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Title : Géographie universelle de Malte-Brun. Tome 2 / illustrée par Gustave Doré
Author : Malte-Brun, Conrad (1775-1826). Auteur du texte
Publisher : G. Barba (Paris)
Publication date : 1858
Contributor : Doré, Gustave (1832-1883). Illustrateur
Set notice : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb308691086
Type : text
Type : monographie imprimée
Language : french
Language : French
Format : 6 vol. : fig. ; gr. in-8
Format : Nombre total de vues : 392
Description : Avec mode texte
Rights : Consultable en ligne
Rights : Public domain
Identifier : ark:/12148/bpt6k65257762
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, G-3318
Provenance : Bibliothèque nationale de France
Online date : 03/06/2013
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GÉOGRAPHIE UNIVERSELLE
DE
MALTE-BRUN
TOME SECOND
TABLE DES MATIÈRES.
EUROPE (SUITE) RUSSIE.
GRÈCE.
TURQUIE.
ASIE TURQUIE.
SIBÉRIE.
PERSE.
TURKESTAN.
ARABIE.
CHINE.
JAPON.
HINDOUSTAN.
INDO-CHINE.
AFRIQUE EGYPTE.
NUBIE.
ABYSSINIE.
TRIPOLI.
ALGÉRIE.
S'AH'ARA OU GRAND DÉSERT.
SÉNÉGAMBIE.
ILES D'AFRIQUE.
CAFRERIE ET NATAL.
AMÉRIQUE AMÉRIQUE SEPTENTRIONALE.
CANADA.
AlUERIQUE RUSSE.
AMÉRIQUE ANGLAISE.
TERRES ARCTIQUES.
ÉTATS-UNIS.
MEXIQUE.
AMÉRIQUE CENTRALE.
ANTILLES.
AMÉRIQUE MÉRIDIONALE.
PÉROU.
GUYANE.
BRÉSIL.
OCÉANIE MALAISIE.
AUSTRALIE.
POLYNÉSIE.
f fil
GEOGRAPHIE UNIVERSELLE
DE
MALTE-BRUN
ILLUSTRÉE PAR
GUSTAVE DORÉ
PARIS l GUSTAVE BARBA, LIBRAIRE-EDITEUR 8, RUE CASSETTE
1859
GÉOGRAPHIE UNIVERSELLE
DE
MALTE-BRUN
TOME SECOND
TABLE DES MATIÈRES.
AUTRICHE - (Suite).
ALLEMAGNE
Bavière,
Hanovre, Saxe,
les Grands-Duchés et Principautés.
HOLLANDE.
BELGIQUE.
ITALIE.
SUISSE.
ILES BnITANXJQUES.
FRANCK
GÉOGRAPHIE UNIVERSELLE
DE
MALTE-BRUN
ILLUSTRÉE PAR
GUSTAVE DORÉ
PARIS GUSTAVE BARBA, LIBRAIRE-ÉDITEUR 31, RUE DE SEINE 1357
BAVIÈRE.
Postillons bavarois.
SlTUATION>Î^VT ^IM ^nîS, SUPERFICIE, POPULATION. — Le royatHme né Hnvièlv. formait autrefois l'une des principautés les plus im p ortantes de la vieille Allemagne ; c'est en 1806
que l'ancien duché électoral de Bavière reçut, avec une augmentation de territoire, le titre de royaume. Il occupe le troisième rang dans la Confédération Germanique.
Ce royaume se compose de deux parties distinctes et d'inégale grandeur, situées l'une sur la rive droite du Rhin , c'est l'ancienne Bavière ducale; l'autre sur la rive gauche, c'est le Palatinat, que l'on nomme encore Bavière Rhénane ou Cercle du Rhin. Ces deux parties sont séparées entre elles par un espace de 55 kilomètres.
La première a pour limites, au nord, la Hesse-Electorale, la Saxe-Weimar, la Saxe-Meiningen, la Saxe-Gotha, les principautés de Reuss et le royaume de Saxe; à l'est, la Bohême et l'Autriche; au sud, le Tyrol, le Vorarlberg, provinces de l'empire d'Autriche, et le canton suisse de Saint-Gall; à l'ouest, le Wurtemberg, les grands-duchés de Bade et de Hesse-Darmstadt.
La seconde a pour limites, au nord, la Province Rhénane prussienne et la Hesse-Darmstadt; à l'est, le grand-duché de Bade, dont le Rhin la sépare; au sud, la France; à l'ouest, la Province Rhénane de Prusse et la Hesse-Hombourg.
La superficie du royaume est de 1387,50 milles carrés géographiques allemands, ou 77,700 kilomètres carrés. On évaluait la population du royaume en 1855 à 4,541,556 habitants.
Fidèle à la marche que nous avons adoptée pour la Prusse, nous considérerons tout le territoire compris entre le Wurtemberg et l'Autriche comme le royaume de Bavière proprement dit ; et, après avoir décrit sous les rapports physique et politique son importante superficie, nous considérerons séparément sous les mêmes rapports la province bavaroise des bords du Rhin.
BAVIÈRE PROPRE.
MONTAGNES ET RIVIÈRES DE LA BAVIÈRE PROPRE. —
La Bavière proprement dite ou la vieille Bavière occupe presque tout le bassin formé à l'ouest par le Raulie-Alp et le Spessarl ; au nord par le Rhônegebirge, le Thuringerwald, le Frankenwald et le Fichtelgebirge ou la Chaîne des Pins; à l'est par le Bôhmerwald; et au sud par divers prolongements des Alpes Tyroliennes. Ce vaste bassin se divise naturellement en deux parties ou bassins secondaires. Le premier ou le septentrional est celui que traverse la Regnitz; il n'est, à proprement parler, que celui du Mein. Il est circonscrit par deux branches partant du point où la Regnitz prend sa source, et dont l'une se dirige à droite, sous le nom de Frankenicald, pour aller se rattacher au Ficlitelgebirge; tandis que l'autre, sous celui de Steigerwald, se prolonge jusqu'à la chaîne du Spessart, dont elle n'est séparée que par le cours du Mein. La principale pente de ce bassin est dirigée du sud au nord ; c'est aussi cette direction que suit la Regnitz avant d aller se réunir au Mein. Le second bassin ou le méridional, plus important que le premier, est traversé par le Danube; il est formé par les ramifications du Franlcenwald et du Steigericald, et par les autres montagnes que nous avons nommées : celles qui s'élèvent au nord du fleuve sont bien moins importantes que celles qui se prolongent au sud; aussi les afûuents qu'il reçoit sur sa rive gauche sont-ils moins considérables que ceux de la rive droite. Les trois qui méritent d'être cités par leur étendue sont YAltmûhl, qui descend du Steigerwald; le Naub, oui descend du Ficlitelgebirge; et la Regen, qui prend sa source
dans le BOhmerlttld,¡ Mais sur sa rive droite ce sont l'Iller, le Lech, l'Isar ou l' Iser, et l'Inn, qui ont leurs sources dans les Alpes.
La principale pente de ce bassin est dirigée vers le nord-est. Les diverses ramifications de ces montagnes forment des vallées larges et des plaines basses dont le sol est ordinairement marécageux. La plaine la plus étendue occupe l'espace compris entre Ratisbonnc et Osterhofen, c'est-à-dire une longueur de 65 kilomètres sur une largeur un peu moins considérable.
Le bassin du Danube nous montre donc d'une manière distincte la séparation de deux grands systèmes de montagnes : celui des Alpes au sud du fleuve, et celui des monts Hercynio-Carpathiens au nord, comme nous l'avons dit dans les généralités sur la géographie physique de l'Europe.
Nous avons indiqué la disposition de ces montagnes ; cependant quelques détails sur le Spessart, le Rhônegehirge et le Bôhmerwald, nous donneront les moyens de compléter la géographie physique de la Bavière.
La chaîne du Spessart commence sur les bords du Mein, à l'endroit où le cours de cette rivière la sépare de la fciiaine de l'Odenwald. L'extrémité la plus rapprochée du Mein porte le nom d'Engelsberg ; elle se dirige vers le nord en projetant des rameaux au sud-ouest et au sud-est, et va se rattacher à la chaîne de Rhônegebirge; plusieurs ruisseaux, la plupart tributaires du Mein, y prennent leur source. On trouve dans le Spessart quelques roches volcaniques; mais celles qui s'y montrent le plus fréquemment sont le granit, le gneiss, la syénite et le porphyre. Ces montagnes offrent des formes arrondies et prolongent au loin leurs pentes adoucies; ce n'est que près d'Aschaffeubourg qu'elles présentent des rochers escarpés et des sommités pyramidales.
Le Rhônegehirge ou Rhœnegebirge occupe une étendue plus considérable que le Spessart; à l'ouest il va se rattacher à la chaîne du Vogelsberg, et à l'est à celle du Thüringerwald; il fournit au Mein deux affluents, le Sinn et la Saale.
Le Fichtelgebirge, qui unit le Rhônegebirge au BGhmerwald, est en grande partie granitique comme ces deux chaînes. Sa cime la plus élevée est le mont Ochsenlmpf Deux petites rivières en descendent pour former le Mein : l'une est le Mein blanc, et l'autre, au sud de celle-ci, est le Mein ronge. Le lit de la première à Culmbach, comparé à celui de la seconde à Bayreuth, est de 42 mètres plus haut. La pente du bassin du Mein, de l'est à l'ouest, est considérable: on l'évalue à plus de 200 mètres, depuis Bayreuth jusqu'à Würzbourg, c'est-à-dire sur une étendue de près de 130 kilomètres.
Le Bôhmerwald se rattache, ainsi qu'on viènt de le voir, au Fichtelgebirge; il commence aux sources de l'Eger et se termine aux monts Moraves. Long de 350 kilomètres, sa largeur au nord-ouest est de 25 kilomètres, au centre de 34, et au sud de 55. Depuis son extrémité septentrionale, il s'élève graduellement jusqu'auprès de Waldmunchen ; près de Sviesel, il atteint sa plus grande élévation , puis il diminue graduellement jusqu'à son point de jonction avec les monts Moraves. Ses plus hautes sommités sont l'Arber, le Rachel et le Dreysel ou Drey-Sesselberg. Cette chaîne, très-escarpée du côté de la Bavière, offre des pentes beaucoup moins rapides du côté de la Bohème; elle projette sur le sol de la première plusieurs ramifications, dont les plus importantes sont le Greinerwald , qui, s'élevant près de Waldmunchen, voit couler au bas de ses pentes méridionales la Regen , affluent du Danube, et le Bayerwald , qui se détache du mont Rachel et va se terminer près de Ratisbonne, en séparant le cours du Danube de celui de la Regen. Cette rivière n'est pas la seule importante qui descende du Bôhmerwald pour suivre les pentes du bassin du Danube : plusieurs des cours d'eau qui forment le Naab prennent leur naissance dans cette chaîne et dans celle du Fichtelgebirge; il faut encore y ajouter l'llz, qui a sa source au pied du mont Rachel. La base du Bôhmerwald est granitique. Ses roches offrent des cimes décharnées, des pointes en forme de pyramides et d'aiguilles, des abîmes profonds et de nombreux marais. Les forêts qui en occupent les pentes sont peuplées d'ours et de lynx.
Le cours du Danube partage le sol de la Bavière en deux grandes formations géologiques. Au nord du fleuve, les terrains, y compris ceux du bassin de la Regnitz et du Mein, appartiennent à la formation ancienne ; au sud s'étendent, depuis le lac de Constance jusqu'au confluent de Vlnn et du Danube, de vastes dépôts appartenant à la formation tertiaire.
ANIMAUX FOSSILES. — C'est au nord du fleuve que les terrains d'alluvion et de transport plus anciens que ceux de la Bavière méridionale, ont offert aux recherches de la zoologie géologique des ossements de ces anciens animaux qui habitèrent notre planète avant qu'elle pût offrir à l'espèce humaine un climat et une nourriture propres à sa conservation. Les us fossiles de tapirs et de rhinocéros découverts dans la vallée de la Regen, les crocodiles des schistes calcaires de la vallée de l' Altmiihl; les débris d'éléphants, qui par leurs dimensions annoncent une taille de 4 à 5 mètres, et qui furent trouvés aux environs de Schweinfurth et d'Arfistein dans la
vallée du Mein ; enfin les cavernes remplies d'ossements de lious et d'hyènes découvertes dans le Steigcrwald, annoncent combien ce pays est intéressant pour tout ce qui tient aux recherches de la plus attrayante des sciences naturelles.
LACS. — La partie la plus élevée et la plus méridionale de la Bavière se ressent du voisinage et de l'influence des Alpes; les lacs y sont nombreux, plusieurs ont une étendue considérable; ainsi, sans compter celui de Constance, dont une très-faible partie dépend de ce royaume, nous pouvons en citer huit importants par leur superficie : celui de Ammer, d'où sort une rivière de ce nom qui va se jeter dans l'Isar; celui de Würm, celui de Cliiem, qui alimente la petite rivière d'Alz, affluent de l'Inn , et d'où s'élèvent plusieurs îles, sont les plus étendus; ajoutons le Staffel, le Kochel, le lTlalchen, le l'egern, et le Ba¡'llwlomæus, ou le lac Royal, nous aurons relaté ceux qui méritent le plus d'être cités. D'autres moins vastes, ainsi que beaucoup d'étangs, sont, avec ceux que nous venons de nommer, une sorte de richesse pour cette partie de la Bavière, par les pêches abondantes auxquelles ils donnent lieu.
SOURCES MINÉRALES. — On compte aussi dans la Bavière beaucoup de sources minérales : les plus fréquentées sont celles de Sieekeïsretith ou d'Alexandre, situées dans la contrée pittoresque du FichVetgebirge ; les bains de Kissingfn, dans une vallée arrosée par la Saale, à 55 kilomètres au nord de Wiirzbourg; dans la même contrée, les eaux acidulés et ferrugineuses de Bocklet et de Brückenau; et, dans la partie méridionale du royaume, celles de Hardecker, qui se consomment presque exclusivement à Munich.
CLIMAT. — Le climat de ce pays est généralement sain et tempéré : l'élévation du sol et le voisinage des montagnes apportent cependant des modifications considérables dans la température : au midi du Danube, l'air est vif, on éprouve des hivers longs et rigoureux; c'est la partie la plus élevée de la Bavière ; c'est celle qui est la plus exposée a l'influence des glaciers éternels des Alpes. Dans la région du Bnknttfwaid, les vents du nord-est rendent le climat sec et âpre ; au nord, le Fichtelgebirge donne à la contrée du haut Mein une âpreté moins grande peut-être, parce que les vallées s'y étendent de l'est à l'ouest, et que les montagnes y modifient l'influence des vents du nord. Dans un grand nombre de lieux, le printemps et l'été sont humides et pluvieux; mais dans les vallées ouvertes au sud, les chaleurs de l'été sont souvent excessives. De toutes iës saisons, là plus belle est ordinairement l'automne.
ANCIENS HABITANTS. — La Bavière était occupée jadis par deux nations considérables que séparait le Danube. Au nord du fleuve s'étendaient les Hermunduri, au sud les Vindelici. Les pentes du Bôhmerwald ou de la forêt de Bohême, que les-anciens appelaient Gabrita Sylva, jusqu'au bord du Danube, et depuis l'embouchure du Naab jusqu'à celle de l'Ilz , étaient habitées par les Narisci, peuple moins considérable que les deux précédents. Les Hermunduri adoraient, suivant Tacite, Mars et Mercure ; ils eurent souvent des démêlés et des guerres sanglantes avec les Calti, leurs voisins, mais situés plus au nord. Dans ces luttes cruelles , ils vouaient l'armée ennemie à leurs dieux; alors, s'ils étaient vainqueurs, ils massacraient sans pitié les hommes et les chevaux de l'armée vaincue. Ces peuples se soumirent cependant aux armes des Romains, dont ils devinrent les alliés les plus fidèles; aussi étaient-ce les seuls Germains, dit l'historien latin Tacite, qui communiquassent librement avec les Romains, et qui pussent parcourir sans gardes les colonies limitrophes; et tandis, ajoute-t-il, que nous ne faisons voir aux autres peuples que nos armes et nos camps, nous ouvrons à ceux-ci nos maisons de la ville et de la campagne, qui n'excitent point leur cupidité.
Les Narisci, qui, suivant Tacite encore, habitaient près des Hermunduri, ne leur cédaient point en bravoure; nous avons peu de renseignements sur ce peuple. Ptolémée et Dion Cassius ne donnent sur leur compte aucune particularité remarquable ; mais nous devons faire observer que le premier de ces deux auteurs les appelle Varisti, et le second Narfstoe.
Les Vindelici s'étendaient depuis le lac de Constance ( lacus Tlenetus) jusqu'au confluent de l'Inn et du Danube; ce fleuve leur servait de limite. Suivant d'Anville, ils doivent leur nom à deux rivières, le Vindo, qui est aujourd'hui la Weftach, et le licus, aujourd'hui le Lech, sur le bord desquelles ils avaient dès la plus haute antiquité leurs principaux établissements. Cette étymologie paraît assez naturelle. Les Vindelici furent soumis par les Romains, et leur pays reçut de ceux-ci le nom de Vindelici a ; il fut joint ensuite à la Rhètie (pr ovin ci a Rhcetia), dans laquelle furent établies plusieurs colonies romaines. La plus importante parait avoir été celle qui reçut d'Auguste le nom d'Augusttt Tlzndellcorùm, aujourd'hui Augsbourg, que dans les transactions commerciales on désigne encore sous le nom d'Auguste. Une autre assez considérable fut Gambodurium, qui paraît être Kempten, Ratisbonne, sur le Danube, a conservé dans celui de Regensberg son ancien nom de Regina,
qui lui vient de la rivière de la Regen, à l'embouchure de laquelle elle se trouve. Passau est l'ancienne Batava-Castra. Enfin, NeuOeîting, prcs de MlIhldorf, paraît être le lieu nommé Pons-OEni, ainsi que le confirment les restes d'une voie romaine découverte dans ses environs.
HISTOIRE. — La Bavière est restée jusqu'en 1806 le plus ancien duché de l'Allemagne; elle a conservé depuis le cinquième siècle son titre, son nom et même une partie de son antique constitution ; les Allemands l'appellent Bayern, et ce nom rappelle celui des Boii, l'un des peuples germains refoulés dans la Bohème par les Romains, et qui en sortirent vers l'an 450 avec les barbares connus sous le nom d'Ostrogoths. Ce duché était encore appelé Boiaria dans le moyen âge : il s'étendait plus loin vers l'est que le royaume actuel. Le premier chef ou duc des Bavarois paraît être Alâiger ou Aldeger. On croit qu'il prit le titre de roi en 45G, titre que ses successeurs conservèrent jusqu'au neuvième siècle presque sans interruption. Il se ligua avec d'autres princes allemands dans le dessein de suivre Clovis dans ses conquêtes et de les partager avec lui; mais, après la victoire de Tolbiac, Clovis repoussa les Allemands dans leurs premières limites, força les Bavarois et leur chef à reconnaître son pouvoir, établit pour contenir ces peuples une colonie de Francs dans la partie de l'Allemagne qui prit de là le nom de Franconie, et dont les princes devinrent les suzerains des princes de Bavière. En 560, vers la fin du règne de Theudon III, petit-fils d'Aldiger, les Bavarois commencèrent à embrasser le christianisme. Ce quatrième roi de Bavière fut baptisé par saint Robert, évêque de Strasbourg. Au sixième siècle, après le partage du vaste royaume des Francs, les princes de Bavière se soumirent à la domination des rois d'Austrasie. La faiblesse des derniers Mérovingiens fut une heureuse occasion pour les Bavarois de secouer le joug de ceux-ci; la Bavière fut libre jusque vers l'an 783 ; mais à cette époque Thassilon III, de l'ancienne famille ducale des Agilolfingiens, suscite des troubles en Allemagne ; Charlemagne marche contre lui, et l'oblige à le reconnaître pour son suzerain. L'année suivante, Thassilon se révolte encore; cité à la diète d'Ingelheim, accusé du crime de lèse-majesté, il est condamné à mort; mais Charles commue sa peine, et après l'avoir dépouillé de ses Etats, lui fait raser les cheveux et le fait enfermer dans l'abbaye de Lauresheim, et de là dans celle de Jumiéges. Thassilon y prouva qu'un prince inhabile peut devenir un très-bon moine, car y il mourut en odeur de sainteté. Depuis cette époque, Charles s'empara de la Bavière, la divisa eti plusieurs comtés, et la fit gouverner par des princes de son choix. Le partage de la monarchie entre les fils de Louis Ier changea encore une fois le sort de cette contrée : elle échut, avec toute l'Allemagne, à Louis surnommé le Germanique, qui choisit Ratisbonne pour sa résidence. Après lui ses fils se partagèrent ses possessions, et Carloman devint roi de Bavière. Ce pays resta soumis à Arnoùld, fils naturel de Carloman , élu roi de Germanie.
Luitpold ou Léopold est probablement le premier qui fut nommé margrave par les rois allemands au neuvième siècle. Otton III, comte de Wittelsbach, qui régna en 1101, est regardé comme la souche de la maison qui règne aujourd'hui. Otton V, en 1180 , fut le premier duc de cette branche. Le Palatinat du Rhin fut acquis en 1215 à Louis I", duc de Bavière. En 1253, le duché fut divisé en deux : Louis Il eut le Palatinat et la haute Bavière; Henri fut duc de la basse Bavière. Ce Louis II ou le Sévère, de la maison de Wittelsbach, laissa deux fils, Rodolphe et Louis, qui devinrent les fondateurs de la branche palatine ou rodolphine, et de la branche bavaroise ou ludovicienne. Cette dernière reçut une grande illustration dans la personne de ce même Louis, Ille du nom, élu empereur d'Allemagne en 1314.
De funestes partages empêchèrent la Bavière de sfe maintenir au rang qu'elle avait occupé. On vit même les deux branches bavaroise et palatine se faire la guerre. C'est en suivant une politique si peu généreuse que Maximilien Ier réussit dans la guerre de trente ans à dépouiller le malheureux comte palatin Frédéric V, son oncle, de la dignité électorale et de la plus grande partie du haut Palatinat.
Il fut nommé électeur eu 1623. La Bavière croyait combattre alors pour la foi catholique : elle ne fit qu'accélérer l'agrandissement de l'Autriche. La branche ludovicienne conserva par succession directe le duché de Bavière; mais elle s'éteignit en 1777, et ce fut l'une des branches de la ligne palatine, celle de Deux-Ponts, qui conserva jusqu'à nos jours la souveraineté de là Bavière.
Louis XIV sut s'attacher la maison de Bavière; mais l'issue peu heureuse de la guerre de la succession d'Espagne frustra Maximilien Il des avantages que son alliance avec la France lui avait permis d'espérer. En 1742, l'électeur de Bavière, élu empereur sous le nom de Charles Vtl, se vit dépouiller de tous ses Etats par l' Autriche ; et ce triste César, réfugié dans le camp des Français , porta d'exil en exil cette couronne impériale que la maison d'Habsbourg frémissait de se voir arracher.
En 1777, l'ignorance des médecins mit fin à la fie de MaximiIlen III et à la ligne bavaroise masculine. Charles-Théodore, de la branche palatine, réunit à ses domaines la Bavière, et reprit
dans le collége électoral la place due à sa maison. Il pouvait alors compter 2,250,000 sujets; niais une armée désorganisée et des finances épuisées laissaient l'État sans considération et sans force.
L'Autriche essaya de s'en empâter; elle fut obligée de se ëontenter du quartier de l'Inn, peuplé de 120,000 habitants; Gliàrles-Théodore mourut en 1799, et Maximilien IV lui succéda.
Entraînée dans la guerre de la coalition, là Bavière, depuis l'avénement de ce prince, n'a cessé de se rapprocher de la France.
Aussi les pertes qu'elle avait faites par la cession de la rive gauche du Rhin ont-elles été amplement compensées par le recez des indemnités. En 1803, l'électeur de Bavière resta souverain de 2, 430,000 sujets. De nouvelles acquisitions en portèrent le nombre au delà de 3 millions.
En 1805, la Bavière s'était montrée fidèle alliée de la France pendant la guerre que termina la bataille d'Austerlitz : le lef janvier 1806, l'empereur des Français l'érigea en royâhihe. La paix de Presbourg lui valut le Burgau, le Vorarlberg, plusieurs petites seigneuries, le territoire de Lindâu, le Tyrol avec Trente et Brixen et plusieurs portions qui complétaient ce qu'elle avait obtenu des évêchcs de Passau et d'Eichsfâdt. En entrant dans la Confédération du Rhin, la Bavière obtint d'autres augmentations, dont les principales sont les villes de Nuremberg et d'Augsbourg. En 1810, elle eut encore Ratisbonne, Salzbourg, Berchtesgaden, la principauté de Bayreuth et une partie de l'Hâusi uck en Autriche ; mais elle céda le Tyrol italien au royaume d'Italie, plusieurs territoires au grandduc de Wiïrzbourg, et d'autres, avec la ville d'Ulm, au royaume de Wurtemberg. Vers la fin de 1813 , quand les plus grandes calamités menaçaient la France, la Bavière, oubliant ce qu'elle devait à son alliée, renonça à la Confédération du Rhin, et se jeta dans les bras de l'Autriche. En 1814 , elle restitua à celle-ci ce qui lui restait du Tyrol, le Vorarlberg, Salzbourg, le Hausruck et quelques autres portions de territoire. Celle-ci lui céda la principauté d'Aschaffenbourg et de AViirzboUrg. Enfin, en 1816, elle reçut pour dernière compensation , en France , une petite partie de l'ancienne province d'Alsace avec Landau, une portion des évêchés dé Worms et de Spire, et l'ancien duché de Deux-Ponts.
Le roi Maximilien IV gouverna son royaume en souverain nbsblu jusqu'au 26 mai 1818, époque à laquelle il donna, le premier dé tous les gouvernements allemands, une constitution à son peuple.
Eu 1825, Louis Ier succéda à son père. Il se montra disposé à étendre les rares et insuffisantes libertés que la constitution de 1818 accordait à ses sujets; mais, redoutant l'influence de la révolution française de 1830 , en Allemagne , il s'efforça par tous les moyens possibles de limiter les droits déjà si peu étendues des états généraux; le mécontentement était général, une révolution était imminente , lorsque arriva en Bavière une danseuse, Lola Montès, qui usa de l'autorité qu'elle sut prendre sur le roi pour en obtenir des dispositions plus libérales en faveur du peuple bavarois. Mais les excentricités de cette favorite indisposèrent les Bavarois; une émeute eut lieu à Munich, et le roi Louis fut obligé de la renvoyer.
Quelque temps après éclatait en France la révolution de 1848. Son contre-coup se fit ressentir à Munich, et le roi Louis préféra abdiquer fen faveur de son fils Maximilien II, plutôt que d'accorder leS réformes plus ou moins radicales qu'on lui demandait. Ce prince, qui avait toutes les qualités d'un artiste, a cependant làissé en Bavière des souvenirs impérissables de son amour de la patrie, de son culte pour les beaux-arts et de son activité administrative.
PRODUCTIONS MINÉRALES. — La Bavière possède des carrières de meules, plusieurs exploitations de pierres à aiguiser, des houillères, des mines de plomb et de cuivre; mais ces diverses substances minérales ne sont point à comparer, pour l'importance des produits, à ceux qu'elle retire de sës salines et de ses mines de fer. Les sources salées les plus considérables sont celles du cerclé de l'Isar, celles de Rcicltenhall, de Traunstcin et de Rosenheim.
Elles produisent par an près de 400,000 quintaux de sel; la mine de Berchtesgaden en fournit plus de 150,000, celle d'Orb 24,000 4 celle de Kissingen 16,000; mais, pour satisfaire aux besoins de là population, le gouvernement, par suite d'un traité spécial, reçoit annuellement de Hall, dans le Tyrol, environ 260,000 quintaux de sel, qui, après l'épuration nééessairé; se réduisent à 190,000.
Les plus importantes mines de fer sont celles du territoire d' Amberg, produisant 40 à 50,000 quintaux; celles du cercle du haut Mein 80 à 90,000; celles de Ylsar, près de la montagne de Kressen, 120,000; et les autres cercles environ 20,000, ce qui fait un total de près de 300,000 quintàux. Dans la Bavière proprement dite, le cercle du haut Mein est le seul où l'on exploite de la houille, mais le produit ne dépasse pas 35,000 quintaux; c'est à peu près le tiers de ce que l'on relire du cercle du Rhin.
AGRICULTURE, PRODUCTIONS NATURELLES: — Les proz grès de l'agriculture eh Bavière ne datent que du commencement de re siècle. ,
En vertu d'une loi de l'Etat, toutes les grandes routes sont bor-dées d'arbres fruitiers, principalement de cerisiers et de pommiers.
Ces arbres sont élevés dans des pépinières aux frais du gouvernement, et vendus au prix de revient à tous les particuliers.
Le sol des régions montagneuses de la Bavière proprement dite est d'une qualité médiocre ; mais, dans les plaines basses et dans les vallées, il est très-productif. Dans le nord, les terres livrées à la culture sont généralement légères ; dans la partie méridionale, elles sont grasses et fortes. Le gouvernement bavarois cherche à encourager l'agriculture, mais il aura beaucoup à faire pour vaincre l'indolente apathie et l'ignorance routinière des paysans, qui sont autant d'obstacles à toute espèce de perfectionnement. Près d'un tiers des terrains de l'Isar, du bas Danube et de la Regen est encore inculte.
Près d'un cinquième de la superficie de la Bavière proprement dite est composé de terres vagues qui ne produisent que de mauvais pâturages. L'administration a, dans ces dernières années, fait dessécher des marais et rendu à la culture des terres considérables ; mais ces opérations utiles exigent des dépenses qui s'opposent à l'accomplissement rapide d'un projet dont la nécessité et les résultats sont du plus haut intérêt. A quoi tiennent les différences que l'on remarque entre le rapport des terres de même qualité, dans une contrée soumise à la même administration, si ce n'est au degré de lumières et d'instruction des cultivateurs?
Le cercle de Souabe, ceux de haute et de basse Franconie, celui de la haute Bavière et celui de moyenne Franconie, sont les mieux cultivés et ceux où l'on récolte le plus de céréales. Les produits n'y sont point, il est vrai, aussi considérables que dans la basse Saxe et dans la Flandre, mais les habitants sont laborieux et susceptibles de comprendre leurs intérêts : ces cercles de la vieille Bavière seront donc longtemps les plus riches et ceux où l'abondance des récoltes compensera l'insuffisance de celles des autres cercles. Les deux derniers que nous venons de nommer produisent non-seulement des grains, mais du vin, des légumes et des fruits. Dans les montagnes du Spessart, l'agriculture, autrefois négligée, fait chaque jour de nouveaux progrès : les pommes de terre forment avec le pain la principale nourriture des habitants. Dans quelques autres districts, comme dans ces montagnes, les récoltes suffisent à peine à la consommation; cependant, nous devons le dire, l'administration veille aux moyens de répandre les lumières chez le peuple, et la Bavière trouvera un jour dans l'agriculture des éléments de prospérité.
La Bavière produit beaucoup plus de céréales qu'elle n'en consomme. On y ré colte annuellement 70,000 quintaux de houblon, dont 30,000 sont vendus à l'étranger. La culture de la vigne est un objet important dans la haute et la basse Franconie, ainsi que dans la moyenne Franconie et le Palatinat. Parmi les vins que fournissent ces contrées, celui que l'on nomme Steimoein jouit d'une grande réputation. On peut évaluer à 1 million d'hectolitres la quantité de vin que produisent les vignobles du territoire bavarois.
Les bestiaux forment, après l'agriculture, la principale branche de la richesse territoriale : les prés qui s'étendent le long des rivières en favorisent l'accroissement et la multiplication ; il est même à remarquer que dans les départements où la culture est arrivée à un certain degré de perfection, les moyens d'améliorer les races se sont multipliés : dans les cercles du haut et bas Mein et dans celui de la Rezat:, le système des irrigations, pratiqué avec zèle, a donné naissance à de magnifiques prairies qui servent à engraisser de nombreux troupeaux; il semblerait qu'une industrie ne s'établit point sans en faire naître une autre. Cependant on y voit peu d'animaux de belle race : la contrée la plus riche sous ce rapport est celle qui s'étend sur les pentes des Alpes : les bêtes à cornes pourraient y rivaliser par la beauté avec celles de quelques cantons de la Suisse; il est vrai aussi qu'elles forment la principale richesse de cette partie élevée de la Bavière qui s'étend au sud de Munich.
Les chèvres sont nourries avec soin dans cette contrée, ainsi que dans la plupart des montagnes qui bornent le royaume. Le porc est engraissé dans presque toute l'étendue de la Bavière; la chair de cet utile animal est dans beaucoup de cantons la principale nourriture des habitants. Les Bavarois n'ont pas, jusqu'à présent, réussi à améliorer la race des chevaux ; à la vérité, le cheval est rarement employé par l'agriculteur, qui tire du bœuf des secours suffisants; mais en ne veillant point aux moyens de multiplier et de perfectionner les haras, le gouvernement se met dans la nécessité de rester, sous ce rapport, tributaire de l'étranger. L'amélioration des bergeries commence à devenir le but des soins et des essais des agriculteurs; partout on s'occupe avec beaucoup d'intelligence de croiser les races indigènes avec les mérinos : depuis longtemps les manufactures de draps s'aperçoivent de l'avantage qu'elles peuvent retirer de cette importante branche d'industrie. Les cercles les plus riches en chevaux sont ceux de la haute Bavière, de la basse Bavière , de Souabe et de la basse Franconie ; en brebis, ceux de la basse Franconie, de la moyenne Franconie et de la haute Bavière. Enfin, l'éducation des abeilles est encore une des occupations les- plus lucratives de quelques propriétaires. Elle est cependant moins répandue qu'autrefois, quoique l'usage de la cire le soit beaucoup plus : c'est dans les cercles de Souabe et de haute Franconie qu'on s'en occupe avec le plus de succès. Il en est donc de l'entretien des animaux domestiques comme de l'agriculture : les
Bavarois sont également arriérés dans ces deux branches de l'éco nomie rurale. Mais c'est sur la qualité comme sur la quantité qu'ils doivent porter leurs soins; car le nombre des bestiaux n'est pas aussi considérable qu'il devrait l'être.
L'horticulture a pris plus d'extension ; on cite plusieurs établissements importants de jardiniers-fleuristes et de pépiniéristes. La culture des légumes s'étend principalement dans les environs des grandes villes. Nous avons déjà dit que les cercles de la moyenne et de la basse Franconie possèdent plusieurs vignobles ; c'est dans le premier que se font les vins de Franconie, dont les meilleurs crus se trouvent sur les bords du Leiste, près du Steinberg, aux environs de Saleck et dé Würzhourg. On cite encore les vignes de Calmuth, d'Eiweilsladt, de Sommerach et d'Eschendorf. La Bavière en possède aussi sur les bords du lac de Constance. En général, la vigne parait être cultivée dans ce pays avec intelligence.
La conservation des bois et des forêts est un des objets dont s'occupe le plus le gouvernement bavarois; leur exploitation fait vivre plusieurs milliers d'individus. Les arbres les plus communs sont le chêne et le hêtre : le premier y déploie un grand luxe de végétation; le second , beaucoup plus commun, atteint fréquemment une hauteur de plus de 32 mètres. La cultureya introduit le bouleau, le frêne et plusieurs espèces de conifères. Les forêts les plus considérables sont celles du Spessart, du Hhônegebirge, du Zuiesler, du Milten, du Kullcald, du Retzer, du Lorenz, et celles des environs de Kemplen. Les cercles les plus riches en forêts sont ceux de l'Isar, du bas Mein , de la Regen et du haut Danube. On peut évaluer leur superficie à environ 5,740,000 journaux, ou arpents du pays. On a calculé qu'elles occupent 29 pour 100 des terres du royaume, ce qui fait à peu près 4 hectares par famille.
L'ignorance du peuple des campagnes n'est pas la seule entrave aux améliorations que le gouvernement bavarois a projetées dans l'intérêt de la propriété foncière. Il existe encore en Bavière des débris d'institutions féodales qui résistent depuis longtemps aux efforts de l'administration : les redevances seigneuriales, les droits de chasse, les dîmes, les corvées inhérentes au sol, et d'autres coutumes non moins surannées, maintenues parles efforts de ceux qui en profitent, sont autant de plaies dangereuses qui dans cet Etat s'opposent au développement des germes de prospérité. C'est en admettant en principe le morcellement des terres, en accordant gratuitement le défrichement et le partage des forêts dont l'étendue est trop considérable, en concédant sans frais les terres incultes, en exemptant les nouveaux propriétaires de toutes charges et contributions pendant un temps plus ou moins long, eu leur donnant même des primes d'encouragement, en livrant à la culture les pâturages qui sont trop maigres pour avoir quelque influence sur l'amélioration des bestiaux, en abolissant le droit de pâture et de parcours sur les terres d'autrui; en engageant les habitants à donner la meilleure nourriture possible à leurs troupeaux, et à éviter qu'ils ne restent jour et nuit exposés aux intempéries de l'atmosphère ; en accordant aux cultivateurs la faculté de faire détruire les arbres forestiers situés dans les prairies où ils ne sont destinés qu'aux plaisirs du propriétaire de la chasse; en ne déterminant point le minimum des terres qui doivent être possédées dans une famille, et surtout en n'exigeant point la possession d'une certaine quantité de terres pour qu'un particulier ait le droit de bâtir une maison; c'est en adoptant tous ces principes que le gouvernement pourra espérer de voir le pays jouir enfin de la prospérité que la nature de son sol lui montre en perspective.
INDUSTRIE. — L'industrie est moins avancée en Bavière que l'agriculture ; cependant les manufactures y sont assez nombreuses.
On compte 25 forges dans les seuls cercles de la Regen et du haut Mein, 20 hauts fourneaux, plusieurs fabriques de fil de fer et 2 manufactures d'armes. Quelques établissements ne pourront parvenir au degré de perfection convenable qu'à force d'encouragement : les filatures sont encore dans l'enfance, les tisserands ne livrent à la consommation que des toiles grossières : on tire de l'étranger les toiles fines. Il en est de même des tissus de laine ; aussi les draps et les casimirs forment-ils une branche considérable d'importation. La Bavière ne peut donner en échange de ces produits que des fils de chanvre et de la laine filée pour les tapis communs. Les toiles de coton et tout ce qui tient à la bonneterie se fabriquent et se consomment dans ls pays. Il est pourtant quelques branches d'industrie dans lesquelles les Bavarois ont acquis sur leurs voisins une supériorité reconnue; ainsi les cuirs, qui sont un objet important d'exportation; les papiers , dont ils fournissent la Saxe ; les instruments de musique, de chirurgie et de mathématiques fabriqués à Munich sont recherchés en Allemagne; et les cartes à jouer de Nuremberg et ses jouets d'enfants sont expédiées dans les différentes parties du monde.
Il existe aussi en Bavière environ 60 manufactures de tabac, 132 papeteries, 60 verreries ; des manufactures de glaces, de faïence et de porcelaine ; et, dans diverses autres branches de fabrication, plus de 230,000 établissements. Les produits de ces diverses branches d'industrie prélèvent annuellement sur l'Allemagne et sur l'Europe un tribut de plus de 75,000,000 de francs. Nous ne parlerons
point des manufactures de coutil, de batiste et de dentelles; leur nombre, assez restreint, n'occupe point une place importante dans l'industrie de ce pays. Toutefois, n'oublions pas d'annoncer que le gouvernement, qui semble s'être fait un devoir de détruire par degrés tout ce qui rappelle les abus de l'ancien régime, abolit en 1827, dans l'intérêt de l'industrie, les maîtrises et les jurandes.
COMMERCE. — VOIES DE COMMUNICATION. — D'après ce que nous venons de dire des produits industriels de la Bavière, on ne sera point étonné que son commerce soit peu important; heureusement pour ce pays que sa situation favorise les communications entre plusieurs Etats et entretient une grande activité dans le commerce de transit. Ce royaume possède deux canaux navigables, le premier sert à faire communiquer le Rhin avec la vallée de la Franconie; le second, qui est l'œuvre du roi Louis et qui porte son nom, unit le Rhin au Danube par la Regen et l'Altmuhl. Le cours des principales rivières navigables, telles que le Danube, le Rhin, le Mein, la Reignitz, l'Inn et le Salzach; les routes nombreuses et assez bien entretenues, qui occupent une étendue de plus de 8,000 kilomètres; le service des postes, très-cher, mais fort expéditif; les chemins de fer de Munich à Stuttgard et d'Augsbourg à Leipzig, avec leurs embranchements, favorisent les transactions commerciales:
DIVISIONS POLITIQUES. — La Bavière se divise en huit cercles , qui sont les suivants :
Nouvelle division depuis 1837. Ancienne division.
Cercle de haute Bavière. Cercle de l'Isar.
- de basse Bavière. — du bas Danube.
- de haute Franconie. — du haut Mein.
- de moyenne Franconie. — du Reizat.
- de basse Franconie. — du bas Mein.
- de Souabe et Neubourg. — du haut Danube.
- du haut Palatinat et Regensberg. — du Regen.
— du Palatinat. Bavière Rhénane.
Chaque cercle est subdivisé en arrondissements de justice royale et de justice seigneuriale, au nombre de 217, et, dans le Palatinat, en 12 commissariats provinciaux. En 1846, le royaume comptait 222 villes, 401 bourgs, 94 terres nobles, 11,075 villages, 11,214 hameaux.
Réservons le Palatinat pour une description particulière, ainsi que nous l'avons annoncé, et commençons notre excursion chorographique par la haute Bavière, dont le chef-lieu est en même temps la capitale du royaume.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE DE LA BAVIÈRE PROPREMENT DITE. — Au milieu d'une vaste plaine, et entre les collines de l'Isar et du Galgen, Munich s'annonce de loin comme une grande cité; après Vienne, on peut la compter au nombre des plus belles villes de l'Allemagne. C'est d'ailleurs une de celles qui se sont embellies et agrandies le plus rapidement, malgré l'ingratitude de son climat et du sol de ses environs ; depuis 1827 surtout, elle n'est plus reconnaissable. Gustave-Adolphe disait de Munich : « C'est une selle dorée sur le dos d'un mauvais cheval; » mais ce mot n'est plus exact depuis les embellissements qu'ont éprouvés tous les lieux qui entourent cette capitale. Son sol, arrosé par l'Isar, qui n'y est pas navigable et qui y forme plusieurs îles, est élevé de 640 mètres au-dessus du niveau de la mer. Elle a une enceinte murée, 7 portes et 6 faubourgs : ceux A'Ait, de Ludtcig, de Schônfeld, de Maximilien, de Sainte-Anna et de l'Isar. La ville n'est pas régulièrement bâtie. Au milieu de constructions modernes, on voit s'élever pl usieurs édifices du moyen âge; cependant on y remarque beaucoup de rues larges, bien alignées, bordées de trottoirs, garnies de maisons élégantes et de magnifiques hôtels, du moins en apparence; car plusieurs de ces habitations, ornées de colonnes et de portiques, ne sont que des édifices en briques revêtues de plâtre.
Nous pourrions citer quelques palais qui passent pour être remarquables par leur architecture, qui ont même été cités avec éloge par des géographes, et que nous avons reconnus pour de fastueuses décorations. Elle renferme près de 4,800 maisons, et sa population était en 1852 de 127,385 habitants, et en 1855 de 132,112 ; elle est divisée en quatre quartiers, appelés Anger, Hacken, Graggenauervierlel et Kreuz. Cette division est déterminée par les quatre rues principales: la Neuhauscrgassc, qui fait suite au Kaujingergassc, le Thal, la Sedlingergasse, qui s'aligne avec le Rindermarkt; et la Schwabiugergassc, continuée par la I Vcillstrasse, qui aboutissent toutes les deux à la place principale (Hauptplatz), au centre de la ville. Ce qui contribue à embellir Munich, ce sont ses places publiques, telles que celle que nous venons de nommer, qui est entourée de portiques et de belles plantations d'arbres, la place d'Armes, celle de Max-Joseph, celle d'Anger, celle de Maximilien; ce sont les palais de Max, de Guillaume ou de Fugger, des états généraux; le ministère de l'intérieur, l'hôtel de ville, la nouvelle
monnaie, la douane, l'arsenal, le nouveau manège; les deux principaux théâtres, dont l'un, le nouvel Opéra, est un des plus beaux de l'Europe ; le palais de Leuchtenberg ; l'hôpital général, celui du Saint-Esprit; le muséum; la Glyplothèque ou musée de sculpture, l'un des plus beaux édifices de l'Allemagne; la Pinacothèque ou musée de peinture, monument qui n'est pas moins remarquable que le précédent; l'Académie des sciences, jadis collége des jésuites, et le plus magnifique qu'ils possédassent en Europe; et surtout le palais royal, dont l'architecture est irrégulière, mais dont l'intérieur est de la plus grande magnificence et l'étendue si considérable, que l'on disait autrefois qu'on y pourrait loger tous les rois de la chrétienté. Nous citerons, pour son élégance et sa richesse, la chapelle de la cour, dans laquelle on admire un tableau de Michel-Ange et plusieurs autres curiosités.
Au nombre des collections d'objets d'art que renferme encore ce palais, se trouvent le cabinet des miniatures, dont le nombre, porté à cent trente, est estimé au delà de 600,000 francs, et la galerie Maximilienne, dans laquelle on remarque des tableaux de choix des plus grands maîtres. La nouvelle résidence royale , appelée KÕlIigsbau, et bâtie en grès sur le modèle du palais Pitti à Florence, efface encore la magnificence de ce palais.
Parmi les 26 églises de Munich, nous n'en citerons que 3 : celle de Notre-Dame (Frauenkirche), ou la cathédrale, renferme plusieurs tableaux de prix et le beau mausolée de l'empereur Louis de Bavière. Ses deux tours, élevées de 333 pieds, sont souvent visitées par les curieux qui vont y jouir d'une vue magnifique. Celle de la Trinité passe à tort pour avoir été bâtie sur le modèle de celle du Vatican à Rome : c'est une rotonde avec une coupole qui repose sur 18 colonnes d'ordre corinthien. Celle de Saint-Michel est une des plus belles églises de l'Allemagne. On y remarque un monument à la mémoire du prince Eugène Beauharnais, qui fait honneur au ciseau du sculpteur danois Thorwaldsen.
Munich possède plusieurs collections publiques du plus haut intérêt; le musée royal de peinture ou Pinacothèque compte plus de 1,600 tableaux de différents maîtres célèbres; ce musée se compose de 8 salles principales comprenant l'école allemande moderne, l'école allemande du moyen âge, l'école flamande, l'école française, l'école espagnole et l'école italienne. La bibliothèque de la cour et de l'Etat contient plus de 400,000 volumes, environ 16,000 manuscrits, et plus de 20,000 exemplaires qui datent de l'enfance de l'imprimerie, ainsi qu'une Bible de Guttemberg et Faust, de 1454. La bibliothèque de l'Université renferme plus de 160,000 volumes. Le Conservatoire général comprend plusieurs collections précieuses, telles que le cabinet des médailles qui se compose d'une suite de plus de 10,000 grecques ou romaines en or; le cabinet de zoologie, celui de minéralogie et le musée brésilien, qui se compose d'objets d'art et de produits naturels recueillis au Brésil. L'Académie des sciences, fondée en 1759, a sous sa surveillance ces diverses collections ainsi que l'observatoire et le jardin botanique. Cette Académie, qui est le principal corps savant de la Bavière, se divise en trois classes : 1° celle de philologie et de philosophie, composée de six membres titulaires et d'un membre adjoint; 2° celle de mathématiques et de physique, formée de treize membres titulaires et de deux adjoints; 3° celle d'histoire, qui compte huit membres. Chaque classe a son secrétaire perpétuel et des membres honoraires. L'Académie, dont le roi est membre protecteur et président-né , a un secrétaire général. Munich possède en outre une Académie des arts, composée d'un directeur, d'un secrétaire général, de huit membres ordinaires, de trente honoraires et de quatre correspondants.
La Glyplothèque ou musée des Antiques se compose de 13 salles: on y remarque les marbres de l'île d'Egine, et les sculptures des écoles les plus anciennes d'Athènes, de Corinthe et d'Argos.
Cette capitale a plusieurs établissements d'instruction de divers genres : le principal est l'université, qui était autrefois à Laudshut, et qui, après avoir subi de grandes améliorations, est devenue l'une des plus considérables de l'Europe; l'institut royal des études, qui se divise en quatre écoles de différents degrés, et dans lequel plus d'un millier d'élèves se préparent à suivre les cours de l'université ; l'école de médecine et de clinique, l'école centrale vétérinaire, l'école des beaux-arts, celle de topographie pour l'instruction des ingénieurs géographes ; l'école forestière, destinée à former les gardes et les inspecteurs des forêts, l'Académie militaire, celle d'artillerie, l'école polytechnique centrale, celle de construction ; enfin l'institut des sourds-muets, celui des demoiselles appelé institut Maximilien, et destiné aux jeunes filles des familles distinguées ; le lycée et deux gymnases. Nous ne devons point oublier l'institut mathématique et mécanique de Reichenbach, renommé pour le fini et la précision des instruments sortis de ses ateliers ; l'institut géographique fondé par le baron Cotta, et le grand établissement lithographique de M. Sennenfelder, inventeur de la lithographie, qui, apportée par lui en France, y est parvenue au plus haut degré de perfection.
Outre ces établissements qui font honneur à Munich, il en est plusieurs excl usivement réservés à l'éducation des classes pauvres:
telles sont l'école destinée aux jeunes gens sans fortune et l'école fratuite des dimanches et fêtes pour les hommes et les femmes.
Ile possède aussi des sociétés philanthropiques et plusieurs établisieraents publics destinés au soulagement des indigents. Hôpitaux pour les deux sexes, maisons d'orphelins, hospice d'enfants trouves, établissement pour les aliénés, rien ne manque sous ce rapport à Munich. Ce qu'il y a de plus intéressant, c'est que la plupart de ces établissements sont dus aux fondations vraiment pieuses et philanthropiques de quelques habitants de cette ville; quelques-unes de ces fondations existent depuis près de quatre fûèclea : il semble que depuis cette époque les citoyens vertueux, guidés par une noble émulation, aient cherché à soulager dans des établissements publics et durables tous les genres d'infortunes et de misère, sans être encouragés ni soutenus par la coopération du gouvernement et de la noblesse. Aujourd'hui que l'administration a suivi cet exemple, les secours n'en sont devenus que plus puissants, les moyens de répression contre la mendicité plus sévères et plus efficaces; aussi a-t-on remarqué qu'il y a peu de villes où il y ait moins de mendiants qu'à Munich. On y voit rarement des enfants s'habituant de bonne heure à vivre dans l'oisiveté, en comptant sur les aumônes des passants qu'ils importunent ; ceux que l'on surprend à mendier dans les villes et dans les campagnes sont soustraits à cet état dégradant qui engendre tant de vices, et sont élevés aux frais du gouvernement jusqu'à ce que par leur travail ils soient en état de gagner leur subsistance. Plusieurs maisons d'arrêt et de correction sont destinées aux criminels et aux vagabonds ; enfin, pour terminer ce que nous avons à dire sur les établissements de bienfaisance et d'utilité publique, rappelons celui dont le plan fut proposé à Munich par l'un des hommes auxquels l'humanité et l'économie domestique doivent le plus de reconnaissance. Le projet du comte de Rumford a reçu une exécution complète : dans un édifice destiné à cet usage, 600 indigents reçoivent chaque jour gratuitement leur nourriture; une porte secrète, qui communique de l'extérieur dans le bâtiment est réservée à ceux qui aiment mieux souffrir que de montrer leur misère. Parvenus à un guichet, ils y reçoivent, sans être vus, une ration d'aliments sains et suffisants. On assure que plusieurs individus respectables, mais victimes des vicissitudes de la fortune, trouvent ainsi dans la ville les moyens de supporter plus facilement le poids de leur indigence.
La plus grande partie de la population de Munich ne subsiste que des dépenses de la cour et des emplois du gouvernement.
Quoique la ville renferme quelques fabriques de drap, de quincaillerie et de bijouterie, plusieurs tanneries, des brasseries considérables, et une manufacture de tapisseries de haute-lisse, que l'on prétend être au niveau de celle des Gobelins ; quoiqu'il s'y tienne plusieurs foires par an, et des marchés de grains toutes les semaines, on peut dire que le commerce y est peu important : le seul qui ait quelque activité est celui d'expédition. L'établissement des lignes de chemin de fer en Bavière est destiné à faire de Munich un des centres commerciaux du pays. Cette ville communique déjà (en 1856) avec les chemins badois par la ligne d'Augsbourg et de Stultgard, au midi avec les villes du lac de Constance, et au nord avec la grande ligne de Francfort à Berlin et à Vienne.
Plusieurs places publiques que nous avons nommées servent de promenades aux habitants de Munich. Sur l'une de celles-ci, la place Caroline, on a érigé un obélisque de 33 mètres de hauteur, partant l'inscription suivante: ,Aux 30,000 Bavarois qui ont péri dams la guerre de Russie. — Elevé par Louis Ier, roi de Bavière.
— Achevé le 18 octobre 1833. — Eux aussi ils sont morts pour la délivrance de la pairie. Sur la place Max-Joseph que décorent le nouveau palais du roi, le grand théâtre, l'hôtel des monnaies et l'hôtel des postes, s'élève une assez belle statue en bronze du premier roi de la Bavière. Parmi les principales promenades, nous citerons le firater, dans une île de l'tsar : c'est un jardin qui sert de rendez-vous aux fumeurs ; le Jardin anglais, qui est pour cette capitale ce qu'est le Thievgarteu pour Berlin. Ce jardin est traversé par l'isfir ; il est très-vaste et fort bien dessiné. Près de là se trouve le jardin de la cour (Mqfgartm), entouré d'arcades sous lesquelles on a fait exécuter par les meilleurs artistes bavarois une suite de peintures à fresque qui représentent les principaux événements de l'histoire de Bavière, depuis le treizième siècle jusqu'à nos jours. A l'extrémité de la Tkeresienwiese (prairie de Thérèse), où ont lieu tons les ans les grandes fêtes d'octobre, sur la Theresienhôhe ( hauteur de Thérèse), d'où l'on aperçoit les Alpes à l'horizon quand le temps est clair, le roi Louis 1er a fait construire par l'architecte L. de Kleuie, fat llukmetkalU (salie de gloire), portique de colonnes doriques en marbre, qui fouine trois côtés au milieu duquel s'élève la atatue colossal» de la Bavière, dépassant de toat le buste le monnaient qui F entoure à demi. Cette statue a 20 mètres de hauteur; un escalier de 48 marches, large de 7 mètres, conduit à son piédMUl. On s'élève par des degrés en fonte jusque dans la tête deia statue, oà se trouve no banc pouvant recevoir 25 à 3)0 personnes. De ce point on peut, par des ouvertures habilement menagéw,jouir d'inu vue - sur la ville et les environs.
Le» «Sf»®b# de Munich présentent en outre un grand nombre
de lieux qui attirent les promeneurs pendant les jours de fête : tels sont principalement Gross-Hesselohe, le village de Paesing, dont la route est charmante : celui de Bogenhausen, où l'on voit un château, des bains, et un nouvel observatoire ; les bords de l'Isar, sur lequel on a élevé près de la ville un nouveau pont de fer ; enfin les différents châteaux royaux situés à des distances plus ou moins considérables de la ville. Le roi réside ordinairement l'été à Nymphenbourg, village situé à 6 kilomètres au nord-ouest de Munich. Le château est bâti sur le modèle de celui de Versailles : on y remarque une belle galerie de tableaux ; le parc et ses belles eaux en font un séjour délicieux. ScJtltissneim, à 12 ou 15 kilomètres au nord de la capitale , est regardé comme une des plus magnifiques résidences de l'Allemagne : on y admire un superbe salon et un grand escalier. Ce palais renferme plus de 1,600 tableaux. On y a établi une importante école d'économie rurale. Biederstein est une autre jolie maison de plaisance avec de beaux jardins.
Au nord-ouest de Munich, le roi possède le château de Landshut, situé au bord de l'Isar, sur la pente d'une montagne que domine celui de Trausnitz, bâti par les anciens ducs de Bavière. Divisée en vieille et nouvelle ville, Landshut compte parmi ses plus beaux édifices l'ancien bâtiment où fut établie l'université, la chancellerie, l'hôtel de ville et l'église Saint-Martin, dont la tour a 140 mètres de hauteur. Ses établissements de bienfaisance consistent en 2 hôpitaux et en 2 maisons pour les pauvres. Il y a peu d'industrie dans cette ville, on n'y trouve que 5 fabriques; son commerce est presque nul. Sa population est peu importante, et ne s'élève qu'à 8,500 habitants. Freising, située sur l'Isar, à une égale distance de Landshut et de Munich, renferme un château, une belle cathédrale, un séminaire de maîtres d'école, et un institut de sourds-muets. Sa population est de 3,600 habitants. L'évêché dont elle était le siège a été transféré en 1817 à Munich, et érigé en archevêché. Dans la petite ville de PJaffenhofen, il existe une école d'industrie et de dessin. Landsberg, sur la rive droite du Lech, ceinte de murailles et dominée par un château, a 10 églises et 4 hôpitaux, bien que sa population soit à peine de 4,000 âmes.
Dans notre course rapide nous ne devons parler que des villes qui par leur importance, les souvenirs qu'elles retracent ou les monuments qu'elles renferment, méritent que nous nous y arrêtions ; n'oublions pas que la Bavière ne ressemble point aux petites principautés que nous avons décrites ; dans ce royaume, qui renferme des cités importantes, les villes de 2 à 3,000 âmes sont généralement peu dignes de fixer l'attention.
Vers l'extrémité méridionale du royaume, un village appelé Tegemsee, parce qu'il est situé sur le lac de Tegern, mérite de nous arrêter quelques instants. C'est le chef-lieu d'une seigneurie de ce nom. Sa position au pied des Alpes Tyroliennes, la beauté du lac, qui a 8 kilomètres de longueur et est entouré de montagnes boisées, en rendent l'aspect tout à fait pittoresque. Ce village n'a que 80 maisons ; mais de vastes bâtiments y attirent les regards : ce sont ceux d'une riche abbaye, qui a été sécularisée en 1802 et convertie depuis en maison de plaisance. Chaque année le roi y passe une partie de l'été. C'est la résidence la plus agréable pendant la saison de la chasse ; toutes les forêts et les montagnes des environs sont remplies de sangliers, de daims et de chamois.
Nous venons de décrire les lieux les plus importants du cercle de la haute Bavière, nous allons successivement parcourir les autres cercles, Passau, chef-lieu de celui de la basse Bavière, est, suivaut toute probabilité, l'une des plus anciennes villes de la Bavière ; sa situation au confluent de rIlz, de l'Inn et du Danube, est extrêmement agréable. Elle est divisée en quatre parties : la vraie ville, YInnstadt, sur la rive droite de J'Inn; llzstadt. sur la rive droite de l'III, et le faubourg d'Anger, fortifié et défendu par les châteaux d Qbcrkaus et d'linterlaaus, et par huit forts, qui portaieut autrefois des noms de généraux français. Les faubourgs d'Innstadt et d'Ilzstadt communiquent avec la ville par des ponts. Le premier de ces faubourgs n'est pas mal bâti, mais le second n'est formé que de chétives maisons, habitées par des pêcheurs et des laboureurs. Passau ou la vraie ville est, au contraire, très-propre. Elle renferme un ancien et beau palais épiscopal, une cathédrale magnifique, trois églises paroissiales, dont celle de Notre-Dame des Capucins était célèbre par ses miracles ; une maison de santé, un hospice d'orphelins et cinq hôpitaux, un séminaire, une école d'industrie où l'on enseigne un grand nombre de sciences, et un lycée qui occupe l'ancien collège des jésuites. Malgré sa position avantageuse, son industrie et son commerce sont peu importants : la première consiste en manufactures de tabac, de porcelaine, de poterie et de creusets estimés, de papier, de tabatières, en brasseries importantes et en usines où l'on travaille le fer et le cuivre ; le second a pour objet la vente de la soie, des céréales et du vin ; la navigation seule y est active. Les femmes ont la réputation d'y être belles. La ville est peuplée de 12,000 habitants, y compris les faubourgs. Elle est célèbre par le traité conclu en 1552 entre Charles-Quint et Maurice de Saxe, traité qui cimenta la réformation de Luther en Allemagne. C'est dans ses environs que se trouvent les château de plaisance de Freudenkeim, de Liiwenhof et de
Rabengut. Près de l'Ilzsladt on voit, sur une montagne appelée le Mariahilfberg, une chapelle qui est un des lieux de pèlerinage les plus célèbres de la Bavière. A peu de distance de cette montagne, il en est une où l'on exploite le carbone naturel appelé graphite, et dont on fabrique les crayons de mine de plomb.
On pêche dans l'Ilz, à peu de distance de la ville, des perles que forme un mollusque connu sous le nom vulgaire de moule, et des conchyliologistes sous celui de mulctle margaritifèrc. Ce coquillage , qui produit à proportion beaucoup plus de perles que Yavicule perlière que l'on pêche dans l'océan Indien, doit, suivant Linné, cette faculté aux soins que l'animal prend de se défendre des attaques d'un ennemi redoutable. L'illustre naturaliste suédois a remarqué que le ver aquatique, qui se nourrit aux dépens de la mulette, en perce la coquille pour atteindre l'animal, qui n'a d'autre moyen de se défendre que de se hâter de sécréter de son corps la matière calcaire propre à remplir la brèche faite par l'assaillant. Si la sécrétion est trop considérable, elle forme une protubérance , un tubercule plus ou moins rond, qui souvent se détache du fond de la coquille, et que l'on recherche lorsqu'il est blanc et d'un bel orient.
Straubing, ville de 8,000 habitants , est avantageusement située sur une hauteur, au bord du Danube; c'est l'ancienne Castra Augustana des Romains ; elle est aujourd'hui célèbre par ses creusets et par ses poteries. Un château, sept églises, dont eellc de SaintJacques a une tour de 89 mètres de hauteur, quatre hôpitaux, une maison d'orphelins, le bâtiment de la régence et l'hôtel de ville, sont ses principaux édifices. Elle a un arsenal et une fonderie de canons. Elle renferme un gymnase et plusieurs écoles : c'est dans ses environs que se trouve la belle abbaye de X Qber-Altaich, qui possède une superbe bibliothèque. Badeumaïs n'est qu'un bourg dont le nom est connu des minéralogistes par les minéraux qu'on recueille dans ses environs, et des dessinateurs par les belles chutes d'eau du IUgs et du Mosbach. Il passe pour important par ses mines et par ses fabriques de vitriol, qui en fournissent annuellement près de 2,000 quintaux.
Ratisbonne, chef-lieu du Palatinat supérieur, fut jadis la capitale de la Bavière et la résidence des anciens rois allemands de la race des CarloviPgiens. Sous l'empereur Frédéric Ier, elle reçut le titre et les privilèges de ville libre et impériale. En 1486, elle rentra sous la domination bavaroise; mais en 1502 elle redevint indépendante jusqu'en 1803, qu'elle échut en partage au prince primat.
Enfin, lorsque le grand-duché de Francfort fut fondé, elle fut comprise, ainsi que son'territoire, dans les Etats de la Bavière.
Depuis 1662 jusqu'à cette époque, elle avait été le siège de la diète de l'empire; depuis l'an 891 jusqu'en 1642, cette ville, qui renfermait beaucoup de constructions en bois, fut sept fois sur le point d'être réduite en cendres. En 1418, on y brûla deux ecclésiastiques qui blâmaient la sentence du concile de Constance à l'égard de Jean Huss; mais en 1542 la mémoire de ces deux victimes de l'intolérance et du fanatisme fut réhabilitée par une grande partie de la population, qui adopta publiquement la confession d'Augsbourg.
Sous ses murs se livra en 1809, entre les Français et les Autrichiens..,. la célèbre bataille qui dura cinq jours, et dans laquelle Napoléon reçut une légère blessure au talon ; la ville eut beaucoup à souffrir de cette lutte : 134 maisons furent incendiées, et sa perte s'éleva à 1,500,000 florins. Cette vieille cité, que les Allemands appellent Regensburg, parce que la Regen s'y jette dans le Danube, porta du temps des Romains le nom de Castra Regina, puis celui de Augusta Tiberii; vers le commencement du sixième siècle, elle prit celui de Reginenburg. On y compte plus de 26,000 habitants.
Elle est entourée de vieux remparts peu susceptibles de défense.
La plus belle de ses vingt-huit églises est la cathédrale, bâtie en 14Q0. L'église de Saint-Emmeran est décorée de plusieurs bons tableaux, Nous ne citerons point ses hôpitaux et ses nombreux établissements destinés à l'instruction ; ses musées et ses collections scientifiques sont dignes d'une ville plus considérable ; sa galerie de tableaux est riche ; ses bibliothèques ne le sont pas moins. Au nombre de ses plus importantes constructions, on cite le pont de quinze arches sur le Danube, de 320 mètres de longueur; la célèbre abbaye de Saint-Emmeran, aujourd'hui habitée par le prince de Tour-et-Taxis, qui y a réuni de riches collections d'objets d'art et de science, et l'hôtel de ville, bâtiment d'une médiocre architecture, dans lequel s'assembla la diète germanique pendant une période de 144 ans, c'est-à-dire depuis 1662 jusqu'en 1806. Le monument élevé à la mémoire de Kepler, qui mourut dans cette ville, est digne de fixer l'attention ; il semble que les boulets ont respecté ce monument, qui rappelle le génie qui sut calculer les révolutions et les orbites des corps célestes : construit en 1808, il ne reçut aucune atteinte pendant les désastres de Ratisbonne. Les rues de cette ville sont étroites et tortueuses, mais propres et bien pavées. Les maisons sont fort élevées et construites dans le goût allemand. Les manufactures y sont peu nombreuses et peu importantes. On y construit des navires pour la navigation du fleuve, qui procure aux habitants un commerce considérable de transit et de commission. C'est dans la ville de Ratisbonne que naquit l'un des
plus grands capitaines du seizième siècle, don Juan d'Autriche, fils naturel de Charles-Quint, qui gagna contre les Turcs la bataille de Lépante , qui maintint les Pays-Bas sous le pouvoir de l'Espagne, et qui mourut empoisonné par les ordres de son frère Philippe II, parce que ce tyran soupçonneux craignait qu'il ne se déclarât souverain de la Flandre. Stadt-am-Hof ou la ville de la cour est en quelque sorte un faubourg de Ratisbonne, dont elle n'est séparée que par le pont de pierre du Danube. Cette petite cité fut réduite en cendres en 1809, et rebâtie avec plus de solidité et d'élégance : elle contient environ 1,500 habitants. A quelques kilomètres à l'est de Ratisbonne, et sur la rive gauche du Danube, s'élève la Walhalla ou la salle des choisis, au sommet d'une éminence de 91 mètres, que l'on gravit à l'aide d'escaliers gigantesques : c'est le Panthéon germanique, élevé par le roi Louis Ier de Bavière en 1842 aux gloires de l'Allemagne. L'édifice est un temple d'ordre dorique, bâti sur le modèle du Parthénon, ayant 8 colonnes cannelées sur ses deux façades et 17 sur ses côtés. Il est orné de statues, de bustes et d'inscriptions qui rappellent les hommes célèbres qui ont vu le jour en Allemagne. Ce fut en IM7 que la lecture de Jean de Millier, l'historien, inspira au prince royal de Bavière, qui devint le roi Louis Ier, la première pensée de ce monument national, dont la première pierre a été posée le 18 octobre 1830 (jour anniversaire de la bataille de Leipzig, et dont l'inauguration eut lieu le 18 octobre 1842).
Le roi Louis présidait à ces deux cérémonies, précédées et suivies de fêtes patriotiques. L'architecte choisi par le roi, Léon de Klenze, un élève de Charles Percier, avait dépensé 2 millions de florins, dont 330,000 florins de sculptures.
Le Vils, rivière qui se jette dans le Naab, traverse Amberg à 50 kilomètres au nord de Ratisbonne. Cette ville est entourée de murailles flanquées de 70 tours. Ses rues sont larges, alignées et assez bien bâties. Le château royal, le collège, l'arsenal et l'hôtel de ville, bâtiment gothique, sont ses principaux édifices. Elle renferme 10 églises, o hôpitaux, une maison de santé, plusieurs écoles , un séminaire de maîtres , une bibliothèque et 8,000 habitants.
Sa manufacture d'armes occupe 60 ouvriers; les montagnes de ses environs renferment des mines de fer qui produisent par an 5,400 quintaux. Le Vils est navigable pour les petits navires qui descendent vers le Danube. Cette facilité de communication avec Ratisbonne et plusieurs autres villes, ses fabriques de tabac, d'étoffes de coton, de faïence et de cartes à jouer, entretiennent dans Amberg un commerce important. C'est dans les plaines qui l'entourent que l'archiduc Charles força, en 1796, l'armée farnçaise, sous le commandement du général Jourdan, à battre en retraite jusqu'au Rhin.
Ingolstadt, sur la rive droite du Danube, passait autrefois pour l'une des plus importantes villes de la Bavière ; sa population est d'environ 10,000 âmes. Ses fortifications, qui avaient été détruites en 1800, ont été relevées en partie par le roi Louis. Cette ville est assez bien bâtie; mais la peinture dont on prétend orner les façades des maisons ne leur donne qu'un aspect bizarre. De jolies fontaines, un château royal et plusieurs églises, s'y font remarquer. Celles-ci sont au nombre de neuf : il en est une où l'on voit le tombeau du général Tilly, et celui d'Eckius, l'un des antagonistes de Luther: une autre, celle du ci-dcvant collége des jésuites, est décorée de belles peintures à fresque. Une école de latin remplace l'université, qui y fut fondée en 1472, et qui, après avoir été transférée à Landshut, a été, depuis peu d'années, définitivement installée à Munich. Abensberg, sur la petite rivière d'Abens, est l'ancienne Abusina, cité des iliiidelici; on trouve encore près de ses murs des antiquités romaines. Cette petite ville de 1,200 habitants est ceinte de murailles flanquées de 32 tours rondes et de 8 carrées : c'était autrefois la résidence des comtes d'Abensberg, dont il reste encore un château. Eichstudt, arrosée par l'Altmuhl, dans une vallée étroite, mais agréable, est entourée de murailles ; on y compte 4 faubourgs, 3 places publiques et 3 grandes rues ; c'est le cheflieu de la principauté qui fut cédée, sous la souveraineté de la Bavière, à Eugène Beauharnais. Le château qu'elle possède est une très-belle résidence; après cet édifice on peut citer la cathédrale, qui renferme le tombeau du martyr Wilihaid, et l'église de Walpura: ces deux églises, ainsi que quatre autres moins importantes, sont réservées au seul culte catholique. Cette ville possède un gymnase, une école, une bibliothèque et quelques collections. Sa population s'élève à plus de 8,000 habitants. Le territoire d'Eichstiidt est fertile et produit du blé, du houblon, du lin, des fruits et des légumes.
On y élève peu de bestiaux, mais il abonde en poissons et surtout en gibier. Ses montagnes contiennent quelques mines de fer, des carrièresae pierre, de marbre et d'ardoise. Il y a dans le même cercle, à 32 kilomètres au nord-est d'Amberg, le bourg de Leuchtenberg, qui fut aussi érigé en duché en faveur du prince Eugène Beauharnais.
Bayrmth, chef-lieu du cercle de la haute Franconie, est située sur le Mein, dans une position agréable, au fond d'une vallée formée par les rameaux du Fichtelgcbirge. L'élévation de son sol est de 200 mètres au-dessus du niveau de la mer. Entourée de vieilles murailles et de trois faubourgs, au nombre desquels se trouve la
Paysans bavarois.
petite ville de Saint-Georges, ses rues sont larges, régulières et bien bâties. Parmi ses édifices on ne peut cependant citer que le vieux château de Sophienbourg et le nouveau palais, où l'on remarque la statue équestre du margrave Chrétien-Ernest, deux salles de spectacle et un vaste manège bâti en pierre. Ses habitants, au nombre de 14,000, ne comptent pas 1,000 catholiques : ceux-ci y possèdent une église et les juifs une synagogue. Bayreuth renferme plusieurs hôpitaux, un gymnase, un théâtre et quelques manufactures.
Bamberg, arrosée par la Regnitz, n'est point l'ancien Bergium dont parle Ptolémée, comme quelques auteurs l'ont cru ; elle ne fut bâtie que vers le dixième siècle : c'était la résidence des anciens comtes de ce nom. Son étendue, sa population, qui s'élève sans la garnison à près de 25,000 âmes, ses maisons bâties en pierre de taille, ses deux superbes ponts qui la divisent en trois parties, dont la plus haute s'élève majestueusement en amphithéâtre adossé sur plusieurs collines, en font une des plus belles villes de la Bavière. Elle possède un château magnifique, le Petersberg, une belle église, qui renferme les tombeaux de l'empereur Henri II et de Cunégonde son épouse, 23 autres églises, 15 chapelles, 3 hôpitaux, une maison de santé et une vaste maison de correction. Le château de Petersberg contient une bibliothèque publique, un cabinet d'histoire naturelle et les archives du pays. On a érigé une croix à la place où le prince Berthier mourut, le 1er juin 1815, après s'être jeté d'une croisée, par suite, dit-on, du désespoir que lui avaient causé les revers éprouvés par l'armée française. Bamherg offre une singulière compensation avec Bayreuth : elle ne renferme pas 1,000 protestants. On n'y voit qu'un seul couvent de religieuses. Ses établissements d'instruction sont nombreux : elle a un lycée, un gymnase, un séminaire ecclésiastique, un séminaire pour 30 ou 40 instituteurs, plusieurs écoles élémentaires, une de médecine et de chirurgie, et un institut pour les cours d'accouchement. Cette ville a donné naissance au célèbre philologue Joachim Camerarius; elle est renommée pour ses jardins potagers et ses manufactures.
Hof, à peu de distance de la frontière orientale du royaume, est
arrosée par la Saale ; elle contient plusieurs établissements d'éducation, un hôpital fort riche, une bibliothèque et 8,000 habitants.
L'industrie y est fort active : la filature et le tissage du coton y emploient un grand nombre de bras ; une seule de ses fabriques fournit de l'ouvrage à plus de 800 ouvriers, et livre annuellement au commerce 30,000 pièces de mousseline et 45,000 douzaines de mouchoirs. Kulmbcich, sur les bords du Mein blanc, est, par sa position entre deux montagnes, une des villes les plus agréables de ce département; elle est entourée de murs; ses rues sont irrégulières , mais bien pavées ; la place du marché est grande et belle.
Comme toutes les villes un peu importantes de ce cercle, elle renferme un nombre suffisant d'hôpitaux et d'institutions de bienfaisance. Sa population s'élève à un peu plus de 4,500 habitants. Sur l'une des deux cimes qui dominentja ville s'élève la forteresse de Plassenbourg, qui sert de prison d'Etat.
Ne quittons point le cercle de la haute Franconie sans parler du village de Gailenrcutlt J situé sur la rive gauche du [L'icsent, dans le bassin de la Regnitz, et célèbre par ses cavernes naturelles remplies d'ossements fossiles, qui ont excité dans ces derniers temps l'attention des naturalistes. La plus considérable, qui porte le nom du village, est percée dans un rocher vertical ; son entrée est haute de 2™,50; on y voit d'abord une première grotte longue de 25 mètres ; elle communique à une seconde par un trou de 65 centimètres de haut; celle-ci a 40 mètres de longueur sur 13 de largeur. Sa hauteur est d'abord de 6 mètres, puis elle devient de plus en plus basse, jusqu'à n'avoir que lm,60 de haut. A l'extrémité, on trouve un passage étroit, puis divers corridors, par lesquels on arrive à une troisième grotte, dont le diamètre peut avoir 10 mètres et la hauteur 3. Ici l'on est frappé d'étonnement en examinant le sol qui est pétri de dents et de mâchoires. A l'entrée de cette grotte, une cavité de 5 à 6 mètres, dans laquelle on descend par une échelle, conduit à une voûte de 5 mètres de diamètre sur 10 de haut; près de cette voûte, on voit une grotte toute jonchée d'ossements. En descendant encore un peu, une nouvelle arcade conduit
Femmes de Passau.
à une autre grotte de 13 mètres de longueur. Elle est terminée par un nouveau gouffre de 6 à 7 mètres de profondeur : on y descend, et l'on arrive encore à une caverne d'environ 13 mètres de haut, remplie d'ossements. Un couloir conduit à une autre grotte de 8 mètres de long sur 4 de large; un second couloir mène à une autre de 6 mètres de haut; et enfin à une de 26 mètres de largeur sur 8 de hauteur, qui contient encore plus d'ossements que les précédentes. Mais ce n'est point l'extrémité de ce dédale, il faut encore marcher avant d'arriver à la sixième et dernière grotte. Elles forment un ensemble qui décrit à peu près un demi-cercle. Peut-être ne s'est-on pas assuré si quelques fentes que l'on aperçoit dans la roche calcaire ne communiquent point à d'autres cavernes : en 1784, une fente semblable fit découvrir une nouvelle grotte de 5 mètres de longueur sur 1 de largeur, que l'on trouva toute pleine d'ossements d'hyènes et de lions. On observa que l'ouverture en était beaucoup trop petite pour que ces animaux eussent pu s'y introduire; un canal particulier, qui aboutissait dans celle-ci, offrit, dit M. Cuvier, une quantité incroyable d'os et de têtes entières. On a reconnu parmi ces débris d'animaux des ours , des hyènes, des tigres, des loups, des renards, des gloutons, des putois et quelques herbivores, comme des cerfs et des chevreuils; mais les carnassiers y sont dans une proportion si considérable, que sur 100 ossements on est sûr d'en trouver 3 d'hyènes, 5 de loups ou de renards, 2 de tigres, 3 de gloutons et 87 d'ours. Tous ces animaux diffèrent de ceux d'aujourd'hui; ils attestent l'antique existence d'un monde qui n'est plus ; et lorsqu'on veut se rendre compte de la cause qui a amoncelé ces ossements dans ces cavités souterraines, on est porté à se faire deux questions : servaicnt-elles d'asile à des bêtes féroces qui y entraînaient les cadavres des herbivores dont elles se nourrissaient? ou bien une catastrophe, telle qu'une irruption des eaux, a-t-elle accumulé dans ces cavernes une énorme quantité de carnassiers avec des animaux d'un autre ordre? En voyant celle de Gailenreuth, on est tenté de la regarder comme ayant été remplie de cette dernière manière.
Le cercle de la Franconie moyenne est celui qui renferme le plus de villes manufacturières et commerçantes de la Bavière. Son cheflieu est Ansbach, que l'on appelait autrefois Onolzbach, mais qui est plus connu sous celui d'Anspach. Cette ville, arrosée par la Rézat, est entourée de murailles et renferme 18 édifices publics dont les plus importants sont le château et la chancellerie. Les habitants sont au nombre de 17,000, parmi lesquels il n'y a pas 300 catholiques. On y trouve un gymnase, une bibliothèque et plusieurs écoles élémentaires ; elle a des manufactures de divers tissus et des tanneries, mais son commerce est peu considérable.
C'est la patrie du célèbre médecin Stahl. Anspach est une résidence agréable par ses nombreuses promenades.
Erlangen, sur la Regnitz, station du chemin de fer de Munich, est entourée d'un mur et divisée en vieille et nouvelle ville ; ses rues sont larges et régulières : elle possède la seule université protestante du royaume; tous les établissements nécessaires à l'instruction y sont réunis. L'Académie impériale des naturalistes y existe depuis l'an 1666. Il y a vingt ans qu'on y a fondé une société de physique et de médecine, et une d'agriculture et d'économie. On est étonné qu'une ville de 12,000 âmes soit le siège de tant d'établissements utiles. Son château royal n'a rien de remarquable. Ses fabriques sont nombreuses et florissantes. Sous le rapport du commerce et de la population, Fiirth est plus importante qu'Erlangen; elle est aussi bien bâtie et s'élève au confluent de la Regnitz et de la Pegnitz.
Les juifs forment environ le quart de sa population, qui s'élève à 16,800 âmes; ils entretiennent à leurs frais un tribunal particulier, une université, deux imprimeries, trois écoles, un hôpital et quatre synagogues ; ce qui suffirait pour prouver à ceux que de misérables préjugés portent à regarder cette nation comme incapable de former de bons et utiles citoyens, que lorsqu'elle est admise à jouir de ses droits politiques, elle égale en lumières les chrétiens qui croient avoir le droit de la mépriser. Fürth est l'une des villes les plus industrieuses de la Bavière; sa manufacture de glaces est importante. Un tronçon de chemin de fer unit cette ville à Nuremberg,
importante station de la ligne de Munich à Vienne, à Berlin et à Francfort.
Au milieu d'une plaine fertile, quoique sablonneuse, la Pegnitz divise Nuremberg ou NÚrnberg en deux parties : la Sebalderseite au nord et la Lorcnzerseile au sud. Une vieille muraille, flanquée de tours et entourée d'un fossé, forme son enceinte, qui figure à peu près un carré. Ses rues sont irrégulières, mais plusieurs sont larges et toutes sont assez bien pavées; tout, jusqu'au Richsveste, vieux château qui la domine et qui n'est plus digne du titre de forteresse, rappelle ces anciennes cités dans lesquelles s'enfermaient, au temps
de la ieodahte, ces princes et ces comtes qui n étaient puissants que par la faiblesse de leurs voisins. Cet édifice a servi de résidence aux empereurs pendant le moyen âge ; lorsque la ville est devenue libre, il a été le séjour de son premier magistrat ; aujourd'hui il sert de magasin. Dans l'une de ses cours, on voit un puits de 178 mètres de profondeur. Les peintures qui convient les maisons de Nuremberg leur donnent un singulier aspect; l'hôtel de ville, qui date de l'an 1619, est un très-bel édifice, remarquable principalement par les tableaux et les curiosités qu i} renferme; On y conserve avec soin le gobelet de Luther. Dans plusieurs de ses huit églises, on trouve de belles peintures. On fttjmirc les. v^vftux de l'ancienne cathédrale; ceux de l'église Sainte-Clair* sqnt curieux par leur date : ils remontent à l'an 1278. Daigg celle dé !'4n b_'gdius, on admire un tableau de Van Dyck. Il existe dans cette ville un grand nombre d'écoles, dont les principales sont un gymnase qui passe pour un des meilleurs de l'Allemagne, trois écoles latines, un séminaire de professeurs, une école polytechnique, une Académie de peinture et une école de dessin; plusieurs sociétés d'arts et de sciences y prospèrent : telles sont la société physicQ-médioale, celle de la Pegnitï et celle d'industrie et d'aenculture; enfin elle possède un musée et sept bibliothèques publiques. Nuremberg, après avoir été l'une des villes les plus importantes de l'Allemagne, puisqu'elle a eu jusqu'à 90,000 habitants, en est encore une des plus industrieuses ; elle renferme 490 manufactures de différents produits, et principalement d'instruments de musique et de Riatjlfc maliques t de lunettes, d'épingles, d'aiguilles, de jouets d'enfants, etc.; le3 chapelets seuls occupent plus de 47 fabriql\es. oo commerce est très-étendu : on y compte 35Q maisons de négociants, plusieurs. m&^àsi.ns d'objets d'art et de quincaillerie dont les. assors timents surpassent en importance ceux de la plupart des autres villes de l'Allemagne deux bourses, une banque et un mont-depiété. Les e^thfiliques forment le sixième de sa population , çstimée à 50,000 individus. Depuis 1835 que Nuremberg communtque avec Furth par un chemin de fer, ces deux villes ont acquis croupe plus d'importance. Nuremberg est la patrie du célèbre peintre Albert Durer, et de plusieurs hommes d'un mérite distingué; et si l'on veut compter les inventions utiles qui ont eu lieu dans ses murs, Nuremberg a des titres à la reconnaissance du genre humain. Pierre Hell y inventa les montres vers la fin du quinzième siècle; Traxdorf, les pédales ; Rudolphe, les filières à étirer le fil de fer; Jean Lobsinger, les fusils à vent; un inconnu" les batteries d'armes à feu; Christophe Denner, la clarinette ; Érasme Ebencr, l'alliage connu sous le nom de cuivre jaune ; Martin Behaim, la sphère terrestre, dont l'usage contribua sans doute à la découverte de l'Amérique; enfin, Jean Muschel y perfectionna la trompette.
Les villes dont nous avons encore à parler nous paraîtront bien peu intéressantes après Nuremberg. Schicabach, sur la rivière de ce nom, est renommée par ses fabriques d'aiguilles, d'épingles, de fil d'archal, de cire à cacheter, de papiers, de draps et d'indiennes; elle doit sa prospérité à une colonie de protestants français qui s'y réfugièrent après la révocation de l'édit de Nantes. Le nombre de ses habitants est de 10,000. La petite ville de Bayerdorf, sur la Regnitz, est connue par ses clous et ses chaudrons. Rot/wnbourg, entourée de hautes murailles et bâtie dans le goût gothique, a un bel hôtel de ville, une jolie fontaine, une bibliothèque riche en manuscrits rares, et une population de 8,000 habitants. Dinkelsbúltl, entourée de hautes murailles flanquées de tours et bâtie Comme la précédente, compte 7,000 âmes. Ses fromages jouissent de quelque réputation. Nôrdlingen, dont la charcuterie est recherchée des gourmands, exporte annuellement plus de 30,000 oies : bâtie sur l'Eger, elle est entourée de fossés, de remparts et de tours : celle de l'église Sainte-Madeleine est élevée de 114 mètres. Ses 7,600 habitants font le commerce du produit de leurs diverses fabriques de toiles, de bas de laine, de futaines et de couvertures pour les chevaux.
Le cercle dé basse Franconie et d' Aschaffcnbourg se compose de l'ancien grand-duché de Würzbourg, de la province d'Aschaffenbourg, de plusieurs parties du territoire de Fülde et de quelques cessions faites par la Hesse. Son chef-lieu est IVûrzbourg. Peuplée d'environ 26,000 âmes, cette ancienne ville impériale, qui fut ensuite soumise au pouvoir d'un évêque dont l'une des prérogatives était de faire porter une épée nue devant lui, est entourée d'une haute muraille et d'un fossé profond. Le Mein la divise en deux parties : celle de la rive droite est l'ancien IVûrzbourg ; celle de la rive gauche porte le nom de quartier du Mein. On communique de
l'une à l'autre par un beau pont de huit arches, long de 201 mètres.
Dans le quartier du Mein s'élève, sur un rocher de 133 mètres de haut, la forteresse de Marienbcrg, au milieu de laquelle une antique construction est regardée comme les restes d'un temple de la déesse Freya, la Vénus des Scandinaves. La ville proprement dite n'est pas régulièrement bâtie, mais on y cite quelques édifices : le château royal est un des plus beaux de l'Allemagne ; la cathédrale, qui renferme plusieurs monuments et une chaire d'un travail achevé, est la plus remarquable de ses trente-trois églises. Le grand hôpital de Julius, douze autres hôpitaux et plusieurs établissements de bienfaisance; des bibliothèques, un observatoire, un jardin botanique et d'autres collections scientifiques de divers genres ; de nombreuses écoles de différents degrés, telles qu'une école vétérinaire, un gymnase, une école centrale d'industrie, un institut agricole, un séminaire ecclésiastique, et surtout une université qui a plus de 400 ans d'antiquité, et dans laquelle 31 professeurs donnent l'instruction à environ 700 étudiants Il enfin un commerce considérable, surtout en vins, font de cette ville une des pins belles acquisitions de la Bavière.
Les vignobles des environs de Wiïrzbourg sont renommés depuis le treizième siècle : les gourmets connaissent les vins de Franconie celui de Leisfe est le plus estimé, celui de Slcin se réçolte sur un terroir qui appartient au grand hôpital : lorsqu'il est vieux, on le vend plus de 5 francs Io, bouteille. On cite encore celui de Schalksberg et celui de Calmus., Presque tous ces vins sont chauds et liquoreux. Carjstadt, sur le Mein, fait également un grand commerce de vins ; le Mein arrose aussi Schweinfterth, ville de 7,000 habitants, qui, dans sa vieiUe enceinte de murailles, renferme une haute école fondée par Gustave-Adolphe, un gymnase, quatre écoles élémentaires et 37 fontaines publiques. Ses environs produisent des céréales , du tabac et du vin, L'excellent vin de Saalelconstitue le commerce de la petite ville d'Hamv?elbourg, sur la Saale. Les 5,000 habitants de Kilzingen se livrent au commerce des vins et d'expédition pour l'Allemagne méridionale. Ce qu'il y a de plus remarquable dans cette petite ville, entourée de murailles pi de tours, c'est le pont sur le Mein, par lequel on communique avec le faubourg d'Edwashausçn : il a 15 arches et 333 mètres de long. Sa longueur paraît d'autant plus considérable qu'il n'a que 5 mètres de largeur. fiisswgei?, est encore une ancienne ville murée, mais petite et peuplée comme un simple village, malgré sa position sur la Saale, malgré plusieurs sources minérales dont on expédie un grand nombre de bouteilles, un bel établissement de bains et des salines qui fournissent 16,000 quintaux de sel par an. Le village de ocklct, à a kilomètres de là, est célèbre en Bavière par ses bains d'eau sulfureuse et d'eau ferrugineuse.
Au bas des pentes occidentales du Spessart s'élève, au bord du Mein, une colline sur laquelle est bâtie Ascluijjcnbourg ; 7,000 habitants peuplent cette ville, dont les rues sont étroites, mais que des écoles et des collections d'arts ctdc sciences rendent intéressante, et qu'un superbe château, qui possède un beau parc, une faisanderie et une orangerie, embellit. Aschaffenhourg était pendant l'été la résidence des électeurs de Mayence. Des tanneries et des fabriques de sucre de betterave y sont établies; c'est l'entrepôt de toutes les marchandises qui descendent le Mein et des bois de construction que l'on tire de la forêt du Spessart.
Retournons sur nos pas, et parcourons le cercle de Souabe et Neubourg, auquel plusieurs villes importantes donnent de l'intérêt, et que certaines branches d'industrie enrichissent : c'est de tous les départements de la Bavière celui qui renferme le plus de moulins à papier. Augsbourg, son chef-lieu , est, après Munich et Nuremberg, la plus importante ville du royaume : nous avons parlé de son antiquité, voyons ce qu'elle renferme de curieux, quels sont ses établissements et ses sources de richesses. Elle est située dans une
plaine vaste et fertile, entre le cours du Lech et celui du Wertach, qui se réunissent au pied de ses remparts et à quelque distance de ses fossés pour porter au Danube le tribut de leurs eaux. Ses rues étroites et irrégulières, qui semblent contraster avec l'aisance, et nous pouvons dire la richesse de ses 35,000 habitants, ne sont cependant qu'une conséquence de son ancienneté; on n'en compte que quelques-unes d'alignées : au nombre de celles-ci, la rue du May est magnifique. De belles fontaines embellissent la ville et contribuent à l'assainir. Ses principales places sont celles du May, la place Neuve et celle de Caroline; son hôtel de ville est peut-être le plus vaste et le plus régulièrement bâti de toute l'Allemagne. On y remarque la salle d'Or, dont la longueur est de 30 mètres et la largeur de 18. L'ancien palais épiscopal, aujourd'hui l'hôtel du gouvernement, est célèbre par la lecture de la confession d'Augsbourg faite en présence de Charles-Quint l'an 1530. L'arsenal est le principal dépôt d'armes de tout le royaume. La cathédrale, ornée de superbes vitraux, de plusieurs tableaux de prix et de trente colonnes colossales , est la plus remarquable de ses 12 églises, dont 6 appartiennent au culte catholique et6 à lacommunion luthérienne; cependant celle de Saint-Ulric, dans laquelle les deux cultes ont leurs jours d'office particuliers, est citée pour la hardiesse de ses voûtes, et celle des récollets pour les dimensions de son orgue; les
autres édifices sont la halle et le théâtre. Augsbourg est la résidence d'un évêque dont la puissance est bien déchue : ses revenus ne sont plus à comparer à ce qu'ils étaient jadis. Il y a plus de 1,000 ans, l'évêché était l'un des plus riches de la chrétienté. Ceux qui le possédaient portaient le titre de princes de l'Empire. C'est en 590 qu'elle eut son premier évêque; parmi ses successeurs il en est plusieurs qui se .distinguèrent par le zèle avec lequel ils en augmentèrent le patrimoine. L'évêque Brunon, frère de l'empereur Henri II, se distingua sous ce rapport : il ne se contenta pas de l'enrichir de ses propres biens, ce fut lui qui obtint le premier que la dignité de prince fût attachée à cet évêché, et que le droit de chasse et plusieurs péages fussent compris parmi ses revenus. Au treizième siècle, l'évèque Hartman, comte de Dillingen, donna en toute propriété les biens de sa famille et le comté de IVittislingen à cet évêché déjà si riche. L'évêque Wolfhart de Roth l'augmenta encore de plusieurs villages, et l'évéque Henri VI porta l'empereur Louis à engager à cet évêché une prévôté considérable avec les villages qui en dépendaient. Voilà comment l'antique Augusta Tiindelicorurn, la principale cité des Vindelici, devint l'un des principaux évêchés de la chrétienté. On y voit encore plusieurs restes de constructions romaines.
Son importance s'accrut successivement jusqu'à l'époque où il partagea le sort de presque tous les chapitres de l'Allemagne. Augsbourg a un gymnase et plusieurs établissements d'éducation, une école polytechnique, une bibliothèque publique et une belle galerie de tableaux, pour la plupart de l'école allemande, des hôpitaux et diverses maisons de bienfaisance dont les revenus s'élevaient, en 1827, à plus de 7,000,000 de florins. L'industrie manufacturière y était autrefois plus active qu'aujourd'hui ; cependant son commerce est encore très-considérable : il enrichit environ 2,000 négociants, dont les affaires s'élèvent annuellement à plus de 4.7,000,000 de florins. Le change de Vienne avec le reste de l'Allemagne se règle sur celui de cette place. Elle possède des fabriques de toute espèce ; ou prétend que c'est dans ses murs que les premières futaines ont été faites. Les affaires de commission et de change en font un des points principaux de l'Europe commerçante.
Cette importante ville est le centre du réseau des lignes de chemin de fer delà Bavière. Quatre lignes en partent, se dirigeant : à l'est, vers Munich ; au sud, vers le lac de Constance ; à l'ouest, sur Ulm, Stuttgard et la ligne badoise; enfin au nord, sur Nuremberg et Bamberg, où elle rejoint la grande ligne de Francfort à Vienne et à Berlin.
Neubourg, ville de 7,000 âmes, sur la rive droite du Danube, est entourée de murailles et dominée par un château royal bâti sur une hauteur; cet édifice, d'une assez belle architecture, renferme un cabinet d'antiquités. Dans la ville, qui se divise en haute et basse, des casernes, trois églises, un séminaire, des hôpitaux, une maison d'orphelins et un collège pour la jeunesse noble, un institut royal et quelques beaux tableaux dans l'église Saint-Pierre, ne nous arrêteront point. Nous sommes entourés de lieux féconds en souvenirs.
Ici s'élève la tombe de la Tour d'Auvergne, de ce héros qui n'ambitionna que le titre de premier grenadier de France, et qui fut tué, en 1800, sur le chemin de Neubourg- à Donawert ou Donall■wônlh. C'est dans cette petite ville que Louis le Sévère fit décapiter Marie de Brabant sa femme. Ses environs sont célèbres par plusieurs batailles sanglantes : en 1703, les Impériaux y furent défaits par les Français et les Bavarois, commandés par le maréchal de Villars ; en 1704, les Français et les Bavarois, sous le commandement de Tallard, y furent battus par les Impériaux que commandaient Marlborough et le prince Eugène, et le maréchal français y fut fait prisonnier. C'est près du village de Blenheim qu'eut lieu cette sanglante affaire connue sous le nom de bataille d'Ochstâdt. En 1780, on y délerua une si grande quantité d'ossements, qu'on s'en servit pour faire les fondements d'une chaussée. Mais les revers de Tallard, auquel l'intrigue fit donner le commandement d'une armée que Villars aurait sans doute conduile à la victoire, furent vengés sur le même lieu en 1796 et en 1800.
Mernmingen, autrefois ville impériale, est arrosée par V Ach, et peuplée de 8,000 âmes. Au nombre de ses principaux édifices il faut mettre l'hôtel de ville, l'arsenal et la chancellerie. Elle renferme un lycée, un conservatoire de musique, une bibliothèque publique et plusieurs écoles pour les deux sexes. C'est la patrie de Heiss, de Sichélbein et de plusieurs autres artistes ; elle fait un grand commerce de toiles, de serge et de houblon. Kempien, station de chemin de fer, rivalise avec la précédente pour l'industrie et le commerce; elle est située sur le bord de YHier et entourée de montagnes. Sa fondation remonte au delà du huitième siècle : on sait que Hildegarde, femme de Charlemagne, donna au chapitre de cette ville tous les biens qui lui venaient de l'héritage de sa mère. Les dépendances du couvent qui porte le nom de cette impératrice sont si considérables, qu'elles forment une seconde ville de Kempten à côté de la première. On trouve dans celle-ci un grand nombre d'établissements de bienfaisance, des écoles, un théâtre et des collections scientifiques. A 2 kilomètres de la ville, les bains d'Aich sont connus sous le nom de Kempten.
Sur le bord du lac de Constance s'élève une ville de 3,000 âmes,
qui était jadis libre et impériale : on la nomme Lindan. Sa construction , en partie sur pilotis, au milieu de trois îles, l'activité de son commerce d'expédition , son port, ou plutôt le bassin Maximilien, qui peut contenir près de 300 bateaux, lui ont fait donner le nom de petite l enise. Le chemin de fer d'Augsbourg y aboutit, et y arrive sur un pont de 555 mètres construit sur les lagunes. Elle possède un château qui fut pendant longtemps une abbaye de chanoinesses dont i'abbésse était princesse de l'Empire; du haut de cet édifice on jouit d'une vue magnifique.
ADMINISTRATION DE CHACUN DES CERCLES. —JUSTICE.
— Les différents cercles que nous venons de décrire sont a dministrés chacun par un commissaire général, qui a sous ses ordres les autres membres de l'administration, qui se divise en deux branches, l'intérieur et les finances; la police y est soumise à l'autorité de plusieurs autres commissaires. Chaque cercle est ensuite subdivisé en diverses justices qui ont chacune leur chef-lieu; plusieurs de ces justices sont sous la dépendance de quelques seigneurs privilégiés, ce qui leur fait donner le nom de justices médiates et seigneuriales : nous n'en avons point parlé, parce que nous avons pensé que l'énumération en serait fastidieuse et sans intérêt. La cour souveraine d'appel de Munich est le premier tribunal du royaume; tous les tribunaux d'appel de cercles lui sont subordonnés, de même que les tribunaux de cercles, ceux des villes et des campagnes : les justices patrimoniales et seigneuriales sont subordonnées, à leur tour, à la cour d'appel de chaque cercle.
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BAVIÈRE RHÉNANE
ou
CERCLE DU FALATIXAT.
SUPERFICIE , POSITION. — Le territoire que nous allons parcourir forme le cercle du Palatinat. Il est pour la Bavière ce que la Province Rhénane est pour la Prusse : c'est un pays où l'agriculture, l'industrie et l'instruction sont plus avancées que dans les autres Etats de la monarchie à laquelle il appartient; c'est un pays où l'amour des libertés publiques est répandu d'ans toutes les classes ; c'est un pays enfin où les besoins matériels et intellectuels semblent exiger de nombreuses et importantes réformes dans l'action gouvernemcntale.
Le cercle dit Palatinat est formé de la plus grande partie de l'ancien département français du Mont-Tonnerre, d'une petite portion enlevée à l'extrémité septentrionale de celui du Bas-Rhin, et d'une autre qui appartenait à celui de la StaTe. Il fut d'abord donné à l'Autriche par le congrès de Vienne, mais en 1816 il passa à la Bavière. Sa superficie est de 10,821 milles carrés géographiques allemands, ou de 6,060 kilomètres carrés; sa longueur du l'est à l'ouest est de 100 kilomètres, et sa largeur du nord au sud de 80.
Il est borné au nord et à l'ouest par la province prussienne rhénane et par quelques possessions du duché de Saxe-Cobourg-Gotha et du landgraviat de Hesse-Hombourg; au sud par la France, et à l'est par les grands-duchés de Bade et de Hesse. Séparé du reste de la monarchie bavaroise par un intervalle de 55 kilomètres, qu'occupe une partie du grand-duché de Hesse-Darmstadt, ce cercle est en quelque sorte une colonie de la Bavière.
ASPECT PHYSIQUE. — Une grande partie de sa surface est occupée par l'extrémité septentrionale des Vosges : la ciniq la plus élevée est celle du Donnersberg ou du Mont-Tonnerre, qui n'a pas plus de 6 à 700 mètres d'élévation au-dessus du niveau moyen du Rhin. Ces montagnes sont presque partout couvertes de forêts, dont les deux plus considérables sont celle de Bien, qui a 15 à 20 kilomètres de longueur sur 9 de largeur, et celle de la Harth, qui a plus de 15,000 hectares du superficie. En général, le cercle du Rhin contient plus de 253,000 hectares de forêts, c'est-à-dire que sa richesse en bois égale presque celle du plus boisé des départements de la France , celui de la Côte-d'Or. Les pentes méridionales des rameaux de cette chaîne de montagnes sont garnies de vignes; les jardins et les vignobles forment une superficie de plus de 15,000 hectares : de sorte que l'on peut comparer la quantité de vignes de ce cercle à celle que possède notre département de la Nièvre; d'ailleurs leur produit est considérable, puisqu'on l'évalue année commune à 818,000 hectolitres. Enfin il y a dans ce paysdix fois moins de terrains incultes sur une superficie égale que dans le plus fertile des autres cercles de la Bavière. Sa population est de 611,476 âmes. On y compte 12 villes, 29 bourgs, 713 villages ou hameaux et près de 70,000 maisons.
AGRICULTURE. — Malgré l'importance de sa population, l'agriculture y est portée à un tel point de perfection, que le sol y produit le double de ce qui est nécessaire à la consommation ; les bestiaux surtout sont élevés avec le plus grand soin, et l'on peut même dire que c'est là tout le secret de la richesse agricole de ce pays. La propriété y est très-divisée : il y a peu de grands propriétaires ; mais aussi il n'est pas un habitant de la campagne, si peu riche qu'il soit, qui ne possède une maison et un champ. La mendicité y est inconnue comme la disette ; et celle-ci y est si peu à craindre, que lorsque la saison est défavorable aux céréales, elle favorise la végétation des racines potagères ; de sorte que lorsqu'il y a diminution d'un côté, il y a compensation de l'autre. Les principales récoltes, outre celle du vin, consistent en seigle, en épeautre, en orge, en avoine, en chanvre, en lin , en tabac, en garance, en pommes de terre, en fruits savoureux, et surtout en noix et en chataignes. L'épeautre dont il est ici question est connu en Allemagne sous le nom de dinkel; c'est un grain dont la farine est jaunâtre et recherchée principalement pour la pâtisserie : il a l'avantage sur les autres grains de pouvoir être semé dans des terres où le froment ne réussirait pas.
CONSTITUTION GÉOLOGIQUE DU PALATINAT. — La constitution géognostique de ce pays est assez intéressante : toute la partie montagneuse appartient à la formation du grès bigarré et à celle de cette roche formée de cailloux roulés réunis par un ciment siliceux qui a reçu en France le nom de grès vosgien, et que l'on peut regarder comme une dépendance de la formation du grès rouge. A l'est et surtout à l'ouest de ces montagnes, s'étend une longue bande de calcaire appelé musc/telkalk, et qui s'appuie sur le grès bigarré, qui repose lui-même sur le grès vosgien. De chaque côté de la rivière du Glan, règne, de l'est à l'ouest, un long et étroit dépôt de tourbe. L'extrémité nord-ouest du pays, depuis Rorbach jusqu'aux rives de l' Alsenz, présente une vaste formation houillère bordée de bandes de porphyre noir et parsemée de mamelons de la même roche, qui est supérieure au dépôt de houille.
Vers les bords du Rhin, on ne trouve plus que des dépôts de transport.
RIVIERES. — Les rivières qui arrosent le pays descendent de la chaîne des Vosges; elles appartiennent au bassin du Rhin occidental. A l'est de ces montagnes, la Lauter, qui a environ 70 kilomètres de cours, la Qucich qui en a 50, la Spire ou le Speyerbach qui en a 60, vont se jeter directement dans le Rhin ; à l'ouest, YErbach, qui n'a que 35 kilomètres de cours, va se joindre à la Blies, affluent de la Sarre ; le Glan et l'Alsenz se rendent dans la Nahe.
CLIMAT. — Le climat est sain et généralement doux ; mais il est plus froid dans les montagnes et sur le versant occidental que sur le versant opposé et dans les plaines qui s'étendent jusqu'au Rhin.
INDUSTRIE. — Malgré la grande quantité de bois et de houille que renferme ce pays, les habitants ne négligent pas d'exploiter leurs tourbières. Les mines d'argent, de cuivre, de cobalt et de plomb sont peu productives ; mais on livre annuellement aux usines 85,000 quintaux de houille, 33,000 de plomb, et environ 6 à 700 de mercure. On y recueille encore de l'argile propre à la fabrication des briques et de la poterie grossière, du porphyre, du marbre, des grès, de la pierre à chaux et du sel gemme.
L'industrie sait tirer parti des richesses de toute nature qu'offrent les entrailles de la terre comme la superficie du sol. Ainsi l'on compte dans le cercle du Palatinat 26,500 établissements industriels , dont les plus importants sont environ 20 manufactures de tabacs, autant de papeteries, 23 scieries, 3 verreries, des forges, des fabriques de potasse, des manufactures de différents tissus, des féculeries et des distilleries d'eau-de-vie. Les objets d'exportation sont les grains, le tabac, l'huile de navette, le vin, l'eau-devie, la graine de trèfle et de lin, les fruits secs, les bois de construction, les planches de sapin et le bois de chauffage, le fer, le mercure, le papier, les tissus de laine, les bestiaux, et principalement les porcs.
ANCIENS HABITANTS. — Les Nemètes habitaient, du temps de César, le versant oriental des montagnes de ce cercle et s'étendaient jusqu'au Rhin. Les Mediomatrici occupaient le versant occidental.
Tout ce qu'on sait de l'histoire des Nnnète" c'est que peu de temps guerre des Romains contre Arioviste, ce peuple fut un de eéax qui forcèrent les Mediomalrici à abandonner la rive gauche du Rhin pour aller s'établir au delà des Vosges ; les Nemètes habitaient auparavant sur la rive droite du fleuve. Tacite ne les regarde pas comme Gaulois. «Nul doute, dit-il, que les Vangioncs, les Triboci et les Nemètes ne soient d'origine germaine. • Il paraît, d'après le auteur, qu'ils serviront comme auxiliaires dans les armées romaines. comme auxi l iaires dans les armées
ADMINISTRATION POLITIQUE. — Le cercle du Rhin n'est point soumis à la même organisation que les autres provinces de la Bavière : on y a conservé, sauf quelques modifications, celle que le gouvernement français y avait établie, de même qu'on y a respecté la prédilection que les habitants n'ont cessé de témoigner pour la législation française. Le pays est donc divisé en 4 districts, subdivisés en 32 cantons.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Le chef-lieu, le siège des autorités départementales, est Spire. Cette ville, appelée en allemand Speyer, arrosée par une petite rivière qui porte le même nom et qui se jette à peu de distance de là dans le Rhin, est entourée d'une muraille percée de cinq portes. L'hôtel de ville, remarquable par son architecture, la cathédrale, qui renferme les cenres de huit empereurs et de trois impératrices dont les mausolées ont été détruits par les troupes de Louis XIV, 15 églises catholiques et 2 temples protestants, un gymnase, une maison d'orphelins et plusieurs autres établissements utiles, lui donnent une importance plus grande que ne l'annonce sa population. Elle ne renferme que 11,000 habitants, mais elle pourrait en contenir deux fois plus, si les espaces vides qu'on y remarque étaient garnis d'habitations.
Elle jouit cependant d'une industrie et d'un commerce qui ne manquent pas d'activité, et que doit accroître la facilité des communications de la ville avec les grands centres commerciaux de l'Allemagne avec lesquels elle est liée par le chemin de fer de Manheim. Il existe dans ses environs des sources d'eaux minérales.
Spire a donné le jour à quelques hommes distingués, entre autres au célèbre médecin et chimiste J. J. Becher, qui fonda une théorie chimique sur laquelle Stahl établit ensuite la sienne.
Cette ville existait avant l'ère chrétienne; elle s'appela d'abord Noviomagus, puis Augusta Nemetum, du nom des Nemètes, dont elle était la principale cité. En 348, elle était déjà le siège d'un évéché. Ruinée au commencement du cinquième siècle par les Vandales et les Alains, elle tomba au pouvoir des rois de France : Dagobert Ier, en 630, la restaura et rétablit son évéché. Vers le huitième siècle, elle prit le nom de la petite rivière qui l'arrose; an onzième, son évèque, Rodiger ou Roger, la fit entourer de murailles. Sous l'empereur Henri IV, elle devint ville libre et impériale, tout en reconnaissant l'autorité de son évêque; mais celui-ci n'avait pas même le droit d'y résider. Ce fut en 1529 que se tint dans cette ville la célèbre diète où le nom de protestant prit naissance. Enfin Spire était riche, peuplée et ornée de beaux édifices, lorsqu'au mois de septembre 1688 les troupes de Louis XIV, sous les ordres de Montclas, se présentèrent devant la ville. Les habitants n'avaient point oublié les ravages opérés par Turenne, en 1674, dans tout le Palatinat, où deux villes et vingt villages avaient été réduits en cendres : pour éviter les malheurs d'un siège, et pleins de confiance dans les promesses du chef ennemi, ils ouvrirent leurs portes. Après avoir vu raser leurs fortifications, après avoir supporté pendant huit mois le poids accablant de toutes les contributions de guerre, ils attendaient encore la réalisation des promesses qu'on leur avait faites, Jorsque le 13 mai 1689 on publia à son de trompe que tous les habitants eussent à évacuer la ville dans l'espace de sept jours, parce que passé ce terme on la livrerait aux flammes; que le roi regrettait d'autant plus d'en agir ainsi, qu'il n'avait aucun sujet de plainte contre eux, mais qu'ayant besoin ailleurs de ses troupes, il ne voulait point que ses ennemis trouvassent de la subsistance dans cette place. Cet ordre, émané de Louis XIV et contre-signé par Louvois, fut rigoureusement exécuté.
Le général français avait promis de respecter le dôme ou la cathédrale; il le devait au nom du roi très-chrétien, par respect pour les dépouilles royales qui y reposaient en paix. Il permit aux habitants d'y déposer ce qu'ils ne pourraient emporter. Le terme fatal expiré, la flamme dévora en un jour cette grande et célèbre cité, à la vue des hommes, des femmes et des enfants désolés, errant sans asile dans les environs. Malgré les promesses les plus sacrées, la cathédrale fut livrée au pillage, les tombeaux des empereurs Henri Ill, Conrad II, Henri IV, Henri V, Philippe, Rodolphe Ier, Adolphe et Albert Ier, furent profanés, et l'édifice fut livré aux flammes, dont la violence fut encore augmentée par l'incendie des meubles que les bourgeois y avaient déposés. On n'accorda des passe-ports qu'aux membres du clergé et de la chambre impériale; on voulait forcer le reste des habitants à aller s'établir en France; mais la plupart préférèrent se réfugier dans les bois où ils trouvèrent le moyen de tromper la surveillance des patrouilles répandues dans les environs et de gagner la rive droite du Rhin. Les officiers étaient honteux de se voir contraints d'être les instruments de ces persécutions, qui s'étendirent sur tout le Palatinat, et qui cependant ne furent pas les dernières. On sollicita en vain à la paix de Ryswick une indemnité en faveur des malheureux habitants de Spire, de Landau, de Frankentbal, et d'autres lieux également incendiés : ce ne fut qu'après la- signature de ce traité, en 1697, que Spire commença à se relever de ses ruines. Le dôme ne fut même restauré qu'en 1772. En 1794, les cruautés dont Louis XIV avait le premier donné l'exemple furent renouvelées par ordre du comité
de salut public, qui avait résolu aussi de mettre un désert entre la France et ses ennemis. Enfin, sous le gouvernement français, le Palatinat acquit un degré de prospérité qu'il n'avait jamais eu, et Spire, qui n'avait que 3 à 4,000 âmes, a plus que doublé de popution depuis qu'elle est le chef-lieu du cercle du Palatinat.
Les autres villes de ce cercle ne retracent aucun souvenir remarquable, et conséquemment offrent peu d'intérêt. Franketithal, station du chemin de fer de Spire à Manheim, dont le nom rappelle le royaume de Franconie, n'a que 4,800 habitants; mais elle est bien bâtie et la plus industrieuse cité du département. On y trouve des fabriques de tissus de laine, d'étoffes de soie, de toiles, de rubans, de tapisserie, de papiers peints, de tabac, et de porcelaine qui rivalise avec celle de la Saxe. Au moyen de la navigation du Rhin, qui n'en est éloigné que de 4 kilomètres, elle fait avec l'Allemagne un grand commerce de grains et des divers produits de ses manufactures. Griinstadt, bâti au milieu d'un territoire fertile, arrosé par la Liss, possède des fabriques de faïence et de cotonnades. Kaiserslautern, qui renferme un gymnase, un séminaire de maîtres d'école et 4,600 habitants, n'est connu que par le souvenir qu'on y conserve de l'empereur Frédéric-Barherousse, qui y possédait un vaste château, remplacé aujourd'hui par une prison, et pour avoir été le théâtre de deux batailles que se livrèrent dans ses environs les Français et les Prussiens en 1793 et 1794. Pirmasens, qui retrace le souvenir de la sanglante journée du 17 sep lembre 1793, pendant laquelle le duc de Brunswick battit l'armée française, est bien bâtie, possède un beau château et 5,000 habitants. Elle est sur la ligne du chemin de fer de Manheim à Metz. Deux-Ponts ou Zwei-Briiclcen, qui a 1,000 habitants de plus, est une jolie petite ville agréablement située sur l'Erlbach, et dont les rues sont droites, propres et bien bâties. On y voit un superbe château ; celui des anciens ducs de Deux-Ponts a été entièrement détruit. Landau, sur le Queich et l'embranchement de Weissembourg à Neustadt, fortifiée par Vauban, place réservée pour la Confédération, mais occupée seulement par les troupes bavaroises, est remarquable par ses fortifications. La ville, qui n'a que deux portes et qui a la même population que Deux-Ponts, est bâtie au milieu de ces travaux : ses rues sont régulières. On y voit une belle place d'armes, des casernes garanties contre la bombe et des magasins considérables. Cette ville, qui appartenait à la France depuis 17] 3, qui fut assiégée vainement en 1793 par les Prussiens et en 1814 par les Russes, lui fut enlevée par les traités de 1815, et depuis ce temps son commerce et sa prospérité passés n'ont cessé de décroître. Germcrsheim, située sur la même rivière, à peu de distance du Rhin, ne mérite d'être citée que parce qu'on y voit encore une des tours de la vieille forteresse dans laquelle mourut l'empereur Rodolphe de Habsbourg, et que dans ses environs on a établi un lavage d'or sur le bord du fleuve. Cette petite ville, qui s'élève sur l'emplacement du Vicus Julius des Romains, possédait sous les rois francs un château royal.
Aujourd'hui elle est une des places de la Confédération : elle est défendue d'un côté par des murailles, et de tous les autres par le Rhin, le Queich et des marais, ainsi que par des travaux nouvellement construits.
GOUVERNEMENT. — La Bavière forme un royaume indivisible; les domaines de l'Etat sont inaliénables; la couronne est héréditaire, et la personne du roi est inviolable. Il peut professer la religion catholique ou protestante à son choix. Le trône n'est dévolu aux femmes qu'à défaut de mâles. L'assemblée générale des États se compose de deux chambres : celle des pairs est formée de la réunion des princes de la famille royale, des dignitaires de la couronne, des deux archevêques, des chefs des principales familles seigneuriales, d'un des évêques nommés par le roi, du président du consistoire général protestant, et de tous ceux que le roi désigne, soit comme membres héréditaires, soit comme pairs à vie. Cependant le nombre de ceux-ci ne doit point dépasser le tiers de la totalité. On exige des membres héréditaires un bien-fonds payant 300 florins d'impositions, l'âge de 21 ans pour siéger, et 25 ans pour ceux qui sont nommés à vie. La chambre des députés se compose de 115 membres, dont un huitième appartient à la noblesse, un huitième au clergé, un quart à la bourgeoisie, et la moitié aux propriétaires fonciers ; de plus, chaque université nomme un député qui doit avoir 30 ans révolus, et qui doit appartenir à l'une des trois communions chrétiennes. Le nombre des membres de cette chamlïre est déterminé d'après celui des familles, de manière que
7,000 familles sont représentées par un député; la candidature se renouvelle tous les six ans. Ils sont convoqués tous les trois ans. Les états sont investis du pouvoir législatif et de la faculté de voter les impots. Le pouvoir exécutif est entre les mains du roi ; les deux autorités centrales sont le ministère, composé de cinq ministres, et le conseil d'Etat, considéré comme autorité consultative et comme le pouvoir délibérant le plus élevé. D'après la loi fondamentale, nul ne peut être soustrait à ses juges naturels; tous les citoyens sont appelés à remplir les divers emplois de l'Etat, et le service militaire est obligatoire pour tous.
On compte en Bavière cinq ordres de chevalerie, dont le roi est grand maître, savoir : l'ordre de Saint-Hubert, celui de SaintGeorges, celui de Saint-Michel, l'ordre militaire de Max-Joseph et l'ordre du Mérite civil.
RELIGION. — La Bavière ne reconnaît point de religion de l'Etat, les consciences y sont libres : les catholiques, les luthériens et les réformés jouissent de droits égaux; le gouvernement n'intervient jamais dans les questions qui ont rapport au culte, mais il exerce sur tous une surveillance impartiale. D'après le dernier concordat, le royaume est divisé en deux archevêchés, dont l'un est à Munich et l'autre à Bamberg, et en six évêchés : ceux de Passau, de Ratisbonne et d'Augsbourg, et les évêchés suffragants d'Eichstadt, de Wurzhourg et de Spire. Le culte protestant est sous l'autorité du consistoire général de Munich, et les israclites sous celle de leurs rabbins, dont la nomination est soumise à l'approbation du gouvernement.
CARACTÈRE MORAL. — COUTUMES. — Les peuples de la Bavière ont conservé quelques traits caractéristiques des différentes souches dont ils sortent : l'habitant de l'ancienne Souabe est ignorant, superstitieux et sobre; le Franc, ou peuple de l'ancienne Franconie, est rusé, actif et entreprenant; le Bavarois proprement dit, celui qui descend du mélange des Vindelici et des Boii, est sérieux, loyal, fidèle à ses engagements, constant dans ses affections , attaché aux cérémonies religieuses plutôt qu'aux préceptes de la religion, et prêt à tout faire pour la patrie, si le prêtre le lui prescrit au nom de la Divinité. Chez ces peuples, les mœurs ne sont point aussi pures qu'on pourrait le croire : dans les villes, la corruption n'est que trop visible et facile à expliquer; mais jusque dans les montagnes, le nombre des enfants naturels annonce une dépravation qui n'est probablement que la suite du défaut d'éducation.
Déjà le gouvernement a senti cette grande vérité; il s'occupe de la mettre à profit. Depuis longtemps des notions assez étendues d'agriculture font partie de l'enseignement primaire. Chaque paroisse possède une école élémentaire; un temps viendra sans doute où chaque village en possédera une. La classe aisée est mieux partagée sous ce rapport : des lycées, des collèges et des universités sont établis dans plusieurs villes, mais leur nombre est loin d'être suffisant pour une nation qui a le droit de prétendre à tenir un rang parmi les plus éclairées, et qui paraît digne de la liberté.
FINANCES. — Le revenu de la Bavière est d'environ 112,000,000 de francs, et sa dette publique de plus de 500,000,000. Ces résultats sont peu satisfaisants ; mais de nombreuses réformes, des économies sagement entendues, faites dans les dépenses de l'Etat, ne peuvent manquer d'améliorer la situation financière du royaume.
ARMEE. — L'armée qu'entretient la Bavière répond par son importance au rang (le troisième) que cet État occupe dans la Confédération Germanique.
L'infanterie et la cavalerie sont divisées en deux corps d'armée formés chacun de deux divisions, chaque division ayant deux brigades d'infanterie et une brigade de cavalerie. Il y a deux régiments d'artillerie à pied, un d'artillerie à cheval et un régiment du génie.
Sur le pied de paix l'armée est de 72,000 hommes et de 8,000 chevaux. Sur le pied de guerre les bataillons et les régiments sont plus forts, et l'armée compte (1855) 188,566 hommes d'infanterie, 26,600 hommes de cavalerie, 22,016 hommes d'artillerie et 1,628 bouches à feu; enfin 2,704 hommes du génie, sans compter les états-majors. Les places fortes du royaume sont Landau, place forte fédérale, avec garnison exclusivement bavaroise en temps de paix; Passau, Wiirzbourg, Forchheim, Ingolstadtet Germersheim.
Les forts ou citadelles sont ceux de Willibaldsbourg, près de Eiehstâdt, de Wultzbourg, de Rothenberg et de Rosenberg, près de Kronach.
TABLEAUX STATISTIQUES DU ROYAUME DE BAVIÈRE.
STATISTIQUE GÉNEBALE.
FOPULATIOÂ par FI N A N G E s SUPERFICIE. POPULATIONÏ kilomètre en 1855 COMlIRRCg. FORCES MILITAIRES.
carré.
1,387 50 En 1852. 59 Revenus. ExporttionR. Pied de paix. 72,000 hommes milles carrés 4,539,452 43,071^756 florins, 150,000,000 francs. - 8,000 chevaux, géographiques allemands, ou environ Pied de guerre. ] 90,000 hommes.
ou En 1855. 112,000,000 francs. — 25,000 chevaux.
77,700 4,541,550 Dépenses. 1,028 bouches à feu.
kilomètres carrés. 118,000,000 francs, Det e en oetob, e liso-l.
196,090,302 lforins, ou 500,000,000 francs.
- = ——=~————' '—————————————— rtr-
Stalistique des Provinces,
SUPERFICIE POPULATION EN DKOKJIBRK 1852.
NOM DU CERCLE. kilomètres ---- SUBDIVISIONS ET VILI.ÈS PRINCIPALES.
carrés. Hommes. Femmes. Total.
) Présidiaux.
MUNICH , 127,385. Rosenheim, 2,500.
Berehtesgaden, 10,000. Schongau, 1,300.
Dachau, b., l^OOi Slarnberg, vill., 300i Eberberg, b., 900. Teisendorf, b., 700.
Erding, 1,800. Tillmaning, 1,100.
Freising, 3,600. Tolz, b., 1,200.
Landsbcrg, 4,000. Traueustein, 3,000.
| Landshut, 8,500. Troslberg, b., 900.
HALTE BAVIÈRE ,. 17,313 52 369,409 365J422 734,831 Laufen, 2,600. Viisbibourg, 1,000.
(27 présidiailx ou justices Miesbach, b., 800. Wasseibourg, 1,500.
et Moosbourg, 1,300. Weilheim, 1,800.
3 juridictions seigneuriales.) Miihldorf, 1,400. Werdenfels, 1,500.
P faffennhofen, 1,600. Wolfrathshausen, 1,200.
Reiclienliall, 3,500,
Juridictions seigneuriales.
Brannenbcrg, vill., 400. I Tcgcrnsee, vill., 300.
Hohenaschau, vill., 500. Présidiaux, WüllznouRo, 24,000. Klingpnberg, 900.
Alzenou, vill., 500. Künigshofell-illl-Grabfeldc, Arûstein, 2,000. 1,500.
Asehaffenbourg, 7,000. Lohr, 3,500.
Aura, b., 1,300. Mainberg, vill., 200.
Biscliofsheim, 1,600. Markl-Breit, 8,000.
Brückcnau, 1,500. Markt-Steft, b., 1,200.
Carlstadt, 2,200. Mellriclistadt, 2,000.
Dellelbach, 2,200. Munnersladt, 1,600.
Ebern, 1,000. Neustadt-an -der- Saale, BASSE FBANCONIE ET ASCIIAF- Etleman, ? 1,700.
FESBOURG 9,089 92 293,138 302,610 595,748 Euerndorf, vill., 700. Obernbourg, 1,500.
( 48 présidiaux,) Fladungen, 800, Ochsenfurt, 2,000.
Frammersbach, 2,200. Orb, 3,700.
Gemûnden, 1,200. Prôlsdorf, b., 400.
Gefolzhofeu, 2,000. Rôlhenbuch, vill., 800.
Glensdorf, bï, 400. Rottingen, 1,300. *
Hammelbourg, 2,300. Schweinfurt, 7,000.
Hassfurt, 2,000. Sulzheim, vill., 300.
Hillers, b., 900. Wolkach, 1,600.
Hofheim, 1,300. Klcin-AYaldstadt, b., 600.
Hambourg, b., 600. Werneck, b., 900.
Kallgnberg, vill., 400. Weyel's, b., 800.
Kissingen, 1,000. Woifmunster, 800.
IKilzingep, 5,000. Zeil, 1,000,
- - .-.-:-.-
SUPERFICIE POPULATION KM DÉCEMBRE 1852.
NOM DU CERCLE. kilomètres N SUBDIVISIONS BT VILLES PRINCIPALES.
1 Hommes. Femmes. Total.
carres.
! Présidiaux.
BAYP.KLTII, 14,000. Mûnchberg, 1,800.
Bamberg, 22,000. Naila, b., 1,300.
BoUrg-Eberach, h., 600. Neustadt - am - Kulmen , Ebcrmnnstadt; 1,600. 1,000.
Eschenbach, 1,100. Pegnitz, 1,000.
Forrhhcim, 3,000, Pottenstein, 800.
Gefrées, b. ljlOO. Rehati, 1,100.
Grntènbefg, 1,000. Schesslitz, 900.
Hôchstadt, 1,400. Selb, 1,600.
Hof, 8,000. Sesslaeb, 800.
HAUTE F/nA Axtiofciih 7,019 60 242,215 257,' ^94 499,709 Hollfeld 1,000. Stadsteinacli, 1,200.
(34pré, si.d.. Kcmnath, l,a00. JTeuschnitz, 800.
t é 'J' emna , ,a , l'use III z,
e iaux Kirchlamitz, b., 1,100. Trischenreuth, vill., 700?
Ki-onach, 3,000. Waldsassen, ? 6 juridictions seigneuriales. ) Kulm b ach, 4,500. Weiden berg, 2,000.
U m ae", "el en eIl, 4:0, , Lauenstein, b., 500. Weissmain, ?
Lichlenfels, 1,800. Wunsiedel, 3,000.
Juridictions seigneuriales.
I Bant, viiI., 3CO. Milwitz, vill., 300.
Ebnat, viii" 900. Tambach, vill., 300, | Presseék, b., chef-lieu de la Thurnati, b., 1,300.
i Seigneurie de Heinersreuth, 800. ,
I Présidiaux, ANsPAcH, 17,000. Hilpolstein, b., 600.
Altdorf, 2,300. Lauf, 1,600.
Markt-Bibert, 1,200. Leutershausen, 1,000.
Cadolzbourg, b., 900. Monheim, 1,500.
Dinkelsbühl, 7,000. Neustadt-an-der-Aisch, Erlangen, 12,000. 2,000.
! Furth, 16,800. NÕrdlingen, 7,600.
MOYENNE m FRANCONIË 770 00 2a7,243 276,587 533,830 Markt.Ertbach, b., 900. Nuremberg, 76,000.
(29 présidiaux.) 1 Feucbtwangen, 2,000. Pleinfeld, b., 800.
Greding, 2,000. Rolenbourg-an-der-TauI j Guzenhausen, 1,800. ber, 8,000.
V Heidenheim, b , 2,000. Schwabaeh, 9,500.
I HeilsbrenIl, b., 800. Uffenheim, 1,600.
I Hemcden, 1,000. Wassertrudingen, 2,200.
I Hersbriick, 1,600. Weissenbourg, 5,000.
Herzogen-Aurach, 1,500. Windsheim, 3,500.
Présidiaux.
PASSAU, 10,500. Mitterfels, vill., 500.
Attenotting, b., 1,000. Pfarrkirchen, b., 1,400.
Burghausen, 2,200. Regen, b., 1,100.
Cham, 2,000. Simbach, vill., 300.
Deggendorf, 2,800. Straubing, 7,000.
BASSE BAVIÈRE, , , , , , , , , , 10,909 92 270,082 279,514 549,596 Eggenfclden, b., 1,300. Vilshofen, b., 900.
(19 présidiaux Grafenau, 700. Vegscheid, ?
! GGrraiefsebnaacuh, , 7b0.0, 800. AVolfstein, ?
, et Griesbacli, b., 800. Viechtach, ?
1 juridictibn seigneurial/) KÜlzting, b., 1,100, Wolfstein, ?
Landau, 1,300.
Juridiction seigneuriale.
Irlbach, vill., 400.
Présidiaux.
AUGSBOURG, 35,000. Lindau, 6,000.
Aichach, 2,000. Mindelheim, 2,400.
Buchloe, b., 700. Neubourg, 7,000.
Burgau, 2,400. Oberdorf, b., 1,100.
Dillingen, 3,400. Obergunzbourg, b., 800.
Donauwôrth, 3,000. Oitenbuern, 1,700.
Fricdberg, 2,000. Rain, 1,200.
SOUABB IT NEUBOURG 9,727 20 274,656 291,127 565,783 ( Füssll; 2,000. Roggenbourg (paroisse) f (33 présidiaux Goggingen, b., 1,500. 1,800.
et 1 Gronenbach, 1,000. Schwab-muncben, b., 2,600 18juridictions seigeteuriales.) Günzbourg, 4,000. Schrobenbausen, 1,600.
I Hôchstadt, 2,500. Sonthofen, b., 1,100.
| Illerlissen, b., 1,200. Turkheim, b., 1,500.
Immenstadt, b., 1,300 Ursberg, viii., iOO.
I Kaufbeuren, 4,500. Weiler, ?
Kempten, 6,000. Wertingen, 1,400.
\Lauingen, 4,000. Zusmarshausen, ?
SUPERFICIE POPULATION EN DÉCEMBRE 1852.
e~' .-.
NOM DU CERCLE. kilomètres ---.. SUBDIVISIONS ET VILLES PRINCIPALES.
carrés Hommes. Femmes. Total.
carrés. I Prèsidiaux.
j RATISBONNE, 26,500. Neubourg, 5,600.
Abensberg, 1,200. Parsherg, b., 500.
Amberg, 8,000. Pfaffenbcrg, b., 400.
Beilngries, 1,000. Regenstauf, b., 1,500.
Burglengenfeld, 1,800. Riedenhourg, b., 900.
Hemmau, 900. Roding, b., 1,000.
PALATINAT SUPÉRIEUR ET Ri- Ingolstadt, 6,000. Stadt-am-hof, 1,500.
TIsnONNE,.,.,.,. 9,810 08 223,951 244,528 468,479 Kastel ou Castel, b., 1,100. Sulzbach, 2,400.
(20 présidiaux Kellheim, 2,800. Tresswitz, vill., 500.
et Nabbourg, b., 1,500. AValdmunchen, b., 800.
7 juridictions seigneuriales.) Neumarkt, 2,700.
Juridictions seigneuriales.
Eckhmühl, vill., 100. Wackerstein, ?
| Eichslàdt, 7,000. Winklarn, ?
Ki|ifenbcrg, b., 800. M'ôrth, vili., 300.
Labervveiting, vill., 500.
Noms des districts. Chefs-lieux des cantons.
SPIRE, 8,000.
Dui-klieim, 3,500.
< Fl'ankenthal, 4,,800, , J Frankenthal, 4,800.
lunsa .,;)
I MiiUersLadl, b., 1,600.
Ncusladt-au-der-Harth, 3,000.
I DEUX-PONTS, 6,000.
| I BliescasleJ, b., 1,500.
Dhan, 700, I 1 Hombourg, 1,800.
S.. „ Nen-Hornbacll, 1,100.
DEUX-PO:--¡TS , Landslbul, 800.
| , 1 Medelsheim, b., 400.
I Pirmasens, 5,000.
PALATINAT (Bavière rhénane). 5.059 76 303,398 308,078 611,476 [ WJdfischbacli. b., 5°°.
V (4 districts et 32 cantons.) - - U aldmohr b 600.
! LANDAU, 6,000.
Anweiler, 2,200.
I JT ANDAU < J Bergzabern. 2,000.
L'\xD'Iu., Edenkoben, b., 3,400.
I Germersheim, 1,600.
I Kandel, 2,500.
KAISERSLAUTERN, 5,600.
I [ I Gôlheim, b., 1,000.
I Kirchheim-Poland, 2,000.
1 I Kussel, 1,400.
iK,, AISERSLAUTERN. /} Lauterecken, 900.
obermoschelj Otterberg, 1,500.
JRockenhausen, 1,100.
Winweiler, b., 900.
Wolflein, vill" 400.
Population d'après les religions en 1852 (L).
Autres CERCLES. CATHOLIQUES. PROTESTANTS. RÉFORMÉS. CONFESSIONS ISRAÉLITES.
CHRÉTIENNES.
Haute Bavière 692,645 11,626 333 587 1,218 Basse Bavière. , , ", , , 542,346 2,091 1 95 10 Palatinat 252,394 325,077 » 3,384 15,606 Haut Palatinat.. , , , , , , , , , , 425,021 36,272 2 92 910 Haute Franconie 206,492 280,223 233 45 5,431 Franconiemoyenne.,. 105,655 408,911 718 743 10,659 Basse Franconie 473,828 96,995 51 464 15,83 i Souabe. 477,952 70,268 1,093 150 6,365 Population civile. 3,176,333 1,23],463 - 2,431 5,560 56,033
(1) Extrait de l'Almanach de Gotha pour 1857.
SAXE.
Étudiants eu costume de corporation.
ESQUISSE HISTORIQUE SUR LA MAISON DE SAXE. — Nul doute que la maison de Saxe, l'une des plus anciennes et des plus illustres de l'Allemagne, ne descende de Wilikind, duc des Saxons.
On sait qu'elle posséda d'abord le landgraviat de Thuringe, puis le margraviat de Misnie ; que Frédéric le Belliqueux, qui eut la gloire de fonder l'université de Leipzig, fut le premier margrave qui porta le titre d'électeur de Saxe en 1422, et que Frédéric le Bon , son successeur, fut le père des deux princes Ernest çt Albert, fondateurs des deux branches appelées de leur nom Ernestine et Albertine, qui règnent encore aujourd'hui sur les Etats saxons. La première, qui est l'aînée, eut, avec la dignité électorale, le duché de Saxe et la Thuringe; la seconde, le margraviat de Misnie et toutes ses dépendances.
Frédéric le Sage, de la branche Ernestine, refusa prudemment la couronne impériale, et, sans se déclarer ouvertement pour Luther, protégea ce réformateur contre ses persécuteurs. Jean le Constant, zélé partisan dé la réforme, accéda en 1530 à la célèbre ligue des protestants, à Schmalkalden. Jean-Frédéric, surnommé le Magnanime, fut, avec le landgrave de Hesse , choisi pour commander les armées protestantes; mais, avec toute sa grandeur d'âme, il ne possédait pas les talents militaires ni la prudence politique si nécessaire pour le rôle qu'il avait accepté, et surtout pour pouvoir tenir tète au puissant Charles-Quint. Battu près de Mühlberg en 1547, il tomba au pouvoir de l'empereur, qui le fit condamner à mort, et il ne sauva sa tête qu'en cédant à Maurice la dignité électorale et la presque totalité de ses États. C'est à ces événements, qui se passèrent depuis l'année 1547 jusqu'en 1566, que la branche Albertine dut l'avantage qu'elle a conservé de posséder quatre fois autant de pays que la branche Ernestine.
Le rusé Maurice avait atteint son but; mais, devenu puissant, il résolut, en trahissant les intérêts de Charles-Quint, de rétablir les affaires des protestants, qui semblaient désespérées. Il se ligue secrètement avec la France et les princes protestants, et, sous prétexte d'exécuter le ban de l'empire contre Magdebourg, il lève une puissante armée, feint de mettre le siége devant cette ville, se fait prêter de l'argent par Charles-Quint lui-même, et soudain tombe sur ce prince qu'il manque de faire prisonnier, et le presse si vivement, qu'il lui arrache en 1552 la favorable convention de Passau.
L'année suivante, la mort arrêta dans ses vastes projets cet homme extraordinaire.
Son frère Auguste, qui lui succéda et qui se prétendait théologien , se fit l'instrument de la haine et de la vengeance des partisans de Luther contre ceux de Calvin. Jean-Georges Ier, qui, dirigé par les conseils de son confesseur, se conduisit envers GustaveAdolphe avec déloyauté, et plusieurs autres princes, ne nous offrent sous leur règne aucun événement remarquable. Frédéric-Auguste Ier était appelé à jouer un rôle plus important, bien que par ses talents il ne s'élevât pas au-dessus du vulgaire. Après avoir abjuré en 1697 la réforme de Luther, il eut la couronne de Pologne. Cette funeste couronne valut à la Saxe une visite de Charles XII, qui tira 23 millions d'écus du pays. Le comte de Brühl, qui gouvernait FrédéricAuguste II et la Saxe, se flattait de conquérir Magdebourg et de participer au partage de la monarchie prussienne ; ce fut par cette amorce que l'Autriche l'entraîna dans la terrible guerre de sept ans, qui changea les riantes et fertiles campagnes de la Saxe en affreux déserts. L'électeur-roi eut cependant la consolation de voir la paix conclue en 1763 , et de pouvoir revenir à Dresde. Frédéric-Christian régna à peine une année; mais Frédéric-Auguste III, prince sage,
économe et ennemi des plaisirs, était l'homme qu'il fallait pour rétablir les finances délabrées. En 1793, il fournit un faible contingent à l'armée des princes coalisés contre la France; ensuite il accéda à la neutralité armée jusqu'en 1806, qu'il réunit toutes ses troupes à celles de la Prusse. L'anéantissement de cette dernière dans la campagne de 1807 mit la Saxe entre les mains de Napoléon, qui attacha les Saxons à sa cause par des augmentations de territoire, en érigeant l'électorat de Saxe en royaume, et en ajoutant à la couronne du nouveau roi la Pologne prussienne, sous le titre de grand-duché de Varsovie. En 1809, Napoléon réunit encore à la Saxe plusieurs territoires cédés par l'Autriche.
Les désastres qui terminèrent si malheureusement la glorieuse campagne de Moscou rendirent la Saxe le théâtre d'une lutte sanglante et acharnée entre les armées prussienne et russe et l'armée française. La trahison força celle-ci à la retraite; mais elle ne fut point payée de reconnaissance par les puissances coalisées. Le congrès de Vienne enleva au royaume de Saxe un territoire considérable et une population de 8 à 900,000 habitants.
SUPERFICIE, POPULATION, LIMITES. — Aujourd'hui ce royaume n'occupe plus qu'une superficie de 15,222 kilomètres, et ne comprend qu'une population, qui était en 1853 de 1,987,832 habitants, et que l'on évalua en 1855 à 2,039,075 habitants. Il est borné au nord et à l'est par la Prusse, au sud par la Bohême et la Bavière, et à l'ouest par les duchés de Saxe et la Prusse. Sa plus grande longueur, de l'orient à l'occident, est d'environ 230 kilomètres, et sa plus grande largeur, du midi au nord, de 150 kilomètres.
MONTAGNES. — La partie méridionale du royaume est formée par les dernières pentes des monts Métalliques, en allemand Erzgebirge, longue chaîne qui va joindre à l'orient celle que l'on connaît sous le nom de Rîesengebirge. Ces montagnes, dont le noyau est granitique, sont en grande partie couvertes de gneiss : leurs pentes sont ordinairement plus roides vers l'occident que vers l'orient.
L'Erzgebirge est tellement riche en métaux de diverses espèces, que la dénomination de monts Métalliques lui convient parfaitement.
Leur exploitation occupe une population nombreuse ; c'est dans cette contrée de l'Allemagne que l'art du mineur est devenu depuis longtemps une science qu'ont honorée plusieurs hommes estimables par leurs travaux et leur capacité ; c'est à Sreyberg enfin que le célèbre Werner fonda la chaire de géologie qui a rendu son nom si cher à cette science qu'il sortit du chaos, et qui n'était avant lui que l'art de bâtir des systèmes auxquels leurs auteurs donnaient le titre pompeux de théoriet de la terre.
RIVIÈRES. — L'Elbe traverse le royaume du sud-est au nordouest : ce fleuve eu est le seul cours d'eau navigable. Entre le Riesengebirge et l'Erzgebirge, il coule dans une vallée profonde et ses rives sont escarpées. Il reçoit sur le territoire saxon la Miiglitz.
et la IVeistritz, qui descendent de l'Erzg-ebirge. Ces montagnes donnent également naissance à YElster, à la Pleisse, et à la Mulde qui passe à Freyberg, ainsi qu'à la Mulde qui traverse Zwickau.
CLIMAT. - Le royaume de Saxe jouit d'un climat sec et tempéré; la région montagneuse est seule exposée à un froid assez rigoureux, à tel point qu'on y voyage encore en traîneaux lorsque dans les contrées basses la neige est fondue depuis longtemps ; l'on commence à y voir réussir le blé, l'avoine et les pommes de terre, tandis que dans les plaines on récolte déjà les asperges. C'est en effet dans les parties les plus basses, comme aux environs de Leipzig, que la température est la plus douce. Ce qui prouve que le climat y est sain, c'est que la mortalité y est moins considérable que dans les contrées voisines, et que les hommes y parviennent souvent à un âge avancé.
PRODUCTIONS NATURELLES. — INDUSTRIE. — De belles forêts bien entretenues couvrent les montagnes, qui forment de jolies vallées cultivées avec soin et riches en beaux pâturages. Les terres du royaume de Saxe sont partout d'une bonne qualité; l'agriculteur y est intelligent, les produits en sont nécessairement considérables La race des moutons y est belle ; on en élève de nombreux troupeaux, dont la laine, fort estimée, forme une branche de commerce importante. P l usieurs sociétés d'agriculture encouragent l'éducation des abeilles, l'amélioration des bêtes à cornes et des chevaux.
D'autres sociétés ont pour but de favoriser dans plusieurs cantons la propagation de la vigue; celle-ci produit des vins de bonne qualité , mais dont la quantité ne suffit point à la consommation. Les récoltes des céréales sont également insuffisantes, mais beaucoup d'habitants y suppléent par la pomme de terre, qui y réussit parfaitement. Enfin les légumes et les fruits y sont abondants. Dans quelques cantons on cultive avec succès le lin, le chanvre , le houblon et le tabac.
Les richesses minérales que possède la contrée surpassent encore celles que produit un sol cependant fertile. On les estime à un revenu
brut de plus de 8,300,000 francs. Les mines d'Ausbringen sont comprises dans cette somme pour 2,450,000 francs, et celles de Freyberg pour 350,000. On évalue à 3,200,000 francs la valeur de l'argent fin que l'on retire annuellement des mines de la Saxe.
On compte environ 9,000 ouvriers mineurs qui peuvent extraire par an 3,000 quintaux de cuivre, 80,000 de fer, 10,000 de plomb, 2,500 d'étain, plus de 5,000 quintaux d'arsenic, et une quantité plus ou moins considérable d'autres métaux. Le nombre des uiihcbr ne s'élève qu'à 400 dans la justice de Dresde. Mais dans la chaîne de l'Erzgebirge, si riche en métaux , en quartz blanc et en améthystes, en agates, en jaspes , en grenats et en kaolin , dont la belle qualité a contribué pendant si longtemps à la supériorité de la porcelaine de Saxe sur toutes celles de l'Europe, de nombreux ouvriers recueillent annuellement, suivant Stein, près de 1,200,000 quintaux de soufre, d'alun et de nitrate de potasse. Enfiu, plusieurs houillères considérables sont exploitées sur le territoire saxon; mais les plus importantes sont celles des environs de Dresde, qui raljpoltenl annuellement près de 800,000 francs. Si à la valeur de fargent et de la houille on ajoute 50,000 francs de cuivre, 1,500,000 de fer manufacturé, 130,000 de plomb, 300,000 d'étain, 15,000 de bismuth, 65,000 d'arsenic, 1,830,000 de cobalt, 2,000 de manganèse, 27,000 de sulfate de fer, 4,000 de basalte, 2,000 de kaolin et d'autres terres, enfin 8,000 francs d'échantillons de minéralogie, on aura pour le produit des substances minérales du royaume la somme de 7,900,000 francs; pour obtenir cette somme, on dépense environ 400,000 francs en achat de diverses matières nécessaires à l'exploitation et que l'on tire de l'étranger.
Les salines que possédait la Saxe avant 1815 livraient du sel à la consommation pour des sommes considérables; mais lorsque le
congres de vienne lui enleva tes terrains aans lesquels ou le recueille. il fut stipulé que la Prusse, à laquelle on donnait ces terrains , délivrerait tous les ans à la Saxe 250,000 quintaux de sel à un taux assez modique pour que le gouvernement saxon pût, sans en élever le prix accoutumé, obtenir, par ce monopole, un bénéfice équivalent à celui qu'il en retirait avant le traité de 1815t Les manufactures de la Saxe ne sont dépourvues ni de cette activité ni de ce zèle nécessaires pour arriver aux améliorations qui en augmentent les produits. On y fabrique des toiles, des étoffes de soie, de laine ou de coton, des blondes, des dentelles, des rubans, des mousselines, des chapeaux de paille, du papier, des instruments de musique, des armes, enfin des porcelaines et des faïences également estimées. Ces établissements industriels occupent un grand nombre de bras. Ainsi on comptait encore, il y a quelques années, plus de 800,000 individus occupés à la fabrication de ces divers objets. Les fabriques de draps en employaient près de 25,000; celles de chapeaux de paille 5,000; celles de divers objets en métaux 50,000; enfin les filatures seules de coton près de 400,000.
Le point de perfection auquel sont parvenus quelques-uns de ces établissements n'est pas seulement dû à l'intelligence ci à l'industrie naturelle au peuple saxon; le gouvernement a depuis longtemps employé tous les moyens propres à leur donner plus d'essor.
Non-seulement il accorde des primes et des récompenses aux inventeurs des machines les plus utiles, mais des médailles aux fabricants les plus habiles. Il a fondé des sociétés d'encouragement, et il a mis à leur disposition des sommes considérables destinées à faciliter l'accomplissement de ses projets. Sur son ordre, ces sociétés ont établi des concours pour les questions dont la solution ne tend qu'à éclairer -sur leurs intérêts les agriculteurs et les manufacturiers ; il a même été, pour atteindre ce but, jusqu'à diminuer quelques-uns des impôts. Quelle impulsion de pareils moyens ne peuvent-ils pas donner aux transactions commerciales! aussi sont-elles fort étendues en Saxe.
CHEMINS DE FER. — Ce pays est entré de bonne heure dans la voie des progrès matériels; dès l'année 1837 un chemin de fer unissait Dresde à Leipzig. Cette ligne, qui aujourd'hui fait partie de la grande artère centrale de l'Allemagne, de Casse] à Vienne par Breslau, traverse le royaume d'est en ouest; elle reçoit cinq embranchements, celui de Leipzig à Francfort, par la vallée du Mein; celui de Riesa à Chemnitz; celui de Riesa à Berlin; celui de Dresde à Vienne, par Prague ; enfin celui de Zittau à Lobaü. D'autres lignes sont encore à l'étude ou en construction. La Saxe est donc un des pays de l'Allemagne les mieux partagés sous le rapport de ces rapides et utiles voies de communication.
DIVISIONS POLITIQUES. — La Saxe est divisée en quatre cercles : Dresde, Zwickau, Leipzig, Budissin ou Bautzen. Elle compte 142 villes, ayant 53,621 maisons, habitées par 663,040 individus; et 3,532 villages, ayant 169,747 maisons, habitées par 1,231,391 individus. Sur ses 1,987,832 habitants, on compte 32,000 catholiques, 900 juifs et 130 grecs.
LANGUE ALLEMANDE EN SAXE. — L'allemand que l'on parle en Saxe passe pour le plus pur et le plus correct. Cependant on
reproche, dit-on, aux habitants des villes une prononciation traînante et affectée. Presque tous les Saxons professent le culte de la confession d'Augsbourg : nous avons vu qu'au seizième siècle leurs électeurs furent ardents à défendre les principes et à protéger l'établissement de la réformation que prècha Luther ; mais depuis Frédéric-Auguste, qui embrassa en 1097 le catholicisme pour se faire élire roi de Pologne, la maison régnante est restée attachée à cette croyance.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Lorsqu'on arrive dans la capitale de la Saxe par la rive droite de l'Elbe, la richesse de ses environs, la variété des sites que l'on y remarque, la beauté de la foute que l'on suit, la largeur et la propreté des rues des faubourgs qui précèdent la ville, la longueur du magniCque pont qui traverse le fleuve, donnent une haute idée de Dresde. Ce pont, bâti en grès, est formé de seize arches; il est long de 460 mètres et large de 14.
On y a placé des bancs de distance en distance, et sur le douzième pilier un crqcifix doré, que supporte un morceau de roc brut d'environ 10 mètres de hauteur. Le maréchal Davout fit sauter le quatrième pilier, le 19 mars 1813, pour ménager la retraite de l'armée française; mais il a été rétabli, depuis 1815, par les souverains étrangers. La hauteur moyenne de l'Elbe sous ce pont est à 87 mètres au-dessus du niveau de l'Océan. Dresde, que les Allemands appellent Dresrlen, a vu en 1810 transformer ses hautes murailles en belles promenades, et trois ans après de nouveaux remparts construits par les Français la protéger contre les armées coalisées.
Ces derniers travaux ont disparu. Divisée en vieille et nouvelle ville, elle est accompagnée de trois faubourgs, dunt les plus importants sont Vellsladt, et surtout Friedric/tstadt.
Parmi ses 18 églises ou chapelles, dont 16 sont consacrées au culte protestant, on en compte 4 qui méritent de fixer l'attention.
La première, située dans la vieille ville, est surnommée Frauenkirche (l'église de Notre-Dame). Elle est construite sur le modèle de Saint-Pierre de Rome ; les colonnes légères qui la surmontent soutiennent une espèce de tour qui s'élève au delà de 112 mètres.
La seconde, appelée l'église de la cour ou de Sophie, parce qu'elle a été en partie construite en 1602 par une princesse de ce nom, veuve de Christian Ier, est remarquable par les sculptures qui ornent son portail, par ses tableaux, et par l'un de ses autels orné de colonnes qui ont appartenu, dit-on, au temple de Jérusalem, et qui furent rapportées en 1476 de la ville sainte par le duc Albert.
Celle de Sainte-Croix est un énorme tas de pierres que nous ne citons que pour sa haute tour, qui domine toute la ville. Celle.que l'on appelle la nouvelle église des catholiques, surmontée aussi d'une tour fort élevée, passe pour l'une des plus belles de l'Allemagne, et mérite d'être au premier rang parmi les constructions qui embellissent cette capitale. Les autres édifices de Dresde sont la chancellerie, l'hôiel des finances, la monnaie, l'hôtel des états, remarquable par son architecture, l'arsenal, l'hôtel de ville, les théâtres, Y Angicsleum, autrefois le palais Japonais, celui du prince Maximilien, celui deBruhl, celui des princes, et enfin celui du roi.
La salle du grand Opéra tient au palais du roi ; elle mérite d'être citée moins par la richesse de ses ornements que par sa grandeur; elle contient environ 5 à 6,000 spectateurs. La vue dont on jouit du palais de Brühl rend cette habitation fort agréable ; la belle galerie de tableaux qu'il renferme en fait une des curiosités de la - ville.
Dresde possède cinq hôpitaux, sans compter l'hospice des orphelins et celui des enfants trouvés. On y a fondé, vers la fin de 1828, une maison de correction destinée à recevoir les enfants vagabonds, et une école spéciale pour les enfants pauvres et abandonnés par leurs parents. On y compte aussi un grand nombre de maisons d'éducation, dont l'une est réservée aux jeunes filles catholiques; deux gymnases, plusieurs écoles spéciales, telles que celle des cadets, celle d'artillerie et du génie; une institution pour les aveugles, une école de médecine et de chirurgie, une école vétérinaire; une pour les instituteurs primaires et trois d'industrie ; un institut d'arts et métiers, une école d'architecture et cinq écoles de charité.
On y a établi des sociétés bibliques et économiques, et plusieurs qui sont consacrées à l'encouragement des arts et des sciences enfin une académie des arts. Des cabinets de médailles, des collections d'antiquités, une des principales galeries de tableaux que l'on puisse citer en Europe, un jardin botanique, trois bibliothèques publiques, dont l'une des plus riches est celle que renferme l'Augusteum, sont à la disposition des personnes qui consacrent une partie de leur temps à l'étude, Mais la bibliothèque la plus importante est celle du roi; elle renferme 250,000 volumes, 4,000 manuscrits et 20,000 cartes géographiques.
Elle renferme 108,732 habitants (en 1855), y compris la garnison; le cours de l'Elbe et les trois chemins de fer de Leipzig, de Berlin et de Vienne, y favorisent un'commerce que son industrie et ses foires rendent considérable.
Les environs de la capitale présentent plusieurs lieux remarquables. Tout près de ses murs se trouvent les beaux bains de Link, sur les bords de l'Elbe; plus loin Pillnitz ou PollnÍlz, village qui
renferme un château royal célèbre par le congrès dans lequel, en 1791, les souverains étrangers signèrent une convention pour soutenir les Bourbons sur le trône de France; en 1818, il devint la proie des flammes, mais il a été rebâti depuis avec un grand luxe.
C'est la résidence habituelle du roi pendant l'été. Pirna, station du chemin de fer de Bohême, au pied des rochers escarpés que couronne la forteresse de Sonnenstein, est fortifiée, et possède un ancien château, converti aujourd'hui en hospice d'aliénés; cette petite ville n'a que 6 à 7,000 habitants. Meissen, au confluent de l'Elbe et de la Meissa, est une autre petite cité entourée de murs et dominée par les ruines d'un château fort bâti par l'empereur Henri IeP.
C'est la patrie du poète Schlegel et de l'historien du même nom.
Meissen est renommée dans toute l'Europe pour la beauté des porcelaines que l'on y fabrique.
Altenberg, à 24 kilomètres de Dresde, dans l'Erzgebirge, est connu par son exploitation d'étain, le meilleur après celui de l'Angleterre, par sa culture en grand du lin, par ses dentelles et par sa fabrication d'horloges en bois, dont l'origine remonte à une époque très-reculée.
La ville la plus importante de la Saxe, après Dresde, est Leipzig ou Leipsick, grande station du chemin de fer de l'Allemagne centrale. Fondée vers la fin du quinzième siècle, elle porta d'abord le nom slave de Lipzk, qui signifie tilleul, parce qu'elle était environnée d'une plantation d'arbres de cette espèce. Avantageusement placée au confluent de l'Elster blanc, de la Partha et de la Pleisse, dans une plaine fertile, le commerce y a tellement répandu l'aisance, multiplié les moyens de délassement et les occasions de plaisir, que beaucoup de personnes riches préfèrent son séjour à celui de la capitale. Pendant l'été, les promenades et les bosquets autour de la ville, le petit bois de Rosenthal, les jardins de Hendri, GeMis et ses environs, sont les points de réunion les plus fréquentés. Ces lieux, que le fléau de la guerre avait dévastés en 1813, ont repris leur première fraîcheur et tous les attraits qui les faisaient rechercher; il n'y a pas de maux irréparables là où le commerce et l'industrie exercent leur bienfaisante influence. Cependant, au centre de ces divers points de réunion, les sujets de distraction qu'on y cherche forment un singulier contraste avec quelques-uns des monuments de douleur et de regrets qu'on y remarque. Le jardin de Resch renferme le tombeau du fabuliste Gellert; près des jardins de Hendel, se trouve celui du physicien Gallisch ; enfin, au milieu des bosquets de Reichenbach, on remarque celui de Poniatowski, mort en héros après avoir eu la douleur de voir au milieu d'nn combat les alliés des Français tourner leurs armes contre eux. Pendant l'hiver, les habitants de Leipzig trouvent au théâtre nationalà l'Académie de musique, dans les casinos, dans les jardins d'hiver de Breiter, au grand bal et au sein des diverses sociétés qu'on appelle Ressources, des délassements variés. Dans la ville, qui renferme près de 70,000 âmes, et à laquelle il ne manque que des rues plus larges pour être citée parmi les "villes bien bâties, on remarque de beaux édifices, tels que l'hôtel de ville, construit en 1556; l'édifice connu sous le nom de Cloître (À7osfrv); le Geicandhaus, bâtiment qui renferme une bibliothèque et une salle' de bals et de concerts; le nouveau théâtre, la bourse, le su perbe hôpital Saint-Georges, la maison des orphelins et celle de détention. Ses églises les plus belles sont celle de Saint-Nicolas, ornée de marbre et décorée de quelques tableaux du peintre Oeser, et celle de Saint-Thomas, où l'on voit un superbe jeu d'orgues ; celle de Saint-Jean renferme un monument érigé à Gellert. Il ne reste des anciennes fortifications qu'une enceinte de murs percée de quatre belles portes, et le château de Pleisenbourg, qui ressemble à la citadelle de Milan; il renferme une église dont l'une des tours sert d'observatoire, un beau laboratoire de chimie, et le local où se réunit l'académie d'architecture et de peinture. Sur la nouvelle esplanade d'un des quatre faubourgs, on remarque la statue en marbre du dernier roi de Saxe. Plusieurs maisons de particuliers méritent d'être comptées au nombre des édifices qui ornent la ville ; mais il en est deux qui offrent un intérêt historique : l'une est celle qu'habita Luther, l'autre celle où le général Tilly signa la capitulation de Leipzig. Depuis l'an 1409, cette ville possède une université, l'une des plus célèbres de l'Allemagne et même de l'Europe; on y compte plus de 80 professeurs et environ 1,400 étudiants; une bibliothèque de 40,000 volumes, un cabinet d'histoire naturelle, un établissement de clinique et l'observatoire, en dépendent. Ses écoles sont nombreuses ; les principales sont celles de Saint-Thomas et de Saint-Nicolas, l'école bourgeoise, celle dite des francs-maçons et celle des pauvres, où l'on compte aujourd'hui près de 1,200 enfants. Ses sociétés des arts et des sciences sont connues dans le monde littéraire et savant : ce sont les sociétés économique et philologique, celle des naturalistes et celle des antiquaires allemands; son musée des arts est riche en machines et en modeles; enfin son jardin botanique, son cabinet de curiosités et d'histoire naturelle, et ses bibliothèques, sont dignes d'une ville qui réunit a une industrie variée, à une grande richesse commerciale, le plus important commerce de librairie que l'on connaisse. Les trois foires qui s'y tiennent à l'époque du nouvel an, à la Saint-Michel et à Pâques,
sont les plus importantes que l'on connaisse, surtout la dernière.
On évalue à près de 80 millions de francs le montant des ventes qui se font dans ces grandes réunions. Nulle part on ne fait d'aussi importantes affaires en librairie ; le nombre seul des ouvrages qui s'y vendent est de 4 à 5,000, et celui des exemplaires est si considérable qu'il s'élève, année commune, à la valeur de 8 à 10 millions de francs.
On doit visiter près de la ville le Rosenthal (vallée de roses), le jardin de Richter, les esplanades qui remplacent ses murailles et qui l'entourent.
La petite ville de Chemnitz ou Alt-Chemnitz, qui porte le même nom que la rivière sur laquelle elle est située, peut être comptée au nombre des plus agréables et des mieux bâties de la Saxe; sa population est évaluée à 26,000 habitants. La description de ses six églises, de son collège, de ses quatre hôpitaux, de la triple muraille qui l'entoure, du vieux château qui la défendait jadis, serait d'un faible intérêt; nous devons seulement rappeler que cette cité, qu'enrichissent de nombreuses fabriques de toiles, de mousselines, e calicots et de machines, prétend avoir donné naissance au célèbre Puffendorf; mais il paraît que cet honneur appartient à la petite ville de Dippoldistcalde, située sur la Weistritz. Un embranchement particulier de chemin de fer unit Chemnitz à la grande ligne de Leipzig à Dresde.
La petite ville de Hohnstein, à 14 kilomètres de Chemnitz, sur la pente d'une haute montagne, possède une belle église, un hospice de pauvres et d'orphelins, et plusieurs manufactures de tissus de coton. Elle est le point central de la culture du lin propre au tissage du linge damassé. On exploite dans ses environs des mines d'or, d'argent, de cuivre et d'arsenic. Plauen, station du chemin de fer de Francfort, qui ne renferme que 10,000 âmes, s'enrichit, comme Chemnitz, du produit de ses toiles, de ses mousselines et de ses calicots. Cette ville est située dans une belle vallée, sur la rive gauche de l'Elster blanc. Elle est entourée de murs et dominée par le château royal de Ratschauer. C'est le siège d'une grande maîtrise des eaux et forêts, et d'une cour de justice. On y trouve plusieurs manufactures importantes. Elle a vu naître le théologien Wolfgang et Bottcher qui inventa la porcelaine de Saxe. La petite ville ftAdorf, à 12 kilomètres au sud-est de Plauen, jouit de quelque célébrité en Saxe par ses fabriques de draps et de toutes sortes d'instruments de musique.
Freyberg, du territoire de laquelle nous avons dejà vanté l'importance, dans l'aperçu que nous avons donné du produit des mines de la Saxe, mérite sous plusieurs rapports une mention particulière. Elle est peuplée de 13,000 âmes, et arrosée par la Mulde; son sol est élevé de près de 400 mètres au-dessus du niveau de la mer; plusieurs édifices anciens lui donnent l'aspect d'une vieille ville, cependant on y voit quelques rues bien alignées, et des maisons d'une élégante construction. La cathédrale, la plus belle de ses cinq ou six églises, renferme les tombeaux de quelques-uns des anciens électeurs de Saxe; l'hôtel de ville possède une riche collection de vieilles armures; un gymnase et une bibliothèque publique se font encore remarquer dans cette ville ; mais ce qui la rend surtout célèbre, c'est son école des mines, établissement qui peut servir de modèle dans ce genre, et qui, depuis que Werner en a augmenté les collections et rectifié le mode d'enseignement, a fourni des hommes célèbres dans l'art de tirer du sein de la terre les richesses qu'elle renferme. Plusieurs marchands de minéraux font à Freyberg un commerce assez considérable. Outre plusieurs fabriques de draps, de tissus de coton, de blanc de céruse et de quincaillerie, il existe un martinet pour le cuivre, une fonderie de canons et deux moulins à poudre. On a établi aux environs, à Haisbruck, des bains de scories, qui sont très-fréquentés, et dont l'effet salutaire a déjà été reconnu dans diverses maladies. Tharand ou Granaten, qui renferme à peine 1,000 habitants, doit son second nom à la grande quantité de grenats que l'on trouve dans ses environs. Sa situation près d'une forêt de 10,000 arpents y a fait établir une école royale forestière. Annaberg, à 45 kilomètres au sud-ouest de Freyberg, est le point central de la Saxe pour la fabrication et le commerce des dentelles. Sa population est de 6,000 âmes.
Glaucha ou Glauchau, résidence des comtes de Penigk, renferme 3 châteaux, 2 églises et 2 hôpitaux. Elle possède plusieurs fabriques de différents tissus de laine et de coton, des tanneries et des usines pour le fer et le cuivre, et de plus elle est le principal entrepôt des produits du cercle de l'Erzgebirge. Elle est la patrie du célèbre minéralogiste Agricola. A Swickau, ville de 8,000 âmes, chef-lieu de cercle, unie à la capitale par un chemin de fer ; il existe une école scientifique, une bibliothèque, une église où l'on remarque un superbe tableau de Luc Cranach, une fabrique de produits chimiques ; et près de ses portes, au château d'Osterstein, une importante maison de travail et de correction. Schneeberg est le siège d'une intendance des mines.
Un pays de montagnes, un peuple de mineurs dont les mœurs diffèrent de celles des habitants du reste de la Saxe, donnent aux villages que l'on trouve aux environs de Chemnitz et de Schneeberg
un aspect tout particulier; mais si l'on veut traverser un pays tout à fait digne d'intéresser le dessinateur ou le naturaliste, il faut aller de Freyberg à Kônigsstcin et à Schaiidau, petites villes dont la population est peu importante, mais dont la situation est des plus pittoresques. La première est une forteresse imprenable; elle est bâtie sur un rocher élevé de 400 mètres au-dessus du cours de l'Elbe ; un puits de 300 mètres de profondeur fournit en tout temps une eau fraîche et limpide. Cette forteresse renferme des champs, des jardins et des prairies. C'est au pied de la montagne qu'elle couronne que la ville est bâtie. La seconde, située aussi sur le bord de l'Elbe, à 4 kilomètres de la précédente, est entourée de montagnes et de rochers qui s'élèvent en amphithéâtre; son port est animé par une navigation active, et près de la ville, un bain d'eau minérale chaude y attire tous les ans un grand nombre de malades. Le pays auquel appartiennent ces deux villes est rempli de tant de sites romantiques, qu'il a été surnommé la Suisse saxonne.
Vers l'extrémité orientale du royaume, Zitluu occupe un joli vallon sur les bords du Mandau et de la Neisse. Sa population est de 12,000 âmes; un tronçon de chemin de fer l'unit à la grande ligne de Dresde à Breslau; son commerce consiste en toiles blanches ou imprimées, et en draps. Elle possède un gymnase et un séminaire de maîtres d'école, un cabinet d'histoire naturelle, une collection de médailles, cinq hôpitaux, un hospice pour les orphelins, et une maison de détention. Sa plus belle église est celle de Saint-Jean, qui ne paraît pas devoir jamais être achevée. En sortant de la ville par la porte de Bohême, le village de Herrnhut doit son nom à une population de 1,400 individus, tous de la secte des frères moraves, qui ont leur pasteur et leur église, et qui ne s'occupent presque exclusivement que de la culture des jardins.
Gross-Scltœnau, village de 4,000 habitants, à 16 kilomètres à l'ouest de Zittau, s'enrichit par le produit des fabriques de toiles damassées.
Nous terminerons notre excursion par la ville de Bautzen ou Budissin, chef-lieu de cercle, située sur un rocher qui domine la rivière de la Sprée, avec une station du chemin de fer de Dresde à Breslau ; un commerce considérable et de nombreuses manufactures en ont fait une cité importante. Elle est peuplée de 12,000habitants; ses fortifications, à moitié ruinées, attestent son ancienneté, mais des rues alignées et bien bâties lui donnent l'apparence d'une ville moderne ; il est vrai qu'elle a acheté cet avantage par de nombreux incendies qui ont successivement détruit ses anciens quartiers. On y remarque de belles promenades, un théâtre, un gymnasè, un collège de prédicateurs, 2 bibliothèques publiques, et une maison de correction. Cette ville est du petit nombre de celles qui offrent un de ces exemples de tolérance religieuse que nous voudrions voir imiter partout : l'église de Saint-Pierre est partagée par une grille en deux parties, dont l'une est réservée au culte catholique, et l'autre à la communion luthérienne. Sur la rive gauche de la Sprée, s'élève, à peu de distance de la ville, la monta-
gne du Prolschen, sur laquelle on aperçoit encore les ruines d'un ancien autel où les dieux des Wendes rendaient leurs oracles. La construction du château qui, avec les fortifications, défendait la ville, remonte, dit-on, au neuvième siècle; cependant l'histoire ne fait mention de Bautzen que vers l'an 1078; mais cette ville sera longtemps célèbre dans les fastes de l'Allemagne par la lutte sanglante que l'armée française épuisée soutint avec avantage, en 1813, contre les puissances coalisées.
GOUVERNEMENT. — La Saxe est une monarchie constitutionnelle. Tous les citoyens sont égaux devant la loi, ils jouissent de la liberté individuelle, et, à peu d'exceptions près, des mêmes prérogatives. Toutes les propriétés sont garanties, tous les cultes libres.
Le pouvoir est partagé entre le souverain et deux chambres. La couronne est héréditaire dans la ligne masculine seulement. Le roi, dont la personne est inviolable et dont les ministres sont responsables, exerce le pouvoir exécutif, et les décisions des chambres sont soumises à sa sanction. Les chambres se divisent en deux chambres , première et deuxième : la première se compose des princes de la maison royale, d'un député du chapitre de Meissen, d'un député de l'université de Leipzig, d'un député du chapitre de Wurzen, membres de droit par leurs charges, de 22 députés, des propriétaires des biens seigneuriaux, des bourgmestres de Dresde et de Leipzig, et de ceux de six autres villes désignées par le roi. La deuxième chambre se compose de 75 députés, 20 députés de propriétaires de biens nobles, 25 députés des villes, 25 députés des campagnes et 5 députés du clergé évangélique. Les membres de cette chambre sont élus pour trois ans, les électeurs doivent être âgés de plus de vingt-six ans, et les députés de plus de trente et un ans. L'administration est confiée à un conseil de cabinet, un conseil des finances, un conseil militaire; la justice à une haute cour d'appel, et les cultes à un consistoire supérieur ecclésiastique.
Chacun des 5 cercles qui forment la division territoriale a une cour de justice et une administration particulière. Les paysans jouissent complétement de la liberté individuelle.
Comme État de la Confédération Germanique, la Saxe est placée au quatrième rang dans l'ordre de la chancellerie fédérale; elle dispose d'une voix entière dans le comité des Dix-Sept et de quatre voix dans l'assemblée générale. Son contingent est de 18,000 hommes , qui appartiennent au IXe corps de l'armée générale, et sa contribution fédérale est d'environ 160,000 francs.
FINANCES. — Le budget est voté en Saxe pour trois ans. Celui qui a été voté pour la période de 1855 à 1857 est de 9,040,902 thalers, c'est-à-dire d'environ 34,903,382 francs; il faut y ajouter 7,893,550 thalers de dépenses extraordinaires, ou 29,380,812 fr.
La dette publique était évaluée en 1854 à 53,991,186 thalers, environ 200 millions de francs.
ARMÉE. — L'armée se compose de 15,748 hommes d'infanterie partagée en 4 brigades de 4 bataillons, chacun à 4 compagnies ; de 4,005 chasseurs à pied formant une brigade à 4 bataillons, à 4 compagnies; de 3,208 de cavalerie formant une division de 4 régiments de 2,420 hommes d'artillerie , pionniers, pontonniers. En tout, en y comprenant les officiers supérieurs, 27,000 hommes, sans la réserve. L'armée se recrute sur une réserve que l'on pourrait appeler landsturm, et qui comprend, sauf un grand nombre d'exceptions, les hommes de dix-huit à trente et un ans. Cette réserve n'est point organisée. Les villes possèdent des gardes nationales composées de tous les citoyens qui peuvent s'équiper, et qui sont obligés à ce service jusqu'à l'âge de soixante ans. Enfin la sûreté des routes est protégée par un corps de gendarmerie à cheval.
HANOVRE.
ANCIENS HABITANTS. — Le royaume de Hanovre est une des contrées du nord de l'Europe d'où sortirent au cinquième siècle ces Saxons qui envahirent l'Angleterre. Le Hanovrien, peuple jadis grossier, entreprenant, est maintenant paisiblement soumis au pays que ses ancêtres ont conquis ; jadis guerrier féroce et dévastateur, une vie errante et aventureuse avait pour lui des charmes ; aujourd'hui civilisé, bienfaisant, attaché au sol qui l'a vu naître, il semble n'avoir conservé de son antique origine que la bravoure dans les combats et l'amour d'une sage liberté; enfin autrefois il adorait des divinités sanguinaires, aujourd'hui il pratique le christianisme réformé. Ce peuple, appartenant à la branche Cimbro-saxonne, se divisait en plusieurs peuplades ou tribus. Les Vinili, qui, sortis de la Scandinavie, reçurent ensuite le nom de Longobardi ou J.angobardi, à cause de leur longue barbe, occupaient les deux rives de l'Elbe; les Angli habitaient plus au nord sur la rive gauche du fleuve, et les PeliisChauci sur la même rive près de son embouchure; les Chemi, comme nous l'avons dit en parlant du duché d'Oldenbourg, habitaient à l'embouchure du Weser; les Fusi ou Fosi se tenaient dans le pays qui comprend aujourd'hui le territoire d'Hildesheim ; les Bructeri occupaient les bords de l'Ems; enfin les Chamavi et les Cherusci, qui se mêlèrent plus tard aux Francs, vivaient près des forêts du Harz.
Lors de la grande invasion des nations slaves, une peuplade wende, appelée les Polabres, c'est-à-dire habitants des campagnes, s'établit dans les environs de Lunebourg.
Les noms de quelques montagnes et ceux de différents lieux du Hanovre conservent encore des traces des anciennes divinités qu'on y adorait. Sonnenberg signifie montagne du soleil ; peut-être même, la terminaison horn (corne), que l'on remarque dans plusieurs noms, rappelle-t-elle le culte de la lune, qui, personnifiée, avait pour attributs les cornes du croissant; le mot biel, qui était le nom du dieu de la végétation chez les peuples du Nord, et du protecteur spécial de la forêt Hercynie, se retrouve aussi dans plusieurs noms de lieux; enfin la plupart des Allemands de nos jours, qui appellent Ostern le jour de Pâques , ne se doutent point de l'origine de ce nom ; sa racine ost, orient, ne retrace-t-elle pas le souvenir d'une fête planétaire que la fête chrétienne aura remplacée?
On ne sera point étonné que le culte druidique, dont on retrouverait les traces sur presque toute la surface de la terre, s'il fallait s'en rapporter aux idées systématiques de quelques antiquaires qui lui attribuent toutes les pierres bizarrement groupées ou singulièrement disposées, ait laissé de pareils monuments sur la cime du mont Brocken.
MOEURS, CARACTÈRE DES HABITANTS. - Les Hanovriens ou bas Saxons ont, plus que les habitants de la haute Saxe, conservé cette franchise, cette simplicité, cette hospitalité, et en général toutes ces antiques vertus qui, selon Tacite, composaient le caractère des anciens Germains. C'est surtout parmi les habitants des Landes que l'isolement et la pauvreté ont empêché la corruption de s'introduire. Dans les cantons maritimes appelés Marschland, il règne, à côté de la simplicité et de la rusticité, un luxe très-grand qui cependant ne s'attache qu'aux objets solides, comme bijoux d'or et d'argent, bons meubles, bons lits; ou à des denrées qui flattent directement les sens, comme café, thé, vins de France ou bières fortes. Ce luxe, suite naturelle de la liberté et de la richesse de ces paysans navigateurs et de leurs relations avec les Anglais et les Hambourgeois, ne les empêche pas de rester aussi entrepre-
nants, aussi industrieux que leurs ancêtres, dont ils conservent religieusement le costume. Dans les villes hanovriennes, et surtout dans la capitale, on remarque en plusieurs points une imitation assez heureuse des mœurs et des manières anglaises. La noblesse est fort attachée à ses préjugés de naissance. Les mêmes hommes s'appuient des principes de la philosophie moderne pour s'opposer à l'agrandissement du pouvoir exécutif, et des principes de l'aristocratie féodale pour maintenir entre eux et la bourgeoisie une distance respectueuse. C'est précisément le même esprit que la noblesse du Holstein.
APERÇU HISTORIQUE. — Tout ce qui forme aujourd'hui le Hanovre, soumis d'abord au grand-duché ou royaume des Saxons, tomba sous la domination de Charlemagne et continua d'être gouverné par les durs de Saxe de la famille de Witikind, et ensuite de celle de Billung. Cet ancien et véritable duché de Saxe était divisé en Westphalen, à l'ouest du Wcser, et Ostphalen entre le Weser, l'Elbe et le Harz (1).
Au commencement du douzième siècle, un mariage avec une princesse de la dynastie billungienne donna à Henri le Noir, duc de Bavière et fils de Welf ou Guelf, la possession de la principauté de Lunebourg.
Henri le Lion réunit sous sa domination la Bavière, le duché de Saxe et d'Ingrie (alors borné à une partie de la Westphalie), les principautés ou comtés de Brunswick, Gœttingue, Nordheim et autres. Ces pays avaient déjà été acquis par le père de Henri le Lion ; mais ce grand prince , après avoir, au moyen d'une négociation longue et difficile, réalisé ses droits sur des domaines si vastes, attaqua les Slaves et Vandales et conquit de grandes possessions au nord de l'Elbe. La jalousie qu'il inspira à l'empereur lui attira, en 1179, le ban de l'Empire et une guerre terrible de la part de tous ses voisins ou vassaux. Henri le Lion ne sauva de toutes ses possessions que ce qui forme aujourd'hui l'électorat du Hanovre proprement dit.
La branche électorale de Hanovre a sa souche dans l'ancienne maison de Brunswick. Ernest-Auguste, le dernier des fils de George, duc de Brunswick, fut le premier rejeton de cette branche. Ce prince, qui, eu 1662, commença par être évêque d'Osnabruck, devint, en 1680, duc de Hanovre après la mort de celui de ses frères qui était titulaire de cette principauté. Il fut bientôt un guerrier intrépide, et rendit de si grands services à l'Empire que, bien qu'il fût protestant, l'empereur Léopold, en 1692, créa en sa faveur un neuvième électorat, transmissible de mâle en maie dans sa famille. Son fils, George-Louis, fut proclamé roi d'Angleterre en 1714, après la mort de la reine Anne. Ainsi ce prince, dont le père avait été évêque, était réservé à devenir l'un des plus fermes appuis du protestantisme. Par lui la Grande-Bretagne, en conser-
(1) Ces deux mots sont susceptibles d'être expliqués différemment; ils peuvent signifier le pays à l'ouest et a lest de la limite de séparation, car pfahl veut dire pieu, et dans un sens plus étroit, bâton élevé pour marquer la frontière; c'est l'étymologie communément adoptée, mais nous préférerions celle-ci : be fehlen ou be fahlen, veut dire commander; le be n'est qu'une particule accessoire, ost et west fahlen signifierait donc tout simplement le gouvernement, le duché d'est et d'ouest. Le ph n'est qu'une fausse orthographe imitée du latin.
vant le Hanovre, auquel elle ajouta de nouvelles possessions jusqu'en 1802, eut constamment un pied sur le continent, et put prendre une part plus active aux affaires. La ligue qu'elle organisa contre la France obligea cette dernière puissance à s'emparer du Hanovre, qui, par suite des traités faits en 1806, appartint pendant quelques mois à la Prusse, et fut enfin partagé par Napoléon entre la France et le royaume de Weslphalie qu'il venait de fonder.
Ce ne fut qu'en 1813 que le Hanovre rentra sous la , possession du souverain d'Angleterre. L'année suivante il fut érige en royaume, et successivement augmenté de l'Ost-Frise et de divers autres territoires. Le duc de Cambridge, septième fils de George III, en fut tour à tour gouverneur général, 1816, puis vice-roi, 1831. En 1837, après la mort de Guillaume IV, roi d'Angleterre, qui laissa le trône de la Grande-Bretagne à sa nièce Victoria, le Hanovre, qui était fief masculin, échut en partage à Ernest-Auguste, duc de Cumberland. Ce prince prit le titre de roi, et dès son avènement il s'empressa d'abolir la constitution libérale de 1833, pour n'accorder à ses sujets que celle plus restreinte de 1819. En 1848 il dut faire des concessions qu'il maintint avec honneur jusqu'à sa mort arrivée en 1851. Il a eu pour successeur son fils George V, né en 1819, et aveugle. En 1852 le gouvernement a présenté aux deux chambres un projet de révision complète, déclarée indispensable, de la constitution de 1848, qui ne se trouvait plus en harmonie avec le droit public de l'Allemagne.
LIMITES, ÉTENDUE, SUPERFICIE, POPULATION. — Le royaume de Hanovre se compose de deux parties principales, séparées l'une de l'autre par le duché de Brunswick. La plus considérable, ou la septentrionale, est bornée au nord par la mer d'Allemagne et par l'Elbe, qui la sépare des duchés danois de Holstein et de Lauenbourg, du territoire de Hambourg et de la province prussienne de Brandebourg. A l'est elle est contiguë à la province prussienne de Saxe; au sud au duché de Brunswick, aux principautés de Waldeck, de Lippe-Detmold, de Lippe-Schauenbourg, à la Hesse électorale et à la province prussienne de Westphalie. A l'ouest elle est séparée du royaume de Hollande par une liniiie tracée à travers les marais de Bourtange et la baie de Dollart, dans laquelle l'Ems se jette. La partie méridionale est bornée au nord par le duché de Brunswick; à l'est par le même duché et la province prussienne de Saxe, vers le point le plus élevé de la chaîne du Harz; au sud par la province de Saxe et la Hesse électorale; et à l'ouest par cette dernière et la province prussienne de Westphalie, dont le Weser la sépare sur une longueur de 5 kilomètres. Outre ces deux parties, le Hanovre comprend le comté de Hohnstein, enclavé entre le duché de Brunswick et la province de Saxe; et le territoire de Polie entre le même duché, la principauté de Waldeck et la province de Westphalie. La superficie du royaume est de 698,655 milles carrés géographiques allemands, ou bien 39,125 kilomètres carrés. Sa population était évaluée à la fin de l'année 1852 à 1,8] 9,253 habitants, savoir : 907,659 hommes et 911,594 femmes.
ASPECT PHYSIQUE. — Depuis les bords de la mer Baltique jusqu'aux extrémités méridionales du Hanovre, le terrain monte graduellement à mesure qu'on approche des montagnes du Harz, dont la plupart des ramifications appartiennent à ce royaume. Dans les parties les plus voisines de la mer, et surtout dans la contrée orientale que le bas Elbe et le bas Weser arrosent, le sol est en grande partie formé par les a: terrissemcnts et les alluvions de ces deux fleuves. Elles sont souvent exposées à de grandes inondations, dont on ne peut neutraliser les funestes effets que par des digues.
Après ces deux fleuves nous citerons, parmi les principaux cours d'eau, Ylbmnau et VOste, affluents du premier; Y Mer, affluent du second, et qui se grossit de la Leine et de YOcher; enfin YEnts avec la Hase ou la Haase qui lui porte ses eaux. Ce qui semble prouver combien les terres du Hanovre sont depuis peu de temps sorties du sein des eaux, c'est la grande quantité de marais qui les recouvrent. Il en est de même de la contrée occidentale, que l'Ems traverse. Les cantons qui occupent ces divers terrains sont peu productifs, mais les plus stériles sont surtout ceux des landes de Lunehourg et de Verden, situées entre l'Elbe et le Weser, et des landes de Meppen, sur la rive droite de l'Ems. Dans ces cantons pauvres et peu propres à l'agriculture, on ne remarque que des campagnes sablonneuses, couvertes de forêts de sapins, de bruyèr-es et de marais. Aux environs du territoire de Brème on a rendu à l'agriculture plusieurs portions de terrains marécageux; mais que de soins et de temps ne faudrait-il pas pour convertir en terres labourables les vastes landes de Lunebonrg, qui occupent, de l'est à l'ouest, une longueur d'environ 100 kilomètres, et du sud au nord, depuis Celle jusqu'à Harbourg, une étendue non moins considérable ! Ces plaines arides ont mérité le nom d'Arabie de l'Allemagne. Sur la rive gauche de la Vechte, qui coule à l'ouest de l'Ems, les environs de Bentheim n'offrent aussi que des landes immêllses, couvertes cà et là de marais et de flaques d'eau stagnante.
Considérées sous le point de vue géologique, les contrées dont nous venons de décrire l'aspect et la nature appartiennent aux ter-
rains de sédiment supérieur : c'est ce qui explique pourquoi la mer apporte à chaque marée, près de la ville de Stade, non loin de l'embouchure de 1 Elbe, des morceaux de bois différents de ceux qui croissent aujourd'hui sur la terre.
MONTAGNES DU HARZ. — Le Harz, cette contrée montagneuse si riche en métaux, dépend du pays que les anciens nommaient forêt Hercynie (sylea Hercynia). Quelques auteurs ont déjà fait remarquer que la similitude du nom latin et du nom allemand prouve suffisamment que les Romains n'ont fait que traduire la dénomination germanique de Harzvuld : cette contrée était en effet couverte autrefois de vastes forêts de sapins. Mais les érudits allemands ont voulu aller plus loin; ils ont cherché l'étymologie du mot haTz" les uns ont prétendu qu'il venait de hart, dont l'origine est incontestablement germanique, et dont la signification s'accorderait assez avec l'aspect sombre de ces montagnes, et même avec la figure noirâtre de leurs habitants; d'autres l'ont cherchée dans le nom de Hertha, ancienne divinité que les Germains plaçaient sur les lieux élevés. Suivant cette origine, il serait probable que les Germains eussent donné un nom analogue à celui de harz. à toutes les chaînes de montagnes de leur contrée : ce qui expliquerait l'étendue que les Romains attribuaient à la forêt Hercynie. Confondant sous un seul nom une dénomination commune à plusieurs lieux, ces derniers crurent à l'existence d'uue contrée monlueuse et couverte de forêts, qui occupait la plus grande partie de la Germanie. De là vient que Jules César dit qu'il faut neuf jours de marche pour traverser dans sa largeur la forêt Hercynie, et qu'il n'y a point de Germains qui en aient atteint l'extrémité en marchant dans sa longueur pendant soixante jours. Mais nous nous rangeons du parti de ceux qui croient que l'étymologie la plus vraisemblable est celle qui dérive de la quantité de sapins qui couvraient jadis ces sommités aiguës. En effet, harz signifie encore aujourd'hui l'ésine.
Il est naturel de penser que l'utilité que les Germains tiraient de cette substance végétale leur ait fait donner son nom à la forêt qui en fournissait le plus. Les montagnes du Harz occupent une longueur de plus de 130 kilomètres sur 50 de largeur. Des vallées escarpées, des bois et quelques marais .y forment un labyrinthe naturel dans lequel il est impossible de se diriger sans guide.
Le mont Brocken ou Bloxberg, élevé de 1,160 mètres au-dessus de la mer Baltique, est le point central du Harz. C'est de là que rayonnent presque dans tous les sens les branches qui composent ce groupe auquel Stein donne une superficie de 3,550 kilomètres carrés. Tout ce qui se prolonge à l'ouest du Brocken porte le nom de haut Harz ( Oberz-Harz) , et à l'est de cette montagne celui de bas Harz ( Unter-Harz). L'une des branches, en se dirigeant vers le sud, forme la ligne de partage qui sépare le bassin du Weser de celui de l'Elbe. Elle rencontre, vers la source de la Leine, le Dungebirge, qui n'est que le prolongement septentrional du TltlÏringerwald; de là elle projette au nord-ouest un rameau qui, sous les noms de IVesergebirge et de Solling, s'étend entre la Leine et le Weser. Une autre branche court au nord-est, entre l'HoIzemme, affluent de la Bode, et l'Ocker qui va se jeter dans l'Aller. Une troisième branche se dirige vers le nord entre l' Iun ers te et l'Ocker; une quatrième entre la Leine et l'Innerste ; enfin , vers l'est, s'étendent les branches qui séparent les bassins de la Bode, de l'Helme et de la lripp"r.
Outre les nombreuses rivières qui descendent du Harz, on distingue plusieurs sources importantes : la plus remarquable est la fontaine des Sorcières (hexcn brunnen), Ce nom indique le souvenir de quelques pratiques superstitieuses des anciens peuples de ces contrées. Lorsque Charlemagne y établit le christianisme, quelques-unes des prêtresses des antiques divinités germaines auront conservé l'habilude d'aller près de cette source faire leurs cérémonies, et les prêtres chrétiens, confondant ce culte avec celui des démons, auront désigné cette fontaine par le nom qu'elle a conservé. Elle est placée à environ 6 ou 7 mètres au-dessous de la cime du Brocken, et fournit une masse d'eau fort abondante. Sur le sommet de cette montagne il se passe souvent, vers le matin ou le soir, un phénomène physique qui a été longtemps la terreur de l'habitant du Harz : si le spectateur est placé entre le soleil et un nuage, il voit son image réfléchie dans ce nua"e comme dans un miroir, mais plus grande et difforme. Jadis l'ignorance accréditait l'opinion qu'un spectre, auquel on donnait le nom de spectre de Brocken, était caché dans ce nuage. Cet effet d'optique rentre dans la classe de ceux que l'on comprend sous le nom de mirage.
CAVERNES A OSSEMENTS DU HARZ. — Dans le calcaire ancien qui s'appuie sur les roches granitiques du Harz , on remarque plusieurs cavernes moins célèbres encore par les nombreux détours qu'elles offrent à la curiosité du voyageur que par l'énorme quantité d'ossements fossiles que l'on y a découverts, et qui peuvent les faire considérer comme d'immenses charniers naturels dans lesquels se sont conservées les dépouilles d'une génération d'animaux qui diffèrent de ceux qui vivent maintenant à la surface de la terre, et qui attestent l'importance des changements que nohe planète a jadis
éprouvés. Les plus curieuses de ces cavernes sont celle de la Licorne et celle de Baumann. La première est située au pied du château de Schartzfels : elle est composée de cinq grottes qui communiquent les unes aux autres par de nombreuses sinuosités qu'il faut parcourir, soit en montant, soit en descendant. La seconde, beaucoup plus vaste, est également composée de cinq grottes placées à des niveaux différents. De la première à la seconde de ces cavités, on descend 10 mètres; pour passer de celle-ci à la troisième , il faut se hisser à l'aide des pieds et des mains; enfin, après avoir alternativement monté et descendu , on arrive par une pente assez rapide dans une galerie remplie d'eau et placée sous les autres grottes.
Cette galerie, rarement visitée, contient une grande quantité d'ossements qui appartiennent généralement à des tigres, à des hyènes, et à un ours qui devait être aussi grand qu'un cheval, On remarque dans la caverne de Baumann une colonne en stalactites qui rend un son agréable lorsqu'il y tombe une goulte d'eau de la voûte. Les rochers magnétiques d'IlscTlteiu et de Schierla attirent aussi l'attention du géologue.
MINES DU HARZ. — Le Harz est depuis longtemps célèbre par ses mines : celles de fer sont lès plus abondantes. Les autres métaux que l'on y recueille sont le plomb, le cuivre, te zinc, l'argent et même l'or. Le soufre et l'arsenic y sont égalemriît exploités. Enfin on y trouve des marbres , des ardoises, des pietres de taille, du gypse, des argiles de différentes espècSï, et des sources salées et d'eaux minérales.
Il est peu d'endroits en Europe uù fa science du mineur soit aussi avancée qu'au ttai-8. Les ouvriers empiloyés eux mines forment une population particulière de plus de 60>W0 individus, originaires de la Franconie. Les premiers qui «'établirent dans ces montagnes y furent envoyés par Charlemagtté ; niais au onzième siècle une nouvelle migration se fit pour expktflW les toutes du Rammelsb rg, qui venaient d'être découvertes. Ceshowmes, aujourd'hui reconnaissables à leur uniforme noir à parefs Muges, sont organisés militairement par compagnies, ayant pour chefs des ingénieurs dont le rang correspond aux grades de géniaux, de colonels, d'officiers et de rous-officiers. Leur association est remarquable par l'esprit de corps qui y règne. Ils ont conservé de leurs ancêtres cette passio* pour la chasse qui leur rend cet exercice plus agréable que pénible, cet amour de la musique qui tew\' fait écouter avec intérêt les chants de leurs compatriotes, et cette urbanité un peu rustique, mais franche, qui leur fait accweflliï les étrangers, et qui porte leurs enfants à aller au-devant de eeax-ci en les appelant cousins.
LACS. — Le royaume du Hanovre renferme peu de lacs : il n'en est que trois qui méritent d'être cités. Le premier est le Steiiihunder-meer, sur la limite de la principauté de SchauenbourgLippe; le second, le Dumer-see, sur celle du grand - duché d'Oldenbourg. Celui-ci surtout, très-poissonneux, est remarquable par son étendue ; il occupe un espace de 4 kilomètres de largeur et de 9 de longueur. Mais le plus extraordinaire est celui de Jordan, situé dans la province de l'Ost- Frise. Il s'étend sous terre à une dislance considérable, et le sol qui le recouvre, dit Stein, est devenu assez ferme pour supporter le poids des voitures.
CLIMAT. — Le climat du Hanovre est généralement tempéré : ses habitants vantent sa salubrité; mais il faut avouer que dans les lieux bas et marécageux il est d'une humidité dangereuse, et que dans la plus grande partie de la contrée la température est extrêmement variable : près des bords de la mer, elle ne l'est pas moins qu'en Angleterre. L'hiver y est rigoureux, et dans l'été même on est souvent exposé au froid. Les rosées, les vapeurs qui s'exhalent de la surface de la terre pendant les nuits d'été, à l'approche du lever et du coucher du soleil, ont quelquefois une funeste influence sur certains tempéraments. Le vent du nord-ouest souffle fréquemment pendant l'hiver; au printemps, c'est le vent d'est; et pendant l'été, pendant même une partie de l'automne, c'est celui du sud-ouest qui règne. L'influence de ces vents et les changements de température contribuent à faire tomber les dents avant l'àge.
PRODUCTIONS NATURELLES. — FORÊTS. - Les richesses naturelles du Hanovre consistent dans le produit de la pèche des rivières et des lacs qui l'arrosent, de la mer qui le baigne, du gibier qui peuple ses forêts, ses champs et ses marais, des bestiaux que son territoire nourrit, des végétaux qui croissent sur son sol, et des mines que ses montagnes renferment. Sous ces divers rapports il est peu de pays qui soient mieux partagés.
Depuis les encouragements que le roi George III accorda en 1792 à la pêchc de la baleine, un grand nombre de Hanovriens partent tous les ans pour aller exercer ce genre d'industrie autour du Groenland.
La pêche est aussi très-productive sur les côtes du -Hanovre; celle des rivières procure en abondance la plupart des poissons de nos contrées, tels que des perches, des barbeaux, des carpes, des brochets, des truites , mais surtout des anguilles monstrueuses.
Le Hanovre ne manque pas de forêts. Outre celles du Harz, on en compte plusieurs d'une assez grande étendue, telles que celle de Bentheim, dans le comté de ce nom; et dans celui de Lunebourg , celle de Barn, celle de Gohrde qui porte le nom d'un village, celle de ICultehofstube, celle de Lucie, celle de Ninder, etc. Mais il y en a très-peu dans le duché de Brème, dans la Frise orientale et dans le gouvernement d'Osnabrück.
Les forêts fournissent des bois propres à la mâture des petits navires, des courbes pour leur construction, et des planches ; le bois de chauffage y est cher, mais l'exploitation de plusieurs houillères remédie à cet inconvénient Ces belles forêts sont peuplées de cerfs, de sangliers, de chevreuils, de lapine et de lievres ; mais, heureusement pour les cultivateurs , le nombre en diminue sensiblement depuis une vingtaine d'années. Les lieux marécageux abondent en oiseaux aquatiques, et les environs d@ Oisnabrück fournissent un grand nombre d'ortolans.
C'est principalement dans le Harz que les loups sont à craindre par leur nombre et par lettr grosseur.
Les bêtes à cornes sont d'une taille médiocre, înais la chair du bœuf et eelle du moatoa de% montagnes passent pour être d'un goût exquis.. On porte te nombre de ces animaux à 2,700,000. Le porc y est aussi d'une qualité excellente. Parmi les animaux de ce pays, le cheval jouit d'une réputation méritée. Soit que l'abondance des pâturages et la grande quantité d'avoine qu'on y récolte y aient perpétué les belles races, ou qn'elles y soient indigènes, on est souvent étonné de la beauté des attelages des chariots des paysans. Il est rependaut à remarquer qwe le croisement des races du midi avec telles du nord n'a jamais réussi dans le Hanovre. Les moutons sont au nombre d'environ 1,4300.000; leur laine est généralement grosse et d'une mauvaise qualité ; mais elle s'améliore depuis que le gouvernement a encouragé l'ion des moutons espagnols. Maintenant plusieurs propriétaires livrent au commerce des laines qui peuvent supporter la œm avec celles de F Angleterre et de Espagne. Quelques "ifctiàtfts du Hanovre tirent un grand profit de îa vente des oies. Mais ce "i t« encore d'un produit assez important, c'est l'éducation des «feoflfcs. Au printemps, lorsque les prés sont émaillés de flcars, on roft 4flns la principauté Je Lunebourg des paysans qui ce font point 4'fustre métier que de sortir de leurs villages pour recueillir «es pwksaas Ïlnseetes et en rem plir près de 60,000 ruches. Ce comté mx.,porte anaiiel-lement pour plus de 800,000 francs de cire et de ttrêï.
EXPLOITATION MINERALE. — La plus importante richesse de ce pays consiste dans le produit de ses mines; on y exploite annuellement environ 200,000 quintaux de fer, 5,000 de plomb, 7,000 de cui vre, et 40,000 marcs d'argent; l'exploitation du cuivre fournit en outre 2,000 quintaux de sulfate de ce métal ou de vitriol.
Les exploitations du Harz donnent un produit que l'on peut évaluer à 2,040,000 rixdales, ou à plus de 11,700,000 francs, sans y comprendre la houille, la tourbe, le marbre, les pierres de construction , les argiles à poterie , etc.
AGRICULTURE. — L'agriculture dans le Hanovre ne tire point tout le parti possible des terres; on est étonné de la quantité de celles encore en friche, et du grand nombre de marais qui, malgré les encouragements du gouvernement, ne sont point encore desséchés. Il est vrai que les sociétés d'agriculture établies dans quelques villes importantes ont proposé plusieurs améliorations; mais que de temps il faut pour que de tels établissements puissent éclairer la masse des agriculteurs guidés par la routine plutôt que par la raison ! Cependant les essais que l'on a faits pour transformer en bons pàturages des terrains couverts de roseaux ou de bruyères, ont eu, dans la partie septentrionale de la principauté de Lunebourg, ks plus heureux résultats.
Les fermes sont toutes peu étendues : leur contenance est de 4 à 30 hectares chacune. La plupart des villes et des villages possèdent de vastes biens communaux, et les habitants jouissent de certains droits de pâture pour les bestiaux : c'est probablement pour cette raison qu'il y a une grande quantité de terres en friche.
Les grands fermiers ont généralement aussi des droits de pâturage fort étendus. La manière la plus simple et la plus efficace d'améliorer l'agriculture du Hanovre , serait que le gouvernement vendit tous les domaines à l'enchère en fermes d'une bonne grandeur, comme la Prusse l'a fait autrefois dans ses nouvelles possessions.
Les fermiers du Hanovre comparés aux autres fermiers de l'Allemagne, vivent dans l'abondance et la splendeur. Leurs maisons sont toutes entourées de grands arbres et de jardins élégants; les planchers sont couverts de tapis, et les fenêtres sont garnies de larges carreaux. Les maisons d'habitation, les granges, les établcs pour le bétail, sont toutes couvertes d'un toit immense, et chaque ferme a l'air d'un palais entouré d'un petit parc. Les propriétaires dirigent les opérations agricoles sans travailler beaucoup euxmêmes , et par leurs manières cordiales ils ressemblent beaucoup aux fermiers anglais.
La culture produit principalement des paturages, de l'avoine,
Bergers des environs de Rothenbourg.
des céréales, du maïs, des fèves, des haricots, des pommes de terre et d'autres légumes, et enfin du chanvre et du lin. On ne cultive le blé, l'orge et l'avoine que dans les terrains bas, dans la Frise orientale, sur le bord des rivières et près de la mer. Après ces végétaux, c'est la culture du seigle et du sarrasin qui est la plus répandue, principalement dans la partie méridionale. La plupart des terres sablonneuses sont réservées à la culture des pommes de terre ; elles y réussissent parfaitement.
A l'exception de la pomme, les fruits à pepins ne sont ni aussi gros, ni aussi variés, ni aussi bons dans le Hanovre qu'en France; il en est de même des fruits à noyau. La vigne n'est cultivée que dans les jardins, et principalement pour la table du riche, car il est rare que le raisin y arrive à une parfaite maturité.
INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE. — Les fabriques sont peu répandues dans ce royaume ; l'habitant y est plus disposé à aller exercer une industrie quelconque en pays étranger qu'à cultiver les terres ou à choisir un métier dans son pays. On évalue à 16,000 le nombre d'individus qui s'expatrient tous les ans pour la Hollande.
Le Hanovrien réussit cependant assez bien dans la fabrication du tabac, du savon, de quelques étoffes de laine, et surtout dans la mise en œuvre du fer et du cuivre. L'art de filer et de tisser le lin occupe un grand nombre de bras. On estime à une valeur annuelle de 5,500,000 florins le produit de cette fabrication dans les territoires de Lunebourg, de Brème, d'Osnabrück, de Hoya et de Diepholz. Les deux sexes s'en occupent, et l'on cite dans le district de Celle des villageoises qui, dans l'espace de dix-neuf heures, peuvent fournir plus de 78 écheveaux de fil; mais les toiles que l'on y fabrique ne sont point à comparer à celles de la Prusse et de la Frise. Les tanneries du Hanovre ne livrent à la consommation que des cuirs d'une médiocre qualité ; cependant la sellerie y est bien exécutée. Ajoutons aussi que pour les objets de goût et de luxe, la joaillerie, la passementerie et l'orfèvrerie y sont plus avancées que dans plusieurs autres contrées de l'Europe.
COMMERCE. - VOIES DE COMMUNICATION. — Des routes parfaitement entretenues, quatre lignes principales de chemins de fer (1), des bateaux à vapeur qui remontent et descendent continuellement l'Elbe, le Weser, l'Ems et l'Aller, facilitent beaucoup en Hanovre le commerce d'exportation et d'importation ; celui de transit avec le Nord et l'Allemagne n'est point sans importance.
Parmi les places commerçantes les plus considérables, on doit citer Miinden, où il arrive annuellement par le Weser 500 navires, par la Werra 200 et par la Fulda 250. Les routes qui se dirigent vers le sud-est de l'Allemagne portent aussi, année commune, environ 200 chariots et 800 voitures ; et celles qui communiquent avec le sud-ouest de la même contrée une quinzaine de chariots et 120 voitures. On peut évaluer ces diverses exportations à plus de 1,800,000 francs.
DIVISION POLITIQUE. — Le royaume de Hanovre est divisé en sept gouvernements (Land-drosteien) dont nous allons indiquer la circonscription.
Le gouvernement de Hanovre se compose de l'ancienne principauté de Kalenberg, du comté de Aoya et de celui de Diepholz. Il renferme 32 bailliages et 9 justices ou tribunaux indépendants des bailliages.
Le gouvernement de Hildesheim, formé de la principauté de ce nom, de celles de GtHti/lglte et de Grnbcnlwgcll, et du comté de Hohnstein, contient 37 bailliages et 25 justices.
(1) Ces lignes sont : 1° La ligne d'Osnabrück à Hanovre et à Brunswick; 2° La ligne latérale de l'Ems (d'Osnabrück à Emden) ; 3° La ligne du Weser (de Hanovre à Brème) ; 4° La ligne de Francfort à Hambourg, qui, de Hildeshein à Harbourg sur l'Elbe, traverse le Hanovre dans toute sa hauteur.
Conducteur de radeau (environs do Hameln),
Le gouvernement de Lunebourg, composé de la principauté du même nom, comprend 37 bailliages et 8 justices.
Le gouvernement de Stade embrasse les duchés de Brêvic et de Verden, et le pays de Hadeln, Il est divisé en 16 bailliages et 28 justices.Le gouvernement d'Osnabrück répond à peu près a l'ancien évêché souverain de ce nom, et renferme la principauté d'Osnabriick, les comtés de LiT/gen et de BClItheim, et les cercles de Meppen et d'Emsbiihren. On y compte 11 bailliages.
Le gouvernement d'Atiricit comprend seulement l'ancienne province d'Ost-Frise; il renferme 12 bailliages et 5 justices.
Enfin la capitainerie des mines de Klausthal ou capitainerie montueuse de Klausthal (Berghaupt Munnschafl-Klaiisllial) a le rang de gouvernement, et étend sa juridiction sur le Harz supérieur (Ober-Harz). C'est une concession faite en faveur des priviléges dont jouissent les mineurs depuis des siècles. Ce gouvernement ne comprend que 3 bailliages.
- DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Hanovre, capitale du royaume, est située dans une plaine sablonneuse, au confluent de la Leine et de l'Iliinc, petites rivières dont la première est navigable, et qui la divisent en deux parties, la vieille et la nouvelle ville.
La plupart des maisons sont bâties en briques ; cependant les nouveaux quartiers sont beaux et réguliers. La vieille ville n'était en 1130 qu'une forteresse; mais en 1178 elle obtint le droit et le titre de cité. La nouvelle ville se divise en deux parties, appelées Y Mgydien-Ncusladt et le Kalcnbcrger-Neusladt; ]a première est la seule qui soit construite sur un plan régulier. La population de cette capitale est de 42,500 habitants. L'élévation de son sol est de 47 mètres au-dessus du niveau de la mer. Ses anciens remparts ont été nivelés et transformés en une belle esplanade. Les environs de Hanovre sont remarquables par les prairies qui l'entourent, par les sites les plus pittoresques, et par la charmante promenade de Linden. De loin cette ville ressemble à un jardin parsemé d'édifices
et de clochers revêtus de lames de cuivre. Le cours de la Leine, qui se replie autour d'elle, ajoute encore à l'illusion que ce coup d'œil présente; mais lorsqu'on approche de son enceinte, on voit que les maisons et les rues sont agréablement entrecoupées de plantations de tilleuls et de peupliers ; enfin on est étonné du mouvement qui règne dans ses rues et sur ses places, bien éclairées de nuit ; de l'élégance de quelques-unes de ses constructions, qui contrastent singulièrement avec l'architecture allemande et même gothique de quelques anciennes habitations particulières. Les édifices Jes plus remarquables sont le palais du roi et celui du vice-roi, Yarsenal, Y hôtel des étais, le palais de justice, le bâtiment de la bibliothèque publique et des archives, la cour de Loclcum et le théâtre. Le monument élevé à la mémoire de Leibnitz, sous le nom de temple d'honneur, est digne de ce grand homme : il est construit en marbre de Carrare, et décore l'esplanade, Nous devons citer encore l'église du château, l'hôtel Cambridge et les écuries royales.
La jeunesse studieuse, et en général toutes les personnes qui s'occupent des lettres et des sciences, trouvent de quoi se satisfaire dans cette ville, qui possède une société d'histoire naturelle recommandablc par ses travaux , plusieurs cercles littéraires et une riche bibliothèque publique. Les établissements destinés à l'instruction publique - sont dignes d'une capitale. Le lycée, l'école israélite, l'école vétérinaire, celles d'anatomie, de médecine et d'accouchement , et plusieurs autres, ne sont pas les seuls établissements qui attestent sous ce point de vue la sollicitude du gouvernement : l'école normale ou séminaire des maîtres d ecole est un modèle en ce genre ; on y procure aux deux sexes des connaissances utiles jointes à la littérature et à la morale. Ainsi des jeunes filles, dont on cultive le cœur et l'esprit, v apprennent non-seulement les arts d'agrément, mais encore à coudre, à filer, à broder, et plusieurs autres occupations utiles à des femmes destinées à diriger un jour un ménage. Les garçons , loin de n'y prendre qu'une instruction que le monde et ses distractions leur feront trop tôt oublier, y apprennent à greffer, à lever des plans et d'autres pratiques qui dans
l'occasion peuvent être d'un grand avanlage. Dans les autres écoles on ne fait point, comme en France, pâlir les élèves pendant huit ans sur le grec et le latin; le français, l'anglais, la géométrie et la technologie font partie essentielle de l'éducation; et, dans les écoles de troisième degré, J'étude de la langue hébraïque et de l'archéologie est considérée comme indispensable. L'institut destiné, sous le nom de Georgîanum, à la jeunesse noble, est organisé militairement : quarante fils de nobles y sont admis ; mais l'instruction y est donnée de manière à préparer les jeunes gens à occuper un jour avec succès des emplois civils et militaires.
Il nous faudrait entrer dans de trop longs détails si nous voulions décrire tout ce que renferment d'intéressant les diverses collections scientifiques de la ville de Hanovre, depuis le cabinet d'histoire naturelle , celui des médailles et des antiquités, placés dans le palais du roi, jusqu'à la bibliothèque publique, dont le nombre de litres dépasse 200,000. Quoique les arts ne soient point dans cette ville arrivés à un grand degré de perfection, elle est cependant assez intéressante sous le rapport de l'industrie et du commerce, en y trouve des manufactures de galons d'or et d'argent, de drap, de cotonnade et de toile ; plusieurs fabriques de tabac, de savon, de faïence, de fleurs artificielles, etc.; d'importantes brasseries et huit imprimeries, des raffineries, des distilleries , et surtout des fabriques de broderies, qui jouissent en Allemagne d'une grande ïépiitation. Elle fait des affaires considérables avec Brème et Hambdhrg.
Elle exporte par la Leine et le chemin de fer qui l'unit aux grandes villes d'Allemagne des grains, des bois à bruler et de chàtpcrite, et une partie des produits des mines du Harz.
Les Allemands vantent dans les environs de Hanovre les deux maisons royales de plaisance appelées Herrenhausen et Montbrîllant, les jardins du comte de IValmoden, ouverts au public, et d'autres propriétés particulières ; mais ces curiosités , qui peuvent fixer un instant l'attention du voyageur, ne méritent pbiftt d'être décrites ici. Ne quittons point le territoire de Hanovre sans rappeler que cette ville est la patrie de l'illustre astronome Herscliell.
Si nous remoht'ons la Leine, nous passerons devant là petite ville de Gronau, située dans une île vis-à-vis l'embouchure de la Dep; puis nous verrons, au confluent de la Warne et de la Leine, Alfeld, autre petite ville entourée de murailles, où l'on fait un grand comr merce de fil et de toile. Nous traverserons ensuite les Etats du duché de Brunswick , et nous arriverons à Eîtnbeck ou Eînbeck, ville de 5,000 habitants-, Bâtie sur les bords de deux ruisseaux affluents de l'Ilme. Elle était autrefois la capitale de la principauté de Grubenhagen, et entourée de fortifications aujourd'hui eh partie ruinées.
Ses rues sont tortueuses et mal pavées, et ses maisons construites dans le style gothique ; mais elle possède une place publique assez belle. On y voit trois églises : l'une d'elles renferme les mausolées des ducs de Grubenhagen, dont le château en ruines donne aux environs un aspect très-pittoresque. Il y a dans la ville un hospice d'orphelins, deux hôpitaux, une maison de charité, un gymnase, des écoles élémentaires, une école d'industrie, des fabriques de toile, d'étoffes de laine, de.maroquin et de tabac. Les environs renferment des blanchisseries considérables. On célèbre chaque année dans ce pays une fête populaire appelée en allemand Nachbarschafthallen, c'est-à-dire réunion de bon voisinage.
A quelques kilomètres à l'ouest d'Eimbeck, on voit, près de la petite ville de Dassel, une belle papeterie, une scierie, plusieurs moulins à huile, et de grandes usines où l'on coule chaque année plus de 500 quintaux de fer en barre, et où l'on fabrique des haches, des faux et d'autres outils. Plus loin, mais au sud de la précédente, la ville d'ifslar, entourée de murailles, est le siège d'une surintendance protestante ; on y voit deux forges royales et une usine royale pour le cuivre. Entre des montagnes et des rochers s'élève la petite cité d'Hardegsen, que nous traverserons avant de revenir sur les bords de la Leine et d'entrer dans Gouingen ou Gœttingue, l'une des villes universitaires les plus célèbres de l'Allemagne.
Elle est située au pied du mont Haimberg, sur le bord de la Leine, dans une fertile vallée élevée de 145 mètres au-dessus du niveau de la mer Baltique ; elle était autrefois au nombre des villes hanséatiques. On la dit fort ancienne ; son origine paraît remonter aux premiers siècles de notre ère. Ses remparts ont été convertis en une promenade, d'où l'on jouit d'une très-belle vue. Elle est formée de trois parties : l'ancienne, la nouvelle ville, et le quartier appelé Masch. Ses rues sont larges et bien éclairées la nuit ; sa population est évaluée à 11,000 habitants. Elle possède des fabriques de tabac, de divers objets en fer et en cuivre, d'étoffes de laine, et des tanneries. Ce qui la rend surtout intéressante, c'est son université, fondée en 1737 par le roi George II. Toutes les sciences y sont enseignées, on pourrait le dire, avec une égale supériorité. Aussi que d'hommes célèbres sont sortis de ce foyer de lumières ! Plus de 750 étudiants sont inscrits sur les registres de l'université, qui, pour former constamment de bons instituteurs, a sous son inspection un établissement connu sous le nom de Séminaire philologujue. Tout, dans cette, ville, contribue à faciliter les moyens d'instruction. Une bibliothèque de 450,000 volumes, formée de celle de Leiboitz, qui y laissa ses nombreux manuscrits, et enrichie
chaque année d'ouvrages utiles aux arts et aux sciences; une belle collection de tableaux, un cabinet d'estampes, un muséum d'histoire naturelle, dans lequel on remarque la belle collection de crânes formée par le savant professeur Blumenbach ; un jardin botanique que l'on peut ranger parmi les plus riches de l'Europe; un amphithéâtre anatomique , un cabinet de médailles, un observatoire riche en instruments d'astronomie, un cabinet de phvsique, une collection de machines et de modèles ; une école vétérinaire, une d'accouchement, une de commerce et d'industrie, et une d'équitation ; enfin une société royale des sciences, qui compte dans le monde savant un grand nombre de membres correspondants, sont autant de véhicules et de moyens d'encouragement pour une jeunesse studieuse. GôtUngue a produit plusieurs hommes célèbres dans les sciences, entre autres le médecin Michaclis, le littérateur CasaIiiis et Blumenbach.
Ail confluent de la Werra et de la Fulda, qui par leur réunion fol'inent le Weser, s'ëlèvfe, flans une jolie mllée 1 fa Villë de Mitnden, station du chemin de fer de Cassel à Hanovre, dont les 6,000 habitants, riches de leurs brasseries, de leurs tanneries et de leurs fabriques de vinaigre, de drap , de savon, de tabac et de faïence, se livrent à ub commerce assez considérable, que la navigation du fleuve rend très-actif. On évalue à jjlus de 2,500,000 francs la valeur de la toile illi sis vend annuellement à Mûnden. A Dudcrstadt, située â 22 kilomètres à l'est de Gôttingue, il se fait un commerce considérable eh grains, en bière , en eau-de-vie, et surtout en toile à voile.
Ostei-ode 's',offre au nord de là précédente, ad milieu des montagnes du llàrz. C'est Une petite ville entourée d'é murailles et remplie de fabriques. Dans ses environs, on exploite des mines de fer, dont elie est l'entrepôt. Le bourg de ïferzba-g, sur la rive gauche du Sleber, renferme 2,600 habitants, et possède la seule manufacture d'armes 'qu'il y ait dans le Hanovre. Sur une montagne de 800 mètres de hauteur au-dessus du niveau de la mer, s'élève Saint-Andreasberg, chef-lieu d'un bailliage des mines, où l'on fabrique beaucoup de dentelles et de fil de lin. Sur les limites du Hanovre et de la Prusse, Elbingerode s'étend au bord d'un ruisseau affluent de la Bode, à 532 mètres au-dessus du niveau de la mer.
Des forgeS considérables environnent cette petite Ville. Klausthal, dans le Harz supérieur, est la ville la plus importante de cette contrée montagneuse. Sa population est de 10,000 habitants; son sol est à ?33 mètres au-dessus du niveau de la mer. C'est le siège d'une administration supérieure des mines; elle possède un hôtel des nroùMies, deux églises, tin gymnase et huit écoles élémentaires.
Ses habitants s'occupent 'de l'exploitation des mines et de la fabrication de "la dentelle.
En quittant Klausthal pour aller à Goslar, il faut traverser une partie du duché de Brunswick. Cette ville est située sur les bords de la Gose, ruisseau qui lui donne son nom, et qui, non loin de là, se jette dans l'Ocker. C'était autrefois une ville libre et impériale, qui occupait le septième rang parmi les villes de l'empire et le second parmi celles de la basse Saxe; ses hautes murailles, ses rues étroites, sombres et tortueuses, ses maisons construites dans le goût gothique, attestent son ancienneté. Suivant Dresser, elle a été fondée par Henri l'Oiseleur, et fortifiée pour la première fois en 1201. On prétend que c'est dans ses murs que le moine Bcrthold Sclnvarlz inventa la poudre à canon. On y remarque les restes du Kaiserburg, ou fort impérial, vieil édifice dans lequel les empereurs d' Allemagne tenaient leurs cours et rassemblaient la diète.
t'église Saint-Etienne renferme un monument assez curieux d'antiquité saxonne; c'est le Kaiserstuld, ou autel de Crotbos, qui consiste en une espèce de coffre en bronze, percé d'un grand nom bre de trous par lesquels passaient les Oammes qui consumaient les victimes humâmes que l'on attachait dessus. Goslar est le siege de l'administration des mines de Brunswick et de Hanovre. Elle est célèbre par la fabrication d'une espèce de bière connue sous le nom de gose; elle possède des brasseries considérables, des fabriques de vitriol et des fonderies de plomb. Une partie de sa population est occupée à ces divers genres d'industrie et à l'extraction des ardoises de ses carrières; elle est peuplée de plus de 7,000 âmes.
C'est près de cette ville que s'élève le mont Rammelsberg.
En descendant les pentes septentrionales du Harz, on remarque, dans une plaine inégale, sur les bords de l'Innerstc , la vieille ville de Hildcsheim, qui était déjà assez importante lorsque Charlemagnc porta dans ces montrées l'Évangile, tout souillé du sang des Saxons que son intolérance faisait massacrer au nom d'un Dieu qui prescrit à l'homme l'indulgence et l'amour pour son semblable. Aujourd'hui on y compte 15,000 habitants, occupés du commerce et de la fabrication des toiles. C'est une importante station de la grande ligne de Francfort à Hambourg, par Cassel et Hanovre. Elle est grande, mais mal bâtie, et possède un collége renommé et 20 églises, dont 12 sont réservées au culte catholique et 8 à la confession d'Augsbourg. Le plus remarquable de ses édifices est la cathédrale, que décorent de beaux tableaux, et dans laquelle on voit un monument digne de l'attention des antiquaires c'est la colonne qui portait la figure d' Irmensid ou d' Hcrmcnscnd, divinité saxonne que cer-
tains auteurs confondent avec Hermès, et que d'autres croient être le dieu Mars, en vénération chez cette nation. Cependant l'opinion la plus accréditée en Allemagne porterait à croire que cette statue, que l'on conserve encore, est celle du célèbre Herman ou Irmus, chef des Germains , illustre conquérant qui fut appelé par les Romains Arminius , et qui après sa mort fut adoré comme une divinité. Cette statue représente un guerrier armé de pied en cap, qui tient de la main droite une lance, au haut de laquelle est un long étendard taillé en pointe et orné d'une rose; de sa main gauche il porte une balance ; sur sa poitrine est un ours, et sur son ventre un écu portant un lion blasonné an-dessus d'une balance d'argent.
Lorsque Charlemagne , en 772, s'empara d'Heresbourg, dont il fit égorger les habitants, les prêtres d'Irmensul furent intmolés sur les débris de leur divinité renversée, et la colonne qui subsiste encore fut enterrée près du Weser; mais Louis le Débonnaire la fit transporter dans l'église de Hildesheim, où elle servit de support à un chandelier à plusieurs branches. Aujourd'hui, comme pour rappeler sa destination première, elle sert de piédestal à une statue de la Vierge. Outre sa grande cathédrale, cette ville renferme quatre édifices remarquables : le palais épiscopal, celui du conseil, l'arsenal et le trésor. Elle entretient, proportionnellement à sa population, un très-grand nombre d'établissements publics; ce sont : 3 hôspices d'orphelins, 18 hôpitaux, un séminaire et un gymnase catholiques, plusieurs écoles, dont une d'industrie. Le village de Berg, près de la ville, en est en quelque sorte le faubourg. On remarque non loin de là une grotte, nommée la droite des Nains, où il se forme une sorte de sel de Glauber ou de sulfate de soude.
Hildesheim a vu naître Hahn, médecin et chimiste distingué , et le célèbre missionnaire morave Oldendorp, qui en 1763 partit pour aller prêcher dans les Antilles et dans l'Amérique septentrionale ; la variété de ses connaissances le mit à portée de publier sur les pays qu'il parcourut des détails aussi exacts qu'instructifs relatifs a la géographie et à l'histoire naturelle.
Au bord de la Fuse, dans une plaine marécageuse, nous remarquerons la petite ville de Peina, station du chemin de fer de Hanovre à Brunswick, avec une enceinte de murailles et un petit ehâteau fort; à Burgdorf nous traverserons la petite rivière de raue, et nous arriverons ensuite à Zell ou Celle. Cette ville, peuplée de 12,000 âmes, et située dans une plaine sablonneuse, au confluent de la Fuse et de l'Aller, est le siège de la cour suprême d'appel du royaume. Trois faubourgs, de belles rues, plusieurs places, un château royal entouré de murailles et de fossés, un hôtel des invalides, une maison d'aliénés qui est en même temps une maison de correction fort bien administrée, la ren'dent digue de l'attention des étrangers, qui remarqueront encore dans le parc du château le monument élevé à la mémoire de Caroline-Mathilde, sœur du roi George III, et reine de Danemark, et dans la cathédrale son beau cercueil dans un mausolée délabré. Importante station du chemin de fer de Hanovre à Hambourg, elle est enrichie par un commerce de transit considérable, et par la navigation active de l'Aller; elle possède plusieurs fabriques de bougie, de drap et de papier.Lunebourg, ville importante par sa population, qui s'élève à 13,000 habitants, et par le rang qu'elle occupe comme chef-lieu de gouvernement, est située sur l'Ilmenau, l'un des affluents de l'Elbe, et sur le chemin de fer de Hanovre à Hambourg. Le monastère Saint-Michel, où l'on voit les tombeaux de plusieurs anciens ducs de Lunebourg, et où l'on a établi une école appelée Y Académie des Chevaliers, qui possède un musée renfermant quelques antiquités remarquables du moyen âge, l'hôtel de ville avec la salle des princes et le château royal, sont ses principaux édifices.
La ville ne se compose que de maisons anciennes et de rues étroites et sombres, mais elle est riche en établissements utiles, tels que six hôpitaux, un mont-de-piété, une maison d'orpheline, deux gymnases et un institut militaire pour les jeunes gens nobles. Les nombreuses abeilles qu'on élève hors de ses murs, les carrières de pierre calcaire ouvertes dans le mont Kalkberg, les salines exploitées dans ses environs, et d'où l'on tire annuellement plus de 100,000 quintaux de sel, ses marchés où plus de 70,000 chevaux SMit vendus tous les ans, enfin les produits de ses nombreuses fabriques , donnent à son commerce une grande activité.
A 30 kilomètres au nord-ouest de cette ville, une belle route nous conduit à Harbourg, siège d'une surintendance générale, petite cité murée dont la citadelle commande le passage de l'Elbe. Le chemin de fer de Hanovre vient y aboutir, et le trajet de Harhourg à Hambourg se fait en une heure de traversée sur l'Elbe à l'aide d'un bateau à vapeur. De là nous descendrons à Stade, sur la Schwinge. Malgré son titre de chef-lieu de gouvernement, ses 15,000 habitants, son gymnase, son école de cavalerie, sa maison de travail, son hospice d'orphelins, sa halle des marchands, ses fabriques de flanelle, de bas et de dentelles, et son commerce assez actif de transit, cette ville fortifiée et entourée de quatre faubourgs ne mérite point que nous nous y arrêtions. Mais si nous remontons l'Ems à son embouchure, nous verrons sur sa rive droite Emden ou Embden, la ville la plus commerçante du royaume. La baie de
Dollart donne à son port une grande importance, surtbut relativement aux chantiers de construction qu'elle possède et aux nombreux bâtiments qu'elle arme tous les ans pour la pêche du hareng et de la baleine. Sans être une forteresse, elle est entourée de remparts et de fossés. Il est peu de villes aussi bien arrosées : on y compte 257 fontaines. Son port est sûr, et sa rade offre un excellent mouillage, même pour les vaisseaux de ligne : uii phare place sur l'île de Borlrim indique l'entrée du Dollart. Elle possède des charlliers pour la construction des navires. Son vaste hôtel de ville feflferme une belle collection d'armes anciennes. Cette cité, renommée par ses fabriques de tabac et de bas de fil, a une population d'environ 12,000 âmes. Elle est unie aux grandes villes de l'Allemagne par le chemin de fer latéral de l'Ems qui y aboutit.
Nous ne quitterons point les parages de la mer du Nord sans parler des îles qui bordent le rivage, depuis l'embouchure de l'Elbe jusqu'à celle de l'Ems. Leurs noms sont Spikerooge, Langerooge, Baltrum, Norderney, Iuist et Borkinm. D'autres îles s'étendent encore à l'ouest de l'embouchure de l'Ems, mais elles appartiennent à la Hollande. Les envahissements que la mer a faits depuis six siècles sur les côtes hanovriennes et hollandaises, et dont la trace est en quelque sorte marquée par l'agrandissement graduel de certains golfes, et particulièrement de celui de Dollart, qui est dû aux conquêtes faites par les eaux depuis 1279 jusqu'en l'an 1539 que la construction d'une digue en arrêta les efforts, semblent prouver que ces Iles faisaient jadis partie du continent. D'ailleurs ces faits sont confirmés dans le pays par la tradition de l'engloutissement de plusieurs villages qui s'élevaient jadis sur ces côtes aujourd'hui détruites. Les îles que nous venons de nommer sont probablement destinées à être, à l'aide du temps, englouties sous les eaux; déjà l'on croit s'apercevoir que la mer les ronge continuellement. Ainsi se trouverait confirmée, sur cette petite portion de l'Europe, cette grande idée admise en géologie, que l'Océan a plusieurs fois abandonné et envahi ces antiques continents dont nos montagnes tertiaires ou de sédiment supérieur nous offrent les débris. Car nul doute que ces îles sablonneuses, menacées d'une future destruction , n'aient été formées au sein des eaux marines ; et si, depuis qu'elles sont couvertes de verdure et habitées, leur sol recèle les restes de quelques mollusques terrestres ou d'eau douce, la mer qui doit les recouvrir y déposant les dépouilles d'autres mollusques qui vivent dans son sein, il arrivera qu'un jour, mises de nouveau à découvert, les observateurs futurs y remarqueront la succession des dépôts d'eau douce et marine, reconnue si souvent dans des terrains qui appartiennent à un monde qui n'est plus. Ces îles consistent en plusieurs chaînes de dunes qui s'élèvent à 6 et même à 15 mètres. Pour donner plus de consistance au terrain sablonneux dont elles sont formées, on a imaginé d'y naturaliser quelques plantes qui croissent facilement dans le sable, telles que Yelymus arenarius et quelques espèces d'arenaria. Les magistrats, les curés et les maîtres d'école sont chargés de veiller à l'exécution de cette sage mesure, dont l'efficacité a été reconnue dans des localités analogues. Borkum cependant diffère des autres îles en ce qu'elle offre sur plusieurs points de sa surface des terrains gras et propres à la culture. Sa circonférence est de 18 kilomètres; elle est tellement basse, que la marée la divise en deux parties. On croit que les anciens la connurent sous le nom de Byrchanis ou Fabaria.
L'ne de Iuisi, très- basse, n'a que 6 kilomètres de longueur sur 2 ou 3 de largeur; Norderncy, un peu plus grande, n'est qu'un banc de sable tapissé de quelques plantes : elle est très-peuplée, grâce aux bains de mer qui y sont établis depuis 1799, et qui sont très-fréquentes; Baltrum, large de 2 kilomètres et longue de 10, -est souvent inondée dans les hautes marées ; les trois îles de Langerooge, dont la plus occidentale se nomme lFeslerende, et la plus orientale Osterende, sont exposées aux mêmes inondations; enfin }'pikerooge n'est qu'un amas de dunes entouré de hauts-fonds. L'espace compris entre ces îles et le continent est si peu profond, qu'il est presque à sec pendant la marée basse. Au surplus, malgré leur stérilité, toutes ces îles sont peuplées, et ceux qui les habitent y élèvent des bestiaux, et vivent principalement de la pêche et de la chasse.
Rentrons sur le continent par Norden, petite ville assez bien bâtie, quoique ancienne, à 4 kilomètres de Leysand, plage qui communique à la mer du Nord par un canal ; traversons Aurick, siège d'un consistoire protestant et d'une surintendance générale.
Le commerce communique de cette petite ville à Emden par un canal. Le bailliage d'Aurich est en grande partie couvert de marécages et de bruyères. Nous ne citerons le chef-lieu de cercle Meppen, petite ville de 1,800 habitants, que parce qu'elle se trouve sur le chemin de fer qui nous conduit à Osnabrùck.
Les érudits allemands ne sont pas plus d'accord sur l'origine de 'l'eUe dernière ville, qui existait déjà du temps de Charlemagne, que sur l'étymologie de son nom, dans lequel les uns veulent voir Osenbruclc (pont sur l'Osen), et d'autres Ochsenbrûcl: (pont des bœufs). Quoi qu'il en soit, la petite rivière qui la traverse n'est point l'Osen, comme l'étymologie que nous venons de rappeler pourrait Ie-faire croire, mais la Hase ou la Haase. Osnabrùck, peu-
plée de 12,000 habitants, fut érigée en évêché par Charlemagne; c'est dans les salles de son hôtel de ville que fut signé en 1648, entre les plénipotentiaires de la Suède et de l'empire, le célèbre traité de Westphalie, Les portraits de ces ministres sont conservés dans cet édifice, l'un des plus beaux de la ville. Malgré la prépondérance de l'évêque, qui était jadis souverain de cette cité, elle fut la première à embrasser la réformation de Luther. Aujourd'hui elle possède un évêque catholique et un évêque anglican choisi parmi les princes de la maison d'Angleterre. Osnabrück, autrefois fortifiée, comme l'indiquent quelques restes de remparts, est généralement mal bâtie ; on y remarque cependant quelques belles rues : telle est celle qui conduit au château, assez vaste édifice qu'entoure un jardin orné de pièces d'eau. Nous ne parlerons point des cercueils en argent renfermant les reliques de saint Crépin et de saint Crépinien conservés dans la cathédrale, mais nous dirons que la ville possède plusieurs hôpitaux, un collége et une belle promenade dans le quartier nommé 1 e.Freyung. Elle fait un grand commerce de toiles, et possède des manufactures de tabac, de lainages grossiers , et des blanchisseries de toiles. Cette ville a vu naître le célèbre théologien protestant Jean Jérusalem et le littérateur Mœser.
En 1790, tout ce qui constituait l'électorat du Hanovre était compris dans la partie orientale de l'ancien cercle de Westphalie et dans la partie occidentale de celui de la basse Saxe. Érigé en royaume en 1814, le Hanovre s'est agrandi depuis par des traités particuliers : il a cédé au Danemark le duché de Lauenbourg, à la Prusse et au grand-duché d'Oldenbourg plusieurs petits territoires en échange de ceux de Hildesheim et de Goslar, de la Frise orientale, du comté inférieur de Lingen, des seigneuries de Plesse et de Gleichen, des bailliages d'Uchte et de Frudenberg, de la partie septentrionale du pays d'Eichsfeld et du territoire de Meppen; en 1818, il a fait l'acquisition du comté de Spiegelberg.
GOUVERNEMENT. — Le Hanovre est un royaume héréditaire.
D'après la constitution, ce royaume est transmissible de mâle en mâle par ordre de primogéniture.
Ce royaume fait partie de la Confédération germanique, où il occupe le cinquième rang, et où il a quatre voix à la diète en assemblée générale, et une en assemblée ordinaire. Le contingent qu'il est obligé de fournir à la Confédération est de 19,600 hommes.
Le gouvernement de ce royaume tient à la fois du régime féodal et du régime représentatif. Les états hanovriens, composés de la noblesse, du clergé et des députés des villes, se divisent en deux chambres, qui s'assemblent annuellement dans la capitale et y discutent les projets de lois. La justice est rendue par les bailliages et les justices, par des chancelleries, des cours de première instance, et la cour suprême établie à Celle.
POPULATION PAR RELIGION. — La religion luthérienne est la religion de l'Etat. Il y a des consistoires luthériens à Hanovre, Stade, Otterndorf, Osnabrück et Aurich; l'on évalue à 1,494,033 le nombre des luthériens. Les catholiques réformés sont au nombre de 95,220 ; beaucoup descendent dés anciennes familles françaises réfugiées dans le pays après la révocation de l'édit de Nantes. Les catholiques sont au nombre de 217,367 ; ils ont deux évêchés à Hildesheim et à Osnabrück; enfin les israélites sont au nombre de 11,562; leur consistoire central est à Hanovre.
FINANCES. —En 1826, les revenus du royaume étaient évalués à environ 23 millions de francs ; aujourd'hui on les estime à plus de 32.
Mais la dette publique ne monte pas à moins de 150 millions de francs, dont les intérêts sont payés au taux de 4 pour 100. On peut juger d'après cela que pour peu que le gouvernement s'occupe de l'amortissement de la dette et des améliorations que le pays exige, les réserves qui restent dans les caisses du trésor public ne doivent pas être fort importantes.
ARMEE. — L'armée hanovrienne, en temps de paix, se compose de 25,000 hommes, parmi lesquels on compte 4,800 hommes de cavalerie et 1,500 d'artillerie; le reste est en infanterie. Elle se recrute par des enrôlements volontaires et par des appels que décrètent les états. En cas de guerre, cette armée peut s'augmenter de deux tiers par l'appel de la landwehr, milice nationale qui n'est point soldée, et qui n'est soumise à aucun service en temps de paix.
D'après une loi rendue en 1817, tout individu qui a atteint l'âge de 19 ans, sans distinction de rang, est obligé de faire partie de ce corps. On en excepte les infirmes, les ecclésiastiques, les professeurs, les employés du gouvernement, les anciens officiers après six années de service et les fils uniques qui ont eu un frère tué devant l'ennemi. Les étudiants seuls ont le droit de se faire remplacer. Tous les dimanches la landwehr est exercée par escouades, excepté pendant le temps de la récolte, et tous les ans par compagnies et par bataillons. Le corps royal des dragons provinciaux fait sur les routes le service de la gendarmerie.
Les principales places de guerre sont Embden, Hameln et Harbourg. Herzberg possède une manufacture d'armes, Hanovre un arsenal et une école d'artillerie et du génie, et, près d'Hameln, il existe à Herzen une fabrique de poudre. Depuis 1815, dans l'ordre civil et l'ordre militaire, le mérite est récompensé par la distribution d'une décoration dont l'institution admet des grand'croix, des commandeurs et des chevaliers.
ILE DE HELGOLAND A L'ANGLETERRE. — Des côtes du Hanovre on aperçoit une île dont nous dirons ici quelques mots, bien qu'elle ne dépende pas de ce royaume, et qu'elle appartienne à la Grande-Bretagne depuis 1807, que les Anglais l'enlevèrent au Danemark, qui fut obligé de la leur céder par les traités de 1814.
Cette île, appelée Helgoland, et située à 60 kilomètres des côtes du Holstein, est au nord des bouches du Weser et au nord-ouest de l'embouchure de l'Elbe. Une ligne de rochers de 500 pas de longueur, et que l'on gravit au moyen d'un escalier, la divise en deux parties, l'une haute et l'autre basse. La partie haute, dont le point culminant est de 70 mètres au-dessus du niveau de la mer, a 4,200 pas de circonférence , et renferme un fort, un arsenal, des magasins et 3 à 400 maisons; l'autre, qui n'a que le tiers de la précédente, mais qui s'accroît journellement par les alluvions que la mer y accumule, contient environ 80 habitations. La population totale est de 3 à 4,000 habitants, qui retirent de la pêche environ 125,000 francs par an. Le chef-lieu porte aussi le nom d'Helgoland. Le gouvernement britannique entretient dans l'île un gouverneur, un sous-gouverneur, un major de place et une garnison de 400 hommes. Helgoland, ainsi que l'indique son nom, était autrefois un lieu vénéré : les anciens Germains la nommaient Hertha, du nom de la déesse de la terre, à laquelle elle était consacrée.
WURTEMBERG.
ANCIENS HABITANTS. — HISTOIRE. — Ammien Marcellin et quelques autres auteurs parlent d'un peuple qu'ils nomment Alemanni, et qui habitait la contrée située entre le haut Danube, le haut Rhin et le Mein. Cette contrée est occupée aujourd'hui par le grand-duché de Bade et le royaume de Wurtemberg.
Les Alemanni, que les anciens nomment aussi Alamanni et Alambani, sont donc les ancêtres de ceux qui habitent aujourd'hui les Etats du roi de Wurtemberg. Agathias et Jornandès, qui vivaient sous le règne de l'empereur Justinien, nous ont conservé quelques renseignements precieux sur ces peuples barbares: le premier nous donne même l'origine du nom À'Alemanni; il dit qu'il signifie une réunion d'hommes de différentes nations de la Germanie : en effet, ail, tout, manp, homme, semblent être l'étymologie de ce nom. Les Alemanni descendaient probablement des Stœvi j leur gouvernement était monarchique, ou du moins ils se
choisissaient un chef Ibrsqu'ils entreprenaient une guerre ; leur religion était la même que celle des autres Germains; leurs mœurs étaient même plus féroces : il est certain que leur haine contre les Romains les porta à plusieurs actes de cruauté envers les prisonniers qu'ils leur firent. Caracalla marcha contre eux et les défit sans les soumettre : ce n'est qu'à force d'argent qu'il put en enrôler quelques-uns dans ses troupes. Vers le milieu du troisième siècle, ils s'emparèrent des forts que les Romains avaient bâtis sur les bords du Rhin, et ravagèrent une partie de la Gaule. Maximin les refoula sur leur territoire, où il mit tout à feu et à sang ; enfin leur histoire présente de nombreuses alternatives de victoires et de défaites jusque vers l'an 388, qu'ils se soumirent à Maxence.
Vers le milieu du onzième siècle, le Wurtemberg formait un comté situé dans le cercle de Souabe : il ne fut érigé en duché que vers l'an 1495, par l'empereur Maximilien. Sous Ulric VIII, qui
s'engagea dans la ligue de Smalkalde, une grande partie de ce pays embrassa la croyance de la communion d'Augsbourg, dont ce prince approuvait les principes, et maintenant on y compte plus de 1,000,000 de protestants.
Le duché de Wurtemberg avait, en 1796, une superficie de 8,320 kilomètres carrés et 608,000 habitants; il acquit ensuite, avec le titre d'électorat, une augmentation de 2,060 kilomètres carrés et de 118,000 habitants. Ces acquisitions consistaient principalement en plusieurs villes libres et impériales, avec leur territoire , enclavées-dans le duché, telles que Hall, avec des salines, Heilbronn, ainsi que la riche prévôté d'Ellwangen. Le traité de Presbourg procura, en 1806 , à l'électeur le titre de roi, et une grande partie des possessions autrichiennes en Souabe, telles que le comté de Hohenberg, avec 40,000 habitants; le landgraviat de Nellenbourg, qui passa en 1810 au grand-duché de Bade, auquel il appartient encore; enfin plusieurs petites villes sur les deux rives du Danube, fleuve dont l'ancien duché de Wurtemberg n'atteignait pas les bords. Le roi a gagné considérablement encore en soumettant à sa domination toutes les petites souverainetés appelées seigneuries immédiates, et qui constituaient, au milieu même du royaume, des enclaves considérables.
LIMITES. — SUPERFICIE. — POPULATION — Le royaume de Wurtemberg est situé entre la Bavière et le grand-duché de Bade, qui l'entourent de toutes parts. Son étendue est de 354,14 milles carrés géographiques allemands, ou de 19,831 kilomètres carrés.
Sa population était évaluée en décembre 1852 à 1,733,263 habitants, et en décembre 1854 à 1,783,967 habitants, dont 873,827 hommes et 910,140 femmes.
ASPECT PHYSIQUE. — Cette contrée est couverte de montagnes et sillonnée par de larges vallées dont la plus étendue est celle que traverse le Neckar ou Necker. Une branche considérable du Schicarzwald ou de la Forêt-Noire forme, sur une longueur de 120 kilomètres, la limite occidentale de ce royaume. Une seconde, celle du Rauhe-Alp, que les géographes français désignent sous le nom d' /llpes de Souabe, part de la précédente et se prolonge vers le nord-est, entre le cours du Necker et celui du Danube. Ces deux chaînes, qui ne sont que les rameaux d'une souche qui part des bords du Rhin vis-à-vis de Bâle, et qui se bifurquent en formant une partie des limites naturelles du Wurtemberg, au sud-ouest, renferment plusieurs montagnes élevées de 1,000 à 1,200 mètres; mais les moins considérables sont celles du Rauhe-Alp.
Les rivières qui ont leurs sources dans ces montagnes sont le Necker, ainsi que YEnz, la Fils, le Rems, le Kocher et le laxt, affluent du Necker; le Tauber, affluent du Rhin: le Danube et quelques petites rivières, telles que la Ricss, le Roth, et YIller, y prennent aussi naissance. Le plus considérable des lacs de l'intérieur du royaume est le Federsee, de près de 4 kilomètres de longueur et de 2 de largeur. Nous ne parlerons point du lac de Constance, qui forme seulement la limite méridionale du Wuitemberg.
PRODUCTIONS MINÉRALES. — Le royaume de Wurtemberg est riche en charbon de terre, en soufre, en sel, eu ardoisières, en carrières de marbre et en divers calcaires propres aux constructions. Les montagnes de la Forêt-Noire, couvertes de forets, renferment encore quelques mines de fer, de cuivre et même d'argent, mais en petite quantité.
CLIMAT. — PRODUCTIONS NATURELLES. — Le climat du Wurtemberg est en général sain et tempéré ; mais sur les hauteurs et dans les forêts qui s'étendent sur leurs pentes, la température est froide, et les hivers durent longtemps. La terre y est féconde en diverses productions agricoles : plus de la moitié de sa superficie est employée en grande culture ; les vignobles en occupent près d'un cinquantième, les prés environ un septième ; le reste est occupé par des forêts. Les vignes de ce pays ont été apportées de l'Alsace, de la Bourgogne, de la Valteline et de la Hongrie; on a même vu des plants de Chypre et de Perse y réussir parfaitement.
Les belles plaines qui occupent le centre du Wurtemberg produisent en abondance du froment, de l'épeautre, du seigle et d'autres grains. Les pentes de l'a Forêt-Noire et du Rauhe-Alp offrent de beaux pâturages; à leurs pieds, on voit dans les vallées des forêts d'arbres fruitiers. En un mot, le Wurtemberg attache à chaque pas les regards du voyageur par le contraste d'une nature sauvage et pittoresque avec les ouvrages de l'industrie humaine. Il est riche en chevaux, en porcs, en bêles à cornes et en brebis, parmi lesquelles on compte un grand nombre de mérinos. Les bois et les champs sont tellement peuplés de gibier, que, dans l'intérêt de l'agriculture, le gouvernement a cru devoir prendre, depuis 1817, une mesure fort sage, celle d'encourager la destruction des lièvres, des lapins et du gibier qui sort des forêts. Les gardes forestiers sont tenus de rembourser aux agriculteurs les dégâts causés par ces animaux, et chaque commune a le droit de charger deux hommes dignes de confiance de chasser sur ses terres.
INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE. — Le Wurtemberg offre une réunion assez remarquable de richesses naturelles et de matières premières pour l'exploitation des diverses branches de l'industrie.
Les fabriques commencent à prendre une grande extension dans le royaume, et plusieurs industriels ont même obtenu en 1855 des médailles à l'exposition universelle de Paris.
On remarque principalement : les salines de Wilhelmsglück, près de Hall ; celles de Friedrichshall, qui seront bientôt en pleine exploitation; les fonderies de Wasseralfengen, qui fournissent la matière aux remarquables fabriques de machines à vapeur d'Esslingen ; les fabriques d'instruments aratoires de Friedrichshall et deNeuenburg; la coutellerie de Heilbronn, celles de Futtlingen, de Kirchheim; les armes d'Oberndorf; les tôles, les tissus métalliques, les chaînes d'archal d'Ulm; la poterie de Schramberg, de Scherzheim ; les porcelaines de Louisbourg ; les fabriques de produits chimiques, de blanc de céruse de Heilbronn; l'outre-mer de Kirchheim; les ustensiles de bois et les horloges de la Forêt-Noire; les filatures de coton et les teintureries ; la filature modèle qui va entrer en activité à Esslingen; les fabriques de chapeaux de paille de Schramberg et de Fellbach; cinq grandes fabriques de sucre de betteraves ; les tissus de laine d'Aalen, de Metzingen, d'Esslingen, de Reuttlingen, et principalement les draps mi-fins, qui sont trèsrecherchés ; les peaux tannées, qui sont en partie absorbées par Francfort, Leipzig et Zurich; les instruments de musique, entre autres les pianos et les pianos-orgues Schiedmayer, qui s'exportent en grand nombre pour l'Angleterre et l'Amérique, et dont la fabrication se fait à Stullgard, etc., etc.
Les distilleries sont au nombre de plus de 5,000 on en compte dans le canton de Heilbronn 30, dans celui de Bahlingen 226, dans celui de Biberach 63. A Mossingen, la même industrie occupe 280 cuves. L'esprit qu'on fabrique dans ces distilleries n'est point tiré du vin , de la pomme de terre ni du grain; on l'extrait du fruit de ce merisier qui se multiplie si facilement dans les montagnes de la Forêt-Noire, que la. liqueur spiritueuse qu'on en retire, connue sous le nom de kirsrltemeasser, donne lieu à un produit annuel de plus de 130,000 florins (la valeur du florin varie de 2 fr. 15 à 2 fr. 50), et à une industrie qui fait vivre plus de 120 familles.
Que les gourmets estiment à tort ou avec raison cette eau-de-vie germanique, les habitants du Schwarzwuld ne devraient-ils point élever une statue à Thomas Leodgar, qui en est l'inventeur, et à qui ils sont redevables de l'aisance dont ils jouissent?
COMMERCE. — Le haut commerce du royaume consiste principalement dans l'exportation de ses bois, de ses vins, de ses grains, de ses fruits secs, de ses cuirs, de ses toiles, de son kirschenwasser et des horloges en bois fabriquées dans ses montagnes.
On récolte annuellement plus de 300,000 hectolitres de vin, et plus de 5,400,000 kilolitres de grains, dont 300,000 sont exportés.
La Suisse, la France, la Bavière et l'Autriche sont les pays avec lesquels il a des relations suivies. Il en retire des draps, de l'huile, des laines fines,' de la soie brute et des soieries, des tabacs et diverses denrées coloniales. Quant au commerce intérieur, il est alimenté par certains produits que le système des douanes a cru favoriser en évitant la concurrence étrangère, ou par le monopole que le gouvernement a établi dans plusieurs branches; ainsi, l'étoffe de coton qui porte le nom de la ville chinoise d'où on la tire ne peut point entrer dans le royaume, le fer brut n'en peut point sortir, et le sel ainsi que le tabac sont vendus exclusivement par le gouvernement. Mais, dans la vue de faciliter le commerce intérieur, l'autorité suprême a, depuis vingt ans, établi un système uniforme de poids et mesures, fondé sur le calcul décimal; elle s'est de plus attachée à entretenir les routes : ce qui, avec le secours des rivières , contribue à encourager les communications commerciales.
On estimait en 1824 la valeur des marchandises du royaume à 33,000,000 de florins, dont environ 16,000,000 pour les produits naturels, et 17,000,000 pour les produits industriels. En 1837, on portait la valeur des exportations à environ 37,000,000, et celle des importations à 35,000,000 de francs. Aujourd'hui les exportations dépassent 45,000,000, et les importations atteignent 40,000,000 de francs.
DIVISIONS ADMINISTRATIVES. — Le royaume est divisé en quatre cercles, qui portent les noms des rivières qui les traversent ou des montagnes principales qui forment la limite occidentale de cet Etat. Ainsi, au nord s'étendent ceux du Necker et du laxt; à l'ouest, celui du Schwarzwald ou Forêt-Noire, et au sud celui du Danube. Ces quatre grandes divisions comprennent 12 justices provinciales et 64 justices moins importantes. Le royaume renferme d'après les statistiques les plus récentes 134 villes, 228 bourgs, 1,459 villages, 3,106 hameaux et 4,671 habitations isolées.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Au milieu d'une jolie vallée bordée de coteaux et de vignobles, s'élève, sur le bord du Nehenbach, Stuttgart, la capitale du royaume. Nouvellement augmentée, cette ville comprend avec ses faubourgs 2,000 maisons, et
une population qui s'élevait en 1823 à 27,780 habitants, et qui en renferme aujourd'hui 45,814, sans compter la garnison. Elle est entourée d'un mur et d'un fossé. La ville proprement dite est mal bâtie; ses rues sont étroites et ses maisons en bois; les faubourgs sont plus modernes et plus réguliers; on y remarque deux rues larges, alignées et bien bâties, dont la plus belle est le Gmben.
C'est le giége des collèges suprêmes du royaume; le roi y possède deux châteaux, dont le nouveau, situe datis le fUiiboui^ d'Esslingefl, sur une esplanade symétriquement plantée, est d'une belle construction et d'une grande richesse dans son intérieur : on y remarque une belle collection de tableaux et de statues. L'ancien château renferme les bureaux du gouvernement. Stu'tgartcom pte encore d'autres beaux édifices, au nombre desquels nous citerons l'église principale, la chancellerie et le théâtre de l'Opéra. Autour du nouveau palais s'élèvent les principaux établissements publics : ici c'est une bibliothèque renfermant plus de 300,000 volumes, une collection de 12,000 Bibles en soixante langues et un grand nombre de manusëfits; là lé musée. d'histoire naturelle ; plus loin l'aadémie de peinture et de culptHr, et le jardin botanique. Le gymnase de Stuttgart jouit d'une grande réputation ; c'est une sorte 11 petit collége; une trentaine de maîtres y sont attachés; il possède un observatoire et une riche collection d'instruments de physique et de mathématiques. Il y a dans cette ville un hôtel des monnaies, une école des arts et métiers, un magnifique haras, une école vétérinaire et une école forestière. Les deux écoles de Catherine et de Pauline sont destinées à recevoir des enfants pauvres, que l'on met ensuite en apprentissage. La caisse d'épargne, fondée en 1818, possédé maintenant lin capital d'environ 200,000 florins. L'industrie et le commerce de cette capitale consistent fin fabriques de draps, de toiles, de teintures, de soieries, de machines à vapeur et d'ouvrages en bronze. L'une des branches principales de l'industrie de Stuttgart est l'imprimerie ; après Leipzig et Berlin, cette ville est la plus importante de l'Allemagne sous ce rapport. Ses transactions commerciales sont d'ailleurs favorisées par sa situation sur la grande ligne du chemin de fer qui unit Munich et Augsbourg aux lignes du Rhin, pans .les environs, on remarque les châteaux de Roseinstein, de liôlienheim et dé là Solitude ; ce dei,nieri est bâti sur la pente d'une montagne d'où l'on jouit d'une vue délicieuâë : la salle de concert, celle de l'Opéra, la ménagerie, les jardins et la chapelle consacrée à la mémoire de la dernière reine, y fixent principalement l'attention. Le nouveau cimetière de la ville renferme quelques beaux mausolées. C'est là que se trouve le caveau de la famille royale, qui depuis 1827 possède les restes mortels de Schiller; sa tête avait été déposée à la bibliothèque : elle a été réunie à ses ossements.
Si nous suivons les sinuosités du Necker, nous remarquerons, en remontant cette rivière, Esslingen ou Esslingue, siège du collége suprême de justice, et station du chemin de fer d'Ulm et Augsbourg.
Cette ville de 13,500 âmes, autrefois au nombre des cités libres, n'est pas dans une situation moins agréable que Stuttgart : elle est entourée de vignobles et de forêts. A 15 ou 20 kilomètres au-dessous de la capitale, nous ferons remarquer, sur la rive gauche et sur le chemin de fer de Carlsruhe, la jolie petite ville de Ludwigsbourg ou Louîsbourg, résidence royale où l'on voit un beau château, nn hospice d'orphelins, une maison de correction pour les femmes et l'académie militaire, que l'on y a transférée de Stuttgart. Les manufactures de draps, de toiles, de porcelaine, qu'on y a établies avec les secours du gouvernement, n'ont pu porter la population de cette ville à plus de 10,000 âmes, sans compter la garnison et la cour.
A 30 kilomètres plus loin, sur la rive opposée, Heilbronn, ville un peu plus considérable, autrefois libre et commanderie de l'ordre Teutonique, cité qui s'enrichit par ses ouvrages en orfèvrerie, par le produit de ses vignobles, de ses fonderies de plomb à tirer, de ses distilleries et par la navigation active du Necker, possède une bonne académie : un embranchement spécial de chemin de fer l'unit à la grande ligne wurtcmbergeoise. A 45 kilomètres à l'est de cette ville s'étend celle de Hall, que l'on distingue de plusieurs autres du même nom par la désignation de Hall de Souabe ( SchwabisehHall). Située sur les bords du Kocher, entourée de rochers, peuplée de plus de 7,000 âmes, elle doit sa fondation aux abondantes sources salées de ses environs. Ellwangen, sur le Iaxt, chef-lieu de cercle, est, malgré son gymnase L son lycée, sa cour royale et son commissariat épiscopal, moins intéressante que Gmünd, arrosée par le Rems, ancienne place forte, que défendent encore des murs flanqués de tours : ville tombée d'une population de 18,000 à celle de 8,000 habitants, et connue par ses diverses fabriques, où l'on travaille avec art les métaux précieux. L'industrie de la petite ville de Geislingne ou Gesslingen consiste en divers petits ouvrages tournés en os, en ivoire et en bois, dont elle exporte par an pour plus de 90,000 florins. 5,000 habitants forment la population de Gœppingue ou Gôppingen, arrosée par la Fils, et station du chemin de fer de Stuttgart à Ulm. Elle renferme des fabriques de draps et de poteries.
Les eaux minérales du village d'Ueberkingen attirent des étrangers dans ses environs, riches en sitea«pitLoresques. On voit à peu de distance le bourg de Hohenstaufen, placé sur une hauteur d'où la vue est magnifique. Le vieux château ruiné qui domine ce bourg
fut pendant longtemps le séjour de l'empereur itarberiJUge. Le dernier rejeton de la famille de Hohenslaufen était le jeune Conrad ; qui périt sur l'échafaud l'an 1269 à Naples, pour avoir essayé de s'emparer du trône de Sicile qu'avait occupé son père, et que le pape venait de donner à Charles d'Anjou. Reudingue ou Reiillingeii, située à 373 mètres sur l'Echatz, au pied de YAckalm, autrefois ville libre, ne mérite d'être citée que parce qu'elle est le chef-lieu du: Cercle de Schwarzwald, qu'elle contient 12,000 habitants, et qu'ëllè ptJMède Un lrcée; Ses vignobles ; qui tapissent les pentes du Rauhe-Alp et du Georgenberg, ?es tanneries et ses fabriques de dentelles et de quincaillerie contribuent à l'enrichir; Èlle possède des bains sulfureux fréquentes. Son église Sainte-Marie est une des plus belles du Wurtemberg.
Tubingue ou l'ubingcn, entre la rive gauche du Necker et la droite de l'Animer, ne renferme que 8 à 9,000 habitants; mais elle est importante par son université, où l'on fait de très-bonnes études.
Cet établissement, qui fut fondé en 1477 par Eberhard le Barbu , compte 44 professeurs, près de 900 étudiants, et possède une bibliothèque publique de 80,000 volumes, un amphithéâtre d'anaIçimie ; un institut clilliqtie, Un jardin botanique et une faculté de I.H'oldgîe. C'est lui vieux château de Pfalz que se trouvent la bibliothèque, l'observatoire et Je cabinet d'histoire naturelle. L'églie collégiale renferme les cendres des atidêlres de la mais ii régiiante; Il y a encore dans la ville un séminaire pour les pasteurs étangëJiques, une école vétérinaire et divers autres établissements qdi justifient le rang qu'elle occupe; mais elle est triste et mal bâtie.
Cette ancienne ville a été la résidence des comtes palatins de Souabe : c'est dans ses murs que fut réglé en 1514 l'acte connu sous le nom de Tûbingervertrag, qui fut jusqu'en 1819 la charte du Wurtemberg.
L'lm, importante station du chemin de fer de Stuttgart à Munich, peuplée de 24,000 individus, était autrefois ville libre et impériale, et sa population était plus considérable qu'aujourd'hui. Sa situation au confluent du Blau et du Danube, sur la frontière de la Bavière, les fortifications qui la défendent, ses fabriques et ses blancfiissefieS de toiles, ses manufactures de tabac , les expéditions, les transports et les commissions de transit qui alimentent son commerce déchu , en font encore la seconde ville du Wurtemberg. Elle est célèbre dans l'histoire par la capitulation qui porte son nom, et qui eut lied le 20 octobre 1805. Comme elle ne fit point de résistance à l'approche des Français ; ses édifices sont restés intacts : on cite parmi ceux-ci la bibliothèque pùbUque, l'arsenal, l'hôtel de ville et ses peintures à fresque, mais surtout l'église appelée le M Un s ter, qui, par sa riche architecture ogivale, son magnifique pdrtaÍl; egt aujourd'hui une des plus belles de l'Allemagne. En voyant diminuer l'importance de ses transactions commerciales , cette ville a conservé ses titres à l'estime des gastronomes : les pâtisseries renommées sous le nom de pains d'(Jlm, les asperges qu'elle récolte et.les escargots qu'elle engraisse, sont toujours en réputation : croirait-ou qu'elle exporte par an plus de 4 millions de ces mollusques?
C'est à ses papeteries, à ses fabriques de futaine que Bibcrach, arrosée parla Riss et peùplée de 5,000 âmes, doit sa prospérité.
Cette ville est la principale station du chemin de fer d'Ulm au lac de Constance. Nous citerons encore Rothenbourg, divisée par le Necker en deux parties, dont celle de la rive droite, appelée Ehingen, formait autrefois une ville distincte; Freudenstadt, fondée en 1600 pour servir d'asile aux protestants chassés des Etats héréditaires d'Autriche; Mergentlteitn ou Maricnthal, dont les remparts servent de promenades, et dont le château était autrefois la résidence du grand maître de l'ordre Teutonique; la jolie petite ville de Kirchheim, qui fait un commerce actif en bestiaux et en laine.
A Calic on fabrique des étoffes de laine pour 400,000 florins; à l'rach, sur FErms, on fait 8,000 pièces de toile par an. Non loin de cette petite ville, on voit un couloir long de 300 mètres, pavé en fer, et par lequel on fait descendre vers le bord de la rivière les bois de construction coupés dans les montagnes du Rauhe-Alp ; Friedrichshafen , avec un millier d'habitants, est un petit port franc sur le lac de Constance, et l'cntrepôt du commerce du royaume.
La pêche y est fort active, et l'on y construit des bateaux à vapeur pour la navigation du lac.
Le sol du Wurtemberg n'est pas sans intérêt pour l'antiquaire : la partie méridionale renferme plusieurs tombellcs; aux environs de Rothenhourg, sur le Necker, on a trouvé les restes d'un aqueduc de 12 kilomètres de longueur, et le fameux mur du Diable, qui s'élève sur le bord du Danube , et qui n'est qu'un des restes de la vaste lignede fortifications construites par les Romains, a été reconnu à peu de distance d'Ellwangen. Non loin de Stuttgart, entre Weiblingen et Endersbach , on a découvert des fours de potiers romains et un assez grand nombre de vases. Près de là on a trouvé aussi un autel et plusieurs bas-reliefs. Quelques noms de lieux ont même conservé des traces d'antiques souvenirs. Beinstein ou Beystein signifie près de la pierre, et indique l'ancienne existence d'un monument considérable; et le canton de Kalkofen, dans lequel on a trouvé, il y a peu d'années, des poteries romaines, a toujours porté ce nom, qui signifie fovr à chaux; ce qui donne à ces établissements détruits une haute antiquité. Le gouvernement prend depuis quelques années
les mesures nécessaires pour la conservation detolié leS restes ailtiques et du moyen âge. Une ordonnante de 1&29 recommande aux baillis de veiller à Ce que t'es anciens châteaux, les vieilles églises ,e t les diîbftà romains soient respectés, et que les objets faciles à transporter soient recueillis par eux.
GOUVERNEMENT. — Dès le commencement du seizième siècle, les ducs de Wurtemberg partageaient la souveraineté avec l'assemhlée des étals, composée des 14 principaux ecclésiastiques et de 89 députés des villes et des districts. Lorsque Napoléon érigea ce duché en royaume, l'assemblée des tUaté Tut dissoute; mais depuis la délivrante de l'Aiteiliagne, pour nous servir de l'expression ttlleman'dë-, ou depuis l'établissement de la nouvelle Confédération Germanique, les districts et les anciens seigneurs du royaume réclamèrent l'établissement d'une nouvelle constitution qui déterminât les droits de la souveraineté absolue en fondant une représentation nationale. Ces vœux furent exaucés en 1819. D'après la constitution , le roi est majeur à 18 ans ; sa personne est inviolable ; il peut exercer indistinctement l'un des cuites des diverses communions chrétiennes; à lui seul appartient la sanction et Texécutioh des lois; le droit de rendre la justice, celui de faife la paix du la guerre, et le commandement de J'armée. Par la loi fondamentale du royaume, la liberté de conscience et l'égalité des cultes ont été proclamées; Aucune loi ne peut être mise en vigueur que lorsqu'elle a été approuvée par l'assemblée générale des districis; les contributions sont également votées par elle ; enfin la liberté individuelle a été garantie et la confiscation des biens abolie. La chambre des nobles se compose de 13 membres choisis parmi les propriétaires de biens seigneuriaux, de 6 ecclésiastiques protestants, d'un évêque et de S ecclésiastiques catholiques; enfin de quatre docteurs appartenant aux diverses sociétés savantes du royaume. Le tiers des tnembfeS est nommé à vie par le roi, les deux autres tiers sont héréditaires. On exige pour ceux-ci un revenu de 6,000 florins ; ils ont droit de siéger à l'âge de leur majorité. La seconde chambre se compose de députés élus par la bourgeoisie. Dans les villes, on nomme un député par 200 habitants. A moins de dissolution extraordinaire, ces députés sont élus pour six ans. Une caisse spéciale, dont les fonds sont pris sur les contributions, fournit aux dépenses de l'assemblée générale, ainsi qu'aux frais de voyage des députés. Les députés de district sont élus par des colléges particüliers, composés de citoyens ayant des possessions dans le district, et qui, pour jouir du droit d'électeur, doivent avoir atteint leur vingt-cinquième année. Les membres de l'une et de l'autre chambre fournissent à la haute cour de justice la moitié de ses membres. La chambre haute et celle des députés désignent pour la présidence trois personnes, parmi lesquelles le roi choisit celle qu'il croit digne de remplir cette fonction ; les séances de cette derniere sont publiques.
Dans ce royaume, le gouvernement, dans le but de maintenir le régime constitutionnel et les institutions qui en sont la base, a créé un conseil général, que l'on pourrait appeler conservateur de la constitution, composé de jurisconsultes et de magistrats inamovibles dont la moitié est nommée par le roi, et l'autre par l'assemblée des districts. C'est devant ce conseil que sont renvoyés les
fonctionnaires publics et les membres mêmes des districts qui sont accusés d'avoir tenu une conduite inconstitutionnelle; il est aussi chargé de juger les différends qui peuvent s'élever entre les districts et les ministres eux-mêmes sur la manière d'interpréter la loi fondamentale du royaume. Les districts ont le droit de mettre en accusation les ministres du roi; mais ceux-ci ne peuvent déplacer aucun fonctionnaire public pour lui donner un emploi inférieur) encore moins le destituer, que lorsque son InCapaCité est JiHltH'ëë ou qu'il s'ftst l'ehdu iiddpanie de quelque délit.
L'organisation municipale du Wurtemberg pourrait être enviée par plus d'un des États qui prétendent jouir du régime constitutionnel. Le gouvernement n'intervient ni dans la nomination des membres de l'administration communale, ni dans les délibérations des conseils municipaux. En 1848, on essaya en vain de renverser la constitution de 1819; après de longues délibérations, qui portaient sur la nécessité d'une révision radicale, elle a été maintenue.
Le Wurtemberg occupe le sixième rang dans la chancellerie féd.
raie; il a une voix dans le comité des Dix-àept et quatre voix dans l'assemblée générale. Son contingent fédéral est de 20,000 hBinmës, qui font parlie de la première division du Xe corps ; et sa contribution fédérale est de 71,800 thalers, environ 230,000 francs.
LIBERTÉ DE LA PRESSE. — Dans le Wurtemberg la liberté de la presse n'est point illimitée; elle est soumise à certaines restrictions contre lesquelles les partisans des libertés publiques ont réclamé jusqu'à présent en vain. Sous le prétexte d'éviter les prétendus abus d'un droit qui est devenu un besoin chez les peuples civilisés ; une loi, du 30 janvier 181T pertiiet là publication dës oiivi'àges qui tie l'enferment rien de contraire aux mœurs et à la tranquillité de l'Etat. Les journaux sont libres dans les circonstances ordinaires.
En temps de guerre seulement, ils doivent être soumis à la censure.
Mais les tribunaux sont chargés de poursuivre les auteurs des écrits qui blessent la morale ou la religion, répandent la calomnie sur les particuliers, attaquent la conduite des fonctionnaires publics et des députés, ou portent atteinte à la majesté royale et aux agents des puissances étrangères: INANCËS, — Le budget des finances du royaume de Wurtemberg a été fixé pour l'année 1856-1857, à la somme de 12,522,140 florins, c'est-à-dire à 24,922,601 francs. La dette publique du royaume était évaluée au 30 juin 1855 à 54,877,472 florins ; c'està-dire à 117,986,565 francs. Mais dans le budget on ne compte que les dépenses pour le service ordinaire.
ARMÉE. — L'armée du Wurtemberg se compose sur le pied de guerre de 22,016 hommes, et sur le pied de paix de 9,388 hommes.
Elle comprend une division d'infanterie formée de 3 brigades.
Ces trois brigades comptent 8 régiments ou 16 bataillons. Chaque bataillon est de 4 compagnies. Il y a en outre 2 compagnies de discipline. La cavalerie se compose d'un escadron des gardes du corps, d'un détachement de chasseurs, et d'une division comprenant 4 régiments à 4 escadrons chacun. L'artillerie et le génie forment environ 4,000 hommes.
TABLEAUX STATISTIQUES DU ROYAUME DE SAXE.
STATISTIQUE GÉNÉRALE.
POPULATION SUPERFICIE, POPULATION, par kilomètre FINANCES. FORCES MILITAIRES.
271 83 En 1855. carré. o l s - 4- 60 h.
271 83 En 1855. 126 1855 à 1867. Officiers supérieurs et états-majors 60 h.
milles carrés Hommes. 994,154 Dépenses ordinaires. f f t • brigades de 4 bataill. à 4 comp. 15,748 allemands Femmes. 1,004,921 34,903,382 francs. n ao Crie, ( 1 brigade de chasseurs à 4 bataill. 4,005 t ou w Dépenses extraordinaires. Cavalerie. 1 division de 4 régiments 3,208 , lo,222 Tolal, , 2,039,075 29 380 812 francs Artillerie, pontonniers, etc. 2,420 kilomètres carrés. Dette publique Trains des équipages, commissariat, etc., 1,232 kilomètres carrés. Dette publique.
200,000,000 francs. Total. , , , , , , , , , 26,67311,
Statistique des Provinces,
SUPERFICIE POPULATION CERCLES. en kilomètres VILLES PRINCIPALES.
carrés. en 1855.
DaaSDE, , , , , , , , , , 4,400 528,714 DRESDE, 108,732. - Grossenhayn. 6,000. - Meissen, 6,000. — Pirna, 5,000..
LE!pzt6 3,535 454,262 Leipzig, 69,986. - Grimma, 4,000. — llochlitz, 3,000. - Leissnig, 3,000.
ZwtCMu. 4,711 759,328 Zwickau, 8,000, - Freyberg, 12,000. — Chemnitz, 20,000, - Anneberg, 6,000.
Schneeberg, 6,000, BAUTEN., 2,576 296,771 Bautzen ou Budissin, 15,000. — Plauen, 10,000. — Zittau, 9,000. - Kônigsbrück, 1,200.
TABLEAUX STATISTIQUES DU ROYAUME DE HANOVRE.
STATISTIQUE GENERALE.
POPULATION SUPBRFICIR. POPULATION. par kilomètre FINANCES. FORCES MILITAIRES.
carré.
698 655 Décembre 1852. 47 En 1855-1836. 1 division de cavalerie formée de 6 régiments.. 3,720 h.
milles carrés Hommes. 907,659 Revenus. 2 divisions d'infanterie à 8 régiments 18,320 allemands Femmes.. 911,594 32,000,000 francs. 2 bataillons de chasseurs",., 420 ou —————— Dépenses. Artillerie, génie, etc 1,647 39,125 Total.. 1,819,253 31,000,000 francs. lotal 21,107 h.
kilomètres carrés. Dette publique.
kilomètres cal'res.. 1 otal, , , , , , , 2.,107 h, 150,000,000 francs.
Statistique des Provinces.
SUPERFICIE GOUVERNEMENTS. en kilomètres POPULATION. V Il. LES PRINCIPALES.
carrés.
HANOVRE 6,124 349,958 HANOVRE, 36,000. — Hameln , 6,000. — Bodenwcrder, 1,600. — Miinden , 1,600.
— Springer, 1,600.
HILDRSHEllI, , ,.,.,.", 4,546 367,883 Hildesheim, 15,000. — (îoslar, 8,000. — (îôttingcn, 15,000.— Duderstadt, 6,000.
— Porna, 4.000..
LUNEBOURG, , ,.. , , , ,. , , , 11,424 338,764 Lunebourg, 14,000. — Celle, 10,000.— Harbourg, 5,000. - Danneiibeg, 1,600.
— Luchow, 2,000.
STADE",.,..,., 6,898 279.834 Stade, 8,000. - Verden, 5,000.—Otterdorf, 2,000.
OSNABRUCK 6,348 261,965 Osnubruclt, 14,000. — PapIJenhourg, 4,000. — Meppen, 3,000. - Quackenbrück, 2,000. -
AURlCR, , , , , , , , , , , , 3,144 185,129. Aurich, 5,000. — Leer, 10,000. — Emden, 15,000.
Territoire de CLAUSTHAL. 616 35,720 Clausthal, 10,000. — Andrewshérg, 4,000. — Zellerféld, 4,000.
TABLEAUX STATISTIQUES DU ROYAUME DE WURTEMBERG.
STATISTIQUE GÉNÉRALE.
POPULATION SUPERFICIE. POPULATION. par kilomètre FINANCES. FORCES MILITAIRES.
carré.
354 14 Décembre 1852. 86 1856-1857. Infanterie. 3 brigades de 8 régiments 15,783 h.
milles carrés Hommes. 838,275 Dépenses ordinaires. Cavalerie. 1 division de 4 régiments 2,633 allemands Femmes, 894,988 24,922,601 francs. Artillerie et génie, , , , , , , , , , , , 3,500 ou Dette publique. États-majors. 84 19,831 Total., 1,733,263 117,986,565 francs. Total 22,000 h.
kilomètres carrés. , , 22,000 h,
Statistique des Provinces.
SUPBRKICIE CERCLES. en kilomètres POPULATION. VILLES F II IX C I P A L K S.
carrés.
NICXKa, , ..,. 3,384 501,034 STUTTGART, 40,000. — Ludwigsbourg, 15,000. — Heilbronn, 12,000. — Essling, 9,000.
FOBAT-NoIRB,.,.,. 4,855 443,872 Reutlingen, 12,000.—Rottweill, 4,000. —Rothenbourg, 8,000.—Tubingue, 10,000.
- Calwer, 5,000.
DnllBl!,. 6,368 413,444 Ulm, 16,000. -Blaubenern, 22,000. — Biberach , 6,000. — Gôppingue, 5,000.
IAXT 5,224 374,913 ElUrmgen, 3,000. — Hall, 7,000. - Gmündt, 8,000, - Marientbal, 4,000.
ÉrrArrs SECONDAIRES DE L'ALLEMAGNE.
GRANDS-DUCHÉS.
Un marché à Bade.
BADE.
- NOTICE HISTORIQUirr— Quelques généalogistes font descen-
dre la maison de Bade des rois goths, et d'autres d'un duc d'Alsace, en 684. Mais ce qu'on peul regarder comme certain, c'est que la seigneurie de Bade fut érigée en margraviat par Henri l'Oiseleur, au commencement du dixième siècle. Hermann, fils de Berthold, est le plus ancien prince dont parlent les chroniques vers le onzième siècle; il tenait de Judith sa femme, héritière de Bade, la principauté qui donna à son fils Hermann 1er et à ses successeurs le titre de margrave. Ce marquisat passa entre les mains de plusieurs familles qui s'éteignirent successivement. Les diverses branches de la maison de Bade furent celles de Hochherg, de Sauzenberg et de Bade; en 1503, toutes leurs possessions furent réunies sur la tête du margrave Christophe, dont les fils fondèrent les branches de Bade-Bade et de Bade-Durlach. Celle qui règne aujourd'hui dans cette principauté, qui reçut en 1802 le titre d'électorat, et quelques années après celui de grand-duché, est un rejeton de la dernière branche.
Après la bataille de Leipzig en 1813, le grand-duché de Bade entra dans la Confédération Germanique, dont il fait aujourd'hui partie. En 1849, un mouvement insurrectionnel éclata dans ce pays pour substituer au gouvernement grand-ducal la république ; mais l'intervention de l'armée prussienne rétablit l'autorité du grand-duc, et en 1850 des lois restrictives et répressives étaient votées pour la garantie de la paix publique.
ÉTENDUE, LIMITES, SUPERFICIE ET POPULATION. —
Toutes les vallées qui, des sommets de la Forêt-Noire, s'abaissent vers le Rhin, ainsi que tous les rivages orientaux de ce fleuve, depuis Bâle jusqu'au delà de Manheim, appartiennent au grand-duché de Bade. Cet Etat possède encore toutes les pentes de la Forêt-Noire jusqu'au bord du Rhin, et compte parmi ses dépendances quelques districts au nord et à l'ouest du lac de Constance. Il est borné au nord par le grand-duché de Hesse et la Bavière ; à l'est, il est limitrophe avec le royaume de Wurtemberg et les principautés de Hohenzollern, qui limitent aussi, au sud-est, ses contours irréguliers.
Sa superficie est évaluée, en milles carrés géographiques allemands, à 27 milles 850 millièmes, c'est-à-dire à 15,616 kilomètres carrés.
La population de ce grand-duché s'accroît rapidement; elle dépassait à peine un million d'âmes au commencement du siècle; en 1852 elle était de 1,356,943 habitants. Nous ne dirons rien des anciens peuples qui occupaient son territoire ; ce sont ces mêmes Alemanni dont nous avons parlé dans notre description du Wurtemberg.
ASPECT PHYSIQUE. — Cette principauté renferme les défilés et les passages les plus importants, soit pour couvrir la ligne du Rhin, soit pour pénétrer en Souabe. La cime la plus élevée est cel" du Feldberg, qui atteint 1,425 mètres au-dessus du nivean de U mer; la moins importante est celle du Winterhauch, qui ne dépasse pas 546 mètres. Le Storenberg, le Roskopf, le Polie et
Todnauerberg sont célèbres dans les fastes de la stratégie par la belle retraite du général Moreau en 1796. A l'extrémité septentrionale du duché s'étendent le Herberg et une partie de l'Odenwald, chaînes de montagnes dont le Kniebis est l'un des points les plus élevés.
Les montagnes de la Forêt-Noire les plus rapprochées du Rhin sont formées de roches granitiques; celles qui se dirigent vers le Wurtemberg sont composées de grès et d'autres roches qui caractérisent la formation intermédiaire; la chaîne qui s'étend au nord jusque sur les bords du Necker appartient à la même époque.
A l'exception de ce grand lac appelé en allemand Bodensee, mais qui figure sur nos cartes sous le nom de lac de Constance, il n'existe sur le territoire du grand-duché que de grands étangs, que l'on appelle improprement lacs ; ils sont presque tous situés dans la région la plus montagneuse et à une hauteur assez considérable : celui de Schluch est sur le Feldberg, à 762 mètres de hauteur; celui d'Echner et plusieurs autres sont élevés de 488 mètres au-dessus du niveau de la mer.
CLIMAT. — Dans les parties basses de ce pays, c'est-à-dire près des bords du Rhin, du Mein et du Necker, la température est douce et agréable ; mais dans les montagnes, et particulièrement dans la chaîne du Schwarïfrald, le froid est très - rigoureux pendant l'hiver, et pendant l'été l'air y est toujours très-vif; il est même rare que la neige fonde dane la région la plus élevée.
RICHESSES MÎWEBALES. — Les richesses minérales y sont peu considérables, mais variées ; on exploite annuellement près de 12,000 quintaiiï de fer, 700 de plomb, 500 mates d'argent, du cuivre, du zinc, de l'arsenic, de l'alun, du soufre, delà houille et près de 4,000 quintaux de sel. Les terres propres à la fabrication des poteries fines et grossières, les ardoises, le marbre et l'albâtre y sont commüos; l'or même est d'un produit que nous ne devons pas passer sous silence. C'est sur les bords du Rhin qu'on le recueille; les terrains d'alluvion que traverse le fleuve en contiennent des parcelles; 120 individus s'occupent de le rechercher, mais la valeur de be métal ne s'élève par an qu'à la modique somme de 15,000 francs. Aussi cette industrie tend-elle à décroître de jour en jour.
DIVISION DU SOL. — PRODUCTIONS NATURELLES. Les forêts du grand-duché de Bade occupent une superficie de 790,000 hectares i les terres arables en forment 650,000, les prairies 167,500, et les vignes 37,000. On en compte 104,500 en terrains incultes, et 75,000 appartenant aux communes. Au-dessous de la région des forêts, les parties élevées fournissent avec peine au cultivateur quelques chétives avoines et des pommes de terre ; les cerises n'y mûrissent qu'en septembre ; mais descendez dans les vallées, le spectacle change : la vigne, l'amandier, le châtaignier, les arbres fruitiers les plus variés, les céréales, le chanvre, le lin et les plantes les plus utiles à l'homme croissent avec facilité, et contribuent à répandre chez le cultivateur la richesse et l'abondance.
Le pays abonde en divers produits dont l'importance et la variété sont dues à sa constitution physique. Nous ne parlerons pas des nombreux animaux qui peuplent les forêts, du gibier dont les champs sont remplis, et du produit-que procure leur chasse. La pêche du Rhin et du lac de Constance forme un revenu assez considérable; les saumons paraissent fréquemment dans le fleuve; il n'est point de table bien servie qui ne réserve une place d'honneur à la carpe du Rhin ; on en prend souvent qui pèsent jusqu'à 20 kilogrammes; mais l'un des poissons les plus utiles et qui cependant est moins connu que ceux que nous venons de nommer, c'est l'ablette. L'écaille de ce poisson blanc est un objet de commerce considérable : on l'exporte en Saxe, en France et en Suisse, où elle est employée à donner à la perle de verre un éclat qui le dispute à celui de la perle fine.
DIVISIONS POLITIQUES. — Le grand-duché est partagé, au point de vue politique et administratif, en quatre cercles : ceux du haut Rhin, du Rhin moyen, du bas Rhin et du Lac. Il renferme 110 villes, 36 bourgs, 1,688 villages et hameaux, et 154,710 habitations estimées au plus bas, il y a quelques années, à environ 350 millions de florins par la caisse générale contre l'incendie.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Nous allons maintenant parcourir les lieux dignes de quelque Ilttention.
Wurtheim, ville située au cohfluent du Mein et du Tauber, est une possession médiate du prince de Lowenstein-Wertheim, sous la souveraineté du grand-duc de Bade. Elle est entourée de murailles et renferme 2 châteaux et 4,000 habitants, qui s'enrichissent par la vente des produits de leurs tanneries, de leurs distilleries, de leurs vins, et par un commerce de transit qu'alimente le cours -du Mein. Mahlieim oti Mannheim, importante station de chemin de fer tête de, ligne du grand-duché de Bade, çt l'une de ses ptinci-
pales villes. Elle a trois fois éprouvé en un siècle et demi les funestes effets du fléau de la guerre. D'abord elle s'éleva tout à coup en 1606, par les soins de Frédéric IV, comte palatin du Rhin, et de Frédéric V, son fils, du rang de simple village à celui de place de guerre : ce fut la cause de ses malheurs. Dévastée en 1622 par les Bavarois, elle avait à peine réparé ses maux, qu'elle fut comprise dans la destruction du Palatinat, dont l'arrêt barbare déshonore à jamais le ministère de Louvois. On dit que la fureur des soldats de Louis XIV alla jusqu'à profaner dans ses murs les tombeaux des électeurs palatins. Rebâtie par ses princes, elle fut bombardée en 1795 par l'armée française, et plusieurs de ses édifices devinrent la proie des flammes. Cependant sa situation avantageuse au confluent du Necker et du Rhin, l'activité de son commerce, l'importance de ses fabriques de toile, d'étoffes de laine, et de bijouterie fausse en un alliage connu sous le nom d'or de Manheim, ont puissamment contribué à lui conserver l'importance dont elle jouit encore. Ses remparts, détruits par les Français, ont été convertis en jardins qui contribuent à l'agrément de ses environs tout à fait pittoresques.
Sa population s'élève à 24,316 habitants; ses rues sont droites et bien alignées. On y remarque 6 places publiques, 2 belles fontaines, un château ducal assez bien conservé, Un vaste bâtiment orné de portiques dans lequel se tiennent la bourse et la douane; 7 églises, dont la plus belle fait partie de l'ancienne maison des jésuites, qui atteste la richesse et la splendeur passées de ceux-ci. L'observatoire, enrichi de tous les instruments utiles aux observations astronomiques, est digne d'une ville de premier ordre ; sa tour a 36 mètres d'élévation. La ville possède un amphithéâtre d'anatomie. des écoles de commerce, dé dessin et de musique, une école militaire, une de chirurgie et une de Nages-femmes, un jardin botanique, Un cabinet d'histoire naturelle) une bibliothèque de 60,000 volumes dans une des salles ilu château , ainsi qu'une galerie de tableaux et une collection d'antiquités. Nous ne parlerons point de son gymnase, qui occupe la maison des jésuites ; mais nous devons dire qu'il s'y trouve une académie de peinture et de sculpture, une société littéraire et une société météorologique, et qu'elle est le siège de la cour suprême du grand-duché.
A 45 kilomètres au sud-est de Manheim, en remontant le Necker, on voit sur ses bords et adossée à une montagne la ville universitaire d'Ihidelberg, grande station du chemin de fer badois, dont la fondation remonte au douzième siècle ; elle est assez bien bâtie. On y admire la place Charles, et l'on ne peut voir sans intérêt avec quel soin sont tenus les divers établissements d'instruction qui concourent, avec le jardin botanique, les cabinets de physique, de minéralogie, de chimie, et les bibliothèques, à attirer chaque année dans cette ville, forte de 16,000 habitants, près de 700 étudiants.
Son université est l'une des plus anciennes de l'Allemagne ; elle date de l'an 1386. Au seizième siècle, cette ville était le rendez-vous des savants les plus distingués : c'est dans ses murs que se retira la célèbre Olfmpia-Fulvitt Morata, qui s'illustra par ses mœurs et sa piété autant que par la supériorité de son savoir et de son esprit.
Réfugiée en Allemagne, parce qu'elle avait embrassé avec chaleur la cause du protestantisme, elle y occupa une chaire de langues anciennes, et mourut à Heidelberg à l'âge de 29 ans, après avoir passé, si jeune encore, pour un prodige d'érudition. Ses restes reposent dans l'église Saint-Pierre; dans celle du Saint-Esprit, on voit les tombeaux de plusieurs électeurs. Parmi les savants auxquels cette ville donna le jour, on doit citer François Junius, auteur de plusieurs ouvrages estimés sur les langues anciennes du Nord et sur les antiquités; le littérateur Gérard Voss ouVossius, l'antiquaire Laurent Beger et le théologien Alting.
La montagne qui s'élève auprès d'Heidelberg est dominée par le château, dont les caves renferment le fameux tonneau qui remplaça celui qui fut détruit pendant la guerre de trente ans, ou plutôt c'est le second qui fut construit après celui-là: ainsi, en 1664, l'électeur palatin Charles-Louis en fit élever un qui surpassa le premier en capacité; réparé en 1728, il fut remplacé en 1751 par un troisième plus grand et peut-être plus magnifique que les deux autres : il fut construit par l'électeur Charles-Théodore. Long de 10 mètres, et d'un diamètre de plus de 7 mètres, il contient 284,000 litres; on y monte par un escalier de 50 marches, et l'on évalue à 12 milliers le poids du fer employé à le cercler.
On ne peut rien voir de plus magnifique que ce qui reste du vaste château d'Heidelberg ; que devait-il être cependant lorsque Turenne, servile exécuteur des ordres de son maître, en fit la plus importante des ruines modernes de l'Allemagne? C'est dans ce château que furent établies les premières serres que l'on vit en Europe. De son balcon, on jouit d'une vue magnifique. De ce point élevé, l'œil se promène avec plaisir sur l'une des plus riches contrées de l'ancien Palatinat, et sur les vignobles estimés d'Heidelberg et de Weinlteim, petite ville de 5,000 habitants, située près des frontières du grand-durlié de Hesse, à l'entrée d'une jolie vallée bien boisée.
Schwetzingen, à 9 kilomètres d'Heidelberg, est un bourg d'environ 2,500 habitants, remarquable par son vaste château ducal, et surtout par son jardin botanique, l'un des plus riches de l'Europe, et peut-être même le plus riche en plantes alpines.
Philippsbourg, qui se nommait anciennement Udenheim, et qui dut son nouveau nom à Philippe-Christophe, évêque de Spire, le fondateur de ses fortifications, vers le commencement de la guerre de trente ans, n'est plus défendue par ses remparts, qui tombèrent en 1644 au pouvoir de Louis de Bourbon, et quarante ans plus tard entre les mains de Louis, Dauphin de France. Restituée à son évèque, elle ouvrit ses portes aux Français en 1734 et en 1799, et c'est depuis 1802 qu'elle appartient au pays de Bade. Dans la jolie ville de Bruchsal, peuplée de 6,000 âmes, on remarque le château de l'ancien prince évèque de Spire; ses jardins, bien dessinés, servent de promenade publique. Elle est au point de jonction du chemin de fer badois avec la ligne du Wurtemberg et de la Bavière.
Durlach ou Dourlach, situé dans une plaine fertile sur le Pfinz, a un ancien château et 4 à 5,000 habitants. C'est une station du chemin de fer de Carlsruhe à Heidelberg.
Carlsfuhe, que l'on prononce Carlsrouhe, est la capitale du grand - duché de Bàde; son sol est élevé de 185 mètres au-dessus du niveau de la mer; elle est bâtie avec beaucoup de régularité, et toutes ses rues alignées partent en face du château ducal, en divergeant comme les branches d'un éventail ; cette singulière disposition forme un très-beau coup d'œil le soir, à la clarté des réverbères.
La demeure du prince est d'une élégante simplicité ; ce qui la rend surtout agréable, ce sont les jardins et la forêt qui s'étend dans la partie opposée à celle qu'occupe la ville. Le château renferme une belle bibliothèque et de riches collections. D'autres collections, et surtout le musée , rendent la ville intéressante sous ce rapport. Les édifices qui l'embellissent sont nombreux : on y compte 13 palais particuliers, et de nouvelles constructions qui s'élèvent chaque jour contribuent à l'embellir encore. L'église évangélique et l'église catholique passent pour deux chefs-d'œuvre du célèbre architecte Weinbrenner. La salle de spectacle, ou le théâtre de la cour, construit dans le goût romain, est remarquable ; l'hôtel de ville est un édifice nouvellement construit; les portes de Durlach et d'Ettlingen sont d'une belle architecture. Le lycée, l'école militaire, l'école royale, l'institut des sourds-muets, l'école vétérinaire, l'école normale protestante et la nouvelle école polytechnique sont les principaux établissements d'instruction de cette ville, qui en renferme un grand nombre. La dernière surtout mérite de fixer l'attention : fondée en 1825, elle diffère de celle de France sous plusieurs rapports, principalement par l'âge d'admission, fixé à 13 ans; elle renferme 150 élèves destinés à divers services publics, principalement aux ponts et chaussées, aux mines et au corps des ingénieurs géographes. Carlsruhe, en un mot, ville de plaisir, fière de son élégance, riche de ses établissements utiles, peuplée de 25,000 individus, se dédommage du peu d'importance de son commerce par son industrie dans la fabrication des objets de luxe : elle est renommée pour sa bijouterie, son horlogerie, ses meubles et ses voitures.Reuchlin, l'un des hommes les plus remarquables du seizième siècle par son érudition et par ses idées sur la réformation de la religion chrétienne, s'efforça de prouver que Pforzheim, sa ville natale , avait été fondée par le Troyen Phorcy ; d'autres savants de la même époque -ont prétendu que cette ville s'appelait autrefois Orcynheim, et qu'elle devait son nom à cette vaste forêt dont parle Jules César, et que les anciens connaissaient sous le nom de Sylva Hercynia ou Orcynia. Ces étymologies forcées ne prouvent point, comme quelques-uns l'ont cru, que Pforzheim ait dû porter, sous la domination romaine, le nom de Porta Hercynioe; il est très-vraisemblable , au contraire, que cette ville n'est pas fort ancienne.
Elle est située au pied de la Forêt-Noire, au confluent de l'Enz et de'la Nagold; sa population est de 8,000 âmes. Elle renferme une maison de correction et une maison d'orphelins ; on y confectionne beaucoup d'objets de bijouterie et d'horlogerie; on y fabrique des draps, des maroquins et des produits chimiques ; mais son commerce, qui est d'une grande importance, consiste principalement en blé, en huile, en vins, en bestiaux et en bois de construction.
Entre Durlach, jadis la résidence des margraves de Bade, et Ettlingen, siège d'une cour criminelle, on a découvert en 1802 les restes d'une maison de plaisance romaine, les débris d'une chaussée et un monument qui paraît avoir été consacré à Neptune. Sur le bord dé la Murg, petite rivière de 70 kilomètres de cours, qui prend sa source dans la Forêt-Noire, et qui sert à transporter jusqu'au Rhin les bois de cette région montagneuse, nous voyons Rastadt, ville célèbre par plusieurs congrès et par l'assassinat des députés de la république française. Sa population est de 6,500 habitants; son château ducal, surmonté d'une statue colossale dorée qui représente un Jupiter armé dé la foudre, est remarquable par la belle vue dont on jouit du haut de son belvédère et par les trophées turcs et les collections scientifiques qu'il renferme. Pour éviter des répétitions, nous ne dirons rien de son église, de son gymnase et du séminaire des maîtres d'école ; mais nous ne devons point oublier dé dire que son commerce est important, et que ses fabriques d'acier et de tabatières en pâte de papier ont de la réfutation en Alle- baagne, aussi bien que ses voitures et ses armes a feu. Elle a une station sur le grand chemin de fer badois.
Bade ou Baden-Baden, à 9 kilomètres de Rastadt, doit son nom
à ses sources minérales-et à ses- bains, connus et fréqileutésdú temps des Romains, et qui chaque année réunissent 6 à 7,000. étrangei:s, Les antiquités trouvées dans ses environs forment une collection intéressante ; l'ancien collège des jésuites est l'édifice le plus remarquable de cette ville de 5,866 habitants, si l'on en excepte teiièefois les ruines du vieux château , que fou range avec raison parmi l'es plus belles et les plus pittoresques de l'Allemagne. Il existe- ckanâ cette ville une école normale pour les catholiques, établie sur le même plan que celle- de Carlsruhe pour les protestants. Elle est unie par un embranchement a la grande ligne badoise.. On doit visiter à Bade, dans l' établissement des bains, la maison de conversation, et la Trinkhalle. Les principales promenades et excursions que l'oti peut faire dans les environs sont celles : du vieux Château et des Rochers, du chemin de l'Echo et de l'image de Keller, de l'allée, des Soupirs, la chaire du Diable, la gorge au Loup et l'Ebersteinburg ; ensuite, à une plus grande distance de la ville, le Hœstig, le Mercure, Lichtenthal, Gunzenbach, le château d'Eberstein et la cascade de Geroldsau , etc., etc. La Maison de chasse est aussi un rendezvous de promenade. Elle est construite sur une hauteur de 270 mètres, d'où l'on jouit d'une belle vue qui s'étend jusqu'à Strasbourg.
De Bade à Offenbourg, si l'on passe par le village de Salzbach, on ne remarquera pas sans émotion le vieux noyer au pied duquel le grand Turenne expira, le 27 juillet 1675. Le 27 juillet 1829, le gouvernement a fait inaugurer à la mémoire de ce guerrier célèbre un monument en granit. Le courage et la gloire n'ont point de patrie, tous les hommes savent les apprécier : c'est avec un respect qui ferait croire que Turenne est mort dans les dernières campagnes d'Allemagne, que le vieil invalide allemand préposé à la garde de ce lieu vous montre le boulet qui trancha les jours du grand héros.
Offenbourg, petite ville entourée de murs, avec une station du chemin de fer, et peuplée de 4,000 âmes, possède un territoire riche en vignobles. Laltr, station du chemin de fer, qui renferme aujourd'hui 5,000 habitants, est une des cités les plus industrielles du duché. Quelques-unes de ces maisons se font remarquer par de belles façades.
Au pied des montagnes de la Foret-Noire, Fribourg ou Freybourg, importante station du grand chemin de fer badois, s'élève sur les bords du Treizam ; elle renferme 15,000 habitants, un gymnase et une administration supérieure des forêts. Son université célèbre, fondée en 1456, ses collections scientifiques, sa société de statistique et d'antiquités et son commerce la placent au rang des villes les plus importantes du grand-duché; on y voit de belles maisons et quatre églises, dont une, appelée Munster, est remarquable par sa belle architecture gothique et sa tour, l'une deli-plus hautes de l'Europe. Brisach ou Vieux-Brisach, que les Allemands appellent Alt-Breisach, passe pour avoir été fondée par Drususj elle serait alors l'ancienne capitale des Brisagavi, petit peuple qui dépendait des Alemanni. Elle était autrefois célèbre par ses fortifications, que détruisit Marie-Thérèse. Un mur l'environne encore.
Elle fut presque réduite en cendres, les 15 et 16 septembre 1793, par le feu des Français, dirigé de la rive opposée du Rhin. Ce fleuve, qui l'arrose, n'a point favorisé le commerce chez ses 2,500 habitants ; la fabrication du tabac est sa principale industrie.
La partie méridionale du grand-duché de Bade est celle qui renferme le moins de villes dignes d'être décrites. Les montagnes de la Forêt-Noire sont en effet peu convenables à l'établissement de quelque cité un peu importante. Nous ne pourrons citer que IVil-1 lingen et Constance. Mais avant de traverser la crête du Schwarzwald, nous remarquerons au pied du mont Blauen le village de Badenweiler, renommé par ses eaux thermales depuis plus de vingt siècles : il paraît que les Romains y avaient fondé un établissement considérable, autant qu'on en peut juger par les vestiges de leurs ouvrages, qui ont environ 72 mètres de longueur sur 25 de largeur.
Vers les frontières du royaume de Wurtemberg , on remarque, dans une vallée élevée et sur les bords du Brig, IVillingen, peuplée de 4,000 habitants; le cercle dont elle dépend ne renferme qu'uno seule ville un peu plus importante, c'est Constance ou Constanz.
qui donne son nom au lac sur les bords duquel elle s'étend. Cette ville est célèbre par le concile de 1451, dont le résultat fut le martyre de deux des plus zélés précurseurs de la réformation, Jean Huss et Jérôme de Prague, qui, indignés des désordres qui affligeaient l'Église, préférèrent être brûlés vifs que de nier la nécessité d'abolir les abus qu'ils signalaient dans le culte.
Les cicerone de Constance ne manquent point de vous faire voir, dans le faubourg de Bruel, la place où Jean Huss fut brûlé5 et, dans l'ancien couvent des franciscains, la tour qui lui servit de prison. Son supplice fut suivi de celui de Jérôme de Prague, qui partageait ses opinions. On rapporte que le bourreau voulant allumer le bûcher par derrière, il lui dit : « Mettez le feu par devant; si je l'avais craint, je pouvais facilement m'y soustraire. »
Constance, ville ancienne, autrefois impériale et libre, est assez bien bâtie, mais elle est triste et peu peuplée pour son étendue ; elle ne renferme que 5,600 habitants ; elle a trois faubourgs : l'un appelé Kreuslingen, l'autre le Paradis, et le troisième Petershausen, sur la rive droite du Rhin, avec lequel elle communique par un
pont de bois. Des fortifications la défendent. Le château ducal, le palais épiscopal et la cathédrale, bâtiments gothiques, sont ses principaux édifices. Du haut du clocher de l'église, on jouit d'une vue magnifique : en se tournant vers le nord , on voit à sa droite s'étendre, à 40 kilomètres à l'est, la principale partie du lac de Constance ( Bodensee ) ; devant soi se prolonge l'un de ses deux bras, appelé lac d'Uberlingen ( Uberîingensee) , et sur la gauche l'autre bras, nommé lac Inférieur ( Untersee), au milieu duquel s'élève la grande île de Reichenau. Au sud s'étendent les montagnes de l'Appen zen sur la rive gauche du Rhin, et sur la droite celles du Vorarlerg. A l'entrée de l'église, une plaque indique la place où Jean Huss entendit son arrêt de mort; mais dans la nef il est représenté de grandeur colossale, soutenant la chaire et faisant de hideuses contorsions. L'ancien couvent des dominicains, où se tint le fameux concile qui dura depuis 1414 jusqu'en 1418, porte aujourd'hui le nom de Kaufhaus : c'est un édifice où se tient le marché aux toiles.
On y montre les sièges de l'empereur et du pape , et le cachot de Jean Huss. Ce concile, dans lequel ce réformateur et son disciple Jérôme de Prague furent condamnés à mort, dégrada le pape Jean XXIII, déposa Grégoire XII et Benoît XIII, et excommunia Frédéric d'Autriche pour avoir favorisé l'évasion du pape Jean. Le lycée, l'école' normale et l'hôpital de Constance sont bien entretenus. Quoique cette ville ne soit pas très-commerçante , elle possède une bourse. Ses établissements industriels consistent en fabriques de toiles peintes ; c'est la principale branche de son commerce, auquel elle joint les grains, les bois et les vins.
GOUVERNEMENT. — Le gouvernement du grand-duché est une monarchie constitutionnelle. La constitution qui régit le grandduché date de 1818. Le pouvoir est héréditaire dans la famille du grand-duc ; ses ministres sont responsables ; tous les citoyens sont admissibles aux emplois publics ; les impôts sont votés pour deux ans par les deux chambres; le grand-duc partage avec elles le droit de fixer les impôts et de prendre des mesures propres à assurer la prospérité du pays.
La première chambre se compose des princes de la famille grandducale, de la haute noblesse, d'un évèque catholique, d'un prélat protestant, de huit députés de la petite noblesse, de deux députés des universités, et de ceux que le grand-duc veut bien y appeler.
La seconde chambre se compose de 63 membres, députés des villes et bailliages, nommés sans distinction de castes par voie de double élection.
Le grand-duché de Bade tient le septième rang dans la Confédération Germanique ; il a une voix dans la diète ordinaire et trois voix dans l'assemblée générale. Son contingent fédéral est de 15,000 hommes, et sa contribution d'environ 115,000 francs.
RELIGION. — La maison régnante de Bade est attachée à la confession d'Augsbourg, mais près des deux tiers de la population suivent le rite catholique (905,143 âmes) ; le reste est partagé entre la foi luthérienne (432,184) et le culte réformé: ceux de cette dernière communion sont quatre fois moins considérables que les luthériens. On y compte aussi des mennonites (1,421) et des juifs (23,547). Il existe encore dans le grand-duché plusieurs couvents de femmes, mais ils sont considérés comme faisant partie des maisons d'éducation. Depuis 1811, personne ne peut être appelé à prononcer des vœux dans ces établissements avant l'âge de 21 ans accomplis; le terme de ces vœux est fixé à 3 ans, après lesquels chaque religieuse a le droit de rentrer dans le monde et de participer aux charges et aux avantages communs. Le silence et l'austérité , et en général toutes les obligations attachées à certaines règles des différents ordres religieux, ont été abolis depuis cette époque.
LANGUE ET DIALECTE. — Les habitants parlent un dialecte dur qui paraît être le résultat du mélange de l'ancien allemand et du slave, et qui cependant diffère dans plusieurs cercles, principalement aux deux extrémités de la contrée; ainsi l'on reconnaît facilement à sa prononciation le peuple du Schwarzwald et celui de l'Odenwald.
LÉGISLATION. — INSTRUCTION. — Le code français, longtemps en vigueur, a été remplacé par le rétablissement des lois romaines et des anciennes coutumes en vigueur dans le duché avant le protectorat de Napoléon jusqu'à la publication d'un nouveau code badois en rapport avec les mœurs des habitants. Le seul bienfait que ce pays ait conservé de ses relations avec la France est l'établissement d'un nouveau système de mesures basé sur ladivision décimale.
Le gouvernement badois favorise l'instruction par de nombreux établissements dont les bienfaits s'étendent de plus en plus chaque jour. Il entretient 2 universités, celle d'Heidelberg et celle de Freybourg ; il a fondé 4 lycées, ceux de Constance, de Bade, de Carlsruhe et de Manheim ; et dans les principales villes 10 gymnases et 15 écoles, dont 7 où l'on enseigne le latin; il a enfin encouragé la fondation de plusieurs institutions spéciales, telles que celle des sourds-muets, celle des élèves forestiers, celle des architectes, les académies de commerce de Manheim et de Carlsruhe, et il a fondé
dans cette dernière ville le séminaire des pasteurs protestants, et à Mersebourg un séminaire catholique.
Sa sollicitude pour l'instruction primaire n'est pas moins grande.
Chacune des communes renferme des écoles pour les deux sexes ; et les plus importantes, des classes d'adultes et de perfectionnement.
Enfin, il y a dans quelques villes des écoles professionnelles pour les jeunes ouvriers.
INDUSTRIE. — La partie de la Forêt-Noire comprise dans le grand-duché de Bade rivalise, pour la fabrication du kirschenwasser, avec celle qui appartient au Wurtemberg. Sur les bords du Rhin et du Mein, on cite plusieurs vignobles qui produisent des vins généreux et pleins de feu : tel est entre autres celui d'Affenthal, aux environs de Bade. Nous ne prononcerons pas entre ceux de Steinbach, de Lautenbach, de Hamsbach , d'Ordenbourg ; nous ne dirons pas, comme quelques Badois, que sur les bords du lac de Constance ce sont les coteaux de la Bourgogne sous le ciel de la Suisse : il nous suffira de faire remarquer que ces vins sont une source de richesse pour le pays, puisque dans certaines années on en a exporté pour la valeur de plus de 2,000,000 de florins (le florin du duché de Bade vaut 2 fr. 15 cent.). C'est dans les environs de Badcnweiler que l'on récolte le vin de Margrave (Markgràjler ), regardé comme le meilleur de tout le grand - duché.
A l'exception des chevaux, la plupart des animaux domestiques sont de belle race et assez nombreux.
Dans la plus grande partie du pays, les habitants s'occupent de la filature du lin et du chanvre, ainsi que de la fabrication de divers tissus. Le territoire d'Ettenheim exporte annuellement pour 30,000 florins de chanvre brut ou filé; dans celui de Pforzheim, on fabrique pour plus de 1,700,000 florins de quincaillerie. Dans la Forêt-Noire, on fait beaucoup de petits ouvrages en bois et en paille. Depuis l'établissement des lignes de chemins qui traversent le pays, cette contrée tire un grand produit de ses fabriques d'horloges en bois, de ses cuillers en fer étamé, et d'autres branches d'industrie qu'il serait trop long de détailler; 6 à 700 horlogers y fabriquent annuellement plus de 187,000 horloges de bois, évaluées à la somme de 562,000 florins. Pour donner une idée du mouvement industriel qui règne dans le grand-duché, il suffit de dire qu'il y a quelques années encore on y comptait près de 75,000 ouvriers en différents genres.
COMMERCE. — Le commerce de transit est très-actif; les exportations sont considérables : elles consistent principalement en bois de construction qu'on expédie pour la Suisse, la France et les Pays-Bas. Nous avons déjà parlé des vins et du chanvre, ajoutons-y le blé , les fruits secs, le kirschenwasser, le tabac, des eaux minérales et divers objets de quincaillerie, nous aurons donné une idée suffisante de la richesse commerciale du pays, qui reçoit en échange des vins de France, du sel, des denrées coloniales, des chevaux et des tissus de luxe.
CHEMINS DE FER. — Le grand-duché de Bade est un des États de l'Allemagne les plus avancés sous le rapport des communications par les chemins de fer. Une grande ligne parallèle au Rhin et au chemin de fer français de l'Alsace le traverse dans toute sa longueur, de Leophôhe près de Bâle à Manheim ; elle s'embranche sur la ligne du Necker au Mein, sur celle de Metz à Nancy prolongée jusqu'à Manheim, et sur la ligne de Stuttgart à Munich. Un tronçon de quelques kilomètres seulement l'unit à Kehl en face de Strasbourg. Elle traverse les principales villes du grand-duché.
FINANCES. — "Le budget des recettes dans le grand-duché pour 1855 a été évalué à 29,912,779 florins, qui, si l'on en déduit 9,736,218 florins pour frais d'administration, se réduisent à 20,176,561 florins, c'est-à-dire 43,379,606 francs. Les dépenses atteignent 20,211,279 florins ou 43,454,150 francs; mais il faut y ajouter 2,086,173 florins de dépenses extraordinaires, ou 4,485,272 francs.
Tel est le budget général du grand-duché; mais outre celui-ci, il en existe encore de particuliers : celui des postes, celui des chemins de fer, celui des bains. Au 1er janvier 1855, la dette publique s'élevait à 35 millions de florins ou environ 96 millions de francs, sans compter la dette des chemins de fer, qui dépassait 100 millions de francs.
FORCES MILITAIRES. — L'armée du grand-duché de Bade se recrute par la voie de la conscription : tous les citoyens y sont soumis. La durée du service est de six années. Le commandement appartient à un comité spécial ; les officiers sortent de l'école militaire de Carlsruhe, En temps de paix il n'y a guère que le quart de l'effectif fédéral sous les armes, c'est-à-dire 4,000 hommes. Il y a pour tout le contingent des exercices annuels auxquels les militaires en congé sont tenus d'assister.
Nous avons dit que le contingent fédéral était de 15,000 hommes; il peut en temps de guerre être facilement porté à 20,000 hommes.
Ils font partie de la deuxième division du VIIIe corps.
HESSE-DARMSTADT.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. — Le grand-duché de Hesse-Darmstadt est formé de deux portions séparées par le territoire de Francfort-sur-Ie-Mein et la province hessoise de Hanau. La partie septentrionale est limitée à l'ouest par le duché de Nassau et la province prussienne de Westphalie ; au nord, à l'est et au sud, par la Hesse-Cassel ou Hesse-Êlectorale.
La seconde est bornée au nord par la principauté de Nassau, le territoire de Francfort et la Hesse-Cassel ; à l'est, par la Bavière; au sud, par le grand-duché de Bade, et à l'ouest par les provinces rhénanes bavaroises et la régence prussienne de Coblentz. La partie septentrionale a 945 kilomètres de long sur 50 de large ; l'autre, 95 sur 65. Outre ces deux principales parties, la Hesse-Darmstadt possède neuf autres petits territoires, dont trois, ceux de Eimelrode, Hôringhausen et Vôhl, sont enclavés dans la principauté de Watdenk; trois autres, ceux de Finkenhof, Helmhof et Wimpfen, se troaventdans le grand-duché de Bade, et les trois dernières, moins considérables encore, sont entre le duché de Nassau, la Hesse-Hombourg, la Hesse-Cassel et le territoire de Francfort. La superficie du grand-duché est de 152 milles carrés géographiques allemands 83 millièmes, ou 8,437 kilomètres carrés. On évaluait sa population en 1853 à 854,314 habitants ; sur ce nombre il y avait 409,658 luthériens, 217,798 catholiques, 36,520 réformés, et 28,734 israélites.
ASPECT PHYSIQUE. — Dans la Hesse septentrionale s'étend la chaîne basaltique du Vogelsberg, couverte de forêts, et dont les sommtts, aigus comme ceux du Peldbers, ne dépassent point 850 mètres. Sur les bords du Rhin, c'est-à-dire dans la contrée méridionale, le Malclenberg s'élève à 1,200 mètres au-dessus du niveau de la mer. Les montagnes sont assez riches en cuivre, en plomb et surtout en fer. Les produits annuels du cuivre sont d'environ 1,000 quintaux, et ceux du fer, de quinze fois autant. On y exploite aussi beaucoup de pierres de taille et d'ardoises ; mais les houillères et les salines ne suffisent pas à la consommation.
Dans l'intérieur de la partie méridionale, les montagnes font place à des plaines qui se prolongent depuis l'Odenwald jusqu'à la rive droite du Rhin ; ce fleuve y reçoit le Mein sur sa droite, et la Nahe sur.sa gauche. Dans la partie septentrionale, les principaux cours d'eau sont la Lahn, la Nidda et le Wetter, affluent de celle-ci.
PRODUCTIONS, INDUSTRIE. - La plus fertile des deux contrées est celle qui borde le Rhin. Dans presque toute cette partie de la Hesse, les coteaux sont garnis de riches vignobles, dont les plus estimés sont ceux de Bodenheim, Bingen, Dienheim, Gaubischofsbeim, Kostheim, Laubenheim, Mayence, Nackenheim, Nierstein, Oppenheim et Worms. Grosswinterheim, Heidesheim, Niederingelheun et Oberringelheim produisent de très-bons vins rouges ; les plaines et les vallées sont couvertes de beaux vergers et de champs d'une grande fécondité. La partie montagneuse présente seule quelques exceptions à cet ensemble général, mais elle offre en compensation des richesses minérales assez importantes ; d'ailleurs le peuplé y est plus industrieux que dans les pays de plaines, quoique, en général, le Hessois paraisse être très-laborieux et doué d'une grande activité. Les arrondissements agricoles exportent du blé, des vins, des fruits secs, des bêtes à cornes et des brebis ; ceux des pays de montagnes livrent au commerce diverses étoffes de laine, des toiles de coton et de lin, des cuirs, des métaux et des objets de quincaillerie. Les avantages que l'industrie retire de la fécondité et de la richesse du sol sont encore encouragés par un gouvernement sage et éclairé, qui s'est empressé d'adopter en 1820 le système représentatif.
DIVISIONS POLITIQUES. — Le grand-duché est divisé en trois provinces : celle de Starkenbourg, dont les principales villes sont Darmstadt et Offenbach; celle de la haute Hesse, ayant pour cheflieu Giessen, et comprenant huit villes de 2,000 à 3,000 âmes ; enfin celle du Rhin, dont le chef-lieu est Mayence, et dont les autres villes les plus importantes sont Worms et Bingen. Nous commencerons notre description par la haute Hesse.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Giessen, ville de 9,000 habitants, est située au confluent de Wieseck et de la Lahn. Le chemin de fer de Francfort à Cassel la domine du haut d'un énorme remblai. C'est une ancienne place de guerre, dont les remparts ont été convertis en promenades; elle est célèbre dans la Hesse par son université, fondée en 1607, et que fréquentent annuellement 500 étudiants. Deux bibliothèques publiques, un observatoire, des jardins botaniques, où l'on enseigne tout ce qui a rapport à l'économie rurale et forestière, une école d'accouchement, des écoles
élémentaires gratuites, des sociétés savantes et littéraires, prouvent que les arts, comme les sciences utiles, y sont cultivée. On y compte plusieurs manufactures de lainages et de cotonnades. Le village a'Oberklie, situé dans ses environs, a donné naissance à Hert, célèbre jurisconsulte, plus connu par son nom latin de Hertius, auteur de divers ouvrages estimés et de plusieurs mémoires sur l'histoire et la géographie de l'ancienne Germanie.
Les villes les plus importantes de la province, après Giessen, sont Lauterbadr., qui n'a que 3,400 habitants; AUfeld, qui fabrique beaucoup de draps communs, et qui a un château, deux églises et un hospice des orphelins; Schlitz, qui fait un grand commerce de cervelas et de saucisses ; Schotten, sa rivale dans la même branche d'industrie. Gernsheim, moins peuplée, renferme un bel hôtel de ville; Gruningen, qui n'est presque qu'un village, fait partie des possessions du prince de Solms-Braunfels, dont la famille l'engagea a la Hesse, en 1755, pour sûreté d'un prêt.
Darmstadt, la capitale, sur le chemin de fer de Carlsruhe à Francfort et à Cassel, n'est point la ville la plus considérable du grand-duché, depuis que Mayence fait partie de cette principauté.
Elle renferme 32,000 habitants; la petite rivière de Darm lui a donné son nom. Darmstadt est divisée en vieille et nouvelle ville : la première, entourée d'une antique muraille, est noire, triste, et ne renferme rien de remarquable ; dans la seconde, qui est assez bien bâtie, se trouvent le château grand-ducal; le musée, contenant une galerie de tableaux ; une salle remplie de statues et d'armures antiques, et un cabinet d'histoire naturelle; le gymnase grand-ducal, qui existe depuis plus de deux siècles; le séminaire destiné à former des instituteurs primaires ; l'école royale , fondée en 1826; l'Académie de dessin pour les militaires; l'école des arts et métiers, et une bibliothèque de plus de 110,000 volumes. On cite parmi ses édifices le vaste bâtiment destiné aux exercices militaires , la salle de l'opéra, la caserne d'artillerie, le palais du prince héréditaire et la principale église, qui renferme les tombeaux des anciens princes de la maison régnante.
Au nord de Darmstadt, sur la rive gauche du Mein, s'élève la jolie ville d'Ofenbach, peuplée de 10,000 âmes, et riche de ses manufactures de soieries, de toiles cirées, de tabac et de passementerie. Elle est unie par un tronçon de chemin de fer à la grande ligne hessoise. Heppenheim, sur une belle route qui traverse la montagne de Bergstrasse, est une petite ville muree, avec deux faubourgs. On voit près de là, sur l'Odenwald, les restes du château de Starkenbourg, qui a donné son nom à la province. C'est la résidence des princes d'Isenbourg-Birstein. Au confluent du Rhin et de la Nahe, Bingen, avec des bains sur le Rhin, située dans un canton riche et agréable, fait un commerce considérable de blés, de vins, de cuirs et d'étoffes de laine; on ne lui donne que 6,000 babitants. Depuis 1689 que Louis XIV la démantela, elle n'a plus recouvré l'importance stratégique que sa position lui donnait.
Sur la rive droite du Rhin s élève à pic le mont Rudesheim, que couronne le vieux château d'Ehrenfell; sur l'autre rive, les rochers amoncelés sont couverts de ruines qui ne sont que des restes de vieux donjons du moyen âge. C'est au bas de ces rochers que le Rhin forme une cataracte appelée Bingerloch, qui présente au navigateur un obstacle dont on exagère les difficultés, mais qui n'est réellement dangereux que lorsque les eaux sont basses. Au-dessous de cette chute on voit sur un rocher, au milieu du fleuve, le Mausthurm ou la Tour des Souri., vieil édifice sur lequel les anciennes légendes racontent une foule de récits plus ou moins fabuleux. Il paraît que cette tour ainsi que le château d'Ebrenfels datent du commencement du treizième siècle.
Worms, station importante du chemin de fer de Mayence, qui paraît être la ville de Borbetomagus, que Ptolémée désigne comme a principale cité des fi angionu, peuple dont nous parlerons en décrivant les provinces rhénanes de la Bavière, reçut, sous la seconde race de nos rois, le nom de Vormatia, originaire de celui qu'elle porte. Les Vandales la ruinèrent en 407, les Huns en 451, les Normands en 891, et les Français en 1689. Cette antique cité ne renferme que des rues étroites et sombres ; on y remarque la cathédrale, beau monument du style byzantin, l'hôtel des monnaies, l'hôtel de ville et le musée d'antiquités romaines. Sa population est de 9,000 âmes, et son commerce, très-productif, consiste principalement dans la vente des vins qu'elle récolte sur les fertiles terrains de la rive gauche du Rhin, au bord duquel la ville est située.
Un peu au-dessous du confluent du Rhin et du Mein, s'élève Mayence (en allemand Mainz), la ville la plus considérable du grand-duché de Hesse. Elle renferme 36,000 habitants, quelques beaux édifices et plusieurs établissements utiles. Cependant sa construction est loin d'être régulière; ses maisons, presque toutes bâties
en grès rouge, lui donnent un aspect désagréable; presque toutes ses rues sont étroites et tortueuses ; on n'en cite que trois qui soient alignées : la plus belle est celle appelée Grosse-Blciche. La place Verte et celle du Marché sont ses deux seules places passables ; sa cathédrale, appelée le IJome, est curieuse par sa construction, son antiquité et le trésor considérable qu'elle renferme. Elle fut fortement endommagée par le bombardement de 1793, mais elle a été peu à peu restaurée. On y remarque plusieurs tombeaux. A l'extrémité septentrionale de cette ville, l'une des quatre places fortes de la Confédération, on voit les restes de l'ancien château électoral et une vaste place d'armes. Tout près de là est le palais grand-ducal, qui appartenait autrefois à l'ordre Teutonique. Une galerie le met en communication avec l'arsenal, qui n'est pas fort éloigné du pont de bateaux qui traverse le Rhin, et que Napoléon avait projeté de remplacer par un pont en pierre. Depuis 1818 on a découvert dans le fleuve plusieurs piles d'un pont que les Romains avaient construit : elles ne sont visibles que pendant les plus basses eaux. Ce pont de bateaux a 523 mètres de longueur : le droit de péage que l'on perçoit sur les piétons, les voitures et les navires qui le traversent rapporte 40,000 florins, ou plus de 86,000 francs, à la ville; mais son entretien est de 18,000 florins, ou près de 39,000 francs : ne serait-il pas plus avantageux de réaliser le projet de Napoléon?
Près du pont est le port de décharge pour les navires venant du haut Rhin et du Mein et pour ceux qui sont destinés pour le bas Rhin : parmi ceux-ci, il y en a qui transportent un chargement de 600 tonneaux.
De vieux murs avec des plates-formes et des batteries flottantes protègent la ville du côté du fleuve. Sur le côté opposé, elle est défendue par de vastes fortifications que l'on améliore sans cesse. On sait que Napoléon en voulait faire un des principaux boulevards de l'empire français. Mais on a peut-être trop étendu les travaux de défense, car ils exigeraient en temps de guerre une garnison de 30,000 hommes. Ces fortifications se lient à la citadelle, dont un bastion renferme un vieux monument, appelé en allemand Eichelstein, c'est-à-dire pierre du gland: c'est une tour ronde dont la construction est attribuée aux Romains. Du haut de cette masse de pierres, on jouit d'une très-belle vue sur la ville et le fleuve. Un autre édifice antique, que nous ne devons point passer sous silence, est l'aqueduc, dont il reste 59 piliers. Le bâtiment qui mérite le plus de fixer l'attention des curieux est celui qui renferme les principales collections de la ville, telles que trois cabinets de médailles, une galerie de tableaux, un musée d'histoire naturelle, une belle suite d'instruments de physique, et la bibliothèque, composée de 90,000 volumes, parmi lesquels il s'en trouve un très-grand nombre des premiers temps de l'imprimerie. On a construit en 1829 une salle de spectacle presque sur l'emplacement de l'église NotreDame, qui, après avoir été à peu près détruite pendant le siège de la ville, fut démolie sous l'administration française. Le muséum des antiquités romaines recueillies dans ses murs ou dans ses environs est riche et fort curieux; on sait que cette ville était déjà considérable sous la domination romaine, qu'elle fut longtemps habitée par Drusus, et que les Romains la nommèrent Moguntiacum, puis Moguntia.
Mayence est administrée par un bourgmestre, un adjoint, deux commissaires de police et un conseil municipal composé de trente membres ; ses revenus sont estimés à 150,000 florins (324,000 fr.).
Le chapitre de la cathédrale, si riche lorsque cette ville était gouvernée par un prince-archevêque, ne compte plus que quatre chanoines. A la place de l'université qui existait du temps des électeurs, "à la plice du lycée établi par le gouvernement français, le grand-duc de Hesse a fondé un gymnase qui renferme 170 à 180 élèves. Un gymnase particulier est annexé au séminaire catholique, qui entretient trente-deux jeunes théologiens. La ville a 5 écoles primaires pour les garçons et 4 pour les filles, indépendamment d'une grande école établie dans l'ancien couvent des carmélites pour les enfants indigents. Cet établissement se charge aussi de mettre en apprentissage 350 enfants des deux sexes. Ces dépenses sont couvertes par les fonds que fournit la ville et par des souscriptions volontaires qui se sont élevées dans certaines années, tant pour l'éducation des pauvres que pour les hôpitaux, à la somme de 70,000 florins, somme énorme pour une ville de la population de Mayence. Outre ces écoles, Mayence possède une école vétérinaire et une de médecine.
L'industrie de cette ville se distingue particulièrement dans l'ébénisterie, la carrosserie, la lutherie, la fabrication des fausses perles et la tannerie. Elle possède d'importantes librairies et de belles imprimeries. Ses manufactures ne lui fournissent pas de grands moyens d'exportation, mais la richesse de son territoire lui offre une importante compensation. Elle expédie annuellement 30,000 quintaux de grains, 16,000 d'huile et de légumes, et 40,000 de vins. Ajoutons à ces produits ses excellents jambons, qui depuis longtemps l'ont rendue célèbre chez les gastronomes. Une ligne de chemin de fer, qui doit être prolongée jusqu'à Bonn et Cologne, sait la rive gauche du Rhin et s'unit au chemin-de fer français; tandis que sur la rive droite un embranchement qui suit la vallée du Mein l'unit à Francfort.
Aucune autre cité des bords du Rhin ne répond mieux que Mayenre à la situation qu'on s'accorde à donner à la ville fondée par Claudius Drusus Germanicus, dix ans avant l'ère chrétienne. A la chute de l'empire romain, elle fut successivement envahie et conséquemment ravagée par les Vandales, les Quades, les Sarmates, les Alains, les Gépides, les Hérules, lès Saxons, les Bourguignons, les Alemanni et les Sucves. Crocus en fit la conquête le dernier jour de l'an 406; elle fut ruinée, et ses fortifications furent rasées.
Quelques années plus tard, elle commençait à peine à se rétablir de tous ses désastres, qu'Attila y porta la dévastation : sa destruction fut si complète, que le petit nombre d'habitants échappés au carnage l'abandonnèrent pour jamais. Un demi-siècle s'était a peine écoulé, que Majoricn, empereur d'Occident, essaya d'eu relever les murs; Théodebert, fils de Clovis, lui rendit en partie son ancienne importance; Charlemagne la restaura complètement et y bâtit une église métropolitaine. Elle fut soumise aux rois d'Austrasie depuis l'an 843 jusqu'en 1025. En 747, saint Boniface en avait été le premier archevêque; ses successeurs, dès l'année 1026, y exercèrent la souveraineté sous la protection et la suzeraineté des empereurs d'Allemagne jusqu'en 1255, époque à laquelle l'extension prise par le commerce et l'industrie fit naitre cette confédération des villes du Rhin, qui, jusqu'en 1462, fut pour Mayence une ère de splendeur et de liberté. Mais dans cette période, qui vit naître Jean Guttemberg, elle eut constamment à lutter contre les prétentions de ses évêques. Enfin l'électeur Adolphe, en 1462, la prit d'assaut, la réduisit en cendres, en décima la population, et lui ravit tous ses privilèges. Ce fut dans cet état qu'elle rentra sous la domination de ses archevêques. Les guerres religieuses du seizième siècle furent encore une calamité pour cette ville. En 1631, les Suédois s'en emparèrent et la conservèrent jusqu'en 1635. Elle tomba au pouvoir des Français en 1644, en 1688 et en 1792. En 1797, ceux-ci la reprirent sur les Prussiens; la possession leur en fut garantie par le traité de Lunéville : elle devint alors le chef-lieu du département du Mont-Tonnerre. Enfin, depuis 1815, elle fait partie du grand-duché de Hessc-Darmstadt.
D'après le règlement militaire définitivement arrêté par la diète germanique, la ville hessoise de Mayence doit avoir en temps de paix une garnison de 6,000 hommes environ, en troupes autrichiennes et prussiennes. Eu temps de guerre cette garnison sera de 12,000 hommes au moins et de 21.000 au grand complet, y compris 600 hommes de cavalerie. L'Autriche et la Prusse y envoient chacune 7,000 hommes, et les principautés de Saxe, d'Anhalt et de Hesse fournissent le complément.
Sur une des places de Mayence s'élève une belle statue de Guttemberg, qui y naquit en 1400. Elle est l'œuvre du sculpteur Thorwaldscn, et a été érigée en 1837 avec l'argent d'une souscription européenne.
A l'extrémité du pont de Mayence s'étend comme son faubourg, sur la rive droite du Rhin, la petite ville de Cnssel ou Castel, le Castellum Trajani des anciens. Comprise dans le vaste système de fortifications qui entoure Mayence, elle est considérée comme un point stratégique fort important. C'est un lieu de passage très-fréquenté où l'on remarque une assez belle église, et où il se tient chaque année un marché considérable de bestiaux.
C'est aux environs du bourg de Hocklteim, à peu de distance de la ville, que l'on récolte les meilleurs vins : on dit que dans les années favorables la pièce de 600 pintes se vend jusqu'à 2,000 francs prise au pressoir. Les beaux viguobJes qui s'étendent sur les collines qui dominent le Rhin donnent au bassin de Mayence l'aspect le plus riche que l'on puisse imaginer. Le fleuve , qui se dirige majestueusement vers le couchant, et dont les eaux présentent une surface de 555 mètres de largeur; qui, vers le midi, se prolonge en formant un rideau terminant une plaine immense; les hautes montagnes qui, vers le nord, semblent devoir l'arrêter dans son cours rapide ; les îles couvertes de verdure qui sortent de son sein ; les villages qui s'élèvent en amphithéâtre sur les pentes des hauteurs ; la variété des points de vue qui vous entourent; la teinte bleuâtre que prend la vieille cité de Mayence au milieu de ces niasses de verdure, forment un tableau dont la magnificence frappe l'homme le moins sensible aux beautés de la nature , enrichie par les efforts de l'industrie et de l'agriculture.
GOUVERNEMENT. — La Hesse-Darmsladl formait autrefois un simple landgrayiat. Ce n'est que depuis 1806 que son souverain a pris le titre de grand-duc. La constitution du grand-duché de Hesse-Darmsladt date de 1820; mais elle a été modifiée dans un sens plus libéral en 1849 et 1&5Ï. Suivant l'acte constitutionnel, il y a dans le grand-duché une chambre des députés et une chambre haute, dont les membres sont électifs, suivant le cens; l'âge auquel ils peuvent prendre part aux délibérations est fixé à vingtcinq ans. La seconde chambre se compose de 6 députés nobles, de ceux des villes d'Alsfeld, Bingen, Darmsladt, Friedberg, Giessen, Ma) ence, Offenbach et Worms, et de 34 députés des bailliages ou districts, tous électifs au premier degré. L'une des bases fondamentales de cette constitution est la liberté de la presse.
Le grand-duc convoque les députés des états lorsqu'il s'agit de lever de nouvelles contributions. Depuis 1819, un code de lois a été rédigé sur le modèle des codes autrichiens ; une cour suprême d'appel est chargée de la révision de toutes les affaires criminelles : malheureusement l'inamovibilité des juges n'a point encore été admise en principe. Un conseil suprême, présidé par le grand-duc, surveille tous les travaux publics du pays. Dans chaque province, les justices de paix sont soumises à une régence qui remplit les fonctions de cour de première instance ; d'autres cours sont chargées de tout ce qui a rapport à l'administration de la justice; enfin la révision des comptes des caisses provinciales et tout ce qui regarde les contributions et les finances est soumis à des collèges chargés de les contrôler.
Le grand-duché occupe le neuvième rang dans la Confédération Germanique ; il a une voix dans la diète et trois dans l'assemblée générale. Son contingent est de 8 à 10,000 hommes, et sa contribution fédérale est d'environ 72,000 francs.
FINANCES. — Le budget dans le grand-duché de Hesse-Darmstadt est voté pour deux ans par les chambres. Les dépenses annuelles équilibrent les revenus et montent à environ 16,500,000 francs. La dette publique est de 8 millions de francs, non compris l'emprunt pour la construction des chemins de fer, qui était en 1856 d'environ 30 millions de francs.
FORCES MILITAIRES. — La force militaire de cet État se compose d'environ 10,000 hommes, faisant partie de la troisième division du VIIIe corps d'armée de la Confédération; mais en temps de paix il n'y en a guère plus que 2,000 sous les armes. En temps de guerre, il peut mettre à sa disposition un corps assez considérable de landwehr ; on sait qu'en 1814 cette masse irrégulière se composait de 95,000 hommes, dont plus de 16,000 étaient armés de fusils. D'après un décret du 24 août de la même année, cette institution fut déclarée permanente, et, depuis 1817, une grande partie a été armée et habillée d'une manière uniforme.
OLDENBOURG.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. — Le grand-duché de Holstein- Oldenbourg, ou simplement d'Oldenbourg, se compose de trois parties distinctes, dont la principale, ou l'Oldenbourg proprement dit, avec la seigneurie de Kniphausen (réunie depuis 1852), est bornée au nord par la mer d'Allemagne ou du Nord, et sur tous las autres points par le royaume de Hanovre, à l'exception d'une frontière de 18 kilomètres de longueur, qui à l'est la sépare du territoire de la ville libre de Blême. Sa longueur, du nord au sud, est d'environ U5 kilomètres; et sa plus grande largeur, de l'ouest 4 l'est, de 70 kilomètres. Depuis ses limites avec le pays de Brème jusqu'à la mer, le cours du bas Weser sépare du royaume de Hanovre cette partie importante du grand-duché. La seconde partie de l'Oldenbourg consiste en douze petites enclaves formant la principauté d'Eutin ou de Lubeck, et situées vers les extrémités orientale et méridionale du duché danois de Holstein ; la troisième est la principauté de Birkenfeld, comprise entre la province prussienne du bas Rhin et la principauté de Lichtenberg, appartenant au duché de Saxe-Cobourg-Gotha.
Les trois parties réunies du grand-duché d'Oldenbourg renferment, avec la seigneurie de Kniphausen, une population de 285,149 habitants, répartis sur une superficie de 114 88 milles carrés géographiques allemands, ou 6,433 kilomètres carrés.
(D'autres renseignements nous donnent 6,267 kilomètres.) ANCIENS HABITANTS. — Tout ce que l'on sait sur les premiers habitants du pays d'Oldenbourg, c'est qu'ils appartenaient à la branche cimbro-saxonne qui, avant le quatrième siècle de notre ère, occupait les contrées voisines du cours de l'Elbe, de celui du Rhin et de la mer du Nord. On donne le nom de Chcmi au peuple qui habitait la plus grande partie des terres qui forment aujourd'hiii le grand-duché d'Oldenbourg. A l'époque reculée dont il s'agit, ce pays, beaucoup plus marécageux qu'aujourd'hui, devait renfermer peu de terrains habitables. C'est à l'embouchure du AVeser et sur les bords de la Jahde que ces antiques peuplades, qui vivaient de la pêche et de la chasse, résidaient.
NOTICE HISTORIQUE. — Suivant quelques auteurs, l'ancien comté d'Oldenbourg comptait parmi ses princes Sigefroi Ier, l'un des descendants en sixième ligne de Witikind le Grand. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'au douzième siècle un Christian ou Christiern fut le premier comte d'Oldenbourg. Il fonda la ville de ce nom, et eut pour successeur son fiJs Théodoric ou Thierry, surnommé le Fortuné, probablement parce que son mariage avec Hcdwigc, héritière du Sleswig et du Holstein, lui valut la possession de ces deux comtes. Cejjrince donna le jour à Christian Ier, qui régna en Danemark, et à Gerhard, qui fut comte d'Oldenbourg. On surnomma ce dernier le Belliqueux, parce qu'il fut constamment occupé à guerroyer, principalement contre son frère, dont il ne put obtenir la possession de l'héritage de sa mère. Enfin ce prince fut vaincu et fait prisonnier par Henri de Schwartzenbourg, archevêque de Brème et évêque de Munster, qui contribua à le faire exiler et à hâter le terme de ses jours : il mourut en France l'an 1500.
Christiap, fils aîné de Thierry, hérita du Sleswig et du Holstein, et devint roi de Danemark en 1448 : l'un de ses deux fils, Jean, régna sur ce dernier pays, et Frédéric sur Je Sleswig et le Holstein ; mais, appelé au trône danois après la déposition de Christian II, il laissa ce trône à son fils aîné, Christian III, tandis que son autre fils, Adolphe, devehait le chef de la maison
de lIolstein - Gottorp. Les descendants de Gerhard possédèrent successivement l'Oldenbourg ; mais Antoine Gunther ou Gonthier, le dernier de ces princes, étant mort sans enfants, le comté passa en 1667 à la couronne de Danemark. Vers cette époque, la ligne de la maison de Holstein-Gottorp monta sur le trône de Russie , et le Danemark échangea avec elle l'Oldenbourg contre le Holstein. En 1773, le grand-duc Paul en fut investi, et c'est à cette occasion que cet ancien comté fut érigé en duché. En 1785, Paul ea fit la cession à son cousin Pgvl-Frédéric-Auguste, évêque de Lubeck, et membre de la branche ducale de Holstein-Gottorp.
En 1803, ce prince reçul une augmentation considérable dt territoire dans l'évêché de Lubeek ; on lui donna les bailliages de Vechte et de Kloppel)..hourg dans l'évêché de Munster, ainsi que le bailliage de Wildeshausen dans le Hanovre. En 1808, il entra dans la confédération du Rhin, formée sous le protectorat de Napoléon ; mais en 1810, le duché fut anéanti par la formation des deux départements français des Bouches - du - Wieser et des Bouches - de l'Elbe. Il ne Lui resta que le pays de Lubeck. Trois ans après, les événements politiques permirent au prince de rentrer dans ses États; enfin, en 1815, le congrès de Vienne lui conféra la dignité de grand -dnc, et lui céda la principauté de Birkenfeld, dont nous avons parlé plus haut, et l'empereur de Russie lui abandonna la seigneurie de Jever. Dans ces derniers temps, en 1852, la seigneurie de Kniphausen a été réunie au grand-duché.
ASPECT PHYSIQUE. — L'Oldenbourg proprement dit est jin pays plat, que quelques élévations qui s'étendent le long de ses rôles garantissent des inondations de la mer. Après le bas Weser, qui le baigne à l'est, ses principaux cours d'eau sont la Hunfe, afuent de ce fleuve, la Jahde, Ylumvic, la Veline, la Soeste, la Leda.
et la Haæc. La première de ces rivières a 190 kilomètres d'étendue; elle n'est navigable qu'à partir de quelques kilomètres avant de se jeter dans le Weser; elle forme, sur une longueur d'un peu plus de 15 kilomètres, la limite entre ce pays et le Hanovre. La seconde, qui n'a que 25 kilomètres de longueur, se jette dans la mer du Nord , en donnant son nom à une haie longue de 35 kilomètres et large de 18, au nord de laquelle s'étend la petite île de Wangeroge, qui appartient au grand-duché. Les cinq autres rivières vont se joindre à l'Ems dans le royaume de Hanovre.
L'Oldenbourg renferme un grand nombre de lacs, dont les principaux sont le Zwischenahn et le IJzïmmer, et plusieurs marais, dont les plus considérables s'étendent vers le sud-est du pays, au nord et au sud-ouest du lac Diimmer, qui, sur une. longueur d'une lieue, sépare l'Oldenbourg du Hanovre. De nombreuses écluses, construites dans le but de disperser les eaux intérieures et de les conduire hors du pays, sont entretenues à grands frais. Dans la partie méridionale s'étend une grande plaine nommée Gumling.
Le territoire de la principauté de Lubeck présente aussi une surface plate arrosée par la Trave et la Schwartau, et dans laquelle on remarque les lacs d'Eutin, de Kell, de Pion et d'Ukley.
La principauté de Birkenfeld appartient physiquement à la région montagneuse du Hundsrück : sa principale rivière est la Nahe.
Sur les bords des rivières de l'Oldenbourg, le terrain est gras et très-fertile; mais dans le reste du pays il est sablonneux, et conséquemment peu productif. Les sables dont nous parlons reposent sur un dépôt de craie. Il en est de même du terrain de la principauté de Lubeck. Quant à celle de Birkenfeld, la nature de son sol et de ses roches est, sous plusieurs rapports, beaucoup plus inté-
Une halte de bohémiens en Saxe.
ressante. On sait quelle quantité prodigieuse d'agates, de jaspes, de calcédoines, on recueille aux environs du village d'Oberstein; on sait aussi tout le parti que l'industrie de ce petit pays retire de cette richesse naturelle.
Dans la principauté de Birkenfeld, on n'exploite pas seulement les matières siliceuses connues sous les noms d'agates, de sardoines, de calcédoines, de jaspes, etc.; les mines de fer y offrent aussi un aliment à l'industrie des habitants.
Quant à l'Oldenbourg proprement dit et à la principauté de Lu- beck, on n'y connaît aucune substance métallique digne d'être mise en exploitation ; mais dans le premier de ces deux pays il existe un grand nombre de tourbières, dont le produit est assez considérable pour fournir à des exportations importantes, et des argiles utilisées par les nombreuses tuileries du pays.
CLIMAT. — La partie la plus septentrionale du duché d'Oldenbourg est exposée à un air froid et humide, dû à la proximité de la mer, et surtout à la configuration de la baie de la Jahde, qui s'enfonce de plus de 20 kilomètres dans les terres, et qui doit son nom à la petite rivière qui s'y jette. Les terres qui entourent cette baie se ressentent de l'influence des vents du nord; les froids s'y prolongent beaucoup plus longtemps que dans le reste de la contrée, où, en général, le printemps et l'été sont plus tardifs que dans les autres parties de l'Allemagne placées sous le même parallèle. Dans les plus grandes chaleurs de l'été, les soirées et les nuits sont souvent très-froides; si l'on ne prend de grandes précautions, le changement subit de température fait naître des maladies dangereuses.
PRODUCTIONS NATURELLES. — Certaines parties du duché d'Oldenbourg sont fertiles en pâturages ; on y élève de nombreux troupeaux, beaucoup de bêtes à cornes, mais principalement des chevaux presque aussi estimés que ceux du Mecklembourg. Tous ces animaux sont compris parmi les objets que ce pays exporte. Les
paysans engraissent beaucoup de porcs ; ils élèvent aussi des oies dont la plume est un objet d'exportation ; enfin les abeilles réussissent assez bien. Aussi le beurre, le fromage, les viandes salées et fumées, les cuirs , les peaux et la cire y sont-ils autant de branches de commerce.
L'intérieur du pays renferme néanmoins peu de terrains propres à l'agriculture; c'est là qu'on rencontre fréquemment des marais et des landes. Lorsqu'on parcourt surtout le sud-ouest de cette contrée, on est quelquefois plusieurs heures sans apercevoir un seul arbre, une seule habitation; de là vient que les grains récoltés dans ce duché ne suffisent point à la consommation de ses habitants. Les forêts y sont peu considérables; et sans les tourbières dont nous venons de parler, la classe peu aisée manquerait souvent de combustible. Les principaux végétaux utiles que l'on y cultive sont le houblon et le lin ; le premier est nécessaire dans un pays où sont établies de nombreuses brasseries; le second alimente des fabriques considérables de toiles. On y récolte aussi du chanvre, qu'emploient les tisserands du pays, et beaucoup de colza, qui alimente un grand nombre de moulins à huile.
INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE. — Nous avons.dit que les bêtes à laine y constituent une des richesses territoriales; mais il est bon d'ajouter que leur toison ne sert point seulement à fabriquer des draps, elle est principalement employée à une si grande fabrication de bas, que dans les seuls cantons de Kloppenbourg et de Vechte le commerce intérieur et d'exportation de cette branche d'industrie s'élève à une valeur de plus de 100,000 écus par an.
Dans le Humling, plaine la plus élevée de tout le pays, et qui forme une lande sablonneuse assez riche cependant en végétaux pour que de nombreux troupeaux puissent y trouver leur pâture, les habitants n'ont d'autres richesses que leurs moutons et leurs abeilles: ces moutons fournissent une laine assez grossière; mais les abeilles produisent une grande quantité de miel, grâce aux soins des paysans. Au printemps ils quittent cette lande élevée, et
Laboureurs de Hesse-Darmstadt.
transportent leurs ruches au nord dans des plaines basses où l'on cultive de la navette ; lorsque la récolte de cette plante est faite, ils se dirigent avec leurs ruches dans les terrains marécageux employés à la culture du blé-sarrasin; ils y restent jusqu'à ce que les landes qu'ils ont quittées soient couvertes de bruyères en fleurs.
L'industrie et les mœurs de ce petit peuple nomade rappellent en quelque sorte ces tribus errantes dont nous parle la Bible.
PiCHE ET COMMERCE. — La pêche maritime et celle des rivières est très-productive dans le pays d'Oldenbourg; elle occupe et nourrie un grand nombre d'individus. Les rivières et les côtes sont très-poissonneuses.
Quant au commerce, il est favorisé par les embouchures du Weser "et de la Jahde, et surtout par celle de cette dernière, parce que la marée, qui s'y élève à près de 5 mètres, permet aux navires d'approcher jusqu'à l'écluse de Varel. Les ayhle, qui bordent la côte sont autant de petits ports d'où les marchandises sont facilement transportées dans l'intérieur du pays par des canaux ou par le Weser et la Jahde.
DIVISIONS POLITIQUES. — Le grand-duché est divisé en 14 cercles, savoir : 7 pour l'Oldenbourg, 1 pour Kniphausen, 3 pour la principauté de Lubeck et 3 pour la principauté de Birkeofeld. Ces cercles sont subdivisés en districts, en bailliages et en paroisses. Le magistrat de chaque paroisse et les baillis relèvent de la justice cantonale du district; les magistrats du district jugent en première instance ; la chancellerie tient lieu de cour d'appel ; et enfin la cour de justice, tribunal suprême, juge en dernier ressort.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Oldenbourg, capitale de tout le duché, et la ville la plus importante par sa population, que Von évalue à 8,000 habitants, est située au confluent du Haren et de la Hunte, rivière peu importante, mais navigable, qui y forme un port accessible pour de petits bâtiments et entouré de plantations
agréables. La ville, qui est fortifiée, fermée par cinq portes et entourée de deux faubourgs, se divise en vieille et nouvelle. Cette dernière est assez bien bâtie : on y remarque quelques maisons élégantes. Le château ducal, nouvellement construit, est orné de tableaux de Fischbeiu et de Strack; un autre édifice, le palais du prince (prinzel' palast) , n'est pas moins digne d'attention. Parmi les trois églises, dont deux appartiennent à la communion luthérienne et une au culte catholique, nous citerons celle de Saint-Lambert, qui porte le titre de cathédrale, et qui renferme un caveau où sont déposées les cendres des anciens princes de la maison régnante; aujourd'hui la sépulture ducale est établie dans le cimetière situé près de la porte Saint-Veit. Trois hôpitaux, un observatoire, un gymnase qui jouit d'une grande réputation, un séminaire pour les maîtres d'école, une bibliothèque publique de plus de 50,000 volumes, placée dans l'ancienne maison de correction, et comprenant une galerie de tableaux et une collection de plâtres d'après l'antique, sont les établissements utiles de cette capitale. Une.manufacture de tabac, des raffineries de sucre, des tanneries, une fabrique de savon et une de draps, sont ses principaux établissements industriels.
Oldenbourg possède une société littéraire : cette ville est la patrie de Lubin, écrivain d'une vaste érudition, qui mourut en 1621, après avoir publié des notes fort curieuses sur Anacréon, Perse et Juvénal, ainsi qu'un traité en latin sur la nature et l'origine du mal, ouvrages qui firent beaucoup de bruit lorsqu'ils parurent, mais qui ne sont plus consultés que par quelques érudits. Elle a vu naître aussi l'his, torien Wolfmann. Le grand-duc a sa résidence habituelle à RtJltède, petite ville de 5,000 âmes, à un myriamètre d'Oldenbourg.
Delmenhorst, sur la Delme, renferme 2,500 habitants; on y fabrique du cuir à la façon anglaise, et l'on y fait un grand commerce de chevaux. Wildeikamen, ville qui contient 800 habitants de plus que la précédente, est située sur les bords de la Hunte, et possède des fabriques considérables de draps et des tanneries.
Nous ne devons point passer sous silence le canton de Seteflaad^ placé au milieu d'une contrée marécageuse, et dont les habitants,
Frisons d'origine, ont conservé la langue et les mœurs de leurs ancêtres. Depuis l'âge de cinq ans jusque dans la vieillesse la plus avancée, dit Stein , les deux sexes s'occupent à tricoter des bas de laine avec une ardeur et une activité sans exemple. Leur sol se compose de marais couverts d'un gazon que vendent les habitants ; ceux-ci, au nombre d'environ 2.000, habitent les trois paroisses de Ramesloh, Scharrel et Strücklingen.
La petite ville de Vechta ou Vechte doit son nom à la rivière de Vccbte. Entourée de murs et de fossés, elle passe pour une place forte. On y compte 2,000 habitants. C'est le chef-lieu d'un des cercles les plus peuplés du grand-duché. Le bourg de Varel, situé à l'embouchure de l'Iahde, a un bon port défendu par le fort Christianbourg, un palais des anciens comtes de Bentinck qui présente une belle façade, des marçhés de chevaux et de bœufs , un gymnase catholique, une population de 3,000 âmes. Son commerce est considérable : le flux facilite l'entrée des navires dans ses murs. Dans le cercle de Kloppenbourg, nous mentionnerons la petite ville de Frysoita ou Friesoite, où se tiennent chaque année quatre grands marchés aux chevaux et aux bestiaux.
Le cercle ou la seigneurie de Jever, situé dans la partie septentrionale du grand-duché, comprend les petits pays d'Ostringen, de Rustringen et de Wangerland. Cette seigneurie échut en 1663 à la maison d'Anhalt-Zerbst; en 1793, elle passa par héritage à l'impératrice Catherine II; en 1807, l'empereur Alexandre la céda, par le traité de Tilsit, au roi de Hollande Louis-Napoléon; en 1814, elle fut donnée au grand-duc d'Oldenbourg, lever son chef-lieu, est environné d'un lossé et de remparts qui servent de promenades, On y voit un vaste château, une église luthérienne et une catholique , une synagogue, une maison d'orphelins , un hospice de charité , un gymnase et une inspection générale des pauvres. Ses établissements industriels consistent principalement en distilleries d'eau-de-vie de grain et en tanneries. Il s'y tient chaque année douze foires pour les bestiaux.
Telles sont les principales villes du grand-duché d'Oldenbourg.
Nous avons dit que ce duché possède deux petites principautés : celle de Luheck et celle de Birfcenfeld. La principauté de Lubeck ne comprend point, ainsi qu'on pourrait le croire, le territoire de cette ville dont nous avons déjà parlé ; elle devrait plutôt porter le nom d'Eutin ou Utina, sa capitale. Cette principauté, qui se compose de douze enclaves situées dans le duché danois de Holstcin, formait autrefois un évêché luthérien, dont le siège avait été fixé i Lubeck, mais dont le titulaire, qui avait le rang de prince de l'empire, résidait à Eutifl, La maison de Holstein ayant umdu, pendant une époque de troubles, d'inaportapts services à cet évêché, il fut convenu, en 1647, que le chapitre choisirait ses évêques parmi les princes de cette maison. En 1802, l'évêché de Lubeck, érigé en principauté, fut donné au grand-duc d'Oldenbourg; en 1810. il fut compris dans le département français des Bouches-de-l'Elbe; mais en 1814 il fut réuni de nouveau au duché d'Oldenbourg.
Les deux principales enclaves dont il se compose sont celles d'Eutin et de Kaltenhof, ou de Schwartau. Eatin est une petite ville bien bâtie, située à 14 kilomètres de la mer du Nord, sur le bord d'un petit lac très-poissonneux. Sa population est de 4,000 habitants ; elle est le siège d'une chancellerie, d'un consistoire, d'une chambre fiscale, d'un tribunal civil el d'une direction générale des hospices de la principauté. Elle possède un château, un palais moderne avec de beaux jardins, une église luthérienne, un hôpital, un établissement de charité, un gymnase et une école d'industrie.
L'un de ses établissements industriels les plus remarquables est une brasserie considérable.
Le territoire de Birkenfeld, qui faisait autrefois partie du département français de la Sarre, et qui depuis a été érigé en princi-
pauté, ne renferme point de villes dignes de ce nom. Birkenfeld, située sur la Nahe, est plutôt un bourg; sa population ne s'élève pas à 1,500 habitants; on y remarque un château et deux établissements de forges assez importants. Un autre bourg, plus intéressant par son industrie, est celui d'Oberstein, situé dans une petite vallée sur la Nahe. Vingt moulins à tailler et à polir divers meubles et bijoux en agate, en calcédoine, eu cornaline, en jaspe, en lapis et en d'autres pierres dures; de nombreux ateliers, dans lesquels des hommes, des femmes et des enfants sont constamment occupés aux détails que nécessitent la préparation et le fini de la taille de ces pierres et de beaucoup d'autres qu'on y envoie de diverses parties de l'Europe, où nulle part on ne peut faire les mêmes travaux aussi bien et à un prix aussi modique, font jeter un regard d'intérêt sur cette population active. On fabrique par an à Oberstein pour , plus de 300,000 francs de boutons, d'anneaux, de boucles d'oreilles, de cachets, de croix, de chaînes, de coupes, de tabatières, de chandeliers et d'autres objets qu'il serait trop long d'énumérer.
Kniphausell, ancienne capitale de la seigneurie de ce nom, aujourd'hui cédée par la famille Bentinck à l'Oldenbourg, est une jolie petite ville de 5 à 600 habitants avec un château fortifié.
GOUVERNEMENT. — Le gouvernement d'Oldenbourg a pour chef le grand-duc, dont le pouvoir est depuis 1852 limité par l'intervention des deux chambres électives dans le gouvernement. Le prince préside le conseil suprême, dans lequel on discute les affaires importantes ; toutes les branches de l'administration sont soumises à un autre conseil, que préside le ministre dirigeant (oberlanddrost). Un conseil de finances est chargé de tout ce qui a rapport aux revenus et aux dépenses du pays. Le nombre des employés et des fonctionnaires est très-limité : la plus sévère économie règne dans toutes les branches du service public. L'administration de la justice se compose de haillis, de magistrats, d'une chancellerie et d'une cour supérieure.
LANGUE, RELIGION. — Les Oldenbourgeois parlent la langue allemande, mais leurs expressions ont peu d'élégance, et, comme le disent les puristes allemands, leur prononciation a surtout le défaut d'être plate. La plupart des habitants sont attachés à la communion lutherienne ; on y compte cependant un grand nombre de catholiques, beaucoup de réformés et quelques juifs ; tous professent leur çulte avec la plus grande liberté. Les églises luthériennes sont au nombre de 101, placées sous la juridiction de trois surintendants et d'un intendant général; les réformés ont quatre temples, et pour chef religieux un surintendant; enfin le nombre des paroisses catholiques est de 37, sous l'inspection d'un doyen général. Tout ce qui concerne le culte protestant est soumis à la décision d'un consistoire , dont les attributions ne s'étendent que sur ce qui regarde la religion, les maisons d'éducation et la célébration des mariages.
Une commission spéciale s'occupe de ce qui concerne la communion catholique.
ARMÉE, FINANCES, RANG DANS LA CONFÉDÉRATION. -i Le grand-duché de Hoittcin-Oldenbourg entretient un corps de troupes de 3,750 hommes, composé d'un régiment d'infanterie et d'une brigade de dragons ; son contingent à l'armée fédérale se compose de 3,311 hommes; ses revenus s'élèvent à 3,800,000 francs, et sa dette publique à 15 ou 18 millions. Conjointement avec les trois duchés d'Anhalt et les deux principautés de Schwartzbourg, il occupe la quinzième place à l'assemblée ordinaire de la Confédération Germanique, et y possède une voix ; mais, à l'assemblée générale, il & une voix à lui seul.
MECKLEMBOURG.
BORNES. — Le Mecklembourg forme deux grands-duchés, celui de SCHWJÎRIN et celui de STRELITZ, gouvernés par des princes appartenant à deux branches d'une même famille. Considérée comme un seul État, cette contrée est bornée au sud par la province prussienne de Brandebourg, à l'est par une partie de cette province et la Poméranie, au nord par la mer Baltique, à l'ouest par le territoire de la ville libre de Lubeck, dont le lac de Dassow la sépare, et par le duché danois de Lauenbourg, avec lequel une partie du cours de la Steckenitz détermine une petite ligne de sa frontière; au sud-ouest enfin par le royaume de Hanovre, avec lequel l'Elbe forme une portion de sa limite.
ANCIENS HABITANTS. — II est probable que les plus anciens peuples du Mecklembourg appartenaient à la race Scandinave, et qu'ils furent subjugués au commencement de notre ère par la nation des Weades ou Venedi, connue en Europe sous le nom de Vandales.
Lorsque ces peuplades du Nord se mirent en marche vers le quatrième siècle pour conquérir des contrées soumises aux Romains dégénérés, les habitants du Mecklembourg, qui portaient aussi, mais plus anciennement, le nom de Vandales, abandonnèrent leur patrie, dans laquelle plusieurs peuples slaves ou vendes ne tardèrent pas à s'établir. Ces Wendes se divisaient en plusieurs tribus : les H., les l/arini ou Warnes, les Vilsi ou Wilses, et les Obo
ti-iii; mais en peu de temps ces derniers restèrent seule maîtres du pays ; et vers le neuvième siècle leur royaume s'étendait depuis 14 Steckenitz jusqu'à la Penne.
HISTOIRE. — Les ducs de Mecklembourg appartiennent à la plus ancienne maison régnante de l'Europe. L'origine de cette maison est tellement reculée, que les généalogistes et les historiens ne sont point d'accord sur le prince qui la fonda. Selon les uns, elle descendrait de Genséric, roi des Vandales, qui s'accagea Rome l'an 455 de notre ère; selon d'autres, elle aurait pour chef Wislas ou Wisilas, roi des Hérules, bisaïeul de Mistew 11, dit le Fort; on peut donc, sans craindre d'exagérer l'ancienneté de cette maison, la faire remonter jusqu'au temps de Charlemagne. Mistew II mourut vers l'an 1025. Quelques-uns disent qu'il avait reçu le baptême, mais cette particularité est peu vraisemblable. Godsfal, fils d'Eude, est probablement le premier chrétien de cette famille ; on l'honore du titre d'apôtre et de martyr de ses sujets ; on le regarde comme fondateur de l'évèché de Schwerin. Quoi qu'il en soit, il paraît que son exemple ne fut point suivi par son successeur, puisque Pribislas ou Pribislav, qui prit le titre de roi des Obotrites, fut converti au christianisme par Albert l'Ours l'an 1151; mais sa conversion paraît avoir été plutôt une affaire de politique que de conviction. Chassé de ses États par Henri surnommé le Lion, duc de Bavière et de Saxe, il n'y rentra qu'après avoir reçu le baptême.
Depuis ce temps il quitta le titre de roi pour celui de prince de Mecklembourg, que ses successeurs ont conservé. Quelques-uns de ces princes méritent une mention particulière : Jean dit le Jeune fonda eiLl419 l'université de Rostock ; Jean-Albert, mort en 1576, introduisit la religion protestante dans ses États ; enfin AdolpheFrédéric , qui, pour s'être uni aux ennemis de la maison d'Autriche, fut détrôné eo 1628 par l'empereur Ferdinand II, qui donna ses États à Walstein, mais qui, après la paix de Prague, et après que le roi de Suède l'eut rétabli sur le trône, se réconcilia avec lui, donna le jour aux deux princes Frédéric et Adolphe-Frédéric II, chefs des deux branches de Mecklembourg. Ceux-ci, après la mort de leur père , se partagèrent ses Etats. Le premier fonda la maison de Schwerin, et le second celle de Strelitz. Ces deux principautés sont restées séparées. En 1808 elles firent d'abord partie de la Confédération du Rhin; en 1815 elles entrèrent dans la Confédération Germanique, et leurs souverains prirent alors le titre de grands-d ucs.
ASPECT GÉNÉRAL PHYSIQUE. — Le Mecklembourg ne forme pour ainsi dire qu'une vaste plaine sablonneuse, au milieu de laquelle s'étendent des forêts et des lacs; ceux-ci même sont sans exagération plus nombreux que les villes ; les plus considérables sont ceux de Plau, de Flesen, de Malcltin, de Miiritz, de Cummerow, de Schwerin, de DassO-w, de Ribnitz, de Krakow, de Schaal.
de Koelpin, de Ratzebourg, de Tollen et de Pctersdorf. Tous sont abondants en poissons. Quelques montagnes s'élèvent au milieu de ces plaines basses; la plus considérable est le Rulmenberg; sa hauteur au-dessus duniveau de la mer Baltique est d'environ 200 mètres.
Une autre montagne moins considérable est le Petersil, dans le grand-duché de Strelitz; une troisième, nommée Hohebourg, s'élève à 165 mètres; mais le rocher appelé Heilige-Damm (la Sainte-Digue), dont le nom indique peut-être l'antique vénération du peuple pour cet amas de pierres plates et unies de différentes formes et de différentes couleurs, qui, placé près de la ville de Dobberan, semble servir de digue aux flots qui viennent s'y briser avec fracas, est un monument naturel assez curieux : il occupe une superficie de plus de 3 kilomètres de long sur 13 de large ; sa hauteur n'est que de 4 à 5 mètres ; mais la réunion des diverses pierres qui le composent excite l'étonnement de celui qui le visite pour la première fois. On regarde cette digue comme un des plus anciens monuments religieux des peuples du Nord, Ses pierres, jointes sans ciment, sont polies, et portent la trace visible de diverses figures qui semblent avoir quelque rapport avec la mythologie Scandinave.
La mer Baltique forme deux enfoncements ou golfes assez considérables à l'ouest de cette digue naturelle : l'un est le Wallfisch et l'autre le Sals-Haff, séparés par l'île de Poel, longue d'un peu plus de 9 kilomètres, et la seule que nous ayons à citer sur la côte du Mecklembourg, généralement escarpée et peu découpée.
Les principaux cours d'eau qui arrosent les deux grands-duchés sont : la Steckenitz, le IVarnoir, la Recknitz, la Peene et la Tolhmse, qui appartiennent au bassin de la Baltique; les autres, tels que YEldcr et la Snde, sont des affluents de l'Elbe.
CLIMAT. — Le climat du Mecklembourg est en général tempéré, mais les nombreux lacs qu'il renferme y entretiennent une grande humidité ; l'atmosphère y est souvent chargée de brouillards.
La température est plus douce dans le Mecklembourg - Strelitz que dans le Mecklembourg-Schwerin.
PRODUCTIONS NATURELLES. — Des deux grands-duchés, le Mecklembourg-Schwerin est le plus riche en bestiaux ; on y élève
aussi un grand nombre de chevaux: leur taille haute, leur agilité et leur vigueur en ont fait une race fort estimée. Quant aux produits agricoles, ils sont assez abondants ; ils consistent en pommes de terre, en céréales, en chanvre et en houblon; de belles prairies fournissent un excellent fourrage. Il faut dire aussi que l'agriculture 9 reçu dans ce pays de grands perfectionnements, et que dans quelques localités on est parvenu, 4 force d'industrie, à remédier aux inconvénients d'un terrain souvent très-sablonneux ou bien humide et marécageux.
DISTRIBUTION DES TERRES, SUPERFICIE, POPULATION.
— Les économistes sont maintenant d'accord sur ce point, que plus les terres sont réparties dans un grand nombre de mains, plus l'aisance se fait sentir sur tous les habitants d'une contrée. Dans le Mecklembourg, les domaines de la maison ducale comprennent les 7,0 de toute la superficie, la noblesse en possède les '0 et les villes 1/10, La classe des paysans ne participe point à l'avantage d'être propriétaire, et cependant les contributions, les impôts et les charges extraordinaires sont supportés également par tous les individus. Il ne faut point attribuer à une autre cause le peu d'importance de la population : elle est pour les deux duchés d'environ 640,000 âmes sur 16,087 kilomètres carrés, ce qui ne donne que 39 habitants par 4 kilomètres, quantité qui devrait être plus considérable dans un pays gouverné d'ailleurs avec une sagesse toute paternelle. Nous devons cependant faire observer que cette population était moins importante encore avant 1820, et que depuis elle a continué à augmenter. Ne pourrait-on point attribuer cette progression à l'abolition du servage?
DIVISION POLITIQUE. — Le grand-duché de MecklembourgStrelitz se compose de deux parties fort distinctes, séparées par le Mecklembourg-Schwerin : la plus orientale est la seigneurie de Stargaid, comprenant le territoire des villes de Friedland, Furstemberg, Wesemberg, du bourg de Mirow et de Neu-Strelitz, sa capitale; l'autre partie, limitrophe des possessions danoises et du territoire de Lubeck , porte le nom de principauté de Ratzebourg : tout le reste du Mecklembourg appartient à la branche de Schwerin.
Plusieurs petites enclaves situées dans le Mecklembourg-Schwerin, dans le duché de Lauenbourg et entre ce duché et le territoire de Lubeck, font partie de ces deux divisions.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE DU GRAND-DUCHÉ DE STRELITZ. — Jetons un coup d'œil sur les principales villes de chacun des grands-duchés, et commençons par le moins important, celui de Mecklembourg-Strelitz; il est, ainsi que nous l'avons dit, composé de la principauté de Strelitz et de la seigneurie de Sturgœrd (Herrschaft-Stargard), bornées par le MecklembourgSchwerin et les Etats prussiens; cette seigneurie a 80 kilomètres de longueur et 20 à 25 de largeur.
Nous aurons peu de chose à dire sur les cités que nous allons parcourir. Slargard, que domine un vieux château, ne mérite une mention que pour ses manufactures de drap, et surtout ses fabriques de poteries. Sa population est d'un peu plus de 1,500 habitants.
Friedland, qui en renferme 5,000, n'a pour ainsi dire d'autre industrie que la fabrication du tabac, des pipes de terre et des cartes à jouer. Neu-Bradenbourg ou le Nouveau-Brandebourg, ville située sur le lac de Tollen, et peuplée de 7,000 âmes, a des distilleries, des fabriques de drap et de toile de coton. Sa Marien Kirche, bel édifice gothique, a été récemment restaurée, ainsi que les portes gothiques de la ville; ses foires de chevaux sont très-renommées.
On cultive beaucoup de tabac et de houblon dans ses environs. AltStrelitz ou Vieux-Strelilz, qui contient 3,500 habitants, dont environ 500 juifs, possède une maison de correction et d'aliénés, des fabriques de cuir, de papier et de tabac. Enfin Neii-Strelitz ou Nouveau-Strelitz, capitale du duché, sur le lac de Zierk, est remarquable par la régularité avec laquelle elle est bâtie. Elle ne date que de l'année 1733; ses rues, droites et bien percées, partent d'un même point, la place du marché, en formant une étoile rayonnée. C'est le siège des colléges supérieurs du duché; on y remarque le palais ducal, un gymnase, une belle école des arts et métiers, et un institut appelé Carolinum, destiné aux maîtres chargés de l'éducation. Sa population est évaluée à 6,400 habitants; son industrie, assez variée, consiste principalement en armes blanches et en divers ouvrages en fer.
La principauté de Ratzebourg, séparée du grand-duché de Mecklembourg-Strelitz par toute la longueur du Mecklembourg-Schwerin, est physiquement limitée par le lac de Ratzebourg, la Wackenitz et la Trave ; sa longueur, du nord au sud, est de 22 kilomètres, et sa largeur de 14. Son sol est assez fertile. Elle a pour chef-lieu Schônberg, petite ville de 1,200 habitants. La ville danoise de Ratzebourg, qui donne son nom. à la principauté, appartient en partie au grand-duché de Mecklembourg-Strelitz.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE DU GRAND-DUCHÉ DJË SCHWERIN. — Dans le grand-duché de Sohwei'in, qui s'étend de
l'est à l'ouest sur une longueur d'environ 150 kilomètres, et sur une largeur de 90 du sud au nord, on compte un plus grand nombre de villes importantes que dans le précédent. Nous citerons d'abord Wimtar, qui renferme 10,000 habitants; située au fond d'un golfe, cette ville possède d'assez beaux chantiers de construction; un tronçon de chemin de fer l'unit à la ligne mecklembourgeoise. On montre dans l'église Sainte-Marie une grille en fer, au sujet de laquelle le peuple rapporte diverses traditions miraculeuses. Rostock, sur le Warnow, à 9 kilomètres de l'embouchure de cette rivière dans la Baltique, est la plus importante résidence de la contrée.
Le grand-duc y possède un palais. Elle est bâtie dans le goût gothique , et divisée en trois parties : l'ancienne ville, la nouvelle, et celle du milieu; de vieilles fortifications forment son enceinte; sa population est d'environ 24,000 habitants. Son université, entretenue aux frais du grand-duc et de la ville, jouit de quelque réputation; elle fut fondée en 1419; près de 200 étudiants y suivent les cours de 34 professeurs. Rostock possède aussi plusieurs écoles et une société savante, celle des naturalistes; une société biblique, un musée, un jardin botanique et une bibliothèque publique. On y remarque un chantier de construction, un hôtel des monnaies, un couvent de religieuses et neuf églises, parmi lesquelles celle de Sainte-Marie renferme le cœur du célèbre Hugues Grotius ; enfin l'arsenal et l'hôtel de ville, appelé Promotions-haus. Cette cité jouit de plusieurs priviléges importants ; elle fixe la quotité de ses contributions , jouit des produits des droits de pêche et de navigation sur le Warnow, et de plusieurs autres qu'il serait trop long de spécifier. Elle est la patrie du général prussien Blücher. Le commerce y est considérable, grâce au chemin de fer mecklembourgeois qui y aboutit et qui l'unit à Hambourg par Schwerin, et à son port, dont l'entrée est défendue par un fort et qui peut recevoir des navires qui ne tirent pas plus de 2 mètres 60 d'eau. Dans ses environs , on cite les bains de mer établis à Dobberan comme les plus célèbres de toute l'Allemagne, non-seulement sous le rapport des cures qu'on leur attribue, mais encore par la commodité des logements , les sujets de distraction qu'on y trouve et la société choisie qui s'y réunit. Ce bourg, situé dans une vallée agréable, au bord d'une petite rivière qui se jette à 4 kilomètres de là dans la Baltique, possède un château ducal et une salle de spectacle. Il ne reste plus de sa célèbre abbaye de bernardins qu'une église qui renferme les tombeaux de plusieurs grands-ducs. Varncmünde, à l'embouchure du Warnow, est le véritable port de Rostock. Butzow, à 24 kilomètres de cette dernière, doit la plupart de ses manufactures aux réfugiés français qui s'y établirent à l'époque de la révocation de l'édit de Nantes.
Schwerin, autrefois Schwelfc, dont la population est de 20,000 habitants , est située entre deux lacs ; le plus considérable, qui porte son nom, a plus de 22 kilomètres de long du sud au nord. Elle se divise en trois parties : la vieille ville (Altstadt), la nouvelle (Neustatd) et le faubourg ( Vorstadt). Elle est entourée de murailles percees de deux portes, et passe avec raison pour la mieux bâtie de tout le Mecklembourg. Elle ne renferme cependant point de monuments remarquables : ses églises, la synagogue, l'hôtel des monnaies et les hôpitaux sont les seuls édifices dignes d'une capitale et de la résidence d'un prince souverain. Le palais du grandduc est bâti sur une des îles qui s'élèvent au milieu du grand lac de Schwerin, et qui contribuent à y ménager des points de vue charmants. On remarque dans ce château une belle galerie de tableaux, un cabinet d'histoire naturelle et divers objets de curiosité intéressants, tels qu'une collection d'antiquités des anciens Slaves ou Wendes qui s'établirent dans le Mecklembourg. Les jardins méritent d'être visités par les étrangers. Cependant ceux du château ducal bâti à Ludwigsbourg ou Ludivigslust, à 22 kilomètres de Schwerin, sont encore plus agréables par leur situation au milieu d'un beau pays ; ils peuvent être comptés au nombre des jardins anglais dessinés avec le plus de goût.
L'industrie de Schwerin consiste principalement en distilleries, en tanneries, en fabriques de drap, de tabac, de chapeaux de paille, de toiles et de bougie de blanc de baleine. Elle est sur le chemin de fer de Hambourg à Rostock.
- L'ancienne ville de Mecklembourg, qui donna son nom aux deux grands-duchés, et qui fut la capitale du royaume des Obotriti, n'est plus aujourd'hui qu'un village de 600 habitants, chef-lieu d'un petit bailliage. Son nom viendrait-il du mot allemand makel (souillure), parce que cette ville était très - sale? ou de l'adjectif gothique rnykil, qui répond au mot latin multus (nombreux), parce qu'elle était très-peuplée? Quoi qu'il en soit, son ancien nom de Mecklinborg paraît plutôt avoir une origine wende que germanique.
Parchim ou Parchen, sur le bord d'un petit lac, est le siège de la cour suprême d'appel pour les deux grands-duchés, el d'une sousintendance de la confession d'Augsbourg.. Peuplée de 6,000 âmes, cette ville, divisée en vieille et nouvelle, est entourée de murailles.
Elle renferme des fabriques semblables à celles de Schwerin, et des fonderies de cuivre et d'étain. On croit qu'elle existait au deuxième siècle sous le nom d'Alistus, et que son nom moderne lui vient de
parcum, mot de la basse latinité, parce qu'elle possédait, avant l'établissement du christianisme, un enclos qui renfermait plusieurs idoles. Nous n'avons rien à dire de GrabOlo, sur la rive gauche de l'Elde, petite ville où se tiennent annuellement quatre foires; de Plau ou Plage, qui donne son nom à un lac; de Robel, fondée en 1226 par Henri Borwin II; de Boizenbourg, près des bords de l'Elbe, ville commerçante qui perçoit en droits de douane 3 à 4 millions de francs par an; de Waren et de Warin, qui semblent rappeler le nom des Warini ou Warnes j de Krakow, dont l'origine date du treizième siècle; de Malchin, située près du lac du même nom; de Neukalden, fondée par Henri Borwin III en 1244; de Teterow, bâtie en 1272 par Nicolas III; ni de quelques autres qui ne sont pas plus importantes. Mais Gustrow mérite quelques détails : elle compte plus de 9,000 habitants. Située sur la rive gauche du Nebel et entourée de murailles, elle renferme un château, une cathédrale , un hôpital, une maison de correction, un collége appelé YEcole du Dôme, et un grand nombre d'établissements industriels.
Ses foires de bétail sont fort importantes.
ORGANISATION POLITIQUE. — En faisant connaître l'organisation politique des deux grands- duchés de Mecklembourg. les rapports qui existent entre la noblesse, la bourgeoisie et les paysans , nous aurons indiqué tout ce que les deux principautés offrent de plus intéressant sous ce point de vue. Le droit de succession à la couronne ducale s'exerce par droit de primogéniture; l'héritier présomptif est reconnu majeur à 18 ans ; les autres princes du sang reçoivent des apanages en numéraire, et les princesses une dot qui jusqu'à présent a été fixée à 20,000 thalers (le thaler vaut environ 3 fr. 75 de notre monnaie). D'après le traité fait en 1442 entre les maisons de Mecklembourg et de Brandebourg, après l'extinction totale de la première, le territoire doit appartenir à la seconde, c'est-à-dire au royaume de Prusse. D'après d'autres traités qui remontent à l'an 1572 , et renouvelés plusieurs fois depuis , le grand-duc partage avec les seigneurs le produit des contributions et le droit de rendre justice; différents colléges ont en outre le droit de veiller aux intérêts des communes; enfin les seigneurs des deux grands-duchés forment un corps séparé sous le nom de Vieille union du pays ( Aile landes union).
A la tête des 112 familles seigneuriales sont placés 3 maréchaux des provinces, choisis chacun dans une de ces familles; ils forment, avec 8 conseillers et le député de Rostock, un conseil chargé de diriger les affaires seigneuriales et provinciales. Les principales villes du Mecklembourg nomment en outre des députés qui s'assemblent annuellement sur la convocation du grand-duc. La réunion des députés des deux grands-duchés compose les états : ainsi ces états sont communs aux deux principautés et en discutent les intérêts. Ils se réunissent alternativement à Sternberg et à Malchin.
Chacun des grands-ducs y est représenté par un commissaire.
Ils s'occupent "des affaires relatives aux contributions et de la délibération des lois que le prince présente par écrit. Dans ces délibérations, les députés ont le droit d'exposer les plaintes de leurs commettants et de demander l'abolition des abus. Les seigneurs ont encore des assemblées particulières dans les chefs-lieux de justice; mais lorsqu'ils jugent convenable de faire des convocations provincial es , ils doivent en avertir le souverain. La cour suprême d'appel de Parchim étend sa juridiction sur les deux duchés. Les villes ont en général le droit de nommer leurs maires ; les magistrats et tous les fonctionnaires qui dépendent du ministère de la justice sont à la nomination du prince.
RELIGION. — Dans les deux duchés de Mecklembourg, les princes de la famille régnante, ainsi que la plupart des habitants, sont luthériens, ou, pour parler plus exactement, sont attachés à la confession d'Augsbourg. Le clergé est soumis à la juridiction des consistoires. Cependant on y compte aussi des réformés, des catholiques et des juifs; ces derniers sont au nombre d'environ 4,000.
Les catholiques et les israélites exercent publiquement leur culte; ils ont leurs églises et leurs synagogues, et même on remarque plusieurs couvents réservés aux demoiselles de la noblesse et à celles de la bourgeoisie. Depuis la réformation, les seigneurs ont acquis l'influence qu'avaient su obtenir les évêques, et ces établissements, restés à leur disposition, ont dû nécessairement changer de destination. En 1813, les israélites ont obtenu la jouissance de tous les droits de citoyens ; mais les enfants nés du mariage entre des juifs et des catholiques doivent être élevés dans l'une des communions chrétiennes.
COMMERCE DU MECKLEMBOURG. — Le commerce du grandduché de Mecklembourg - Schwerin n'est point sans importance; mais de tous les ports, celui de Rostock, ou plutôt celui de Warnemunde, qui dépend de cette ville, est le plus fréquenté; il y entre annuellement près de 700 navires, et dans celui de ll/ismar environ 160. Des grains, du beurre, des fromages, du tabac, des bois de construction. des chevaux, des bêtes à cornes, des porcs, sont principalement les objets d'exportation de ce pays. Il reçoit de
la Russie de l'huile, du suif et du chanvre ; de la France, des vins; de la Suède, du fer, des harengs et de la morue; enfin de l'Angleterre, de l'étain, du plomb, du charbon de terre et divers produits de ses manufactures.
CHEMINS DE FFR. — Le Mecklembourg-Schwerin est traversé du sud-ouest au nord-est par la ligne de Hambourg à Rostock qui passe par Schwerin, et a des embranchements sur Wismar et Gustrow, les principales villes commerçantes du pays. Ce chemin de fer mecklembourgeois s'embranche près de Hagenow à la grande ligne de Hambourg à Berlin.
MARINE MARCHANDE. — Le grand-duché de MecklembourgSchwerin possède sur la Baltique une étendue de côtes assez considérable pour trouver quelque avantage dans le commerce maritime et le cabotage. Ses deux principaux ports sont ceux de Rostock et de Wismar. La marine marchande consiste en 302 bâtiments, 6 bateaux à vapeur, dont un vapeur-poste, et 41 bâtiments côtiers.
FINANCES. — Le budget du grand-duché de MecklembourgSchwerin est divisé en budget ordinaire et en budget extraordinaire. Les recettes ordinaires ont été en 1852 de 3,251,174 thalers,
ou 12,191,852 francs, et les dépenses ordinaires de 3,439,564 thalers, ou 12,898,365 francs. La dette dépasse 1-0 millions de thalers, ou 37 millions de francs.
Dans le grand-duché de Mecklembourg-Strelitz, les revenus et les dépenses sont évalués à près d'un million de thalers, 3,750,000 fr., et la dette à 1,200,000 thalers, ou 4,500,000 fr.
FORCES MILITAIRES. — Les deux pays n'entretiennent pas de troupes en temps de paix, si ce n'est quelques soldats chargés de la police intérieure du pays. Le contingent fédéral du Mecklembourg-Schwerin est de ] 1,000 hommes; sa contribution fédérale est de près de 30,000 francs. Le contingent fédéral du Mecklembourg-Strelitz est de 2,500 hommes. Sa contribution fédérale est d'environ 6,000 francs.
RANG DES GRANDS-DUCHÉS DANS LA CONFÉDÉRATION.
— Ces deux États réunis ont une seule voix à l'assemblée ordinaire de la diète, où ils tiennent le quatorzième rang; mais celui de Mecklembourg- Schwerin a 2 voix à l'assemblée générale, et celui de Mecklembourg-Strelitz en a une. Le premier fournit à la Confédération Germanique un contingent de 5,370 hommes, et le second 1,077, y compris les réserves.
SAXE-WEIMAR.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. —
Le grand-duché de Saxe- Weimar ou de Saxe- Weimar-Eisenach a été formé en 1485, lors du partage que se firent les princes Ernest et Albert des États de leur père Frédéric le Bon, électeur de Saxe.
Il se compose de trois parties détachées, accompagnées chacune de quelques enclaves. La première, ou le cercle de Weimar-Iéna, est bornée au nord par la province prussienne de Saxe, à l'ouest par la même province et la principauté de Schwarzbourg-Rudolstadt, au sud par le duché de Saxe-Altenbourg, qui la limite aussi à l'est : sa longueur de l'est à l'ouest est de 65 kilomètres, et sa largeur du nord au sud de 49. La seconde, ou le cercle de Neustadt, au sud-est de la précédente, avec laquelle elle forme la principauté de Weimar, est entouré par le duché de Saxe-Alteubourg, et par les principautés de Reuss, au nord et au nord-est; au sud par la province prussienne de Saxe, et à l'ouest par le duché de SaxeMeiningen : elle a 45 kilomètres de l'est à l'ouest, et 18 du nord au sud. La troisième, qui forme le cercle ou la principauté d'Eisenach, à l'ouest des deux autres, est bornée au nord par la province de Saxe, à l'ouest par la Hesse électorale , au sud par la Bavière, et à l'est par les duchés de Saxe-Meiningen et de Saxe-CobourgGotha : elle a 65 kilomètres du sud au nord, et 18 de l'est à l'ouest.
Deux principales enclaves appartiennent au cercle de Weimar-Iéna : ce sont celles d'Ilmenau au sud-ouest, et celle d'Allstedt au nord.
Parmi celles qui appartiennent au cercle d'Eisenach, nous citerons celle d'Ostheim au sud, et celle de Zillbach à l'est.
La superficie de tout le grand-duché est de 66 milles carrés ou 3,696 kilomètres carrés, et sa population était en 1853 de 262,524 habitants. Il comprend 32 villes, 13 bourgs et 604 villages.
ASPECT GÉNÉRAL PHYSIQUE. — Quelques petites montagnes qui s'étendent du nord-est au sud-ouest, et qui vont se réunir à la chaîne du Thuringerwald, forment, dans la principauté de Weimar, de larges vallées où coulent la Werra, la Saale et l'IIm. Le sol y est généralement gras et fertile. La principauté d'Eisenach renferme des terrains de la même nature que ceux de la précédente; elle contient en outre des grès bigarrés, des marbres, des charbons de terre ; sur les bords de la Werra, on remarque quelques anciens volcans qui font partie du groupe qui se prolonge jusque sur la rive gauche du Rhin. La partie méridionale de cette principauté est couverte par les rameaux du Rhônegebirge.
En général, le grand-duché n'est pas fort riche en substances minérales : les mines d'argent et de cuivre sont maintenant épui- sées; on en trouvait aux environs d'Ilmenau, dans la principauté de Weimar; mais aujourd'hui on n'y exploite plus que du fer et du manganèse. Dans la principauté d'Eisenach, il existe près de Kreutznach une saline, celle de Wilheim-Glackshrun; à Kammerberg, une houillère, et à Kaltennord'heim on exploite une mine de lignite ou bois bitumeux, qui fournit annuellement 10,000 quintaux de ce combustible. Le cercle de Neustadt renferme de la tourbe et de l'albâtre. La principauté d'Eisenach est très-riche en argile à poterie et en terre à foulon. Le duché ne possède que deux
sources minérales ; la première, près de Berlra, aux environs de Weimar ; la seconde à Ruhla, près d'Eisenach.
PRODUCTIONS NATURELLES. — Dans les deux principautés, presque toutes les hauteurs sont couvertes de forêts : le bois est une des principales richesses du pays. Le sol est en général peu fertile, et la condition des cultivateurs laissant beaucoup à désirer, il en résulte que les produits de l'agriculture ne sont pas très-considérables; cependant la principauté de Weimar récolte assez de blé pour pouvoir en exporter dans les bonnes années. Celle d'Eisenach , peu riche en céréales, produit beaucoup de pommes de terre, de lin, de colza, de pavots et de chanvre. Les fruits sont abondants , mais d'une médiocre qualité; on cite cependant les pommes de Boursdorf et les cerises des environs d'Ostheim, dans la principauté d'Eisenach. Quant au vin, celui d'Iéna et celui de Kunitz dans celle de Weimar sont d'une qualité tout à fait inférieure. Les animaux domestiques, principalement les bêtes à cornes, sont élevés avec soin dans les environs d'Eisenach et sur le territoire de Neustadt, dans la principauté de Weimar. A Allslcdt, il y a un beau haras; les moutons fournissent une laine très-fine, qui se vend sous le nom de laine électorale.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Les principales villes du grand-duché de Saxe sont Weimar, Apolda, Neustadt, Iéna et Eisenach. Elles sont trop peu importantes pour que nous nous y arrêtions longtemps : nous les passerons rapidement en revue.
Weimar, située dans une jolie vallée arrosée par l'IIm, et sur le chemin de fer de Cassel à Dresde et à Leipzig, renferme 12,600 habitants. On remarque dans l'église principale les tombeaux des princes et princesses de la famille ducale, celui de Herder, et quelques peintures de Luc Cranach, dont on remarque le tombeau dans l'ancien cimetière. Cette ville, que l'on a surnommée avec raison l'Athènes de l'Allemagne, possède des écoles publiques, un collège, une académie de peinture et quelques établissements de bienfaisance. Parmi ses édifices, le plus remarquable est le palais du prince : l'escalier passe pour un chef-d'œuvre, et l'intérieur est cité pour la magnificence de l'ameublement et la richesse des collections, qui consistent en armures, en médailles et en tableaux de.
prix. Le parc, dessiné à l'anglaise, est regardé comme un des plus beaux de l'Allemagne. Nous ne devons pas oublier de citer parmi les établissements utiles de Weimar l'institut géographique, où l'on publie huit écrits périodiques et une foule de matériaux destinés à répandre le goût de la géographie.
Le grand-duc possède aux environs de Weimar une charmante maison de plaisance, connue sous le nom de Belvédère, et dont on cite l'orangerie et le jardin, l'un des plus riches de l'Europe en plantes exotiques. A Tieffurth, le prince a établi à ses frais une belle école d'agriculture, et il a eu soin de conserver lé beau jardin de la dernière duchesse douairière, dans lequel on remarque les monuments élevés à la mémoire des princes Constantin de Weimar et Léopold de Brunswick. A Osmannstedt reposent les cendres du
célèbre Wieland. C'est à Berhtt, à 9 kilomètres au sud de Weimar, petite ville de 900 âmes qui possède une manufacture de velours, que sont établis des bains sulfureux très-fréquentés.
ilpolila, peuplée de 3,500 individus, est connue par ses fabriques de draps. Neustâdt-sur-ÏOtla (Neusrndt-tm-der-Orla) renferme deux grandes manufactures de draps estimés, Il s'y tient chaque année des foires importantes.
léna, avec 6,000 âmes, tient un rang honorable parmi les villes universitaires de l'Allemagne. De belles bibliothèques, dont une de 60,000 volumes, un musée d'histoire naturelle, un jardin botanique , un observatoire, un amphithéâtre d'anatomie, des établissements de clinique, Servent puissamment à l'instruction de la jeunesse ; tandis que des sociétés savantes, telles que celle de minéralogie, celle d'histoire naturelle, et la société latine, contribuent, avec la Gazette universelle de littérature, à répandre le goût de l'étude et des occupations utiles. L'université d'Iéna a été fondée en 1548.
Cette ville, entourée de murailles flanquées de tours, est située dans une vallée arrosée par la Saale, que l'on y traverse sur un beau pont en pierre: c'est dans ses environs que s'est livrée, le 14 octobre 1806, la célèbre bataille qui porte son nom. Eisenach est une jolie ville de 10,000 habitants, bâtie sur une élévation qui domine la Neisse, et sur le chemin de fer de Cassel à Leipzig. Elle est entourée de murs, et possède un château ducal, un hôtel des monnaies, une école de dessin, un collège et plusieurs établissements utiles. La fondation de cette cité industrieuse remonte à l'an 1070.
Plusieurs dépendances de la principauté d'Eisenach sont enclavées dans la Bavière, dans les duchés de Saxe-Meiningen el de Saxe-Cobourg-Gotha, mais elles sont trop peu importantes pour que nous en parlions; il en est de même d'un territoire situé dans la province prussienne de Saxe, et dont la seule ville, Allstedt, qui dépend du cercle d'Iéna, renferme 2,000 habitants. Rulil ou Ruhla est intéressante par ses établissements industriels : il y a un institut normal forestier; plusieurs manufactures de quincaillerie, de pipes, de limes, de gants, de bas de laine, et d'autres objets. Peuplée de 2,600 habitants, elle est divisée en deux parties par le ruisseau du Ruhl, qui lui donne son nom : l'une, de 1,100 habitants t appartient au duché de Saxe-Weimar; l'autre, de 1,500, à celui de Saxe-Co bourg-Gotha.
GOUVERNEMENT ET ADMINISTRATION. — La constitution
du grand-duché de Saxe-Weimar date du 5 mai 1816; elle a été modifiée le 15 octobre 1850. Sa loi électorale date der 6 anil 1852.
Les états se divisent actuellement en diète ordinaire et en diète extraordinaire. La première s'assemble tous les trois ans et ordinairement à la dernière année de la période financière.
Les principales autorités dans la hiérarchie administrative sont le ministère, divisé en plusieurs départements, huit conseillers privés, la chambre des députés, la chancellerie d'Etat, l'administration de la justice, le tribunal suprême d'appel d'Iéna; dans les autres branches, le collège des finances, l'intendance des bâtiments, la chambre de révision des impôts. celle des comptes, et le bureau mathématique ; dans les affaires ecclésiastiques, les deux consistoires suprêmes.
- La majorité des habitants est protestante : on ne compte que 10 à 12,000 catholiques, et environ 1,500 israélites.
FINANCES. - Le budget du grand-duché est filé tous les deux ans. Il était pour la période financière 1854-1856 de 1,540,915 thalers ou 5,778,431 francs pour les recettes, et de 1,539,148 thalers ou 5,771,805 francs. Sa dette s'élève à près de 4 millions de thalers ou 10 millions de francs.
COMMERCE. — Il règne dans le duché de Saxe-Weimar une grande activité commerciale : à Eisenach on fabrique annuellement plus de 100,000 pièces d'étoffes de laine, beaucoup de rubans et de la céruse; à Iéna et Apolda on compte de nombreux métiers à faire des bas et des tissus. Kaltcnsundheim est peuplée de tisserands ; Burgel renferme plus de 40 fabricants de poterie, et des distilleries de vinaigre ; Weimar, des tanneries et des fabriques de toile et de bas de poil de lapin. Stulzerbach J des verreries et des papeteries; enfin, Ilmenau et ses environs possèdent des forges et des usines, des manufactures de porcelaine et de boutons. Le commerce a pris un nouvel essor depuis que le grand-duché est traversé dans toute sa largeur par la ligne de Cassel à Leipzig.
FORCES MILITAIRES, RANG DANS LA CONFÉDÉRATION.
— Le grand-duché de Saxe-Weimar n'entretient que quelques troupes pour le maintien de la police à l'intérieur ; son contingent fédéral est de 5,150 hommes; sa contribution fédérale est d'environ 25,000 francs. Il occupe le XIIe rang dans la diète avec les autres Saxes ducales.
TABLEAUX STATISTIQUES DU GRAND-DUCHÉ DE BADE.
STATISTIQUE GÉNÉRALE.
POPULATION par SIJPBBFI01R. POPULATION. kilomètre COMMERCE. FINANCES, FORCES MILITAIRES.
carré.
278 50 En 1852. 86 Exportations. Budget de 1855. État-major 185 h.
milles carrés 1 356-94,3 60,000,000 fr. Revenus. Infanterie. 1 division de 2 brigades.. 11,514 géographiques diemands. » ,i 43,379,606 fr. Cavalerie. 1 brigade de 3 régiments. 2,148 ou Dép enses. Artillerie. 1 régiment à 3 btllei-ics 1,158 ou 0 Dépenscs r 1 l'fil'. l'elpmcn 11 al el'lcs ,;) 15,616 70,000,000 fr. 43i434 l50 fri lo- kilomètres carrés, Dette, ] ;).000 h.
100,000,000 fr.
Statistique des Provinces,
NOMS SUPERFICIE NOMBRE DE d en PtlPULATION .,.
es kllomètre VILLES PRINCIPALES.
des .kn ilomètres pn jor.o CERCLUS, catrés. JAILUAGES. coHsruxEs.
RHIN MOYEN. 4,312 462,085 21 389 CARLSRUHE, 23,217. — PForzheim, 8,000. - naden, 5,866. - RasladL, 6,000. — Durlach, 8,000. — Kehl, 5,000. — Elthngen, 4,000. Offenbourg, 4,000.
HAUT RIUN 4,368 349,205 18 448 Fribourg, 15,000. - Brisach, 3,500. - Ilailenweiler, 800. - Lori-deh, 3,000. - Endigen, 3,500.
BAS RIIIN. 3,472 346,578 20 382 Manheim, 24,316. — Heidelberg, 15,000. — Wertheim, 4,000. — Waldurn, 2,600. - Sinsheim, 3,000.
Du LAC..,.., 3S464 199,075 15 376 Constance, 8,000. — Willingen, 4,000. — Neberlingen, 2,500. — Ludwigshafen, 1,600,
TABLEAUX STATISTIQUES DU GRAND-DUCHÉ DE HESSE-DARMSTADT.
STATISTIQUE GENERALE.
POPULATION POPULATION par s UP ER PIC IE. POPULATION par FINANCES EN 1856. FORCES MILITAIRES.
carré.
152 7 854,942 11 Revenus. Pied de paix.
milles carrés (1) 16,000,000 francs. 1 régiment de cavalerie, géographiques allemands, Dépenses. 1 régiment d'artillerie, 4 régiments d'infanterie; ou - 17,000,000 francs. pionniers, pontonniers.
8,515 Dette Total : 10,621 hommes, y compris l'état-ninjor.
kilomètres carrés. 9,000,000 francs.
Emprunt des chemins de fer.
25,000,000 francs.
(1) D'après les religions : 664,080 luthériens; 217,898 catholiques; 4,199 religions diverses; 28,862 israélites.
Statistique des Provinces.
PROVINCES. SUPERFICIE. POPULATION. DISTRICTS. VILLES PRINCIPALES.
STII.RKBNBOUlI.G. 3,025 319,678 14 DARMSTADT, 92,000. - Offenbach, 11,000. - Grossgerau, 1,800. Diebourg, 2,800. — Heppenlieim, 4,500.
HAUTE HESSE. 4,090 309,617 15 Giessen, 12,000. — Friedberg, 3,400. - Lauterbach, 4,000. — Schlitz, 3,600. — Griinberg, 3,000. — Schôtten, 2,500.
HESSE RHÉNANE 1,400 225,647 Il Mayence, 45,800.— Cassel, 2,500. - Bingen, 5,000. — Worms, 8,000.
- Alzev, 8,600.
TABLEAUX STATISTIQUES DU GRAND-DUCHÉ D'OLDENBOURG.
STATISTIQUE GENERALE.
POPULATION POPULATION par FINANCES r SUPERFICIE. en 1852. kKiilioommeèitrre e en 1857. FORCES MILITAIRES.
carre.
114 88 285,149 44 Budget de 1857.. hommes.
milles carr é s (1) Revenus. Infanterie- i 3 bataillons de campagne 11 2'909 hommesmilles carrés (1) Rcycnus. n fanterie. f 1 bataillon de remplaçants
géographiques allemands, 75,000,000 fr. Cavalerie. 3 escadrons. 460 — ou Dépenses. Artillerie et pionniers. 369 — 6,433 72,000,000 fr. 3,738 honimeii.
kilomètres carrés. Dette pi-ibliqlie.
Dctte pubhqlie.
135,000,000 fr.
(1) -D'après les religions : 206,848 luthériens; 467 réformés; 72,819 catholiques; 393 d'autres sectes chrétiennes; 4,477 israélites.
Statistique des Provinces.
SUPERFICIE NOMBRE DES en POPULATION | - M DIVISIONS..ki.. lomètres PeTu 1 -xICoKuO«. BAILLIAGES. PAROISSKS. VILLES ET BOURGS.
, en 1852. MILLI.GI!S, rAROISS;S, canes.
« Cercle d'Oldenbourg 40,292 4 14 OLDENBOURG, 8, 000. - ElSfleth, 1,800.—Zwischçnahn, 11,000.
Si — de Neuenbourg ] 1 35,438 4 9 ATettenboui-g, 600. - Rastède, 5,000. - Vai-el, 2,600.
S — d'Ovelgônne I 1 29,881 5 18 Ovelgônne, 800. — Braake, 1,000. - Wührden, 800.
ë\ - de Delmenhorst.. 13 34,725 4 17 Delmenhorst, 2,200. —Wildershausen, 2,600. — Grander.g — deDe ] men h orst..
a,a kesa, 900.
'a l -- de Vechte. 33,441 3 14 Vechte, 2,000. - Damme, 1,000. - Dinklage, 1,000.
- de Cloppenboul'g. 32,654 3 18 Cloppenbourg, 1,000. - Friesoite, 1,000. - LÕningen, 1,200.
»\ — deJever 20,388 4 21 Jever, 3,600. - Tettens, 300.
— de j e v er. 362 22,146 3 14 .BM<:'M,4,000.—Kattenhof,900.
PRINCIPAUTÉ DE LUBECK 362 22,146 3 14 Eutin, 4,000. — Kattenhof, 900.
— DE BIRKENFKLD.. 512 32,034 3 22 Birkenfeld, 1,500. - Oberstein, 1,600. - Hohefeldeli, 1,000.
SEIGNEURIE DE KNIPHAUSEX. 45 3,035 1 3 Knip/wusen, 3,000.
Militaires. 1,115 1
TABLEAUX STATISTIQUES DES GRANDS-DUCHÉS DE MECKLEMBOURG.
STATISTIQUE GÉNÉRALE. DIVISIONS POLITIQUES. VILLES ET BOURGS.
I. MECKLEMBOUBG-STRELITZ.
Superficie. 2,021 k. c. DUCHÉ DE STRELITZ. NEU-STRELITZ , 6,000.—Alt-Strclilz, 4,000. —Slargard, Population en 1851. 99,628 hah. 1,697 kilomètres carrés, l 1,500. — Neu - Brandebourg, 6,000. — Fürstenberg, Population en 1851 99,628 hab. 1,697 kilomètres carr é s, ^"2,500. — Ho h enzierilz, 600. — Mirow, 1,200. —AVolPopulation par kil. carré.. 50 hab. 83,276 habitants, 2,500. - Hohenzieritz, 600. - Mirow. 1.200. - Wo)Revenus 3,400,000 fr. 8 bailliages. -- dagh, 1,200.
Finances. J | Dépenses 3,200,000 fr. pRIXCIPaUTJÎ DE RATEnOURG. - Schonberg, 1,200.
f Dette 1 publiq1 ue. 4,o00,000 fr. 364 kilomètres carrés, - -, - r bailliag"e ? - ,-' - 1 bailliageT • II. MECKLEMBOURG-SCHWEBIN.
t Superficie. 13.ÇXQ k- c. , DUCHÉ DE MECKLEMBOURG.. SCHIVERIN, 15,000. - Buckow, 1,200. ^Dolberan, 1,600.
Population en 1855 (1). 538,997 hab. 22 bailliages. - Dometz, 1,800. — Grabow, 2,800. - Grevisinùhlen, Population par kil. carré.. 40 hab. 1,600. — Hagenow, 1,800. — Redentin, 3,000. — Ludt Revenus. 12,000,000 fr. vigslüsl, 5,000. — Waren, 2,000.
Finances.-< Dépenses. 12,500^000. fiv - DUCIIÉ nu GUSTROW ou WENDEN. Gustrow, 8,000. — Boizenbourg, .2,500. — Plau ,-!!,OO.Q.
(' Dette. 35,000,000 fr. - 16.bailliages. —Ribnitz, 2,500.— Goldberg, 1,500.—Malchin, 2,800.
Forces f Pied de paix. _,665 h?m: - - : --: Robe], 2,200. - Teterow, 2,00.0..
mititaires.t Pied de guerre. 4, 1 .5.2 l i o i n. PHI I)LI S CHWERI-,'. Ylitzott, 3-,500. Mai-n i tz, 1,500. M'arin, 1,200.
militaires. I Pied de guerre. 4,'752 hom. PRINCIPAUTÉ DE SCHWERIN. flutzou:, 3,500. - Marnitz, 1,500. - Warin, 1,200.
— 6 bailliages. ;; ; : SEIGNEUR* DE AVISMAR. IVismar, 1,200. — Poel, 1,000.
TURRITOIRE DE ROSTOÇK. Rostock; 24,000.
(1) D'après'les religions : lulhériens,*537,-002-; réformés ,178 ; "catholiques , 807; israélites, 3,106.' -
-, - - -
TABLEAU STATISTIQUE DU GRAND-DUCHÉ DE SAXE-WEIMAR.
! 1 "1 i
STATISTIQUE GÉNÉRALE. DIVISIONS POLITIQUES. VILLES ET BOURGS.
Superficie. 3,696 k. c. CERCLE DE WEIAIAR. WgIMAR, 15,000 — Apolda, 3,500. - Iéna, 6,000. —
Population en 1855 (1). 263,755 hab. 1,896 kilomètres carrés, Dornbourg, 1,200.
Population par kil. carré.. 74 hab. ]35,178 habitants.
¡.aevenus. 2,800,000 fI'. C 'E' E' 1 1 000 K t b 2 000 G. 1 OfiO F. D. 2 7O 000 f CERCLE D' E JSENACH. Eiscvuch, 1,000. — Kreutzeb ourg, 2,000. - Grisa, 1,800.
Finances. < Dépenses 2,750,000 fr. kilomètres carr é s, Ostheim-vor- d er-Rhôn, 2,500.
I Dette 10,000,000 fr. 80,551 habitants. Forces militaires 5,150 hom. *> a 1 an sForcesmiHtaires. 5,150hom. CERCLE DE NEUSTADT. Neustadt-an-der-Orla, 3^600. — Berka, 1,000.600 kilomètres carrés.
48,026 habitants.
(1) Luthériens et protestants réformés en 1855, 251,725; catholiques, 10,600; israélites, 1,430.
ÉTATS SECONDAIRES DE L'ALLEMAGNE.
DUCHÉS ET PRINCIPAUTÉS.
Émigrants allemands.
N j ,\f'u\ /J' ANC('Í'S DE L'ALLEMAGNE CENTRALE. —
Nous allons parcourir l'Allemagne centrale, qui comprend ce groupe de petits Etats situés entre la Prusse, le Hanovre, la Saxe royale et la Bohême.
Dans l'impossibilité de faire coïncider les limites des anciens peuples du centre de l'Allemagne avec celles des principautés qui l'occupent, nous croyons devoir commencer par un précis sur son antique population. On y comptait sept peuples principaux, les Cherusci, les Chassuarii, les Catti, les Sedusii, les Sorabi, les Suevi, et même les Venedi.
Les deux rives du Weser, dans les limites qu'occupent la principauté de Lippe-Detmold et quelques dépendances de l'électorat de Hesse-Cassel, étaient habitées par les Cherusci et les Chassuarii.
Aucun des peuples de la Germanie n'a défendu avec plus de courage son indépendance, et ne s'est acquis un plus grand nom dans ses guerres contre Rome, que les Cherusci. Ce sont eux qui contribuèrent le plus à la défaite de Varus ; mais aussi, comme le rapporte Strabon, la vengeance de Germanicus fut-elle éclatante : il les défit, et parmi les personnages illustres qui ornèrent son cortége triompbal, on vit figurer Semiguntus, chef des Cherusci, et Thusnelda sa sœur, femme d'Hermann ou d'Arminius, leur général, qui avait taillé en pièces les trois légions romaines.
Les Chassuarii ou Chasuari, comme les appelle Tacite, ou enfin Atluarii, suivant Ammien Marcellin, étaient des peuples guerriers et vagabonds, qui ravagèrent souvent les frontières des Gaules, jusqu'à ce que Julien fût parvenu à les vaincre. Les Catti, d'après ce qu'en dit Tacite, occupaient de l'est à l'ouest le pays
compris entre les rives de l'Ohm , affluent de la Lahn, et celles du haut Elbe, c'est-à-dire la Hesse électorale, le duché de Saxe-Weimar, et une partie du royaume de Saxe. Selon Pline, ils constituaient avec les Cherusci, les Suevi et les Hennunduri, la nation des Hermiones. Le portrait qu'en fait Tacite mérite que nous en donnions une esquisse. Les Catti se distinguaient des autres Germains par leurs membres robustes et trapus, leur air menaçant, leur courage et leur intelligence. Nés pour la guerre, habiles à choisir leurs chefs, zélés à leur obéir, fidèles à conserver leurs rangs, vigilants à se garder la nuit, sachant profiler des occasions favorables, se défier de l'inconstance de la fortune et se confier à leur courage, toute leur force était dans leur infanterie. Les autres Germains savent combattre, ajoute l'historien romain, les Catti seuls savent faire la guerre. Dès qu'ils étaient adultes, ils laissaient croître leurs cheveux et leur barbe, jusqu'à-ce qu'ils eussent tué un ennemi dans les combats. Les plus braves portaient un anneau de fer, marque d'ignominie et d'esclavage, dont ils ne se déliaient, dans chaque bataille, qu'après avoir vaincu un de leurs adversaires.
Dédaigneux de posséder aucun bien, mais prodigues de celui des autres , ils n'avaient ni maisons, ni champs, ni propriétés.
Les Sedusii habitaient le territoire situé entre le Rhin et le Mein, et qui forme une partie de celui du grand-duché de Hesse-Darmstadt. Ils faisaient partie de la coalition qui résista, sous le commandement d'Arioviste, aux armées de César. Les Sorabi occupaient une partie de la Saxe ; les Suevi s'étendaient depuis les bords de l'Elbe jusque vers ceux de l'Oder. Ils occupaient donc plus du tiers du royaume de Saxe; mais il est difficile de préciser l'étendue
de terrain qu'ils possédaient, parce qu'ils Étaient nomades, et que les anciens désignaient sous le nom de Suevi divers peuples appartenant à la même souche. Tacite dit que ce qui servait a ies distinguer, c'était leur chevelure relevée et nouée sur le sommet de la tête. Strabon prétend qu'ils s'étendaient depuis le Rhin jusqu'à l'Elbe, et même au delà; Ptolémée place dans les mêmes contrées les Langobardi, les Suevi, les Angli et les Semnones. l^Iais plus les Romains eurent de rapports avec les Suevi, moins le peuple auquel ils donnaient ce nom parut devenir nombreux, parce que ceux qu'ils confondaient sous cette dénomination générale se firent mieux connaître et parvinrent même à se faire craindre.
Vers le cinquième siècle, les Suevi se rapprochèrent du Rhin.
Enfin les terres de la rive droite de l'Elbe, en Saxe, ont aussi été occupées par les Venedi ou les Wendes.
Ce sont les descendants des Catti et des Suevi qui, sous le nom de Saxons, acquirent dans le moyen âge une si grande réputation par leurs mœurs guerrières. Ils résistèrent pendant plusieurs siècles aux rois de France, qui, depuis le règne de Clovis, furent pendant longtemps les princes les plus puissants de l'Europe. Au cinquième siècle, Hengis , l'un de leurs rois, suivi de quelques peuples des bords du Weser, passa dans la Grande-Bretagne et s'empara de l'île. Sous la conduite de leur prince Hermeric, ils firent en 409 une invasion en Espagne. Au sixième siècle, maîtres d'une partie de la Belgique, ils soutinrent contre Thierry, Clolaire 1er et Clotaire II, de longues guerres, malgré lesquelles ils restèrent possesseurs- de cette contrée. Charles-Martel les combattit pendant vingt ans, Pépin pendant dix, et Charlemagne ne put les réduire.
qu'après une lutte qui dura trente-deux ans.
BRUNSWICK.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. — Le duché de Brunswick se compose de trois parties principales, dont la plus septentrionale et la plus importante, qui jrepferme la capitale , est bornée au nor d , à l'est et au sud par la régence prussienne de Magdebourg, et au suif, à l'ouest et au norà par le Hanovre; la seconde, qui forme le district du Harz, est pour ainsi dire enclavée dans le Hanovre méridional, c'est-à-dire qu'elle .confine- à ce pays au nord comme au sud; mais à l'est elle est bornée par la Prusse, et à l'ouest par une enclave de la principauté de'W aldeck.
Elle renferme une enclave du Hanovre. La troisième, sur les pentes méridionales du Harz, porte le nom de district de BlanjkenJjourg, et est entourée par les possessions de la Prusse et du Hanovre. Le duché comprend encore quatre autrs parties, dont quelques-unes très-peu importantes et plus ou mojns éloignées des deux premières : l'une d'elles est à plus de 100 kilomètres de la' plus considérable.
La quatrième, formée du district 4e Kalwôrd-e,' est enclavée dans la régence prussienne de Magdebourg; bien que peu considérable, elle renferme jjne petite enclave de 10. Prusse. La cinquième, ou le pays de Bodenbourg, est enclavée jlar/s la province hanovrienne d'HiJeshe¡ui. p sixième est comprise dans la partie septentrionale de la même province. Enfin la septième, Ja plus septentrionale de toutes, qui forme le cercle de Thedinghausen, est située sur Ja rive gauche du Weser, enclavée au IP.iliev du Hanovre. La superficie de toutes ces pap^es réunies est de 61, 16 milles carrés géographiques allemands, ou 3,760 kilomètres carrés, et la population était, en 1853, de 271,943 individus, presque tous attachés au culte de la confession d'Augsbourg.
PRODUCTIONS NATURELLES. — Les richesses minérales de tout le duché consistent en divers métaux, tels que le fer, le plomb, le cuivre, le mercure , le zinc, et même l'or et l'argent ; on en tire aussi des marbres, des ardoises, des pierres à chaux, du bitume, du sel et des terres propres à la fabrication de la faïence et de la porcelaine.
Diverses parties possèdent de bons pâturages; l'agriculteur sait y mettre à profit un sol généralement fertile : les céréales, la navette, le houblon, la garance, le tabac, et la phicorée que l'on travaille pour mêler au café et pour la préparation de la soie, constituent ses principaux produits agricoles.
INDUSTRJE MANUFACTURIÈRE. — Le duché possède un grand nombre d'établissements industriels, tels que des fabriques de toile, de draps et de soieries, des moulins à huile, .des papeteries, des manufactures de glaces et de ppreelaine, des verreries et surtout des forges et des usines.
DIVISION POLITIQUE. — Le duché de Brunswick se divise en six cercles qui portent le nom de leur chef-lieu; ce sont les cercles de Brunswick, Wolfenbullel, Helmsled, Holzminden, Gqndersheim et Blankenbourg.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Brunswick ou Braunschweig, capitale du duché, est située dans une plaine et arrosée par l'Ocker, qui s'y partage en plusieurs branches. On dit qu'elle fut fondée en 868 par Brunon, fils du duc de Saxe Adolphe, qui lui donna son nom. Elle est assez grande en y comprenant Jes faubourgs, et l'on porte sa population à 38,000 habitants. plusieurs de ses quartiers sont aérés et bien bâtis : on y remarque quelques belles rues garnies de trottoirs. Ses faubourgs sont formés de jolies maisons et de beaux jardins. Cette ville renferme 12 églises et autant de places publiques. La cathédrale est remarquabl e surtout par
Ips tombeaux de la famille ducale, l'église Saint-André l'est par son cJqcher, qui a 105 mètres d'élévation. Les autres édifices qui piéritent d'être mentionnés sont Ip nouveau palais ou Scftloss, bâti sur l'emplacement de l'ancien palais ducal; l'ancien et Je nouvel hôtel fie ville, le premier bâti dans le goût gothique; l'arsenal, qui contient un beau njusée, et la salle de l'Opéra. La plus belle de ses places est celle du Bourg, ornée d'un lion en bronze que l'on dit avoir été fondu au douzième sièclp par Henri III, dit le Lion.
Un autre monument liislorique attire aussi les regards ; il est coulé en fer , et consacré à la mérrtoii-e du duc de Brunswick , qui mourut en 1806 sur le champ de bataille d'Auerstadt, et de celui qui fut tué en 1815 aux Quatre-Bras. L'Jîafaij: et J'épée de ce dernier prince sont conservés dans Je riche musée d'antiquités, d'histoire naturelle #H gravures que possède pelte viUe, et dans lequel on admire un vase en agate-onyx estimé à la val eu p de plusieurs millions de francs. Outre cet établissement, Brunswick possède une nombreuse bibliothèque, un collège appelé Çarotijfitnf, qui jouit 0 une grande rénutatioti, et une autre institution pfi^s emportante encore depuis qu on y a réuni les deux gymnases d^Calherine et de Martin avec le coilége !le chirurgie et d'anatomic. gii y remarque des hôpitaux, des riiaispps de chanté, et surtout iijj hospice ,r xelins, que l'on peut regarder comme un très-bel pfliîfpè. C'est à Brunswick que naquirent je médecin Meihon et le théologien ffenke, et que fut inventé, dit-on , pgi J534, par un nomme l#rgen, le rouet à filer. C'est aussf$ans cette ville que l'orç mit na mode, il y a plus de 60 ans , le café de chicorée, un y poinpte plusieurs fabriques de cette substance végéfale et d'autres objets dont elle fait son principal copimerce , tels que des chapeauK, Ses rubans, des dentelles , des draps et de la bijouterie. Il s'y tient chaque année, aux jours de la Chandeleur et de la Saint-Laurent, deux foires importantes et six grands marchés aux bestiaux. Le commerce de la ville est d'ailleurs activé par sa situation sur le chemin de fer de Hanovre à Berlin par Magdebourg.
Sept belles avenues d'arbres, qui aboutissent à autant de portes, conduisent à Brunswick; l'une d'elles est la route de llZo(fenbùttel, ville fortifiée, arrosée par l'Ocker, et peuplée de 9,000 âmes. C'est le siège du tribunal suprême d'appel de tout le duché de Brunswick et des principautés de Lippe et de Waldeck. Elle renferme un arsenal, un gymnase et une des plus riches bibliothèques de l'Europe, dans laquelle on trouve plus de 800 Bibles et plus de 10,00.0 manuscrits; on y remarque aussi le monument élevé à la mémoire de Lessing, le la Fontaine de l'Allemagne. Cette cité est Ja plus industrieuse de tout le duché, aussi est-ce une station importante du chemin de fer de Hanovre à Berlin. Helmstedt est, comme les deux précédentes, le siège d'une surintendance générale des affaires ecclésiastiques. Elle est précédée de deux faubourgs, et environnée de murailles ; mais ses fortifications ont été converties en promenades. Elle renferme à places publiques, 4 hôpitaux, 2 églises, dont la seule remarquable est celle de Saint-ptienne, 6,000 habitants, plusieurs manufactures et quelques beaux édifices publics, dont le plus considérable est celui de J'ancienne université, fondée en 1575 par le duc Jules de Brunswipk, et supprimée en 1809 par Napoléon, qui fit transférer une partie de la bibliothèque à Gottingue. Mais il y est resté un collège, qui est renommé.
Celle ville, qui a été fondée en 782 par Charlemagne, a produit plusieurs hommes distingués, entre autres le théologien CaJixte et les littérateurs RitImever, Wolger et Conringius.
C'est aux environs d'Helmstedt qije sont situés, dans une agréable vajlée, les bain d'Amélie, aujourd'hui abandonnés pour ceux de Charles (Kadsbrtlnnen) , où l'on a copstruit une salle de spectacle.
Aux portes de la ville, il existe d'autres bains près du lieu appelé
Maschplatz; on aperçoit le mont Corneille et le mont Sainte-Anne, sur lequel s'élève un monument appelé Autel des holocaustes.
Près des bains de Charles, le botaniste trouve plusieurs plantes dignes de prendre place dans un herbier choisi. Le géologiste peut chercher dans les terrains d'alluvion an milieu desquels est bâti le village de Thiede des ossements d'éléphants, et l'antiquaire remarquera sur le mont Corneille plusieurs de ces pierres placées verticalement dont l'érection est attribuée aux druides. On exploite sur le territoire d'Helmstedt du gypse et de la houille.
Les autres villes situées dans la principale partie du duché q,ue nous parcourons sont, au nord, Vorsfelde et Wechel, et au sud Sckeppenstedi, jolie petite ville qui fabrique de la toile et du coutil, et Schôningen, où l'on exploite une source qui fournit annuellement 500,000 kilogrammes de sel.
Le district du Harz nous offre peu de villes importantes. Seesen, la plus considérable, n'a que 2,200 habitants; on y confectionne une grande quantité de tonneaux. Près du bourg de Neustadt s'élèvent, sur le Burgberg, les ruines du vieux château que fit bâtir l'empereur Henri IV en 1068, et qu'il fit détruire deux ans après parce qu'il avait servi d'asile aux mécontents de la Saxe ; relevé plus tard, il fut abandonné pendant le seizième siècle. Non loin de ce bourg, les salines de Julius-Hall appartiennent en commun au Hanovre et au Brunswick. C'est aux environs d'un autre bourg, appelé Lutter-am-Barenberg, que le général Tilly défit, en 1626, l'armée commandée par Christian IV, roi de Danemark ; ce bourg tire son nom de sa position au pied du Grand et du Petit-Barenberg, sur le bord du Mühfenach, afflent de l'Innerste. La petite ville de Ganderskeim doit son nom à ia Gande, qui J'arrose. Elle renferme un château ducal et les bâtiments d'un ancien couvent, dont l'abbesse était choisie dans la maison de Brunswick. Cette abbaye a été donnée au duc à titre d'indemnité ; son église et les collections qu'on a réunies dans plusieurs salles méritent de fixer l'attention des amateurs d'antiquités. Holzminden, sur Ja rive droite du Weser, au pied des montagnes du Solling, renferme plusieurs établissements industriels importants, tels que des usines où l'on travaille le fer, de grandes fabriques d'épingles et d'aiguilles, et un atelier dans lequel unç belle machine hydraulique scie et polit en dalles les pierres qu'on, tire du Solling. Cette ville, d'environ 4,000 âmes, est l'entrepôt des toiles et des fers du duché, et celui d'une grande quantité de denrées coloniales qu'elle expédie dans l'intérieur de l'Allemagne; elle possède un gymnase important par le nombre de ses élèves. Bevern, ainsi qu'Escltershausen, ne sont que des bourgs, dont la principale industrie consiste à fabriquer de la toile.
Dans la, région montagneuse où viennent se terminer les derniers rameaux de la chaîne du Harz, s'élève Blankenbourg, chef-lieu de l'administration des mines du ijarz, petite ville qui possède un collège, un hôpital, deux églises et de grands magasins de fer.
Elle fut la résidence des princes de Blankenbourg, dont on voit encore le château ruiné. C'est dans ce château, qui la domine et que l'on regarde comme l'un des plus grands de l'Allemagne, que Gonthier ou Gontram de Schwarzbourg fut élu empereur, en 1349, par le vœu des électeurs, qui regrettaient d'avoir choisi trois ans auparavant Charles de Luxembourg, signalé comme l'instrument servile de la cour de Rome, prince qui régna sous le nom de Charles IV, et qui eut recours au poison pour se défaire de son compétiteur. Blankenbourg fut pendant quelque temps habitée par Louis XVIII. C'est dans ses environs que s'étend une série de rochers appelée dans le pays la Muraille du diable, et que l'on voit le romantique Regenstein ou Rocher pluvieux, et les célèbres cavernes de Biel et de Baumann.
Sur la pente d'une montagne au pied de laquelle coule le Hassel,
nous apercevons la petite ville d' Hasselfelde, qui fut entièrement incendiée en 1794, mais qui est très-bien bâtie aujourd'hui; son église renferme un monument en fer érigé à la mémoire dés guerriers morts dans la campagne de 1815.
Les petites enclaves qui complètent le territoire du duché dç Brunswick ne nous Offrent que des localités sans ipiérêt. Iialvôrde n'est qu'un bourg entouré de houblonnières et renfermant un château; Bodenbourg n'a que 801) habitants; Olsbourg est moins considérable encore; enfjn Thedinghausen, sur la rive gauche du Weser, fabrique de la toile et renferme 1,500 individus.
POSSESSIONS MÉDIATES. — Le duché de Brunswick a encore plusieurs Possessions médiates, qui sont : dans la Silésie prussienne, 1° dans la régence de Breslau, la principauté d'Oels, avec la seigneurie de Mendzibor (2,200 kilomètres carrés, 8 villes, 1 bourg, 324 villages) , et la terre de Plomnitz dans le comté de Glatz, cercle de Habelschwerdt ; 2° dans le district d'Oppeln, cercle de Lublinitz, la seigneurie de Gutentag.
STATISTIQUE GÉNÉRALE. — Tels sont les détails topographiques dans lesquels nous avons cru devoir entrer relativement au duché de Brunswick. Ce pays comprend 10 villes, 12 bourgs et 418 villages et hameaux. Son revenu est de plus de 14 millions de francs. L'excédant de ce revenu sur les dépenses présente une somme annuelle de 300,000 francs, dont la plus grande partie est réservée à amortir une dette publique de 35,000,000 de francs. Le contingent qu'il doit fournir à la Confédération Germanique est de 3,1^4 soldats et de Il canons, et son armée, sur le pied de paix, est de 3,000 hommes; la contribution fédérale est de 24,000 francs.
Conjointement avec le duché de Nassau, il tient le treizième rang dans l'assemblée particulière de la Confédération, et seul il jouit de deux voix dans l'assemblée générale.
NOTICE HISTORIQUE. — La maison de Brunswick est une des plus anciennes de l'Europe; elle descend d'Azo, premier warquis d'Esté, en Italie, et qui mourut vers la fin du dixième siècle. Elle a fourni des ducs à la Saxe et à la Bavière ; et, ainsi que nous l'avons déjà dit, sa branche cadette est assise sur le trône de 4 Grande-Bretagne. Le plus ancien prince de la maison de Brunswick est Welf, ou Guelf, duc de Bavière. Un de ses descendants, Henri le Lion, qui était parvenu, par la force des armes et par des négociations habiles, à réunir sous sa domination non-seulement la Bavière et Tes duchés de Saxe et d'Engrie, mais encore les comtés de Brunswick, de Gôttingue, de Nordheim et quelques autres, et qui menaçait encore les Slaves et les Wendes, s'attira la jalousie de l'empereur Frédéric Barberousse,et fut, en 1179, mis au tan de l'Empire ; il perdit les duchés de Bavière et de Saxe. Il ne conserva que les comtés de Brunswick, de Gôttingue et de Lunebourg, qui furent érigés en duché, et constituèrent celui de Brunswick. Ce duché fut par la suite divisé en plusieurs petits Etats; mais, vers le milieu du seizième siècle, ces Etats furent réunis en un seul par Ernest, duc de Lunebourg et de Zell. Après la mort de celui-ci, ils furent de nouveau partagés entre ses deux fils, Henri et Guillaume. Le premier fonda le duché de Brunswick-Wolfenbüttel, qui comprenait la majeure partie du duché actuel; le second fonda celui de Brunswick-Lunebourg, qui fait aujourd'hui partie du royaume de Hanovre.
En septembre 1830, une petite révolution intérieure fit passer la couronne ducale de la tête du prince Charles sur celle du prince Guillaume; et de 1830 à 1851, le duché de Brunswick a joui d'un gouvernement constitutionnel. En 1851, la loi électorale a été changée, ainsi que la constitution; et de plus grandes franchises politiques ont été accordées par le duc Guillaume à son peuple.
SAXE-MEININGEN.
LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. — Le duché de Saxe-Meiningen ou de Saxe-Meivingen - Hildburghausen esl borné au nord par la principauté saxonne d'Eisenach, une enclave de la Prusse, et la principauté _de Schwarzbourg ; la Bavière forme sa limite à l'ouest et au sud; à l'est ce sont le duché de Saxe-CohourgGotha, les principautés de Reuss et de Schwarzbourg, ainsi que deux enclaves prussiennes et une du grand-duché de Saxe-Weimar.
Toute la partie que nous venons d'indiquer forme une bande circulaire longue de 155 kilomètres et large de 24, en y comprenant 4 enclaves : celle de Cambourg, entre le grand-duché de SaxeWeimar et les Etats prussiens ; celle de Kranichfeld, entre les mêmes États et les principautés de Schwarzbourg ; le territoire de Sonnenfeld, entre le duché de Saxe-Cobourg-Gotha et la Bavière, et enfin
dans ce royaume le pays (Je Kônigsberg. Sa superficie est de 2,562 kilomètres carrés, et sa populatioq est de 166,364 habitants.
ASPECT PHYSIQU. — Une grande partie du sgl de cette principauté est montagneuse, boisée et riche en fer, en sel, en soufre, en cobalt, en houille, en pjerres de Wile, en marbre, en ardoise et en argile à fouton. Il y a bien quelques mines d'or, d'argent et de plomb, mais elles ne sont cas assez importantes pour être exploitées, Les (Jeux salipes les, plus qniérables sont celles de Salzurigen et de Friedrichshall. Ups rameaux appartenant au Frankenwald à l'est, au Tljuringerwald vers le nord, et au Rhônegebirge vers l'ouest, se prolongent sur son territoire. -
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Les villes principales de ce petit duché sont Meiningen, Hildburghausen, Saalfeld, PÕsneck et Sonnenberg. Ces cités et plusieurs villages, qui forment 12 bailliages, ont une industrie fort active, dont les établissements consistent en usines, en verreries, en papeteries et en fabriques de diverses étoffes.
Meiningen ou Meinungen, la capitale, environnée de montagnes et située sur la rive droite de la Werra, est une jolie petite ville de 6,000 âmes. Ses établissements utiles sont un collège, un gymnase et une maison d'orphelins; ses édifices, une église, un théâtre, le palais ducal, vaste et d'une élégante architecture, et un beau bâtiment où se tient l'assemblée des états. Le palais du duc renferme une bibliothèque de 24,000 volumes, un cabinet de curiosités et le dépôt des archives. La ville est entourée de remparts et de fossés.
Son industrie se borne à fabriquer des futaines, des crêpes et d'autres étoffes de laine. On visite dans les environs les ruines du château de Henneberg.
La petite ville de Kranichfeld appartient à la fois au duché de Saxe-Meiningen et à celui de Saxe-Weimar.
Le village de Liebenstcin possède des eaux minérales très-fréquentées et une fabrique de couteaux et de cadenas. On fait remarquer dans ses environs le rocher sur lequel saint Boniface, l'apôtre de la Germanie, fit ses premières prédications. A Dreissigacker, autre village, il y a un château ducal dans lequel on a établi une académie forestière et un cabinet d'histoire naturelle. La petite rivière de Steinach, dans laquelle on trouve des perles, donne son nom à deux villages, Steinach et Obersteinaclt, où sont établies plusieurs usines.
Sonnenberg, petite ville située dans une vallée étroite sur le Rôten, ne consiste qu'en une seule rue d'une grande longueur : elle est remarquable par ses fabriques de quincaillerie, son commerce de jouets d'enfants, et par le mouvement industriel qu'elle a contribué à répandre dans tout son territoire.
Le pays de Sonnenherg, peu important par son étendue, est fort intéressant par son industrie. Il offre un nouvel exemple de la prospérité à laquelle une population peut parvenir par le travail et l'économie. Cet arrondissement, couvert de montagnes et de forets, retire annuellement de ses produits, peu importants en apparence, une somme de 400,000 francs; la main-d'œuvre seule leur donne quelque valeur: ce sont des jouets d'enfants, des boîtes et des coffrets en bois, des billes en marbre, des boutons d'habits en verre et divers articles de quincaillerie. On peut dire de ces montagnards que l'intérêt commercial les a naturellement portés à diviser le travail pour trouver dans la main-d'œuvre une plus grande économie de temps. L'un ne fait que des corps de poupées, l'autre que des bras ou des jambes; celui-ci les réunit, celui-là les orne des couleurs exigées ; il en est de même de tout ce qu'ils fabriquent en bois ou en carton : d'où il résulte que tout ce qui sort de leurs mains se vend à très-bas prix, et qu'ils peuvent donner, par
exemple, pour 3 ou 4 francs 70 douzaines de petites trompettes d'enfants. Ce qui sort de ce pays se répand dans les diverses parties de l'Allemagne, et se vend, sous le nom d'ouvrages de Nuremberg, à Francfort, à Leipzig, à Dresde, à Nuremberg, à Munich, et dans d'autres villes commerçantes, qui expédient ces produits dans toutes les contrées de l'Europe et jusqu'en Amérique.
Hildburgltallsen, arrosée aussi par la Werra, est une jolie ville de 4,500 habitants, ceinte de murailles, entourée de 2 faubourgs, et divisée en 2 parties, la vieille et la nouvelle ville. Elle était la capitale du duché de Saxe-Hildburghausen avant l'extinction de la branche de. Gotha, c'est-à-dire avant 1826. A Roda, située dans une vallée boisée, il y a un château ducal et une maison de charité.
A Kltala-, sur la Saale, est un grand entrepôt de bois flotté. Saalfeld, ville de 4,000 âmes, a un beau château ducal, un collège, un hôtel des monnaies, une direction des mines, une école latine et plusieurs manufactures. Dans ses environs, il existe au Rotheberg une importante exploitation de fer. On remarque à peu de distance de Saalfeld le monument élevé à la mémoire du jeune prince LouisFerdinand de Prusse, sur la place même où il fut tué le 10 octobre 1806. Pôseneclc ou PÕsneclf, entourée de murs, n'a que 3,000 habitants ; mais elle possède des fabriques de tissus de laine, des tanneries, et une manufacture de porcelaine.
GOUVERNEMENT. — Le gouvernement de ce duché est monarchique et constitutionnel depuis l'an 1824; mais les agrandissements qu'il obtint par héritage, à l'extinction de la branche de Saxe-Gotha, en 1826, nécessitèrent quelques modifications dans la constitution. D'après ces modifications, l'intégrité du territoire est admise en principe ; le duc et ses successeurs sont reconnus majeurs à 21 ans ; dans la répartition des emplois publics, la religion du candidat ne peut être considérée ni comme un avantage ni comme un obstacle. Toutes les communions chrétiennes jouissent de la protection de la loi et d'une entière liberté de conscience.
Aucune différence de rang n'exempte des devoirs communs à tous les habitauts. et n'établit de privilège pour l'acquisition de biens el de droits seigneuriaux, ou pour les charges publiques. Le nombre des députés aux états est de 24, savoir : 8 pour les propriétaires de biens seigneuriaux, 8 pour la bourgeoisie et 8 pour les paysans. Toute disposition du souverain doit être contre-signée par un membre responsable du conseil privé ou du ministère. L'administration du duché a reçu en 1848 quelques modifications libérales.
RANG DANS LA CONFÉDÉRATION1, FINANCES. — Le duché de Saxe- Meiningen occupe le douzième rang avec les autres États saxons dans la Confédération , et il a une voix dans le plenum.
Son contingent fédéral est de 1,726 hommes, y compris la réserve, et la contribution qu'il doit à la caisse fédérale est de 12 à 15,000 francs. Les revenus de l'Etat sont évalués à près de 3 millions de francs, et la dette publique est d'environ 10 millions de francs.
SAXE-ALTENBOURG.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. —
Le duché de Saxe - Altenbourg se compose de deux portions principales , séparées par la seigneurie de Géra, qui appartient à la principauté de Reuss-Lobenstein-Ebersdorf. La partie orientale est bornée, au nord et à l'est, par le royaume de Saxe; au sud, par ce royaume et le duché de Saxe-Weimar; à l'ouest, par ce duché, la seigneurie de Gera et la province prussienne de Saxe.
La partie occidentale touche, au nord et à l'ouest, à la principauté de Weimar; au sud, au duché de Saxe-Meiningen, et à l'ouest à celui de Saxe-Weimar. La première a 38 kilomètres de longueur sur 22 de largeur; la seconde, 45 de longueur sur 13 de largeur.
La superficie des deux, réunie à celle de plusieurs petites enclaves, est de 1,344 kilomètres carrés. La population du duché était évaluée à la fin de l'année 1854 à 132,233 habitants.
DESCRIPTION PHYSIQUE. — La partie orientale montre à découvert des roches de formation ancienne, telles que des schistes argileux à l'ouest d'Altenbourg, des marnes et des grès bigarrés à l'est et au sud. Ces grès et ces marnes s'étendent sur toute la partie occidentale. On exploite dans tout le duché du fer, du cuivre, du cobalt, de la houille, du gypse, du sel, du porphyre et du kaolin.
La partie orientale présente de belles plaines, tandis que l'autre offre un grand nombre de collines qui appartiennent -aux ramifications les plus septentrionales de l'Erzgebirge. La première est très-
fertile en blé, la seconde renferme beaucoup de bois. Dans l'une et dans l'autre, les moutons fournissent une laine très-fine-, qui se vend , comme dans les autres pays saxons , sous le nom de laine électorale.
DIVISIONS POLITIQUES. — Le duché renferme 8 villes, 2 bourgs et 458 villages répartis dans 2 cercles : celui d'Altenbourg et celui de Saal-Eisenherg.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Altenbourg, la capitale, assez bien bâtie, forte de 16,800 âmes, renferme 4 églises, un gymnase, une bibliothèque publique et un cabinet d'histoire naturelle. Le château ducal, situé sur un rocher, mérite d'être visité.
Ronnebourg, à 26 kilomètres d'Altenbourg, possède un châteaD-qui n'a rien de curieux, une population qui s'élève à un peu plus de 4,000 âmes, et un bel établissement d'eaux minérales qui, malgré sa situation agréable et les dépenses qu'on a faites pour l'embellir, est peu fréquenté. Eisenberg ou Eisenbonrg, petite ville peuplée comme la précédente, et dominée par un château, renferme un observatoire et quelques établissements industriels, dont le plus considérable est une manufacture de porcelaine.
GOUVERNEMENT. — Le gouvernement de ce duché est monarchique constitutionnel. L'autorité ducale est limitée par le contrôle d'une chambre élective. La constitution date du 29 avril 1841.
RANG DANS LA CONFÉDÉRATION, FINANCES. — Le duché de Saxe-Al tenbourg occupe avec les autres duchés saxons le douzième rang dans la Confédération Germanique; il possède une voix dans le plénum, ou assemblée générale. Son contingent est fixé à 1,473 hommes, et sa contribution fédérale à 10 ou 12,000 francs.
En 1854, le budget des recettes s'élevait à 2,400,000 francs, et celui des dépenses à 2,350,000 francs. Cet État a une dette peu importante, qui a été contractée en partie pour l'établissement du chemin de fer de Leipzig en Bavière, qui le traverse en suivant la vallée de la Pleisse.
SAXE-COBOURG-GOTHA.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. —
Le duché de Saxe - Cobourg - Gotha comprend deux principautés séparées par des portions d'autres petits Etats. La principauté de Gotha, qui est la plus considérable et la plus septentrionale, est bornée au nord et à l'est par la province prussienne de Saxe; à l'ouest, par la principauté d'Eisenach, et au sud , par une enclave de la Prusse. Nous négligeons de nommer d'autres parties d'Etats qui la bordent à l'est et à l'ouest. La principauté de Cobourg, la plus méridionale, touche, au nord et à l'ouest, le duché de SaxcMeiningen; au sud et à l'est, le royaume de Bavière. La superficie des deux duchés réunis est de 2,035 kilomètres carrés, et l'on évaluait leur population à la fin de 1852 à 150,412 habitants.
DESCRIPTION PHYSIQUE, PRODUCTIONS NATURELLES.
- La principauté de Gotha est bornée au sud par le Thiiringerwald , qui étend jusque dans son centre ses rameaux peu élevés. Celle de Cobourg est couverte dans sa partie septentrionale par les montagnes qui joignent le Frankenwald au Rhonegebirge; elle offre la grande vallée de l'Itz, nommée ltzgrimde, et plusieurs autres vallées fertiles. Les productions minérales consistent en fer, en houille, en magnésie et en porphyre, que l'on exploite pour en faire des meules. On récolte dans tout le duché une assez grande quantité de blé, d'épeautre, de pommes de terre et de lin, surtout dans la principauté de Gotha, qui produit aussi des carottes estimées et des truffes qui ne le sont pas moins. Dans les deux principautés , le gros bétail est une des principales richesses ; on y nourrit des moutons dont la laine est recherchée.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Gotha est la plus jolie de toute la Saxe ducale. C'est une de celles qui possèdent les établissements scientifiques les plus remarquables. Son gymnase, où l'on compte une vingtaine de professeurs, est célèbre ; son observatoire , situé sur le Seeberg, aux portes de la ville, est l'un de ceux qui ont rendu le plus de services à l'astronomie par les travaux qu'y ont faits les savants barons de Zach et de Lindenau ; l'école normale est peut-être la plus ancienne de l'Allemagne. Son établissement géographique, fondé par Justus Perthe, tient le premier rang en Europe par ses admirables productions. Outre ces établissements , il y a une école d'industrie et de commerce, une école militaire, une école d'accouchement et plusieurs écoles élémentaires gratuites. Gotha est agréablement située sur le penchant d'une colline au-dessus de la Leine. Elle renferme de belles fontaines et quelques édifices d'une élégante construction. L'ancien château ducal, appelé Friedenstein, qui la domine, possède une terrasse qui rivalise avec celle de Windsor en Angleterre. On y a réuni des collections précieuses qui, depuis plusieurs années, sont ouvertes au public ; elles consistent en une bibliothèque de 160,000 volumes, comprenant plus de 2,000 manuscrits; une galerie de tableaux occupant 12 salons distribués par écoles, un cabinet d'histoire naturelle et de curiosités, une collection de médailles, l'une des plus riches de l'Europe ; un cabinet de physique, un musée d'antiques , enfin un musée oriental, où l'on a rassemblé un grand nombre d'objets chinois. Ce château renferme aussi un arsenal. Il est à 349 mètres au-dessus du niveau de l'Océan. Parmi les églises de Gotha, il y en a 7 qui sont destinées au culte évangélique : l'une des plus remarquables, est celle des orphelins ; la chapelle catholique de Sainte-Marguerite renferme les tombeaux des ducs de Saxe-Gotha; dans le parc du palais de Friedrichsthal, on remarque les tombeaux du duc Ernest, de ses jeunes fils et du duc Auguste.
Cette ville, qui fut bâtie vers l'an 964 par un archevêque de Mayence, compte 15,000 habitants. Elle possède plusieurs établissements de bienfaisance. Elle fait un commerce important du produit de ses manufactures de porcelaine et de ses fabriques d'étoffes de laine et de coton, de papiers peints, de tabac, d'instruments de mu-
sique et de chirurgie. Station importante du chemin de fer de Cassel à Leipzig, elle est l'entrepôt d'un commerce actif entre Leipzig et le reste de l'Allemagne. C'est la patrie de quelques hommes distingués, tels que les médecins Gaspard Hoffmann, Thomas Reinesius et le poëte Gotter.
Cobourg fabrique aussi plusieurs tissus et de la porcelaine ; on y fait divers objets de luxe en bois pétrifié; mais son commerce principal consiste en tabac, en vins et en étoffes de laine. Sa situation sur la rive gauche de J'Itz, dans une belle vallée, ajoute aux sujets de distraction qu'elle offre aux étrangers. On y trouve un casino, une salle de spectacle, des redoutes, des concerts et une réunion agréable appelée Erholung. Elle est en réputation chez les gastronomes allemands pour ses excellents saucissons. Ses plus beaux édifices sont le magnifique château d'Ehrenbourg, l'une des résidences du prince, l'hôtel de ville, l'arsenal et l'église SaintMaurice. Sans être, sous le rapport des arts et des sciences, la rivale de Gotha, elle possède cependant un gymnase de première classe, un séminaire de maîtres d'école, un observatoire, un cabinet de physique et d'histoire naturelle et une bibliothèque ducale. Sa population est de 10,000 habitants. Elle est défendue par une citadelle.
Dans la principauté de Gotha, la petite ville de Friedrischrode, siège d'une administration des mines ; celle d'Ohrdl'ujj, où l'on voit un château appartenant aux princes d'Hohenlahe, et celui de Zellcr, sont importantes par leur industrie. A Tonna, où l'on a découvert une source minérale, on a établi une maison de bains.
Près de ce village, on a plusieurs fois trouvé des ossements d'éléphants au milieu du terrain d'alluvion qui constitue le sol. On récolte dans ses environs de l'anis, de la garance, et la plante connue sous le nom de pastel (isatis tinctoria) , dont la qualité l'emporte sur celle que produit le reste de l'Allemagne.
Dans la principauté de Cobourg, Rodach possède un haras, avec un petit château qui sert de rendez-vous de chasse; Neustadt, surnommée An-der-Hayde, rivalise avec Sonnenberg pour la fabrication des jouets d'enfants.
ORIGINE DES DUCHÉS DE SAXE. — Les ducs de SaxeCobourg, d'abord ducs de Saalfeld, puis de Saxe-Cobourg-Saalfeld, sont une des branches de la maison ducale de Saxe-Gotha, issue elle-même de la branche Ernestine, et qui prit naissance en 1680 quand les sept fils d'Ernest le Pieux se partagèrent ses Etats.
En 1825, la famille souveraine de Saxe-Gotha-Altenbourg s'étant éteinte en la personne du duc Frédéric IV, le duché de ce nom fut divisé entre ses héritiers les ducs de Saxe - Cobourg, Saxe-Altenbourg et Saxe-Meiningen. La plus grande partie passa au duc de Saxe-Cobourg, qui prit alors le titre de Saxe-Cobourg-Gotha. Cette famille s'est alliée à plusieurs des grandes puissances de l'Europe par mariages.
GOUVERNEMENT. — Les deux duchés de Cobourg et de Gotha sont depuis le 3 mai 1852 réunis sous une constitution commune.
L'autorité du grand-duc est limitée par la surveillance de deux chambres électives formées dans chacun des deux duchés.
RANG DANS LA CONFÉDÉRATION, FINANCES. — Le duché de Saxe-Cobourg-Golha occupe le douzième rang dans la diète; il a une voix dans l'assemblée générale. Son contingent est de 1,674 hommes, y compris la réserve, et sa contribution fédérale est d'environ 13,000 francs. Son budget pour la période 1853-1857 était annuellement d'environ 740,000 francs pour Cobourg, et de 1,800,000 francs pour Gotha.
Sa force armée, y compris le contingent fédéral, forme un régiment à 2 bataillons de 837 hommes, partagés en 4 compagnies, plus une compagnie de réserve : en tout 1,860 hommes.
ANHALT.
NOTICE HISTORIQUE. — Avant de visiter les deux duchés d'Anhalt, nous donnerons un précis historique sur les princes qui les gouvernent. S'il n'est pas certain qu'ils descendent du grand Wilikind, ils partagent du moins l'honneur de tenir un rang parmi les plus anciennes familles régnantes de l'Europe. L'historien allemand Limnœus n'a pas craint le ridicule en les faisant descendre d'Ascanus ou Ascenazus, fils de Gomer et petit-nis de Japhet, fils de Noé. Autant valait remonter au premier homme de la Genèse.
Que d'erreurs une érudition sans goût et sans critique a fait comQue d'erreurs une érudition sans f~-. d é c h irer le voile impénétrable mettre aux auteurs qui ont tenté de déchirer le voile impénétrable qui cache l'origine des peuples et des familles ! On voulut trouver la souche des anciens comtes d'Ascanie, d'où descendent les ducs d'Anhalt, et l'on a imaginé que des peuplades de l'Asie mineure, des Ascaniens, avaient quitté les marais de l'Ascanie dans la Bithynie, pour aller s'établir dans les antiques forêts de la Germanie.
De là l'origine d'un Ascenazus, que l'on fit chef de ce peuple ascanien, et que l'on fit descendre d'un petit-fils de Noé. Mais on sait aujourd'hui quel degré de confiance on doit accorder à ces recherches étymologiques, depuis que des savants recommandables en ont démontré la futilité. L'origine des ducs d'Anhalt remonte probablement au huitième siècle; mais ce qu'il y a de certain, suivant quelques auteurs, c'est qu'ils descendent d'Esiko, comte de Ballensledl, qui vivait dans le onzième siècle. On peut suivre la filiation de cette famille jusqu'à Henri, premier prince d'Anhalt, c'est-à-dire jusqu'au commencement du treizième siècle. Diverses alliances la portèrent à un haut degré de splendeur. Albert, surnommé l'Ours, l'un des princes de cette maison, fut fait margrave et électeur de Brandebourg par l'empereur Conrad III. Frédéric Barberousse donna à Bernard , l'un des fils d'Albert, une partie des Etats enlevés à Henri le Lion. C'est de Bernard que descendent les ducs actuels d'Anhalt. En 1686, la maison d'Anhalt se divisait enquatre branches : Dessau, Bernbourg, Kôthen et Zerbst. Cette dernière s'éteignit en 1793 ; la famille se partagea en trois branches : Anhalt-Dessau , Anhalt-Hernbourg et Anhalt-Kôthen, jusqu'au 22 mai 1853, époque à laquelle des lettres patentes du duc Léopold-Frédéric, chef de la branche aînée, décrétèrent la réunion des duchés d'Anhall-Dessau et d'Anhalt-Kôthen en un seul duché. Les ducs d'Anhalt se succédèrent les uns aux autres; et sous le rapport du crédit, ils sont solidaires sous la direction de la branche ainée. qui est celle d'Anhalt-Dessau.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. RANG DANS LA CONFÉDÉRATION. — Les duchés d'Anhalt sont enclavés dans les possessions de la monarchie prussienne. Leur superficie totale est de 56 milles géographiques carrés allemands ou 3,136 kilomètres carrés, et leur population totale, en 1852, s'élevait à 176,400 habitants. On y compte 27 villes, 8 bonrgs et 341 villages et hameaux. Ces duchés possèdent, avec les maisons de Schwarzbourg et d'Oldenbourg, une voix collective dans l'assemblée ordinaire de la Confédération Germanique. Dans l'assemblée générale, chacun d'eux a unr voix individuelle. Quant à l'administration de la justice, ces deux duchés, comme les deux principautés de Schwarzbourg , ressortissent au tribunal d'appel de Zerbst, petite ville dont nous parlerons bientôt.
I. AJVHALT-DESSAU-KOTHEÎV.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. —
Le duché d'Anhalt-Dessau-Kôthen se compose de plusieurs territoires situés sur les rives de l'Elbe et de la Mulde. La partie principale est bornée au nord par l'Elbe, à l'est et au sud par la régence prussienne de Mersebourg, et à l'ouest par le duché d'AnhaltKÕtheli. Les autres parties sont situées au nord de la précédente : l'une lui est contiguë ; les deux autres sont enclavées dans la régence prussienne de Magdebourg. La superfieie totale de toutes ces petites possessions est de 40 milles géographiques carrés allemands ou 2,240 kilomètres carrés, et sa population est de 123,759 habitants.
ASPECT PHYSIQUE, PRODUCTIONS. — Sous le rapport de l'agriculture, le sol y est d'une fertilité très-variable; plusieurs parties sont basses, humides et couvertes de petits lacs, d'autres sont légèrement sablonneuses. Les bailliages situés sur la rive gauche de l'Elbe sont très-fertiles ; ceux de la rive opposée renferment des bruyères. Toutes les parties du duché sont suffisamment boisées. Les produits de la culture consistent en céréales, en lin, en pommes de terre, en houblon. Les environs d-e KÕlhen sont généralement plats ; le sol est fertile et produit surtout des céréales et
des fruits en abondance. Les bestiaux, surtout les brebis, étaient fréquemment atteints de maladies dangereuses, lorsqu'en 1815 le gouvernement ordonna l'inoculation de la clavelée, mesure qui arrêta les ravages de ce virus contagieux.
INDUSTRIE, COMMERCE. — Le pays possède un grand nombre de filatures de laine et de brasseries, des manufactures de tabac, et plus de 120 fabriques de draps. Dans les campagnes, on trouve des moulins à huile, des papeteries, des distilleries, des tuileries et des fabriques de poteries communes. Les exportations consistent en huiles et en semences de carottes, en blé, en fruits, en laines, en bestiaux et en poissons. On évalue la valeur de ces produits à 500,000 reichsthalers (le reichsthaler vaut environ 3 fr. 72), et les importations à 1,000,000 de la même monnaie.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Dessau, sur la Mulde, qu'un tronçon de chemin de fer unit, à Kôthen, à l'importante ligne de Hambourg à Halle, etc., est une jolie ville de 12,000 habitants, divisée en quatre parties, la vieille et la nouvelle ville, le Sand et le Wasservorstadl; elle renferme sept places publiques et une trentaine de rues droites, régulièrement bâties, et bien éclairées pendant la nuit. Elle a quatre églises, une synagogue, trois hôpitaux, un hospice d'orphelins, une maison de charité, un bain public, plusieurs établissements d'instruction, dont les plus importants sont un collège, un séminaire de maîtres d'école, un institut d'éducation pour les juifs, une école pour les langues étrangères, une bibliothèque publique et quelques fabriques. Ses plus beaux édifices sont le palais du duc, le manège, les écuries du prince et la salle de spectacle. Cette ville possède une fabrique considérable de chapeaux de paille cousue. Dans ses environs, on remarque le Dreberg ou le Mont- Tournant et la montagne de Sieglitz, avec le monument du comte d'Anhalt.
A IVarlilz, petite ville de 2,000 habitants, le duc possède un très-beau château et de magnifiques jardins. Les maisons de plaisance appelées Louisium et Georgium méritent d'être vues. Zerbst, sur le bord de l'Elbe, a 8,500 habitants, un gymnase, et peut-être la plus ancienne école protestante de demoiselles connue en Allemagne : sa fondation remonte au delà de trois cents ans. On y remarque également une école supérieure appelée le Francisceum, avec seize professeurs et un grand nombre d'élèyes. Elle renferme aussi une maison de correction et de travail. On fabrique dans cette ville des soieries et des velours, ainsi que de la passementerie d'or et d'argent. Elle est entourée de murailles avec six portes et un vieux château. Zerbst est la patrie de l'impératrice de Russie Catherine IL La petite ville d'Oranienbaum, à 10 kilomètres de Dessau, est bien bâtie et agréablement située près de la montagne de Kappengraben.
Iesnitz, la ville la plus méridionale du duché, renferme plusieurs fabriques. Le duc possède un château à Sundersleben.
Kùlken, que l'on écrit aussi Côtlicn, est la capitale des deux duchés nouvellement réunis : elle est située sur les bords du Ziltan; sa population est de 5,800 habitants. Cette petite ville est située sur la grande ligne de Hambourg-Magdebourg-Halle, qui traverse l'Allemagne du nord au sud ; elle renferme plusieurs établissements d'éducation, un séminaire de maîtres d'école, une bibliothèque, un cabinet d'histoire naturelle et une galerie de tableaux. On y fait le commerce de laines , et l'on y fabrique des fils d'or et d'argent pour la broderie et la passementerie.
Nommons encore d'abord, sur le territoire situé à la gauche de l'Elbe, Nienbourg, où se tiennent des foires assez fréquentées, et, dans la partie opposée, enfin Roslau, qui renferme un château, mais qui n'a pas plus de 900 habitants.
FINANCES, FORCES MILITAIRES. — Le budget du duché d'Anhalt-Dessau-KÕthen est d'environ 4 millions de francs pour les recettes; les dépenses sont de 3 millions de francs ; la dette est de 2,400,000 fr. pour le Dessau, et d'environ 7 millions de fr. pour l'Anhalt-Kôthen ; le duché doit à la Confédération 1,280 hommes.
II. ANHALT-BERNBOURG.
SUPERFICIE, POPULATION. — Plusieurs terrains dispersés constituent le territoire du duché d' ânhalt-Bernbourg, dont la superficie peut être évaluée à 896 kilomètres carrés. Il renferme 7 villes et 54 villages, et sa population est évaluée à 52,641 habitants.
SITUATION, ASPECT PHYSIQUE. — Ce duché se compose de deux parties principales : l'une sur la gauche de la Saale, que
l'on appelle la Principauté inférieure, et qui est limitrophe du duché d'Anhalt-Kôtlien ; l'autre, appelée Principauté supérieure, et qui occupe une partie du Harz : elle est éloignée de la précédente par un espace d'environ 4 kilomètres, espace qui appartient à la province prussienne de Saxe. Cette dernière principauté est montagneuse et couverte de forêts; dans l'autre, le terrain est bas ; il présente de grandes plaines et des terres très-fertiles.
CLIMAT, PRODUCTIONS NATURELLES; INDUSTRIE ET COMMERCE. — Le climat y est en général tempéré, surtout dans la partie orientale ; car la Principauté supérieure, qui s'étend jusque sur les pentes des montagnes du Harz, est soumise à une température froide. On y trouve des midès de différents métaux, dont quelques-unes sont assez riches ; les produits agricoles sont à peu près les mêmes que dans la principauté précédente; l'industrie y est variée; outre plusieurs manufactures de différents produits, on y remarque des forges, des usines, des aciéries, des fabriques de fil de fer el de sulfate dû même métal, connu dans le commerce sous le nom de Titridl, DESCRIPTION TOPOGRAPHIQtE. — Bernboilrg, la plus importante des tilles du duché, a le titre de capitale. Un tronçon, de chemin de fer l'unit â KÕtHen. Située sur le pènchatit d'une ttilline et sur le bord de là Saale, qui y est retenue fat- une digue remarquable, elle est divisée en trois quartiers séparé?, dont deux sont entourés de murailles ; le troisième dotuiilè les deux autres : t'est là qtte se trouve le château dpcal. Berribotfrg est bien bâtie; elle a un hôtel des monnaies, a églises et plusieurs hôpitaiiij, ainsi que des fabriques de tabac et de faïence. Les bâtiments de la chancellerie sont vastes, etrenferinent une bibliothèque et une riche collection l'estâfupes. Sa population est d'environ 7,000 âmes. Dans ses environs pn compte plusieurs petits vignobles sur le bord de ta Saale.
Dans là Principauté sbpérieure, la petite villè de BaUeniiedt possède du vieux château dutal, qui; par la beauté de ses Jardihs, est lè seiil édifice remarquable de cette cité sonibre et mal bâtie.
C'est là résidence habùlifelie du prince. Les autres constructions sont liii théâtre, une v. maison de bains èi une salit pour les redotites. A Gernrodè, on retharque les bâtiments d'une ancienne abbaye impériale, ftbnt là belle église renferme le maùsdléë de son
fondateur, le margrave Gero. Hoymb, sur la petite rivière de la Selke, est environnée d'une muraille percée de quatre portes, et possède un château, ainsi qu'une importante fabrique où l'on file le lin qu'on cultive en grande partie dans ses environs, et qui forme sa principale branche de commerce. La Principauté supérieure offre une foule de sites pittoresques par le nombre de ses montagnes et de ses vallées. Harzgerode, dont une partie des 2,200 habitants s'occupe de l'exploitation des mines de fer et d'argent de ses environs , est placée sur un sol élevé de 465 mètres au-dessus du niveau de la mer. C'est au Miidchensprung ou Magdesprung, groupe de rochers sourcilleux, que sont situées les usines et les exploitations métalliques du duché. Une seule mine d'argent y produit annuellement environ 1,200 marcs. Les usines consistent en deux hauts-fourneaux pour la fonte du iriiitetâi de fer, en quatre feux d'affinerie pour le fer en bmres et l'acier, et en d'autres ateliers où l'on fabrique de la tôle et au fil ae fer. Ces établissements produisent 12,000 quiiltaui. fle tonle, 8,000 de fer en barres, 500 de tôle et 300 8e fil de fer. Non loin de ces exploitations se trouve l'obélisque, de, 19 mètres de hauteur, élirfé t lit mémoire du dernier duc, Frédéric-Albert, par son successeur.
POSSESSIONS MÉDIATÈS. - Le duché d'Anhalt-Bernbourg a pour possessions Jhédiales : dans 13 pttftiilcè prussienne de Saxe, régence de ei-Sèhourg, la {erre de EeÍtz et le village de Belleben avec 800 Ii tlnts; Èt dans la régence fie Jfagdebourg, ttne partie de l'ancien lac èl'Asclter$fef¡en.
GtJUVEftlflEMljNT. — D'âfttès là constitution promulguée en 1850, le duc ae Bernbourg est seconde par un ministère d'État, ni réutllt dans soii Sein la direction de toutes les branches de l'adtniiiistiâtiotf,- tant intérieure qu'exléflfebre, et par une chambre composée de membres élus au premier lIgrê- dans la proportion d'un député sur 3,000 habitants.
FINANCES, FORCES I«tLttAI#ES, - Le budget du duché d'Anhalt-Bernbourg était pour 1853-1856 de 2,500,00(1 francs pour les recettes, et 2,490,00(1 francs ppur les dépenses; la dette publique était d'environ 6 miUiotÎs de irancs; le duché doit à la Confédération 555 HwHtfwBg-
NASSAU.
LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. — Borné à l'ouest et au nord par les possessions prussiennes rhénanes, à l'est et au sud par Fenchtte prussienne de Wetzlàr et le grand-duché de Hesse-Darmstadt, le duché de Nassau, long d'environ 95 kilomètres, et large de 64, occupe une superficie de 85, 50 milles carrés géographiques allemands ou 4,788 kilomètres carrés. Sa population était en 1854 de 428,819 habitants, dont 223,738 protestants, 197,755 catholiques et 6,958 israélites.
ASPECT PHYSIQUE. —Presque tout ce pays est montueux: deux chaînes principales, bien que médiocrement élevées, l'une dans la partie septentrionale, l'autre dans la partie méridionale, le parcourent du couchant au levant. La première est celle du Westerwald, la seconde celle du Taunus ou de Hôhe. Entre ces deux chaînes, s'étend le bassin de la Lahn, rivière qui coule de l'est à l'ouest, pour aller se jeter dans le Rhin à l'extrémité du duché; car ce fleuve forme la limite du territoire de Nassau, depuis le point où il reçoit le Mein jusqu'à celui où il reçoit la Lahn. Celle-ci se grossit de plusieurs petites rivières qui sont, sur sa rive droite, l'Elz et l'Aue, et sur sa rive gauche l'Aar, le Dreisrh, l'Embs, le Mûhl et le Weil. Le Rhin y reçoit encore le Wisperbach, le Mein et la idda. ,
Le Westerwald, dont le nom signifie Forêt de l'ouest, a en effet ses pentes et ses cimes couvertes de forêts. Le Taunus n'est pas moins hoisé, mais il offre moins de sources minérales. Les sommets les plus élevés de ces deux chaînes diffèrent peu de hauteur; ils atteignent 500 à 800 mètres.
CLIMAT. — Le climat du duché est doux dans les vallées, et principalement au sud, sur les bords du Rhin et du Mein; il est froid dans le Westerwald et le Taunus, mais partout salubre.
RICHESSES MINÉRALES. — La richesse minérale du pays consiste en mines d'argent, de cuivre, de fer et de plomb, en carrières de marbre, en houillères, en exploitations d'argile à foulon et à poterie, et en sources minérales. Les principales mines de plomb
argentifère sont celles des environs de Weilmiinster et deHolzappel : ces dernières seules rapportent annuellement plus de 100,000 fr. ;
on exploite du marbre, de la houille et du sel près du village de Soden, à peu de distance du Mein; enfin les principales sources d'eaux minérales sont celles d'Embs, de Fachingen, de Gellenan, de LanffenschwaIbach, de Schlangenbad , de Soden, de Wiesbaden, et surtout de Selters.
PRODUCTIONS NATURELLES. — Le sol n'est point d'une grande fertilité, mais nulle part il n'est improductif; celui qui l'est le moins est dans la région du Westerwald; celle-ci renferme à la vérité d'excellents pâturages. Les terres les plus productives sont celles des bords du Rhin, où l'on cultive principalement la vigne, et celles qu'arrosent la Lahn et l'Aar, où l'on récolte le meilleur blé. Partout la culture est fort avancée; on tire un grand parti de la vigne et des arbres fruitiers; les prairies artificielles y sont parfaitement dirigées. Les meilleurs vins sont ceux d'Asmanshauser, de Geisenheim, de Hattenheim, de Johannisberg, deMarkbrunn, de Rüdesheim et de Rheingau. Ceux de ce dernier vignoble, qui ne sont cependant point à comparer à ceux de Johannisberg, se vendent dans certaines années 2,000 à 6,000 francs la pièce.
Le duché comprend 1,814,967 arpents (moryett, il en faut deux pour un hectare) de terres imposables, dont 702,331 arables, 15,498 en vignobles, 106,991 en pâturages, 39,660 en landes et en chemins, et 739,112 en forêts.
Les pâturages nourrissent un grand nombre de bestiaux : en 1818, on comptait dans le duché 10,300 chevaux et poulains, 170,000bètes à cornes, plus de 158,000 brebis, 54.000 porcs et 8,000 chèvres.
Le recensement de cette époque portait le nombre des ruches d'abeilles à 19,000.
INDUSTRIE, COMMERCE. — L'industrie ne s'exerce en grand sur aucune branche de produits, si ce n'est sur la fonte des métaux, et principalement du fer. On fabrique des draps et des bas dans le bailliage d'Uringen, du maroquin à Idstein, du tabac, des pipes, de la latence, de la porcelaine, des aiguilles et du papier
Postillon et maréchal ferrant du duché de Nassau.
dans plusieurs localités ; mais les manufactures les plus nombreuses sont celles de potasse et celles de grosses toiles, les brasseries et les distilleries d'eau-de-vie.
Malgré tant d'éléments commerciaux, malgré la navigation du Rhin, de la Lahn et du Mein, malgré des routes bien entretenues, le commerce du duché a peu d'activité. Les capitaux se portent principalement sur l'agriculture. Les principales branches d'exportation sont les vins, les fruits, la potasse, le fer, les pipes, les aiguilles, les eaux minérales, les bestiaux et la laine des brebis.
DIVISION POLITIQUE. — Ce territoire est divisé en 28 bailliages, qui portent le nom de leur chef-lieu; il renferme 31 villes, 36 bourgs et 816 villages.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Parmi les villes nous citerons, dans la partie septentrionale, Braubach et Holzappel, près desquelles on exploite des mines d'argent, dont le produit s'élève à plus de 80,000 florins; Diez, qui possède une belle école d'horticulture , et qui a dans ses environs une maison de force et l'ancien château d'Oranienstein, résidence des ducs de Nassau; Dillenbourg, qui porte le nom de la Dille, qui l'arrose, et dont on cite le cuivre ; Weilbourg, située sur une montagne au pied de laquelle coule la Lahn, dans un petit pays appelé autrefois Wettéravie, du nom de la rivière de Wetter. Cette petite ville renferme un gymnase, un château avec de beaux jardins, où résidait le prince de NassauWeilbourg ; ses environs sont riches en mines d'argent, de fer et de cuivre. Nous citerons encore Hadamar, qui possède un lycée et des usines ; Limbourg, petite ville murée, entourée de trois faubourgs ; Nassau, que dominent les ruines de son vieux château; Hcrborn, où l'on trouve -une académie et une célèbre école protestante de théologie, fondée en 1584 par le comte Jean le Vieux, ville qui a donné le jour aux deux savants philologues George et Mathias Pasor.
Les villes delà partie méridionale sont Langenschwalbach, qui possède des sources et des bains d'eaux minérales renommés;
Runkel, qui donne son nom à une principauté médiate appartenant aux princes de Wied-Runkel ; Hôchst, qui, par sa position sur le Rhin, fait un commerce d'expédition fort animé. La plus considérable de ces villes n'a pas 3,000 habitants.
Uliesbaden, la capitale, en renferme environ 15,000. Entourée de montagnes et de sites pittoresques, ornée de deux châteaux et de quelques jolies constructions, elle est enrichie par le tribut qu'elle lève chaque année sur 25 à 30,000 étrangers qu'attirent dans ses murs les plaisirs qu'offre la saison des bains. Il y a à Wiesbaden 14 sources d'eaux thermales, dont le bâtiment appelé Kursaal est remarquable par sa construction et les dimensions d'une de ses salles; ses bains étaient déjà connus du temps des Romains, ainsi que l'attestent les tombeaux, les restes d'édifices et les nombreux objets d'antiquité que l'on a découverts dans ses environs. On y remarque un bel établissement consacré au soulagement des vieillards indigents, une société d'antiquaires, une d'agriculture et d'économie, une bibliothèque de 30,000 volumes et un beau théâtre. On visite aux environs la Dietenmühle, moulin très-fréquenté, les ruines du château de Sonnenberg, l'ancien et le nouveau Geisberg, le Mausolée, le lpéroberg, le couvent de Clarenthal et le château de chasse de la Platte. C'est à Biebrich, à 4 kilomètres de la capitale, que réside le duc.
Parmi les sources minérales du duché de Nassau, celles de Nieder-Selters sont connues dans toute l'Europe. Ce village exporte quelquefois par an près de 2,500,000 bouteilles de ces eaux, dont le produit forme la principale richesse du bailliage d'Idstein.
GOUVERNEMENT. — Le duché de Nassau est gouverné par un prince dont le pouvoir est tempéré par des étais divisés en deux sections : la première, composée d'un prince du sang, de 6 seigneurs et de 6 députés de la noblesse; la seconde, de 22 députés des villes. Un conseil d'État, qui compte neuf membres, est chargé de prononcer sur les hautes questions administratives. Une commission générale de contrôle, composée de membres de tous les
Habitants des environs de Schwavzbourg-Rudolstadt.
départements administratifs, un ministère d'État et une chancellerie régissent les affaires du pays. La cour suprême d'appel, qui siège dans la capitale, ne compte que sept juges; les autres tribunaux s'assemblent à Dillenbourg et à Wiesbaden.
FINANCES, RANG DANS LA CONFÉDÉRATION. - Le duché de Nassau occupe, avec celui de Brunswick, le treizième rang dans la Confédération Germanique, où, conjointement avec cet Etat, il a une voix aux assemblées ordinaires, et deux pour son propre compte aux assemblées générales. Il fournit à la Confédération 5,498 hommes y compris la réserve. Ses revenus sont de 15 millions de francs, et la dette publique est de 30 millions de francs.
NOTICE HISTORIQUE. — La maison de Nassau est fort ancienne; elle eut pour chef un frère de l'empereur Conrad Ier,
Othon, comte de Laurcnbourg, qui fut envoyé en qualité de général de l'armée impériale en Hongrie, par Henri l'Oiseleur, l'an 926.
Ce ne fut qu'en 1180 que les descendants d'Othon prirent la dénomination de comtes de Nassau, du nom d'un château bâti près d'un siècle auparavant, et au pied duquel s'élevèrent des habitations qui forment aujourd'hui la petite ville de ce nom. En 1255, les deux frères Waltram et Othon, descendants du comte de Laurenbourg, firent un partage de leurs possessions et fondèrent les deux branches principales qui subsistent encore, et qui ont été si fécondes en grands hommes. Celle d'Orange descend d'Othon, et celle de Weilbourg remonte à Waltram. La première occupe aujourd'hui le trône de la Hollande; la seconde est depuis 1816 en possession de tout le pays de Nassau, par l'extinction de la branche de NassauUsingen. Le territoire de Nassau fut érigé en duché en 1806, époque à laquelle Napoléon organisa la Confédération du Rhin.
HESSE-CASSEL.
ORIGINE. — La Hesse-Cassel, que l'on désigne aussi sous le nom de Hesse-Electorale, comprend la plus grande partie de l'ancien landgraviat de Hesse, dont le démembrement à la mort du landgrave Philippe, en 1567, a formé les deux landgraviats de Hesse-Cassel et de Hcsse-Darmstadt. Ce n'est qu'en 1803 que le landgrave de Cassel a pris le titre d'électeur..
LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. — Cette principauté est bornée au nord par la province prussienne de Westphalie et par
une partie du royaume de Hanovre ; à l'est par la régence prussienne d'Erfurt, le grand-duché de Saxe-Weimar, Je duché de SaxeMeiningen et le cercle bavarois du bas Mein ; au sud par ce même cercle et le grand-duché de Hesse-Darmstadt ; à l'ouest par ce même duché et la principauté de Waldeck. Elle possède aussi le cercle de Schmalkalden, enclavé entre le territoire prussien de Schleusingen, et les duchés de Saxe-Cobourg-Gotha et de Saxe-Meiningen ; plus le cercle de Schauenbourg , situé loin de la principale masse de la principauté, entre celles de Lippe-Detmold et de Schauenbourg-
Lippe, le Hanovre et la province prussienne de Westphalie; enfin elle possède plusieurs petites enclaves dans la Saxe ducale et la Hesse- D armstadt.
La superficie de la Hesse-Cassel est évaluée à 176 milles allemands géographiques carrés, ou à 9,856 kilomètres carrés; sa population était, à la fin dé l'année 1854, de 755,350 habitants.
ASPECT GÉNÉRAL PHYSIQUE. — Le Rhônegebirge, chaîne de montagnes qui commence en Bavière, envoie des ramifications dans la partie dû sud-est de la Hêsse-Cassel, où elle se joint aux Vogelgebïrge. Un dè lëtirs rameaux porte, le long de la Fulda , le nom de Fuldagebirge. t)e tes monts dépendent le Reinhardswald et le HabricHtSwald, qtll fcouvrefit le nord-ouest de la principauté.
Quelques hauteurs qui dépendent de la chaîne flii Spessart se montrent vers l'èitkéffiiié méridionale. Toutes Ces montagnes, qui sont composées dfi calcaire et 8e marne blehé J sont bordées de basaltes e1 dè vôlcaus éteints. Ellès forment lei nombreuses vallées qui silloMétit lé sol : aussi renferment-elles plus de pâturages et de forêts (juc dé terres propres à l'agriculture. C'est dans le Fuldagebir<fë,(jiie l'on trouve lès sommets les plus élevés : le Milzèbourg atteint lit Jfatlteur de.l ,d#0 mètres au-dessus dti niveau de la mer, et le Ddnvftiêrêfeld celle de 1,210 mètres.
Dans la partie septentrionale dè reiectlirat, eift remarque sur une longueur Se 20 kilomètres, HabrichUwdîÊ, dont le so'mffjet eu plateforme est gitni de forêt- ët dont les flancs recèlent dès ètiéS de bois bitÛriïineux, exfflt/itêés eftriirie d&f bancs de hoffîllë ; Mus loin, le ffalbërg, montagne nf forme cOriique, mais mcfifis élevée que là Jjflfcévlênte, et è(ir j.1m/1J (Jo. toit encore les ruines d'un vieux àhilëdH;; contient des àitias etc çdnjfelistible dontl'ex^lôl^atofi est pltis lffisllf tlbb]e eiicbte. Mçtis à 24 kilomètres de Casse! s'm.e le mont fflêlîiftfr, curimti pitt lès rognes et les substances qui « composent.
Les pTÎncipiitîfx coufs d'eaùi qiïi.arrô'serft la Hesse électorale sdni d'abord le" Weser, qift y reçoit fe Diemël ; la Fulda, qui s'y grôâsit des eaux de fEder; Iii Weffà, qui, sixr le territoire hanovrien , va se jeter Sans le WeSer, ënôfi le Mein, qui borde une petite partie de sa fronUèrë méridionale. Le pays renferme un grand nombre d'étangs fjûlssonnetîi et plusieurs soûrcès minérales, ,at1l\i lesquelles celles de Gèiar, flôfgeisnffr, Scbrwâlheim, tfiëlflël, Volksmarsheim , et Wllîièlffisbafl, jouissent de quelque réputation.
CLIMAT. — Le climat de fe Hesse, quoIque tempéré, est plutôt froid que chaud, si ce n'est près des bords du Mein, où les chaleurs de l'été sont très-fortes. Comme dans tous les pays montagneux, les vallées et les plateaux y présentent, sous le rapport de la température, des différences qui influent plus ou moins sur la nature des produits agricoles. Aux environs de Cassel et de Hanau, on récolte dans les plaines des céréales, des légumes farineux, des fruits de vergers; sur quelques collines, du raisin ; dans plusieurs vallées, du lin et du chanvre, et dans les lieux où la culture ne s'est point trop étendue, les bois sont abondants. Dans toutes les dépendances de l'électorat, on compte, suivant Hassèl, 668,7l0 hectares de terres labourâbIes, 168,141 employés en jardins, 222,704 en prés oii pâturages et 501,922 en forêts.
PRODUCTIONS NATURELLES. — Sur le territoire de Hanau, on récueille du cuivre et de l'argile, que l'on emploie dans les fabriques de faïence; près de Konnefeld, de l'albâtre gypseux trèsbtane, propre à la fabrication de plusieurs objets de luxe, et des grès que l'on emploie à la bâtisse; dans la partie occidentale, arrosée par la Lahn, des tripolis et des jaspes ; près des frontières de ]a Hesse-Darmstadt et sur le territoire de Schmalkalden, de nombreuses sources salées produisent annuellement plus de 100,000 qiiiritaùx de sel; aux environs de cette ville, on exploite des mines qui fournissent plus de 13,000 quintaux de fer en barres ; et 4,000 d'acier naturel. L'arrondissement de Cassel possède aussi des richesses minérales : près du bourg de Carlshafen , au pied du Reinhardswald, une source saline occupe trois ou quatre chaudières.
A Allendorf, une autre source plus riche et plus abondante alimente 22 bâtiments de graduation, et 24 chaudières , et donne lieu à un produit d'environ 400,000 francs. A Oberkirchen, il y a des houillères, et une mine de fer emploie une soixantaine d'ouvriers; une seconde à Homberg et une troisième à Rommershausen occupent chacune à peu près le même nombre d'hommes. A peu de distance de Gross-Almerode, la montagne du Hirschberg renferme des cÕucbes de schistes dont on retire annuellement environ 400 quintaux d'alun ; près de Riegelsdorf, on exploite une mine de cobalt et-une mine de cuivre, dont les produits, évalués à 25,000 quintaux, font vivre plus de 1,000 individus. D'autres mines cuivreuses, mais moins considérables, s'étendent à l'ouest de Cassel.
Sur les bords de l'Eder, on a établi depuis longtemps des lavages d'or, Enfin , dans plusieurs parties de la Hesse, il existe des houillères, quelques mines de plomb argentifère, des eaux thermales sulfureuses.
DIVISION POLITIQUE. — La Hesse-Cassel est partagée en quatre cercles, qui sont ceux: de la Hesse Inférieure avec Schaumbourg, de la Hesse Supérieure, de Fulde et de Hanau. Elle renferme 62 villes, 26 bourgs et 1,290 villages.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — L'électorat renferme 62 villes , dont les moins importantes sont Hofgeismar, connue par le château ducal et le bel établissement de bains situé à 2 kilomètres de ses murs ; elle est sur le chemin de fer de Cassel à Dusseldorf; Eschicege, arrosée par la Werra, et enrichie par le commerce de transit et par la culture du tabac; au pied du mont Mejsnëf, Allendorf, dont les environs renferment une source saline qui produit plus de 90,000 quintaux de sel; Rothenbourg, station du chemin de fer de la Saxe, résidence du landgrave de HesseIlothenbourg, qui possède , sous la souveraineté de l'électeur et du duc été Nassau, 8 villes et 219 villages, mais qui, par suite d'arrangements particuliers, reçoit une rente annuelle de 300,000 fr. ;
Homberg, domine par une colline que couronne un vieux château , dans lequel on voit un pfiils de 160 mètres de profondeur; enfin sur une mentagnfe élevée, que baigne la petite rivière de Kinsig, Gelnhdusèn , dont le territoire èst riche en vignobles; ville entourée de itiufailles et défendue par un fort situé dans une île. Près de là se voient les ruinés dh château de Pfalz, ancien séjour de l'empereur Frédéric-Barbërdîisse. Cependant plusieurs cités assez importantes occupent le territoire de la Hesse.
Caséel, sa capitale , est la plus considérable. Sa population ne s' élève pas à moins de 33,000 âmes. Bâtie sur la Fulda, elle est divisée en ttois quartiers principaux la vieille ville, la nouvelle ville basse ei la nouvelle ville haute, ou la vil le française. Les - deux premières sont anciennes et conséquemment mal bâties; la dernière , qui est la plus récente, est composée de rues larges et alignées, dans lesquelles on remarque plusietits maisons construites avec élégance; la plus belle de ces rues est cellè de Rellevue, d'où l'on aperçoit le château. Ses principales places sont la place Royale, celle dé la Parade, celle de Frédéric et belle des Gendarmes. Sur la première On remarque un écho qui répète les sons plusieurs fois ; la secondé est très-belle; sur la troisième on a rétabli, depuis la restauration, la statue du landgrave Frédéric II. La place Charles est ornée de la statue du landgrave de êt nom. De tous les édifices de Cassel, les plus importants sont l'église catholique de SaintMartin, l'arsenal et le palais électoral, qu'un incendie réduisit en cendres en 1811, mais qu'on a commencé à rétablir en 1817. Cette ville possédé un lycée, un séminaire Se maîtres d'école, un observatoire , une Académie de peinture et plusieurs autres établissements consacrés à l'instruction. Le musée Frédéric, qui forme le plus bel ornement de la place de ce nom , renferme une belle bibliothèque, une riche collection d'antiques , d'objets de curiosité et d'instruments de physique et de mathématiques. Le jardin de Bellevue , l'esplanade et le beau parc de l'Augarten sont les principales promenades de la ville. Cassel ne peut point être rangée parmi les villes de haut commerce , cependant il s'y tient deux foires considérables.
On y fabrique des toiles, des tissus de laine et des faïences qui imitent celles d'Angleterre. Cette ville est importante parce que les deux grandes lignes de chemin de fer de Francfort-sur-le-Mein à Hambourg et du Hanovre en Saxe s'y croisent.
Ce que l'on admire le plus dans ses environs, c'est la belle maison de plaisance de lUillielmshohe, qui, lorsque Cassel était la-capitale du royaume de Westphalie, portait le nom de Napoleonshôhc. On y voit de belles cascades et un jet d'eau de 63 mètres de hauteur, le plus élevé de l'Europe.
Sur une autre montagne, au milieu des bois, s'élève le château du Lion ou le Lôwenburg. C'est l'imitation exacte de la demeure d'un ancien paladin. Des pouts-Ievis, des tours à créneaux, des vitraux, des meubles antiques, des armures et de vieux portraits, tout rappelle ici les siècles de la chevalerie. Dans une petite bibliothèque on trouve une collection complète de tous les romans de chevalerie dont .l'Allemagne est inondée.
Marbourg, station du chemin de fer de Francfort, sur la Lahn, prend le titre de capitale de la haute Hesse; c'est une ville de 10,000 habitants. Elle possède une belle église gothique qui renferme des tableaux et des sculptures de Durer, et les tombeaux de plusieurs princes de la Hesse ; une université qui date de 1527, et dans laquelle les jeunes théologiens sont obligés d'étudier l'économie rurale; une bibliothèque de 100,000 volumes, une société d'histoire naturelle, fondée en 1817, et des manufactures de serge et de camelot.
Schmalkalden ou Smallcalde, qu'arrose une petite rivière qui porte le même nom, est une ville bâtie à l'antique, environnée d'une double muraille et d'un fossé à sec : on y remarque deux châteaux appartenant à l'éfectenr : celui de Hessenhof, qui est fort ancien, et celui de rJ/ilhernsbottrg. Dans un État comme la Hesse, une ville qui renferme 5,400 habitants , qui possède une saline dont le produit est évalué à 12,000 quintaux, des usines et des manufactures de quincaillerie , une imprimerie renommée et une papeterie , doit prendre place parmi les principales cités ; mais ce qui lui donne plus d'importance aux yeux de l' historien, c'est que Smalkalde a
été le théâtre des conférences et des traités qui eurent lieu à diverses reprises, depuis l'an 1529 jusqu'en 1540, entre les princes protestants qui entreprirent, dans l'intérêt de la réformation, de résister à Charles-Quint, qui s'était fait le protecteur de Rome, après l'avoir à Charles- Q uint, qui pillée. Smalkalde est la patrie de Christophe Cellarius, l'un des plus savants philosophes du dix-septième siècle, auquel on doit la réimpression de plusieurs auteurs anciens, et un assez bon traité de géographie. Il faut visiter, dans les environs de cette ville, le Stahlberg, ou là montagne d'Acier, qui n'est pour ainsi dire qu'une masse de fer.
Rinteln, à environ 85 kilomètres de Cassel, sur la rive gauche du Veser, renferme 4,000 habitants, et un gymnase qui remplace son ancienne université, qui fùt supprimée sous le règne de Jérôme Napoléon.
Fulde ; située sur la Fnlda, est plus considérable que Smalkalde : sa population est de 10,000 âmes au moins. C'est le siège d'un vicariat épiscopal, d'une cour supérieure de justice, d'une administration forestière et d'une inspection des ponts el chaussées. On vante son pont en Pier~e et sa ci- d evailt ca l~e nts et (: h auss é es. On vante son pont en pierre et sa ci-devant cathédrale, ou l'église de Munster, qui renferme les restes de l'apôtre allemand saint Bonifafce, en grande tënëratidn flans le pays, et le palais de l'évêque souverain qui gouverna le duché de Fulde jusqu'en 1803, époque à laquelle la principauté dont elle était autrefois Je chef-lieu passa entre les mains du prince de Nassau-Orange, et, par suite de conventions particulières, devint plus tard une province hessoise. La ville de Fulde est formée de rues étroites et de maisons anciennes.
Son sol est à 200 mètres au-dessus du niveau de la mer. Le gymnase, la bibliothèque, l'école des arts et métiers, l'école d'accouchements et d'autres utiles établissements sont bien entretenus. Du temps de son évêque, elle renfermait plusieurs couvents dont les bâtiments ont reçu' depuis une destination plus utile. Les capucins et les franciscains ont été réunis dans la même maison, aux environs de la ville ; deux couvents de femmes, auxquelles on confie l'éducatioh des jeunes personnes, ont été également conservés.
Le pays de Fulde, quoique peu étendu, est intéressant sous plusieurs rapports : on y réculte en abondance du blé, des fruits et (lu bon vin, peut-être moins bon cependant que lorsque les principaux vignobles appartenaient à des moines qui, en le conservant pendant dix ans dans de grands foudres, en décuplaient la valeur.
Quelques-uns de ces vins se vendaient alors jusqu'à 9 florins la bouteille. Partout dans eetté province le peuple est industrieux, actif et labbrieux.
Après Cahel, la tille la plus considérable de la Hésse est Hanau, chef-lieu de province et peuplée de 16,Oob individus. Cette cité, station du chemin de fer du MeirÏ, est divisée en vieille et nouvelle Tille : cette dernière seulement est bâtie avec régularité, mais à la manière hollandaise, parce qu'elle doit son origine à des Wallons et des fJoUafjdais, qui la fBndèrent vers l'ab 1600. On y remarque la place de l'hôtel de ville. L'ancienne ville, mal bâtie, renferme une belle place d'tfrmes èt un château où réside souvent le prince.
Hanau possède, au noiiïbre de ses établissement? utiles, un taiste hôpital, un arsenal, un mont-de-piété, un gymnase et une Académie de dessin; et parmi ses curiosités, le musée de la société des naturalistes de Wettéravîe et un cabinet de minéralogic. Située au confluent de la Kinsig et du Meiii, cette ville est dans une position agréable. L'électeur a dans ses environs une maison de plaisance appelée Philippsruhe; à Wilhellllsbad, qui n'est cependant pas à 4 kilomètres de Hanau, et dont le nom indique un établissement thermal, On remarque un autre château appartenant- au prince.
Ses jardills considérables, bien dessinés, mais entretenus avec parcimonie, sont le rendez-vous des baigneurs et de tous les habitants des environs. A Salrminster, il y a un couvent de franciscains, et à Schlûchtern, qui n'a pas 1,500 habitants, une école latine.
GOUVERNEMENT. — Le gouvernement de la Hesse-Cassel est une monarchie constitutionnelle : le pouvoir du prince y est tempéré par celui des deux chambres : la nouvelle constitution qui régit cet Etat est du 13 avril 1852. Elle est plus libérale et répond aux besoins généraux dé l'époque; l'ancienne datait de 1831 : elle reconnaissait la liberté de la presse, celle des débats parlementaires
et celle de l'industrie ; le service militaire limité à cinq ans ; l'affranchissement des communes et la reconnaissance publique de leurs droits ; l'organisation d'une garde bourgèoise et le concours pour l'admission aux emplois publics.
FINANCES. — La Hesse-Cassel est une des plus riches puissances du troisième ordre. Son budget était pour la période financière de 1852 à 1854 de 47 millions de francs pour les revenus; et pour les dépenses de 52 millions de francs. L'État a une dette de 50 millions de francs, dont la majeure partie a été contractée pour l'exécution des chemins de fer.
INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE. — La préparatioh dd lin, l'art de tisser la toile, la fabrication des poteries communes, des faïences, de la porcelaine et du verre ; la confection de diverses étoffes de laine et l'emploi des métaux forment la principale industrie des habitants de. la Hesse. C'est surtout aux deux extrémités de l'électorat, sur les territoires de Cassel et de Hanau, que les prodùits industriels sont le plùs considérables. Cependant, malgré la protection que le gouvernement accorde à l'industrie, on pourrait désirer plus de liberté sous ce rapport, et surtout moins de corporations ; leur influence routinière, l'esprit qui les anime toutes, sont plutôt nuisibles qu'utiles au perfectionnement. Ce n'est que depuis quelques années qu'il est permis d'exercer tous les métiers dans les villages. Au surplus, le soin qu'on a pris d'établir un conseil des arts et métiers, chargé du maintien des règlements en usage, de l'examen des diverses observations relatives aux inventions et aux améliorations proposées, et de la distribution des médailles d'encouragement pour les plus beaux ouvrages faisant partie de l'exposition industrielle qui a lieu à différentes époques, donnera au gouvernement hessois les moyens de s' éclairer sur les intérêts de ses fabriques.
COMMERCE. — Le commerce de la Hesse consiste dans l'exportation de ses produits et le transit des marchandises expédiées par Francfort pour le nord de l'Allemagne. Le Weser, la Werra et la Fulda facilitent ses moyens de transport. Cassel expédie chaque année, pour les foires étrangères, du fil et de la toile, dont la valeur représente environ 5,000,000 de francs, plus 120,000 cruches d'eau minérale, ainsi qu'un grand nombre d'autres marchandises, en éthange desquelles elle reçoit du sucre, du café, du coton, des vins de France et d'Allemagne, de la graine dè lin et de chanvre; etc. Quoique la balance commerciale soit un mot vide de s'ens, puisque chaque Etat est toujours obligé de fournir pottr le commerce une valeur égale à celle qu'il reçoit, on peut dire que, dans ses rapports avec Its pays étrangers, la Hesse doit îfàôir l'avantage, parce que la classe des industriels y est sobre et économe, et que par conséquent elle consomme moins qu'elle ne produit.
CHEMI\S DÉ FER. — La Hesse-Cassel èst traversée du hbrd au sud par la grande ligne de Francfort à Hambourg. Cassel est une des stations importantes des chemins de fer allemands de cette ville ou de ses environs partant des embranchements vers Gôttingûe, vers la Saxe et vers Dusseldorf et le Rhin.
FORCES MILITAIRES. — La force militaire de cet Etat est une des plus considérables des États de troisième ordre de l'Allemagne.
Oii sait qu'en 1814 la levée générale qu'elle fit, sous le nom de landstttrm J s'éleva à 82,000 hommes d'infanterie et à 2,000 de cavalerie. En 1816, son armée se composait d'environ 22,000 hommes, y compris 6,000 de landwehr; aujourd'hui, par suite de la longue paix dont jouit l'Allemagne depuis cette époque, elle est réduite à 2,400 hommes, sans compter le contingent qu'elle doit fournir à la Confédération. Un corps de dragons, organisé comme notre gendarmerie , est chargé de maintenir la tranquillité publique.
CONTINGENT FÉDÉRAL. — RANG DANS LA CONFÉDÉRATION. — Le contingent fédéral de cet État est de 8,519 hommes; sa contribution fédérale est de 65,000 francs. Il occupe le huitième rang dans la diète et a trois voix dans l'assemblée générale.
LIPPE.
I. LIPPE-DETMOLD.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE. - POPULATION. —
La principauté de Lippe-frelmold se compose d'un territoire situé entre la province prussienne de WestpHalie, le pays de Rinteln, qui appartient à la Hesse électorale, une partie du royaume
de Hanovre, une enclave de la Prusse, et une qui appartient à la principauté de Waldeck. Ainsi elle est presque entièrement entourée par une des plus importantes possessions de la Prusse : au centre même de celle-ci se trouve le cercle de Lippstadt, l'un des plus peuplés de la principauté. Là portion la plus considérable, dont nous venons de déterminer les limites, a 50 kilomètres de
longueur sur 38 dans sa plus grande largeur, et la superficie des deux est de 1,182 kilomètres carrés, avec une population qui s'élevait en 1853 à 106,615 habitants.
ASPECT PHYSIQUE. — PRODUCTIONS. — INDUSTRIE. En général, le pays est montagneux et le sol est peu fertile. Les montagnes qui, dans la partie méridionale, appartiennent à la chaîne du Teutoburgerwald, sont garnies de forêts composées en grande partie de chênes ; plusieurs cantons sont couverts de bruyères; mais ceux qui jouissent de quelque fertilité produisent du blé, du lin, du chanvre, du colza, des légumes farineux et des fruits ; on y élève beaucoup de bestiaux et d'abeilles. Le climat en est doux, mais humide, et les brouillards y sont fréquents.
La fabrication des toiles est la principale industrie du pays : le nombre des métiers est de 2 à 3,000; on y fabrique aussi des étoffes de coton, des tissus de laine et des pipes en magnésie carbonatée connue sous le nom d'écume de mer. Enfin la principauté possède deux verreries, cinq papeteries et un grand nombre de moulins à scies. Ses exportations consistent surtout en bois, en fil, en laine et en toile.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Jetons maintenant un coup d'œil sur les villes principales et cependant peu importantes de cette principauté. La résidence du prince est Detmold, sur la Werra, au pied du mont Teutberg : elle a 4,000 habitants, deux églises réformées et une de la communion d'Augsbourg, un collége avec une bibliothèque, une école d'industrie, un séminaire de professeurs, un hôpital, une maison de correction bien entretenue, un hospice d'orphelins, une école d'asile. un mont-de-piété et une société biblique. Le vieux quartier, que l'on croit être l'ancien Teutoburgium, est.sale et mal bâti; mais le nouveau est propre et régulier. On doit visiter au sud-ouest de Detmold la Grotenùurg, un des plus hauts sommets du Teutoburgerwald, car elle atteint 400 mètres au-dessus de la mer et 233 mètres au-dessus de Detmold. C'est sur cette montagne que l'Allemagne voulait ériger un monument à Arminius, le vainqueur de Varus. Lemgo ou LemgolV, arrosée par la Bega, est plus peuplée que la capitale, et la ville la plus importante du duché : on y compte près de 4,000 âmes. Elle possède un gymnase et un couvent de femmes.
Son industrie consiste en fabrique d'étoffes de laine, de toiles et de pipes en écume de mer. Elle a donné naissance au docteur Kœmpfer, qui mourut en 1716, après avoir voyagé dans les Indes, et publié plusieurs ouvrages r dont le plus estimé est l'Histoire civile et naturelle du Japon. Ujfeln ou Salz-Ujfeln, sur la petite rivière de Salze, possède dans ses environs des sources salées, et renferme 1,500 habitants. Quelques antiquaires prétendent que c'est entre cette ville et la ville prussienne d'Herford que s'étend le champ de bataille où furent défaites les légions de Varus. Horn, avec la même population, est située près de la forêt de Teutobourg (l'eutoburgerwald). Non loin de ses murs s'élève une rangée de huit rochers, placés verticalement sur le sol, et que plusieurs savants regardent comme des pierres druidiques : ses habitants les nomment Externsteine; on les appelait correctement autrefois Egerstersteine (Roches aux Pies).
Lippstadt, ville de 5,000 habitants, est située sur la Lippe, à l'endroit où elle devient navigable, et possède un petit territoire enclavé dans la province prussienne de Westphalie ; elle était autrefois ville libre et impériale; aujourd'hui soumise à deux maîtres, le prince de Lippe en a la souveraineté conjointement avec le roi de Prusse. Quelques auteurs croient que c'est la Luppia dont parle Ptolémée; d'autres disent au contraire que sa fondation ne remonte qu'au douzième siècle. Elle possède un gymnase et des fortifications en assez bon état. Ses rues sont régulières et bien bâties, son commerce en grains et en toiles de lin assez actif.
GOUVERNEMENT. —En 1819 la principauté de Lippe-Detmoldt a été admise aux bienfaits du gouvernement constitutionnel, et les habitants ont été appelés à élire des députés pris dans l'ordre de la noblesse, de la bourgeoisie et des paysans. En 1836 des modifications plus libérales furent encore apportées dans la constitution, du consentement du prince régnant. A la suite de la révolution de 1848, il dut, pour satisfaire aux exigences des libéraux, accorder de nouvelles franchises qui ont été retirées depuis, et la constitution revisée de 1836 a été remise en vigueur. Le prince gouverne , secondé par un chef du cabinet, qui a sous ses ordres des directeurs de la justice, de l'intérieur, des finances, etc., et avec le contrôle d'une chambre des députés élective par des moyens qui doivent remplir certaines conditions de cens.
LANGUE. — RELIGION. — INSTRUCTION. — On parle dans cette principauté un allemand corrompu. La plus grande partie de la population est attachée à la communion" réformée : sur 44 paroisses, 38 appartiennent à cette communion, 3 à la confession d'Augsbourg, et 3 au culte catholique. Sous le rapport sanitaire, Le pays est divisé en cinq inspections médicales. L'instruction élé-
mentaire y est encouragée par le gouvernement : on y compte environ 120 écoles primaires.
RANG DANS LA CONFÉDÉRATION. — FORCE MILITAIRE.
— FINANCES. — La principauté de Lippe-Detmold envoie un membre à l'assemblée générale de la Confédération, et se joint aux princes de Schauenbourg- Lippe, de Waldeck, de Reuss, de Hohenzollern et de Lichtenstein, pour en envoyer un à l'assemblée ordinaire. Elle occupe, avec ces principautés, le seizième rang à la diète germanique. Pendant la guerre de 1814, elle a armé, suivant Stein, un corps de 11,677 soldats. Aujourd'hui elle doit à la Confédération 1,082 hommes, et sa contribution fédérale est d'environ 8,000 francs. Sa force armée est d'un bataillon d'infanterie de 840 hommes, non compris 120 remplaçants et 240 hommes de réserve. Son budget, qui se solde en équilibre, s'élève à environ 1 million de francs. Cet Etat n'a pas de dette.
II. LIPPE-SCHAUEMBOLRG.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. — La principauté de Lippe-Schauenbourg est située au nord de la principauté de Lippe-Detmold. Elle en est séparée par le territoire hessois de Rinteln, qui la circonscrit à l'est. Au nord , elle est bornée par le Hanovre, à l'ouest et au midi par la province' prussienne de Westphalie. La seconde est située au sud de la précédente, entre Ja principauté de Lippe-Detmold, le territoire de Pyrmont et le royaume de Hanovre. Les possessions du prince de Lippe-Schauenbourg ont à peu près 546 kilomèlres carrés, et la population y était évaluée à la fin de 1852 à 30,226 habitants; Le chemin de fer d'Aix-la-Chapelle à Hanovre traverse ce petit État.
SOURCES MINÉRALES, PRODUCTIONS NATURELLES. On y exploite de la houille ; on y connaît plusieurs sources minérales, entre autres celles d'Eilsen et de Stadthagen. Le sol, assez fertile, est riche en blé, en lin, en arbres fruitiers et en bois de haute futaie. Les marais de Hagenbourg et de Steinhude donnent beaucoup de tourbe.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Cette petite principauté comprend deux villes et deux villages. La capitale est Bückebourg ou Biickenbourg, sur la petite rivière de l'Aue. Elle renferme un château qui est la résidence du prince, un gymnase et 3,000 habitants. Stadtliagen, à 12 kilomètres au nord-est de la précédente, est située dans une vallée agréable, sur un ruisseau appelé le Diemen. Elle est entourée de murailles ouvertes de trois portes. On y remarque un château auquel tient une église; celle de la ville renferme les tombeaux des princes de Schauenbourg. Cette cité, qui n'a pas 1,600 habitants, possède des eaux minérales, une maison d'orphelins et une école latine, dans laquelle le géographe Busching, qui est né à Stadthagen, reçut sa première éducation.
GOUVERNEMENT. — Les habitants jouissent d'un gouvernement représentatif, comme dans la principauté précédente; c'est depuis l'an 1810 que toutes les charges de servitude corporelle ont été abolies. Le peuple des campagnes est seulement soumis à quelques corvées et à plusieurs redevances qui ont été conservées. En 1816, le prince conféra aux députés des districts le droit d'examiner les dépenses administratives, de régler la quotité des contributions et leur mode de perception, de délibérer sur les lois, et enfin de faire des propositions relatives aux intérêts du pays. Tous les ans ils se constituent en assemblée générale par ordre du gouvernement.
RANG DANS LA CONFÉDÉRATION, FINANCES, FORCES MILITAIRES. — Cet État occupe le seizième rang dans l'ordre de la chancellerie fédérale ; sa contribution fédérale est d'environ 2,500 francs, et son contingent est de 315 hommes; les revenus de l'État sont évalués à 460,000 francs, et la force publique est représentée par un corps de 550 chasseurs.
ANCIENNETÉ DE LA MAISON DE LIPPE. — Les princes de Lippe ont la prétention de descendre de Witikind, ce qui donnerait à cette maison une antiquité de près de onze siècles. Cependant les généalogistes, peu satisfaits d'une origine aussi reculée, la font remonter à la noblesse germaine du temps de la domination des Romains. Ce qu'il y a de certain, c'est que sous Charlemagne encore elle jouissait d'une si grande considération, que lorsqu'en temps de guerre les peuples des bords du Weser choisissaient un chef, ils le prenaient de préférence parmi ces princes. Charlemagne leur conféra le titre de comte; mais on ne peut suivre leur filiation qu'à partir du commencement du douzième siècle. Dès cette époque, on les voit figurer sous le titre de wald graves de Westphalie. C'est au commencement du dix-septième siècle que s'établit la branche de Schauenbourg-Lippe. Elle entra en 1808 dans la Confédération Germanique avec la branche de Lippe-Detmold.
SCHWARZBOURG.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, DIVISIONS. — Le pays de Schlcarzbourg est, sous le point de vue administratif, un petit dédale. Il se compose de trois territoires séparés : le premier, au nord des deux autres , est enclavé dans la province prussienne de Saxe ; il a 49 kilomètres dans sa plus grande longueur de l'ouest à l'est, et 22 dans sa plus grande largeur du nord au sud; le second, à 45 kilomètres au sud du précédent, est situé entre la province prussienne de Saxe et les duchés de Saxe-Weimar, de Saxe-Altenbourg et de Saxe-Cobourg-Gotha ; il a 40 kilomètres de longueur et environ 27 de largeur; le troisième, à 6 kilomètres à l'est du précédent, est entouré par la principauté de ReussSchleitz, par une petite enclave de la Prusse, et par les duchés de Saxe-Meiningen et de Saxe-Cobourg-Gotha; il a 13 kilomètres de largeur sur 15 de longueur.
Ces trois territoires forment une superficie de 1,842 kilomètres carrés. Il semblerait naturel qu'appartenant à deux branches d'une même famille, celui du nord fût l'apanage de l'une, et les deux du sud celui de l'autre : il n'en est point ainsi. La branche de Schlcarzbourg-Rudolstadt règne sur une grande partie du territoire septentrional , sur l'extrémité orientale de l'un des territoires du sud, et sur la partie occidentale de l'autre; de telle sorte que le prince de Schwarzbourg--Sondershausen gouverne la plus grande partie du nord et la plus petite du sud.
ASPECT PHYSIQUE. — PRODUCTIONS. — La chaîne du Thiiringerwald se prolonge dans la partie méridionale du territoire de Schwarzbourg. On y remarque des sommités couvertes de forêts qui s'élèvent à 4 ou 500 mètres de hauteur.
Au bas des pentes-de ces montagnes se trouvent quelques plaines et plusieurs vallées fertiles, parmi lesquelles on doit citer celle de Helm. On y trouve aussi des mines de fer, de cuivre, de plomb argentifère et de cobalt. La richesse industrielle du pays consiste principalement dans l'emploi de ces métaux, dans des exploitations de sel, dans des fabriques de porcelaine, de poteries de grès, de tissus de différentes espèces, des verreries et des distilleries ; enfin en 13 forges et usines où l'on fabrique du fer-blanc. Le blé et le lin y abondent; les bestiaux y sont très-nombreux.
I. PRINCIPAUTÉ DE RUDOLSTADT.
SUPERFICIE, POPULATION, GOUVERNEMENT. - La principauté de Schwarzbourg - Rudolstadt comprend une superficie de 978 kilom. carrés ; la population était eu 1852 de 69,038 habitants.
Le gouvernement représentatif y est établi depuis 1816. L'assemblée législative se compose de 36 députés élus pour 6 années, dont 6 sont pris parmi les possesseurs des biens seigneuriaux, 6 parmi les propriétaires de terres non seigneuriales, 6 choisis par les villes, et 18 librement élus par les citoyens les plus imposés.
Rudolstadt, Frankenhausen et Stadt-Ilm sont les principales villes de ce pays.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Rudolstadt renferme 5,500 habitants; c'est la résidence du prince; son château et les collections qu'il renferme sont dignes de l'intérêt des curieux. Cette jolie ville, arrosée par la Saale et située dans le plus grand des deux territoires méridionaux, possède un cabinet d'histoire naturelle riche surtout en coquilles, une bibliothèque de 50,000 volumes, un gymnase, une maison d'éducation pour les filles pauvres, et des fabriques de porcelaine et d'étoffes de laine. Le château, situé sur un rocher qui domine la ville à une petite distance, est maintenant transformé en une maison de force. Frankenhausen, sur leWipper, est peuplée de 5,000 âmes; c'est le siège d'une surintendance, d'un consistoire, d'une chambre fiscale et d'une administration des forêts. Cette ville a un château seigneurial, deux églises, un hôpital et une imprimerie; on y voit des fabriques
d'instruments de musique et des teintureries. Dans ses environs se trouvent des établissements d'eaux minérales , une mine de sel qui produit 20,000 hectolitres, et le château de Rathsfeld , où naquit, en 1726, le poëte Zacharic. Stadt-Ilm, ou simplement Ilm, porte le nom de la rivière qui l'arrose, et qui prend sa source dans le Thüringerwald; elle est bien bâtie et renferme un château. L'industrie de ses 2,200 habitants consiste principalement dans la fabrication de diverses étoffes de laine; on y compte 2 à 300 métiers. Leulenberg n'est remarquable que par le château de Fridenbourg, qui domine cette petite ville. Schwarzbourg n'est qu'un village; mais on y voit encore, sur un roc escarpé, le château d'où sont sortis les princes de Schwarzbourg, et au pied de ce rocher uue maison de correction où l'on travaille le marbre et l'albâtre; une riche carrière d'albâtre est exploitée dans ses environs. Le prince de Schwarzbourg-Rudolstadt possède en commun avec le comte de Stollberg, sous la souveraineté du roi de Prusse, Heringel et Kelbra, dans la régence prussienne de Mersebourg; mais ces deux villes, peuplées d'environ 1,700 âmes chacune, n'ont rien d'intéressant.
II. PRINCIPAUTÉ DE SOXDERSHAUSEN.
SUPERFICIE, POPULATION, GOUVERNEMENT. — La principauté de Schwarzbourg-Sondershausen est moins considérable que la précédente. Sa superficie est de 864 kilomètres carrés et sa population de 60,845 habitants.
Le gouvernement est une monarchie limitée par l'intervention d'une chambre de députés élective. Le prince régnant appartient à la branche aînée de la maison de Schwarzbourg.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Parmi les villes qu'elle renferme, Sotidershaiisen a le rang de capitale. Elle est située au confluent du Wipper et de la Bebra. Environnée de murs percés de trois portes, elle possède un gymnase, une maison de travail et une d'orphelins. Sa population est estimée à 5,000 âmes. Près de la ville se trouve, sur une hauteur, le château du prince, qui renferme un théâtre dont l'orchestre est fort bien composé, et un beau cabinet d'histoire naturelle et de curiosités, parmi lesquelles on remarque le Pustrich, idole descendes, coulé en bronze.
A un kilomètre de là, les bains de Gunther, avec une source d'eau sulfureuse, attirent un grand nombre de baigneurs et de promeneurs qui vont jouir du beau parc qui dépend de cet établissement.
Sur le mont Frauenberg on voit encore les restes du château de Jecliabourg que les Huns détruisirent en 933. A Greussen, ville de 2,000 âmes, on compte plusieurs manufactures de toiles et de flanelles; on cultive beaucoup de lin dans ses environs. Arnstadt est la seconde ville de la principauté. Elle renferme 5,500 habitants; la Géra la divise en deux parties; c'est le siège des colléges du pays ; elle possède un lycée, un hospice des orphelins, trois églises, et un musée des productions de l'art et de la nature, dans lequel on remarque une collection très-curieuse de poupées vêtues des costumes de différentes époques ; elle a des fabriques de toile et de laiton; il s'y fait un commerce assez important Elle renferme un château; mais le plus remarquable de ses édifices est l'église NotreDame , que l'on prétend avoir été bâtie par les templiers. C'est dans ses environs que se trouve la principale mine de cuivre du pays.
RANG DANS LA CONFÉDÉRATION. — FINANCES. — Les deux principautés de Schwarzbourg occupent le quinzième rang dans la Confédération, et jouissent chacune d'une voix dans l'assemblée générale. Le contingent fédéral est pour Rudolstadt de 809 hommes, et la contribution de près de 6,000 francs; pour Sondershausen, le contingent est de 676 hommes et la contribution de 5,000 francs.
Le budget de 1855 était pour la première de ces principautés de 1,500,000 francs, et pour la seconde de 1,860,000 francs.
REUSS.
ORIGINE ET BRANCHES DE LA MAISON DE REUSS. —
La maison de Reuss se compose de plusieurs princes unis par les liens de l'amitié comme par ceux du sang. La branche aînée possède la principauté la plus riche; la branche cadette se subdivise en deux rameaux, dont les possessions sont très-inégales en population et en superficie. Les généalogistes font remonter l'origine de
cette maison jusque vers l'an 950, et la font descendre d'Eckbert, comte d'Osterode, dans le Harz. Dès le douzième siècle, les princes de cette famille étaient préfets de l'empire. Ce titre de préfet (en allemand VÕgte) fit donner au pays qu'ils administraient le nom de Uogtland ou Voigtland, qui s'est conservé jusqu'à ce jour. L'un de ces princes, Henri III surnommé le Riche, partagea ses domaines
entre ses quatre fils, qui formèrent les branches de Greitz, de Weida, de Gera et de Plauen. La première s'éteignit en 1226, la deuxième en 1535 et la troisième en 1550. Ce fut un des prinçes de la branche de Plauen, Henri le Jeune, qui fit donner le nom dç Reuss à la famille dont il fut la souche. On prétend que ce nom de Reuss ou de Ruzzo, c'est-à-dire le Russe, est un surnom que lui valut une circonstance assez singulière dç sa vie aventureuse : il faisait la guerre en terre sainte avec l'empereur Frédéric II, vers l'an 1238, lorsqu'il fut pris par les niusulmans et vendu à un marchand russe qui l'emmena dans son pays, où il Je garda pendant 12 ans comme scfve; mais des Tatars étant venus ravager la partie de la Russie ou il se trouvait, le conduisirent en Pologne et en Silésie, d'où il s'échappa, et vint se réfugier à 1p. pour de l'empereur. Il conserva le surnom qui rappelait le peuple chez lequel il était resté prisonnier, et le transmit à ses deux ifils, sopches de deux branches de cette mjsop., dont tous les princes portent le nom de Henri, suivi d'un npwéro de 1 à 1QQ, et dont les différences §éries, commencées en Ip68, se renouvellent sans cesse.
SITUATION, LIMITES, ÉTENDUE. — Les trois principautés de Reuss comprennent deux territoires séparés par une distance de 9 kilomètres. Le territoire septentrional ou le plus petit est situé entre la province prussienne de Saxe au nord , le duché de SaxeAltenbourg à l'est et à l'ouest, et le grand-duché de Saxe-Weimar au sud; il a 25 kilomètres de longueur de l'est à l'ouest, et 17 de largeur du nord au sud. Le territoire méridional est borné à l'est par le royaume de Saxe, au sud par la Bavière, à l'ouest par le duché de Saxe-Meiningen, la principauté de Schwarzbourg - Rudolsjadt et l'enclave prussienne de iegenrück, et au nord par le grand-duché de Saxe-Weimar; il a 66 kilomètres de longueur dans la direction du nord-est au sud-ouest, et 28 dans sa plus grande largeur du nor d au sud.
Les deux territoires sont p.arsemés de collines couvertes de forêts, dont les plus considérables sont celles de Greitz et de PÕllwitz.
I/Elster les traverse pu sud au nord , mais la Saale n'arrose que la partie méridionale.
I.
PRINCIPAUTÉ DE REUSS-GREITZ. — La principaute de ReussGreitz, limitrophe du royaume de Saxe, appartient à la branche aînée de cette famille. Elle se compose de la partie orientale et de la partie occidentale du territoire méridional, c'est-à-dire de la seigneurie de Greitz et de celle de Burg. Sa superficie est de 380 kilomètres carrés. Son territoire, qui renferme des montagnes et des vallées, est fertile , et son industrie est fort active : elle consiste en manufactures d'étoffes de laine, en forges, en usines et en fabriques d'acier.
Greitz, la capitale, située près de l'Elster, dans une vallée agréable et fertile, renferme deux châteaux, dont l'un a été rebâti en 1802, et dont l'autre est sur une colline au milieu de la ville.
Elle a dps manufactures importantes et 7,000 habitants. Zeulenroda, petite ville commerçante de 4,300 âmes, a un arsenal et un hôpital. Ce sont les deux seules villés de la principauté.
La branche cadette de Reuss se divise aujourd'hui en deuxrameaux : celui de Reuss-Schleitz et celui de Reuss-Lobenstein-Ebersdorf.
II.
PRINCIPAUTÉ DE REUSS-SCHLEITZ. - La principauté de Reuss-Schleitz a 110 kilomètres carrés de superficie, en y comprenant la moitié du territoire de Géra. Sa capitale est Sç/tleitz, sur le AViesenthal. Dire que cette ville renferme 4,700 individus, un collège, une maison de pauvres, une d'orphelins, un séminaire pour les maîtres d'école, une école du soir pour les ouvriers, et des fabriques de draps ,' de toiles et de mousselines , c'est en donner une idée suffisante. Tanna, où se tiennent des foires cOIlsidérabJes, n'a que 1,300 habitants.
Deux petites sèigneuries en Silésie, celle de Quarnbcclr dans le Schleswig, et quelques villages dans la province de Brandebourg et dans le royaume de Saxe, forment encore une population de 8,000 âmes soumise au prince de Reuss-Schleitz.
PRINCIPAUTÉ DE REUSS-LOBENSTEIN-EBERSDORF. — Un territoire de 152 kilomètres carrés, y compris la moitié de celui de Géra , constitue la principauté 4e Reuss-Lobmstem-Ebersdorf. Son territoire produit une assez grande quantité de fer pour alimenter plusieurs forges importantes, ainsi que de l'alun et du vitriol, dont la vente forme une partie de son commerce.
Le prince fait sa r é sidence a ~o & e?Mfe! K, petite ville que l'on peut regarder pour cefte raison comme la capitale (le la principauté, et dont les 4,000 habitants possèdent des tanneries et des iflatures de laine et de coion. Ebersdorf n'est qu'un bourg, mais riche de ses fabriques de broderies, de cotonnades, de savon et de tabac. Géra, qui, ainsi que son territoire, appartient en commun aux deux princes de la branche cadette de Reuss, est une petite ville que l'on peut regarder comme importante, si on la compare aux trois capitales que nous venons de décrire. Elle est peuplée de 8,000 âmes; elle est riche et industrieuse, et quoiqu'elle ait été presque entièrement détruite en 1780 par un incendie, son commerce a pris une telle extension , qu'on l'a surnommée en Allemagpe le petit Leipzig. Elle renferme une maison de détention , un gymnase et quelques écoles, dont une est destinée aux enfants des pauvres. Mais ce qui contribue à l'enrichir, ce sont ses fabriques de colonnades, d'étotres de laine , de chapeaux, de porcejàine, et ses tanneries. Plusieurs de sep étab lissements tirent un grand parti des eaux de l'Elster, qui l'arrose.
Nous ne parlerons point de la branche séparée de Reuss-Kôstritz, dont le petit territoire forme la principauté médiate de ce nom, et qui reconnaît la suzeraineté des deux branches principales des princes de Rcuss. Elle réside dans le bourg de Hohenleuben.
RANG DANS LA CONFÉDÉRATION. — FINANCES. — Les principautés de Reuss tiennent le seizième rang dans la Confédération Germanique, avec les principautés de Lippe et de Schwarzbourg. Elle? ont chacune une voix dans le plénum. Les deux branches doivent au contingent fédéral 1,117 hommes; la contribution fédérale de la brandie aînée est de 2,600 francs, et celle de la branche cadette est de 6,000 francs.
Les revenus de la principauté de Reuss-Greitz étaient évalués en 1853 à 180,00Q francs, et ceux de la principauté de ReussSchleitz-Lobenstein-Ébersdorf à 750,000 francs.
WALDECK.
SITUATION, LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION. — Les territoires qui constituent la principauté de Waldeck comprennent l'ancien comté de Waldeck proprement dit et celui de Pyrmont, formant une superficie totale-de 1,213 kilomètres carrés. La principauté de Waldeck est bornée d'un côté par la province prussienne de Westphalie, de l'autre par la Hesse électorale et une enclave du grand-duché de Hesse-Darmstadt. Le comté de Pyrmont, plus septentrional, touche vers le nord au Hanovre, vers l'est à une partie du duché de Brunswick, vers le' sud à une enclave de la Prusse, et vers l'ouest à la principauté de Lippe-Detmold. Ces deux parties sont peuplées de 60,000 habitants. La famille régnante paraît descendre directement de Witikind, qui portait en effet le titre de comte de Swalenberg et de Waldeck.
ANCIEN COMTÉ DE WALDECK, ASPECT GÉNÉRAL PHYSIQUE. — L'ancien comté de Waldeck, qui forme la plus grande partie de cette principauté, présente une superficie de 1,103 kilomètres carrés. C'est un des pays les plus élevés de l'Allemagne. Les monts Rothaar et les monts Ègge, dont les ramifications le traversent du sud-ouest au nord-est, sont composés àe schistes et de roches de sédiment inférieur. Les plus haiites cimes sont le Poen et le DOlIlIÕel. Dans la partie orientale, on remarque quelques volcans éteints, dont le plus considérable est le Lammsherg. Le centre
de ce comté appartient à la formation de grès bigarrés et de marnes irisées. La partie occidentale comprend des schistes et des calcaires anciens analogues à ceux de Gôtlingue ; la partie orientale est formée d'argile plastique et d'autres dépôts de sédiment supérieur. D'après cet aperçu, on doit penser que cette contrée est généralement pierreuse et médiocrement fertile; l'air y est vif, mais sain. Dans les montagnes, on exploite plusieurs mines de fer, de cuivre et de plomb, des carrières de marbre et des ardoisières ; dans les vallées, le cours des rivières renferme des sables aurifèrès il y a des lavages d'or à Alforden et à Hernhausen, sur les bords de l'Eder; le pays possède aussi plusieurs sources minérales.
PRODUCTION, INDUSTRIE, COMMERCE. — Les produits agricoles sont peu importants ; ils consistent en pommes de terre et en céréales : cependant le blé y est assez abondant pour constituer une des branches du commerce d'exportation. La filature des laines, la fabrication de divers tissus, l'exploitation des mines et quelques papeteries, sont les principaux genres d'industrie qui occupent la population. ANCIEN COMTÉ DE PYRMONT. — Dans l'ancien comté de Pyrmont, entre la principauté de Lippe-Detmold et les possessions iiu duc de Brunswick, se termine la chaîne des monts Êgge. Ce
petit territoire, qui n'a que 20 kilomètres carrés, et qui compte environ 5,000 habitants, est piontueux , et couvert de forêts. Le centre en est occupé par un -massif de grès bigarrés, entouré d'une bande de calcaire. Le pays renferme des sources d'eaux minérales.
Les habitants exportent une grande quantité de bas tricotés.
Ces deux terrilo res sont arrosés par l'Aar, le Diemel et l'Eder.
Les bords du Diemel sont fertiles, mais exposés à de fréquentes inondatipns.
GOUVpRNEMENT, DIVISION POLITIQUE. '- Depuis 1816, le gouvernement représentatif est'étab'li dans cette principauté; les possesseurs des biens seigneuriaux, les treize villes et la "classe des paysans et des agriculteurs nomment des députés dpnt I'assejpblée se réupit tous les ans. Ce sont eux qui examinent le budget, qui voteiij les impôts, qui discutent les lois, et qui proposent aii prince les améliorations dont l'administration du pays est susceptible. Le pays est partagé en quatre cercles, qui sont ceux de : Twiste, Eisenberg, Eder et Pyrmont.
DESCRIPTION -TOPOGRAPHIQUE. — Corbach ou Korbach, qui ne renferme que 3,000 habitants , prend le titre de capitale; elle est entourée de murailles ; elle possède un château et quelques établissements utiles. Sachsenberg a des foires assez fréquentées.
ilrolsen, résidence ordinaire du prince, est bien bâtie; on n'y compte que 2,050 habitants. Le château, qui est remarquable par
son étendue, renferme une galerie de tableaux, un cabinet d'histoire naturelle et de médailles et une bibliothèque de 30,000 volumes. A Nieder- U/idungen, il y a un château.
Dans l'ancien comté, aujourd'hui le bailliage de Pyrmont, on remarque le village de Frip.densthal, peuplé d'une colonie de quakers qui s'occupent à fabriquer de l'acier et divers objets de coutellerie. Pyrmont ou Neustadt-Pyrmont, ville de 2,500 habitants, est, depuis le quinzième siècle, célèbre par ses sources minérales.
Pendant la saison des eaux, les bals, les concerts, le spectacle, lui donnent l'apparence d'une cité importante. Elle renferme quelquefois près de 2,000 étrangers. La promenade est formée de plusieurs allées de tilleuls et bordée de boutiques élégantes et bien assorties ; le prince y possède un château. Pyrmont exporte annuellement près de 3pQ,QP0 bouteilles de ses eaux, dont les droits de gortie produisent plus de 12,000 thalers.
RANG DANS LA CONFÉDÉRATION. — FINANCES. — Dans l'ordre de la chancellerie fédérale, la principauté de Waldeck occupe le trentième rang. Elle a une voix dans l'assemblée générale, et partage une voix avec les autres principautés dé Lippe, de Reuss et de Lichtenstein dans le comité des Dix-Sept. Sa contribution fédérale est d'environ 6,000 francs, et son contingent, y compris la réserve, est de 779 hommes; son budget annuel monte ordinairement à 1,350,000 francs, et sa dette publique, qui est très-considérable pour un si petit État, est de plus de 2 millions de francs.
HESSE-HOMBOURG.
ORIGINE. — SUPERFICIE, POPULATION. — Le landgraviat de Hesse-Hombourg, un des plus petits Etats de l'Allemagne, a été détaché en 1595 de celui de Hesse-Darmstadt par Louis V en faveur de son frère Frédéric. Supprimé en 1806, rétabli en 1815, il n'a été admis dans la Confédération Germanique qu'en 1817. La superficie de cet État est de 280 kilomètres carrés, et sa population était évaluée en 1852 à 24,921 habitants.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Malgré son peu d'importance, il a encore le désavantage d'être formé de deux petits territoires, éloignés l'un de l'autre de plus de 90 kilomètres. L'un est celui de Hombourg, situé entre les possessions de la HesseDarmstadt et celles de Nassau; l'autre, qui est le plus étendu, est celui de JtIcissenheim, sur la rive gauche du Rhin, entre le cours de la Nahe et celui de la Glan, et limité à l'ouest par la principauté de Birkenfeld, au sud par celle de Lichtenberg, à l'est par les provinces rhénanes de la Bavière, et au nord par la régence prussienne de Cobjgntz. Le premier comprend 120 kilomètres carrés, et le second 160.
Le sol des deux portions du landgraviat de Hesse-Hombourg est fertile en produits agricoles et riche en mines : le territoire de Hopibourg en renferme quelques-unes; celui de Meissenheim possède des forges et des houilleres : la formation du schiste ârgileux domine dans les deux principautés. Hombourg-vor-der-Hohe ou devant la hauteur, surnommé ainsi pour le distinguer du Hqmboijrg qui appartient à la Bavière, est la capitale du landgraviat. Cette ville est située au pied d'une hautejir sur laquelle est le château
du prince; elle est petite, mais assez bien\ bâtie. Sa population est de 6,000 âmes; son industrie consiste en fabriques de toiles, de soieries, de flanelles et de bas de laine. Elle doit sa prospérité toute nouvelle à quatre sources minérales très-efficaces, qui y ont fait construire une maison de bains, la Kursaal, qui est le plus bel établissement en ce genre de toute l'Allemagne. La saison des eaux de Hombourg y attire, grâce à la situation de la ville à quelques kilomètres des grandes lignes de chemins de fer allemandes et françaises , plus de 20,000 étrangers que le jeu et les plaisirs captivent.
Meissenheim, sur la rivière de Glan, n'a que 1,800 habitants, dont le commerce consiste dans la vente des produits d'une verrerie et de deux usines où l'on travaille le fer, d'une mine de mercure que l'on exploite dans ses environs, et des vins de son territoire.
GOUVERNEMENT. — Avapt 1848, cette petite principauté était soumise à un gouvernement absolu. En 1850 , elle avait obtenu une diète composée d'une seule chambre; en 1851, le landgrave a retiré cette espèce de constitution, alléguant qu'elle lui avait été arrachée par la force.
RANG DANS LA CONFÉDÉRATION. — FINANCES. — Le lancjgraviqt dq Hesse-lfpffibpurg occupe avec jes principautés de Reuss et de Lippe le seizième rang dans la Confédération Germanique. Il a une voix dans l'assemblée générale ; son contingent est de 300 hommes, et sa cqntribution fédérale est de 2,500 francs.
Son revenu était évalué en 1855 à près de 720,000 francs, et sa dette à 2,500,000 francs.
LICHTENSTEIN.
La plus petite principauté de l'Allemagne est celle de Lichtenstein.
Sa longueur, du nord au sud, est de 26 kilomètres ; sa largeur moyenne, de l'est à l'ouest, est de 6 kilomètres, et sa superficie de ] 62 kilomètres. Elle est peuplée de 7,000 habitants ; elle fournit 82 hommes à la Confédération Germanique. Son revenu public est de 44,000 francs, et sa dette passe pour être d'environ 6,000,000, mais c'est probablement en y comprenant les dttes particulières du prince, qui jouit personnellement d'un revenu déplus de 3,000,000, par les grandes propriétés qu'il possède en Moravie, en Silésie et en Autriche, ainsi que dans d'autres parties de l'Allemagne. Telles sont entre autres les belles principautés de Troppau et de Jijgerndort, dont il jouit sous la souveraineté de l'Autriche et de la Prusse ; il peut donc passer pour l'un des plus riches particuliers de l'Europe. Il entretient une garde d'honneur de 12 hommes et une compagnie de 87 grenadiers. La maison de Lichtenstein descend d'Azo IV d'Est, mort en 1037. Elle a possédé jusqu'à 73 seigneuries pendant les siècles qui suivirent. Les membres de cette famille sont restés catholiques, ainsi que leurs sujets.
La principauté est située à 25 kilomètres au sud du lac de Constance, sur les bords du Rhin. Un rameau des Alpes la couvre au sud et la traverse du sud au nord, en divisant le pays en deux parties : à l'ouest, c'est la vallée du Rhin; à J'est, celle de la Samina, petite rivière qui va se jeter dans l'IJ), qui est lui-même un affluent du fleuve. On y jouit d'une douce température; le sol y e§t presque partout fertile; ses forêts sont belles, et les habitants élèvent beaucoup de bêtes à cornes.
Ce pays est divisé en deux seigneuries : celle de Vadutz et celle de Schellenberg.
Lichtenstein, autrefois fadutz, bourg de 1,8QP habitants, est la résidence habituelle du prince ; sa situation près de la rive droite du Rhin en fait un séjour agréable; le château est assez bien bâti.
Dans la seigneurie de Schellenberg, il y a un château qui est la résidence d'un landatjJman, magistrat chargé de In justice.
C'est à Vadutz que siège l'administration de la principauté; elle se compose de la chancellerie de la cour du prince, d'un juge, d'un receveur des impôts, d'un intendant et d'un garde forestier.
SUPERFICIE POPULATION en par FORCIS DIVISIONS kilomtres POPULATIO kilomètre REVENUS. MILITAIR.ES. POLITIQUES. VILLES ET BOURGS PRINCIPAUX.
carrés. carré. MI|ITÂIRES PÛLITIQUES.
carrés, carre.
DUCHÉ DE BRUNSWICK.
3,760 271,943 72 14,000,000 fr. 3,000 h. 6 cercles. BRUNSWICK, 38,000.— Wolfenbiittel, 9,000.—8,000.
- Gandersheim, 2,000. — Holzminden, 5,000. — Blankenbourg, 4,000. — Hasselfelde, 1,800. - Kônigslutter, 2,600.
- - Seesen, 2,200.
DUCHÉ DE SAXE-MEININGEN.
2,562 166,364 65 3,000,000 fr. 1,700 h. 12 bailliages. MRININGKV, 6,000. - Sonnenberg, 3,000. - RÕmhild, 1,800.
— Hildburghausen, 4,000. — Eisfeld, 2,600. — Saalfeld, 5,000. — Pôseneck, 3,000.
DUCHÉ DE SAXE-ALTENBOURG.
1,344 I 132,233 1 98 I 2,400,000 fr. 1 1,400 h. I 2 cercles. IALTENIIOURG, 12,000. — Ronnebourg, 4,000. - Kahla, 2,500.
III ) t Eisenberg, 4,000. — Roda, 2,800.
DUCHÉ DE SAXE-COBOURG-GOTHA.
2,035 150,412 73 2,500,000 fr. 1 1,600 h. I 2 bailliages. 1 GOTHA, 12,000. - Friedrichsrode, 1,800.—Ohrdruff, 4,000.
— Cobourg, 9,000. - Rodach, 1,600. — Neustadt-an-derHayde, 1,600.
DUCHÉ D'ANHALT-DESSAU-KOTHEN.
2,240 123,759 55 3,000,000 fr. 1,200 h. 22 bailliages. DESSAU, 12,000. - Worlitz, 2,000. - Fraslllorf, 1,700. , h. ~22 bailliageg. Sandersleben, 1,800.— Grôbzig, 2,800.- ZerbA4 9,000. Lindau, 1,200. — Kôthen, 7,000. — Nienbourg, 1,200. —
Roslau, 1,000.
, DUCHÉ D' ANHALT-BERNBOURG.
896 52,641 1 58 12,500,000 Cr., 5:1511. I 8 bailliages. IBERNBOURG, 8,000.— Ballenstedt, 3,600.— Harzgerode, 2,500.
| ) t — Kostrik, 2,400.- Hoymb, 2,000. — Gerllrode, I,Soo.
DUCHÉ DE NASSAU.
4,7881428,8]9 89 15,000,000 fr. 6,000 h. 28 bailliages. WiFsBADEN, 12,000. - Diez, 2,800. - Dillenbourg, 2,600.
Eltville, 2,200. — Herborn, 2,400. - Hôchst, l,Sfi.— ldstein, 2,000. — Niederselters, 3,600.- Limhëvrg, 3,000.Nassau, 1,000. — Montabaur, 2,600. — Rudeshrim, 2,400.
- Selters, 800.— Usingen, 2,000. — Weilbourg, 2,000. Biebrich, 2,000.
HESSE ÉLECTORALE.
9,856 755,350 77 47,000,000 fr. 9,000 h. 4 provinces, CASSEL, 35,000.—Erchwcge, 5,000. — Frizlar, 2,600.— Rin22 cercles. teln, 4,500. — Frankenberg, 3,000. — Marbourg, 10,000.
— Kirchhain, 2,000. -Fulda, 10,000. - Rerlflà, 6,000.
— Smalkalde, 6,000. — Hanau, 16,000. — Gelnhausen, 3,000. — Salmünster, 1,600.
PRINCIPAUTÉ DE LIPPE-DETMOLD.
1,182 106,615t ) 90 jl,500,000 fr. 1,100 h. 12 bailliages. 1 DETMOLD, 4, 000. - Barentrup, 1, 100. - Blomberg, 2,000.
j Lemgo, 4,000.
PRINCIPAUTÉ DE SCHAUENBOURG-LIPPE.
564 1 30,2261 53 1 500,000 fr. 1 315 h. 6 bailliages. |BUCKEBOURG,3,200.—Hagenbourg, 1,200.—Stadthagen, 1,800.
PRINCIPAUTÉ DE SCHWARZBOURG-RUDOLSTADT.
978 69,038 70 ) ) 1,500,080 fr. I 800 h. 1 10 bailliages. IRUDOLSTADT, 5,000. — Stadt-Ifm, 2,500. — Frankenhau|| L sen, 3,800.
PRINCIPAUTÉ DE SCHWARZBOURG-SONDERSHAITSEN.
.864 1 60,8451 70 1,860,000 fr. I 675 li. I 7 bailliages. I SOXDURSHAUSEN, 5,000.— Arnstadt, 5,000. — Ktula, — || ) Geltren, 1,500.
PRINCIPAUTÉ DE REUSS-GREITZ.380 1 35,1591 92 1 180,000 fr. 1 300 h. 12 seigneuries. GREITZ, 8,000. - Zeulcnroda, 4,300.
PRINCIPAUTÉ DE REUSS-SCHLEITZ-LOBENSTEIN - EBERSDORF.
1,181 1 79,8241 69 1 920,000 fr. 1 800 h. 15 seigneuries. ISCHLEITZ, 5,000.— Lobenstein,$,QQ0. — Ebersdorf, 1,200. 1 ) Géra, 10,000.
PRINCIPAUTÉ DE WALDECK.
1 2] 3 1 59 6971 49 1 1,350,000 fr. 1 780 h. 12 seigneuries, I CORBACH, 2,000. - Sachsenberg, 1,500. - Arolseo, 2,200. [4 bailliages, Niederwildungen, 2,000.
LANDGRAVIAT DE HESSE-HOMBOURG.
280 1 24,921 1 89 1 720,000 fr. ( 300 h. 12 seigneuries. [HOMBOURG, 6,000. - Meisenheim, 1,800.
PRINCIPAUTÉ DE LICHTENSTEIN.
162' 7,000 J 44 13,044,000 fr. 1 82 h. 12 seigneuries. (VADUTZ ou LICHTENSTEIN, 2:000. - Sehellenberg (château).
PAYS-BAS.
Une kermesse en Hollande.
\SIRUIRITOC; LikrtEs, SUPERFICIE, POPULATION. —
Le^ai^ibV^^s-Bas, ou la Néerlande (1), est un des États maritime do l'Btfrope ; il forme l'extrémité occidentale de la gran d e
plaine de l'Europe septentrionale. Ses limites sont, au nord et à l'ouest, la mer du Nord ; au sud, la Belgique (provinces de Flandre orientale, Flandre occidentale, Anvers et Limbourg) ; à l'est, le Hanovre et la Prusse Rhénane.
La superficie de ce royaume est de 35,868 kilomètres carrés, ou, d'après d'autres calculs, de 34,175 kilomètres carrés; au commencement de l'année 1855, on évaluait sa population à 3,433,372 habitants , la population du grand-duché de Luxembourg y comprise.
Au 31 décembre de la même année elle était de 3,450,707 individus. La population de toute la monarchie, en y comprenant celle de ses belles colonies, est de 18 à 20 millions d'âmes.
GÉOGRAPHIE PHYSIQUE. — On ne voit dans les Pays-Bas que des plaines à peine interrompues par de petites collines. C'est une contrée basse, couverte d'alluvions et de dépôts tourbeux qui indiquent les conquêtes récentes que les atterrissements des fleuves ont faites sur la mer (2). Ainsi, dans la province de Groningue, on
(1) C'est à tort que l'on donne encore en France à ce pays l'ancienne dénomination de royaume de Hollande. Sa véritable qualification dans les protocoles officiels est Néerlande ou royaume des Pays-Bas, du mot frison Nederlanden, en allemand Niederland, qui signifie pays inférieur. On conserve néanmoins au peuple la qualification de Hollandais.
(2) Voir aux Additions, page 11 : De la formation du sol de la Hollande.
a quelquefois trouvé des ossements de cachalots enfouis à environ 35 mètres de profondeur : ils indiquent un rivage sur lequel ces cétacés sont venus échouer peut-être depuis les temps historiques.
Toute la partie septentrionale présente jusqu'aux bords de l'Yssel des dunes sur les côtes, et des sables, des marais, des bruyères dans l'intérieur; entre l'Yssel et le Rhin s'élèvent des collines sablonneuses; la partie orientale jusqu'à la Meuse offre des dunes sur les côtes, et dans l'intérieur des lacs desséchés et un sol marécageux qui forme une sorte de croûte tourbeuse sur un amas d'eau salée que l'm trouve à quelques mètres de profondeur ; dans les îles qui s'élèvent entre la Meuse et l'Escaut, un dépôt argileux repose sur un sous-sol salé et imprégné de salpêtre ; enfin toute la région au sud de la Meuse est couverte de landes sablonneuses, de bruyères et de marais. La côte est en moyenne à 60 centimètres au-dessous du niveau de la haute mer. Les polders sont des terrains formés d'alluvions entassées par l'effet des eaux de la mer ou des fleuves, qui, situées de 2 à 5 mètres au-dessous des plus basses marées, sont protégées par des digues et forment des jardins maraîchers d'une fertilité extraordinaire.
FLEUVES ET RIVIÈRES. — La Néerlande, ce pays si humide, renferme un grand nombre de cours d'eau : à son extrémité septentrionale, l'embouchure de l'Ems baigne une petite partie de ses côtes; le Veckt, qui pren d sa source sur le territoire prussien, la traverse de l'est a l'ouest sur une longueur de 60 kilomètres, pour aller se jeter dans le Zuyderzée; l'Yssel, qui sort aussi du territoire prussien et qui se grossit de rOude-Yssel, coule dans la direction du sud au nord pour aller porter aussi ses eaux dans le Zuyderzée.
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des deux précédais par le nom de Nouvel-Yssel (Nieuw-Yssel) , n'est qu'une branmaJu Rhin, longue d'environ 70 kilomètres. Ce fleuve se ramifie et se divise sur le sol de la Néerlande d'une manière tout à fait remarquable; il perd avec son nom son rang de grand cours d'eau, et ne conserve sa dénomination que dans un de ses bras les moins importants. Ainsi, sous le nom de IVahal il va se joindre à la Meuse, et cède à celle-ci l'honneur réservé ordinairement aux grands fleuves, celui d'avoir une large embouchure et de former un vaste delta, tandis qu'il conserve le nom de Rhin sur son bras septentrional, qui se jetait jadis dans la mer au-dessous de Leyde jusque vers l'an 869 de notre ère, époque à laquelle il cessa d'avoir une embouchure qu'on lui rendit vers l'an 1709, en ouvrant un canal que les sables finirent par obstruer, et qui fut ouvert de nouveau en 1807. La Meuse, qui vient de France et traverse la Belgique avant d'entrer dans les Pays-Bas, est le plus méridional des neuves de la Néerlaude; il nous suffit de dire que sur le sol de ce pays elle reçoit, outre le Wahal, les deux rivières de l'Aa, et qu'à son embouchure le plus méridional de ses nombreux et larges bras va communiquer avec les bouches de l'Escaut. Quant à ce dernier neuve, dont les bouches seules appartiennent au territoire néerlandais, nous le décrirons aussi avec la Belgique, qu'il arrose; nous devons seulement faire observer ici que, formant avec la Meuse les îles de la Zélande, ses deux principaux bras, l'un au nord et l'autre au sud, ont reçu le premier le nom d'Escaut oriental, et le second celui d'Escaut occidental. La plupart de ces cours d'eau sont liés entre eux par des canaux qui établissent des communications faciles entre Jes villes, les bourgs et les villages.
CANAUX. — Dans un pays où l'industrie humaine est en lutte perpétuelle avec l'eau pour conserver les terres qu'elle a conquises sur les domaines de cet élément, l'entretien des digues, des routes et des canaux est l'objet d'une attention particulière de la part du gouvernement. Les Pays-Bas offrent l'aspect d'un immense réseau de canaux, dont les uns servent à l'écoulement des eaux, et les autres à la navigation. Le canal principal est le grand canal de la Hollande septentrionale, entre Amsterdam et Nieuw-Dicp, près du Helder, le plus bel exemple de ce genre en Europe ; long de 80 kilomètres, large de 42 mètres, profond de 7 mètres, deux frégates peuvent y naviguer de front, et il abrége aux vaisseaux qui vont à Amsterdam les dangers et la perte de temps d'une navigation dans le Zuyderzée; les autres grands canaux sont le Zederik dé Vian en à Gorcum; le canal de Bois-le-Duc à Maëstricht, navigable pour bâtiments de 800 tonneaux ; le canal d'Ems à Harlingen ; le DamsterDiep, joignant Groningue à Delfzyl et allant se jeter dans le Dollart; le Nieuwenlui" entre Utrecht et Amsterdam ; le grand canal de Rotterdam, joignant cette ville à Amsterdam par Delft-Leyde et Harlem ; enfin le canal dérivatif de Katicyk, qui sert à faire écouler les eaux du Rhin dans la mer, mais à marée basse seulement. La plupart de ces canaux, protégés par des levées, sont situés au-dessus du sol, et l'on peut à l'aide des écluses inonder le pays en cas d'attaque.
LACS. — Le sol de la Néerlande renferme un grand nombre de lacs. L'ancien lac ou mer de Harlem, qui menaçait d'engloutir Amsterdam, n'existe plus; il vient d'être desséché, et l'on a ainsi rendu plus de 15,000 hectares à l'agriculture (1); il est même aujourd'hui partagé en propriétés particulières et cadastrées. Une nouvelle commune s'élève au milieu de son fertile emplacement. Les autres lacs de la Néerlande sont ceux de Sneerker, Heeger, Bergumer, Lekster, Qpwerder, Zuidlaarder, Schild, Hoels, etc., etc. Le BiesBosch, sur la frontière du Brabant septentrional, est un lac d'environ 240 kilomètres carrés, qui est dû à un événement plus funeste que celui qui forma jadis la mer de Harlem : il fut produit, le 19 novembre 1421, par la rupture de plusieurs digues; 72 villages, dont la population s'élevait à 100,000 âmes, furent submergés. Plusieurs bras de la Meuse s'y jettent ; à sa sortie ils en forment un seul sous le nom de Hollands-Diep. Parmi les nombreux marais des Pays-Bas, le Bourtange, dans les provinc"" de Groningue et de Drenthe, et le Peel, dans celles de Limbourg et du Brabant septentrional, couvrent une grande surface. Les côtes de la Hollande sont protégées par des digues qui ont de 40 à 50 mètres de large sur 12 mètres environ de hauteur ; ces digues sablonneuses sont fixées à l'aide de plantations de pins et de roseaux. La plupart des villes sont elles-mêmes assises sur des hauteurs artificielles ou terpen, de sorte que lorsque la mer rompt les digues, les villes ou villages forment un archipel d'îles à clochers.
COTES ET GOLFES. - De tous les golfes qui bordent la côte et servent d'embouchures aux principales rivières, les deux plus importants sont le Dollart, entre la province de Groningue et le Hanovre, et le Zuyderzée, entre les provinces de Hollande et de Frise. Le premier, qui reçoit les eaux de l'Ems, a 14 kilomètres de largeur et 30 d'enoncement; il est le résultat d'une terrible inondation qui, en 1277, engloutit 33 villages. Le second, dans lequel se jettent le Reest,
(1) Voir aux Additions, page 12: Lac de Harlem et son dessèchement. -
l'Yssel et plusieurs autres rivières, fut formé en 1225 par une irruption de la mer qui couvrit 600 kilomètres carrés de pays; son nom signifie mer du Sud, parce qu'il est au sud de l'Océan. D'après ce qui a été fait pour le lac de Harlem, on peut penser qu'il ne serait pas impossible au génie et à la patience néerlandaise de dessécher ce vaste amas d'eaux souvent peu profondes et de le rendre à l'agriculture.
ILES. — Les îles du royaume des Pays-Bas forment deux groupes bien distincts ; le méridional comprend les plus grandes, baignées par les différents bras de l'Escaut, de la Meuse et du Rhin ; ce sont ll'alcheren, Nord et Sud-Beveland, Tholcit, SclwlIlfJcn, Duiveland, Over-Flakkee, Voome, Putten, Beyerland et Ysselmoude; le septentrional est composé des îles lVieringen, Texel, Vlieland, Ter-Schelling et Ameland, toutes rangées à l'entrée du Zuyderzée et sur les côtes de la Frise.
INONDATIONS. — Les Pays-Bas, d'après leur constitution physique, sont malheureusement exposés à un terrible fléau, celui des inondations ; on a calculé que la mer rompait les digues en moyenne tous les sept ou huit ans (1); ce sont alors de terribles catastrophes qui coûtent la vie à beaucoup de personnes; la dernière date de 1855.
Les causes qui les amènent sont les vents violents du nord-ouest ou d'ouest, coïncidant avec les crues de la Meuse et du Rhin.
CLIMAT. -'Les provinces des Pays-Ras, conquêtes de l'homme sur l'Océan, empruntent aux brumes de la mer et aux exhalaisons des marais leurs brouillards et leur humidité. Cependant l'hiver, qui y règne pendant quatre mois de l'année , et qui couvre la terre de frimas et les eaux de glace; le vent d'est, qui souffle fréquemment pendant cette saison, dissipent les miasmes d'une atmosphère insalubre. Il arrive souvent que le Zuyderzée est entièrement pris par les glaces. Dans la saison chaude, les vents pluvieux sont ceux d'ouest qui viennent de l'Océan, et ceux du sud-ouest qui viennent à la fois de l'Océan et des larges embouchures de l'Escaut et de la Meuse. Ce sont ces vents qui dominent; on a même remarqué que c'est à leur influence que les grands végétaux doivent d'être plus ou moins inclinés vers l'est et le nord-est. Les aurores boréales sont assez fréquentes en Hollande, puisque Muschenbroeck en a observé environ 750 dans l'espace de 20 années.
PRODUCTIONS NATURELLES. — Le sol des Pays-Bas, composé d'argile et de sable, ne recèle d'autre minéral qu'un peu de fer; il contient d'immenses dépôts de tourbe, de l'argile à potier et d'autres terres à ouvrer ; on trouverait difficilement une pierre de quelque volume dans tout le royaume ; les étendues de bois y sont très-rares.
Les arbres et arbustes que l'on trouve le plus communément dans les bois sont l'aune noir, le bouleau, le charme, le chêne, l'érable, le frêne, le hêtre , le mélèze, le noisetier, l'orme, le peuplier, le pin, le sorbier, le tilleul, l'aubépine, le chèvrefeuille, le cornouiller, l'épine-vinette, le framboisier, le houx, le nerprun, le prunellier et le sureau. Dans les tourbières croissent le roseau commun (arundo phragmites) , des scirpes (scirplls paluslris, lacustris et acicularis); la prêle d'eau (hippuris rulgnris), la gremille d'eau (myosotis palllstris), la ciguë aquatique (phellandrum aqualiculn), le plantain d'eau (alisma plantago damasonium) , le chiendent des marais (carex leporina) et la lentille des marais (lemna gibba). Les prairies naturelles se composent principalement de J'avoille haute (avena elatior), do l'avoine des prés (avena sesquitertia), du chiendent à épis (schœnus aculeatus) et de l'avoine stérile (bromus sterilis).
L'industrie du cultivateur multiplie dans les Pays-Bas les animaux domestiques et les pâturages. Bien que ce pays ne présente pas l'agréable variété d'un sol irrégulier, la belle saison le pare de ses charmes; d'immenses prairies brillantes de la plus fraîche verdure sont pendant huit mois couvertes de bestiaux, dont les flancs arrondis annoncent une abondante et saine nourriture; ces nombreux animaux n'attestent pas moins la richesse du campagnard , que les champs en culture n'indiquent ailleurs l'intelligence et l'assiduité d'une population laborieuse.
Dans le nord, le blé, le lin, le chanvre, la garance, et dans la région méridionale, le tabac et quelques arbres fruitiers, couvrent les meilleures terres. C'est chez le Hollandais que l'horticulture a fait les plus grands progrès ; c'est chez lui que la culture de mille plantes d'agrément, et surtout des jacinthes et des tulipes, a été portée si loin, qu'au dix-septième siècle le prix d'une fleur y dépassait souvent ce que coûtait l'entretien annuel de vingt familles.
Les seuls mammifères sauvages que l'on trouve en Hollande sont un grand nombre de lapins et de taupes, ainsi que quelques cerfs et chevreuils ; les sangliers, les loups et les renards y sont inconnus.
Les Hollandais nourrissent quelques belles races de bêtes a cornée.
La Hollande et la Frise produisent quelques races de chevaux estimés : ils sont ordinairement noirs; leur cou est long et ramassé, leur sabot épais et large. On donne le nom de ketten à une race
(1) Voir aux Additions, page 12: Action de l'Océan sur le sol de la Néerlande.
obtenue par le croisement des grands chevaux de la Hollande et des petits chevaux des îles Shetland.
Le petit gibier à poil est très - abondant, ainsi que les oiseaux aquatiques et les reptiles dans les marécages. Les grues, qui font leur nourriture de ces derniers, sont aussi en très-grand nombre; et des mesures sont prises dans le pays non-seulement pour empêcher la destruction, mais même pour augmenter le nombre de ces animaux utiles. Les principales pêches de la côte sont celles de la morue, du turbot, de la sole et des autres poissons plats; celle du hareng est l'une des sources de richesses de la Néerlande, mais elle a diminué en importance depuis le commencement du siècle.
DISTRIBUTION DE LA POPULATION PAR RELIGIONS ET P.AR RACES.- La population du royaume des Pays-Bas, considérée sous le rapport religieux, se subdivise en un grand nombre de croyances différentes. Aucune n'a sur les autres la prééminence comme religion de l'Etat; toutes jouissent des mêmes droits et d'une égale liberté. Cependant la religion réformée est celle de la majorité des habitants : les chrétiens de la confession d'Augsbourg occupent le troisième rang ; les mennonites, d'autres membres de différentes sectes et les juifs, beaucoup moins nombreux, sont répartis dans toutes les provinces. Sous le rapport ethnographique, la population offre des nuances encore plus nombreuses ; le langage y appartient à trois souches principales. La plus importante est la souche germanique : les peuples de la Frise et des îles du Zuyderzée, ceux qui parlent le hollandais, ceux qui ont conservé les dialectes néerlandais de la Gueldre, de la Zélande et des autres provinces du nord, les habitants des cantons voisins de l'Allemagne, en font partie. Les juifs, en général originaires du Portugal, se servent de l'idiome qui leur était familier lorsqu'ils s'établirent dans les Pays-Bas.
En 1855, la population des Pays-Bas était de 3,433,372 habitants, dont 1,834,924 protestants, 1,164,148 catholiques, 41 arméniens et grecs, 58,518 israélites et 1,369 de religion inconnue.
ANCIENS HABITANTS. — Les plus anciens peuples de la contrée étaient les Frisii et les Batavi. Les Frisii, ancêtres des Frisons, occupaient du sud au nord le pays compris entre le Rhin et l'Océan ; leur nom latin vient probablement d'un ancien mot de la langue germanique, friessen, qui signifie défricher, creuser des marais.
Ils étaient l'une des natjons les plus puissantes de la Germanie occidentale. Braves, jaloux de leur liberté, ils furent longtemps les dévoués auxiliaires des Romains; leur indépendance ne fut jamais contestée. On les voit, après la mort de Drusus, choisir des chefs ou des ducs au sein de leur nation. Celle des Batavi était, à ce que l'on croit, une colonie du peuple germain appelé Chatti ; forcés par suite de dissensions intestines de quitter leur patrie , ils s'installèrent dans le pays sablonneux et marécageux circonscrit par le Rhin et la Meuse : leurs voisins les appelèrent pour cette raison Wattaicer (1), dénomination que les Romains transformèrent en Batavi. Lorsque César entreprit la conquête des Gaules, ils étaient déjà puissants et maîtres d'une partie des terres au sud de la basse Meuse. Leur cavalerie était redoutable : leurs chevaux étaient dressés à traverser les fleuves à la nage sans rompre leurs rangs.
A la bataille de Pharsale, ils décidèrent la victoire en faveur de César. Leur bravoure et leur loyauté valurent aux Batavi le titre d'amis et de frères des Romains et l'honneur de former la garde prétorienne; Tacite dit qu'on ne les chargeait point d'impôts; ils restèrent fidèles à l'empire jusqu'à sa chute. Leur territoire était compris dans la seconde Germanie.
D'autres peuplades germaines, telles que les Sicamhri, les TIsipètes et les Chamaves, habitaient aussi la partie septentrionale du royaume néerlandais.
HISTOIRE ET DIVISIONS POLITIQUES. - Lorsque les provipces des Pays-Bas, soulevées contre la tyrannie de Philippe II, se lièrent par le traité d'Utrecht en 1579, et prirent en conséquence le titre de Provinces-Unies, elles étaient au nombre de sept : les seigneuries de Groningue, de Frise, d'Over-Yssel et d'Utrecht, le duché de Gueldre et les comtés de Hollande et de Zélande. Le pays de Drenthe était leur allié ; le Brabant hollandais et la Flandre orientale étaient sous leur dépendance. En 1798, le gouvernement républicain de France, dont les armées avaient envahi le territoire des sept Provinces-Unies, les détermina à modifier leur organisation : elles prirent le nom de république batave. Leur division politique changea; elles furent divisées en huit départements (2). Cette division ne dura que 18 mois; celle qui rappelait les beaux jours de l'indépendance batave redevint en usage, et subsista jusqu'à l'époque où Napoléon imposa un souverain aux descendants de ces républicains qui avaient cimenté leur indépendance par le sang des
(1) En allemand, watte signifie encore banc de sable; aue ou ave, pays bas, prairie.
- (2) On les désigna par les noms de Delft, Dommel, Amstel, Ems, Escaut-et-Meuse, Rhin, Texel et Vieux-Texel, qui étaient ceux des principaux cours d'eau qui les traversaient.
phalanges espagnoles. Leur pays, qui prit le nom de Royaume de Hollande, fut alors divisé en 11 départements (1). Réunie le 9 juillet 1810 à l'empire français, la Hollande forma 7 départements (2).
En 1814, augmentée de la Belgique, elle composa la monarchie des Pays-Bas ; mais depuis 1830 elle en est séparée : le royaume néerlandais est rentré dans ses limites antérieures à 1810, si ce n'est qu'il reste possesseur d'une partie des provinces de Luxembourg et de Limbourg. Il comprend 10 provinces, qui sont celles de Groningue, Drenthe, Over-Yssel, Frise, Utrecht, Zélande, Hollande septentrionale, Hollande méridionale, Gueldre, Brabant, et partie des duchés de Luxembourg et de Limbourg.
PROVINCE DE GRONINGUE. — Groningue, chef-lieu de la province du même nom, est la plus importante ville du nord de ce royaume. Arrosée par la Hunsé, située à l'embranchement de trois grands canaux qui la font communiquer avec plusieurs villes commerçantes, possédant un port qui, bien qu'il soit à 22 kilomètres de l'embouchure de l'Ems, reçoit les plus gros navires marchands, il n'est point étonnant que cette cité soit aussi florissante. Elle possède une bonne université, des écoles, de belles collections et des sociétés scientifiques; et elle a vu naître plusieurs savants distingués, entre autres Rudolphe Agricola, l'orientaliste Albert Schultens, et Muntinck , qui fonda le jardin botanique qu'on y admire. Ses plus beaux édifices sont l'église gothique de Saint-Martin, dont la flèche a 1I0 mètres de hauteur, et l'hôtel de ville, construit en 1793 sur une place qui passe pour une des plus belles de la Néerlande. L'un de ses ponts, appelé Botering-Hoog, est regardé comme un chefd'œuvre. Ces constructions et plusieurs autres que l'on y remarque, la propreté et la régularité de ses rues, placent Groningue au rang des plus belles villes du royaume. On évalue sa population à environ 26,000 âmes. Avant l'épidémie qui la ravagea en 1826, cette population était de près de 30,000 âmes. Elle Et jadis partie de la ligue hanséatique; elle jouissait alors de grandes prérogatives sur ses environs, que l'on appelait ommdandes. On prétend, sur quelques données fort incertaines, qu'elle a été bâtie autour de la forteresse romaine que Tacite nomme Corbulonis monumentum; cependant l'histoire n'en fait mention pour la première fois que vers le neuvième siècle; et ce n'est que pendant le quatorzième qu'on y éleva des fortifications qui ont toujours été entretenues depuis avec beaucoup de soin. Un chemin de fer doit l'unir à la Haye et Amsterdam. D'autres embranchements viendront s'y souder, et la mettront en communication avec les chefs-lieux des provinces.
L'île de Rottum, qui s'élève à quelques kilomètres de la côte, dépend de la province de Groningue : elle a 3 kilomètres de longueur et 1 de largeur, et renferme un petit village peuplé de pêcheurs.
Delfzyl, à l'embouchure de l'Ems, est défendue par une forteresse, et possède un port assez fréquenté. buiiischoien, sur le Rensel, qu'on a canalisé sous le nom de Winschoter-Trekvaart, a 5,000 habitants. On y remarque d'anciennes fortifications. Bourtangel, environnée de marais, est une place forte assez importante sur la frontière de Hanovre. Klosterburen, Pieterburen, Middelstum, Jukwert, ont quelque importance commerciale.
PROVINCE DE FRISE. - Dans la province de Frise, Leeuwarden communique avec Groningue par un canal, en attendant qu'elle y soit liée par un ehemin de fer; par d'autres canaux elle entretient un commerce actif avec plusieurs villes, telles que Doklru", Sneelr, etc. Ce chef-lieu de province est entouré d'un fossé et d'un rempart en terre; l'une de ses 12 églises renferme les tombeaux des princes d'Orange; le palais de ceux-ci est l'un de ses principaux édifices. Son hôtel de ville, construit en 1715, est d'une assez belle apparence. On donne à cette ville, que les habitants nomment Liewerden, une population d'environ 26,000 âmes. Sur l'emplacement d'un hameau que la mer engloutit en 1134, s'élève Harlingen, importante par ses fortifications, par son port, par son commerce et par ses chantiers de construction, Cette ville, qui est la plus peuplée de la Frise après la capitale, est assez bien fortifiée du côté de la terre, et peut défendre ses abords par des écluses qui inondent ses environs. Des digues la mettent à l'abri des envahissements de la mer. Il s'y fait une grande quantité de sel. Près de son port on voit un monument qu'elle érigea en l'honneur de Gaspard Robles, qui, en améliorant les digues de la province, a mérité la reconnaissance de ses concitoyens.
Dans les environs de Franeker on fabrique une grande quantité de briques que l'on exporte pour l'étranger. Cette ville possédait autrefois une université qui a été remplacée par un athenée, ou sept professeurs font chaque année des cours. Dokkum, ville de 3,000 âmes, est très-bien placée pour le commerce sur la route de Leeuwarden à Groningue. Sneek ou Snits est une ville de 6,000 âmes,
(1) Amstelland, Brabant, Zéeland, Utrecht, Gueldre, Maasland, Frise, Ost-Frise, Over-Yssel, Drenthe et Groningue.
(2) Ceux de YEms-Oriental, de YEms-Occidental, de la Frise, des Bouches-de-l'Yssel, de l'Yssel supérieur, du Zuyderzée et des Bouch es-de-la-Meuse.
bâtie près d'un lac qui porte son nom, sur la petite rivière de Swette.
Son plus bel édifice est l'hôtel de ville. On remarque dans une de ses deux églises le tombeau d'un simple paysan nommé Lange-Pier, qui se rendit célèbre pour avoir pris le titre de duc de Frise. Dans cette ville industrieuse on fabrique des toiles, de la poterie et des horloges en bois, dont on fait des envois en pays étrangers. Au mois de février 1825, la digue de Workum se rompit, et la mer se répandit dans la ville. Heerenveen est le siège d'un tribunal de première instance. On exploite dans ses environs la meilleure tourbe de toute la Frise. Les petites villes de Sloten, de Ijlst, BolslCard, Workum, Hindeloopen et Stavoren méritent d'être mentionnées pour leur commerce ou pour leur industrie; les trois dernières sont à l'entrée du Zuyderzée sur le Vliestrom. La pêche et le commerce maritime enrichissent leurs habitants.
Les trois îles de Schiermonnik-oog, Ameland et Ter-Sehelling appartiennent à la province de Frise; la première, longue de près de 9 kilomètres et large de 2, renferme 1,200 habitants, dont la principale occupation est la pêche. La seconde, trois ou quatre fois plus considérable, a plus de 5,000 habitants répartis dans trois villages. La troisième, large de 4 kilomètres et longue de 20, est bordée de dunes qui la^çarantissent contre les irruptions de la mer, et renferme de beaux pâturages et un grand nombre de bestiaux ; elle a 2,500 habitants.
La Frise, ancienne seigneurie érigée en comté par l'empereur Charles le Gros en 888, et dont l'archiduc Charles , depuis CharlesQuint, fut le dernier prince, fit partie des Provinces-Unies en 1579, époque de l'union d'Utrecht. Elle formait avec l'Ost-Frise ou la Frise orientale, qui appartenait au royaume de Hanovre, le pays des anciens Frisons, Frisii. Germains d'origine, les Frisons ont conservé l'idiome de leurs ancêtres, leurs anciennes coutumes, et surtout leur amour pour la liberté. Leur principale industrie consiste à fabriquer des toiles de lin, dont l'extrême finesse est renommée dans toute l'Europe.
PROVINCE DE DRENTHE. — La province de Drenthe est sensiblement plus haute que celles de Frise et de Groningue; les parties élevées sont boisées ; celles qui bordent les rivières offrent de bons pâturages : le sol est en général peu fertile, et produit peu de céréales. La principale industrie se réduit à l'exploitation des tourbières dont le pays abonde. Cette province formait jadis un comté qui dépendait de l'empire d'Allemagne.
Assen-, son chef-lieu, sur la ligne projetée d'Amsterdam à Groningue, est une jolie ville qui par un canal communique avec Meppel, bourg de 4,600 âmes, et avec le Zuyderzée. On a découvert dans ses environs des tombeaux d'anciens Germains. Iioevorden, bâtie en forme de pentagone, est entourée de fortifications regardées comme le chef-d'œuvre de Cohorn, le Vauban hollandais; elle est en outre environnée de marais qui en rendent l'accès difficile. Les autres lieux importants de la province sont : Hoogeveen, Beilen, Gasselte, Vries et Uffelte.
PROVINCE D'OVER-YSSEL. — La province d'Over-Yssel renferme plusieurs villes importantes : à Zuolle ou Zvolle, sa capitale, l'église Saint-Michel est remarquable par la beauté de son orgue et les sculptures de la chaire évangélique. Cette ville est fortifiée et assez bien bâtie. Près de ses murs on a établi des promenades agréables sur la montagne Sainte-Agnès, que surmontait jadis le couvent d'Augustins où vécut au quinzième siècle Thomas A-Kempis, qui dispute au chancelier Jean Gerson l'honneur d'avoir composé ce livre de consolation : YImitation de Jésus-Christ.
Kampen est sur la rive gauche de l'Yssel, à peu de distance de son embouchure dans le Zuyderzée; les sables qui obstruent son port menacent d'une destruction totale son commerce depuis longtemps déchu. Cependant cette ville renferme encore plus de 6,000habitants. Elle est entourée de fossés et de hautes murailles flanquées de tours , mais qui tombent en ruine. Ce qu'elle offre de plus remarquable , c'est son hôtel de ville et un pont de bois long de 256 mètres et large de 6, soutenu par de grosses poutres enfoncées en terre, et tellement éloignées les unes des autres qu'on le croirait suspendu en l'air. Kampen était autrefois ville libre et hanséatique.
C'est la patrie de Thomas A-Kempis. Deventer, dont on vante la quincaillerie, la bière et le pain d'épice, possède quelques beaux édifices, tels que la cathédrale et l'hôtel de ville, et renferme 12,000 habitants. Elle est importante par ses fortifications : en 1813 elle résista aux Russes et aux Prussiens réunis. Elle possède plusieurs associations philanthropiques et scientifiques, telles que la société du bien public, celle d'agriculture, et un athénée qui compte sept professeurs. C'est le Deventurum des Romains, et Ja patrie du philosophe Gronovius. Nommons encore sans nous y arrêter : Ommen, petite ville industrieuse sur la Wechle; Gramsbergen, à 8 kilomètres au nord-est sur la même rivière; Almelo, que traversera la ligne de Munster à Zvolle; Rijssen, Oldenzaal, Delden, Raalte, Gor etEnschede.
PROVINCE DE GUELDRE. — La province de Gueldre, qui a conservé le nom d'une ville cédée à la Prusse il y a plus d'un
siècle, était habitée jadis par les Sicambri, peuple de Germanie.
La première ville importante que l'on y traverse en suivant le cours de l'Yssel, est Zutphen, défendue par quelques fortifications : on y remarque l'hôtel de ville, l'église Sainte-Walburge surmontée d'une très-haute tour, et le palais des anciens comtes de Gueldre. Cette vieille cité fit partie de la ligue hanséatique, puis elle donna son nom à un comté qui fut réuni ensuite au duché de Gueldre. Sa population est de 12 à 15,000 âmes. Sur le bord d'un des bras du Rhin, Arnheim, non moins forte que la précédente, est le siège du gouvernement de la province; elle fut fortifiée par Cohorn ; ses remparts, plantés de vieux ormes, forment une agréable promenade; son port est beau; ses rues sont alignées; sa principale église, dédiée à saint Eusèbe, renferme les tombeaux des anciens ducs et comtes de Gueidre.
Sa population est évaluée à 15,000 âmes. A vingt kilomètres au sud de ce chef-lieu, une ville plus considérable est celle de II/imègue. Son ancien nom était Noviomagum, qui dans le moyen âge se changea en celui de Numaga. Elle est célèbre par deux traités de paix : le premier, conclu en 1678 par l'Espagne, la France et la Hollande, et le second, l'année suivante, par l'empire d'Allemagne et la Suède. Cette ville est bâtie sur trois collines et défendue par des fortifications fort étendues elT)ien entretenues. Ses maisons sont assez régulières, mais ses rues sont étroites. On y remarque l'hôtel de ville, orné des statues de différents empereurs et renfermant la collection des antiquités romaines qui ont été trouvées dans ses murs ou dans ses environs. On y voit aussi avec intérêt le vieux château de Valkenhoj, dont on attribue la construction à Charlemagne. Non loin de cet édifice est la promenade de Kalverbosch, près de laquelle est le Belvédère, haute tour d'où l'on jouit d'une vue magnifique. Parmi ses 8 églises, celle de SaintStéphano se distingue par ses tours et son carillon. Nimègue a donné le jour à plusieurs hommes célèbres, au nombre desquels on cite le littérateur Geldenhaut ou Gérard et le savant jésuite Pierre Canisius. Sa population est d'environ 22,000 âmes. Thiel et Kuilenbourg, dans la même province , sont des villes de 4,000 âmes qui n'offrent rien de remarquable.
PROVINCE D'UTRECHT. — L'un des bras du Rhin traverse Utrecht, ville beaucoup plus considérable que toutes celles que nous venons de citer. Le nom de Trajcctum, sous lequel elle est désignée dans l'Itinéraire d'Antonin, annonce qu'elle dut être une des 50 forteresses que Drusus fit bâtir chez les Batavi pour s'assurer du cours des principales rivières. Cette cité naissante fut plusieurs fois détruite par les Barbares sous le règne de Valentinien; Ulpius Trajan la rétablit, ce qui lui valut le nom de Trajectum Ulpii. Ses édifices ont un caractère d'ancienneté qui inspire le respect ; en les examinant, le souvenir de l'acte d'union de 1579, qui proclama l'indépendance de la république des sept ProvincesUnies, celui de la paix qui y fut signée en 1713, se présentent à l'esprit : ce fut donc au sein de cette ville, berceau du précepteur de Charles-Quint, le pape Adrien VI, que se forma cette puissance maritime qui lutta contre l'Angleterre, qui fut humiliée par Louis XIV, et qui fit trembler ensuite le grand roi. Dans l'ancienne cathédrale, restée en partie renversée par l'ouragan de 1674, et dont la principale tour a 125 mètres de hauteur, reposent les cendres de plusieurs empereurs. Le palais du roi, appelé Huis van Loo, est un de ses édifices les plus remarquables. Son université, ses collections scientifiques et ses sociétés des arts, des sciences et du bien public, sont dignes du rang qu'elle occupe dans les annales de la Hollande. Elle a donné son nom à un genre de velours qu'elle fabrique encore. Sa population est de 45,000 âmes.
Amersfoort est la seconde ville de la province d'Utrecht; elle est grande et bien fortifiée ; elle s'enorgueillit d'avoir vu naître le célèbre Olden Barnevelt, victime de l'ambition et du despotisme de Maurice de Nassau.
A 30 kilomètres d'Utrecht, Rhenen, sur la rive droite du Leck, est une petite ville dans les environs de laquelle on cultive de vastes champs de tabac. Wyk-by-JJunrstec, à 15 kilomètres plus bas sur la meme rivière, est une autre petite ville qui paraît être l'antique cité appelée Batavodurum. Près de son enceinte on voit les ruines du vieux château de Dunrstede, qui portait jadis le nom de JJurostadium. Les autres petites villes de la province sont : Jysselstein, Montfoort et Maarsen.
PROVINCE DE HOLLANDE SEPTENTRIONALE. — Depuis le fond du Zuyderzée jusqu'à l'île à!Ameland, 1 une des plus septentrionales de celles qui bordent l'entrée de ce grand golfe, la traversée est de 180 kilomètres et la navigation très-dangereuse, parce qu'il faut passer entre un grand nombre de bancs de sable.
Au sud-ouest de Ter-Schelling, que nous avons déjà nommée, on voit l'île de Vlieland, entourée de bancs de sable et renfermant un village de 800 habitants. La mer en a peu à peu diminué l'étendue.
On voit ensuite l'importante île du Texel, et celle de Wieringen, couverte de prairies, de champs en culture, et peuplée de 1,500 âmes Ces trois îles appartiennent à la Hollande septentrionale, ou, sui-
vant l'expression du pays, à la Nord-Hollande. Wicringen a un peu plus de 9 kilomètres de longueur sur 2 de largeur ; le Texel a 18 kilomètres sur 10 de large , et renferme 6 villages; il est célèbre par plusieurs batailles navales qui se livrèrent près de ses côtes, et surtout par celle de 1653, dans laquelle l'amiral Tromp perdit la vie. L'île produit beaucoup de tabac; ses prairies sont couvertes de bestiaux, et principalement de brebis, dont le lait sert à faire un excellent fromage vert qui doit, dit-on, sa couleur à la fiente des brebis. La population de l'île est de 6,000 habitants; sur sa côte méridionale elle offre une rade commode où se rassemblent les vaisseaux pour y attendre les vents du nord-est qui doivent leur faire passer le dangereux courant du Mars-Diep, et les pousser vers Amsterdam.
L'extrémité nord de la Hollande septentrionale, qui s'avance en pointe vis-à-vis l'île du Texel, est un pays aride et sablonneux qui porte les traces du séjour récent de la mer, et que les Hollandais appel lent leur Sibérie. Lesflols baignent le joli bourg du Helder, sans arbres ni canaux, mais composé d'habitations propres et élégantes. Il a donné son nom à une bataille gagnée par les FrancoBataves sur lelt Anglo-Russes, bien que cette affaire ait eu lieu près de Castricum, à plus de 32 kilomètres du Helder. Près de là, Ulillems- Oord est un établissement maritime fondé par Napoléon, et protégé par le roi Guillaume II, qui lui donna son nom ; il y possède même un petit palais dont le parc, planté d'arbres rabougris, ressemble à une petite oasis au milieu d'une aride steppe.
Sur la côte du Zuyderzée, Mèdemblick, petite ville de 2,500 âmes, avec un port, est, dans les grandes tempêtes, menacée d'une sub mersion complète ; on la regarde comme la plus vieille ville de la Hollande septentrionale, et comme la résidence des anciens rois de Frise. Hoorn, au fond d'une baie, est la patrie de Guillaume Schouten, qui découvrit en 1616 le cap américain auquel il donna le nom de sa ville natale. Elle est assez bien bâtie ; son port est bon ; ses environs sont embellis par des jardins et des maisons de campagne , et le nombre de ses habitants est de 10,000. En 1557, les eaux du Zuyderzée rompirent les digues et menacèrent de l'engloutir. Alkmaar est le centre d'un des plus importants commerces de beurre et de fromage de la Hollande. Cette ville, de 9,000 âmes, jouit d'une charmante promenade plantée à l'anglaise, qui occupe une superficie de 25 hectares. A l'embouchure du Zaan, dans le long golfe de l'Y, Zaandam ou Saardam, ville importante divisée en deux parties, est célèbre par le séjour qu'y fit Pierre le Grand, en qualité de simple charpentier, sous le nom de Pierre Mikhaïlof. La cabane qu'il habita est la seule curiosité qu'elle renferme : tous les voyageurs y inscrivent leurs noms. On y conserve avec soin la modeste couchette sur laquelle reposa le fondateur de la puissance russe. Zaandam a des chantiers considérables et fait un grand commerce de bois de construction et de papier. Presque toutes ses maisons sont en bois et peintes en vert. Vue du port, elle paraît n'avoir qu'une cinquantaine d'habitations, mais elle se prolonge ensuite en une seule rue longue de 12 kilomètres qui se trouve entre deux rangées de moulins à vent, dont on compte là plus de 2,000; car le mécanisme de ces moulins est appliqué par les Hollandais à toutes sortes d'usages : à moudre les grains et le tabac, comme à puiser de l'eau et à remonter les navires. Il n'est point en Europe de cité de 12,000 âmes dont la population soit aussi opulente.
Des bords septentrionaux du golfe de l'Y, la traversée n'est que de 2 kilomètres pour entrer dans le port d'Amsterdam. D'immenses prairies parsemées de villages et d'habitations entourent cette ville importante ; le cours tranquille de l'Amstel, petite rivière qui l'arrose, et dont les bords sont couverts pendant la belle saison de prés fleuris et d'arbres chargés d'un beau feuillage, complètent le brillant tableau qu'offrent ses environs. Cette ville, ceinte de fossés et de remparts convertis en boulevards, ne craint point l'approche de l'ennemi : elle peut, au moyen de ses écluses, inonder tout le pays qui l'environne. Une foule de canaux, la plupart bordés de rangées d'arbres, la traversent en formant 90 îles qui communiquent par 280 ponts, dont le plus beau est celui de l'Amstel : il a 220 mètres de longueur, 32 de largeur, et se compose de 35 arches. L'eau saumâtre et fangeuse de ces canaux, quoique souvent agitée par le mouvement des écluses, répand dans cette vaste cité des miasmes dangereux qui se joignent à l'humidité de l'atmosphère et du sol pour rendre son séjour malsain. L'un des inconvénients qu'elle offre est le défaut d'eau douce ; celle de l'Amstel est mauvaise : on se sert de l'eau de la petite rivière de Vecht, que l'on va puiser à quelques kilomètres de la ville; mais la meilleure est celle que l'on fait venir d'Utrecht à grands frais. Les rues, presque toutes alignées au bord des canaux, sont bien pavées, garnies de trottoirs, et la nuit éclairées avec soin; les deux plus belles, appelées le Heeren-Grachl et le Keizers-Gracht, sont magnifiques : elles ont plus de 2 kilomètres de longueur. Rien n'égale leur richesse; mais ce ne sont pas, comme dans les villes d'Italie, des palais qui en font l'ornement : les maisons, toutes bâties en briques et peintes de diverses couleurs, sont garnies avec goût des plus brillantes étoffes; el la profusion des magasins, ornés de tous
les produits des deux mondes, annonce la richesse d'une ville qui posséda longtemps le commerce de l'univers. Le Kalver-Straat et le Nievedek surtout ressemblent à des galeries d'exposition en plein air de tous les trésors de l'industrie.
De beaux édifices publics font ressortir encore la richesse commerciale d'Amsterdam : sur la place du Dam, la plus magnifique construction est le palais du roi, l'ancien hôtel de ville. On lui reproche seulement des proportions peu en harmonie entre elles : ainsi, sa hauteur, qui est de 38 mètres non compris une tour qui en a 13, est trop considérable pour sa longueur, qui en a 94, et pour sa profondeur, qui est de 75. Il est bâti sur 13,659 pilotis.
L'intérieur atteste la splendeur de la capitale à l'époque où elle fit construire un bâtiment aussi somptueux pour ses magistrats; les ornements n'ont point été épargnés : les marbres, les statues, les tableaux y sont même en profusion. La salle royale est l'une des plus vastes qui existent en Europe : elle a 40 mètres de long, 18 de large et 32 de haut; elle est traversée par une méridienne que traça le célèbre Huyghens. Les marbres dont le parquet, les murs et le plafond sont revêtus, les colonnes qui supportent celuici , les drapeaux enlevés sur les Espagnols, la décorent avec une magnificence que rien ne pourrait remplacer. Les appartements royaux sont encore tels que le roi Louis les fit orner et meubler. La bourse, bâtie sur un large pont qui cache le cours de l'Amstel, est un édifice dans le goût gothique, long de 80 mètres sur 40 de largeur; sa principale façade est ornée d'un Mercure colossal.
Les temples et les églises d'Amsterdam sont au nombre de 49; celle de Saint-Nicolas, appelée aussi Ouder-Kerk ou la vieille église, est un bel édifice dont la voûte est soutenue par 42 colonnes en pierre et sur laquelle s'élève une tour de 80 mètres de hauteur, portant un carillon composé de 36 cloches. Celle de Sainte-Catherine, ou l'église neuve, Nieuwe-Kerk, est une des plus belles du royaume ; on y remarque le tombeau du célèbre amiral Ruyter.
Dans la belle rue appelée Heeren-Gracht se trouve la société Felix meritis, qui, par ses cours de sciences, de littérature et de commerce, est l'une des plus importantes et des plus fréquentées de cette capitale. Le bâtiment où elle tient ses séances peut passer pour un de ses plus beaux édifices. La plus belle porte de la ville est celle de Harlem. On compte à Amsterdam plusieurs théâtres et un nombre considérable d'hôpitaux et d'hospices. Le vaste hôtel de la compagnie des Indes, les bâtiments de l'amirauté, qui ressemblent à une ville séparée, les chantiers de construction et la majestueuse enceinte du port, font juger de ce que devait être autrefois l'activité d'Amsterdam par le mouvement qui y règne encore. Il y entre annuellement 3,000 navires. Plusieurs chemins de fer, dont quelques-uns sont encore en construction, l'unissent à Utrecht, à la Haye, et vont se souder aux grandes lignes de l'Europe centrale.
Son commerce est très-considérable, mais il ne contribue pas seul à nourrir sa population : on y fabrique un grand nombre d'étoffes, des produits chimiques, du tabac, de la quincaillerie et de l'orfèvrerie ; on y distille une grande quantité d'eau-de-vie de genièvre ; l'art du lapidaire surtout y est encore porté au plus haut degré de perfection.
Cette grande capitale, dont on évalue le nombre d'habitants à plus de 200,000, était au douzième siècle bâtie au pied d'un château au bord de l' Amstel, qui lui donna son nom; vers le milieu du quatorzième siècle elle reçut le titre de cité ; en 1482 elle fut entourée de murailles ; et ce ne fut qu'en 1578, lorsqu'elle eut adhéré à la pacification de Gand, qu'elle acquit de l'importance ; un siècle plus tard elle attira dans ses murs tout le commerce dont Anvers était depuis longtemps en possession. Au commencement du seizième siècle elle ne renfermait que 2,500 maisons : aujourd'hui leur nombre s'élève à plus de 27,000.
A 10 kilomètres au nord-est d'Amsterdam, Broek-in-Waterland, que l'on nomme plus simplement Broek, est un village de 800 habitants, renommé dans toute l'Europe par la propreté minutieusement recherchée de ses rues, et surtout par ses maisons en bois peintes avec le plus grand soin ; elles sont entourées de petits jardins tenus d'une manière irréprochable, où s'épanouissent les fleurs les plus belles et les plus rares. Une visite au village de Broek est un pèlerinage obligé pour tout voyageur qui séjourne quelques jours à Amsterdam.
Un canal et un chemin de fer de 16 kilomètres de longueur conduisent d'Amsterdam à Harlem, ville importante, entourée de fossés et de remparts flanqués de tours qui r-appellent les horreurs d'un siège trop fameux qu'elle soutint en 1573 contre les Espagnols commandés par le duc d'Albe. Après un échange de têtes coupées, fait entre les assiégeants et les assiégés, et une résistance de six mois, le duc força la place à capituler, promit une amnistie, et fit périr en moins de trois jours, dans des supplices affreux, les magistrats, les ministres protestants, 2,000 citoyens et ce qui restait de la garnison. Les constructions de cette ville sont belles; ses rues ne sont pas larges; mais, garnies de trottoirs bordés de balustrades et traversées par des canaux plàntés d'arbres, elles présentent un ensemble d'autant plus agréable que la plupart des maisons sont ornées de marbre, de plaques de cuivre éclatantes
et de peintures. Le plus beau de ses édifices est l'hôtel de ville.
L'église Saint-Bavon est célèbre par son magnifique buffet d'orgue, composé de 8,000 tuyaux dont l'harmonie est au-dessus de tout ce que l'on peut imaginer de plus mélodieux. Sur la place du marché, une statue érigée à Laurent Coster annonce que cette ville se glorifie d'avoir vu naître cet homme, qui passe, surtout à Harlem, pour le véritable inventeur de l'imprimerie, à qui Faust et GuttemDerg auraient volé ses caractères, son secret et ses titres à la reconnaissance de la postérité. Au milieu de la foule de marchanda et d'acheteurs on voit se promener gravement des cigognes, qui jouissent d'une liberté d'autant plus grande que le peuple a pour ces oiseaux une sorte de vénération. Cette ville est aussi la patrie du savant helléniste Corneille Schrevelius, de Wouwermans, de Van der Helst et de plusieurs autres peintres célèbres. Sa société des sciences, qui compte parmi ses membres des hommes distingués; celle appelée l'eylérienne, qui tous les ans propose des prix pour la solution de plusieurs questions scientifiques, placent Harlem au rang des cités savantes de la Hollande. Elle est renommée pour ses blanchisseries, ses tissus de laine et de soie, ses lapis et ses velours, ses savonneries et ses fonderies de caractères d'imprimerie, mais surtout pour ses jardins, où la culture des tulipes a presque dégénéré en manie. Toute la banlieue est consacrée a ce genre d'industrie : ce qui ajoute à la beauté de ses environs, où l'on remarque une magnifique promenade appelée le Bois, des maisons de plaisance du plus beau style et les ruines de la vieille forteresse de Brederode, dont les tours rougeâtres s'élèvent majestueusement dans les airs.
PROVINCE DE HOLLANDE MÉRIDIONALE. — La route d'Harlem à Leyde, la première ville de la Hollande méridionale que nous allons visiter, est tracée entre le canal et l'ancienne mer d'Harlem. Elle est aussi belle et aussi bien entretenue qu'une allée de jardin anglais les charrettes ne l'encombrent pas, car tout se transporte par le chemin de fer qui lui est latéral ou par les canaux.
Ce n'est, sur un espace de 25 kilomètres jusqu'à cette ville, patrie de Rembrandt, de Gérard Dow, de Muschenbroek et du chef des anabaptistes Jean de Leyde, qu'une agréable promenade au milieu de prairies, de maisons de campagne et d'élégants villages. Autrefois célèbre par son industrie et par le commerce de librairie que rendaient si actif les- presses des Elzevirs, elle renferme encore près de 36,000 âmes. Son université, fondée en 1575, possédant de belles collections, une bibliothèque de 60,000 volumes qui peut compter 14,000 manuscrits, est toujours très-fréquentée. Vaste, entourée de fossés et de murailles et percée de huit portes, Leyde n'est que la réunion d'un grand nombre d'îles entrecoupées de canaux bordés d'arbres, couvertes de rues larges et droites qui communiquent entre elles par une infinité de ponts la plupart en pierre. C'est dans son hôtel de ville que l'on voit un des plus beaux tableaux de Lucas, l'un de ses peintres, représentant le jugement dernier. L'église gothique de Saint-Pierre renferme le tombeau de Bocrhaave. Le vieux château, témoin du fameux siège que soutint la ville en 1574 contre les Espagnols, pendant lequel plus de fr,000 personnes périrent par la famine, présente un labyrinthe que les étrangers vont visiter. Plusieurs parties de cette forteresse paraissent être de construction romaine, ce qui confirmerait l'opinion encore incertaine que Leyde occupe l'emplacement de Lugdunum Bolavorwii, mentionnée dans la Table théodosienne, dans l'Itinéraire d'Antonin, et par Ptolcmée, comme la plus importante cité des Batavi. A 4 kilomètres de Leyde, au village maritime de Il atvijk, on voit les gigantesques écluses qui assurent l'écoulement du Rhin à la mer; elles ont été construites en 1809.
l,a- Haye, en hollandais ffaag ou S'Gravcnhage, à 15 kilomètrès au sud die Leyde, s'offre en première ligne comme la résidence de la cour et des états généraux. Elle n'est d'une grande importaince ni par son étendue ni par sa population, que l'on porte à 75,000 âmes; mais on ne peut se dispenser de la comprendre parmi les plus- belles villes, de l'Europe. Elle est du petit nombre de celles de la Hollande oà le sol est sec et l'air pur et sain. Les deux tiers de ses pues sont entrecoupés de canaux bordés d'arbres ; de keliss plantations couvrent aussi ses places et rendent plus agréable à l'œil la régularité des édifices. Un air d'aisance se fait remarquer dMtt tous les quartiers de cette cité, plutôt parlementaire. que commerçante. Les quartiers marchands sont composés de rues étroites, mais d'une grande propreté y dans ceux de la bourgeoisie, les maisons ont une belle apparence ; les rues en sont larges, droites et pavées en briques; la plus belle est le PrmzenGraclit. On trouve dans la ville une belle bibliothèque, avec nue collection de médailles, de& tableaux précieux et les archives du royaume. Le parais neuf, bâti par Guillaume III, celui du comte de Beiilheim et celui du prince Maurice de Nassau brillent chacun dans leur genre. Le musée que le dernier renferme est visité par tous les curieux ; phts de 400 tableaux y rappellent l'ancienne splendeur des écoles flamande et hollandaise. Un autre musée, composé de plusieurs salles, contient une magnifique collection de curiosités chinoises et japonaises, ainsi que des objets d'un grand
prix aux yeux des Hollandais qui connaissent l'histoire de leur pays.
Ici se conservent les habits que portait Guillaume de Nassau, le fondateur de la république hollandaise, lorsqu'il fut atteint d'une balle par le fanatique Balthasar Gérard ; plus loin ce sont les vêtements du stathouder Guillaume III, des cheveux de Guillaume IV, le chapeau de Ruyter, les gobelets d'argent du marquis de Spinola et la truelle de même métal dont se servit l'empereur Alexandre pour sceller une pierre dans la cabane de son aïeul à Saardam.
L'hôtel de ville, la halle aux grains et le temple neuf sont aussi de beaux édifices; le dernier est surtout remarquable par sa charpente.
Nous aurions trop à faire si nous voulions énumérer ou décrire les hospices, les maisons de charité, les écoles, les collections et les sociétés scientifiques de la Haye. Toutes les villes de la Hollande renferment de semblables établissements. Rappelons seulement que cette cité royale est la patrie de l'astronome Huyghens et du poële Jean Second, qui se servit avec tant de grâce el de facilité de la langue d'Ovide.
Les environs de cette ville, si riants et si verts, sont encore embellis par de charmantes habitations et par des promenades magnifiques. La beauté de celle que l'on nomme le Bois surpasse tout ce qu'on peut imaginer : des arbres majestueux entrelacent dans les airs leur épais feuillage ; à ses extrémités, des pavillons, qui déguisent sous d'élégantes façades des guinguettes ou des cafés, servent de rendez-vous aux promeneurs; car le Hollandais aime mieux s'enfermer dans ces pavillons, où l'attire le dimanche un orchestre choisi, que de respirer un air pur sous les voûtes silencieuses de ce bois magnifique. Près de la promenade est située la jolie maison royale d'Orangensaal. Une belle avenue conduit au village de Schweningen, renommée par son établissement de bains de mer, et où l'on trouve réunis divers lieux de divertissement.
Delft, à 8 kilomètres de la Haye, occupe une jolie position sur les bords de la Schie; c'est une place de guerre de troisième classe, une ville sans mouvement et presque sans commerce, quoiqu'elle possède des fabriques de draps, de tapis, de savon , et des brasseries estimées. Elle compte 800 ans d'antiquité, et cependant elle est bien bâtie ; ses édifices publics sont magnifiques. On voit dans sa vieille église les tombeaux de l'amiral Heyn et du célèbre Tromp ; l'église neuve renferme ceux de Grotius et du physicien Leuwenhœck, qui ont illustré cette ville où ils reçurent le jour; mais le monument le plus remarquable dans ce temple est le mausolée de Guillaume Ier : c'est au Prinzen-Hof, à quelques pas de là, que ce prince fut assassiné par Balthasar Gérard.
En moins de deux heures, et en suivant une route où l'on ne voit de tous côtés que des villages peu distants, séparés par de magnifiques prairies, que des hahilations d'herbagers que l'on prendrait pour des maisons de campagne, on arrive de Delft à Rotterdam, la cité la plus commerçante et la plus populeuse de la Néerlande après la capitale. Elle possède des écoles et des sociétés savantes ; elle est la patrie d'Erasme, dont on voit encore la maison, et à qui elle érigea une statue en bronze sur le grand pont de la Meuse; et cependant c'est peut-être la seule grande ville de la Néerlande qui ne possède point une bibliatltèque publique digne de son importance. Absorbés par leurs grandes occupations commerciales , les habitants ne peuvent consacrer à l'étude des lettres et des sciences que de bien courts instants. Cependant elle renferme plusieurs sociétés scientifiques et littéraires, telles que la Société batave des sciences exactes et expérimentales, la Société du bien public et la Société nationale économique, et des établissements pour l'instruction, c'est-à-dire un collège, une école latine, un cabinet d'antiquités et d'histoire naturelle. Le nom de cette ville signifie la digue de Botte, parce qu'elle est située à l'endroit où cette petite rivière se jette dans le cours d'eau que l'on appelle la basse Meuse.
Une partie de la ville est spacieuse et située très-agréablement.
Des canaux larges et profonds, que le flux et le reflux de la Meuse empêchent d'être insalubres, où l'on voit les plus gros navires à l'ancre devant les magasins et les boutiques les plus riches, et qui communiquent les uns aux autres par des milliers de pouts-levis; des quais magnifiques sur le bord de ces canaux, ornés de rangées de gros tilleuls et garnis de hautes maisons que l'on dirait construites depuis peu : voilà le coup d'oeil général. Quelques quartiers sont pittoresques ; tel est celui de l'amirauté, avec ses chantiers, offrant un quai plus beau que tous les autres, où la Meuse forme un coude, et qui est suixi au loin d'une plantation superbe, entremêlée de petites maisons bâties en briques, dont l'arrangement forme des dessins divers. Au milieu du fleuve qui baigne ces habitations, qu'on dirait sorties de ces ondes, se montre une île couverte de bocages. Le palais de l'amirauté et celui de la ci-devant compagnie des Indes sont deux des pins beaux édifices de Rotterdam. La population de la ville est d'environ 90,000 âmes. Cette grande cité manufacturière est un des points principaux de la ligne de chemin de fer hollandais qui passe actuellement par Dordrecht, Leyde, la Have, Harlem et Amsterdam.
Entre un bras de la Meuse et le lac de Biesbosch , une ville dispute d'wicienneté avec Delft, c'est celle de Dordrecht. Elle n'est
éloignée de Rotterdam que de 18 kilomètres ; sa situation sur une île la défendrait au besoin beaucoup mieux que ses vieux remparts.
C'est dans son enceinte que tint, en 1618 et 1619, le synode qui condamna les doctrines d'Arminius, et qui, dévoué au prince Maurice, envoya à la mort le grand pensionnaire Barneveldt. Dordrecht, par ses 22,000 habitants, son commerce, son industrie, ses chantiers, son port, sa principale église et ses belles promenades, est une des plus importantes villes du royaume. Gorkum ou Gorinchem, divisé en deux parties par la petite rivière de la Linghe, est une place de guerre peuplée de 8 à 9,000 âmes, entourée d immenses polders, et où les digues ont de la peine à retenir le Wahal, qui, avec tous ses affluents, y présente l'aspect d'une mer. A l'embouchure d'un des bras de la Meuse, c'est-à-dire sur le côté septentrional de l'île de Woorne, se trouve Brielle, qui passait autrefois pour une place de guerre importante, et dont la plupart des 3,000 habitants sont pécheurs et pilotes, C'est la première ville des Provinces-Unies qui se souleva contre la domination espagnole et se déclara pour Guillaume d'Orange.
Nommons encore parmi les villes principales de la Hollande méridionale : Rytwik, petite ville de 1,800 habitants qui a donné son nom au traité qui mit fin à la seconde guerre de coalition contre Louis XIV, Le traité fut signé au château de Niewburg, situé à peu de distance au sud-ouest de la ville; Maashuis, Delfshaven, Vlaardingen, Niewport, IVianen et Helleooelduis, dont la population varie de 6 à 6,000 âmes. Guudlt est une ville industrieuse de 15,000 habitants, renommée pour su distilleries et ses fabriques de pipes. Schiedam, près de l'embouchure de la Schie dans la Meuse, est une ville maritime commerçante peuplée de 15,000 Ames.
PROVINCE DE ZÉLANDE. — La province de Zélande, formée des îles qui s'élèvent à l'embouchure de l'Escaut, a pour capitale Middelbourg, au centre de l'île de Walcheren ; son nom signifie place du milieu. C'est une ville industrieuse, commerçante, riche et même savante, ou du moins possédant une société des sciences et des arts, une société d'agriculture, un athénée, une bibliothèque et un musée d'histoire naturelle et d'antiquités. Elle est la patrie du poëte Beverland et de Leydeker, auteur de la République des Hébreux. Un large canal, construit en 1817, remplace son ancien port. Cette ville, assez tien bâtie et traversée par des canaux, possède un hôtel de ville remarquable par son architecture gothique et par sa façade ornée de vingt-cinq statues des comtes et comtesses de Zélande; l'église Saint-Pierre, ancienne cathédrale , renferme plusieurs beaux mausolées. Dans la même île, Flestingue ou Vlissingen, défendue par d'importants travaux de fortification, possède un port vaste et sûr, des bassins qui peuvent contenir 80 vaisseaux de ligne, des chantiers et des magasins immenses, constructions dues en grande partie aux Français, qui, après en avoir chassé les Anglais en 1809, conservèrent cette place jusqu'en 1814. Elle fut après Brielle la première ville qui, en 1572, arbora l'étendard de la liberté ; elle eut aussi la gloire de donner le jour à l'amiral Ruyler, et elle érige en ce moment en l'honneur de ce célèbre marin un monument digne de fixer l'attention des habitants du pays comme celle des étrangers.
La petite ville de Veen:, ou Tervere, possède un hôtel de ville bâti en 1470 et un bel arsenal commencé en 1564. Elle fut le 8 janvier 1836 le théâtre d'un sinistre événement : la tour colossale qui dominait une de ses églises transformée en hôpital, s'écroula ; des 300 malades que renfermait cet établissement, 7 furent retirés morts et un grand nombre blessés.
Goes, ou Ter-Goes, dans l'île de Sud-Beveland, est une petite place forte peuplée de 4,000 âmes. Tholen, dans l'île de ce nom, n'a que 2,000 habitants; Zierikzée, sur l'île Schouwen, est célèbre par ses bancs d'huîtres, qui s'étendent sur la côte, et par ses puits, dans lesquels on les conserve. Sluis, sur la frontière de Belgique, est plus connue sous le nom de VEcluse; c'est un petit port de 2,000 âmes, célèbre dans l'histoire par la défaite de la flotte française par les Anglais en 1336. Hulst, forteresse destinée à protéger la province, est située à 12 kilomètres à l'est de la petite ville d'Axel.
PROVINCE DU BRABANT SEPTENTRIONAL. — Dans le Brabant septentrional, ou hollandais, la plus méridionale des provinces et la plus importante par le rang qu'elle occupe aux états généraux, dix villes mériteraient d'être mentionnées, si nous ne voulions éviter les répétitions monotones qu'entraînerait la description d'un grand nombre de cités qui offrent la même physionomie.
Les trois principaux chefs-lieux sont trois places de guerre. Sur la rive droite de l'Escaut oriental, Berg-op-zoom, ou Bergen-opsoom, est célèbre comme forteresse, et renommée par les anchois que l'on pêche dans ses environs et par les poteries qu'elle fabrique.
-La tour de son château s'élève en s'élargissant et semble prête à s'écrouler au moindre coup de vent. Bois-le-Duc, en hollandais Hertogenbosch, est la capitale de la province. Arrosée par le Dommel et l'Aa, qui s'y réunissent pour se jeter à 4 kilomètres plus bas dans la Meuse, elle peut augmenter les moyens de défense que lui offrent sa citadelle et ses deux forts en inondant ses environs. Ses
rues sont droites et bien bâties ; ses canaux la divisent en neuf quartiers ; son hôtel de ville et sa cathédrale sont ses plus beaux édifices, et son commerce est important. Parmi ses hommes célèbres, on cite le peintre Jérôme Bos et le mathématicien S'Gravesande. Entre ces deux villes, et à 35 kilomètres de l'une et de l'autre, Breda est défendue par des fortifications qui ont près de 4 kilomètres de tour et par de vastes marais. Elle est célèbre dans les annales de la guerre. En 1590 , Maurice de Nassau s'en rendit maître en cachant dans un bateau de tourbe, qu'il fit entrer la nuit dans la place, 80 soldats qui s'emparèrent du gouverneur et ouvrirent les portes.
Spinola, 35 ans plus tard, la força de se rendre et fit brûler le fameux bateau. Les Français s'en emparèrent en 1792 et en 1794; mais en 1813, pendant une sortie qu'ils firent pour attaquer l'armée russe, les habitants se révoltèrent, fermèreut les portes et empêchèrent la garnison de rentrer. L'un de ses plus beaux édifices est sa grande église, dont la floche a 120 mètres de hauteur.
Gertruydenbera, place forte située sur le Biesbosch, et Tilbourg, ville de 12,000 âmes, importante par ses fabriques de draps, ne doivent pas être passées sous silence.
LIMBOURG HOLLANDAIS. — Le territoire néerlandais De se compose pas seulement des anciennes provinces que nous venons de parcourir ; il possède, sur les rives de la Meuse, dans l'ancien Limbourg, Venloo, Ruremonde, Thorn et Maestricht avec les dépendances de ces villes : c'est-à-dire que tout ce qui s'étend à 4 kilomètres à l'ouest de Maestricht, et à partir de cette forteresse jusqu'à Thorn, tout ce qui est à l'est de la Meuse jusqu'à la frontière de la Prusse, et enfin, depuis Thorn, les deux rives de la, Meuse jusqu'aux confins de la Gueldre, est néerlandais, d'après le traite du Ut novembre 1831, conclu sous le patronage des puissances étrangères. D'un autre côté, le grand-duché de Luxembourg a été partagé entre la Belgique et les Pays-Bas, de telle manière que ce dernier pays possède dans le grand-duché tout ce qui est compris entre le cours de la Moselle et une ligne à l'ouest, qui, prolongée du nord au sud , maintient sur le territoire néerlandais, outre Luxembourg et Diekirch, Vianden et Bteinfori.Visitons ces possessions de la couronne néerlandaise, Venlo ou Venloa, sur la rive droite de la Meuse, est environnée de marais et de plaines incultes; de l'autre côté de ce fleuve elle est défendue par le fort Saint-Michel. Cette ville, qui n'a que 7,000 âmes, est ancienne, et fit jadis partie de la ligue hanséatique; c'était en 1343 un bourg que Renaud, dnc de Gueldre, entoura d'une muraille, et qu'il éleva au rang de cité. Elle dut son nom aux tourbières au milieu desquelles elle s'élève (1). Sa principale industrie est la fabrication des épingles. C'est dans cette ville que naquit en 1526 le savaut antiquaire Hubert Goltzius. Veerdt, que les traités ont aussi laissée aux Hollandais, est une petite ville de 6,000 âmes, entourée également de landes et de tourbières, et qui renferme une très-belle église. Elle est la patrie du fameux Jean de Veerdt, qui, d'abord garçon cordonnier, s'engagea comme soldat, devint général au service de l'Autriche, et vice-roi de Bohème, et qui, après avoir répandu la terreur jusqu'aux portes d'Amiens, tomba au pouvoir des Français en 1638 à la bataille de Rheinfeld, capture qui fut chantée dans les couplets de pont-neuf de cette époque, comme la plus importante que l'on eût pu faire. A 17 kilomètres à l'est de cette ville s'élève Ruremonde ou Roërmond, c'est-à-dire bOl/che de la Roëi-, parce qu'elle est située à l'embouchure de cette rivière dans la Meuse; plus ancienne que Venlo, elle n'était qu'un simple village lorsqu'en 1290 Othon III, dit le Boiteux, comte de Gueldre, y fit construire des murailles. Elle est ceinte d'un rempart avec un fossé, peuplée de 5,000 âmes et assez bien bâtie; elle possède un collège et renferme des fabriques de tissus de laine et des papeteries considérables, A 10 ou 12 kilomètres au sud-ouest de cette ville, on voit, à peu de distance de la rive occidentale de la Meuse, Thorn, bourg de 1,200 habitants , qui renferme des brasseries, des tanneries, des tisseranderies et des fabriques de teintures.
Une vallée qui s'élargit devant nous laisse apercevoir dans le lointain Maestricht et la montagne de Saint-Pierre qui le domine entre la rive gauche de la Meuse et le cours du Jaar; cette mon* tagne calcaire, dont on tire depuis plus de 15 siècles une pierre tendre et crayeuse, est traversée par un si grand nombre de galeries, qu'elle forme un labyrinthe inextricable d'environ 25 kilomètres de circonférence. On a découvert dans cette masse divers ossements fossiles d'un grand intérêt pour la science, entre autres deux têtes de sauriens gigantesques, qui ne vivent plus à la surface du globe, et que les savants s'accordent à désigner sous le nom de mosasauriis. L'une a été transportée dans le musée d'Har]em, et l'autre se voit au muséum d'histoire naturelle de Paris ; sa longueur est de lm25, ce qui fait présumer que ce monstrueux lézard avait environ 8 mètres de longueur. La montagne de Saint-Pierre, qui porte le nom d'un village qui sert de faubourg à la ville, ou plutôt celui de l'église Saint-Pierre qui précéda la fondation de ce village,
(1) Wecn en hollandais signifie tourbière.
Famille de pêcheurs hollandais travaillant au filet.
s'appelait, au moyen âge, le Mont des Huns (mons Hunnorum).
Sur le sommet de la montagne, une vieille tour a conservé la dénomination de Tour de César; plus loin on croit qu'il exista un camp romain. Ajoutons à ces noms fondés sur des traditions que le nom brabançon de Maastricht n'est que la traduction de l'expression latine Trajectum ad Mosam, passage de la Meuse; ne doit-on pas en conclure que les Romains n'y possédaient qu'un camp retranché? Rien n'annonce que cette cité puisse être antérieure au quatrième siècle. Les remparts, les fossés et les bastions qui la défendent, ainsi que le fort Saint-Pierre, en font une des plus fortes places des Pays-Bas. Elle est bien bâtie ; on ne peut se dispenser de remarquer la beauté de son hôtel de ville et de l'église SaintGervais. On y fabrique des armes à feu, des épingles et des draps ; le cours de la Meuse donne de l'activité à son commerce. La ville communique avec le faubourg de Wyck au moyen d'un beau pont en pierre de 166 mètres de longueur qui traverse ce fleuve; ses maisons sont bien bâties; ses rues sont larges et propres, principalement celle de Bois-le-Duc, qui est remarquable par sa longueur. Le Vry-Hof, ou la place d'armes, plantée de beaux arbres, forme une agréable promenade. L'un des côtés de la grande place du marché est décoré par la façade de l'hôtel de ville, qui date de 1652, et qui passe pour un des plus beaux de la Néerlande. Les autres édifices sont la halle couverte, l'église Saint-Gervais, l'arsenal ,, le théâtre et l'ancien collège des jésuites. Elle possède neuf autres églises, deux hôpitaux, deux hospices d'orphelins , une belle bibliothèque et une société d'agriculture. Sa population est estimée à 22,000 âmes. Réunie à la France en 1795, cette ville devint le chef-lieu du département de la Meuse-Inférieure.
LUXEMBOURG HOLLANDAIS. — La partie du Luxembourg que les traités ont cédée au royaume néerlandais forme une superficie d'environ 1,500 kilomètres carrés; ce n'est que le tiers de toute l'ancienne province ; cependant cette portion conserve le titre de grand-duché, qui lui fut donné par l'acte du congrès de
Vienne, et place son souverain dans la Confédération Germanique, parce que Luxembourg est, depuis cette époque, une des forteresses de la Confédération. Cette ville, qui s'élève au bord de l'Alzctte, fut pendant vingt ans le chef-lieu du département français des Forêts; elle se divise en deux parties : la ville basse, arrosée par la rivière qui la partage en deux quartiers que l'on peut considérer comme les faubourgs de la place, et la ville haute, où l'on arrive par un chemin tortueux et taillé dans le roc : ce chemin est tellement escarpé, que les voitures ne peuvent le gravir qu'avec peine. Cette partie de Luxembourg date du commencement du onzième siècle. Les deux quartiers de la ville basse sont appelés le Grundt et le Pfaffenthal, De larges fossés de 20 mètres de profondeur sembleraient devoir suffire à la défense de la ville, et cependant, outre ces fossés, un double rang d'ouvrages extérieurs en défend l'approche. Ces travaux de défense furent d'abord dus en partie aux Français, qui s'en emparèrent en 1684; cédée à l'Espagne par le traité de Riswick, Luxembourg fut reprise en 1701 par les Français; mais à la paix d'Utrecht, elle passa sous la domination de l'Autriche. Bloquée en 1795 par l'armée française, elle fut forcée de capituler; ses fortifications reçurent alors de nouvelles augmentations; enfin, en 1814, enlevée à la France, elle fut érigée en capitale du grand-duché auquel elle donne son nom, et qui futannexé à la couronne des Pays-Bas. Ses travaux de défense reçurent encore de nouvelles augmentations; aussi n'est-ce point une exagération de dire que c'est une des plus fortes places de guerre de l'Europe. Sous le rapport militaire, elle ne dépend pas du seul royaume néerlandais; la nomination du chef qui y commande est soumise à l'approbation de la Confédération Germanique. C'est là tout ce qui constitue l'importance de Luxembourg; il nous serait difficile de mentionner parmi ses édifices un seul bâtiment civil ou religieux digne du rang que cette ville occupe; sa population même est à peine de 15,000 âmes.
Cette ville doit son origine à un ancien château que l'on prétend avoir été construit sous le règne de Gallien pour arrêter les irrup-
Pêcheurs hollandais.
tions des Allemani, et dont il est fait mention dans un acte de l'an 963. Compris dans les vastes domaines de Sigefroid, comte d'Ardenne, c'est autour de ce château que se groupèrent les habitations qui formèrent dans la suite la ville haute.
A 25 kilomètres au nord de Luxembourg, Diekirch est une petite ville irrégulière, bâtie dans le style gothique; elle n'était qu'un misérable hameau lorsqu'en 1320 Jean, roi de Bohème et comte de Luxembourg, la fit entourer de murailles. Un peu plus loin, Vianden, qui n'a que 1,200 habitants, s'élève sur la rive droite de l'Our.
Sur celle de la Sura, Echternach ou Epternach, l'antique Andethana, possède des fabriques de linge de table et une population de 3 à 4,000 âmes. Grevcnmachern, près des bords de la Moselle, qui coule au pied d'une colline couverte de vignes, fait un grand commerce de vin. Son nom signifie limites du comté. Au sud de cette petite ville, "celle de Remich joint au même commerce celui du plâtre qu'on exploite dans ses environs ; enfin Bettenbourg est située sur un territoire fertile en céréales.
CARACTÈRE ET MOEURS DES HOLLANDAIS. — Il est peu de pays où la constitution physique du sol paraisse avoir plus d'influence sur le caractère et les mœurs des habitants que le royaume néerlandais. L'humidité du climat leur donne une apparence de lourdeur et de phlegme ; ils sont rarement affectés par de grandes passions, mais leur apathie cesse dès qu'ils s'occupent d'affaires. Le désir d'acquérir est, dit-on, la base de leurs actions, l'amour du gain leur premier stimulant. Convenons cependant que ces deux défauts ont été les causes de leur grandeur passée, de leurs richesses, de leur patriotisme, de la sagesse même de leurs institutions, et que l'économie est devenue une de leurs vertus politiques. Si leur parcimonie les porta à secouer le joug de l'Espagne qui les accablait d'impôts, à refuser de payer la dime au clergé et les indulgences au pontife romain, dans la grande lutte qu'ils soutinrent au seizième siècle' leur esprit de calcul et leur persévérance triomphèrent de tous les obstacles. Ils sentirent que la liberté religieuse était la base de la
liberté civile, que celle-ci assurait celle du commerce et de l'industrie ; ils conservèrent tant qu'ils le purent les avantages du régime représentatif. A cet égard, quel que soit le mobile de leurs grandes actions, ils ont du moins le mérite d'avoir dirigé leurs vues intéressées vers les moyens d'assurer la prospérité de leur patrie.
Ceux qui les ont détractés ont cru qu'il suffisait de faire ressortir leurs défauts pour diminuer l'impression favorable que laissent dans l'esprit cette foule de travaux et d'établissements utiles entretenus à grands frais, qui donnent à leur pays une physionomie particulière. Ces digues élevées pour arrêter les efforts de l'Océan ne sont dues, a-t-on dit, qu'à l'intérêt de leur propre conservation ; ces canaux qui coupent leur pays dans tous les sens ne sont creusés que dans le but de favoriser leurs relations commerciales ; ces hôpitaux, ces établissements de bienfaisance, si beaux et si nombreux, ne sont fondés que pour mettre l'aristocratie des riches à l'abri des attaques de la classe indigente ; leur bonne foi dans les affaires n'est que le besoin de capter la confiance. L'homme est un composé de vertus et de vices; on ne doit pas exiger chez un peuple plus de désintéressement que chez un individu. Qui ne voit qu'en attribuant à leur intérêt seul les institutions et l'esprit d'ordre qui font honneur aux Hollandais, on rend hommage à leur jugement? On leur reproche leur orgueil national. Quelle est donc la nation qui n'aime se rappeler sa splendeur passée? Le Français lui-même, le peuple le plus spirituel de la terre, ne préfère-t-il pas reporter sa pensée sur sa gloire militaire que sur celle qu'il s'est acquise dans les arts, la littérature et les sciences ?
Les mœurs des Hollandais sont paisibles : ce que l'on attribue , avec quelque raison, à la froideur de leur caractère et à leur penchant pour l'économie. Peu délicats dans leurs affections, ceux qui se donnent des maîtresses les choisissent dans la classe domestique, et quelquefois les femmes ne se montrent pas plus difficiles dans le choix des objets de leurs faiblesses. On remarque beaucoup moins de dépravation dans la classe du peuple en Hollande que dans le reste de l'Europe. Il est fort rare qu'on y entende
parler de vols, et plus rarement encore l'on y commet des crimes.
Sortir pen, fumer beaucoup, boire et manger souvent, sont à peu près les principaux passe-temps des riches Hollandais. Ils n'apprécien^pas les plaisirs de la société , mais ils savent goûter les jouissances paisibles de la vie intérieure. Les seules réunions suivies ne sont que des rassemblements d'hommes qui se partagent en classes : celles des armateurs, des riches négociants, des magistrats , des commerçants, des courtiers, des marchands et des bourgeois. Ces classes ne se mélangent jamais, et vivent même dans une sorte de jalousie les unes à l'égard des autres. Les artistes et les gens de lettres sont peu considérés, et quoiqu'il n'y ait pas de pays où l'on trouve plus de musées, de collections scientifiques, de sociétés littéraires et savantes, les beaux jours qui virent briller en Hollande tant de littérateurs, de savants et de peintres célèbres, sont à jamais passés; les sciences et les arts ne sont plus que les délassements des riches industriels, qui tous, , appréciant dignement les nobles produits de l'esprit humain, n'épargnent aucune dépense pour donner à leurs enfants une éducation qui les dipose à se ménager de semblables jouissances.
GOUVERNEMENT ET ADMINISTRATION. — Les Pays-Bas forment une monarchie constitutionnelle. La couronne est héréditaire en ligne masculine et féminine. Comme grand-duc de Luxembourg, le roi est membre de la Confédération Germanique. Le roi est secondé dans le gouvernement par un conseil d'Etat composé de ses ministres et par les Etats généraux. Ces états généraux se composent de deux chambres : l'une qui comprend environ 60 membres, choisis par le roi parmi les citoyens les plus imposés ; l'autre comprend 58 députés nommés par les états provinciaux, ils se renouvellent par tiers chaque année. L'initiative des projets de loi n'appartient qu'au roi et à la seconde chambre ; c'est encore un des priviléges de la seconde chambre de discuter, la première, toutes les lois de finances, qui doivent lui être présentées immédiatement après l'ouverture"'le la session ordinaire des états, avant le commencement de l'année financière.
Le royaume est divisé administrativement en dix provinces et en deux duchés, ceux de Limbourg et de Luxembourg. Chacune des provinces possède des états provinciaux, dont les membres sont nommés pour six ans et se renouvellent par moitié tous les trois ans; ils sont investis de très-larges attributions administratives.
L'organisation et l'administration de l'économie intérieure de la province leur appartiennent; mais le pouvoir exécutif reste toujours aux mains du gouverneur nommé par le roi.
RELIGION. — Tous les cultes sont égaux et libres dans les PaysBas; le culte protestant est administré par des synodes provinciaux, et le culte catholique par l'archevêque d'Utrecht. Il y a des évêchés à Harlem, Bois-le-Duc, Bréda et Ruremonde , et près de ces évêchés il existe des séminaires et des écoles ecclésiastiques. Les ministres des cultes réformé et catholique sont rétribués par l'Etat.
JUSTICE. — L'organisation de la justice repose sur le principe de l'unité des codes; le pouvoir judiciaire est exercé exclusivement par des juges établis par le roi. Il existe une haute cour de justice dont chaque membre est nommé par le roi sur une liste de cinq candidats désignés par la seconde chambre des états généraux. Le choix du procureur général appartient directement au roi. L'une des attributions de la haute cour est de juger les membres des états généraux et les hauts fonctionnaires prévenus de délits dans l'exercice de leurs fonctions, et poursuivis soit au nom du roi, soit sur une accusation de la seconde chambre. Les membres et le procureur général de la haute cour, les membres des cours de justice, s'il y en a, et des tribunaux de première instance, sont nommés à vie. Le reste de l'organisation judiciaire est à peu de chose près la même qu'en France, sauf le jury, qui n'existe pas ; il y a une cour de cassation à Amsterdam, des cours provinciales d'appel dans chacune des capitales de provinces, des tribunaux d'arrondissement jugeant en première instance, et des juges de paix dans chacun des cantons ou bailliages.
INSTRUCTION. — L'enseignement est l'une des parties les plus remarquables de l'organisation administrative des Pays-Bas. Il existe dans ce pays trois académies ou universités, celles de Leyde, Utrecht et Groningue ; la plus fréquentée est celle de Leyde, on y compte annuellement 500 étudiants. Amsterdam possède un athénée très-fréquenté. L'enseignement moyen comprend les gymnases et les écoles latines, qui en général sont dans un état florissant; ces établissements comptent ordinairement environ 2,000 élèves. Il existe une académie militaire à Bréda pour le service du royaume.
et celui des colonies, et à Delft une académie polytechnique. On compte une école de médecine militaire à Utrecht, six écoles cliniques , soutenues par les fonds locaux on provinciaux. La Haye possède une école spéciale pour le commerce et l'industrie. A Amsterdam , à Harlingue, à Groningue, il y a plusieurs écoles particulières de marine.
Le nombre des écoles primaires dépasse 8,400; elles sont fré- quentées par 820,000 enfants des deux sexes. Enfin il va à Utrecht une école vétérinaire, et à Groningue une école d'économie rurale d'où il est sorti de bons agriculteurs. FINANCES. — Les finances sont très-sagement administrées dans les Pays-Bas. On évaluait le budget de 1855 à 73,299,275 florins, ou 156,860,450 francs pour les recettes; et 73,740,661 florins, ou 157,805,014 francs pour les dépenses. Les principales sources du revenu public sont les impôts directs, qui rapportent près de 19 millions de florins, et les accises, qui en rapportent près de 20.
La plus grande dépense est celle du service des intérêts de la dette publique; car la Néerlande est après l'Espagne le pays où la dette publique est le plus élevée. On l'évaluait en 1855 à 1,192,110,830 florins , ou 2,560,000,000 de francs ; et les intérêts à payer montaient à 34,858,824 florins, c'est-à-dire à plus de 70 millions de francs.
Il y a du reste amélioration dans l'état financier du pays, car en 1850 le capital de la dette s'élevait à 1,240 millions de florins.
ARMÉE. — L'armée néerlandaise se recrute, comme en France, par la voie du tirage au sort, avec la faculté du remplacement; la durée du service est de cinq ans à partir de vingt ans. Les cadres de l'armée sont de 56,000 hommes environ, mais en temps de paix il n' y a jamais plus de 30 à 32,000 hommes sous les armes.
Cette armée se composait en 1855 de un régiment de grenadiers et chasseurs, 8 régiments de ligne, 4 régiments de dragons, un régiment de chasseurs à cheval, un régiment d'artillerie de campagne, 3 régiments d'artillerie de forteresse, un régiment d'artillerie à cheval; et des bataillons et compagnies d'instruction, des pontonniers, du génie et de la maréchaussée.
En temps de guerre on organise une garde civique qui peut être portée à 80,000 hommes.
MARINE. — La marine des Pays-Bas est la première des Etats secondaires de l'Europe. Au 1er juillet 1855 elle comptait 84 bâtiments portant 2,000 bouches à feu, et 58 chaloupes canonnières armées de 174 canons. Parmi les bâtiments il y avait 5 vaisseaux, 15 frégates, 12 corvettes, 10 bricks et 20 bâtiments à vapeur.
Le nombre des marins en service actif était à cette époque de 7,000 matelots et de deux divisions de marine, dont la moitié est ordinairement embarquée et dont le cadre est fixé à 1,588 hommes.
INDUSTRIE, COMMERCE. — L'industrie agricole est développée dans les provinces méridionales de la Néerlande ; les principaux produits agricoles sont le seigle et le blé noir, ensuite l'orge et l'avoine. Le froment est particulièrement cultivé près d'Utrecht, en Frise et en Zélande; les légumes, le pastel, la garance, le millet et le raifort dans ces deux dernières provinces ; le lin en grande quantité dans les deux provinces du sud, le tabac dans Utrecht et la Gueldre ; la vigne dans le Luxembourg, mais en très-petite quantité. Les principaux produits de l'élève sont le gros bétail et les chevaux de trait ; le beurre salé et le fromage sont les produits très-estimés de la Néerlande, et qui font l'objet d'une exportation considérable.
La pêche est l'origine de la puissance des Pays-Bas, et les harengs préparés par les Hollandais ont conservé jusqu'à nos jours leur supériorité. La pêche de la morue occupait dès le seizième siècle 260 bâtiments et 14,000 matelots dans l'océan Glacial du Nord; celle du hareng, beaucoup moins importante qu'autrefois, occupe encore 120 à 130 bâtiments.
L'industrie manufacturière est très-active et très-vivement encouragée par le gouvernement. La Néerlande propre est renommée depuis longtemps pour ses toiles, ses velours et son papier ; ses typographies ont joui aux dix-septième et dix-huitième siècles d'une réputation méritée pour la beauté de leurs produits. Le manque de houille et la force soutenue du vent font employer les moulins à vent comme moteurs dans beaucoup d'usines et pour toutes sortes d'usages. Les principaux articles manufacturés sont : les lainages de Leyde et d'Utrecht; les soieries et velours d'Utrecht, Harlem, Amsterdam; les toiles et les cotons d'Harlem; les pierres taillées d'Amsterdam; le papier, les cuirs, les cordages, les chapeaux, les rubans, les aiguilles, etc., etc. La Néerlande possède aussi de nombreuses distilleries de genièvre , de nombreuses briqueteries et des tuileries. Les Hollandais ont dû à leur situation physique la prospérité de leur commerce et l'établissement des plus riches colonies du monde. Les importations ont atteint en 1855 plus de 700 millions de francs, et les exportations plus de 600 millions ; ce commerce d'échange embrasse toutes les productions du monde. La marine marchande possède 400 bâtiments de 220,000 tonneaux, 900 galiotes et 1,400 bateaux légers pour le commerce intérieur. Les principaux ports maritimes sont ceux de Rotterdam, Amsterdam, Dordrecht, Schiedam, Middlebourg, Harlingue, Flessingue, Saardam.
COLONIES. — Les colonies hollandaises sont très-importantes., et leur population, que l'on évalue àJ 5,201,692 habitants, est environ cinq fois plus considérable que celle de la métropole.--Lei
nombreux établissements de l'Asie comprennent Java et les îles adjacentes, le gouvernement de la côte de Sumatra, les résidences de Lampong, de Palembang et de Banka, de Riouw, celle de Sambos (Bornéo), celle de la côte occidentale de Bornéo et celle du sud-est de Bornéo, le gouvernement de Makassar dans l'ile Célèbes, la résidence. d'Amboina, de Menado,. de Tornati, de Banda, de Timor, de Bali et Lombok, une partie de la Nouvelle-Guinée. Joignons à cette longue énumération la Guyane hollandaise et les îles Curaçao et de Saint-Eustache en Amérique, et les établissements de la côte de Guinée en Afrique, tels que le petit fort d'ElMina: tel est l'ensemble des colonies des Pays-Bas. Les plus remarquables de ces colonies sont celles des Indes orientales; on évaluait leur superficie à 1,619,688 kilomètres carrés, et leur population était au 31 décembre 1853 de 15,021,000 âmes; sur ce nombre, les Européens ne comptent que pour 22,000 âmes. Ces populations appartiennent à diverses races et suivent diverses religions. De toutes ces races, la plus nombreuse est celle des Javanais et Balinais, que M. Melvill de Carnbee évalue à 7,720,000. On porte les Lampongs et les Sundanais à 2,700,000, les Bouginais à 2,422,000, les Malais à 1,591,000, les Alfoures à 1,425,000; les autres parties de la population sont formées de Dayaks, de Chinois, de Papous, de Battaks, de Bengalais et d'Arabes.
C'est la religion mahométane qui domine parmi ces populations, chez lesquelles le bouddhisme, des croyances chinoises, et différentes formes de paganisme sont représentées. On estime à plus de 13 millions d'âmes le nombre des musulmans, et les chrétieus à 147,000 âmes seulement. Java est le centre principal de la puissance commerciale des Pays-Bas dans les Indes. Les exportations et les importations de cette île représentent plus de 180 millions de francs. Le commerce est en partie entre les mains de la compagnie connue sous le nom de Handel maats schpij, dont la fondation date de 1824, et qui a été depuis réorganisée. Les anciens chefs indigènes des îles asiatiques ont autant que possible été réduits à l'état de vassa ux. Ils sont surveillés par des administrateurs (régents)
hollandais, et ceux-ci sont eux-mêmes placés sous la direction d'un gouverneur général investi d'un pouvoir civil et militaire. Les Indes orientales ont leur armée et leur budget particulier. L'armée, composée d'indigènes, est renforcée par quelques troupes européennes, dont le séjour est de trois ans. Le budget des finances était en 1853 de 150 millions de francs pour les recettes, et de 148 millions de francs pour les dépenses.
Parmi les colonies d'Amérique et d'Afrique, celle de Surinam est la seule qui paraisse se suffire ; ses revenus dépassent 2 millions de francs, et ses dépenses n'atteignent que 1,800,000 francs.
Les autres ne font face à leurs dépenses que grâce à des Bub-.
sides qui leur sont alloués sur les recettes des Indes orientales.
Surinam figurait d'ailleurs en 1850 pour 150,000 florins, environ 375,000 francs, dans cette liste des subsides à la charge du budget des Indes.
Les colonies néerlandaises jouissent en général d'une paix profonde et d'une grande prospérité, qu'elles doivent au système trèssimple de commerce et d'administration que les Hollandais ont su y appliquer.
RANG DU ROI DES PAYS-BAS DANS LA CONFÉDÉRATION.
— Le roi des Pays-Bas est membre de la Confédération Germanique comme grand-duc de Luxembourg et duc de Limbourg; il occupe le onzième rang et il a trois voix dans l'assemblée générale.
La contribution fédérale est de 30,000 francs, et le contingent est de 3,804 hommes, y compris 845 hommes de réserve, qui font partie de la deuxième division du neuvième corps.
COULEUR NATIONALE, DISTINCTIONS HONORIFIQUES.
— La couleur nationale est l'orangé ; le drapeau est orangé, aux armes de la maison d'Orange-Nassau. Les différents ordres honorifiques du royaume sont: l'ordre militaire de Guillaume d'Orange, l'ordre du Lion néerlandais, créé en 1815, et l'ordre de la Couronne de chêne, créé en 1825.
ADDITIONS (1>.
DE LA FORMATION DU SOL DE LA HOLLANDE. — On peut diviser en trois temps la formation du sol hollandais sous l'action des eaux douces: — une période antérieure à l'existence du Rhin, — une autre période durant laquelle le fleuve s'est ouvert un passage vers la mer, — enfin une dernière période durant laquelle il a tracé la forme actuelle de la, Hollande.
Avant la naissance du Rhin , la plus grande partie des Pays-Bas était une mer. Limitée du côté de l'Allemagne par une chaîne de rochers, cette mer a laissé dans son ancien lit des dépots de coquilles marines, des ossements de baleine, de rhinocéros et de mammouth, fracassés, brisés. Ces colosses du vieux monde se retrouvent partout; la mer du Nord est pleine de pareils débris. Ce qui élonne le plus sur le théâtre de cet océan disparu, desséché, c'est la présence d'énormes blocs de granit et de gneiss dont l'origine est aujourd'hui connue. On retrouve en effet les masses d'où ils ont été détachés, en un mot la souche de ces blocs, dans les montagnes de la Scandinavie. Il ne reste plus qu'une question à résoudre : comment sont-ils venus là? Selon toute vraisemblance, ces quartiers de roche sont arrivés de la Suède et de la Norvège sur des radeaux de glace.
L'existence de ces glaçons voyageurs n'est point une chimère géologique : ils se promènent encore aujourd'hui sur nos mers. Ces îles flottantes, dont quelques-unes ont l'éclat blanchâtre et cristallin du sucre, ont été vues dans ces dernières années : l'une d'entre elles a même atteint le cap de Bonne-Espérance. Du temps où la Hollande était encore sous l'eau, ces bancs de glace arrivaient des mers polaires, ou bien encore c'étaient des ruines d'énormes glaciers qui, du haut des montagnes de la Scandinavie, descendaient en s'écroulant jusque dans la mer. Les quartiers de roche tombaient pêle-mêle avec les neiges. Ces débris, enlevés loin de leur gisement naturel par la rapidité de la chute, se voyaient ensuite comme portés et voiturés sur les glaçons qui traversaient en tout sens l'Océan. Les blocs erratiques se retrouvent en masse ; la mer du Nord en est pavée. Il est probable que, le radeau de glace Tenant à fondre, la plupart de ces blocs ont échoué sur des bancs
(1) Nous ne pouvons mieux faire, pour compléter cette rapide description géographique des Pays-Bas, que de citer quelques passages d'une étude remarquable publiée par M. Alphonse Esquiros dans la Revue des Deux Mondes, en juillet 1855, sous ce titre : la NéerLande et la vie hollandaise. ( Voir la série des articles de 1855 à 1856.)
de sable, peut-être même sur quelques îles basses, d'où ils s'élevaient à fleur d'eau, comme des pierres druidiques dans un champ de blé.
A l'époque reculée où nous nous plaçons, toute la masse imposante des Ardennes, plissée du nord-est au sud-ouest, se dressait, formant un rempart entre cette ancienne mer et des lacs grossis dans l'intérieur de l'Allemagne par l'éboulement des rivières. La mer battait les chaînes de montagnes, les blocs erratiques entraient dans les anfractuosités de ce mur, et s'arrêtaient collés aux parois comme une pierre lancée par la fronde. Un jour (si l'on peut appeler jours ces époques de la nature), soit qu'uue impulsion fût communiquée à la masse des eaux douces par des tremblements de terre, soit que la force de gravitation seule eût déterminé un conflit, les Ardennes et leurs dépendances furent battues en brèche ; les lacs emprisonnés dans une ceinture de roçhers s'émurent. L'obstacle était gigantesque, mais il céda ; car les rochers, que le langage humain a choisis comme des termes de comparaison pour exprimer la force de résistance, cèdent toujours dans la nature à la puissance formidable et lente des eaux comprimées. Une partie des montagnes fut emportée. Ce premier bond du Rhin (car c'était lui) dans la mer fut terrible. L'ouverture par laquelle il s'élança est encore là, visible, béante : cette ouverture, beaucoup plus considérable que le cours actuel du fleuve, montre par quelle masse d'eau la barrière primitive fut forcée. Les traces d'une si prodigieuse débâcle ne sont point encore effacées sur le sol de la Néerlande : l'œil les suit pour ainsi dire au loin; les ruines de la muraille du Rhin ont été portées de deux côtés à des distances énormes. Les débris de l'immense brèche ouverte par le fleuve ont servi à former des provinces entières. Le sol de la Gueldre, de l'Over-Yssel et de l'île du Texel est jonché de cailloux roulés, dans lesquels on reconnaît les fragments des roches de basalte, de granit et de porphyre qui bordent, en Allemagne, le cours du fleuve. Ces Titans du règne minéral ont été foudroyés par l'explosion des eaux.
Nous avons vu par quels obstacles les eaux avaient été retenues : une fois le passage ouvert, on vit commencer l'opposition séculaire de l'Océan et du Rhin. D'abord ce fut le fleuve qui obtint l'avantage ; l'Océan recula. Tous les géologues savent que la puissance des rivières est assez forte pour jeter dans la mer des terrains d'alluvion qui prolongent, au bout d'un certain nombre de siècles, l'extrémité des continents. Le sol de la Hollande se constitua et s'étendit en vertu de ce mécanisme. Formée des sables voyageurs que le Rhin apportait de l'Allemagne, la Hollande a flotté, si l'on ose ainsi
parler, dans les eaux du fleuve, tenue quelque temps en suspension par la rapidité orageuse du courant, puis déposée couche par couche au sein de l'Océan, qui battait en retraite. Les progrès du delta ne s'accomplirent d'ailleurs qu'à travers des réactions immenses. Les eaux douces et les eaux salées se disputaient tour à tour le terrain occupé maintenant par les deux plus riches provinces des Pays-Bas.
Cependant le fleuve conservait une supériorité marquée ; il refoulait la mer : tout annonce que le niveau relatif de la côte et des marées différait alors de ce qui existe maintenant. Puis, par un de ces revirements de la fortune qui atteignent les puissances mêmes de la nature, le résultat de cette lutte paraît avoir tourné, depuis deux mille années, en faveur de l'Océan. Le Rhin a été vaincu; il traîne dans le cours humilié de ses eaux le sentiment de sa décadence.
Entendez-vous sa plainte ? Cette plainte, ce murmure étouffé des flots qui se souviennent de leur grandeur passée, tout cela ressemble à de la poésie, mais tout cela est en même temps de l'histoire. Le Rhin, dont il est si souvent parlé dans les auteurs du dixseptième siècle, finit, comme le règne de Louis XIV, par la division et l'amoindrissement.
ACTION DE L'OCÉAN SUR LE SOL DE LA NÉERLANDE. —
La mer ruine les côtes de la Hollande, c'est un fait constaté : l'œil peut suivre, à travers des écroulements de sable, ce triste et silencieux travail de destruction ; mais il existe de ce cataclysme perpétuel des témoins plus irrécusables encore. A Katvijk, village de pêcheurs à 4 kilomètres de Leyde, près de l'endroit où, soutenu par de magnifiques travaux d'art, le Rhin s'écoule laborieusement dans la mer, M. A. Esquiros a vu, par les marées basses, les fondations d'un château romain (la maison des Bretons) qui dominait la bouche du fleuve dans un temps où le Rhin, alors plus jeune et plus vigoureux, se portait lui-meme dans l'Océan. C'est une preuve évidente que le sol a reculé; mais ce n'est point la seule. On a conservé le souvenir d'une antique forêt qui couvrait autrefois la Hollande méridionale, et qui s'étendait même très-avant vers le nord ; les arbres qu'on retrouve couchés dans les tourbières, à une heure et demie de la côte, sont, selon toute vraisemblance, les cadavres de cette ancienne forêt, que le vent ou les inondations ont dépeuplée, que la hache a détruite. Tout porte à croire que ces géants de la végétation du Nord s'élevaient sur des terres alors éloignées de la côte. Ces conjectures ont pour fondement certains faits positifs.
Plusieurs tourbières, qui doivent leur origine à l'eau douce, se rencontrent aujourd'hui, spécialement du côté du Zuyderzée, sous le niveau de la mer. Tout dans la physionomie actuelle du delta indique donc de vastes et profondes révolutions. Une partie de ces changements s'est accomplie presque sans désastres ; d'autres fois au contraire l'homme a été non-seulement témoin, mais acteur de ce grand drame de la nature. Les anciens habitants de la Hollande ont péri par milliers au milieu des guerres intestines de la terre et de la mer. Les événements géographiques dans lesquels se sont trouvés enveloppés des villes, des villages, des populations entières, fournissent depuis l'ère Tomaine le sujet d'une histoire tristement authentique, à laquelle ne manquent ni les dates ni les récits des contemporains. La Hollande, ce vaste radeau flottant sur les vagues de la mer du Nord, a vu plusieurs fois la tempête déchirer ses flancs, et lui enlever une partie de ses hommes, de ses troupeaux, de ses richesses.
Du temps des Romains, il y avait une plaine d'une grande fertilité à l'endroit où l'Ems entrait dans la mer par trois bras. Cette contrée basse projetait une péninsule au nord-est, du côté de Emden. En 1277, un déluge détruisit d'abord une partie de cette péninsule : trente-trois villages périrent (1). A cette incursion de la mer est due l'existence du Dollard, ce golfe dont le nom en hollandais signifie le furieux, sans doute pour exprimer l'impétuosité du choc qui rompit les défenses naturelles et ouvrit le passage aux vagues. D'autres inondations survinrent à différentes périodes dans le cours du quinzième siècle. En 1507, une partie seulement de Torum, ville considérable, était demeurée debout : le reste de cette ville, en dépit de l'érection des digues et du barrage des rivières, fut enfin emporté; cinquante monastères disparurent, engloutis, balayés par les flots.
Une des plus mémorables entreprises de la mer est encore celle qui éclata le 18 novembre 1421. Sur une réunion d'îlots formés par les sables de la Meuse s'élevaient soixante-douze villages : en un instant, les sables furent remplacés par un désert d'eau. La marée
(1) Le souvenir de ce désastre est consigné dans une carte géographique faite pour rappeler l'événement; on y lit cette inscription brève et triste comme une épitaphe : Anno 1277 maris inundatione 33 pagi hoc in loco .periere. Une autre carte manuscrite, en parchemin, représente les trente-trois villages qui existaient avant l'inondation, avec le cours des rivières et le tracé des routes. Cette carte est d'ailleurs conjecturale : les cartes positives ne remontent point en Hollande plus haut que le milieu du seizième siècle.
avait fait éclater une écluse près de Wieldrecht, dont il n'est resté que le nom. Trente-cinq villages furent irrévocablement perdus : on n'a pu en découvrir aucun vestige , si ce n'est pourtant une vieille tour, morne, solitaire, appelée la maison de Mertoed. Plus tard, pour fixer les lieux où il était permis aux pêcheurs de jeter les filets, on reconstitua par conjecture le cours de la rivière, le vieux Maas, qui traversait le pays avant la submersion. Chercher dans l'eau où fut une rivière, quelle sombre et biblique figure du déluge ! L'endroit où les villages ont été détruits porte encore aujourd'hui le nom de Biesbosch, bois de joncs (1).
Tous ceux qui ont vu la Haye connaissent le village de Schevehingue, auquel conduit une des plus agréables routes qui existent dans le monde. Scheveningue était autrefois éloigné de la mer, et maintenant il touche à la plage. En 1570, la moitié de l'ancien village a disparu sous les flots. L'église actuelle, dont le charmant clocher semble demander grâce à la mer, fut élevée au milieu des sables pour en remplacer une qu'on avait construite à deux mille pas plus avant sur la côte, au centre du village d'alors, et qui fut anéantie (2). Plus loin, vers Katvijk, autre village de pêcheurs, la mer, en quinze années, et cela au dix-septième siècle, avait fait disparaître quatre-vingts maisons. Il y avait deux rues qu'on cherchait et qu'on ne trouvait plus. Nous abrégerons cette trop longue histoire. Ceux qui croient que notre planète doit périr par l'eau trouveront dans les tragiques annales de la Hollande un avant-goût de leurs sinistres prophéties. Là, l'homme a senti de siècle en siècle la terre manquer sous ses pieds ; il a vu les abîmes de l'Océan monter au-dessus des contrées les plus florissantes et les balayer comme le flot qui raye le sable.
Les auteurs latins ne font aucune mention de l'énorme golfe par lequel la mer pénètre aujourd'hui si avant dans les Pays-Bas. Divers récits indiquent au contraire que la Frise touchait alors à la Hollande par la terre ferme. Il existe une carte de 1584 dans laquelle l'auteur, Abraham Ortelius, reconstruit, sur le témoignage des historiens, l'ancienne configuration du pays avant l'existence du Zuyderzée. Là s'étendait une vaste région, entrecoupée par différents lacs intérieurs : le plus considérable de ces lacs était le lac Flevo ( Vlieland), dont parle Tacite. Ce lac s'était formé, selon Pomponius Mêla, par les débordements du Rhin. Il était traversé par une rivière du même nom (Flevum), qui avait son embouchure dans la mer. Un jour l'Océan s'élança, creusa un isthme et entra dans le lac Flevo : renforcé de cet auxiliaire, l'ennemi ne tarda point à s'avancer dans l'intérieur du pays. Les invasions successives par lesquelles une grande partie du territoire fut transformée en baie commencèrent et finirent avec le treizième siècle. Des documents certains, des relations écrites par les habitants des provinces voisines, témoins contemporains du désastre, ne laissent aucun doute sur la formation récente du Zuyderzée. C'est par des mouvements réitérés de la mer qu'une immense étendue de terres basses a été ensevelie. En l'année 1205, l'île appelée maintenant Wieringen, au sud du Texel, faisait encore partie de la terre ferme; elle en fut détachée par plusieurs déluges dont on connaît les dates : en 1251, la séparation était achevée. Encouragée par ces premiers succès, la mer se jeta sur un isthme riche et populeux, qui s'étendait au nord du lac Flevo, entre Staveren en Frise et Medemblick en Hollande; vers l'an 1282, toute cette région était anéantie. Il est impossible de promener ses regards sur les côtes du Zuyderzée, si belles l'été, si calmes parfois, sans songer aux catastrophes qui ont fait cette mer, aux cités florissantes qui ont trouvé leur tombeau dans ses vagues.
LAC DE HARLEM ET SON DESSÉCHEMENT. — Ce lac, les Hollandais l'avaient vu naître. L'histoire de sa formation doit être étudiée sur les anciennes cartes : on suit alors pas à pas les développements de cette masse d'eau, qui avait fini par intimider la ville de Leyde et la ville d'Amsterdam. Il existait en 1531, dans les environs de Harlem, quatre petits lacs insignifiants, et à côté de ces lacs florissaient trois villages, dont les noms ont été conserves : Nieukerk, Dorp Ryk et Wijk Huysen (Cinq-Maisons). En 1591, un des trois villages avait déjà disparu ; en 1647, c'en était fait des deux autres. Les lacs étaient d'abord séparés; en 1531, il existait entre le lac de Harlem et celui de Leyde une ouverture encore si étroite qu'on pouvait la passer sur une planche; en 1647, les
(1) A ces exploits de la mer se rattachent des chroniques locales.
On raconte qu'un enfant de l'un des villages sur lesquels l'inondation allait s'étendre, vit, en pompant de l'eau, sortir des poissons de mer. Tout surpris, il avait divulgué le fait, mais on en avait ri.
Lui, plus sage, se décida à prendre la fuite. Peu de jours après, la catastrophe survint. Cet enfant fut le seul de son village ou presque le seul sauvé. Malheureusement la tradition ajoute que l'enfant, devenu homme, fit un mauvais usage de sa sagacité : il vola et fut pendu.
(2) Lors de sa destruction, elle venait d'être érigée en paroisse, après avoir été longtemps une chapelle.
quatre lacs s'étaient réunis, et leurs noms particuliers s'étaient confondus dans celui de Haarlemmer meer. Il n'y avait plus qu'un point de terre, le Beinsdorp, qui surnageait; en 1687, le Beinsdorp avait diminué, et le lac s'accroissait toujours (1). Dans ces derniers temps, il avait atteint 50 kilomètres de circonférence. C'était une mer, et une mer orageuse. Sur cette mer s'étaient livrées des batailles navales, desflottes de soixante-dix bâtiments plats avaient manœuvré, plusieurs vaisseaux avaient péri (2). M. A. Esquiros a vu à Harlem, dans le cabinet d'histoire naturelle du docteur van Breda, deux individus du genre silurus glanis, qui avaient été péchés dans le lac, et qui appartiennent à la plus grande taille des poissons d'eau douce.
Tour à tour d'humeur calme ou violente, ce lac paraissait se comporter selon des lois à lui. Le 1er novembre 1755, on l'avait vu s'émouvoir au moment du fameux tremblement de terre de Lisbonne, et l'on n'apercevait rien de cette agitation dans la mer. La traversée de ses eaux était périlleuse; il y avait eu des naufrages.
Comme ces animaux qui deviennent plus méchants avec les années, le lac de Harlem se montrait de jour en jour d'un caractère plus tempétueux. A chaque gros temps, on voyait dans cette mer intérieure des montagnes d'eau se soulever, battre avec une grande force les ouvrages de défense, et s'écrouler sur les bords avec beaucoup d'écume. C'était un voisin incommode et dangereux ; si les ouvrages dans lesquels on le contenait à peine fussent venus à céder, le lac se serait jeté dans d'anciennes tourbières inondées et eût recruté là de nouvelles forces pour menacer toute la Hollande. On dépensait, d'un autre côté, à combattre ses empiétements et à le refouler dans son lit autant d'argent qu'il en eût fallu pour le mettre à sec. Cependant le lac de Harlem continuait d'exister, lorsque, le 9 novembre 1836, les eaux, chassées par un vent d'ouest furieux, s'élancèrent par-dessus les digues et les routes, et arrivèrent jusqu'aux portes d'Amsterdam. Cet événement décida du sort du Haarlemmer meer. Le lac avait menacé Amsterdam, Amsterdam dit au lac : Tu disparaîtras.
De ce jour, en effet, son arrêt fut prononcé; il ne s'agissait plus que de trouver les moyens pour exécuter la sentence. Le dessèchement du lac de Harlem avait été plusieurs fois proposé, et divers systèmes avaient été mis au concours. En 1643, un ingénieur et faiseur de moulins dans la Nord-Hollande, Jean-Adrien Leegh Water, voyant le péril qui menaçait la Hollande si le lac de Harlem continuait d'exister, avait publié à Amsterdam un petit ouvrage dont la conclusion était : « Il faut se débarrasser de cette masse d'eau ruineuse et envahissante, ergo delendum est mare ! « A cet ouvrage, — Haarlemmer meer Boek, —étaient joints un plan de dessèchement et une carte. L'auteur du projet avait besoin de cent quarante moulins pour déverser l'eau du lac dans la mer. Ce projet recontra plus d'un genre d'objections : il aurait fallu que le vent se fit sentir vite et longtemps dans la même direction pour que les moulins travaillassent convenablement. Beaucoup d'autres systèmes se produisirent ; mais pour extraire cette puissante masse d'eau, il fallait une force considérable, indépendante des variations de l'atmosphère, soumise seulement et entièrement à la volonté de l'homme. Ces plans embryonnaires n'étaient, relativement aux moyens d'exécution , que des utopies ; il leur manquait une découverte qui levât tous les obstacles et qui rendît praticables toutes les hardiesses du génie humain, il leur manquait la vapeur. La force de la vapeur trouvée, l'assèchement du lac de Harlem était décrété en principe.
Cette invention moderne changea en effet de fond en comble les conditions de cette œuvre difficile et jusque-là téméraire. Au mois d'avril 1840 partit de la Hollande pour se rendre en Angleterre une commission chargée de faire des recherches sur la vapeur et sur les machines d'épuisement. On sait quel parti la Grande-Bretagne a tiré du nouveau moteur, à quelles profondeurs elle est allée chercher l'eau de ses mines, et à l'aide de quelles puissantes pompes elle a chassé cette eau vers la surface ; mais rien de tout ce qui avait été fait et pratiqué jusque-là n'était applicable à l'entreprise du lac de Harlem : il fallait un système de machines tout nouveau.
Après quelques essais, les principaux organes du nouvel appareil furent constitués. C'était moins une machine qu'un être colossal et animé; on lui donna le nom de Leegh lVatel", en souvenir de celui qui, le premier, avait osé conseiller le dessèchement de cette mer (3).
(1) Voici des chiffres exacts sur la proportion de ces agrandissements successifs :
En 1531, le lac avait 6,585 morgen ou arpents de Hollande.
En 1591, — 12,375 — En 1647, — 17,080 — En 1687, — 18,000 - En 1806, — 20,000 —
(2) Il existe à la bibliothèque de la Haye un livre hollandais avec des gravures représentant ces vaisseaux et leurs manœuvres de combat.
(3) Ceux qui croient à la prédestination des noms peuvent s'exercer sur celui-ci : Leegh Water signifie en hollandais vide-eau.
Le Leegh Water commença tout seul l'épuisement des eaux le 7 juin 1848. Deux autres machines, le Cruquius et le Lijnden, vinrent à son aide, l'une le 7 juin 1848, et l'autre au commencement d'avril 1849. Aujourd'hui le desséchement est un fait accompli.
Lorsque en 1855 M. A. Esquiros visitait le lac de Harlem, cette redoutable mer intérieure n'existait déjà plus. Le Leegh Water travaillait encore, mais c'était à soutirer les eaux superflues d'un petit bassin, faible et dernier vestige de ce qui avait été le Haarlemmer meer.
L'édifice qui contient la machine est une tour ronde, placée au midi de l'ancien lac et assise sur une forêt de pilotis. Les constructions de l'industrie moderne ressemblent quelquefois à celles de la féodalité; dans les unes et les autres, l'art s'est proposé d'installer la force matérielle. Seulement dans les anciennes tours résidait la puissance de destruction, tandis que ce bastion colossal, debout au milieu des eaux vaincues, effacées, représente ici la puissance d'utilité. A cette tour est adossé un bâtiment carré pour les chaudières. Quelques-unes des pièces intérieures du Leegh Water sont d'une grandeur inconnue jusqu'ici dans le monde mécanique. Le Leegh Water ne fonctionne pas; il travaille, il vit, tant une économie intelligente préside à tous ses mouvements.
Onze pompes, vastes et puissants suçoirs, fixées au flanc de la tour, lui donnent l'air d'un polype gigantesque occupé à boire les eaux du lac (1).
Ces terres récemment desséchées et comme étonnées de voir le jour, ces chemins à peine tracés où l'on marche et où hier on naviguait, ces oiseaux qui chantent où nageaient les poissons, tout cela forme un spectacle unique et sérieux. A propos d'oiseaux, l'auteur de ce curieux article rencontra, chemin faisant, quelques bandes d'espèces aquatiques, venues avec le printemps et toutes surprises de ne plus retrouver le lac qu'elles avaient connu. Les pauvres bêtes se demandaient si elles avaient perdu la tête, ou bien si c'était la nature qui était devenue folle. Ni l'un, ni l'autre : c'était l'homme qui avait passé là; sous son souffle, les mers aujourd'hui se dessèchent. Dix-huit mille hectares de terres retrouvées ont été vendus et bien vendus (2). Le sol se remontre triste, nu, et tel que reparaîtrait le sol de l'Europe après trois siècles, s'il eût été couvert par un déluge universel. La civilisation recommence dans-le désert, et elle recommence par le travail. Déjà on rencontre quelques paysans qui élèvent des habitations. D'autres cabanes provisoires en planches ou même en paille annoncent le retour de la vie pastorale dans ces lieux qui furent autrefois le domaine de l'homme, et d'où l'homme s'était retiré. Quant aux anciens villages engloutis, on n'en a pas même retrouvé la trace; du moins ces villages sont vengés : leur ennemi n'est plus. On s'attendait à recueillir au fond du lac mis à sec des pièces de monnaie, des mé- dailles, des ouvrages d'art, et les débris des vaisseaux qui ont autrefois fait naufrage. Jusqu'ici ce qu'on a trouvé est peu de chose ; mais l'agriculture, en remuant ces terres, déterrera probablement d'autres richesses. Un trésor plus certain du reste que les pièces d'or ou d'argent enfouies dans le sol, c'est celui dont parle le fabuliste : travaillez, prenez de la peine. Ce fonds qui manque le moins est déjà cherché, exploité par la bêche. Des essais de culture ont été tentés sur l'emplacement de l'ancien lac, et ont réussi au delà de toute attente. En 1855, on a semé du colza; c'est toujours par là qu'on commence dans les polders desséchés : la première récolte a été magnifique, et l'on n'espère pas moins de la seconde.
Maintenant la terre est, au printemps, toute jaune de fleurs, et des
industriels ont amené des abeilles exotiques pour butiner cette moisson d'or. On a vu là comme un présage des richesses que ce sol doit produire entre les mains des cultivateurs hollandais. Jusqu'ici les habitations s'étaient élevées sans ordre, et les terres n'étaient point classées. Quelques enfants étant venus au jour par hasard dans ces maisonnettes de bois ou de brique, on ne savait à quelle commune rapporter leur état civil. La loi n'avait pas prévu qu'on dût naître dans cet endroit-là. Aujourd'hui des circonscriptions ont été tracées, des villages et des églises s'élèvent; des canaux, des routes , des avenues d'arbres doivent bientôt varier la figure de cette plaine monotone et telle que l'ont faite les eaux. C'est un monde qui naît. Dans quelques années d'ici, ces mêmes enfants, dont il y a six mois la patrie n'existait pas encore sur la carte, seront les habitants d'une riche campagne, peut-être même les propriétaires d'une ferme, où les vaches reviendront le soir, les flanc.
pleins d'herbe et le pis gonflé de lait.
(1) Pendant les trente-neuf mois qu'avait duré le dessèchement, les machines en pleine activité avaient tiré 924,266,111 mètres cubes d'eau, et consommé 25,789,920 kilogrammes de houille.
(2) Cette vente a donné lieu à une singulière discussion. Les habitants de Leyde ont réclamé ces terres, comme les ayant autrefois possédées, et en vertu de ce principe du droit romain: æterna auctoritas esto, la revendication est éternelle. L'État se trouverait de la sorte avoir desséché à leur profit des terres qui leur appartenaient ; mais la difficulté sera sans doute de produire des titres authentiques de propriété.
TABLEAUX STATISTIQUES DU ROYAUME DES PAYS-BAS.
STATISTIQUE GENERALE.
POPULATION POPULATION par CU- 'Ir ER CE FOR CES MIL IT A IRE S.
SOPJÏRFJCIE. en 1855. kilomètre FINANCES. COMMERCE. FORCES MILITAIRES.
FIN A N CES. a
carré.
35,868 3,433,372 95 Budget en 1855. En 1853. Armée.
kilomètres carrés. Revenus. Importations. Infanterie 42,000 hommes.
150,860,450 francs. 690,000,000 francs. Cava l erie 4,000 — kilowetres carres. w rjpnpnsfs Exportations. Génie, artillerie. 8,000 — 1d7,805,014 ff rancs. 584,000,000 francs. M Ma„ri•ne. 8,000 „ Marine. frégates, Dette publique. En 1854. 5 vaisseaux, 15 frégates, ° 65 bâtiments inférieurs, 2,560,000,000 francs. 720,000,000 francs. 58 chaloupes canonnières.
Exportations. 8,000 marins.
620,000,000 irancs.
Statistique des Provinces.
SUPERFICIE POPULATION CHEFS-LIEUX PROVINCES. en en 1855. et POPULATION, kilomètres carrés. en 1855. VILLES PRINCIPALES.
Amsterdam, 225,000 HARLEM t (1). 26,000 HOLLANDE SEPTBNTRIONALE. 2,520 526,108 i Hoorn. 12,000 Alkmaar 1,000 Saardam 12,000 LA HAYE. 72,000 Rotterdam 90,000 Delft 18,000 HOLLANDB MÉRIDIONAI,Jo: 3,080 599,224 Leyde 36,000 Dordrecht. 20,000 Goreum. 9,000 Schicdam. 12,000 LDDELROURG 17,000 Zi\LANDE 1,792 165,237 ! Flessingue. 9,000 1 Zierikzée. , 8,000 UTRECHT ff 48,000 TUr trecht , M,°n° A l -yo-6c'u748 a { S Amersfort. 12,000 { ARNHUIJI 19,000 1 Nimègue. 29,000 Gm:LDRE. 5,208 390,512 < Zutphen. 12,000 I Harderwyk. 4,000 [ Thielt. 6,000 • ( ZWOLLE 18,000 OVI!R-YSSEL 3,420 230,293 { Deventer. 15,000 ( Kampen. 10,000 1 AssEN 5,000 DRENTHE. , 2,700 89,457 MeppeJ. 5,000 ( Coeverden 2,500 f GRONINGUE 34,000 GRONINGUE 2,300 199,563 t Delfzyl 4,000 LEEUWARDEV 25,000 FaisE. 3,340 ÎSHnaerlcik ngue 9,000 Sneck. 8,000 - Franker 6,000 BOIS-LLI-Duc t. 22,000 BRABANT SEPTENTRIONAL. 5,250 408,012 Breda -IL 15,000 BBreregd-a op-Zooni 9,000 - ( Ti!bom-g. 15,000 TERRITOIRE CÉDÉ PAR LA BELGIQIF., ( Maéslficlll 24,000 F en vertu du traité da 15 novembre 1831. I Ruremonde "}" 8,00Q Partie du LalBouRG. 2,250 210,831 Venloo. 8,000 I Veerdt 3,000 Part:eduLuxE!HBO!jRG. 2,608 194,619 Sittard. 3,800 J Luxembourg. 15,000 Total. 35,868 3,433,372 Vianden. 1,800 Population des colonies détail- Diekirch. 3,400 lées ci-après. 15,201,692 Wiltz .,. 2,500 —————————— f f Echternach. 5,000 Total de la population générale 18,635,064 [ Grevenmachern 2,300 V Remich. , , 2,500
(1) Le signe t indique les évêchés.
Parties du monde. COLONIES NJJERLANDA ISES. Population.
iDans la république de Fantie : Elmina ou Saint-George de la Mine, le fort Vre d en b our g ,
le fort Nassau, le fort Leydssaamheyde ou Apam. f le fort Nassau, le fort Leyrlssaamheyde ou A pam. ? innnnn AFRiQur. Dans le royaume d'Ahanta : le fort Illtonius, le fort Hollandia, le fort Sébastien. )
Dans le royaume d'Acra : le fort Crèvecœur.
Sumatra (la plus grande partie de cette île avec Bencouleil Java, dont Batavia, la capitale, est celle de toute l'Océanie néerlandaise. i Madura, en totalité. I OcÉ.'I.SIE.. Cèlcbcs, en grande partie. 15 02] 000 O"c"ME' .'-----.--. - Bornéo, en grande partie.
! Archipel de Sumbava et Timor, presque en entier.
Archipel des Moluques, presque en entier. 1 La terre des Papouas et Vile des Papouas, presque en entier. )
(Iles Bonair, Crafao, Saint-Eustache, une partie de celle de Saint-Martin celle de Saba j AH!in!QUE.< et quelques îlots peu importants. 80,692 ( Colonie de Surinam à la Guyane. J 15 201 692
POPULATION DES PAYS-BAS PAR RELIGIONS.
PROTESTA!l:TS. CATHOLIQUES. ARMÉmNS ET GRECS. ISRAÉLITES. DE REL1GION INCONNUE.
PBOTJÎSTAXTS. CATHOLIQUES. ARMÉNIENS ET GRECS. ISRAÉLITES. DE RELIGION INCONNUE.
1,834,924 1,164,148 41 58,518 1,369
Population des colonies des Indes-Orientales Au 31 décembre 1853 , d'après les renseignements officiels.
Java et Madura. 10,290,000hab. Rhio. 23,000 hab. Menado 100,000 hab.
Sumatra (côte ouest). 1,015,000 - Banka 47,000 — Ternate 93,000 — Benooulen. 111,000 - BiI!iton. 8,000 — Amboine 132,000 — Lampongs 83,000 — Bornéo (côte ouest) 215,000 — Banda 6,000 —Pàlembang 316,000 — Bornéo (côtes est et sud) 446,000 - Timor. 1,846,000 Célèbes 260,000 —
Population par religion des possessions américaines des Pays-Bas.
PROTESTANTS. CATHOLIQUES. FRÈRES MORAVES. ISRAÉLITES. PAÏENS.
Guyane 5,400 7,340 19,419 684 18,995 Curaçao. 1,922 14,123 » 786 » MÉTHODISTES.
Bonaire. 120 2,218 » 1 Aruba. 428 2,772 « 1 » Saint-Eustache 1,308 230 315 3 « Saint-Martin.,. 1,187 100 1,622 2 Saba., 1,682 27 12,047 26,810 21,363 1,477 18,995
Année en 1855.
OFFiCIERS. SOLDATS. OFFICIERS. SOLDATS,
Infanterie. Report. 1,316 47,791 Etat-major général el administration militaire. 170 1 régiment de grenadiers et chasseurs 80 3,536 , Artillerie.
8 régiments de ligne à 4 bataillons, chaque Etat-major. 71 158 bataillop à 5 compagnies et 1 dépôt. 720 38,748 1 régiment d'artillerie de campagne. 75 2,554 1 bataillon d'instruction à 4 compagnies 28 591 (11 compagnies de campagne, 1 de dépôt, Dépôt de discipline, 2 compagnies. 11 55 servant 11 batteries de 8 pièces).
État-major de l'infanterie. 30 » 3 régiments d'artillerie de forteresse. 192 5,160 Cavalerie. (Chaque régiment 12 compag. et 1 dépôt.) C„ h, érie. 1 régiment d'artillerie à cheval. : .: 30 716 4 régiments de dragons à 5 escadrons 144 3,510 (4 compagnies de campagne et 1 dépôt, 1 régiment de chasseurs à cheval. 28 682 servant 4 batteries de 8 pièces.) Etat-major de la eavalel'le. 6 » Corps des pontonniers. 7 205 Génie (d eux inspections ) - Corps des maréchaussées (2 compagnies) 10 262 nle eux IDspec IOns.
État-major; sapeurs et mineurs, 1 bataillon i 701 aAR (3 compagllJes). 99 669 Areporter. 1,316 47,791 58,647
Marine au 1er juillet 1855.
2 vaisseaux de ligne, chacun de 84 canons.
3 — — 74 — 6 frégates de première classe, de 60 à. 54 — dont 2 à hélice.
8 frégates de seconde classe, de 44 à. 38 1 frégate rasée, de. 28 12 corvettes, de 18 à. 28 dont 2 à hélice.
10 bricks, de 12 à. 18 —
18 goëlettes, de 6 canons.
dont 1 à hélice.
19 bâtiments de guerre à vapeur.
2 corvettes de charge.
2 frégates}. d -t t 100 1 corvelte } vaisseaux de port, pOl an 100 — 1 corvette 84 bâtiments, portant. 2,000 canons.
58 chaloupes canonnières 174 -
Le corps de la marine se compose d'un amiral, d'un lieutenant-amiral, de 2 vice-amiraux, 4 contre-amiraux, 20 capitaines de vaisseau, 32 capitaines de frégate, 300 lieutenants de première et seconde classe, 70 aspirants de première classe, 70 aspirants de seconde classe, 83 officiers de santé de différentes classes, et 81 officiers d'administration.
Force de la marine au 1er juillet 1855.
La force de la marine néerlandaise en service actif était à cette époque de 6,180 hommes, non compris les marins indigènes de service aux Grandes-Indes, au nombre de 580 et de 2 divisions d'infanterie de marine, dont la moitié est ordinairement embarquée et dont le cadre est fixé à 1,588 hommes.
Commerce néerlandais
En 1853.
1 IMPORTATIONS. EXPORTATIONS.
Florins (l). Florins.
Australie. » 694,628 Belgique 25,164,698 24,112,814 Brésil. '1 4,573,593 40,366 Brème 1,138,542 982,639 Californie » 129,340 Chine 1,411,167 2,502 Cuba. 2,317,539 159,730 Curaçao. 127,681 322,030 Danemark. 1,963,855 1.007,351 France 12,531,116 11,687,590 Groenland, été. 88,617 » Grande-Bretagne 1 87,896,334 73,968,646 Hambourg. 4,919,687 7,314,011 Hanovre et Oldenbourg 4,125,055 2,389,984 Java, etc 63,729,272 21,809,704 Iles Canaries, etc. 5,356,426 159,724 États de l'Église 19,302 271,966 Côte de Guinée. 413,945 250,892 Luheck. 79,618 40,007 Mecklembourg 112,771 132,905 Naples et Sicile. 1,164,146 2,800,924 États-Unis de l'Amérique. 6,746,580 5,377,239 Norvége. 4,595,903 681,441 Autriche. 1,220,581 4,473,060 Iles Philippines. ! 251,210 » Portugal 511,351 337,676 Russie (mers Baltique et Blanche). 15,226,640 3,438,248 Russie (mer Noire) 2,643,583 276,335 Sardaigne., .1 134,451 1,809,957 Espagne 687,344 657,084 Etats de l'Amérique (hors l'Union). 686,066 573,612 Surinam 4,439,065 1,262,320 Union douanière allemande 64,130,562 100,146,833 Toscane 472,066 1,693,393 Turquie, Grèce, etc. 1,716,438 3,419,046 Suède.1 422,977 377,669 Épaves 33,551 » Totaux. 321,051,729 272,801,666 Année précédente. 322,719,559 272,484,635 Différence. 1,667,830 317,031 diminution. augmentation.
En 1854.
IMPORTA TIOXS, EXPORTATIONS.
Florins. Flocîns.
Australie. » 479,511 Belgique 41,446,556 30,469,426 Brésil. 1,240,388 221,535 Brême. 1,162,682 773,560 Californie » 61,904 Chine. 561,900 53,094 Cuba. 1. 2,461,436 244,861 Curaçao. 135,614 267,319 Danemark.. 3,963,715 1,190,010 France. 12,171,902 13,074,585 Groenland, etc. 9,526 » Grande-Bretagne. 99,761,865 15,1.94,278 Hambourg. 6,759,502 9,824,583 Hanovre et OIdenhourg. 5,488,825 2,587,857 Java, etc 74,833^23 29,402,129 Iles Canaries, etc. 2,772,244 242,623 États de l'Eglise. » 854,334 Côte de Guinée. - 422,185 517,116 Lubeck. 88;559 16,523 Mecklembourg. 59,346 77,665 Naples et Sicile. 2,002,691 3,805,510 Etats-Unis., 7,545,043 5,136,923 Norvège.. 4,824,723 844,943 Autriche. 974,310 3,302,120 Iles Philippines.:. 179,816 Portugal. 743,639 508,587 Russie (mers Baltique et Blanche). 7,510,808 87,448 Russie (mer Noire) 1,743,529 » Sardaigne. 264,157 2,925,746 Espagne. 1,127,887 735,530 Amérique (hors l'Union) 429,488 822,955 Surinam., 4,384,095 1,501,934 Union douanière allemande 68,819,497 116,435,236 Toscane. 576,222 2,769,146 Turquie, Grèce, etc. 778,998 3,772,505 Suède. 1,125,047 579,305 Épaves. 115,101 » Totaux., 356,484,519 108,780,801 Année précédente. 321,051,729 272,801,666 Différence. 35,432,790 35,979,135'
(1) Le florin des Pays-Bas vaut 2 fr. 10. Il se décompose en 100 cents.
BELGIQUE.
Armée belge. — Chasseurs à cheval.
SITUATION P\toS^JUPERFICIE, POPULATION. — La Belgique est le rnfr>nirre1e récemment fondé en Europe; elle
occupe les vastes plaines que l'on rencontre à l'embouchure de la Meuse et du Rhin, au nord-est de la France. Ses limites sont : au nord, les Pays-Bas ( provinces de Zélande et de Brabant) ; à l'est, les Pays-Bas (Limbourg et Luxembourg hollandais) et la Prusse Rhénane; au sud-ouest, la France (départements de la Meuse, des Ardennes et du Nord) ; et au nord-ouest, la mer du Nord.
Sa superficie est de 29,455 'kilomètres carrés, et sa population était évaluée au 1er janvier 1854 à 4,548,507.
COTES DE BELGIQUE. — La mer du Nord baigne la Belgique sur une étendue de côtes de 68 kilomètres environ. Une chaîne de dunes borde le rivage et sert de barrière contre les envahissements des flots; entre Wenduyne et Heyst, où cette défense naturelle manquait , il a fallu la remplacer par quarante-neuf jetées et soixantetreize épis destinés à reconquérir l'estran envahi devant l'ancienne digue au Comte Jean. Au sud de Nieuport, au contraire, la mer tend à abandonner la côte : chaque année l'estran avance de près de deux mètres. Les dunes, sous l'influence du vent du nord-ouest, envahissent l'intérieur du pays, et ne s'arrêtent que lorsqu'on leur oppose des plantations.
Des bancs nombreux d'un sable fin, gris et noir, forment le prolongement sous-marin de la côte ; les parties de ces bancs les plus élevées et les plus dangereuses pour les navigateurs ont reçu le nom de pollaert : elles n'ont pas trois mètres de hrassiage au moment des plus basses eaux. Les bancs qui restent en regard de la côte belge peuvent se diviser en deux zones : la première se rattache aux atter-
rissements du rivage et aux sables qui s'accumulent à l'entrée de nos ports, la seconde s'étend au large et se compose de plateaux plus ou moins isolés. A la première zone appartiennent le Traepegeer, le Broers Bank, le Strooms Bank et le Paarclen Markt; à la seconde zone , le Smal Bank, Y Uit Jiatel, le Klif d'Islande, le Breed Bank oriental, le Banc de Middelkerke, le Banc de Nieuport, le Banc d'Ostende, le Banc de ev enduyne, le Buyten Bank, le Brisant de Heyst, le Brisant de Knocke, l' Inner Bank, le Banc de Lisseweglie et le Baan Bank.
Les bas-fonds que l'on rencontre entre ces bancs sont : la Passe de Zuydcoote, qui limite le Traepegeer à l'ouest ; la Bade de Nieuport (autrefois West Diep), qui sépare le Traepegeer et -le Broers Bank du Smal Bank et du Banc de Nieuport; le Chenal du nord, qui sépare le Smal Bank et le Breed Bank oriental du Banc de Nieuport et du Banc de Middelkerke ; la Passe du nord-est, qui sépare le Banc de Nieuport du Strooms Bank ; la Petite rade d'Ostende, qui.sépare la côte du Strooms Bank; la Grande rade d'Ostende, qui sépare le Strooms Bank du Banc de Nieuport, du Banc d'Ostende et du Banc de Wenduyne ; la Passe française, qui sépare le Banc de Wenduyne et le Paarden Markt du Brisant de Heyst, du Brisant de Knocke et de l'Inner Bank; les Wielingen, qui séparent l'Inner Bank du Banc de Lisseweghe et du Raan Bank ; et le Deurloo, qui limite le Raan Bank à l'est.
ASPECT PHYSIQUE GNÉRAL. - Le royaume de Belgique présente, sous le rapport physique, une transition bien marquée entre le territoire néerlandais et le territoire français : au nord les deux provinces de Flandre, celle d'Anvers et celle du Brabant méridional,
offrent des plaibes comme celles de la Hollande, mais encore plus étendues, et les marais du Limbourg se confondent avec ceux du sol néerlandais ; au sud s'étendent des plateaux ondulés qui se continuent sur le territoire de la France. Les aspérités du sol ne sont dans la Belgique que des collines ; elles appartiennent au groupe du système alpique qui domine en France et que nous avons appelé groupe franco-celtique : ainsi celles qui s'étendent dans la province de Luxembourg et dans celle de Liége ne sont qu'un prolongement de la chaîne que nous avons nommée cévenno-vosgienne. Le plateau des Ardennes ou plutôt de l'Ardenne, qui appartient à la même chaîne , s'étend dans le Hainaut, la province de Namur et celle du Limbourg. Les plateaux qui se trouvent entre l'Escaut et la Meuse sont sillonnés par des fentes au fond desquelles coulent des rivières : ce qui donne a la contrée un aspect montueux. Celle qui est située à l'est de la Meuse est basse dans sa partie du nord-ouest, et s'élève dans la direction du sud-est, c'est-à-dire vers les frontières de la France. Ses points les plus élevés ne paraissent pas dépasser 350 mètres au-dessus du niveau de l'Océan. Elle est en général sillonnée par un grand nombre de vallées et de vallons. Ce mouvement du sol, l'existence d'une multitude de petites rivières et le mélange des rochers escarpés avec des prairies, des terres labourables et de petites forêts, lui donnent un aspect très-pittoresque; mais, comme dan. presque tous les autres @ pays où dominent les terrains primordiaux, le sol est peu fertile, à l'exception cependant des parties situées au nord de la Sambre et de la Meuse, sur lesquelles se sont étendus des dépôts muables de terrains secondaires ; de sorte que les richesses minérales s'y trouvent réunies ; ce qui a fait dire que le mineur et le minéralogiste, accoutumés à habiter des montagnes arides, étaient étonnés de se rencontrer, dans le Hainaut, au milieu de plaines couvertes d'une végétation brillante, où la culture est portée aù plus haut point de perfection.
On doit remarquer que sur la rive droite de la Meuse la disposition des vajlées présente deux modifications distinctes : les unes sont droites, larges, peu profondes, bordées de coteaux en pente donce, et dirigées du nord-est au sud-ouest; mais elles sont déchirées par des vallées plus profondes, irrégulières, dirigées en tous sens et servant d'écoulement aux rivières; disposition qui est due à la constitution géognostîque du pays. Les autres vallées n'ont aucun rapport avec la nature du sol, du moins lorsque celui-ci est formé de roches dures; car ces vallées sont arrêtées par des dépôts arénacés. Elles semblent démontrer qu'il ne faut point attribuer le creusement des vallées à l'action érosive des eaux, mais à des crevasses dont les eaux ont profité pour s'écouler.
Les derniers rameaux des Ardennes pénètrent au sud-ouest dans ce pays; leurs sommités ont une hauteur moyenne de 550 mètres au-dessus du niveau de la mer. Cependant l'Ardenne belge n'est pas montueuse ; on y volt des suites considérables de plateaux qui ne présentent que de légères ondulations. Mais dans les parties traversées par des rivières un peu importantes, telles que l'Our, la Meuse, la Roër, le Semois, la Sure, etc., elle est déchirée par une multitude de vallées et de gorges extrêmement profondes, souvent très-resserrées, qui présentent des escarpements de plus de 200 mètres de hauteur. Il résulte de cette disposition que cette région renferme des cantons très-montueux et d'autres presque plats, et que cependant les sommets des plateaux sont partout à peu près de la même hauteur et le terrain de la même nature. On connaît ses immenses forêts, mais la majeure partie du sol est aride et ne présente que des landes qui forment ou de vastes plateaux marécageux et absolument incultes, connus dans le pays sous le nom de fagnes, ou de mauvaises pâtures qu'on ne peut livrer à la culture qu'après un intervalle de 15 à 20 ans, et par un procédé particulier appelé essartage: ce n'est eu général que dans les vallées que l'on trouve de véritables prairies et des terres régulièrement cultivées.
CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE. — la constitution géognostique du royaume de Belgique mérite quelques détails, car ce pays lui doit une grande partie de ses richesses. Dans les Flandres et dans la province d'Anvers on trouve un calcaire marin que l'on a d'abord rapporté au calcaire grossier des environs de Paris, mais qui est reconnu aujourd'hui pour être plus récent que tout ce qui forme les terrains parisiens. C'est sur ce calcaire que s'étend une couche d'argile diluvienne qui constitue les terres fortes des Flandres. Vers le nord de ces provinces s'étend un dépôt sablonneux- beaucoup plus moderne : il est composé de plusieurs assises dont la plus inférieure est un sable vert sur lequel repose tantôt un limon noir et tout pétri de coquilles d'eau douce appartenant à des espèces encore vivantes aujourd'hui, tantôt un sable blanc ou jaune qui constitue le sol des grandes bruyères de la province d'Anvers et des terres légères du pays de Waes, dans la Flandre orientale , sur lesquelles des blocs erratiques se sont répandus. Ces dépôts septentrionaux sont évidemment diluviens et d'eau douce. Sur ceux-ci, comme sur le dépôt marin du midi, il existe des tourbières qui portent les mêmes caractères, avec cette différence que dans celles qui reposent sur le calcaire marin on trouve des ossements du bœuf aurochs, et dans celles qui-sont sur le dépôt diluvien des ossements
de castors, de loups, de chiens, de loutres, de chèvres et d'hommes.
Cuvier a prouvé que les castors de ces tourbières appartiennent à une espèce qui n'existe plus : voilà donc un nouvel exemple d'ossements humains contemporains d'animaux dont les races sont perdues.
Les dépôts diluviens ou de transport de la plupart des provinces belges, telles que celle d'Anvers, le Brabant méridional, les Flandres, le Hainaut et le Limbourg, renferment des ossements d'éléphants et quelquefois de rhinocéros; celles de Namur et de Luxembourg ne paraissent pas en recéler ; mais dans les cavernes de la province de Liège, particulièrement celles de Chokier, on a trouvé dans une couche argileuse d'origine diluvienne, mêlée de cailloux roulés, de quartz et de fragments de calcaire, des ossements humains accompagnés de débris de rhinocéros et du grand ours des cavernes.
Si de Menin nous tirons une ligne passant par Bruxelles et se terminant à Maestricht, tout l'espace qui s'étend au sud de cette ligne nous offrira une grande variété de formations plus ou moins anciennes.
Depuis les bords de la Senne jusqu'à la frontière belge, à peu de distance d'Aix-la-Chapelle, s'étend une longue bande de terrain crétacé composé de craie blanche, de marne, d'argile et de craie tuffeau. Sa plus grande largeur du nord au sud se trouve entre Saint-Trond, dans le Limbourg, et Héron, dans la province de Liège.
A l'ouest du terrain crayeux, s'appuie sur celui-ci un terrain supercrétacé dont nous avons déjà parlé, et qui est plus récent que le calcaire grossier des environs de Paris : il sa compose d'un sable calcarifère coquillier, qui renferme des bandes de roches calcaires.
Il s'étend en longueur de l'est à l'ouest, depuis Dhuy jusqu'à Turcoing, et en largeur depuis Bruxelles jusqu'à Nivelles.
Au sud de ce terrain, depuis Nivelles jusqu'à Chimay, on traverse 5 ou 6 bandes de calcaire antbraxifère, c'est-à-dire contenant une matière combustible appelée anthracite, qui se prolongent presque parallèlement du sud ouesLau nord-est, depuis Tournay jusqu'aux environs d'Aix-la-Chapelle, et dont la plus septentrionale est à Nivelles et la plus méridionale au sud de Chimay.
Au sud de la plus septentrionale, on voit à l'ouest et à l'est de Mons le terrain houiller, qui s'étend ensuite en une longue bande depuis Fontaine-l'Evèque, dans le Hainaut, jusqu'à Daelheim, dans la province de Liège. Au sud de Mons reparaît la craie recouverte des grès du terrain supercrétacé ; mais plus au sud encore, depuis les environs de Dour jusqu'à Verviers, les bandes dacalcaire anihraxifère s'appuient sur des schistes ardoisiers qui régnent ensuite sans interruption jusqu'aux frontières méridionales de la Belgique.
La stratification ou la disposition des couche: du calcaire anthraxifère et du schiste ardoisier est remarquable en ce qu'elles s'élèvent verticalement, ce qui oblige à exploiter au moyen de puits les immenses houillères des environs de Namur et de Mons. Quel soulèvement ces couches ont dû éprouver par suite de l'action des feux souterrains, pour que ces couches , originairement horizontales , se trouvent aujourd'hui perpendiculaires !
Dans la partie du Luxembourg qui appartient à la Belgique on voit reposer sur les schistes le lias ou calcaire à gryphées, les marnes irisées, le calcaire conchylien ou muschelknlh des Allemands, et lo grès bigarré.
Tel est en général l'ensemble des terrains qui constituent le territoire de la Belgique. Ils donnent lieu à quelques exploitations plus ou moins considérables, parmi lesquelles la houille n'est pas la seule qui soit importante.
ROCHES, MARBRES, MINÉRAUX. — Les roches quarlzeuses et celles qui renferment de l'amphibole, et qui forment des couches au milieu du terrain ardoisier, constituent une branche importante d'exploitation pour le pavage des routes et la fabrication des meules à aiguiser. C est dans le terrain qui contient de l'anthracite que se trouve cette grande variété de marbres, l'une des richesses minérales de Belgique, principalement celui qui doit à de nombreux débris de corps organisés marins le nom de petit granît, et que l'on exploite à Soignies, à Harquesne, à Felay, aux Écaussines dans le Hainaut, et à Ligny dans la province de Namur ; on doit encore citer les marbres noirs connus sous les noms de marbres de Namur, de Theux et de Dinant, ainsi que celui de Sainte-Anne, qui vient des environs de Thuin dans la province de Hainaut, et qui est veiné de gris et de blanc. Un autre marbre assez estimé est fa brèche de Waulsort, dans la province de Namur. Le même terrain contient en abondance de riches minerais de fer et de plomb, et donne naissance aux célèbres eaux thermales de Chaud fontaine, près de Liege.
Le schiste est exploité comme pierre de construction, et employé aussi en carreaux, en tables, et quelquefois en ardoises; au milieu des roches schisteuses des bords de la Meuse, on exploite ces pierres à aiguiser, ces pierres à rasoir que l'on expédie sur tous les points de l'Europe, ces schistes chargés d'alun que l'on vend sous le nom de crayons de charpentiers; enfin, c'est du terrain ardoisier que jaillissent les eaux minérales de Spa, qui ont acquis une si grande célébrité.
Le fer abonde dans le terrain anthraxifère ; il s'y présente sons deux états différents : le fer oxydé, que les mineurs nomment mine rouge, et le fer hydraté, qu'ils appellent mine jaune. Le premier de ces minerais forme des couches dans les bandes schisteuses, et donne un fer tendre et cassant peu estimé; le second se présente en amas considérables au milieu du calcaire, et donne en général du fer d'excellente qualité. Les plus riches exploitations de ce métal sont celles des cantons de Waicouft et de Florenne. On en exploite aussi dans les environs de Couvin, d'Echsweisep, de Ferricre, de Rochefort et de Theux. Le calcaire anthraxifère recèle aussi des filons de galène et de pyrite, c'est-à-dire de sulfure de plomb et de fer, principalement à Vedrin, près de Namur. A Visé on trouve du cuivre pyriteux disséminé en globules; à Moresnet, dans la province de Liège, on exploite dans la localité connue sous le nom de la Vieille-Montagne, ainsi qu'aux environs de Limbourg, du zinc silicate et carbonate, et le métal qu'on en retire sert à alimenter une importante fabrique de zinc établie à Liège et plusieurs manufactures de laiton, qui existent en Belgique et dans le nord de la France.
C'est dans la bande de calcaire anthraxifère que la nature a creusé la belle grotte de Han, située à 22 kilomètres de Dinant La rivière de la Lesse s'y engouffre sous des masses de rochers pour reparaître à 500 mètres plus loin, de l'autre côté de la colline. Les corps légers que l'on jette dans la rivière prouvent que celle-ci met 24 heures à traverser les sinuosités de la grotte. Cette célèbre caverne se compose d'une série de cavités élevées, unies par des couloirs plus ou moins resserrés, dont le développement est de plus de 2 kilomètres, et dont les parois sont tapissées de brillantes stalactites. Il est bon de remarquer que la vallée de la Lesse n'est point barrée en cet endroit, mais qu'elle se prolonge autour de la colline traversée par les eaux, et que lorsq ue le volume de celle-ci devient trop considérable pour entrer dans la grotte, une partie s'écoule dans la vallée.
BASSINS HYDROGRAPHIQUES. — Toute la Belgique appartient au versant de la mer du Nord et est comprise dans les trois bassins hydrographiques de la Meuse, de l'Escaut et de l'Yser. Elle s'étend en outre sur une petite partie du bassin du Rhin où naissent l'Attert (près d'Arlon) , la Sure (près de Neufchâteau) et la Wiltz (près de BaslogneJ, affluents de la Moselle; et sur une portion du bassin de la Seine où l'Oise (près de Chimay) prend sa source.
Le bassin de la Meuse est long et étroit. Il est borné par le bassin du Rhin (au nord et à l'est) , avec lequel il est d'abord confondu, puis dont il est séparé par des collines qui s'élèvent peu à peu et auxquelles succèdent les monts Eifel, les Hohe-Veen ou Hautes Fagnes, les Ardennes orientales et les inonts.de la Moselle; par le bassin du Rhône (au sud), dont il est séparé par le plateau de Langres et les monts Faucilles ; et par les bassins de la Seine et de l'Escaut (à l'ouest), dont il est séparé par les monts de la Meuse, l'Argonne, les Ardennes occidentales et une suite de collines qui vont en décroissant à mesure qu'elles se rapprochent de la mer. Le bassin de la Meuse comprend, politiquement, une partie de la France, de la Belgique, du grand-duché de Luxembourg, de la Prusse Rhénane, du duché de Limbourg et des Pays-Bas. En Belgique , ce bassin comprend une partie de la province de Limbourg, la presque totalité des provinces de Liège et de Luxembourg, la province de Namur et une partie de la province de Hainaut.
Le bassin de l'Escaut est presque aussi large que long. Il est borné par le bassin de la Meuse (au nord et à l'est), dont il est séparé d'abord par un dos de pays à peine sensible, puis par quelques hauteurs insignifiantes et enfin par les Ardennes occidentales; par les bassins de la Seine, de la Somme, de l'Authie et de la Canche (au sud ), dont il est séparé par le prolongement nord-ouest des Ardennes occidentales; et par les bassins de l'Aa et de l'Y ser (à l'ouest), dont il n'est séparé que par une crète peu prononcée.
Le bassin de l'Escaut comprend, politiquement, une partie de la France, de la Belgique et des Pays-Bas. En Belgique, ce bassin comprend une partie de la Flandre occidentale, la Flandre orientale, la province d'Anvers, une partie des provinces de Limbourg et de Liège, la province de Brabant et une partie de la province de Hainaut.
Le bassin de l'Yser est peu développé en longueur comme en largeur. Il est borné par le bassin de l'Escaut (au nord, à l'est et au sud), dont il est à peine séparé par quelques faibles éminences ; et par le bassin de l'Aa (à l'ouest)-, dont il n'est, pour ainsi dire, séparé par rien. Le bassin de l'Y ser comprend, politiquement, une partie de la France et de la Belgique. En Belgique, ce bassin comprend nne partie de la Flandre occidentale.
FLEUVES ET RIVIÈRES; CANAUX, ÉTANGS ET MARAIS.
— Nous allons énumérer les principales rivières qui arrosent ces bassins. L' Escaut, en flamand Schelde, prend sa source en France près de Catelet, au pied du mont Saint-Martin, à 110 mètres d'altitude; après un cours de 107 kilomètres, il entre en Belgique près de Tournay, passe à Courtray, Oudenarde, Gand, Anvers, et après
un parcours de 233 kilomètres il entre dans les Pays-Bas. Arrivé devant le fort de Batz, il se divise en deux bras qui baignent plusieurs îles. Le bras le plus méridional porte le nom d'Escaut occidental, Wester Schelde ou Hond. Il sépare la Flandre zélandaise des îles de Sud-Beveland et de Walcheren, et se jette dans la mer du Nord entre Flessingue et Breskens. Le bras septentrional porte le nom d'Escaut oriental, Oostei- Schelde. Il sépare d'abord le Brabant hollandais de l'île de Sud-Beveland, sous le nom de Kreekegat ou canal de IJerg-op-Zoom, puis communique avec la Meuse par l' Eendracht, qui sépare le Brabant hollandais de l'île de Tholon, et après avoir traversé l'archipel formé par les îles de la Zélande, il va aussi rejoindre la mer du Nord. La largeur du fleuve, qui n'est que de 20 mètres à son arrivée en Belgique, atteint 40 mètres à Gand, 600 mètres à Anvers et 4,000 mètres devant Flessingue.
Quoique les Pays-Bas soient maîtres des embouchures du fleuve, sa navigation est libre et garantie par les traités moyennant une faible redevance perçue par les Hollandais. Les principaux affluents de l'Escaut sont : la Haîne, qui prend sa source à la fontaine de SaintMédard à Anderlues, à l'altitude de 179 mètres; elle passe à Jemmapes et vient se jeter dans l'Escaut, sur sa rive droite, à Condé, après un cours de 70 kilomètres dans la direction générale de l'est à l'ouest. La Trouille, affluent de gauche, passe à Mons; son cours général est du sud-est au nord-ouest; elle n'a que 16 kilomètres.
La Lys, autre affluent de gauche, prend sa source à Lysbourg, à 30 kilomètres à l'ouest de Béthune, à 140 mètres environ d'altitude; elle sert de limite entre la France et la Belgique pendant 28 kilomètres, depuis Armentières jusqu'à Menin, et coule en Belgique en traversant Menin, Cuerne, Waclien et Gand, où elle se jette dans l'Escaut après un cours de 88 kilomètres en Belgique; son cours total est de 214 kilomètres.
La Dendre ou Dender, affluent de droite de l'Escaut, est formé à Ath, à l'altitude de 30 mètres environ, par la jonction de deux branches; elle passe à Cramont, à Ninove, à Alost, où elle est navigable, et se jette à Dendermonde (Termonde) dans l'Escaut après un cours de 78 à 80 kilomètres.
Le Rupel est formé à Broeks-Bemden par la jonction de la Dyle et de la Nèthe; il se jette dans l'Escaut à Rupelmonde après un parcours de 12 kilomètres ; la marée s'y fait sentir, et sa largeur varie de 100 à 280 mètres.
La Dyle prend sa source à Houtain-Ie-Mont, à l'altitude de 150 mètres environ; elle arrose Wavres, Louvain, Malines, et après un cours de 99 kilomètres elle se réunit à la Nèthe à Rumpst pour former le Rupel. La Dyle reçoit le Demer, qui passe à Hasselt, et la Senne, qui naît dans les bois d'Ottignies; elle passe à Steenkerque, à Tubize, à Bruxelles, où elle forme six îles, à Vilvorde, et se jette dans la Dyle à Sennegat après un parcours de 103 kilomètres. Cette rivière est sujette à de fréquents débordements après les grandes pluies et le dégel.
La Nèthe est formée à Lierre par la jonction de la Grande-Nèthe, qui a 90 kilomètres de cours dans la direction de l'est à l'ouest, avec la Petite-Nèthe, qui a 64 kilomètres de cours dans la direction du nord-est au sud-ouest; cette dernière est en partie canalisée.
La Nèthe passe à Lierre et à Rumpst, où elle se jette dans la Dyle; la marée se fait sentir sur tout son parcours.
La Meuse, en wallon Mouse, en flamand Maes, prend sa source en France à quelque distance du village de Meuse, le premier qu'elle traverse et qui lui donne son nom; après un parcours de 400 kilomètres, elle entre en Belgique, coule au fond d'une gorge très-resserrée, arrose Dinant, Namur, Huy, Liège, abandonne à Kessenich le territoire belge après un parcours de 194 kilomètres.
Elle entre alors dans les Pays-Bas, arrose Venloo, Gorcum, se réunit plusieurs fois au Wahal, puis au Leck et à l'Yssel , et va se jeter dans la mer du Nord à Brielle et à travers les îles de la Zélande. Son cours depuis sa source jusqu'à Gorcum est de 893 kilomètres. Sa largeur sur le territoire belge varie de 80 à 140 mètres.
La Meuse reçoit à droite : la Semoy, qui passe à Bouillon, et la rejoint en France, en faisant de nombreux méandres, à Monthermé après un parcours de 198 kilomètres dans la direction générale du sud-est au nord-ouest. La Lesse, qui prend sa source à Ochamps, s'engouffre à Han dans une montagne calcaire dont elle parcourt les cavités immenses, arrose Ëprave, Wanlin et Houyet, et se jette dans la Meuse à Anseremme après un parcours de 84 kilomètres.
L'Ourthe a pour origine deux ruisseaux qui viennent des villagesfrançais d'Ourth et de Deyfalt et qui se réunissent à Ortho; elle traverse d'abord une vallée profonde resserrée entre des rochers presque à pic; son bassin s'évase ensuite et se resserre tour à tour jusqu'à Liège, où elle se jette par trois bras dans la Meuse, après un cours de 160 à 170 kilomètres. Sa largeur varie de 20 a 60 mètres.
La Sambre, le principal affluent de gauche de la Meuse, prend sa source en France au village de Fontenelle, a 14 kilomètres au sudouest d'Avesnes ; elle entre en Belgique après un cours de 87 kilomètres, arrose Erquelines, Marchiennes, Charleroi, et se jette à Namur dans la Meuse après un cours sinueux de 192 kilomètres; sa largeur sur le territoire belge varie de 10 à 35 mètres.
L'Yser, qui donne son nom à un petit bassin côtier, prend sa
source en France à 6 kilomètres au nord-est de Saint-Omer; il entre en Belgique après un parcours de 28 kilomètres, arrose Reninghe, Dixmude, Nieuport, et se jette dans la mer par un chenal qui traverse Oostdunkerque après un cours de 78 kilomètres; il reçoit l'Yperleé qui passe à Y pres.
La Belgique est encore arrosée par la Sure, petite rivière de 173 kilomètres de cours, qui appartient au bassin du Rhin par l'intermédiaire de la Moselle, et par l'Oise, affluent de la Seine. L'Oise prend sa source dans le bois de la Thiérache, près du hameau de Poteau-Pré, commune de Chimay. Elle sert de limite entre la Belgique et la France depuis Macquenoise jusqu'à la Lobiette, commune de Momignies; puis, après 17 kilomètres de cours, elle abandonne complétement le territoire belge.
La plupart de ces rivières communiquent entre elles à l'aide de canaux, ou sont accompagnées de canaux latéraux; nous citerons parmi les principaux : le canal de Charleroi à Bruxelles, qui unit la Sambre à la Senne ; sa longueur est de 74,200 mètres ; le canal de Liège à Maestricht ou canal latéral de la Meuse, qui a 20,450 mètres; le canal de Maestricht à Bois-le-Duc, qui a 123,536 mètres; le canal de Louvain à Malines ou canal latéral de la Dyle, qui a 29,770 mètres; le canal de Mons à Condé, qui a 24,532 mètres; le canal de Gand à Terneuse ou canal du Sas de Gand, qui a 33,316 mètres; le canal de Gand à Bruges, qui a 47,092 mètres; le canal de Bruges à Ostende, continuation du précédent, qui a 23,530 mètres; enfin les canaux de Nieuport à Dunkerque (32,250 mètres ) et de Bergues à Furnes, que l'on nomme aussi canal de la Basse-Colme (24,475 mètres).
La Belgique possède un grand nombre d'étangs : les plus grands sont ceux de Berlaere, de Bornhem, de Wirelles et de Voumen.
Les marais n'y sont pas rares ; on peut citer pour exemple la Grande Moere près de Furnes, et ceux de la Campine entre la Meuse et l'Escaut.
CLIMAT ET PRODUCTIONS NATURELLES. — Les diverses parties du royaume de Belgique diffèrent principalement par leur humidité plus ou moins grande. Dans le duché de Luxembourg le climat est sain et tempéré, cependant plutôt humide que froid. Le chêne, le frêne et le hêtre dominent dans ses belles forêts ; les bêtes
à cornes y trouvent des pâturages abondants ; on y cultive quelques vignes qui donnent un vin médiocre; les arbres fruitiers sont rares; le blé réussit avec peine; mais l'habitant tire un grand avantage de la culture du seigle, de l'avoine, et surtout de la pomme de terre.
Dans la province de Liège l'air est souvent brumeux : ses vallées fertiles et bien cultivées, principalement celle qu'arrosent YOurthe et YEmblève, donnent, outre les productions du Luxembourg, une belle qualité de froment; son territoire n'est pas moins riche que le précédent en forêts, en gibier, en porcs et en bêtes à cornes.
L'air de la province de Namur est vif et sain ; le sol, très-varié, est docile à la culture; les moutons ont une laine plus belle et une chair plus succulente que dans les autres provinces.
On respire dans le Hainaut un air aussi sain, on y jouit d'un climat aussi tempéré, on y remarque la même fertilité, et les forêts, quoique plus disséminées, procurent de beaux bois de charpente.
La Flandre occidentale et la Flandre orientale sont sous l'influence d'un climat humide qui fait nattre fréquemment des fièvres dangereuses; l'été y est chaud, mais pluvieux; l'hiver est froid : les vents du nord-ouest rendent souvent, dans la première de ces provinces , cette saison redoutable par les inondations qu'ils causent.
Les deux Flandres nourrissent des chevaux trop lourds comme monture, mais excellents pour le trait. Les autres animaux domestiques s'y font remarquer par leurs qualités, qu'ils doivent à de bons pâturages. Les végétaux qui y réussissent le mieux sont le tabac, le chanvre, la garance, et surtout le lin , principale richesse du pays. Dépourvues de forêts, mais abondantes en tourbe, on y fait un grand usage de ce combustible. Les provinces du Brabant méridional, d'Anvers et du Brabant septentrional, sont saines, quoique humides; le sol y est partout fertile , excepté dans le nord de la dernière, où les bruyères et quelques forêts de pins couvrent encore des landes sablonneuses, sur lesquelles la tourbe s'accumule au fond des grands marécages : cependant des travaux assidus pourraient , comme sur le territoire d'Anvers, transformer en fertiles prairies des terrains inutiles. Le Limbourg, non moins marécageux, se livre avec un grand avantage à l'éducation des bestiaux et des abeilles.
ANCIENS HABITANTS. - Avant de passer à la description des villes du royaume de Belgique, -nous jetterons un coup d'œil rapide sur les anciens peuples qui habitaient ce pays avant, pendant et après la domination romaine. Les principaux., ceux qui donnèrent leur nom à la Belgique, sont les Belges, nation celtique que l'on s'accorde à regarder comme originaire de la Germanie, et dont Je nom signifiait dans son propre idiome , selon les uns, habitants du Nord, selon d'autres, querelleur, du mot tudesqne belgen, qui si-
gnifie disputer. A une époque très-reculée qu'il est difficile de fixer d'une manière précise, mais qui paraît être entre l'an 350 et 281 avant notre ère , ils traversèrent le Rhin, envahirent la Gaule septentrionale jusqu'à la chaîne des Vosges à l'est, et au sud jusqu'au cours de la Marne et de la Seine. Leur véritable nom de Bclg se prononçait Bolg, Volg et l'olk : de là les dénominations latines de Belgœ, llolgœ et Volcæ, par lesquelles ils sont désignés dans les anciens auteurs. La nation belge se composait de plusieurs peuples dont les principaux étaient les Vellocasses, les Treviri, les Segni, les Condrusi, les Eburones, les Atuatici, les Cœresi, les Pœmani, les Ambivarites, les Menapii, les Morini, les Nervii, avec les Centrones, les Grudii, les Levaci, les Pleumosii et les Garduni, peuplades qu'ils prenaient sous leur protection.
Ceux de ces peuples qui occupaient la Belgique actuelle étaient les Ambivarites dans la province d'Anvers; les Nervii dans le Hainaut et dans une partie du Brabant méridional et de la Flandre orientale; les Morini dans la Flandre occidentale ; les Menapii dans le Limbourg, avec les Eburones, qui possédaient aussi la province de Liège, et qui paraissent avoir pris plus tard le nom de Tungri; enfin les Treviri, qui comprenaient dans leur territoire la plus grande partie de la province de Luxembourg.
HISTOIRE. - Subjugués par les Romains, ces peuples s'unirent en 409 aux Francs pour secouer le joug qu'ils portaient depuis 458 ans. C'est de cette réunion que date llorigine de la monarchie française. Le roi Clodion, fils de Pharamond, s'empara de la province romaine appelée seconde Belgique, et fixa le siège de son empire à Dispargum, que l'on croit être aujourd'hui la ville de Diest, dans le Brabant méridional; Mérovée ajouta aux conquêtes précédentes celle de la première Germanie, et choisit Tournay pour capitale; Childéric y joignit la seconde Germanie avec la première Belgique; enfin Clovis s'empara de Tongres et de la seconde Belgique : ainsi, les premiers rois de la France l'ont également été de la Belgique. Ce pays fut le berceau de la puissante famille d'Héristal et de Landen d'où sortit Charlemagne, et fit partie du vaste empire de ce conquérant. Lors du morcellement de cet empire, la Belgique neustrienne, ou comté de Flandre, devint un fief du royaume de France ; la partie austrasienne forma quelque temps un royaume particulier sous le nom de Lotharingie ou royaume de Lothaire , puis après maintes vicissitudes elle reconnut la suzeraineté des empereurs d'Allemagne. Pendant les temps féodaux, le pays fut morcelé en Etats indépendants : les duchés de Brabant, de Limbourg et de Luxembourg , les comtés de Flandre, de Hainaut et de Namur, l'évêché de Liège, la seigneurie de Malines, la principauté de Stavelot. C'est alors qu'on vit les Belges prendre une large part aux croisades et aux guerres entre la France et l'Angleterre, taudis que leur pays, malgré de fréquentes révolutions, s'enrichissait par le commerce et l'industrie. Au quinzième siècle, Philippe le Bon réunit ces domaines au duché de Bourgogne. Seuls, l'évêché de Liège et la principauté de Stavelot continuèrent pendant plus de quatre siècles une existence distincte. Le règne de Philippe le Bon fut long et prospère ; il attira à sa cour un grand nombre de savants et d'artistes, parmi lesquels brillèrent Hubert et Jean Van Eyck, les fondateurs de la première école de peinture flamande. Charles le Téméraire, son fils, se rendit redoutable à ses voisins, et se vit au moment de ceindre la couronne royale; mais ses projets gigantesques, poursuivis avec obstination, causèrent la ruine de sa puissance. Il fut vaincu par les Suisses à Gransonet àMoratz, et mourut dans sa dernière bataille, livrée en 1477 sous les murs de Nancy.
Sa fille Marie, à laquelle le roi de France Louis XI reprit la Bourgogne , épousa l'archiduc Maximilien d'Autriche.
La Belgique resta unie et puissante sous Philippe le Beau, fils de Marie et de Maximilien , roi d'Aragon, par son mariage avec Jeanne d'Aragon, et sous Charles-Quint élevé en 1519 à la dignité impériale. A la mort de ce prince elle tomba de la domination impériale sous la domination espagnole. Les troubles religieux qui attristèrent le règne de Philippe II amenèrent les premiers démembrements du pays. Enlevée après un soulèvement général à l'autorité du roi, puis reconquise par le prince Alexandre de Parme, la partie méridionale des Pays-Bas resta à l'Espagne, tandis que la Hollande, la Gueldre, la Frise, etc., formèrent la république des Provinces-Unies sous le stathoudérat de la famille de Nassau. A sa mort le roi Philippe II céda les Pays-Bas à sa fille Isabelle et à l'archiduc Albert d'Autriche ; mais ces princes moururent sans laisser de postérité, et la guerre ne se termina qu'en 1648 par le traité de Munster, qui abandonna aux Provinces-Unies la possession de Maëstricht, d'une partie du Brabant et de quelques villes de Flandre.
D'autre part, les guerres entre la France et l'Espagne, jusqu'à la fin du dix-septième siècle, coûtèrent à la Belgique l'Artois, une partie de la Flandre, du Hainaut et du Luxembourg.
En 1713 la souveraineté de la Belgique passa à l'Autriche par le traité d'Utrecht, et elle resta à cette puissance jusqu'en 1794; mais dans cette période elle fut temporairement conquise par Louis XV, de 1745 à 1748; elle vit éclater la révolution brabançonne, 17891790; et elle eut à subir la première invasion des Français en 1792.
La belle victoire de Fleurus, en 1792, rendit à ces derniers la Belgique, qui fut réunie à la république, ainsi que l'évêché de Liège et la principauté de Stavelot. Fraction de 1 empire français, puis annexée aux Provinces-Unies pour former les Pays-Bas, la Belgique est devenue, en septembre 1830, un Etat distinct, sur lequel , en 1831, le prince Léopold de Saxe-Cobourg a été appelé a régner par le congrès national.
DIVISIONS POLITIQUES. — Le royaume de Belgique est divisé en 9 provinces subdivisées en 49 arrondissements administratifs, et 2,504 communes. Les 9 provinces sont : le Brabant méridional ou Brabant belge, la province d'Anvers, la Flandre orientale, la Flandre occidentale, le Hainaut, la province de Liège, la province de Namur, le Limbourg et le Luxembourg belges.
PROVINCE D'ANVERS. — La province d'Anvers portait sous la domination française le nom de département des Deux-Nèthes et s'est formée du marquisat d'Anvers, ancienne annexe du duché de Brabant, de la seigneurie de Malines et de quelques parcelles d'autres territoires. On y distingue deux régions bien différentes : l'une fertile, populeuse, formant en quelque sorte un demi-cercle dont l'arc est tracé par la position des villes d'Anvers, de Lierre et de Malines, et dont l'Escaut simule la corde ; l'autre connue sous le nom de Campine et couverte presque en son entier de bruyères.
Cette province est divisée en trois arrondissements : Anvers, Mali nes et Turnhout.
Sur la rive droite de l'Escaut, Anvers, en flamand Antwerpen, paraît devoir son nom à deux mots flamands, aen'twelf, qui signifient au quai, parce que dès la plus haute antiquité cette ville avait un quai destiné au débarquement des navires. Dans les anciens monuments historiques elle est appelée Andoverpia, Anturpia, Andoverpum, etc. On croit qu'elle était la cité des Ambivarites, peuple dont parle César; les lois saliques paraissent en faire mention sous les noms d'Aubunerbo et d'Andrepus; mais ce qu'il y a de certain, c'est qu'il en est question dans des actes du septième siècle qui lui donnent le titre de castrum, expression qui signifiait déjà, non pas un château, mais une ville forte : et en effet, c'est en 630 que saint Amand y construisit l'église Saint-Pierre et Saint-Paul. Devenue au huitième siècle le boulevard septentrional des Francs contre les hordes danoises, frisonnes et normandes, elle reçut le titre de marquisat de l'empire, c'est-à-dire Marche frontière. Vers l'an 1124 elle était déjà très-peuplée; en 1201 son enceinte fut agrandie; en 1304 elle "prit de nouveaux développements; en 1306 ses rues furent pavées ; en 1456 l'autorité municipale ordonna que ses maisons, qui jusque-là avaient été bâties en argile, le seraient en pierres on en briques; enfin, au seizième siècle, elle devint une ville régulière, une place commerçante, et elle entra dans la ligue des 32 villes hanséatiques. Devenue après sa réunion à la France, en 1795, chef-lieu du département des Deux-Nèthes, des travaux immenses ordonnés par Napoléon l'élevèrent momentanément au rang des principales villes maritimes de l'empire français. Sa cathédrale est la merveille de la Belgique; c'est l'une des plus belles constructions gothiques de l'Europe : elle a 152 mètres de longueur, 76 de largeur et 109 de hauteur. Ses voûtes sont soutenues par 125 piliers formant 230 arcades. Plusieurs tableaux des grands maîtres de l'école flamande décorent son intérieur : on y admire la fameuse Descente de croix de Rubens ; c'est le chef-d'œuvre de ce grand homme. Des colonnes en marbre de diverses couleurs ornent le chœur, les chapelles et le portail. La grande tour dont elle est surmontée fut commencée en 1422 et terminée en 1517; lorsque l'église fut brûlée, en 1533, il n'y eut de préservés que le chœur et cette tour. Celle-ci a 144 mètres de hauteur. Elle renferme un des plus beaux carillons de la Belgique : il se compose de 42 cloches, bien qu'il y ait 40 autres cloches ordinaires pour carillonner aux fêtes. Montons jusqu'à la plus haute galerie de cette tour pyramidale , et jetons un coup d'œil sur le magnifique spectacle qui s'offre à la vue. On se trouve au centre d'un panorama de 40 kilomètres de rayon; on voit se diriger dans tous les sens les 212 rues de la ville ; on aperçoit l'hôtel de ville, bâti à l'époque dite de la renaissance, mais achevé plus tard dans un autre style, ce qui produit un coup d'œil bizarre auprès des maisons qui bordent la place, et dont l'architecture est plus ancienne, telles que la fameuse maison de la corporation des brasseurs, si élégamment sculptée. La Bourse attire aussi les regards : c'est un parallélogramme dont le cloître intérieur et à jour se fait remarquer par la multiplicité des colonnep qui soutiennent l'édifice, et dont aucune n'a la même forme ni la même sculpture. Cette dissemblance tient à une cause qui mérite d'être rappelée : la Bourse a été fondée par les corporations du commerce, et chacune fit faire un pilier sur un dessin particulier, en n'observant d'autre règle d'uniformité que celle de la hauteur. L'église Saint-Jacques renferme le tombeau de Rubens et son beau tableau de la Sainte Famille, qui fut fait en dix-sept jours , et dont toutes les têtes sont les portraits des membres de sa propre famille. Sur la place de Meer on voit l'hôtel du gouvernement, qui sert encore d'habitation aux gouverneurs, et où Napoléon résida
en 1806. On aperçoit aussi les six portes de la ville, ses quais, les restes de ses chantiers, le magnifique faubourg de Borggerhout; le port, l'une des plus grandioses créations de Napoléon, et destiné à recevoir plus de 100 navires; l'arsenal, d'une étendue considérable, qui fut incendié en 1831 par les Hollandais; enfin la citadelle, une des plus fortes de la Belgique, et qui cependant fut enlevée aux Hollandais, en 1832, par l'armée francaise sous les ordres du maréchal Gérard. L'Escaut, dont la largeur est de 500 mètres à quelque distance du port, donne un aspect magnifique à cette ville, patrie des Teniers, de Van Dyck, de Jordaëns, de la famille de Rubens et d'autres personnages célèbres, tels que le géographe Ortelius et le philologue Jean Gruter.
Anvers possède un athénée ou grand collège, une Académie royale des beaux-arts et une bibliothèque municipale renfermant 15,000 volumes. Cette ville est une des principales stations du chemin de fer du Nord, qui se soude près de Essehen au chemin de fer hollandais.
A 35 kilomètres au nord-est d'Anvers nous voyons Turnhout, bâti à l'endroit où les ducs de Brabant avaient construit un château au milieu d'une forêt. Elevée au rang de cité en 1264, cette ville, dont on porte la population à 15,000 âmes, est célèbre par ses dentelles et ses divers tissus de lin, de chanvre et de laine. Au confluent des deux Nèthes, Lierre, dont on remarque la grande église et l'hôtel de ville, était déjà, en 1212, au nombre des cités belges. Son nom, dit-on, dérive de Ledi, qui signifie flux de la mer.
En remontant le cours de la Dyle, Malines, qui communique avec Bruxelles par un chemin de fer de 16 kilomètres de longueur, est nommée en flamand Mechelen : c'est une ville bien bâtie et peuplée de 26,000 âmes. Son séminaire possède une bibliothèque de 30,000 volumes. Sa plus belle église, celle de Saint-Rombaut, renferme quelques tableaux remarquables. Sa tour a 112 mètres de hauteur. Cette ville existait au neuvième siècle. Son ancien nom est Maghlinia ( maris tinea), c'est-à-dire reflux de la mer. Déchue de la splendeur dont elle a joui longtemps, elle est encore le siège d'un archevêché; mais son importance réelle n'est plus que dans la fabrication de ses dentelles, renommées sous le nom de point de Malines. On y fabrique aussi presque toutes les chaises dont on se sert en Belgique. La station de Malines est le centre du réseau de chemins de fer belges. Au milieu de la station s'élève une colonne milliairc qui n'a rien de monumental. C'est de ce point que se mesure la longueur des diverses lignes ; c'est aussi de ce point que partent les poteaux kilométriques placés le long de chaque route de 500 en 500 mètres. Les environs de Malines forment la partie la plus populeuse et la plus fertile de la province d'Anvers ; on y voit les villages de Wavre Notre-Dame, IVavre Sainte-Catherine et Wavre Saint-Nicolas, qui ont remplacé l'ancienne forêt de W averwald.
Ces cam pagnes, dont l'œil mesure sans obstacle la riche et fertile étendue, n'offrent pas un seul monticule, et ne sont que des prairies alternant avec des champs, des haies et des jardins.
PROVINCE DE FLANDRE ORIENTALE. — La province de Flandre orientale portait sous la domination française le nom de département de l'Escaut. Le sol est en général très-fertile; il est cultivé avec un soin tout particulier. Le morcellement de la propriété, l'emploi judicieux des engrais, l'art avec lequel l'agriculteur varie les assolements suivant la nature du terrain, y produisent de très-riches récoltes.
Presque tous les bois ont disparu, et une grande quantité de terrains vagues , de marais, de bruyères ont été défrichés. La Flandre orientale produit pour le roulage des chevaux excellents, remarquables par leur énorme carrure et très-recherchés; le bétail y est d'une belle espèce, sauf les moutons, auxquels la température humide de la contrée ne semble pas convenir. La province est divisée en six arrondissements : Gand, Alost, Saint-Nicolas, Termonde, Audenarde, Eecloo.
A 18 kilomètres d'Anvers, l'élégante cité de Saint-Nicolas, riche de son commerce de lin, de chanvre, de houblon et de seigle, et de ses fabriques en tous genres, est traversée par une route magnifique. Cette ville de 20,000 âmes renferme une place d'une grande étendue, un hôtel de ville et une église remarquables par leur architecture. A 13 kilomètres au delà, Lokeren, à peu près aussi peuplée, est arrosée par la Durme, qui, canalisée jusqu'aux bouches de l'Escaut, favorise son important commerce en grains, en bestiaux, en toiles et en denrées de toute espece. Ces deux villes sont les principales stations intermédiaires de la ligne d'Anvers à Gand. Termonde ou Delldennollde, c'est-à-dire Bouche de la Dendre, située au confluent de cette rivière et de l'Escaut, passe pour être ancienne : on croit qu'elle existait du temps de Charlemagne.
Sa citadelle ne date que de l'an 1624. Cette petite ville peut inonder ses environs à une grande distance. C'est la station intermédiaire du chemin de fer de l'ouest, entre Malines et Gand.
A 28 kilomètres de celle-ci brillent les clochers de Gand ou de Gent, cette ancienne capitale de la Flandre, qui du temps de
Charles-Quint surpassait en superficie la capitale de la France, Sa forme est triangulaire; l'Escaut, la Lys et les deux petites rivières de la Liève et de la Moère y forment plus de 26 îles réunies par plus de 100 ponts. Cette ville, comme toutes les autres de la Belgique, présente les traces de la domination des Espagnols : un gr-and nombre de maisons rappellent par leur architecture celles de Madrid , ce qui forme un singulier contraste avec la multiplicité de ses canaux, qui la font ressembler à Amsterdam. Des quais magnifiques, de grandes places publiques, des promenades agréables, dans une enceinte murée de 18 kilomètres de circonférence, placent Gand au rang des belles et vastes cités; mais, peu peuplée relativement à son étendue, l'aspect en est monotone et triste; sa population est de près de 100,000 âmes, La citadelle que fit bâtir Cbarles-Quint sur l'emplacement de l'antique abbaye de SaintBavon, pour contenir les habitants, n'existe plus ; le roi Guillaume en a fait construire une autre assez mesquine. La cathédrale, sous l'invocation de saint Bavon, monument de la munificence des comtes de Flandre, est un des plus remarquables de la Belgique.
Il fut consacré en 941. On y admire la belle c haire à prêcher, ouvrage de Dekaus. Il faut surtout porter son attention sur l'église souterraine qui date des temps antérieurs à Charlemagne et qui possède des tombeaux parfaitement conservés de divers personnages du septième siècle. La tour voisine appelle le beffroi, et dont les fondements ont été posés en 1461 et la croix en 1535, porte un carillon célèbre par le nombre de ses cloches. L'hôtel de ville est digne aussi de fixer l'attention : c'est un double bâtiment à deux faces; l'une, qui estdans le style gothique, fut commencée en 1481 ; l'autre date des premières années du septième siècle. I.e palais de l'Université présente une belle façade. Il renferme une bibliothèque de 60,000 volumes et d'environ 600 manuscrits. Les principales places de Gand sont le Marché du vendredi) remarquable par sa grandeur, et le Marché aux grains, près duquel se trouve, au détour d'une rue, un canon en fer forgé d'une dimension extraordinaire ; il a 1 mètre de diamètre et 6 de longueur. On dit que Charles-Quint le fit fondre pour contenir les Gantois. Le Kauter et la Couture sont les deux plus belles promenades. Un zèle éclairé pour les sciences, les arts, la morale et la religion, a contribué à la fondai ion de plusieurs riches établissements dans cette patrie de CJlarlas-Quint, de Jacques Arteveld, qui se rendit célèbre dans les troubles de la Flandre, de l'helléniste Daniel Heinsius, du sculpLeur Delvaux, de l'architecte François Romain, de l'astronome Pibilippe Laensberg, et de l'historien Van der Vynckt. Parmi les établissements les plus utiles, nous citerons l'Université, le jardin botanique, le cabinet de physique et d'histoire naturelle, le musée de peinture., la collection de médailles et d'antiquités, l'Académie des teaux-arts, la société d'agriculture et de botanique, l'hospice des incurables et des aliénés, la maison de correction, et plusieurs associations philanthropiques. On montre, rue des Champs, la maison qu'ocoupa Louis XHII pendant les cent jours ; dans l'OverScttld, le ^cabaret où l'archiduchesse Jeanne mit au jour le prince qui devint célèbre sous le nom de Charles-Quint ; et non loin de l'Université, la maison du fameux brasseur Jacques Arteveld, qui au quatorzième siècle fut le général des Gantois et gagna des batailles sur les comtes de Flandre et les dues de Bourgogne.
On attribue l'origine de Gand à deux châteaux, dont l'un appelé Castrum Ganda lui donna son nom. Elle était déjà de quelque importance au septième siècle; on la voit au onzième siècle, industrieuse et riche., créer son commerce, conquérir ses libertés municipales , et pendant trois siècles prendre part aux intrigues politiques de l'Europe et s'y distinguer souvent comme rebelle. A ses opulents tisseurs de laine succédèrent ces turbulents tisserands qui dictèrent des lois à leurs souverains, aux dues de Bourgogne, comme aux empereurs .eux-mêmes. Sous la république et l'empire, Gand fut pendant NingLans le chef-lieu du département de l'Escaut; aujourd'hui encore elle est l'âme des Flandres par l'activité de son Uubtfiiïe : elle renferme des fabriques de soieries, de Jiapeaux, de dentelles , des raffineries, des tanneries, et plus de 60 manufactures .où l'on lile, tisse, blanchit et imprime le coton. On évalue à-20,000 le nombre des ouvriers employés dans les filatures, blanchisseries et imprimeries jde coton , et à 35,000 celui des tisserands disséminés aux environs et travaillant pour les .mêmes fabriques.
Gand a un graod commerce de consommation de transit et d'expédition. On remarque aux environs de Gand plusieurs bourgs et villes, teterfjue Qostac&er, Haerne, Deynze, Peteghem, Landeghem, Ncuele, Eeclao et Maldeghem surnommée la Loyale.
Sur les cives de la Cendre, à 22 kilomètres au sud-est de Gand, Alast, en flamand Aëlst, est une ville de 1-5,000 âmes qui renferme une belle église dédiée à saint Martin, et un hôtel de ville construit depuis peu d'années et remarquable par son architecture.
Alost paraît devoir-son oriRine à un château que les Goths bâtirent en 411. Elle eal jadis le titre de ville-impériale, parce que la rive droite de l'Escaut, -qui faisait partie de son territoire, relevait juou pas des rois de -France, mais des empereurs. Elle donna le jour jà Koeck, peintre et architecte de Charles-Quint, et à Thierry Martens qui introduisit l'Ai t de l'imprimerie en Belgique-, et dont le tom-
beau, qui porte une épitaphe composée par Érasme , se voit dans l'église Saint-Martin. Alost fait un commerce considérable de grains de houblon et d'huile de colza. Une belle route conduit de cette ville à Audegem, station du chemin de fer de l'ouest près de Termonde.
Comme Alost, c'est à un château bâti en 411 par Alaric que la petite ville d rludenarde doit son origine. Les Flamands la nomment Au-den-aerde. Son hôtel de ville est remarquable par sa belle architecture gothique. Audenarde est la patrie du peintre Brauwer, de l' historien Rap-Saet et de Marguerite de Parme, fille naturelle de Charles-Quint. En 1708, il se livra sous ses murs une bataille dans laquelle les Français, sous les ordres du duc de Bourgogne et du duc de Vendôme, furent forcés de céder à la force numérique de l'armée des confédérés autrichiens, hollandais et anglais, commandés par le prince Eugène et Marlborough. Les Français la.
démantelèrent en 1744. A quelque distance de cette ville, on trouve du côté de Deynze, Huysse (4,500 habitants), Cruyshaulcm (7,000); on y voit le château des comtes de Vandermeercn et le bourg de Nazareth, peuplé de 6,000 âmes.
PROVINCE DE FLANDRE OCCIDENTALE. — La Flandre occidentale, qui s'étend entre la Lys, l'Escaut et la mer du Nord, était autrefois un pays peu fertile, en grande partie couvert de bois et de forêts. C'est à son active population qu'il doit le défrichement de son sol. Cependant, malgré plusieurs siècles de travaux, il reste encore de vastes bruyères au centre de cette province, au sud de Bruges et à l'est d'Ypres. Mais au nord de la première de ces villes, les villages sont nombreux et la population très-agglomérée; de ce côté le pays présente l'aspect d'une immense plaine, où l'œil n'aperçoit au loin que des terrains labourés, des habitations, des clochers. Dans la direction de Furnes le terrain est plus marécageux, et l'on y rencontre de vastes prairies où paissent de nombreux bestiaux. Les cantons limitrophes de la Lys sont les plus importants et les mieux cultivés. Sous le gouvernement aulriihien cette province s'appelait la West-Flandre; sous la domination française elle a porté le nom de département de la Lys ; elle se divise en huit arrondissements, savoir : Bruges, Ypres, Courtrai, Thielt, Roulers, Furnes, Ostende et Dixmude.
Bruges, qui fut le chef-lieu du département français de la Lys, et qui est la capitale de la Flandre occidentale, paraît devoir son nom au mot flamand Bruggen (ponts), parce qu'il fallait jadis traverser deux ou trois ponts pour y arriver. C'est une des plus anciennes cités flamandes; il en est fait mention dans une charte du quatrième siècle ; au septième siècle elle avait déjà le titre de ville municipale; dès l'an 867 elle était fortifiée, il serait même possible que quelques parties de ses murailles remontassent à cette époque. Au commencement du treizième sièele elle était le principal entrepôt des villes hanséaiiques et l'une des plus florissantes places de commerce de l'Europe. Ses rues sont larges, mais ses maisons à pignons découpés leur donnent un aspect gothique qui a conservé à cette ville une telle empreinte du caractère flamand, que l'on regrette de n'y plus rencontrer ces sombres figures à chaperons mi-partis, et au coin des rues ces chaînes en fer, barrières matérielles des franchises de Bruges. Le pays d'alentour, qui, sur une étendue de 30 kilomètres, comprend plusieurs villes, bourgs et villages, formait un canton qui porte encore le nom de Francde-Bruges, et qui s'administrait par des coutumes particulières.
Dans l'ancienne salle du Franc-de-Bruges, au palais de justice, on admire de belles sculptures en bois, entre autres une statue de Charles-Quinl, de grandeur naturelle. Cet édifice décore la vaste place du Bourg, sur laquelle on voit aussi l'hôtel de ville, bâtiment gothique riche de sculpture et de souvenirs. Un beau monument du moyen âge est l'église Notre-Dame, qui avait le titre de cathédrale avant 1801, époque à laquelle l'évêché de Bruges fut réuni à celui de Gand ; on y remarque une belle statue de la Vierge par MichelAnge; mais cette église a été considérablement endommagée par un incendie dans ces derniers temps. Le Marché du vendredi est une des trois grandes places de la ville : plusieurs allées d'arbres y forment une promenade agréable. La place du Grand marché est la plus belle ; on y voit le vaste bâtiment des halles , dont la façade surmontée d'une immense tour carrée que l'on aperçoit des bords de la Tamise, et qui possède le plus beau, le plus harmonieux de tous les carillons connus. Sur cette même place, la Halle aux draps, bâtie sur un canal, est soutenue par plusieurs piliers, de sorte que les navires peuvent passer dessous pour traverser du canal d'Ostende dans celui de Gand. Cette ville a donné le jour au mathématicien Simon Stevin, inventeur du calcul décimal; au géomètre Grégoire de Saint-Vincent, au jurisconsulte Damhouder, auteur de plusieurs traités sur la procédure civile et la procédure criminelle ; aux peintres Jean de Bruges, Roger et Stradan, et à Van Berchem, inventeur de l'art de tailler Je diamant. Elle possède une académie des beaux-arts, une société de littérature, un collège royal, une bibliothèque publique de 10,000 volumes, un jardin botanique et un cabinet de physique et d'histoire naturelle. Le bassin du canal peut contenir plus de 100 navires de 4 a 500 tonneaux. Mais après avoir été pendant le moyen âge l'une des villes les plus commer-
çantes de l'Europe, la rivale de Gand et tour à tour son alliée ou son ennemie, fidèle ou rebelle aux comtes de Flandre, qui souvent y résidaient, sa prospérité a toujours été en déclinant. Sa population s'élève cependant encore à 50,000 âmes. On fabrique à Bruges des toiles, des draps, de la dentelle, des étoffes de fil et coton, de laine ; le lin qu'on y emploie est filé dans les villages voisins.
Bruges possède aussi des raffineries de sel et de sucre, des tanneries, des corderies, des poteries, des chapelleries ; on y trouve un chantier pour la construction et le radoub des navires. C'est une principale station de chemin de fer de la ligne de l'ouest. On trouve dans les environs de Bruges Damme, petit bourg de 1,000 habitants , qui a remplacé la puissante ville du même nom ; Blankenbcrge, bourgade de 3,000 âmes, peuplée de pêcheurs; Oudenbourg et Ghislelles, ruinées par les guerres civiles; Maele, Jabbeke et Zedelghem, villages où l'on file le lin qui nous donne les toiles de Flandre si estimées sur nos marchés.
Ostende, ville forte et port de mer à 26 kilomètres de Bruges, est trois à quatre fois moins peuplée. Elle soutint, depuis le 5 juillet 1601 jusqu'au -22 septembre 1604, an siège mémorable à la suite duquel elle se rendit à Ambraise$ptQpla, qui commandait l'armée espagnole. Cette ville date eu douzième siècle ; son nom signifie extrémité orientale. bile était menacée de voir son commerce tout à fait ruiné; déjà son orb encombré par lç sable et les galets, ne recevait plus les gros bâtiments qu'à la faveur de la marée montante, lorsqu'en 183E il fut complétement nettoyé et garanti contre le renouvellement du danger qui le menaçait, par une écluse de chasse qui forme la poiiç dp mer. Depuis 1830, l'établissement de services réguliers de bateaux à vapeur entre Ostende et Londres, la construction du chemin de fer et l'étahlissegient de bains de met de plus en plus fréquentés, lui ont donné une vie nouvelle. Sa population s'elève aujourd'hui à U,OOO habitants, parmi lesquels plus de 2,000 "sont Anglais. La pèche de la morue et du hareng y est lrès-Idive et ses huîtrières sont renommées. La ville est en général bien bâtie et ses rues sont régulières, mais ses monuments ont peu d'importance, si l'on en excepte l'hôtel de ville, Les fortifications de la ville sont très-considérables et pourraient soutenir un long siège. Le plus grand agrément d'Ostende est la promenade sur la digue de mer, où l'on jouit dans les beaux jours d'un spectacle magnifique et d'ne deuce brise. Sa station est la dernière de la ligne de l'oest. Une chaussée conduit à Niettport, petite ville maritime de 3,000 âmes, située sur le canal de Dunkerque à Ostende et à Bruges.
A 36 kilomètres au sud de Bruges, Ypres, sur le bord de l' Yperlée, était jadis sa rivale en industrie et en commerce; sa population était alors de 120,000 âmes; elle en compte à peine 18,000 aujourd'hui. Elle fabrique encore des toiles, des étoffes de laine et de la dentelle; mais elle n'est réellement importante que par ses fortifications rétablies depuis la paix. Parmi les édifices on doit citer l'hôtel de ville, appelé communément les halles, beau monument du quatorzième siècle, surmonté d'une haute tour dans laquelle on conserve les archives. L'église Saint-Martin est aussi fort ancienne; elle a perdu le titre de cathédrale depuis 1801 que le diocèse d'Y pres a été réuni à celui de Gand. A peu de distance d'Ypres, à mi-chemin entre cette ville et la frontière de France, est la ville de Poperinghe, située sur le Schipvaert, affluent de l'Y sère.
Elle est bien bâtie et commerçante. Sa population est de Il à 12,000 âmes; la principale richesse de son fertile territoire est le houblon renommé qu'on y récolte. Elle possède trois églises remarquables par leur architecture gothique. C'est la patrie de l'historien Pierre d'Oudegherst, mort en 1570.
Si nous voulons voir une ville industrieuse, il faut nous diriger sur Courtray, que la Lys divise en deux quartiers à peu près égaux ; ses belles toiles, son linge de table et ses dentelles sont l'aliment de son commerce, qui est activé par la position de la ville sur le chemin de fer de Lille à Gand. Il s'y tient tous les ans deux foires considérables. Cortryk, son nom flamand, vient de celui de Cortoriacum, ville gauloise dont elle occupe sans doute l'emplacement; elle fut plusieurs fois prise et reprise par les Français. On y remarque l'hôtel de ville, édifice d'une belle architecture dans le style gothique, mais que déparent des restaurations de mauvais goût.
On y trouve une bibliothèque de 12,000 volumes. Dans l'église Notre-Dame, bâtie par Baudouin, comte de Flandre, qui fut empereur de Constantinople, un Jésus-Christ crucifié entre deux larrons est regardé comme une des plus belles œuvres de Van Dyck.
Ses environs sont fameux dans l'histoire par un grand nombre de batailles; en 1302, l'armée française perdit contre les Flamands celle que l'on appela la bataille des éperons, parce que les ennemis trouvèrent sur le terrain plus de 4,000 éperons dorés. En 1382, Charles VI vengea cette défaite par la victoire de Rosebecke, qui fit éprouver une perte de 40,000 hommes aux Flamands; en 1794, une armée de jeunes Français y battit deux fois les vieilles bandes autrichiennes soutenues par les Anglais et les Hanovriens.
Les autres villes de ta Flandre occidentale sont de peu d'importance. Thielt est la patrie du fameux Olivier le Dain, surnommé le Diable, qui fut barbier, puis ministre de Louis XI, et qui fut pendu
sous le règne de Charles VIII; Thorout passe pour devoir son nom au dieu Thor, à qui l'on rendait un culte dans les forêts qui entouraient cette ville, dont on fait remonter l'origine au delà de notre ère; Furnes, en flamand Veuren, possède un hôtel de ville d'une architecture gothique remarquable, et fait un commerce assez important en chevaux et en bestiaux ; Dixmude est célèbre par la bonté de son beurre , dont la vente l'enrichit ; enfin Roulers ou Rousselaers, ville de 10,000 âmes, c'est-à-dire environ deux fois plus peuplée que la plupart des cités de second ordre que nous venons de nommer, fait un grand commerce de grains et possède des fabriques de toiles.
PROVINCE DE hAINAUT. — La province de Hainaut, formée du Tournaisis, de la partie septentrionale de l'ancien comté de Hainaut, et de quelques fragments du duché de Brabant, du Namurois et de l'évêché de Liège, prit sous la domination française le nom de département de Jemmapes. Elle forme en quelque sorte le point de jonction entre les immenses plaines de la Flandre et le sol accidenté de l'Ardenne; à mesure que l'on s'avance vers la Sambre, le sol y devient de plus en plus montueux, les productions naturelles y sont très-variées. L'arrondissement de Tournay est le plus fertile et le plus avancé sous le rapport de fagriculture; dans quelques localités LA terre végétale y atteint aile. profondeur de 50 centimètres. L'arrondissement de Mans est en partie aussi bien cultivé que le précédent; en d'autres endroits le terrain y est moins productif, mais il fournit en abondance de la houille et des pierres de taille. Enfin, dans l'arrondissement de Charleroi, le sol, formé de sable mêlé de pierres et d'argile, est en général peu favorable à la culture; mais du moins il offre en grande quantité des houillères, des gîtes de minerai de fer, des carrières de pierre, de marbre, etc., etc. La province est divisée en trois arrondissements : Mons, Tournay, Charleroi.
Sur la rive droite de l'Escaut, le Hainaut comprend plusieurs lieux mémorables dans les fastes de la stratégie. Près de Tournay, Fontenvy rappelle la victoire à laquelle assista Louis XV; la petite ville de Fleurnt est célèbre dans les annales de l'Espagne par la bataille que gagnèrent ses troupes sur MantMd en 16ji. etlLdans la longue série de utes victoires, par celle que livra avec tant de succès, en 1690, le maréchal de Luxembourg à l'armée impériale ; par la journée du 16 juin 1794, dans laquelle Jourdaa défîUes Anglais et les Autrichiens, et fit tomber la Belgique au pouvoir des Français ; enfin par celle qui précéda de deux jours la grande défaite de 1815. Le village de Saint-Denis est célèbre aussi par la trahison du prince d'Orange, depuis roi d'Angleterre, qui, le 14 août 1678, attaqua et battit l'armée française commandée par le maréchal de Luxembourg, après la signature de l'armistice qui venait d'être conclu à Nimègue. Steinkerque vit en 1692 le même général français battre les alliés commandés par Guillaume d'Orange; et la plaine de Jemmapes a été le théâtre de la victoire que Dumonricz remporta sur les Autrichiens le 7 novembre 1792, victoire qui fit donner le nom de ce village au département français dont Mons fut le chef-lieu.
Tournay, à 9 kilomètres de la frontière de France, est partagé par l'Escaut en ville vieille et ville netlre; dans celle-ci un superbe quai planté d'arbres forme la promenade la plus belle et la plus fréquentée de la ville ; les maisons en sont bien bâties, les rues propres et assez droites; l'autre quartier, moins beau, s'élève sur l'emplacement de Tornacum, qui paraît remonter au delà du deuxième siècle, qui servit de résidence aux rois francs, et qui fut érigé en évêché au cinquième siècle. On admire la construction de la cathédrale, dont les quatre clochers noirâtres s'aperçoivent à une distance considérable; l'intérieur est surchargé de sculptures et d'ornements de la plus grande richesse. Elle fut fondée par les chrétiens belges, au temps de Théodore son premier évêque, vers l'an 480. Le tombeau de Childéric Ier fut découvert par hasard, en 1653 , en démolissant une vieille maison à côté de cette église.
Une fouille faite à 2 mètres et demi de profondeur mit à jour un sac de cuir renfermant plus de 100 pièces de monnaies d'or et autant d'argent, le fer d'une hache et celui d'un javelot, une lame d'épée, cinq agrafes, un étui avec un style pour écrire, les charnières de deux tablettes, une petite tête de bœuf émaillée, deux anneaux dont un portant un cachet sur lequel on lisait ces mots : Childerici regis. Ces divers ornements en or étaient accompagnés de plus de 300 petites abeilles en or et en argent, qui paraissaient avoir appartenu à un manteau royal; le tout se trouvait mêlé a des ossements, parmi lesquels on remarquait deux têtes humaines et le s quelette d'un cheval, ce qui servit à confirmer la coutume qu'avaient les Francs de se faire enterrer avec leurs armes, leurs habits, leur cheval de bataille, leurs bijoux les plus précieux, et peut-être quelques dépouilles de leurs ennemis, car 1 une de ces deux têtes était vraisemblablement celle d'un esclave ou d un guerrier vaincu. Tournay, qui pourrait contenir plus de 60,000 àmes, n'en renferme pas la moitié; elle est cependant industrieuse et commerçante; ses tapis, ses toiles, ses camelots et ses porcelaines sont connus dans toute l'Europe. Louis XIV fit raser ses fortifications, mais elles ont été
Paysans belges et artilleurs.
rétablies sur un plan nouveau. La bibliothèque municipale de Tournay est assez considérable; elle se compose de 30,000 volumes.
Cette ville, qu'un embranchement particulier unit à la ligne de Lille à Gand, est la première du HainAt en importance, en population, en activité industrielle, mais la seconde seulement dans l'ordre administratif. Elle est située dans un pays peuplé et fertile.
Dans ses environs on remarque les châteaux de Froyemies, Bumillies et Obigies.
A 6 kilomètres de cette ville, entre les villages de Hollain et de Rongy, on remarque au milieu de la campagne un bloc de grès haut d'environ 5 mètres, large de 3 et épais de 66 centimètres, qui est connu dans le pays sous le nom de pierre Brunehàut; on a fait beaucoup de conjectures sur l'antiquité et le but de ce monument, qui doit être rangé parmi ceux qu'on appelle druidiques ; il offre tous les caractères d'un menhir, et sous ce rapport il est d'autant plus remarquable que ces sortes de monuments sont fort rares en Belgique.
La petite ville de Leuze ne renferme rien d'intéressant qu'une assez belle église dédiée à saint Pierre et à saint Paul. Ath est une place forte dont les remparts furent élevés par ordre de CharlesQuint, reconstruits par Vauban et détruits par Joseph II; mais, depuis 1815, le roi Guillaume y a fait faire des travaux de défense qui la mettent sur un pied respectable. Elle possède un collége qui, depuis l'an 1416 qu'il fut fondé, a toujours joui d'une grande réputation. Son hôtel de ville et l'église Saint-Julien sont de beaux édifices dans le style gothique. Cette ville a vu naître le récollet Louis Hennepin, qui fut missionnaire au Canada et découvrit le ileuve Mississipi. Enghien, qui fut bâtie en 1167, par un seigneur d'Anghien ou d'Ainghin, près d'un château de ce nom, fait le commerce de dentelles, de tapis et de toiles, et n'offre de remarquable que Le château de la famille d'Aremberg, célèbre dans tout le pays par la beauté de ses jardins. Cette petite ville est à 20 kilomètres au nord de Mons , qui mérite quelques détails.
Mons, capitale de la province, est bâtie sur l'emplacement de Castri-locus, où Q. Cicéron commandait une légion de l'armée de
César ; elle garda longtemps le nom de cette station romaine ; mais elle ne prit réellement le titre de ville qu'au septième siècle, époque à laquelle sainte Vaudru, fille du comte Walbert, y fit construire une magnifique abbaye (Monasterium, Monsterium, Mons) dans laquelle elle reçut le voile et le manteau des mains de saint Aubert, évêque de Cambrai. Elle est grande et fortifiée ; mais il existe peu de places fortes qui aient plus souffert des maux inévitables de la guerre. En 1572, Louis de Nassau employa un singulier stratagème pour s'en emparer : il y fit entrer des soldats déguisés en marchands de vin qui conduisaient des charrettes chargées de tonneaux à double enveloppe, dont l'extrémité renfermait du vin et l'intérieur des armes. Après avoir payé les droits, les prétendus marchands de vin égorgèrent les employés de l'octroi ainsi que la garde, et livrèrent les portes à leur chef, qui y entra aux cris de vive la liberté ! plus d'impôts de dixième et de vingtième ! faisant allusion aux contributions exorbitantes dont la ville était frappée par le duc d'Albe. Mons renferme 25,000 habitants; ses fortifications en font une des principales places fortes de la Belgique; on y remarque l'hôtel de ville, édifice gothique surmonté d'une tour, et l'église Sainte-Vaudru, qui n'est pas celle que l'on érigea au septième siècle en l'honneur de cette sainte : elle fut détruite en 1112 par un incendie, et rebâtie en 1148; celle que l'on voit aujourd'hui fut commencée en 1460 et terminée en 1469. Celle de Sainte-Elisabeth est riche d'ornements dans le goût espagnol. La bibliothèque publique mérite d'être citée; elle renferme 12,500 volumes et 300 manuscrits.
La ville de Mons est peu manufacturière et peu commerçante : c'est néanmoins la principale station de la ligne du sud après Bruxelles. Elle possède des salines et quelques savonneries. Elle est située au milieu d'un riche bassin houiller, qui s'étend depuis Quiévrain jusqu'à Modamoelz, se reliant, d'une part, au bassin français d'Anzin et de Valenciennes ; de l'autre, au bassin de Charleroi. Ou y trouvait, en 1838, 69 mines, dont 53 étaient exploitées; les machines à vapeur, au nombre de 193, y représentaient une force de
Armée belge. — Grenadiers.
8,014 ebevmx; le nombre d'ouvriers employés était de 16,896, et la quantité de houille extraite de 1,691,549 tonneaux, représentant ose val earde 15 millions de francs. Les houilles sont de différentes qualités, depuis la maigre que l'on recherche pour certaines usines, jusqu'à la houille grasse ou collante dite de fine forge. Le centre du bassin houiller se trouve sous la montagne dite du Flénu, dans les communes de Jemmapes et de Cuesmes. Les charbonnages de ce canton sont, à ce qu'il paraît, connus depuis une haute antiquité, et ce sont eux qui firent donner à une partie du pays des Nerviens le nom de Forêt Charbonnière (Carbonaria Sylva), qui se perdit vers le dixième siècle. Les principaux d'entre eux se trouvent entre Mons et Saints Chislain, à proximité de la Haine, du canal de Condé et du chemin de fer du midi. Us donnent de l'activité et de la vie aux villages de Cuetmes ( 2,800 hab. ), Quaregnon ( 4,700 ), Jemmape»(5,000),Hornu(4,000), Wastnet (6,000), Pâturages (7,000), FrafIWÍu (9,000) et Dour (6,500 hab.). Ce canton est connu 80U le nom de Borinage. 0 Sur le bord de la Sambre, et sur la ligne de chemin de fer du sud-est, s'élève Charleroi, ville de 7,000 âmes, qui, à la place qu'occupait le village de Chamoi, fut fondée et fortifiée en 1666 en l'honneur du roi d'Espagne Charles II. Ses fortifications plusieurs fois détruites ont été reconstruites depuis 1815. On y compte plusieurs fabriques d'ouvrages en fer et en acier, de. verrerie, de tabac et de canons de fusiL Charleroi est le centre d'un canton où l'industrie est extrêmement active et qui produit en abondance de la touille et du minerai de fer ; les carrières de pierre et de marbre y sont nombreuses, surtout sur les bords de la Sambre. Les charbonnages exploités y étaient en 1838 au nombre de 82, qui occupaient 8,345 ouvriers, et employaient 118 machines à vapeur d'une force totale de 3,197 chevaux; le nombre des hauts fourneaux y était à la même époque de 32. Les principales usines sont celles de Couillet, C hatelineau, Monceau-tur-Sambre, Marchiennes-au-Pont, Mont-turAlarckieuu, etc., etc. Thuin, à quelques myriamètres plus haut, a été longtemps une petite place forte; enfin Beaumont, près de la
frontière de France, possède des scieries de marbre et des forges.
Le village de Vergnies, dans ses environs, est la patrie du musicien Gossec.
PROVINCE DE NAMUR. — La province de Namur, appelée sous la domination française département de Sambre-et-Meuse, a été formée d'un grand nombre de territoires autrefois enclavés les uns dans les autres. Ce morcellement fut un grand obstacle au développement de sa prospérité agricole. Aujourd'hui l'agriculture y a fait de notables progrès par l'augmentation du nombre des voies de communication et par l'établissement de nombreux fours à chaux. Dans l'arrondissement de Namur, les terres sont en général grasses, argileuses et très-productives; dans ceux de Philippevilleet de Dinant, le sol recouvre de grandes masses de calcaire et de schiste argileux; la culture du froment y est presque inconnue ; on la remplace par celle de l'épeautre, et on cultive aussi le seigle, l'orge et l'avoine. Les bois occupent presque le tiers du territoire ; le chêne, le hêtre, le frêne, le bouleau, sont les principales essences que l'on y rencontre. Cette province produit d excellents chevaux de trait et des moutons d'une bonne qualité ; le bétail y est trèsestimé. Les mines de houille, de fer et de cuivre, les carrières de marbre y sont abondantes. La province se divise en trois arrondissements : Namur, Dinant et Philippeville.
A 27 kilomètres au delà du cours de la Sambre, que l'on traverse près du bourg de Merbet-lès-Château, on aperçoit sur une colline la petite place forte de Philippeville, dans la province de Namur. C'était en 1555 l'ancien village de Corbigny; Marie, reine de Hongrie et sœur de Charles-Quint, le fit fortifier à cette époque et lui donna le nom de Philippe II, son neveu. On n'y compte que 1,200 habitants. A 9 kilomètres au sud-ouest, la place de Martinbourg, moins importante encore, a été bâtie par la même princesse, qui lui donna son nom. Ses fortifications ont été reparées et augmentées en 1818. Sur la rive droite de la Meuse, Dinant est défendu par une bonne citadelle. Ce chef-lieu d'arrondissement est
une des plus anciennes villes de la Belgique. Quelques auteurs prétendent que son nom lui vient d'un temple de Diane que les Romains y avaient construit à la place de celui de la déesse Arduenna, à laquelle les Attuatici immolaient des victimes humaines. Suivant l'historien Fisen, une caverne creusée au milieu d'un rocher qui domine la ville était le lieu où la divinité païenne rendait ses oracles. Cette caverne existe encore dans le jardin de l'ancien refuge de Florenne : on y voit des traces d'antique construction. Au quatrième siècle saint Materne y bâtit une église. Elle est citée comme ville au sixième et au septième siècle sous le nom de Dionantis; mais il n'existe aucun monument antérieur à la fin du quinzième siècle, parce que les habitants ayant pris parti pour Louis XI contre le duc de Bourgogne Philippe le Bon, et ayant pendu en effigie le comte de Charolais, fils de ce prince, et fait mettre au gibet un plénipotentiaire chargé de les engager 4 se soumettre, le comte de Charolais y entra le 23 août 1466, livra la ville au pillage pendant trois jours, y fit mettre le feu, fit jeter dans la Meuse 800 Dinantais liés deux à deux, dos contre dQij, fit transporter à Liège le reste de la population, et raser toutes les constructions qui avaient résisté au* flammes. Ce ne fut qu'en 1469 que les chanoines de Dinant obtinrent la permission de rebâtir leur église, ainsi qu'une douzaine de maisons qui existent encore, et dont le nombre s'augmenta par la suite jusqu'à pouvoir compter 5,000 habitants qui forment sa population actuelle.
Une route aussi belle qu'elle est pittoresque borde la rive gauche de la Meuse et conduit à Namur, bâti à l'embouchure de la Sambre.
Cette place, déjà bien forte lorsqu'elle fut emportée par Louis XIV, est devenue presque imprenable par les travaux que le roi des Pays-Bas a faits à la citadelle, qui était connue au temps des mairei d'Austrasie sous le nom de Namon, et qui dans la chronique de Sigehart au septième siècle, était appelée Narnmum castru,m.
Sa situation, au confluent de deux grands cours d'eau, favorise son commerce et son industrie : la fabrication de la coutellerie et de la poterie commune, ainsi que la préparation des cuirs, y occupent un grand nombre de bras ; les usines où l'on fond le fer et le cuivre sont ses principaux établissements industriels; enfin la taille et la vente de ses marbres noirs forment une branche importante de ses exploitations les plus lucratives. Ses édifices les plus remarquables sont l'église cathédrale de Saint-Aubin, construite sur le modèle de Saint-Pierre de Rome, celle de Saint-Loup, et l'hôtel de ville bâti en 1827. Ses deux principales bibliothèques sont celle de I4 ville, qui a 15,000 volumes, et celle du séminaire, qui en a 11,000. Environ 24,000 individus peuplent cette patrie du peintre Jean-Baptiste Juppin. Namur est une des plus importantes stations de la ligne du sud-est. Le faubourg de la Plante, le long de la Meuse, vers Bouvignes, et ses jolies promenades; Jambes, du côté du Luxembourg, où l'on trouve la pierre dite du Diable , monument celtique composé d'une énorme pierre soutenue par quatre autres; du côté du nord, Bouge, où campa Charles- Quint en 1554, et où mourut le fils naturel de ce prince, don Juan d'Autriche, en 1578 ; Védrin, remarquable par sa mine de plomb, découverte en 1610; et enfin l'ermitage taillé dans le rocher dit des Grands-Malades : voilà ce qu'offrent de plus curieux les environs immédiats de Namur.
Rien de plus enchanteur que le spectacle qu'offre la route de Namur à Liège sur les bords de la Meuse : ici vous voyez le fleuve resserré entre des plateaux escarpés couronnés par des forêts touffues ; là son lit s'élargit, sa pente devient plus rapide, le terrain s'abaisse, et ses flots se pressent avec rapidité ; bientôt des prairies s'étendent sur ses rives ; il y promène lentement ses larges contours, comme pour jouir plus longtemps de la fraîcheur d'une belle verdure. Au nord de Namur, on monte par une route qui, vers l'an 1828, a été ouverte à travers des bois épais et sur le flanc d'une colline escarpée, et d'un abord jusqu'alors difficile; du sommet, la ville et le confluent de la Sambre et de la Meuse apparaissent d'un côté dans toute leur beauté ; de l'autre, on descend dans les magnifiques plaines du Brabant méridional.
PROVINCE DE BRABANT. — La province de Brabant, appelée département de la Dyle sous la domination française, est composée de l'ancien duché de ce nom. La partie occidentale offre une bonne culture et un terroir riche; daus l'arrondissement de Louvain on trouve beaucoup de bruyères. L'agriculture y a fait de grands progrès ; les bois , qui occupent un septième du territoire, y sont d'un bon rapport; les prairies nourrissent une grande quantité de bestiaux, La province est littéralement couverte de routes; le roulage, la navigation, y sont très-actifs; elle emprunte une grande importance à sa situation centrale et à la possession de la ville de Bruxelles. Elle est divisée en trois arrondissements : Bruxelles, Louvain et Nivelles.
La première ville que nous traverserons est Nivelles, jadis fort importante. Au commencement du treizième siècle, elle était entourée de murailles; elle a 3 faubourgs , 5 églises et un hôpital. Il y a 40 ans, elle était célèbre par une abbaye de chanoinesses qui le soir quittaient l'habit religieux pour jouir des distractions de la
vie mondaine ; leur abbesse prenait le titre de princesse de Nivelles.
La tour de l'horloge porte à son sommet un homme en fer qui frappe les demi-heures avec un marteau, figure appelée dans le pays Jean de Aivelles. Ce n'est cependant point à ce sonneur qu'il faut attribuer un proverbe connu. D'après les recherches de plusieurs historiens, Jean Il de Montmorency, père de Jean, seigneur de Nivelles, et de Louis , baron de Fosseux, épousa en secondes noces Marguerite d'Orgemont; les deux jeunes gens, qui n'avaient point à se louer de la belle-mère, se retirèrent à la cour du comte de Flandre, et Louis devint la tige des Montmorency-Fosseux. Leur père les somma vainement de revenir; sur leur refus, il les traita de chiens et les déshérita. La sommation avait été faite à l'alné, Jean de Nivelles, ce qui donna lieu au dicton populaire : Il ressemble au chien de Jean de Mivellcs, qui s'enfuit quand on l'appelle. Cette ville a 8,000 habitants ; elle est la patrie du musicien Jean le Teinturier, qui au quinzième siècle donna à la musique une forme nouvelle.
L'origine de Bruxelles ou Brusicl date du huitième siècle. Saint Geri, évèque d'Arras et de Cambrai, fonda une chapelle dans une petite He formée par la Senne, et cette île, qui n'était qu'un marécage (en flamand breecksel), donna son nom au bourg qui, avec le château du Borgval, devint le bourg de Bruxelles, que sa position agréable fit choisir pour résidence aux ducs de bassa Lorraine. Les comtes de Louvain, devenus ducs de Brabant, en firent une ville importante qui s'accrut encore sous les gouvernements espagnol et autrichien. Joseph II transforma ses anciennes fortifications en une belle promenade. C'était une ville entourée d'une simple muraille, lorsque, du rang de capitale des Pays-Bas autrichiens, elle descendit en 1794 à celui de chef-lieu du département français de la Dyle.
Elle est bâtie sur un terrain inégal, et ses rues sont généralement escarpées. Sa partie basse, la moins saine et la moins régulière, renferme beaucoup de maisons dans Je goût de la.. renaissance.
Les habitations sont éclatantes de blancheur; on les peint tous les ans au printemps. On compte dans cette ville 290 rues, 13,000 maisons, 27 ponts et 8 places publiques; la plus belle est la Place-Royale, dont l'enceinte quadrangulaire est formée par le beau portail de l'église Saint-Jacques-sur-Caudemberg, et par 8 hôtels à l'italienne d'un goût exquis, formant deux par deux les quatre faces des côtés. La GramJe-Place offre un aspect tout différent. Les constructions qui l'entourent sont des divers genres d'architecture espagnol, flamand et gothique ; la principale est l'hôtel de ville, bâtiment flanqué de 5 tourelles hexagones et surmonté par un beffroi haut de 120 mètres, couronné par une statue de saint Michel en cuivre doré, de plus de 5 mètres de proportion, et tournant sur un pivot au moindre vent. La construction de cette tour est de l'an 1445. La Grande place du Sablon est ornée d'une belle fontaine en marbre blanc, représentant Minerve assise, qui tient les portraits de l'empereur François Ier et de Marie-Thérèse. Cette fontaine est l'ouvrage de Berger, qui l'exécuta en 1751, d'après un legs de Thomas Bruce, comte d'Aylesbury, qui avait séjourné 40 ans à Bruxelles. La place Saint-Michel n'est pas d'une grande étendue, mais elle est plantée d'arbres et entourée de bâtiments d'une élégante architecture. C'est sous ces allées qu'ont été inhumées les victimes de la révolution de 1830; au centre s'élève le monument que la nation a fait ériger en leur mémoire. Sur celle de la Monnaie, Jont la plupart des constructions sont remarquables, on distingue le grand théâtre royal et l'hôtel des monnaies, bâtiment simple et imposant, présentant une façade surmontée d'un étage et d'un attique. Sur le monticule appelé Molenberg, dans la partie septentrionale de la ville, l'antique église Saint-Michel et Sainte-Gudule étale son imposante façade gothique ; on y monte par un escalier composé de 36 marches. La sculpture de sa chaire en bois est digne de fixer l'attention , c'est l'ouvrage de Verbruggen.
Dans celles de Saint-Nicolas et de Notre-Dame-des-Victoires-auxSablons, on remarque des tableaux précieux et de nombreuses reliques. La ville est arrosée par une trentaine de fontaines, presque toutes embellies de sculptures, et alimentées par les eaux d'un petit lac situé à 1,500 mètres de ses murs dans la direction de l'orient.
Aucune ne jouit de la réputation populaire du Mannekenpiss, enfant en bronze, dont le nom exprime par quelle voie il jette un indécent filet d'eau. Cette statue, qui fut coulée en 1648 par le célèbre sculpteur Duquesnoy, en a remplacé une dont l'origine remonte peutêtre au douzième siècle; elle porte chez le peuple le titre du plus ancien bourgeois de Bruxelles. Elle a été dotée par tous les souverains qui ont voulu s'attirer la bienveillance des Bruxellois; elle jouit de 300 livres de rente, fruit de diverses fondations. Dans les fêtes, le perruquier, son voisin, qui est son homme d'affaires, la revêt d'un habit plus ou moins riche ; il l'affuble ou du coslume de la garde civique, ou de l'épée donnée par Frédéric, ou du cordon rouge dont le décora Louis XV. , , Nous n'avons point encore nomme tous les edifices de cette ville, tels que le Palais de la Nation, où s'assemblent le sénat et les représentants; le nouveau Palais'de Justice celui du roi, construit depuis peu d'années, et surtout le magnifique palais bati par le prince d' Orange, et dont il n'a pu jouir que pendant deux années.
La capitale de la Belgique est, dans une circonférence de 10 kI-
lomètres, comme une réunion de plusieurs petites cités qui diffèrent par leur langage, leurs occupations et leurs mœurs. Le quartier du Parc est habité par la noblesse et les riches banquiers; c'est aussi celui que choisissent de prédilection les nombreux étrangers.
Vers le sud-est, une population active et rusée, mais peu nombreuse et composée de Wallons, se distingue par sa physionomie et son langage. La ville basse est presque exclusivement peuplée de Flamands , attachés à leur idiome et à leurs anciennes coutumes. Le quartier situé entre ce dernier et celui du Parc est le centre du commerce et des plaisirs : là demeurent des bijoutiers, des modistes et tous les industriels qui trafiquent sur le luxe des gens riches. La rue de la Madeleine, mon tueuse et sale, mais flanquée de maisons curieuses par leurs pignons bizarrement sculptés et souvent dorés, est le point de réunion des plus beaux magasins. Les juifs n'habitent pas, comme à Amsterdam, un quartier séparé : les plus pauvres se concentrent dans les rues les plus sales, et les opulents se répandent dans le reste de la ville. L'accroissement que prennent certaines parties prouve que l'industrie et le commerce y sont en- core florissants, bien que le nombre des manufactures ait diminué depuis 1830. Un magnifique hospice des vieillards et des établissements de bienfaisance pour les orphelins, les aliénés, les malades et les aveugles, y sont entretenus soigneusement. Dans aucune ville les secours aux pauvres ne sont mieux distribués ni plus considérables : les indigents secourus en hiver sont au nombre de 25,000.
La population totale de Bruxelles s'élève aujourd'hui à 246,314 habitants, y compris les faubourgs.
Un grand nombre d'établissements relatifs aux sciences, aux arts et aux lettres, donnent à cette capitale un autre genre d'importance.
Nous citerons l'Académie des sciences et belles-lettres, la Société royale des beaux-arts; celle de Concordia, où l'on s'occupe de recherches sur la littérature nationale; celle de Botanique, celle qui a pour but l'instruction primaire et populaire; Y Université libre, fondée au moyen de souscriptions; et Y Athénée, espèce de collége royal. Dans le palais des anciens gouverneurs généraux se trouvent la bibliothèque de la ville, contenant 150,000 volumes, et la belle bibliothèque royale, dite des ducs de Bourgogne, conservée avec soin, et qui se compose de 70,000 volumes et de 25.000 manuscrits; les cabinets de physique et d'histoire naturelle, le musée d'industrie; enfin une collection de plus de 200 tableaux, parmi lesquels on remarque une précieuse suite de tableaux antérieurs aux. beaux temps de l'école flamande. Nous devons encore citer le jardin botanique, dont les serres sont d'une magnificence unique, et qui renferme des plantes d'une grande rareté ; il orne le faubourg de Schaerbeck, au nord de la ville.
Le duc d'Aremberg, le comte de Jlobiarjo et le comte de Beaufort possèdent aussi du galeries de tableaux précieux, et Mlf. Vandermaelen une riche collection scientifique et un établissement géographique important.
Bruxelles compte parmi ses enfants Jean Boch ou Bochius, dont les poésies latines rappellent souvent les beautés antiques des grande maîtres ; de Falier et le prince de Ligne, écrivains distingués ; MiræulI Pontanm, Cartias, Nény et Hogard, biographes et historiens estimés; Van Helmont, Spigelius et Vésale, connus dans les annales de la médecine. La peinture doit à Bruxelles les deux Champagne , Van Orley et Vander Meulen ; la gravure, les deux Sadeler; et la sculpture, Buyster, Godechasles et Duquesnoy.
Le Bruxellois aime à se montrer, avec un faste qui souvent dépasse ses moyens pécuniaires, dans les réunions brillantes et surtout dans d'élégants équipages, sur les boulevards qui entourent la ville, et sur l'allée verte, délicieuse avenue plantée d'arbres séculaires et située entre le canal qui joint celui de Charleroi au Rupel, et le chemin de fer dont le mouvement vient embellir cette promenade couverte de chevaux et de voitures.
Le commerce de Bruxelles rivalise avec celui des plus grandes capitales; de riches magasins, où le luxe des décors le dispute à l'élégance, y étalent les productions de tous les pays.
Un grand nombre de manufactures importantes fournissent aussi la plupart des objets de nécessité ou de luxe que le commerce met en circulation. On connaît la finesse et la beauté des dentelles de Bruxelles ; la ville possède des fabriques de savon, d'amidon, de vitriol ; des distilleries, des brasseries dont le produit est renommé.
Lefaro de Bruxelles a une grande réputation ; l'art typographique y est porté à un assez haut degré de perfection ; mais il a trop rarement, jusqu'à présent du moins, eu l'occasion de s'appliquer à des œuvres indigènes. La carrosserie y jouit à juste titre d'une grande renommée. Ses produits réunissent l'élégance de la forme à la solidité de la construction.
Située à 16 kilomètres au sud de Malincs, à laquelle elle se rattache par le chemin de fer du sud, Bruxelles est en communication rapide avec toutes les grandes villes de la Belgique, et avec Paris et Les grandes villes de France par le chemin de fer du nord.
La dernière station de la ligne du sud est à Quiévrain, sur la frontière, et de là à Valenciennes il n'y a que 13 kilomètres.
Le plus beju des faubourgs de Bruxelles est celui de Schaerbeek, près de la porte de ce nom ; il compte plus de 12,000 âmes, et au
commencement du siècle on y aurait à peine trouvé deux ou trois chaumières. Là se trouvent la station du chemin de fer du nord, le jardin botanique et l'école de commerce et d'industrie. Le faubourg de Louvain ou de Saint-Josse-ten-Noode, aussi populeux (10 à 12,000 âmes), plus ancien, mais moins régulier et moins somptueusement décoré, offre de belles promenades. Sur la hauteur voisine est le champ des courses et le cimetière Sainte-Gudule, Le quartier Léopold est orné d'hôtels somptueux, il unit le faubourg d'Etterbeek (3,000 hab.) à la ville. Le faubourg d'Ixelles, situé hors de la porte de Namur, est habité par des fonctionnaires et des artistes, des bourgeois paisibles qui veulent fuir les bruits de la ville. Saint-Gilles est un des plus anciens faubourgs. Dans son voisinage est le quartier Louise, de récente création. Il n'y a qu'une distance peu considérable de là à Forit, village de 1,200 habitants, où l'on rencontre tour à tour des bois, de belles maisons de campagne, de vastes prairies, des hauteurs d'où l'œil embrasse un immense horizon.
Le bourg d'Anderleclu, peuplé de 5 à 6,000 âmes, contient un grand nombre de belles habitations ; son église est un bel édifice du quinzième siècle. Le hameau de Cureghem, situé vers la ville le long de la chaussée de Bruxelles à Mons, comprend plusieurs grandes fabriques et l'école vétérinaire. Les prairies environnantes, fréquemment inondées par la Senne, fournissent un beurre renommé.
Molenbeek, hors de la porte de Flandre, est de tous les faubourgs celui où règne le plus de mouvement industriel. Sa population est de 10,000 âmes. On y voit le bel établissement géographique de M. Vandermaelell.
Laeken est une réunion de maisons de campagne. Sur la hauteur de Schoonenberg, c'est-à-dire Beaumont, au haut de la côte appelée Uonderberg ou montagne du Tonnerre, s'élève le château de Laeken, résidence d'été de la cour; il a été bâti de 1782 à 1784. Une terrasse magnifique, bordée des deux côtés par des bosquets touffus, traversée dans son milieu par un vaste étang, permet de jouir d'une vue admirable sur la Senne, le canal de Willebroeck et la capitale. Au sud de Bruxelles s'étend la belle forêt de Soignes; plusieurs chaussées la coupent en tous sens; des villages de récente création s'accroissent chaque jour de ses débris. Elle est riche en souvenirs du passé. Audergltem, sur la route de Wavre à Tervueren, avait un beau couvent de dominicains; Rougle-Cloître, situé entre deux vastes étangs , dans une vallée dominée par des côtes ombragées, était un couvent de chanoines réguliers de l'ordre de saint Augustin, dont les religieux se distinguèrent par leur savoir; une teinturerie occupe aujourd'hui leur asile. Au hameau de Trois-Fonlaines il reste encore quelques ruines de la tour dans laquelle on enfermait les braconniers et les maraudeurs. A Boitsfort était la vénerie des ducs de Brabant. Aujourd'hui meutes et gibier ont disparu à la fois ; on ne trouve plus dans la 'forêt ni loups, ni cerfs, ni daims , ni chevreuils. La forêt, jadis très-étendue, ne comprend guère plus de 5,000 hectares. Sur la lisière est situé Tervueren, ancien séjour des rois des Pays-Bas, converti aujourd'hui en haras.
<■ Le village de Waterloo, où s'est livré la plus décisive bataille des temps modernes, est situé au sud de la forêt de Soignes. L'église, construction du dix-septième siècle, renferme quelques tombeaux d'officiers morts dans la journée du 18 juin 1815. Au hameau de Mont-Saint-Jean, prolongement et dépendance de Waterloo, la route de Bruxelles à Charleroi se bifurque, et un embranchement se dirige vers Nivelles. Vers la droite est le bourg de Braine l'Alleud, ainsi que le château ruiné et le parc de Hougoumont, qui fut défendu avec intrépidité par les alliés. Entre les routes de Nivelles et de Charleroi on remarque le monument élevé par le gouvernement des Pays-Bas en mémoire de la bataille ; c'est une montagne artificielle figurant un cône immense et surmontée d'un lion colossal en fer de fonte. Le long de la seconde des chaussées on trouve successivement la ferme de la HAIE-SAINTE, près de laquelle eurent lieu les charges les plus sanglantes; le monument des Prussiens; la ferme de la Belle Alliance, où se rencontrèrent le duc de Wellington et le prince Blücher; enfin celle dite du Calliou, où Napoléon eut son quartier. La plaine est bornée à l'est par un canton montueux entrecoupé de forts ravins; c'est par là que les troupes prussiennes débouchèrent, le soir du 18 juin, et décidèrent la victoire en attaquant en flanc l'armée française qui, depuis le milieu de la journée, s'efforçait de déloger les Anglais de leur position.
La victoire complète des alliés amena le terme des guerres qui depuis vingt-trois années ensanglantaient l'Europe (1). »
La ligne septentrionale du chemin de fer parcourt, en quittant Bruxelles, les belles plaines de Monplaisir, et conduit d'abord le voyageur à Vilvorde, ville de 6,000 âmes, dont l'origine et l'ancien nom de Filfurdum remontent au huitième siècle, et qui doit a Joseph Il une maison de détention remarquable par la beauté de ses ateliers. A 16 kilomètres à l'est nous apercevons, sur un canal qui correspond avec Anvers par l'Escaut, Louvain ou Leuwen, qui était déjà connue dans les annales de la Belgique en 884, et qui
(1) Les délices de la Belgique, par Alph. Wautrrs.
possédait au quatorzième siècle 4,000 fabriques de draps, dont une partie des 150,000 ouvriers, forcés de s'expatrier par suite d'une révolte contre Wenceslas, duc de Luxembourg, époux de Jeanne, dernière héritière des ducs de Brabant, allèrent porter leur industrie en Angleterre. Aujourd'hui cette ville n'est plus célèbre que par la fabrication de ses excellentes bières, dont elle exporte annuellement plus de 150,000 tonneaux. Son canal, qui porte de gros bateaux, contribue avec le cours de la Dyle à activer cette branche de commerce. Un établissement qui donne de l'importance à cette ville est l'université, fondée en 1427 par Jean IV, duc de Brabant.
Elle porte le titre d'Université catholique ; sa bibliothèque renferme plus de 100,000 volumes et 250 manuscrits; une autre bibliothèque, celle dite des Jésuites, possède 22,000 volumes. Un autre établissement important que conserve Louvain est l'hôtel des Invalides, qui peut recevoir 2,500 personnes. L'enceinte murée de cette ville, trop vaste pour une population de 30,000 âmes, renferme des jardins et des champs, des rues assez régulières, avec des maisons mal bâties et quelques beaux édifices. Parmi ceux-ci se présente en première ligne l'hôtel de ville, que l'on peut considérer comme le monument du moyen âge le plus pur de style que possède la Belgique. Son extérieur forme un parallélogramme flanqué de 4 tourelles et de 2 demi-tourelles; trois rangées de sculptures représentent des sujets tirés de l'Écriture sainte. Cet hôtel allait tomber en ruines, lorsque l'administration municipale le fit réparer dans le style primitif. L'église Saint-Pierre n'est point indigne de l'attention de l'archéologue, qui regrettera toujours la destruction de la belle flèche qui la surmontait et qu'un violent coup de vent abattit en 1604. On doit remarquer aussi les vastes et somptueux bâtiments de sa vieille université. Parmi les collections particulières on peut citer la magnifique galerie de tableaux de M. Van der Schrick. En un mot, Louvain est une ville déchue, mais qui chaque jour essaye avec succès de recouvrer sa splendeur passée. Cette ville, principale station du chemin de fer de l'est, possède depuis 1836 une université catholique, dont les cours sont suivis chaque année par environ 600 jeunes gens. A 2 kilomètres au sud on voit le magnifique château d'Everlé, appartenant à la famille d'Arenberg.
Aerschot ou Arschot, sur le Démer, à 12 kilomètres de Louvain, est une petite ville autrefois fortifiée, dont l'église paroissiale est fort ancienne. Il ne reste de ses fortications qu'une tour appelée tour d'Aulélien. Diest n'est remarquable que par son église Saint-Sulpice, qui renferme les cendres du fils de Guillaume le Taciturne. C'est la patrie de Nicolas Clénard, savant helléniste, qui passe pour être l'auteur de la première grammaire grecque. Tirlemont, en flamand Thienen, plus peuplée que les deux précédentes, est une ville de 8 à 9,000 âmes, située sur la Geete. Sa population occupe à peine le tiers de son enceinte, qui tombé en ruines. Elle a été l'une des plus importantes cités du Brabant; ses fortifications ont été rasées en 1804. On y remarque la vieille église Saint-Germain, l'hôpital et de belles casernes. On y a ressenti en 1828 d'assez fortes secousses de tremblement de terre. C'est une station du chemin de fer de l'est.
Wavre, qui a 5,000 habitants, est une petite ville florissante, où un violent combat se livra le jour même de la bataille de Waterloo entre un corps prussien et les généraux français Grouchy et Vandamme.
PROVINCE DE LIMBOURG. — Le Limbourg, qui sous la domination française formait le département de la Meuse-Inférieure, a été formé d'un grand nombre de territoires distincts. Tels sont ceux de la Hcsbayc et des villes de Tongres et de Saint-Trond, qui composent aujourd'hui le Limbourg belge. Cet assemblage de petits Etats reçut assez mal à propos le nom de province de Limbourg, puisque l'ancien duché de ce nom est aujourd'hui enclavé dans la province de Liège.
La lisière méridionale de la province est fort peuplée et fertile; mais à mesure que l'on s'avance vers le nord, le sol se couvre de plus en .plus de bruyères, d'étangs, de marais, de tourbières, et les villages deviennent plus rares. L'agriculture y est moins avancée que dans les autres provinces, et l'on y cultive plus de seigle que de froment. Les pâturages y nourrissent une grande quantité de bestiaux. La province se partage en trois arrondissements : Hasselt, Maeseyck et Tongres.
C'est par le chemin de fer de l'est, qui, passant à Tirlemont, conduit a Aix-la-Chapelle, que nous entrerons dans le Limbourg.
Saint-Trond, qu'il faut d'abord traverser, trafique de ses dentelles et du produit de ses forges. Cette ville, de 8,000 habitants, doit son origine à un village appelé Sarchinium, et son nom à un seigneur nommé Trudon, et par corruption Trond. Un embranchement particulier l'unit à la grande ligne de l'est. Nous laissons sur notre gauche le bourg de Looz, dont on aperçoit le magnifique château, et dont les anciens comtes firent souvent trembler par leur audace et leur turbulence les ducs de Brabant et les évêques de Liège; nous arrivons à Hasselt sur le Demer : c'est une petite ville qui possède un grand nombre de distilleries. Depuis 1830 ses fortifications ont été augmentées, et on y a construit des casernes et d'autres bâtiments militaires. Ses environs, plantés aujourd'hui de tabac
et de garance, sont intéressants sous le rapport historique : c'est à l'est d'Hasselt, jusque près de Diest, que les Francs vinrent se fixer en 406 ; le souvenir en est consacré dans la dénomination de Vranckryck (royaume des Francs), qu'a conservée ce territoire, et dans celle de Frans-Broueck ( pâturages des Francs), que l'on donne à l'espace qui s'étend entre Hasselt et Laeck.
Maseyk, sur le bord de la Meuse, doit son nom à ce fleuve.
C'est une petite ville de 5,000 âmes qui fait le commerce de cuirs et de dentelles, et qui vit naître les frères Hubert et Jean Van Eyck, fondateurs de l'école flamande et inventeurs de la peinture à l'huile.
Le surnom de Bruges, donné ordinairement à Jean, vient de ce qu'il faisait son séjour habituel dans cette ville.
Remontons vers les bords du Jaar, où Tongres, en flamand Tongeren, est fréquenté pour ses eaux minérales ferrugineuses. Cette ville était du temps de César une forteresse des Eburones, qui fut appelée Atuatuca Eburorum, et qui devint avec Cologne le chef-lieu de la seconde Germanique sous le nom d'Atuatuca Tungrorum. Les débris de ses remparts romains, dont on voit encore quelques mètrès de tours massives, font penser que la ville avait près de 9 kilomètres de circonférence. Elle fut ruinée en 451 par Attila, et en 881 par les Normands. Sa population est à peine de 5,000 âmes.
Son église dédiée à Notre-Dame est un des plus beaux édifices gothiques de la Belgique.
PROVINCE DE LIÉGE. — La province de Liège, formée de l'ancienne principauté de ce nom, reçut sous la domination française le nom de département de l'Ourthe. Elle se partage en deux parties bien distinctes : l'une, désignée d'ordinaire sous le nom de Hesbaye, est une immense plaine , dont le sol est composé de couches de calcaire recouvertes d'un terrain meuble, éminemment propre à la culture des céréales; l'autre partie, qui comprend les rives de la Meuse et les contrées voisines vers l'est, est hérissée de hauteurs rocheuses et sillonnée de gorges et de ravins. Dans la première de ces parties l'agriculture est en progrès, et on y voit disparaître peu à peu les jachères; dans la seconde région, dont l'épeautre est la principale culture, les habitants dirigent toute leur industrie vers l'élève du bétail, les pâturages, les closeries. Des forêts couvrent le cinquième du-territoire de toute la province; ses mines sont de la plus grande richesse. Au sud-ouest, un canton qui confine à la fois à la Prusse et au Luxembourg, et qu'on appelle les Fanges ou Fagnes, n'est qu'une immense et stérile bruyère, périlleuse à traverser en hiver, sauvage et déserte en été. La province est divisée en quatre arrondissements : Liège, Huy, Verviers, Waremme.
Dans la province de Liège, le premier endroit que nous visiterons est le bourg Hannut, qui se trouve sur la route du chef-lieu. Liège est appelé en flamand Luyck. Cette cité riche, populeuse et active, importante station du chemin de fer de l'est, est une des plus pittoresques que l'on puisse voir. Lorsqu'on l'aperçoit des hauteurs qui l'environnent, ses tourelles antiques, ses vieilles églises, dont les clochers se mêlent aux hautes cheminées des usines, d'où s'échappe une épaisse fumée de houille, produisent un singulier assemblage, qui n'est point sans quelque charme pour l'homme qui aime à trouver aux mêmes lieux les traditions de l'histoire et l'essor de l'industrie. Liège, qui s'embellit tous les jours, est l'entrepôt des marchandises des Pays-Bas, de la France et de l'Allemagne.
L'exploitation des houillères, les forges, la fonderie des canons, la fabrication des armes et plusieurs autres genres d'industrie, occupent une partie de ses habitants, dont le nombre total est de 70,000.
10 faubourgs, 17 ponts, 12 places publiques, 1 arsenal, une bourse, une chambre de commerce, une université fondée en 1817, des écoles et des sociétés savantes, attestent sa richesse, son importance et le zèle d'une partie de ses habitants pour l'instruction et les sciences. La bibliothèque de l'université possède 62,000 volumes et 400 manuscrits ; dans celle du séminaire, on compte plus de 14,000 volumes. Ses fortifications avaient cessé d'être entretenues sous le gouvernement français; mais une vaste citadelle s'est élevée depuis peu d'années sur l'emplacement de l'ancienne : elle a maintenant le rang de place de seconde classe. Ses monuments publics sont peu remarquables, si nous en exceptons sa massive cathédrale, son ancien palais épiscopal, son hôtel de ville et son nouveau théâtre, construit sur le modèle de l'Odéon de Paris. La cathédrale date de l'an 1016 ; le palais de l'évêché est un brillant monument du treizième siècle : ses cloîtres extérieurs sont soutenus par près de 200 énormes piliers donnés par les corporations liégeoises, et présentant la même irrégularité que ceux de la bourse d'Anvers.
La cour de ce palais sert aujourd'hui de marché, et c'est dans l'intérieur que siège la cour d'appel. Dans les rues commerçantes, on voit encore ces vieilles boutiques enfumées où s'ourdissaient les révoltes contre les ducs de Bourgogne et les éveques. Liège a vu naître plusieurs hommes célèbres : les deux Surlet- Chokier, dont l'un fut antiquaire et l'autre jurisconsulte ; les peintre Lairesse, et Barthélemi Flémalle, plus connu sous le nom de Bertholet; les historiens Gilles d'Orval et Foulon; le biographe Chapeauville; le médecin Nysten, et le mécanicien Renkin, constructeur de l'an-
cienne machine de Marly. La mémoire de ces hommes remarquables, et de plusieurs autres que nous pourrions nommer, doit être chère à cette ville, à en juger parje prix qu'elle a paru mettre à posséder le cœur de l'inimitable Grétry, qui naquit aussi à Liège, mais dont la verve musicale s'est illustrée sur la scène française. La ville de Liège est le centre d'un bassin houiller qui s'étend du nord au sud dans toute la largeur de la province, sur les bords de la Meuse, et qui se prolonge en outre dans une partie de la province de Limbourg. Le nombre total des mines comprises dans ce bassin était en 1838 de 115, savoir : soixante sur la rive gauche du fleuve, soixante-cinq sur la rive droite; elles occupaient 10,648 ouvriers et produisaient 740,000 tonneaux de charbon de terre. Les exploitations qui environnent Liège sont les plus importantes, ce sont aussi celles-là qui donnent une houille si grasse qu'on ne peut l'employer aux usages domestiques dans son état naturel; on est obligé de la pétrir avec de l'argile pour en former des boulets qui brûlent avec moins de rapidité. Sur les hauteurs de Saint-Gilles, on ne compte pas moins de 60 à 65 couches superposées.
Aux environs de Liège nous ne devons point oublier le bourg de Seraing, où l'ancien palais d'été des évêques de Liège a été transformé en une magnifique usine fondée par John Cockerill, et qui égale ou même surpasse les plus beaux établissements de ce genre en Angleterre et dans toute l'Europe. C'est là que sont fabriquées les machines à vapeur les plus parfaites. Une multitude de puits pour l'extraction de la houille, des martinets et des hauts fourneaux, dépendent de cette immense fonderie, qui doit sou importance aux encouragements du roi Guillaume. Sous la commune de Seraing sont encore les houillères et hauts fourneaux de YEspérance et la verrerie du Val Saint - Lambert. Le petit village de Herstal ou Heristal fut le berceau de la race carlovingienne.
A 27 kilomètres au nord-ouest de Liège, IVaremme est une trèspetite ville près de laquelle on remarque une antique voie romaine.
A 27 kilomètres au sud-ouest, Huy, peuplée de 8,000 âmes, est remarquable par son industrie, ses papeteries, ses manufactures de zinc, de fer-blanc, de tôle et d'ouvrages en fonte. On y traverse la Meuse sur un beau pont en pierres ; on y voit un château fort, une église d'un beau style, et plusieurs sources minérales, dont une est connue depuis le sixième siècle. S'il faut en croire d'anciennes chroniques, Huy, en latin Huum, aurait été bâtie en 148 par l'empereur Antonin.
Le pays qui s'étend au sud du cours de la Meuse, à partir de Liège et de Huy jusque dans la partie septentrionale de la province de Namur, entre la Meuse et l'Ourthe, porte le nom de Condros, de celui des Condrusi, peuple qui l'occupait avant la conquête romaine.
Près de la frontière prussienne, sur le chemin de fer de l'est, Limbourg, ancienne capitale du duché de ce nom, petite ville de 2,000 âmes, conserve encore son vieux château, bâti sur la crê te d'un monticule imposant. Quelque pittoresques que soient en général les routes de la province de Liège, il est difficile de ne pas mettre sous ce rapport en première ligne celle qui conduit de Liège à Limbourg : elle est presque toujours resserrée entre des coteaux boisés ou tracée au milieu de prairies arrosées par la Vesdre et garnies cà et là de fabriques de draps et d'armes à feu. Verviers, autre station du chemin de fer d'Aix-la-Chapelle, un peu plus bas sur la même rivière, continue à s'enrichir par la vente de ses draps estimés. Sa population est de 26,000 habitants. On traverse cette jolie ville avant d'arriver à Spa, petite cité de 5,000 âmes agréablement située dans une vallée profonde, resserrée entre des plateaux escarpés, et arrosée par la Vèse, affluent de la Vesdre. Elle est célèbre par ses eaux minérales, qui tous les ans, à la fin de mai, sont fréquentées par plus de 1000 étrangers que le plaisir encore plus que le soin de leur santé y attire. La ville ne se compose que d'une rue tortueuse et assez mal bâtie, mais on y trouve un théâtre, une salle de bal et des maisons de réunion. La plus fréquentée de ses sources est celle du Pouxhon, sur la place du Marché : on en exporte annuellement plus de 130,000 bouteilles. Outre cet élément de richesses, elle possède une branche d'industrie qui était autrefois trèsproductive : c'est la fabrication de divers petits objets de goût en bois et en fer-blanc peints et vernissés ; mais ces objets ont beaucoup perdu de leur vogue depuis que la fabrication en a été perfectionnée en Ecosse et à Paris. Spa est entouré de montagnes assez hautes qui s'étendent en ellipse, en montrant cà et là un front rocailleux et aride, et ne laissant qu'une ouverture à l'ouest pour la petite rivière appelée le Weay. On a pratiqué dans une partie des hauteurs des rampes très-douces qui présentent les promenades les plus pittoresques que l'on puisse imaginer.
Au delà de Spa commencent les Fagnes ou Fanges, appelées en flamand Veen, immense territoire marécageux qui comprend une partie de la province de Liège. L'élévation de cette contrée y cause des froids très-vifs et y occasionne en hiver une grande accumulation de neiges.
La dernière petite ville que nous traverserons avant de quitter la province est Stavelot, dont l'ancien nom Stablllaus, disent les chroniques, vient de Stabulum, parce que dans ce lieu jadis désert, où
les bêtes sauvages venaient boire et manger aussi tranquillement que si c'eût été leur étable, saint Remacle fonda en 655 un monastère qui devint l'origine de la ville qu'on appela Stablot ou Stavelot, et qui avec la ville de Malmedi, aujourd'hui sur le territoire prussien , forma un territoire dont l'abbé de Stavelot était souverain avec le titre de prince de l'empire. Il y a dans cette ville de 4,000 âmes des fabriques d'étoffes de laine et des tanneries. 1 PROVINCE DE LUXEMBOURG. — Le Luxembourg belge est en grande partie couvert de terrains incultes et de bois, restes de la forêt des Ardennes. Les environs d'Arlon, de Virton et de Marche sont assez fertiles; mais le reste de la province est peu productif; le sol, de nature argileuse, ne peut être rendu fertile qu'à l'aide d'agents énergiques. Les bois occupent plus d'un quart du territoire, et les prairies artificielles près d'un dixième. Bien que de taille moyenne, le bétail des Ardennes, et surtout le mouton, est trèsestimé; les chevaux y sont petits, mais pleins de force et de feu. Si l' Ardenne est un pays pauvre, ses habitants ont du moins conservé le caractère belliqueux et les mœurs simples de leurs ancêtres.
L'Ardennais est franc, ouvert, hospitalier et laborieux. La province de Luxembourg est divisée en cinq arrondissements, savoir : Arlon, Bastogne, Marche, Neufchâteau et Virton.
Dans la partie de la province de Luxembourg que les traités ont laissée à la Belgique, nous remarquerons d'abord la Roche, petite ville qui doit son nom aux rochers qui la dominent; Marche, autre petite ville qui renferme des usines : on lui donne le nom de Marche-en-Famène, parce qu'elle est dans le pays de Famèlle, contigu au Condros, et qui comme celui-ci doit son nom au peuple antique qui l'habitait, et que César appelle les Pœmani ou Phœmani. Nous trouvons ensuite sur la petite rivière de Wiltz, Bastogne, renommée pour ses excellents jambons : elle est située dans le lieu même où Childebert, roi d'Austrasie, possédait une maison de plaisance appelée Belsonacum, d'où elle tire son nom.
Au pied des montagnes qui séparent le cours de l'Ourthe de celui de la Lesse, nous apercevons Saint-Hubert, ancienne petite ville qui s'appelait Andage ou Andaïn, lorsqu'en 825 on y transporta les reliques du saint que les chasseurs ont choisi pour patron, et qui est regardé comme celui des Ardennes. Sa clfapelle reçoit encore les fréquentes visites des paysans qui veulent mettre et leurs personnes et leurs troupeaux à l'abri de la rage. L'église de cette ville est d'une belle architecture. Neufchâteau, sur la Vierre, fait un commerce assez considérable de grains et de bétail. La position de Bouillon, dans une gorge profonde que la Semoy parcourt en serpentant, lui donne un aspect triste et romantique. L'ancien château , qui domine cette vieille capitale de duché, la défendrait mal contre un ennemi redoutable, parce qu'il est commandé par les monts environnants; mais il est digne de respect: c'est dans ses murs que naquit Godefroi, le héros de la première croisade, qui le reçut de sa mère, Ide, duchesse de la basse Lotharingie, à titre de seigneurie.
Au milieu des forêts, sur une des collines qui donnent naissance à la Semoy, l'on aperçoit la petite ville d'Arlon, qui commerce en fer et en grains ; c'est une antique cité, mentionnée sous le nom d'Orolaunum dans l'Itinéraire d'Antonin. Lorsque l'on fouille son sol, on y trouve souvent des objets antiques. Deux fois, en 1793 et 1794, les Français y mirent les Autrichiens en déroute. Depuis les derniers traités , cette ville, qui n'a que 4,000 habitants, mais qui possède des forges, des distilleries, des fabriques d'étoffes de laine et des manufactures de faïence, a le titre de capitale de la province de Luxembourg.
CARACTÈRE, MOEURS. — Le peuple belge a le sentiment des beaux-arts : les Teniers, Verbruggen, Grétry et tant d'autres artistes, morts ou vivants, que la Belgique a produits, suffiraient pour prouver la supériorité qu'il s'est acquise sous ce rapport. Mais ce qui semblerait attester son origine germanique, c'est que la musique est un besoin impérieux qui règne dans toutes les classes : la plupart des villes ont des sociétés philharmoniques parfaitement organisées, et dans les provinces il existe des concours musicaux fort suivis.
Dans les Flandres, les Bierhaus doivent leur vogue et l'affluence des fumeurs au choix heureux des musiciens qui composent l'orchestre ; plusieurs de ces lieux de réunions populaires prennent le titre de grande harmonie.
Le Belge ne vit point frngalement; l'estaminet ou les clubs prennent une partie de sa journée, et 5 heures de travail sont, pour le fonctionnaire et l'homme d'affaires, une journée bien remplie; les jeunes gens, surtout ceux des hautes classes, sont quelquefois d'une ignorance impardonnable.
Néanmoins il serait injuste d'attribuer à tous les Belges généralement cette nonchalance coupable. Chez le paysan il y a de l'activité et un travail soutenu : chez le Wallon, c'est-à-dire l'habitant du pays de Liège, du Namurois et du Hainaut, il y a du zèle et de la bonne volonté. Les Wallons s'adonnent au commerce et à l'agriculture avec passion; ils sont économes, rangés et industrieux.
Par leur gaieté et leur vivacité ils rappellent le Français, dont ils regrettent de n'être plus les frères; et, il faut le dire, pour le mal-
heur peut-être de la Belgique, ils ont peu de sympathie pour la race flamande. Leur courage est indomptable, et leur foi sacrée.
Il serait à désirer que l'esprit de certains d'entre eux, de ceux de Liège par exemple, fût moins entaché de cette turbulence qui chez eux est un trait caractéristique.
GOUVERNEMENT. — La Belgique forme une monarchie constitutionnelle, héréditaire dans la ligne masculine par ordre de primogéniture. Elle a été déclarée, par le traité qui reconnaît son indépendance, Etat perpétuellement neutre envers tous les autres États. Le chef de l'État porte le titre de toi des Belges, et le prince royal celui de duc de Brabant. La constitution décrétée par le congrès national le 7 février 1831 place le pouvoir dans la nation, qui l'exerce par ses représentants ; elle consacre la liberté individuelle, l'égalité de tous les Belges devant la loi, la liberté des cultes, le droit de s'assembler et de s'associer, la liberté de l'enseignement et de la presse. Les ministres sont responsables; la chambre des représentants les met en accusation, et la cour de cassation les juge. Le pouvoir exécutif appartient au roi, qui a le droit de faire grâce, excepté dans le cas de la condamnation d'un ministre, où il ne peut exercer ce droit que sur la demande de l'une des deux chambres législatives. Le pouvoir législatif est confié au roi et aux deux chambres de la représentation nationale, et chacune de ces trois autorités jouit du droit d'initiative dans la proposition des projets de loi. La représentation nationale comprend le sénat et la chambre des représentants, dont les membres sont élus directement par tous les citoyens âgés de 25 ans et payant un certain cens. î es sénateurs sont élus par province et pour 8 ans; leur nombre est de 48. Les représentants sont élus pour 4 ans et par province; leur nombre , fixé d'après la population de chaque province dans la proportion de 1 sur 40,000, est de 95. Les chambres se réunissent chaque année, elles votent le budget et jouissent du droit d'enquête.
Il y a 6 ministères, non compris le ministère d'état et celui de la maison du roi. Les affaires financières sont soumises au contrôle d'une cour des comptes, composée de 8 membres nommés pour 6 ans par la chambre des représentants.
Le royaume est administrativement divisé en 9 provinces, dont le premier magistrat porte le titre de gouverneur. Dans chaque province il y a un conseil provincial pour régler les intérêts exclusivement provinciaux. Le gouverneur provincial se fait assister dans un grand nombre de cas par la députation permanente, comité de 6 membres, pris parmi les conseillers provinciaux, et élus pour 4 ans. Les subdivisions territoriales administratives sont les arrondissements administratifs, au nombre de 41, et les communes, au nombre de 2,504. L'administrateur de l'arrondissement est le commissaire d'arrondissement, intermédiaire entre l'administration provinciale et les administrations des communes rurales ; les communes sont administrées par des bourgmestres, des échevins et des conseillers dont le nombre est variable suivant la population de la commune.
RELIGION. — La religion catholique domine en Belgique. Le royaume est divisé en 6 diocèses catholiques, ceux de l'archevêché dè Malines et des cinq évêchés suffragants de Tournay, Gand, Bruges, Liège et Namur. Ils comprenaient en 1841 224 cures, 2,179 succursales et 519 chapelles. Les communautés religieuses sont nombreuses en Belgique, leur nombre dépasse 330, dont 40 communautés d'hommes. Le culte prostestant compte 12 ministres, et les israélites ont un grand rabbin qui, à Bruxelles, préside le consistoire central.
JUSTICE. - L'organisation judiciaire de la Belgique est à peu près la même que celle de la France , les codes français sont d'ailleurs en usage. Les tribunaux du royaume sont : la cour de cassation, les cours d'appel, les cours d'assises, les tribunaux de première instance, les tribunaux de commerce, les justices de paix et les cours martiales. Les cours d'appel sont celles de Bruxelles, Gand et Liège. Chaque province a une cour d'assises. L'institution du jury est en vigueur en Belgique. Il y a 26 tribunaux de première instance et 205 justices de paix. Les prisons centrales du royaume sont : la maison de force à Gand pour les condamnés aux travaux forcés, la maison de réclusion de Vilvorde, la maison de correction de SaintBernard près d'Anvers, la maison de détention militaire à Alost et le pénitencier de Namur pour les femmes condamnées aux travaux forcés et à la réclusion.
INSTRUCTION. — Le royaume possède quatre universités, celles de Gand et de Liège établies et maintenues par l'État, l'université libre de Bruxelles et l'université catholique de Louvain; le nombre des étudiants dans ces quatre universités est en moyenne d'environ 1,500 par an. Les écoles spéciales sont : la haute école militaire de Bruxelles pour l'armée et la marine, l'école du génie civil à Gand, les écoles des mines de Liège et de Mons, l'école centrale de commerce et d'industrie de Bruxelles, l'école royale vétérinaire de G ureghem-lez-Bruxelles, les écoles royales de navigation d'Anvers
et d'Ostende , les deux écoles des arts et manufactures de Gand et de Liège, les séminaires diocésains de Malines, Bruges, Gand, Liège, Namur et Tournay, les écoles normales primaires annexées aux séminaires, enfin les Académies de peinture et écoles publiques de dessin et d'architecture au nombre de plus de 45, à la tête desquelles nous devons nommer l'Académie royale des beaux-arts d'Anvers et les Académies de Bruxelles, de Gand et de Bruges.
Bruxelles et Liège ont des conservatoires de musique entretenus par l'État.
La constitution belge garantit la liberté pleine et entière de l'enseignement ; aussi les établissements tenus par des laïques ou des ecclésiastiques y sont-ils nombreux. Le nombre des écoles primaires est d'environ 5,000, fréquentées en moyenne par 425,000 écoliers.
Parmi les établissements d'enseignement classique secondaire, 21 sont entretenus par l'État et 37 appartiennent aux communes; ces écoles comptent en moyenne 5 à 6,000 élèves : les principales sont les athénées de Bruxelles, d'Anvers, de Bruges et de Gand.
Les jésuites ont des écoles très-fréquentées à Alost et à Gand.
Bruxelles, Gand 1 Mons et Namur ont des écoles pour les jeunes aveugles et les sourds et muets.
Parmi un assez grand nombre de sociétés académiques, nous citerons l'Académie royale des sciences et belles-lettres de Bruxelles.
Des expositions nationales des beaux-arts ont lieu tous les ans alternativement à Anvers, à Bruxelles et à Gand. Le nombre des presses de la Belgique dépasse 500, et le nombre des journaux quotidiens est d'environ 80, dont les trois quarts en français et le reste en flamand.
INDUSTRIE. — L'industrie agricole est très-avancée dans quelques provinces de la Belgique, surtout dans les Flandres; la culture du lin , du houblon et des plantes oléagineuses y est très-productive.
Les races des chevaux flamands et du Luxembourg y sont perfectionnées ; et les Flandres sont renommées pour leurs bêtes à corne" dont l'élève est une des principales industries du pays.
L'exploitation des mines est pour le royaume une source trèsconsidérable de richesses. On y compte près de 400 mines ou houillères, partagées en trois groupes : celui du Hainaut, celui de Namur et Luxembourg, celui de Liège et de Namur. On exploite dans ces mêmes régions de belles carrières de marbre et des ardoisières. La pêche en pleine mer et sur les côtes occupe les habitants du littoral, et surtout ceux des ports d'Anvers, d'Ostende, de Blankenherghe et de Nieuport; elle emploie plus de 200 bâtiments; Anvers et Ostende arment pour la pêche de la morue.
L'industrie manufacturière est la principale source de prospérité pour la Belgique. Ses grands produits sont les tissus et les articles en métal. Parmi les tissus de laine, les draps tiennent le premier rang; les sièges les plus importants de leur fabrication sont Verviers, Liège et Dolhain-Limhourg. Les autres lainages sont les flanelJes, les étamines, les serges, les camelots, fabriqués dans toutes les provinces et surtout à Hodimont, Stavelot, Tirlemont, Thuin, Y pres et Poperinghen; les couvertures de laine à Bruxelles, Liège, Malines et Verviers; les tapis renommés de Tournay. Le tissage des toiles est une des industries les plus anciennes et les plus célèbres de la Belgique; la réputation des toiles de Flandre est universelle.
Les toiles les plus estimées sont celles de Gand, de Saint-Nicolas, de Terinonde, de LoJwren, d'Alost, de Bruges et de Courtray.
La fabrication des dentelles, quoique moins importante qu'autrefois, donne encore les produits les plus estimés de l'Europe; les villes où elle est en honneur sont Bruxelles, Malines, Anvers, Lierre, Turnhout, Courtray, Gand, Alost et Saint-Nicolas. On trouve dans ces villes des métiers pour le tissage du coton. L'industrie des métaux a pris de grands développements depuis vingt ans. Nous avons nommé les principaux centres de fabrication dans notre description topographique. Les articles principaux sont les machines et les mécaniques, les armes à feu, la clouterie, la poêlerie, la chaudronnerie et la coutellerie. Liège est le centre de la fabrication des armes à feu ; cette industrie n'occupe pas moins de 8 à 10,000 ouvriers. La fonderie royale de canons à Liège est un des plus beaux établissements de ce genre en Europe. La coutellerie est une industrie importante dans la province de Namur. Les fabriques de quincaillerie de Liège sont justement renommées pour la bonté de leurs produits; à Malines, on fabrique des articles en cuivre; à Liège et Anvers, de la bijouterie et de l'orfèvrerie estimées. Après les tissus et les métaux travaillés, les autres grands articles de l'industrie belge sont les cuirs, les papiers, les produits de la typographie; la poterie, la faïence et la porcelaine ; les verres, le tabac, les huiles, les savons, le sucre raffiné, la bière, les eaux-de-vie de grains.
La bière, qui est la boisson ordinaire des habitants, occupe environ 3,000 brasseries. Le lambic et le faro de Bruxelles, le petermonn et la bière blanche de Louvain et le uytzet de Gand, sont des bières renommées parmi les autres; celles de Tournay, Diest, Hoegaerde et Tirlemont sont les plus estimées.
COMMERCE. —La Belgique fait un commerce considérable avec les autres États de l'Europe. Sa valeur moyenne a été de 1832à 1838, non compris le numéraire de 362,950,094 fr., dont 211,768,831 fr.
d'importations et 151,181,263 francs d'exportations. Pendant la même période la valeur moyenne du numéraire déclaré à la douane a été de 12,323,611 francs importés et de7,622,718 francs exportés.
Dans les chiffres de l'importation et de l'exportation le commerce spécial de la Belgique entrait pour 190,931,742 francs d'importations et 129,689,075 francs d'exportations de produits belges.
Voici les chiffres des importations et des exportations dans ces dernières années, pour le commerce spécial :
Importations. Exportations.
En 1848 221,395,000 francs. 181,302,000 francs.
» 1849 235,792,000 — 224,326,000 — » 1850 236,525,000 — 263,647,000 — » 1851 241,059,000 — 253,828,000 — » 1852 286,646,000 — 287,321,000 — » 1853 286,792,000 — 354,208,000 —
Les pays qui importent le plus de marchandises en Belgique sont l'Angleterre, la France, les Pays-Bas, les Etats-Unis, l'association allemande du Zollvereiii, la Russie, les Antilles espagnoles.
Ceux qui en reçoivent le plus sont la France, l'Angleterre, les Pays-Bas, l'association allemande du Zollverein et les Etats-Unis.
La navigation commerciale a employé en 1852 4,791 navires, dont 2,375 navires entrés jaugeant 412,615 tonneaux et 2,416 navires sortis jaugeant 416,709 tonneaux. En 1853 le nombre des navires entrés dans les ports belges était de 2,345 et celui des navires sortis de 2,296.
ROUTES, CANAUX, CHEMINS DE FER. — La Belgique est après l'Angleterre le pays qui possède le plus grand nombre de voies de communication; leur développement total, en y comprenant les fleuves et rivières navigables, dépasse 130,000 kilomètres.
Les grandes routes passent pour être les plus belles de l'Europe ; leur développement est d'environ 5,000 kilomètres ; elles sont entretenues partie sur les fonds de l'Etat, partie aux frais des provinces.
Les autres routes de grande et petite voirie ont un développement de 120,000 kilomètres; la longueur des chemins vicinaux pavés ou empierrés dépasse 3,000 kilomètres.
La Belgique possède de nombreux canaux, dont quelques-uns sont assez larges pour donner passage à des navires de commerce ordinaires ; les principaux sont : le canal de Bruxelles, entre Bruxelles et Anvers; le canal d'Osteude à Dunkerque par Nieuport ; le canal Belge du Nord, entre l'Escaut et la Meuse; Je canal de Terneuse, de Gand à Terneuse ; le canal de Liège, entre la Meuse et la Moselle; enfin le canal de Charleroi à Bruxelles.
La Belgique est le pays de l'Europe qui le premier a joui d'un système complet de chemins de fer; ils sont administrés par l'État; leur longueur totale est de 562 kilomètres; le nœud principal est à Malines, et ils forment quatre lignes principales, toutes mesurées par des poteaux kilométriques de 500 mètres en 500 mètres à partir du poteau central de Malines.
Les quatre lignes sont : la ligne du Nord, qui gagne Rotterdam en Hollande par Anvers ; la ligne de l'Est, qui gagne la Prusse par Louvain, Liège, Verviers; la ligne de l'Ouest, qui gagne Ostende et Bruges par Gand, et est en communication avec Londres à l'aide d'un service de paquebots; enfin la ligne du Sud et du Sud-Est qui se soude au chemin français du Nord à Lille par Gand et Courtray, à Valencicnnes par Bruxelles et Mons. Quelques autres embranchements partant de ces lignes principales unissent à la capitale de la Belgique les grands centres commerciaux ou de production.
FINANCES. — Les revenus publics sont plus sagement administrés dans ce pays que dans les grands États ses voisins, et il lui serait facile de mettre en équilibre le budget des recettes avec celui des dépenses. En 1853 les recettes ont été de 123,224,250 francs
et les dépenses de 131,547,693 francs, non compris 4,995,000 francs affectés aux fonds spéciaux des chemins de fer. La contribution foncière (19 millions), les droits des douanes (13 millions), les droits d'enregistrement et amendes (24 millions), les chemins de fer (18 millions), les contributions personnelles et les patentes (12 millions), sont les principaux éléments du budget des recettes.
Le service de la dette publique (37 millions ), le budget de la guerre (36 millions), ceux des travaux publics (19 millions), de la justice (13 millions), des finances (11 millions), sont les principaux éléments du budget des dépenses. La dotation royale, etc., etc., ne dépasse pas 4 millions de francs.
En 1854, on évaluait le budget des recettes à 125,002,150 francs.
La dette publique de la Belgique était en 1854 de près de 700 millions de francs, dont un tiers représente la part qui a été attribuée à ce pays dans l'ancienne dette des Pays-Bas; chaque année une certaine somme doit être réservée au budget des recettes pour l'amortissement de cette dette.
FORCES MILITAIRES. — L'armée belge forme un effectif de 74,000 hommes et de 11,000 chevaux avec les états-majors; en temps de paix, il n'y a guère plus de 40,000 hommes sous les armes, mais en temps de guerre cette armée peut facilement compter 100,000 hommes de troupes de ligne; dans ce dernier cas on devrait ajouter à ce nombre 100,000 hommes de garde civique mobilisée.
L'armée se recrute par le tirage au sort, le contingent annuel est de 10,000 hommes et la durée du service de 8 années.
L'infanterie comprend 12 régiments de ligne, un régiment de carabiniers, deux régiments de chasseurs et un de grenadiers ; en tout près de 50,000 hommes.
La cavalerie se compose de deux régiments de chasseurs, de lanciers, de cuirassiers, et un des guides; en tout 7 régiments, dont l'effectif est d'environ 5,000 hommes.
L'artillerie compte 6,700 hommes, dont 3,105 montés et 152 pièces. Le génie, le train, les pontonniers, forment un effectif de 2,400 hommes.
La surveillance intérieure est faite par 9 compagnies de gendarmerie , qui portent le nom de chacune des provinces auxquelles elles sont affectées.
Sous le rapport de l'administration militaire la Belgique forme quatre divisions territoriales, dont les chefs-lieux sont : Gand, Anvers, Liège, Mons; chaque province forme un commandement militaire. Il y a dans le royaume 22 places fortes et forteresses : Anvers avec les forts de Sainte-Marie et de Calloo, Ath, Audenarde, Bouillon, Charleroi, Courtrai, Furnes, Gand , Hasselt, Huy, Liège, Lierre, Marienbourg, Menin, Mons, Namur, Nieuport, Ostende, Philippcville et Ypres. Un camp d'observations et de manœuvres est établi annuellement à Beverloo et Beeringen sur la frontière hollandaise, dans la Campinc (province de Limbourg).
MARINE. — La Belgique n'a pas, à proprement parler, de marine militaire, car on ne peut donner ce nom à 14 bâtiments légers portant 94 pièces de canon et stationnant à Anvers et à Ostende pour protéger les côtes. Le roi possède un yacht de plaisance et un bateau à vapeur pour ses.excursions à Londres.
COLONIES. — La Belgique n'a pas de colonies, car l'on ne peut donner ce nom à l'établissement colonial tenté en 1841 à SaintThomas de Guatemala, au fond du golfe du Mexique, et qui paraît n'avoir pas beaucoup prospéré.
COULEURS NATIONALES; ORDRES HONORIFIQUES. Le drapeau belge est tricolore : rouge, jaune et vert; les couleurs sont verticales, le vert tenant à la hampe. Les ordres honorifiques sont l'ordre de Léopold, dont les degrés sont les mêmes que ceux de la Légion d'honneur.
TABLEAUX STATISTIQUES DU ROYAUME DE BELGIQUE.
STATISTIQUE GENERALE.
POPULATION s UP ER FI CIE. POPULATION par F IN'.4 NC ES. CO Il Il ER C l~. FORCIIS XIILITAIRF.S.
SUPERFICIE. en 1854. kilomètre FINANCES. COMMERCE. FORCES MILITAIRES.
carré.
29,455 4,548,507 154 Budget en 1855. En 1352. Armée.
kilomètres carrés. Revenus. 128,596,590 fr. Importations. 286,646,000 fr. Infanterie 56,550 h.
Dépenses 128,404,350 Exportations. 287,321.350 Caalere.. , , 8,202 Artillerie 6,700 Chemin s de fer. 3,500,000 tn 18o3. Train, pontonn. 856 - Budget en 1854, Importations. 286,792,000 Génie' 1,690 Revenus. 125,002,150 Exportations. 354,208,000 Dépenses., 129,560,323 73,998 h.
Chemins défer. 1,170,000 Marine.
Dette publique. 650,000,000 14 bâtimenls côliers, 94 canons.
Statistique des Provinces.
NOMBRE DES SUPERFICIE POPULATION -— imm
PROVINCES, en ARRONDISSEMENTS. COMMUNES CHEFS-I,IEUY ET VILLES PRINCIPALES.
hectares. en 180)4, VILLES. fura'es.
Bruxelles. 2 118 BRTXLLLLIS, 246,414. - Hal, 9,000. - Vilvorde, 6,000.
Bn,inn'T.,. 328,323 769,842 < Louvain 4 107 Louvain, 32,000. — Tirlemont, 9,000. — Aer- schot, 4,000.
Nivelles. 2 105 Nivelles, 9,000. - Wavre, 6,000.
( Anvers., 1 56 Anvers, 95,000.
ANVERS 283,311 434,405 < Malines 2 37 Malines ff (1), 30,000. - Lieri-P, 15,000.
( Turnhout. 1 49 Turnhout, 15,000.
Bruges. 2 39 Bruges t, 50,000. - Ghistelles, 3,000.—Thourout, 9,000.
Courtray 2 44 Courtray, 24,000. -Menin, 9,000. - Iseghem, 8500.
Dixmude. 1. 25 Dixmude, 40,000.
FL.NDRI':OCCIDENTUE. 323,449 637,277 Furnes. 2 26 Fumes, 5,000. — Nieuport, 5,000.
Ostende. 1 27 Ostende, 16,000.
Roulers. 2 18 Roulers, 12,000.
Thielt 1. 17 Thielt, 14,000.
Ypres., 4 38 Ypres, 18,000. — Poperinghe, 12,000. — Wervick, 6,000.
Gand. 2 77 Gand t, 112,000. — Everghem, 8,000. — Nazareth, 6,000.
Alost 3 78 Alost, 17,000. — Waerschoot, 6,000.
FLANDRE O~RI,EN, TALE o29n9Q,7'70e7 '7 Audenarde 2 58 Audenarde, 7,000. - Grammont, 8,500. - NiLANDRE ORlGNTAJ.E , , , nove, 5,0UU.
K nnn ■
Eecloo.. , 1 17 Eecloo, 9,000.
Saint-Nicolas. 2 27 Saint-Nicolas, 24,000.
Termonde. 1 25 Termonde, 10,000. - Lokeren, 18,000.
IMons 2 76 Mons, 26,000.— Braine-le-Comte, 6,000.— Chièvres, 3,000.
Ath.,. 2 62 Ath, 9,000. - Brugelette, 1,000.
HAINAUT., , 372,206 756,056 Cliarleroy 4 64 Charleroy, 9,000. — Binchc, 6,500.
SOlgllles, 5 46 Soignies, 7,000.
Thuin , 4 75 Thuin, 5,000.
Tournay , , 4 83 Tourna y t, 32,000, - Peruwelz, 8,000. - Lessines, 5,000. - Leuze, 6,000.
! Liège 2 106 Liége t, 90,000. — Seraing, 6,000.
HL.~EGE E. 289,319489,146 Huy.,. 2 79 Huy, 10,000.
Verviêrs. !!!!!! 3 53 Verwers,' 2M00. — Stavelot, 5,000. — Spa, 5,000.
Varemme » 86 Varemme, 2,000.
(Hasselt 2 65 Hasselt, 10,000. — Saint-Trond, 1,200.
LUmOURG. 241,315 192,827 < Maeseyek. 1 35 Maeseyck, 5,000.
j Tongres. , , 1 99 Tongres, 6,000.
Arlon 1 16 Arlon, 6,000. — Saint-Hubert, 2,000.
Bastogne. , 2 31 Baslogne, 3,000.
LUXEMBOURG. 441,704 195,909 < Marche., 3 48 Marche, 2,000.
Neufchâteau. 3 64 Neufchâteau, 2,000. — Bouillon, 3,000.
Virton 2 35 Virton, 2,000.
iNamur 3 121 Namur f, 24,000. — Andenne, 6,000.
NaMUR. 366,180 282,190' Dinant..,. 1 136 Dinant, 7,000.
NAMUR 366,180 282,190 Philippeville 1 84 Philippeville, 2,000. —Marienbourg, 1,000.
(1) Le signe tt indique l'archevêcbé, et t les évêchés.
ITALIE.
Ascension du mont Blanc. — Passage d'une crevasse.
TABLEAU PHYSIQUE GÉNÉRAL.
LIMITES, DIMENSIONS, SUPERFICIE. - Considérée dans ses limites naturelles, la partie septentrionale de l'Italie comprend tout le versant des Alpes, depuis les Alpes Cottiennes jusqu'aux Alpes Juliennes; mais les lignes de démarcations politiques ont modifié ces limites. Ainsi, dans sa plus grande largeur, l'Italie est comprise entre le golfe de Trieste et le Rhône, non loin du lac de Genève; d'où il suit que ce fleuve, les Alpes Pennines et l'extrémité du golfe Adriatique, séparent l'Italie de la France, de la Suisse et de l'Allemagne. Le golfe Adriatique et la Méditerranée baignent les côtes de cette contrée jusqu'aux pentes des Alpes Maritimes, près des frontières de la France. Sa longueur, du nord-est au sud-ouest, est d'environ 1,330 kilomètres; sa largeur, au nord, est de plus de 650 kilomètres ; dans sa partie moyenne, de 220; au midi, de 160 ; et à l'entrée de la Calabre, de 40 à 80 seulement. Sa superficie, en y comprenant la Sicile, la Sardaigne et toutes les petites îles, est de 324,000 kilomètres carrés; et celle des îles seules, de 56,000 kilomètres carrés.
COTES, CAPS, GOLFES. — Le développement des côtes de l'Italie est d'environ 3,500 kilomètres, dont 1,020 kilomètres sur l'Adriatique, 840 sur la mer Ionienne, 1,100 sur la mer Tyrrhénienne, et 540 sur le golfe de Gènes. Les côtes de l'Adriatique sont peu sinueuses sur toute leur étendue, et leur principale saillie est formée par le mont Gargano. Au bord de Rimini jusqu'à l'Is-
trie, elles sont basses et bordées de lagunes et de marécages. La côte de la mer Ionienne, marécageuse seulement au fond du golfe de Tarente, est plus accidentée ; ses principales saillies sont les caps Leuca, Alice, Colonne, Rizzuto, Stilo, Spartivento et de l'Armi. La côte occidentale de l'Italie est généralement plus accidentée et plus élevée que la côte orientale, excepté sur une partie des côtes de la Toscane et des Etats pontificaux où se trouvent les Maremmes de l'embouchure de l'Arno et les marais Pontins. Ses saillies les plus remarquables sont les caps Vaticano, Licosa, Campanella, Circello.
La Méditerranée forme sur les côtes de l'Italie les golfes de Venise et de Manfredonia, dans l'Adriatique; le golfe de Tarente et de Squillace, dans la mer Ionienne; le golfe de Gênes, de SainteEuphémie, de Policastro, de Salerne, de Naples et de Gaëte dans la Méditerranée proprement dite.
MONTAGNES, COLS ET PASSAGES. — Les principales montagnes de l'Italie sont les Alpes Pennines, qui comprennent la chaîne qui s'étend du mont Rosa au mont Blanc; les Alpes grées (Graiæ), comprises entre le mont Blanc et le mont Cenis; les Alpes Cottiennes, entre le mont Cenis et le mont Viso; enfin les Alpes Maritimes, qui, du mont Viso, se prolongent au delà du Col de Tende. Ces différentes parties d'une même chaîne serpentent de l'est à l'ouest et de l'ouest à l'est dans la direction générale du nord au sud.
On pénètre en Italie à travers les Alpes par plusieurs passages, dont voici les naux : -
Col de Tep/Ie^j. 1,795 mètres.
— du mont Viso ou de la Traversetlc. 3,040 — — du mont Genèvre.,. 2,000 — — du mont Cenis , , 2,100 — du petit Saint-Bernard 2,192 — du Bonhomme 2,455 — du grand Saint-Bernard. 2,620 — — de Saint-Théodule ou du Cervin. 2,455 — — de la Bocebetta 2,641 — — du Simplon. 2,193 — - du Griès. 2,446 — - du Saint-Gothard. 2,075 - du SpiuDgen 1,925 - du Stelvio, 2,870 -
A partir du Tmnaro jusqu'à l'extrémité de l'Italie, s'étend la longue chaîne des Apennins, Toute. ces montagnes appartiennent au même système, celui des Alpes la chaîne Rkétique et la chaîne Apennine partent d'une masse principale, le mont Blanc. La chaîne des Apennins, qui doit principalement nous oecaper, s'étend sur une longueur de 1,200 kilomètres. Elle se divise en trois parties : l'Apennin u 1 qu'à la mer septentriotal se prolonge, en passant près d'Urbin, jusqu'à la mer Adriatique; l'Apennin central se termine près des bords du Sangro; l'Apennin méridional s'étend, en serpentant, jusqu'au bassin de l'Ofanto, où il se bifurque : la branche la moins considérable sépare la terre de Bari de celle d'Otrante; l'autre, composée de montagne.
élevées, traverse les deux Calabres, et se termine par YAspromonte.
Du côté de l'Italie, la chaîne des Alpes est beaucoup plus escarpée que du côté de la France, de la Suisse et de l'Allemagne; celle des Apennins, moins élevée, prolonge plusieurs rameaux, dont les plus importants vont former des caps dans la mer Adriatique, la mer de Sicile et la Méditerranée. Piombino est bâti sur l'un de ces caps, mais le plus important est celui qui forme la pointe de Campanella, à l'entrée du golfe de Naples. Sur les bords de l'Adriatique, ces pointes ou ces extrémités de chaînes sont moins importantes ; cependant, à l'entrée du golfe de Tarente, le cap de Lenca est formé par les dernières pentes d'un de ces rameaux. La branche principale. qui continue jusqu'à l'extrémité la plus méridionale du
continent, ne fait que s'enfoncer dans la mer pour reparaître en Sicile, dont elle forme pour ainsi dire la charpente. Dans l'étendue que parcourt la chaîne Apennine, elle se range plus près de la côte occidentale de l'Italie que de la côte opposée.
Cette contrée si remarquable par ses montagnes ne l'est pas moins par ses plaines. L'une des plus belles et des plus riches de l'Europe, et peut-être du" monde , est celle de la Lombardie, dont on évalue la superficie à 33,000 kilomètres carrés. Celle qui s'étend entre le golfe de Naples, le Vésuve et les Apennins, moins étendue, est admirable par sa richesse et sa fertilité. Sur le versant opposé de cette chaîne, d'autres plaines moins étendues encore, mais non moins fertiles, se prolongent sur les bords de l'Adriatique, aux environs du golfe de Manfredonia et sur la terre de Bari.
VERSANTS, FLEUVES, RIVIÈRES. — Les Alpes et les Apennins divisent l'Italie en trois versants principaux, qui sont ceux de l'Adriatique, du golfe de Tarente et de la mer Méditerranée. Les cours d'eau qui sillonnent ces versants diffèrent d'importance suivant qu'ils descendent des Alpes ou des Apennins. Le fleuve le plus important du versant de l'Adriatique est le Pô, le plus grand des fleuves de l'Italie; il prend -sa source au mont Viso. Grossi des eaux du Tanaro, de la Trebbia, du Taro et du Panaro, qui s'y réunissent sur sa rive droite ; augmenté sur sa gauche par la Dora, YOrca, la Sezia, le Tessin, l'Adda et l'Oglio, il se jette, après un trajet de 480 kilomètres, dans la mer Adriatique. La même mer reçoit des Alpes le Tagliamento, la Piave, la Brenta et l'Adige, et des Apennins le Sangro et l'Ofanto. La chaîne des Apennins fournit à la Méditerranée l'Arno, qui se jette dans le golfe de Gênes, YOmbrone, le Tibre, le Garigliano et le Volturno. Le versant du golfe de Tarente est arrosé par le Bradano, le Basiento et le Crati.
LACS. — Les plus grands lacs s'étendent sur le versant des Alpes Rhétiques; à l'ouest, c'est le lac Majeur, et dans la direction de l'est on voit successivement ceux de Lugano, de Côme, d'fseo et celui de Garda, le plus important de tous. Que sont, auprès de ces grandes nappes d'eau, les lacs de Pérouse, de Bolsena et de Fucino, qui se succèdent du nord-ouest au sud-est, sur les pentes occidentales des Apennins?
Le lac Majeur (lago Maggiore) est le Verbanus lacus des anciens; il a 6 kilomètres dans sa moyenne largeur, et 58 dans sa plus grande longueur; mais sa profondeur est extraordinaire : elle est, dit-on, de 800 mètres. Le lac de Lugano, l'ancien Ceresius lacus, n'a que 22 kilomètres de longueur sur une largeur moyenne de
2 kilomètres. Il est élevé de 290 mètres au-dessus du niveau de la mer, et de 60 au-dessus du lac Majeur, dans lequel il ccoule ses eaux. Celui de Côme, appelé Larius lacus par les anciens, a 26 kilomètres de longueur en le mesurant depuis son extrémité septentrionale jusqu'à l'extrémité méridionale de la plus longue de ses deux branches. Sa largeur est d'environ 4 kilomètres. Il reçoit plus de 60 cours d'eau, dont la plupart forment de belles cascades ; ce qui est dû à la hauteur des montagnes qui l'entourent. En effet, plusieurs de celles-ci ont près de 3,000 mètres d'élévation, elles s'abaissent en gradins et viennent former autour de ses rives une rangée de collines de 400 à 600 mètres de hauteur. Les points de vue agréables qu'elles offrent, les maisons de plaisance qui se groupent çà et là sur leurs pentes, rendent les bords de ce lac on ne peut plus pittoresques. Ses eaux sont animées par un grand nombre de mauves qui voltigent à sa surface, et dont le nom latin lanrs paraît être l'origine de celui du lac. Le lac d'Iseo ou de Sabino (SeviRfU lacus), large d'à peu près 4 kilomètres et long de 22, a 300 mètres de profondeur. Il est environné de rochers à pic et de coteaux couverts de vignes et d'oliviers. Le lac de Girda (Benacus lacus) a 44 kilomètres de longueur, 4 kilomètres de largeur au nord et 16 au sud. Sa profondeur, qui Tarie beaucoup, est, dans son maximum, d'environ 300 mètres. Ce lac, Enté par Catulle et par Virgile, est célèbre par la variété et la quantité de poissons qu'il nourrit.
1 SOURCES MINÉRALES. — La beauté du climat de l'Italie a contribué à rendre plusieurs de ses sources minérales aussi célèbres que celles de l'Allemagne. Aux environs de Pise, les sources galeuses de Saint-Julien, les bains de Montecatini, les sources de Saint-Cassian et les célèbres bains de Lucques attirent une foule d'étrangers en Toscane. Cette principauté possède des lacs uniques en Europe : ce sont ceux dont les eaux renferment de l'acide borique. Ils s'étendent sur une superficie d'environ 104 kilomètres; il s'en élève des colonnes de vapeur d'un volume pins om moins considérable, qui imprègnent l'air d'une odeur forte et légèrement sulfureuse. Dans leur voisinage on ressent unechaleur insupportable, et l'on est mouillé par les vapeurs. Le sol brûlant qui s'ébranle sous vos pas est couvert çà et là de magnifiques cristallisations de soufre et d'autres minéraux. Dès la plus haute antiquité, la contrée où s'étendent ces lacs était regardée comme l'entrée de l'enfer; le volcan voisin des principaux de ces lacs porte encore le nom de mont de Cerbère (monte Gerboli). - -
Dans le royaume de Naples on trouve a chaque pas des Sources gazeuses, comme si elles étaient la conséquence des phénomènes volcaniques : les eaux de Santa- Lucia, celles de Pisciarelli, de Pouzwles, et les 4 sources d'Itcliia ; dans le royaume LombardVénitien, les bains d' Albano, près de Padoue, ceux de Bocoaro, dans les environs de Vicence; les sources thermales d'Acqui, ceUes de Vinabio et d'Oleggio, dans le royaume de Sardaigne; enfin les sources minérales des environs de Parme prouvent que l'Italie est, sous le rapport des moyens curatifs, aussi favorisée que toute autre contrée de l'Europe.
CLIMAT ET PRODUCTIONS NATURELLES. — Du nord au sud de l'Italie on compte quatre zones et quatre climats différents.
La zone septentrionale, qui règne depuis les Alpes jusqu'aux Apennins, est souvent exposée à des froids rigoureux : quelquefois Je thermomètre y descend jusqu'à 10 degrés. Elle ne produit généralement ni l'olivier, ni le citronnier, ni les différentes espèces de ce genre, si ce n'est dans quelques localités abritées contre les vents.
Dans la seconde, qui s'étend jusqu'au cours du Sangro, l'hiver est sans âpreté : l'olivier et l'oranger sauvages lui résistent, mais l'arbre qui porte l'orange douce n'y prospère point en pleine terre. C'est dans la région suivante, qui se termine vers les bords du Crati, qu'il réussit presque sans culture, à côté du cédratier et du bigarradier. Il gèle pourtant quelquefois dans cette région, mais rarement dans les lieux peu élevés. La dernière zone enfin jouit d'un climat brûlant, le thermomètre n'y descend point au-dessous de zéro; le palmier, l'aloès et le figuier d'Inde y croissent, surtout dans les plaines et sur le bord de la mer, car les cimes les plus élevées se couvrent de neige en hiver.
Rien n'égale la fertilité de la première région, qui occupe toute la vallée du Pô; elle produit une grande quantité de riz, diverses espèces de grains, et surtout ce beau blé qui sert à faire les pàtes et les macaronis dont les Italiens sont si friands. C'est aussi dans cette vallée et dans celles qui y aboutissent que l'on voit les plus belles prairies de l'Italie et les bestiaux les plus gras. Ses fromages sont un objet considérable de commerce, ses vins sont estimés, principalement ceux du Frioul, du Vicentin, du Bolonais et du Montferrat.
La seconde région a peu de prairies et peu de champs de blé ; ses terres cultivées s'élèvent, sur les pentes des 'montagnes, en terrasses , soutenues par des murs de gazon, dont la verdure, sur laquelle se détachent des arbres couverts de fruits et le pâle olivier, donne aux coteaux l'aspect le plus riant et le plus riche.
La troisième région, que plusieurs parties malsaines ont fait appeler pays du mauvais air, la Malaria, est couverte de vastes pâturages , de coteaux et de vergers.
Dans la dernière, on cultive le figuier, l'amandier, le cotonnier, la canne à sucre et la vigne qui donne les vins brûlants de la Calabre. La végétation y rappelle celle des plus belles contrées dé l'Afrique. Le bombyx, qu'on y élève, produit une soie moins fine et moins brillante que dans les autres parties de l'Italie ; on en attribue la cause à sa nourriture, qui consiste principalement en feuilles de mûrier noir. C'est dans cette région que l' œi se promène avec plaisir sur ces pampres, dont les rameaux flexibles s enlacent aux peupliers. On a remarqué que les vins que l'on obtient des vignes basses sont d'une qualité supérieure à ceux que produisent celles qui forment d'élégantes guirlandes à la cime aes arbres.
Souvent le raisin des premières est mûr avant que celui des secondes se soit coloré. Le mélange de ces deux raisins ne donne qu'un vin aigre-doux, en dépit du climat.
L'Italie produit tous les arbres fruitiers des contrées tempérées de l'Europe, et de plus quelques végétaux qui ne peuvent croître qu'à la faveur d'une haute température. Tels sont : le plaqueminier, dont les fruits jaunes, acides et de la grosseur d'une cerise, ne sont mangés que par les enfants et par les pauvres ; Yazédarac bipennè, arbre dont les fleurs, d'un bleu tendre et d'une odeur suave, tombent en grappes élégantes ; le grenadier, apporté de Carthage en Italie par les Romains ; l'azel'olier, espèce de néflier dont le fruit plaît par sa belle couleur rouge, et dont le suc rafraîchissant le fait rechercher dans l'Italie méridional ; le caroubier, dont la gousse est aimée des Napolitains; le pistachier lentisgue, qui fournit une huile bonne à brûler et à manger i enfin le frêne à feuilles rondes, arbre précieux de la Calabre, dont l'écorce entaillée suinte la manne.
ANIMAUX. — Plusieurs animaux de l'Italie sont communs à différentes parties de l'Europe ; d'autres sont particuliers à son climat et à ses montagnes : celles-ci servent de retraite au lynx, au chamois, à la chèvre sauvage, au furet, au loir et au lemming, petit rat de Norvège célèbre par ses migrations. Dans les Apennins on trouve communémetft le porc-épic. Un bœuf auquel on donne le nom de biMe vit apprivoisé dans le midi de la contrée. Les chevaux napolitains sont estimés pour leurs formes et leur vigueur; l'âne et le mulet y sont d'une très-bonne race, et les moutons rivalisent avec ceux d'Espagne. Les oiseaux y sont très-nombreux : dans les seules Alpes maritimes on en compte 306 espèces ; quelques reptiles du Midi appartiennent à la partie septentrionale de l'Afrique; deux grandes couleuvres, l'aspic et la vipère, y distillent leur venin.
Les poissons et les mollusques sont extrêmement nombreux dans la Méditerranée. Les profondeurs de cette mer sont habitées par les alépocéphales, les pomatomes, les chimères et les lépidolèpres. Dans la région supérieure se trouvent les molves, les merlans, les castagnolles, etc.; à 300 mètres au-dessous de la surface des eaux, les raies, les lophies, les pleuronectes et tous les poissons à chair molle.
A 150 mètres plus haut s'étend la région des coraux et des madrépores; au milieu d'eux vivent les balistes, les labres, les trigles et autres poissons. Au-dessus végètent des algues et des caulinies; cette région est fréquentée par les murènes, les vives, les stroma.
tées, etc. Au-dessus s'élèvent les rochers couverts de varechs et de fucus qui servent de retraite aux blennies, aux clines, aux centrisques et à tous les poissons de rivage. Enfin les plages couvertes de galets et de sables sont la résidence ordinaire des spores, des anchois, des muges et de divers mollusques. C'est au sein de la Méditerranée qu'habite la sèche commune, qui rejette, lorsqu'on la poursuit, une liqueur noirâtre dont on fait la couleur appelée sepia; c'est là que demeure également ce mollusque de la famille des poulpe» décrit par Aristote et par Pline, et connu sous le nom d'argonaute papyracé, singulier animal dont la coquille transparente et fragile, en forme de nacelle élégante, sem ble avoir donné à l'homme l'idée des premiers navires, comme il paraît lui avoir donné les premières leçons de navigation. Doué de là prudence nécessaire à sa conservation, qualité indispensable au navigateur, dès que la tempête commence à agiter les flots, il se renferme dans sa coquille et se laisse descendre au fond des eaux ; mais lorsque le calme a reparu, il étend ses bras hors de sa barque légère et reparaît & la surface de l'onde. Il introduit ou rejette à volonté l'eau qui lui est nécessaire pour son lest ; le mouvement donné à ses bras, qui lui servent de rames, le fait voguer; et si la brise qui agite les flots n'est point trop forte, il élève deux de ses bras, présente au vent la membrane qui les unit, et s'en sert comme d'une voile propre à accélérer sa course, tandis qu'un autre bras, plongeant dans l'eau derrière la coquille , agit comme gouvernail.
VENTS. — Les vents du midi sont très -incommodes dans le royaume de Naples et dans la Sicile ; mais celui du sud-est, ou le sirocco, est cejui dont Te Souffle est le plus accablant. Lorsqu'il règne, la lueur du jour est obscurcie, les feuilles des végétaux se
roulent comme si elles étaient piquées par un insecte destructeur, et l'homme est accablé d'un malaise ef d'une nonchalance qui lui font perdre ses forces. Heureusement ce vent règne plus fréquemment l'hiver que l'été.
CONSTITUTION GËOGNOSTIQUE. — Lorsqu'en descendant des Alpes on examine la constitution géognostique du sol, on rencontre d'abord le calcaire ancien qui s'étend par couches horizontales, d'où sortent çà et là des bancs de grès rouge. Dans le bassin du Pô, depuis les pentes des Alpes et des Apennins jusqu'aux rives de ce fleuve, toutes les collines sont formées de calcaire rempli de corps organisés fossiles. Les environs de Vérone et de Vicence montrent, comme aux environs de Paris, la craie supportant des dépôts de sédiment supérieur, mais qui paraissent cependant d'une époque plus récente que dans le bassin de la Seine. Le Pô, le Tagliamento, la Piave, la Brenta, l'Adige, etc., etc., accumulent lentement au fond de l'Adriatique, et surtout aux environs de Ravenne et de Venise et sur la côte occidentale du golfe de Trieste, des alluvions qui travaillent à la ruine de plusieurs ports. C'est ainsi que l'ancienne Hatria, Adria, qui jadis était un port florissanl, est maintenant à plus de 35 kilomètres du rivage. Entre l'Adige et la Brenta un groupe de montagnes d'origine volcanique porte le nom de monts Euganéens.
La chaîne des Apennins offre une curieuse réunion de deux massifs , dont l'un est composé de granit et de roches à base de serpentine, et l'autre de calcaire d'une texture grenue mais serrée, dont le plus important est connu dans les arts sous le nom de marbre de Carrare. On y rencontre aussi des roches formées d'un mélange de quartz et de calcaire. Leur base est généralement couverte de sédiments de la dernière époque géologique, qui s'étendent jusqu'au bord de la mer.
Mais ce qui caractérise surtout les Apennins, c'est que depuis le Pô jusqu'aux Abruzzes, sur le versant oriental de ces montagnes, règne une longue traînée de matières volcaniques; et que sur le Versant opposé une autre traînée se prolonge depuis le golfe de Naples jusque dans la Sicile. Le gaz hydrogène, les vapeurs sulfureuses, le gaz acide carbonique, qui s'échappent de quelques points de ce versant, accusent l'intensité des feux souterrains, dont le Vésuve et l'Etna sont les vastes soupiraux. C'est à leur action que sont dues les îles du golfe de Naples et des côtes de Sicile. Cette grande île est partagée en trois versants par un massif de montagnes dans lesquelles le granit surmonté de calcaires à débris organiques domine principalement.
ANCIENS CRATÈRES CONVERTIS EN LACS. — Au bas du versant des Apennins qui se dirige vers le golfe de Naples, des cratères de diverses dates se sont accumulés sur le sol même que l'homme foule aujourd'hui, et la décomposition des laves a contribué à fertiliser ses champs. Toute la plaine de la Campanie est couverte de déjections volcaniques ; Naples est bâtie sur des courants de laves. Spallanzani a reconnu le premier que les lacs Averno, Agnano et I.ucrino étaient d'anciens cratères.
Cette plaine, qui s'étend depuis les bords du Sebato et du Sarno jusqu'à la Méditerranée, est connue depuis les temps anciens sous la dénomination de champs Phlègrêens : tout y retrace en effet les ravages des feux souterrains. L'Averne, que les Grecs nommaient Aornos, parce que les oiseaux fuyaient ses rives, d'où s'exhalaient des vapeurs pestilentielles, les attire aujourd'hui par l'abondante nourriture qu'il leur offre. Il a dans certains endroits 60 mètres de profondeur, mais il n'offre plus l'aspect sombre et lugubre sous Je..
quel nous le peignent les historiens et les poëtes de l'antiquité. Les vieilles forêts qui couvraient ses bords escarpes sont remplacées par des taillis et des buissons qui conservent leur verdure toute l'année, les marais insalubres qui l'euvironnaient ont été convertis en vignobles. On remarque encore sur ses bords, d'un côté les restes d'un temple d'Apollon, de l'autre la célèbre grotte de la sibylle de Cumes ; enfin rien n'est plus romantique que l'aspect de ce lac, que les anciens regardaient comme l'entrée des enfers.
Le lac Lucrino ou Licola (Lucrinus lacus), voisin du précédent, avec lequel il communiquait par un canal que fit construire Agrippa, gendre d'Auguste, pendant que d'un autre côté il communiquait aussi à la mer, ne nourrit plus les huîtres qui le rendaient célèbre chez les anciens. L'éruption du 29 septembre 1558 forma dans son sein un petit volcan qui, pendant sept jours, rejeta des matières enflammées, et dont la lave forme aujourd'hui une colline de 2,600 mètres de circonférence à sa base et de 130 de hauteur : il est connu sous le nom de Monte-Nuovo. Depuis l'éruption subite de cette colline, le lac Luorino, considérablement diminue, n'est plus qu'un étang dans lequel on ne pêche que des anguillesi Le lac d'Agnano a 2 kilomètres de circonférencej ses eaux sont poissonneuses, ses bords garnis dé châtaigniers. Les rives et le fond de ce lac sont formés de pépérine ponceuse renfermant des fragments de lave; on n'y découvre aucun filon : ce qui fait présumer avec raison, ainsi que l'a remarqué Spallanzani, que ce cratère n'a produit que des éruptions boueuses. Malgré la beauté du
site, l'œil ne découvre aux environs que des habitations éparses. Les habitants riverains sont faibles et languissants, Sur les bords de ce lac les curieux ne manquent point d'aller visiter la grotte du Chien; mais elle a beaucoup perdu de sa réputation depuis que l'on connaît dans plusieurs contrées volcaniques d'autres cavernes d'où s'exhale l'acide carbonique. Sur le côté opposé à celui où l'on voit cette grotte, on remarque les étuves de San-Germano, et la célèbre source des Pisciarelles, dont on vante les effets salutaires.
Sur le côté du sud-ouest du lac on voit la célèbre Solfatare, connue jadis sous le nom de vallée de Phlegra et de Forum Vulcani, reste d'un cratère de forme elliptique, dont le grand diamètre est de 300 mètres, et qui est environné de collines formées de laves qui furent jadis les parois de cet entonnoir volcanique. Le fond du cratère est à 100 mètres au-dessus du niveau de la mer. Aux environs , le sol caverneux retentit sous les pas du voyageur. Le soufre et l'alun que l'on en retire semblent être une inépuisable richesse pour l'industrie. Il est à remarquer que les exhalaisons sulfureuses de la Solfatare ne cessent que lorsque le Vésuve est en éruption.
Non loin du lac Agnano est Astroni, autre cratère formé en même temps que celui (FAverne. Sa profondeur est de 35 mètres ; il est rempli d'arbres grands et majestueux, formant le seul bois des environs de Naples qui rappelle les belles forêts du Nord.
Suivant le docteur Forbes, l'Achéron ou le lac Fusaro, qui communique avec la mer, est au milieu d'un sol alluvial. Au sud s'élève le monte di Procida, composé d'un conglomérat porphyrique.
Il contient des fragments de granit et de syénite, et se termine dans la mer par le Scoglio delle pietre arse, qui est formé d'une roche de rétinite couverte de lave terreuse.
Toute la partie des champs Phlégréens, depuis le château de l'OEuf, près de Naples, jusqu'au cap Misèue, à l'extrémité occidentale de la baie de Pouzzole, est composée de roches volcaniques. Le mont Pausilippe est formé de pépérine ponceuse qu'il a été facile de percer pour la route souterraine appelée Grotte de Pouzzole, parce qu'elle conduit de Naples à cette ville. Dans la caverne de Misène, creusée par l'art, un peu au-dessus du niveau de la mer, dans une roche analogue à celle de Pouzzole, on voit des efflorescences d'hydrochlorate d'alumine en tapisser continuellement les parois.
LE VÉSUVE. — Le Vésuve est le chef de tous les petits volcans modernes du territoire de NapleS-. Aussi actif qu'il y a dix-huit siècles, il passe pour être le seul en Europe qui rejette des roches de différentes natures sans les altérer. Dans l'éruption qu'il éprouva en 1822, sa hauteur diminua d'environ 32 mètres; le point le plus septentrional de sa cime a 1,198 mètres d'élévation absolue; les parois de son cratère offrent la succession d'un grand nombre de couches de lave qui pourraient presque servir à calculer celui de ses éruptions. Dans cette cavité conique on a plusieurs fois observé des laves prismatiques presque aussi régulières que les plus belles colonnes de basalte. Le mont Somma, qui était le sommet du Vésuve au temps de Strabon, l'entoure aujourd'hui en partie, et n'en est séparé que par la colline volcanique de Cantaroni. Cette longue ceinture, appelée Somma, paraît être formée de roches d'origine ignée, qui, au lieu d'avoir été vomies par un cratère, sont sorties par l'effet d'un soulèvement ancien. Près du cratère, la lave retentit sous les pas : il semble qu'elle soit prête à s'engloutir dans le gouffre qu'elle recouvre ; des vapeurs brûlantes sortent d'un grand nombre de petites crevasses tapissées de soufre en efflorescence, et dans lesquelles la flamme se manifeste lorsqu'on y présente une matière combustible. Ce qui complète avec la Somma la ceinture de la cime du Vésuve, c'est la Padimentina, qui, à l'est, se rattache à la Somma, et à l'ouest se termine à peu de distance du Cantaroni.
Entre la Somma et le cône du Vésuve se trouve une sorte de vallée appelée alrio del Cavallo (vestibule du Cheval), parce que les voyageurs y laissent leurs montures. La base entière du Vésuve présente des cratères et des vallons plus ou moins considérables : tels sont la costa della Toja et la costa del Gando, le vallone della Paliata, le vallone dell' Angelo et le vallone di Constantinopoli. Il serait inutile de décrire le cône du Vésuve, car sa forme change à chaque éruption ; nous nous bornerons à rappeler que depuis J'an 79, date de la première éruption dont les hommes aient conservé le souvenir, on en compte 85 jusqu'à celle qui eut lieu en 1850.
Cette montagne volcanique est isolée au milieu d'une plaine ; elle n'est formée que de matières vomies du sein de la terre, en sorte que sa masse donne la mesure exacte de la cavité d'où elles sont sorties. Sa base est divisée en propriétés de peu d'étendue, mais très-ferfiles : on peut juger de la richesse du sol que forme la lave en se décomposant par la quantité d'habitants comparée à sa superficie: chaque kilomètre carré nourrit 1,222 individus. On est d'abord étonné de la sécurité de cette population, qui semble être menacée d'une destruction subite et complète ; mais on est bientôt tranquillisé par l'idée que chaque éruption est annoncée à l'avance par des indices certains i la terre est ébranlée, un bruit sourd fait retentir ses entrailles,- les puits tarissent et les animaux errent épouvantés.
Averti du danger, l'homme a le temps de s'échapper et de mettre à l'abri ce qu'il a de plus précieux. Dans les intervalles de ses éruptions , ce volcan rejette sans cesse des tourbillons de fumée.
RICHESSE MINERALE. — La richesse minérale de l'Italie consiste plutôt en substances pierreuses qu'en substances métalliques; toutefois elle n'est pas sans importance. N'a-t-elle point la serpentine du revers méridional des Alpes, le porphyre des Apennins, le marbre de Carrare, l'albâtre de Volterra, le marbre brèche de Stazzema, composé d'une réunion de fragments de diverses couleurs; le marbre noir de Pistoja, le vert de Prato, les brocatelles de Piombino; la pierre calcaire de Florence, dont les plaques polies représentent des ruines ou d'élégantes arborisations formées de molécules de manganèse; la baryte sulfatée du mont Paderno, dont on fait par la calcination la pâte appelée phosphore de Bologne ; les jaspes de Barga, les calcédoines de la Toscane, le lapis-lazuli des environs de Sienne, le jargon du Vicentin, le grenat du Piémont, l'hyacinthe du Vésuve, et les mines de la Sicile et de la Sardaigne, qui fournissent un peu d'or, quelques centaines de kilogrammes d'argent, quelques milliers de quintaux de plomb, et 5 ou 600,000 quintaux de fer ?
ILES QUI DÉPENDENT DE L'ITALIE. — De nombreuses îles dépendent du territoire de l'Italie; les plus importantes sont : la Sicile, la Sardaigne, et nous pourrions même dire la Corse, puisque, considérée physiquement, celle-ci n'est qu'un démembrement de l'autre. Celles qui viennent ensuite, classées d'après leur importance, sont, au sud de la Sicile, Malte, Gozzo et Pantellaria; puis, entre la Sicile et le continent, les îles d'Eole ou de Lipari; à l'entrée du golfe de Naples, Ischia et Capri; enfin l'île d'Elbe, entre la Toscane et la Corse.
LA SICILE. — Située entre l'Europe et l'Afrique, la Sicile est la plus grande des îles de la Méditerranée. Elle a 1,020 kilomètres de tour, et 1,270 kilomètres en tenant compte des découpures des côtes; sa superficie est estimée à 24,475 kilomètres carrés. Une chaîne de montagnes qui fait suite aux Apennins s'y divise en trois branches, dont les extrémités se terminent par trois caps principaux : celui de Rasocolmo au nord-est, celui 5e San-Vito au nordouest et celui de Palo au sud-est. Ces trois branches partagent la masse triangulaire de l'île en trois versants celui du nord, celui de l'est et celui du sud-ouest. Ils donnent naissance à un grand nombre de cours d'eau; les plus importants sont: au midi, le Belici, le Platani et le Salso; à l'est, la Giarretta; le versant septentrional , étroit et rapide, n'est sillonné que par des ruisseaux.
COMPOSITION GÉOGNOSTIQUE. - La roche principale qui sert de charpente aux montagnes de la Sicile est, suivant Spal" lanzani, un granit qui se décompose facilement; mais les caractères qu'il lui donne nous portent à croire que cette roche est du nombre de celles qui se sont souvent fait jour au milieu des roches à débris organiques, c'est-à-dire qui rentrent dans la catégorie des syénires, des diorites et des protogynes. Sur ce noyau granitoïde s'appuient des calcaires remplis de madrépores, de mollusques marins et de poissons fossiles.
L'ETNA. — C'est sur le versant oriental de la Sicile que s'élève le mont Gibel ou l'Etna, volcan si considérable que le Vésuve ne serait qu'une colline auprès. Sa hauteur est de 3,237 mètres audessus du niveau de la mer; sa base a 110 kilomètres de circonférence ; mais si l'on y comprend tout l'espace sur lequel la lave s'est étendue, sa circonférence est de plus du double. Il est divisé en trois régions végétales : la première est celle de la canne à sucre et du blé, elle porte le nom de région fertile (regione coltivata) ; la deuxième, celle des vignes, de l'olivier, du hêtre, du chêne et du châtaignier, se termine par des arbres résineux, et porte dans le pays le nom de région boisée (regione selvosa) ; la troisième, celle des plantes boréales et des neiges, est appelée région stérile (regione scoperta). On voit qu'elles représentent les éléments et la végétation des trois grandes zones de la terre; aussi pourrait-on les appeler zone torride, zone tempérée et zone glaciale.
La lave et les scories de l'Etna ne sont pas moins susceptibles d'être fécondées que celles du Vésuve : sa base, sur une circonférence de 450 kilomètres, nourrit 180,000 habitants. Les végétaux y acquièrent une vigueur prodigieuse. Près du promontoire d'Aci, qui rappelle la fable d'Acis et Galatée, d'antiques châtaigniers, témoins muets des révolutions politiques et des convulsions de la nature qui depuis tant de siècles agitent la contrée, étendent leurs gigantesques rameaux. Plusieurs de ces arbres ont 4 a 5 mètres de diamètre.
Au milieu de la deuxième région se trouve, sur la pente méridionale, la grotte des Chèvres (grotta dette Capriole), ainsi appelée parce que ces animaux viennent s' y réfugier dans les mauvais temps.
Près de cette caverne, on voit les deux plus belles montagnes qu'ait enfantées l'Etna : le Monte-Nero et le Monte-Capreolo. Sur la même
pente, mais près du sommet, dans la région stérile, la tour du Philosophe (torre delFilosofo) attire l'attention, parce que l'opinion vulgaire est qu'elle fut érigée par Empédocle, qui en fit son habitation pour mieux étudier les éruptions du volcan, tandis que plusieurs personnes pensent qu'elle est un reste d'un temple de Vulcain, et que d'autres croient que ce fut une vedette construite par les Normands pour observer au loin les mouvements de l'ennemi. Quelle que soit son origine, tout porte à croire que cet édifice est d'une époque fort ancienne.
Ce terrible volcan, dont le cratère, dominé par un rocher pyramidal , a plus de 4 kilomètres de circonférence et 228 mètres de profondeur, est souvent visité par les curieux; mais rarement on peut parvenir jusqu'à sa cime glacée, tant les dangers augmentent après avoir passé la première région des neiges.
Une des plus importantes de ses dernières éruptions est celle de 1812, qui dura six mois; celle de 1819 fut considérable. Un voyageur qui en fut témoin vit sortir la lave sous ses pieds; elle formait un courant de 20 mètres de largeur sur la montagne et de 400 à sa hase. Elle ravagea une étendue de 9 kilomètres, embrasant les arbres qu'elle touchait. Au- dessus de la bouche qui la vomissait, un cratère lançait des pierres à plus de 300 mètres de hauteur (1).
SALSES DE SICILE. — On connaît dans l'île plusieurs salses semblables à celles de Modène : l'une est celle de Valanglte della Lalomba, l'autre celle de Terra Pilata, et la troisième celle de Macaluba. La première est la moins importante; elle cesse d'être en mouvement pendant les grandes chaleurs. La seconde consiste en une éminence divisée par plusieurs fentes; un grand nombre de petits cônes y lancent à 2 ou 3 mètres de hauteur de la fange et du gaz, d'autres du gaz hydrogène seul; plusieurs cônes profonds de lm,72 rejettent constamment de l'hydrogène, qui s'enflamme dès qu'on en approche une substance incandescente. La salse de Macaluba, située sur un monticule de 17 mètres de hauteur, produit des phénomènes un peu différents : Dolomieu lui donne le nom de volcan d'air. De ses petits cratères s'exhalent des bulles de gaz qui, rompant l'argile qui les recouvre, produisent un bruit semblable à celui d'une bouteille que l'on débouche. Ce monticule renferme une source d'eau salée; sur le sol calcaire de ses environs s'élèvent d'autres monticules d'argile grisâtre, qui contiennent du gypse. Le terrain de Terra Pilata doit le nom qu'il porte à sa stérilité ; il n'y croît aucun végétal.
FERTILITÉ, PRODUCTIONS DE LA SICILE. — Les terres de la Sicile sont douées de la plus grande fertilité; l'olivier y est plus grand et plus robuste que dans les autres parties de l'Italie; le pistachier y est abondant, et le cotonnier cultivé avec beaucoup de soins; mais les forêts y sont depuis longtemps épuisées, au point que le bois est extrêmement rare. La culture des fèves y remplace l'usage des jachères; l'abeille est une des principales richesses du pays : le miel de Sicile est justement estimé. Les animaux n'y diffèrent point de ceux de la Calabre ; et parmi les oiseaux, le plus fidèle au sol et le plus recherché pour son chant plein d'harmonie est le merle solitaire (turdus cyaneus ).
LA SICILE A-T-ELLE FAIT PARTIE DU CONTINENT? —
Ne quittons pas la Sicile sans examiner une question sur laquelle plusieurs savants ont été divisés : la Sicile a-t-elle fait partie jadis du continent? Dans cette question, ceux qui nient la possibilité de cette séparation ont peut-être passé trop légèrement sur les traditions rapportées par les anciens. Pline et Pomponius Mela l'ont admis comme un fait incontestable. Les poëtes décrivirent cette catastrophe :
(1) La dernière éruption date de l'année 1851. Le silence que garde Homère sur les feux de l'Etna fait présumer que de son temps il était dans le même état de calme que le Vésuve au temps de Strabon. Depuis l'époque historique la plus reculée, le nombre de ses éruptions s'élève à 96, savoir :
Avant l'ère chrétienne 10 Au premier siècle de cette ère. 1 Au troisième ]
Au neuvième.,.,.,. ]
Au douzième 2 Au treizième 1 Au quatorzième 3 Au quinzième 4 Au seizième. , , 9 Au dix-septième. , 22 Au dix-huitième. , , , , 32 Depuis le commencement du dix-neuvième. 10 TOTAL. 96
Virgile et Silius Italicus en fournissent la preuve. Une tradition populaire peut n'être point d'un grand poids aux yeux des savants, lorsqu'elle est opposée aux témoignages de la raison et aux faits qui forment la base d'une science; mais lorsqu'elle s'accorde avec ces témoignages et ces faits, elle doit être considérée comme une preuve de quelque importance. Il est vrai qu'au premier abord l'autorité de l'histoire a droit à plus de confiance qu'une simple tradition qui se perd dans la nuit des temps; mais, en y réfléchissant, on sent que, pour peu que l'on remonte à une certaine antiquité, l'histoire même se confond avec les fables; et l'imagination peut facilement se transporter à une époque où les peuples ignoraient l'art de fixer les idées par le moyen de l'écriture, où l'histoire ne reposait que sur des traditions. Une objection importante en apparence a été faite par Cluver contre la possibilité de la catastrophe dont nous nous occupons; il dit que le cours des rivières sur les dernières pentes de l'Italie, du côté de Messine, indique une inclinaison générale et ancienne du terrain vers la mer; mais, en admettant que la chaîne apennine, minée par les feux souterrains, s'est rompue à l'endroit même où une dépression séparait deux sommets ; en admettant surtout qu'au moment de cette rupture les eaux de la mer se seront précipitées avec violence dans le détroit de Messine, elles auront dû contribuer à adoucir les pentes qui terminent l'Italie d'un côté, et les caps de Messine et de Rasocolmo de l'autre. Voilà ce qu'on peut répondre aux objections relatives à la configuration actuelle du terrain : mais que répondra-t-on aux observations géologiques qui prouvent que les montagnes de la Sicile sont formées des mêmes roches que celles de l'Apennin? Regardera-t-on comme une rêverie l'idée qu'un violent tremblement de terre ait pu faire écrouler une partie de cette chaîne sur une largeur de moins de 4 kilomètres, sous prétexte qu'il n'est point vraisemblable que l'Apennin méridional soit miné, et pour ainsi dire placé sur d'immenses cavités, lorsqu'on sait avec quelle intensité les feux souterrains ébranlent la Calabre, lorsque ceux-ci ont formé une montagne aussi importante que l'Etna, lorsqu'ils ont soulevé au milieu des flots les sommités volcaniques auxquelles on donne le nom d'îles de Lipari?
ROCHERS DE CHARYBDE ET DE SCYLLA. — A 6 kilomètres de la pointe du phare situé près du cap Rasocalmo, s'élève un rocher fameux dans l'antiquité comme le plus redoutable écueil.
Coupée à pic, la- base de Scylla est percée de plusieurs cavernes; les flots qui s'y précipitent se replient, se brisent et se confondent en produisant un bruit effrayant, qui explique pourquoi Homère et Virgile ont peint Scylla poussant d'horribles hurlements dans sa profonde retraite, entourée de chiens et de loups menaçants. Chal'ybde, aujourd'hui Calofaro, à 272 mètres du rivage de Messine, ne ressemble point à la description qu'Homère en a faite ; ce n'est pas un gouffre, c'est un espace ayant à peine 32 mètres de circonférence , qui éprouve le remous que l'on remarque en mer dans tous les passages étroits.
GROUPE DE MALTE. — Entre la Sicile et l'Afrique, Malte, Gozzo et Comino forment une superficie de 255 kilomètres carrés.
La première, l'antique Melita, longue de 22 kilomètres et large de 12, est un rocher calcaire à peine couvert d'une légère couche de terre végétale que la chaleur de son climat rend fertile. Plus de 80 sources l'arrosent. Ses oranges célèbres et d'autres fruits exquis, la beauté de ses roses, les douces exhalaisons de mille fleurs diverses, son miel délicieux, la fécondité de ses brebis et de ses bestiaux, s'accordent peu avec l'idée qu'on doit se faire d'un sol sur lequel on est obligé d'apporter de la Sicile la terre végétale lorsqu'on veut y créer des jardins.
La petite île de Comino est une pointe de rochers d'environ 500 pas de circonférence, qui doit son nom.à la grande quantité de cumin qu'on y cultive. Gozzo, jadis Gaulos, hérissée de montagnes, a 18 kilomètres de long sur 9 de large; elle est fertile en coton, en grains et en plantes potagères. Plus près de l'Afrique que de la Sicile, l'île volcanique de Pantellaria, l'antique Cossyra, n'offre de tous côtés que des pentes abruptes et des cavernes. Au centre, un lac de 800 pas de circuit et d'une immense profondeur occupe la cavité d'un ancien cratère; ses eaux sont tièdes et ne nourrissent point de poissons. Du pied de la plupart des montagnes arides et brûlées sortent des sources bouillantes. Les parties de sol les moins rebelles à la culture produisent du raisin, des figues et des olives.
Lampedouse, jadis Lopadusa, plus près de l'Afrique que de Malte, a environ 40 kilomètres carrés ; elle est inhabitée, mais seulement fréquentée accidentellement par les pêcheurs.
UNE ILE ÉPHÉMÈRE. — C'est entre Pantellaria et la Sicile, à 34 kilomètres au nord de la première et à 55 de la seconde, que s'éleva en 1831, vers le 10 juillet, une petite île volcanique, qui reçut des Anglais le nom d'île Graltm, des Siciliens celui de Fernanda, et des Français celui de Julia. C était un volcan qui brûlait au sein des flots, et que ceux-ci engloutirent au commencement de 1832.
ILES ÉGADES. — Près des côtes occidentales de la Sicile, les trois îles Egales, Favignana, Maretimo et Levanza, sont peu digues de fixer F attention. Ou y élève des abeilles, Au nord, toutes les fies ue sont que d'anciens cratères, A 47 kilomètres du cap de (iqllQ, Ustica est dominée par trois petits sommets volcaniques" qui, sous la domination phénicienne, étaient depuis longtemps éteints. Son 401 noirâtre et fertile produit du raisin, des olives et du coton, ILES LIPARI. - A l'est de l'île d'Ustiça s'étendent celles d'Eole ou de Limri, les police et Vulcaniœ des anciens i elles sont au nombre de 16, Ba^itunzo, Paxiaria, Dattola et les trois Pinarelli ne sont que des gLCueilf. composés de laves trachytiques et de laves poreuses Recouvertes de sulfate d'alumine. On peut les regarder comme les débris d'un volcan qui fut le centre de tout le groupe des {ûpari, Baçilvzzo renferme quelques maisons habitées. On assure qu'autour dft çes îlots le gaz hydrogène s'élève à la surface des eaux. Le sol d'alioudi ou Alicuda est couvert de laves globuliformes. Spallanzani y a remarqué une masse de. poxphyre qui ne paraît point avoir subi l'action du feu, Filicuri ou Felicudi, l'ancienne Phoenicuea, est intéressante par les couches de laves et de tufa ou pépérine qui alternent, et par une vaste cavité que l'on appelle la grotte du bœuf marin longue de 65 mètres, large de 40 et haute de 21, Le même savant y observa un bloc de roche granitique analogue à celle que l'on remarque près de Melazo en Sicile.
Ce. bloc, qui paraît avoir été transporté par les eaux, ne prouverait-^ point qu'une éruption marine a contribué avec l'action des feux souterrains à séparer la Sicile de l'Italie? Salina, que Spallangani croit être l'ancienne Didyma,, a 16 kilomètres de circonférence ; on y voit un critère. Fertile en vins très-recherchés, elle doit son nom à l'abondance du sel que l'on retire d'un lac séparé de la mer par une petite digue de laves amoncelées par les flots. La chaleur du soleil fait les principaux frais de cette exploitation : l'eau, en 5 évaporant des fosses que l'on y pratique après avoir mis le lac à sec, laisse une épaisse couche de sel.
Lipari, la plus grande de ces iles, a près de 26 kilomètres de tour : elle est couverte de laves feldspathiques, de verre volcanique ou d'obsidienne, et de pierres ponces dont elle approvisionne toute l'Europe. La montagne de Qumpo - Bianco, d'où on les retire , est composée de conglomérats ponceux, renfermant, suivant Spallanzani et Dolomieu t des restes de végétaux, et formant des couches parallèles qui alternent avec les pouces, Vulcano, l'antique Vulcania, qui n'a pas 26 kilomètres de circonférence i offre deux cratères dont l'un paraît être épuisé , et dont l'autre, d'une vaste dimension, envoie dans les airs des tourbillons de fumée. On évalue sa profondeur à 1,400 mètres et son diamètre 4 770 ; sa dernière éruption date de 1775. On peut descendre dans le cratère éteint; on y voit une grotte revêtue de stalactites de soufre. L'île renferme une autre grotte dont les murs sont recouverts de soufre, de sulfate d'alumine et de chlorhydrate d'ammoniaque, ainsi qu'un petit lac dont les eaux chaudes dégagent de l'acide carbonique.
Les produits volcaniques de Pmaria, jadis Hycesia, n'ont rien de particulier : il y croît, comme à Lipari, du blé, des olives, des figues et d'excellents raisins.
Scrombali, l'antique Strongylç, la plus septentrionale de ces îles, n'est qu'un volcan escarpé, dont le cratère, ouvert sur l'un de ses lianes, est toujours en feu. Ses éruptions se renouvellent deux fois dans un quart d'heure. Elle a 800 mètres de hauteur, et est composée d'agglomérats volcaniques et de bancs dq lave. Cette lave contient de beaux cristaux de fer oligiste, ILES DU GOLFE DE NAPLES. — L'entrée du golfe de Naples est défèndue par trois îles : à droite, celle de Çapri ou de Caprée; 6 gauche, celles dlIsphia et de Procida, La première, large de 5 kilomètres et longue de 7, n'offre aucune traGe de vulcanisation ; uq roclier calcaire qui s'élève à pic sépare l'île en deux parties ; on y monte par un escalier de 500 marches, qui sert à faire communiquer ses habitants de l'une à Vautre. On dit que dans certaines saisons les cailles se rassemblent en si grand nombre sur les terres les plus fertiles de l'île, qu'on en prend pour plus de 100 ducats par jour. La dîme perçue par l'évêque sur cette chasse forme son principal revenu, lae.hia, l'antique /Enaria compte 36 kilomètres de circonférence.
Son sol est entièrement volcanique; la lave y a recouvert les derniers dépôts marins. Strabon dit que. ses anciens habitants tiraient de grands avantages de sa fertilité et de ses mines d'or ; mais il est probable que le géographe grec a commis une erreur car on ne trouve dans ses laves aucune trace de ce métal. Ses anciens volcans, le MORffclL Vioo et l'EpDtneO, rivalisent de hauteur avec le Vésuve. L'éruption qui se manifesta en 1302 dura. deux mois et fit déserter l'ile, mais aujourdJmi elle est très-peuplée. On y récolte d'excellents vins, comme du temps des anciens ; ses sources minérales et ses étuves attirent un grand nombre d'étrangers. Procida, jadis Pracbyta, placée entre le continent et la précédente, n'a que 12 kilomètres de circonférence; c'est un des points du globe les plus
peuples : elle nourrit 14,000 habitants. Son sol volcanique, formé de plusieurs dépôts successif s de laves, abonde en orangers, en figuiers et en vignes.
A l'ouest d'Ischia s'étendent les îles Ponces; elles sont au nombre de cinq : San Stefano, Vemlotena ( Pandataria), Zannone, Ponza et PalmarolaPlusieurs îlots s'élèvent entre ces tles, dont la plus considérable est Povza, la Pontia des anciens, longue de 11 kilomètres et large de 2. Elle est formée, comme celles qui l'entourent, de roches trachytiques, restes d'antiques embrasements qui ont coulé au milieu de dépôts volcaniques pulvérulents. L'un des points les plus élevés de l'île est la montagne délia Guardia.
ILES DE LA MER, DE TOSCANE, — Vers le nord, entre la Corse et la Toscane, on voit plusieurs autres îles; les plus méridionales sont : Gianuti, autrefois Artemisia, et selon d'autres fliamum; Monte-Cristo, l'ancienne Oglosa, habitée par quelques pêcheurs; et Giglio, connue des Romains sous le nom d' Æilium.
Celle-ci est hérissée de collines couvertes de bois ; on y exploite des granits et des marbres estimés ; son territoire produit beaucoup de vins. PiwQsa, l'antique Planasia, île boisce, mais peu habitée, n'est pas éloignée de l'île d'Elbe. Au nord de celle-ci, à la hauteur du cap Corse, Capraja, petite île calcaire, est bien peuplée ; et vis-à-vis de Livourne, Gorgona, plus petite encore, est couverte de bois et sert de rendez-vous aux pêcheurs de sardines.
ILE D'ELBE, — L'île d'Ele, si renommée pour ses mines de fer, dont l'exploitation remonte à la plus haute antiquité, était appelée /Ethalia par les Grecs et Ilva par les Romains; elle a près de lO kilomètres de tour et 221 de superficie. Le granit, le schiste micacé et le calcaire marbre sont les principales roches qui composent les. montagnes qui la traversent de l'est à l'ouest. La plus haute de leurs cimes est la Capajma^ Malgré quelques marais infects, le climat y est saJuhre, On n'y voit point de rivières ; le ruisseau du Rio est son seul cours d'eau, mais les sources y sont abondantes et ne tarissent jamais, On y connaît quelques eaux minérales; on y fait de très-bons vins. Ses pâturages occupent peu d'étendue, mais ils sont excellents.
ILE DE SARDAIGNE. — L'île de Sardaigne, dont la longueur du nord au sud est de 270 kilftnètres et la plus grande largeur de 156, forme une superficie de 3,100 kilomètres carrés. EUejest traversée du sud au nord par une chaîne de montagnes qui projette à l'ouest deux rameaux, dont l'un se dirige vers le nord-est et l'autre vers le sud-ouest. Ou plutôt la Sardaigne ne présente point de véritables chaînes de montagnes ; l'arête centrale, qui offre les plus hauts sommets t est interrompue à plusieurs reprises par de profondes coupures transversales, par des plateaux assez étendus et de larges plaines basses. Sa charpente est formée par le granit.
Cette roche constitue le mont Genargentu, que ses deux pics, l'un de 1,864 et l'autre de 1,917 mètres de hauteur, mettent au rang des points les plus élevés. Près de Giave on voit un petit volcan moderne que caractérisent des pouzzolanes et des scories. L'existence de l'or dans les montagnes de la Sardaigne est fort incertaine, mais on y connaît plusieurs mines de plomb et de fer- L'argent, le cuivre et le mercure y sont fort rares.
La Sardaigne présente un caractère particulier, c'est le grand nombre et l'étendue de ses étangs et de ses marais. Il y en a qui communiquent avec la mer par des coupures artificielles, comme le grand étang de la Scaffa près de Cagliari. Les eaux de ces étangs sont basses, et lorsque les vents du nord viennent à souffler, ces eaux refoulées ne permettent même pas aux bateaux plats d'y naviguer ; d'autres, étangs, dont le niveau est plus bas que celqi de la mer, ont probablement avec elle une communication souterraine; d'autres enfin, placés au pied de grandes masses de tracbite, doivent leur origine à des circonstances purement géologiques et locales.
Les principales rivières sont, sur le versant occidental de la grande chaîne : YOzieri, au nord; l'Oristano, au centre, et le Mannu, au sud; sur le versant opposé, nous ne citerons que le Flmnendosa. L'Oristano a 90 kilomètres de cours; les plus considérables après celui-ci n'en ont pas plus de 60. La Sardaigne a de nombreux étangs dont les eaux sont plus ou moins salées, qualité qu'elles doivent au voisinage de la mer ou aux terrains de formation salifere qu'elles traversent.
Le climat de cette île est tempéré ; elle est souvent exposee aux funestes effets d'un vent du sud-est, le levante, qui est le sirocco des Napolitains. Strabon, Tacite, Cicéron et Cornélius Nepos parlent de l'insalubrité de la Sardaigne (Sardinia), Les mêmes effets sont encore aujourd'hui produits par les mêmes cames ; les miasmes qui s'exhalent des marais, surtout après les premières pluies, font naître des fièvres intermittentes fort dangereuses.
La cinquième partie du sol de la Sardaigne est couverte d'antiques forêts de chênes dont les principales espèces sont le chêne commun (quercus robur), l'yeuse (quercus ilex) et le chêne-liége (quercus suber). L'île offre trois zones végétales différentes : celle
des montagnes, ou la plus élevée, est tout à fait analogue au climat de la Corse; celle des plaines et des côtes septentrionales ressemble à celui de la Provence et d'une partie de l'Italie; enfin celle des plaines et des côtes méridionales rappelle la nudité de l'Afrique.
C'est plutôt au caractère du Sarde qu'à la qualité de son sol qu'il faut attribuer le peu d'avancement de l'agriculture en Sardaigne.
L'île ne renferme aucune bête féroce. Parmi les animaux sauvages, les plus importants par leur taille sont le cerf, le daim, la chèvre et le sanglier; ils sont cependant plus petits que sur le continent.
Le mouflon se distingue de celui de la Corse par la forme de ses cornes, qui se rapprochent de celles du bélier. La Sardaigne nourrit aussi la plupart de nos petits quadrupèdes, comme le renard, le lapin, le lièvre, la belette , etc. Les animaux domestiques s'y distinguent par des caractères particuliers : le cheval est petit, sobre, vigoureux, et peut se rendre utile jusqu'à 20 ou 30 ans; l'âne est petit et couvert de JoQSS poils; le bœuf, comme celui de Hongrie, est vif, agile, fougueux, et muni de eornes d'une grandeur extraordinaire. La chèvre est le seul animal qui n'offre point cette dégradation de taille que Ton remarque chez les mammifères de la Sardaigne.
L'aigle plane au-dessus des montagnes; le vautour dévore dans la plaine leg cadavres putréfiés; la fauvette, le merle et la grive habitent les champs et les guérets; la perdrix de roche se tient dans les broussailles et sur les sommets arides. Les flamants arrivent d'Afrique vers le milieu tfaoût; deux mois plus tard, les cygnes, les canards et les oies, sortis des régions septentrionales, les joignent, et sont suivis des héron, des foulques et des cormorans. La marche tardive de la végétation, le desséchement subit de la plupart des plantes, rendent les insectes plus rares en Sardaigne que dans les autres contras méridionales de l'Europe. On y trouve cependant la tarentule, une espèce de scorpion peu dangereuse, les sauterelles et une grande quantité de cousins. Vabeille fournit un miel eueJlent qui dans quelques onetrées prend line amertume qui n'est point désagréable et que l'on attribne aux fleurs de l'arbousier. L'île ne nourrit d'autres reptiles que plusieurs espèces de lézards et une très-petite couleuvre. La plupart de nos paissons peuplent ses eaux
douces et marines; les seuls amphibies remarquables que l'on trouve sur ses rivages sont deux espèces de phoques.
La Sardaigne est environnée de petites îles, dont les plus importantes sont : au sud-ouest, San-Antioco et San-Pietro; au nordouest, Asinara; au nord, la Maddalena, Caprara et Tavolara.
Sau-Antiaco, l'Enosis des Romains, a 36 kilomètres de tour, des terres fertiles et des salines. San-Pietro, divisée du nord au sud par une colline, est l'ancienne Hieraeum; sa circonférence est d'environ 35 kilomètres. Ses habitants pèchent le corail, exploitent des salines et cultivent un sol fertile. Asinara, YInsula Herevlis des anciens, longue de 18 kilomètres, large de 9, est montagneuse, couverte de pâturages, et cependant ne renferme que quelques cabanes de bergers et de pêcheurs. Tavolara, l'ancienne Hermœa, rocher calcaire babité par des chèvres sauvages, était fréquenté par les anciens, qui allaient pécher sur ses côtes le mollusque dont ils liraient la pourpre.
ILES DE LA MER ADRIATIQUE. — L'Italie n'a dans la mer ou le golfe Adriatique que- de petites îles an des ilôts; tes plus considérables forment, près des çôtes du royaume de Naples, au nordouest du Monte-Gargano, le groupe des îles TrewJti, les Diomedœ insulœ des anciens, et dans lesquelles Tibère envoya en exil Julie , nièce cfaupste, qui y mourut après un séjour de 20 ans. Elles soolau nombre de cinq : San-Domiaico. la plus grande et la plus méridionale, a à peine 9 kilomètres de circonférence ; die renferme des collines, des bois et quelques champs en eullure, mais elle manque de sources ; il n'y a que de l'eau de citerne. Elle possède une saline qui fournit de beau sel blanc. San-Nieola, la plus orientale, est un peu moins grande et aussi dépourvue d'eau; il s'y forma, le 15 mai 1816, un petit cratère qui vomit pendant sept heures des pierres et une lave sulfureuse, et qui depuis eut de nouvelles éruptions. Caprara, la plus septentrionale, doit son nom à la grande quantité de câpriers qu'elle renferme; CrtBaeio et la Yeeckia ne sont que des écueils qui servent de retraite à un grand nombre d'oiseaux de mer. Cet iles produisent de l'huile excellente et des fruits exquis.
SARDAIGNE.
ANCIENS HABITANTS.- Longtemps avant notre ère, les bords méridionaux du lac Léman étaient habités par les Nanlunies; ceux de la Dora étaient occupés par les Salassi, peuple celle sur lequel Strahon donne quelques renseignements : if dit que la plus grande partie de leur territoire est dans une profonde vallée : c'est celle d'Aoste. Il ajoute qu'ils possèdent des mines d'or; mais nous sommes porté à eroire qu'ils exploitaient ce métal par le lavage dans des terrains d'alluviort; car, selon lui, la Duria, aujourd'hui la Dota, leur fournissait l'eau nécessaire pour cette opération; souvent ils la tarissaient, ce qui faisait naître des querelles sanglantes entre eux et leurs voisins, qu'ils privaient de cette rivière utile à leurs travaux agricoles. Ils curent fréquemment avec les Romains des combats et des trêves : leurs défilés et leurs montagnes doublaient lewrs forces. Ils eurent aussi la hardiesse de taxer à une drachme par tète les soldats de l'armée de Deeius Brutus, qui fuyaient de Modène, et de faire payer à Messala le bois de chauffage et les arbres nécessaires à ses soldats campés dans leur voisinage. Ils pillèrent même une fois le trésor impérial; et sous prétexte de travailler aux ponts et chaussées, ils firent rouler sur des légions d'énormes masses dé pierres. La conduite de ce peuple irrita tes Romains, Auguste le détruisit; 40,000 prisonniers furent vendus comme esclaves, 4,000 furent incorporés dans la garde prétorienne, et 3,000 Romains envoyés par Auguste fondèrent la ville d' ,qugtl,çta da os le lieu même ou Varron, leur vainqueur, avait fait camper son armée. C'est cette ville qui a donné son nom à la vallée d'Aoste.
Les Jawvni habitaient entre les Alpes, le Pô et la Dora. Ils étaient d'origine celtique, comme les précédents. Les Statielli, sur lesquels on a très-peu de détails, occupaient la rive droite du Tanaro; mais- à l'ouest de- ces peuples, et au pied des Alpes, était placé celui auquel les anciens donneat indistinctement k'S noms de
l'agienni, de Vageni ou de Bageni. Au sud de ceux-ci, sur le versant méridional des Alpes , la petite nation des Intemelii s'étendait jusqu'à la mer. Enfin sur le versant méridional des Apennins, dans l'espace compris entre Gênes et la Spezzia, le petit peuple des Apiiani portait le nom de la ville d'Apua, aujourd'hui Pontremoli.
Le territoire de ces quatre derniers peuples constituait la province romaine de Ligurie. Les autres étaient compris dans la Ganle viennoise et dans la Gaule cisalpme.
HISTOIRE. — C'est vers la fin du quatrième siècle que le pays voisin du lac Léman prit le nom de Savoie (Sab'auâia) (1). Ce pays, beaucoup plus considérable alors qu'aujourd'hui, comprenait celui dcVaud, dont une partie appartenait à la contrée appelée Maxima Sequanorum dans la Gaule belgique. Il fut successivement envahi par les Ostrogoths et les Bourguignons ; ceux-ci l'incorporèrent au royaume qu'ils fondèrent vers l'an 408; mais en 532, ce royaume ayant été conquis par Childebert, roi des Francs, la Savoie appartint à la France jusqu'à l'époque du partage des États de Charlemagne, qu'elle échut à Lothaire et fit partie du corps germanique.
Un nouveau royaume de Bourgogne s'étant constitué en 888, ta Savoie y fut incorporée vers l'an 930. Rod-olphe III, dit re Fcrinéant, qui mourut vers l'an 1031, donna son royaume à l'empereur Conrad le Salique, après avoir toutefois érigé la Savoie et la Maurienne en comté, en faveur d'un seigneur Berthold ou Berold qui avait rendu de grands services à l'État. Conrad confirma Humbert aux blanches
(1) Le plus ancien auteur qui emplbie ce nom est Ammien- Maïccllin, qui vécut jusqu'en 390. Quelques historiens prétendent que Saballdia ou Sapmtdia dérive de la langue celtique. et signifie poys montagneux.
Le sistre, instrument du Tyrol.
mains, fils de Berthold, dans la possession de ce comté, qui, en 1416, fut élevé au rang de duché par l'empereur Sigismond, en faveur d'un Victor-Amédée qui en était souverain.
La maison de Savoie est considérée à juste titre comme l'une des plus anciennes de l'Europe ; mais plus son origine est obscure, moins on doit être étonné de voir le soin que les généalogistes ont pris de la faire descendre de Wittikipd. Ce chef saxon est en quelque sorte le Japhet des princes de l'Europe moderne : tous prétendent l'avoir pour aïeul, La maison de Savoie, descendant seulement de Berthold, peut prouver une antiquité de plus de 800 ans : c'est une durée assez respectable. Le fondateur de la monarchie sarde est Victor-Amédée II. Dégoûté des affaires, il abdiqua en 1730 en faveur de Charles-Emmanuel son fils, qui par son ingratitude le conduisit au tombeau. Le règne de Charles-Emmanuel fut glorieux; mais ses successeurs perdirent toutes leurs provinces continentales par -suite de l'influence qu'eurent sur la politique européenne les conquêtes de la république française; et le royaume de Sardaigne, réduit au territoire de cette île, ne reprit son ancien rang que par les traités de 1815. qui le remirent en possession de ses Etats. Depuis cette époque il s'est mis à la tête- du mouvement libéral en Italie. En 1849 le roi Charles-Albert essaya, mais en vain, de résister à l'Autriche, et de venir au secours de l'indépendance italienne en Lombardie. Malgré les défaites de Custozza et de Novare, la Sardaigne est encore, sous la sage administration de son roi Victor-Emmanuel, le dernier rempart de la liberté italienne.
PAYS DONT SE COMPOSE LE ROYAUME DE SARDAIGNE.
— Le royaume de Sardaigne comprend l'ancien duché de Savoie, moins une petite portion cédée au canton de Genève ; la principauté du Piémont, les duchés d'Aoste et de Montferrat, la seigneurie de Verceil, les marquisats de Saluces et d'Yvrée, les comtés de Nice et d'Asti, et l'île de Sardaigne. A ces anciennes possessions le congrès de Vienne a ajouté une petite partie du Milanais, le territoire de l'ancienne république de Gènes et l'île de Capraja.
SUPERFICIE, POPULATION. —La superficie totale du royaume est de 75,311 kilomètres carrés, dont 51,215 pour la partie continentale et 24,096 pour l'île de Sardaigne. La population du royaume était en 1848, d'après les recensements officiels, de 4,990,249 habitants; en 1855 on l'évaluait à 5,200,000 âmes.
FLEUVES ET RIVIÈRES. — Une partie des Alpes qui appartiennent au groupe du mont Blanc se trouve, ainsi que cette célèbre montagne, sur le territoire sarde. Les principales rivières qui arrosent les provinces continentales sont: le Rhône, qui borde à l'ouest la Savoie; l'Isère, qui en traverse une partie; le Var, qui arrose l'intendance de Nice; la Magra, celle de Gênes ; enfin le Pô, qui, avec le Tanaro, la Stura, la Dora et quelques autres de ses affluents, arrosent les intendances de Turin, d'Alexandrie, de Novare, etc.
LANGUE. — Les diverses parties des États sardes diffèrent par leurs idiomes. Le savoisien et le vaudois sont des dialectes de la langue romane, qui est une des branches de la langue italique ; dans le comté de Nice on parle le provençal, qui est un autre dialecte de la même langue. L'italien en usage dans les autres provinces sardes du continent est loin d'être pur : le piémontais et le génois sont des dialectes remplis de mots français. Dans la Sardaigne on parle un italien mêlé de mots latins, castillans, grecs, français et même allemands. Ce sont autant de traces qui restent des différents peuples qui se sont établis dans l'île.
DIVISIONS POLITIQUES ET ADMINISTRATIVES. — Le royaume de Sardaigne est partagé en 14 divisions administratives; 11 pour les États de Terre-Ferme et 3 pour l'île de Sardaigne; ces divisions se subdivisent en 52 provinces, dont 41 pour la TerreFerme et 11 pour l'île de Sardaigne.
Nous suivrons dans notre description topographique l'ordre indiqué par les anciennes provinces qui composent la monarchie, renvoyant au tableau statistique pour les nouvelles divisions.
Bersaglieri sardes.
ÉTATS DE TERRE FERME.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE DE LA SAVOIE. — Nous commencerons notre excursion chorographique par le nord de la Savoie. La première ville que l'on traverse en venant de Genève est Bonneville, où l'on remarque, à l'extrémité du pont qui traverse l'Arve, une statue érigée en 1824 au roi Charles-Félix, en mémoire des digues qu'il fit élever pour arrêter les ravages de cette petite rivière torrentueuse. A 5 kilomètres au delà du village de Cluse, on fait voir aux étrangers la caverne de la Balme, qui a 600 à 700 pas de longueur, et dont l'entrée est à 228 mètres au-dessus des eaux de l'Arve. Plus loin on remarque le Nant d'Apenas, cascade qui, tombant de la hauteur de 250 mètres, se détache comme une longue écharpe blanche sur un fond de roches noires dont les couches sont d'un côté disposées en zigzag, et de l'autre en un grand nombre de bandes arrondies et parallèles. De la petite ville de Sallenches, que traverse un torrent fougueux, et qui a été détruite par un incendie au mois de mars 1840, on ne peut se lasser d'admirer la vue majestueuse du mont Blanc. Sallenches s'élève aujourd'hui à quelque distance de l'emplacement qu'elle occupait. De l'autre côté de l'Arve, le village de Saint-Martin est situé au pied de l'aiguille calcaire de Warens, qui s'élève à environ 2,500 mètres. Sur la rive gauche de l'Arve, les bains de Saint- Gervais, au pied du mont Blanc, attirent chaque année une foule d'étrangers par l'efficacité de leurs eaux thermales, par la magnifique cascade qu'on y remarque et par les sites pittoresques qui les environnent.
Sur le chemin qui par la rive gauche de l'Arve conduit à la vallée de qhamouni, où cette rivière prend sa source, on passe près du lieu qu'occupait le petit lac de Chède, qui fut détruit par un éboulement en 1839. Entouré de vertes pelouses, ce lac présentait une
singulière particularité : c'est qu'au fond de ses eaux limpides et tranquilles on apercevait çà et là des places du plus beau bleu , que les montagnards attribuaient, les uns à des sources qui ne gèlent jamais, les autres à ses cavités profondes.
Le village de Servoz, qui sous l'administration française s'enrichissait par l'exploitation des mines de plomb argentifère, offre aujourd'hui le tableau de la misère; les travaux y sont depuis longtemps abandonnés, les usines n'offrent plus que de tristes ruines.
C'est un peu au delà de ce village que commence la vallée de Chamouni, devenue le rendez-vous des touristes de toutes les nations, depuis qu'en 1741 deux Anglais, dont l'un était le célèbre voyageur Pococke, la signalèrent à la curiosité de leurs compatriotes. Mais on sait que plus d'un siècle avant cette époque le vertueux François de Sales y avait porté à de malheureux habitants que les éboulements de deux montagnes avaient réduits à la plus affreuse misère, les consolations de la religion et les secours que réclamait leur indigence.
Celui qui n'a point encore parcouru les Alpes ne peut voir sans une sorte d'admiration cette longue vallée profondément encaissée entre deux rangées de hautes montagnes : à gauche le mont Brevent, à droite les rameaux du mont Blanc, qui forment une suite d'obélisques élancés dans les airs comme les flèches d'un gigantesque édifice gothique ; ici l'Arve qui serpente en roulant avec fracas ses eaux écumeuses sur son lit rempli des débris des montagnes; là ces trois amas énormes de glaces appelés le glacier des Buissons ou des Bossons, le glacier des Bois et le glacier de lArgentiere, qui, commençant dans la région des neiges perpétuelles, descendent jusqu'au fond de la vallée, au milieu des prairies ou des champs en culture. C'est le glacier des Bois qui forme près du sommet du Montanvert, à 800 mètres au-dessus de la vallée, ce que l'on nomme la mer de glace, longue de 8 kilomètres sur une largeur d'environ 2 kilomètres. Mais ce que ce glacier offre de plus remarquable, c'est vers son extrémité, au milieu de la vallée, une caverne de 32 mètres de diamètre et de 20 mètres de hauteur, creusée
naturellement dans la glace et du fond de laquelle se précipite l'Arveiron. On croit voir le palais de cristal qui sert d'asile à la nymphe des torrents.
A 60 kilomètres à l'ouest du village de Chamouni, la petite ville d'Annecy, agréablement située au bord d'un lac, est le siège d'un évêché. Le vieux château qui appartenait aux anciens comtes de Genève, le palais où réside l'évèque, la cathédrale où l'on couserve les reliques de saint François de Sales, l'église du couvent de la Visitation, bâtie par le roi Charles-Félix, et la salle de spectacle, sont ses principaux édifices. Cette ville de 6,000 âmes possède des filatures de coton, une importante verrerie et des usines. Le lac qui la baigne a 12 kilomètres de longueur sur 4 de largeur; à quelque distance de sa rive orientale on voit le château de Menthon, qui, à en juger par une inscription placée sur la porte, a la prétention d'être antérieur à la naissance de Jésus- Christ ; et plus loin le hourg de Tolloire où naquit le chimiste Berthollet. Au nord du lac, , le village d' ânnecy-l&-Vieiix paraît être l'antique JJinia : on y a trouvé des inscriptions romaines.
Chambérw, ancienne capitale de la Savoie , qu'un chemin de fer doit (1851) unir à Tprin et à Genève, est encore plus agréable par sa position an milieu cruu bassin entouré de hautes montagnes, qu'intéressante- par ses édifices; cependant elle n'est pas dépourvue de belles contractions. Quelques-unes de ses rues sont larges et bien alignées ; en doit surtout citer celle à arcades qu'a fait bâtir le général de Botgoes, qui, né dans cette ville, amassa dans fInde une fortune reusidira e est à sa générosité que Chambéry doit le bel hospice Saint-Benoit ta cathédrale est un édifice du commencement du quinzième siècle , où l'an voit des fresques de cette époque ; le portai) de réglise dite la Sainle-Cbapelle est orné des statues de plusieurs princes de la maison de Savoie; la chapelle royale est remarquable par ses vitraux; le théâtre est d'une construction élégante et simple; la caserne peut loger, dit-on, plus d'un régiment; la place de Lans, lapins beDe de la Tilte, est décorée d'une fontaine d'assez mauvais goût; mais la promenade de Verney, plantée en quinconce, est jolie et. agréable. Chamhtiy, qui n'a que 15,000 âmes, siège d'un arcLerèché, possède une société royale académique, une bibliothèque où l'on remarque quelques beaux manuscrits, entre autres une Bible du neuvième siècle, enfin un musée riche en médailles antiques et en bons tableaux. Les environs de cette ville sont aussi pittoresques que riches et bien cultivés ; la campagne est parsemée de magnifiques mûriers qui indiquent que l'industrie des habitants lire un graud produit des vers à soie.
Aix, à 12 kilomètres au nord de Chambéry, au fond d'un entonnoir formé par de hautes montagnes, est célèbre par ses bains. On y remarque les restes de thermes romains et ceux d'un temple que l'on croit avoir été érigé en l'honneur de Diane. Au sudouest, la route des Echelles, qui communique de la France dans la Savoie, est une des constructions les plus remarquables en ce genre : elle porte le nom de la vallée et du bourg des Echelles, qu'elle traverse. Pour la tracer il a fallu scier, sur une largeur d'environ $,000mètres, des rochers d'une haatewr excessive. Elle a été commencée sous l'administration française- et. terminée par le gouvernement sarde. Le bourg des Elles, situé sur le Qltiel's, est aujourd'hui très-fréqucnté, il a pris Je rang de ville.
En remontant le cours de l'Ise, on arrive à ConflllTls, petite TItte qui, malgré sa fonderie royale et son école des mines, a perdu de son importance depuis que la route de la Tarentaise, an lieu de kt traverser, tourne le rocher sur lequel elle est bâtie.
L'Mèpitat, an contraire, qui n'en est séparé que par un pont, a changé en vingt ans son rang de simple village en celui de bourg considérable. Jtfowtkrs possède, depuis 1822, une école des mines où Fott voit ne» riche bibliothèque et une belle collection minératogiutte. Cette ville-, aux environs de taquelle il existe des antiquités, est fort ancienne : eHe a porté successivement les noms de Darentasia, de Cmitas Ccntrvmim et enfin celui de Menastxrhim.
La @ = de Maurienne comprend le bassin de la rivière d'Arc, affluent de l'Isère. La petite ville de Saint-Jcan-de-M ancienne, qui en est la capitale, est triste et ma) bâtie. Elfe est. le siège d'un évâeké ; sa cathédrale renferme les tombeaux1 de-plusieurs comtes de Maurienne. C'est dans cette ville que Charles Jre. Chauve mourut, eu 877, empoisonné par le juif Sédécias, son médecin. En suivant te- cours de JIa. rivière jusqu'au grand village «le A ans- l&Sowrg, on remarque le- fort de Bramons- qui de ce côté défend- Fentrée de l'Italie. tes deux côtes de la vallée sont bordées de montagnes, les unes arides et tes autres couvertes de forêts, dont les sommités sont creusées de cavernes qui servent de retraite aux om-s.
A peine a-t-on traversé- l'Agir, qui descend- dea- Alpes grecques, que l'on voit s'élever la superbe route tracée en zigaag sur Ite revers septentrional du mont Cenis, par laquelle on peut arriver à cheva l ou en voiture an point le plus élevé du col, c'est-à-dire à plus de2^100 mètres. C'est de là qu'avant ta construction de cette nouvefte route, se faisait te voyage en trafineau appelé la ramasse, et que l'on franchissait en quelques minutes, an milieu des neiges et des précipices, tout l'espace qui s'étend jfcfsqti'à le Novalèse, viMage-
aujourd'hui ruiné. Bientôt cette belle route sera à son tour abandonnée, et le mont Cenis verra ses Oancs livrer passage à une ligne de chemin de fer à l'aide d'un immense tunnel qui permettra de relier le réseau français avec le réseau italien (1857).
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE DU PIÉMONT. — C'est par Suse que nous entrerons dans le Piémont. Cette ville, malgré la beauté de son nom oriental, n'a de curieux que son arc de triomphe de marbre dédié à Auguste, remarquable par le basrelief de la frise, offrant un triple sacrifice, monument qui rappelle les arcs antiques de Rome, et qui sem ble une noble entrée ou une sortie convenable de l'Italie. Cette ville de 3,000 âmes est le siège d'un évêché. Un chemin de fer de 53 kilomètres l'unit à Turin.
Rivoli, qui renferme 6,000 habitants, est bien bâti et dominé par un château royal qui n'a jamais été achevé, où naquit en 1562 Charles-Emmanuel I", et où fut enfermé Victor-Amédée II, qui, après avoir abdiqué en faveur de Charles-Emmanuel son fils , avait tenté de reprendre le pouvoir.
Traui ou Torino occupe l'extrémité de belles plaines qu'arrose le Pô. Cette ville est au confluent do Ilenve et de la Dora ou Doire.
il ne faut point confondre cette petite rivière avec celle qui descen d clela vallée d'Aoste- 1:0rigine SeL tite riviere a iec celle qui descend e et te capitale est fort ancienne ; elle était la principale cité des Tftmrim, comme l'indique son nom à'éugusta TUlIrinorrcE. Elle est fermée de deux villes : le vieux Twit, qui ressemble à toutes les cités anciennes et jjothiques, et le nêwreau Turin, qui a toute l'élégance des villes modernes. Ses rues bien largest bien droites, et l'on peut dire aussi bien tristes , ne sont animées que les jours de fêtes; les principales sont celle de la Dera grossa, celle du Pô, et la rme Xeure. Deux grandes places séparent l'ancienne et la nouvelle viDc ; Tune esLaelle de San-Carlo, ettautre celle du. Castelle., ou du château. Turin peut passer pour la plus propre des cités italiennes ; elle doit cetavantage à l'abondance des eaux qui pendant l'été coulent dans toutes les rues, les nettoient, les rafraîchissent, et pendant l'hiver les débarrassent de la neige.
Pour cette opération » du ehâtean d'eau de la porte de Suse, ouvert pendant deux heures chaque jour, sort un torrent qui entraine la neige et toutes les immondices de la ville. Une rue longue de 2 kilomètres , formée de maisons bâties sur le infime modèle, ornées de portiques qui garantissent de la pluie et du ukil, conduit à la place du Château. La demeure royale en occu pe le centre, et présente d'un côté un? façade gothique, et de l'autre l'iligmee de l'architecture grecque. Cet édifice, biiarre dans aon ordonnance, est cependant imposant et digne de sa destination p on mante dans l'intérieur par un escalier magnifique. Les appartements sont ornés de tableaux ; mais on n'y trouve rien des grands maîtres de l'école ital ienne. Les différents palais qui décorent cette ville sont en général des édifices d'assez mauvais goût, sans en excepter le vaste palais Carignan, bâti en briques. Celui des ducs de Savoie, réuni au palais du roi par une galerie, rappelle par sa façade certaines parties du Louvre. Celui qui est construit avec le plus de goût est l'ancien palais du comte Birago de Borgaro, aujourd'hui l'hôtel de l'ambassade de France. Le palais de Madame, bâti en 1416 et situé aujourd'hui au centre de la ville, était alors sur les remparts. Il ne reste plus des anciennes fortifications que la citadelle.
La belle place Saint-Charles est décorée de la statue équestre en bronze d'Emmanuel-Philibert, duc de Savoie, que l'on a admirée dans la cour du Louvre, à Paris, il y a quelques années. Ce monument, dû au ciseau d'un artiste français distingué, ST. Marochetti, est orné de quatre grandes figures allégoriques représentant le comté de la vallée d'Aoste, la principauté de Piémont, le comté de Nice et le duché de Savoie.
On compte à Turin 110 églises ou chapelles ; la plus vantée est celle de Saint-Laurent : elle est entièrement revêtue de marbre et surmontée d'une belle coup ole. L'une de ses chapelles est celle du roi. Pendant les guerres d'Italie, les Français enlevèrent les candélabres et les lampes d'argent qui décoraient cette église, mais ils respecteront celle du Saint-Suaire, attenante à la cathédrale et au palais du roi, et oà fan conserve dans une châsse d'agent ornée de pierreries te linceul de Jésus-Christ, objet de la vénération du peuple. Cette relique est regardée comme authentique; cependant Rome, Gênes, et ert France Besançon., eu possèdent aussi qui passent pour ne Fctre pas moins. La cathédrale, dédiée à saint Jean,, est d'une belle architecture; une inscription y indique la sépulture du satvant écrivain Seyssel. qui futévêque de Marseille et archevêque de Turin, L'église Sainte-Christiue est décorée d'un majestueux portail ; celle de Saint-Charles Borromeeest riche r mais d'une an-chitectiwe médiocre; celle de la Trinité est une des plus telles de la ville; mais l'a plus remarquable sous tous les rapports est celle de Saiufc-Philippe de Néri.
te- grand théâtre de Turin est F un- des plus beaux de l'Italie; il suffit de dire qu'il a servi de modèle pour celui de Naples, et qu'il est te chef-d'ieuvre du comte Alfieri. La salle CariglMII, récemment restaurée avec goût, est due an- même artiste.
L'un des édifices qui doivent être mis en première ligne est le bâtiment de ruaivm. ité; en. y entre par une grande cour cari ée
entourée d'un rang d'arcades à double ctage, dont les murs sont incrustés de bas-reliefs et d'inscriptions antiques. La fondation de cet établissement remonte à l'an 14.05; on y compte environ 2,000 étudiants. Sa bibliothèque, formée principalement de l'ancienne collection des livres et manuscrits des ducs de Savoie, contient plus de 112,000 volumes et 2,000 manuscrits; parmi ceux-ci se trouvent plusieurs palimpsestes de Cicéron qui ont été publiés, et Y Imitation de Jésus-Christ, dont la date n'est pas moins incertaine que son auteur. Le musée des antiques renferme plusieurs objets remarquables ; le médaillier, l'un des plus riches de l'Europe, prend son rang après ceux de Paris, de Londres et de Vienne.
Le musée égyptien est sans contredit, dans son genre, une des plus belles collections qui existent après celles de Londres, de Paris et de Berlin. Il est triste de penser qu'après avoir été formée en Egypte par le consul de France Dvovelti pour orner le Louvre , le gouvernement français n'pu, par un singulier motif d'économie, en faire l'acquisition, et que la cour de Turin s'est trouvée assez riche pour pouvoir en doter sa capitale. Parmi les richesses de cette collection, on distingue la statue colossale du roi Osymandias, celles de Tout- mosis Ier et de Toutmasis II, d'Aménophis II, connu sous le nom de Memnon, et de Rhamsès IV ou du grand Sésastris, regardée comme la plus belle statue égyptienne que l'on connaisse. On y voit aussi une riche suite de stèles ou tableaux peints et sculptés sur pierre, dont les couleurs ont conservé toute leur fraîcheur ; a e nomDreux ustensiles destinés aux divers usages de la vie; des instruments d'agriculture et des armes ; une immense quantité de momies et de manuscrits : parmi ces derniers se trouvent les fragments d'un tableau chronologique de plus de cent rois antérieurs à la dix-huitième dynastie.
Sans toutes ces richesses, Turin serait encore au premier rang parmi les villes savantes et littéraires de l'Italie. Outre son université , dont l'enseignement est confié à des hommes du premier mérite x elle possède sous le titre d'académie militaire une école où l'on instruit les jeunes officiers, trois collèges, et un institut des sourdsmuets. Outre la bibliothèque et le musée dont nous venons de parler, elle renferme des collections d'histoire naturelle et de physique, un édifice hydraulique 4 établissement unique dans son genre, où l'on fait des cours hydrauliques accompagnés d'expériences sur de grandes masses d'eau, des laboratoires de chimie , un jardin botanique regardé comme un des. plus beaux de l'Italie, et un jardin expérimental destiné à des expériences d'agronomie, lequel est accompagné d'une collection d'instruments aratoires t ainsi que d'une bibliothèque relative à la botanique et à l'agriculture. Parmi les sociétés scientifiques se trouvent l'Académie royale des sciences, celle des beaux-arts, la société royale d'agriculture et l'Académie philharmonique.
Les établissements de bienfaisance se font remarquer par leur belle tenue; l'hôpital Saint-Louis est un modèle dans son genre.
Tels sont les monuments de la munificence du gouvernement sarde qui recommandent Turin à la curiosité de l'artiste , du savant et du philanthrope. Cette capitale du Piémont est située à 230 mètres au-dessus du niveau de la mer, au milieu d'une plaine fertile. Elle fait qn grand commerce avec l'Italie et la France; trois lignes de chemins de fer la mettent en communication : 1° avec Gènes, 165 kilomètres; 2° avec Suse, 53 kilomètres; 3° avec Pignerol, 32 kilomètres i 4° avec Coni, 85 kilomètres; elles doivent être prolongées pour mettre cette capitale en communication avec les grandes villes d'Italie et de France. Turin a pris un tel accroissement depuis 1815, que sa population, qui ne s'élevait qu'à 73,000 âmes, dépasse aujourd'hui 140,000.
Hors de son enceinte, on voit au bord du Pô le grand château royal appelé le Valenlin, précédé de plusieurs allées plantées de grands arbres, et qui forment l'une des plus belles promenades de la ville.
Au pied d'une vaste colline couverte de maisons de campagne, s'élève la magnifique église de la Mère de Dieu, qui semble être une copie du Panthéon de Paris, A l'extrémité de Turin, le pont sur la Doire est un de ceux, qui méritent d'être cités en Europe pour leur hardiesse et leur légèreté. Le palais de Stupinis, rendez-vous de chasse du roi, peut être regardé comme l'un des plus splendides qu'ily ait en Europe. Sur le sommet de la montagne de la Superga, on aperçoit cette magnifique église que Victor-Amédée Ier fit élever en 17Q6 en commémoration de la lin-ée- du siège de Turin par les Français. Les caveaux de ce temple servent de sépulture aux rois.
Nous avons laissé au nord de la province de Turin quatre autres provinces qui ne doivent pas être passées sous silence : ce sont celles livrée, d'Aoste, de Bielle et de Novare. Leurs chefs-lieux seuls méritent d'être nommés. Ivrée, ancienne capitale du marquisat, du même nom, est une ville épiscopale de 8,000 âmes ; son aspect est de loin assez agréable, mais son intérieur est fort laid. La JloireBajtée (Dçra B-ql) y est traversée par un pont romwIL Cette ville fut fondée sous le consulat ie Marius ; c'est l'antique Eporcdia., On y fait un assez grand, commerce de fromages. Il y a de bonnes filatures de soie et de coton et un entrepôt de fer de Cogne, A osée, l'ancienne Augvsta Salassiorum, est aussi le siège d'un évêclic ; elle possède plusieurs restes de constructions romaines et un arc de triomphe
érigé à Auguste. Sa population ast de 6,000 âmes, elle est à 660 mètres au-dessus du niveau de la mer. Un chemin de fer doit la relier à Turin.
Au delà du mont Rosa , l'admiration qui se portait un instant avant sur les beautés de la nature se concentre sur un des plus beaux monuments de l'industrie et de la patience humaine : la route du Siwplon surpasse tout ce que les Romains ont exécuté de plus beau en ce genre. Ce n'était point assez d'avoir fait sauter à l'aide de la poudre une portion de la chaîne des Alpes, il a fallu percer ces montagnes pour construire un chemin praticable à toutes les voitures, Napoléon avait franchi les Alpes comme Annibal et Bernard , oncle de Charlemagne : cette action glorieuse pouvait être imitée plus tard; mais c'est à lui que l'on doit un travail inimitable qui unit à jamais la Suisse et l'Italie, et qui mériterait d'être mieux entretenu.
Le lac Majeur forme la limite des possessions sardes; la route qui descend du Simplou la côtoie et va traverser l'ancienne et jolie ville de Novare, défendue par un vieux château et quelques fortifications.
On y remarque une belle place d'armes, un théâtre nouvellement construit, une cathédrale ornée de quelques beaux tableaux, une belle église dédiée à saint Gaudeoce t et quelques restes d'antiquités romaines. Un chemin de fer de 6.6 kilomètres, qui doit être continué jusqu'au lac Majeur, l'unit à Alexandrie en attendant que celui qui doit l'unir à Turin par Verceil soit terminé. C'est au sud de la ville qu'eut lieu, le 23 mars 1849, la bataille désastreuse et courageusement défendue par Charles-Albert contre les Autrichiens.
Au nord de cette ville, Oleggio est recommandable par ses bains.
Verceil, en italien Vei-celli, et en latin Vel'cellæ ,. passe pour avoir été fondée par Bellovèse, six siècles avant notre ère. Elle est intéressante par ses monuments. Sa cathédrale ou le Dôme est un magnifique édifice moderne, où l'on conserve les reliques de saint Eusèbe ; l'église Saint-André est une construction gothique ; celle de Saint-Christophe est ornée de peintures, et celle de Sainte-MarieMajeure d'une superbe mosaïque représentant l'histoire de Judith : on montre dans le trésor de la cathédrale un Evangile manuscrit copié de la main de saint Eusèbe. Sa population est de 18,000 âmes.
C'est dans les plaines qui entourent cette ville que les Cimbres furent taillés en pièces par Marius.
Au sud de Turin et sur le bord de la Stura, CQni ou Cunea, qui fut démautelée par les Français après la bataille de Marengo, est une station importante du chemin de fer de Nice. Elle renferme 18,000 âmes, et possède une société littéraire. Casale sur le Pô, à l'est de Turin, a été souvent prise et reprise par les Français. Sa population est à peu. près égale à celle de la ville précédente, mais les beaux édifices y sont en plus grand nombre : ce sont principalement ses églises, son théâtre et son collège, Pignerol, à 36 kilomètres au sud-ouest de Turin, avec laquelle elle communique par un chemin de fer, est bâtie au pied et sur le revers d'une montagne dominée autrefois par une citadelle dans laquelle furent enfermés le Masque de fer, Bouquet et Lauzmtet dont il ne reste plus qu'un tas de pierres. Pignerol est une ville de 12,000 âmes, capitale d'une des provinces du royaume. Salvcei, à 52 kilomètres au snd-sud-onest de Turin, est un autre chef-lieu de province peuplé de 10,000 âmes; elle se divise en ville haute et ville basse ; de la première on jouit d'une belle vue sur les plaines du Piémont. Elle fut pendant trois cent quatorze ans la capitale du marquisat de Saluces - réunie à la couronne de France comme fief du Dauphiné, elle fut échangée par Henri IV, au traité de Lyon, en 160 1, contre la- Bresse, le Bagey, Gex et le Valromev.
La belle route qui conduit de Turin à Gênes, et que côtoie le chemin de fer qui unit ces deux villes, traverse d'abord Asti* jadis Hasta Pompeia, célèbre pendant le moyen âge par ses cent tours-, comme Thèbes rétait chez les anciens par ses cent portes. Ses vieilles murailles tombent en ruines; ses tours ne sont plus qu'au nombre de trente, et sa population, éprouve une diminution sensible : sur une superficie à peu près égale à. celle de Turin, on y compte à peine 22,000 âmes. On remarque dans cette ville l'hôtel où naquit Alfieri, et la cathédrale, bel édifice gothique. Son commerce, peu important, consiste en vins, rouges et blancs, estimés les meilleurs du Piémont. Les lieux environnants sont remplie d'antiques souvenirs. A quelques kilomètres ail sud-ouest, on voit Alla, jadis Alba Pompeia, ville épiscopale, qui rappelle le père du grand Pompée qui la restaura; et Chierasco (Chérasque), l'empereur Pertinax qui y reçut le jour. D'Asti, la route et le chemin de fer longent les sinuosités du Tauaro. et conduisent à. Alexandrie.
De loin celle-ci ressemble à un village au milieu d'une plaine, et de près ce n'est qu'ujie ville triste, bâtie en briques, mais l'une des plus importantes places fortes de l'Italie par sa citadelle t aulre ville d'un aspect superbe, qui fut construite par las. Français, et dont l'entrée est interdite aux étrangers. On sait qu'Alexandrie doit son origine aux querelles des papes et des empereurs pendant le douzième siècle. Elle fut fondée en l'honneur du pape Alexandre Ill, et longtemps elle eut le nom d'Alexandrie. de U. Paille, parce que ses maisons étaient couvertes de çhaunie. Alexandrie est importante aussi par s.& population, que l'on évalué, à pl-nside 3.6^060 âmes.
Le palais royal, l'hôtel de ville, quelques-unes de ses églises, le mont-de-piété, le bâtiment où se tient la foire et son nouveau théâtre, méritent d'être vus. C'est le siége d'un évêché. Elle possède une bonne bibliothèque publique, et une société littéraire qui prend le singulier titre d'Académie des immobiles. Alexandrie fait un grand commerce de soie, elle a des filatures. A la sortie de cette ville, une route traverse le village de Marengo, devenu célèbre par la victoire que Bonaparte y remporta en 1800 sur les Autrichiens. On voit dans un domaine qui occupe une partie de l'emplacement de l'ancien champ de bataille, un musée curieux où l'on a réuni les reliques trouvées aux environs. La route conduit ensuite à Tortone et à Vogltera. La première, grande et jadis bien peuplée, n'a que 10,000 habitants; la seconde, qui en renferme 12,000, possède une belle cathédrale dans le style grec. C'est la dernière ville du Piémont sur la frontière de Plaisance.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE DU DUCHÉ DE GÊNES.
- A l'embranchement de la route de Tortone et de celle de Gênes, le pays prend un aspect particulier : on entre dans les Apennins ; le chemin se change en une gorge étroite, tantôt ombragée par des forêts, tantôt bordée par des prairies solitaires. Entre Alexandrie et Novi on remarque la belle abbaye de dominicains del Bosco, qui renferme quelques bons tableaux et le tombeau que le pape Pie V, fondateur de ce couvent, s'y était réservé et qui est resté vide. Novi, station du chemin de fer de Gênes, est une ville de 10,000 âmes, dont les plus belles maisons sont habitées pendant l'automne par de riches Génois; il ne reste de son vieux château qu'une tour bien conservée et d'une grande élévation. C'est près de cette ville que l'armée austro-russe, sous les ordres de Souwaroff, gagna contre les Français une bataille dans laquelle périt le jeune général Joubert.
A partir de Novi, outre le chemin de fer, deux routes conduisent à Gênes : l'une nouvelle par Aquata, Ronco et Ponte-Decimo; l'autre par la Bocchetta. Cette dernière offre des difficultés, mais est admirable par ses points de vue : c'est une suite continuelle de montées et de descentes, de gorges et de ravins ; on est dans le cœur des Apennins. Les habitations, d'abord rapprochées, deviennent plus rares, et bientôt disparaissent; enfin on arrive au col de la Bocchetta. Gènes se présente au bas de ces montagnes, et la Méditerranée se perd à l'horizon. Ordinairement celle-ci se confond avec le brouillard qui obscurcit ce passage; mais, par un temps clair, sa surface, brillante comme le cristal, prend la teinte azurée du ciel.
Il faut voir Gênes du côté de la mer pour en avoir une idée favorable : bâtie en demi-cercle sur une étendue de plus de 3,600 mètres, elle s'élève en amphithéâtre au pied d'une montagne aride et brûlée ; deux môles imposants par leur masse défendent l'entrée du port, dominé par un fanal gigantesque. Dans un circuit de 18 kilomètres, la ville est entourée d'une double enceinte de fortifications, devenues célèbres par le siège qu'y soutint Masséna contre les Autrichiens en 1800, et par la courageuse résistance des habitants, qui souffrirent pendant 59 jours toutes les horreurs de la famine. Elles sont entretenues avec soin. Les rues, pavées de dalles, sont étroites et tortueuses, à l'exception de trois : la rue Balbi, la rue Nuova et la rue Novissima, les seules dans lesquelles les voitures puissent circuler. Cette dernière est formée d'une réunion de palais magnifiques. Rien ne produit un plus singulier effet, surtout vues de loin, que les terrasses couvertes de jardins remplaçant la toiture des palais et des maisons. On ne se borne point à y cultiver des arbustes et des plantes grimpantes : elles sont construites de manière à pouvoir supporter une épaisse couche de terre, d'où s'élancent dans les airs des orangers de 8 mètres de hauteur. A l'exception de plusieurs riches habitations, telles que les palais Philippe Durazzo, Carrega, Maximilien Spinola, André Doria, Balbi, Brignole, Lercari-Imperiale et plusieurs autres, on ne peut citer que l'ancien palais ducal et quelques édifices religieux. Le premier de ces palais est réellement monumental; le deuxième est remarquable par la richesse de ses ornements; le troisième se distingue par l'heureuse proportion des portiques de la cour et l'originalité de ses voûtes en arcs de cloître; celui d'André Doria porte sous l'entablement des croisées une longue inscription qui rappelle que cet intrépide marin fut amiral du pape, de Charles-Quint, de François Ier et de Gênes; le palais Balbi se distingue par ses portiques et ses jardins ; le palais Brignole par sa belle galerie de tableaux; le palais Lercari-Imperiale passe pour l'une des plus élégantes constructions de Galéas Alessi. Le palais ducal, ancienne résidence des doges, aujourd'hui occupé par le sénat de la ville, est le plus vaste de Gênes. Nous ne devons point passer sous silence le magnifique palais Marcel Durazzo, devenu celui du roi : c'est le seul dans lequel les voitures peuvent entrer.
L'église Saint-Laurent est la plus vaste de Gênes et l'une des plus belles cathédrales de l'Italie ; on y voit le fameux Sacro Catino, large cuvette hexagone en verre de couleur, qui fut regardée comme ayant été taillée dans une énorme émeraude, comme ayant été donnée à Salomon par la reine de Saba, et comme ayant servi aux noces de Cana. Conservé pendant longtemps à la bibliothèque royale de Paris, ce vase n'avait été apprécié que d'après sa valeur vénale;
c'est un vénérable trophée de la conquête de Césarée par les Génois en 1101. L'église l' Annonziada fait regretter que sa façade ne soit pas terminée : dans son intérieur l'œil est fatigué de la profusion des dorures; celle de San-Cyro, l'ancienne cathédrale, est ornée de fresques et l'une des plus riches en marbres de différentes couleurs.
L'Assomption de Carignan est en petit Saint-Pierre de Rome : on y remarque un saint Sébastien et un Alexandre Sauli, chefs-d'œuvre du Puget; enfin l'église Sainte-Marie de la Consolation renferme quelques peintures et sculptures estimées.
Trois hôpitaux d'un beau style se font encore remarquer : l'un, par sa magnifique façade, par l'asile qu'y trouvent 2,000 individus de tout âge, par les divers métiers qu'on y exerce, est un modèle dans ce genre ; on le nomme YAlbergo dei poveri. L'hôpital des Pammatone, qui contient environ 700 malades, n'est pas seulement une des plus importantes fondations philanthropiques, c'est aussi l'un des plus beaux monuments de l'art : l'escalier magnifique, les portiques qui environnent la cour sont en marbre blanc. Jamais, dit M. Valéry, la douleur physique n'eut un plus magnifique séjour.
Dans cet hôpital, comme dans le précédent, la bienfaisance a son aristocratie : un don de 25,000 francs vaut à celui qui le fait une inscription, 50,000 francs un buste, et 100,000 francs une statue.
L'hôpital militaire, dans une belle situation, sur un lieu élevé du faubourg Saint-Théodore, peut recevoir jusqu'à 1,000 malades. Le conservatoire des Fieschine et celui des Brignole sont à la fois des couvents et des maisons de travail. L'Institut des sourds-muets est un des plus remarquables que l'on connaisse.
Aucun des théâtres de Gênes n'était digne d'être cité avant l'année 1828, que fut terminé celui de Carlo-Felice, qui, après celui de Saint-Charles à Naples et celui de la Scala à Milan, est le plus vaste de l'Italie.
Le palais de l'Université, avec ses portiques, ses colonnes, ses escaliers de marbre d'une blancheur éclatante, a plutôt l'air d'un palais habité par un roi que d'un collège. Les salles destinées aux cours sont decorées de tableaux de différents maîtres génois. Le nombre des élèves ne s'élève qu'à 400. La bibliothèque renferme 45,000 volumes et plusieurs manuscrits chinois et arabes. La ville possède trois autres bibliothèques, au nombre desquelles celle dite Berio, présent d'un particulier, compte 15,000 volumes et 1,500 manuscrits. Les autres établissements d'instruction sont l'école de marine, celle de navigation et l'Académie des beaux-arts.
La Loggia de Banchi ou la bourse est un édifice remarquable surtout par la hardiesse de la voûte formée de simples mâts de navires.
Dans le bâtiment de la douane, on admire les belles proportions de la grande salle de Saint-Georges, ornée des statues du fondateur de cette célèbre banque. Au-dessus de la porte principale de l'édifice, on voit suspendus quelques morceaux de la chaîne de fer qui fermait le port de Pise et que les Génois conquirent en 1290. A la porte du tribunal de commerce on a placé un monument antique assez curieux : c'est une table en bronze portant une sentence rendue l'an 637 de la fondation de Rome par deux jurisconsultes romains, relativement à la suprématie qu'exerçaient alors les Génois sur les pays limitrophes.
L'enceinte desséchée qui sert de bagne à 700 galériens est l'ancien arsenal où furent construites les fameuses galères de la république. Le nouvel arsenal est situé dans l'ancien couvent du SaintEsprit : on y conserve une proue antique, un canon de cuir et de bois pris sur les Vénitiens au siège de Chiozza en 1379, et l'une des trente - deux cuirasses portées en 1301 par de nobles croisées génoises.
Les seules promenades de Gênes sont les murailles du fort, les allées de l'aequa verde, celles de l'acqua sola, les moles, la promenade du quai, et le beau pont de Car'ignano, de 32 mètres de hauteur, qui, jeté par-dessus des maisons de six étages, réunit deux quartiers élevés de la ville. ,.., La bourse, si fréquentée lorsque la noblesse genoise faisait le commerce de l'univers, est aujourd'hui bien déchue de son ancienne activité, malgré la franchise dont jouit le port de Gênes. Cette ville n'est cependant point tombée dans la même décadence que Venise; mais lorsqu'on pense que du temps des Carthaginois elle était assez puissante par son commerce pour faire ombrage à ce peuple qui la brûla; que, rebâtie par les Romains, elle redevint florissante; que plus tard elle répara les pertes causées par les invasions des Huns, des Goths et des Hérules, par les conquêtes des Lombards et de Charlemagne ; qu'au douzième siècle elle fut la première ville commerçante qui fonda une banque, célèbre encore dans ces derniers temps sous le nom de banque de Saint-Georges, et qui fut retablie en 1814; que, rivale de Venise au douzième siècle, elle était maltresse du faubourg de Péra à Constantinople; que, devenue la capitale d'une république puissante, elle conserva plus longtemps que Venise la forme primitive de son gouvernement; que, bien qu'elle ait été plus d'une fois obligée de chercher contre ses divisions intestines un refuge dans la protection étrangère, l'amour de l'indépendance fut toujours la principale cause de ses succès; que ce fut par accommodement et non par force qu elle céda la Corse aux ministres de Louis XV ; qu'enfin elle était encore indépendante
lorsqu'elle reçut du gouvernement républicain de France une constitution et le titre de république ligurienne, jusqu'à ce que l'empire l'enveloppât dans ses filets, en donnant à son territoire le nom de département; on est presque disposé à regretter qu'à l'époque de la restauration de tant de trônes européens, Gênes n'ait pas .été réintégrée dans son antique indépendance.
On est frappé à Gênes de l'extérieur d'aisance et de propreté du peuple, de l'obligeance et de la politesse de la classe supérieure, et des manières simples de la noblesse. On n'y voit point, comme à Turin, ces seigneurs en habits de gala, ni cette morgue, ni cette étiquette qui règnent dans les villes où les nobles sont riches et puissants : et c'est sans doute aux occupations commerciales qu'il faut en attribuer la cause. Les femmes mettent- beaucoup de recherche et d'élégance dans leur toilette ; elles portent avec une grâce particulière, quand elles vont à pied, un ample voile blanc appelé mezzaro, dont elles couvrent plutôt qu'elles ne cachent une partie de leur visage, les épaules et les bras. Cet ajustement, qui descend jusqu'aux pieds, ajoute à l'élégance d'un bas de soie bien tiré et d'une chaussure légère. Toutes les femmes de la haute classe ont leurs sigisbés; mais cette mode, qui hors de l'Italie passerait pour scandaleuse, est regardée à,Gênes comme tellement indifférente en elle-même, que l'on est tenté de croire qu'elle est aujourd'hui presque sans conséquence. L'amour des arts, la culture de l'esprit, une certaine liberté dans les idées, distinguent les Génois de la plupart des Italiens méridionaux. La nation, portée vers le commerce, excelle encore dans plusieurs genres d'industrie : Gênes a des manufactures de soieries, de velours et d'étoffes d'or ; l'orfèvrerie y est portée à un haut degré de perfection; ses parfumeries et ses fleurs artificielles sont recherchées. Parmi les productions du sol, ses huiles sont plus estimées que ses vins.
Cette ville a conservé assez de causes de prospérité pour augmenter de population : aussi n'y compte - t- on pas moins de 120,000 âmes.
Ce qu'on nomme à Gênes le Port franc est une réunion de huit beaux édifices uniformes, enfermés dans une enceinte de murailles où l'on emmagasine, sans les imposer à aucun droit, toutes les marchandises qui arrivent de l'étranger. C'est un véritable entrepôt, il fait la richesse du commerce génois. Les seuls portefaix qu'on y emploie sont connus sous le nom de caravani; ils sont tous Bergamasques et se recrutent dans les communes de Piazza et de Zugno, aux environs de Bergame. L'organisation de cette corporation remonte à l'an 1340 ; à cette époque ils n'étaient que 12; depuis 1832 le nombre en est fixé à 200.
La partie orientale de la côte qui borde le golfe de Gênes est désignée depuis longtemps sous le nom de rivière du Levant; c'était une des divisions du territoire de l'ancienne république. La Spezzia, jolie ville de 7 à 8,000 âmes, en est le principal port. Il est capable de contenir une importante armée navale et sert souvent de mouillage à l'escadre française d'évolution dans la Méditerranée. Depuis quelques années il a acquis une grande importance, et il est destiné à devenir, après Gènes, le second port militaire du royaume de Sardaigne. A 20 kilomètres de la Spezzia l'on voit Sarzana, ville à peu près de la même population, et le siège d'un évêché; elle est la patrie du sage et savant pape Nicolas V; sa cathédrale est un bel édifice construit en marbre de Carrare. On voit dans ses environs les ruines de l'antique et célèbre Luni, capitale de la Lunigiane, qui passe pour avoir été détruite par Alaric, ainsi que les restes de deux tours, d'un amphithéâtre et d'une église. Chiavari, plus peuplée, bien bâtie et industrieuse, fabrique des toiles et des chaises qu'elle expédie jusqu'en Amérique. Cette ville possède une bibliothèque de 7,000 volumes, des écoles publiques, une maison de travail pour les pauvres et une société d'encouragement. A 8 kilomètres de Gênes, on voit dans l'église de la petite ville de Nervi le tombeau du comte Corvetto, qui fut ministre des finances en France sous le règne de Louis XVIII.
A l'ouest de Gênes, l'ancien territoire de la république portait le nom de rivière du Ponent, La petite ville de FoZtri a de la réputation pour ses papiers et son vermicelle. Le village de Cogoleto prétend à tort disputer à Gênes l'honneur d'avoir vu naître Colomb. Savone, ville de 16,000 habitants, tire un grand secours de ses fabriques de faïence, de porcelaine et de potasse; mais elle redeviendrait commerçante, si son port, comblé depuis longtemps, était creusé de nouveau. On voit encore dans cette ville les restes du palais de Jules II. Sa cathédrale est un bel édifice. Albenga, vieille ville noire et insalubre, renferme quelques restes d'antiquités : le baptistère est un petit temple antique qui remonte, dit-on, à un empereur Proculus du dernier temps de l'empire; le ponte longo est attribué à Adrien ou à Constance.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE DU COMTÉ DE NICE.
— La jolie Oneille ou Oneglia, la première ville du comté de Nice que nous rencontrons sur notre route, com p te à peine 5,000 âmes; c'est la patrie d'André Doria. San-Remo est l'antique Fanum Romuli; et Vintimille, siège d'un évêché, est l'Albium Intemelium dont parlent Tacite et Cicéron. Plus loin, en suivant la côte, Nice est une
ville de 30,000 âmes, chef-lieu de province et siège d'un évêché; son petit port reçoit des bâtiments de 300 tonneaux; à son entrée s'élève une statue en marbre du roi Charles-Albert. Cette ville jouit du plus beau climat de l'Europe : l'hiver y est sans frimas ; aussi le pays est-il le rendez-vous pendant la froide saison d'un grand nombre d'étrangers et surtout d'Anglais attirés par la douceur de sa température. On voit à Cimier, dans ses environs, les restes de l'antique Cenemanium : ce sont des bains, des temples et un amphithéâtre.
3o-E
ILE DE SARDAIGNE.
ÉTYMOLOGIE DE SON NOM. — L'île de Sardaigne a été appelée par les Grecs Sardon et Ichnusa, et par les Romains Sardinia.
Le nom de Sardo lui vient, dit-on, de Sardus, prétendu fils d'Hercule , qui, parti de la Libye, s'-y établit avec une nombreuse colonie.
Le nom d'/chnusa paraît lui avoir été donné du mot grec ic/mos, par la ressemblance grossière que les anciens trouvaient entre sa forme et celle de l'empreinte d'un pied d'homme. Il paraît que les premières sardoines y furent trouvées; car le nom de sardonyx, que les Grecs donnaient à cette variété d'agate, vient en effet de Sardon. Suivant Dioscoride, il croissait dans cette île une plante de la famille des renonculacées, que les anciens nommaient pour cette raison sardonia, et qui donnait la mort à ceux qui en mangeaient la racine, en produisant aux nerfs de la face une contraction semblable au rire et que l'on appelle rire sardonique. Enfin le petit poisson du genre dupé appelé sardine doit son nom à l'île de Sardaigne, parce que les anciens en pêchaient une grande quantité sur ses côtes, comme font encore les modernes.
HISTOIRE. — La Sardaigne fut conquise d'abord parles Pélasges, puis par les Phéniciens, les Etrusques et les Carthaginois, qui en restèrent possesseurs jusqu'à l'époque de leur première guerre avec les Romains, qui les en chassèrent, et dont elle devint un des greniers. Peu de temps après, elle ne fit avec la Corse qu'une seule province. Sous ces maîtres du monde, sa population était plus considérable qu'aujourd'hui: elle renfermait 42 villes, elle n'en compte plus que 10 qui méritent ce titre. Les Vandales, devenus possesseurs de l'Espagne et des côtes de l'Afrique, les Goths, les empereurs d'Orient et les Arabes furent successivement maîtres de la Sardaigne. Au onzième siècle, les Pisans et les Génois leur succédèrent; 200 ans plus tard, les papes, qui n'ont jamais négligé d'étendre leur domination temporelle, cherchèrent à la réunir aux domaines de l'Eglise; deux fois les Pisans se virent contraints de la leur céder, et Rome en investit la couronne d'Aragon ; mais ce fut au quatorzième siècle seulement que Jacques II, roi d'Aragon, parvint à s'en rendre maître. Elle resta soumise à l'Espagne jusqu'en 1708, que les Anglais s'en emparèrent au nom de l'empereur d'Allemagne, qui la céda au duc de Savoie en échange de la Sicile.
ÉTAT SOCIAL. — CARACTÈRE. — Depuis le moyen âge les Sardes étaient regardés comme des espèces de sauvages peu susceptibles de civilisation ; mais, à force de soins, la maison de Savoie améliora leur sort. Elle fit fleurir chez eux les arts et les sciences, et put dès lors reconnaître l'avantage que les gouvernements retirent d'une marche légale et de la propagation des lumières. Peutêtre même les malheurs de cette maison n'ont-ils pas peu contribué à ces améliorations : lorsque les conquêtes de la France eurent réduit la monarchie sarde à la seule possession de cette île, la présence du souverain dut y faire plus que les gouverneurs les mieux intentionnés. Il y a 50 ans, les revenus de la Sardaigne atteignaient à peine le quart de leur terme moyen actuel.
L'habitant doit à son long isolement les traits qui le distinguent des autres peuples de l'Italie; et pour le peindre en deux mots, le Sarde est d'une constitution robuste, d'un caractère gai, d'un courage qui va jusqu'à la témérité. Exalté dans ses passions, il aime avec constance, il hait avec fureur; doué d'une imagination vive, enthousiaste dans ses goûts, ami du merveilleux, il se livre avec ardeur à la poésie et aux beaux-arts. On est même étonne de l'imagination poétique et de la facilité à versifier qui distinguent les gens de la campagne : ils charment leurs travaux ou leurs voyages par des chants improvisés, dans lesquels ils célèbrent les événements du pays, ou la bienvenue d'un étranger, ou les plaisirs de la campagne.
MONTAGNES ET RIVIÈRES. — Nous avons déjà parlé précédemment des montagnes de la Sardaigne, dont la principale, Je
mont Genurgcnt*, occupe le milieu de l'île. Ses rivières sont peu considérables, et offrent l'apparence de torrents furieux à certaines époques de l'année. Les seules que Bous puissions nommer sont : l' Oristano, le Mannu, le Cogninas et le Flumendosa.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Au fond d'un golfe, à l'extrémité méridionale de l'île, Cagliari, la capitale, occupe la pente d'une colline rapide que domine un château fort, bâti par les Pisans. Sa population est de 32,000 habitants; c'est la résidence du vice-roi et des principales autorités. Ses maisons sont mal construites, et ses rues étroites et tortueuses. Outre sa cathédrale, elle a 38 églises, 21 couvents, un séminaire, une université, une société royale d'agriculture, un musée d'antiquités et d'histoire naturelle, une bibliothèque, un théâtre, un hôtel des monnaies et un hôpital ; mais le palais du vice-roi est le seul édifice remarquable. Elle est le siège d'un archevêché, de la cour suprême de justice de l'île et du parlement. Cette ville, qui fut fondée par les Carthaginois sous le nom de Calaris, fait un grand commerce. Les produits de son sol consistent en blé, en huile, en vin, en coton et en indigo.
La plus importante après celle-ci est Sassari, dans une belle vallée au nord-ouest de l'île, peuplée de 23,000 âmes; elle est le siège d'un archevêché et la résidence du vice-intendant et du gouverneur de la division. Bâtie sur la pente d'une colline, les coteaux qui l'environnent sont couverts de citronniers, d'orangers, d'oliviers et de vignes; la vue délicieuse dont on jouit et la salubrité du climat en font un séjour agréable. Elle est entourée de murailles gothiques percées de cinq portes principales, et dominée par un vieux château flanqué de tours et défendu par des fossés. Ses maisons sont en général bien bâties; 1 ses plus beaux édifices sont le palais du gouvernement, celui de l'archevêché, celui du duc d'Asinara et la cathédrale, dont on admire le portail. Outre celle-ci, il y a 4 églises paroissiales, 10 couvents d'hommes dont un de jésuites, et 3 de religieuses. Elle possède un séminaire, un collège de nobles, une école de mathématiques appliquées, et une université où 3 chaires sont consacrées à la théologie, 1) au droit, 3 à la médecine et 2 à la philosophie, et où l'on compte 2 à 300 étudiants. Sa bibliothèque publique est assez belle : l'ancien palais de l'inquisition a été transformé en caserne. La population de cette ville est industrieuse; on y fait un grand commerce, principalement en huile d'olive et en tabac. Parmi les belles promenades qui entourent la ville on cite celle de Rosello, ornée d'une fontaine de ce nom que, pour son architecture et l'abondance de ses eaux, on compare aux plus belles de l'Italie.
Oristano ou Oristagni, près du golfe de ce nom, sur la côte occidentale, est le siège d'un archevêché. On y fait le commerce du thon, poisson qui abonde dans ces parages; elle est peuplée de 12,000 habitants. On récolte dans ses environs l'excellent vin de Verflaccia. Bosa, petit port à l'embouchure du Terno, sur le même côté de l'île, a une belle rue, une ancienne cathédrale et plusieurs couvents ; la ville, entourée de murailles qui tombent en ruines, est peuplée de 7,000 habitants : on y pêche le corail, ainsi qu'à Alghero, autre siège d'évêché sur la même côte. Cette dernière ville est la plus commerçante en blé. Sa population est de 8,000 âmes; son port ne peut recevoir que de petits bâtiments; mais à 14 kilo-* mètres à l'est, celui de Porto-Conte, vaste et bien défendu, peut donner asile à des flottes considérables. Celui de Castel Sardo, au nord de l'île, est défendu par des fortifications importantes. Ozieri est un village où réside l'évêque de Bisarcio, mais ce village est plus peuplé que certaines villes de la Sardaigne : il a environ 8,000 habitants. Tempio est un bourg à peu près aussi peuple, où réside l'évêque d' Ampiur as.
Dans l'intendance de Cagliari il existe un petit pays appelé Barbagia, qui tire son nom d'une émigration de Berbères ou habitants de la Barbarie qui s'y réfugièrent à l'époque de l'invasion de leur patrie par les Vandales. Ce pays, couvert de montagnes et de forêts, se divise en quatre parties : la Barbagia proprement dite, le Scalo, qui a pour chef-lieu un village de 1,200 habitants; le Belvi et r Ollolai.
ANCIENS MONUMENTS DE L'ILE. — La Sardaigne, qui a été subjuguée par tant de peuples différents, doit nécessairement renfermer beaucoup de monuments qui rappellent leur domination.
Ceux qui ont le plus exercé la sagacité des antiquaires sont surtout ceux que Ton nomme Nuraghes, et que l'on a attribués aux Pélasges, et fait remonter à environ quinze siècles avant l'ère chrétienne : ce sont donc les plus anciens de tous ceux que renferme l'île. Ils offrent le même caractère de construction que les monuments dits cyclopèènSj dont on trouve de nombreux exemples en Italie. On en a signalé plus de 600. Ce sont des espèces de tours, quelquefois hautes de 17 mètres et de 30 mètres de circonférence, dont le sommet se termine en cône surbaissé; ils sont formés de blocs d'environ 1 mètre cube, réunis sans ciment ; leur intérieur est divisé en trois étages, ayant chacun un& chambre ; une rampe en spirale, pratiquée dans l'intérieur, sert de communication entre
les différents étages; mais ce qu'il y a de remarquable dans la construction de ces chambres, c est qu'elles sont voûtées en ogive.
Quelques-uns de ces Nuraghes sont flanqués de tours au nombre de 3 à 7, dont la hauteur est d'environ 2 mètres, et qui ont une ouverture à la partie supérieure. On croit que ces monuments ont servi de sépultures. D'autres constructions antiques, que l'on trouve dans l'île, appartiennent principalement aux Romains : ce sont des restes d'aqueducs, de bains et d'autres édifices. Dans la direction de Cagliâri à Sassari, on remarque les restes d'une voie romaine.
ILES VOISINES. — La Sardaigne est environnée de petites îles : les principales sont, au nord-ouest, l'île d'Asinara, et au sud-ouest celles de Piana, de San-Pielro et de Sant-Antioco; à l'est, celles de Serpentaria, de Chirra, d'Ogliasti-a et de Pedrami; au nord-est, celles de Spargî, de la Madeleine, de Saint-Etienne, de Caprera et de Tatolara.
Cette dernière est un bloé énorme de roche calcaire qui a 325 kilomètres de tour et qu'on peut rapporter à la formation secondaire; ses flancs sont coupés à pic et quelquefois même en talon renversé, ce qui la rend inaccessible de tous les côtés. Elle n'est habitée que par des chèvres sauvages. Les anciens allaient y pêcher le mollusque dont ils tiraient la pourpre.
Asinara, l' Insula Hcrculis des anciens, longue de 20 kilomètres, large de 9, est montagneuse, fertile, couverte de pâturages, et cependant ne renferme que quelques cabanes de bergers et de pêcheurs.
San-Pletro, divisée du nord au sud par une chaîne de collines, est l'ancien Hieracum; sa circonférence est de 35 à 36 kilomètres.
Ses habitants pèchent le corail et cultivent un sol fertile. Elle renferme des salines.
Sah-Antioco, qui comprend 36 kilomètres de tour, est l'Enosis des Romains. Elle a des salines et des terres fertiles.
Caprera récolte beaucoup de grains et abonde en pâturages. Les autres îles ne sont que des îlots sans importance.
GOUVERNEMENT DU ROYAUME DE SARDAIGNE, LÉGISLATION. — Depuis 1848 le gouvernement du royaume sarde, qui était absolu, est devenu un des rares gouvernements constitutionnels de l'Europe. Sa constitution date du 4 mars 1848. Le roi gouverne d'accord avec un sénat, nommé par lui à vie, et une chambre des députés élective. Il y a huit ministères ; le gouvernement est assisté par un conseil d'Etat et une cour des comptes.
A la tête de chacune des 14 provinces est préposé un intendant général, et elles ont des conseils provinciaux électifs; les villes nomment leurs conseillers municipaux.
La législation est calquée sur les codes français. La suprême justice appartient à la cour de cassation. Il y a sept cours d'appel: à Turin, Chambéry, Casale, Nice, Gênes, Sassari et Cagliari, et des tribunaux de première instance dans chacun des chefs-lieux de province.
RELIGION. — l.a religion catholique est la religion de rÉfal.
Le royaume compte sept archevêchés : à Turin, Gênes, Chambéry, Verdeil, Cagliari, Sassari et Oristani. Le nombre des évêchés est de 32. Le nombre des juifs ne dépasse pas 7,000. Dans les vallées des Alpes et en Savoie on rencontre les Vaudois au nombre d'environ 20,000. L'Église vaudoise a un collége supérieur à Torre, des écoles dans chaque paroisse et des hôpitaux.
INDUSTRIE AGRICOLE ET MANUFACTURIÈRE. — I/industrie agricole est plus développée dans ce pays qu'en aucune autre partie de l'Italie. L'exportation du bétail, des vins, des soies grèges, tient une place importante dans le budget commercial de la Sardaigne. La filature du coton, la confection des tissus, la tannerie, la fabrication des objets en corail et des filigranes d'or et d'argent, celle des papiers, tiennent le premier rang dans l'industrie manufacturière..
COMMERCE. — CHEMINS DE FER. — Le commerce a pris depuis une vingtaine d'années un essor considérable qui entraine un mouvement de plus de 400 millions d'affaires. Ce chiffre s'accrottra encore lorsque les chemins de fer aujourd'hui en construction seront termines, et que Turin sera joint à Genève, Grenoble, Lyon , d'une part; et de 1 autre à Milan, Venise, 1 ileste, Vienne.
Turin est le centre des chemins de fer sardes. Les principales lignes livrées en 1856 à la circulation sont celles de Turin à Gênes (165 kilom. ), avec embranchement d'Alexandrie au lac Majeur par Mortara et Novare (100 kilom. ) ; de Turin à Coui, qui doit se prolonger jusqu' à Nce - de Turin à Suze (52 kllom.), de Turin à Pigfïerol (38 kilom. ).
Sur le chemin d AlexandrIe au lac Majeur, il y a à Mortara un embranchement sur Vigevano, ville frontière qui n'est séparée de Milan, où commencent les grandes lignes autrichiennes, que de
32 kilomètres à peine; espérons que cette lacune sera bientôt comblée : alors, après l'achèvement du chemin du Simplon, on pourra parcourir en chemin de fer toute la haute Italie en se rendant de Paris à Vienne.
FINANCES. — Les événements politiques de 1848 ont grevé les ifnances de la Sardaigne. La dette inscrite était en 1855 de 615,993,429 francs; les revenus étaient évalués la même année à 128,472,824 francs et les dépenses à 141,374,532 francs. On voit donc qu'il y a encore annuellement un déficit de 10 à 12 millions.
ARMÉE. ■— Le recrutement se fait en Sardaigne par levées annuelles. L'armée active est sur le pied de guerre de 147,000 hommes; mais sur Le pied de paix elle ne compte guère plus de 50,000 hommes. Elle se compose principalement de 20 régiments d'infanterie, 10 bataillons de Bersaglieri (chasseurs-tirailleurs formant une trou pe très-estimée), 1 bataillon de chasseurs francs, 4 régiments de cavalerie de ligne, 5 régiments de cavalerie légère et 3 régiments d'ar-
tillerie. Le royaume est partagé en 7 divisions militaires; et la Sardaigne a un commandant général, qui réside à Cagliari. Le nombre des places fortes est de 25, et les arsenaux sont à Coni, Forsano et Mondovi. En cas de défense nationale, la milice, qui comprend tous les citoyens valides de 21 à 55 ans, peut être mise sous les armes.
MARINE. — La marine sarde comprenait en 1855 4 frégates à voile, 4 frégates à vapeur, 4 corvettes, 3 brigantines, 1 brick, 10 bâtiments à vapeur, etc., etc., en tout 40 navires de guerre portant 900 canons.
Le personnel de la flotte se compose d'environ 3,000 officiers et matelots. Le commandant général de la marine réside à Gênes; le royaume est partagé en trois départements maritimes : Gênes, Villafranca et l'île de Sardaigne.
Le personnel de la marine marchande se compose de 30,252 hommes, capitaines, matelots et ouvriers; le matériel comprend 3,153 bâtiments jaugeant 177,832 tonnes.
MONACO (1).
SITUATION, SUPERFICIE, POPULATION. — La Principauté de Monaco est située à 9 kilomètres à l'est de Nice ; elle occupe depuis le cap d'AgIio jusqu'au petit village de Gàiavauo, près des lagunes de Chyuso, une étendue de côtes de 16 kilomètres. Sa superficie est d'environ 30 kilomètres carrés, et sa population ne dépasse guère 7,500 habitants.
HISTOIRE. — L'origine de cette principauté remonte à une bourgade de pêcheurs qui, dès les temps les plus reculés, s'était formée au pied d'un temple d'Hercule Monæcus, et qui sous les Phéniciens et les Romains jouissait d'une certaine importance commerciale sous le nom de Porhis Hermlis Monæci. Au temps des invasions, le rocher sur lequel s'élevait jadis le temple servit un instant de refuge aux Liguriens, mais les Sarrasins s'en emparèrent au dixième siècle ; ils en furent chassés par Guillaume, vicomte de Marseille, qui donna l'investiture du fief de Monaco et des terres qui en dépendaient au Génois Gibffllin Grimaldi, en récompense de ses éclatants services, et depuis il est toujours resté dans la famille.
Cette petite principauté traversa, grâce à sa position isolée, les époques du moyen âge et des temps modernes, tantôt sous le protectorat espagnol, tantôt sous le protectorat français , sans être inquiétée dans son indépendance. Un instant réunie, cependant, à l'empire français, le traité de Paris de 1814 reconnut et consacra son indépendance. En 1848 elle eut aussi sa révolution, et ses habitants réclamèrent son annexion au royaume de Sardaigne. Mais le prince régnant ayant protesté auprès des grandes puissances, a réclamé l'exécution pure et simple des traités. La principauté a été reconnue indépendante de nouveau, et le roi de Sardaigne a dû se contenter d'un simple protectorat.
ASPECT GÉNÉRAL PHYSIQUE. - Le territoire de la principauté de Monaco, enclave du comté de Nice, est entièrement montagneux; son climat est le même que le climat tant vanté de Nice; la végétation y est fort riche, et les fruits du Midi y réussissent à merveille. Les principales vàllées sont celles de Gorbio, de Boirigio, de Careï et de Mentone. Ses côtes sont escarpées et ne s'abaissent un instant que pour faire place au port de Mentone.
(1) Nous croyons devoir conserver à cette petite principauté la place qui lui appartient comme Etat souverain de l'Europe actuelle, les grandes puissances ne s'étant pas encore prononcées sur son annexion définitive au royaume de Sardaigne (1857).
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. — Monaco est une petite ville de 1,200 habitants ; ses rues sont propres, ses maisons bien bâties. On y remarque le palais à demi ruiné et abandonné, trois églises, une caserne et la promenade Saint-Martin. La ville, vue du port, présente comme une longue ceinture de pierres et de bastions au-dessus de laquelle s'élève un amas de maisons blanches. On y arrive par deux portes : la porte Saint-Antoine et la porte Neuve. Le port est à demi envahi par les sables; il est encore fréquenté par quelques pêcheurs. En suivant la route de la Corniche, due au génie de Napoléon, on arrive au village de Roquebrune ou Rocca Brima, très - pittoresquement situé sur les derniers plans d'un bloc de rochers. Ses rues sont étroites, tortueuses et escarpées; on pénètre dans les maisons par des escaliers à pic. L'église, qui est ancienne, se fait remarquer par la simplicité de sa décoration intérieure. En suivant le long de la mer une route délicieuse à travers des forêts d'oliviers, de platanes , de lauriers-roses, on arrive à Mentone, la ville la plus importante de la principauté; elle est située au fond d'un joli golfe et ne compte pas moins de 4 à 5,000 habitants. Cette petite ville fait un commerce assez important de vins, d'huile, d'oranges et de cédrats. Ses pêcheurs vont vendre leurs poissons dans les ports voisins, et il s'y fait un certain commerce de cabotage avec Gênes et Cette. Le tonnage du port est d'environ 60 bâtiments; il y a des chantiers de construction. Plus avant dans l'intérieur des terres, le hameau de Monti, situé sur la rive gauche de la Careï, compte à peine 600 habitants.
GOUVERNEMENT ET ADMINISTRATION. — Le prince de Monaco a le titre d'altesse sérénissime et est souverain absolu de par les traités de 1815 et 1817. Le pays est administré par un gouverneur assisté d'un conseil d'Etat; la législation en vigueur est celle du code français. Il y a à Monaco une cour supérieure d'appel civile et criminelle. La religion catholique est celle de l'État, qui dépend de l'évêché de Nice. Un vicaire général de cet évêché réside à Monaco. Le roi de Sardaigne a droit de protection, il met une garnison de 300 hommes dans Monaco. La force armée du pays est de 50 carabiniers. Les revenus de la principauté ne dépassent pas 350,000 francs. Le roi de Sardaigne s'est momentanément emparé de Roquebrune et de Mentone pour garantie des sommes par lui avancées à la principauté ; il est probable que dans un avenir prochain cette petite principauté sera absorbée par le royaume de Sardaigne.
L TABLEAUX STATISTIQUES DU ROYAUME DE SARDAIGNE.
.- STATISTIQUE GENERALE.
POPULATION par FINANCES COMMERCE SUPERFICIE. POPULATION. kilomètre en J855. en 18^5. FORCES MILITAIRES.
en ]855. en 18")5, carré.
En 1818. 68 Revenus.. 128,472,824 fr. ^Importât. 130,000,000 fr. Armée.
Terre ferme.. 51,215 4,437,584 Dépenses. 141,374,532 fI". 1 Exportai, 75,000,000 fr. Pied de paix. 52,000 hommes.
Surdm^nc> • 24,096 l)€ttcpub, 610^993^429 fr« Marine marchande. FlottE )j 3,153 bâtiments 4 frégates à voiles, 75,311 4,990,249 jaugeant 177,832 tonn. 4 frégates à vapeur, En 1855. 30,252 marins. 4 corvettes, 5,200,000 10 bateaux à vapeur.
Statistique des Provinces.
SUPERFICIE en POPULATiON.
DIVISIONS ADMINISTRATIVES. PROVINCES. kilomètres (1) CHEFS-LIEUX.
carrés.
ÉTATS DE TERRE FERME.
( i llle 2,89267 { l 276,486 TURIN ff (2), 143,157.
T PI'OVLOCC.,. ~2~892~~ 67 276,486 Turin..{ l Pprovi. nce } ) TURIN S pigliei-0],.. 1,535 21 134,04ft Pignerol f, 14,000.
Suse. 1,39570 82,078 Suse f, 3,000.
/"Alexandrie 888 73 124,344 Alexandrie t, 42,000.
Usti 909 38 137,635 Asti f, 24,000.
AI.EXANDRIK /Voghera 797 35 202,033 Voghera, 10,000.
jTortone *. 665 00 59,420 Tortone, 10,000, (Bobbio 696 96 37,947 Bobbio f, 4,000.
Coni 2,597 75 180,767 Coni f, 18,000.
se; I Mondovi. , , , 1,758 45 148,303 Mondovi t, 16,000.
2 mil.,. Albe 1,056 05 - 156,430 Alba f, 8,000.
S (Saluces 1,609 94 119,263 Saluces, 15.000.
- /Novare ; 1,381 00 101,411 Novare f, 20,000.
iLomellina 809 05 .139,854 Figevano f, 4,000.
NOVÏRE /Ossola 1,348 00 36,470 Domo d'Ossola, 2,500.
Pallanza. , , , , 1,348 00 64,335 Pallanza, 2,000.Vaisesia. 755 00 36,021 Mortara, 6,000.
f Ivrée 1,453 94 168,893 Irrée t, 4,000.
IsRI4E Aoste 3,194 04 81,469 Aoste t, 5,000.
(Verceil 1,2400 125,234 Verceil ff, 18,000.
1 VERCEIL < Casale 866 12 121,860 Casale f, 20,000.
( Biella 971 44 13,679 Biella t, 8,000.
1 Savoie propre 1,641 59 156,051 Chambèry ff, 16,000. - Aix, 4,000.
Savoie haute 974 28 51,058 L'Hôpital, 2,000.
Mauriénne 2,067 07 64,500 Saint-Jean de Maurienne t, 2,500.
o Tarantaise 1,827 27 45,841 Moutiers, 2,000.
f Genevois 1,605 73 109,527 Annecy f, 9,000.
cn !ANNECY ! Chablais 922 83 58,229 Thonon, 2,000.
jFaucigny. 2,935 25 105,929 Bonneville, 4,000.
/Ville » 125,339 Gênes ff, 125,339.
lr& nes" l Province 926 95 184,848 ., (GÊNES SChiavari 915 66 116,664 Chiavari, 12,000.
g, 1 | Novi 747 49 65,250 Novi, 10,000. - Rapallo, 10,000.
J Levante 672 21 79,080 Spezzia, 10,000. — Sarzane f, 9,000.
; Savone 806 29 79,148 Savone f, 16,000.
G I VSAVONE Acqui 1,151 22 101,548 ACqUl f, 6,400.
Albenga., 681 78 60,415 Albenga t, 6,500. — l'arasze, 8,000.
(Nice 3,054 53 116,616 Nice t, 38,000.
U NicE < Oneglia. 451 24 60,595 Oneglia, 6,000, Z ( San-Remo. , 685 64 64,803 Vintimille t, 10,000.
ILE DE SA.RDAIGNE.
ÎCagliari 3,381 58 109,117 Cagliari tt, 35,000.
CAGLIARI..,. ; Oristano 2,523 40 78,444 Oristano tt, 15,000.
re C A G u a M jg~g,~ 2,195 80 42,766 Iglesias f, 5,000.
CD - Isili 2,006 44 48,958 Isili, 3,000.
re 1 (Sassari 1,915 16 67,317 Sassari tt, 30,000.
Alghero 1,131 55 34,308 Algliero t, 8,000.
G J SASSARI ) Oziel'i.,.. 1,865 30 24,615 Ozieri f, 10,000. — Villacidro f, 6,000.
2 i ( Tempio 2,138 32 22,738 Tempio f, 9,000.
< n f Nuoro 3,586 88 59,286 Nuoro f, 4,000.
e- NuoRo..,. I Lanusci 2,270 32 27,530 Lanusci f, 1,500.
S5 ( Macomor ou Cugliel'l. , 1,081 31 37,586 Cuglieri, 4,000. — Bosa t, 8,000.
(1) Les chiffres de la population sont pris dans le Bulletin de la Société de géographie du mois de juillet 1852, page 100.
(2) Le signe tt indique les archevêchés, et t les évêchés.
LOMBARDIE ET VÉNITIE.
Paysans des environs de Bergame.
ANCIENS HABITANTS. — Les plus anciens peuples connus qui traversèrent le versant des Alpes et la rive gauche du Pô, depuis le cours du Tessin jusque près des bords de l'Isonzo, ou la Gaule cispadane, étaient les Orobii au nord, les Insubres et les Cenomani au-dessus des lacs de Côme et d'Iseo; les Lcevi à l'ouest, près du confluent du Tessin et du Pô, et les Euganei à l'est.
Les Orobii étaient probablement originaires des Alpes; leur nom signifie vivant dans les montagnes. Cependant Pline, d'après Cornélius Alexandre, les fait descendre de quelques montagnards grecs; mais le nom de leur capitale, Bergomum, prouve une origine germanique, ou plutôt germano-celtique. Les Insubres paraissent être venus également du nord ; ils faisaient partie de la nation des Ombri, dont le nom, dans leur langue, avait la signification de vaillant. Mediolanum, leur capitale, est aujourd'hui Milan. Les Cenomani étaient une colonie d'un peuple celte qui habitait le territoire du Mans. Ils vinrent s'établir sur les pentes méridionales des Alpes, six siècles avant notre ère. Les Lœvi passaient aussi pour être Gaulois. Les Euganei, longtemps possesseurs du territoire actuel du gouvernement de Venise, furent envahis par les Veneti ou Vénètes, que l'on croit être une colonie des Veneti qui habitaient les environs de Vannes, dans l'Armorique, et qui étaient puissants par leur marine et leur commerce.
HISTOIRE. — Y La Lombardie. Tels sont les peuples que l'on distingua dans cette partie de l'Italie jusqu'à la chute de l'empire d'Occident, vers la fin du cinquième siècle, que les Hérules, sous la conduite d'Odoacre, quittèrent les bords du Danube, vinrent s'établir sur les deux rives du Pô, et choisirent Ravenue pour la
capitale de leurs possessions. Six ans après leur conquête, ces peuples furent soumis par les Ostrogoths, dont la puissance s'ébranla sous les glorieux efforts de Bélisaire, et s'écroula, en 553, sous ceux de l'eunuque Narsès.
L'Italie, rentrée sous la puissance des empereurs d'Orient, ne fut pas longtemps à l'abri des attaques étrangères. Les Longobar'di ou Lombards quittèrent les forêts de la Germanie, et vinrent fonder, en 568, un puissant royaume dans la grande vallée du Pô, qui prit le nom de Lombardie. Mais alors les évoques de Rome préludaient à leur puissance, et voyaient avec crainte et jalousie l'agrandissement que prenaient ces peuples barbares, qui menaçaient de s'emparer de l'ancienne métropole du monde. Etienne II appela la France à son secours : Pepin enleva aux Lombards l'exarchat de Ravenne, et en donna la souveraineté au pape. Charlemagne, favorisé par la victoire, détruisit leur royaume, et relégua dans une abbaye Didier, leur dernier roi.
La Lombardie , sans souverain, conserva ses lois : après la mort de Charlemagne, elle se divisa en plusieurs principautés soumises à l'empire d'Occident. Mais l'esprit d'indépendance gagna cette partie de l'Italie ; les empereurs d'Allemagne accordèrent à quelques villes le droit de choisir leurs magistrats. La coutume qu'avaient conservée les citoyens, selon l'esprit du christianisme, d'élire leurs évêques, prépara le peuple à l'idée que tout pouvoir émane de la nation ; les formes républicaines se perpétuèrent, et déterminèrent plus tard les villes les plus importantes à demander de plus précieux privilèges et des chartes. Au douzième siècle, toutes les cités lombardes non-seulement choisissaient leurs magistrats, mais délibéraient sur la paix et la guerre, et sur loirs intérêts locaux.
Frédéric Barberousse fut le premier empereur qui, au mépris des chartes et des traités de ses prédécesseurs, essaya de rétablir en Italie le pouvoir absolu. Milan était la plus im portante ville de la Lombardie.
Assiégée par ce prince et pressée par la famine, elle capitula, mais à des conditions dont le vainqueur ne tint aucun compte : quelques jours après sa reddition, Milan n'était plus qu'un monceau de ruines.
Si l'empereur protégea les rivales de cette vaste cité, il détruisit jusqu'à l'ombre de toute liberté, et remplaça par des podestats de son choix les magistrats élus par les citoyens. Cependant la paix qui succéda aux malheurs de la guerre n'était que le silence de la crainte. La liberté avait été vaincue , mais elle n'avait pas perdu ses droits ; une ligue secrète s'organisait dans l'ombre. Les villes formèrent une confédération dans le but de recouvrer leurs privilèges. Les succès de Barberousse l'avaient enhardi : soit qu'il voulût réduire les papes aux seuls droits spirituels, soit qu'il eût le dessein de réunir leurs possessions à l'empire, il marcha contre Rome. Cette fois les foudres du Vatican furent favorables à l'indépendance des peuples. Les Romains, animés par le juste ressentiment de leur évêque, résistent avec courage, et le ciel semble seconder leurs efforts: la peste détruit l'armée impériale. L'empereur fait de nouvelles tentatives contre la LombartIie; mais, frappé d'excommunication, il est devenu un objet de haine et de mépris ; 19t villes confédérées lui livrent bataille ; ses troupes sont taillées es piètts, et lui-même ne sauve ses jours qui l'aide d'un déguiseriiëh ; enfitt; abandonné de la fortune, il redtinttit l'ititlépendance des républiijftës lombardes.
L'un des plu grând. fléaux des révolutions politiques est la division des opinions, tjtil transforme Im efilieinié irréconciliables les citoyens d'une i-jiffitf nation. Les premiers SHfcfctffi dé Barberousse lui avaient attiré cette foule d'ambitieuf ftJttjoufl amis du pouvoir.
Après la mort de ce prince, son successeur conserva les mêmes partisans; et comnte dans la lutte qui venait de se terminer les excommunications di Rome avaient puissamfrient soutenu la cause du peuple contre l'bmpire, deux factions doininstiitèi, partagèrent la Lombardie : 1M partisaîis du pape prlrëiit la domination iie Guelfes, et CEtii afe l'empereur se firent Appeler SibeliuS (1). Les deux partis obtinrent des avantftjjeg Méiproques, mal? celui dit pape l'emplflita tb plus souvent.L'amour dë l'Indépendance, ddijlr IfcS villes lombardes éonnèffeit tant de prettfes, développa la civilisation, les arts, le commerce et les richesses, On peut juger de Ifelli* puissance par le-tableau ijilB nous a laissé dé Milan, au treizième iMtII!, un écrivain conteillp fls rain, Galvarièiis Flamma. Elle comptait tfiirmI ses 200,000 habitant 600 notaires, 200 médecins, 80 instUfileufs et 50 copistes de Mz nuscrits. Des files pavées en dftlles { des ponts de pierre, des iùàlgtffil bien bâties, des palais, des monument publics j lui dannaIent Uli aspect tout différent de celui des villes âtt fitim et titi l'occident de l'Europe. Son territoire, qui comprenait Lodi, Pavie, Bergame et Côme, 150 villages et autant de châteaux, entretenait un corps de 8,000 cavaliers ou gentilshoinffles, et pouvait mettre 240,000 hommes sous les armes. Mais les dissensions intestines firent naître l'ambition et la corruption, ennemies de l'amour de la patrie et de l'indépendance. Ces villes, si jalouses de défendre leurs prérogatives contre les empereurs, choisirent des magistrats dont le pouvoir devint héréditaire, et dégénéra bientôt en tyrannie.
Vers le quatorzième siècle, la Lombardie centrale était l'héritage de la famille des Visconti; celle de la Scala gouvernait Vérone; celle de Carrare, Padoue; et celle de Gonzague, Mantoue. En 1395, l'empereur Venceslas érigea Milan et son territoire en duché, en faveur d'un Visconti ; cèlte principauté échut par alliance à un fils naturel du célèbre Jacques Sforza, qui, de laboureur, parvint par son courage et ses talents à la dignité de connétable. A l'extinction de cette famille, Charles-Quint s'empara du Milanais, qui appartint à l'Espagne jusqu'en 1700, que, le dernier duc étant mort, le duché échut en partage à la maison d'Autriche, sauf quelques portions qui furent cédées - à la Savoie, 2° La Vehitie. Les descendants des Vénetes, pour échapper aux hordes d'Alaric, qui pénétra en Italie au commencement du cinquième siècle, cherchèrent un refuge dans les petites îles de l'embouchure de la Brenta. Ils y fondèrent deux petites villes : Rialto et Malamocco; mais, en 697, les magistrats de ces îles populeuses, convaincus de la nécessité de former un corps de nation, obtinrent de l'empereur Léonce l'autorisation d'élire un chef auquel ils donnèrent le titre de duc ou de doge. Pépin, roi d'Italie, accorda à cet État naissant des terres sur le littoral de chaque côté de l'Adige; Rialto, réunie aux îles voisines, devint une ville nouvelle qui prit le nom de flenetiæ, Venise, de celui que portait le pays dont ces îles faisaient partie. Au neuvième siècle, cette république commerçante se faisait respecter par ses forces maritimes ; au douzième,
(1) Les Gucffei liraient leur nom d'une taqiiJe illustre de la Bavière qui s'allia à la maison d'Este. Les Gibelins prenaient leur dénomination d'iin village de Franconie où naquit Conrad le Salique, d'où descendait la maison de Souabe. Voyei l'Europe au moyen lÎg", par M. Hallam.
elle équipait les flottes destinées aux croisades; en 1 io2, elle contribua puissamment à la prise de Constantinople; une partie de cette ville et de son territoire lui échut en partage, et son doge, qui prenait par suite des conquêtes de la république le titre de duc de Dalmatie , y ajouta celui de duc du quart et demi de l'empire romain (1). Candie, les îles Ioniennes, la plupart de celles de l'Archipel el d'autres stations importantes, des comptoirs à Acre et à Alexandrie, contribuaient à assurer sa puissance et la prospérité de son commerce.
Dans l'origine, le gouvernement vénitien se composait de conseillers nommés par le peuple, qui partageaient avec le doge le pouvoir législatif. Ce magistrat jouit d'abord d'une puissance imposante ; les bornes en furent rétrécies dans la crainte qu'elle ne dégénérât en une dignité héréditaire. Un conseil représentatif et nombreux, élu tous les ans par 12 électeurs choisis par le peuple, fut institué ; mais par la suite les membres qui en faisaient partie s'arrogèrent le dtoit de nommer les 12 électeurs et d'approuver ou de rejeter leufi) Successeurs. Le résultat de cette confusion de pouvoirs amena nécessairement la fieqiïëtite élection des mêmes membres; enfin une. dignité qui devait être la récompense des vertus civiques devint le partage exclusif de certaines familles. Lorsque ces changement!; contraires à la forme prifflitive du gouvernement, fiiréht ëbtiSfititinés, on institua lift Sétiat, auquel on accorda le dfffît tlèi paix et de guerre ; mais il4igit renouvelé tous les ans, ILiml tjtie les ctfttseillers du ddgèj pgf le gràtitl rtJhseil. Le tnécontéfatëifl^it, les fêVoltes mêfiiëS HM fit flMtrti àG quatorzième siècle un êfélfffie qui anéantissait 1HS bittes fondamentales dU gouvernement républicain, nécessitèrent là ntffflination du célèbre Conseil des tiixj fttil brgaiiisa sassin et tout t'attirail du ~rèm de ft tëft-etlf.
Tëllfe était là situation aê la LomMfdie lit de la Yl!üiUe, lors~djl'feli If 07 la défaite de fjffehlduc GhàfltfSj sur les btJidl du Taà tlttRb, fchdtigea leur position pfflHitjjtfë: Pif le tfâlLé dé CampoFormio, 1 fut H suite dd cette Ijflliftfltë victtflrfc ttf général ~ItfiFS tèifiteires, rétiflls à celtll fW Mbdène ët f quelques ~tibrtioiis flti8 fltis de l'ÈgliSèj effttiêfent IR rl!pubtiue Cisalpine, ui prit gil 1802 lé nom 06 rèpUbliqûé Ittii&fiHê, qu'elle conserva jusqu'en 1805, époque où èlle devint le royaume d Italie.
L'arifflètitil flêtfottilfaâtlotl de Lombardie était depuis longtemps inusitée: tiltMÛj par F# iiégdfclëlltfhB flu conjfël de Vienne en 1815, l'Autriche devenue maitresse Été MllStl j 8Ii Mantoue, de Venise et de la Vàit.ëlitië tHdt leurs àëpgitdgfligg et en forma le royaume Lombard-venitien leurs clëpëiiflfttldël Ët fen forma le ro y aume LIMITES, SUPERFICIE, POPULATION le royaume Lombard-Vénitien est botne ati iidfd pst là ii té Mt de Parme, celui de et au sud par lés posSësâions safdfis: lë dtŒHé de Parme, celui de Modêne et les États de l'Eglise ; et a 1 par le golfe Adriatique et le foytttîffls d'iilyriei bi lSc Majeur et lé tessin à l'ouest, la plus grande partie du cours du Pô au sud, et la mer Adriatique à l'est, lui servent de limites naturelles. Sa superficie est d'environ 46,256 kilomètres carrés, savoir : 21,960 kilomètres carrés pour la Lombardie, et 24,296 pour la Vénitie. La population était évaluée à la fin de l'année 1854 à 5,503,473 habitants, savoir: 3,009,505 pour la population lombarde, et 2,493,968 pour la population vénitienne.
CUMA T, — Dans ce royaume, l'hiver ne dure ordinairement que deux mois, mais il est quelquefois assez rigoureux pour que le thermomètre centigrade descende à 12 degrés, et pour que les lagunes de Venise soient prises par les glaces. En février, la terre se couvre d'une nouvelle verdure, le mois de mai voit revenir la chaleur ; la récolte des céréales et de la plupart des fruits se fait en juin et juillet, et les vendanges en octobre. Les pluies sont abondantes en automne, et en hiver lorsque le froid n'est pas rigoureux.
Elles sont plus abondantes dans la partie occidentale que dans la partie orientale ; dans la première il tombe annuellement 1,162 millimètres d'eau et 893 dans la seconde. L'air est sain dans la plus grande partie du pays, cependant les rizières établies sur plusieurs points produisent des miasmes putrides. Les environs de Mantoue et de Rovigo sont exposés à des exhalaisons malfaisantes, et les lagunes sont dangereuses pour tous les étrangers.
PRODUCTIONS NATURELLES. — Cette vallée du Pô, qui du temps de Polybe était uue contrée marécageuse ombragée par d'antiques forêts peuplées de sangliers, peut à peine aujourd hui fournir assez de bois pour ses habitants ; mais de magnifique^ prairies, arrosées par des ruisseaux qui descendent des Alpes, fournissent jusqu'à six récoltes dans la même année, et des fruits délicieux 3tarissent dans les vergers. La race des bêtes a cornes y est belle; elle est l'objet des soins des paysans, qui depuis longtemps se livrent à la fabrication d'excellents fromages.
(1) Hallam : L'Europe au moyen âge, t. III.
Quelques traces de l'antiquité se sont conservées dans les tampagnes du Milanais : ces chars pesants, à roues basses et massives, traînés par plusieurs paires de bœufs dont les longues cornes sont ornées de boules de fer poli, et dont la queue est assujettie de côté par des rubans ou des guirlandes; ces paysannes dont les cheveiix relevés en tresses sont attachés avec une flèche d'argent; ées bergers portant au lieu de houlette un bâton en forme de crosse, et dont l'epaule gauche est élégamment drapée d'un m'anfeau ; ces moulons, dont le riez arqué, les oreilles pendantes et les pattes mifices et élancées rappellent certains lias-reliefs antiques, annoncent l'ftalie et ses riches souveiln's. Mais ces caractères, qui frappent ati premier abord, forment un contraste pénible avec la misère du paysan. Il faut nous habituer à des contrastes plus pénibles encore; l'Italie est le pays du luxe et de la pauvreté.
INDUSTRIE. — L'abeille et le ver à soie reçoivent des soins assidus en LÓinbardiê. Les églises consomment une énorme quantité de cire, et, de toutes les branches d'industrie, la fabrication des étoffes de soie est du petit nombre de celles qui n'y sont pas restêes arriérées. Cependant les filatures de colon, les fabriques de draps et dé toiles ont encore une assez grande activité; le produit moyen de ses exportations est d'environ 100,000,000 de francs.
Les communications commerciales sont favorisées par de superbes routes, des chemins de fer, des rivières et des canaux.
DIVISIONS POLITIQUÊS. — Le royaume Lombard-Vénitien a été déclaré partie intégrante de la monarchie autrichienne. Ce pays, qui fut longtemps gouverné par les lois françaises, mériterait quelques faveurs. L'empereur est représenté par fin vice-roi, et le royaume est partagé en deux grands gouvernements : celui de Milan et celui 3e Venise; le premier divisé en neuf délégations, et lé second en huit.
DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE DE LÀ LOMBARDIE. —
Milan, capitale du royaume et résidence du vice-roi, est située dans une vaste plaine sur les bords de l'Olôna. En y comprenant ses vieux remparts et ses nouvelles promenades, elle al2,348 mètres de circonférence; Jriais la partie habitée n'en a que 7 ou 8,000.
Elle a onze portes, et sa plus grande longueur, qui est de 3,465 mètres, occupe l'espace compris entre la porte de l'ouest et celle du Tessifr. On y compte 5,488 habitations et plus de 170,000 habitants. Si cette ville avait plus de rues alignées et larges, elle mériterait le titre de magnifique; on a dit avec raison que les ma: sons de mauvaise apparenée y sont aussi rares que le sont ailleurs les palais.
Les rues les plus spacieuses sont appelees corsi, parce qu'elles sont le rendez-vous des promeneurs et qu'on les choisit pour y faire des courses de chevaux. Ses places publiques sont presque toutes irrégulières et sans ornements; celle de la cathédrale est longue et étroite. Cet édifice, appelé le Dôme, est l'un des plus remarquables que l'on connaisse; il fut commencé en 1386 par l'ordre du duc Jeaii-Galéas Visconti. Il n'est point achevé , et probablement il ne le sera de longtemps; si les deux millions que Napoléon affecta à son achèvement n'ont pas contribué à l'avancer beaucoup, les 144,000 franco destinés annuellement par l'empereur d'Autriche à remplir ce but produiront-ils bientôt le résultat qu'on en attend?
Sa, longueur est de 148 mètres, sa largeur de 57 mètres, et là voûte de 64 d'élévation; la plus haute de sès tours à lll mètres.
Il est peu d'édifices gothiques dont les ornerhents soient plus multipliés ; dans toutes les profondeurs 1 sur toutes les saillies, audessus de chaque tour, sur toutes lès fleches, s'élèvent des statues en marbre blanc, dont le nombre est évalué à plus de 3,000, mais dont la plupart sont tellement hors de la portée de la vue, que l'on regrette de ce pouvoir, comme les oiseaux qui y font leurs nids, se placer de manière à les voir en détail. Cinquante-deux piliers de marbre, de 28 mètres de hauteur et de 8 de circonférence, supportent ce vaste édifice, dont la construction a dû coûter des sommes immenses. La porte principale, qui, par son style romain, jure avec le-caractère général du monument, est ornée de deux colonnes monolithes gigantesques en syénite rouge. Les quatre évangélistes et les quatre Pères de l'Église en bronze qui décorent les deux chaires sont des fi gures remarquables ; elles font honneur au talent du sculpteurrançois Brambïlrà; les 17 bas-reliefs que l'on remarque à la partie supérieure du mur d'enceinte du chœur sont, suivant un littérateur plein de goût, d'une finesse de ciseau rare. On doit au même artiste le grand et riche tabernacle en bronze doré du mattre-autel. Au-dessus de celui-ci un brillant reliquaire se fait remarquer : il renferme un des clous de la vraie crÕix, relique vénérée que, le 3 mai de chaque année, anniversaire de la terrible peste de 1376, l'archevêque de Milan promène processionnellement dans la ville, à l'exemple de saint Charles Borromée. Une chapelle souterraine renferme le corps de ce saint dans un sarcophage en cristal, chargé de bas-reliefs et d'ornements en vermeil. Il est revêtu de ses habits pontificaux enrichis de diamants ; sa tête mitrée repose sur un coussin d'or. Plus loin, on voit le tombeau du cardinal Frédéric Borromée, cousin du saint archevêque, et qui aurait
été sanctifie comme lui si sa famille avait voulu faire deux fois les frais énormes de la canonisation. Les mausolées d'Othon le Grand et de Jean Visconti, oncle et neveu, archevêques et seigneurs de Milan.
aux treizième et quatorzième siècles, attirent aussi les regards; mais un autre plus magnifique est celui du cardinal Marin Caracciolo. La chapelle de Jean-Jacques Médicis, marquis de Marignan, est occupée par le riche mausolée érigé,- d'après les dessins de Michel-Ange, par le pape Pie IV, son frère, à ce hardi capitaine.
Le bassin de porphyre qui sert à baptiser passe pour avoir appartenu aux thermes de Maximien-Hercule à Milan; enfin, on admire un candélabre en bronze ayant la forme d'un arbre, et qui a fait donner à la chapelle qu'il décore le nom dell' albero.
La vieille église Saint-Ambroise présefite un assemblage curieux et mêïïie bizarre de tous les styles d'architecture chrétienne depuis le quatrième siècle jusqu'au quinzième. Sa façade offre un vaste parvis sur le modèle des pronaos des temples grecs. Dans l'intérieur on remarque une antique et vaste chaire en marbre vis-à-vis de la chaire moderne; une colonne surfrioiltée d'un serpènl d'airain que l'on a prétendu être celui que Moïse éleva dans le désert, ou du moins être formé du même métal; un pilastre décoré du portrait de saint Ambroise fait d'après nature, ainsi que l'indique l'inscription, et dont le visagê, par une bizarrerie singulière de l'artiste, est en marbre noir; plusieurs mosaïques représentant des scènes de la vie du Sauveur et de céllè de saint Ambroise, et des inscriptions indiquant la sépulture de l'empereur Louis II, mort en 875; enfin des fresques et des'tableaux précieux. Dans les archives de la basilique, on conserve un missel magnifique, manuscrit vélin du quatorzième siècle : son principal ornement est une riche miniature représentant le côuronnement de Jean-Galéas Visconti comme premier .duc de Milan.
Dans le grand nombre d'autres églises que renferme Milan, nous distinguerons celle de Sainte-Marie de la Passion, l'une des plus belles et peut-être la plus riche en tableaux. Celle de Saint-Antoine abbé est remarquable par ses belles fresques; celle de Saint-Sébastien, fondée par saint Charles Borromée sur les dessins de Pellegrini, est un des monuments d'architecture les plus splendides de Milan; Celle de Saint-Alexandre in Zebedia est riche de peintures et magnifique d'ornements; celle de Saint-Eústorge est une des plus anciennes : à l'entrée, en dehors, on remarque une chaire en pierre d'où, selon l'inscription, saint Pierre martyr réfutait les manichéens; celle de Saint-Victor al Corpo est belle et majestueuse ; celle de Satltq-Maria del Carmine est gothique et présente un portail d'une riche composition; celle de Saint-Barthélémy n'est pas sans magnificence ; celle de Saint-Marc est superbe; enfin celle de SaintFidele, quoique inachevée, est un magnifique monument de Pellegrini. C'est dans cet édifice que les empereurs d'Allemagne allaient jadis recevoir la couronne de fer. L'ancien couvent des dominicains, appelé Sainte-Marie des Grâces, est célèbre par le beau tableau de Léonard dé Vinci représentant la Cène, et peint à l'huile sur les murs du réfectoire. Il a 10 mètres de long sur 5 de hauteur; le temps, la fumée et l'humidité l'ont tellement endommagé qu'il est à craindre que bientôt il n'en reste plus de traces. On a peine à croire que l'autorité municipale de Milan ait, en 1797, changé ce réfectoire en un corps de garde et même en une prlsoh, en y faisant loger les prisonniers de guerre à la garde des Français. Qu'on juge par là s'il est étonnant que ce chef-d'œuvre, qui compte 300 ans d'antiquité et auquel on semblait prendre si peu d'intérêt, n'ait paru à des soldats, généralement peu connaisseurs, qù'une misérable peinture sur laquelle on pouvait s'exercer à la cible. Une vieille femme, qui habitait dans le voisinage et qui fut témoin de cette sorte de profanation, racontaitlà. un voyageur français que Napoléon, étant à Milan, vint voir ce beau tableau, et le trouvant en si mauvaises mains, leva les épaules, frappa du pied, fit évacuer le local, murer une des portes et placer la balustrade que l'on y voit encore.
Plusieurs auteurs ont épuisé les fécondes ressourcés de l'étymologie pour découvrir celle de l'antique nom de Mediolanum, que portait cette ville. Ce n'est ni à deux guerriers toscans, ni à sa position entre deux fleuves, ni à une truie à moitié couverte de laine (mediolana) que Bellovèse, son fondateur, aurait vue à la place qu'elle occupe, qu'elle doit son nom, puisque plusieurs vijles gauloises étaient appelées de même. Elle était magnifique à l'époque de la splendeur de l'empire romain : plusieurs antiquités l'attestent.
Les seize colonnes antiques de l'église Sdn - Lorenzo sont les restes des bains de Maxirnieii-Hcrciile, associé de Dioclétien à l'empire.
Les ruines du palais de ce prince ont été décôiivêrtês près du cirque de l'Aretia.
Les principaux palais de cette ville sont : le palais archiépiscopal, orné de tableaux précieux et dont l'architecture est digne dune des?
tination plus noble encore; le palais royal:. remarquable par la richesse des appartements et par le beau théâtre de la Canobiàna qui en dépend ; le vaste palais Manl, occupe par le ministère des finances et l'administration des douanes ; le palais della Contablllta, le plus parfait sous le rapport de l'art de tous ceux de Milan; le palais de justice et l'hôtel de la mÓnnaIc, peu digne de cette ville
sous le rapport de l'architecture, mais curieux par sa belle collection de médailles et de monnaies d'Italie. Ces édifices ne sont cependant point à comparer à la magnifique caserne que fit bâtir le vice-roi Eugène, et que l'on regarde comme la plus belle du monde.
Une douzaine de palais appartenant à des particuliers attestent, par la beauté de leur architecture et la richesse de leurs ornements, l'opulence de quelques familles milanaises.
Des quatre ou cinq théâtres de Milan, les deux plus fréquentés sont YOpéra et le spectacle de Girolamo ou Fiando. Le premier, appelé Scala parce qu'il occupe l'emplacement d'une ancienne église de ce nom, est vaste, sonore et décoré avec élégance. Il peut contenir 4,000 spectateurs. Ses six rangs de loges présentent un aspect imposant ; mais les salons qui les accompagnent font d'un rendezvous de plaisir fait pour charmer l'oreille, l'œil et le cœur, un immense salon de jeu et de causeries. Sous un autre rapport, ce théâtre est un établissement d'autant plus immoral, que l'imprudent ou le désœuvré y est attiré depuis midi jusqu'au soir par un salon _de lecture, et depuis le soir jusqu'au matin par la danse et la musique, et qu'une salle où la roulette est pour ainsi dire en permanence y offre ses dangereuses séductions. En 1830 la voûte de ce théâtre s'écroula subitement. Le second passe en Italie pour l'un des plus célèbres théâtres de marionnettes ; la précision et la vivacité des mouvements des acteurs, dont notre petit théâtre de Séraphin n'offre qu'une imparfaite copie, produisent une illusion complète.
L'origine de ces petites figures en bois se perd dans les vagues souvenirs de l'antiquité la plus reculée. L'un de nos voyageurs les plus intrépides, Cailliaud, a rapporté d'Egypte de petites poupées à ressorts qui ne le cèdent point à celles de Nuremberg : il paraît que les Égyptiens inhumaient ces jouets avec leurs enfants, usage qui existait à Rome , même après l'établissement du christianisme.
Chez les anciens, une jeune fille offrait à Vénus, avant de se marier, la poupée qui avait servi à ses jeux. Les auteurs parlent de ces petites figures mobiles qui attiraient la foule sur les places publiques ; mais, comme le fait observer Millin, c'est aux modernes seuls qu'appartient l'idée de remplacer sur des théâtres les acteurs par des marionnettes. C'est à Philippe Acciajuoli, chevalier de Malte, que ce genre de spectacle doit son perfectionnement. Sur le théâtre de Girolamo, on représente des tragédies, des opéras, des comédies et des ballets; la meilleure société de Milan s'y réunit, et depuis l'homme du peuple jusqu'au riche financier, chacun exprime par de francs éclats de rire le plaisir qu'il éprouve aux lazzis de Girolamo, personnage burlesque, qui est à la fois le polichinelle napolitain, l'arlequin de Venise et le Gianduja de Turin.
Un autre lieu de réunion très-fréquenté est le théâtre Filodrammatico, dont la salle élégante est aussi grande que celle de nos principaux théâtres, et sur lequel on n'admet que des amateurs.
L'immense esplanade qui entoure les restes de l'ancien château de Milan était un terrain humide et malsain, qui sous l'administration française fut transformé en une agréable promenade ombragée de plus de 10,000 pieds d'arbres, et qui reçut le nom de Foro Bonaparte. L'extrémité de la route du Simplon est occupée par la porte du Simplon, appelée aujourd'hui l'Arc de la Paix, bel arc de triomphe orné de magnifiques bas-reliefs en marbre blanc tiré de cette montagne. Il est moins grand que celui de l'Etoile à Paris, et la statue de la Paix y remplace celle de Napoléon. On peut citer ce monument comme un des plus beaux de Milan et de l'Italie. Plus loin est une vaste place d'armes, près de laquelle on voit le Cirque ou YArena, monument du règne de Napoléon, et qui par sa grandeur rappelle ceux des Romains : les gradins peuvent contenir 30,000 spectateurs, et l'arène est destinée à des courses et à des jeux publics. Il est à regretter que cet édifice ne soit point terminé. Près de la porte Orientale, le Cours, bordé de riches palais, et la rangée d'arbres qui s'étend entre cette porte et la porte Romaine, sont fréquentés par les promeneurs à équipages; c'est là que les élégants Milanais vont étaler le luxe de leurs chevaux et montrer leur adresse à conduire de légers phaétons.
Nous ne nous arrêterons point à décrire les établissements scientifiques de Milan, mais nous dirons quelques mots de la bibliothèque ambroisienne, fondée par le cardinal Frédéric Borromée.
Elle compte aujourd'hui près de 200,000 volumes imprimés et 10,000 manuscrits. Ce qu'il y a de remarquable relativement à son illustre fondateur, qui a donné tant de preuves de son amour pour les lettres, et ce qu'il y a d'incommode pour les recherches que l'on veut y faire, c'est qu'il a interdit la formation d'un catalogue de ce riche trésor : il faudrait, dit-on, une dispense de Rome pour l'établir. La seule transgression que l'on a osé faire à cette défense est le simulacre d'un catalogue où les auteurs ne sont désignés que.
par leurs prénoms. Une autre singularité, c'est que les livres ne portent sur leur couverture aucun titre. Parmi les richesses de l'Ambroisienne , on distingue le fameux Virgile de Pétrarque offrant la note passionnée sur Laure ; dix lettres de Lucrèce Borgia au cardinal Bembo, accompagnées d'une boucle des cheveux blonds de cette femme dépravée, digne fille du pape Alexandre VI ; un manuscrit de Josèphe, traduit par Ruffin et écrit des deux côtés sur papyrus: il a douze siècles d'antiquité; les célèbres manuscrits
palimpsestes des plaidoyers de Cicéron pour Scaurus, Tullius et Flaccus, que l'on a remis au jour en enlevant l'écriture des poëmes de Sédulien, prêtre du sixième siècle; enfin les lettres de MarcAurèle et de Fronton, retrouvées sous une histoire du concile de Chalcédoine. La bibliothèque ambroisienne possède un musée peu considérable, mais précieux : on y voit le carton de l'école d'Athènes, première inspiration naïve et grande de cette immortelle composition ; un portrait de Léonard de Vinci, au crayon rouge, dessiné par lui-même; plusieurs tableaux charmants de Bernardin Luini, dont deux, entre autres, figurèrent un instant au Musée impérial de Paris : Saint Jean jouant avec un agneau et la Vierge aux Rochers; enfin on y remarque aussi une belle fresque représentant le couronnement d'épines.
Le palais royal des sciences et des arts, autrefois dit de Brera, bâtiment magnifique, renferme un superbe observatoire, un jardin botanique riche en plantes exotiques, une bibliothèque publique, un cabinet de médailles et un musée. La bibliothèque ne possède qu'un millier de manuscrits, mais elle compte 170,000 volumes, et elle est riche en ouvrages modernes ; le cabinet de médailles occupe un très-beau local, et le musée, bien qu'il ne contienne pas de chefs-d'œuvre des grands maîtres, est fort riche en tableaux modernes, et très-intéressant pour l'histoire de l'art. C'est dans ce musée que se fait annuellement l'exposition des peintures modernes.
Les principaux établissements d'instruction sont deux lycées et deux gymnases, l'Académie ou l'école des beaux-arts, l'école de mosaïque, celle des sourds-muets, le conservatoire de musique, l'école vétérinaire , l'institut militaire géographique, le cabinet d'histoire naturelle, et enfin, parmi les sociétés savantes, l'institut royal et impérial.
Nous ne décrirons point les nombreux hôpitaux de Milan, dont le plus remarquable est le grand hôpital qui renferme plus de 2,000 lits, ni les établissements fondés par la bienfaisance; nous nous contenterons de citer les principaux, qui sont : l'hôpital des Fate-bene-Sorelleet celui des Fale-bene-Fmtelli, l'hospice des orphelins, celui des orphelines, le lazaret et l'hospice de Trivulce; la ville renferme de nombreuses salles d'asile.
Milan a toujours tenu un rang distingué dans les lettres et dans les arts : Virgile y étudia, et Valère-Maxime y prit naissance.
Dans les temps modernes elle vit naître l'antiquaire Octavio Ferrari, le savant François-Bernardin Ferrari, oncle du précédent, le jurisconsulte André Alciat, le protestant Jean-Paul Alciati, le géomètre Bonaventure Cavalieri, la célèbre Marie-Gaetane Agnesi, qui occupa la chaire de mathématiques à Bologne, les papes Pie IV et Urbain III, et le célèbre jurisconsulte Beccaria.
Le commerce de cette ville est considérable, et ses fabriques sont en grand nombre; on y compte plusieurs manufactures de soieries, de velours, de tulles, de cotonnades, de porcelaine, de chocolat, etc.
Milan est le centre d'un commerce actif et d'un mouvement intellectuel qui deviendront plus considérables lorsque le gouvernement autrichien voudra bien rendre à la province plus de franchises libérales. Trois canaux alimentent le commerce de la ville : le Naviglio Grande, le canal de Pavie et celui de la Martesana. De belles routes conduisent à cette ville, et elle est destinée à devenir le nœud principal des chemins de fer italiens. Déjà elle communique avec Venise et le lac de Côme ; bientôt elle sera reliée à Turin et par Chambéry en communication avec le chemin de fer français (août 1857).
On visite aux environs de Milan la chartreuse de Chiaravalle, le sanctuaire de la Vierge de Rho, le palais de Lainate et l'écho de Simonetta.
Près de Garignano, à 2 kilomètres de Milan, on remarque la petite maison de Pétrarque, dont il ne reste de l'époque de ce célèbre personnage que deux colonnes sur lesquelles se voit son chiffre, les fenêtres, le plancher et les voûtes de deux chambres donnant sur la campagne. Dans le même village il faut visiter les fresques de l'ancienne Chartreuse, et au bourg de Saronno, l'église Notre-Dame, dont les fresques sont des chefs-d'œuvre de Bernardin Luini. Au château de Castellazzo on remarque les restes du mausolée de Gaston de Foix, ouvrage du Bambaja; à la maison Simonetta, les voyageurs vont écouter un écho qui répète trente-six fois le bruit d'un coup de pistolet.
Au nord-ouest de Milan, et sur la route de cette capitale au lac Majeur, Varèse, petite ville commerçante et industrielle, est animée pendant l'automne par un grand nombre de personnes qui viennent y passer la saison; sa population ordinaire est de 8,000 âmes; ses environs sont peuplés de palais et de maisons de campagne des riches familles milanaises. Le lac de Varèse, à quelques kilomètres à l'ouest de la ville, est entouré d'admirables collines. Buffalora, sur la route de Turin à Milan, est sur la frontière des Etats sardes et du royaume Lombard-Vénitien. Magenta, petite ville peuplée de 3,400 habitants, est l'ancienne Maxentia. Marignano ou Melegnano, à 6 kilomètres au sud-est de Milan , est célèbre par la victoire que François Ier y remporta sur les Suisses en 1515. Dans un pays aussi bien cultivé, on cherche en vain les traces des retranchements contre lesquels vinrent se briser les carrés de l'infanterie helvétique.
Binasco, à moitié chemin entre Milan et Pavie, rappelle le supplice
de Béatrix Tenda, femme de Philippe Visconti, qui fut mise à la torture et eut la tête tranchée pour crime supposé d'adultère. Sur la rive gauche du Pô, Casal Maggiore est une petite ville de 5,000 âmes sur la frontière du duché de Parme; on y a élevé à grands frais des digues pour la défendre contre les inondations du Pô, qui l'ont dévastée. Dans ses environs, la petite ville de Sabionetta, peuplée de 6,000 âmes, est aujourd'hui à 6 kilomètres dn Pô, dont elle était très-proche au dixième siècle ; c'est de ses environs qu'un poëte a dit, en parlant des inondations du fleuve : Et ignotos aperit sibi gurgite campos.
Sur la frontière méridionale du royaume, Pavie s'élève au bord du Tessin. Cette rivière lui fit donner le nom de Ticinum; son origine , suivant Pline, est antérieure à celle de Milan. Sous les empereurs elle était considérable : Tacite en fait mention. Sa situation est délicieuse. Les Lombards la choisirent pour capitale; mais on ignore d'où lui vient le nom de Pavie. Elle fut ravagée par le maréchal de Lautrec, qui, par une conduite barbare, chercha à venger la célèbre défaite de François Ier. C'était jadis la ville aux cent tours : il n'en reste que deux; encore celle dite de Boëce est-elle moderne. Elle est peuplée de 26,000 habitants. Ses rues sont larges, et sa grande place est entourée de portiques. Sa cathédrale a été restaurée de manière que l'ancien gothique se perd dans des constructions nouvelles; on y voit suspendu à la voûte un vieux mât ferré que l'on prétend être la lance de Roland. On y a déposé les restes de Boëce, de ce véritable grand homme, dit un auteur, de ce ministre, savant, orateur, philosophe, poëte, et martyr du bien public et de la vérité dans un siècle de barbarie; mais on n'y voit point son tombeau, bien que Liutprand, roi des Lombards, lui en eût fait ériger un magnifique en 726 dans l'église Saint-Augustin. De ses autres églises, la plus digne d'attirer l'attention par son architecture lombarde est celle de Saint-Pierre in ciel d'oro, transformée depuis longtemps en un magasin de fourrages, et qui recèle, dit-on, sous des bottes de foin, le tombeau de Liutprand. L'église Saint-Michel passe pour une des plus anciennes de Pavie, on la fait remonter au sixième siècle; mais un auteur récent a prouvé qu'elle avait été brûlée en 924 par les Hongrois, et que l'église actuelle ne date que du onzième siècle, opinion que justifie le style de son architecture. L'église del Carmine est vaste et majestueuse ; celle de Santa-Maria Coronata, dite de Canepanova, est d'une simple et noble architecture. On conserve à l'évêché le prétendu tombeau de saint Augustin, que l'on voyait autrefois dans l'église Saint-Pierre; c'est un travail de deux artistes siennois du quatorzième siècle.
Un pont couvert soutenu par cent colonnes de granit, un théâtre etplusieurs autres édifices décorent cette ville. Son université célèbre remonte à l'époque de Charlemagne, et a reçu de Marie-Thérèse une organisation qui subsiste encore : on y compte environ 1,400 étudiants. La bibliothèque de Pavie n'a que 50,000 volumes et un petit nombre de manuscrits ; elle possède aussi un musée d'histoire naturelle , nn jardin botanique, ainsi que des cabinets de physique et d'anatomie. Le plus beau de ses trois colléges a été fondé par saint Charles Borromée : c'est un véritable palais.
- Nous ne devons point passer sous silence l'ancienne chartreuse de Pavie, située entre cette ville et Milan : c'est une des merveilles de l'Italie ; la façade de l'église est ornée de sculptures exquises des premiers maîtres du quinzième siècle; le pavé de la nef, qui imite un tapis de Perse, et tous les autels sont en mosaïque de pierres fines de la plus grande beauté; on y remarque le magnifique mausolée de Jean-Galéas Visconti, fondateur de ce couvent, et qui est resté vide, parce que, terminé 100 ans après sa mort, on ne put jamais découvrir le lieu où son corps avait été déposé provisoirement. Les murs intérieurs et extérieurs de cette chartreuse sont couverts de fresques remarquables.
- Une belle place entourée d'arcades, 8 faubourgs, 18,000 habitants , un vieux château transformé en une vaste caserne, une enceinte de murailles élevées, plusieurs églises, un grand hôpital renfermant quelques vieux tombeaux, un théâtre et plusieurs beaux palais appartenant à des particuliers, des fabriques considérables de faïence et de soieries, un grand commerce de fromages que l'on vend sous le nom de parmesan, voilà en peu de mots ce qu'offre la ville de Lodi, sur les bords de l'Adda, célèbre par la bataille du 10 mai 1796.
Crema, l'antique Forum Diuguntorum, sur la rive droite du Serio, est le siège d'un évêché. L'industrie de cette ville de 9,000 âmes consiste dans ses toiles et son fil, dont elle fait un grand commerce.
Monza, à 12 kilomètres et demi au nord de Milan, sur lé cheM min de fer qui conduit au lac et à la ville de Côme, possède un beau palais ainsi qu'une cathédrale, vieille basilique fondée par Théodelinde, reine des Lombards, et dont le trésor est l'un des plus riches du royaume ; on y montre la célèbre couronne de fer dont on ignore l'origine et la date, et que Napoléon plaça sur sa tête en disant : Dieu me la donne, gare à qui la touche, d'après l'inscription qu'elle porte : Guai a chi la tocca. La couronne d'or d'Agilulphe, duc de Turin, que Théodelinde avait choisi pour époux, était une autre curiosité du trésor de cette cathédrale : elle fut transportée à Paris en 1799, et placée au cabinet des médailles;
mais en 1804 des voleurs s'en emparèrent et la firent fondre. On montre encore le reliquaire de Théodelinde, qui contient la couronne de cette reine, sa coupe de saphir, son éventail et son peigne ; la prétendue robe de la Vierge, et le manuscrit sur papyrus contenant l'état des reliques envoyées par saint Grégoire à la belle Théodelinde. Les peintures à fresque et les tableaux qui décorent la basilique de Monza sont remarquables : la voûte est ornée de médaillons représentant les princes qui ceignirent la couronne de fer depuis Agilulphe jusqu'à Charles-Quint. On voit dans le cimetière le cadavre momifié d'Hector ou d'Astor Visconti, exhumé depuis environ trois siècles, et trouvé intact : il est debout dans une niche et recouvert de son armur