénié avant tout à se faire goûter, à se faire comprendre, à instruire utilement et pratiquement. De nombreuses reproductions d'admirables documents photographiques, extrêmement variés et saisissants, ajoutent à l'intérêt du texte, qui est déjà très grand. I. W.

A CELLES QUI PLEURENT, par le chanoine STANISLAS GAMBER, docteur ès lettres. Un vol. in-8°, o fr. 60. F. Guiraud, éditeur, 7, quai du Canal, Marseille.

En ces belles pages, toutes pénétrées des enseignements de l'Evangile et de la doctrine de l'Eglise sur la douleur et sur la mort, ces pauvres cœurs meurtris trouveront la parole de réconfort, de consolatio 1 et de surnaturelle expérience dont ils ont besoin et à laquelle nous sommes sûrs qu'ils feront le meilleur accueil. L. C.


POCHETTE DU CONSCRIT FRANÇAIS. Un vol.

in-18 de 64 pages, 12° édition soigneusement, revue.

Franco, 0 fr. 20; 5o ex. franco, 6 fr. 95; 100 ex. franco, 12 fr. 15 (Lyon-Paris, librairie Emmanuel Vitte).

« Voilà un opuscule, écrivait naguère Mer Déchelette, qu'il faudra mettre entre les mains de tous nos jeunes soldats. Tout ce qu'il renferme est juste, sage et parfaitement approprié à l'état militaire. De tels conseils sont le fruit de l'expérience, et nous les croyons appelés à faire beaucoup de bien. »

L'ami et le conseiller si autorisé de nos jeunes conscrits, M. R. Bazoncourt, s'exprime ainsi à propos de ce manuel : « En soixante pages, l'auteur donne aux conscrits les plus sages avis agrémentés d'anecdotes et de traits empruntés à la vie du soldat. Et le jeune homme qui quitte sa famille pour se lancer dans l'inconnu n'aura qu'à suivre, point par point, ces conseils paternels, simplement présentés par un prêtre pour qui l'existence militaire n'a pas de secrets. Il s'en trouvera bien. Rien n'a été omis par l'auteur de cette Pochette dont la place est marquée dans la valise de tout soldat chrétien. »

Son mérite a d'ailleurs été reconnu, par de nombreux officiers supérieurs parmi lesquels il nous plaît de citer les généraux Zédé, P. Lo- gerot, de Geslin de Bourgogne, et par tous ceux, prêtres ou laïques, qui se préoccupent des intérêts religieux et de la santé morale des soldats de France. X. R.

ARMÉE ET MARINE

LES MANŒUVRES DU SUD-OUEST EN 1913.

8 francs. Lavauzelle, 10, rue Danton, Paris. Les grandes manœuvres qui se sont déroulées, en 1913, dans la région du Sud-Ouest ont donné lieu, enleurtemps, àde nombreuses controverses.

M. Marty-Lavauzelle, breveté d'état-major, rédacteur en chef de la France militaire, qui les a suivies de près, a recueilli dans ce volume ses impressions et les réflexions qu'elles lui ont suggérées.

Sans songer aucunement à rouvrir la polémique qui fut ouverte sur ce sujet, M. Marty-Lavauzelle fait ressortir que les dernières manœuvres d'armée ont marqué ua très grand progrès au point de vue de l'organisation, de la conception et des grandes lignes de l'éxécution, et qu'elles ont consacré le fruit de cinq années d'expériences.

Une des conclusions à tirer de cet important travail, c'est l'obligation, pour l'avenir, de renoncer définitivement aux manœuvres d'armée truquées ou tronquées qui, limitant l'effort, préviennent la faute. Or, c'est la faute qui est instructive..

Une grande carte d'ensemble en couleurs et trois, cartes hors texte rendent très facile la lecture de ces pages, qu'éclairent encore agréablement pour l'œil neuf portraits de généraux ayant pris part à ces manœuvres. A. Z.

ART TRISTAN ET ISOLDE, drame musical en trois actes, par RICHARD WAGNER traduit en prose, par J. G. Prod'homme, 1 fraac. Société d'édition Muller, 38, rue des Ecoles, Paris,

Bonne traduction (avec le texte allemand en regard) du célèbre drame de Wagner. Une notice biographique sur l'auteur de Tristan et une notice historique sur l'œuvre elle-même, notices à notre gré un peu trop enthousiastes, constituent des compléments utiles. S. L.

BIOGRAPHIE PANÉGYRIQUES DE SAINTE CLOTILDE, par G. GASTAMBIDE, vicaire à Sainte-Clotilde. Un vol. in-8°, 4 francs. Bloud, 7, place Saint-Sulpice, Paris.

Vicaire à Sainte-Clotilde depuis 1879, M. l'abbé Gastambide a voué à la basilique le plus grand attachement, et une partie de son activité s'est dépensée à recueillir des documents sur sainte Clotilde, reine de France et patronne de la basilique. C'est ainsi qu'il édite aujourd'hui des panégyriques prononcés en l'honneur de la Sainte : tour à tour Mgr Freppel, l'abbé Perreyve, le chanoine Perdreau, Mtr d'Hulst, le R. P. Terrade, MI Demimuid et MI Rumeau ont célébré sainte Clotilde. Leur éloquence variée charmera le lecteur. E. G..

VIE POPULAIRE DE SAINT FRANÇOIS XAVIER, par A. BROU, i fr. 50. Gabriel Beauchesne, 117, rue de Rennes, Paris.

Aujourd'hui, dans les pays de mission, l'Eglise compte plusieurs millions de fidèles, dans plus de cent diocèses et vicariats apostoliques. Elle emploie par milliers des prêtres, des religieux, des religieuses. Ses progrès sont visibles d'année en année. Or, le point de départ de ce développement aux Indes, en Chine et au Japon, c'est l'apostolat de saint François Xavier. L'auteur n'en dessine dans ce récit souverain que les lignes maîtresses; mais combien apparaîtra intéressante, suggestive et édifiante cette histoire du grand missionnaire! Le lecteur français qui aime les tableaux de dévouement et d'héroïsme sera servi à souhait. E. G.

LA DERNIÈRE COMMUNION DE JEANNE D'ARC, par ELIE. MAIRE. Brochure, 0 fr. 60. De Gigord, 15, rue Cassette, Paris.

L'auteur, après avoir recherché la part d'influence eucharistique dans la formation de la Sainte, essaye d'attribuer à l'Hostie son rôle sublime dans l'éducation de la martyre.

A. Z.

LE P. CLAUDE BERNARD DIT LE PAUVRE PRÊTRE (1588-1641). Un vol. in-12 ill. P. Lethielleux, 10, rue Cassette, Paris.

Tel est le titre d'un fort beau livre récemment édité par la maison Lethielleux. M. le commandant de Broqua, camérier secret de cape et d'épée de Pie X et postulateur de la cause du pauvre prêtre, a fait une œuvre de véritable résurrection en révélant aux catholiques d'aujourd'hui la noble figure de Claude Bernard qui fit, par l'héroïsme de sa charité, l'admiration de son siècle.

Approuvée par les diocèses de Paris et de Dijon, précédée d'une belle préface de M" Monestès, l'œuvre se présente sous les auspices de Pie X, qui a daigné accorder à cette étude une bénédiction autographe. L. C.


LES GRANDS HOMMES DE GUERRÈ: *NAPOLEON, par le lieutenant-colonel J. COLIN. Un vol.

in-18, de 178 pages avec 8 planches hors texte, 1 fr. 50.

Chapelot, 30, rue Dauphine, Paris.

Le troisième volume de la Collection des grands hommes de guerre vient de paraître. Il rencontrera auprès du public le même succès qui a accueilli déjà l'apparition des deux premiers volumes : Murat et Davout.

Il fallait la plume particulièrement compétente d'un écrivain militaire de la valeur du lieutenantcolonel J. Colin pour camper en pleine lumière la figure du grand empereur et pour retracer en moins de 200 pages les étapes de sa prestigieuse existence.

Non seulement les premières années de la carrière du général Bonaparte et ses premiers succès, les grandes victoires, puis les revers de Napoléon, y sont traités avec une incomparable maîtrise par un écrivain dont les travaux font actuellement autorité en la matière, mais les qualités militaires de l'empereur, ses procédés de commandement et les caractéristiques de la guerre napoléonienne y sont merveilleusement exposés.

Mettant à la portée du grand public, sous une forme facile et attrayante, le résultat des études historiques et militaires des dernières années, le petit livre du lieutenant-colonel J. Colin constitue une œuvre de vulgarisation de valeur qui ne peut manquer de rencontrer dans tous les milieux le plus grand succès. X. R.

LE DERNIER JOUR DE NAPOLÉON A LA MALMAISON (29 JUIN 1815), pièce en 1 acte en prose par HENRY, HOUSSAYE. Un vol. in12, 1 franc. Perrin, 35, quai des Grands-Augustins, Paris.

Cette œuvre posthume du regretté historien Henri Houssaye a de réelles qualités dramatiques. L< C.

VICTORIA, par HENRI COLLET. Un vol. in-8° écu de 208 pages, 3 fr. 50. Alcan, 108, boulevard Saint-Germain, Paris.

Donner une histoire documentée d'un artiste qui fut au XVIe siècle le rival de Palestrina; situer son œuvre et l'analyser pour en faire aimer la forte saveur ainsi que les hardiesses annonçant l'art moderne; restituer enfin à la mâle figure du vieux mystique espagnol sa fruste beauté, tel est l'objet de cet ouvrage qui contribuera à faire connaître et aimer davantage du public français Victoria, appelé improprement jusqu'ici, à l'italienne, Vittoria.

HISTOIRE LE BOIS CHENU DE DOMREMY-LA-PUCELLE.

par EDMOND STOFFLET. Crépin-Leblond, 21, rue SaintDizier, Nancy.

Petite brochurette sur l'interrogatoire de Jeanne d'Arc : la signification du mot Bois Chenu et quelques mots sur les bois sacrés.

LE PATRIOTISME : PAUL DÉROULÈDE, par le P. A. GAFFRE, o. fr. 60. Librairie catholique; 1, rue du Palais, Nice.

Cette conférence du regretté P. Gaffre a été donnée à Nice, le 12 mars 1914. Elle chante avec

une éloquence vibrante et passionnée la grandeur de l'idée de patrie, incarnée, selon le mot de l'auteur, dans Paul Déroulède. E. G.

LES DERNIÈRES FLEURS DE LYS, par CHOISEUL GOUFFIER (A. de Faucigny-Lucinge). Un vol. in-18, orné de 6 gravures, 3 fr. 50. Emile-Paul, 100, rue du Faubourg Saint-Honoré, Paris.

M. de Faucigny-Lucinge a pu faire état, pour écrire cet intéressant volume, non seulement de ses nombreuses études historiques antérieures de ses propres souvenirs, mais encore de précieuses archives de familles. Elle nous y donne sur le duc de Berry, sur la fin de la monarchie bourbonienne, sur une visite qu'elle fit à Frohsdorf des vues curieuseset neuves. Elle ne cherche d'ailleurs à aucun moment à dissimuler ses sentiments personnels, ce qui donne une saveur particulière à ses œuvres, mais ce qui ne permet pas toujours d'accepter ses jugements sans réserve. Mais encore une fois ce livre est un intéressant et utile ouvrage d'histoire. R. N.

CINQUANTE ANS DE SOUVENIRS (1859-1909), par le comte DE MAUGNY, ancien officier d'ordonnance du roi Victor-Emmanuel II, ancien chargé d'affaires de France en Perse, avec une préface de M. RENÉ DOUMIC, de l'Académie française. Un vol. in-16 de 318 pages, 3 fr. 50. Plon-Nourrit, 8, rue Garancière, Paris.

Cinquante ans!. c'est une belle période dans une vie humaine. Lorsque celui qui les a vécus s'est trouvé dans un poste favorable pour observer les événements contemporains, ses Souve- nirs sont évocateurs de beaucoup d'impressions oubliées et d'anecdotes inconnues. Non seulement M. le comte de Maugny s'est trouvé dans des conditions heureuses pour observer gens et choses, mais il possède un vrai talent d'écrivain.

Il est du pays de saint François de Sales et de Joseph de Maistre. Aussi quel défilé intéressant de noms célèbres, de faits instructifs, de piquantes réminiscences dans ces pages évocatrices d'un demi-siècle! V. M. C.

LITTÉRATURE RONSARD, textes choisis et commentés, par PIERRE VILLEY, Un vol. ,in-So, 1 fr. 50, Plon, 8, rue Garancière, Paris.

Les textes de Ronsard que nous présente M. P. Villey proviennent de la seule édition sùre, celle de 1587, qui correspond à l'état dernier des poésies de Ronsard; ils sont accompagnés d'une glose substantielle, exempte de recherches pédantesques, mais nourrie d'anecdotes et de faits typiques. Sur la vie de Ron-, sard, M. Villey a utilisé et discuté les plus récents travaux. CR. P.

LA BRUYÈRE, textes choisis et commentés, par EMILE MAGNE. Un vol. in-8°, 1 fr. 50. Plon, 8, rue Garancière, Paris.

M. Magne nous donne la biographie rapide de La Bruyère, au milieu de laquelle il a inséré les textes essentiels, notamment l'introuvable Edition princeps des Caractères, celle de 1688. Le volume se complète par les Dialogues sur le quiétisme et se termine par quelques chapitres des Caractères sous leur forme ultime et définitive.

CR. P.


PARSIFAL. Festival scénique sacré en trois actes par RICHARD WAGNER, textes français et allemand en regard; traduction en prose de J.-G. PRUD'HOMME, 1 franc. Société d'édition Muller, 38, rue des Ecoles, Paris.

On trouvera ici une bonne traduction du célèbre opéra de Wagner. Cette traduction' est précédée d'une notice qui explique la genèse de Parsifal et d'une analyse de ce drame fort touffu, mais qu'on a consideré à juste titre, semble-t-il, comme le chef-d'œuvre de son auteur. A. R.

GRAINS DE POÉSIE, par D. ANSELME DEPREZ. Un vol. in-.2 de 80 pages, 1 franc. Abbaye de Maredsous.

Une grande variété de ton, d'allure, de rythme et de sujets rend ce recueil de poésies très attrayant. Ce n'est pas simple littérature. Sous la forme, d'ailleurs toujours très belle, l'auteur sait glisser avec discrétion la leçon surnaturelle et édifiante.

PHILOSOPHIE

L'INTELLECTUEL, étude psychologique et morale, par A. CARTAULT. Un vol. in-8° de 312 pages, 5 francs (Bibliothèque de Philosophie contemporaine). Alcan, 108, boulevard Saint-Germain, Paris.

Les intellectuels ont fait assez parler d'eux pour qu'il fût utile de connaître ce qu'ils sont.

Disons toutefois que les intellectuels et l'Intellectuel diffèrent plus entre eux qu'un singulier et un pluriel et que, si les premiers n'ont pas beaucoup eu un rôle de tout point irréprochable, le second mérite plus d'estime, surtout quand on a lu M. Cartault : « Le plus grand peuple, dit-il, n'est pas celui qui déploie le plus d'énergie matérielle, qui fournit la somme la plus considérable d'action, mais celui qui a le plus de penseurs et les plus profonds, qui réalise leurs conceptions et dont l'action est la mieux dirigée. » (P. 288.)

Cette formule pourtant est-elle absolument exacte? ne pourrait-on pas dire qu'à défaut d'un nombre considérable — introuvable, d'ailleurs — d hommes également doués d'une haute intelligence et d'une grande vertu, il vaut mieux avoir — concrétisons notre pensée — moins de génies et plus de saints, plutôt que beaucoup de génies et moins de saints. La grâce n'a-t-elle pas été viGtime d'une sorte de pléthore d'intellectuels et de pénurie de volontaires, d'une surabondance de dirigeants et d'une disette de dirigés soumis?

Ceci soit dit d'ailleurs sans vouloir déprécier la valeur de l'intelligence, propriété spécifique de l'être humain.

Une remarque encore : M. Dauzat écrit (p. 207) : « Le droit divin est une fiction qui a pu avoir son utilité dans le passé et qui progressivement disparaît. » Puisque, à la page précédente, l'auteur reconnaît que l'autorité était de nécessité naturelle, peut-être dite « d'institution divine », ne peut-on et ne doit-on pas dire qu'il y a, quelles qu'en aient été en fait les interprétations au cours de l'histoire, un droit divin?

Après ces observations, nous n'avons plus que du bien à dire du livre de M. Cartault, dont deux beaux chapitres particulièrement sollicitent une

légitime attention : le chapitre 1 et le chapitre XII qui ont pour titres : l'Ancienne Education uni versitaire. — L'Intellectuel et le respect.

JEAN DUMASET.

RELIGION RÉFLEXIONS SUR LE CATÉCHISME ET LE: CIRCONSTANCES ACTUELLES, par M. l'abbé Vi QUESNEY. Brochure, o fr. 60. Lethielleux, 10, rue Cas sette, Paris.

C'est le numéro 4 de la collection éditée pa la « Revue des Patronages ». Celle-ci s'adress aux directeurs de ces œuvres si utiles. A.

LES PREMIERS PAS VERS LE CIEL : INSTRUC TIONS, RÉFLEXIONS ET PRIÈRES POUR LES ENFANTS, par le R. P. ISIDORE HOFFNER, S. J., tra duction par J. RAYMOND, 1 franc. Aubanel, Paris.

Ce livre est d'un bout à l'autre un délicieu: dialogue entre Jésus et l'enfant. En faisant choi: de cette forme dialoguée, l'auteur a rendu soi ouvrage attrayant et d'une lecture facile.

passe ainsi en revue tout le cycle de la vie ter restre, tout ce qu'il faut éviter et tout ce qu'i faut faire pour assurer le salut de son âme.

E. G.

PENSÉES DE SAINTE THÉRÈSE, recueillies pa M. MOISSON. Un vol. in-32, 1 fr. 50. Librairie de Saints-Pères, 83, rue des Saints-Pères, Paris.

Sainte Thérèse est une grande sainte et ui grand écrivain. C'est à sa correspondance s vive, si ailée, que l'auteur a emprunté la plu grande partie de ces « pensées » jaillies spon tanément de sa plume et de son cœur, la plu part à l'instant même où la nécessité s'en fai sait sentir; elles nous découvrent une âm expérimentée de la vie, et qui sait ce que son les hommes : elle nous font mieux connaîtr sainte Thérèse. E. G.

NEUVAINE EN L'HONNEUR DE LA BIENHEU REUSE JEANNE D'ARC, par l'abbé L -P. GERSON curé de Villers-Semeuse. Un vol. de 162 pages, 1 fr. 25 Aubanel, Avignon.

Chacun des jours de la neuvaine que nou: présente l'auteur montre Jeanne d'Arc rem plissant un de ses devoirs de la façon la plu: parfaite et la plus méritoire. L'auteur étudi tour à tour Jeanne d'Arc et l'âme, Jeanne d'Ar et la prière, la sainte Eucharistie, la Sainte Vierge, l'Eglise, le Pape, la France, ses parents son prochain, enfin Jeanne d'Arc et les vertu chrétiennes. E. G.

LA PIÉTÉ ÉCLAIRÉE : DIRECTOIRE SPIRITUEL POUR PERSONNES INSTRUITES, par le R. P. RA MON UlZ AMADO, S. J., traduits par l'abbé GERBEAUD Un vol. de 400 pages, 2 fr. 50. Aubanel, Avignon.

Cet ouvrage projette un jour lumineux SUI l'ensemble du dogme. Il démontre l'excellence de la foi, les raisons pour lesquelles nous devons croire, la réalité des prophéties et des miracles.

D'une documentation sûre et d'une exposition bien ordonnée, la Piété éclairée doit être lue avec réflexion et par petites doses. E. G.

LE PALAIS ET LE FESTIN DE DIEU : A SES ENFANTS. PETITS ET GRANDS, par M. W. ROCHE,


S. J., traduit de l'anglais par A. DE MITRAY. Un vol.

2 fr. 5o. G. Beauchesne, 117, rue de Rennes, Paris.

Ce livre a pour but de guider la pensée de l'enfant à cet âge où l'esprit commence à chercher, à se poser les graves questions de la religion, de la vie. Avec un style plein de charme et d'originalité, un tour philosophique à la fois très simple et très profond, l'auteur a su donner le plus attrayant intérêt à un exposé nouveau des vérités anciennes et essentielles. E. G.

UN MOIS DE MARIE SUR LA VIE DE LA TRÈS SAINTE VIERGE, par le R. P. PETITALOT. Un vol.

2 francs. P. Téqui, 82, rue Bonaparte, Paris.

Ces pages sur la Sainte Vierge feront les délices des âmes pieuses qui saisissent toutes les occasions d'augmenter leur trésor spirituel.

L'onction et la piété en déborde, et une doctrine substantielle leur donne un cachet de force et de sérieux que n'ont pas, hélasl tous les « Mois de Marie ». E. G.

EN LISANT L'ÉVANGILE, par la C~ DE FRAN- KENSTEIN. Un vol. in-12 écu, 2 francs. P. Lethielleux, 10, rue Cassette, Paris.

« Ces pages, dit l'auteur dans la préface, ne sont que mes réflexions. sur la vie quotidienne, fates en lisant l'Evangile et les Epîtres. » Ce sont bien, en effet, de simples considérations jetées au courant de la plume, sur la vie journalière, les affections familiales, les relations avec les inférieurs, etc., et rattachées à une soixantaine de passages du Nouveau Testament, courts mais choisis avec à-propos.

On a visé surtout à faire ressortir que « nous pouvons suivre Jésus sans bouleverser notre existence habituelle. Il ne nous demande ni austérité trop pénible ni tristesse; son joug est suave et léger ». L'auteur s'efforce de persuader à ses lecteurs que c'est dans l'accomplissement généreux des mille petits devoirs qui forment le tissu de la vie ordinaire qu'ils rempliront le mieux leur mission ici-bas. Ce livre nous paraît propre à rendre familière la lecture et surtout la pratique de l'Evangile. C. C.

AVOIR CONFIANCE, par Mr' GIBIER, évèque de Versailles. Un vol. in-12, 3 fr. 50. Lethielleux, 10, rue Cassette, Paris.

Avoir confiance est plus que l'affirmation d'un légitime optimisme, c'est la démonstration claire, précise, convaincante, des progrès de l'Eglise catholique en France depuis la persécution religieuse de 1901 et la loi de Séparation de 1905.

Ce livre est le fruil de la plus probante expérience. Mer Gibier, en même temps qu'un convaincant écrivain, est un infatigable réalisateur. Les catholiques peuvent avoir confiance en lui quand il affirme que l'Eglise de France a réalisé depuis dix ans d'admirables progrès. A. Z.

PARVULIS, par F. GELLÉ, Brochure, 0 fr. 20. Beauchesne, 117, rue de Rennes, Paris.

Excellente petite catéchèse, inspirée des Pères, destinée à faire comprendre aux petits enfants le mystère du Christ. A.

LA PETITE HISTOIRE SAINTE, par J. SACKEBANT.

o fr. 30. Lethielleux, 10, rue Cassette. Paris.

Ce petit livre, format carnet, est destiné aux enfants du catéchisme. 11 est orné d'images et d'une carte de la Palestine, et suivi des évangiles du dimanche. A.

PAROLES D'ENCOURAGEMENT, par F. MILLION.

Brochure, 1 franc. Téqui, 82, rue Bonaparte, Paris.

Recueil de textes extraits des lettres de saint François de Sales. A.

LA VIE INTIME DU CATHOLIQUE, par J. V. BAINVEL. Un vol. in-12, 1 fr. 25. G. Beauchesne, 117, rue de Rennes, Paris.

En cet opuscule, qui est la réédition très augmentée d'une étude ~paroe dans la Revue de philosophie, M. Bainvel s'est appliqué à dégager du spectacle des catholiques qui pensent, vivent et agissent en catholiques, les traits communs qui caractérisent et distinguent le catholique.

Cette œuvre d'expérience religieuse donnera une idée plus juste de la vie catholique à ceux qui n'en vivent pas et aidera ceux qui en vivent déjà à en prendre une conscience de plus en plus nette pour la vivre dans sa plénitude. L. C.

« ITE AD OVES ». LE GRAND DEVOIR PASTORAL DES TEMPS ACTUELS, par l'abbé GUÉRET. curé doyen Un vol. in-12, 2 francs. P. Lethielleux, JO, rue Cassette, Paris.

La visite des paroissiens : voilà le grand devoir du pasteur à l'heure présente. On ne vient plus à lui, il ira au-devant des brebis indifférentes ou hostiles.

Quelles pages délicieuses à lire que celles qui nous montrent dans un curé le prêtre, le pasteur, l'ami, le père, le médecin ! Quelles richesses de détails et aussi quelle flamme surnaturelle pour pousser amoureusement à la recherche de la brebis égarée !

Ce qui fait la supériorité de ce travail — une vraie Somme de doctrine pastorale, — c'est que M. l'abbé Guéret, curé en une paroisse difficile, a pratiqué ce qu'il conseille. Il a su lui-même accomplir « le grand devoir pastoral aes temps actuels ». Ses observations sont pleines de sens parce qu'elles sont choses vécues. Il livre ses expériences pour guider et féconder celles de ses confrères. Il a bien mérité des âmes, du clergé, de l'Eglise. L. C.

LA VIERGE MARIE, par l'abbé V. D. ARTAUD. Un vol. in-16, 3 fr. 5o. G. Beauchesne, 117, rue de Rennes, Paris.

Cet ouvrage contient trente et une conférences sur les mystères de la vie de la Sainte Vierge.

Ce qui signale spécialement à l'attention ce mois de Marie, c'est le grand nombre de traits historiques qu'il contient, non pas seulement juxtaposés, comme ils le sont habituellement dans les ouvrages de ce genre, mais mélangés au récit, faisant corps avec lui, et venant, en quelque sorte, l'illustrer d'une façon très heureuse. L. C.

LA SPIRITUALITÉ DE SAINT IGNACE, par ALEXANDRE BROU. Un vol. in-12, 3 francs. Beauchesne, 117, rue de Rennes, Paris.

Certaines controverses récentes sur la piété « ignatienne » ont provoqué de la part des écrivains de la Compagnie des précisions et


des répliques intéressantes. C'est le cas du P. Brou. Son livre n'est pas un exposé théorique de* la spiritualité de saint Ignace, c'est avant tout une page d'histoire. On y trouvera un résumé de la pensée de saint Ignace et ses premiers disciples sur l'oraison et sa méthode, un rapide aperçu sur ce qui fait l'essentiel des exercices, les relations de cette spiritualité avec la tradition, la dévotion au Sacré Cœur, la liturgie, sa place dans l'histoire de la piété catholique.

Une série de médaillons, pris dans les glorieuses annales de la Compagnie de Jésus et au dehors complète le tableau et permet de voir cette spiritualité réalisée dans ses fleurs de sainteté les olus authentiques. En fermant le livre on tirera la conclusion suivante : que dans l'Eglise de Dieu le Saint-Esprit a voulu et a suscité une merveilleuse diversité qui ne nuit en rien à l'unité du corps mystique du Christ. CR.

TRÉSORS D'HISTOIRES SUR LE SACRÉ CŒUR, par 1 abbé MILLOT, vicaire général de Versailles. Un vol. in-12, 3 fr. 50. P. Lethielleux, 10, rue Cassette, Paris.

Ce volume complète la série d,es Trésors d'histoires qui ont rendu de si réels services au clergé français pour la préparation des prédications et des catéchismes. Voici les titres des principaux chapitres : Histoire de la dévotion au Sacré Cœur. — L'image du Sacré Cœur. — Le scapulaire et la médaille du Sacré Cœur. — Les promesses. — Les amis du Sacré Cœur. Il y a' là toute une mine à exploiter à la disposition des fidèles qui veulent s'édifier et des prêtres qui ont à faire des lectures ou à donner des sermons pendant le mois de juin. Inutile d'ajouter qu'il peut être utilisé avec grand profit pour les instructions données, le premier vendredi du mois, dans bon nombre de paroisses, CR.

L'ESPRIT DU CHRISTIANISME, par le P. F. NEPVEU, S. J. Nouvelle édition d'après l'originale de 1700, par le R. P. PAUL DEBUCHY, S. J. Un vol. in-12, 3 francs, René Giard, éditeur, rue Royale, à Lille.

Après une trentaine d'éditions françaises, ce livre n'est pas encore dans toutes les mains qui le cherchent. Il y a encore des catholiques qui se plaisent aux chefs-d'œuvre de la ferme spiritualité du XVIIe siècle. Ces connaisseurs ne se laissent pas rebuter par le style trop uniformément périodique du P. Nepveu, style qui semble dater plutôt de i65o que de 1700, mais qui eut des admirateurs durant tout le XVIIIe siècle. La lecture de l'Esprit du christianisme présente d'ailleurs d'autres attraits. On n'y perd jamais de vue Nôtre-Seigneur, et c'est en lui d'abord qu'on étudie les vertus chrétiennes.

Ainsi la leçon devient plus vivante, en même temps que plus douce. CR.

RETRAITE DE COMMUNION SOLENNELLE. Essai d'éducation eucharistique, par l'abbé GELLÉ, docteur en théologie. Un vol. in-8°, 3 francs. G. Beauchesne, 117, rue de Rennes, Paris.

La retraite de la communion solennelle n'est plus la préparation à la première réception de Notre-Seigneur; il importe donc de donner aux sujets qu'on y traite et à. la manière de les

traiter une orientation différente. M. l'abbé Gellé la conçoit avant tout comme un , essai d'éducation eucharistique », comme un effort pour décider les enfants à la communion fréquente, et même quotidienne, qui est le meilleur gage de leur persévérance dans la nouvelle vie où ils vont entrer. Du commencement à la fin de cet ouvrage, l'auteur prêche l'Eucharistie, sacrement et sacrifice du corps du Christ, ramenant par une remarquable synthèse théologique les sujets classiques (péché, mort, enfer, etc.), à la sainte Communion. Tous les prêtres auront grand profit à lire cette œuvre originale, qui allie la profondeur de la pensée à la simplicité très vive et très variée de l'expression. CR.

JÉSUS-CHRIST, SA VIE, SON TEMPS, par le P. HIPPOLYTE LEROY, S. J. Année 1911. Un vol. in-12, 3 francs. Beauchesne, 117, rue de Rennes, Paris.

Ce volume est le cinquième de la deuxième série et le dix-septième et avant-dernier de tout l'ouvrage. Le P. Leroy n'a pas pu le mener à son achèvement complet : IL a plu à Dieu de l'appeler à lui le 4 mars 1914, après une maladie de quelques jpurs ; mais on dit qu'il a laissé d'importants matériaux pour l'achèvement du dernier volume. Ces leçons d'Ecriture Sainte, prêchées au Gesu de Paris et de Bruxelles, exposent la vie du Sauveur, de la flagellation inclusivement jusqu'à la Résurrection. On y trouve les mêmes, qualités que dans les tomes précédents : science historique, exégétique et théologique avec la piété qui répand son onction sur ces leçons du professeur et les change en belles élévations et en méditations qui rappellent parfois celles de Bossuet. CR,

ROMANS LA LAXDÇELA SAGA, légende historique islandaise. Traduction par FERNAND MOSSÉ. Un vol. in-16 de 288 pages, 3 fr. 50. Felix Alcan, 108, boulevard SaintGermain, Paris.

Bien qu'il y ait occasion de quelques justes louanges de traduction, il faut avouer que cet ouvrage, au titre d'ailleurs par lui-même exotique, ne saurait offrir d'attraits que pour un esprit curieux du passé et de littérature à son berceau. On apprend, non sans joie d'éITudit:, l'existence d'une littérature scandinave déjà ancienne, qui permet certains rapprochements avec notre moyen âge français; mais il y a peut-être exagération à prétendre rencontrer des beautés aussi originales et nombreuses.

Ces diverses productions se distinguent peu les unes des autres par la variété des scènes dépeintes. Les mêmes caractères à peine modifiés se rencontrent toujours, d'où une inévitable monotonie que combat médiocrement l'impression générale de sauvagerie dans les mœurs, paroles, sentiments de ces héros scandinaves.

Notre Geste de Roland soutiendrait' facilement une comparaison. L'ouvrage comprend d'ailleurs, en explications d'intérêt historique, de nombreuses notes fort érudites. E. q. N.


LES AMIS CÉLÈBRES, par EDWARD MONTIER. Un vol. in-16 de 300 pages, 3 fr. 50. Plon, 8, rue Garancière, Paris. t Après lecture, on se prend à regretter que l'auteur se soit borné à ces quelques peintures d'amis célèbres : fable, histoire, légende offrent nombreux encore des noms qui symbolisent tel ou tel type d'amitié digne de tenter une plume délicate, gracieuse, entendue autant que littéraire, .érudite, documentée comme celle de M. Edward Montier. Pastel ou tableautin, esquisse ou peinture achevée, le même charme se rencontre, œuvres d'études, observations, longues rêveries de l'auteur, qu'on dirait tour à tour contemporain et familier de ses héros dont il pénètre, tellement il est nourri de leurs ouvrages, jusqu'aux pensées les plus intimes.

Rien d'intéressant comme de le suivre en visite chez Horace, Virgile, Socrate, et c'est plaisir délicat que de parcourir avec lui le camp d'Achille, accompagner David, aborder Pathmos où se développe quelque page psychologique et gracieuse autant que fidèle sur l'amitié.

E. G. N.

VOYAGES AU JAPON, par Java, la Chine, la Corée, Nouvelles notes d'un touriste, par BRIEUX, de l'Académie française. Un vol. in-18, 3 fr. 50. Delagrave, 15, rue Soufflot, Paris.

M. Brieux rapporte avec agrément dans cet ouvrage les impressions d'un intéressant voyage en des pays que nous ne connaissons trop souvent encore qu'à travers des légendes plus ou moins ridicules. M. Brieux ne s'est d'ailleurs pas contenté d'une vue superficielle des choses; il a réfléchi, déduit, compris; et nombre de ses observations d'ordre politique ou social ont beaucoup plus de portée que les « notes » ordinaires d'un touriste. Ce n'est pas à dire que notre auteur voie toujours et conclue comme nous souhaiterions. Remercions-le cependant, lui qui n'est à aucun degré des nôtres, du très émouvant hommage qu'il rend à l'œuvre réalisée par les Jésuites de Ziccawey. R, N.

SCÈNES DE LA PACIFICATION MAROCAINE, par PIERRE KHORAT. Un vol. in-i6 de 300 pages. 3 fr. 50.

Perrin, 35, quai des Grands-Augustins, Paris.

L'auteur de ces scènes expose sans prétention quelques solutions des problèmes guerriers, économiques et administratifs que nos compatriotes peuvent avoir à résoudre au Maroc.

M. Pierre Khorat n'aime guère à passer à côté de la vérité qu'il voit. Son expérience de la vie coloniale a rendu son coup d'œil précis et l'a habitué à mesurer à leur valeur réelle les hommes et les circonstances. C'est assez dire quel profit on peut tirer de la lecture de son livre. C. E.

VARIA PLANTES ET FLEURS A LA MAISON, par A. BLANCHON. Un vol. in-16, 1 franc. Armand Colin, ro3, boulevard Saint-Michel, Paris.

Le but de ce petit volume est de donner de précieuses indications pour la culture des fleurs.

Il nous apprend à acheter, conserver et faire prospérer chez nous fleurs et plantes; à en tirer le parti le plus utile pour la parure de nos demeures; à réaliser, avec une dépense minime, une ornementation qui sera une preuve de notre goût et qui charmera tous les yeux.

E. G.

LA CORRESPONDANCE, par Mm. ADRIENNE CAMBRY. Un vol. in-16, 1 franc. Armand Colin, 103, boulevard Saint-Michel, Paris.

Ces pages ne sont pas un formulaire où l'on trouvera des modèles de lettres adaptées à toutes les circonstances. Mais le jeune homme, la jeune fille, la maîtresse de maison, l'employé, y trouveront les renseignements qui leur permettront de rédiger en toute sécurité la lettre parfois très délïcate, à laquelle auparavant ils ne sougeaient pas sans appréhension. E. G.

LA NOTION DE PROSPÉRITÉ ET DE SUPÉRIORITE SOCLALES, par G. MELIN, 0 fr. ôo. Bloud, 7, place Saint-Sulpice, Paris.-

Qu'est-ce que la prospérité et la supériorité sociales ? A quels signes les reconnaît-on ? Comment peut-on les réaliser? Telles sont les questions que l'auteur se pose. Il y répond en s'inspirant des idées et des travaux de Le Play et de H. de Tourville. E. G.

LA CROIX-ROUGE FRANÇAISE : LE ROLE PATRIOTIQUE DES FEMMES, par ANDRÉE D'ALIX, Un vol. in-16, 3 fr. 50. Perrin, 35, quai des GrandsAugustins, Paris.

Ce livre, inspiré par une haute pensée patriotique et morale, nous retrace l'histoire de la Croix-Rouge depuis ses premières origines jusqu'à ses actes les plus récents. Avec émotion, nous suivons l'œuvre bienfaisante souvent héroïque de ses infirmières dans les guerres récentes du Maroc et des Balkans. Quelques chapitres très vivants et très documentés seront, pour les infirmières et pour celles qui aspirent à le devenir, une sorte de manuel résumant le programme de leurs études, les qualités que réclame d'elles cette vocation et les devoirs qu'elle leur impose. E. G.

UNE FRANÇAISE AU XX. SIÈCLE, par Y. D'ISNÉ.

Un vol. in-12, 2 francs. Lethielleux, lQ, rue Cassette, Paris.

Une Française au xx° siècle est une de ces âmes d'élite comme notre pays en possède encore beaucoup, heureusement. Elle est brisée par l'épreuve; mais elle trouve dans sa foi et son abnégation le courage de se donner et de se dévouer sans mesure. Cette semence de bien jetée dans les larmes produit une riche efflorescence de vertus autour d'elle : et c'est là la meilleure récompense de cette vaillante et chrétienne Française. E. G.

BOULANGER, par FONTENELLE et MALEPEYRE. Deux vol. in-18, 6 francs. Mulo, 12, rue Hautefeuille, Paris.

Deux nouveaux volumes de l'Encyclopédie Roret, pratiques et complets comme tous les manuels de cette collection. A.


NOUVELLES LITTÉRAIRES ARTISTIQUES ET SCIENTIFIQUES

LETTRES ACADÉMIE FRANÇAISE Mme Léon Daudet a offert à l'Académie française le buste en bronze de Jules Lemaître par M. de Saint-Marceaux.

.M. JEAN AICARD BLESSE M. Jean Aicard se rendait, le 31 janvier 1915, en automobile, de sa villa de la Garde à Bandol, en passant par Toulon; déjà la voiture avait franchi la route du Cap-Brun, quand un tramway, venant en sens inverse, dérailla et se jeta sur l'automobile.

L'académicien reçut d'assez sérieuses blessures à la figure; il eut, en outre, le bras gauche cassé. Son chauffeur fut indemne.

M. Jean Aicard a été transporté à l'hôpital, où il a reçu des soins immédiats.

UN HOMMAGE AU CARDINAL MERCIER A Bruxelles, malgré la guerre, la classe des Lettres de l'Académie royale de Belgique s'est réunie au milieu de février 1915, et, à l'unanimité, a décidé d'adresser à S. Em. le cardinal Mercier l'hommage de sa sympathie et de son admiration pour sa « pastorale » patriotique.

C'est sur la proposition de M. Godefroid Kurth, l'éminent historien que l'invasion a surpris dans sa petite résidence d'Assche, près de Bruxelles, que cette résolution a été prise.

L'Académie royale s'est réunie dans les locaux de la Bibiothèque royale, le palais des Académies étant occupé par les Allemands.

LE CRIME DE REIMS A L'INSTITUT Le 22 janvier, l'Académie des inscriptions et belles-lettres a pu juger, au moyen des saisissantes projections du Dr Capitan, de l'état actuel de la cathédrale de Reims.

Le Dr Capitan, mobilisé comme médecin inspecteur de l'armée et appelé à Reims par son service, a pu, au cours de sa mission, explorer la cathédrale et en prendre des photographies.

Les membres et les invités de l'Académie ont pu voir défiler sur l'écran la façade, l'abside, la tour Nord-Ouest le clocher de l'Ange, le faîte, les contreforts, avant et après le crime. Les statues de la tour Nord-Ouest ne sont plus que des tiges informes; la destruction des vitraux est presque complète; vue de flanc, la basilique apparaît découronnée

de son admirable charpente du xve siècle; le clocher de l'Ange a disparu; du carillon de 1772 il ne reste plus rien; à l'intérieur de la nef même, on constate des altérations importantes qui seraient encore plus sensibles à l'œil si les photographies en pouvaient rendre les tons d'incendie.

Après cette émouvante démonstration, l'Académie a repris ses travaux.

ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS L'Académie des inscriptions et belles-lettres a tenu, le ig février 1915, un Comité secret, au cours duquel elle a décidé la radiation de ses associés et correspondants allemands qui ont signé le fameux manifeste des 93 désignés sous le nom d'« appel aux nations civilisées ».

Au cours d'une précédente séance, M. Potier a donné d'excellentes nouvelles des membres associés et correspondants de Belgique: MM. Dumont, Charles Michel, Perrenne et enfin le P. Delhaye, récemment élu, on le sait, membre correspondant de la Compagnie.

MISS BRADDON L'Angleterre vient de perdre en février Miss Braddon, romancière dont la fécondité rappelait celle de feu Ponson du Terrail, et dont la manière n'était pas sans analogie avec celle de cet arrière-petit-neveu du chevalier Bayard.

Elle fit sortir le roman anglais de la berquinade dans laquelle Miss Young, Miss Nouchette Carey l'avaient enlisé vers le milieu du règne de la reine Victoria. Reste à savoir si c'est un service qu'elle lui a rendu. Elle ouvrit toute grande la voie dans laquelle s'élancèrent Ouida, Miss Corelli et bien d'autres encore, qui mirent leur amour-propre à assaisonner leurs œuvres à qui mieux mieux de poivre, decarry et de piment. Si bien qu'aujourd'hui il n'y a guère de roman anglais qu'on puisse mettre entre les mains d'une jeune fille; si l'on veut quelque chose de convenable, il faut venir le chercher en France.

Il y a quarante ans, c'était tout le contraire.

Miss Braddon n'alla pas aussi loin dans la voie de l'émancipation que celles dont elle fut la devancière; cependant, on dit qu'elle ne permettait pas à ses filles de lire ses livres.

Elle avait épousé son éditeur, M. Maxwell; un de ses fils a hérité de son talent de romancier.

AUTRES ÉCRIVAINS DÉCEDÉS On annonce la mort de : M. Eugène Rostand, membre de l'Institut, officier de la Légion d'honneur, économiste


distingué, père de l'académicien, mort à Cambo, en janvier, à l'âge de 71 ans.

M. Georges Thiébaut, un des esprits les plus distingués de notre époque, mort le 21 janvier. Né à Toulouse en 1850, il avait fait de'brillantes études, avait dirigé le Courrier des Ardennes, puis suscité, par la plume et la parole, le mouvement boulangiste qu'il essaya vainement de canaliser au profit des idées plébiscitaires. Il fut impliqué dans les poursuites dirigées contre Déroulede, passa en Belgique, fut mis hors de cause par la Haute Cour, revint en France, et consacra sa plume à la défense d'une politique réellement nationale et catholique. Il écrivait en dernier lieu dans la Libre Parole, et fit une guerre sans relâche au « parti protestant ».

M. de Caillavet, l'auteur dramatique bien connu, décédé en janvier à l'âge de 46 ans, au château d'Essendières (Dordogne).

M. Eugène Grebaut, directeur général des fouilles de la Haute-Egypte après M. Maspéro, et chargé de cours à la Faculté des lettres de Paris, décédé en janvier.

M. Adolphe Ribaux, écrivain suisse, mort à Curio, près de Lugano, après une longue maladie; il était l'auteur de nouvelles, de pièces historiques et de poèmes.

M. Henry de Bruchard, rédacteur à l'Action française, ancien directeur du Midi royaliste, mort le 6 février.

M. le chanoine Lecigne, professeur à l'Université catholique de Lille, l'étincelant écrivain qui fut collaborateur de la Croix et de la Semaine littéraire, directeur de l'Univers dans sa dernière période, mort près de Lille, en février.

BEAUX-ARTS EXPOSITIONS Le 23 janvier, les ministres ont assisté, au Petit-Palais des beaux-arts, à Paris, à l'inauguration, en présence du président de la République, de l'exposition des envois artistiques de la France et de la Belgique à l'exposition de San-Francisco. A cette occasion, un échange de télégrammes de sympathie a eu lieu entre le président de la République et le roi des Belges.

Sur la proposition de la municipalité du Havre, le ministre des Sciences et des Arts de Belgique a ouvert, le 27 février, dans une salle du musée de peinture, une exposition des œuvres d'art et des objets précieux qu'on put récemment sauver dans la région de l'Yser.

Le produit des entrées est réservé aux réfugiés belges.

A Bordeaux s'est ouverte, fin février, l'exposition des musées commerciaux, produits français contre produits austro-alle- mands, organisée par le Comité des concours de province, pour affirmer la supériorité de l'industrie française sur le commerce allemand.

Trois artistes danois, bloqués par la guerre àSaint-Christophe (Cantal), MM. Niels Bjerre, Gom Hansen et Han Hansen, ont fait tirer en loterie trois tableaux qui étaient exposés à Aurillac. La loterie a produit la somme importante de 3000 francs, qui ont été donnés pour les blessés soignés dans le Cantal.

UNE PLAQUETTE Le colonel Lyautey, commandant le 3e hussards, qui tient habituellement garnison à Senlis, frère du général, vient, pour marquer le début de l'année 1915, de remettre à chacun de ses officiers une artistique plaquette où l'on voit, d'un côté, le génie de la Victoire, le drapeau en main, le clairon aux lèvres, entraînant les troupes à l'assaut, à la charge, pour arriver à la victoire décisive des alliés; de l'autre côté, on lit la devise du 3e housards : « Il en vaut plus d'un », puis la mention : « 3e hussards en campagne », et enfin la date : « 1er janvier 1915 ».

LES ŒUVRES DE LIGIER-RICHIER On est très inquiet, dit le Journal de la Meurthe et des Vosges, sur le sort de la célèbre mise au sépulcre de Ligier-Richier, à Saint-Mihiel. Les uns prétendent qu'il est resté intact; d'autres, qu'il aurait été emporté en Allemagne.

Cette dernière assertion nous laisse un peu sceptique, car c'est une grosse et difficile opération que l'enlèvement de ces personnages en pierre. Ce que l'on sait de certain, c'est que le fameux retable de Hattonchâtel, une des merveilles de la sculpture française de l'école san-mihielloise, a été démonté et emporté en Allemagne.

C'était un des plus précieux monuments historiques de la Meuse.

LIVRE D'OR Le Syndicat d'initiative de Bourg-en-Bresse a adressé à toutes les municipalités de l'Ain un appel pour des monuments et un « livre d'or » départemental de la guerre.

DÉCOUVERTE On signale la découverte, à Cyrène, d'une colossale statue de marbre représentant Alexandre le Grad, et à laquelle il manque seulement une partie de l'avant-bras droit.

Cette œuvre serait une reproduction d'un ori-


ginal dû au célèbre statuaire grec Lysippe (ive siècle avant Jésus-Christ), et daterait presque de la même époque.

ARTISTES DÉCÉDÉS On annonce la mort de : M. Emile Bogino, statuaire, fils de l'auteur du célèbre monument élevé à Mars-la-Tour, à la mémoire des soldats morts en 1870, et bombardé et détruit par les Allemands le 16 août 1914.

M. Théophile Poilpot, 66 ans, peintre militaire, président de la Société des médaillés miiitaires, décédé en février.

M. le chevalier Ernest de Munck, le célèbre violoncelliste belge, décédé à Londres.

SCIENCES ACADÉMIE DES SCIENCES M. Lameere, membre de l'Académie royale des sciences de Bruxelles, assistait à la séance du 18 janvier de l'Académie des sciences, à Paris. M., Edmond Perrier lui souhaita la bienvenue. Il a annoncé ensuite que les associés et correspondants anglais ont adressé à M. E. Guillaume, pour les œuvres d'assistance de l'Institut, la somme de 31 guinées, avec l'expression de leur chaleureuse sympathie.

M. l'inspecteur général Delorme a présenté une communication très intéressante sur le traitement des paralysies consécutives aux blessures des nerfs par les armes à feu.

M. Laveran a présenté une note de M. J. Danysz, de l'Institut Pasteur, sur le traitement des plaies de guerre par les solutions antiseptiques très diluées, et en particulier par le nitrate d'argent à 1 pour 200 000 ou 500000. De nombreux cas ont été traités par cette méthode, depuis deux mois, dans quelques hôpitaux de Paris, quelques ambulances de la Croix-Rouge, et partout on a constaté une cicatrisation et une désinfection des plaies plus rapides que par les autres méthodes chroniques employées jusqu'alors.

M. Branly a communiqué une note de M. le Dr Foveau de Courmelles, sur la détermination rapide, par la radioscopie, de la position des projectiles dans le corps humain.

ACADÉMIE DE MÉDECINE M. Quénu a communiqué à l'Académie une note sur les plaies gangréneuses par projectiles de guerre. L'auteur a obtenu les meilleurs résultats par les moyens déjà préconisés et qui consistent en soins énergiques dès le début : larges désinfections par l'eau oxygénée, l'oxycyanure de*même, et simplement par l'eau de Javel à 3 pour 100.

M. Belbèze a, de son côté, noté dix-sept

observations, dans lesquelles l'application de la collobiase d'or en chirurgie de guerre a démontré que l'or constitue un agent thérapeutique remarquable contre les affections d'une certaine gravité.

Le 2 février, l'Académie de médecine a élu comme membre associé étranger le prince Albert de Monaco.

L'EXPÉDITION POLAIRE RUSSE Un radiogramme de Wilkitzky annonçait, le 23 février, que les provisions de l'expédition suffisent pour un an.

La terre Nicolas Il s'étend jusqu'à 77"50 de latitude et 99° de longitude. L'expédition a découvert près de la terre Beunet une nouvelle terre d'étendue et d'aspect semblables à celle-ci et située par 76°10 de latitude et 153° de longitude. b UN HOMMAGE L'Etat vient d'être saisi d'une demande d'acquisition, dans un but d'intérêt public, de la maison de l'illustre entomologiste Henri Fabre. Cet hommage au vénérable savant de Sérignan honore autant que celui-ci ceux qui en ont pris l'initiative.

INVENTION On annonce de Bombay, en février, que le professeur Albe, de Lahore, a inventé un phonoscope qui permettrait aux personnes totalement sourdes de percevoir la parole et la musique au moyen des yeux.

SAVANTS DECÉDÉS On annonce la mort de : M. Duner, ancien professeur d'astronomie à l'Université d'Upsala, officier de la Légion d'honneur et membre étranger de l'Académie des sciences, décédé en février.

M. Albert Riondel, capitaine de frégate en retraite, mort à Nantes, en décembre 1914, à l'âge de 85 ans : cet excellent officier, qui était aussi un parfait catholique et avait collaboré à la Croix dts Marins, s'était fait une réputation mondiale par ses vigoureuses campagnes en faveur de la réglementation de routes maritimes, notamment dans les voisi- nages du banc de Terre-Neuve.

VARIA CONFESSION DE SCHOPENHAUER Ce que Schopenhauer a écrit de meilleur peut tenir dans la phrase suivante : « En prévision de ma mort, je fais cette confession que je méprise la nation allemande à cause de sa bêtise infinie et que je rougis de lui appartenir. » (M. 399.)


NÉCROLOGE Mg, » Benson.

Mgr Hugh-Robert Benson, le célèbre romancier anglais, est mort en octobre 1914.

Ce n'était pas un homme ordinaire. Selon l'expression d'un de ses confrères dans le sacerdoce, le R. P. Askew, c'était un « saint et un génie »; j'ajouterai « un mystique allié à un apôtre, un prédicateur doublé d'un romancier, qui excellait dans l'un et l'autre genre ».

Hugh-Robert Benson, quatrième fils de l'archevêque anglican de Canterbury de ce nom, naquit en 1871. Il n'avait donc que quarante-trois ans au moment de sa mort.

Après de brillantes études au collège d'Eton et à l'Université de Cambridge, où il prit le grade de maître ès arts, il entra dans le ministère de l'Eglise anglicane. Grâce à l'influence paternelle, il aurait pu aspirer aux plus riches bénéfices; mais déjà le Révérend H.-R. Benson n'avait plus de goût pour les biens temporels. Le prêtre catholique perçait sous le pasteur anglican. Il exerça d'abord les fonctions de vicaire dans une des pauvres paroisses de l'est de Londres; puis il entra dans la communauté de la Résurrection, sorte de Congrégation fondée par des membres de la « haute Eglise », qui imitent les institutions catholiques. Mais il ne tarda pas à s'apercevoir que l'imitation n'est pas le véritable article; son âme, avide de vérité, reconnut bientôt que l'Eglise catholique était la seule véritable Eglise, et, en 1898, il fit son abjuration au couvent des Dominicains de Woodchester, entre les mains du R. P. Réginald Buckler. Il partit aussitôt pour Rome, où il fut ordonné prêtre l'année suivante.

A peine revêtu du sacerdoce, le R. P. Benson — en Angleterre, le titre de « Père » s'applique également aux membres du clergé séculier et du clergérégulier, — le R. P. Benson, dis-je, s'empressa de procurer aux autres le bienfait de la foi qu'il venait lui-même de recevoir. Il commença cet apostolat ardent qu'il continua jusqu'au dernier jour de sa vie.

Il prêchait parfois deux ou trois fois dans une seule journée. On peut dire hardiment que son zèle apostolique a abrégé ses jours. Le nombre des conversions qu'il a effectuées ne se compte pas. Doué d'une grande facilité de parole, d'une merveilleuse éloquence naturelle, il avait' malheureusement un léger défaut de prononciation qui, joint à une certaine nervosité, l'obligeait à parler très vite, de sorte que ses auditeurs avaient parfois quelque difficulté à le suivre. Néanmoins, on accourait de toutes parts à ses sermons.

En 1911, le Souverain Pontife éleva ce

prêtre zélé au rang de prélat domestique.

Mgr Benson n'était pas seulement un prédicateur distingué, il était un écrivain de premier ordre, d'une fécondité extraordinaire, peut-être même trop exubérante. Parmi ses nombreux ouvrages, on peut signaler la Lumière invisible, la Religion d'un commun mortel, dans lequel il fait connaître les raisons qui l'ont amené au catholicisme.

Mais cet apôtre zélé, cet éloquent prédicateur, était, comme écrivain, surtout un romancier.

Certains d'entre ses romans ont un caractère étrange, bizarre même; les plus remarquables, ceux qui vivront, sont les livres dans lesquels il a raconté dans un style incomparable l'histoire des persécutions exercées au XVIe siècle contre les catholiques anglais : Par quelle autorité ? l'Œuvre du roi, la Tragédie d'une reine.

L'immense influence qu'exerçait Mgr Benson était due en grande partie au charme de sa personne, à la suavité de ses manières. « J'ai rarement rencontré, disait le P. Vaughan, une plus belle, une plus noble, une plus sainte figure que celle de Mgr Benson. Il avait la simplicité et la droiture d'un enfant, l'amabilité et l'optimisme d'un adolescent, la force et la résolution d'un homme. »

Il était infatigable au travail. Lorsque le P. Vaughan l'exhortait à ménager sa santé, à ne point trop présumer de ses forces, il disait : « J'adore le travail; pour moi, écrire est un plaisir, prêcher est une récréation. »

A ceux qui le conjuraient de prendre un peu de repos, il répondait comme l'inflexible Arnauld aux représentations plaintives du pauvre Nicole : « Nous avons l'éternité pour nous reposer. »

F. DE BERNHARDT, Un savant chrétien.

M. Emile Amagat est mort en février 1915, et le Journal du Cher écrit à son sujet :.

C'est une perte pour la science.

Sa mort de grand chrétien et de vrai savant a été digne de sa vie.

Quand il s'est senti atteint par le mal qui devait l'emporter, il a dit à son curé: « Maintenant vous allez me préparer à paraître devant Dieu.

J'entends mourir en chrétien. Je crois tout ce que croit et enseigne l'Eglise catholique.

J'aurais voulu communiquer ma foi à tous les savants avec lesquels j'ai vécu. Je n'ai jamais rougi de ma croyance quand j'étais au milieu d'eux. Je ne l'ai sacrifiée ni aux honneurs ni aux places. »

Une de ses dernières paroles a été: « Il n'y a de vérité que ce qui est basé sur le Christ, le reste n'est rien.» Les obsèques de M. Amagat ont été présidées par un prêtre éminent de Paris, M. l'abbé Courbe, curé de Saint-Jacques du Haut-Pas, ami personnel du défunt, et, comme lui, ancien professeur à l'Université de Fribourg.


DOCUMENTS ÉPISCOPAUX SÉRIE A 0 FR. 15 Chaque brochure, 0 fr. 15; port, 0 fr. 05.

Le Fait de Lourdes : Sa valeur apologétique, par Mgr CHOLLET, archevêque de Cambrai. — 32 pages.

Le Franc-Maçon, voilà l'ennemi! par Mgr DELAMAIRE. - 64 pages.

La Désolation du Foyer: Le mal, Sa gravité, Ses causes, Mauvais prétextes, Remèdes, par Mgr RICARD, archevêque d'Auch. — 45 pages.

Le Denier du Clergé: Origines, Obligations, Objections, par S. Em. le card. SEVIN, archevêque de Lyon. — 62 pages.

SÉRIE A 0 FR. 10 Chaque brochure, 0 fr. 10; port, 0 fr. 05.

L'Education de l'enfant, par S. Em. le card. AMETTE, archevêque de Paris. — 30 pages.

La Presse, par S. Em. le card. AMETTE. — 22 pages.

La Souffrance, par S. EM. le card. AMETTE. — 22 pages.

La Cité futu re : L Enfer, Le Paradis, Le Purgatoire, On va au ciel partEglise, Devoirs des vrais catholiques, par S. Em. le card. ANDRIEU, archevêque de Bor eaux. — 30 pages.

Le Sacerdoce de la famille : Aux jeunes gens, Aux époux, Aux pères et aux mères, par S. Em. le card. ANDRIEU. — 29 pages.

Le fléau de la dépopulation, par Mgr CHOLLET. — 36 pages.

La sanctification du dimanche, par Mgr MARTY, évêque de Montauban.

- 30 pages.

Patriotisme et endurance (Noël 1914), par S. Em. le card. D.-J. MERCIER, archevêque de Malines, primat de Belgique. — 32 pages.

La formation religieuse des petits enfants, par Mgr PENON, évêque de Moulins. — 22 pages.

La désertion des campagnes: Ses causes, Ses conséquences, Ses remèdes, par Mè'r RUMEAU, évêque d'Angers. - 16 pages.

Le fléau de la dépopulation : Ses causes, Ses remèdes, par Mgr RUMEAU.

— 15 pages.

La presse : Son influence, Nos devoirs, par Mgr RUMEAU. — 14 pages.

Catéchisme sur le devoir électoral, par S. Em. le card. SEVIN, archevêque de Lyon. - 26 pages.

Usurpation et acquisition des Biens ecclésiastiques: Réfutation de quelques sophismes, Ligne de conduite pratique, par S. Em. le card.

SEVIN. — 28 pages.

Les utilités nationales de l'école libre, par Mgr TOUCHET, évêque d'Orléans. — 30 pages.

La mauvaise Presse, par Mgr TURINAZ, archevêque-évêque de Nancy.

— 23 pages.

SÉRIE A 0 FR. 05 Chaque brochure, 0 fr. 05; port, 0 fr. 05.

Les épreuves de l'Eglise dans les temps présents, par Mgr DELAMAIRE.

Sur quelques conséquences de l'Athéisme en France, par le card.

LANGÈNIEUX.

L'enseignement libre, sa nécessité, les périls qui le menacent, par S. Em. le card. Luços, archevêque de Reims.

La politique antireligieuse de M. Combes, discours de Mgr TOUCHET à Lille.

Sauvons l'enfance et la jeunesse française: Appel aux catholiques, aux honnêtes gens et aux vrais Français, par Mgr TURINAZ.

Nouvelles atteintes aux droits et aux libertés des catholiques de France : Les fondations pieuses, la liberté de renseignement, les objets dart de nos èglises, par Mgr TURINAZ.

Remises par quantités : 7/6, 15/12, 70/50, 150/100. — Port en susMAISON DE LA BONNE PRESSE, 5, RUE BAYARD, PARIS


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La publication des CONTEMPORAINS nous présente les hommes du L* siècle en un court résumé de leur vie et de leur action. Elle nous donne leur portrait physique et leur portrait moral. Elle nous fait connaître le personnage, comprendre les événements, aimer le bien, haïr le mal. C'est une galerie incomparable, un musée vivant et parlant. — Dès maintenant on la trouve dans les bonnes bibliothèques et dans de nombreuses familles cultivées.

LES CONTEMPORAINS Suivant leur ordre de publication Quarante - cinq volumes comprenant chacun 25 fascicules illustrés.

LES PAPES CONTEMPORAINS Un volume comprenant 23 fascicules illustrés.

LES GLOIRES CONTEMPORAINES DE L'ÉGLISE Dix volumes comprenant chacun 25 fascicules Illustrés.

RELIGIEUX ET MISSIONNAIRES CONTEMPORAINS Deux volumes comprenant chacun 25 fascicules illustrés.

LA RÉVOLUTION -- AUTOUR DE LOUIS XVI Un volume comprenant 25 fascicules illustrés.

NAPOLÉON ET SA FAMILLE Un volume comprenant 25 fascicules illustrés.

[LES MARÉCHAUX DE L'EMPEREUR Un volume comprenant 25 fascicules illustrés.

NOS CHEFS D'ÉTAT CONTEMPORAINS Un volume comprenant 25 fascicules illustras.

LES GLOIRES MILITAIRES CONTEMPORAINES Huit volumes comprenant chacun 25 fascicules illustrés. -

LES MARINS CÉLÈBRES DU SIÈCLE Un volume comprenant 25 fascicules illustrés.

LES ARTISTES CONTEMPORAINS MUSICIENS, PEINTRES, SCULPTEURS Trois volumes comprenant chacun 25 fascicules illustrés.

LES EXPLORATEURS CONTEMPORAINS Un volume comprenant 25 fascicules illustrés.

LES FEMMES CÉLÈBRES DU SIÈCLE Quatre volumes comprenant chacun 25 fascicules illustrés.

LES SAVANTS CONTEMPORAINS Trois volumes comprenant chacun 25 fascicules i/lultrés.

LES POÈTES CONTEMPORAINS Un volume comprenant 25 fasc/cules illustrés.

LES ORATEURS CONTEMPORAINS Un volume comprenant 25 fascicules illustrés.

LES LITTÉRATEURS CONTEMPORAINS Un volume comprenant 25 fascicules illustrés.

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Exhortation de S. S. Pie X au clergé catholique à l'occasion de son Jubilé sacerdotal (4 août 1908). Texte latin et traduction française. Prix : 0 fr. 15; port, 0 fr. 05.

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Les doctrines des modernistes : Encyclique « Pascendi Dominici gregis » (8 septembre 1907). 3e édition suivie du décret du Saint-Office Lamentabili sane exitu. Texte latin et traduction française. — 0 fr. 25; port, 0 fr. 05.

Lettre de Notre Saint-Père le Pape à l'Episcopat français sur le « Sillon ».

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Motu proprio « Sacrorum antistitum » sur le modernisme (1er septembre 1910). Texte latin et traduction française. — Une brochure in-12. Prix : 0 fr. 10; port, 0 fr. 05.

La même, édition in-8% Ofr. 20; port, 0 fr. 05.

De la réception quotidienne de la sainte Eucharistie : Décrets de la S. Cong.

du Concile et de la S. Cong. des Indulgences (décembre. 1905, février, septembre, décembre 1906, avril 1907). Traduction française, — 0 fr. 05; port, 0 fr. 05.

L'âge d'admission à la première Communion (Décret de la S. Cong. des Sacrements. 8 aozÎt 1910). Texte latin et traduction française. - 0 fr. 10; port, 0 fr. 05.

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Décret de la S. Cong. Consistoriale sur t AmovibHité administrative des curés (20 août 1910). Texte latin et traduction française.—0 fr. 10; port, 0 fr. 05.

Constitution apostolique « Divino afflatu » sur la nouvelle disposition du psautier dans le Bréviaire romain (ltv novembre 1911). - Une brochure in-8°, de 40 pages, prix : 0 fr. 15; port, 0 fr. 05.

Confessions des Moniales et des Sœurs (Décret de la S. Cong. des Religieux, 3 février 1913). Texte latin et traduction française. — Une brochure in-8° de 16 pages. Prix : 0 fr. 10; port, 0 fr. 05.

Nouvelle disposition partielle des offices divins (Motu proprio « AbhillC duos annos », 23 octobre 1913- Décret de la S. Cong. des Rites, 28'octobre 1913). Texte latin et traduction française. —Une brochure in-8° de 32 pages.

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Les Messes manuelles : ce qu'il faut obseruer et éviter dans la célébration" des messes manuelles. Commentaire canonico-moral sur les décrets Ut débita et Recenti, par le P. J.-B FERRERÈS. Ouvrage traduit de l'espagnol par un DIRECTEUR DE GRAND SÉMINAIRE. — Un vol. in.8° de 164 pages. Prix: 1 fr. 50; port, 0 fr. 15.

La Communion fréquente et quotidienne : commentaire canonico-moral sur le décret Sacra Tridelltina Synodus, par le P. J.-B. FERRERÈS. Ouvrage traduit de l'espagnol par un ancien DIRECTHUR DE GRAND SÉMINAIRE. -,Un vol.

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La Curie romaine : actes historiques et canoniques d'après la Constitution I Sapienti consilio et les autres documents pontificaux, par le P. JULES SIMIER.

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La Première Communion des enfants d'après les enseignements et les prescriptions de S. S. Pie X. Commentaire canonico-moral sur le décret.

« Quam singulari », par le R. P. J.-B. FERRERÈS, S. J. Ouvrage traduit de l'espagnol par un ancien DIRECTEUR DE GRAND SÉ INArRE (seule traduction française autorisée). Un vol. in-8° de 110 pages. Prix: 1 fr. 50; port, 0 fr. 15.


CHEMINS DE FER DE L'ÉTAT Depuis le 6 décembre, les importantes modifications ci-après seront apportées au service des trains : f Ligne de Paris au Havre. — Création d'un express de chaque sens dans la matinée et d'un express de chaque sens dans la soirée, entre Paris-Saint-Lazare et Le, Havre.

Départ de Saint-Lazare à 7 h. 15 et 16 h. 51, arrivée à Rouen à 9 b. 37 et 19 h. 17, au Havre à 11 heures et 20 h. 40; départ du Havre à 7 h, 31 et 17 h. 4, arrivée à Rouen à 8 h. 58 et 18 h. 27, à Saint-Lazare à il h. 20 et 20 h. 53.

1 2" Ligne de Paris à Cherbourg. — Accélération de l'express actuel de Paris à Cherbourg et retour. Gains respectifs dans la durée du trajet : 1 h. 40 et 2 h. 15, Départ de Saint-Lazare à 8 h. 4, arrivée à Caen à 12 h. 26, à Cherbourg à 15 h. 2; départ de Cherbourg à 12 h. 16, arrivée à Caen à 14 h. 43, à Saint-Lazare à 18 h. 55.

Création d'un express dans la matinée, de Caen à Paris, et, dans la soirée, de Paris à Caen

! Départ de Caen à 6 h. 34, arrivée à Saint-Lazare à 10 h. 50; départ de Saint-Lazare à 18 h. 56, arrivée là Caen à 23 h. 15.

[ 3° Ligne de Paris à Mantes par Poissy et par Argenteuil. — Création de nouveaux trains de matinée et de soirée entre Paris-Saint-Lazare, Les Mureaux et Mantes-Gassicourt. et entre Paris-Saint-Lazare, Conflans,.

Sainte-Honorine et Meulan-Hardricourt.

4° Ligne de Paris à Chartres. — Création d'un train dans chaque sens entre Paris et Chartres : 1 Départ de Paris-Montparnasse à 19 heures, arrivée à Chartres à 22 heures; départ de Chartres à G h. 2, arrivée à Paris-Montparnasse à 9 h. 15.

t DO Ligne de Nantes-Etat à Bordeaux. — Accélération des trains express de jour, dans le but d'établir une nouvelle relation : t A) De Rennes à Bordeaux, viâ Blain et Nantes-Etat, — B) De Bordeaux sur la Bretagne par la mise en correspondance, à Nantes, du train express B.- N. avec le train C. A. (Orléans) partant de Nantes-Orléans r 15 h. 33 et se dirigeant vers Quimper : I Départ de Rennes à 6 heures, arrivée à Nantes-Etat à 9 h. 40; départ à 10 heures, arrivée à BordeauxSaint-Jean à 17 h. 51; départ de Bordeaux-Saint-Jean à 7 h. 36, arrivée à Nantes-Etat à 11 h. 32, à NantesOrléans à 15 h. 10.

)L En outre, de nouveaux trains seront ajoutés et des modifications apportées au service sur de nombreuses lignes d'embranchement.

Pour ces modifications, consulter les affiches apposées dans les gares.

L'administration des chemins de fer de l'Etat fait connaître que, depuis le 7 février et jusqu'à nouvel avis, le service maritime voyageurs entre la France et l'Angleterre et vice versa, par les ports de Dieppe et de Folkestone, qui n'était assuré que la semaine, aura également lieu le dimanche.

CHEMINS DE FER DE L'EST Depuis le 19 décembre, il est mis en marche des trains-express, 1re, 2° et 3e cl. entre Paris et Nancy et vice versa, Paris et Belfort et vice versa.

Dans ces trains express, les voyageurs ne sont admis que dans la limite des places disponibles.

Au départ de Paris, les places de 1re et 2' cl. peuvent être retenues à l'avance (1 fr. par place).

Voici l'horaire de ces trains : 1° Train Paris-Nancy. — Départ de Paris à midi, de Château-Thierry il 14 h. 29, d'Epernay à 15 h. 13 de Châlons à 15 h. 41-15 h. 49, de Vitry-le-François à 16 h. 22, de Revigny à 16 h. 56, de Bar-le-Duc à 17 h. 14-17 h. 19, de Gondrecourt à 18 h. 27, de Toul à 19 h. 18, arrivée à Nancy à 19 h. 50. — Départ de de Nancy à 12 h. 10, de Toul à 12 h. 46, de Gondrecourt à 13 h. 50, de Bar-le-Duc à 14 h. 45-14 h. 50, de Revigny à 15 h. 7, de Vitry-le-François à 15 h. 40, de Châlons à 16 h. 9-16 h. 17, d'Epernay, à 16 h. 50, de Château-Thierry à 17 h. 37, arrivée à Paris à 20 h. 15.

Dans ces trains, les voyageurs de 3e cl. ne sont admis que pour un parcours simple d'au moins 300 kilomètres à faire sur le réseau de l'Est, ou en payant pour ce parcours.

Wagon-restaurant entre Paris et Epernay. Epernay et Paris.

2° Train Paris-Belfort. — Départ de Paris à 8 heures, de Longueville à 9 h. 19, de Romilly à 9 h. 54, de Troves à 10 h. 26-10 h. 35, de Bar-sur-Aube à 11 h. 24, de Chaumont à 12 h. 6-12 h. 13, de Langres à 12 h. 48, de Chalindrey à 13 h. 4, de Vitrey-Vernois à 13 h. 29, de Jussey à 13 h. 4i, de Port-d'Atelier à 13 h. 56, de Vesoul à 14 h. 18, de Lure à 14 h. 58, arrivée à Belfort à 15 h. 31. — Départ de Belfort à 13 h. 26, de Lure à 13 h. 57, de Vesoul à 14 h. 26, de Port-d'Atelier à 14 h. 48, de Jussey à 15 h. 3, de Vitrey-Vernois à 15 h. 15, de Chalindrey à 15 h. 47-15 h. 52, de Langres à 16 h. 6, de Chaumont à 16 h. 41-16 h. 51, de Bar-sur-Aube à 17 h. 28, de Troyes à 18 h. 15-18 h. 23, de Romilly à 18 h. 59, de Longueville à 19 h. 42, arrivée à Paris à 21 h. 5.

Dans ces trains, les voyageurs de 3' cl. ne sont admis que pour un parcours simple d'au moins 200 kilo- mètres à faire sur le réseau de l'Est, ou en payant pour ce parcours.

Wagon-restaurant, entre Paris et Chalindrey, et Chalindrey et Paris.

Des pourparlers sont, engagés avec les chemins de fer fédéraux pour la continuation de ce, servicei sur la Suisse.


CHEMIN DE FER DE PARIS A ORLÉANS L'hiver aux Pyrénées et à la Côte d'Argent.

Les communications par voie ferrée continuent à s'améliorer, ce qui est d'un excellent augure pour la reprise des affaires. Il convient de féliciter la Compagnie d'Orléans du nouvel et très méritoire effort qu'elle vient de faire en ce sens. Elle lance désormais trois nouveaux trains express par jour, qui partent du quai d'Orsay à 8 h. 40 le matin, 20 heures et 21 h. 50 le soir, et arrivent en neuf heures à Bordeaux, en treize heures à Pau, Biarritz et Saint-Jean-de-Luz. Le retour de la Côte d'Argent s'effectue avec la même facilité, et toutes commodités sont offertes aux voyageurs, depuis les wagons-lits, pour les trajets de nuit, jusqu'aux voitures directes des trois classes entre Paris, Pau et Hendaye-Irun. Nul doute que le trafic général n'en reçoive une heureuse impulsion.

Nouvelles améliorations au service des trains.

A. - Câte Sud de Bretagne au dela de Nantes.

Le train express partant de Paris-Quai d'Orsay à 20 heures et arrivant à Nantes à 3 h. 19 est désormais continué par un nouveau train partant de Nantes à 4 h. 17 pour arriver à Redon à 6 h. 23, à Vannes à 7 h. 52, à Lorient à 9 h. 23, à Quimper à 11 h. 13.

B. — Ligne de Paris-Toulnuse par Capdenac avec correspondance sur Rodez et Albi. Le train express partant de Paris-Quai d'Orsay à 19 h. 20, arrivant à Limoges à 1 h. 53 et à Brive à 3 h. 36, a une continuation par express à partir de ce dernier point sur Capdenac.

Départ de Brive à 4 heures, arrivée à Saint-Denis-près-Martel à 4 h. 43, à Figeac à 6 h. 26, à Capdenac à 6 h. 41 (correspondance sur Rodez, départ à 6 h. 59, arrivée à 10 h. 38), départ de Capdenac à 7 h. 50, arrivée à Albi à 14 h. 28, à Toulouse à 16 h. 19.

Au retour, départ de Toulouse à II h. 39, d'Albi à 13 h. MO, de Rodez à 13. h. 53, de Capdenac à 20 h. 30, de Figeac à 20 h. 48, de Saint-Denis-près-Martel à 22 h. 52; arrivée à Brive à 23 h. 46 pour continuation par l'express partant de Brive à 0 h. 22 et de Limoges à 2 h. 12, pour arriver à Paris-Quai d'Orsay à 8 h. 33.

CHEMINS DE FER DU MIDI Agence de voyages des chemins de fer d'Orléans et du Midi. — En présence du mouvement renaissant des affaires qui développe en même temps les déplacements, les Compagnies d'Orléans et du Midi viennent d'ouvrir à nouveau leur Agence de voyage installée 16, boulevard des Capucines, dont le succès était si vif avant le début des événements actuels.

Le public pourra s'y procurer les catégories de billets que, d'accord avec l'autorité militaire., les Compagnies sont autorisées à délivrer, et tous renseignements sur les horaires des trains et sur les régions de villégiature desservies par les deux réseaux, entre lesquelles celles de Pau et de Biarritz sont notamment si fréquentées.

CHEMINS DE FER P.-L.-M.

Mise en marche de nouveaux trains de voyageurs à marche accélérée.

La Compagnie des chemins de fer P.-L.-M. rétablit des trains à marche accélérée sur les principales artères de son réseau. Le nouveau .service actuellement en vigueur comporte le maintien des trains-poste de nuit dans leur horaire actuel entre Paris et Marseille ave prolongation sur Nice. Départ de Paris : 20 h. 5 ; arrivée à Lyon à 5 h. 9, à Marseille à il h. 30, à Nice à 17 h. 13. Dans le sens inverse : départ de Nice à 10 h. 8, de Marseille à 16 h. 16, de Lyon à 22 h. 8; arrivée à Paris à 7 h. 15. Ces trains accessibles aux voyageurs de 1re et de 2* classe faisant 500 kilomètres au moins seront dédoublés tous les jours entre Paris et Marseille..

En outre, il est créé trois express de toutes classes et de chaque sens entre Paris et Lyon, quatre entre Lyon et Marseille, deux entre Marseille et Nice.

Les lignes de Lyon à Genève, Culoz à Modane, Lyon à Grenoble, Tarascon à Cette seront desservies par un express de chaque sens en correspondance avec les trains-poste. De plus. un train accéléré de chaque sens sera mis en circulation entre Lyon et Grenoble.

Les express circulant entre Paris et Lyon emprunteront la voie du Bourbonnais; ils seront pourvus a SaintGermain-des-Fossés de correspondance de et sur Clermont-Ferrand et Saint-Etienne.

Les relations directes entre Lyon, d'une part, Bordeaux et Nantes, d'autre part, seront maintenues.

Enfin, entre Lyon et Saint-Etienne sera établi un service comparable au service normal.

Liaison des trains.

En vue d'établir la liaison des express du Simplon avec les trains des chemins de fer de l'Etat et du Nord assurant les relations directes avec l'Angleterre, vià Folkestone, il est mis en marche, tous les jours, des trains de jonction circulant d'après l'horaire ci-après : 1° De Paris Saint-Lazare à Paris P.-L.-M. et vice-versa : départ de Paris-P.-L.-M. à 7 h. 30, arrivée à ParisSaint-Lazare à 8 h. 38. Départ de Paris-Saint-Lazare à 20 h. 48, arrivée à Paris-P.-L.-M. à 21 h. 66.

2° De Paris-Nord à Paris-P.-L.-M. : départ de Paris-Nord à ;.W h. 56, arrivée à Paris-P.-L.-M., à 21 h. 37.


MAISON DE LA BONNE PRESSE, 5, RUE BAYARD, PARIS ABEL FABRE PAGES D'ART CHRÉTIEN 4 volumes, grands in-8° de chacun 128 pages à deux colonnes, richement illustrés de 3go reproductions photographiques. Chaque vol. sous élégante couverture en couleurs, broché, 1 franc; port, 0 fr. 20.

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Reliés, 6 francs, port, un colis de 3 kilos.

1re série (parue en 1910). — 100 photogravures.

Images du Christ : essai d'iconographie, du « Bon Pasteur » des Catacombes au « Sacré Cœur » moaèrne. — Le Crucifix: sa représentation à travers les âges. — Vierges et Madones : représentation de la Vierge Marie, des Catacombes à nos jours. — Fra Angelico : sa valeur artistique au point de vue technique, la chapelle de Nicolas V au Vatican. — Saint-Pierre de Rome et Notre-Dame de Paris : parallèle entre l'architecture classique et l'architecture gothique. — La Généalogie des cathédrales françaises : étapes du développement architectural de la période gothique (XI.I'-XV' sicle). — Nouveautés sur le gothique : Origines anglaises du style flamboyant. La déviation de l'axe des églises.

Evas. ment des nef* guthiques. — Le Gothique du Midi.

2e série (parue en 1911). — 90 photogravures.

De Giotto à Raphaël: évolution de la peinture italienne de 1304 à 15 I o. — Les Madones de Raphaël. — Michel-Ange peintre de la Sixtine. — La légende de sainte Ursule et des onze mille vierges, par Memling et Carpaccio. — Les rois Mages d'après les artistes : des Catacomtes à Fia drin. — Les portails imagés : étude architecturale, sculpturale et iconographique des jcxntaiïs des cathédrales. — Le Rêve de l'Imagier : la Sainte-Chapelle de Paris, et Notre-Dame de Salut.

3e série (parue en 1912). — 120 photogravures.

Iconographie des Anges : des premiers siècles à Maurice Denis. -. Les Primitifs français : Y-a-t-il tu, en peinture, dtsPrim tifs français ? — Histoire de l'Autel (avec une liste de 270 monuments les plus caractériques catalogués par ordre chronologique du 11° siècle à nos jours). — Du Néo-Gothique au Moderne : cinquante ans d'architecture religieu e 11850-1900).

4e série (parue en 1913). — 80 photogravures.

La Filiation d'Ingres : Histoire de la peinture religieuse décorative en France au XIX" siècle.

1. Ingres et sa doctrine. — Il. Orsel, Périn et Roger. — III. Les élèves d'Ingres. — IV. Hippolyte Flandnn, — V. Th. Chassériau. — VI. Overbeck et l'Ecole de Beuron. — VII. Puvis de Chavannes.

VIII. La réaction coloriste : Henri Martin, Ferdinand Humbert, Albert Besna?-d. - IX. Quelques églises : Le Sacré-Cœur de Montmartre, Lourdes, Fourvière, Oullins, Versailles (chapelle des Augustines), La Madeleine, Notre-Dame de France à Jérusalem, etc. — X. Maurice Denis.

QUELQUES APPRÉCIATIONS De la Chronique des Arts, supplément de la où il ne s'attendait à trouver que de la critique, le lecteur Gaz^ ette des Beaux-Aris, (février ion, igi3) : rencontrera des pages d'une psychologie délicate. Le Ga~eMe des Bea.ux-.4.n,s: (fJJrier 19 II, 19 13) : texte est fleuri de belles images qui pourraient, a elle « Nous ayons sigiialé ici même, au fur et à mesure de seules, former une anthologie d'art, un précieux album leur apparition dans le Àiois littéraire, quelques-unes des mais qui fournissent ici les références et les illustrations études qui composent cet intéressant et instructif destinees à mieux faire comprendre le texte. La Maison recueil. Toutes ces pages, qui témoignent dune érudi- de la Bonne Presse a édité ainsi, pour un prix minime, tion sérieuse, d'une etude attentive et pénétrante, des une œuvre réellement et sainement artistique, des Pages monuments, sont enrichies de nombreuses illustrations d'Art que l'on souhaiterait de voir lues et feuilletées, non à l'appui des démonstrations du texte » seulement dans les presbytères ou les Séminaires, mais ; « Avec la même érudition, le même agrément de presen- dans toutes les familles, surtout chrétiennes, où on s'inté, tation, M. A. rabre aborde, dans cette 3e série. de nouvelles resse aux questions d'art et d'histoire, aux manifestations questions d'histoire et d'iconographie particulièrement du goût et de la beauté. »

intéressantes » IDteressanes.» -. De M. André Pératé, conservateur-adjoint du De la Revue du Clerge françaIs (y oct^ obre igi i); Musée de Versailles (Polybiblion, mai igi3) : « Nos lecteurs savent déjà que M. Abel Fabre est un « Je voudrais voir dans les mains de tous les jeunes artiste et un écrivain de goût très sûr en meme temps gens et de toutes les jeunes filles qui slntéressent à rart qu'un archéologue très.érudit On ne saurait trop recom- ~es~~i'pdu'~nf". ~fines nui ~':'!r)t~pr'<"~ :<:pTit A l'art qu un archéologue très erudit. On ne saurait trop recom- les excellentes Pages d'Art chrétien, de M. Abel Fabrc.

mander ses études aussi agréables que pénétrantes. » Si un recueil mérite vraiment le nom de populaire, c'est De M. Francis Vincent (Revue pratique bien .celui-là : accessible à tous par un prix étonnamment a W AA p-NFoItTRoUgRÉelFiÎqMuIP e, Mm/ati i, 1T 9n 1T2> , FaIvNrRiIl L imgiii?) i • modique, séduisant au possible un pri. x etonnammen t j- modique, séduisant au possible par une illustration dA~og-e~ti)~~M/e<. , t!Mn/n t 1912, avnl 1913) photographique de la plus haute valeur, enfin et surtout « Ne manquons pas de lire les volumes de M. Fabre. recommandable par un texte où la science la plus sérieuse Ses études sont superbement éditées, avec une illustration et la plus sûre se fait tout aimable et gracieuse Ces extrêmement soignée. Il est clair que l'auteur connaît son études nous montrent en l'auteur un artiste en même sujet, et il s'y promène avec une aisance qui dispense de temps qu'un vulgarisateur fidèle aux plus saines traditout effort son. lecteur même non initié Ces Pages tions, mais que les nouveautés n'effrayent point si une o'Art ont toute la solidité d'un manuel et tout l'agrément piété sincère les inspire. Demandons-lui de continuer pour d'une étude d'amateur lettré. » notre profit et notre joie l'œuvre si intelligemment entreJe ne sais si l'on avait encore, parmi nous catho- prise, et souhaitons cordialement son grand succès. »

liques, vulgarisé la eritique d'art avec une aussi aimable Trait d Union (de M„ arneffn-e m [Bel1 gi■ que]-1, aisance et une telle lucidité de jugementl Le critique Du Trait d'Union (de Marneffe [Belgique], qui manie la plume avec cette fermeté n'est pas seu- juillet igi3) : rement un théoricien d'art excellent, mais un pur écri- « Ce n'est pas une histoire de l'art menée d'une vain. Quand on domine ainsi sa matière et qu'on l'étreint façon didactique; ce ne sont que des pages, mais des avec cette sûreté, quand on sait de la sorte aérer un sujet, pages substantielles à travers lesquelles court, comme en en élargir les horizons par le jeu pertinent des idées gêné- se jouant, une plume de savant et d'artiste. Le style en rate et des comparaisons, on peut être inscrit, pour sa est clair, intéressant, plastique même en mainte concluparue, au Livre de rnaitrise » sion; les gravures sont nombreuses et font vraiment corps De M. C, de Suplicy (Bulletin de LittératUl'e avec le texte Ces pages peuvent être grandement utiles De M C de SUDIÎCV (Bulletin ade e LT iutttèerraatluui re e à nos jeunes gens pour leur formation esthétique »

ecclésiastique, de l'Institut catholique de Toulouse, à De Jeunes gens pour leur formatIOn esthétiq~ue. »

janvier igi3) : De M. Louis Dimier (Action française, octobre Co.,.. Parmi les livres traitant de l'Histoire de l'Art, ces I913) : séries occupent une place toute particulière Le lecteur « Ce qui distingue ces études, c'est un très grand curiçux y trouvera Ides études intéressantes, pleines de bon sens en une exacte information. L'auteur se tient au détails généralement ignorés ou que l'on ne découvrirait courant de l'inédit publié par les historiens de l'Art et des qu'épars dans de nombreux recueils Ces études, théories émises par les antiquaires. Tout cela chez lui est modèles de clarté et de grâce, cachent sous une forme passé au crible d'une réflexion qui cherche ses contacts J souple ét élégante une documentation très sérieuse Un dans le sentiment général. Ainsi la lecture est des plus 1 des attraits de ces étùdes - non le moindre - est que, là profitables. Peu de systèmes et beaucoup d'instruction »


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